FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 22 novembre 2004
À | 1035 |
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)) |
M. Jack Wayne (président, Canadian Scholars' Press Inc., Association des éditeurs canadiens) |
À | 1040 |
Le président |
M. Brian P. Anthony (directeur général, Fondation Héritage Canada) |
Le président |
Mme Maureen Parker (directrice générale, Writers Guild of Canada) |
À | 1045 |
Le président |
À | 1050 |
M. Thor Bishopric (président, ACTRA Nationale, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists) |
M. Gordon Pinsent (participant / membre , ACTRA Nationale, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists) |
M. Thor Bishopric |
M. Gordon Pinsent |
À | 1055 |
M. Thor Bishopric |
Le président |
M. Thor Bishopric |
Le président |
Mme Deborah Windsor (directrice générale, Writers' Union of Canada) |
Á | 1100 |
M. Christopher Moore (président, Writers' Union of Canada, Periodical Writers Association of Canada, League of Canadian Poets and the Playwrights Guild of Canada) |
Á | 1105 |
Le président |
M. Christopher Moore |
Le président |
Mme Liz Warwick (présidente, Periodical Writers Association of Canada) |
Le président |
Mme Sarah Iley (présidente, Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada) |
Á | 1110 |
Le président |
Á | 1115 |
M. Rolf Maurer (président, Literary Press Group of Canada) |
Le président |
M. Rolf Maurer |
Á | 1120 |
Le président |
M. Richard Harris (Cariboo—Prince George, PCC) |
Mme Maureen Parker |
M. Richard Harris |
Mme Maureen Parker |
M. Gordon Pinsent |
Á | 1125 |
Le président |
M. Richard Harris |
Mme Sarah Iley |
Le président |
M. Jack Wayne |
Le président |
M. Maka Kotto (Saint-Lambert, BQ) |
Á | 1130 |
Le président |
M. Gordon Pinsent |
M. Thor Bishopric |
M. Maka Kotto |
M. Jack Wayne |
Á | 1135 |
Le président |
L'hon. John McKay (Scarborough—Guildwood, Lib.) |
Mme Liz Warwick |
Á | 1140 |
L'hon. John McKay |
Mme Liz Warwick |
L'hon. John McKay |
Mme Maureen Parker |
L'hon. John McKay |
Le président |
L'hon. John McKay |
Á | 1145 |
Mme Sarah Iley |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD) |
M. Gordon Pinsent |
Á | 1150 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Brian P. Anthony |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le président |
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.) |
Mme Maureen Parker |
Á | 1155 |
M. Don Bell |
M. Jack Wayne |
M. Don Bell |
M. Jack Wayne |
M. Christopher Moore |
Le président |
M. Christopher Moore |
Le président |
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC) |
M. Brian P. Anthony |
Le président |
 | 1200 |
M. Thor Bishopric |
Mme Rona Ambrose |
Le président |
Mme Rona Ambrose |
M. Thor Bishopric |
Le président |
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
 | 1205 |
M. Thor Bishopric |
L'hon. Maria Minna |
Le président |
L'hon. Maria Minna |
M. Jack Wayne |
 | 1210 |
Le président |
M. Maka Kotto |
Le président |
M. Christopher Moore |
Le président |
Mme Maureen Parker |
Le président |
M. Thor Bishopric |
 | 1215 |
Le président |
 | 1225 |
Le président |
M. Mark Jamison (président, Association des éditeurs des magazines canadiens) |
 | 1230 |
M. Robert Goyette (Reader's Digest, Association des éditeurs des magazines canadiens) |
 | 1235 |
Le président |
M. Peter Sandmark (directeur national, Alliance des arts médiatiques indépendants) |
Ms. Linda Norstrom (présidente, Alliance des arts médiatiques indépendants) |
M. Peter Sandmark |
 | 1240 |
Le président |
M. Peter Sandmark |
Le président |
M. Axel Conradi (président, Conseil d'administration, Sommet canadien des Arts) |
 | 1245 |
Le président |
M. Jacquelin Bouchard (président , comité exécutif, Association des producteurs de films et de télévision du Québec) |
 | 1250 |
Mme Nathalie Leduc (directrice, secteur financement, Association des producteurs de films et de télévision du Québec) |
M. Jacquelin Bouchard |
Mme Nathalie Leduc |
 | 1255 |
Le président |
Mme Monique Twigg (directrice nationale de la Recherche et des Politiques, La Guilde canadienne des réalisateurs) |
· | 1300 |
Le président |
M. Fred Farrell (président, Conseil canadian des archives) |
· | 1305 |
Le président |
Mme Susan Ferley (directrice artistique, Grand Theatre, La voix d'opéra au Canada) |
M. Bob McPhee (directeur, Opera.ca, directeur général, Calgary Opera Association, Opera.ca) |
· | 1310 |
Le président |
Mme Hélène Derome (vice-présidente, Édition Littéraire, Association nationale des éditeurs de livres) |
· | 1315 |
Le président |
M. Ian Morrison (porte-parole, Friends of Canadian Broadcasting) |
· | 1320 |
Le président |
M. Richard Harris |
M. Axel Conradi |
M. Richard Harris |
M. Axel Conradi |
M. Richard Harris |
M. Axel Conradi |
M. Richard Harris |
M. Axel Conradi |
M. Richard Harris |
M. Axel Conradi |
M. Richard Harris |
· | 1325 |
Mme Susan Ferley |
M. Richard Harris |
Mme Susan Ferley |
M. Richard Harris |
Mme Susan Ferley |
M. Axel Conradi |
M. Richard Harris |
Le président |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ) |
M. Jacquelin Bouchard |
M. Yvan Loubier |
M. Axel Conradi |
M. Yvan Loubier |
· | 1330 |
Mme Hélène Derome |
M. Yvan Loubier |
Mme Hélène Derome |
M. Yvan Loubier |
Mme Hélène Derome |
M. Yvan Loubier |
M. Mark Jamison |
· | 1335 |
Le président |
M. Don Bell |
M. Mark Jamison |
M. Don Bell |
M. Mark Jamison |
M. Don Bell |
Mme Monique Twigg |
M. Don Bell |
Mme Monique Twigg |
· | 1340 |
M. Don Bell |
Ms. Linda Norstrom |
M. Don Bell |
Ms. Linda Norstrom |
M. Don Bell |
M. Peter Sandmark |
Le président |
M. Peter Sandmark |
Le président |
M. Peter Sandmark |
Le président |
M. Axel Conradi |
Le président |
M. Axel Conradi |
Le président |
M. Bob McPhee |
· | 1345 |
Le président |
M. Mark Jamison |
Le président |
M. Ian Morrison |
Le président |
M. Don Bell |
M. Jacquelin Bouchard |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
· | 1350 |
M. Ian Morrison |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Axel Conradi |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Mme Hélène Derome |
· | 1355 |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Le président |
Mme Nathalie Leduc |
Le président |
L'hon. Maria Minna |
Le président |
L'hon. Maria Minna |
M. Ian Morrison |
¸ | 1400 |
L'hon. Maria Minna |
M. Peter Sandmark |
L'hon. Maria Minna |
M. Peter Sandmark |
L'hon. Maria Minna |
M. Peter Sandmark |
Mme Nathalie Leduc |
L'hon. Maria Minna |
Le président |
L'hon. John McKay |
¸ | 1405 |
M. Ian Morrison |
L'hon. John McKay |
M. Ian Morrison |
L'hon. John McKay |
M. Ian Morrison |
L'hon. John McKay |
M. Mark Jamison |
L'hon. John McKay |
M. Mark Jamison |
L'hon. John McKay |
M. Mark Jamison |
L'hon. John McKay |
Le président |
L'hon. John McKay |
Le président |
M. Fred Farrell |
¸ | 1410 |
Le président |
CANADA
Comité permanent des finances |
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l |
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l |
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 22 novembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
À (1035)
[Traduction]
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): Bonjour tout le monde.
J'aimerais remercier les témoins d'être ici. Ne vous inquiétez pas de l'absence de certains membres. Nous avons une longue journée devant nous, alors je pense que quelques-uns d'entre eux avaient plusieurs choses à faire avant que nous commencions.
Vous êtes assez nombreux, alors nous aimerions limiter les interventions ou les observations préliminaires à environ cinq minutes. Je vous ferai signe à une trentaine de secondes de la fin. Je n'aimerais vraiment pas avoir à vous interrompre, parce que je sais que ce que vous avez à dire est important. Toutefois, nous apprécierions que vous limitiez vos déclarations à environ cinq minutes pour que les membres du comité aient le temps ensuite de vous poser des questions.
J'ai une liste de l'ordre des interventions.
[Français]
Nous allons commencer par M. Wayne, de l'Association des éditeurs canadiens.
[Traduction]
M. Jack Wayne (président, Canadian Scholars' Press Inc., Association des éditeurs canadiens): Merci, monsieur le président et membres du comité.
Je m'appelle Jack Wayne, je suis trésorier de l'Association of Canadian Publishers. Ma compagnie s'appelle Canadian Scholars' Press, et nous gérons aussi Women's Press. Nous avons un document, que nous avons remis au greffier, qui porte sur les questions auxquelles s'intéresse le comité. Je ne le lirai pas, parce que ce serait plus ennuyeux que ce à quoi on peut s'attendre de la culture canadienne.
L'association que je représente, l'Association of Canadian Publishers, a été fondée en 1971. Notre but est de promouvoir les livres auprès des lecteurs canadiens. Ce que nous nous efforçons de faire, en tant qu'association, et aussi chacun d'entre nous en tant qu'éditeur, c'est de veiller à ce que les auteurs canadiens soient publiés et que les lecteurs canadiens aient accès à leur propre culture. Nous aimons communiquer aux Canadiens les expériences de Canadiens. Notre association compte 145 membres, des gens qui représentent tous les points de vue politiques, sociaux et économiques. Nous avons pignon sur rue dans 10 provinces et un territoire, et nous représentons et illustrons la diversité du Canada. Nous appuyons environ 20 000 écrivains à qui nous versons des droits d'auteur, et nous avons publié 5 000 nouveaux ouvrages l'année dernière.
En réponse aux questions qu'a posées le comité, je pense qu'on peut dire, à propos des programmes, que ce sur quoi nous voudrions insister auprès du comité est la même chose qui tient à coeur au comité, c'est-à-dire qu'il faut sauvegarder la prospérité du Canada et répondre aux besoins sociaux des Canadiens. L'important, particulièrement, pour l'industrie de l'édition, c'est qu'il faut suivre la cadence de l'évolution du savoir. Nous vivons une ère nouvelle. C'est une ère où nous avons affaire à des propriétés numériques. C'est une ère où les industries du savoir sont sous le siège de sociétés multinationales de nombreux autres pays, et avec notre participation en tant qu'éditeurs de livres et celles d'autres industries culturelles, nous pouvons suivre cette évolution. Nous pouvons préserver notre identité canadienne. Nous pouvons préserver la culture canadienne. Nous pouvons communiquer ce que font les Canadiens et leurs réflexions. C'est sûr, nous avons eu une série d'éminents écrivains canadiens qui ont été très présents dans les médias des États-Unis, du Canada et d'ailleurs dans le monde. C'est cette célébration du Canada que nous cherchons à maintenir dans la mire du public.
En fait de soutien, il existe deux principaux programmes dirigés par le ministère du Patrimoine canadien: le Programme d'aide au développement de l'industrie de l'édition; et le Conseil des Arts du Canada, avec sa section des lettres et de l'édition. Le Programme d'aide au développement de l'industrie de l'édition nous offre un soutien de base, qui contribue à maintenir à un faible niveau les prix des livres publiés par des Canadiens. Le financement des éditeurs c'est chiffré à environ 31 millions de dollars l'année dernière, à quoi s'est ajouté une subvention du programme Un avenir en art. Nous recevons aussi 19 millions de dollars environ du Conseil des Arts du Canada, et un petit montant, mais néanmoins important, de l'Association pour l'exportation du livre canadien. Je pense qu'en comparaison des autres industries, ce sont des sommes bien modestes. Elles sont modestes, mais elles assurent la survie d'une industrie vitale. Elles nous permettent de continuer d'innover, puisqu'une part des fonds que nous recevons doit être consacrée à des investissements dans la chaîne d'approvisionnement et d'autres technologies novatrices.
Nous ne venons pas devant ce comité pour demander plus d'argent, vous serez certainement heureux de l'entendre. Nous pensons que nous pouvons assurer la survie de l'industrie en ces temps difficiles avec les sommes que nous recevons, indexées à l'inflation. Nous ressentons l'impact de la concurrence d'énormes multinationales qui impriment des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers de livres. Notre marché est beaucoup plus modeste. Nous apprécions la chance que nous avons de pouvoir faire partie de l'industrie, du patrimoine canadien, et bien sûr, comme je l'ai dit, cela permet de réduire les prix de nos ouvrages afin que les Canadiens puissent y avoir accès et, vous serez heureux de l'entendre, ils sont nombreux à en profiter.
Je vous remercie de cette occasion que vous nous avez donnée de discuter avec vous.
À (1040)
Le président: Merci.
La Fondation Héritage Canada, monsieur Anthony.
[Français]
M. Brian P. Anthony (directeur général, Fondation Héritage Canada): Monsieur le président, membres du Comité permanent des finances, je vous remercie de me recevoir une fois de plus dans le cadre de vos consultations prébudgétaires annuelles.
La Fondation Héritage Canada est un organisme non gouvernemental de bienfaisance ayant pour mission de promouvoir la préservation du patrimoine bâti du Canada à l'échelle nationale.
[Traduction]
Regroupant des membres au sein d'une association sans but lucratif, la fondation est dirigée par un conseil d'administration composé de représentants élus de chaque province et territoire; elle est gérée par une équipe professionnelle travaillant à Ottawa.
[Français]
Comme l'indique notre proposition prébudgétaire de 2004 remise aux membres du comité, le Canada a perdu une quantité désolante des ressources de son patrimoine bâti, et ces pertes se poursuivent chaque jour.
[Traduction]
Entre 1970 et 2000, nous avons vu disparaître entre 21 et 23 p. 100 de nos immeubles historiques—21 p. 100 dans les grands centres, 23 p. 100 dans les plus petites collectivités—et dans certaines villes, le taux d'attrition était près du double des moyennes nationales. La tendance paraît inexorable.
Je suis convaincu que chaque membre du comité pourrait sans effort se rappeler d'au moins un immeuble remarquable de son milieu qui a disparu inutilement. Pour peu qu'on y réfléchisse, de nombreux exemples ne manquent pas de nous revenir, qu'il s'agisse d'un hôtel de ville, d'un église, d'une école centenaire, d'une banque, d'un bureau de poste, d'un magasin général et ainsi de suite, dans chaque collectivité et dans chaque circonscription, partout au pays.
Un observateur célèbre a attribué le phénomène à une culture de la destruction, qu'il est impératif de remplacer par une culture de la préservation si nous voulons léguer une partie de notre passé aux générations futures.
[Français]
Le gouvernement du Canada a une excellente occasion de prendre l'initiative en reconsidérant et en réorientant la façon dont il prélève des taxes et la façon dont il dépense, ainsi qu'en adoptant d'autres politiques et pratiques en vue d'encourager la conservation, la restauration et la réutilisation adaptée des atouts de notre patrimoine bâti.
[Traduction]
Notre proposition prébudgétaire présente diverses recommandations qui permettraient au gouvernement du Canada de montrer la voie à suivre dans ce domaine d'importance nationale—et montrer la voie non seulement à l'échelle nationale, mais aussi internationale. Je voudrais ici résumer ces recommandations.
Le financement de l'initiative des lieux historiques qu'a entrepris le gouvernement fédéral devrait maintenant être renouvelé sur une base permanente. Les mesures législatives assurant le fondement de l'initiative devraient être présentées aussitôt que possible cette année. Un vaste programme d'incitatifs fiscaux devrait être mis en place pour encourager à la restauration des bâtiments patrimoniaux, et la taxe sur les gains en capital à l'égard des dons de biens immobiliers devrait être réduite à zéro. Une politique pangouvernementale accordant la priorité au patrimoine devrait être adoptée; dans cette optique, l'initiative fédérale en faveur des villes et collectivités devrait encourager à la conservation et à la réutilisation des immeubles historiques.
[Français]
Les consultations de la vérificatrice générale au sujet du patrimoine devraient être examinées soigneusement. Les ressources nécessaires devraient être prévues pour pallier les lacunes qu'elle a cernées. Enfin, le gouvernement fédéral devrait activer ses discussions avec notre fondation au sujet de son éventuelle transformation en véritable organisme chargé du patrimoine au Canada.
[Traduction]
Des témoins parmi les plus visibles, tangibles et accessibles de notre passé sont démolis chaque jour, à raison de 20 p. 100 à chaque génération. À ce rythme, que laisserons-nous aux prochaines générations de Canadiens, à nos enfants, à nos petits-enfants et à leurs enfants? Et que leur dirons-nous lorsqu'ils nous demanderont ce que nous avons fait pour endiguer l'inexorable disparition de monuments les uns après les autres, dans une collectivité après l'autre?
Pour espérer mettre fin à cette dilapidation de notre passé, il faut bien y mettre fin, nous devons tous nous y mettre—non seulement la Fondation héritage Canada et le milieu voué à la conservation du patrimoine, mais chacun d'entre nous.
[Français]
Monsieur le président, le Comité permanent des finances a, dans le passé, manifesté envers les propositions de la Fondation Héritage Canada un intérêt et un appui qui ont été éminemment appréciés.
[Traduction]
Aujourd'hui, à cet important point tournant, nous espérons pouvoir encore compter sur votre appui.
Je vous remercie.
Le président: Merci. C'est fantastique. C'était moins de cinq minutes. Je l'apprécie.
C'est au tour de la Writers Guild of Canada.
Madame Parker.
Mme Maureen Parker (directrice générale, Writers Guild of Canada): La Writers Guild of Canada est heureuse de cette occasion qui lui est donnée de comparaître devant le Comité permanent des finances dans le cadre des consultations prébudgétaires.
Je m'appelle Maureen Parker, je suis directrice générale de la Writers Guild of Canada. Je suis accompagnée par ma collègue, Gail Martiri, notre directrice des politiques.
La Writers Guild of Canada est une association nationale qui représente plus de 1 900 scénaristes professionnels qui travaillent dans le domaine des films, de la télévision, de la radio et du multimédia d'expression anglaise au Canada. Les scénaristes sont les principaux créateurs de la production canadienne. Ce sont les voix qui assurent la préservation de notre identité canadienne. Les membres de la WGC sont les créateurs de récits canadiens comme la nouvelle série télévisée populaire Corner Gas, et les longs métrages comme Mambo Italiano.
Les consultations prébudgétaires du comité des finances ont lieu à une période critique. Notre secteur indigène de la production est en crise, en raison du financement instable qu'il reçoit de l'État, de la réduction des dépenses par les télédiffuseurs sur les productions dramatiques canadiennes, et des marchés en baisse d'exportation de nos oeuvres audiovisuelles. Les scénaristes, directeurs, artistes, techniciens et producteurs canadiens se sont unis pour inciter ce gouvernement à créer une source de financement stable et à long terme pour le Fonds canadien de télévision, Téléfilm et la SRC.
Le mercredi 17 novembre 2004, la ministre Frulla a comparu devant la Chambre des communes pour défendre le budget du ministère du Patrimoine. Nous sommes heureux que tous les partis politiques aient affirmé leur appui unanime à un soutien financier continu des créateurs. Dans le secteur de l'audiovisuel, les scénaristes—nos membres—créent les scénarios, qui à leur tour deviennent des productions.
L'industrie canadienne du film et de la télévision est un modèle à suivre. Elle emploie plus de 134 000 personnes hautement compétentes qui travaillent dans un secteur qui rapporte 5 milliards de dollars à notre économie. Notre industrie s'appuie sur un partenariat entre les secteurs public et privé, où chaque dollar investi attire 6 $ du secteur privé. Sans compter les retombées sur l'économie dans son ensemble, comme sur le secteur de l'hébergement, ou les avantages culturels énormes qu'il y a à raconter nos propres histoires.
Mais après des années de progrès réguliers dans tous les secteurs de notre industrie, nous constatons maintenant un déclin, particulièrement au titre de la production des oeuvres dramatiques. Bien qu'il y ait de nombreuses manières de raconter des histoires, l'oeuvre dramatique reste la forme la plus efficace et la plus populaire. C'est néanmoins, aussi, la plus coûteuse.
Depuis plusieurs années, les radiodiffuseurs ont fait pression avec succès sur le CRTC en faveur de l'élimination des exigences relatives aux dépenses et à la diffusion pour la production d'oeuvres dramatiques. De plus, les ventes à l'exportation d'oeuvres audiovisuelles canadiennes ont baissé parce que d'autres pays ont compris l'importance de créer leurs propres programmes et de raconter leurs propres histoires, alors ils ne sont plus intéressés à acheter les nôtres. Fait étonnant, il est beaucoup plus économique d'acheter des émissions de télévision américaines, qui rapportent d'énormes recettes de publicité, que de créer des programmes canadiens originaux. Tout cela fait qu'il y a moins d'oeuvres dramatiques et qu'on produit moins.
Ce déclin se reflète dans nos statistiques annuelles. En 1999, il y a eu 755 heures de programmation dramatique dans notre territoire de compétence, mais en 2003, on n'en produisait plus que 488. C'est une chute de 35 p. 100 en cinq ans.
Notre secteur industriel est aussi en difficulté, surtout à cause de la hausse du dollar canadien comparativement au dollar américain. Il n'est tout simplement plus économique de filmer des productions à gros budget au Canada. C'est plus économique ailleurs. La précieuse leçon que nous devons tirer de cet état de fait, c'est que le seul type de production sur laquelle nous pouvons compter, c'est celle d'émissions créées pour les Canadiens, par les Canadiens.
Mais les productions audiovisuelles sont coûteuses, et nous n'avons qu'une petite population. Au contraire des États-Unis, nous ne pouvons pas recouvrer les coûts d'une production sur notre propre marché. Il nous faut conclure un partenariat avec le gouvernement canadien. Il est important de souligner que ce n'est pas une situation unique, puisque la plupart des pays appuient la programmation locale au moyen de crédits fiscaux et d'autres initiatives d'investissement.
Voici ce qu'il nous faut pour avoir une industrie viable.
Il nous faut augmenter le financement à long terme du Fonds canadien de télévision, de Téléfilm et de la SRC. Il nous faut une augmentation du taux de crédit d'impôt accordé pour la production de films et d'enregistrements vidéos canadiens, de 25 à 30 p. 100 à tout le moins. Ce remboursement d'impôt est un élément essentiel du financement de la production. Enfin, il nous faut un échelonnement de l'impôt pour les entrepreneurs indépendants qui travaillent dans les industries culturelles, parce qu'une bonne année est souvent le fruit de 5 ou 10 années de revenus minimes.
À (1045)
La WGC presse le comité des finances de recommander à notre gouvernement de joindre le geste à la parole et de maintenir son soutien à nos créateurs en mettant en oeuvre les trois mesures que nous proposons. Si nous reconnaissons notre valeur en tant que nation, nous devons engager les ressources nécessaires pour assurer la survie de notre culture populaire.
Je vous remercie.
Le président: Merci. C'est très bien. Vous êtes dans les temps.
De l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists, nous accueillons M. Bishopric.
À (1050)
M. Thor Bishopric (président, ACTRA Nationale, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists): Bonjour, monsieur le président. Merci.
Honorables membres du comité, je m'appelle Thor Bishopric et je suis président national de l'ACTRA, l'Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists. L'ACTRA est une organisation nationale qui représente plus de 21 000 artistes professionnels qui travaillent dans le secteur des médias d'enregistrement d'expression anglaise au Canada. Je suis accompagné de Gordon Pinsent, Compagnon de l'ordre du Canada, un artiste des plus éminents et récipiendaire de fraîche date du Prix du Gouverneur général pour les arts de la scène.
M. Gordon Pinsent (participant / membre , ACTRA Nationale, Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists): Bonjour, monsieur le président et membres du comité.
Il semble que nous passons notre vie à expliquer l'ACTRA et qui nous sommes. Nous nous levons chaque matin en devant expliquer qui nous sommes et justifier ce que nous voulons faire, mais ça va.
Il n'y a pas très longtemps, je rendais visite à un foyer pour personnes âgées, où se trouve l'une de mes soeurs, à St. John's. Alors que j'étais là, un Canadien connu s'est penché vers une personne âgée et lui a demandé « savez-vous qui je suis? ». La personne a répondu, « non, mais je ne doute pas que si vous allez demander au bureau d'accueil, ils pourront vous le dire ». Nous sommes habitués à ce genre de chose.
L'ACTRA est un ardent défenseur de la préservation et du renforcement de la culture canadienne et de la créativité canadienne. Ses membres ont un intérêt vital dans l'avenir culturel du Canada, et il est toujours bon pour les artistes que l'industrie soit prospère et les occasions d'emploi nombreuses. Les membres de l'ACTRA sont aussi passionnément convaincus que le Canada a besoin d'une solide présence canadienne partout où des produits et services de divertissement et d'information sont créés et distribués aux Canadiens. Nous vouons une fervente confiance à notre propre créativité, notre capacité de raconter et d'illustrer nos propres histoires. C'est cette confiance qui motive la participation de l'ACTRA dans les processus publics d'examen de l'avenir de la télévision, du film et d'autres médias canadiens.
