FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 13 juin 2005
Á | 1110 |
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)) |
M. George Soule (président national, Fédération canadienne des étudiants et étudiantes) |
Le président |
M. Christopher Wilson (agent supérieur des relations publiques, Fédération de l'habitation coopérative du Canada) |
Á | 1115 |
Le président |
M. Toby White (directeur adjoint aux relations gouvernementales, Alliance canadienne des associations étudiantes) |
Á | 1120 |
Le président |
Mme Joyce Potter (présidente, Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine) |
Á | 1125 |
Á | 1130 |
Le président |
M. François Roy (coordonnateur, Logement'occupe, Front d'action populaire en réaménagement urbain) |
Á | 1135 |
Le président |
M. William Robson (premier vice président et directeur de la recherche, Institut C.D. Howe) |
Á | 1140 |
Le président |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC) |
Á | 1145 |
M. Toby White |
M. Monte Solberg |
M. George Soule |
M. Monte Solberg |
M. George Soule |
Á | 1150 |
Le président |
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ) |
Á | 1155 |
M. François Roy |
Le président |
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
 | 1200 |
M. Christopher Wilson |
Le président |
M. François Roy |
 | 1205 |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD) |
M. Monte Solberg |
Le président |
M. William Robson |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
 | 1210 |
Le président |
M. William Robson |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Toby White |
Le président |
Mme Joyce Potter |
Le président |
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC) |
 | 1215 |
Le président |
M. George Soule |
Le président |
M. François Roy |
 | 1220 |
Le président |
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ) |
Le président |
M. Toby White |
Le président |
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.) |
 | 1225 |
M. Toby White |
Mme Susan Kadis |
Le président |
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.) |
M. William Robson |
Le président |
M. George Soule |
 | 1230 |
Le président |
Le président |
M. John Williamson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens) |
 | 1245 |
Le président |
M. Richard Jock (directeur général, Assemblée des Premières Nations) |
 | 1250 |
Le président |
M. Richard Jock |
Le président |
M. Richard Jock |
Le président |
Mme Ellen Russell (économiste, Centre canadien de politiques alternatives) |
 | 1255 |
· | 1300 |
Le président |
M. Michael Murphy (premier vice-président, Politiques, Chambre de commerce du Canada) |
· | 1305 |
Le président |
Mme Claire Morris (présidente et directrice générale, Association des universités et collèges du Canada) |
· | 1310 |
Le président |
M. Charles-Antoine St-Jean (contrôleur général, Bureau du Contrôleur général, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada) |
· | 1315 |
Le président |
M. Monte Solberg |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Monte Solberg |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Monte Solberg |
Le président |
M. Brian Pallister |
· | 1320 |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Brian Pallister |
M. Richard Jock |
Le président |
M. Pierre Paquette |
· | 1325 |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Pierre Paquette |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Pierre Paquette |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Pierre Paquette |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Pierre Paquette |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Pierre Paquette |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Pierre Paquette |
Mme Ellen Russell |
M. Pierre Paquette |
Mme Ellen Russell |
M. Pierre Paquette |
Mme Ellen Russell |
M. Pierre Paquette |
· | 1330 |
Mme Claire Morris |
M. Pierre Paquette |
Mme Claire Morris |
M. Pierre Paquette |
Le président |
L'hon. John McKay (Scarborough—Guildwood, Lib.) |
M. Charles-Antoine St-Jean |
· | 1335 |
L'hon. John McKay |
M. Michael Murphy |
L'hon. John McKay |
M. Michael Murphy |
L'hon. John McKay |
M. John Williamson |
· | 1340 |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Richard Jock |
· | 1345 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
Mme Claire Morris |
Le président |
M. Ken Epp (Edmonton—Sherwood Park, PCC) |
· | 1350 |
Le président |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Ken Epp |
Le président |
M. Richard Jock |
Le président |
Mme Ellen Russell |
Le président |
Mme Claire Morris |
· | 1355 |
M. Ken Epp |
Le président |
M. Guy Côté |
M. Charles-Antoine St-Jean |
M. Guy Côté |
Le président |
M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.) |
¸ | 1400 |
Mme Claire Morris |
M. Charles Hubbard |
Mme Claire Morris |
M. Robert Best (vice-président, Direction des affaires nationales, Association des universités et collèges du Canada) |
¸ | 1405 |
M. Charles Hubbard |
Le président |
CANADA
Comité permanent des finances |
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 13 juin 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
Á (1110)
[Français]
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): Bonjour, tout le monde.
[Traduction]
Peut-être devrions-nous commencer. Nous nous réunissons aujourd'hui conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 19 mai 2005 concernant le projet de loi C-48, Loi autorisant le ministre des Finances à faire certains versements.
Nous avons six groupes de témoins à entendre.
[Français]
On va laisser cinq minutes à chaque groupe, puis les membres du comité poseront des questions. J'ai ici la liste des témoins.
[Traduction]
Le premier groupe sera la Fédération canadienne des étudiants et étudiantes.
Monsieur Soule, vous avez la parole.
M. George Soule (président national, Fédération canadienne des étudiants et étudiantes): Bonjour. Je m'appelle George Soule et je suis président national de la Fédération canadienne des étudiants et étudiantes. La Fédération représente environ un demi-million d'étudiants qui sont membres de plus de 75 associations d'étudiants d'un bout à l'autre du Canada.
Nous vous avons aussi distribué un certain nombre de documents que nous vous invitons à examiner.
Je voudrais aborder plusieurs éléments du projet de loi C-48 dans mes remarques liminaires en demandant aux membres représentant tous les partis d'appuyer ce projet de loi, mais dans un premier temps, il convient à mon avis de prendre un peu de recul et de voir cette mesure législative dans son contexte.
Au cours des 10 dernières années, les frais de scolarité au Canada ont augmenté de plus de 160 p. 100 et le niveau d'endettement moyen chez les étudiants est passé à 25 000 $. En tant que proportion du salaire moyen au Canada, les frais de scolarité n'ont jamais été plus élevés depuis la Seconde Guerre mondiale. Ces deux grandes hausses sont attribuables aux réductions successives des montants accordés par le gouvernement fédéral au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux pendant toute la période des années 1990. Bien qu'une bonne partie de ce financement ait été rétablie pour le système de soins, on ne s'est guère intéressé au financement des études postsecondaires. Les crédits prévus au titre de l'aide financière aux étudiants ont été relevés dans certains cas, mais les résultats sont mitigés.
C'est-à-dire qu'il y a de bons résultats en ce qui concerne les subventions versées aux personnes à faible revenu, mais des résultats tout à fait catastrophiques en ce qui concerne les Bourses d'études canadiennes du millénaire. Les gens sont quasi unanimes à reconnaître que le gouvernement fédéral doit rétablir le financement de base des collèges et universités du Canada tout en s'assurant de rendre les études postsecondaires plus abordables et plus accessibles. Depuis 12 mois, heureusement, l'accent est de plus en plus mis sur les études postsecondaires, puisque de plus en plus les premiers ministres provinciaux exhortent le gouvernement fédéral à rétablir le financement des programmes d'études postsecondaires.
La majorité des étudiants au Canada sont protégés à présent grâce à un gel des frais de scolarité, et le financement qu'assurera le projet de loi C-48 est essentiel si nous souhaitons continuer à corriger les problèmes causés par la hausse massive des frais de scolarité pendant les années 1990. La grande majorité des étudiants canadiens viennent de familles à revenu modeste, et l'adoption de ce projet de loi garantira que ces étudiants et leurs familles n'ont pas à se laisser écraser de dettes afin de financer ce qui devrait être considéré comme un droit social fondamental dans une société démocratique.
Il est manifeste que le public est vivement en faveur de l'adoption de ce projet de loi. Ce n'est guère surprenant, étant donné que plus de 80 p. 100 des citoyens appuient le blocage des frais de scolarité. De plus, ce projet de loi est essentiel si nous souhaitons que l'accès aux études postsecondaires soit basé sur le mérite et l'initiative, et non pas sur les moyens financiers. Des données très détaillées aux États-Unis nous apprennent que pour chaque augmentation des frais de scolarité de 1 000 $, les chances des étudiants à faible revenu de terminer un programme d'études sont réduites de 19 p. 100. Les études révèlent également que plus de 50 000 jeunes ne peuvent accéder aux programmes d'études secondaires chaque année en raison de leur situation financière. Nous savons que les taux de participation déjà catastrophiques des jeunes Autochtones canadiens continuent à baisser. La réduction des frais de scolarité qui sera possible grâce à ce projet de loi constituera un premier pas positif en redonnant espoir à ceux qui ont jusqu'à présent été exclus du système, et en garantissant que ceux qui font déjà des études postsecondaires auront les moyens de terminer leurs études.
Bien que les négociations avec certaines provinces sur la mise en oeuvre de ce projet de loi risquent de causer certaines difficultés politiques, il est essentiel que le gouvernement fédéral réaffirme qu'il compte jouer un rôle de leadership en ce qui concerne les frais de scolarité. Il faut que ces crédits soient utilisés conformément à l'esprit et à l'intention de l'accord qui est à l'origine du projet de loi dont vous êtes actuellement saisis, c'est-à-dire comme des crédits qui sont offerts aux provinces pour leur permettre de réduire les frais de scolarité, en respectant, bien entendu, les accords de financement déjà conclus avec la province de Québec.
En terminant, encore une fois je vous exhorte tous à voter en faveur de ce projet de loi. Les membres de la Fédération dans chaque province du Canada félicite le gouvernement et le NPD d'avoir conclu cet accord historique. Cette législature nous aura donné un exemple rare de ce que peut faire un gouvernement minoritaire pour répondre aux besoins des Canadiens à l'heure actuelle et surtout à l'avenir.
Merci. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
Le président: Merci, monsieur Soule.
Monsieur Wilson, êtes-vous prêt? Avez-vous un exposé liminaire à faire? Je pense que les conditions devraient être un peu meilleures que la semaine dernière.
M. Christopher Wilson (agent supérieur des relations publiques, Fédération de l'habitation coopérative du Canada): Merci de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui, surtout dans un contexte légèrement plus calme, de comparaître devant le comité.
Je comparais devant vous aujourd'hui pour représenter la Fédération de l'habitation coopérative du Canada. Nous ne venons pas aujourd'hui vous parler des questions partisanes—d'ailleurs, nous sommes un organisme non partisan—mais plutôt d'une question très importante d'intérêt public : nous sommes là pour exprimer notre appui pour les crédits additionnels que prévoit le projet de loi C-48 pour la construction de logements abordables.
Il y a actuellement 91 000 unités de logement coopératif au Canada. Environ 250 000 personnes vivent actuellement dans des coopératives, et il s'agit de Canadiens à revenu faible et modeste. Je ne me présente pas devant vous aujourd'hui pour demander que le gouvernement accorde plus d'aide à ceux qui vivent déjà dans des coopératives d'habitation. Nos membres ont de bons logements dans de bonnes collectivités. Je suis là plus tôt pour parler au nom de ceux qui n'ont pas de logement décent et abordable.
Selon les dernières estimations, plus de 1,7 million de ménages consacrent plus de 30 p. 100 de leurs revenus mensuels aux frais de logement. Sur ce nombre, 700 000 y consacrent plus de 50 p. 100 de leurs revenus. Et là il s'agit de personnes à faible revenu. Bon nombre d'entre elles n'ont personne pour les défendre. Elles ne font pas partie d'un groupe de pression organisé. Je suis donc là en partie pour parler au nom de ces personnes qui n'ont pas de logement abordable, pour vous parler de leurs besoins.
Avec ces crédits supplémentaires, nous avons maintenant la possibilité de faire quelque chose de positif pour ceux qui ont besoin de bons logements. Je vous rappelle que les derniers programmes fédéraux d'habitation coopérative à but non lucratif ont pris fin en 1992. Il y a eu quelques initiatives dernièrement, mais je dois vous dire que malheureusement, elles n'ont pas donné lieu à la construction d'un grand nombre d'unités de logement abordable—je veux dire, vraiment abordable—et encore moins à la construction de coopératives d'habitation.
Mais grâce à cette injection de 1,6 milliard de dollars, nous avons à présent la possibilité de faire quelque chose d'important pour tous ceux qui ont besoin de logement. Et je tiens à préciser que nous parlons là de Canadiens de tous les milieux—des personnes âgées, des familles à faible revenu, des néo-Canadiens, des personnes ayant une incapacité, et d'autres encore. Nous parlons de gens qui ont de grands besoins et dont les besoins ne sont pas satisfaits par le marché.
Cela va peut-être vous surprendre, mais nous sommes tous favorables au rôle du marché en ce qui concerne la construction d'unités de logement. Nous estimons que le marché privé fait un excellent travail pour ce qui est de construire des maisons unifamiliales et des copropriétés. Pour plus de 70 p. 100 de la population canadienne qui peut se permettre ce genre de logement, ce sont des options tout à fait convenables, mais pour les autres, ce ne sont pas de bonnes options. Nous estimons que ce financement additionnel aidera grandement à répondre à ces autres besoins.
J'insiste aussi sur le fait que ce financement n'aura pas pour seul avantage de permettre aux gens d'avoir un toit. Quand les gens ont un bon logement et vivent dans des collectivités fortes, les avantages qui en découlent sont très considérables. Ces gens acquièrent des compétences, ils ont confiance en eux, ils deviennent autosuffisants, et par conséquent, ils ont moins besoin de services sociaux et de toutes sortes d'autres… Disons simplement qu'en devenant autosuffisants, les charges sociales qui sont nécessaires pour les aider à vivre correctement sont bien réduites.
Donc, nous sommes en faveur de cette affectation de fonds, non pas parce qu'il s'agit d'une panacée qui va régler tous nos problèmes, mais parce qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction. Pour nous, ce n'est pas une question partisane. Il s'agit simplement de faire ce que nous dit notre conscience. Nous vous exhortons par conséquent à voter en faveur du projet de loi C-48.
Merci.
Á (1115)
Le président: Merci, monsieur Wilson.
De l'Alliance canadienne des associations étudiantes, nous accueillons M. White.
M. Toby White (directeur adjoint aux relations gouvernementales, Alliance canadienne des associations étudiantes): Je voudrais vous remercier de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant le comité aujourd'hui. Je m'appelle Toby White, et je suis agent supérieur des relations publiques à l'Alliance canadienne des associations étudiantes.
L'ACAE est une alliance de 19 associations étudiantes des universités et collèges du Canada, et représente quelque 300 000 étudiants inscrits à des programmes d'études postsecondaires. Notre directeur national, Phillippe Ouellette, devait faire l'exposé devant le comité jeudi, et je dois donc vous demander d'excuser son absence. Il est actuellement à Calgary, où nos membres sont réunis pour discuter des problèmes des étudiants canadiens et pour fixer les objectifs de notre organisme pour l'année qui vient. Nos membres, qui se réunissent actuellement à Calgary, sont directement touchés par les dispositions du projet de loi C-48 et d'autres initiatives fédérales visant à améliorer les conditions de l'enseignement postsecondaire. Par conséquent, ils suivent de très près les audiences d'aujourd'hui.
D'autres témoins comparaîtront devant le comité pour exprimer leur opposition à l'investissement supplémentaire dans les programmes sociaux que prévoit le projet de loi C-48. Pourtant c'est un investissement dont nous avons grandement besoin. Nous n'exagérons nullement en affirmant que l'enseignement postsecondaire de notre pays est en pleine crise. Les frais de scolarité sont montés en flèche au cours des 10 dernières années et les mesures d'austérité imposées à nos établissements compromettent gravement la qualité de l'éducation. Par conséquent, la charge des étudiants est de plus en plus lourde.
Les étudiants qui n'ont d'autre recours que d'emprunter pour payer des frais de scolarité de plus en plus élevés se trouvent avec une dette qui rôde en moyenne autour de 30 000 $, sans parler des intérêts. Si les tendances actuelles se maintiennent, il est prévu que d'ici 2020, un diplôme de quatre ans en lettres ou en sciences pourrait coûter 132 000 $ environ. Mais ce n'est pas sur les étudiants que nous représentons que pèse la menace la plus grave; elle pèse plutôt sur notre système d'enseignement postsecondaire dont l'accessibilité sera gravement compromise. Si vous convenez avec nous pour reconnaître que des gens compétents et méritoires ne devraient pas avoir à lutter constamment contre des obstacles financiers pour pouvoir finir leurs études, vous conviendrez également avec moi pour dire qu'il y a tout lieu de s'alarmer face à la conjecture actuelle. Sachez que les Canadiens appartenant à des familles de faible revenu ont en effet 2,5 p. 100 de moins de chance de pouvoir faire des études universitaires que leurs compatriotes plus aisés.
Le budget fédéral de 2005 assure du financement à de nombreux secteurs de la société canadienne. Par contre, l'un des groupes importants qui n'a pas bénéficié de financement est la population étudiante canadienne. Le projet de loi C-48 vise à rectifier ce problème. Ce projet de loi n'est certes pas parfait, mais nous vous demandons de l'appuyer. Nous estimons que le projet de loi C-48 pourra jouer un rôle de catalyseur en amenant d'autres changements importants dans notre système canadien d'enseignement postsecondaire.
Grâce à ce projet de loi, les gouvernements pourront commencer à s'attaquer au problème des frais de scolarité trop élevés. Comme nous l'apprennent les récentes annonces faites en Alberta et en Saskatchewan, il devient de plus en plus manifeste que les gouvernements fédéral et provinciaux se rangent à l'avis des étudiants pour affirmer que ces frais astronomiques doivent être maîtrisés, puisqu'ils mettent en cause une éducation postsecondaire accessible et abordable.
La somme de 1,5 milliard de dollars que promet le projet de loi C-48 est certes très nécessaire et appréciée par les étudiants du Canada, mais il ne faut pas oublier qu'il ne s'agit là que d'un premier pas vers un engagement plus ferme, permanent et prévisible de la part du gouvernement fédéral. Pour pouvoir rétablir le niveau de financement fédéral de l'enseignement postsecondaire que nous avons connu en 1992-1993, il faut un transfert aux provinces expressément destiné à l'enseignement postsecondaire se montant à au moins 3,9 milliards de dollars. Les députés de tous les partis sont d'ailleurs de plus en plus conscients de l'impérieuse nécessité d'un tel transfert.
Le projet de loi C-48 offre justement une occasion toute désignée aux décideurs, qui y reconnaîtront un outil leur permettant d'amorcer la création de ce transfert expressément destiné à l'enseignement postsecondaire. Cela dit, il faudra un cadre de travail efficace et fiable de longue haleine pour éviter les risques financiers et les injustices à l'égard des étudiants et des citoyens du Canada. Le financement est certes important, mais ce dont l'enseignement postsecondaire a surtout besoin de la part des pouvoirs publics, c'est de leadership.
Si nos parlementaires font preuve de leadership et font en sorte que cet enseignement soit plus accessibles, il sera possible d'ouvrir un dialogue national sur l'enseignement postsecondaire. Ce dialogue est tout à fait essentiel, et l'ACAE estime qu'il devrait conduire à la conclusion d'un accord pancanadien qui s'appuie sur le modèle des accords sur la santé, c'est-à-dire où les administrations à la fois fédérale et provinciales s'engagent à concrétiser une vision national pour l'éducation postsecondaire.
Les étudiants sont convaincus que le financement de 1,5 milliard de dollars que prévoit le projet de loi C-48 pour améliorer l'accessibilité du système d'éducation postsecondaire au profit de groupes comme les Autochtones canadiens est un excellent premier pas vers l'amélioration de l'accessibilité générale à l'enseignement postsecondaire au Canada. Au cours des cinq prochaines années, presque 70 p. 100 de tous les emplois disponibles exigeront que leurs titulaires possèdent un diplôme postsecondaire. Il est donc critique pour notre économie et notre société que nous possédions un système d'enseignement postsecondaire qui permet à tous les Canadiens de réaliser leur potentiel.
Les étudiants font face à de nombreux obstacles. Parmi ces derniers, les obstacles financiers sont parmi les plus graves, mais ils sont aussi ceux que le gouvernement est le plus en mesure de régler. La nouvelle subvention créée par le gouvernement à l'intention des Canadiens issus de familles à faible revenu a été très bien accueillie par les étudiants. Mais elle ne permet de payer les frais de scolarité des étudiants concernés que pour la moitié d'une année. Le gouvernement doit donc envisager de créer des subventions plus intéressantes pour les étudiants issus de familles à faible revenu.
Á (1120)
En conclusion, le financement destiné à l'enseignement postsecondaire que prévoit le projet de loi C-48 est tout à fait essentiel si nous souhaitons commencer à éliminer les obstacles auxquels font face les étudiants qui désirent faire des études postsecondaires au Canada. Le gouvernement fédéral devrait saisir cette occasion pour réinvestir dans l'enseignement postsecondaire et ouvrir un dialogue productif avec les provinces. Nous espérons que ce financement ne sera pas considéré comme un don qui est fait aux provinces, mais plutôt comme l'occasion de prendre l'engagement ferme d'améliorer la vie des étudiants du Canada.
[Français]
De la part de l'ACAE, je vous remercie de nous avoir permis de faire une présentation et je vous demande de transformer nos recommandations en réalités.
Merci.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur White.
Nous accueillons maintenant Mme Potter, de l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine.
Mme Joyce Potter (présidente, Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine): Merci, monsieur le président et membres du comité, de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis présidente de l'Association canadienne d'habitation et de rénovation urbaine, et je suis accompagnée de notre directrice générale, Sharon Chisholm.
Nous nous présentons devant vous aujourd'hui pour vous exhorter à appuyer le projet de loi C-48, et ce à cause des 1,7 million de ménages canadiens qui ont encore désespérément besoin d'une habitation correcte et abordable. Tous les Canadiens sont interpellés par cette question. Je pense que la plupart des citoyens jugent inacceptable qu'il y ait eu une telle augmentation du nombre de sans-abri, y compris chez les familles, et que les besoins importants en matière de logement abordable dans presque toutes les localités du pays restent insatisfaits. Je crois aussi que la plupart des Canadiens estiment que le gouvernement fédéral devrait faire preuve de leadership dans ce domaine et s'engager à verser les 1,6 milliard de dollars du projet de loi budgétaire destinés à financer la construction de logements abordables.
Nous sommes d'avis que les habitations devraient être construites et gérées au niveau communautaire par l'entremise d'organismes communautaires à but non lucratif. Nous savons que, dans toutes les régions du Canada, il existe des solutions à notre crise du logement qu'il serait possible de concrétiser dans chaque circonscription du pays. Par exemple, un projet domiciliaire du groupe Daniel's à East York, Toronto, prévoit la construction de 250 unités de logement abordable pour les familles monoparentales dirigées par une femme. À St. John's, Terre-Neuve, les Stella Burry Community Services, le St. John's Status of Women's Centre et l'Armée du salut étudient tous activement de nouveaux projets de logement abordable qui seraient conditionnels à l'octroi de crédits fédéraux. À Victoria, en Colombie-Britannique, il est question de cinq projets différents, destinés à différents groupes, soit les personnes âgées de santé fragile, les victimes de violence familiale, et les familles à faible revenu, entre autres, projets qui pourraient être lancés immédiatement.
