FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 5 octobre 2005
¹ | 1540 |
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)) |
Mme Caroline Di Giovanni (directrice, Campagne contre la pauvreté des enfants) |
M. Simon Rosenblum (directeur, Campagne contre la pauvreté des enfants) |
¹ | 1545 |
M. Gerald Vandezande (directeur, Campagne contre la pauvreté des enfants) |
Le président |
M. Gerry Barr (président et directeur général, Conseil canadien pour la coopération internationale) |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
Le président |
Mme Monica Lysack (directrice générale, Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance) |
Mme Lynell Anderson (directrice de project, Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance) |
º | 1600 |
º | 1605 |
Le président |
Mme Rosemary Laurin (membre, Conseil d'administration, Family Services à la famille Ottawa) |
M. Peter Crosby (membre , Conseil d'administration, Family Services à la famille Ottawa) |
Mme Rosemary Laurin |
M. Peter Crosby |
º | 1610 |
Mme Rosemary Laurin |
M. Peter Crosby |
Mme Rosemary Laurin |
Le président |
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
Le président |
M. Alfred Gay (analyste de la politique, Association nationale des centres d'amitié, Alliance nationale pour les enfants) |
Mme Janis Douglas (directrice, Développement des capacités et affaires communautaires, Clubs Garcons et Filles du Canada, Alliance nationale pour les enfants) |
º | 1615 |
M. Alfred Gay |
º | 1620 |
Le président |
M. Dave Sitaram (président, Canadian Co-operative Association) |
Mme Carol Hunter (directrice exécutive, Canadian Co-operative Association) |
º | 1625 |
Le président |
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC) |
º | 1630 |
Le président |
Mme Rona Ambrose |
Mme Monica Lysack |
Mme Rona Ambrose |
Le président |
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD) |
º | 1635 |
M. Simon Rosenblum |
Le président |
M. Gerry Barr |
º | 1640 |
Le président |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Mme Lynell Anderson |
Mme Christiane Gagnon |
Mme Monica Lysack |
º | 1645 |
Le président |
L'hon. Maria Minna |
º | 1650 |
Mme Monica Lysack |
Le président |
Mme Bev Oda (Durham, PCC) |
Mme Lynell Anderson |
º | 1655 |
Mme Monica Lysack |
Le président |
M. Robert Bouchard (Chicoutimi—Le Fjord, BQ) |
M. Simon Rosenblum |
» | 1700 |
Le président |
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.) |
Mme Carol Hunter |
M. Don Bell |
Mme Carol Hunter |
M. Gerry Barr |
M. Don Bell |
M. Gerry Barr |
M. Don Bell |
» | 1705 |
Le président |
CANADA
Comité permanent des finances |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 5 octobre 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1540)
[Traduction]
Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): La séance est ouverte.
Bonjour, mesdames et messieurs. Nous allons commencer immédiatement, car nous avons plusieurs groupes et que nous devrons voter d'ici la fin de l'après-midi. Essayons de ne pas prendre de retard.
Normalement, nous commençons par une déclaration préliminaire de sept ou huit minutes. Je suis plutôt indulgent, mais j'aimerais que vous vous en teniez à cela. Je veux que les membres puissent poser des questions.
Nous sommes réunis conformément à l'article 83.1 du Règlement, relatif aux consultations prébudgétaires 2005.
Nous accueillons d'abord l'organisation Campagne contre la pauvreté des enfants, représentée par Mme Di Giovanni.
Mme Caroline Di Giovanni (directrice, Campagne contre la pauvreté des enfants): Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je vous remercie de nous offrir l'occasion de venir à nouveau présenter nos idées au comité.
Nous sommes trois à représenter la Campagne contre la pauvreté des enfants. Je m'appelle Caroline Di Giovanni et j'étais autrefois directrice de la Fondation Espoir pour les enfants. Gerald Vandezande, qui dirigeait autrefois Citizens for Public Justice, m'accompagne et prendra peut-être la parole plus tard. Simon Rosenblum, analyste des politiques et chercheur pour la Campagne 2000 est aussi avec nous. Nous sommes tous membres du comité directeur de la Campagne contre la pauvreté des enfants, un groupe de pression pluriconfessionnel formé de bénévoles qui font connaître le problème de la pauvreté des enfants. Nous travaillons ensemble depuis 1998. Nous publions de la publicité dans les journaux. Nous présentons des exposés à des ministres, à des comités et à des députés dans les circonscriptions, nous parlons en public, souvent devant des groupes confessionnels, nous publions des lettres dans les courriers des lecteurs et nous suivons l'évolution du dossier et les progrès de la recherche. Nous sommes ici et nous y resterons jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'enfants pauvres au Canada. C'est notre mission et nous ycroyons passionnément. Nous voulons que vous nous écoutiez.
Au Canada, la pauvreté affecte les enfants et les familles en milieu urbain, dans les collectivités rurales et dans les réserves autochtones. Même dans un pays prospère comme le nôtre, il y a des enfants qui se couchent le ventre vide, qui vivent dans des logements insalubres et qui doivent se passer de bien des choses considérées comme normales.
Dans le dernier rapport de l'UNICEF intitulé La Pauvreté des enfants dans les pays riches, le Canada venait au 19e rang d'un groupe de 24 pays. Notre taux de 14,9 p. 100 est resté pratiquement inchangé depuis la fameuse résolution multipartite de 1989 visant à mettre un terme à la pauvreté des enfants au Canada d'ici l'an 2000. Le pourcentage est élevé, et la pauvreté est grande. Près de la moitié des familles pauvres ont des revenus de 10 000 $ sous le seuil de la pauvreté. Nous sommes venus vous dire qu'il était possible de respecter la promesse faite par tous les partis. Nous voulons fixer des cibles et des repères pour réduire sensiblement la pauvreté des enfants et des familles. D'autres pays l'ont fait, et nous savons que nous pouvons y parvenir nous aussi.
Comme l'a dit notre nouvelle gouverneure générale dans son très beau discours inaugural, tous les enfants naissent égaux mais ils n'ont pas tous les mêmes perspectives d'avenir. Nous voulons un Canada offrant à tous les enfants les mêmes perspectives: nous voulons qu'ils partent dans la vie du bon pied, grâce à un bon régime d'apprentissage et de services de garde pour la petite enfance, un régime facile d'accès; nous voulons que toutes les familles vivent dans des logements sûrs, abordables et stables; nous voulons que nos gouvernements collaborent avec les employeurs de tout le pays pour garantir des salaires équitables et la sécurité du revenu, afin que les parents puissent échapper à la pauvreté. La pauvreté s'accentue de génération en génération. Ce n'est pas une situation que les Canadiens peuvent accepter.
Simon Rosenblum va poursuivre notre exposé.
M. Simon Rosenblum (directeur, Campagne contre la pauvreté des enfants): Il y a onze ans, le ministre des Finances de l'époque a déclaré à votre comité qu'il fallait demander aux témoins de faire des choix difficiles. Nous sommes d'accord avec lui et nous voulons souligner que le débat opposant équité et efficacité économiques est un faux débat, car nombre de démocraties à économie de marché ont réussi à atteindre ces deux objectifs. Ma collègue a mentionné le rapport de l'UNICEF sur la pauvreté des enfants dans les pays riches et indiqué que les pays scandinaves, en particulier, avaient pratiquement éliminé la pauvreté chez les enfants. L'écart de pratiquement zéro à plus de 20 p. 100 de pauvreté chez les enfants dans les pays occidentaux est scandaleux. Comme les États-Unis font piètre figure à cet égard, il est évident qu'il ne suffira pas d'enrichir le Canada pour réduire la pauvreté.
Un important investissement social s'impose. La semaine dernière encore, dans une étude internationale sur les déterminants de la productivité et de la croissance, le Forum économique mondial concluait que l'expérience des pays nordiques ébranlait la croyance traditionnelle que les impôts lourds et les vastes filets de sécurité sociale minent la compétitivité.