M. Thor Bishopric: Nous traitons en profondeur, dans le mémoire que nous avons remis, de la question de l'échelonnement de l'impôt pour les artistes travailleurs autonomes. C'est très important pour le milieu de la création du Canada.
Cependant, l'aspect sur lequel nous allons insister aujourd'hui, c'est la nécessité de maintenir et d'accroître le financement du gouvernement pour encourager l'investissement dans la production de films et d'émissions télévisées au Canada. Nous craignons fort que l'exercice actuel d'examen des dépenses du gouvernement fédéral ne soit la prémisse d'autres mesures d'austérité budgétaire qui, inévitablement, auront de graves répercussions sur l'industrie du film et de la télévision en particulier, et sur les industries de la culture en général.
Le secteur canadien du film et de la télévision génère 4,93 milliards de dollars d'activités de production chaque année. Ce secteur emploie plus de 133 000 Canadiens. L'industrie a affiché un taux annuel de croissance, entre 1997 et 2002, de 8,5 p. 100, dépassant ainsi le taux de croissance de 3,6 p. 100 de l'économie en général. Les produits de l'industrie canadienne du film et de la télévision représentent une valeur annuelle à l'exportation de 2,37 milliards de dollars, dont 635 millions de dollars par année dans les co-productions prévues par un accord.
Le financement public versé en moyenne entre 1996 et 2003 représente environ 16 p. 100 de la valeur totale de toutes les productions canadiennes certifiées par le Bureau de certification des produits audio-visuels canadiens. Chaque dollar versé par le gouvernement pour appuyer notre industrie a permis d'obtenir plus de six dollars d'autres types de financement.
M. Gordon Pinsent: Le discours du Trône qui a été prononcé récemment faisait état de grands engagements, notamment celui de favoriser les politiques culturelles qui aspirent à l'excellence, au renforcement de l'assise sociale du pays et aussi d'assurer au Canada une place d'honneur et d'excellence dans le monde. C'est déjà commencé. Le mouvement est entamé. Le Canada s'est fait un nom et suscite, ou retrouve beaucoup de respect du reste du monde. Les raisons à cela, du moins en partie, sont assez évidentes dans les journaux d'aujourd'hui.
Tout cela revient à l'identité, mais nous devrons nous voir pour nous connaître, et nous nous sommes très bien débrouillés dans certains cercles. Nos ouvrages de fiction sont accueillis très favorablement par la critique. La danse et le théâtre, les récits sur toutes sortes de sujets ont contribué à nous faire voir et reconnaître le fait qu'on nous apprécie hors du pays. Mais pour atteindre les objectifs énoncés dans le discours du Trône, il faut un engagement de ressources financières, qui doivent être assignées aux programmes qui appuient la création de films et d'émissions télévisées et la production des nouveaux médias.
Sans engagement de financement suffisant du secteur culturel par l'État, l'effet cumulatif, sur les prochaines années, d'une réduction fixe du pourcentage qui s'appliquerait également dans tout le portefeuille du Patrimoine canadien, particulièrement au Fonds canadien de télévision, à Téléfilm Canada, à la Société Radio-Canada et au Conseil national du film sera dévastateur pour la création du contenu canadien. Ces organes de financement jouent un rôle essentiel en encourageant la création de productions canadiennes, particulièrement d'oeuvres dramatiques canadiennes. Les émissions dramatiques sont un outil culturel efficace et le genre le plus populaire de programmation. C'est le principal moyen par lequel les Canadiens disent et partagent leurs histoires entre eux.
En 1955, je commençais à faire le genre de travail que je fais maintenant, et il semblait alors tout naturel que nous nous fassions les dents sur les oeuvres—des classiques américains et britanniques—d'autres cultures plutôt que de la nôtre. Il n'était pas question de nous asseoir et de dire remplaçons tout cela immédiatement et mettons-nous à nous raconter, entre nous, nos propres histoires. Nous ne nous en sommes pas donnés la peine. Nous pensions que nous ne faisions qu'un, dans le sens du genre de travail que nous faisions.
Cela me tracassait, et j'ai peine à croire que 50 années sont passées et que nous en sommes encore à discuter de la possibilité qu'en tant que culture, nous pouvons y gagner, et consolider et enrichir le réseau dans lequel nous évoluons, le réseau de télédiffusion qui relie les Canadiens en un médium commun. Les réductions budgétaires entraîneraient d'importantes pertes d'emplois pour les créateurs et les artistes, et une forte baisse du nombre et de la qualité de productions au contenu canadien qui sont diffusées chaque année.
D'aucuns pourraient soutenir que les forces du marché à elles seules devraient déterminer quelles productions survivent sur les ondes et dans nos théâtres. Cet argument ne tient pas au Canada. La programmation canadienne en langue anglaise, particulièrement la programmation dramatique, est très vulnérable aux forces des grandes entreprises d'Hollywood et au déversement au Canada d'émissions américaines qui dominent les ondes des télédiffuseurs privés du Canada pendant les heures de grande écoute.
L'aide de l'État à la production d'oeuvres dramatiques télévisées et de longs métrages est essentielle et n'est pas unique au Canada. Le fait est que bien des pays de l'Europe, notamment le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France, et aussi l'Australie, dont les gouvernements financent directement la production intérieure, ont des industries concurrentielles et dynamiques et produisent à l'interne des séries télévisées qui figurent au nombre des 10 les plus populaires. Il convient de souligner que les États-Unis et l'Inde sont les seuls pays à ne pas financer directement la production télévisée, parce que leurs propres marchés intérieurs et de l'exportation sont suffisamment vigoureux pour soutenir les nouvelles productions sans l'aide du gouvernement.
À (1055)
M. Thor Bishopric: Monsieur le président, j'apprécie votre patience. Il est clair que nos notes d'allocution sont trop longues. Cependant, nous avions espéré pouvoir vous faire part d'autres anecdotes sur notre expérience dans l'industrie. Je vais terminer nos observations, et j'espère qu'il restera du temps, pendant la période de questions, pour...
Le président: Je vous donne 10 secondes, parce qu'il y a neuf groupes et malheureusement, je ne peux permettre...
M. Thor Bishopric: Je comprends très bien.
En bref, si je peux résumer, l'ACTRA aimerait obtenir du gouvernement l'engagement de rétablir et d'accroître la contribution de l'État au financement du Fonds de télévision canadien, de Téléfilm et de Radio-Canada dans le prochain budget fédéral. Un financement approprié est essentiel si nous voulons que la programmation produite au pays, et particulièrement les productions dramatiques canadiennes pour la télévision et les longs métrages canadiens, soient accessible aux publics canadiens.
Nous vous remercions de nous donner cette occasion d'exprimer nos préoccupations, et s'il reste du temps pour les questions, nous y répondrons avec plaisir.
Le président: Merci.
De Writers' Union of Canada, nous accueillons M. Freeman.
Mme Deborah Windsor (directrice générale, Writers' Union of Canada): Je suis Deborah Windsor, de Writers' Union of Canada.
[Français]
Je vous remercie de nous donner l'occasion de participer à ces consultations.
[Traduction]
The Writers' union of Canada apprécie cette occasion qui lui est donnée de participer aux consultations prébudgétaires avec vous, le Comité permanent des finances.
Comme indique le mémoire que vous avez déjà en main, l'Union a été fondée par des écrivains, pour les écrivains, en 1973, et a évolué pour constituer un effectif national de 1 500 écrivains d'ouvrages de tous genres. Il a le mandat de promouvoir et de défendre les intérêts de ses membres créateurs et toutes les libertés du Canada d'écrire et de publier.
L'industrie de l'écriture et de la publication du Canada a connu une croissance faramineuse depuis 30 ans, et les Canadiens ont bénéficié des avantages économiques et culturels liés à cette croissance. Et pourtant, de nos jours, le profil financier de l'écrivain, du compositeur et de l'artiste canadien moyen peut être résumé en quelques mots: un créateur à faible revenu, travailleur autonome, dont le revenu connaît parfois d'énormes fluctuations.
Je suis accompagnée aujourd'hui de Christopher Moore, un écrivain et ancien président de Writers' Union of Canada.
Á (1100)
M. Christopher Moore (président, Writers' Union of Canada, Periodical Writers Association of Canada, League of Canadian Poets and the Playwrights Guild of Canada): Monsieur le président, je m'appelle Christopher Moore. Je suis aujourd'hui à titre d'ancien président de Writers' Union of Canada. Je représente Bill Freeman, notre président, qui n'a pu venir aujourd'hui. Je suis aussi ici qu'en tant qu'écrivain, en tant que personne qui vit et fait vivre sa famille par ses oeuvres et droits d'auteur.
En fin de compte, je suis ici pour affirmer que les écrivains créateurs qui font une contribution à la culture canadienne ont le droit de gagner leur vie par le travail qu'ils font, et que cela vaut la peine pour le gouvernement canadien d'instituer des politiques qui continuent de faire que ce soit possible et de les appuyer.
The Writers' Union a plusieurs propositions à faire à ce comité.
Nous appuyons vigoureusement le maintien du programme de financement intitulé Un avenir en art qu'a annoncé le premier ministre en mai 2001 pour augmenter d'environ 30 p. 100 le budget du programme de subvention globale des maisons d'édition et du Programme d'aide au développement de l'industrie de l'édition.
Ce ne sont pas des programmes qui s'adressent directement aux écrivains mais plutôt aux maisons d'édition. Cependant, The Writers Union apprécie le soutien qu'ils fournissent à l'industrie de l'édition et nous en avons constaté les bénéfices directs. Nous aimerions que le programme Un avenir en art soit maintenu.
Nous voudrions recommander que les législatures envisagent la création au Canada d'une déduction des revenus de droit d'auteur. Depuis quelques années, le régime fiscal du Québec permet la déduction des revenus de droits d'auteur des créateurs jusqu'à une certaine limite, et ils ont trouvé que c'était très efficace, puisque le droit d'auteur est nettement défini dans la Loi sur le droit d'auteur. C'est une proposition qui est facile à administrer, et encourage les créateurs à produire plus de matériel brut.
Si un écrivain encaisse 10 p. 100 de la valeur de son livre, cela signifie que l'écrivain qui a le soutien de ses droits d'auteur génère un revenu équivalent pour neuf autres personnes. C'est un moyen pour le gouvernement d'instituer un programme d'incitation fiscale qui est simple et qui appuie directement non seulement les créateurs, tous les créateurs, mais toute l'industrie qui dépend d'eux.
Nous partageons l'avis d'autres qui ont déjà parlé aujourd'hui de la valeur d'une proposition d'étalement rétrospectif limité pour les créateurs dont les revenus fluctuent et sont importants une année et moins une autre.
Nous prenons note du fait que de nombreux créateurs reçoivent des subventions de subsistance, particulièrement du Conseil des arts du Canada, mais aussi des conseils des arts des provinces, et que ces subventions sont imposables, ce qui fait que les minces subventions de subsistance qui aident les créateurs à générer le travail qui soutient si bien l'industrie culturelle deviennent imposables. L'octroi d'exemptions fiscales à ces subventions du Conseil des arts du Canada et des provinces serait, je le répète, directement bénéfique pour les créateurs, et ces bénéfices auraient des retombées sur l'industrie culturelle qui dépend d'eux.
Nous aimerions attirer votre attention sur ce qui est, en vérité, l'unique grand problème du programme de la Commission du droit de prêts publics. Ce programme récompense les écrivains pour l'utilisation de leurs ouvrages dans les bibliothèques publiques. Il les indemnise pour l'emploi répandu qui est fait de leurs ouvrages dans les bibliothèques publiques. Le seul problème que cela pose, c'est que le nombre d'ouvrages que les écrivains et maisons d'édition du Canada mettent dans les bibliothèques publiques continue de croître alors que le financement du programme a été plafonné, ce qui a entraîné une chute régulière et marquée des revenus pour les écrivains qui touchent des prestations de ce programme. Nous pensons qu'il est impératif de rétablir le niveau de financement afin que les prestations reviennent au niveau qu'elles avaient lorsque le programme a été créé il y a 18 ans. De fait, il est maintenant de 30 p. 100 inférieur à ce qu'il était à l'époque, par créateur.
Ce comité est certainement au courant du nombre de faillites survenues au fil des années dans l'industrie de l'édition et souvent, ce ne sont pas que les propriétaires et les actionnaires des maisons d'édition qui vivent les difficultés liées à ces faillites, mais aussi les écrivains que publient ces maisons d'édition, qui ne sont pas considérés comme des créanciers garantis.
Je suppose qu'il ne me reste presque plus de temps?
Á (1105)
Le président: C'est cela.
M. Christopher Moore: Alors je vais tirer ma conclusion.
Par conséquent, nous appuyons les recommandations du comité permanent antérieur du développement des ressources humaines, en faveur d'une procédure par laquelle les écrivains pourraient être considérés comme des créanciers garantis quand il y a faillite de maisons d'édition.
Ceci termine notre liste de recommandations.
Je le répète, je pense qu'il est fondamental, en réponse à vos questions, de dire qu'il vaudrait la peine pour le gouvernement fédéral qu'il assume un rôle efficace dans le soutien de la culture et qu'il y investisse des fonds. En notre ère de mondialisation des communications, il est important que le gouvernement canadien appuie la diversité culturelle et une solide culture canadienne. Nos recommandations vont en ce sens.
Je vous remercie.
Le président: Je vous remercie.
Le groupe suivant est celui de la Periodical Writers Association of Canada. Je laisse la parole à Mme Warwick.
Mme Liz Warwick (présidente, Periodical Writers Association of Canada): Bonjour.
Je m'appelle Liz Warwick. Je suis présidente de la Periodical Writers Association of Canada. Nous représentons 500 écrivains de nombreuses régions du Canada.
En mai cette année, dans une allocution prononcée devant la Chambre de commerce de Laval, le premier ministre Paul Martin a énoncé les priorités économiques de son gouvernement. De l'avis général dans tout le Canada, la santé est la plus grande priorité, et nous ne dirions certainement pas le contraire. Cependant, c'est la deuxième priorité du premier ministre, le savoir,sur laquelle nous aimerions nous concentrer aujourd'hui.
Dans son allocution, M. Martin a dit que ce qui est important, c’est de continuer à investir massivement dans ce qu’on a de plus précieux : nos connaissances et nos talents. L'une des principales composantes de cette économie du savoir est la culture, et bon nombre des catalyseurs de la culture, de nos jours, sont les membres de la Periodical Writers Association of Canada. La PWAC représente plus de 500 écrivains et entrepreneurs culturels, de propriétaires de petites entreprises dont le produit est la culture canadienne et dont le marché est le Canada lui-même et, de plus en plus, le monde.
Les membres de la PWAC étudient, expliquent, interprètent et remettent en question chacune des facettes de l'expérience canadienne. Nous sommes la principale voie par laquelle l'économie du savoir se transmet partout au pays et sur les marchés internationaux. Les membres de la PWAC écrivent pour tous les grands médias du Canada, ses journaux, revues, sites Web, et aussi pour la radio et la télévision. Nous écrivons aussi pour le gouvernement canadien, ses secteurs scientifique et médical, ses organismes et ses établissements d'enseignement. En bref, nous créons le texte du Canada.
Par conséquent, il est tristement ironique qu'à une époque où les gouvernements reconnaissent l'importance du savoir et du talent pour la prospérité économique actuelle et future, les artistes, les créateurs et les entrepreneurs culturels comme les écrivains pigistes, restent parmi les professionnels les moins payés de tous les secteurs. Le membre moyen de la PWAC a deux diplômes d'études postsecondaires, et pourtant, les honoraires des rédacteurs ont stagné, ou même chuté depuis une vingtaine d'années.
Tout cela étant dit, nous soumettons respectueusement la suggestion suivante à votre comité. Nous vous demandons de suivre le conseil du premier ministre et d'investir massivement dans nos connaissances et nos talents. L'un des moyens de le faire serait par le financement accru du Conseil des arts du Canada. Le Conseil excelle dans ce qu'il fait, et il a fait ses preuves depuis près de 50 ans, en dépit d'un financement s'amenuisant toujours.
Nous vous demandons aussi d'envisager des exemptions d'impôt et l'étalement des revenus culturels. Je n'irai pas trop dans le détail là-dessus. Mon collègue, Chris Moore, en a parlé, mais nous aimerions beaucoup voir le gouvernement adopter ces mesures. Il existe certainement des modèles qu'on pourrait suivre, dont un au Québec et d'autres de pays de l'Europe.
Nous demandons aussi l'investissement direct dans la communauté des créateurs d'ouvrages non romanesques, d'après l'exemple fructueux du Fonds du Canada pour les magazines. Depuis plus de cinq ans, le Fonds a encouragé ce secteur qui était en difficulté à investir dans le contenu éditorial canadien. Grâce au Fonds, de nombreux magazines modestes mais vitaux pour la culture ont pu continuer d'être publiés. Ces magazines constituent des marchés pour les membres de la PWAC. Nous vous remercions d'aider ces magazines et nous vous incitons vivement à appuyer le Fonds.
Toutefois, nous aimerions aussi voir la création d'un Fonds canadien pour les créateurs de textes non romanesques, pour encourager les entrepreneurs culturels à créer leur entreprise, à augmenter leur niveau de professionnalisme et à largement accroître la quantité et la qualité du contenu canadien disponible pour toutes les industries culturelles, et de fait pour toutes les industries qui dépendent des créateurs professionnels d'oeuvres non romanesques.
En résumé, notre demande et nos suggestions sont les suivantes : un budget largement accru pour le Conseil des arts du Canada; des incitatifs fiscaux et l'étalement du revenu pour les créateurs; le soutien continu du Fonds du Canada pour les magazines; et un nouveau Fonds pour les créateurs d'oeuvres non romanesques, pour offrir directement un soutien aux créateurs.
Je vous remercie beaucoup.
Le président: Merci.
C'est bien. Nous sommes revenus sur la bonne voie. J'en suis heureux.
C'est au tout du Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada, maintenant, avec Mme Iley.
Mme Sarah Iley (présidente, Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada): Merci, monsieur le président et honorables membres du comité.
Nous apprécions beaucoup cette occasion qui nous est donnée de nous exprimer devant le Comité permanent des finances. C'est la sixième année que le Conseil pour le monde des affaires et des arts du Canada témoigne devant le comité.
Notre perspective est, chose intéressante, différente de celles d'autres témoins rassemblés aujourd'hui. Le Conseil pour le monde des affaires et des arts est l'association nationale des donateurs, commanditaires, clients et, bien souvent, collecteurs de fonds du secteur privé pour les organisations artistiques sans but lucratif dont nous sommes si fiers ici, au Canada.
De notre avis et de celui de deux tiers de la population canadienne, le secteur culturel du Canada devrait être pleinement appuyé à la fois par le secteur privé et le secteur public. C'est pourquoi je voudrais me faire l'écho des observations de plusieurs des témoins qui ont comparu déjà ce matin, en disant que nous espérons, nous aussi, que le programme du ministère du Patrimoine canadien, Un avenir en art, sera prolongé. Il a à nos yeux une importance phénoménale, pour l'incidence qu'il a sur les organisations artistiques sans but lucratif de tout le pays. Huit cents clients des arts de la scène, clients du Conseil des arts du Canada, attendent de savoir si ce programme sera prolongé, parce que leurs conseils d'administration bénévoles ne peuvent planifier efficacement sans le savoir, et leurs donateurs doivent planifier en sachant que leur contribution au fonds de dotation aura un financement de contrepartie. Nous espérons vivement que le programme sera prolongé.
Notre principale recommandation, aujourd'hui, est de prolonger la disposition d'incitatif fiscal pour les dons, et l'élimination de l'impôt sur les gains en capital pour les dons d'actions publiques qui se sont appréciées. Nous avons tiré réconfort du fait que deux comités permanents de la Chambre des communes des finances ont entendu cette recommandation et l'ont appuyée dans leurs propres rapports, mais nous avons été très déçus qu'en fait, elle n'ait pas retenu l'attention du gouvernement. Nous sommes ici encore pour vous prier d'éliminer complètement l'impôt sur les gains en capital perçu sur les dons d'actions publiques appréciées aux organisations caritatives et aux fondations publiques, et aussi la prolongation de la disposition visant l'inclusion des fondations privées.
Notre démarche est motivée par le fait que nous avons constaté une énorme hausse des montants et du nombre de dons de charité sur une très courte période, depuis 1997, quand le gouvernement a promulgué cette disposition particulière. Nous sommes d'accord avec le ministre des Finances, Ralph Goodale, quand il dit dans une lettre à l'un de nos administrateurs que cette mesure a su encourager les Canadiens à faire des dons de charité qu'ils n'auraient pas faits autrement.
Ce qui nous inquiète, c'est que les règles du jeu ne sont toujours pas, pour nous, comme au Royaume-Uni et aux États-Unis, et cela signifie que les donateurs, lorsqu'ils ont l'occasion de se défaire de leur actif et d'en faire don pour le bien public, doivent encore verser des impôts. Nous pensons que si quelqu'un fait vraiment un don dans l'intérêt public, aucun impôt ne devrait être perçu sur sa bonne volonté et son esprit de philanthropie.
Ce que nous recommandons, c'est que ce soit prolongé et d'éliminer l'impôt sur les gains en capital complètement, pour toutes les actions cotées en bourse, quelles qu'elles soient. Nous pensons qu'il est très important que cette disposition fiscale particulière englobe aussi les fondations privées. Ces dernières sont réglementées de la même manière que les fondations publiques, et en vertu de l'article 189 de la Loi sur l'impôt, elles sont empêchées de faire des opérations d'initiés. Elles constituent un instrument d'une utilité phénoménale pour donner, et nous avons constaté une énorme hausse du nombre de fondations privées qui ont été créées dans ce pays depuis une dizaine d'années.
Très récemment, Ipsos a entrepris un sondage pour la Banque Scotia, qui a conclu que 70 p. 100 de Canadiens bien nantis étaient intéressés à créer des fondations privées pouvant être un instrument pour se séparer de leurs richesses et en faire don dans l'intérêt public, sous forme d'organismes caritatifs. De plus, 18 p. 100 de ces personnes accordent la plus grande priorité aux arts et à la communauté culturelle. Nous serions très heureux que le gouvernement accorde cet incitatif aux fondations privées pour profiter aux organisations artistiques et culturelles qui revêtent une si grande importance pour le pays.
Á (1110)
Pour conclure, monsieur le président et membres du comité, je vous signale qu’aux États-Unis, les dons versés au secteur des arts s’élèvent à 21 dollars par habitant. Nous estimons que la philanthropie a progressé énormément au Canada sur une très courte période, c’est-à-dire depuis 1997, et nous enjoignons le gouvernement fédéral de continuer à l’encourager.
Le président: Merci.
Le prochain groupe à prendre la parole est le Literary Press Group of Canada. Monsieur Maurer, la parole est à vous.
Á (1115)
M. Rolf Maurer (président, Literary Press Group of Canada): Je vous remercie, monsieur le président ainsi que les membres du comité.
Je m’appelle Rolf Maurer et je suis éditeur chez New Star Books à Vancouver. Je suis en compagnie d’Alana Wilcox, notre vice-présidente, qui travaille chez Coach House Books à Toronto.
Nous vous sommes reconnaissants de nous donner l’occasion d’exprimer notre point de vue et, par le fait même, de contribuer ainsi à vos travaux.
Le Literary Press Group of Canada, qui a été fondé en 1975—tout près d’ici en fait, au Château Laurier—représente aujourd’hui 48 maisons d’édition d’oeuvres littéraires de propriété canadienne ou sous contrôle canadien. J’insiste sur le fait que notre principale activité est l’édition d’oeuvres littéraires. Les maisons d’édition membres du groupe diffèrent sur les plans de leur taille et de leur spécialisation. Nous avons des bureaux dans presque toutes les régions du Canada.
Le LPG a été créé en 1975 par un groupe d’éditeurs d’oeuvres littéraires désireux de travailler ensemble pour bâtir au pays une solide culture de la lecture, de l’écriture et de l’édition. Aujourd’hui, le LPG poursuit toujours cet objectif. Les éditeurs membres du Literary Press Group publient la majorité des œuvres littéraires d’auteurs canadiens et une bien plus grande proportion des premiers ouvrages d’auteurs canadiens.
Le LPG s’efforce d’atteindre l’objectif dont je viens de parler, et ce, de deux façons. Notre groupe milite en faveur de l’établissement de conditions favorables à la création et à la croissance de la culture littéraire au Canada et, en outre, il organise des activités de commercialisation collectives pour le compte de ses membres. Le LPG a mis sur pied deux entités de nature commerciale. Il a formé une équipe nationale des ventes composée de cinq personnes et qui représente 33 éditeurs. Il a aussi créé un distributeur qui offre un service hors pair à l’industrie du livre au nom de 23 éditeurs.