Á (1125)
[Français]
Au Québec, nous travaillons en collaboration avec le FRAPRU. Je donnerai la parole à M. Roy et à M. Brunet pour qu'ils décrivent la situation dans cette province.
[Traduction]
L'ACHRU a l'appui de nombreux groupes—le Centre canadien de politiques alternatives, l'Organisation nationale anti-pauvreté, le Conseil canadien de développement social, la Fédération de l'habitation coopérative du Canada, le FRAPRU, l'Église anglicane et l'Église unie—qui estiment que le logement abordable est la solution qui s'impose pour redonner aux gens leur dignité, pour offrir à chacun la chance de partir du bon pied et d'avoir accès à un emploi, et pour bâtir des collectivités saines et sécuritaires.
D'ailleurs, il n'y a pas que les organismes sociaux qui réclament que le gouvernement fédéral prenne des mesures en ce qui concerne les logements abordables. La Banque Toronto-Dominion, par exemple, a publié un excellent rapport où l'on insistait sur l'importance des logements abordables pour assurer le succès de notre politique économique. L'an dernier, Charles Coffey, vice-président du groupe financier RBC, a prononcé un discours à une de nos assemblées dans lequel il dénonçait la persistance du problème des familles sans-abri.
Le gouvernement fédéral a un rôle important à jouer pour faire en sorte que le Canada devienne de nouveau l'un des pays du monde où ses habitants ont les meilleures habitations. Nous étions autrefois des chefs de file et nous faisions l'envie du monde entier à l'époque où nous avions des programmes d'habitation bien financés par le gouvernement fédéral et bien exécutés par le secteur des logements à but non lucratif et des coopératives d'habitation. Depuis 1994, les compressions massives effectuées dans les programmes d'habitation font que nous sommes à présent en retard de 10 ans par rapport à la demande de logements abordables. Ce n'est donc pas par hasard que nous ayons assisté à une telle augmentation du nombre de sans-abri.
Comme vous l'a dit M. Wilson, le secteur privé est en mesure de répondre très efficacement à la plupart des besoins canadiens en matière d'habitations, mais il ne peut se permettre de répondre aux besoins des Canadiens à faible revenu sans bénéficier d'aide financière. Ces familles et ces personnes méritent que le gouvernement fédéral réponde à leurs besoins en matière d'habitation. Les projets sont prêts à être lancés, de même qu'un nouveau cadre pour le secteur de l'habitation, et nous ne devons pas laisser s'échapper cette occasion de progresser.
L'habitation constitue l'un des piliers de toute ville sachant affronter la concurrence. En fait, les maisons constituent une forme d'infrastructure, et ce sont des structures matérielles qui permettent aux occupants d'être branchés aux services essentiels. L'habitation constitue un facteur déterminant de la santé, du bien-être, de l'employabilité et même de la capacité d'apprentissage des occupants. Les logements malsains et surpeuplés peuvent compromettre l'état de santé et le rendement des gens.
Enfin, je voudrais vous parler de la pauvreté causée par le coût de l'énergie, qui constitue une préoccupation grandissante pour les citoyens de ce pays. Les ménages à faible revenu ont gravement besoin du financement que prévoit ce projet de loi pour l'amélioration du rendement énergétique des logements. En Ontario, par exemple, le dernier quintil de revenu consacre trois fois plus de revenus à l'énergie, soit 12 p. 100 du revenu du ménage—que les personnes à revenu moyen, qui y consacrent seulement 4 p. 100 de leur revenu. Ainsi les programmes destinés à améliorer le rendement énergétique des logements permettraient à ces résidents de faire évaluer leur logement et de décider d'y apporter les améliorations qui leur permettront d'économiser de l'argent.
Je crois que vous savez tous à quel point le fait de ne pas avoir accès à une habitation abordable et de vivre dans un quartier pauvre influe sur la vie de vos contribuables. Les difficultés d'aujourd'hui peuvent devenir les occasions de demain, surtout lorsqu'il devient possible, grâce à des fonds privés, à l'appui du public, et à l'énergie des citoyens des collectivités concernées, de créer de meilleures habitations et des collectivités plus fortes.
Au nom de l'ACHRU, de nos membres et de nos partenaires, je vous exhorte tous à adopter rapidement le projet de loi C-48.
Merci.
Á (1130)
Le président: Merci, madame Potter.
[Français]
Nous allons maintenant entendre le représentant du Front d'action populaire en réaménagement urbain.
Monsieur Roy.
M. François Roy (coordonnateur, Logement'occupe, Front d'action populaire en réaménagement urbain): Bonjour.
Nous vous remercions de nous accueillir ce matin. Le président du FRAPRU, M. François Giguère, qui était ici la semaine dernière, ne pouvait pas venir aujourd'hui. J'ai donc accepté de le remplacer au pied levé.
Je m'appelle François Roy et je suis coordonnateur de Logemen'occupe, un comité de logement qui est actif sur le plan de la défense des mal-logés à Gatineau et qui est un membre actif du FRAPRU. Je suis accompagné de M. André Brunet, qui est locataire d'un logement à prix modique ici, à Gatineau, dans le cadre d'un projet de logement social. M. Brunet est un ancien homme d'affaires qui était propriétaire de trois salons de coiffure. Après avoir eu des problèmes de santé, il a été itinérant pendant une dizaine d'années. Depuis maintenant cinq ans, M. Brunet habite dans un logement avec du soutien communautaire et a pu stabiliser sa situation.
Le FRAPRU est un regroupement national au Québec qui regroupe plus de 100 organismes. Cet organisme est né en 1978 et se consacre depuis à la défense du droit au logement, et plus particulièrement à la promotion du logement social sous ses différentes formes, qu'il s'agisse de coopératives d'habitation, de logements à but non lucratif ou de HLM.
Dans les années 1990, plus particulièrement en 1994, le FRAPRU s'est opposé de façon virulente au retrait du gouvernement Mulroney du développement du logement social. Depuis lors, il n'a pas lâché prise, interpellant les différents gouvernements, tant sous M. Jean Chrétien que sous M. Paul Martin, sur la nécessité de réinvestir de façon importante dans le logement social à prix modique. Nous voulons faire une nuance ici. Quand nous parlons de logement social, il ne s'agit pas du logement abordable, mais véritablement du logement à prix modique.
Dans cette perspective, nous étions heureux de l'entente Martin-Layton, qui nous proposait une enveloppe de 1,6 milliard de dollars contenue dans le projet de loi C-48 pour le logement à prix modique. En effet, le Québec a presque épuisé les 236 millions de dollars qui lui avaient été affectés pour le Programme de logement abordable. Pour nous, cet investissement est une nécessité en raison de l'ampleur du problème au Québec, comme cela a été indiqué par les différents représentants.
Au Canada, comme on l'a mentionné, il y a au-delà de 1,5 million de ménages qui consacrent plus de 30 p. 100 de leur revenu à leur logement. Au Québec, d'après les données du dernier recensement, qui sont probablement dépassées au moment où on se parle, il y avait 447 000 ménages qui dépensaient plus de 30 p. 100 de leur revenu et 219 000 ménages qui dépensaient plus de 50 p. 100 de leur revenu pour se loger. Il faut également rappeler qu'on estime qu'il y a au-delà de 150 000 sans-abri au Canada. C'est complètement indécent dans un pays aussi riche que le Canada. Dans une étude de Santé Québec réalisée il y a trois ou quatre ans, on avait dénombré 13 000 personnes sans abri à Montréal et au-delà de 3 600 dans la ville de Québec. Pour nous, cet investissement est donc une nécessité compte tenu de l'ampleur de la crise du logement.
Au Québec, à l'heure actuelle, il y a six régions métropolitaines qui ont des taux d'inoccupation inférieurs à 1,6 p. 100, alors que la norme reconnue pour avoir un équilibre est de 3 p. 100. On parle ici de taux d'inoccupation et non de logement accessible. Nous voulons que l'investissement fédéral aille directement au logement social, comme l'avait promis M. Martin, et qu'il respecte la juridiction du Québec, évidemment.
Dans le cas du projet de loi C-48, nous considérons que rien n'empêche de respecter la juridiction du Québec, comme cela avait été le cas dans le Programme de logement abordable, qui avait pu être mis en oeuvre grâce à une entente avec Québec. Dans cette perspective, nous lançons un appel à l'ensemble des députés ici présents pour qu'on ne ralentisse pas le processus d'adoption du projet de loi C-48 et qu'on investisse rapidement les 1,6 milliard de dollars prévus pour le logement. Nous aimerions que le budget soit adopté rapidement en raison de l'urgence de la situation.
Pour terminer, nous aimerions rappeler que, pour nous, cette enveloppe de 1,6 milliard de dollars n'est qu'un début, et qu'il serait important de rajouter 2,4 milliards de dollars à partir des surplus de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, qui sont considérables.
Á (1135)
Avec l'ajout de ces deux enveloppes, l'investissement totaliserait 4 milliards de dollars sur deux ans, ce qui répondrait à toutes fins pratiques aux revendications émises partout au Canada. Cela correspond à la solution du 1 p. 100 préconisée, à l'instar de tous les organismes canadiens de ce domaine, par le Bloc québécois et le NPD.
Je crois avoir couvert l'essentiel du sujet. Je pourrai répondre aux questions plus tard. Merci.
Le président: Merci, monsieur Roy.
[Traduction]
Nous accueillons M. Robson, de l'Institut C.D. Howe.
M. William Robson (premier vice président et directeur de la recherche, Institut C.D. Howe): Merci. Je suis ravi d'être parmi vous. J'espère que le comité n'en a pas assez de me voir.
J'ai comparu devant le comité il y a à peine un mois, et à cette occasion, nous avons discuté des prévisions budgétaires du gouvernement fédéral et de l'opportunité de créer un organisme indépendant. Je ne compte pas répéter ce que je vous ai déjà dit, mais ce sur quoi j'ai insisté ce jour-là, c'était que le système actuel est devenu dysfonctionnel. Nous visions le résultat net à l'époque où nous enregistrions de gros déficits. Nous continuons à viser le résultat net à une époque où le gouvernement enregistre des excédents, et je crois par conséquent qu'il y aurait lieu maintenant de faire les choses un peu différemment.
Je suis parmi vous un peu comme celui qui se trouve au bar mais qui ne boit pas, alors permettez-moi de vous parler tout de suite de mes préoccupations précises.
La situation que nous avons connue ces huit dernières années est inhabituelle. Nous avons eu sans arrêt des surprises, étant donné que les recettes ont toujours dépassé les prévisions du ministère des Finances. De plus, les frais d'intérêt ont été inférieurs à la prévision, et nous avons en même temps connu une augmentation très importante des dépenses chaque année qui n'étaient pas inscrites dans le budget. Le fait est que cela ne devrait pas normalement se produire. Les surprises ne devraient concerner qu'une augmentation des recettes et une réduction des dépenses. Vous aurez forcément à dépenser moins au titre de l'assurance-emploi si l'économie est forte, et inversement.
Or depuis un moment, nous dépensons la totalité de nos revenus, ce qui veut dire que lorsque des surprises positives arrivent, le gouvernement fédéral a en réalité dépensé beaucoup plus. Au cours des huit dernières années, si vous examinez la différence entre les chiffres du budget et les chiffres réels à la fin de l'exercice, vous verrez que les recettes non anticipées sont montées à 45 milliards de dollars—ça, c'est après avoir comparé les chiffres du budget de chaque exercice avec ceux inscrits dans les Comptes publics—ainsi que des économies non prévues de frais d'intérêt de 9 milliards de dollars, soit 54 milliards de dollars en tout de marge budgétaire non prévue. Il s'agit là de tout ce qui n'a jamais été inscrit dans les budgets.
Un tiers de cette somme a servi à réduire notre dette—ce qui n'est pas mauvais en soi—mais les autres deux tiers ont donné lieu à 35 milliards de dollars de dépenses de programmes non prévues; il s'agir de dépenses qui n'ont jamais été présentées dans aucun budget. Dans certains cas, ces dépenses ont été à la fin de l'exercice, après le 31 mars, à l'aide de certaines pratiques qui ont d'ailleurs été critiquées par la vérificatrice générale. Dans certains cas, il s'agit de dépenses supplémentaires, qui posent moins problème en ce qui concerne le contrôle qu'exerce le Parlement sur les deniers publics, mais qui sont quand même problématiques en ce sens que le budget constitue le seul moment où vous avez la possibilité de tout voir en même temps et de poser des questions stratégiques. Il est manifeste—et c'est ça qui est exaspérant—que dans bien des cas, la décision d'engager la dépense a été prise en premier lieu, et ce n'est qu'en deuxième lieu ou encore beaucoup plus tard qu'on a commencé à réfléchir à ce à quoi servirait l'argent et comment l'engagement de la dépense concernée permettrait d'atteindre les objectifs fixés.
Lors d'une récente réunion de l'Association canadienne d'économique, Jim Stanford—qui serait d'ailleurs plus à l'aise au bar ici que chez les travailleurs de l'automobile—et moi-même avons parrainé un forum mixte; c'est-à-dire que le Forum de l'économique progressiste et l'Institut C.D. Howe ont été tous les deux les hôtes d'une séance mixte. Tim O'Neill a fait un exposé, de même que Paul-Henri Lapointe du ministère des Finances, ainsi que Jim et moi.
Il y avait de nombreuses divergences d'opinions, bien entendu, mais il y avait aussi de nombreux domaines où les participants étaient d'accord sur l'analyse de ce qui arrive depuis un moment et sur certaines des conséquences négatives de cet état de choses. Dans mon exposé, j'ai fait valoir les arguments que vous venez d'entendre, et pour prouver le bien-fondé de ma conviction que nous dépensons d'abord et réfléchissons après—la preuve par excellence d'une politique budgétaire dysfonctionnelle—j'ai cité l'exemple de ce projet de loi. Il est idéal quand on fait un exposé de ce genre; on peut tout mettre sur un seul acétate.
Comme vous pouvez vous imaginer, étant donné que le Forum de l'économique progressiste et l'Institut C.D. Howe étaient coparrains de la conférence, les participants ont constitué un groupe assez hétérogène, mais le fait est qu'ils ont tous ri. C'est un projet de loi tout à fait étonnant. En 400 mots, il autorise le ministre à dépenser 4,5 milliards de dollars, sous réserve de certaines limites qu'on ne peut connaître à l'avance, et ce pour à peu près tout et à peu près n'importe comment. Tous les gens de la salle ont ri, mais parfois on a envie de rire parce que si on ne rit pas, on risque de pleurer.
Autoriser des dépenses antidatées de cette façon—à mon avis, le Parlement ne devrait pas faire cela. Si n'importe lequel des organismes représentés autour de cette table décidait d'antidater ses dépenses comme ce projet de loi semble le prévoir, nos vérificateurs refuseraient de signer nos états financiers. Si nous étions des entreprises privées, nous pourrions finir en prison.
La majeure partie des dépenses, dans la mesure où les détails nous permettent de le déterminer, concerne des secteurs où le gouvernement fédéral est soit moins compétent que les administrations provinciales et municipales, ou n'a pas donné la preuve qu'il a les capacités voulues pour régler les problèmes, et où les modalités qui sont censées permettre d'atteindre un tel résultat—et l'enseignement postsecondaire est un exemple particulièrement pertinent—n'ont pas été bien réfléchies.
Je ne voudrais pas vous sembler entièrement négatif, parce que l'établissement d'un budget fédéral peut être un outil très puissant quand il est utilisé à bon escient.
Permettez-moi donc de terminer en abordant trois points. Premièrement, dans les mois qui viennent, afin de sortir de cette situation impossible, il serait utile d'officialiser jusqu'à un certain point l'incertitude du processus budgétaire. Il y a énormément d'éléments qui sont incertains—les surprises qu'il pourrait y avoir, la structure de l'économie, et l'incidence de la politique budgétaire sur l'économie. À mon sens, nous comprendrions mieux les difficultés inhérentes au processus budgétaire si cette incertitude était officiellement reconnue au moment de présenter un plan budgétaire.
Á (1140)
Deuxièmement, il est possible que la création d'un organisme distinct améliorerait la situation. Le ministère des Finances est chargé de préparer un plan budgétaire. Il y aurait peut-être grand intérêt à créer un organisme distinct qui établit des paramètres clés et le contexte, parce qu'il y a forcément un élément de tension lorsqu'un même organisme fait les deux.
Quant au troisième point, c'est-à-dire la raison pour laquelle nous devrions nous intéresser à ce problème, ce projet de loi semblait peut-être comique pour le public devant lequel je faisais mon exposé, mais par rapport à un contexte général dont il est la principale composante, il l'est beaucoup moins. Nous assistons à une série d'accords qui sont conclus avec les provinces, l'une après l'autre, leur prévoyant le versement de certains fonds, et on a un peu l'impression qu'il suffit de mettre le drapeau canadien en berne pour se faire offrir du cash. Pour moi, l'histoire risque de juger mal ce qui a été fait au cours de cette période.
Ces dépenses irréfléchies compromettent notre capacité de rembourser la dette. Elles accaparent les crédits dont nous avons besoin pour financer des fonctions fédérales essentielles que personne d'autre ne peut remplir. La défense est évidemment en tête de liste. Elles empêchent aussi de réduire les impôts. Et elles empêchent surtout d'accorder le genre d'allégements fiscaux que le citoyen moyen ne remarque pas, c'est-à-dire l'impôt sur les sociétés. Le citoyen moyen ne sait pas pourquoi il y a moins d'emplois, pourquoi son salaire est inférieur, pourquoi le rendement de sa pension est inférieur à ce qu'il aurait pu être. Mais il faut bien que les impôts versés par les sociétés soient payées par quelqu'un. Moi-même j'ai une petite entreprise, et je peux vous dire qu'il n'y a pas de moyen magique de générer de l'argent. Cet argent sort des poches des membres de ma famille. Ces dépenses nous empêchent donc de réduire les impôts que paient les familles, alors que le gouvernement fédéral devrait d'ores et déjà être en mesure d'offrir de telles réductions. Les provinces ont de grosses dépenses engagées dans les mois qui viennent. Nous avons déjà entendu parler de l'enseignement postsecondaire; tous les jours on nous parle du système de soins, et récemment la Cour suprême a fait des déclarations importantes à ce sujet. Les provinces ont donc besoin de cette marge financière, et par conséquent le gouvernement fédéral ne devrait pas tout garder pour lui.
Je peux concevoir une politique budgétaire fédérale plus intelligente. Je peux concevoir une politique budgétaire fédérale qui reconnaît les incertitudes qui existent et ne prévoit pas de réduire les dépenses ou de dépenser davantage de façon ponctuelle tout au long de l'exercice de manière à atteindre certains objectifs jugés essentiels. Je peux concevoir une politique budgétaire qui a recours à l'expertise de spécialistes indépendants pour quantifier certains risques et établir un plan. Je peux concevoir une politique budgétaire fédérale qui met l'accent sur les priorités fondamentales et favorise la croissance économique et une fédération plus saine. Mais dans ce que je viens de vous décrire, le projet de loi C-48 n'a pas vraiment sa place, à mon avis.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Robson.
Monsieur Solberg.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Merci, monsieur le président.
Je trouve vraiment ironique que le ministre des Finances soit à Halifax ce matin pour demander aux entreprises de viser une productivité accrue en parlant des grands défis économiques que nous aurons à relever dans les mois qui viennent. Nommons entre autres la concurrence de pays comme la Chine et l'Inde, et l'évolution du profil démographique du pays dans les prochaines années. D'ici l'an 2030, nous aurons deux fois plus de personnes âgées qu'à l'heure actuelle. Cela exercera de fortes pressions sur notre système de soins de santé et notre régime de pensions. Bon nombre des nouveaux emplois qui sont créés supposent l'obtention d'un diplôme d'études postsecondaires. Je trouve donc ironique, vu ce que M. Robson vient de nous dire, que le ministre des Finances déclare maintenant que c'est une grande priorité, alors qu'il nous demande d'adopter un projet de loi qui perpétue bon nombre des problèmes que nous connaissons actuellement au Canada.
Je voudrais d'abord aborder la question de l'enseignement postsecondaire. Bien sûr, les études postsecondaires sont importantes si nous voulons relever notre productivité. À mon avis, personne ne contesterait cette réalité. Mais en même temps, il est dangereux d'essayer de régler le problème à coups de millions. Et c'est justement cela que nous faisons dans le contexte actuel, avec le projet de loi C-48. En fait, j'ai constaté qu'il y a une certaine divergence d'opinions sur le véritable impact de cette mesure budgétaire. M. White dit que le projet de loi C-48 permettra de commencer à régler les problèmes des étudiants en ce qui concerne les frais de scolarité. Par contre, M. Soule a dit que les étudiants n'auraient plus à se laisser écraser de dettes à cause des frais de scolarité.
J'invite donc l'un d'entre vous, ou tous les deux, à répondre à la question que voici : Quel sera le véritable résultat de tout cela? Ce projet de loi permettra-t-il de régler le problème de la hausse des frais de scolarité? Est-il aussi fantastique que cela? Comment allons-nous faire accepter cela par les provinces, étant donné que les provinces ont la responsabilité de l'enseignement postsecondaire, alors que bon nombre d'entre elles n'ont manifesté aucune volonté de respecter les règles établies par le chef du NPD en ce qui concerne le projet de loi C-48?
Á (1145)
M. Toby White: Je vais m'y attaquer en premier. Nous ne sommes pas du tout convaincus que ce projet de loi, à lui seul, permettra de régler tous les problèmes qui caractérisent actuellement le système d'enseignement postsecondaire. Ce projet de loi est loin d'être parfait. Mais nous espérons que s'il est adopté, et quand il aura été adopté, il pourra servir de catalyseur pour amener les changements qui sont essentiels, et il ne faut pas non plus oublier que nous avons besoin de crédits au titre des frais de scolarité et de l'aide financière aux étudiants.
À mon avis, le gouvernement fédéral pourra ouvrir un dialogue avec les provinces. Je pense qu'il sera possible de travailler avec les provinces pour que ces crédits servent à améliorer l'aide financière aux étudiants et à réduire les frais de scolarité. Je pense même que plusieurs provinces ont déjà indiqué que telle est l'orientation qu'elles comptent prendre. L'idéal serait que toutes les provinces décident de prendre cette même orientation.
M. Monte Solberg: Mais si vous vous précipitez sans qu'un accord ne soit déjà conclu entre les provinces et le gouvernement fédéral pour que cet argent serve à réduire les frais de scolarité, n'y a-t-il pas un danger que l'argent ne serve pas à cela?
M. George Soule: Je vais m'attaquer à cette partie de votre question, en vous disant que, pour notre part, nous avons observé au cours des 12 derniers mois, que les provinces s'engagent d'ores et déjà à réduire les frais de scolarité. Si on fait le tour, la Colombie-Britannique s'est engagée à plafonner les augmentations; Ralph Klein en Alberta s'est engagé à payer toute augmentation future des frais de scolarité. Après avoir soutenu pendant des années qu'il n'accepterait jamais de geler les frais de scolarité, le gouvernement de la Saskatchewan vient d'opter pour un blocage des frais de scolarité. Nous en sommes à la cinquième année de gel au Manitoba, et à la deuxième année de gel en Ontario. Sur 30 des 35 dernières années, les frais de scolarité sont bloqués au Québec. À Terre-Neuve-et-Labrador, on parle de six années de gel après deux années de réductions. Donc, des engagements ont été pris.