Les bases d'un programme efficace pour les enfants n'ont rien de mystérieux. Le crédit d'impôt pour enfants doit être bonifié, mais il faudra aussi établir et financer rapidement les premiers éléments d'un programme national d'apprentissage et de services de garde pour la petite enfance. Un sérieux effort sur le front du logement abordable est également nécessaire, tout comme une réforme du marché du travail, pour qu'un adulte qui travaille à temps plein puisse élever ses enfants sans craindre la pauvreté.
Nous ne prétendons pas que l'on puisse réduire sensiblement la pauvreté des enfants sans rien débourser. Il en coûtera entre 15 et 20 milliards de dollars annuellement au gouvernement fédéral, à maturité, selon le concept de programme et les ententes fédérales-provinciales. Certains éléments, dont le programme d'apprentissage et de garde pour la petite enfance, produiront des retombées économiques considérables et pourront donc se financer en partie. Mais ne nous berçons pas d'illusions: il faudra de nouvelles recettes fiscales pour financer un programme efficace destiné aux enfants. Signalons qu'en 2002, parmi 30 pays de l'OCDE, le Canada venait au 12e rang pour les recettes fiscales exprimées en pourcentage du PIB.
À cet égard, un récent document d'orientation rédigé par des professeurs d'universités et d'écoles de commerce canadiennes pour l'Institute for Competitiveness and Prosperity indique qu'il faudra recourir à une « fiscalité intelligente » pour recueillir par l'impôt suffisamment d'argent pour nous offrir le Canada que nous voulons. Un pays où l'impôt est relativement élevé, la Suède, est cité comme exemple positif de fiscalité intelligente.
Nous espérons que le Comité établira dans ses recommandations des objectifs annuels fermes et des repères pour réduire la pauvreté des enfants au cours de la prochaine décennie.
J'ai commencé en citant un ancien ministre des Finances. Avant de laisser la parole à mon collègue, j'aimerais citer à nouveau ce même ministre qui, en 1998, affirmait qu'il fallait essentiellement faire de l'élimination de la pauvreté des enfants un vaste objectif national, un peu comme cela a été fait pour l'élimination du déficit. Nous sommes tout à fait d'accord avec ce ministre, qui est aujourd'hui premier ministre du Canada. Que la prochaine décennie soit enfin la décennie des enfants, et que le Canada prenne fièrement place parmi les nations où la pauvreté des enfants est en voie de disparition.
¹ (1545)
M. Gerald Vandezande (directeur, Campagne contre la pauvreté des enfants): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je suis heureux d'être ici. C'est sans doute la dernière fois que je vous vois, car ma santé est fragile, en particulier aujourd'hui.
J'ai simplement deux ou trois commentaires à faire. Je suis venu témoigner devant votre comité à diverses reprises au fil des ans et je tiens à vous remercier d'avoir écouté les Canadiens aussi souvent que vous l'avez fait et, malgré tous les défis que comportaient vos invitations, de vous être penchés sur certains des problèmes fondamentaux auxquels notre pays est confronté. Je vous remercie, au nom d'une génération qui n'a pas ménagé sa peine pour promouvoir la justice sociale et qui poursuivra ses efforts afin de bâtir un Canada fort.
Notre nouvelle gouverneure générale a mentionné que les deux solitudes qui ont caractérisé le Canada devaient disparaître.Je suis parfaitement d'accord avec elle. La solitude des familles et des enfants pauvres et vulnérables doit disparaître dans notre pays. Vous, les députés, êtes particulièrement en mesure de traduire dans les faits les mots de la gouverneure générale et les paroles éloquentes que le premier ministre a prononcées lors d'un important discours le 20 septembre dernier. Il est nécessaire de protéger les enfants et les familles vulnérables, et vous avez la possibilité de faire à ce sujet une recommandation énergique.
J'aimerais souligner ce que nous avons fait au cours des ans. La pauvreté est une question apolitique. C'est une question de justice fondamentale qui intéresse l'ensemble de la société. Je vous implore une dernière fois de faire tout ce qui est en votre pouvoir dans l'intérêt de la justice, du pays, des enfants, des familles vulnérables et, en particulier, des femmes; je vous demande de ne rien ménager, compte tenu de la situation actuelle du Canada, pour établir des priorités de dépenses garantissant que les investissements sociaux profiteront à ceux qui en ont le plus besoin; vous, les membres du comité, devez lancer un défi au Parlement, par amour de la justice. Ce défi pourrait être endossé par tous les partis politiques et par tous les Canadiens, afin que des changements se produisent, que les deux solitudes deviennent chose du passé et que plus personne ne soit oublié dans notre pays.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de participer à vos délibérations. Je le ferai peut-être encore par courrier, si j'ai un peu d'aide, mais c'est sans doute la dernière fois que je viens ici.
Je vous remercie et je vous souhaite bonne chance.
Des voix: Bravo!
Le président: Merci, monsieur Vandezande. J'espère que les membres du comité prendront note de vos paroles. J'aimerais que les membres de notre comité soient parfois un peu moins partisans; malheureusement, nous sommes élus sous une bannière précise, et la partisannerie est difficile à réprimer. Je pense que nos membres ont de bonnes intentions. Je pense que le comité a fait du bon travail par le passé. Nous avons publié un solide rapport, l'an dernier, et j'espère que nous ferons la même chose cette année.
Quant à vous, je vous souhaite bonne chance, et j'espère que nous vous reverrons l'an prochain.
Revenons à notre programme.
Nous accueillons maintenant le Conseil canadien pour la coopération internationale.
Monsieur Barr.
M. Gerry Barr (président et directeur général, Conseil canadien pour la coopération internationale): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis fier d'être du même côté de la barricade que M. Vandezande.
Je m'appelle Gerry Barr, je suis président et chef de la direction du Conseil canadien pour la coopération internationale, un organisme qui réunit environ 90 des principales organisations de la société civile oeuvrant dans le domaine de la coopération pour le développement international et l'aide humanitaire dans le monde.
[Français]
Le conseil est aussi l'une des principales organisations au Canada chargée d'animer la campagne « Abolissons la pauvreté », menée par une vaste coalition pour inciter le gouvernement à adopter des politiques qui visent à éliminer la pauvreté, notamment celles des enfants au Canada.
Le Sommet du G8 qui s'est déroulé en Écosse en juillet dernier a suscité, à l'échelle planétaire, un grand mouvement de solidarité avec les peuples vivant dans la pauvreté, ainsi qu'un appel des dirigeants du monde à l'action contre la pauvreté.
Or, le premier ministre Paul Martin a omis d'annoncer un calendrier en vue d'atteindre l'objectif de consacrer 0,07 p. 100 du revenu national brut à l'aide, objectif adopté par les membres des Nations Unies, y compris le Canada.
¹ (1550)
[Traduction]
Voilà une grande déception pour bien des Canadiens. Les citoyens s'étaient mobilisés et des centaines de milliers de messages ont été adressés au premier ministre, à M. Goodale et à des députés, pour inciter le gouvernement à s'engager. Des députés canadiens avaient répondu à l'appel, et le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international avait adopté à l'unanimité son 12e rapport, dans lequel il pressait le gouvernement de s'engager à respecter une cible de 0,7 p. 100 d'ici 2015 et, concrètement, à fixer une cible provisoire de 0,5 p. 100 d'ici 2010. Tous les partis à la Chambre des communes ont par la suite appuyé ce message et ils ont entériné le 12e rapport en juin, avant les vacances parlementaires.
Il y a de moins en moins d'excuses valables pour ne pas intervenir dans ce dossier. Le monde entier a les yeux tournés vers le Canada. Notre économie est plus viguoreuse que celle d'autres pays du G-8. Même si l'on ne s'entend pas tout à fait sur l'ampleur de l'excédent du Canada, personne ne doute qu'il y aura un excédent, qui viendra confirmer une tendance manifeste depuis une décennie et mettre clairement en lumière le fait que le gouvernement a une certaine latitude.