Le mémoire que nous vous présentons aujourd’hui comporte deux recommandations précises à l’intention du comité. L’une est d’accroître de l’ordre de 3,47 millions de dollars le financement destiné au programme de subventions globales du Conseil des Arts du Canada s’adressant aux auteurs et aux éditeurs. L’autre est de rétablir, comme d’autres l’ont proposé, le programme Un avenir en art.
Le Conseil des Arts du Canada est probablement l’organisme avec lequel nous avons le plus de contacts quotidiens. Il a été en mesure d’appuyer les auteurs et les éditeurs canadiens grâce au financement fourni par le programme Un avenir en art. Le rétablissement de ce programme permettrait au Conseil des Arts de continuer d’offrir cet important soutien.
Nous formulons cette recommandation, car les gens ont l’impression qu’il y a une abondance de livres au Canada, mais en fait l’industrie canadienne de l’édition ne se porte vraiment pas aussi bien que celle d’autres pays occidentaux. Nos statistiques sont assez médiocres quant au pourcentage d’oeuvres littéraires publiées par rapport à la totalité des livres publiés. Cette situation nous préoccupe sérieusement, et nous estimons qu’elle pourrait être corrigée en appliquant notre première recommandation. Nous exhortons le Parlement à démontrer l’importance qu’il accorde à la contribution qu’apportent les éditeurs d’oeuvres littéraires en affectant 3,47 millions de dollars supplémentaires au programme de subventions. À l’heure actuelle, le programme permet de financer seulement 30 p. 100 à 35 p. 100 des déficits…
Nous avons déjà écoulé notre temps, n'est-ce pas?
Le président: Il vous reste une minute.
M. Rolf Maurer: Il me reste une minute. Je vais donc aller droit au but. Je vais vous faire grâce de certains des chiffres que nous expliquons en détail dans notre mémoire.
L’autre programme dont nos membres bénéficient est le programme d’aide au développement de l’industrie de l’édition du ministère du Patrimoine canadien. De façon directe et indirecte, le ministère, par l’entremise de ses initiatives, a apporté une aide essentielle à nos membres, les aidant à améliorer tous les aspects de leur entreprise. En général, il a joué un rôle clé dans la mise sur pied de l’industrie canadienne de l’édition.
Le programme Un avenir en art a rendu possible la réalisation du projet de commercialisation Take a Joy Read Canada et du Projet de la chaîne d’approvisionnement. Les fonds alloués au programme Un avenir en art au cours des trois premières années ont été utilisés pour encourager l’utilisation de nouvelles technologies novatrices et appuyer la commercialisation et la promotion des livres canadiens. Le projet Take a Joy Read Canada et le Projet de la chaîne d’approvisionnement visent tous deux la réussite continue de l’industrie des livres canadiens.
C’est pour cette raison également que le LPG recommande vivement le rétablissement du programme Un avenir en art. En fait, le LPG espère que ce programme deviendra permanent.
Je vous remercie pour votre temps.
Á (1120)
Le président: Merci.
Nous allons procéder à la première ronde de sept minutes.
M. Harris, la parole est à vous.
M. Richard Harris (Cariboo—Prince George, PCC): Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, je vous remercie pour vos exposés.
Je ne sais pas à qui adresser ma question, mais j’aimerais qu’on m’explique la cause du problème. Est-ce parce que notre marché intérieur n’est pas en mesure de soutenir l’industrie canadienne des arts et de la culture sans une augmentation du financement public? Est-ce parce que nous sommes voisins des États-Unis ou que les Canadiens choisissent de regarder, de lire ou d’écouter des œuvres artistiques, culturelles ou littéraires d’autres pays plutôt que du nôtre? Quelle est la principale raison?
Mme Maureen Parker: Puis-je répondre?
M. Richard Harris: Je ne sais pas à qui m’adresser, alors allez-y.
Mme Maureen Parker: Nous avons abordé cette question lors de notre exposé. En particulier, nous avons évoqué la taille de la population comme étant une des causes. Notre population s’élève à environ 30 millions d’habitants, tandis que les États-Unis en comptent 230 millions. Et au Canada, nous avons deux langues : le français et l’anglais.
Il suffit d’examiner l’aspect financier des productions audiovisuelles pour constater qu’en raison de la faible population, cette industrie ne peut assumer seule le coût des productions. Par conséquent, il faut se pencher sur l’objectif que l’on veut atteindre par l’entremise de cette industrie. Quel est cet objectif sur le plan des connaissances, comme un de nos collègues l’a demandé. Et sur le plan culturel? Le message que l’on transmet suffit-il à attirer des investissements?
Vous avez aussi invoqué le fait que nous sommes voisins des États-Unis. Bien entendu, cela fait une énorme différence. Je reviens tout juste d’Australie, et je constate à quel point notre situation diffère. Ici, nous sommes envahis par la culture américaine, plus que tout autre pays dans le monde. Le États-Unis réalisent en particulier d’excellentes productions audiovisuelles. Ils y investissent de grosses sommes, car ils peuvent se le permettre. Ils exportent leurs productions et dominent le marché mondial.
Quant aux choix que font les Canadiens, cela constitue tout à fait une cause. Aux États-Unis, le budget moyen pour une production d’une heure s’élève à 4 millions de dollars. Au Canada, le budget moyen s’établit à 1 million de dollars. Quelle production paraît donc meilleure à l’écran? Quelle est la rémunération des acteurs américains? Quels progrès les États-Unis ont-ils réalisés sur le plan technique?
Il est très difficile pour nous d’être concurrentiels lorsque l’investissement est faible. Le choix des scénarios n’est pas vaste. Souvent, nous nous précipitons en production avant même d’être prêts. Nous pouvons être concurrentiels. Je crois que certaines des productions à succès réalisées par notre secteur, et par d’autres secteurs j’en suis sûre, en sont la preuve. Nous discuterons de cela. Nous pouvons certes être concurrentiels. Nous avons le talent et l’expertise nécessaires. Ce dont nous avons besoin, c’est de la confiance de notre gouvernement.
M. Gordon Pinsent: Il a aussi été démontré au fil des ans que l’attitude a une grande influence sur le financement que nous recevons et la continuité de celui-ci. Un grand nombre d’entre nous au sein de l’industrie de la création ont l’impression que le financement sera toujours intermittent, uniquement parce que notre profession ne se fait pas suffisamment valoir. Les gouvernements ne nous comprennent pas assez et ne sont pas assez informés.
Il y a un certain temps, nous avons tourné une série à propos d’un député. À cette occasion, j’ai rencontré quelques nouveaux chefs, et presque chacun d’entre eux nous a demandé comment se portait notre industrie. Le premier ministre Trudeau m’avait demandé si la Société de développement de l’industrie cinématographique canadienne répondait à nos besoins. L’intonation dans sa voix indiquait qu’il espérait que je réponde oui parce qu’il ne voulait pas en discuter bien longtemps. Cette attitude persiste depuis longtemps. Le premier ministre Diefenbaker, lui, était plutôt différent. Il a trébuché sur quelques câbles en disant « Ah, cette sacrée SRC ».
L’attitude manifestée par chaque personne laissait transparaître l’absence de volonté de contribuer à la construction de notre industrie. Il faut que nous ayons un avantage concurrentiel afin d’avoir le sentiment qu’il vaut la peine d’œuvrer dans cette industrie au sein du pays où nous voulons travailler. Le gouvernement croyait que le financement était suffisant, mais il était intermittent, ce qui était inquiétant.
Á (1125)
Le président: Je vais venir en aide aux témoins.
Le temps appartient aux témoins, alors je vais permettre aux membres de décider à qui ils adressent leurs questions, mais je vais ensuite les interrompre, car les témoins ne disposent que de sept minutes.
Monsieur Harris, vous avez la parole.
M. Richard Harris: Merci.
Je vous remercie, monsieur Pinsent.
Madame Iley, vous proposez que le gouvernement rehausse les incitatifs fiscaux à l’intention des mécènes et autres donneurs de l’industrie artistique et culturelle sans but lucratif. Je suis tout à fait d’avis que le gouvernement devrait faire cela afin d’encourager le soutien provenant du secteur privé, qu’il s’agisse de particuliers ou d’entreprises.
Le secteur privé pourrait-il appuyer davantage l’industrie artistique et culturelle à but lucratif si le gouvernement lui offrait des incitatifs fiscaux à cet égard? Si de tels incitatifs étaient vraiment attrayants, serait-il possible qu’un jour le financement public destiné au secteur à but lucratif de l’industrie devienne moins important que l’investissement du secteur privé dans ce même secteur? Les incitatifs fiscaux à l’intention de ceux qui appuient le secteur à but lucratif de l’industrie peuvent-ils être rendus plus attrayants?
Mme Sarah Iley: Je ne suis probablement pas la mieux placée pour répondre à cette question, car les membres du Conseil pour le monde des affaires et des arts n’œuvrent pas dans le milieu de la culture. Ils travaillent notamment dans le domaine de la finance ou dans l’industrie pétrolière et ils appuient l’industrie artistique sans but lucratif par l’entremise de dons et de parrainage.
Je sais que certaines mesures fiscales prises au fil des ans, visant particulièrement l’industrie cinématographique, ont eu des effets plus ou moins bénéfiques. Je vais demander à mes collègues de répondre à la question, car ils connaissent mieux que moi les personnes intéressées à investir dans le domaine.
Le président: Merci.
Faites vite, monsieur Wayne; vous disposez de 10 secondes.
M. Jack Wayne: Je vais laisser faire; je ne peux pas répondre en 10 secondes.
Le président: Monsieur Kotto, la parole est à vous.
[Français]
M. Maka Kotto (Saint-Lambert, BQ): Merci, monsieur le président.
Bonjour et bienvenue.
Ayant été moi-même très actif dans le milieu culturel, je comprends parfaitement vos préoccupations et vos doléances. J'ai été élu récemment, et c'est la première fois que je siège au comité. Au départ, je suis acteur, auteur, metteur en scène et poète.
En vous écoutant, je me suis dit qu'il s'était passé quelque chose sur cette colline. Je suis porté à penser qu'un genre d'autisme financier fait qu'on a mis de côté le volet culturel pendant des années, voire des générations. Mon collègue--je puis l'appeler ainsi--dit qu'une demande a été faite dans le but d'obtenir un soutien permanent. Or, je suis d'accord avec lui à cet égard.
Nonobstant les préoccupations matérielles de la vie quotidienne, la préservation des identités est fortement mise à risque quand l'État retire son soutien aux cultures.
Est-ce que c'est un sentiment que vous partagez?
Á (1130)
Le président: La parole est maintenant à M. Pinsent.
[Traduction]
M. Gordon Pinsent: Nous aimerions avoir le sentiment qu’on a à coeur notre travail. Vers la fin de l’année, on commence à se demander si nous pourrons poursuivre notre travail l’année suivante.
Je suis sur le point d’entreprendre un projet qui devrait se concrétiser l’année prochaine. Mais pour l’instant, nous n’avons aucune nouvelle du Fonds canadien de télévision, à l’instar de toutes les autres productions devant se réaliser l’an prochain. Nous allons encore devoir attendre à l’année suivante. En tant qu’artiste, j’ai toujours pensé que si, en décembre, je n’avais aucun projet de confirmé, je ne travaillerais pas l’année qui suit. Ce serait merveilleux d’avoir le sentiment que l’on pourra toujours réaliser nos projets.
Nous nous sommes habitués à ne pas pouvoir mener à bien nos projets. Nous en avons mis sur la glace en nous disant : « Eh bien, attendons ». Quant au projet dont je parle en ce moment, j’ai commencé à y penser il y a environ 20 ans. J’ai mis toutes ces années à le mettre sur pied. J’ai été capable, grâce à ma persistance, de surmonter les obstacles auxquels nous sommes confrontés au Canada, et c’est très bien. Mais ce n’est pas tout le monde qui y parvient et qui y est parvenu. Maintenant, je suis dans une position où je peux me permettre de choisir, mais il y a très peu de gens comme moi au Canada.
Mon projet verra le jour l’an prochain ou bien je devrai continuer à attendre. Nous sommes désormais habitués à ce genre de situation. Mais si le soutien était stable, nous aurions le sentiment que le gouvernement trouve notre travail important et qu’il ne se dit pas simplement : «Bon, nous devons les aider encore une fois». Le problème aurait déjà dû être réglé.
M. Thor Bishopric: Puis-je ajouter quelque chose?
Pour ce qui est du problème de l’exode des talents et des cerveaux, je dois dire que le Canada a de la chance que des artistes comme Gordon aient choisi de faire carrière au Canada. Par contre, de nombreux jeunes artistes estiment qu’ils ne peuvent survivre dans un milieu aussi instable que le nôtre. Les occasions d’emploi et les possibilités de créer des œuvres artistiques n’existent tout simplement pas. Un grand nombre d’entre eux sont attirés par les États-Unis et d’autres pays dans le monde. Il est essentiel que nous obtenions un engagement de la part du gouvernement.
Nous avons entendu l’engagement donné par les premiers ministres. Le premier ministre Martin a déclaré il y a un an qu’il jugeait très important d’assurer un financement stable et d’encourager la production d’œuvres artistiques. Depuis, de nombreux artistes ont quitté le pays. C’est un problème.
[Français]
M. Maka Kotto: Si je n'ai que deux minutes, je confirmerai tout simplement que nous sommes au fait de la fragilité et de la précarité qui priment au sein de ce milieu. Quelqu'un évoquait plus tôt l'imposition chez les artistes. Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails à ce sujet?
Ma seconde question concerne l'édition, donc les livres. Il y a 12 ans, le Parti libéral a promis de supprimer la TPS sur les livres. Je pense qu'un grand nombre d'éditeurs, au Canada et au Québec, étaient favorables à cette idée.
Où en êtes-vous face à cette question?
Merci.
[Traduction]
M. Jack Wayne: Je vous remercie beaucoup.
Je vais parler d’abord de la question de la TPS, car c’est un sujet facile. Les livres ne sont toujours pas exempts de TPS. Cette taxe rend le prix des livres plus élevé, et je n’entrevois nullement qu’elle sera supprimée.
Quant au régime fiscal, il existe un très bon exemple d’allègement fiscal pour les éditeurs de livres. Le gouvernement ontarien a créé un crédit d’impôt à leur égard qui pourrait servir de modèle. Il permet aux éditeurs de déduire des dépenses propres au domaine de l’édition.
Pour ce qui est de la taxe imposée aux artistes, je crois que la Writers' Union of Canada en a parlé. Dans notre jolie brochure illustrée, vous trouverez une liste des grands auteurs canadiens qui ont été d’abord publiés par de petits éditeurs canadiens. Le secteur de l’édition a besoin d’aide pour faire publier la prochaine génération de génies du monde littéraire, tant francophones qu’anglophones. Notre marché est très petit. Le génie des personnes que nous publions n’est pas reconnu instantanément.
On nous balance au Canada les tirages supplémentaires des éditeurs américains. Cela pose un problème aux éditeurs anglophones. Le soutien provenant du ministère du Patrimoine canadien sert simplement à faire entrer sur le marché les nouveaux écrivains et à faire baisser le prix des livres afin que nous puissions faire concurrence aux multinationales. Dans bien des domaines, cela fonctionne. Mais dans le domaine de l’édition de manuels scolaires, cela n’a pas fonctionné. Dans le secteur des manuels anglophones, les éditeurs américains nous devancent puisqu’ils peuvent publier des manuels de physique et de chimie, notamment. Ils peuvent convertir les miles en kilomètres. Cela ne change rien pour eux.
Á (1135)
Le président: Merci, monsieur Wayne.
Monsieur McKay.
L'hon. John McKay (Scarborough—Guildwood, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci aussi aux témoins. J'ai trois questions.
Plusieurs d'entre vous ont soulevé la question de l'étalement fiscal pour les artistes; je vais donc la poser aux rédacteurs de périodiques et à ceux qui souhaitent y répondre.
La Loi de l'impôt sur le revenu prévoit déjà l'étalement fiscal. Ce que je ne comprends pas au sujet de votre exposé, c'est ce qui ne convient pas dans les dispositions actuelles de la Loi de l'impôt sur le revenu au Canada.
Ma deuxième question est la suivante : Pourquoi le gouvernement du Canada devrait-il donner la préférence à un groupe de professionnels par rapport à un autre, ou à un groupe de contribuables par rapport à un autre? Qu'est-ce qu'il y a d'unique, si vous voulez, au sujet des artistes? Je comprends que tous ceux qui se déclarent artistes considèrent qu'ils sont uniques, mais il est possible que des vendeurs ou d'autres qui gagnent leur vie autrement considèrent également être uniques. Pouvez-vous donc m'éclairer à ce sujet? Qu'est-ce qui ne convient pas à propos des dispositions actuelles de la Loi de l'impôt sur le revenu relatives à l'étalement fiscal? Deuxièmement en quoi votre situation est-elle unique?
Mme Liz Warwick: Je vais commencer par la fin et parler un peu de ce qui est différent pour les artistes. Je vais prendre l'exemple d'un écrivain qui écrit un livre. Le genre d'investissement en temps initial nécessaire pour produire un manuscrit peut être énorme, je veux parler du temps consacré à la recherche et à la rédaction. Tout projet de grande envergure exige un énorme investissement initial. Il est très difficile, à moins d'être prêt à travailler 24 heures par jour, de continuer à gagner sa vie en écrivant d'autres projets tout en ayant encore du temps à consacrer à ce projet de plus grande envergure.
Ce que nous souhaitons, c'est qu'on reconnaisse, pour ce qui est de l'étalement fiscal notamment, que lorsque l'on se fait finalement payer pour ce produit particulier de grande envergure, le travail préalablement accompli est énorme.
Ce que nous demandons, je crois, c'est une application plus large de l'étalement fiscal et des exceptions, notamment pour le droit d'auteur. C'est ce qui existe au Québec et qui donne de très bons résultats. Nous aimerions que ce soit offert à d'autres écrivains dans tout le Canada.
Á (1140)
L'hon. John McKay: Je comprends votre point de vue, mais permettez-moi de me faire un peu l'avocat du diable, car le gouvernement préfère traiter tout un chacun de façon équitable.
Pourquoi une telle personne, telle que vous la décrivez, recevrait-elle un traitement préférentiel par rapport—et je vais prendre un exemple—à un vendeur d'assurance dont le revenu au cours des quelques premières années est effectivement peu élevé mais augmente au fur et à mesure qu'il fidélise sa clientèle? Il dispose de l'étalement fiscal actuel et il est possible que son revenu augmente de manière plus progressive que celui de la personne dont vous parlez. Vous décrivez une situation où la personne ne gagne rien pendant longtemps et, tout d'un coup, gagne énormément. Je ne vois pas, si vous voulez, quelle est la différence entre une catégorie de contribuables et une autre.
Mme Liz Warwick: Je ne connais pas particulièrement le domaine de l'assurance, mais ce que vous décrivez équivaut à une augmentation régulière de revenu. La différence, dans le cas des artistes, ne touche pas seulement l'écriture, mais tous les domaines. Si un artiste veut travailler sur un projet de grande envergure, il y consacre deux à trois années, il réalise un certain montant d'argent et ensuite, cherche en quelque sorte de nouvelles idées, pense à de nouveaux projets tout en travaillant sur des projets moins importants. Le cycle se répète sans cesse; la situation est très cyclique.
D'après moi, les écrivains et les autres artistes ont un genre d'emploi très cyclique et c'est sur ce point que nous mettons l'accent.
L'hon. John McKay: D'accord, merci.
Mme Maureen Parker: J'aimerais également répondre à cette question.
Nous nous sommes déjà rencontrés et nous avons parlé des investissements publics-privés. Je comprends très certainement vos préoccupations : les artistes geignards recommencent, ils veulent ce que d'autres Canadiens n'ont pas. Il y a cependant une différence entre ne recevoir aucun revenu et choisir une profession où vous savez que votre revenu va augmenter.
Je reçois bien sûr un salaire et je ne compare pas mon sort à celui des artistes. Un artiste commence par faire un investissement, par lancer une idée et cette idée se traduit, dans notre monde, en une production qui emploie des centaines de personnes. Pour que cette idée prenne forme, il faut passer beaucoup de temps à la créativité ou à la création d'un programme. Pendant cette période, ce n'est pas qu'on gagne moins, on ne gagne rien du tout . Beaucoup de nos artistes travaillent dans d'autres professions, comme serveurs ou serveuses, ou n'importe quoi d'autre, pour gagner leur vie.
Je ne pense pas que ce soit un bon investissement dans la culture. On ne peut pas être bon dans son domaine si on ne s'y exerce pas. C'est donc absolument différent du domaine de l'assurance ou de toute autre carrière. Nous investissons tous dans l'éducation et l'apprentissage et faisons ce qu'il faut pour gagner un revenu décent. Ce n'est pas le cas dans le monde artistique. Un artiste peut être le meilleur qui soit dans son domaine. M. Pinsent qui est ici, ne sait pas si l'année prochaine il aura un engagement. C'est un domaine très imprévisible auquel il faut prêter attention.
L'hon. John McKay: Je ne suis pas en désaccord et je ne qualifierais certainement pas les artistes de geignards. Mon épouse est une artiste si bien que je comprends mieux la situation que vous décrivez que la plupart des gens.
J'aimerais malgré tout revenir à ma question initiale, pourquoi faudrait-il donner la préférence à un contribuable par rapport à un autre alors que le revenu futur des deux est semblable ou parallèle? Je n'ai peut-être pas choisi le bon exemple en parlant de l'assurance. Il peut y en avoir d'autres auxquels je ne peux tout simplement pas penser.
De toute façon, permettez-moi de poser une autre question, car je n'ai presque plus de temps.
Le président: Effectivement.
L'hon. John McKay: D'autres voudront peut-être reprendre cette question.
Ma deuxième question s'adresse au Conseil pour le monde des affaires et des arts. Vous souhaitez étendre la disposition relative aux valeurs cotées en bourse non seulement aux organismes de charité et aux fondations publiques, mais aussi aux fondations privées. J'ai deux questions.
Premièrement, est-ce limité aux valeurs cotées en bourse ou engloberiez-vous également l'immobilier? Si oui, quels sont vos mécanismes d'évaluation?
Deuxièmement, les fondations privées : Êtes-vous convaincus que les fondations privées sont gérées comme il le faut et qu'elles peuvent remplir leur mandat?
Á (1145)
Mme Sarah Iley: Je vais répondre à la deuxième question pour commencer.
Oui, nous pensons effectivement que les fondations privées sont gérées comme il le faut par l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Selon nous, d'après les dispositions prévues, elles sont assujetties au même genre de rigueur que les fondations publiques, en ce qui concerne les rapports financiers, le contingent des versements. Tout ceci est prévu et nous considérons que le fait d'étendre l'application de la disposition qui leur permet de recevoir dans leur actif des valeurs cotées en bourse comme dons ne pose aucun problème en matière d'évaluation. Nous pensons qu'il s'agit simplement d'un élargissement de ce qui est déjà prévu pour les fondations publiques et les organismes de charité.
Je crois que l'Association of Fundraising Professionals demande également l'élimination de la taxe sur les gains en capital dans le cas de dons d'immobilier. Nos membres en ont discuté et pour l'instant, nous préférons nous en tenir aux valeurs cotées en bourse, si bien que nous n'appuyons pas cette recommandation particulière. Ce qui nous intéresse essentiellement, c'est l'élimination de la taxe sur les gains en capital dans le cas des valeurs cotées en bourse.
Le président: Merci.
Madame Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, merci à vous tous pour vos exposés d'aujourd'hui. Je crois que vous avez réussi très rapidement à présenter un argument fort convaincant à propos de la nécessité d'investir dans les arts et la culture au Canada—la radiodiffusion, l'édition de livres et l'appui aux acteurs et aux écrivains à l'échelle du pays.
Je crois toutefois que votre argument devrait être encore plus convaincant, compte tenu des pressions que subit notre gouvernement de la part de la droite qui souhaite que tout l'excédent disponible serve au remboursement de la dette, ou de la part du Parti conservateur à la Chambre qui souhaite que tout cet excédent serve à des réductions d'impôt. À mon avis, à moins de convaincre ce gouvernement qu'il faut investir dans précisément ce dont vous parlez, nous n'allons pas beaucoup avancer.
Ma question qui s'adresse à vous tous—je vais choisir une ou deux personnes parmi vous, mais vous pourriez de toute façon y penser d'ici le budget—est la suivante : Qu'avons-nous perdu en versant les 86 milliards d'excédent imprévu ces dix dernières années dans le compte de la dette? Qu'aurions-nous pu faire dans le domaine des arts et de la culture? Qu'avons-nous perdu dans le domaine du théâtre au Canada? Dans quelle mesure les productions théâtrales ont-elles diminué? Qu'avons-nous perdu en ce qui concerne les sites historiques? Avons-nous perdu des écrivains qui ont tout simplement abandonné la partie?
J'aimerais d'abord poser ces questions à Gordon Pinsent tout en lui disant que je le remercie de tout coeur d'être ici. Je sais que vous êtes très occupé, mais il est tellement important qu'un acteur bien connu, de réputation internationale, vienne témoigner devant notre comité. Merci d'être ici. J'aimerais que vous nous disiez dans quelle mesure, d'après vous, le théâtre au Canada est pénalisé par toutes ces restrictions. Qu'en pensez-vous et comment pouvons-nous rendre notre argument plus convaincant?