En ce qui concerne les accords, la Nouvelle-Écosse a joué un rôle de chef de file dans ce domaine. Cette dernière a déjà adopté un projet de loi prévoyant que lorsque la province touchera les crédits, ces crédits serviront à réduire les frais de scolarité et à créer un programme de subventions dans la province. À Terre-Neuve-et-Labrador, Danny Williams a pris le même engagement. En Ontario, l'ancien premier ministre Bob Rae a récemment laissé entendre qu'il fallait augmenter les frais de scolarité de même que le financement des établissements, mais lorsque le budget provincial a été déposé, le gouvernement provincial a déclaré qu'il reconnaissait la nécessité d'un financement accru, mais qu'il estimait que les frais de scolarité constituaient une priorité, si bien que le gel serait maintenu.
Je tiens aussi à préciser que je laissais entendre dans mes propos qu'il s'agit d'un premier pas favorable vers l'élimination des problèmes que posent les frais de scolarité et les niveaux d'endettement. Mais il est évident que ce projet de loi ne constitue aucunement la solution finale. On parle d'un financement de seulement 1,5 milliard de dollars, même si cela représente un progrès considérable. C'est aussi un progrès très important en ce sens que le gouvernement fédéral reconnaît à présent qu'il a un rôle à jouer dans la réduction des frais de scolarité. La Nouvelle-Écosse a été la première à agir, mais je ne pense pas que beaucoup d'administrations provinciales seront prêtes à négocier s'il n'y a pas d'argent sur la table. Donc, le fait que le gouvernement fédéral lance une véritable initiative en disant aux provinces qu'il est prêt à verser la somme de 1,5 milliard de dollars pour réduire les frais de scolarité encourage les provinces à conclure des accords. À mon avis, c'est le seul moyen d'atteindre cet objectif.
M. Monte Solberg: Dans le même ordre d'idées, je vous fais remarquer qu'il s'agit d'un accord sur deux ans. Après cela, il n'y aura rien de garanti, étant donné que celui qui paiera sera celui qui décidera, et il est possible que les provinces décident à ce moment-là de recommencer à relever les frais de scolarité. À mon avis, il faut reconnaître cette réalité-là.
Deuxièmement, avez-vous pris position sur le pourcentage du coût total des études que les étudiants devraient avoir à payer? Avons-nous décidé que le niveau actuel de dépenses pour les étudiants est approprié par rapport au coût global de leurs études? Quelle est votre position à ce sujet?
M. George Soule: Pour répondre à la première partie de votre question, encore une fois il s'agit d'un premier pas, et ces 1,5 milliard de dollars devraient permettre d'ouvrir un dialogue. L'un des documents que nous avons fait distribuer aux membres concerne un transfert destiné à l'éducation postsecondaire. Il s'agirait donc d'un transfert aux provinces expressément destiné à l'éducation postsecondaire, comme les transferts qui sont faits pour le système de soins, et s'il devait se concrétiser, il permettrait d'imposer certaines exigences aux provinces en ce qui concerne l'amélioration de l'accessibilité et de la qualité des études postsecondaires.
Donc, nous insistons sur le fait qu'il s'agit d'un premier pas. Nous espérons que cette mesure lancera les négociations qui conduiront à la conclusion d'accords provinciaux garantissant que ce soit une priorité à long terme. L'idée du transfert canadien au titre de l'éducation émane de l'Association canadienne des professeurs et professeures d'université dont les représentants ne sont malheureusement pas parmi nous aujourd'hui, mais nous travaillons de concert avec cette association dans plusieurs domaines, y compris pour la création d'un transfert canadien au titre de l'éducation postsecondaire.
Á (1150)
Le président: Merci, monsieur Soule.
Monsieur Côté.
[Français]
M. Guy Côté (Portneuf—Jacques-Cartier, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci pour vos présentations. J'aimerais aborder deux questions.
Mis à part le fait qu'il annonce des montants dans divers secteurs, le projet de loi C-48 ne va pas plus loin, et c'est entre autres ce qui nous cause problème, au Bloc québécois. Par exemple, dans le domaine de l'éducation et du logement social — et M. Solberg l'a bien expliqué plus tôt —, on ne précise aucunement à quoi sera alloué cet argent. Sera-t-il consacré au maintien ou à une baisse des frais de scolarité? On ne peut pas savoir si ces fonds seront utilisés, par exemple, pour augmenter le montant des bourses ou des prêts étudiants. Rien n'empêche le gouvernement d'aller dans cette direction.
Au Québec dernièrement, on a vu ce que pouvait donner une augmentation du montant des prêts. À prime abord, cela peut sembler intéressant, mais il reste que le niveau d'endettement des étudiants augmente, ce qui n'est pas nécessairement la solution. Le problème, en ce qui concerne le projet de loi C-48, c'est qu'on ne connaît pas exactement les intentions du gouvernement. Vous conviendrez avec moi qu'advenant le cas où le gouvernement opterait pour une stratégie nationale relative à la baisse des frais de scolarité, celle-ci ne serait pas pertinente au Québec, où le problème ne se situe pas vraiment à ce niveau. C'est un réinvestissement en matière d'infrastructures scolaires et de bibliothèques scolaires, entre autres, qui s'avère nécessaire. Bref, aucun plan précis ne fait état de la façon dont le gouvernement va dépenser ces fonds. On parle uniquement d'appuyer les programmes de formation et de faciliter l'accès à l'enseignement, notamment chez les autochtones.
Par exemple, on parle dans le projet de loi d'un versement d'« un maximum de 900 millions de dollars pour l’environnement — notamment pour les systèmes de transport en commun et les travaux d’amélioration de l’efficacité énergétique des habitations à loyer modique ».
On a annoncé la semaine dernière un investissement qui représente 800 des 900 millions de dollars disponibles. Tout sera consacré au transport en commun. Je tiens à souligner que le transport en commun est important et que c'est bien. Cependant, rien n'aurait empêché le gouvernement, s'il l'avait voulu, de faire exactement l'inverse dans le cadre de ce projet de loi.
Pour ces motifs, nous proposerons un certain nombre d'amendements lorsque le temps sera venu d'effectuer l'étude article par article afin que le projet de loi soit un peu plus précis et réponde plus spécifiquement aux besoins du Québec. Il s'agit en partie du même problème dans le domaine du logement social. Nous conviendrons tous que la situation ne serait pas celle que nous connaissons s'il n'y avait pas eu cette dizaine d'années de désengagement. À l'heure actuelle, dans ce secteur, on a vraiment besoin d'un investissement massif. Nous avons toujours préconisé l'engagement dans des domaines comme celui-là.
Monsieur Roy, vous disiez plus tôt désirer que les compétences respectives soient respectées dans le cadre de ce projet de loi. Or, même si on peut se réjouir du fait que 1,6 milliard de dollars sont investis dans le logement social, la façon dont le gouvernement s'y prend cause problème. En ce qui concerne la mise en application du projet de loi, on parle très clairement d'ententes conclues directement avec les municipalités. Encore une fois, on ne donne pas de détails.
Lorsque le gouvernement fédéral dit vouloir investir dans le logement social, parle-t-il de subventions aux propriétaires visant à construire de nouvelles habitations à prix modique? Rien n'empêche le gouvernement fédéral de le faire, mais il reste qu'on ne sait pas si c'est le cas; ce n'est pas précisé. Est-il question que par le biais de la réglementation, le gouvernement fédéral fasse en sorte que la majeure partie de l'argent soit allouée aux grandes municipalités, compte tenu que ces dernières comportent une masse critique? Cela n'est pas non plus précisé dans le projet de loi. Les réserves que nous avons face au projet de loi C-48 sont de cet ordre. Nous pouvons cependant vous assurer que nous travaillerons à l'améliorer. Pour ce faire, nous espérons recueillir l'appui de nos collègues du NPD, du Parti conservateur ou encore du Parti libéral. Dans certains secteurs très importants, des réinvestissements massifs sont nécessaires à court terme. Malheureusement, c'est là que le gouvernement fait de la petite politique de façon à se maintenir au pouvoir. C'est dans les faits la façon dont il a procédé.
Voilà les réflexions qui me sont venues à l'esprit. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.
Á (1155)
M. François Roy: Pour nous, c'est nettement insuffisant. Toutefois, nous considérons que c'est un pas en avant compte tenu de ce que nous avons vécu au cours des 10 dernières années. Quand le gouvernement fédéral s'est désengagé, il y a eu un prix important à payer partout au Québec et au Canada. Si nous vivons la situation actuelle, c'est qu'il y a eu un désengagement important depuis 1994. Nous reconnaissons qu'il peut y avoir des améliorations, mais malgré cela, nous considérons que c'est un pas en avant. Dans le cadre du Programme de logement abordable, on a conclu une entente avec le Québec et la juridiction de celui-ci a été respectée. Le taux est passé au niveau de la SCHL. Au Québec, avec l'implication des organismes, on s'est assuré que l'argent aille véritablement au logement social géré par des OSBL. Une infime partie de l'argent est allée au secteur privé.
Par ailleurs, dans la version anglaise de l'entente, on parle de logement abordable, alors que dans sa version française on parle de logement à prix modique. Pour nous, c'est une nuance importante. J'en discutais encore hier avec des personnes qui m'accompagnaient à mon retour de Québec, où avait eu lieu le congrès du FRAPRU. Le logement abordable est nettement inaccessible pour les gens qui travaillent au salaire minimum. Nous voulons donc nous assurer que les sommes octroyées le soient pour la réalisation de logements à prix modique véritablement accessibles pour les ménages à faible revenu. Nous avons peut-être des craintes et cela peut être bonifié, mais nous pensons que c'est quand même un plus pour les mal-logés du Canada et du Québec.
J'ai oublié de mentionner un point dans ma présentation. Cet argent nous permettrait également de reconduire le programme IPAC, qui a permis des investissements importants sur le plan du logement et des groupes qui interviennent auprès des sans-abri partout au Canada. Je vous rappelle qu'un comité de l'ONU a reconnu que la situation des sans-abri constituait une crise nationale. Il est complètement inadmissible, dans un pays aussi riche que le Canada, qu'on se retrouve avec une population de sans-abri comme celle qu'on voit à l'heure actuelle. Cet argent nous permettrait de reconduire le programme IPAC. Selon les estimations, pour le Québec, il s'agit de 200 millions de dollars annuellement. Ce n'est pas rien. Le programme québécois permet de réaliser 1 200 unités avec 35 millions de dollars. On pourrait faire beaucoup avec cet argent. Nous reconnaissons que ce n'est pas assez, mais c'est quand même un plus.
Le président: Merci, monsieur Roy.
[Traduction]
C'est à Mme Minna, suivie de Mme Wasylycia-Leis.
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, monsieur le président.
Il est évident que je suis en faveur du projet de loi, et je voudrais vous expliquer pourquoi ce dernier me semble si important, ne serait-ce que dans le domaine de l'habitation. Ensuite j'aurais quelques questions à vous poser.
J'ai constaté certaines réactions face aux propos de certains témoins, mais ce n'est pas la première fois que nous prenons une initiative dans le domaine de l'habitation. Je sais que nous avons été absents pendant un certain temps, mais nous sommes actifs dans ce secteur depuis un moment maintenant. Le programme destiné aux sans-abri annoncé il y a quelques années est un exemple des accords tripartites conclus par les administrations fédérale-provinciales-municipales. En fait, au niveau communautaire à Toronto, le programme pour les sans-abri est exécuté de concert avec la Ville de Toronto, et cela donne d'excellents résultats. Dans toutes les régions du Canada, il existe des accords semblables—il s'agit des 600 millions de dollars.
De plus, la dernière tranche de financement destiné au secteur de l'habitation, qui était de 1,5 milliard de dollars, si je ne m'abuse, avait été utilisée, si bien que le financement en question a été renouvelé dans le discours du Trône. Donc ce projet de loi avance l'échéancier en prévoyant que ces crédits soient investis maintenant, plutôt que dans deux ans. Voilà à quoi servira l'injection de 1,6 milliard de dollars. Il en était question dans le discours du Trône, si bien que ce n'est pas quelque chose de nouveau ou d'injustifié. Par exemple, nous avons récemment annoncé la conclusion d'un accord d'une valeur de 601 millions de dollars avec la province de l'Ontario, et je vous fais remarquer que sur cette somme, quelque 300 millions de dollars étaient encore dans une banque quelque part parce que Mike Harris avait refusé de s'en servir en Ontario. Par contre, dans les autres régions du Canada, nous avons fait des investissements et nous avons construits des logements.
Donc, des partenariats fédéral-provincial dans ce domaine existent depuis un moment, et nous avons conclu récemment un certain nombre d'accords, et continuerons à le faire. Donc, il n'y a rien de bien nouveau dans tout cela.
Par contre, je pense que tous les paliers de gouvernement s'engagent à construire des logements abordables et à travailler… Vous avez raison de dire qu'il est très important que ces projets soient exécutés dans les localités mêmes. C'est M. Wilson qui en parlait tout à l'heure, je pense. Dans ma propre circonscription électorale, il existe un organisme qui s'appelle Senior Link, qui s'occupe de questions liées aux logements pour personnes âgées. Ils vont bientôt inauguré un nouvel immeuble. Ce qui est intéressant—et cela rejoint ce que certains ont dit au sujet de l'amélioration du rendement énergétique des maisons et l'importance de réduire les coûts dans ce domaine—c'est que cet immeuble est muni de panneaux solaires. Voilà la source d'énergie prévue. Il est même possible que grâce aux panneaux solaires, ils pourront vendre une partie de l'énergie ainsi générée—parce que celui qui est chargé du projet fait ce qu'il fait—à d'autres immeubles que possèdent Neighbourhood Link ou à d'autres immeubles pour personnes âgées, et peut-être même à l'hôpital situé tout près. Des discussions sont en cours à ce sujet.
Donc, les possibilités dans ce domaine sont vraiment phénoménales.
Monsieur Wilson, j'estime que les coopératives d'habitation constituent l'une des formes les plus intéressantes de logements abordables jamais créés au Canada, et je suis 100 p. 100 en faveur. Il en faut davantage, à mon avis.
Je sais qu'un nouveau cadre national pour l'habitation sera bientôt déposé par le ministre, et je sais qu'une certaine restructuration est actuellement en cours à la SCHL concernant le rôle qu'elle a joué par le passé dans ce domaine. Je voudrais savoir de vous, ou des représentants de la Fédération d'habitation coopérative du Canada si vous avez eu des discussions avec la SCHL ou le ministre concernant de nouveaux programmes ou arrangements potentiels qui pourraient faire partie de ce cadre. Il y a déjà eu des discussions à ce sujet, et il me semble important qu'elles continuent.
 (1200)
M. Christopher Wilson: Oui, je peux vous affirmer que nous tous avons justement participé aux discussions pilotées par le ministre Fontana sur l'élaboration d'un nouveau cadre national pour l'habitation.
Il me semble aussi important d'insister sur le fait que le Canada peut être fier de cette longue tradition qui existe au pays en ce qui concerne la construction de logements abordables. Ce que nous demandons, essentiellement, c'est le renouvellement de cette tradition. Pendant un long moment jusqu'au milieu des années 90, le Canada était un véritable chef de file dans la construction d'habitations abordables. Malheureusement, à l'exception de quelques initiatives prises récemment dans ce domaine, nous n'avons pas bénéficié des investissements requis. D'ailleurs, je précise que ces investissements ont été faits par des gouvernements de toutes les orientations politiques—c'est-à-dire que ce sont à la fois des gouvernements conservateurs et libéraux qui ont investi dans ce domaine. La cause principale du problème actuel des sans-abri est les faibles sommes investies dans la construction de logements abordables au cours des 10 dernières années; en ce qui nous concerne, le problème des sans-abri n'est qu'une infime partie de la réalité pour ce qui est de la terrible pénurie d'habitations abordables.
Donc, il y a effectivement toutes sortes de programmes qui peuvent être mis en place. Nos amis l'ACHRU ont parlé des projets qui sont prêts à être lancés. Nous serions ravis si un nouveau programme de coopératives d'habitation pourrait voir le jour. Il en va de même pour de nouveaux programmes de logements à but non lucratif. Dans toutes sortes de segments de la population canadienne, les besoins sont considérables. Donc, oui, nous sommes prêts à agir.
Pour revenir sur le point soulevé par notre ami, William Robson, en fait, je suis d'accord avec lui. Je ne pense pas que ce soit la bonne façon de préparer un budget. Nous avons beaucoup insisté pour que l'engagement relatif aux logements abordables fasse partie du budget. En ce qui me concerne, c'est sur ce genre de priorités qu'il faut se concentrer dans le budget.
Je voudrais aussi mentionner qu'après autant d'années de non-investissement dans les programmes sociaux, nous faisons maintenant face à un énorme déficit social au Canada qu'il faut absolument combler. Ce déficit est très manifeste dans le secteur du logement. Donc, vous avez parfaitement raison : tout cela devrait faire partie de la planification gouvernementale et il devrait s'agir d'engagements permanents.
L'argent budgété sera-t-il suffisant pour régler tous ces problèmes? Bien sûr que non. Même si 1,5 milliard de dollars représentent une somme considérable, et même si nous sommes très reconnaissants de pouvoir en bénéficier, c'est une goutte d'eau dans la mer comparativement aux besoins. Mais c'est tout de même un début, et il faut l'accepter comme tel, il faut commencer à faire de tels investissements. Il est temps que le gouvernement fédéral recommence à agir dans un domaine où son action a toujours été très efficace, d'ailleurs. Les 91 000 unités qui existent au Canada dans les coopératives d'habitation sont le résultat de trois programmes fédéraux de coopératives d'habitation qui ont été menés à bien par le gouvernement fédéral, dans certains cas, de concert avec les provinces.
Le président: Merci.
[Français]
Monsieur Roy, veuillez répondre rapidement, s'il vous plaît.
M. François Roy: Nous avons eu l'occasion de rencontrer M. Fontana et de discuter avec lui de la mise en place d'un futur cadre national sur l'habitation. Nous avons dit à M. Fontana qu'il ne faudrait pas qu'il y ait des délais trop longs en ce qui a trait à la mise en place de ce cadre. À l'heure actuelle, les sommes octroyées au Québec via le Programme de logement abordable sont presque toutes dépensées et plusieurs projets sont en attente. Il ne faudrait pas pénaliser des groupes promoteurs de projets et les mal-logés du Québec. Nous sommes préoccupés, car il y a urgence, selon nous.
Nous avons aussi mentionné à M. Fontana que la structure de livraison au Québec fonctionne relativement bien. Ce qui nous manque, c'est de l'argent. Il ne faudrait pas que le Québec soit pénalisé encore une fois à cause de son succès. Je pense que les sommes octroyées via le Programme de logement abordable ont été bien dépensées. Cela a bien réussi au Québec, mais ailleurs au Canada cela a peut-être moins bien fonctionné. Encore une fois, le Québec se retrouve pénalisé à cause du succès de l'opération.
En ce qui a trait à l’Initiative de partenariats en action communautaire, ou l'IPAC, c'est la même chose. Pour nous, il y a urgence. Il faut comprendre que le deuxième volet de l'IPAC se termine le 31 mars 2006. C'est dans moins de sept mois. Au Canada, des centaines d'organismes ont pu être financés par le biais de ce programme, et des milliers de personnes vivant le phénomène de l'itinérance ont pu avoir de l'aide. Si ce programme n'est pas reconduit rapidement, comme M. Fontana l'a promis, des milliers de sans-logis risquent d'en souffrir. Au Québec, on parle d'une petite enveloppe de 56 millions de dollars pour le deuxième volet. C'est très peu compte tenu des ressources de ce gouvernement. Pour nous, il est important que le projet de loi C-48 soit adopté le plus rapidement possible.
 (1205)
Le président: Merci, monsieur Roy.
[Traduction]
Madame Wasylycia-Leis, c'est à vous, et ensuite il y aura un deuxième tour pour M. Pallister et M. Paquette.
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD): Merci, monsieur le président.
M. Monte Solberg: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Sauf votre respect, nous avons plusieurs témoins parmi nous qui nous encouragent à engager ces dépenses, et un seul qui nous demande de faire preuve de retenue. Ceux qui nous encouragent à engager ces dépenses ont eu beaucoup de temps pour exprimer leurs vues. M. Robson aurait peut-être voulu donner un autre son de cloche, et il me semble juste qu'il puisse le faire.
Le président: Donc, pour être juste envers M. Robson, je lui accorde 30 secondes.
M. William Robson: Je voudrais faire une observation d'empêcheur de tourner en rond concernant la nécessité de respecter la répartition des compétences.
Je suis d'une ville où le taux d'inoccupation est monté en flèche depuis que le gouvernement fédéral a cessé de financer les activités dans ce domaine. Pourquoi? Parce qu'on a mis un terme au blocage des loyers. Il n'est pas normal que les administrations provinciales aient recours à la clôture de protection prudentielle ou adoptent des règlements de zonage très stricts qui empêchent la construction de suites secondaires—autrement dit, que ces paliers de gouvernement créent un problème dans le secteur de l'habitation et s'attendent ensuite à ce que le gouvernement fédéral leur donne de l'argent pour les tirer d'affaire. Je préférerais que le gouvernement fédéral prévoit une certaine marge budgétaire. À mon avis, si la province de Québec agissait sur les deux aspects du problème, comme l'a fait la province de l'Ontario, les résultats de l'industrie de l'habitation seraient bien supérieurs.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Robson.
Madame Wasylycia-Leis.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.
Je suis contente que M. Robson ait pu faire cette intervention, parce que je voudrais justement revenir sur certaines de ses affirmations, affirmations qui pour moi sont sans grand fondement et ne s'appuient pas sur des faits.
Premièrement, je voudrais remercier tous les témoins d'être revenus aujourd'hui. Nous apprécions votre patience dont vous avez fait preuve jeudi matin dernier pendant que certains s'amusaient à faire des entourloupettes. Nous sommes très contents que vous soyez revenus maintenant que ce jeu a pris fin et que nous avons la possibilité de faire une analyse sérieuse du projet de loi C-48.
Monsieur Robson, je dois vous dire que j'ai mal accepté vos affirmations, car en réalité, je pense que ceux qui ont ri à la conférence que vous avez organisée… C'est-à-dire que ce n'est pas le fond de la question qui m'a dérangé, mais plutôt le fait que l'Institut C.D. Howe a deux poids, deux mesures. Je pense que les gens sont assez choqués de voir que vous et les Conservateurs dénoncent tout d'un coup le manque de détails dans ce projet de loi budgétaire, alors que vous n'avez aucunement dénoncé le manque de détails dans d'autres projets de loi par le passé, ni même dans le projet de loi C-43, dont nous sommes également saisis en ce moment.