Le monde entier attend que le Canada agisse — et les coûts de l'inaction sont énormes. Plus de 50 000 personnes meurent chaque jour des suites de maladies et de carences liées à la pauvreté, alors qu'il existe des remèdes simples et abordables. C'est l'équivalent d'un tsunami silencieux qui sévit chaque semaine et qui menace la sécurité humaine sur toute la planète. Les objectifs de développement du millénaire, les repères antipauvreté envers lesquels le monde entier s'était engagé en 2000 lorsque les dirigeants mondiaux ont promis de ne ménager aucun effort pour y parvenir, ne seront pas atteints d'ici 2015 si les pays riches du monde ne remplissent pas leurs engagements en offrant les niveaux d'aide nécessaires.
Je vous demande donc si nous, Canadiens, acceptons de ne pas verser la contribution individuelle que nous avons collectivement promise? Nous étions là lorsque ces promesses ont été faites, nous avons pris un engagement. Où en sommes-nous, maintenant?
Il faut plus d'aide, bien sûr, mais cette aide doit aussi être de meilleure qualité pour porter fruit.
[Français]
C'est pourquoi le CCCI presse le gouvernement de se doter d'une loi qui renforcerait l'obligation de rendre compte au Parlement de l'APD canadien. Il demande que cette loi fasse en sorte que la réduction de la pauvreté et de l'aide humanitaire soit la finalité de l'APD.
Je sais bien que le comité n'a pas l'habitude de recevoir des témoignages touchant des mesures qui ne comportent pas de coûts. Je ne m'attarderai donc pas sur ce point, mais je veux seulement dire que la législation de l'aide favorisera le rendement optimal d'une contribution accrue. C'est ce qui justifie ma présence ici aujourd'hui, car je viens plaider en faveur de l'aide et apporter sur ce dossier des éclaircissements susceptibles de renforcer la confiance du public dans une stratégie de réinvestissement, deux points étroitement liés.
[Traduction]
J'ai commencé mon intervention en parlant de l'occasion qu'avait manqué le premier ministre à Gleneagles, en Écosse. Une autre occasion nous est passée sous le nez il y a quelques semaines à New York, alors que le monde entier était réuni aux Nations Unies pour vérifier si les États avaient bien tenu les promesses faites en 2000. Le discours du premier ministre ne contenait aucune allusion ni aux objectifs de développement du millénaire ni à un plan canadien pour atteindre la cible de 0,7 p. 100.
Le Canada aura bientôt une troisième occasion d'assumer ses responsabilités à cet égard, et votre comité a, bien sûr, un important rôle à jouer. Le budget 2006 du Canada devrait enrichir l'enveloppe de l'aide internationale 2006-2007 d'au moins 15 p. 100, y compris les 250 millions de dollars déjà promis comme base du calcul de l'APD à compter de 2007-2008. En outre, le Canada devrait exposer dans le budget 2006 son plan pour atteindre les 0,7 p. 100 d'ici 2015, sans compromettre l'équilibre budgétaire auquel il tient. Le document que j'ai fait circuler aujourd'hui, intitulé « Le Temps d'agir », propose plusieurs scénarios. Si elle était intégrée au budget de base, l'enveloppe bonifiée de l'aide internationale, telle que proposée dans le budget, fonderait à partir de l'an prochain une amélioration constante. Le scénario d'augmentation de 15 p. 100, assujetti à la marge de manoeuvre financière du gouvernement, est le plan que préconise le Conseil. Ce plan permettrait au Canada de porter son niveau d'aide à 0,7 p. 100 d'ici 2015.
Comme je l'ai dit précédemment, lorsqu'elle a entériné le 12e rapport, la Chambre a fixé un objectif provisoire de 0,5 p. 100 d'ici 2010. Cette stratégie coûtera environ 100 millions de dollars en 2006-2007, au-delà des augmentations régulières de huit pour cent déjà promises par le gouvernement, puis de 400 à 800 millions de dollars annuellement, de façon progressive, jusqu'en 2010-2011. Le comité a maintenant la possibilité de renforcer le message de la Chambre en proposant de modifier le cadre financier des dépenses au titre de l'APD de façon à refléter la décision ou la position de la Chambre. C'est ce que le comité devrait faire.
Le gouvernement a laissé passé d'excellentes occasions, mais le comité ne doit pas en faire autant. Il doit bien sûr s'efforcer de persuader le gouvernement que le budget représente l'occasion rêvée d'assumer sans ambiguïté ses responsabilités en matière de pauvreté dans le monde.
Merci beaucoup.
¹ (1555)
Le président: Merci.
Nous accueillons maintenant l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance du Canada et sa porte-parole, Mme Lysack.
Mme Monica Lysack (directrice générale, Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance): Merci.
Je m'appelle Monica Lysack et je suis directrice générale de l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance. L'ACPSGE est heureuse de témoigner devant le Comité permanent des finances aujourd'hui.
Notre organisation pancanadienne a été créée en 1982; nous croyons que des services de garde à l'enfance financés publiquement sont la pierre angulaire d'une politique familiale progressiste.
Je suis venue aujourd'hui en compagnie de notre directrice de projet, Lynell Anderson.
Mme Lynell Anderson (directrice de project, Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance): Merci, Monica.
Je veux tout d'abord féliciter le comité permanent, qui a reconnu dans ses recommandations de 2004 nombre des éléments clés nécessaires à l'établissement d'un système de garde d'enfants pancanadien à caractère communautaire. Dans vos recommandations, vous préconisiez notamment la création, et je cite, « d'un régime de services de garde national, accessible, abordable, de haute qualité et sans but lucratif, financé et réglementé par le secteur public ». Le Canada commence enfin à progresser dans cette direction. Les engagements financiers de notre pays à l'endroit des services et du soutien offerts aux familles et aux jeunes enfants ont augmenté ces dernières années, et certaines provinces et certains territoires ont entrepris de définir et d'instaurer des régimes communautaires complets pour l'apprentissage et la garde de la petite enfance.
Je ne vais pas énumérer ici les résultats d'études et les preuves sur lesquelles s'appuient nos demandes d'instauration d'un système pancanadien. Nous allons plutôt mettre l'accent sur la façon dont l'investissement public dans la garde des enfants peut améliorer la productivité au Canada.
Dans notre mémoire, comme vous le demandiez, nous avons inscrit nos arguments et nos recommandations dans le cadre d'un programme de productivité pour le Canada. Nous rappelons toutefois au comité que le Canada, comme les provinces et les territoires, est signataire de traités internationaux qui comprennent des engagements relatifs au soin des enfants et destinés à garantir le respect des droits des enfants et des femmes. Concrètement, les droits de la personne et la productivité sont liés, car ces deux éléments optimisent la qualité de vie. La productivité à long terme du Canada est inextricablement liée à des progrès coordonnés et intégrés dans tous les domaines du développement social, et les excédents budgétaires fédéraux anticipés offrent une occasion parfaite d'améliorer nos programmes sociaux, tel que promis il y a longtemps aux Canadiens.
Pour ce qui est des services de garde proprement dits, nous voulons aujourd'hui attirer l'attention du comité sur deux points principaux. Premièrement, les services de garde à l'enfance améliorent la productivité s'ils sont de qualité, abordables et accessibles à tous les enfants et à toutes les familles; deuxièmement, les services de garde nécessitent un investissement public dans un programme de dépenses spécifique. Nous voulons aussi souligner qu'il faut adopter une approche universelle en matière de services de garde. De plus en plus, les études confirment que des services de garde de qualité ont des retombées dans toutes les classes sociales et économiques. Ils profitent aux enfants, aux familles et à la société dans son ensemble. L'investissement public dans des services de garde de qualité doit donc viser l'inclusion, l'abordabilité et l'accès pour tous — autrement dit, l'universalité.