M. Gordon Pinsent: Eh bien, il me semble que plus la situation perdure, plus le sentiment qu'il est inutile de participer à la culture canadienne et d'y jouer un rôle devient tenace---certainement pour les jeunes générations de notre pays. Il est devenu tellement facile, et cela a toujours été le cas, d'accepter ce qui nous vient d'ailleurs et pourtant, nous ne sommes même pas isolés par des océans, comme l'Australie. Or, nous sommes prêts à accepter pareille situation et à abandonner la partie. Notre pays est marqué par de faux départs et par d'éternels recommencements. On y est déjà habitué et cela dure depuis des années. Le point de vue de la nouvelle génération n'est absolument pas différent.
Nous avons cependant entre les deux un public qui attend de grandes réalisations dans notre domaine et pourtant, rien n'arrive; on nous demande en fait de reculer: diminuez votre créativité; diminuez la taille des productions; ne vous inquiétez pas de la concurrence. Eh bien, je suis désolé, mais c'est justement ce qu'il faut faire.
M. Jack Valenti qui est intervenu ici dans les débats sur la distribution des films s'est exprimé ainsi: si vous ne le faites pas, nous le ferons. C'est aussi simple que cela. L'influence des États-Unis réapparaît sans cesse. Il a également déclaré que ce n'était pas de leur faute si nous n'avions pas encouragé le théâtre ou le cinéma—il voulait parler de ce qui nous distingue, comme par exemple le cinéma: si le Canada ne produit pas son propre cinéma et n'investit pas dans le cinéma, ce n'est certainement pas la faute des États-Unis qui eux, ne vont pas ralentir, mais qui, au contraire, vont continuer à prendre de l'ampleur.
Á (1150)
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci beaucoup pour cette réponse.
Brian Anthony, si nous pouvons avoir un plan de 10 ans pour abaisser le ratio canadien dette-PIB à 25 p. 100, pourquoi ne pouvons-nous pas avoir un plan semblable pour la préservation de notre patrimoine national? Qu'avons-nous perdu ces dix dernières années à cet égard?
M. Brian P. Anthony: Nous avons beaucoup perdu en ce qui concerne le rôle de gardien et protecteur des ressources patrimoniales du gouvernement fédéral. Les sites historiques nationaux qui appartiennent au gouvernement fédéral et qui sont exploités par lui ne sont pas financés comme il le faudrait; ils sont nombreux et très importants. Les travaux d'entretien sont souvent reportés si bien que certains de ces sites s'écroulent tout simplement. La vérificatrice générale du Canada a souligné beaucoup d'insuffisances à cet égard dans son dernier rapport.
Plus largement, toutefois, nous aimerions que plus de ressources soient affectées sous forme de subventions et contributions directes dans le but d'encourager la préservation du patrimoine, mais nous croyons aussi que le gouvernement fédéral peut utiliser ses programmes existants à cette fin en accordant simplement une plus grande priorité aux activités encourageant la conservation et la réutilisation des monuments historiques et en s'abstenant d'appuyer tout ce qui va à l'encontre des objectifs de préservation du patrimoine.
Je vais vous donner un exemple au sujet duquel vous allez être d'accord. Si l'édifice historique Eaton de Winnipeg a été démoli, c'est parce que Infrastructures Canada a injecté les derniers millions de dollars nécessaires pour conclure cette entente. Sans l'argent fédéral, cet édifice serait toujours là et on aurait pu l'utiliser autrement. En fait, le gouvernement aurait dû refuser, n'aurait pas dû appuyer ce projet; il aurait dû demander une nouvelle proposition d'utilisation de cette structure pour de nouvelles fonctions et s'abstenir de détruire des sites historiques—comme il l'a fait dans ce cas précis.
Par conséquent, l'utilisation plus intelligente des fonds existants est importante de même que le recours au régime fiscal. Selon nous, l'utilisation du régime fiscal à des fins de préservation du patrimoine permettrait au secteur privé d'intervenir sans contrainte. À l'heure actuelle, les règles du jeu privilégient la démolition et la nouvelle construction, ce qui n'a aucun sens aux plans environnemental, culturel ou historique, ni non plus d'un point de vue de l'emploi. Nous sommes donc en faveur d'un meilleur recours au régime fiscal, d'une utilisation plus intelligente des ressources existantes et aussi, bien sûr, de plus de ressources pour des objectifs précis.
Le président: Merci.
Monsieur Bell.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Ai-je le temps de poser une autre question?
Le président: Non, merci.
Monsieur Bell.
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.): Je parlais à l'instant à Mme Parker au sujet de ses observations sur la production canadienne. Je viens de North Vancouver où se trouvent les Studios Lion's Gate ainsi que plusieurs maisons d'édition. Si je ne me trompe, plus de 5 000 personnes sont employées dans l'industrie du cinéma et de la télévision dans ma circonscription seulement; je suis donc sensible à vos commentaires.
L'une des questions que je souhaite vous poser porte sur la concurrence et la volonté de réaliser des oeuvres canadiennes. Je sais que vous avez parlé de la différence en termes de population entre les États-Unis et le Canada. Dans quelle mesure avez-vous pu vendre nos oeuvres ou notre produit ailleurs—sur la scène internationale, exception faite des États-Unis?
Mme Maureen Parker: Bonne question. Nous pouvons certainement exporter notre travail ailleurs dans le monde. Nous avons très certainement notre place en Allemagne et au R.-U. sans compter l'Australie.
En fait , j'aimerais vous raconter rapidement une petite histoire. Je reviens d'une conférence en Australie où je connais un groupe d'artistes qui se plaignent tous de la même chose: ils ne peuvent tout simplement pas obtenir suffisamment d'argent pour réaliser des productions nationales et l'Australie vient de négocier son secteur de radiodiffusion dans le cadre des discussions sur le libre-échange. Ils sont donc d'une humeur sinistre.
Ils ont dit entre autres : « Eh bien, peut-être ne faisons-nous pas de programmes de qualité, peut-être est-ce là le problème, ce que nous faisons ne vaut rien. » Un grand nombre d'Australiens ont déclaré être prêts à dénigrer leurs propres créations. En tant que Canadiens, nous sommes les premiers à nous détester, mais les Australiens sont intervenus en disant : « Excusez-nous, l'un des meilleurs programmes réalisés cette année est un programme exporté par le Canada, intitulé Human Cargo »—ce programme a été réalisé pas loin de chez vous par Hugh Beard et Linda Swendsen, qui est également romancière.
Nous avons la capacité d'exporter nos histoires. Nous avons besoin de l'investissement financier pour les réaliser, mais je n'ai aucun doute sur ce point, nous pouvons les vendre.
Á (1155)
M. Don Bell: Merci.
Ma question s'adresse à M. Jack Wayne. Quel impact Internet a-t-il eu sur l'industrie du livre? En général, même les journaux—je sais qu'il s'agit de périodiques—ont tendance à être disponibles sur Internet. Avez-vous noté une baisse à ce chapitre?
Un éditeur canadien de ma région a récemment reçu un prix d'environ 250 000 de dollars, et j'en suis fort heureux. Je me demande tout simplement si les ventes de livres ont diminué de manière générale.
M. Jack Wayne: L'année a été difficile et pour les éditeurs francophones et pour les éditeurs anglophones. Il y a de nombreux facteurs qui influent sur les ventes de livres. L'Internet peut être très utile, et c'est là que les investissements de Patrimoine canadien peuvent s'avérer bénéfiques. Les éditeurs canadiens, dans l'ensemble, prêtent une attention particulière à leurs sites Web, même si cela coûte cher, comme vous le savez, de mettre sur pied un outil qui fonctionne très bien. Nous pouvons toutefois commercialiser nos livres et autres produits d'information via Internet.
Le défi est de taille, mais je pense que les éditeurs canadiens sont capables de le relever. Ce que nous pouvons faire, c'est publier le premier chapitre d'un livre sur Internet et espérer susciter l'intérêt des gens. Nous pouvons vendre des livres au moyen d'un site Web sécurisé, comme le font chapters.indigo.ca et Amazon.com, ce qui permet d'agrandir le marché et de faciliter l'achat de livres. L'Internet, pour nous, n'est pas un facteur négatif.
Il est vrai que de nombreuses personnes reçoivent beaucoup plus d'information via Internet, mais si nous arrivons à publier cette information sous forme de livre, nous allons obtenir de bons résultats. Toutefois, il est encore trop tôt pour tirer des conclusions.
M. Don Bell: Merci.
M. Jack Wayne: Merci.
M. Christopher Moore: Puis-je répondre à la question?
Le président: Allez-y.
M. Christopher Moore: Pour de nombreux créateurs, l'Internet constitue un merveilleux outil de diffusion. Si ce comité-ci était celui du patrimoine ou de l'industrie, nous serions nombreux à parler du droit d'auteur. Si nous n'avons pas trop abordé le sujet, c'est parce que nous comparaissons devant le comité des finances. La question ne se poserait pas si nous avions un régime de droit d'auteur solide qui rémunère les créateurs pour leurs oeuvres, qu'elles soient diffusées sous forme imprimée, photocopiée ou numérique sur Internet. Si le gouvernement du Canada possédait un tel régime, la plupart des créateurs accepteraient que l'Internet serve de nouvel outil de diffusion. Mais il faut voir l'importance que l'on accorde au droit d'auteur.
Le président: Merci.
Madame Ambrose.
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC): Merci.
Monsieur Anthony, je voudrais vous poser une question au sujet du CRTC, qui a fait parler de lui récemment en raison des décisions qu'il a rendues, décisions que certains jugent controversées: je fais allusion à Al-Jazeera, au refus d'autoriser la retransmission de la station de télévision italienne Rai International, et plus récemment encore, à la révocation de la licence de CHOI-FM.
J'aimerais vous poser deux questions. D'abord, je me demande si le CRTC n'est pas trop strict quand il applique la politique canadienne sur la radiodiffusion. Ensuite, on a laissé entendre qu'à cause de cette politique, de nombreuses personnes achètent des systèmes satellites piratés des États-Unis et d'ailleurs parce qu'elles estiment qu'elles n'ont pas le choix ou qu'ils n'ont pas accès à ces stations particulières. Par ailleurs, j'aimerais savoir si cela a un impact financier sur le secteur de la radiodiffusion au Canada.
M. Brian P. Anthony: Merci de la question. En tant que particulier, j'ai des idées bien arrêtées là-dessus, mais je représente ici la Fondation Héritage Canada, dont le mandat est de préserver les bâtiments historiques. Je pense qu'il vaudrait mieux poser la question à un représentant d'une association qui peut s'exprimer sur le sujet.
Le président: Est-ce que quelqu'un veut répondre?
 (1200)
M. Thor Bishopric: Je veux bien.
Nous savons que le CRTC a rendu des décisions controversées. Toutefois, je tiens à préciser que, d'après l'ACTRA, le CRTC remplit un rôle important, rôle qui doit être préservé. Il est absolument essentiel, étant donné que nous sommes voisins des États-Unis, et les commentaires de Mme Parker le confirment, d'avoir un organisme de réglementation qui est prêt à nous offrir des choix.
Fait intéressant : c'est le « choix » qui est au coeur de cette controverse. C'est de cela dont il est question ici. Les téléspectateurs canadiens n'ont pas beaucoup de choix quand vient le temps de visionner une émission canadienne. J'ai passé en revue, la semaine dernière, les émissions programmées aux heures de grande écoute qui sont offertes par les radiodiffuseurs privés. Mes chiffres ne sont peut-être pas exacts, mais j'ai recensé 22.5 heures d'émissions américaines en période de pointe, ce qui laisse 5.5 heures d'émissions canadiennes. C'est ce qu'offre CTV. Global, lui, offre 22.5 heures d'émissions américaines et 5.5 heures de dramatiques canadiennes pendant la période de pointe.
Par ailleurs, il est vrai que le CRTC a rendu de très mauvaises décisions au sujet du contenu canadien, notamment en 1999—nous cherchons à convaincre le gouvernement de revoir cette décision, puisqu'elle a eu un effet dévastateur sur les productions canadiennes. Toutefois, le CRTC demeure, à notre avis, une structure importante qui doit être préservée. Nous espérons qu'aucune mesure ne sera prise pour miner le CRTC ou réduire sa capacité de réglementer et de protéger le contenu canadien.
Mme Rona Ambrose: Est-ce qu'il me reste encore du temps?
Le président: Oui.
Mme Rona Ambrose: Vous avez parlé de l'effet dévastateur de la décision rendue en 1999. Êtes-vous en mesure de nous fournir des chiffres sur l'impact financier qu'ont eu certaines décisions du Conseil?
M. Thor Bishopric: Oui. Nous avons une foule d'information que nous sommes prêts à partager avec vous.
Malheureusement, les chiffres ne sont en guère encourageants. Nous avons vraiment été confrontés à une crise. Par suite de la décision de 1999, le nombre de dramatiques canadiennes, par exemple, est passé—Maureen, aidez-moi—de 13, ou d'un maximum de 22..., ou de 13 à 3 en 2002.
Si je puis me permettre, la décision de 1999 a eu pour effet, entre autres, de réduire les fonds consacrés à l'industrie. Il y avait moins d'argent pour l'octroi de licences de radiodiffusion et l'achat d'émissions canadiennes. Les budgets alloués à ces émissions ont été réduits ou carrément supprimés. Les sociétés de production au Canada ont cessé de produire des dramatiques pour la télévision. Elles ont tout simplement conclu qu'il n'y avait plus de modèle économique adéquat sur lequel s'appuyer, le système étant privé de fonds.
Nous devons réinvestir dans le système. Nous allons ensuite pouvoir faire comme l'Allemagne, la France et le Royaume-Uni, où les dix émissions les plus populaires dans ces pays sont des productions nationales. Leur industrie n'est pas plus rentable que la nôtre. Elle a besoin du soutien structurel et de l'aide financière du gouvernement, mais les dix émissions les plus populaires sont des productions nationales. Les gens veulent voir leurs propres émissions.
Les Canadiens aussi. Nous voulons voir nos propres émissions à la télévision. Mais comme il n' y a pas suffisamment d'argent dans le système pour mettre en place un modèle économique simple et adéquat, nous devons compter sur l'aide du public.
Le président: Merci.
Mme Minna et ensuite M. Loubier.
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, monsieur le président.
D'abord, je tiens à dire que je suis un ardent défenseur du monde des arts, de l'édition, ainsi de suite. En ce qui me concerne, un pays qui n'a pas de politique culturelle bien arrêtée et une industrie des arts et de la culture bien ancrée est un pays sans âme. Je suis d'origine italienne et permettez-moi de vous dire que le pays où je suis née ne ménage aucun effort à ce chapitre.
Le problème au Canada, c'est que les gens ne se rendent pas compte que l'industrie des arts et de la culture a été une importante source de création d'emplois au cours de la dernière décennie. C'est, aujourd'hui, une industrie énorme. Elle crée sans doute plus d'emplois que la plupart des autres industries, mais le gouvernement ou le public ne s'en rendent pas vraiment compte. Pour eux, investir dans les arts, c'est investir à perte. Ils voient cela comme une oeuvre de charité, une démarche qui s'impose pour lutter contre l'influence négative des Américains. Ils ne voient pas cette industrie comme un moteur économique. Or, il est parfois nécessaire de faire ce genre d'investissement.
Ma question comporte deux volets. Que fait l'industrie pour faire passer son message? Avez-vous une stratégie commune de communication? Nous devrions peut-être collaborer avec vous sur ce plan. Est-ce que l'exode des cerveaux vers les États-Unis, auquel on a fait allusion plus tôt, est entièrement attribuable à un manque de possibilités? Au fait que Hollywood se trouve aux États-Unis, que c'est un endroit fastueux où l'on peut réaliser des millions? C'est un phénomène inévitable, dans une certaine mesure.
Ce qui m'inquiète avant tout, c'est le manque de visibilité de l'industrie, le fait qu'on ne la considère pas comme un puissant moteur économique, facteur qui est tout aussi important que les investissements du secteur privé dans celle-ci. Je la financerais de toute façon, même si elle ne créait pas d'emplois, mais c'est une tout autre question.
 (1205)
M. Thor Bishopric: Merci.
Sur le plan économique, et je ne fais allusion qu'aux films et à la télévision, l'industrie génère un chiffre d'affaires de 5 milliards de dollars. Gordon et moi avons rencontré M. Martin l'an dernier—avant qu'il ne devienne premier ministre—au cours d'une réunion privée. Il nous a dit qu'à l'époque où il était ministre des Finances, aucun autre investissement n'était jugé aussi rentable pour le gouvernement que celui consacré à l'industrie du film et de la télévision. En effet, chaque dollar investi en rapportait six. L'industrie est un véritable moteur économique.
Je sais qu'au Sénat et dans le milieu décisionnaire à Ottawa, on commence à se rendre compte à quel point l'industrie sert à promouvoir l'image du Canada et à favoriser les exportations canadiennes. Elle nous apporte beaucoup sur le plan économique.
Pour ce qui est de l'exode des talents ou des cerveaux, nous ne dissuadons pas les artistes indépendants d'aller travailler aux États-Unis ou ailleurs dans le monde. En fait, les acteurs ont toujours fait preuve d'une grande souplesse. Comme l'a indiqué Gordon, ce matin, nous sommes des bohémiens. Nous aimons penser que le Canada est notre pays et que nous aurons toujours la possibilité d'y travailler, mais souvent, nos membres doivent s'exiler ailleurs.
Nous encourageons cet exode, dans la mesure où les artistes sont libres de gagner leur vie. Nous les encourageons également à revenir au Canada, surtout lorsqu'ils sont mieux connus et plus populaires, afin qu'ils puissent aider l'industrie canadienne, la mettre davantage en valeur. Nous essayons désespérément de bâtir un système de vedettariat dans ce pays.
Nous avons, bien sûr, des vedettes au Canada, mais nous devons faire encore plus sur le plan de la commercialisation. Nous devons susciter davantage d'intérêt. Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous devons, à tout le moins, avoir un espace protégé dans le marché pour que les émissions canadiennes puissent être vues par les Canadiens. Une fois cet objectif atteint, les Canadiens s'intéresseront encore plus à nos vedettes.
L'hon. Maria Minna: Vous avez raison.
Est-ce qu'il me reste encore du temps?
Le président: Bonne question. Je ne sais pas. Il vous reste 10 secondes. Si je vous permets de poser une question, le témoin pourra y répondre.
L'hon. Maria Minna: D'accord. Je serai brève.
Concernant l'élimination de la TPS sur les livres, souhaitez-vous que cette mesure s'applique aux livres canadiens ou aux livres étrangers? Est-ce qu'elle doit s'appliquer à tous les livres ou seulement à ceux qui sont publiés ici? C'est le principe d'équité qui m'intéresse. Voulez-vous qu'on élimine la taxe sur tous les livres ou seulement sur les livres canadiens?
M. Jack Wayne: On ne peut pas faire de distinction entre les deux. Les livres, une fois sur les tablettes, doivent être assujettis aux mêmes règles du jeu. Livrer concurrence à un produit multinational ne nous pose aucun problème. Ce que nous aimerions faire, c'est publier des ouvrages canadiens dans le cadre du même régime et avec des règles du jeu qui sont les plus équitables possible. Compte tenu de la taille de notre marché, nous avons besoin de ces subventions et de l'aide que nous recevons du ministère du Patrimoine canadien, deux facteurs qui contribuent à équilibrer les règles du jeu.
Éliminez la TPS, puisque nous sommes prêts à vendre beaucoup de livres.
 (1210)
Le président: D'accord. Merci.
[Français]
Monsieur Kotto, vous remplacez M. Loubier.
M. Maka Kotto: Merci, monsieur le président.
On cherchait plus tôt un argument fort pour défendre la culture. On a évoqué le volet économique, qui est en effet un argument très fort. Ainsi, il est démontré qu'aujourd'hui, la culture rapporte plus d'argent qu'elle n'en fait perdre. Quiconque est sensé ne peut remettre cela en question. La culture ne s'inscrit cependant pas seulement dans l'espace économique qui, comme on le disait plus tôt, génère énormément d'emplois. Elle s'inscrit surtout dans l'espace psychique, où se définissent les comportements générés par des modèles de référence, de valeurs et d'identification.
Or, il faut se demander ce qu'il restera de la consommation, des comportements en regard de la consommation et surtout de l'identité quand nos jeunes, d'ici une, voire deux générations, seront pris dans le piège de l'acculturation. Ils seront alors, en quelque sorte, « étatsunisés ».
Cela me fait dire qu'il est impératif de soutenir la démarche voulant que le Canada assure une position solide dans le cadre de la négociation qui se tient en ce moment à l'UNESCO relativement à l'avant-projet de la Convention sur la protection de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques.
Cette question n'a pas été soulevée ce matin. C'est un sujet dont je n'entends pas beaucoup parler au Canada anglais, mais dont on parle beaucoup au Québec. Il y a là un enjeu majeur. Ce n'est pas par hasard si, autour de la table de négociation, les États-Unis sont en train de conclure des ententes bilatérales avec certains États à l'insu d'autres États.
Il y a là un enjeu économique et identitaire majeur. Je n'ai entendu personne en parler. Quelqu'un a-t-il quelque chose à dire à ce sujet?
[Traduction]
Le président: Nous allons entendre M. Moore, et ensuite Mme Parker.
M. Christopher Moore: J'ai eu l'occasion, il y a quinze jours, dans le cadre de la Semaine canadienne du livre pour enfants, de visiter un grand nombre d'écoles et de bibliothèques à Montréal et à Québec, de parler de l'histoire du Canada, des écrivains canadiens. Je peux vous dire que l'on sent, chez les jeunes, un certain enthousiasme. S'ils ont accès aux livres, ils vont les lire. Il était merveilleux de voir les enfants de troisième, quatrième et sixième années s'intéresser à l'histoire du Canada, et aussi raconter leurs propres histoires.
Pour ce qui est de la diversité culturelle, on revient à la réponse qui a été donnée à la première question de M. Harris. Il voulait savoir si le financement de la culture relevait du protectionnisme, ou constituait des subventions versées aux artistes. Le financement des arts et de la culture au Canada favorise la diversité et la liberté de choix. Nous avons dit, à quelques reprises, que nous sommes les voisins des États-Unis. Or, je pense qu'en raison de la mondialisation des communications, tout le monde aujourd'hui est voisin. Et c'est une bonne chose, car il existe, dans le monde, une immense richesse culturelle. Je consomme des produits qui viennent de divers pays, mais nous devons, nous aussi, apporter notre contribution. Il est difficile, pour le marché, d'offrir ce genre de choix et de diversité sur le plan culturel. Ce n'est pas un choix pour nous, les artistes, mais un choix pour les Canadiens ou pour le monde. Plus nous appuyons la culture et la diversité canadienne dans un monde où les frontières et le protectionnisme ont tendance à disparaître, plus nous en profitons en tant que Canadiens, et plus grande est notre contribution au reste du monde.
Voilà ce que les Canadiens tirent de la culture, de l'aide que consacre le gouvernement à ce secteur, à la diversité culturelle.
Le président: Madame Parker, brièvement. Nous allons ensuite entendre M. Bishopric.
Mme Maureen Parker: Je voulais tout simplement dire que le Canada anglais appuie de manière générale le traité sur la diversité culturelle. Si je le sais, c'est parce que je siège au conseil de la CDC. Il faut à tout prix éviter que la culture fasse partie des négociations commerciales. C'est pour cette raison que nous sommes tous ici, parce que nous croyons que cette industrie est distincte. Elle apporte beaucoup sur le plan financier et constitue un très bon investissement, mais elle est également essentielle à notre souveraineté culturelle.
Le président: Monsieur Bishopric.
M. Thor Bishopric: Merci.
Nous n'avons pas eu le temps d'aborder le sujet dans notre déclaration, mais il en est question dans notre mémoire et nous croyons aussi qu'elle est très importante.
Je tiens à préciser que le Canada a soumis une proposition à la FIA, la Fédération internationale des acteurs, lors du congrès que nous avons organisé, il y a quelques mois. Cette proposition a été appuyée, à l'unanimité, par 100 unions des artistes de par le monde qui se disent en faveur de ce nouvel instrument sur la diversité culturelle. Le Canada continue de faire preuve de leadership dans ce domaine. Nous avons clairement indiqué dans notre mémoire que le gouvernement devrait poursuivre ses efforts en ce sens et faire en sorte que cette proposition devienne réalité par l'entremise de l'UNESCO.
Merci.
 (1215)
Le président: Merci.
Je tiens à remercier tous les témoins d'être venus.
Je constate qu'il n'y a pas de chiffres dans certains mémoires. Je trouve cela malheureux, car le comité des finances aime bien voir des chiffres. Certains en ont fournis, d'autres pas. Certains groupes demandent le même financement ou des fonds additionnels. Vous pouvez toujours nous soumettre d'autres documents, mais pas trop, parce que nous en recevons beaucoup. Soyez précis. Si vous avez établi le coût de vos propositions—certains groupes ont réclamé l'établissement d'une moyenne—ou si vous avez des chiffres, nous aimerions bien les voir. Nous sommes prêts à les examiner.