Je tiens à vous faire remarquer—et j'ai vérifié le bilan à la fois des Conservateurs et de l'Institut C.D. Howe à ce sujet—que les dispositions très générales du projet de loi budgétaire de l'an dernier a attiré très peu de critiques. Par exemple, dans la partie III du projet de loi en question, il était prévu qu'un montant global ne dépassant pas 400 millions de dollars soit versé à une fiducie mise sur pied pour verser aux provinces certains crédits en vue de créer un programme d'immunisation nationale, ne comportait pas plus de détails que ceux que je viens de vous fournir. Et pour la gouverne des membres du Bloc, je précise que ce projet de loi ne renfermait pas plus de dispositions que le projet de loi C-48 pour ce qui est de garantir que les provinces auraient accès aux crédits en question.
Permettez-moi de vous donner d'autres exemples qui concernent ce projet de loi :
… à la demande du ministre de l'Environnement et du ministre des Ressources naturelles, peut être payée et affectée à la Fondation du Canada pour l'appui technologique au développement durable, à son usage, une somme, à prélever sur le Trésor, de 200 millions de dollars… |
Je pourrais continuer. Ce projet de loi compte de nombreux exemples semblables.
Monsieur le président, vous devriez savoir que, lors du débat sur le projet de loi, les Conservateurs et les membres du Bloc n'ont proposé aucun amendement. Aucun témoin n'a été appelé à comparaître. Personne, y compris l'Institut C.D. Howe, n'a critiqué le manque de détails du projet de loi C-30, c'est-à-dire le dernier projet de loi d'exécution du budget, malgré le fait que les affectations prévues étaient beaucoup plus générales que celles que l'on voit au projet de loi C-48. Et n'oublions pas que ni les Conservateurs ni l'Institut C.D. Howe ne se sont plaints du manque de détails dans le projet de loi C-43, qui prévoit l'affectation de 650 millions de dollars pour le nouveau pacte des villes et des municipalités, 150 millions de dollars pour le Fonds d'habilitation municipale vert, ou les 50 millions de dollars versés à la Canadian Cattlemen's Association pour lui permettre de créer un fonds visant à protéger la viabilité à long terme du secteur de l'élevage bovin.
Donc, monsieur le président, il s'agit de deux poids, deux mesures. Il semble que cette rigueur, ces détails, cette transparence et cette responsabilisation ne sont nécessaires que lorsque nous parlons de secteurs longtemps négligés par notre politique sociale, à savoir le logement, l'environnement, les transports publics, les étudiants, l'éducation, les sans-abri, et ainsi de suite. Donc, il n'a aucunement été question de tous ces secteurs au cours de toutes ces années où le gouvernement enregistrait des excédents faramineux, mais là tout d'un coup les Conservateurs et l'Institut C.D. Howe s'agitent et nous disent que nous sommes en pleine crise, alors que nous n'avons jamais entendu parler de ces préoccupations auparavant.
Alors je voudrais demander à tous les représentants ici présents comment ils réagissent aux affirmations de l'Institut C.D. Howe, et pourquoi, à votre avis, ils ont décidé d'attaquer vos secteurs. De plus, comment l'Institut C.D. Howe et les Conservateurs peuvent-ils prétendre que cette dépense de 4,6 milliards de dollars sur deux ans, qui correspond, si je ne m'abuse, à 0,01 p. 100 du PIB, va occasionner des pertes d'investissement et, selon l'Institut C.D. Howe, la perte de 200 000 emplois? Peut-être pourriez-vous expliquer au monde comment ces propositions auxquelles vous êtes favorables permettront en réalité de créer des emplois et de répondre à des besoins insatisfaits dans notre société?
Je me demande si nous avons suffisamment de temps pour permettre à chacun d'entre eux de répondre brièvement.
 (1210)
Le président: Permettez-moi de vous aider. Je vais d'abord demander à M. Robson de répondre, et ensuite je donnerai la parole à quelqu'un d'autre.
M. William Robson: Notre opposition à ce genre de dépenses antidatées et à la création de fondations indépendantes est de notoriété publique et remonte assez loin dans le temps. Je suis content d'avoir été invité à venir vous parler de ces questions. D'ailleurs, j'espère recevoir une invitation semblable—peut-être de votre part, madame—la prochaine fois que le comité sera saisi de cette question.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Vous êtes toujours le bienvenu pour venir discuter d'un projet de loi d'exécution du budget. Les gens demandent à venir parce qu'ils ont quelque chose à nous dire. Or vous n'avez jamais fait valoir ces arguments lors de l'examen de projets de loi d'exécution du budget précédents.
En tout cas, allez-y.
M. Toby White: La question des dépenses antidatées nous inquiète moins que le fait que le versement de ces crédits soit conditionnel à l'enregistrement d'un excédent. J'estime que la question de l'enseignement postsecondaire est importante. Je suis convaincu que les représentants du secteur du logement attachent suffisamment d'importance à leur dossier pour trouver normal de bénéficier de financement garanti, et non de financement conditionnel à l'enregistrement d'un excédent.
En réponse à vos observations, je dirais qu'à mon avis, ces initiatives aideront à créer des emplois et à stimuler l'économie. Je n'ai pas besoin de vous expliquer en détail pourquoi une société plus instruite est une société plus productive, ni les raisons pour lesquelles la meilleure chose qu'on puisse faire pour l'économie et pour la société est de permettre aux gens de tous les milieux de faire des études postsecondaires.
Le président: Je vais permettre à un autre témoin de répondre.
Madame Potter.
Mme Joyce Potter: Il est tout à fait manifeste qu'un investissement dans les logements est un bon investissement qui favorise à la fois le tissu social et l'économie du Canada. Permettre l'accès à un bon logement à prix abordable coûte beaucoup moins cher à court terme que de mettre ceux qui n'ont pas de logement dans un abri—tout comme cela coûte moins cher à long terme de faire cela que de les mettre en prison. Toutes sortes de problèmes sociaux sont créés quand les citoyens n'ont pas accès à un logement convenable.
Le président: Merci, madame Potter.
C'est à M. Pallister, suivi de M. Paquette, Mme Kadis, et M. Bell, et ensuite nous allons conclure.
M. Brian Pallister (Portage—Lisgar, PCC): Merci, monsieur le président, et merci à vous tous pour vos exposés.
En écoutant les propos de ma collègue du NPD, c'est le mot « inepte » qui me venait à l'esprit. À mon avis, ceux d'entre nous qui sommes préoccupés par ce déficit social et les dépenses sociales devraient être gravement préoccupés par ce document de deux pages. Et si nous devrions être gravement préoccupés, c'est parce que ce document ne vous garantit absolument pas que les sommes en questions—comme vous le savez fort bien—serviront à répondre aux préoccupations que vous avez formulées.
Si vous avez lu le projet de loi, vous ne devriez pas avoir l'esprit tranquille quant à la possibilité que même 1 $ sur ce qui est prévu ici finisse par financer les activités qui vous semblent les plus prioritaires. C'est tout à fait l'inverse. Ce projet de loi nous apprend simplement qu'il est possible de prendre des engagements financiers très généraux mais qu'il n'est pas certain que ces engagements soient respectés. Voilà le message que communique ce projet de loi. C'est un exemple de gestion budgétaire imprudente et ce projet de loi ne tient pas debout—surtout pour des gens comme moi qui sont gravement préoccupés par l'accès aux études postsecondaires, par exemple, étant donné que cette question concerne bien des jeunes dans ma circonscription électorale, notamment ceux qui se trouvent en milieu rural ou dans les collectivités du Nord, et par conséquent, je trouve que cette mesure ne tient pas debout.
Cela me ramène aux cours de philosophie que j'ai suivis en première année, où l'on nous disait qu'il importe, avant de lancer un débat, de définir les termes du débat. En ce qui vous concerne, ce projet de loi définit-il quelque chose? Vous avez été forcés de venir nous parler en termes très généraux de vos priorités. C'est très bien. Nous sommes tous d'accord sur ces priorités. Mais la vraie question est de savoir comment nous pourrons y donner suite. Il me semble que c'est surtout ça la question importante dans ce contexte.
Or ce projet de loi ne comporte aucun détail qui nous permettrait de croire que l'on va réellement donner suite aux priorités que nous jugeons les plus urgentes. Permettez-moi de vous donner un exemple. Il est question ici d'enseignement postsecondaire. C'est très bien. Nous sommes tous sensibles à la nécessité d'avoir de bons programmes d'enseignement et de formation postsecondaire qui soient accessibles à tous, n'est-ce pas? En tout cas, je l'espère.
Le rapport de la vérificatrice générale de novembre dernier nous apprend que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien ne sait pas à qui sont octroyés les crédits affectés aux programmes d'enseignement postsecondaire qui sont destinés aux jeunes Autochtones. Qui plus est, les responsables ministériels transmettent des informations inexactes à la Chambre et au Secrétariat du Conseil du Trésor quant à ce qu'ils savent de l'utilisation de cet argent. Ils n'ont aucune idée de l'utilisation qu'on en fait.
Et maintenant, le NPD et les Libéraux nous présentent un projet de loi qui nous demande de dépenser davantage dans ce domaine, alors que nous ne savons même pas quelles sommes sont réellement versées aux jeunes. Nous n'en avons pas la moindre idée.
Si cela ne vous inquiète pas, je me demande bien ce qui peut vous inquiéter. Vraiment, comment pourrions-nous voter en faveur d'un projet de loi qui prend des engagements généraux de ce genre, alors qu'on n'a jamais donné suite aux préoccupations exprimées clairement et à maintes reprises par la vérificatrice générale à ce sujet? Comment pourrions-nous accepter d'affecter des sommes faramineuses à une poste budgétaire très général, comme les études postsecondaires pour les Autochtones, alors que selon des informations anecdotiques, il y a à présent encore moins de jeunes Autochtones canadiens qui bénéficient de ce financement accru?
Il me semble normal de s'attaquer en premier lieu aux plus grandes priorités. Ainsi j'estime que nous devrions d'abord nous assurer que le programme donne de bons résultats avant d'y affecter encore des sommes importantes, parce que l'argent que nous y aurons consacré ne pourra pas servir à régler le problème des sans-abri ou à réduire les frais de scolarité. Cet argent ne sera plus disponible. Il aura déjà été dépensé, et ce sera une véritable tragédie.
J'invite donc tous ces messieurs à réagir parce que, encore une fois, je suis très préoccupé par l'ineptitude des arguments que font valoir les défenseurs de ce projet de loi, qui prétendent que si l'éducation postsecondaire, les peuples autochtones, l'habitation ou le sort des sans-abri nous tient à coeur, il faut absolument voter en faveur de ce projet de loi. Eh bien, je peux vous garantir que toutes ces questions me tiennent à coeur, mais je ne peux absolument pas voter en faveur du projet de loi tel qu'il es actuellement libellé, parce que l'argent n'ira pas où il doit aller. En tout cas, ce n'est aucunement garanti.
J'invite donc ces messieurs à réagir.
 (1215)
Le président: Monsieur Soule, suivi de M. White.
M. George Soule: Ce qui a été une source de préoccupations pour nous par le passé, ce sont les milliards de dollars destinés aux étudiants qui ont été mal orientés, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral a essayé de jouer un rôle sans conclure des accords directs avec les provinces, et sans garantir que les transferts servent véritablement à réduire les frais de scolarité et à améliorer l'accès, grâce à un accord en bonne et due forme. Ainsi des milliards de dollars ont été gaspillés pour les Bourses d'études canadiennes du millénaire, et de même, des milliards de dollars ont été gaspillés chaque année pour financer des programmes d'imposition régressifs qui n'aident pas vraiment les étudiants qui en ont besoin.
Cette mesure constitue un première pas vers l'établissement d'un système de transferts aux provinces, et si vous examinez l'accord sur lequel est basé le projet de loi, vous allez voir qu'il vise à réduire les frais de scolarité et à améliorer l'accès au système. Je suis d'accord avec vous pour dire que ce projet de loi n'est pas parfait, mais nous nous disons que s'il nous est possible d'obtenir que le gouvernement fédéral crée un transfert aux provinces qui doit servir uniquement à financer les programmes d'études postsecondaires—et ce qu'on voit ici constitue un progrès dans ce sens—nous pensons pouvoir réduire les frais de scolarité.
De même, le gouvernement fédéral pourra s'attribuer le mérite de ces dépenses, et il me semble que si le Parti conservateur ou d'autres membres envisagent de proposer des amendements, il nous semble qu'un amendement idéal consisterait à proposer une réduction des frais de scolarité.
[Français]
Le président: Monsieur Roy, vous avez la parole.
M. François Roy: Étant donné l'expérience passée, nous n'avons rien à dire sur le contrôle des sommes affectées au Québec. Les organismes qui interviennent sur le plan du logement et de l'itinérance n'ont pas de leçons à recevoir de qui que ce soit, parce que l'utilisation de chaque sou est examinée à la loupe, particulièrement dans le cadre de l'IPAC. Tout le monde reconnaît qu'il y a même un surcontrôle en raison du scandale du Programme de commandites.
 (1220)
Le président: Monsieur Roy, merci.
Il reste encore trois intervenants.
[Traduction]
Chaque intervenant n'aura que cinq minutes pour les questions et les réponses. Si un intervenant décide de prendre quatre minutes pour poser sa question, il est évident que je n'ai aucun contrôle là-dessus.
Je donne donc la parole à M. Paquette, suivi de Mme Kadis et de M. Bell, et après cela, nous allons conclure.
Monsieur Paquette.
[Français]
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Merci, monsieur le président.
Merci pour vos présentations. Je trouve un peu malheureux que vous soyez les otages d'une opération politique. Il faut bien comprendre que le projet de loi C-48 est une opération strictement politique du gouvernement minoritaire de M. Martin, qui allait être défait et qui est allé chercher l'appui du NPD. En ce sens, vous comprendrez que le Bloc québécois ne peut lâcher la proie pour l'ombre. Nous sommes très conscients du fait que le gouvernement libéral a acheté du temps parce qu'il ne veut pas aller devant la population canadienne et québécoise pour répondre des actes qui ont été commis et révélés dans le cadre de la Commission Gomery.
Plusieurs d'entre vous avancent que c'est un début mais que ce n'est pas assez. C'est un début de quoi? Quand on annonce 900 millions de dollars pour l'environnement, est-ce qu'on s'engage véritablement à mettre en oeuvre un plan d'action sur Kyoto qui soit efficace, qui ait du mordant? Le plan d'action demeure toujours celui que M. Dion nous a présenté.
Pour la formation et l'enseignement postsecondaire, il y a 1,5 million de dollars. Bien entendu, cet argent ne peut être refusé, mais si le gouvernement ne prend pas l'engagement de réinvestir à long terme... Vous savez qu'on a proposé que le gouvernement s'engage à financer 25 p. 100 de l'enseignement postsecondaire, comme il s'est engagé à le faire pour la santé après le dépôt du rapport de M. Romanow. Seriez-vous d'accord sur une telle exigence?
Dans le cas du logement, c'est la même chose. Il n'y avait rien ou presque rien pour cela dans le plan budgétaire, mais tout à coup, on annonce 1,6 milliard de dollars. Cet argent est bien accueilli, mais ce n'est pas un engagement envers le logement social. Vous savez comme moi que le gouvernement fédéral n'est pas intervenu de façon relativement adéquate depuis de nombreuses années. Après qu'il se soit désengagé, on n'a pas été en mesure d'entretenir le parc immobilier. Vous connaissez tous les problèmes que cela peut poser.
Dans le cas de l'aide internationale, on parle de 500 millions de dollars. Encore ce matin, j'écoutais M. Pettigrew à Radio-Canada. Il a été incapable de nous dire quand le gouvernement serait en mesure de respecter l'engagement qu'il a pris de consacrer 0,7 p. 100 du produit intérieur brut à l'aide publique au développement.
Je pose d'abord une question précise aux étudiants. Seriez-vous d'accord pour qu'on demande au gouvernement fédéral de financer 25 p. 100 de l'enseignement postsecondaire? Plus globalement, mis à part les montants dont il est question dans le projet de loi C-48, quand le gouvernement Martin a-t-il pris un engagement à long terme?
Les groupes de chômeurs nous demandent de voter contre ce projet de loi, parce qu'il n'y a rien, dans C-48, pour réparer les horreurs commises par les libéraux depuis 1993. Il faudra tenir compte de l'ensemble du portrait. Comme je vous le disais, nous ne lâcherons pas la proie pour l'ombre.
Je laisse maintenant les témoins réagir.
[Traduction]
Le président: Monsieur White, voulez-vous réagir?
M. Toby White: Pour moi, le mode de fonctionnement du système de financement de l'enseignement postsecondaire est beaucoup trop compliqué pour qu'on puisse déterminer quels pourcentages sont appropriés et déclarer que le gouvernement fédéral devrait payer 25 ou 30 p. 100 des coûts, ou que les étudiants devraient supporter telle proportion des coûts de leurs études.
Pour répondre à l'autre aspect de votre question, je peux vous dire que, malheureusement, il ne semble pas y avoir de vision à long terme pour l'enseignement postsecondaire au Canada, alors qu'on en a gravement besoin, et que cette vision doit être définie à la fois par le gouvernement fédéral et les provinces. Je ne vois pas pourquoi les administrations provinciales et fédérale ne pourraient pas s'asseoir ensemble pour ouvrir un dialogue sur les éventuels éléments d'une vision et d'une orientation nationales pour l'enseignement postsecondaire.
Évidemment, ce dialogue doit comprendre une discussion sur la structure et les modalités éventuelles d'un système de financement. L'idéal serait qu'une composante du système de financement soit un transfert expressément destiné à l'éducation postsecondaire. Quant à savoir comment il faudra calculer le montant de ce transfert, c'est une question qui devra faire l'objet de discussions entre les provinces et le gouvernement fédéral.
Le président: Merci, monsieur White.
Madame Kadis.
Mme Susan Kadis (Thornhill, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je suis évidemment en faveur du projet de loi C-48, et j'estime même que cette mesure est étroitement liée au dynamisme non seulement de notre société et de nos collectivités, mais de notre économie en général. Je n'ai certainement rien contre les réductions d'impôt. En tant qu'ancienne conseillère municipale, je me suis toujours battue pour en avoir et je continue à croire que de telles mesures sont très importantes, et que nous voudrons y avoir davantage recours à l'avenir.
Cependant, il est temps à mon avis que nous songions à réinvestir dans certains secteurs d'activités, que ce soit le logement, les transports en communs, l'infrastructure, ou l'enseignement postsecondaire. Nous sommes vraiment un carrefour, et j'estime que le temps est venu de faire de tels investissements. C'est maintenant que les deniers publics doivent servir à renforcer et à revitaliser ces services très significatifs qui revêtent une importance fondamentale au Canada. Pour moi, c'est tout à fait artificiel de dire que ce ne sont pas des facteurs économiques. Tous ces facteurs sont liés les uns aux autres.
Avec cette toile de fond, je voudrais demander au représentant de l'ACAE quelles seraient les conséquences de la non-adoption de ce projet de loi pour notre prospérité sociale et économique?
 (1225)
M. Toby White: Il est clair que l'une des conséquences de la non-adoption de ce projet de loi est qu'aucun crédit supplémentaire ne sera affecté à l'enseignement postsecondaire dans le budget de cette année.
Je comprends et je partage certaines préoccupations exprimées par d'autres membres du comité quant au fait que ces crédits ne sont pas suffisamment bien ciblés. Par le passé, nous avons effectivement constaté, malheureusement, que des sommes assez importantes qui étaient affectées à l'enseignement postsecondaire n'ont pas vraiment été utilisées pour prendre des initiatives qui aidaient vraiment les étudiants, ou même le système lui-même. Par conséquent, j'encourage tous les membres qui ont des préoccupations à ce sujet à envisager peut-être de proposer des amendements au projet de loi, plutôt que de voter contre, car pour moi, il importe de faire des progrès dans ces différents domaines.
Mme Susan Kadis: À mon avis, il faut séparer le transfert social du transfert au titre de l'éducation. Ça aussi, ce serait utile pour nous aider à régler certains des problèmes que nous avons tous évoqués aujourd'hui.
Merci.
Le président: Merci, madame Kadis.
Monsieur Bell.
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.): Merci.
Je voudrais d'abord remercier tous les témoins.
Je suis en faveur de ce projet de loi. J'étais content d'exprimer mon appui pour le projet de loi C-43, même si j'estimais qu'on aurait pu faire davantage dans des secteurs comme l'éducation, le logement, et les municipalités. Par conséquent, je ne suis pas du tout contre l'idée qu'on affecte des sommes additionnelles à ces différents domaines.
Monsieur White, je constate que vous avez dit dans votre réponse que ce serait peut-être trop compliqué de prévoir que les étudiants supportent tel pourcentage des coûts de leur éducation. Par exemple, M. Soule nous a dit ici que : « En 1992, les frais d'utilisation ont représenté, en moyenne, 17 p. 100 du budget de fonctionnement des établissements », mais en raison de la baisse constante que nous avons observée depuis 2002, il s'agit à présent d'une moyenne de 28 p. 100.
J'ai donc une question adressée à M. Robson de l'Institut C.D. Howe : Avez-vous réfléchi à tout cela? À votre avis, quel pourcentage des frais de leur éducation les étudiants devraient-ils avoir à supporter? Ensuite je voudrais demander à M. Soule s'il a une recommandation à faire à ce sujet.
M. William Robson: Je n'ai pas de chiffre global à vous recommander.
Moi-même j'ai enseigné en milieu universitaire, et j'ai donc pu analyser la question dans l'autre optique. Bon nombre d'établissements postsecondaires ne mettent pas suffisamment l'accent sur la qualité de l'instruction. En ce qui me concerne, c'est un problème. Afin de changer la situation des étudiants, il faut, entre autres, que lorsqu'ils arrivent dans la classe, ils apportent quelque chose aux ressources de l'établissement—bien entendu, cela ne veut pas nécessairement dire qu'ils doivent payer de leur poche. Disons que cet apport pourrait prendre la forme de deniers publics qui les suivraient.
Mais il est très important que l'université ou le collège communautaire que fréquente l'étudiant qui cherche à s'instruire considère ce dernier comme un atout, plutôt qu'un inconvénient. Je suis également d'avis que les étudiants exigent davantage de leurs instructeurs quand ils ont eux-mêmes investi dans leur éducation. Pour cette raison, je dirais qu'il est normal que les étudiants supportent une partie du coût.
Quant à la proportion qu'ils devraient supporter, le fait est qu'il y a de nombreuses études indiquant à quel point les investissements dans l'enseignement postsecondaire sont rentables pour les étudiants individuels. De façon générale, on peut dire que nous n'en sommes pas au point où cela ne vaut plus la peine pour un citoyen individuel d'investir dans des études postsecondaires. Ceux et celles qui font de telles études ont un revenu garanti pour la vie, de même que beaucoup d'autres avantages qui sont beaucoup plus intéressants, par rapport à ceux qui ne font pas de telles études.
Donc, la question qu'il faut toujours se poser est celle de savoir quelle contribution à l'éducation des autres il faut demander aux parents de ceux qui ne font pas de telles études, alors que nous savons à quel point une éducation universitaire ou collégiale est avantageuse pour ceux et celles qui en bénéficient?
Le président: Monsieur Soule.