Quant à l'amélioration de la productivité et aux services de garde à l'enfance, l'investissement public destiné spécifiquement à l'instauration d'un programme de garde touchera au moins deux des trois secteurs de productivité que le comité a désignés comme prioritaires. En termes de capital humain, nous savons que le Canada a besoin d'une main-d'oeuvre qualifiée pour accroître sa productivité. Les études montrent que des services de garde de qualité, abordables et accessibles favorisent la stabilité de la main-d'oeuvre, l'acquisition des compétences et l'apprentissage continu, en particulier pour les femmes. Des services de garde de qualité stimulent aussi le développement d'une main-d'oeuvre qualifiée pour l'avenir.
Même aujourd'hui, la productivité du Canada repose sur la présence des mères de jeunes enfants sur le marché du travail — selon le Conseil canadien de développement social, les mères qui travaillent contribuent à hauteur de 53 milliards de dollars par année au PIB du Canada. L'importance de ces femmes ne fera qu'augmenter car on prévoit d'importantes pénuries de main-d'oeuvre, un fait que le comité permanent reconnaît lorsqu'il demande aux témoins de réfléchir aux mesures à prendre pour encourager les citoyens à travailler.
Les services de garde nécessitent un investissement public dans le cadre d'un programme de dépenses précis, car pour atteindre les buts que nous nous sommes fixés en matière de garde, il nous faut investir des fonds publics dans un programme de dépenses et en vertu d'une politique publique efficace — idéalement, conformément à des dispositions législatives sur les services nationaux de garde à l'enfance.
Entre-temps, les ententes actuelles sur la garde d'enfants conclues entre le fédéral et les provinces ou les territoires, même si elles ne sont pas parfaites, loin de là, jettent les bases sur lesquelles un système de services de garde pancanadien pourrait être érigé, à deux conditions: premièrement, il faut que l'investissement public fédéral dans un programme de dépenses soit augmenté et continu, comme nous l'avons indiqué dans notre mémoire; deuxièmement, les provinces et les territoires doivent dresser des plans et adopter des politiques réalistes pour élargir les services communautaires et en améliorer la qualité et l'affordabilité .
º (1600)
Il ne suffit pas que le gouvernement fédéral investisse dans les services de garde à l'enfance. La façon dont ces fonds publics seront utilisés est également cruciale. Les propositions voulant que les fonds soient versés directement aux parents, par exemple, peuvent sembler attrayantes à première vue, mais elles ne sont ni nouvelles ni efficaces. Depuis 30 ans, dans tout le Canada, les tickets modérateurs et les subventions sont les principales sources de financement des services de garde. Pourtant, ailleurs qu'au Québec, les services de qualité, abordables et accessibles font toujours défaut. La transparence exige que de l'argent frais soit investi de façon à calmer le plus possible ces préoccupations.
Les régimes de services de garde efficaces consacrent des sommes considérables à l'élaboration et à l'exploitation de programmes de garde communautaires sans but lucratif. Lorsqu'ils reçoivent un financement public direct, en particulier, les services communautaires sont tenus de définir des programmes qui répondent aux besoins des familles locales et qui respectent les normes de qualité et d'accessibilité. Cette approche établit des liens clairs entre l'investissement public et les résultats.
Les subventions individuelles devront peut-être être maintenues pour faciliter l'accès à certaines familles, et des frais d'utilisation raisonnables pourront être perçus. Toutefois, pour offrir des services de garde d'enfants de qualité dans les collectivités, que ce soit en établissement ou en milieu familial, les programmes devront recevoir un financement public direct, important et permanent, et rendre compte de son utilisation.
Merci beaucoup.
º (1605)
Le président: Merci.
Écoutons maintenant M. Crosby, qui représente l'organisme Family Services à la famille Ottawa.
Mme Rosemary Laurin (membre, Conseil d'administration, Family Services à la famille Ottawa): En fait, je parlerai en premier.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de nous permettre de participer à cette tribune aujourd'hui.
Je m'appelle Rosemary Laurin. Mon collègue, Peter Crosby, et moi-même sommes membres du conseil d'administration de Family Services à la famille Ottawa, et nous sommes venus en compagnie d'une collègue de l'agence, Christina Marchant, qui est directrice des programmes.
Family Services à la famille Ottawa est un organisme communautaire qui existe depuis 90 ans et qui répond aux besoins des membres de la collectivité. Les organismes de services familiaux du pays aident les familles en difficulté à faire face à leur situation, qu'il s'agisse du comportement des enfants, du stress lié à la pauvreté ou des problèmes relatifs à l'éducation des enfants pendant un divorce difficile.
Nous nous adressons à vous aujourd'hui pour donner un visage à la famille et pour définir certaines initiatives fédérales qui pourraient vraiment améliorer la vie des personnes que nous et nos organismes apparentés au pays voulons aider. Certaines familles ont besoin de plus d'aide que les autres. Les familles à faible revenu et les personnes à risque ont besoin d'un soutien systémique pour pouvoir envisager un avenir positif et sain pour elles-mêmes et pour leurs enfants.
Peter.
M. Peter Crosby (membre , Conseil d'administration, Family Services à la famille Ottawa): Merci, Rosemary.
Je tiens à remercier le comité de nous donner l'occasion de comparaître ici aujourd'hui. J'espère que vos délibérations seront fructueuses.
Je travaille au Service de police d'Ottawa à titre de surintendant chargé des services d'enquête criminelle et je suis membre bénévole du conseil d'administration de Services à la famille Ottawa. Je compte plus de 27 ans d'expérience dans le secteur policier et je peux vous dire que les familles canadiennes ont vraiment besoin d'appui.
Les familles, quelle que soit leur forme, subissent de nombreuses pressions. La violence chez les jeunes est en régression, mais un jeune sur quatre est encore victime d'intimidation à l'école. Les enfants et les parents qui utilisent les services de counselling de notre agence ont de grands besoins et des problèmes complexes, liés notamment à l'anxiété, aux divorces conflictuels, aux traumatismes de la guerre dans le pays d'origine, à la violence familiale et au stress de la pauvreté.
Les parents ont de plus en plus de difficulté à concilier travail et famille. En 2001 par exemple, 74 p. 100 des mères qui travaillaient ont déclaré avoir beaucoup trop à faire, contre 67 p. 100 en 1991. De plus en plus, il faut accepter des emplois à temps partiel ou des contrats. De nombreux parents, en particulier les mères chefs de famille, doivent exécuter deux ou trois contrats, souvent mal rémunérés et qui n'offrent par les congés de maladie et les congés pour obligations familiales généralement prévus dans les emplois à temps plein.
La famille évolue et elle s'ajuste à de nouveaux rôles et à de nouvelles responsabilités, mais on ne peut pas lui demander d'y faire face seule. La famille doit être fonctionnelle pour bien élever des enfants. Si elle arrive à peine à répondre à ses besoins fondamentaux et à ceux de ses enfants, il lui est très difficile d'être efficace.
Mme Rosemary Laurin: Quoiqu'en dise la recherche, de nombreux adultes n'ont toujours pas un revenu suffisant, même s'ils sont bien intégrés à la population active. Quatre-vingt-sept pour cent des enfants pauvres vivent dans des familles qui travaillent, souvent à temps plein. En 2004, la Banque d'alimentation d'Ottawa signalait que 40 p. 100 de ses clients étaient des enfants et que 39 p. 100 des personnes faisant appel à ses services déclaraient souffrir de la faim au moins une fois par semaine. Les familles prestataires de l'aide sociale voient disparaitre 126 $ dont elles auraient bien besoin, en vertu d'ententes fédérales-provinciales sur la prestation fiscale canadienne pour enfants.
Le budget fédéral de 2006 peut garantir que les familles du Canada ont suffisamment d'argent pour satisfaire à leurs besoins essentiels. Continuez de distribuer la prestation fiscale canadienne pour enfants et modifiez la loi de sorte que les provinces et territoires ne puissent plus récupérer une partie du supplément destiné aux familles qui vivent de l'aide sociale. De plus, vous pouvez demander dans le budget fédéral de 2006 que le salaire minimum soit porté à 10 $ de l'heure dans les provinces et territoires ainsi que dans les secteurs de compétence fédérale.