Encore une fois, je vous remercie d'avoir pris le temps de nous rencontrer. Je sais que vous êtes fort occupés. La discussion—du moins en ce qui me concerne—était fort intéressante.
Nous allons suspendre la réunion pendant cinq minutes.
 (1216)
 (1224)
 (1225)
Le président: Bonjour à tous. Je tiens à vous remercier de comparaître devant le comité.
Comme vous le savez, il y a beaucoup de groupes et d'associations qui veulent témoigner ou faire des déclarations. Je vais vous demander de vous en tenir à des exposés de cinq minutes... J'essaierai de ne pas vous interrompre. Quand vos cinq minutes seront sur le point d'être écoulées, je vous ferai signe. Je vous prie de respecter la limite de cinq minutes, parce qu'il y a plus de neuf groupes qui veulent se faire entendre. Nous avons jusqu'à 14 heures environ, et les députés souhaiteraient vous poser des questions.
J'ai, ici, une liste des groupes. Nous allons d'abord entendre
[Français]
Association des éditeurs de magazines canadiens.
[Traduction]
Monsieur Jamison.
M. Mark Jamison (président, Association des éditeurs des magazines canadiens): Merci. Je suis heureux de comparaître devant le comité.
Je m'appelle Mark Jamison, et je représente l'Association des éditeurs de magazines canadiens. Je suis accompagné de Robert Goyette, membre du conseil et ancien président de Magazines du Québec, principale association des magazines québécois.
Je tiens à préciser, au nom de nos 300 membres, que nous représentons environ 90 p. 100 des magazines en circulation au Canada, ce qui équivaut à environ 600 millions de copies ou 28,8 milliards de pages de contenu canadien. L'AEMC défend les intérêts des éditeurs de magazines de consommation et spécialisés.
Nous avons déposé un mémoire auprès du comité. Nous comptons, cet après-midi, vous en exposer les points saillants. Je vais céder la parole à Robert Goyette, qui va vous parler du programme d'aide aux publications.
 (1230)
[Français]
M. Robert Goyette (Reader's Digest, Association des éditeurs des magazines canadiens):
Le comité nous a demandé quelles devaient être les priorités en termes de dépenses. À notre avis, la priorité doit être accordée à des enveloppes budgétaires prévisibles. Dans le secteur culturel, les politiques de soutien ont pour but de créer des incitatifs visant à atteindre des objectifs précis. Dans l'industrie du magazine, ces objectifs sont de créer plus de contenu canadien et de rendre ce dernier accessible au plus grand nombre possible de Canadiens. Ces incitatifs sont efficaces dans la mesure où les éditeurs de magazines peuvent en tenir compte dans leurs modèles d'affaire et travailler de concert avec le gouvernement à l'atteinte des objectifs. Ils sont inefficaces quand ils sont aléatoires et sujets à de nombreux et fréquents changements.
Je crois que le Programme d'aide aux publications est un bel exemple d'efficacité. Il s'agit d'un programme de Patrimoine canadien qui nous aide à défrayer les coûts des envois postaux des magazines canadiens, des journaux communautaires et de la presse agricole pour s'assurer que la perspective uniquement canadienne qu'on trouve dans ces publications soit accessible à tous les Canadiens partout au pays et à un prix abordable. Les modalités du programme sont un modèle d'efficience administrative. Les principales raisons en sont les enveloppes budgétaires prévisibles, des objectifs clairs et des frais administratifs bas.
Le marché canadien du magazine est ouvert à la concurrence internationale. Plus de 5 000 magazines sont vendus dans ce pays. Comme d'autres secteurs culturels tels que l'industrie du film, la télédiffusion et le livre, nous devons concurrencer un immense marché américain, et les publications étrangères dominent notre marché. Le défi est de taille. Les magazines étrangers occupent plus de 90 p. 100 de l'espace dans les présentoirs de magasins et de kiosques au Canada. Sans le Programme d'aide aux publications et le service de distribution nationale de Postes Canada, la situation serait la même pour les abonnements, mais ce n'est pas le cas, heureusement, et le contraste est frappant.
Quelque 70 p. 100 des abonnements vendus au Canada aujourd'hui sont pour des magazines canadiens, mais parce que les magazines canadiens dominent le marché des abonnements, leur part de marché de l'industrie du magazine au pays est de 41 p. 100, même quand on prend en considération les ventes en kiosque. Le programme aide à livrer plus de 175 millions d'exemplaires de magazines chaque année, chacun de ces exemplaires comportant plus de 80 p. 100 de contenu canadien conçu par des Canadiens.
Nous croyons fermement que le Programme d'aide aux publications atteint ses objectifs, en raison surtout de sa nature prévisible. Le programme fait en sorte que des auteurs, des photographes et des illustrateurs canadiens parlent aux Canadiens en dépit des obstacles géographiques et de la concurrence étrangère. Le Programme d'aide aux publications a fait l'objet d'une révision complète par le ministère du Patrimoine récemment et est maintenant un programme plus efficace et mieux ciblé.
Une nouvelle formule récompense l'efficacité, ce qui aura pour conséquence de rentabiliser l'investissement du gouvernement. Les critères d'admissibilité ont été élargis pour permettre à un plus grand nombre de publications d'en profiter, et la formule cible mieux les petites publications qui auront droit proportionnellement à un soutien accru. Nous croyons que le programme doit servir de modèle en matière d'atteinte des objectifs dans le domaine des politiques culturelles. Il y a cependant de nouveaux défis à l'horizon qui mettent en péril le succès de ce programme.
Premièrement, Postes Canada augmente ses tarifs à une vitesse alarmante. Ces augmentations dépassent de loin celles de tous les autres fournisseurs de l'industrie et se situent bien au-delà du taux d'inflation. L'augmentation cumulative des tarifs postaux au cours des six dernières années, par exemple, dépasse les 60 p. 100 pour un magazine de 350 grammes.
L'Association des éditeurs de magazines canadiens reconnaît l'importance de services efficaces et rentables pour Postes Canada, mais elle a répété à cette société que l'industrie ne pouvait en aucun cas continuer d'absorber des hausses aussi importantes. Cela affecte aussi le ministère des Finances. Le coût du Programme d'aide aux publications augmente lui aussi à cause des hausses de tarifs postaux puisque le programme rembourse un pourcentage fixe du coût des envois postaux. Ainsi, alors que Postes Canada augmente ses tarifs, l'atteinte des objectifs du programme en matière de soutien à l'industrie culturelle diminue en importance.
Deuxièmement, le succès même du programme a engendré des coûts plus élevés. Avec les critères d'admissibilité élargis, plus de magazines participent au programme, et les coûts des envois postaux augmentent. Nous prévoyons déjà que la croissance des demandes au cours de la prochaine année fiscale excédera les budgets alloués. Si le budget du PAP reste fixe, la valeur de son aide s'amoindrira, nous ne pourrons plus compter sur le programme de manière prévisible et il sera plus difficile pour les éditeurs d'en tenir compte dans leurs prévisions de croissance. Pour ces raisons, nous incitons le comité à tenir compte de nos recommandations.
Le gouvernement du Canada devrait augmenter le budget du Programme d'aide aux publications afin que le PAP puisse répondre au développement du lectorat des magazines canadiens tout en respectant sa mission première: offrir aux Canadiens des produits culturels canadiens à prix abordable.
 (1235)
Le gouvernement du Canada doit obtenir de Postes Canada que les tarifs des postes-publications restent abordables en échange de l'exclusivité de la distribution des magazines financés par le PAP. Cela pourrait être fait en limitant les hausses que Postes Canada peut imposer aux publications appuyées par le PAP.
En terminant, nous aimerions remercier le comité de nous avoir entendus. Le budget fédéral est un document important pour tous les Canadiens, et ces consultations permettent aux Canadiens d'avoir voix au chapitre au moment de sa création.
Merci de votre attention. Nous serons ravis de répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Goyette. Nous passons à l'Alliance des arts médiatiques indépendants.
[Traduction]
M. Peter Sandmark (directeur national, Alliance des arts médiatiques indépendants): Bonjour. Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.
Je vais demander à notre présidente, Linda Norstrom, de dire quelques mots au sujet de l'association.
Ms. Linda Norstrom (présidente, Alliance des arts médiatiques indépendants): L'Alliance des arts médiatiques indépendants est une association nationale qui représente 82 organismes sans but lucratif et indépendants qui oeuvrent dans les domaines du film, de la vidéo et des nouveaux médias, autant en production qu'en distribution et diffusion partout au Canada. Nous représentons plus de 12 000 artistes.
Nous comptons des organisations membres dans les 10 provinces, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest. Au cours des trois dernières années, nous avons accueilli dans nos rangs neuf organisations autochtones spécialisées dans les arts médiatiques.
Nous représentons des organisations locales sans but lucratif qui sont dirigées par des artistes. Elles appliquent la politique de la porte ouverte, ce qui veut dire que les Canadiens peuvent aller les rencontrer, apprendre à utiliser leur équipement et créer leurs propres oeuvres audiovisuelles et en nouveaux médias.
Patrimoine Canada a reconnu l'importance que revêtent les secteurs du film, de la vidéo et des nouveaux médias comme sources de talent pour l'industrie canadienne du film et de la télévision. En tant que centres de formation sans but lucratif, nos organisations membres sont, par la force des choses, tributaires des subventions du gouvernement.
De nombreux artistes canadiens qui travaillent pour des organismes d'arts médiatiques sont reconnus pour leur excellence dans les cercles artistiques internationaux. Pour certains observateurs, les arts médiatiques au Canada constituent une forme d'art à part entière, en raison de l'innovation dont fait preuve le Canada dans ce domaine. De nombreux artistes canadiens de renommée internationale sont mieux connus à l'étranger qu'au Canada. Cette situation peut être attribuable au fait que l'infrastructure des arts au Canada est fragile. Elle a besoin de financement de base plus stable.
Je vais céder la parole à Peter, qui va vous exposer les grandes lignes de notre mémoire.
M. Peter Sandmark: D’abord, pour répondre à la première question sur les priorités fiscales et les dépenses, nous aimerions que le gouvernement fasse de la culture et des arts une priorité. Dans notre mémoire, nous montrons clairement que les organisations artistiques sont des « moteurs de croissance » pour l’industrie des arts au Canada puisqu’elles jouent un rôle essentiel dans l’allocation des ressources destinées à la création et à la présentation d’œuvres artistiques canadiennes. Évidemment, à l’instar de nombreux témoins ce matin, nous croyons que les investissements du gouvernement dans les arts renforcent l’économie et entraînent la création d’emplois et des retombées économiques. D’ailleurs, d’après Statistique Canada, ces investissements totalisent environ 7 milliards de dollars, ce qui se traduit par une contribution de 33 milliards de dollars au PIB du Canada; on constate donc leur effet multiplicateur.
Même si les arts et la culture sont de bons investissements, il y a d’autres raisons de soutenir ce secteur. Il y a avant tout l'influence qu'exercent les arts sur notre société et l’amélioration de la qualité de vie de la population canadienne.
Nous voyons que la culture a sa place parmi les priorités du gouvernement, comme dans les villes. La culture rend la vie urbaine plus agréable. Elle attire des gens et des employeurs, puisque les travailleurs veulent vivre dans des villes qui offrent beaucoup d’activités culturelles.
Les peuples autochtones sont également une priorité. Le Conseil des Arts du Canada est dans le peloton de tête en ce qui a trait à la création de programmes qui tiennent compte des besoins et des pratiques des artistes autochtones. Par conséquent, si vous voulez agir dans ce domaine, il faut allouer des ressources au Conseil des Arts du Canada.
La notion de péréquation, si je la comprends bien, vise à garantir à tous les Canadiens l’égalité d’accès aux services. Ce n’est pourtant pas le cas des artistes canadiens car les programmes de financement des arts varient grandement d’une province à l’autre. Le Conseil des Arts du Canada est parfois la seule source de financement d’artistes et d’organisations artistiques dans certaines régions. Si vous voulez remédier à cette situation, vous devez augmenter le niveau de soutien alloué au Conseil des Arts du Canada.
Dans notre mémoire, nous recommandons de renouveler le programme Un avenir en art, qui fait partie de l’enveloppe budgétaire du ministère du Patrimoine canadien pour la culture.
J’aimerais aussi parler d’une étude qui a été commandée par le ministère du Patrimoine canadien et le Conseil des Arts du Canada, à laquelle nous avons aussi participé. Une des priorités que l’étude a révélée est la nécessité de financer la présentation des arts. Le manque de financement dans ce domaine, particulièrement en ce qui concerne les arts médiatiques, explique peut-être pourquoi beaucoup d’artistes s’illustrent davantage à l’étranger qu’au Canada. C’est justement la raison d’être du programme Présentation des arts Canada, qui relève d’Un avenir en art.
Les locaux revêtent aussi, évidemment, une grande importance. Le programme Espaces culturels Canada d’Un avenir en art a été mis sur pied pour répondre aux besoins à ce chapitre.
Nous recommandons également dans notre mémoire de doubler le financement actuel du Conseil des Arts du Canada. Nous proposons 150 millions de dollars, ce qui représente environ 2,5 p. 100 du surplus de 5,9 milliards de dollars annoncé dans le Globe and Mail et qui servira aux priorités du gouvernement en matière de dépenses.
Nous exhortons ainsi le gouvernement à faire des arts une priorité. Même une augmentation de 50 millions de dollars du financement alloué au Conseil des Arts du Canada, qui ne représenterait que 1 p. 100 du surplus, donnerait un excellent coup de main à l’industrie des arts.
Que nous ont légué les cultures passées? Si nous pensons à la Renaissance, ce sont les arts et non pas les budgets équilibrés qui nous viennent à l’esprit, et ce grâce à des marchands, comme les Médicis, qui ont été des mécènes. De nos jours, les artistes sont soutenus par les gouvernements; nous vous demandons donc de reconnaître les arts comme un bien public qui doit être financé par l’État.
Je vous remercie beaucoup de nous avoir écoutés. Si vous avez des questions, nous serons ravis d’y répondre.
 (1240)
Le président: Merci.
J’aimerais clarifier quelque chose au sujet des sommes dont vous avez parlé. Est-ce 150 millions de dollars pour le Conseil des Arts du Canada et 150 millions de dollars pour le programme Un avenir en art?
M. Peter Sandmark: Si j’ai bien compris, le budget actuel prévoit du financement pour le programme Un avenir en art. Je ne sais pas ce que vous envisagez pour l’année prochaine, mais si cette somme est déjà dans le budget, notre proposition ne devrait pas entraîner d’autres coûts puisqu’il s’agira simplement de conserver le même niveau de financement. Nous proposons 150 millions de dollars pour le Conseil des Arts du Canada, ce qui comprend les 25 millions de dollars du programme Un avenir en art.
Le président: D’accord. Merci.
Notre prochain témoin est M. Conradi, du Canadian Arts Summit.
M. Axel Conradi (président, Conseil d'administration, Sommet canadien des Arts): J’aimerais d’abord remercier le président et les membres du comité de nous recevoir aujourd’hui et de nous donner l’occasion de nous exprimer dans le cadre des consultations prébudgétaires.
Le Canadian Arts Summit est une association bénévole regroupant 40 des plus grandes organisations artistiques canadiennes sans but lucratif, dont des troupes de théâtre, des musées et des galeries d’art. Nous espérons aujourd’hui vous convaincre que les arts méritent d’occuper une plus grande place dans les priorités du gouvernement et que le temps est venu pour celui-ci de réinvestir dans ce domaine et d’offrir une nouvelle vision qui, selon nous, doit reconnaître l’importance centrale des arts dans l’identité canadienne, la nécessité de créer des programmes qui facilitent l’accès aux arts pour tous les Canadiens et le rôle plus marqué que doivent jouer les arts dans notre système d’éducation.
À cette fin, nous exhortons le gouvernement du Canada à doubler l’aide financière destinée aux organisations artistiques sans but lucratif, aux artistes et aux musées, pour qu’elle s’élève à 10 dollars par habitant. Pour ce faire, nous proposons que le Conseil des Arts du Canada ait un budget annuel de 288 millions de dollars et que 32 millions de dollars soient alloués au programme d’aide aux musées, ce qui représente 1 dollar par habitant. Grâce à cette augmentation, l’aide gouvernementale au Conseil des Arts du Canada s’élèverait à environ 9 dollars par habitant, ce qui est bien en dessous du financement consenti par l’Écosse, l’Angleterre, l’Irlande du Nord et de nombreux pays d’Europe.
Les nouveaux programmes et l’excellence artistique découlant de ces investissements gouvernementaux nous aideront grandement dans nos efforts pour solliciter plus de financement auprès de sources non gouvernementales. Ils auront un impact encore plus retentissant sur la qualité de vie en milieu urbain, la vitalité économique et la réputation du Canada à l’étranger. Pour être prospères, les organisations artistiques du Canada ont besoin d’obtenir du financement pluriannuel stable, davantage de ressources par la création de fondations et une aide ponctuelle pour les projets d’immobilisations ainsi que d’avoir un plus grand rayonnement international. Le statut fiscal des artistes doit aussi être clarifié.
Voilà pourquoi nous demandons au gouvernement fédéral de renouveler le financement du programme Un avenir en art, de préférence sur une base pluriannuelle; d’éliminer l’impôt sur les gains en capital pour les dons de valeurs mobilières afin d'encourager la philanthropie; d’adopter de nouvelles mesures fiscales qui reconnaissent le statut de travailleur autonome des artistes et d’accroître à 20 millions de dollars le financement accordé aux tournées artistiques internationales du ministère des Affaires étrangères. Nous croyons que ces mesures pourraient grandement aider le gouvernement du Canada à atteindre certains des objectifs qu’il s’est fixés dans le discours du Trône, prononcé plus tôt cette année, c’est-à-dire de renforcer nos fondements sociaux, de doter le Canada d’une économie tournée vers le XXIe siècle et de lui donner un rôle influent qui suscite notre fierté dans le monde.
J’aimerais parler davantage de ces objectifs.
Un sondage sur les arts, mené en 2000 par la firme Ipsos-Reid, a révélé que 93 p. 100 de la population canadienne estime que les arts contribuent à la vitalité de leurs collectivités. D’ailleurs, le mode de vie des Canadiens en fait foi. En 2001, 36 p. 100 des ménages canadiens, y compris un sixième des ménages les plus pauvres, ont dépensé 815 millions de dollars pour assister à des spectacles. Quarante pour cent des parents ont assisté à ces événements en compagnie de leurs enfants et 44 p. 100 ont visité en famille des musées. On achète plus de billets pour des pièces de théâtre que pour des matchs de hockey.
Dans l’économie du savoir d’aujourd’hui, les personnes instruites à la recherche d’un emploi veulent de plus en plus s’installer et travailler dans des collectivités riches sur le plan culturel. En outre, une étude de Richard Florida, professeur à l’université Carnegie-Mellon, démontre clairement que les collectivités diversifiées et riches culturellement sont les plus susceptibles de générer les emplois de demain qui feront appel à l’intelligence créative. Le titre de son étude est plutôt rigolo, mais très éloquent : « The Rise of the Creative Class: Why cities without rock bands and gays are losing the economic development race », ou autrement dit, « la montée de la classe créative : pourquoi les villes sans groupes rock ni communautés homosexuelles perdent la course du développement économique ».
La fierté commence par la connaissance de soi, et ce sont les arts qui nous permettent de partager cette découverte.
 (1245)
Les arts nous définissent en tant que peuple, nous aident à trouver notre place dans le monde et à rehausser notre réputation internationale.
Pour illustrer ce point, il me suffit de nommer Ben Heppner, Richard Margison, la Compagnie d’opéra canadienne, le festival d’Edimbourg, Michel Tremblay, Robert Lepage, Billy Bishop Goes to War, Charles Dutoit et l’Orchestre symphonique de Montréal, Evelyn Hart et le Royal Winnipeg Ballet, ou Karen Kain et le Ballet national.
Les arts jouent un rôle primordial dans l’amélioration de la qualité de vie au sein de nos collectivités, le développement économique, le tourisme, l’apprentissage, la créativité et l’établissement de notre identité en tant que peuple hétérogène.
D’après nous, la solution la moins coûteuse et qui offre le meilleur rendement possible au gouvernement est le réinvestissement dans une nouvelle vision des arts, dans l’intérêt du mieux-être de la population canadienne et du tissu social d’un pays dont la diversité s’accroît rapidement.
Merci.
Le président: Merci.
[Français]
Passons maintenant au prochain groupe, l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec et à son représentant, M. Bouchard.
M. Jacquelin Bouchard (président , comité exécutif, Association des producteurs de films et de télévision du Québec):
Bonjour. Mon nom est Jacquelin Bouchard. Je suis président du conseil d'administration de l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec. Je suis accompagné par Nathalie Leduc, directrice du secteur financement.
Nous aimerions d'abord remercier le Comité permanent des finances d'avoir accepté de nous recevoir et d'entendre la présentation d'une partie de notre mémoire, aujourd'hui. Rappelons, d'entrée de jeu, que l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec représente plus de 100 producteurs de films et de télévision au Québec. Nous sommes donc extrêmement représentatifs de la composante québécoise de la production canadienne.
Nous avons identifié, pour notre brève présentation, quatre priorités quant au prochain budget. Nous allons très sommairement vous les présenter.
Notre première priorité est de maintenir les budgets alloués aux différents organismes publics. Dans le cadre de la révision de ses dépenses courantes et malgré des surplus records de 8,9 milliards de dollars pour l'exercice en cours, le gouvernement a demandé à tous ses ministères et agences, dont Patrimoine canadien, Téléfilm, Radio-Canada et l'Office national du film, de réduire leur budget de 5 p. 100 sur les deux prochaines années. Ceci représente donc une coupure de 134 millions de dollars pour Patrimoine canadien, dont 6,5 millions de dollars pour Téléfilm Canada, ce qui pourrait également affecter le budget du Fonds canadien de télévision.
Les réductions budgétaires de Radio-Canada et de l'Office national du film auront également un impact important sur le secteur de la production indépendante. Dans un contexte où, depuis plusieurs années, les budgets fédéraux n'ont pas augmenté pour notre secteur et dans lequel les coûts d'inflation ne sont jamais pris en compte, une telle coupure réduira notre capacité de produire et de créer des emplois en plus de fragiliser encore davantage les artistes, artisans et entreprises de production en cinéma et télévision.
Nous respectons et nous apprécions la détermination du gouvernement à présenter des budgets équilibrés ou excédentaires et à allouer une partie de ces excédents au remboursement de la dette. En fait, nous l'en remercions. Nous croyons cependant que les sommes allouées au secteur de la culture ne devraient pas faire l'objet de coupures étant donné les retombées extrêmement positives en termes d'emplois, de volume de production et compte tenu des succès incomparables obtenus cette année par les productions télévisuelles et cinématographiques.
 (1250)
Mme Nathalie Leduc (directrice, secteur financement, Association des producteurs de films et de télévision du Québec): Notre deuxième priorité est l'amélioration du Fonds du long métrage du Canada. L'année exceptionnelle que vient de vivre le cinéma québécois témoigne du succès des politiques de financement mises en place avec le Fonds du long métrage du Canada. Ces succès dépassent même les prévisions les plus optimistes avec l'atteinte inégalée de 19 p. 100 des recettes guichet canadiennes de langue française et avec l'excellente performance de quelques films québécois de langue anglaise.
L'attribution de l'Oscar pour le meilleur film étranger au long métrage Les invasions barbares, produit par la compagnie Cinémaginaire est l'aboutissement de nombreux efforts et prouve la nécessité de continuer à soutenir le cinéma afin d'en récolter tous les succès.
Les fonds dédiés aux longs métrages francophones souffrent toutefois de sous-financement. En cinq ans, les sommes disponibles pour le cinéma de langue française sont passées de 22,9 à 22,4 millions de dollars. Attirés par ces succès, plusieurs partenaires financiers internationaux aimeraient bien partager les secrets de ces succès en réalisant des projets de coproduction.
Rappelons que le long métrage d'animation Les Triplettes de Belleville est une coproduction entre la Belgique, la France, le Canada et le Royaume-Uni et qu'il a également été mis en nomination dans deux catégories pour les Oscars, dont celle de la meilleure musique, qui fut composée et interprétée par des Québécois.
Bien que tous ces partenaires financiers contribuent au financement de longs métrages, les fonds canadiens sont limités et ne permettent la production que de quelques projets par année. Nous demandons au gouvernement de reconnaître les succès exceptionnels de l'industrie cinématographique en augmentant les fonds disponibles pour l'enveloppe de langue française du Fonds du long métrage, lui permettant de passer de 22,4 à 25 millions de dollars. Ces fonds permettraient de contribuer à financer des longs métrages et de préparer les succès de l'avenir.
Il y a également le long métrage de type documentaire qui n'a actuellement pas accès aux Fonds du long métrage du Canada. Nous demandons une enveloppe supplémentaire de 1,5 millions de dollars spécifiquement réservée aux longs métrages documentaires, et nous demandons qu'elle soit accessible aux deux marchés linguistiques.
M. Jacquelin Bouchard: Notre troisième priorité est d'améliorer le programme de crédit d’impôt pour production cinématographique ou magnétoscopique canadienne.