M. George Soule: Je voulais simplement vous dire, comme je l'ai indiqué dans mes remarques liminaires, que les frais de scolarité constituent un obstacle, voilà tout. Il y a des Canadiens qui veulent faire des études postsecondaires et sont prêts à le faire, mais en raison de leurs moyens financiers limités, ils ne peuvent atteindre cet objectif. D'autre part, nous avons un gouvernement qui parle d'une économie du savoir. Je me demande vraiment comment nous ferons pour soutenir cette économie si tous les citoyens n'ont pas les moyens de payer de telles études.
Quant à savoir qui devrait payer l'éducation, je pense que nous devrions tous y apporter notre contribution par l'entremise de nos impôts. L'argument idéologique qui oppose le contribuable à l'étudiant ne tient pas compte du fait que les étudiants sont des contribuables et continueront à l'être une fois qu'ils auront obtenu leurs diplômes.
 (1230)
Le président: Merci, monsieur Bell.
Je voudrais remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui, surtout ceux qui étaient là jeudi dernier mais n'ont pas eu l'occasion de nous parler. Je pense que l'environnement est un peu plus positif à présent. Encore une fois, je présente mes excuses pour ce qui est arrivé jeudi dernier et je vous remercie d'avoir accepté de comparaître.
Nous allons faire une pause d'environ deux minutes, avant de passer au prochain groupe de témoins.
Merci.
 (1230)
 (1241)
Le président: Bonjour à tous.
Nous allons reprendre nos travaux avec le deuxième groupe de témoins. Encore une fois, je vous demande de vous en tenir à cinq minutes pour vos remarques liminaires. Je ne veux pas vous interrompre, mais les membres auront des questions à vous poser par la suite.
J'ai une liste de témoins devant moi. En premier lieu, nous accueillons la Fédération des contribuables canadiens. Monsieur Williamson, voulez-vous commencer?
Merci.
M. John Williamson (directeur fédéral, Fédération des contribuables canadiens): Merci.
Encore une fois, je voudrais remercier les membres du comité de l'occasion qui nous est donnée cet après-midi de présenter le point de vue de la Fédération des contribuables canadiens sur le projet de loi C-48, communément appelé l'amendement budgétaire du NPD.
Les modifications apportées au budget original du ministre des Finances ajouteront quelque 4,6 milliards de dollars de dépenses non prévues au cours des deux prochaines années. Ce changement soudain suscite des préoccupations, puisque les gens se demandent maintenant si l'approche prudente du gouvernement en matière de budgétisation a maintenant été écartée.
Par conséquent, le gouvernement central sera moins en mesure de répondre à des changements imprévus, tels que des taux d'intérêt plus élevés, un ralentissement économique, ou des taux de chômage plus élevés qui pourraient influer sur notre budget à l'avenir. Ainsi le gouvernement fédéral pourrait se retrouver avec un déficit, si la situation économique devait changer.
De même, le projet de loi C-48 diminue grandement la possibilité de bénéficier de réductions d'impôt intéressantes. Le fardeau fiscal qu'impose le Canada à ses citoyens est trop lourd. Cela mine la productivité, décourage la création de richesse, et continue à constituer un désavantage concurrentiel manifeste.
Le président des États-Unis, George Bush, a déclaré qu'il compte réformer le régime fiscal américain. Ainsi on peut supposer sans trop risquer de se tromper que dans les années qui viennent, le fardeau fiscal américain ira en baissant alors que l'écart entre le Canada et les États-Unis en matière fiscale continuera à se creuser. Face à ce défi, le gouvernement fédéral aura peu de marge pour y réagir.
Il y a peut-être de bonnes raisons d'adopter le projet de loi du NPD qui propose de nombreuses dépenses. Mais si cela est vrai, ne devrions-nous pas au moins en connaître les détails? Jusqu'à présent, aucun plan n'a été déposé qui nous permettrait de savoir, de façon détaillée, comment ces 4,6 milliards de dollars seront utilisés. Le projet de loi C-48 ne compte en tout que deux pages. Est-ce étonnant que les Canadiens aient de graves préoccupations concernant l'utilisation des deniers publics?
Dans le contexte de son examen du programme des commandites du gouvernement fédéral l'an dernier, la vérificatrice générale a déclaré que « On a ignoré ou violé les règles à toutes les étapes du processus » en ce qui concerne l'attribution des contrats. Je ne laisse pas entendre par là que les députés qui sont en faveur du projet de loi C-48 s'adonnent à des activités frauduleuses comme celles qui ont entouré la fraude du programme des commandites, mais ils créent une situation où les dépenses sont autorisées avant que des lignes directrices en bonne et due forme n'aient été établies. Là on ne se contente pas de violer les règles; on en crée d'autres, tout simplement.
La décision de modifier la Loi sur la gestion des finances publiques en supprimant la disposition prévoyant que les recettes excédentaires servent à rembourser la dette n'est pas judicieuse. À cause de ce changement, le gouvernement peut engager des dépenses après la fin de l'exercice financier sans d'abord affecter les fonds en question à un programme particulier. Voilà qui enfreint les principes comptables les plus fondamentaux en ce qui concerne l'utilisation des recettes fiscales.
La Loi sur la gestion des finances publiques, qui exige, avec raison, que 100 p. 100 de tout excédent soient affectés au remboursement de la dette, a permis au gouvernement fédéral de réduire la dette de plus de 60 milliards de dollars au cours des huit dernières années. Ce progrès a occasionné des économies annuelles, en ce qui concerne les paiements d'intérêt sur la dette, de 3 milliards à 4 milliards de dollars par année. Le service de la dette continuera à engloutir quelque 35 milliards de dollars cette année. Cela correspond à 96 millions de dollars chaque jour, soit 20 ¢ sur chaque dollar que le gouvernement fédéral perçoit sous forme d'impôt. Il nous faut donc continuer à réduire notre dette nationale, afin de libérer, au cours des prochaines années, des ressources financières qui sont de plus en plus rares.
Ce serait donc une grave erreur que de modifier la Loi. Un membre du Comité des finances ou un représentant du gouvernement pourrait-il expliquer à la population canadienne pourquoi il est nécessaire de compromettre le rôle de surveillance du Parlement relativement aux dépenses du gouvernement? Où sont les cadres financiers qui permettraient de garantir que les recettes fiscales sont utilisées de manière responsable? À quels programmes et initiatives les crédits sont-ils affectés? Le ministre des Finances compte-t-il publier les plans financiers qui nous permettront de connaître les détails des nouveaux programmes de dépenses?
Ici au Parlement, les législateurs sont sur le point d'approuver un projet de loi qui non seulement compromet le bien-être financier du pays, mais permet au gouvernement de dépenser de l'argent sans faire l'objet du type de surveillance qui serait tout à fait approprié. Le Parlement ne peut en l'occurrence faire le suivi de l'utilisation de ces 4,6 milliards de dollars, étant donné que les détails à propos des dépenses qui sont prévues n'ont jamais été publiés.
Tant que des réponses n'auront pas été fournies par le ministre des Finances ou le premier ministre, j'estime que ce projet de loi devrait rester en comité et ne devrait donc pas être renvoyé à la Chambre des communes pour faire l'objet d'un vote. On demande à ce comité d'approuver l'octroi de crédits en l'absence d'un plan. Or non seulement ce serait irresponsable mais contraire à l'intérêt public de le faire.
Merci, monsieur le président.
 (1245)
Le président: Merci, monsieur Williamson.
Nous allons maintenant entendre M. Jock, de l'Assemblée des Premières nations.
M. Richard Jock (directeur général, Assemblée des Premières Nations): Merci.
Depuis 1993, le gouvernement fédéral a pris l'engagement ferme envers les Premières nations de veiller à leurs intérêts. En janvier 2003, le gouvernement a promis de mettre fin aux conditions honteuses qui existent dans certaines réserves, et il a renouvelé son engagement en octobre 2004, dans le contexte de l'établissement d'un nouveau partenariat avec les Premières nations.
Vu l'ampleur de cet engagement, l'Assemblée des Premières nations estimait que le budget de 2005 présenterait l'occasion de réaliser de véritables progrès. À cette fin, l'APN a déployé des efforts intensifs en vue d'influencer le processus budgétaire fédéral de 2005. Ainsi l'APN a soumis à l'examen du comité permanent un mémoire le 28 octobre 2004 dans le cadre des consultations prébudgétaires. Ce mémoire, de même qu'une étude menée par l'APN, intitulée Federal Spending on First Nations: The Facts, The Myths, and the Way Forward a été soumis à l'examen de tous les députés, sénateurs, ministres et sous-ministres. Ces documents ont été favorablement accueillis, et suivant leur présentation, il y a eu une série de rencontres entre des ministres clés et le chef national et plusieurs membres du Conseil exécutif. De plus, pendant l'automne et l'hiver de 2004-2005, l'Assemblée des Premières nations a participé avec enthousiasme à la Table ronde Canada-Autochtones.
L'APN a aussi participé aux six séances sectorielles qui ont suivi et a déposé des exposés de principe détaillés qui s'appuyaient sur les résolutions adoptées par l'APN et les instructions données par les comités de l'APN. Ces documents faisaient fond sur le mémoire prébudgétaire pour définir une vision claire, y compris les mesures requises à court et à long termes dans des secteurs tels que la santé, l'apprentissage permanent, le logement, les possibilités économiques, les négociations, et la responsabilisation.
Malgré cette préparation, le budget de 2005 ne respectait pas les engagements pris par le gouvernement et n'a donc pas rempli les attentes et les espoirs des Premières nations, qui souhaitaient vraiment renouveler leurs relations avec le gouvernement fédéral, comme nous l'avons dit tout à l'heure. En fait, les 635 millions de dollars prévus à cette fin, qui correspond à 1,3 p. 100 des affectations totales, ne reflètent même pas l'importance de la population autochtone, sans parler de la capacité accrue qu'il faut donner aux peuples autochtones pour leur permettre d'éliminer les conditions tout à fait honteuses dans lesquelles ils vivent.
Cette allocation est d'autant moins importante qu'une réduction d'au moins 230 millions de dollars sera faite dans le cadre de l'examen des programmes, ce qui va directement influer sur les services assurés par les Premières nations. Quand nous défalquons toutes ces déductions, il ne reste plus que 405 millions de dollars, soit moins de 0,8 p. 100 du budget global fixé au départ pour l'exercice 2005.
Le dépôt du projet de loi C-48 par les Libéraux et le NPD nous a donné des raisons d'espérer que certains de ces besoins seraient peut-être satisfaits, en partie grâce à certains nouveaux engagements financiers, et plus précisément la somme de 1,6 milliard de dollars affectée au logement abordable, de même que la somme de 1,5 milliard de dollars prévue pour les programmes de formation et l'enseignement postsecondaire.
Quant à l'habitation, les conditions dans lesquelles nous vivons actuellement sont inacceptables. Les maisons des membres des Premières nations sont surpeuplées et en mauvais état. Ces conditions ont un énorme impact sur l'état de santé des membres des Premières nations. Selon nos estimations, il faut plus de 80 000 nouvelles unités immédiatement. Un investissement dans l'habitation est donc essentiel pour répondre à cette accumulation de besoins.
Le niveau de financement actuel dépend de la capacité des Premières nations de répondre aux critères établis dans le cadre des programmes fédéraux, plutôt que de leurs priorités et de leurs besoins. La majeure partie de ce financement sera accordée sous forme de prêts, alors que le niveau d'endettement des Premières nations a vraiment suffoqué la croissance des Premières nations. Dans notre mémoire prébudgétaire, nous avons indiqué qu'il faudrait un investissement de 5,5 milliards de dollars sur cinq ans pour répondre à l'ensemble des besoins.
L'affectation de 295 millions de dollars que prévoit le budget fédéral de 2005 constitue donc un bon début. Cependant, il faut bien comprendre que ce nouveau financement permettra de construire 6 400 unités, soit moins de 10 p. 100 des 80 000 unités requises, comme je vous l'expliquais tout à l'heure. De plus, les Premières nations les plus nécessiteuses ne recevront pas de crédits parce que leurs économies ne peuvent soutenir l'approche de marché que supposent les loyers qu'impose ce budget. Par conséquent, l'arriéré va continuer à croître, et certains problèmes structurels ne seront pas réglés.
Enfin, cette affectation ne prévoit rien pour les rénovations qui s'imposent dans les maisons isolées à la vermiculite à forte teneur en amiante ou celles qui présentent un problème de moisissure noire. Ainsi, pour améliorer les conditions dans les habitations, nous demandons spécifiquement qu'entre 533 millions de dollars et 800 millions de dollars soient versés directement aux Premières nations. Nous estimons que les investissements dans les logements afin de favoriser l'autonomie des Premières nations en matière de logement, permettront de créer un véritable moteur économique qui bénéficiera à l'ensemble du Canada, en plus d'être une composante importante de toute bonne politique sociale.
 (1250)
Je voudrais maintenant vous parler de l'éducation. Le niveau d'instruction actuel chez les peuples autochtones n'est tout simplement pas acceptable. Chez nous les taux d'obtention de diplômes universitaires sont quatre fois moins élevés que dans la population canadienne en générale, soit 3 p. 100 contre 13 p. 100. De plus, de récentes études menées par Statistique Canada démontrent que le taux de participation aux programmes d'études postsecondaires chez les étudiants venant de familles à faible revenu, ce qui comprend évidemment une forte proportion de familles composées de membres de Premières nations, a considérablement baissé. Ces facteurs, conjugués à un taux de croissance démographique plus élevé, concourent à créer une forte demande de services d'éducation.
Diverses études indiquent également que le coût des études postsecondaires, y compris les frais de scolarité, de fournitures, de logement et les frais de subsistance en général, ont augmenté de 400 p. 100 dans certaines régions du pays. Une évaluation de l'estimation des coûts moyens par étudiant dans les provinces, comparativement au montant accordé à un étudiant membre d'une Première nation par le gouvernement national, indique que les crédits octroyés sont suffisants pour couvrir moins de 50 p. 100 des dépenses engagées chaque année scolaire par un étudiant autochtone, et ce en grande partie parce que les politiques d'éducation du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien n'ont pas évolué depuis 1988, si bien qu'elles ne tiennent pas compte du relèvement des coûts des études supérieures. Le plafond de 2 p. 100 imposé à l'ensemble du budget du MAINC ne fait qu'aggraver la situation.
Il s'ensuit que la majorité des Premières nations utilisent la totalité des crédits qui leur sont accordés pour les programmes d'études postsecondaires, par l'entremise de leur programme de soutien de l'enseignement postsecondaire, mais continuent régulièrement à rejeter les demandes d'un nombre considérable d'étudiants admissibles. En fait, nous estimons qu'environ 10 000 étudiants essuient un tel refus.
Le président: Monsieur Jock, pourrais-je vous demander de conclure, s'il vous plaît?
M. Richard Jock: Très bien. Nous allons conclure.
Le président: Merci.
M. Richard Jock: Par conséquent, il faut considérer cet investissement comme l'un des moyens de mettre en oeuvre ces nouveaux critères et pour faciliter les efforts qui sont actuellement déployés pour redynamiser les politiques du MAINC, de concert avec l'APN.
Nous estimons avoir déposé des plans tout à fait pratiques. Le plan existe, et le projet de loi prévoit les ressources nécessaires. Nous sommes fermement convaincus que le Canada se trouve en pleine crise à l'heure actuelle et que l'écart socioéconomique entre les membres des Premières nations et d'autres Canadiens continue à se creuser. Le chef national est d'avis que nous devons nous mettre au défit d'éliminer l'écart qui existe au niveau de notre qualité de vie au cours des 10 prochaines années. Mais pour y arriver, nous devons commencer tout de suite.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Jock.
Nous accueillons maintenant la représentante du Centre canadien de politiques alternatives.
Madame Russell.
Mme Ellen Russell (économiste, Centre canadien de politiques alternatives): Voilà plus de 10 ans que le Centre canadien de politiques alternatives se joint à beaucoup d'autres groupes pour préparer l'alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral. Nous avons presque toujours été déçus par le budget fédéral, et je suis donc très heureuse de pouvoir venir faire l'éloge d'un budget.
Le CCPA estime que le projet de loi C-48 constitue un véritable progrès. Il prévoit des investissements dans des secteurs qui ont tout à fait l'appui de la population canadienne, et nous sommes d'avis que ces investissements sont appropriés sur le plan budgétaire. De plus, cet accord entre le NPD et le gouvernement prévoit l'élimination de réductions de l'impôt sur les sociétés qui devaient être accordées à l'avenir, réductions que nous considérons comme étant inutiles et injustifiées.
Aujourd'hui, je voudrais aborder deux questions en particulier. Premièrement, pouvons-nous nous permettre les dépenses additionnelles que prévoit le projet de loi C-48? Et deuxièmement, même si nous pouvons nous les permettre, correspondent-elles à une augmentation injustifiée des dépenses du gouvernement?
Premièrement, pouvons-nous nous les permettre? Pouvons-nous nous permettre les 2,3 milliards de dollars que le gouvernement prévoit de dépenser en 2005-2006 et en 2006-2007? Dans le cadre de la préparation de l'alternative budgétaire, un document de discussion a justement été préparé à ce sujet, et j'en ai remis des copies au greffier. Ce texte est également disponible sur notre site Web, à l'adresse suivante : ccpa@policyalternatives.ca. Dans ce document, nous faisons valoir que le gouvernement a de loin la marge budgétaire nécessaire pour engager les dépenses additionnelles que prévoit le projet de loi C-48. Nos arguments s'appuient sur notre évaluation des rapports déposés par quatre prévisionnistes indépendants devant le comité, au moment où ils évaluaient le budget fédéral au début avril.
Vous avez donc entendu les exposés des représentants du Conference Board du Canada, de Global Insight, du professeur François Vaillancourt, et de Jim Stanford, au nom du Centre canadien de politiques alternatives. Chacun de leurs rapports supposait une méthodologie différente. Mais toutes ont permis de conclure qu'il y aurait des excédents importants en 2005-2006 et en 2006-2007, malgré les dépenses supplémentaires prévues au budget original du ministère des Finances. En fait, la projection de chacun de ces rapports était que les prochains excédents fédéraux seraient à ce point considérables que les dépenses prévues au projet de loi C-48—c'est-à-dire les 2,3 milliards de dollars de plus par an—pourraient très bien être engagées sans que le gouvernement fédéral enregistre un déficit dans aucun des deux exercices financiers. Bien entendu, le montant des excédents que prévoyaient les différents prévisionnistes était très différent, mais on peut parler de la moyenne. En établissant la moyenne des chiffres présentés par les quatre provisionnistes, on obtient la somme d'environ 8 milliards de dollars pour chacun des prochains exercices financiers—c'est-à-dire une somme amplement suffisante pour payer les mesures prévues.
Deuxièmement, si vous acceptez l'idée selon laquelle il n'y a aucun risque de déficit, est-il justifié de s'opposer à ces dépenses sous prétexte qu'elles représentent une augmentation des dépenses trop rapide? Par exemple, mon nouvel ami, le représentant de la Chambre de commerce du Canada, aurait dit récemment, selon un article paru dans le National Post, que c'est une litote que de dire que les dépenses de programmes sont gravement excessives.
Dans les remarques que vous avez faites devant le comité le 2 juin, vous avez affirmé, si je ne m'abuse, que les dépenses ont augmenté de 12 p. 100 en 2004-2005, ce qui faisait passer l'augmentation globale sur cinq ans des dépenses de programmes à environ 44 p. 100. Bon, 44 p. 100 paraît tout à fait alarmant, mais il s'agit en réalité des taux nominaux de croissance des dépenses fédérales. Le terme « nominal » signifie qu'ils ne tiennent compte ni de l'inflation ni de l'accroissement de la population.
Or les dépenses nominales doivent progresser un peu chaque année ne serait-ce que pour tenir compte de l'impact de l'inflation et de l'accroissement démographique. Pour des raisons de simplicité, choisissons des chiffres ronds. Ainsi si nous disons que le taux d'inflation et le taux d'accroissement démographique sont de l'ordre de 3 p. 100 par an, le gouvernement doit dépenser 3 p. 100 de plus chaque année pour maintenir l'équilibre. Sinon, les dépenses réelles par habitant iront en rétrécissant, ce qui voudrait dire que le gouvernement dépenserait moins en chiffres réels pour chaque habitant.
Si vous voulez faire croire que les dépenses de programmes sont en pleine accélération, vous allez nécessairement citer les taux nominaux. Mais quand on vous cite des chiffres nominaux, vous devez automatiquement enlever l'inflation et l'accroissement de la population, pour en arriver à un calcul des dépenses réelles par habitant. C'est ce que nous avons fait, et nous constatons qu'après rajustement pour l'inflation et l'accroissement démographique, la progression réelle des dépenses par habitant au cours des cinq dernières années se situe autour de 22 p. 100. Devriez-vous être alarmés devant un taux de progression de 22 p. 100 au cours des cinq dernières années, et vous dire que les dépenses ne sont plus du tout maîtrisées, alors qu'il s'agit en moyenne de 4 p. 100 par an?
 (1255)
Permettez-moi de faire une analogie. Supposons qu'une voiture avance à 30 kilomètres à l'heure, et que le conducteur décide de mettre le frein—tout comme l'a fait le gouvernement fédéral à l'époque où il a décidé d'éponger le déficit. À ce moment-là, la vitesse de la voiture passe de 30 à 20 kilomètres à l'heure. Si vous essayez de reprendre votre vitesse pour avancer au même rythme qu'auparavant, et que vous réussissez donc à passer de 20 kilomètres à 30 kilomètres à l'heure, vous allez vous dire, en évaluant la distance entre 20 et 30 kilomètres à l'heure, que vous avez augmenté votre vitesse de 50 p. 100, et que c'est tout à fait excessif. Mais tout dépend, évidemment, du point à partir duquel vous faites votre mesure.
Malgré les récentes augmentations des dépenses fédérales—augmentations qui, je vous l'accorde, dépassent le taux d'inflation et le taux d'accroissement de la population—les dépenses du gouvernement, en tant que pourcentage du PIB, sont loin de correspondre aux niveaux qu'elles ont atteints par le passé. Il faudrait continuer à augmenter les dépenses d'un montant bien supérieur aux taux d'accroissement démographique et d'inflation pour pouvoir même s'approcher des niveaux de dépenses correspondant à ceux qu'étaient autrefois la norme au Canada.
Le CCPA estime qu'il n'y a pas de raison de sonner l'alarme relativement au degré de prudence qui sous-tend le projet de loi C-48. Nous avons les moyens de faire ces dépenses, qui concernent des secteurs qui sont jugés très prioritaires par la plupart des Canadiens, et on ne peut prétendre à cause de cela que les dépenses fédérales ne sont plus du tout maîtrisées; ce sont des dépenses qui nous permettent de rectifier les difficultés occasionnées par les compressions budgétaires des années 1990, qui nous nuisent encore, évidemment, en raison des multiples problèmes que nous connaissons maintenant dans les domaines de la santé, de l'enseignement postsecondaire, de l'infrastructure, et bien d'autres encore.
Merci.
· (1300)
Le président: Merci, madame Russell.
Nous accueillons maintenant le représentant de la Chambre de commerce du Canada, M. Murphy.