Il n'y a pas de solution facile, mais le problème doit être discuté. Il y a tout simplement trop de familles qui vivent sous le seuil de la pauvreté.
M. Peter Crosby: À Ottawa — et je suis certain que cela est vrais aussi dans de nombreuses collectivités du pays —, le segment des utilisateurs de refuges pour sans-abri et de banques d'alimentation en plus forte croissance est celui des familles; en 2002, il y avait chaque soir 66 familles, dont 44 enfants de moins de six ans, dans les refuges. Un ménage sur cinq consacre plus de 50 p. 100 de son revenu au loyer à Ottawa.
Le budget fédéral de 2006 peut aider les familles canadiennes à trouver des logements abordables. Continuez de travailler pour implanter rapidement le cadre de référence national en matière de logement et engagez-vous spécifiquement à construire de nouveaux logements abordables. Il est notamment recommandé de construire 25 000 nouvelles unités de logement abordables par année pour les cinq prochaines années.
º (1610)
Mme Rosemary Laurin: Les familles sont confrontées à une augmentation continue et dangereuse du stress. Le rétrécissement du filet de sécurité sociale, l'insalubrité, la précarité d'emploi et la pauvreté viennent tous miner la capacité des familles.
Dans ce contexte, il est décourageant d'apprendre que seulement 28 p. 100 des travailleurs en chômage touchent des prestations d'assurance-emploi, alors qu'il y en avait plus de 75 p. 100 au début des années 1990. Aujourd'hui, seulement trois travailleurs sur dix qui sont mis à pied ont droit à des prestations, en raison de règles qui défavorisent ceux qui ont moins d'heures de travail ou des heures irrégulières. Les réformes de l'AE dans les années 1990 sont peut-être allées trop loin en ce qui concerne le nombre d'heures à accumuler, en particulier dans les secteurs où les taux d'emploi sont faibles. Ces tendances ajoutent au stress déjà élevé des familles.
Le budget fédéral de 2006 peut rétablir l'admissibilité à l'AE en créant une exigence uniforme de 360 heures ouvrant droit aux prestations et porter à un an la période de prestations, pour protéger tous les soutiens économiques, y compris les parents à faible revenu.
M. Peter Crosby: Les familles qui vivent dans la pauvreté sont aussi plus susceptibles d'avoir de la difficulté à accéder aux soins de santé physique et mentale. Une étude récente révélait que 25 p. 100 des parents clients des banques d'alimentation déclaraient avoir de la difficulté à accéder aux services, en particulier les services pour lesquels il faut payer des droits.
Les problèmes de santé mentale des enfants ont été qualifiés de nouvelle morbidité. D'après les rapports soumis par les parents, plus de 10 p. 100 des enfants entre quatre et 11 ans manifestent des symptômes d'hyperactivité ou de trouble émotif. Hélas, la tendance à imposer des droits d'utilisation et à radier certains services de santé autrefois universels signifie que les parents et leurs enfants sont souvent incapables d'obtenir les services de santé physique et mentale et les services sociaux dont ils ont besoin.
Les budgets antérieurs ont utilisé les crédits d'impôt pour atténuer ce problème. Cette mesure est utile à certains Canadiens, mais elle ne bénéficie vraiment pas aux plus démunis; 32 p. 100 des déclarants ne touchent pas le revenu minimum imposable et, en conséquence, ne profitent aucunement des changements apportés aux crédits d'impôt. Le budget fédéral de 2006 modifier l'accent stratégique pour remplacer la réforme fiscale par une combinaison de réforme fiscale et de dépenses sociales et fournir ainsi un soutien adéquat du revenu des familles les plus pauvres du pays.
Mme Rosemary Laurin: La grande question, je crois, c'est de savoir d'où vient l'argent. Le Canada est le seul pays du G-8 qui a un excédent, et ce depuis plusieurs années. Cette année, s'il investit ne serait-ce qu'une partie des fonds destinés aux réductions d'impôts et de la dette, le Canada pourrait redevenir un chef de file en matière de services à la personne et un véritable pilier pour les familles vulnérables et à risque qui vivent parmi nous.
Merci beaucoup.
Le président: Merci.
J'ai une question à vous poser, monsieur Crosby. Les familles de sans-abri dont vous parlez, peuvent-elles toucher l'allocation familiale? Il faut une adresse pour cela, n'est-ce pas?
L'hon. Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Vous voulez dire la prestation pour enfants.
Le président: La prestation pour enfants. Faut-il une adresse?
Une voix: Oui
Le président: Poursuivons.
Nous allons maintenant entendre l'Alliance nationale pour les enfants. Monsieur Gay.
M. Alfred Gay (analyste de la politique, Association nationale des centres d'amitié, Alliance nationale pour les enfants): Bonjour. Merci, monsieur le président, de nous accueillir aujourd'hui. Je remercie aussi les membres du comité.
L'Alliance nationale pour les enfants est une coalition de 67 organisations nationales qui oeuvrent collectivement pour accroître le bien-être des enfants, des jeunes et des familles. C'est un modèle de collaboration entre disciplines et secteurs. Il exploite les points forts de centaines de milliers de personnes qui travaillent en première ligne dans nos collectivités et il conjugue leur capacité de recherche et leur savoir-faire. L'Alliance nationale pour les enfants s'efforce d'établir un consensus sur la formulation de sa politique, par la mobilisation et en liant la pratique et la recherche à la politique.
Nos remarques porteront essentiellement sur trois grandes questions: l'infrastructure sociale, les enfants et les jeunes, les Autochtones.
Je vais donc passer la main à mon amie et collègue Janis Douglas.
Mme Janis Douglas (directrice, Développement des capacités et affaires communautaires, Clubs Garcons et Filles du Canada, Alliance nationale pour les enfants): Merci.
Nous croyons que le Canada peut améliorer la vie des enfants, des jeunes et des familles. Les problèmes se perpétuent en raison de l'inaction, mais il existe des solutions.
Il est généralement reconnu que les collectivités ont besoin d'infrastructures matérielles pour assurer le développement économique. Dans une économie basée sur le savoir, toutefois, une infrastructure sociale inclusive est également essentielle au développement humain. Nous croyons que les collectivités et les gouvernements doivent tous intervenir à ce chapitre.
Nous croyons que le financement de l'infrastructure sociale ne peut pas se limiter aux briques et au mortier, il doit aussi appuyer les programmes inclusifs, les services et les réseaux communautaires, renforcer et soutenir la capacité des organisations efficaces qui aident déjà les enfants et les jeunes.
Nous présentons quelques recommandations spécifiques concernant l'investissement dans l'infrastructure sociale. Les voici: création d'un programme d'infrastructures sociales et communautaires financé par le fédéral en vertu d'un programme d'aide aux villes et aux collectivités; dans le cadre d'une initiative nationale de logement et de lutte à l'itinérance, allocation des 1,6 milliard de dollars promis pour le logement abordable dans le budget 2005; implantation d'un code de pratiques de financement saines pour l'Initiative du secteur bénévole, afin de mieux appuyer les coûts organisationnels de promotion du rôle du secteur bénévole et sans but lucratif dans la création de l'infrastructure sociale du Canada.
Par ailleurs, selon les économistes, les programmes de soutien qui investissent dans l'enfance sont la façon la plus rentable de promouvoir la productivité, la croissance et la prospérité. Bowlus et McKenna ont chiffré à 16 milliards de dollars par année les conséquences économiques attribuables au refus d'investir au départ dans l'enfance et les familles.
Les enfants et les jeunes du Canada ne vont pas très bien actuellement — pas aussi bien qu'ils le devraient. Les enfants et les jeunes aujourd'hui sont confrontés à de graves problèmes: insécurité, violence, problèmes de santé physique et mentale, pauvreté, chômage, toxicomanie.