Les sommes versées aux entreprises sous forme de crédits d'impôt ont un effet structurant pour les maisons de production. En effet, ce sont ces sommes qui permettent de financer les activités de recherche et de développement menant à l'élaboration d'oeuvres de qualité.
Rappelons que la moindre fluctuation du volume de production se reflète immédiatement dans le nombre d'emplois créés directement et indirectement par l'industrie. En 2002-2003, la production québécoise a totalisé 1,45 milliard de dollars, une hausse de 18 p. 100 par rapport à l'année précédente. L'industrie soutient 39 200 emplois, ce qui représente également une hausse de 18 p. 100.
Le projet de simplification du programme, amorcé en 2000 avec le processus de consultation de l'industrie, prenait fin en novembre 2003 avec l'annonce de mesures comprises dans la proposition ayant obtenu l'adhésion de tous les participants, soit l'APFTQ, l'ACPFT, le ministère du Patrimoine canadien et le ministère des Finances. Nous remercions d'ailleurs le gouvernement pour la mise en place de ces mesures, qui sont venues clarifier certaines exigences administratives et qui ont résulté en une hausse du taux effectif du crédit à 15 p. 100 pour les productions présentant des dépenses élevées en main-d'oeuvre.
La proposition comportait également une hausse du taux de crédit d'impôt à la production de 2 p. 100, qui n'a toutefois pas été mise en application par le gouvernement. Nous demandons donc au gouvernement de considérer une hausse de 2 p. 100 du taux du crédit afin de continuer à créer des incitatifs pour la production canadienne. Des milliers d'emplois, actuels et nouveaux, en dépendent.
Mme Nathalie Leduc: Je présenterai maintenant notre quatrième et dernière priorité.
Le budget de 2004 comprenait un renouvellement sur deux ans de la contribution du gouvernement au Fonds canadien de télévision, donc pour 2004-2005 et 2005-2006, et ce, au même niveau historique de 100 millions de dollars.
Nous félicitons le gouvernement pour cet engagement, mais nous croyons que celui-ci devrait se faire sur une base permanente afin d'assurer encore plus de stabilité à l'industrie. Le budget gouvernemental alloué au fonds doit donc être renouvelé sur un plus long terme et pour une somme au moins équivalente au niveau historique. Il ne faudrait surtout pas que les réductions budgétaires envisagées viennent réduire la portée des efforts du gouvernement dans le rétablissement du budget du fonds à son niveau historique.
Je vous remercie.
 (1255)
Le président: Merci.
Le prochain groupe est la Directors Guild of Canada, la Guilde canadienne des réalisateurs.
Madame Twigg.
[Traduction]
Mme Monique Twigg (directrice nationale de la Recherche et des Politiques, La Guilde canadienne des réalisateurs): Bonjour, je m’appelle Monique Twigg et je suis la directrice de la Recherche et des Politiques de la Guilde canadienne des réalisateurs.
Comme le mentionne notre mémoire, la Guilde canadienne des réalisateurs représente plus de 3 800 personnes dans les domaines de la création et de la logistique de l’industrie cinématographique et télévisuelle du Canada. Depuis plus de 40 ans, nous contribuons aux politiques relatives à cette industrie. Nous sommes très heureux de participer aux présentes consultations.
Le Comité des finances nous a demandé quelles devraient être les priorités budgétaires et les mesures à prendre pour favoriser la vitalité économique, la productivité, l’innovation, etc. Je commencerai par répondre à ces questions en soulignant un des principaux messages de notre mémoire, c’est-à-dire que le renforcement de l’industrie cinématographique et télévisuelle permet d’atteindre de nombreux objectifs stratégiques nationaux et de protéger les intérêts importants des citoyens. La création de programmes et l’adoption de mesures fiscales qui contribuent à la réalisation de ces objectifs sont une façon efficace d’utiliser les ressources publiques et devraient donc s’inscrire dans les priorités budgétaires du gouvernement.
D’autres spécialistes ont déjà mentionné que cette industrie contribue au développement de l’économie canadienne, puisqu’elle engendre des milliards de dollars sur le plan des productions et des exportations et crée plus de 130 000 emplois directs et indirects, ce qui a des effets multiplicateurs dans d’autres industries. Elle occupe aussi une place importante dans notre économie du savoir car elle favorise le développement des compétences de la main-d’œuvre et du secteur de la haute technologie, et ce sans nuire à l’environnement.
La contribution de l’industrie à l’économie devrait, à elle seule, être une raison suffisante pour la soutenir, mais il y a aussi d’autres retombées. Le renforcement de cette industrie contribue à notre souveraineté culturelle et à l’édification de notre nation. Une industrie viable aide à refléter et à créer notre identité nationale par le truchement de films et d’émissions de télévision originaux, particulièrement les productions dramatiques. Je ne m'attarderai pas sur le sujet des dramatiques puisque d’autres témoins en ont déjà parlé ce matin.
Ces éléments sont essentiels à la création et au maintien d’une culture commune au Canada, mais qui tient compte de sa diversité inhérente. L’industrie permet également à la population de s’exprimer librement sur le plan artistique au moyen des arts audiovisuels et de se reconnaître dans les films et les émissions de télévision.
Le renforcement de l’industrie cinématographique et télévisuelle permet aussi d’atteindre un autre objectif important, soit celui d’établir des liens avec le reste du monde. Nos films et émissions de télévision présentent nos histoires et perspectives partout à l’étranger et nous donnent l’occasion de créer des liens internationaux grâce aux coproductions. L’industrie aide aussi à faire connaître le Canada et ses valeurs ailleurs dans le monde, rehaussant ainsi l’image de notre pays sur la scène internationale.
Je n’ai parlé jusqu’à maintenant que de trois priorités nationales. Si j’avais plus de temps, je pourrais vous dire comment notre industrie soutient d’autres objectifs stratégiques, comme ceux énoncés dans la Loi sur la radiodiffusion, quel rôle elle peut jouer dans le plan d’action concernant les villes. Aujourd’hui, l’industrie cinématographique du Canada croule sous le poids des pressions qui ont entraîné une baisse des niveaux de production et des emplois et qui ont affaibli le secteur. Je ne m’attarderai pas trop sur ce sujet puisque l’ACTRA et la Writers Guilde vous en ont parlé ce matin.
L’emploi est, à lui seul, une source d’inquiétude. Des statistiques sur les salaires, publiées récemment, révèlent les effets néfastes que ces pressions ont exercé durant les huit premiers mois de cette année. Partout au Canada, le nombre d’employés dans l’industrie a baissé de près de 30 p. 100, et le revenu imposable de plus de 20 p. 100. Il s’agit de moyennes nationales; ces chiffres sont encore plus élevés en Colombie-Britannique. D’ailleurs, certains de nos membres nous disent que ce serait plutôt de l’ordre de 40 p. 100 dans cette province. Cela aura des conséquences insidieuses sur d’autres industries aussi.
Beaucoup de gens de l’industrie cinématographique et télévisuelle sont maintenant sans emploi ou sont sous-employés. Il y a des limites à rester dans une telle situation. Nous risquons de perdre de bons emplois hautement spécialisés et bien rémunérés ainsi que des personnes créatives et compétentes qui quitteront l’industrie ou le pays. Si c’est le cas, il sera encore plus difficile de rebâtir l’industrie.
Je suis certaine que vous tiendrez compte de la baisse de l'activité économique et des recettes fiscales attribuable au ralentissement de l’industrie lorsque vous examinerez les recommandations présentées aujourd’hui. Tout ce que nous savons, c’est que l’industrie cinématographique et télévisuelle a besoin d’aide pour se sortir de cette situation difficile et continuer de soutenir les objectifs économiques du Canada, sa souveraineté culturelle, son édification et ses intérêts stratégiques internationaux. La réalité économique de l’industrie cinématographique et télévisuelle est telle que le secteur de la production a toujours eu besoin d’un ensemble intégré de mesures stratégiques, comme du financement et des mesures fiscales, pour survivre. Voilà ce dont je voulais vous parler. Si vous voulez discuter des autres aspects, je suis à votre disposition.
Nous recommandons donc que le budget de cette année prévoie plusieurs mesures intégrées pour renforcer l’industrie cinématographique et télévisuelle et favoriser les productions canadiennes, surtout les dramatiques, dans les années à venir.
Les premières recommandations portent sur le financement des programmes et des institutions, donc le FCT, Téléfilm Canada et Radio-Canada. Nous vous exhortons à maintenir, à tout le moins, le niveau de financement actuel du FCT et de Téléfilm Canada. Nous partageons l’opinion de l’APFTQ en ce qui a trait à la nécessité d’assurer le financement à long terme, essentiel à l’industrie cinématographique et télévisuelle. Les projets sont de longue haleine, et la planification devrait l’être aussi.
· (1300)
Nous aimerions également qu'on augmente le budget de la SRC pour les dramatiques. Pour ce qui est du crédit d'impôt, le CISP, nous voudrions que sa base soit élargie de façon à couvrir toutes les dépenses de biens et services canadiens, et pas seulement les coûts de la main-d'oeuvre. Nous souhaitons également une bonification du crédit d'impôt pour productions canadiennes. D'abord et avant tout, nous voulons qu'il y ait de la production qui se fasse au Canada. Comme l'expérience nous l'a démontré, nous ne pouvons pas compter sur la production étrangère pour maintenir à flot notre industrie.
Enfin, nous recommandons que vous renouveliez vos engagements financiers en faveur de la Coalition canadienne pour la diversité culturelle ainsi que la contribution du Canada aux fins des réunions de l'UNESCO pour la Convention internationale sur la protection de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques. Nous sommes tout à fait d'accord avec M. Kotto : cette initiative gagnerait à être beaucoup mieux connue au Canada anglais.
Merci beaucoup.
Le président: Merci.
Pour le Conseil canadien des archives, monsieur Farrell.
M. Fred Farrell (président, Conseil canadian des archives): Merci. Bonjour à tous.
Le Conseil canadien des archives, un autre groupe dont le sigle est CCA, est un réseau formé des 13 conseils provinciaux et territoriaux regroupant plus de 800 centres d'archives qui ont passé les 20 dernières années à travailler pour préserver et rendre accessible le patrimoine documentaire de ce pays. Durant cette période, le CCA a reçu un total de 27 millions de dollars du gouvernement fédéral. Les provinces, les territoires et les centres d'archives ont donné plus de 50 millions de dollars en contributions pour ces mêmes projets. Le soutien financier du gouvernement fédéral a aidé les centres d'archives de tout le pays dans leurs efforts pour offrir du contenu aux Canadiens ainsi qu'élaborer des normes nationales, dont bon nombre ont été adoptées à l'échelle internationale.
Vous êtes tous bien au fait des transformations majeures que vit le Canada depuis quelques années. Notre pays a évolué d'une économie basée principalement sur les ressources vers une économie mondiale principalement fondée sur le savoir. Où va-t-on entreposer toutes ces connaissances et comment celles-ci deviendront-elles accessibles?
Ce que la plupart des Canadiens ne réalisent pas, c'est le rôle constant que les institutions d'archives canadiennes jouent au sein d'une telle économie. Beaucoup de gens sont au courant du genre d'information que l'on retrouve typiquement dans un centre d'archives : histoires scientifiques et populaires, généalogie, patrimoine bâti et recherche légale—tous des domaines d'importance durable. Les institutions d'archives ne sont pas uniquement le grenier de notre mémoire collective; elles contiennent les ressources qui permettent la réalisation d'une variété de projets à la mesure du Canada et touchent à toutes les facettes de notre société de bien des façons dont peu de gens à l'extérieur de la communauté archivistique sont conscients.
Par exemple, dans les secteurs de la santé et de l'environnement, la préservation de données considérables relativement à la qualité de l'eau datant du début des années 70 fait en sorte qu'elles sont maintenant accessibles aux biologistes étudiant l'état de l'eau potable de la Colombie-Britannique. D'anciennes images des glaciers alpins peuvent être comparées aux photos actuelles pour permettre aux climatologistes de mesurer l'impact des changements climatiques. On peut également citer la recherche médicale sur l'hémophilie, l'anémie de Fanconi et la maladie de Niemann-Pick.
Dans le domaine juridique et des droits civiques, les archives favorisent le règlement précis et adéquat de réclamations territoriales; des décisions appuyées sur les faits concernant la question des pensionnats; et l'établissement de l'âge et de l'état matrimonial pour déterminer l'éligibilité à la pension du Canada.
Dans le domaine de l'économie et de l'industrie, mentionnons l'expansion du métro de Toronto et la construction d'un gazoduc au Nouveau-Brunswick... Quelqu'un pourrait demander ici quels auraient pu être le coût et l'impact s'il n'y avait pas eu de documents authentiques, fiables et déjà accessibles pour faire ce travail.
Dans le domaine culturel, je peux vous citer de nombreuses productions de l'ONF et la SRC, y compris l'une des émissions les plus populaires de Radio-Canada et un best-seller : Le Canada : Une histoire populaire; les romans Kamouraska d'Anne Hébert, Captive de Margaret Atwood, The Last Crossing de Guy Vanderhaeghe et Anne Stillman de New York à Grande-Anse de Louise Lacoursière... Et ce ne sont là que quelques exemples.
Les archives sont fondamentales pour la communauté de chercheurs, l'industrie de l'édition, du film et de la télédiffusion, avec le renouvellement urbain, le soutien des écoles rurales, sans parler de la fierté nationale et de la cohésion sociale.
Bibliothèque et Archives Canada a récemment utilisé l'expression « collection nationale » pour désigner l'ensemble des documents d'archives conservés au Canada; c'est une expression très juste. Elle reconnaît le fait que des documents essentiels ne se trouvent pas et ne peuvent pas se trouver uniquement à Ottawa. Une collection nationale requiert, à coup sûr, un soutien financier national.
Nous proposons une augmentation considérable du soutien financier actuel afin de relever les défis à venir. Avec un programme de subventions de 75 millions de dollars sur cinq ans, les centres d'archives sont capables de mettre une quantité sans précédent de contenu archivistique entre les mains des Canadiens. Nous voulons soutenir le programme de recherche du gouvernement fédéral partout au Canada. Jusqu'à maintenant, nous en avons assumé les coûts, mais nous ne sommes plus en position de le faire, tant du côté des ressources humaines que financières. Les centres d'archives offrent, à divers degrés, du soutien à presque tous les groupes qui se présentent devant ce comité.
Quelqu'un a dit que ceux qui ignorent l'histoire sont condamnés à la répéter. Sans les centres d'archives, les générations futures sont vouées à refaire le travail du passé.
Les centres d'archives sont le moyen le plus efficace d'éviter de réinventer la roue et de faciliter les comparaisons entre les différentes époques. La vérificatrice générale du Canada reconnaît l'importance de l'accès aux documents d'archives comme moyen de prévenir le gaspillage. Nous espérons que vous la reconnaissez aussi.
· (1305)
Le CCA remercie le Comité permanent des finances de lui avoir donné l'occasion de faire connaître ses priorités au gouvernement. Nous remercions également le comité pour le soutien qu'il a accordé par le passé à la communauté du patrimoine.
Le président: Merci.
Maintenant, pour l'opéra au Canada, monsieur McPhee.
Mme Susan Ferley (directrice artistique, Grand Theatre, La voix d'opéra au Canada): Je vais parler d'abord.
Nous nous réjouissons de pouvoir vous rencontrer aujourd'hui pour vous faire part de nos points de vue quant à la contribution que peut apporter le secteur des arts de la scène à la vitalité des villes et des collectivités canadiennes, d'un océan à l'autre. Mon nom est Susan Ferley et je suis directrice artistique du Grand Theatre de London (Ontario). Je suis accompagnée de Bob McPhee, directeur général de la Calgary Opera Association. Nous sommes tous deux ici à titre bénévole.
Nous venons de régions différentes et nous représentons des collectivités et des perspectives fort différentes, mais nous partageons la résolution commune de faire valoir le rôle que peut jouer l'art pour faire changer les choses dans la vie des Canadiens et illustrer la place qu'occupe notre pays au sein du grand tableau mondial.
Nous vous entretiendrons aujourd'hui d'un mémoire présenté conjointement par nos associations. En considérant le spectre des effectifs de nos organisations, vous pourrez voir que les arts de la scène englobent un large éventail de moyens d'expression artistique, de l'opéra jusqu'au théâtre expérimental en passant par les orchestres et les ensembles musicaux des petites collectivités.
En notre qualité d'artistes et de praticiens, nous sommes au premier rang pour constater tout le pouvoir des arts de la scène. Ils sont source d'excitation et d'inspiration pour les auditoires. Ils nous aident à comprendre notre passé et à nous tourner vers l'avenir. Ils nous incitent à nous poser des questions et à déterminer le genre de Canada dont nous voulons faire partie et que nous souhaitons construire et présenter au monde.
Au Grand Theatre, nous avons un programme qui vise à rejoindre notre communauté et les jeunes qui y vivent. Environ 50 à 75 étudiants du secondaire participent à ce projet qui leur permet de travailler avec des artistes et des artisans du théâtre professionnel pour concevoir un véritable spectacle présenté sur notre scène principale. Ce programme a permis de déceler de nouveaux talents qui se sont dirigés vers une formation plus approfondie et travaillent maintenant dans le milieu théâtral. Selon l'un des participants, les jeunes ressortent de ce programme avec tout un bagage de connaissances théâtrales et générales qu'ils emportent avec eux et pourront mettre à profit dans tous les aspects de leur vie, quel que soit le cheminement qu'ils choisissent.
Les Canadiens apprécient ce que nous faisons. Tous les sondages nous apprennent qu'ils conviennent de l'importance des investissements dans les arts; 75 p. 100 des Canadiens sont d'avis que les arts sont importants pour améliorer notre qualité de vie. Nous nous réjouissons de voir tous les partis reconnaître de plus en plus à la Chambre des communes l'importance du financement des arts. Des députés de tous les partis en ont parlé pas plus tard que la semaine dernière en Chambre. Le soutien des parlementaires et des Canadiens en général est pour nous source d'encouragement. Lorsque nous retournerons, Bob et moi, dans nos collectivités respectives, il est bien certain que nous nous réjouirons d'avoir pu constater que notre travail est apprécié.
M. Bob McPhee (directeur, Opera.ca, directeur général, Calgary Opera Association, Opera.ca): Malheureusement, la réalité est moins rose; nous allons retourner dans nos collectivités toujours à la recherche de moyens d'exploiter toutes les possibilités qu'offrent les arts de la scène dans un environnement où les ressources disponibles sont de plus en plus rares. Rien de nouveau sous le soleil.
Notre première priorité consiste simplement à persuader le gouvernement d'assurer le maintien du programme Un avenir en art, pour en faire une source de financement permanent et prévisible pour les activités artistiques. Sans un tel engagement, nous craignons d'assister à une réduction des ressources disponibles pour des organismes essentiels comme le Conseil des arts du Canada. Si le soutien additionnel de 25 millions de dollars n'est pas renouvelé et rendu permanent, il s'ensuivra une réduction d'un sixième des ressources actuellement à la disposition du Conseil.
Nous sommes conscients de l'importance du processus permanent d'examen des programmes du gouvernement fédéral et de la nécessité pour lui de constamment revoir ses priorités. C'est d'ailleurs une réalité quotidienne au sein même de notre organisation. Nous demandons au Comité permanent des finances et au gouvernement du Canada de reconnaître que le financement durable des arts est une priorité pour les Canadiens. En l'absence de budget stable et permanent et de financement pour les associations artistiques, il devient impossible pour les artistes de prendre les risques inhérents à l'innovation et à l'excellence. Aucun secteur de la société, de l'industrie, du milieu des affaires, du monde de l'éducation ou de la santé peut aller de l'avant sans prendre certains risques calculés.
Sans risque, notre organisation n'aurait pas investi dans la production de Filumena de John Murrell et John Estacio, un opéra qui raconte l'histoire de notre peuple, les immigrants qui se sont installés dans la région du Pas du Nid-de-Corbeau au début du XXe siècle. Après une série de représentations locales, l'opéra pourra être vu à Ottawa en avril et dans deux autres villes au cours de la prochaine année. C'est une situation sans précédent pour un opéra créé au Canada.
Pour aller de l'avant, nous exhortons donc le gouvernement canadien à adopter une optique à long terme et à considérer la contribution que peuvent avoir les arts dans la vie des Canadiens et quant à notre place dans le monde. Actuellement, le gouvernement du Canada alloue 0,1 p. 100 de son budget total au Conseil des arts du Canada. À ce chapitre, nous nous situons très loin derrière les autres pays industrialisés, y compris la Grande-Bretagne, la France, l'Italie, l'Allemagne et l'Australie.
Nous demandons au gouvernement de majorer ses investissements dans le Conseil des arts du Canada à hauteur de 0,2 p. 100 des dépenses fédérales totales. Avec un tel soutien, les organisations des arts de la scène que nous représentons seraient mieux aptes à prendre les mesures et les risques nécessaires pour s'épanouir pleinement au sein de leurs collectivités. Cet épanouissement pourrait prendre différentes formes, de la participation de jeunes à risque à des activités d'exploration artistique jusqu'à la production de récits qui aident les Canadiens à mieux comprendre où ils en sont rendus.
Je vous remercie beaucoup de nous avoir donné l'occasion de vous rencontrer et de contribuer à ce débat. L'an dernier seulement, 14 millions de personnes ont assisté à des représentations de danse, de musique, de théâtre et d'opéra. Selon un sondage Decima, 85 p. 100 des Canadiens sont d'accord pour que le gouvernement soutienne les arts et la culture. Nous nous adressons à vous, nos représentants, pour que vous préconisiez un financement durable et prévisible pour les arts de façon à ce que les Canadiens puissent continuer à créer, à raconter leurs histoires et à rêver leurs rêves.
Merci.
· (1310)
Le président: Merci.
[Français]
Le prochain groupe est l'Association nationale des éditeurs de livres. Je cède la parole à Mme Derome.
Mme Hélène Derome (vice-présidente, Édition Littéraire, Association nationale des éditeurs de livres): Je remercie M. le président et les membres du comité de nous recevoir. Je suis vice-présidente de la section Édition littéraire de l'Association nationale des éditeurs de livres. Je suis accompagnée de Marc Laberge, trésorier, directeur des Presses internationales Polytechnique.
L'Association nationale des éditeurs de livres représente 90 p. 100 des éditeurs professionnels de langue française, soit 110 membres francophones au Québec et hors Québec. Le premier mandat de notre association est la promotion du livre canadien, tant sur le plan national qu'international. Nous travaillons fort au rayonnement de notre culture à travers le monde et nous avons d'ailleurs un rôle très actif dans la défense de la diversité culturelle.
Le travail de notre association a permis que l'UNESCO nomme Montréal capitale mondiale du livre pour l'année 2005-2006. Cette année de Montréal capitale mondiale du livre se terminera par un symposium de l'Union Internationale des Éditeurs qui sera organisé par l'Association nationale des éditeurs de livres et par l'association canadienne des éditeurs anglophones, le ACP ou Association of Canadian Publishers.
En ce qui concerne notre activité économique, nous générons ici, au Québec, 348 millions de dollars en ventes de livres, ce qui représente pour nous 49 p. 100 de part du marché. C'est énorme si on pense qu'il y a 40 ans, nous représentions à peu près 10 p. 100 des ventes ici, au Québec. Nous avons versé l'an dernier 29 millions de dollars en droits d'auteur au Québec seulement.
Notre travail d'éditeurs alimente aussi d'autres industries culturelles. Je pense principalement à des oeuvres théâtrales que nous publions, mais aussi au fait que beaucoup de films sont maintenant inspirés de livres que nous avons publiés. Je pense à un film qui sortira bientôt et qui s'appelle Maman Last Call, de Nathalie Petrowski, ainsi qu'au succès de Sur le seuil, de Patrick Sénécal, ou à Mademoiselle C., de Dominique Demers, ou encore à Monica la Mitraille, de Georges-Hébert Germain.
Au fond, il faut comprendre que les subventions aux éditeurs représentent au maximum entre 5 p. 100 et 10 p. 100 du chiffre d'affaires des éditeurs. C'est peu par rapport à ce que nous générons. Nous créons à peu près 20 000 emplois tant dans le secteur direct, c'est-à-dire les emplois dans les maisons d'édition, que dans les secteurs de l'imprimerie, de la pré-presse, de la vente, des libraires, etc.
Je vais être assez brève. Cette année, nous demandons le maintien de ce que nous avons obtenu ces dernières années, soit des subventions du Conseil des Arts du Canada et du PADIÉ. Nous insistons pour le renouvellement du programme Un avenir en art. Ce programme permet des revenus assurés. Je pense principalement au Conseil des Arts, qui doit tirer ses sources de revenus, entre autres, de ses placements, ce qui rend souvent très incertains les montants des subventions que reçoivent les artistes ou les éditeurs. Donc, pour nous, il est important de renouveler ce programme et de maintenir les budgets.
L'UNESCO prétend qu'une industrie culturelle ne peut pas survivre sans aide s'il y a moins de 12 millions d'habitants. Au Québec, nous sommes sept millions d'habitants et nous avons absolument besoin de ces prêts. Voilà tout.
· (1315)
Le président: Merci.