[Français]
M. Michael Murphy (premier vice-président, Politiques, Chambre de commerce du Canada): Merci, monsieur le président.
La Chambre de commerce du Canada reconnaît les progrès réalisés par le gouvernement fédéral sur le plan financier ces dernières années et y applaudit. Pour la huitième année consécutive, le gouvernement fédéral a enregistré un excédent pour l'exercice 2004-2005. Le Canada est le seul pays du G7 affichant un excédent budgétaire. Le rapport de la dette fédérale au PIB est à son niveau le plus bas depuis l'exercice 1983-1984 et le Canada jouit d'une cote de crédit triple A.
Ces données financières fondamentales sont de bon augure, mais il importe d'éviter de nous reposer sur nos lauriers. En effet, nous devons sans cesse adopter des mesures de prudence pour protéger la position économique et financière du gouvernement en cas d'imprévu. La planification prudente, conjuguée à une approche équilibrée en matière de gestion financière et à des efforts continus pour réduire la dette nationale du Canada, augmentera la compétitivité actuelle et future du pays.
[Traduction]
Un grand nombre de nos membres à travers le pays déplorent le fait que le gouvernement fédéral, abandonnant son approche responsable en matière de gestion financière, ait éliminé les éléments fondamentaux d'un budget déjà déposé au Parlement et augmenté les dépenses de programmes pour rester au pouvoir. Les dépenses massives introduites récemment, conjuguées aux énormes hausses de dépenses annoncées dans le budget de 2005, risquent de remettre le pays en position déficitaire si des développements imprévus affectent l'économie canadienne.
Le projet de loi C-48, amendement budgétaire qui remplit les conditions de l'entente entre les Libéraux et le NPD au détriment de la réduction de l'impôt sur les sociétés, a été élaboré rapidement et sans que l'on ait tenté de déterminer si les nouvelles initiatives stimuleront la productivité et la croissance économique à long terme. Il reflète un manque évident de planification et de réflexion stratégique à long terme au sein du gouvernement fédéral.
De plus, bien que le projet de loi C-48 précise les secteurs auxquels les fonds additionnels de 4,5 milliards de dollars seront affectés, il renferme un énoncé non limitatif qui laisse entendre que le Cabinet pourra préciser les fins particulières auxquelles les versements peuvent être faits et le montant de ces versements pour l'exercice en question. En d'autres termes, le Cabinet peut dépenser l'argent comme bon lui semble et la surveillance du Parlement a été sacrifiée. On ne peut pas dire que cela soit responsable sur le plan financier, comme l'a dit le ministre des Finances.
Selon la Chambre de commerce du Canada, le refus de divulguer des détails sur les programmes et leur mode d'administration reflètent un usage très irresponsable de l'argent des contribuables. Les Canadiens s'attendent à ce que l'on fasse preuve de responsabilité et de transparence en les tenant au courant de la façon dont leurs impôts sont dépensés.
Par le passé, les excédents imprévus de fin d'exercice étaient automatiquement affectés à la réduction de la dette. Cependant, au cours des deux prochaines années, une bonne partie de l'excédent servira à financer les nouvelles initiatives qui sont prévues. La dette fédérale continuera probablement à baisser de 2 milliards de dollars par an, ou plus si la réserve pour éventualités n'est pas utilisée, mais la réduction sera moins rapide que par le passé. Et si l'histoire est un bon indicateur prévisionnel, il faut s'attendre à ce que les dépenses additionnelles prévues dans le projet de loi C-48 se prolongent au-delà de deux ans.
La Chambre de commerce du Canada estime que nous devons continuer à mettre l'accent sur le remboursement de la dette. Les sommes économisées sur les règlements nets d'intérêt pourraient être remises aux contribuables sous forme de réductions d'impôt, ce qui rehausserait la compétitivité du Canada. Elles pourraient également servir à satisfaire aux besoins d'une population vieillissante. En effet, après 2011, le financement des programmes sera à la charge d'un pourcentage décroissant de travailleurs. Nous devons donc réduire le fardeau de la dette maintenant, en prévision des contraintes financières qu'occasionnera la retraite des baby boomers.
La réduction de la dette publique nette diminuerait également le coût du capital et stimulerait l'investissement privé dans les usines et le matériel. Un niveau d'endettement moins élevé rendrait également les programmes et les impôts fédéraux moins vulnérables à la fluctuation des taux d'intérêt. Le gouvernement fédéral doit aussi continuer à faire tout en son pouvoir pour rembourser la dette du Canada, notamment en y affectant le fonds de prévoyance, à moins qu'il ne soit requis pour pourvoir à des événements imprévus. Si l'économie se comporte comme prévu, le montant de la réserve de prudence économique devrait également être affecté à la réduction de la dette.
Nous rappelons également au gouvernement fédéral les paroles citées dans le plan budgétaire de 1999, à savoir que la réserve pour éventualités ne constitue pas une source de financement pour de nouvelles initiatives.
L'avalanche de nouvelles dépenses a également réduit la marge de manoeuvre financière requise pour accorder aux familles et aux entreprises canadiennes l'allègement fiscal dont elles ont tant besoin. Dans un monde intégré à l'échelle mondiale, les particuliers, les entreprises et les capitaux deviennent de plus en plus mobiles, recherchant les meilleures perspectives économiques. Les gouvernements de la planète se font concurrence pour attirer et retenir les emplois, les entreprises et les capitaux. Ceux qui offrent un régime fiscal intéressant prendront le dessus.
Les enjeux fiscaux doivent de nouveau devenir une priorité, et être accompagnés d'une feuille de route claire pour l'avenir fiscal. Ainsi les travailleurs à faible et moyen revenu, particulièrement les familles gagnant entre 25 000 $ et 45 000 $ par année, voient une grande partie des avantages qu'ils reçoivent de l'État—notamment la prestation fiscale pour enfants, les crédits pour la TPS et la taxe de vente provinciale, les crédits pour l'impôt foncier provincial, etc.—récupérés à mesure que leurs revenus augmentent. Ainsi leur taux marginal d'imposition réel est supérieur à 60 p. 100 et plus élevé que celui des travailleurs canadiens au revenu le plus élevé.
En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés, malgré les importantes réductions du taux d'imposition visant le revenu des sociétés ces dernières années au Canada, les taux d'imposition du capital, qui incluent l'impôt sur le revenu des sociétés, l'impôt sur le capital, et les taxes de vente sur les composantes du capital, surpassent largement ceux en vigueur aux États-Unis et dans d'autres pays. Certes, le taux d'imposition du capital des moyennes et grandes sociétés des secteurs de la fabrication, des services et des ressources non renouvelables s'établit en moyenne à 29 p. 100, comparativement à 24 p. 100 aux États-Unis.
Je ne peux trop insister sur l'importance de maîtriser les dépenses de programmes et d'éviter les augmentations de dépenses hétéroclites qui gaspillent les excédents de fin d'exercice imprévus. Au lieu de cela, l'argent devrait servir à diminuer les impôts qui pénalisent l'effort de travail, le perfectionnement des compétences, l'épargne, l'investissement, la prise de risque et l'innovation.
Merci, monsieur le président.
· (1305)
Le président: Merci, monsieur Murphy.
Nous accueillons maintenant Mme Morris, qui représente l'Association des universités et collègues du Canada.
[Français]
Mme Claire Morris (présidente et directrice générale, Association des universités et collèges du Canada): Merci, monsieur le président, d'avoir invité l'AUCC à faire part de ses commentaires sur le projet de loi C-48.
Lors de la présentation de l'AUCC, l'automne dernier, devant ce même comité, nous avons fait valoir que l'investissement dans l'enseignement postsecondaire est une condition essentielle à la création de richesses et au développement social.
Le niveau de vie des Canadiens a longtemps reposé sur notre compétitivité dans une économie axée sur le commerce international, où l'abondance de nos ressources naturelles nous avantageait considérablement par rapport à la plupart de nos concurrents. Aujourd'hui, cependant, notre qualité de vie dépend de plus en plus de notre compétitivité au sein d'une économie mondiale fondée sur le savoir. Dans ce contexte, ce sont le savoir et l'expérience sur le plan international qui procurent un avantage indéniable. Le projet de loi C-48 prévoit un soutien accru à l'aide internationale et, bien que cela ne soit pas ici le sujet de notre discussion, les universités jouent un rôle de premier plan à cet égard, en contribuant au transfert de connaissances et en conférant une dimension mondiale à l'expérience postsecondaire de nos étudiants.
Dans une économie axée sur le savoir, les gens — leurs talents, leur créativité, leurs connaissances et leurs compétences — revêtent une importance cruciale. Il en va de même des nouvelles idées et des applications efficaces des idées, des connaissances et des technologies propres à accroître la productivité et la valeur. Les Canadiens sont plus nombreux que jamais à demander accès à l'enseignement supérieur pour eux et pour leurs enfants. Ils ont entendu parler de l'économie du savoir et reconnaissent que, en moyenne, les diplômés universitaires jouissent des salaires et des taux de participation à la main-d'oeuvre les plus élevés, et qu'ils enregistrent les taux de chômage les plus faibles. Il n'est donc pas étonnant que la demande pour les études universitaires monte en flèche. Le nombre d'inscriptions à temps plein a crû de plus de 130 000 au cours des trois dernières années, ce qui porte le total à environ 800 000 étudiants à temps plein.
[Traduction]
En 1994, l'économie canadienne employait plus de 2,3 millions de diplômés universitaires. Une décennie plus tard, en 2004, les emplois destinés aux titulaires d'un ou de plusieurs diplômes universitaires ont augmenté de 45 p. 100. À ce rythme, il faudra 1,5 million de diplômés supplémentaires en 2014 pour alimenter l'économie du savoir—donc, beaucoup plus que le nombre de diplômés nécessaires pour remplacer ceux qui prendront leur retraite au cours des 10 prochaines années.
Aux termes de l'alinéa 2(1)b) du projet de loi C-48, les versements ne devant pas dépasser 1,5 milliard de dollars serviront « à appuyer les programmes de formation et à faciliter l'accès à l'enseignement postsecondaire, dans l'intérêt notamment des Canadiens autochtones ». L'AUCC se réjouit que l'on reconnaisse ainsi l'importance d'investir davantage pour améliorer l'accès à l'enseignement postsecondaire. Pour que cette disposition soit fructueuse, le gouvernement fédéral doit tenir compte des trois dimensions essentielles de l'accessibilité : l'aspect financier des études, la capacité d'accueil et la qualité de l'enseignement.
D'abord, en ce qui touche l'aspect financier, toute personne apte à faire des études supérieures devraient avoir accès à l'enseignement postsecondaire, peu importe sa situation financière. L'accessibilité est sans contredit restreinte quand une personne qualifiée se voit dans l'impossibilité de poursuivre ses études postsecondaires parce qu'elle n'a pas les moyens de supporter les frais des études et de subsistance. Dans ce contexte, il est important de fournir une aide financière ciblée, d'instaurer des mesures susceptibles d'encourager aux études les personnes issues de familles à faible revenu ou de groupes traditionnellement sous-représentés, comme les Autochtones du Canada et, enfin, d'alléger le fardeau financier des étudiants aux deuxième et troisième cycles.
Ensuite, sur les plans de la capacité d'accueil et de la qualité, les universités canadiennes sont déjà confrontées à une augmentation des inscriptions qui met leurs capacités à rude épreuve. Si le projet de loi C-48 a pour effet de stimuler les inscriptions sans que le gouvernement ne règle, en même temps, la question de la capacité d'accueil, on risque d'accroître les attentes et de susciter des déceptions, alors que les établissements ne disposent pas des ressources suffisantes pour offrir les places et la qualité que les étudiants demandent. Rendre les études plus abordables sans augmenter la capacité d'accueil des établissements pourrait entraîner une érosion de la qualité de l'enseignement ou réduire l'accessibilité aux études si des étudiants qualifiés devaient être refusés, faute de places disponibles. Lorsque les universités sont en mesure de dispenser un enseignement de haute qualité, enrichi par la recherche, à tous les étudiants qualifiés qui ont la volonté d'apprendre, cela bénéficie non seulement aux étudiants eux-mêmes, mais à la société toute entière.
Mais la réalité est la suivante : les universités canadiennes sont de plus en plus désavantagées lorsqu'on les compare à leurs principales concurrentes, soit les universités publiques américaines, qui offrent des programmes de quatre ans. Ces dernières reçoivent actuellement du gouvernement 5 000 $ CAN par étudiant de plus que les universités canadiennes. Les établissements américains consacrent ces ressources supplémentaires à l'enseignement, aux services d'aide aux étudiants, aux bibliothèques, à la recherche, et aux services au public—le genre d'investissements propres à améliorer la qualité du milieu d'apprentissage pour les étudiants.
La qualité du milieu d'apprentissage a une incidence directe et manifeste sur l'apprentissage et la croissance personnelle des étudiants, de même que sur l'acquisition de compétences très importantes dans une économie du savoir. Dans l'intérêt de la compétitivité et de la productivité du Canada—et en fin de compte, de notre qualité de vie—il est primordial de commencer à réduire cet écart en matière d'investissements entre les établissements d'enseignement supérieur canadiens et américains.
Afin que le projet de loi C-48 produise le résultat escompté, c'est-à-dire accroître l'accès à l'enseignement postsecondaire, le gouvernement fédéral devra faire sa part et veiller à ce que les établissements disposent des ressources nécessaires pour fournir un enseignement de qualité à un nombre croissant d'étudiants.
Merci, monsieur le président.
· (1310)
[Français]
Le président: Merci, madame Morris.
Nous entendrons maintenant M. St-Jean, du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada.
[Traduction]
M. Charles-Antoine St-Jean (contrôleur général, Bureau du Contrôleur général, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada): Merci, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion de vous rencontrer aujourd'hui.
Ayant tout récemment souligné le premier anniversaire de ma nomination au poste de contrôleur général du Canada, je suis heureux de comparaître devant le comité pour répondre aux questions des membres au sujet du projet de loi C-48. Je suis accompagné aujourd'hui de M. John Morgan, sous-contrôleur adjoint, Secteur de la gestion et de l'analyse financière, au Bureau du Contrôleur général.
[Français]
Comme vous le savez, mon mandat consiste à renforcer la gestion financière et la vérification interne à l'échelle du gouvernement fédéral. Puisqu'une de mes responsabilités est de superviser les nouvelles initiatives en matière de dépenses, c'est avec beaucoup d'intérêt que je veille à ce que les mécanismes appropriés soient mis en place conformément aux propositions formulées dans ce projet de loi.
[Traduction]
Comme d'autres projets de loi de crédits, le projet de loi C-48 accorde aux ministres le pouvoir législatif de faire des paiements à des fins précises approuvées par le Parlement. Toutefois, le projet de loi C-48 est unique puisque, pour la première fois, ce pouvoir de dépenser est assujetti à l'obtention d'un excédent financier minimal en 2005-2006 et en 2006-2007.
[Français]
Il s'agit d'une démarche prudente en matière de gestion financière. puisque ces dividendes financiers seraient autorisés uniquement dans la mesure où un excédent de 2 milliards de dollars serait obtenu au cours de ces deux exercices.
De plus, cette démarche prévoit le plafonnement des propositions de dépenses contenues dans le projet de loi à 4,5 milliards de dollars au cours de la période de deux ans.
[Traduction]
L'approbation de ce projet de loi, bien avant la fin de l'exercice, laisse également davantage de temps pour déterminer le cadre de gestion particulier des programmes. Avant que ces paiements ne soient effectués, l'approbation du Conseil du Trésor serait requise en vertu de certaines modalités. Ces modalités présenteraient en détail les paramètres plus précis des programmes, de même que le niveau approprié de vérification et d'évaluation et les dispositions sur la présentation de rapports et la reddition de comptes. Mon bureau examine ces propositions avant qu'elles ne soient soumises à l'approbation du Conseil du Trésor.
Après l'approbation du Conseil du Trésor, des ententes devraient alors être conclues avec les bénéficiaires avant le 31 mars pour décrire les modalités des paiements et l'assujettissement de ceux-ci à la détermination de l'excédent financier.
Une fois les résultats financiers déterminés, les montants dus aux bénéficiaires en vertu de ces ententes devraient alors être confirmés, prélevés sur l'excédent et vérifiés par le vérificateur général, conformément aux politiques comptables du gouvernement. Dans la mesure où un excédent financier de plus de 2 milliards de dollars est confirmé plus tôt dans l'année, les montants payables en vertu des ententes pourraient être déterminés avant la fin de l'exercice. Les montants payables pourraient alors être versés, selon les besoins, conformément aux modalités des ententes.
· (1315)
[Français]
Voilà qui termine mes observations préliminaires. Je serai heureux de répondre à toutes les questions que peuvent se poser les membres de votre comité. Merci à nouveau de m'avoir invité à comparaître devant votre comité.
Le président: Merci, monsieur St-Jean.
[Traduction]
Pour la gouverne des témoins, je précise que les membres disposent de cinq minutes. Le premier tour sera de sept minutes, mais je vais sans doute réduire le temps de parole des membres par la suite pour pouvoir donner un tour à tout le monde. Cela comprend les questions et les réponses. Merci.
Monsieur Solberg.
M. Monte Solberg: Merci beaucoup, monsieur le président. Mon temps est limité, alors je vais passer directement à l'essentiel.
Monsieur St-Jean, le ministre d'État responsable de l'infrastructure et des collectivités, John Godfrey, a récemment conclu un accord fondé sur le projet de loi C-48, alors que le comité n'a même pas fini de l'examiner encore. Peut-être pourriez-vous nous dire si vous estimez qu'il s'agit là d'une approche prudente, étant donné qu'aucune condition n'a encore été définie quant à la manière dont cet accord serait conclu, géré, vérifié et surveillé.
M. Charles-Antoine St-Jean: Merci beaucoup, monsieur le député, pour votre question.
Tous ces nouveaux accords qui vont être conclus seront assujettis à la politique du gouvernement du Canada sur les paiements de transfert. Cette politique prévoit que des modalités précises soient approuvées par le Secrétariat du Conseil du Trésor. Ces modalités concernent la vérification, l'évaluation, et le cadre de responsabilisation de gestion qui est prévu. Tous ces éléments doivent être paraphés et acceptés par la ville concernée avant qu'on effectue quelque paiement que ce soit. Donc, il peut y avoir accord de principe, mais il faut ensuite faire une présentation au Conseil du Trésor en bonne et due forme pour obtenir l'approbation officielle du mécanisme qui permettra d'effectuer les paiements.
M. Monte Solberg: Donc, vous acceptez volontiers que ces accords soient signés plusieurs années auparavant?
M. Charles-Antoine St-Jean: En ce qui concerne ces accords, comme je viens de vous l'expliquer, ils seront assujettis au cadre de responsabilisation de gestion approprié pour que nous soyons sûrs que tout soit en règle. Nous examinons les modalités de tous les accords pour nous assurer d'avoir un cadre de vérification approprié nous permettant d'effectuer une vérification en bonne et due forme.
M. Monte Solberg: Très bien.
M. Pallister va prendre la relève.
Le président: Merci.
Monsieur Pallister.
M. Brian Pallister: Merci, monsieur le président.
Je voudrais tout d'abord vous remercier pour vos exposés et d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui.
Dans vos remarques liminaires, madame Russell, vous avez posé la question de savoir si cette accélération des dépenses—c'est-à-dire la baisse du rythme de nos dépenses et ensuite l'accélération que nous avons observée ces dernières années—devrait nous inquiéter. Je vous dirais que si vous vous trouviez dans une voiture conduite par quelqu'un qui ne sait pas du tout où il va, cela vous inquiéterait certainement. De plus, si vous n'étiez pas sûre de savoir qui conduisait la voiture, vous seriez encore plus inquiète. Voilà donc un peu notre attitude à cet égard.
Comme vous le savez, ce projet de loi ne présente qu'une série de généralités. Et ce que nous trouvons inacceptable, c'est le manque de surveillance parlementaire que cela suppose. Le gouvernement a pris l'engagement d'examiner toutes les dépenses… et ce n'est pas une situation unique, bien entendu. Cela se fait dans tous les ménages au Canada. Instinctivement, les petites entreprises gèrent leurs ressources de façon à réduire les dépenses qui sont moins prioritaires et à augmenter celles qui le sont davantage. Au cours des dernières années, le gouvernement a beaucoup parlé de ce processus d'examen des dépenses.
Il est évident que le Conseil du Trésor a un rôle à jouer dans ce contexte. Et je trouve inquiétant qu'on nous présente un accord rédigé à la hâte qui représente un engagement de 4,6 milliards de dollars qui, selon vous, comme vous l'avez dit dans vos remarques liminaires, pourra être évalué après coup. Mais ce n'est pas ainsi que le processus d'examen des dépenses auquel le gouvernement s'est engagé et qui, selon lui, devrait conduire à des changements à long terme dans la culture de gestion du gouvernement devait se dérouler, d'après ce que les responsables gouvernementaux ont dit à la population canadienne et à nous, parlementaires, à ce sujet… On nous a dit que les décisions sur les priorités seraient prises avant que les fonds ne soient affectés, et non pas après coup.
Alors j'aimerais entendre votre réaction.
· (1320)
M. Charles-Antoine St-Jean: Merci beaucoup.
J'aurais dû compléter ma réponse à la question de M. Solberg. L'affectation de fonds n'est faite que sous réserve des crédits parlementaires.
L'approche à adopter vis-à-vis de ce dividende budgétaire, si on peut le qualifier ainsi, consiste à prendre la décision longtemps à l'avance. Ainsi au lieu de décider à quoi vous affecterez un excédent non prévu à la fin de l'exercice, vous prenez les décisions longtemps à l'avance, de façon à pouvoir en discuter avec les divers intervenants clés qui auront à exécuter le programme, de façon à asseoir le programme sur un cadre de responsabilisation de gestion approprié. Pour ma part, je suis très favorable à cette approche. C'est quelque chose sur laquelle j'insiste au sein de notre organisme—c'est-à-dire que les décisions soient prises bien longtemps à l'avance—un an ou deux—à supposer que nous ayons la marge budgétaire requise pour engager les dépenses prévues…
M. Brian Pallister: Nous n'avons pas beaucoup de temps, alors je m'excuse d'avance de vous interrompre, mais j'espère que vous aurez compris la nature de nos inquiétudes. C'est bien que vous soyez encouragés d'apprendre qu'il a été décidé que nous irons en Saskatchewan, mais ce qui m'inquiète, personnellement, c'est l'itinéraire qu'on va suivre pour y arriver. Je souhaite que cela se fasse rapidement et que nous soyons en mesure de déterminer par la suite dans quelle mesure nous avons respecté les engagements précis que nous avons pris par rapport à cet itinéraire, etc. Notre responsabilité, et la vôtre, aussi, consiste à assurer une surveillance prudente de l'administration de toutes ces activités.
J'ai beaucoup apprécié l'exposé du représentant de l'APN, et je voulais lui demander de réagir à quelque chose. Je suis très préoccupé par le rapport déposé par la vérificatrice générale en novembre dernier, qui a mis en lumière le manque de compétences—car c'est bien de ça qu'il s'agit—au ministère en ce qui concerne le suivi des crédits affectés au programme d'enseignement postsecondaire. En fait, la vérificatrice générale a signalé que les chiffres donnés au Conseil du Trésor dans les présentations qui lui ont été faites étaient inexactes, que les responsables concernés ne semblaient pas savoir exactement comment les fonds seraient distribués, et qu'il n'y avait pas du tout de régime de responsabilisation en place pour cette catégorie d'activité. Mais malgré le rapport fait par le Bureau de la vérificatrice générale à ce sujet en 2000, en 2004, il n'y avait toujours pas eu de progrès.