Nous croyons que le Canada doit adopter une approche globale pour régler les problèmes des enfants et des jeunes, et le gouvernement devrait faire preuve le leadership, comme il l'a fait en investissant dans la petite enfance, pour ne pas perdre les acquis des dernières années.
À en juger par la tendance démographique, la génération actuelle de jeunes sera essentielle à la compétitivité de notre économie. La puissance économique est directement liée à la santé des citoyens, en particulier à celle des générations futures. On estime que chaque dollar investi dans l'enfance produire, à terme, trois dollars d'économies au chapitre de la santé.
Nous croyons aussi qu'il faut s'attaquer aux obstacles propres à divers groupes défavorisés, dont les Autochtones et les minorités ethniques et raciales, les personnes handicapées et les jeunes immigrants.
Nous croyons qu'il faut envisager la recommandation suivante: investir dans un fonds d'infrastructures communautaires de 300 millions de dollars sur trois ans pour créer des lieux publics, des centres de la famille et un centre de l'enfance et de la jeunesse au sein de la nouvelle Agence de santé publique du Canada, en mettant l'accent sur la prévention communautaire.
En outre, nous recommandons que le gouvernement fédéral joue un rôle de premier plan dans l'élaboration d'un programme national interministériel pour la jeunesse, auquel les jeunes participeraient. Tous les enfants et tous les jeunes peuvent être à risque. Nous croyons qu'il faut continuer d'investir passé l'étape de la petite enfance, pour les enfants d'âge scolaire et les jeunes.
Alfred.
º (1615)
M. Alfred Gay: Je vais maintenant parler des enfants et des jeunes autochtones.
Au Canada, aujourd'hui, il y a environ 320 000 enfants autochtones. La situation des Autochtones en général est hélas plutôt difficile. L'indice de développement humain de l'ONU pour les Autochtones du Canada est semblable à celui du Pérou et du Brésil — même si notre gouvernement produit des excédents record.
Pour combler l'écart entre la qualité de vie de ces enfants et celle des autres Canadiens, nous pouvons entre autre investir directement dans des programmes communautaires qui aident les enfants, les jeunes et les familles autochtones. Les études ont prouvé à maintes reprises l'efficacité des mesures de soutien et des programmes communautaires. Cela signifie investir dans les organismes communautaires. Il existe déjà d'excellents modèles, par exemple les services tribaux de Yellowhead et l'Initiative de protection de l'enfance au Manitoba.
Au Canada, nous savons que les services offerts aux enfants et aux jeunes autochtones, dans les réserves comme à l'extérieur, sont sous-financés. Il est temps de confier les ressource aux agences communautaires qui ont déjà les connaissances et le savoir-faire nécessaires pour intervenir efficacement.
En cinq ans, le nombre d'enfants autochtones pris en charge par l'État a augmenté de plus de 70 p. 100. Il y a plus d'enfants dans cette situation aujourd'hui qu'à l'époque des pensionnats. Ce sont là des statistiques inacceptables. Les services à ces enfants et à leurs familles sont inadéquats, et il existe des écarts importants entre organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations. En raison du financement inadéquat et des conflits de compétence, les enfants et les familles ne peuvent recevoir les services dont ils ont tant besoin. Les enfants et les jeunes autochtones ne peuvent plus attendre.
J'ai quatre brèves recommandations à présenter à ce sujet. Il faut accroître le financement pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants dans les réserves et hors réserve; il faut accroître le financement des programmes communautaires pour les enfants d'âge scolaire dans les réserves et hors réserve; il faut élaborer une nouvelle formule de financement équitable pour les organismes de services à l'enfance et à la famille des Premières nations; finalement, il faut adopter une politique qui permette au gouvernement de premier contact d'offrir immédiatement les services aux enfants et aux familles autochtones, en attendant que les conflits de compétence soient réglés.
Je termine en disant que l'Alliance nationale pour les enfants est essentiellement un regroupement des principaux activistes sociaux du Canada, que ce soit les Clubs Garçons et Filles du Canada ou l'Association nationale des centres d'amitié. Nous comptons 76 organisations membres, et je pense que c'est là qu'il faut d'abord intervenir, en distribuant l'argent aux premiers intervenants. Nous avons parlé des relations entre les divers niveaux de gouvernance. Nous devons maintenant veiller à ce que les fonds parviennent bien aux collectivités, car c'est là qu'ils sont le plus utiles.
Sur ce, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole aujourd'hui.
º (1620)
Le président: Merci.
Nous allons maintenant écouter les représentants de la Canadian Co-operative Association, Mme Hunter et M. Sitaram.
M. Dave Sitaram (président, Canadian Co-operative Association): Merci, monsieur le président, merci, mesdames et messieurs les membres du comité.
Bonjour, je m'appelle Dave Sitaram et je suis président de la Canadian Co-operative Association. Je suis aussi directeur de la Credit Union Central of Ontario et membre et vice-président de la coopérative de crédit des travailleurs de l'automobile à Oshawa.
Je suis venu aujourd'hui avec Carol Hunter, notre directrice exécutive.
La Canadian Co-operative Association est une coopérative nationale sans but lucratif qui est la propriété de ses membres. Notre association représente des coopératives de tout le Canada. Les coopératives oeuvrent dans pratiquement tous les secteurs de l'économie: finances, assurance, agroalimentaire, vente en gros et au détail, habitation, santé, services. Nous sommes particulièrement heureux du thème de la consultation de cette année — Accroître les gains de productivité — et de l'importance accordée à ces trois grands aspects de la productivité: le capital d'entreprise — nos entreprises; le capital humain — nos citoyens; le capital physique — nos collectivités. Les coopératives sont essentielles à l'expansion de ces trois types de capital.
Les 9 500 coopératives du pays servent un tiers de la population canadienne; nous avons 10 millions de membres. En outre, les coopératives ont des actifs de plus de 175 milliards de dollars et font travailler 155 000 personnes. Parce que ce que sont des entreprises possédées et contrôlées localement, elles sont souvent moins visibles ou moins imposantes que les grandes chaînes nationales et les multinationales. Pourtant, aujourd'hui, les coopératives comptent 20 p. 100 d'employés de plus dans le monde que toutes les multinationales réunies.
Le secteur coopératif du Canada comble depuis longtemps des besoins économiques et sociaux. Nous sommes des organisations communautaires et nous nous intéressons non seulement à la rentabilité de nos entreprises mais aussi aux besoins de nos membres et à la qualité de la vie dans nos collectivités.
Carole Hunter va maintenant exposer certaines mesures spécifiques que, selon elle, le gouvernement fédéral devrait prendre pour renforcer le secteur coopératif canadien et nous permettre d'améliorer encore notre contribution au capital d'entreprise, humain et physique du Canada.
Mme Carol Hunter (directrice exécutive, Canadian Co-operative Association): Merci, Dave.
À l'heure actuelle, un partenariat de 15 millions de dollars entre le Secrétariat aux coopératives du gouvernement fédéral et le secteur coopératif permet aux Canadiens d'explorer l'utilité du modèle coopératif pour répondre à des problèmes et à des défis contemporains. L'Initiative de développement coopératif, l'IDC, compte deux volets: innovation et recherche, et services consultatifs.
Annoncée au printemps 2002, l'IDC a été implantée en avril 2003. Le volet innovation et recherche, géré directement par le Secrétariat aux coopératives, permet aux Canadiens d'étudier et de tester des façons innovatrices d'appliquer le modèle coopératif. Le volet services consultatifs aide les associations coopératives provinciales et les partenaires sectoriels à construire un réseau qui donne accès à des services de développement coopératif dans tout le pays, et ce dans les deux langues officielles. Ce volet est géré par la CCA et le Conseil canadien de la coopération, au nom du secteur coopératif. Il est évalué à cinq millions de dollars sur cinq ans, et le secteur coopératif fournit une contribution supplémentaire de 20 p. 100 en nature.