[Traduction]
Nous passons maintenant à l'association Friends of Canadian Broadcasting. Monsieur Morrison.
[Français]
M. Ian Morrison (porte-parole, Friends of Canadian Broadcasting):
Monsieur le président et membres du comité, merci d'avoir invité les amis à participer à vos travaux. Nous sommes un groupe de vigilance financé par quelque 60 000 familles canadiennes. Nous avons comme mandat de défendre et d'améliorer la qualité et la quantité de la programmation canadienne dans le contexte du système audiovisuel.
[Traduction]
Comme vous le savez tous, les radiodiffuseurs sont d'une importance primordiale pour les communautés locales à l'échelle du pays. Les radiodiffuseurs sont un élément vital de l'économie ainsi que de la vie communautaire des municipalités canadiennes. Des médias locaux de première qualité constituent un aspect essentiel de notre démocratie. Il se trouve que ces médias relèvent de la compétence fédérale.
D'après nos recherches et les observations de nos membres, nous avons constaté que la quantité et la variété d'émissions locales sont à la baisse partout au pays, surtout aux heures de grande écoute lorsque les Canadiens se tournent vers leurs écrans en plus grand nombre. Nous avons joint au présent mémoire des données étayant cette affirmation.
Dans le cas de la SRC, le radiodiffuseur public national du Canada, ce phénomène s'avère non seulement regrettable, mais aussi contraire à la loi. En vertu de la Loi canadienne sur la radiodiffusion, la SRC a comme mandat de refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions.
Vous vous rappelez peut-être de la proposition faite par Robert Rabinovitch il y a quatre ans, alors qu'il venait d'accéder à son poste de président de la SRC. Selon cette proposition, les émissions locales que diffusait la SRC en début de soirée seraient supprimées dans 16 villes. Il n'a changé d'avis qu'après une levée de boucliers, tant au Parlement que partout au pays. Il a tout de même écourté ces émissions, qui sont passées de 60 à 30 minutes. En conséquence, leur part d'audience a chuté de façon draconienne. Encore là, les données pertinentes sont jointes à cette présentation.
Cette question était la première parmi celles posées par vos collègues du Comité du patrimoine qui lui ont fait subir un interrogatoire serré la semaine dernière à l'occasion du renouvellement proposé de son mandat.
Vos collègues du Comité du patrimoine ont récemment entrepris une étude rigoureuse de la radiodiffusion canadienne. Le rapport, généralement connu sous le nom de Rapport Lincoln, a été d'abord présenté au Parlement en juin 2003. Il y a deux semaines, ce même rapport, intitulé Notre souveraineté culturelle, a été présenté de nouveau en vertu d'une décision unanime du Comité du patrimoine, qui a prié le nouveau gouvernement de déposer une réponse globale au rapport.
Notre souveraineté culturelle met de l'avant 97 recommandations—toutes de grande importance. Je tenais toutefois à me pencher sur celle qui nous semble la plus importante de toutes, soit la recommandation touchant la radiodiffusion locale et régionale.
Vos collègues du Comité du patrimoine ont écrit que :
...le Comité est d'avis qu'il incombe à la SRC d'offrir aux auditoires une certaine programmation locale—établie en fonction des besoins. |
Ils ont ajouté :
...la SRC ne peut être tenue de mettre l'accent sur une partie de son mandat, en plus de s'acquitter de ses autres responsabilités, sans être assurée de disposer de ressources suffisantes. |
Le comité a demandé à ce que la SRC, d'ici juin 2004 :
...présente au Parlement un plan stratégique, accompagné d'une estimation des ressources nécessaires, sur les mesures qu'elle entend prendre pour remplir son mandat de radiodiffuseur public pour : |
a) offrir une programme locale et régionale. |
Au moment où l'on se parle, plus de 17 mois après le dépôt de ce rapport marquant, et cinq mois après la fin de l'échéancier proposé par le Comité du patrimoine, la SRC n'a toujours pas répondu.
En répondant aux questions que lui posaient les membres du comité la semaine dernière pendant l'audience sur le renouvellement proposé de son mandat, M. Rabinovitch a refusé de révéler ses projets, mais a annoncé pendant le point de presse suivant la séance son intention de demander un financement accru pour renforcer la programmation régionale télédiffusée.
L'organisation Friends of Canadian Broadcasting est d'avis que le renforcement de la capacité locale et régionale de la SRC constitue l'investissement le plus important en radiodiffusion que puisse envisager le gouvernement fédéral. Cela relève exclusivement de la compétence fédérale; qui plus est, une telle mesure favoriserait le mieux-être de nos villes partout au pays grâce à des informations locales plus abondantes et de meilleure qualité, ainsi qu'à une identité locale rehaussée .
Nous estimons qu'il faudra ajouter 100 millions de dollars au budget annuel de la SRC pour lui permettre de contribuer de façon valable à la radiodiffusion locale. Nous recommandons en outre que votre comité préconise cet investissement pour autant que la haute direction de la SRC élabore un plan stratégique acceptable visant un investissement renouvelé dans sa programmation locale. Ce faisant, notre radiodiffuseur public deviendra une société de radiodiffusion canadienne plutôt que d'être essentiellement une société de radiodiffusion de Montréal ou de Toronto.
· (1320)
[Français]
En terminant, nous souhaitons souligner ainsi qu'appuyer une deuxième recommandation énoncée par Notre souveraineté culturelle:
Le comité recommande que le Parlement accorde à la SRC un financement pluriannuel stable (3 à 5 ans) afin de lui permettre de remplir son mandat tel qu'il est énoncé dans la Loi sur la radiodiffusion. |
Nous vous remercions, monsieur le président, de nous avoir accordé l'occasion de témoigner aujourd'hui.
Le président: Merci, monsieur Morrison.
Nous passons à la période des questions des députés.
Monsieur Harris, vous disposez de sept minutes.
[Traduction]
M. Richard Harris: Merci beaucoup.
Monsieur Conradi, est-ce que votre organisation, Canadian Arts Summit, est reliée d'une façon ou d'une autre à un groupe qui nous a déjà fait sa présentation?
M. Axel Conradi: Faites-vous allusion au Canadian Council for Business and the Arts?
M. Richard Harris: Oui.
M. Axel Conradi: Je devrais vous expliquer un peu qui nous sommes. Le Canadian Arts Summit est un regroupement de directeurs artistiques, de directeurs généraux et de présidents du conseil de 40 organisations. Je suis moi-même président du conseil du Arts Club Theatre de Vancouver. Le Canadian Council for Business and the Arts fournit des services de secrétariat au Canadian Arts Summit.
M. Richard Harris: D'accord.
Je reviens à la question de l'impôt sur les gains en capital sur les dons de valeurs mobilières. Si je comprends bien votre bref mémoire—et corrigez-moi si je me trompe—lorsque quelqu'un veut faire une dotation ou un don de valeurs mobilières lui appartenant à un groupe artistique, s'il y a un gain en capital au titre de ces valeurs, le donateur doit payer de l'impôt sur ce gain.
M. Axel Conradi: C'est bien cela.
M. Richard Harris: Et le reçu obtenu du groupe artistique auquel le don est fait ouvre droit à une déduction d'impôt?
M. Axel Conradi: C'est exact.
M. Richard Harris: Nous avons déjà traité de cette question. Je suis membre de ce comité depuis six ans et nous en avons discuté plus d'une fois.
M. Axel Conradi: Oui, et vous avez déjà formulé une recommandation favorable à une telle mesure.
M. Richard Harris: C'est exact. Je sais d'ailleurs que notre parti y est toujours favorable, parce que nous croyons que c'est un excellent moyen de financer les arts et la culture à partir de ressources privées ou corporatives.
D'accord, je vous remercie beaucoup.
Mme Ferley, concernant votre deuxième recommandation, « que le gouvernement du Canada offre des avantages sociaux aux artistes autonomes et traite les artistes de la même manière que les autres Canadiens et Canadiennes », de quels avantages sociaux parlez-vous?
· (1325)
Mme Susan Ferley: Je crois que c'est lié au régime fiscal—Lucy, c'est bien cela?—ils demeureraient travailleurs autonomes mais auraient droit à des avantages sociaux.
M. Richard Harris: De quels types d'avantages?
Mme Susan Ferley: Lucy, c'est votre domaine.
Désolée. Je vous présente Lucy White, directrice exécutive de la PACT; c'est elle qui a les statistiques.
Ce qui est certain, c'est qu'ils demeureraient travailleurs autonomes, mais quant à la structure de certaines des déductions—assurance-emploi et régime de pensions—il faudrait que les artistes autonomes ne soient pas visés...
M. Richard Harris: Les autres travailleurs indépendants canadiens ne sont pas admissibles eux non plus à l'assurance-emploi. Le propriétaire d'un dépanneur ne peut pas verser de cotisations au régime d'assurance-emploi; pas plus que l'exploitant d'un magasin de pneus. Ils peuvent payer des cotisations pour leurs employés, mais eux-mêmes ne sont pas admissibles.
Mme Susan Ferley: Cette question n'est pas de mon ressort.
M. Axel Conradi: Puis-je me permettre de vous interrompre?
C'est une proposition qui a été fermement défendue par la communauté théâtrale. Ce n'est pas du tout une tentative pour faire en sorte que les artistes puissent à la fois toucher des prestations et conserver le statut fiscal d'entrepreneur indépendant; c'est plutôt qu'ils sont réputés être entrepreneurs indépendants et qu'ils ne peuvent toucher de prestations d'assurance chômage à titre d'employés des organisations pour lesquelles ils travaillent. On veut préserver à la fois ce statut de travailleur indépendant pour eux-mêmes et éviter que les personnes qui emploient leurs services ne se retrouvent soudainement dans la position de devoir payer des cotisations au régime d'assurance-emploi, au Régime de pensions du Canada, etc.
M. Richard Harris: D'accord, cela me paraît plus raisonnable.
C'était mes deux seules questions.
Le président: Monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir à la question de M. Harris. Il y a quelques mois, on a rencontré des artistes québécois oeuvrant dans différents domaines. Ils ont exprimé deux demandes en matière de fiscalité, essentiellement. La première était que des artistes qui peuvent avoir plus de revenus une certaine année et en avoir moins l'année suivante, ou deux années plus tard, puissent étaler leurs revenus sur plusieurs années, plutôt que d'être imposés pour une année où les revenus ont été de 200 p. 100 supérieurs aux revenus de l'année précédente. Vous êtes au courant, madame Leduc, de cette revendication. On oublie que l'année précédente, le revenu était pratiquement nul.
L'autre demande était que, quand ils sont considérés comme travailleurs autonomes, ils puissent contribuer à la caisse de l'assurance-emploi, en d'autres mots, qu'ils puissent se bâtir un système de sécurité du revenu par leurs propres moyens.
Êtes-vous d'accord sur ces demandes? Croyez-vous que tout cela soit encore d'actualité, en particulier la question de l'étalement des revenus?
M. Jacquelin Bouchard: Monsieur le président, je vais m'exprimer, mais pas au nom des artistes, parce que nous ne représentons pas d'association d'artistes. À notre avis, leurs demandes sont très légitimes. Cet étalement du revenu est très pertinent. Cependant, je ne représente pas les associations d'artistes.
M. Yvan Loubier: Monsieur Conradi, vous avez dit un peu plus tôt que vous étiez en désaccord sur le fait que les artistes ou les créateurs puissent contribuer à la caisse de l'assurance-emploi.
Est-ce parce que vous voulez éviter que les employeurs aient à payer une contribution?
M. Axel Conradi: Nous sommes en faveur du maintien du statut d'entrepreneur pour les artistes. Par conséquent, il n'y a qu'eux qui vont contribuer à la caisse de l'assurance-emploi.
M. Yvan Loubier: Ma question s'adresse aux éditeurs également. On remarque que dans plusieurs magazines canadiens, on fait souvent la promotion des artistes étrangers, en l'occurrence des Américains. On constate cela aussi en musique, que ce soit à la radio, à la télévision, etc. Étant donné que plusieurs de ces magazines ou de ces médias sont financés en partie par des deniers publics, comment pourrait-on faire pour contrôler un peu plus le contenu et faire en sorte qu'on fasse la promotion des artistes d'ici plutôt que des artistes américains?
· (1330)
Mme Hélène Derome: Cette question fait l'objet de beaucoup de débats au sein de l'Association des éditeurs de magazines canadiens également. Le Conseil des arts a déjà créé des programmes pour encourager la publicité écrite dans les médias et, par conséquent, faire plus de place aux éditeurs canadiens. Cependant, cela ne fonctionne pas tellement bien.
Cela étant dit, nous sommes quand même contents de bénéficier de cette aide. Le problème est plus large. L'association a fait une demande, entre autres, pour qu'à la télé d'État, du moins, le livre soit présent partout et constamment, et non pas seulement dans une émission littéraire qu'on tâchera de rendre accessible à plus de monde possible. Le problème est la place qu'occupe le livre dans son ensemble, dans tout sujet. En effet, on a tendance à laisser tomber les éditeurs québécois.
Il y a une compétition dont on ne parle pas beaucoup chez les éditeurs. Il est évident que pour les éditeurs anglophones, la compétition est américaine. Pour notre part, nous subissons une concurrence très forte des éditeurs européens. En fait, lorsqu'ils viennent ici, à Montréal ou ailleurs au Canada, on leur laisse toute la place parce qu'ils sont en visite.
Quelles peuvent être les mesures pour contrer cela? Si vous commencez à imposer des quotas ou des exigences comme celles-là, je ne pense que cela sera accepté facilement. Les éditeurs canadiens aimeraient certainement qu'il y ait certaines exigences pour les magazines ou les émissions subventionnés par l'État. Cependant, je ne pense pas que vous puissiez le faire.
L'aide à la promotion est donc, de façon générale, importante pour les éditeurs québécois, et nous sommes peu nombreux présentement pour pouvoir prendre notre place et concurrencer efficacement les éditeurs qui sont déjà installés et qui ont une histoire de plus de 100 ans, alors que l'édition au Canada est très jeune, surtout si on la compare à nos compétiteurs.
M. Yvan Loubier: En faites-vous un enjeu dans le cadre du débat sur la diversité culturelle?
Mme Hélène Derome: Vous parlez de la place que nous occupons dans le marché?
M. Yvan Loubier: En effet. Vous dites qu'à l'heure actuelle, ce pourrait être une bonne idée d'imposer des quotas aux éditeurs canadiens, mais que serait peut-être moins bien reçu par les entreprises ou les artistes étrangers qui font affaire avec les magazines canadiens. Cela deviendrait un genre d'obstacle au commerce, selon la définition américaine qui prévaut actuellement.
Mme Hélène Derome: Oui, cela pourrait être un problème. Quitte à élargir le débat, je dirai qu'il est clair, dans le cadre des politiques autant fédérales que provinciales, qu'il faut voir à ce que dans tous les organismes où il est possible de le faire, on accorde une place importante au livre. Je parle ici, entre autres, des éditeurs québécois, de nos bibliothèques, de nos librairies et des journaux.
Pour ce faire, il faut avant tout offrir une aide importante et constante aux éditeurs--c'est d'ailleurs une demande qui est formulée par l'ensemble des gens se trouvant ici--pour qu'ils aient les moyens de se faire connaître. Je pense que de cette façon, cela va se faire plus naturellement que si on impose un quota aux magazines, par exemple. Pour ma part, je ne vois pas cela d'un bon oeil.
M. Yvan Loubier: Monsieur Goyette.
[Traduction]
M. Mark Jamison: Je crois qu'il convient de préciser, d'abord et avant tout, que les magazines canadiens, qu'ils soient de langue française ou anglaise, qui ont accès à l'un ou l'autre des programmes gouvernementaux ont un contenu canadien à 93 p. 100 environ. Le minimum requis est de 80 p. 100 de contenu créé au Canada. Les auteurs, les concepteurs et les rédacteurs en chef canadiens y contribuent tous.
Il n'y a pas vraiment lieu de demander aux éditeurs de magazines du Canada de maintenir un certain degré de contenu canadien parce qu'ils le font déjà. Si les magazines canadiens obtiennent de si bons résultats ici—un peu plus de 40 p. 100 des magazines achetés au pays sont canadiens—c'est parce que les Canadiens veulent entendre parler des artistes canadiens, des événements canadiens et des auteurs canadiens.
Pour être bien clair, il y a des magazines dans ce pays qui se consacrent entièrement à ce qui se passe dans le milieu de l'opéra au Canada ou dans le monde littéraire d'ici. Ainsi les programmes pour le contenu canadien, comme le programme d'aide aux publications, nous permettent de diffuser un produit canadien, et le Fonds du Canada pour les magazines appuie uniquement ceux qui sont fondés sur un contenu canadien.
· (1335)
Le président: Merci, monsieur Jamison.
Monsieur Bell.
M. Don Bell: Merci.
Le message général que j'ai entendu de la table ronde précédente et de celle-ci, c'est qu'il faut un financement stable à long terme. C'est le thème sous-jacent qui se dégage, et c'est un message très commun que les groupes transmettent aux gouvernements à tous les niveaux, en particulier les groupes qui s'intéressent aux arts et à la culture et les organisations à but non lucratif, parce qu'ils ont de la difficulté à établir un budget pour l'année suivante. Quand vient le temps d'établir un budget, il est très difficile de retenir de bons employés si d'autres occasions se présentent là où leur avenir ne dépend pas de la présence ou de l'absence de financement. Ce message est très clair pour moi.
J'ai quelques questions bien précises, dont l'une s'adresse à l'un ou l'autre des représentants de l'Association des éditeurs des magazines canadiens.
Je reviens à une question dont nous avions parlé lorsque les rédacteurs de périodiques étaient ici. Croyez-vous que les fonds—on avait parlé du Fonds du Canada pour les magazines, par exemple—profitent à votre entreprise? Ce fonds devrait-il viser à stimuler de nouveaux magazines, ou le financement doit-il être accordé aux magazines qui sont déjà bien établis et rentables et qui font partie de ce 40 p. 100?
M. Mark Jamison: Les deux en profitent. Tout dépend de la quantité de contenu dans lequel le magazine investit, et le Fonds du Canada pour les magazines est précisément lié à la quantité de contenu que vous produisez. Les magazines qui disposent de budgets plus importants pour le contenu et qui investissent davantage dans le contenu reçoivent un plus grand soutien financier de ce fonds.
La présence du Fonds du Canada pour les magazines et du programme PAP nous aide à uniformiser les règles du jeu par rapport au contenu étranger.
M. Don Bell: Je crois que la question est de savoir si le fonds aide les magazines qui en ont besoin, ceux qui se débattent, ou bien s'il sert simplement à récompenser les magazines qui présentent un contenu canadien très prédominant? Les deux sont importants. L'objectif consiste à augmenter le contenu canadien, mais l'argent est-il remis surtout aux magazines qui performent bien, non seulement au chapitre du contenu, mais aussi financièrement, au lieu d'encourager les périodiques qui tentent d'obtenir une part du marché qui leur permettrait de survivre financièrement?
M. Mark Jamison: Le fonds qui est axé sur le contenu est assez démocratique dans la façon dont il se répercute, parce qu'il vise l'investissement dans le contenu. Si vous voulez le lier au plan d'affaires des magazines, il faudrait changer considérablement la perspective. À l'heure actuelle, nous voulons faire en sorte que cet argent favorise la création d'un contenu canadien, et les résultats sont bons puisque nous voyons de plus en plus de magazines, établis ou moins bien établis, qui élargissent leur contenu, qui créent de nouveaux périodiques et des suppléments et qui engagent plus de créateurs.
M. Don Bell: D'accord. Merci.
Je m'adresse maintenant à Monique, de la Guilde canadienne des réalisateurs. À la page 6 de votre mémoire, vous parlez des compressions budgétaires et vous dites « les récentes augmentations ne portaient pas sur la production dramatique de toute façon ». Je me demande si vous pouvez donner plus d'explications.
Deuxièmement, vous avez parlé de la compression des fonds destinés aux oeuvres dramatiques de CBC/Radio-Canada. La société d'État avait garanti jusqu'à 50 p. 100. Cette garantie a été supprimée en 1999. Un peu plus tôt aujourd'hui, quelqu'un a parlé d'une décision désastreuse prise en 1999. Est-ce qu'on parle de la même chose? Pouvez-vous me le dire, parce que je suis nouveau dans ce comité?
Mme Monique Twigg: La décision de 1999 n'est pas tellement liée à CBC/Radio-Canada. Elle concerne la radiodiffusion privée... Ils parlent de la politique sur la télévision de 1999, qui a entraîné diverses mesures; elle a, entre autres, éliminé les exigences concernant les dépenses que les radiodiffuseurs doivent consacrer au contenu canadien. Il existe encore quelques exigences dans les transferts de propriété. CTV, par exemple, doit encore répondre à quelques exigences. Cette décision a entraîné une chute soudaine de la production dramatique, parce qu'on n'était plus tenu d'y contribuer.
M. Don Bell: Vous dites que les augmentations récentes ne visaient pas la production dramatique. Est-ce à cause de cela?
Mme Monique Twigg: On parle ici de CBC/Radio-Canada. Une partie du financement qui avait été retranché a été restitué à la société d'État, mais cette dernière a tant de choses à faire—elle a un mandat régional, etc.—avec l'argent qu'elle reçoit, que cet argent n'était pas destiné à la production dramatique en soi.
· (1340)
M. Don Bell: Ma prochaine question s'adresse à Linda ou à Peter, de l'Alliance des arts médiatiques indépendants. Vous avez parlé des fonds nécessaires à la présentation des arts. Parlez-vous de la tournée des arts canadiens, ou parlez-vous de la présentation de productions artistiques étrangères au Canada?
Ms. Linda Norstrom: Je crois qu'il faut, entre autres, reconnaître les artistes dans notre propre pays. C'est un grand problème...
M. Don Bell: Ce sont donc des tournées au Canada.
Ms. Linda Norstrom: Des tournées au Canada et des expositions au Canada. Comme je l'ai dit, Patrimoine canadien avait le fonds Présentation des arts Canada, qui aidait les festivals et de nombreux groupes à diffuser les excellentes oeuvres qui sont produites dans notre propre pays. Bon nombre de Canadiens ne savent même pas qu'il y a tous ces artistes indépendants qui produisent des oeuvres d'arts médiatiques. C'est l'un des aspects dont nous avons parlé.
Par ailleurs, il faut certainement diffuser ces oeuvres à l'étranger. Il y a beaucoup d'artistes canadiens qui sont reconnus en Europe, mais dont le nom est inconnu par un grand nombre de Canadiens. Il faut les aider à se faire mieux connaître et à rayonner à l'extérieur du cercle des travailleurs culturels, pour que la société canadienne comprenne et sache que ce travail est réalisé et qu'il est important pour notre communauté.
M. Don Bell: D'accord. Merci.
M. Peter Sandmark: Puis-je ajouter un mot?
De façon générale, les festivals de films sont les plates-formes de lancement pour les productions cinématographiques, n'est-ce pas? C'est là où les films sont vendus. Dans le milieu indépendant, toutefois, les festivals sont maintenant l'endroit et, dans certains cas, le seul endroit où vous pouvez visionner une oeuvre. Ces festivals sont donc importants. C'est le marché d'aujourd'hui. C'est là où les gens peuvent voir beaucoup d'oeuvres indépendantes et ce qu'il nous manque, c'est un réseau qui permettrait de faire voyager ces oeuvres.
Dans certains cas, les festivals innovent en amenant la programmation dans les régions et en faisant la tournée de l'Ontario ou du Québec, mais il nous manque encore ce réseau organisé qui nous permettrait de parcourir l'ensemble du Canada. Les gens ne voient pas ce qui est créé ailleurs au Canada.
Le président: Si nous nous apprêtons à écrire un livre, à réaliser un film, à rédiger une pièce de théâtre ou à créer quoi que ce soit dans le domaine culturel, les activités de marketing ne devraient-elles pas être prévues dans les coûts? Est-ce que ces dépenses ne devraient pas être incluses déjà lorsque nous réalisons, rédigeons ou faisons quoi que ce soit? N'est-ce pas une partie...
M. Peter Sandmark: Ça devrait.
Le président: Ces dépenses font partie de tous les plans d'affaires, j'imagine.
M. Peter Sandmark: C'est ce qui manque dans notre plan d'affaires, si vous voulez. À Hollywood, une grande partie du budget est consacrée au marketing. Nous avons bien réussi à financer la production au Canada, mais nous avons oublié le marketing. Je conviens tout à fait que...
Le président: Excusez-moi, je ne veux pas vous interrompre—ce n'est pas ma question—, mais est-ce parce que nous manquons d'argent, ou est-ce parce que la communauté culturelle ne s'occupe pas du marketing? Les programmes sont-ils axés uniquement sur la réalisation, que ce soit un film, un disque ou peu importe?
M. Axel Conradi: Puis-je répondre à cette question également?
Le président: Oups.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Ce sont mes cinq minutes.
Allez-y.
M. Axel Conradi: Une partie de l'argent supplémentaire que le secteur sans but lucratif a demandé pour le Conseil des arts du Canada servirait à augmenter les tournées. Oui, nous consacrons beaucoup d'argent au marketing. À lui seul, le Arts Club Theatre vend assez de billets pour faire salle comble à la GM Place sept ou huit fois par année, alors nous dépensons beaucoup d'argent à cet effet.