En tant que Manitobain habitant tout près d'une réserve et qui a passé toute ma vie avec les peuples autochtones, je tiens vraiment à ce que ces fonds aillent aux étudiants. Et pour le moment—d'ailleurs, le Bureau de la vérificatrice générale a beaucoup insisté là-dessus—je ne vois vraiment pas comment on peut s'assurer que ce soit le cas. Je dois donc vous faire part de ma réticence en ce qui concerne l'engagement financier que reflète ce projet de loi vis-à-vis d'un programme qui n'offre pas de résultats mesurables à la population canadienne.
J'aimerais savoir ce que vous en pensez, monsieur Jock.
M. Richard Jock: Merci. Je vous dirais que nous serions très intéressés à examiner de nouveaux mécanismes permettant de garantir que les étudiants profitent plus directement de ce programme. Il est évident que l'APN souhaite travailler dans ce sens.
Mais il y a un autre élément important. Il y a lieu à mon avis d'établir un parallèle avec les services de santé. Vous vous souviendrez que le Forum national a mené une étude théorique consistant à examiner la notion selon laquelle le financement du système de soins de santé était suffisant, en théorie, alors que dans la pratique, presque tout le monde constatait que les services assurés ne répondaient pas aux besoins. Les citoyens ont commencé à protester et à manifester leur mécontentement, si bien qu'une orientation stratégique a été définie, que tous les intervenants ont fini par appuyer, et qui voulait qu'on augmente le financement du système de soins sans nécessairement avoir une idée bien concrète de ce qu'il fallait faire.
En ce qui concerne l'éducation et le logement pour les membres des Premières nations, je peux dire que nous nous retrouvons dans exactement la même situation. Cette réalité est bien claire pour les étudiants et pour ceux qui sont les consommateurs, si je puis dire.
Voilà donc la différence entre la théorie et la réalité.
Le président: Merci, monsieur Jock.
Monsieur Paquette.
[Français]
M. Pierre Paquette: Merci, monsieur le président.
Monsieur St-Jean, j'aimerais avoir quelques précisions techniques.
Dans le projet de loi, on parle de « l’excédent budgétaire de l’exercice — tel qu’il est prévu dans les Comptes publics établis conformément aux articles 63 et 64 de la Loi sur la gestion des finances publiques ». Je voudrais que vous nous confirmiez le fait que l'excédent dont on parle, ce sont les recettes totales moins les dépenses de programmes et les frais de la dette. C'est de cela qu'on parle. Cela signifie qu'au fond, dans le budget tel qu'il va se vivre après le projet de loi C-48, la mesure de prudence économique et la réserve pour éventualités ne seront plus à la hauteur prévue dans le projet de loi C-43.
· (1325)
M. Charles-Antoine St-Jean: L'équation budgétaire, c'est toujours les revenus moins les dépenses de programmes, les paiements de transfert aux individus et les frais de la dette. Cela vous donne le résultat net. L'objectif est d'avoir un résultat net d'un minimum de 2 milliards de dollars. C'est la réserve pour éventualités. C'est le montant dont il faut... [Inaudible]
M. Pierre Paquette: Autrement dit, la réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars et la mesure de prudence économique de 1 milliard de dollars nous garantissent que l'argent sera là.
M. Charles-Antoine St-Jean: L'objectif est de viser un surplus comptable de 2 milliards de dollars.
M. Pierre Paquette: Dans ce cas, le gouvernement ne devrait-il pas modifier le montant de ses réserves, qui se situeront en fait à 2 milliards de dollars, pour arriver à un solde budgétaire différent?
M. Charles-Antoine St-Jean: S'il y avait toujours une réserve pour éventualités de 3 milliards de dollars, en plus des 2 milliards de dollars, cela ferait 5 milliards de dollars. L'objectif est d'avoir un surplus budgétaire de 2 milliards de dollars, selon le projet de loi. S'il y a un surplus budgétaire de plus de 2 milliards de dollars, en enlevant toutes les réserves, c'est ce montant qui...
M. Pierre Paquette: Cela me pose un problème.
D'abord, je n'ai jamais trouvé très sérieuse cette idée de réserve pour éventualités et de mesure de prudence économique, parce qu'on les a créées au fur et à mesure que les surplus imprévus augmentaient.
Comment cela devrait-il s'écrire maintenant? On prévoyait, pour 2005-2006, 4 milliards de dollars d'excédent. De ce montant, on soustrayait 3 milliards de dollars de réserve pour éventualités et 1 milliard de dollars pour la mesure de prudence économique. Ne devrait-on pas rayer cela et tout simplement mettre 4 milliards de dollars d'excédent budgétaire et 2 milliards de dollars de réserve?
M. Charles-Antoine St-Jean: Non. Le libellé du projet de loi est assez clair sur ce plan. Du point de vue comptable, c'est très simple: vos revenus moins toutes vos dépenses vous donnent votre surplus. C'est comme cela que le premier paragraphe est écrit.
S'il y a un surplus supérieur à 2 milliards de dollars, vous pouvez...
M. Pierre Paquette: On peut entreprendre les dépenses prévues dans le projet de loi C-48.
M. Charles-Antoine St-Jean: Vous en avez la possibilité. Ce n'est pas obligatoire, mais le projet de loi en donne la possibilité.
M. Pierre Paquette: Ce n'est pas obligatoire. Répétez-nous pourquoi.
M. Charles-Antoine St-Jean: Ce projet de loi autorise le gouvernement à le faire.
M. Pierre Paquette: C'est très bon à savoir.
Madame Russell, j'ai souvent travaillé avec votre institut. Lorsque j'étais à la CSN, nous faisions des budgets alternatifs avec votre organisme. Pouvez-vous nous dire à combien vous estimez les surplus prévus pour 2005-2006 et 2006-2007?
[Traduction]
Mme Ellen Russell: Si ma mémoire est bonne, dans le rapport que nous avons soumis à l'examen du comité, nous avions évalué l'excédent à environ 11 milliards de dollars, c'est-à-dire le montant le plus élevé des quatre rapports. Mais ce chiffre nous semblait tout à fait satisfaisant. Nous avons souvent fait une projection plus élevée de l'excédent que les prévisionnistes traditionnels. Mais en ce qui concerne notre bilan, je dois dire que nos estimations sont assez justes. Nous sommes convaincus que le montant sera beaucoup plus élevé encore.
[Français]
M. Pierre Paquette: Je pense que nous nous entendons très bien sur le fait qu'il n'y a pas de problème financier à assumer les mesures annoncées dans le projet de loi C-48. Les surplus que vous prévoyez sont suffisants pour assumer les dépenses prévues dans C-48.
Selon vous, y aurait-il aussi eu de la place pour bonifier l'assurance-emploi?
[Traduction]
Mme Ellen Russell: À mon avis, nous avons certainement la marge de manoeuvre nécessaire pour augmenter les dépenses, s'il y avait la volonté de le faire, et donc de dépenser plus que ce qui a été négocié dans le contexte du projet de loi C-48. C'est pour cela que ces dépenses supplémentaires ne me semblent pas du tout préoccupantes, parce que le montant dont il est question ici est faible par rapport à ce qu'on pourrait éventuellement dépenser, à mon avis.
[Français]
M. Pierre Paquette: Vous seriez donc favorable à l'idée que le Bloc québécois, par exemple, dépose un amendement pour bonifier l'assurance-emploi. Selon vous, il y aurait de la place pour cela.
[Traduction]
Mme Ellen Russell: Oui, il ne faut pas hésiter à le faire.
[Français]
M. Pierre Paquette: Merci. Nous avons au moins un témoin qui est d'accord avec nous.
Je pense qu'il ne me reste pas beaucoup de temps. Ma dernière question s'adresse à Mme Morris.
J'ai beaucoup aimé votre présentation. Elle est très nuancée. Je comprends que tout le monde veuille qu'on investisse dans l'enseignement postsecondaire. Nous sommes les premiers à le demander depuis très longtemps. Cependant, je vais lire le dernier paragraphe de votre présentation, parce que je trouve qu'il illustre très bien le problème que nous pose ce projet de loi:
Afin que le projet de loi C-48 produise le résultat escompté, c'est-à-dire accroître l'accès à l'enseignement postsecondaire, le gouvernement fédéral devra faire sa part et veiller à ce que les établissements disposent des ressources nécessaires pour fournir un enseignement de qualité à un nombre croissant d'étudiants. |
Selon la façon dont le gouvernement fédéral va dépenser ces 1,5 milliard de dollars, cela pourrait être une petite bouffée d'oxygène — parce qu'il n'y a aucun engagement à long terme dans le projet de loi C-48 —, mais cela pourrait aussi vous causer des problèmes. En effet, si cela porte strictement sur l'accessibilité des études pour les étudiants, cela ne vous donne pas plus de classes, de professeurs et de laboratoires de recherche.
· (1330)
Mme Claire Morris: Merci, monsieur le président.
Le point essentiel de notre présentation est qu'il ne s'agit pas seulement de rendre l'accès à l'université plus facile pour les étudiants sur le plan financier, mais aussi de s'assurer que les universités ont la capacité de recevoir les étudiants. Il faut qu'il y ait un équilibre. Il faut rendre l'accès à l'université plus facile pour les étudiants, mais il faut aussi s'assurer que les universités aient la capacité de les recevoir et de leur dispenser un enseignement de qualité.
M. Pierre Paquette: Est-ce que le fait qu'il n'y ait pas plus de détails dans le projet de loi concernant la façon dont l'argent va être dépensé ne vous inquiète pas un peu, sur le plan des études postsecondaires? S'il n'y a pas cet équilibre auquel vous faites allusion, vous allez vous retrouver avec des problèmes.
Mme Claire Morris: Comme vous l'avez dit, on parle de façon plutôt générale de la question de l'accès des étudiants à l'université. Nous essayons de définir ce que veut dire l'accès en soulignant le fait qu'il y a trois dimensions à l'accès à un enseignement de qualité à l'université.
M. Pierre Paquette: Je voulais simplement mentionner que le point souligné par Mme Morris est très intéressant, parce qu'il montre les faiblesses du projet de loi C-48. On aurait préféré un engagement à long terme de la part du gouvernement, plutôt qu'une petite bouffée d'oxygène qui risque de créer des problèmes.
Le président: Merci, monsieur Paquette.
[Traduction]
C'est maintenant à M. McKay, suivi de Mme Wasylycia-Leis. Ensuite nous entendrons M. Epp et M. Côté.
L'hon. John McKay (Scarborough—Guildwood, Lib.): Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à M. St-Jean.
Vous dites que ce projet de loi habilitant doit permettre aux ministres d'effectuer des paiements pour des fins bien précises. C'est un projet de loi original, en ce sens qu'il prévoit qu'une condition précise soit remplie, à savoir que le gouvernement enregistre un excédent de 2 milliards de dollars, et le montant des dépenses à engager soit plafonné à 4,5 milliards de dollars, ce qui serait prélevé sur l'excédent.
Cela ne semble pas du tout cadrer avec les affirmations de M. Murphy et M. Williamson, et là je me permets de citer directement les propos de M. Murphy :
De plus [...] le projet de loi C-48 […] renferme l'énoncé non limitatif suivant : « le gouverneur en conseil peut préciser les fins particulières auxquelles les versements… peuvent être faits et le montant de ces versements pour l'exercice en question. » En d'autres termes, le Cabinet peut dépenser l'argent comme bon lui semble et la surveillance du Parlement a été sacrifiée. On ne peut pas dire que cela soit responsable sur le plan financier, comme l'a dit le ministre des Finances. Selon la Chambre de commerce du Canada, le refus de divulguer des détails sur les programmes et leur mode d'administration reflètent un usage très irresponsable de l'argent des contribuables. Les Canadiens s'attendent à ce que l'on fasse preuve de responsabilité et de transparence en les tenant au courant de la façon dont leurs impôts sont dépensés. |
Selon M. Williamson, c'est contraire aux principes comptables les plus fondamentaux.
Pour les fins de cette audience, monsieur St-Jean, il convient de préciser que ces deux déclarations ne semblent pas coïncider avec votre opinion, à savoir qu'il s'agit effectivement d'une contrainte en ce qui concerne l'exercice du pouvoir discrétionnaire du gouvernement du Canada. Autrement dit, cette mesure prévoit un plancher et un plafond et indique quelles dépenses pourraient éventuellement être engagées, si les objectifs minimum et maximum sont atteints. Pourriez-vous donc commenter l'opinion de M. Murphy et de M. Williamson, selon qui cette mesure n'est pas responsable sur le plan financier?
M. Charles-Antoine St-Jean: Merci pour cette question.
Comme je l'ai indiqué dans mes remarques liminaires, l'approche adoptée par le gouvernement dans cette mesure est unique en ce qui concerne sa façon de gérer ses affaires financières. Ce qui me plaît beaucoup dans cette approche—et je recommande qu'on l'adopte depuis quelque temps déjà—c'est que tout se fait longtemps à l'avance. Ainsi les différents partis ont le temps de régler les détails du programme de transferts, et les modalités que le gouverneur en conseil trouve souhaitables pour ces programmes.
Donc, du point de vue de la gestion financière, le fait que ce travail se fera longtemps à l'avance, et non pas à la dernière minute, au moment où nous aurons les données finales sur la véritable situation financière du gouvernement, est très positif. Nous aurons un instrument en place, c'est-à-dire l'accord à conclure avec les bénéficiaires, bien avant le 31 mars. Donc, sur ce plan-là, je suis très satisfait que le gouvernement adopte cette approche. Bien entendu, le gouverneur en conseil pourra déterminer lui-même quels programmes devraient être financés ou faire l'objet d'un accord de financement.
· (1335)
L'hon. John McKay: Merci.
Je vais maintenant me tourner vers M. Murphy et M. Williamson pour leur donner l'occasion de réagir, parce que vous avez fait valoir avec énergie votre argument selon lequel le gouvernement du Canada fait des folies avec cette mesure et l'on sait que vos opinions jouissent d'un certain crédit au sein de la population générale.
Mais n'est-il pas vrai que votre caractérisation du projet de loi est tout à fait erronée—et que cette mesure empêche au contraire le gouvernement du Canada de faire des folies et de dépenser sans compter, puisqu'elle précise un minimum, un maximum, et le respect de certaines lignes directrices? Le projet de loi énonce cinq conditions qui doivent être remplies pour la conclusion d'accords, etc.
Je crois comprendre que vous préféreriez que le gouvernement opte plutôt pour la réduction de la dette et des allégements fiscaux. Je comprends pourquoi vous exprimez cette préférence. Mais ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi vous prétendez que cette mesure n'est pas responsable sur le plan financier, parce que le fait est que la décision de réduire la dette et les impôts est une décision politique. Ce projet de loi reflète d'autres choix politiques tout simplement.
Si l'on met de côté votre conviction en ce qui concerne la nécessité de réduire la dette et les impôts, pourriez-vous m'expliquer en quoi cette mesure est plus irresponsable que ce qui se fait actuellement, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de restrictions du tout?
M. Michael Murphy: Monsieur le président, je pourrais peut-être commencer par faire quelques petites observations.
Le premier point sur lequel je voudrais insister est vraiment le point le plus important, en ce qui nous concerne. Et cela concerne le fait que vous êtes saisis d'un projet de loi—et on pourrait certainement débattre longuement la question de savoir ce qui a pu motiver les gouvernements à faire ce qu'ils ont fait au cours de notre histoire, par rapport à la possibilité qu'ils aient ou non aimé bénéficier de ce genre de mécanisme—qui permet essentiellement au gouvernement de prendre l'argent et de décider ensuite comment il l'utilisera. C'est exactement le contraire de ce qu'on fait normalement.
Je sais que devant ce comité, je n'ai pas à prêcher à des convertis. Je pense que le comité sait très bien, mieux que n'importe quel autre comité, en quoi consiste la procédure d'élaboration d'un budget fédéral. Il convient de suivre cette procédure. Le gouvernement a déposé un budget deux mois avant de conclure cet accord. Nous savons pour quelles raisons il a été conclu, si bien que du point de vue du principe, il y a d'ores et déjà un problème.
Mais le point fondamental à retenir, à mon avis, c'est ce qu'on voit ici, dans le projet de loi proprement dit, et dans le texte du projet de loi. Bien qu'on précise jusqu'à un certain point à quoi servira généralement les crédits—mais rappelons-nous qu'il n'y a pas de détails, et je pense que vous avez déjà entendu amplement de critiques à ce sujet—ce qui ne va vraiment pas, c'est ce système qui consiste à affecter les fonds et de permettre au gouvernement de déterminer par la suite comment il veut utiliser les fonds en question. Voilà ce que prévoit le projet de loi. Voilà la raison fondamentale pour laquelle je ne suis pas d'accord.
L'hon. John McKay: Donc, vous préféreriez qu'on laisse les choses telles quelles, c'est-à-dire que le gouvernement continue d'être entièrement libre de faire ce qu'il veut d'un excédent non prévu?
M. Michael Murphy: Je préfère que nous préparions les budgets fédéraux sur une base annuelle. Ainsi nous passons par un processus de grande envergure géré par le comité, et je dirais que, jusqu'à présent, le comité a toujours très bien géré ce processus. Je félicite donc le comité pour la qualité du travail qu'il a accompli jusqu'à présent.
Il se trouve qu'il n'a pas eu le temps d'examiner en profondeur cette procédure. Nous nous retrouvons maintenant dans une situation où le gouvernement a décidé, en février, de présenter tel plan que nous, les investisseurs, les contribuables et les autres, devrons accepter pour les 12 prochains mois, en attendant le prochain budget. Il me semble que le travail d'élaboration du prochain plan devrait commencer le lendemain. Ce qu'on nous offre, à la place, c'est un accord conclu à la va-vite qui prévoit essentiellement que nous dépenserons davantage, sans tenir aucunement compte de ce qu'il faudrait faire du côté des impôts ou du remboursement de la dette. Cela aura effectivement pour résultat de réduire notre capacité de rembourser la dette—du moins potentiellement—à 2 milliards de dollars pour les deux prochaines année. En ce qui nous concerne, ce n'est pas une approche raisonnable.
L'hon. John McKay: Non, pas nécessairement.
Quoi qu'il en soit, c'est maintenant à M. Williamson d'intervenir.
M. John Williamson: Laissant de côté la possibilité qu'on ait une préférence pour les réductions d'impôt et l'élimination de la dette, parce que ce que vous dites est vrai, le fait est que ce changement aura pour résultat de créer de l'incertitude en ce qui concerne les dépenses publiques.
Ce n'est que l'an dernier que le ministre des Finances a déclaré un jour que l'excédent se monterait à 1,9 milliard de dollars, alors que quelques semaines plus tard, il était de 9,1 milliards de dollars. À moins que le Conseil du Trésor en sache plus long que le ministre des Finances, je dirais que c'est plutôt à la fin de l'exercice financier que l'on commence réellement à évaluer l'importance de l'excédent.
Cela marque un changement en ce qui concerne les priorités du gouvernement actuel qui, jusqu'à présent, a toujours présenté les dépenses qu'ils comptaient faire dans son budget, en passant tout de suite à l'année d'après à la fin de l'exercice. C'est avec un grand déploiement de publicité que le gouvernement du Canada a annoncé qu'il adopterait désormais la comptabilité d'exercice, qui prévoit justement que les dépenses soient inscrites au budget d'année en année—c'est-à-dire que les dépenses qui sont annoncées sont engagées au cours de la même période.
En ce qui concerne la transparence et la responsabilisation, si les membres estiment que le gouvernement peut se permettre de dépenser 4,6 milliards de dollars au cours des deux prochaines années, il conviendrait que le gouvernement inscrive ces dépenses au budget, au lieu de modifier la Loi sur la gestion des finances publiques. Il n'y a pas de raison de faire cela, si ce n'est de favoriser les tours de passe-passe à la fin de l'exercice financier, étant donné que le Cabinet sera autorisé à engager des dépenses après coup. De plus, si les excédents en question ne se matérialisent pas, alors que des accords ont été conclus et les cadres de financement sont en place, le gouvernement risquera de faire l'objet de pressions politiques accrues et de se sentir obligé d'engager ces dépenses quand même au cours de l'exercice suivant. Donc, pour moi, cette façon de faire élimine les pratiques responsables de gestion et de budgétisation que nous avons observées depuis que le gouvernement a commencé à enregistrer des excédents. Cette mesure a pour effet d'éliminer cette approche responsable.
· (1340)
Le président: Merci, monsieur Williamson.
Nous avons maintenant comme intervenants Mme Wasylycia-Leis, M. Epp, M. Côté, et M. Hubbard.
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.
Je voudrais dire à tous nos témoins que je leur suis reconnaissante d'être présents aujourd'hui, surtout s'ils sont revenus une deuxième fois—entre autres, Ellen Russell, après avoir attendu au comité que l'orage passe jeudi dernier.
À mon avis, il convient de signaler que M. Williamson et M. Murphy n'ont pas entendu l'exposé de notre contrôleur général, si je ne m'abuse, alors que ce dernier nous a expliqué, au contraire, que ce projet de loi suit la procédure de planification budgétaire normale. En fait, il nous présente même un peu plus de détail et garantit un peu plus de préavis que ce qui est normalement prévu.
Je n'ai pas l'intention de poser une question à ce sujet, mais il me semble important de noter que la Chambre de commerce et la Fédération des contribuables n'ont absolument pas protesté l'an dernier lorsque le projet de loi budgétaire prévoyait que nous mettions de côté 200 millions de dollars pour l'avancement des technologies liées au développement durable, sans aucun détail, ou encore 100 millions de dollars pour l'information sur la santé, ou encore 400 millions de dollars pour créer un fonds de fiducie pour l'immunisation. D'ailleurs, la liste est longue. Nous pourrions certainement trouver suffisamment de postes budgétaires pour dépasser de loin 4,6 milliards de dollars. Bien sûr, en tant que membres du Comité des finances, nous nous assurions que les affectations étaient faites correctement. Donc, ce dont nous parlons n'est guère différent de ce qui se fait normalement. Ensuite, je dirais que la démarche proposée ici est plus rigoureuse que ce ne serait le cas normalement.
À mon avis, si nous avions parmi nous d'autres représentants du milieu des affaires, nous pourrions peut-être entendre un autre son de cloche. Je sais que certaines grandes entreprises ont déclaré qu'il est important d'investir dans des secteurs comme celui de l'éducation. Quand nous avons reçu devant le comité les représentants de certaines entreprises dans le cadre des consultations prébudgétaires, on nous a dit que notre plus grande priorité, en tant que comité, devrait être d'investir dans l'éducation, parce que c'est l'éducation qui garantira l'avenir économique et permettra de répondre à certaines des préoccupations exprimées ici aujourd'hui.