La demande de développement coopératif au Canada est immense. L'an dernier seulement, 200 initiatives coopératives ont reçu une aide quelconque du réseau des services consultatifs, et plus de 40 nouvelles coopératives ont vu le jour. Au cours du premier trimestre de cette année, 109 initiatives ont fait appel au réseau des services consultatifs, et 16 nouvelles coopératives ont été créées.
Malheureusement, le gouvernement fédéral alloue seulement un million de dollars par année aux services consultatifs. Cela ne répond vraiment pas aux besoins des collectivités à la recherche de solutions coopératives à des problèmes économiques et sociaux définis localement. Si le gouvernement fédéral veut qu'un plus grand nombre de personnes puissent s'aider elles-mêmes, créer de nouvelles entreprises, créer des emplois, offrir des services autochtones et contribuer à accroître la productivité du Canada, il doit allouer immédiatement des ressources supplémentaires aux volet Services coopératifs et Innovation et recherche de l'Initiative de développement coopératif pour les exercices 2006-2007 et 2007-2008, les deux dernières années du programme IDC existant
Nous demandons que de quatre à huit millions de dollars soient alloués aux services consultatifs pour les deux prochaines années. Ce modeste investissement aura d'immenses retombées sur la productivité. Nous demandons aussi au gouvernement fédéral qu'il s'engage à collaborer avec le secteur coopératif pour former un nouveau partenariat en vue d'appuyer le développement coopératif au Canada après 2008. En outre, comme un Canadien sur trois est membre d'une coopérative, la CCA demande au gouvernement fédéral de reconnaître explicitement l'importance de ce secteur de l'économie et de la société en créant au sein du Cabinet un poste spécifiquement responsable du secteur coopératif.
Dans son budget de 2004, le gouvernement fédéral a annoncé des mesures à l'appui de l'économie sociale et il en a fait un élément clé de son train de mesures de politique sociale. Nous déplorons la lenteur avec laquelle ce programme est mis en place et le fait qu'aucun financement ne soit encore parvenu aux entreprises de l'économie sociale. Nous pressons le gouvernement fédéral de veiller à ce que l'initiative d'économie sociale soit déployée sans plus de retard. En outre, nous encourageons le gouvernement fédéral a commencer à collaborer dès maintenant avec toute une gamme d'organisations de l'économie sociale, y compris les représentants du secteur coopératif, pour que le financement fédéral du volet de renforcement des capacités soit maintenu au-delà de l'engagement de deux ans.
En décembre 2004, une délégation de coopératives, y compris la CCA, est venue témoigner devant votre comité pour demander la mise en oeuvre d'un plan d'investissement coopératif enregistré, afin d'encourager les membres et les travailleurs à investir dans leurs coopératives agricoles. Le régime n'a pas été créé dans le dernier budget fédéral, mais le gouvernement a indiqué que la mesure était toujours envisagée. Nous demandons maintenant au gouvernement fédéral de tenir son engagement et d'annoncer la création d'un régime d'investissement coopératif dans le budget 2006.
Par l'entremise de la Canadian Co-operative Association et de notre organisation de financement, la Co-operative Development Foundation of Canada, les coopératives participent activement aux activités de développement international du Canada et elles appuient énergiquement un rôle dynamique pour le Canada dans le domaine du développement. La cible de 0,7 p. 100 du PIB consacré à l'aide internationale était une proposition canadienne. Dans le prochain budget fédéral, nous recommandons que le gouvernement fédéral expose un plan pour atteindre cet objectif. Nous recommandons aussi que le budget officiel du Canada pour l'aide au développement continue d'appuyer les organisations indépendantes de la société civile qui fournissent les freins et contrepoids indispensables à toute démocratie véritable.
Ce ne sont là que quelques-unes des recommandations que la CCA adresse au gouvernement fédéral. Vous trouverez plus d'information dans notre mémoire intitulé « Autonomisation du secteur coopératif pour assurer la croissance de la productivité ».
º (1625)
Le président: Merci.
Nous allons maintenant donner la parole à Mme Ambrose.
Mme Rona Ambrose (Edmonton—Spruce Grove, PCC): Merci, monsieur le président, et je remercie nos témoins de leur exposé. Ils étaient fort intéressants.
Je veux parler de la question de la garde des enfants et du lien entre la pauvreté des enfants, le caractère nécessaire d'un programme de services de garde véritablement universel et équitable — puisque cela est débattu en Chambre actuellement — et le travail non rémunéré des femmes. Je désigne ainsi le travail non rémunéré des fournisseurs de services à l'enfance. Je dis « les femmes », parce que c'est surtout le travail des femmes, mais bien sûr les pères en font aussi beaucoup.
Actuellement, nous cherchons à créer un nouveau programme social. L'idée n'est pas nouvelle. Je crois savoir que le gouvernement libéral promet un programme de services à l'enfance depuis une dizaine d'années déjà, mais c'est la première fois qu'une somme considérable est allouée à un programme d'apprentissage et de garde pour la petite enfance. Je m'inquiète toutefois de l'universalité. M. Vandezande a mentionné que les investissements sociaux devaient profiter à ceux qui en ont le plus besoin, et les programmes universels, en particulier, existent précisément dans ce but.
J'ai remarqué, dans l'exposé de l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance, que l'organisation considérait l'universalité comme une priorité absolue; sinon, les critères utilisés pour canaliser les fonds publics vers les enfants et les familles à risque ne donneront que des résultats discutables. L'universalité, c'est ce qui m'inquiète, et c'est ce qui inquiète notre parti, le Parti conservateur. Nous investissons cinq milliards de dollars dans un programme de services à l'enfance qui accroîtra le nombre de places en garderie de trois pour cent seulement. Nous passerons donc de sept à dix pour cent. Bien des gens n'auront pas accès à ces services de garde d'enfants, même si le modèle adopté repose sur des garderies publiques ouvertes de 9 h à 17 h.
Si nous voulons créer un nouveau programme social et bien le faire, de façon universelle, je crois que nous avons l'obligation de veiller à ce que les services soient offerts aux personnes qui en ont le plus besoin.
Nous savons déjà que ce programme n'aidera pas les parents en milieu rural, les familles rurales, puisque l'infrastructure est en ville. Nous savons que les familles d'immigrants préfèrent garder leurs enfants à la maison, pour leur transmettre leurs coutumes, leurs traditions et leur langue, et qu'elles font souvent appel à la famille élargie pour assurer le soin des enfants. Nous savons que les travailleurs de quart ne peuvent pas utiliser les services de garde entre 9 h et 17 h et nous savons qu'un grand nombre de familles à faible revenu ont de la difficulté à se prévaloir du programme, comme le révèle l'expérience du Québec — et le modèle québécois et un excellent point de départ. Le problème, c'est que 85 000 enfants figurent sur les listes d'attentes au Québec, et le gouvernement du Québec consacre 1,4 million de dollars par année au programme.
Les problèmes sont donc nombreux, mais le principal est l'accès pour les parents — l'accès et l'universalité. Le programme n'est pas universel et il n'est pas accessible.
J'ai également des réserves lorsque vous parlez des droits des femmes, et nous en avons discuté... J'ai étudié la théorie féministe, j'ai travaillé toute ma vie avec des organisations féminines. Nous parlons du travail non rémunéré des femmes depuis des années. Voilà l'occasion rêvée de créer un programme où le travail non rémunéré des femmes, en particulier lorsque les femmes choisissent de rester au foyer pour élever leurs enfants, pourrait être reconnu financièrement. Nous suggérons que l'argent, les droits qui seront versés, soit remis directement aux parents pour que ceux-ci puissent choisir le système qu'ils veulent appuyer.