Concernant le financement que nous obtenions par le passé du Conseil des arts du Canada, en gros, ce financement couvrait nos frais fixes, et tous les autres revenus couvraient les coûts variables que comporte la production d'un spectacle. Alors, pour répondre à votre question, il est certain que le financement accru servirait entre autres à diffuser des spectacles canadiens dans d'autres parties du Canada et dans les régions.
Le président: Merci.
Monsieur McPhee.
M. Bob McPhee: Je crois que nous accordons beaucoup d'importance au marketing. Toutefois, la base salariale de nos employés correspond à moins de 60 p. 100 des salaires que gagnent la plupart des Canadiens, et nous injectons ces sommes d'argent dans la création des arts et nous négligeons peut-être le marketing, dans une certaine mesure. Parce que notre financement a été gelé et que, en dollars réels, nous subissons des réductions de la part de nos principales sources de financement, nous sommes obligés de mettre de plus en plus d'argent dans la création, qui est notre mandat principal, plutôt que dans le marketing. Cette perspective pourrait changer si notre mandat principal était consolidé.
· (1345)
Le président: Monsieur Jamison.
M. Mark Jamison: Le marketing est certainement essentiel, mais pour la plupart des industries culturelles, il s'agit simplement d'avoir accès aux canaux de distribution. Dans notre cas, pour les magazines, nous n'avons que 10 p. 100 du kiosque à journaux. Pourtant, grâce au programme PAP, par exemple, les magazines canadiens comptent pour 70 p. 100 de tous les abonnements au Canada. Il y a donc un lien direct avec les efforts visant à accéder au marché.
Les films canadiens comptent pour 3 p. 100 de la consommation au Canada, surtout parce qu'ils ne sont pas diffusés dans nos propres salles. C'est un problème pour la plupart des industries culturelles. Notre gouvernement doit absolument nous aider à surmonter certains de nos problèmes de distribution, peu importe notre domaine d'activité.
Le président: Monsieur Morrison.
M. Ian Morrison: Pour répondre à votre question sur la radiodiffusion, vous constaterez que, du côté anglophone, les diffuseurs privés consacrent beaucoup plus d'argent à la promotion et à la commercialisation des émissions américaines qu'à celles des émissions canadiennes. Vous remarquerez immédiatement que, toujours du côté anglophone, CBC consacre le gros de son budget de marketing aux films de Hollywood.
Le président: Don, vous avez une autre minute.
M. Don Bell: Merci.
J'ai une question pour l'Association des producteurs de télévision du Québec. Je ne sais pas si vous avez omis de parler de l'étalement du revenu—si vous avez cru que ce sujet n'était pas lié à votre domaine en particulier. Vous avez parlé de trois choses : maintenir les niveaux actuels de financement, améliorer le Fonds de financement des courts métrages et améliorer le crédit d'impôt pour production cinématographique.
L'étalement du revenu a été abordé dans le cadre d'une autre table ronde par certains représentants de l'industrie du film—l'ACTRA et d'autres. Ils ont parlé du problème que peut avoir un scénariste ou un écrivain lorsqu'il consacre quelques années à la rédaction de son oeuvre et qu'il doit travailler comme serveur pour subvenir à ses besoins. Puis, il touche enfin les recettes de la vente de son livre ou de son film, avant d'entamer une autre période de vache maigre. Il fait bombance lorsque l'argent rentre.
Il me semble qu'il faut étaler les revenus sur les années antérieures plutôt que sur les années suivantes. Un peu plus tôt, des collègues conservateurs ont parlé d'un gros revenu une année, puis d'une disette pendant les années suivantes. Pouvez-vous faire des commentaires à ce sujet?
Excusez-moi, je ne parle pas français.
[Français]
M. Jacquelin Bouchard: J'ai dit précédemment que nous étions d'accord avec les associations d'artistes lorsqu'elles revendiquent l'équilibre des revenus dans le temps.
Bien sûr, le fait que l'industrie du cinéma et de la télévision soit très souvent sous-financée crée une pression sur tous les intervenants, que ce soit sur le producteur, qui doit investir plus que la moyenne, ou sur l'ensemble de la structure salariale.
Une statistique me revient en mémoire. Au Québec, depuis environ 10 ans, le budget moyen des films n'a pas bougé. Ainsi, même en dollars absolus, il est resté le même, soit en moyenne environ 2,1 millions de dollars. Si on tient compte de l'inflation, il est évident que le budget moyen des films a diminué. Des réflexions énergiques commencent à se faire à ce sujet. Il est entendu que le mouvement à la baisse du budget moyen crée une pression sur les revenus de tous et chacun.
Nous avons donc besoin d'obtenir plus de financement dans le domaine du cinéma. Ironie du sort, au cours de l'année qui vient de se terminer, sept des films canadiens ayant franchi la barre du million sont québécois. Les budgets disponibles pour le long-métrage, qui étaient partiellement basés sur la performance, ont atteint le maximum. Donc, malgré l'excellent rendement de ces films à l'échelle mondiale, on plafonne par manque d'argent.
[Traduction]
Le président: Merci.
Il nous reste environ 12 minutes. Madame Wasylycia-Leis, puis ce sera Mme Minna pendant cinq minutes.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins pour leurs excellents exposés.
À mon avis, nous traversons une crise au Canada en ce qui concerne notre propre présence culturelle. Je crois que le soutien accordé à CBC/Radio-Canada tire à sa fin. Les arts de la scène quémandent toujours de l'argent. Or, on nous presse de tout côté pour qu'on considère les arts, la culture, l'industrie du film et les oeuvres littéraires comme des frivolités et des produits de luxe.
Nous nageons dans les surplus et nous devons profiter de cette occasion en or pour nous faire entendre. On prévoit que le surplus atteindra 52 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. Des pressions sont exercées pour que cet argent servent à la réduction de la dette ou à la baisse des impôts. Comme vous le savez, un plan étalé sur 10 ans a été élaboré pour que le ratio de la dette au PIB soit réduit à 25 p. 100.
Il n'y aucun plan à long terme pour CBC/Radio-Canada, les arts de la scène, les périodiques ou la production dramatique canadienne. Est-ce que quelqu'un pourrait nous conseiller sur la façon de transmettre ce message dans notre rapport? Comment allons-nous renverser la vapeur, conserver ce qui existe et bâtir un milieu culturel souverain au Canada?
Ian, M. Conradi... est-ce quelqu'un voudrait intervenir?
· (1350)
M. Ian Morrison: Pour respecter les 12 minutes du président, qui sont maintenant passées à 10, je dirais en une minute que vos collègues du comité du patrimoine ont fait un excellent travail entre 2001 et 2003 et ont produit 97 recommandations qui, pour la plupart, ont fait consensus parmi tous les partis. Il y a quelques recommandations que l'ancienne Alliance canadienne n'a pas appuyées et d'autres que le Bloc n'a pas appuyées, mais la plupart ont fait l'unanimité.
Il s'agit, dans l'ensemble, d'une nouvelle politique de radiotélédiffusion pour le Canada. Il y a deux semaines à peine, le comité parlementaire du patrimoine l'a présenté de nouveau au gouvernement. Il y a une occasion à saisir dans chaque crise, et vous trouverez une réponse substantielle à vos préoccupations dans l'excellent travail de ce comité parlementaire, si le gouvernement le prend au sérieux.
Mme Judy Wasylycia-Leis: J'en conviens, mais en même temps, nous avons le budget supplémentaire des dépenses qui montre que d'autres réductions sont faites à CBC/Radio-Canada, à Téléfilm et dans les musées. Nous savons qu'un examen des dépenses est en cours et qu'on utilise le mot « réaffectation » pour ne pas parler de « réduction ». Nous savons aussi que les arts sont toujours les premiers à être touchés par les compressions.
Je me demande si quelqu'un veut poursuivre cette discussion sur la réduction de la dette et les baisses d'impôt et sur la nécessité d'investir maintenant dans les arts et la culture.
M. Axel Conradi: Je peux dire que notre présence aujourd'hui marque le début d'un effort fait au nom du Canadian Arts Summit, y compris tous les bénévoles comme moi qui y sont associés, en vue de sensibiliser les gens à cette question. Je crois que vous allez entendre parler de nous davantage à l'avenir.
Je ne sais pas si le Comité des finances a ce mandat ou non, mais lorsqu'il y a des propositions, en particulier pour de nouvelles dépenses du gouvernement, pourquoi ne pas exiger que pareille proposition soit assortie d'un paragraphe qui montrerait l'incidence qu'aurait cette dépense sur les arts et l'identité canadienne?
Mme Judy Wasylycia-Leis: Ce n'est pas une mauvaise idée. C'est un peu comme l'analyse comparative entre les sexes que nous sommes censés de faire sur l'incidence de chaque entente de financement.
Allez-y.
[Français]
Mme Hélène Derome: Il faut savoir que dans tous les pays, le problème de la culture se pose. Il y a plus d'offre que de demande. Dans la majorité des pays, la solution est l'exportation des oeuvres et la diffusion de ces dernières à l'étranger. Or, les organismes d'ici sont de plus en plus en compétition avec des industries culturelles étrangères. Pour éviter d'être alarmiste, je ne dirai pas que notre industrie va disparaître complètement, mais il reste que si on ne prend pas les moyens pour la défendre, elle va décroître automatiquement parce que partout au monde, l'offre augmente. Du fait que plus de gens ont accès à la culture, on produit plus dans ce domaine. C'est un phénomène quasi mondial, du moins dans le domaine de l'édition. On discute beaucoup de ce problème, et il s'avère que la solution réside dans l'exportation. Or, si nous demeurons passifs, il est certain que nous allons perdre de la place dans le marché.
Pour en revenir à l'édition, je voudrais préciser qu'il y a, au Québec seulement, un million d'analphabètes. On parle ici de gens qui ne sont pas fonctionnels dans le domaine de la lecture. Les prochaines générations devront néanmoins être outillées face à l'avenir, et cela implique aussi la culture, l'ouverture sur le monde, la connaissance de ce qu'est le Canada et de ce que nous sommes, de façon à pouvoir porter des jugements, et ainsi de suite.
Dans ce sens, la culture est un outil, mais il semble que nous soyons en train de la laisser en d'autres mains. Il faut donc adopter une vision plus mondiale de la culture.
· (1355)
[Traduction]
Le président: Nous vous écoutons.
[Français]
Mme Judy Wasylycia-Leis: Je suis d'accord. Cependant, il me semble que l'enjeu premier pour les arts est le niveau d'investissement. On doit reconnaître que le gouvernement fédéral a manqué à ses responsabilités à cet égard. Contrairement à d'autres pays, nous n'avons pas investi beaucoup de fonds publics dans les arts. On doit donc, en premier lieu, aborder cette question.
[Traduction]
Comment persuader le gouvernement d'investir et de dépenser directement dans les arts et la culture et d'effectuer tous les changements fiscaux qui sont actuellement abandonnés? Comment faire en sorte qu'on obtienne un investissement direct au lieu d'injecter tout notre argent dans la réduction de la dette, ce qui ne semble pas améliorer la croissance économique, ou dans les baisses d'impôt, qui profitent aux mieux nantis? Comment profiter de cette occasion en or pour renverser cette tendance?
Le président: Nathalie Leduc.
[Français]
Mme Nathalie Leduc: À mon avis, il faut commencer à mettre à profit les succès obtenus. Dans le secteur cinématographique, c'est la première année où il y a autant de représentation aux Oscars. Cela a suscité beaucoup d'intérêt non seulement pour le cinéma québécois mais également pour celui du Canada dans son ensemble. Il s'agit là d'une carte de visite en or dont il faudrait profiter. Les secteurs de l'édition et des magazines, entre autres, ont sûrement connu eux aussi des succès.
Enfin, en cessant les investissements, c'est, à long terme, toute l'industrie qu'on perturbe. C'est en ce moment que se développent des projets qui pourront être réalisés d'ici quelques années. Le gouvernement est prompt à réduire, mais ce faisant, c'est l'avenir qu'il réduit. Il faut donc insister sur le fait qu'il s'agit là d'une carte de visite et que c'est ce qui nous distingue.
Le président: Merci, madame Leduc.
Madame Minna.
[Traduction]
Puis-je demander aux témoins de rester cinq minutes de plus? Êtes-vous d'accord?
Merci.
L'hon. Maria Minna: Je serai brève.
Merci beaucoup.
Le président: Vous pouvez y aller maintenant.
L'hon. Maria Minna: Merci, monsieur le président.
Je ne vais pas répéter ce que j'ai dit plus tôt concernant mon appui pour les arts et la culture, parce que je crois que nous devons faire cela. Nous devons investir, et il est temps de prendre la chose un peu plus au sérieux.
J'aimerais parler un peu plus en détail de CBC/Radio-Canada. M. Morrison a parlé des programmes régionaux qui ont été retirés il y a peu de temps. C'est un véritable problème.
Une des choses que j'ai découvertes lorsque j'étais ministre responsable du développement international... j'ai découvert la culture acadienne à l'âge adulte. Je suis arrivée ici à l'âge de neuf ans, et je n'étais pas au courant. Je savais qu'il y avait des Canadiens français ailleurs, mais j'ignorais qu'il existait une culture acadienne. Ce n'est qu'au sommet de la francophonie, à Moncton, que j'en ai pris conscience. J'ai assisté à la meilleure cérémonie d'ouverture et au spectacle de clôture le plus fantastique que j'avais jamais vus. Il n'y avait que des artistes de la région; c'était une production exclusivement locale. C'était fantastique. Le reste des Canadiens ne voient pas cela.
Je suis évidemment en faveur d'une augmentation pour CBC/Radio-Canada. Je suis en faveur d'un financement stable. Je suis en faveur d'une hausse et je veux que les régions en profitent. Ma question est la suivante : si on ne l'a pas fait auparavant, peut-on amener la société d'État non seulement à faire des choses locales, mais aussi à les transporter pour que les gens de la Colombie-Britannique puissent voir ce qui se fait à Moncton et pour que je puisse voir, à Toronto, ce qui se fait ailleurs? Dans une certaine mesure, c'est ce que...notre pays est si vaste. Et je suis en faveur du financement.
Il y a donc deux seules questions. À votre avis, un tel plan est-il possible, et les 100 millions de dollars seront-ils suffisants ou non?
M. Ian Morrison: La Loi sur la radiodiffusion est dans votre camp. Les investissements faits dans les communautés locales partout au pays visent à raconter aux communautés leurs propres histoires, mais aussi à raconter ces histoires au reste du pays, pour qu'on abandonne le modèle de la grande ville face à l'arrière-pays auquel la SRC et CBC adhèrent beaucoup trop à l'heure actuelle.
Vos collègues du comité du patrimoine, M. Lincoln notamment, ont recommandé dans leur rapport que CBC/Radio-Canada présente précisément un plan pour réaliser entre autres ce que vous avez dit. J'étais ici, comme M. McKay l'aura remarqué, pour critiquer la direction de la société d'État qui n'a pas donné suite à cette invitation ou à cette directive du Parlement.
Concernant cette priorité—votre collègue de ce côté-ci me rappelle encore ce commentaire—durant la Seconde Guerre mondiale, on avait demandé à Winston Churchill d'effectuer des compressions dans les arts, et il a répondu « Si je coupe Shakespeare, pourquoi devrions-nous nous donner la peine d'aller nous battre? »
C'est vraiment une question de valeurs et, grâce à tout ce brassage d'idées sur la culture, votre comité a une chance d'influencer les résultats, du moins c'est ce qu'on espère.
¸ (1400)
L'hon. Maria Minna: Bien sûr, j'appuie le financement sans réserve. Je crois que je pourrais renforcer votre position ou celle des autres pour que la société d'État mette en oeuvre cet autre aspect et propose un plan. Je crois vraiment que c'est important pour les Canadiens, peu importe où ils se trouvent, non seulement de voir leur culture locale, parce que c'est important évidemment de voir le reflet de soi-même, mais aussi de voir ce que le reste du Canada a à leur offrir. C'est ce qui favorise la cohésion et le respect mutuel. C'est important.
J'ai une très courte question. J'ai oublié de demander qui en a parlé, et je m'en excuse. Il s'agit des 133 millions de dollars, du 5 p. 100 qu'on doit supprimer ou redonner au centre.
Cette mesure fait-elle partie de l'examen des programmes? Aviez-vous soulevé cette question, monsieur Sandmark?
M. Peter Sandmark: Oui, parce que je dois admettre que j'étais estomaqué de voir le gouvernement...
L'hon. Maria Minna: Moi aussi.
Je pose la question parce que, si je comprends bien, ce n'est pas censé être un exercice de réduction; on est censé examiner les programmes qui ne sont plus importants et réaffecter cet argent à l'intérieur du même système, à des programmes plus prioritaires. Ce ne devait pas être une réduction générale.
J'aimerais donc savoir ce qui se produit de votre côté, ce que vous obtenez, parce que ce n'est pas ce que j'ai entendu de la part de la ministre.
M. Peter Sandmark: Eh bien, je sais seulement ce que dit la ministre du Patrimoine, c'est-à-dire qu'on réaffecte 5 p. 100 du financement sur plusieurs années.
L'hon. Maria Minna: Est-ce partout, et non...?
M. Peter Sandmark: Je crois que la ministre du Patrimoine tente d'établir un pourcentage qui pourrait varier d'un organisme à l'autre. Je ne crois pas qu'on ait demandé 5 p. 100 à chaque organisme. J'ai réagi à cette annonce en me demandant comment vous pouviez faire pareille chose alors que vous accumulez des surplus. C'est insensé.
Si le Canada n'est pas un pays riche, alors quel pays l'est? Si le Canada, qui est un pays riche, ne peut pas appuyer les arts, alors qui peut le faire?
J'étais sidéré.
[Français]
Mme Nathalie Leduc: Cette réduction de 5 p. 100 va annuler les gains que l'on a faits en obtenant de nouveau les sommes pour le Fonds canadien de la télévision. Je trouve cela dommage. Je sais qu'on a demandé un plan pour réduire de 5 p. 100 le budget de chaque ministère et chaque agence culturelle qui relève de Patrimoine Canada, tout comme pour d'autres secteurs. Je trouve cela dommage, parce qu'on vient de réussir à rétablir le budget de certains organismes. Et maintenant, on efface ce succès en demandant une réduction, alors que le gouvernement a des surplus.
[Traduction]
L'hon. Maria Minna: Merci.
[Français]
Le président: Merci, madame Leduc.
[Traduction]
Merci, madame Minna.
Monsieur McKay, rapidement.
L'hon. John McKay: J'écoutais le dernier échange sur l'examen des programmes. L'idée derrière cet exercice est de faire en sorte que chaque ministère examine l'ensemble de ses programmes et se demande s'ils sont tous égaux et s'ils réalisent tous le mandat qui lui a été confié. Je ne connais aucune grande organisation qui continue de dire que toutes choses sont toujours égales à tout moment et sont toujours des priorités de premier ordre.
Si vous avez 40 priorités dans un ministère donné et qu'elles arrivent toutes au premier rang, alors vous n'avez aucune priorité du tout. Sur toute la durée des programmes, il est certain que certaines priorités perdent de l'importance par rapport à d'autre.
Si vous me le permettez, j'aimerais demander à M. Morrison ce qu'il pense d'un de ses graphiques.
Je lisais votre document après que vous avez pris la parole. Concernant la cote d'écoute de CBC à l'heure du souper... Je suis plutôt surpris, en fait, par ces chiffres. Vous pouvez peut-être me donner quelques explications.
Les résultats sont très bons à St. John's et à Charlottetown. Ils sont bons à Windsor. Ils sont moins bons à Winnipeg et, sauf quelques exceptions, la cote d'écoute laisse à désirer ailleurs. Elle est de 3,5 p. 100 à Toronto, de 1 p. 100 à London, etc. Je ne comprends pas les variations dans la cote d'écoute, puisque je suis un fidèle téléspectateur de CBC.
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M. Ian Morrison: La réponse est simple : la popularité du hockey.
De mars à juin, la programmation est interrompue presque tous les soirs pour les séries éliminatoires de la LNH. Dans l'est du Canada, cette interruption touche les heures plus tardives, mais à cause de la courbure de la terre, pour les villes que vous avez mentionnées, elle touche plutôt les émissions qui suivent l'heure du souper. Et lorsque les gens ne les voient plus pendant deux ou trois mois, ils se tournent vers les compétiteurs.
L'hon. John McKay: Pourquoi est-ce 1 p. 100 à London et 25 p. 100 à Windsor? La courbure de la terre n'explique pas cet écart.
M. Ian Morrison: London ne reçoit pas tous les services de CBC à l'heure actuelle. Elle devrait, mais ce n'est pas le cas.
L'hon. John McKay: L'ironie dans tout cela, c'est que la société d'État fait beaucoup d'argent avec La soirée du hockey, qui lui permet de rester à flot, mais que, par la même occasion, elle tue ses autres programmes régionaux?
M. Ian Morrison: C'est une question de priorités à la société d'État. On revient à la question qu'a posée l'honorable Maria Minna il y a quelques instants. Comme vous le savez, elle doit composer avec des compressions plus importantes que ce que l'ensemble du gouvernement du Canada a connues depuis une décennie, et elle a donc fait certains compromis. Elle dépend de plus en plus des revenus commerciaux.
Concernant votre commentaire sur l'examen des programmes, lorsque vous devez gérer, comme Mme Frulla, un portefeuille dans lequel, disons, 50 cents de chaque dollar est injecté dans un organisme donné, c'est-à-dire CBC/Radio-Canada, allez-vous exempter cet organisme et essayer plutôt de récupérer 10 cents de chaque dollar auprès de tous les autres organismes? C'est un exercice très difficile pour la ministre du Patrimoine canadien.
L'hon. John McKay: J'admets que ce sera difficile.
J'ai une dernière et courte question. Avec le programme d'aide aux publications, qui est destiné aux éditeurs de magazines canadiens, si je comprends bien, lorsque le magazine Maclean`s se trouve en kiosque, il compétitionne avec 90 p. 100 de contenu étranger, mais lorsqu'il est envoyé par la poste, il accapare 70 p. 100 du marché avec les autres magazines canadiens. Est-ce bien cela?
M. Mark Jamison: C'est exact.
L'hon. John McKay: Selon vous, cette fidélité à l'abonné est-elle entièrement attribuable au programme d'aide aux publications?
M. Mark Jamison: C'est un élément important. Il s'agit d'un partenariat avec l'éditeur et le lecteur ainsi qu'avec Postes Canada et le gouvernement. Ça marche. Le programme d'aide aux publications y a beaucoup contribué et, sans lui, je crois que les niveaux d'abonnement commenceraient à ressembler aux résultats que nous obtenons en kiosque.
L'hon. John McKay: Vous dites donc que, d'une part, le gouvernement fédéral injecte des sommes d'argent pour soutenir le programme et que, d'autre part, la société d'État augmente ses tarifs.
M. Mark Jamison: C'est un véritable défi. Les tarifs augmentent de 60 p. 100 en cinq ans, et nous devons y voir également. C'est une hausse de 60 p. 100, en tenant compte des tarifs cumulatifs.
Oui, les rapprochements sont difficiles à faire, et nous devons examiner la situation ensemble pour voir si nous pouvons travailler avec eux, ainsi qu'avec le ministère du Patrimoine, pour trouver un certain équilibre afin de conserver 70 p. 100 du marché des abonnements.
L'hon. John McKay: Merci.
Le président: On n'en finit plus. Ce sont des tables rondes intéressantes—puis-je dire « éclairantes »?
L'hon. John McKay: Vous pourriez le dire.
Le président: J'ai une seule question rapide pour M. Farrell.
Vous avez demandé 75 millions de dollars pour les archives. Pourquoi 75 millions et non 7 millions de dollars? Pouvez-vous nous donner cette information? Ou si vous pouvez nous donner une réponse rapide, nous vous écoutons.
M. Fred Farrell: La principale raison, c'est que nous sommes inondés par les demandes d'organismes qui sont financés par le gouvernement fédéral, que ce soit le Conseil de recherches en sciences humaines ou d'autres organisations—CBC/Radio-Canada en est un bel exemple. Nous travaillons dans ces conditions depuis de nombreuses années et nous sommes au bord de l'épuisement.
Compte tenu de l'accent que Patrimoine canadien met sur la numérisation, en particulier, beaucoup d'argent et d'énergie sont investis, mais toutes les organisations, que ce soit les radiodiffuseurs, les bibliothèques ou les musées, s'adressent aux archives pour répondre à ces exigences, et les archives n'ont pas l'infrastructure pour le faire. Toutefois, nous sommes conscients de l'importance de fournir ce contenu et nous voulons le faire. Un financement de 75 millions de dollars pour cinq ans, c'est un chiffre conservateur.
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Le président: D'accord. Cette somme est étalée sur cinq ans.
Encore une fois, merci à tous les groupes d'avoir pris le temps de nous rencontrer. Nous vous reverrons peut-être l'an prochain.
Merci beaucoup, et merci également aux députés libéraux d'être restés.
La séance est levée.