Dans un premier temps, je voudrais demander à Richard Jock de l'APN, et ensuite à Mme Morris, de l'Association des universités et collèges, d'essayer de faire comprendre aux représentants du milieu des affaires qui sont présents aujourd'hui pourquoi il est important d'investir dans des secteurs où nous pouvons nous attaquer aux maux de la société tout en créant des emplois.
Je vais commencer par vous, monsieur Jock. Dites-nous donc ce que cela signifie pour vous de voir des milliers et des milliers de jeunes Autochtones qui sont aliénés, hostiles, seuls, au chômage, et sans espoir; dites-nous aussi l'impact que cela peut avoir sur l'économie; et expliquez-nous pourquoi une initiative comme celle-ci, même à petite échelle, est importante parce qu'elle constitue un véritable progrès.
M. Richard Jock: Eh bien, vous avez déjà exprimé tout cela en termes très éloquents, à mon avis, mais je voudrais dire que s'agissant des deux principaux éléments du projet de loi, l'habitation en est certainement un qui va relever le niveau de vie des gens, pour qu'ils soient bien positionnés pour profiter de l'avenir. L'éducation constitue vraiment l'élément fondamental qui permettra aux membres des Premières nations de participer à part entière à l'économie.
Nous savons déjà qu'il y aura des pénuries de main-d'oeuvre et de compétences à l'avenir, mais à mon avis, nous possédons déjà une excellente population qui permettra de répondre en partie à certains besoins urgents dans ce domaine.
Je voudrais également ajouter que les études démontrent très clairement que l'éducation offre un rendement qui est de 15 à 20 fois supérieur à l'investissement, comparativement à l'assistance sociale. Quant à nous, nous nous intéressons à ce genre de dépenses, à la fois pour sa souplesse et parce qu'elles permettent d'envisager de nouvelles façons de faire les choses. À mon avis, l'Assemblée des Premières nations est bien d'accord. Par exemple, prévoir un délai de deux ans pour l'habitation nous incitera peut-être à créer un nouveau fonds d'immobilisation, qui permettrait de réunir plus d'argent pour construire des logements et contribuer à financer des logements comme ceux qu'offre le marché.
Bref, les gens qui ont fait des études supérieures, sans même nécessairement avoir obtenu des diplômes, sont beaucoup mieux équipés pour régler des problèmes de santé ou de dépendance de type social, et toutes sortes d'autres difficultés. Pour nous, les avantages d'un tel investissement sont très manifestes.
· (1345)
Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.
Je m'adresse maintenant à Claire Morris : certaines entreprises nous ont dit qu'elles ont besoin de réductions d'impôt plus importantes afin d'accroître les investissements qu'elles font dans la recherche et le développement. Par contre, nous savons aussi que, comparativement à 11 pays, le Canada se classe premier en ce qui concerne les dégrèvements fiscaux qu'il offre aux sociétés pour la recherche et le développement—c'est-à-dire que c'est beaucoup mieux ici qu'aux États-Unis. Ne serait-il pas logique d'investir dans nos établissements d'enseignement afin de créer une population active hautement qualifiée qui nous permette de rehausser notre compétitivité et de solutionner toutes sortes de problèmes en matière de croissance économique et de productivité, problèmes dont nous parle la Chambre de commerce et l'Association des contribuables canadiens? Ne serait-il pas plus rentable maintenant d'investir dans des mécanismes qui amélioreront l'accès aux programmes d'études?
Mme Claire Morris: Merci, monsieur le président.
Il ne fait aucun doute que ce que vous suggérez correspond à notre profonde conviction, et dans notre mémoire, nous indiquons justement que nous parlons à présent d'une économie différente. Nous parlons de l'économie du savoir. Ce n'est pas une économie qui nous permettra de dépendre au même degré des ressources naturelles dans les années qui viennent. Ce qui va surtout compter à l'avenir, ce sont nos ressources humaines et nos idées. Plusieurs de mes collègues autour de cette table ont cité des statistiques au sujet des possibilités d'emploi des personnes qui ont fait des études supérieures ou ont suivi des programmes d'enseignement postsecondaire, par rapport à celles qui ne l'ont pas fait, et nous savons qu'au fil des ans, ce phénomène va aller en croissant.
En 2002, nous avons publié un grand rapport intitulé Out of Reach: Trends in Household Spending on Education in Canada, qui prévoyait que, d'ici l'an 2011, nous aurions 200 000 diplômés universitaires de plus, que plus d'étudiants s'inscriraient à des programmes universitaires, et le fait est qu'en l'an 2004, nous avions déjà 130 000 étudiants de plus. Voilà l'une des raisons pour lesquelles les universités estiment que leurs ressources sont déjà utilisées au maximum, mais à mon avis, cela indique également que les parents et les jeunes eux-mêmes ont compris dans quel monde ils devront vivre et ce qui leur faudra comme compétences pour arriver à affronter la concurrence. Là je présente évidemment le point de vue individuel, mais si vous envisagez la question en termes plus généraux, du point de vue de ce que ça signifie pour notre pays, et quand vous voyez ce que font d'autres pays du point de vue des investissements qu'ils font dans l'éducation et dans la recherche, vous comprenez tout de suite que ce sont ces pays-là que nous concurrençons.
Je voudrais parler pendant quelques instants de l'éducation des Autochtones, parce que c'est une question qui revêt une importance critique pour l'avenir de notre pays. Surtout dans l'ouest du Canada, et même dans toutes les régions du pays, nous devrons trouver de bons moyens de rejoindre les étudiants autochtones, de les soutenir pendant leur période d'apprentissage, et de les amener à terminer leurs diplômes; voilà un des défis auquel nous sommes tous confrontés et que nous souhaitons tous relever.
Le président: Merci, madame Morris.
Monsieur Epp, suivi de M. Côté, et de M. Hubbard.
M. Ken Epp (Edmonton—Sherwood Park, PCC): Merci beaucoup.
Encore une fois, parce que notre temps est limité, je ne peux pas prendre le temps de vous remercier tous de votre présence, mais je dois dire que vos propos m'ont beaucoup éclairé.
Je suis très surpris de constater que le NPD croit volontiers la promesse qui est faite par le gouvernement libéral. Je suis surpris de voir que les Libéraux comptent vraiment voter en faveur de cette motion. Je suis aussi surpris que quiconque parmi nos témoins puisse nous dire : Oui, nous sommes en faveur, parce que ce qu'on nous propose n'a aucune logique.
Je vous invite donc à commenter ceci ; ce projet de loi prévoit que l'argent en question, c'est-à-dire la somme de 1,5 milliard de dollars pour la formation, de 1,6 milliards de dollars pour l'habitation—en tout, quelque 4,5 milliards de dollars—ne seront disponibles que si le gouvernement enregistre un excédent d'au moins 2 milliards de dollars à la fin de l'exercice financier, et même là, les crédits ne pourront pas dépasser ce montant. Mais cette dépense ne nous avancera à rien. Je suis embarrassé de voir que le Conseil du Trésor permette que l'on fasse une telle chose parce que selon les règles de la comptabilité d'exercice qu'on vient d'adopter, les fonds doivent être déboursés dans le courant de l'exercice financier, alors qu'on nous promet maintenant que nous aurons accès à cet argent. Qui va y croire au fond?
Mon collègue faisait l'analogie avec une voiture dont on ne connaît ni la destination ni le conducteur. Quant à moi, je pense à l'essence. Accepteriez-vous de quitter la maison avec un demi-réservoir d'essence si vous n'aviez pas d'argent pour en acheter encore? Vous devez être sûr de pouvoir payer l'essence dont vous avez besoin. Si vous signez un contrat pour une maison sans savoir si vous aurez suffisamment d'argent à la fin de l'année pour respecter vos obligations financières, vous n'allez pas décider de le signer cette année. Vous allez plutôt attendre l'année prochaine. Et l'année prochaine, vous serez de nouveau confronté au même dilemme.
Qu'en pensez-vous? Monsieur St-Jean, je vous invite à répondre en premier, et ce sera ensuite le tour des autres témoins. Comment contourner le dilemme dans lequel nous enferme ce projet de loi, c'est-à-dire que ce que prévoit le projet de loi est impossible, logiquement parlant?
· (1350)
Le président: Je vais demander à M. St-Jean de répondre, et si d'autres souhaitent intervenir, ils n'auront qu'à lever la main, puisqu'il ne nous reste plus qu'environ deux minutes.
M. Charles-Antoine St-Jean: Merci beaucoup, monsieur le président.
Pour répondre à votre question sur la comptabilité d'exercice, je vous fais remarquer que cette procédure respecte les règles de la comptabilité d'exercice. Il s'agirait essentiellement de déduire les dépenses de l'excédent enregistré à la fin de l'exercice. Il ne serait pas nécessaire d'effectuer les paiements dans le courant de cet exercice. Disons que les versements seraient effectués en fonction des liquidités que requerrait l'organisme en question pour mener ses activités. Par conséquent, au lieu de faire un chèque de 2 milliards de dollars à l'organisme en question, si les besoins devaient s'étaler sur deux, trois ou quatre ans, les paiements seraient effectués sur deux ou trois ans. Par contre, la dépense aurait été déduite de l'excédent enregistré au cours de cet exercice-là. Disons que ce serait une dépense législative à prélever sur le Trésor dans le courant de cet exercice-là, de sorte que nous soyons sûrs que les finances soient gérées de façon prudente. Il ne s'agirait pas de faire un chèque de 2 milliards de dollars à la fin de l'exercice. Les paiements seraient effectués en fonction des besoins, conformément aux principes de la comptabilité d'exercice, ce qui serait tout à fait prudent de ce point de vue-là.
M. Ken Epp: En d'autres termes, personne ne va faire de planification dans le courant de l'année, étant donné qu'on ne sait pas si l'argent sera là ou non. On ne peut donc jamais faire de planification. J'ai regardé les chiffres pour les universités, et il est prévu que le nombre d'étudiants inscrits à l'université ait augmenté de 19 p. 100 en trois ans. Arrivés à la douzième année, nous aurons doublé notre population étudiante. Nous ne pourrons certainement pas répondre aux besoins à moins de commencer dès maintenant à prévoir l'infrastructure nécessaire—c'est-à-dire à recruter des professeurs, à s'assurer qu'ils sont bien formés et disponibles, etc. Il faut faire de la planification. En même temps, nous ne saurons pas d'année en année si cet argent sera réellement disponible, puisqu'il ne sera accordé que si l'excédent dépasse 2 milliards de dollars—en fait, il devra dépasser 6,5 milliards de dollars, car pour obtenir les 4,5 milliards de dollars, il faudra nécessairement que l'excédent se monte à 6,5 milliards de dollars.
Y en a-t-il d'autres qui voudraient répondre?
Le président: Je pense que M. Jock voudrait intervenir.
M. Richard Jock: J'ai deux commentaires à faire.
Premièrement, nous estimons que des milliers d'étudiants actuellement inscrits à des cours de formation d'un an ou de deux ans pourraient bénéficier immédiatement de cette mesure. Si nous avons accès aux ressources—et nous savons maintenant que c'est bien possible—à la fin de l'année, nous pourrons commencer à faire des projets. Donc, nous aurons à mon avis un peu plus de préavis qu'en temps normal en ce qui concerne l'accès aux ressources.
Deuxièmement, cette mesure pourrait nous accorder une certaine flexibilité. Comme je vous l'ai déjà dit, certaines possibilités se présentent actuellement en ce qui concerne l'habitation pour les Autochtones auxquelles il serait possible de donner suite si nous avons la marge de manoeuvre que prévoit ce projet de loi. Quand on a désespérément besoin de quelque chose, on n'est pas tellement motivé à critiquer le cadeau qu'on reçoit.
Le président: Merci.
J'invite Mme Russell et Mme Morris à faire de brèves interventions.
Madame Russell, allez-y.
Mme Ellen Russell: Si le problème tourne autour du risque que l'excédent ne soit pas suffisant, eh bien, je peux vous affirmer que je suis tout à fait convaincue que l'excédent sera suffisant et que le financement de ces programmes ne sera pas compromis.
Deuxièmement, je voudrais mentionner que, pour un gouvernement qui enregistre de gros excédents chaque année, le problème qui se pose est surtout de nature structurelle, en ce sens que nous nous demandons constamment à combien se montera l'excédent. Tant que nous aurons un problème de prévision au gouvernement, nous serons dans l'impossibilité de prévoir d'autres mécanismes qui nous permettraient peut-être de faire une meilleure planification.
Le président: C'est à vous madame Morris, mais soyez brève.
Mme Claire Morris: Merci, monsieur le président.
Je voudrais simplement vous dire que je comprends que, pour vous, il s'agit d'une mesure à court terme, mais pour nous c'est important parce que c'est la preuve qu'on reconnaît les besoins qui existent. Nous sommes d'éternels optimistes. Nous allons continuer de faire valoir tous nos arguments concernant l'importance de l'économie du savoir et des études supérieures. Et ces mesures permettront peut-être de garantir que les étudiants les plus nécessiteux pourront faire des études. Il y a un moyen de donner un sens à tout cela.
· (1355)
M. Ken Epp: Me permettriez-vous de conclure en une phrase?
Voilà ce que je voudrais vous dire en guise de conclusion. Il ne fait aucune doute que toutes ces initiatives sont importantes. Mais elles devraient être inscrites dans le budget que le ministre des Finances nous présente, et ce budget devrait nous permettre de savoir que le gouvernement affecte tant d'argent à tel programme, de sorte que le travail puisse se faire. C'est ainsi que le système devrait fonctionner—au lieu de se demander à la fin de l'année si nous aurons de l'argent ou non, et si nous en avons, nous allons peut-être prendre certaines initiatives. Cela laisse planer une telle incertitude qu'on ne peut rien faire pour régler le problème.
Merci.
Le président: Merci.
Monsieur Côté, suivi de M. Hubbard.
[Français]
M. Guy Côté: Merci, monsieur le président.
Merci pour vos présentations. Le secrétaire parlementaire du ministre des Finances sait comme j'adore entendre ses discours et ses déclarations. Il arrive qu'il me surprenne à un point tel que je parlerais même d'émerveillement. Pendant des années, ce gouvernement nous a dit n'avoir d'autre choix, à la fin de l'année financière, que d'allouer automatiquement les surplus au remboursement de la dette.
Le secrétaire parlementaire nous demandait plus tôt si nous préférerions l'époque où le gouvernement faisait ce qu'il voulait des surplus. Madame Russell, vous avez parlé plus tôt de l'élimination de l'impôt sur le capital. Vendredi dernier, au sein même de la Chambre, le secrétaire parlementaire nous a dit que de toute façon, cet impôt serait éventuellement rétabli dans le cadre d'une autre loi. Ces gens ont bien du culot pour nous dire de telles choses. Il n'y a aucun doute que le gouvernement fédéral va disposer des surplus nécessaires pour financer à la fois cette baisse d'impôt relative aux sociétés et les initiatives prévues dans le cadre du projet de loi C-48.
Le manque de précision est un problème fondamental de ce projet de loi. Il n'y a pas si longtemps, le premier ministre Martin avouait à la télévision ne pas avoir été suffisamment vigilant. Il nous faut donc l'être à sa place. Le projet de loi C-48 en est la parfaite illustration: il n'y a rien de précis là-dedans. Mme Morris a donné un bon exemple plus tôt. L'éducation est un enjeu important, mais est-ce que l'argent va être consacré au maintien ou à la baisse des frais de scolarité? On ne le sait pas. Est-ce qu'il est question du maintien ou de l'augmentation des prêts ou des bourses? On ne le sait pas. Lorsqu'on parle de soutien à des programmes de formation, est-ce qu'il s'agit de nouvelles chaires de recherche ou d'investissements dans les infrastructures? On ne le sait pas non plus. Où, quand, comment? On n'a pas de réponse à cela. Voilà où est le problème.
Je vais corriger ce que disait plus tôt le secrétaire parlementaire, à savoir que le projet de loi précise des niveaux plancher et des niveaux plafond. Je ne sais pas à quel endroit il a vu de telles choses. Il n'y a aucun plancher.
Si j'ai bien compris, M. St-Jean a bien exprimé l'idée. On a besoin du surplus de 2 milliards de dollars. Cependant, le gouvernement peut, s'il le désire, si ses priorités n'ont pas changé et si, l'année prochaine, dans le cadre d'un nouveau budget, il n'élimine pas ces 2 milliards de dollars, allouer des fonds jusqu'à concurrence d'un montant donné. Il n'est toutefois pas obligé de le faire.
Je veux m'assurer d'avoir bien compris, monsieur St-Jean
M. Charles-Antoine St-Jean: Merci beaucoup, monsieur le député.
En effet, au paragraphe 1(1), il est indiqué clairement que « le ministre des Finances peut faire des versements, à prélever sur le Trésor, jusqu’à concurrence de la différence ». On dit qu'il peut le faire et non qu'il doit le faire.
M. Guy Côté: Cela s'annonce très bien, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Côté.
Monsieur Hubbard.
[Traduction]
M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci à tous nos témoins pour leur présence.
Je pense qu'ils se rendent tous compte, et nous aussi, que la Chambre des communes est composée des représentants de plus d'un parti. Si nous voulons faire adopter certains projets de loi à la Chambre, il faut que les différents groupes s'entendent jusqu'à un certain point.
Bien entendu, je suis surpris d'entendre les propos de la Chambre de commerce, parce que ce qui est proposé représente un gros investissement dans l'économie. C'est un investissement qui va se faire sur deux ans. Ce n'est pas une initiative de longue durée nécessairement, mais elle va certainement contribuer à accélérer le développement économique et à améliorer l'avenir du pays à long terme, étant donné que les gens auront de meilleurs logements, économiseront davantage l'énergie, et auront accès au transport en commun et à tous les autres services qui aident les étudiants à profiter davantage de ce qu'offrent les universités, de sorte que nous ayons en fin de compte une main-d'oeuvre plus qualifiée à l'avenir. Cette attitude est donc un peu surprenante.
Madame Morris, dans votre exposé, vous avez parlé de quelque 800 000 étudiants à l'heure actuelle qui sont inscrits à plein temps. Par rapport à ce que vous avez dit au sujet des universités américaines, j'ai toujours eu l'impression que nos universités canadiennes sont bien supérieures à la plupart des universités et collèges américains. Vous avez dit que cela coûte 5 000 $ de plus. Mais auriez-vous des chiffres sur ce que l'étudiant moyen aurait à payer pour fréquenter une université américaine, comparativement aux frais de scolarité ici au Canada?
Deuxièmement, une de vos réponses m'a un peu surpris, notamment quand vous avez parlé de la nécessité d'accroître l'infrastructure. Mais grâce aux nouvelles technologies, nous n'avons pas besoin d'autant de bâtiments que par le passé.
Nous constatons que les étudiants qui fréquentent l'université en milieu rural paient deux fois ce que paient les étudiants vivant à Ottawa, à Toronto, ou même à Fredericton, au Nouveau-Brunswick. Si l'on devait faire une comparaison, selon vous, combien paie chaque année l'étudiant universitaire américain moyen, comparativement à ce que l'on paie ici au Canada?
De plus, s'agissant des investissements faits par le gouvernement, j'ai toujours eu l'impression que l'étudiant moyen paie sans doute moins de 30 p. 100 du coût réel de son année à l'université, alors que les gouvernements, à la fois fédéral et provinciaux, doivent sans doute payer 70 p. 100 des frais globaux. Vous qui avez évalué les frais de scolarité et les autres frais associés aux études universitaires, ne pensez-vous pas que ces chiffres soient exacts?
¸ (1400)
Mme Claire Morris: Merci.
Monsieur le président, s'agissant de la différence entre des universités américaines et les universités canadiennes comparables, comme vous le savez fort bien, toutes les universités ont essentiellement deux sources de revenu, à savoir les subventions gouvernementales—que ce soit pour les frais de fonctionnement ou pour la recherche—et les revenus découlant des frais de scolarité. En fait, lorsqu'on compare des universités canadiennes et américaines comparables, on observe un écart dans les deux cas.
Ce qui est intéressant, c'est que nous étions à peu près à égalité en 1980. En fait, l'appui accordé par le Canada à ses universités était supérieur de 2 000 $ à ce qui était fourni aux universités américaines. Je précise qu'il s'agit de dollars canadiens pour toutes ces comparaisons.
Au cours des 25 ans qui se sont écoulés depuis, l'écart s'est creusé en ce qui concerne l'appui gouvernemental. Encore une fois, nous parlons de recherche et de frais de fonctionnement. Récemment le gouvernement fédéral a investi des sommes considérables dans la recherche qui est menée dans nos universités canadiennes. L'écart se monte à 5 000 $ CAN par étudiant.
Quant aux frais de scolarité…
M. Charles Hubbard: Madame Morris, je parle des frais pour l'étudiant lui-même. Un étudiant universitaire au Canada paie entre 10 000 $ et 15 000 $ par an pour faire des études universitaires. Aux États-Unis d'Amérique, combien paient les parents et combien paient les étudiants chaque année pour aller à l'université, et quelle est la différence entre les deux pays sur ce plan-là?
Mme Claire Morris: Je vais demander à Bob Best, notre vice-président, de vous éclairer à ce sujet. Il est très difficile d'établir des comparaisons.
M. Robert Best (vice-président, Direction des affaires nationales, Association des universités et collèges du Canada): Les chiffres que j'ai ne permettent pas d'établir de telles comparaisons. Le chiffre que je peux vous donner concerne le montant des frais de scolarité disponibles par étudiant dans les universités américaines et canadiennes pour un programme de quatre ans. Des universités publiques comparables aux États-Unis qui offrent un programme de quatre ans—c'est-à-dire que les écoles privées sont exclues—touchent environ 3 000 $ de plus par an en frais de scolarité que les universités canadiennes. Cela ne veut pas dire que les frais de scolarité moyens sont plus élevés de 3 000 $. C'est plutôt que les revenus découlant des frais de scolarité sont supérieurs de 3 000 $. C'est en partie parce que les frais payés par les étudiants venant d'un autre État américain sont plus élevés que pour ceux qui habitent l'État en question. À part au Québec, les frais ne sont pas majorés pour les étudiants qui viennent d'une autre province.
Il y a donc une différence au niveau des frais de scolarité, mais il y a surtout une différence importante au niveau du financement gouvernemental. Ici au Canada, les gouvernements supportent en moyenne 70 p. 100 du coût des études. Cela correspond aux budgets de fonctionnement des établissements. En moyenne, ce chiffre est à présent inférieur à 70 p. 100. Il est même inférieur à 65 p. 100 un peu partout au Canada, et la proportion baisse de façon importante depuis plusieurs années. Il y a aussi de grandes variations d'une province à l'autre—dans certaine province, c'est légèrement supérieur à 50 p. 100 en moyenne, alors que dans d'autres, c'est plus élevé.
¸ (1405)
M. Charles Hubbard: Le fait est que nous investissons beaucoup d'argent dans nos universités, et je tenais à ce que ce soit dit publiquement, pour fin du compte rendu.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Hubbard.
Je voudrais remercier tous nos témoins. S'il y en a parmi vous qui étiez là jeudi dernier, je présente nos excuses pour le dérangement que cela a pu vous causer. Encore une fois, merci de votre présence.
Si les membres sont prêts, nous allons passer à l'examen article par article du projet de loi. Nous nous revoyons à 15 h. 30.
La séance est levée.