Je veux parler d'universalité. Que préconisez-vous, quel type de pression exercez-vous sur le gouvernement pour que le programme soit suffisamment souple, qu'il aide les personnes qui en ont le plus besoin, en particulier les femmes qui font un travail non rémunéré en assurant le soin des enfants, les familles à faible revenu et les familles d'immigrants? Ces bénéficiaires doivent avoir accès aux services et le programme doit être assez souple pour leur fournir ce dont ils ont besoin.
º (1630)
Le président: Avant de commencer, je signale que nous allons limiter les premières interventions à cinq minutes. Vous devez donc répondre rapidement. Nous devons finir à 17 h. Merci.
À qui adressez-vous votre question, madame Ambrose?
Mme Rona Ambrose: Au groupe de promotion des services de garde à l'enfance, à Mme Lysack ou à Mme Anderson.
Mme Monica Lysack: Je commence, et ma collègue pourra peut-être ensuite répondre elle aussi. J'ai deux points à faire valoir.
Nous aussi, nous nous inquiétons véritablement de l'universalité. Je crois qu'il est essentiel de préciser que la garde d'enfants telle que nous la concevons est une activité à multiples facettes. Si nous prenons seulement une dimension de la garde d'enfants — par exemple pour corriger la pauvreté chez les enfants — nous pouvons considérer qu'une approche ciblée serait utile. Mais si vous lisez bien notre mémoire, vous constaterez que les services de garde appuient de nombreux autres domaines et contribuent à l'économie de diverses façons. Si nous cherchons à appuyer uniquement les familles les plus pauvres, nous renoncerons à tous ces avantages, et je crois que M. Rosenblum...
Mme Rona Ambrose: Comme l'a dit M. Vandezande, l'investissement social devrait cibler ceux qui en ont le plus besoin. Il devrait être fonction du revenu.
Honnêtement, les familles prospères peuvent sans doute trouver des services de garde d'autres façons. Si nous devons créer un régime public, ce régime doit être accessible et universel. Les personnes qui en ont le plus besoin sont les personnes à faible revenu, et les statistiques montrent qu'elles ne profitent pas de ce programme.
Le président: Merci. Il faut poursuivre.
Madame Wasylycia-Leis, ce n'est pas votre tour, mais je vous donne la parole, puis ce sera Mme Gagnon, puis Mme Minna. Vous avez cinq minutes.
[Français]
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Nord, NPD): Pour commencer, j'aimerais remercier Mme Gagnon et M. Bouchard, qui m'ont permis de prendre la parole à leur place parce que je dois quitter.
º (1635)
[Traduction]
Je voulais d'abord dire que nous tournons en rond. L'an dernier, nous n'étions tous ici: même ordre, mêmes discours, mêmes problèmes, n'est-ce pas? Ce que je demande, au fond, c'est s'il y a quelque chose de neuf depuis votre dernière comparution. Ma question s'adresse à tous.
Le seul secteur où je crois que nous avons fait quelques progrès est celui des services de garde à l'enfance, et maintenant les conservateurs veulent tout nous enlever. Soyons honnêtes, nous ne pouvons pas régler tous les problèmes en même temps, et je ne dis pas que le monde aurait dû changer au cours des six derniers mois, mais ne gâchons pas l'investissement que nous avons consenti pour les services de garde à l'enfance simplement parce que cela ne couvre pas tout le monde et toutes les situations. Reconnaissons que nous travaillons avec les femmes et les familles qui doivent concilier travail et responsabilités familiales et qui veulent s'intégrer à la population active mais qui n'y parviennent pas parce qu'il n'y a pas suffisamment de places en garderie ou parce qu'ils s'inquiètent de la qualité des soins qu'on leur offre. Je pense donc qu'il serait utile qu'on nous dise comment cette question des services de garde est liée à la productivité.
Je pense qu'il serait utile de savoir si, les personnes qui vivent dans la pauvreté, sans accès à une saine alimentation et à des programmes de qualité, par exemple ceux offerts par les centres d'amitié, peuvent utilement contribuer à la société.
Je crois qu'il serait utile que Gerry Barr nous dise ce qui s'est passé depuis que le Parlement a adopté une autre motion à l'unanimité, en juin, pour porter notre contribution à 0,7 p. 100 du PIB.
Je crois qu'il serait utile que l'Association de promotion des services de garde et le groupe d'Ottawa nous disent ce qui se passe quand les parents et les familles ont trop de problèmes à régler. Comment peuvent-ils être des travailleurs productifs?
Je pense qu'il serait utile que les centres d'amitié répondent à la question que j'ai soulevée, et que la Canadian Co-operative Association nous parle des nouveaux modèles applicables à notre travail pour accroître la productivité.
Je sais que c'est beaucoup pour chacun, mais j'aimerais que nous fassions un rapide tour de table. Nous pourrions commencer par Simon.
M. Simon Rosenblum: Eh bien, si nous nous demandons ce qui a changé, nous sommes dans une situation — je crois que c'est un peu comme Alice au pays des merveilles — nous devons courir deux fois plus vite simplement pour rester sur place, car il y a beaucoup de contraintes. Je ne suis pas particulièrement critique de la mondialisation, mais elle a ses inconvénients. Une de ces contraintes touche nettement la main-d'oeuvre, et même le fait de bonifier le crédit d'impôt pour enfants ne nous permet pas de réduire le taux de pauvreté chez les enfants, en particulier si nous ne l'augmentons pas autant qu'il le faudrait.
Ce n'est pas que — comme l'a dit Gerald au début — nous n'apprécions pas les mesures qui ont été prises, dont certaines tout récemment. Mais elles sont bien modestes, vu l'ampleur de la tâche, et il est donc vraiment difficile de faire le point et de dire ce qui a changé au cours de l'année. Je pense que nous devons nous demander ce qu'il y a à faire — mais sans être exagérément optimiste ni espérer que cela puisse se faire en un an, dans le cadre d'un seul budget. Nous devons toutefois nous demander très sérieusement ce qui peut être fait en une décennie.
Je vous signale, et je finirai sur cette note, que le gouvernement britannique a pris une décision. Il a promis de fixer des cibles et des repères concrets. Il arrive à sa première échéance; il avait dit qu'à la fin de 2005, il aurait réduit de 25 p. 100 la pauvreté chez les enfants, et il y est parvenu.
Je crois qu'il nous serait utile à tous d'avoir des cibles véritables devant nous, pour ne pas devoir nous poser les mêmes questions dans dix ans.
Le président: Monsieur Barr.
M. Gerry Barr: Je vais essayer d'être vraiment très bref, car je sais que nous sommes nombreux.
Au cours de la dernière année, je pense que le Canada et le Parlement sont arrivés à un point tournant dans le dossier des progrès à réaliser pour atteindre l'objectif de 0,7 p. 100, mais le gouvernement n'a pas suivi. L'opinion publique a augmenté de 12 points en faveur d'un suivi et d'une contribution accrue à l'aide humanitaire. Il y a 250 000 Canadiens — environ un quart de million — qui participent à une vaste campagne et encouragent les députés et sénateurs et le premier ministre à progresser dans ce dossier. C'est un soutien public énorme. Les éditorialistes et d'autres essaient aussi de faire avancer la question.
Bien sûr, comme l'a dit la députée, la Chambre est parvenue à un consensus, et c'est vraiment remarquable dans un parlement minoritaire. Où que l'on regarde, il y a une évolution positive dans ce domaine. Il faut vraiment se demander pourquoi le gouvernement ne s'est pas encore attaqué sérieusement au problème.
Je ne veux pas minimiser le rôle de votre comité, mais je sais qu'il y a des défis financiers. Sur le plan financier, il sera difficile d'atteindre cet objectif. Dans l'hypothèse où le gouvernement refuserait d'allouer les fonds, je crois que l'on peut à juste titre se demander, comme l'ont fait des députés à certains égards, s'il ne pourrait pas au moins faire ce qui ne coûte rien et adopter une loi?
º (1640)
Le président: Merci, monsieur Barr.
Madame Gagnon, suivie de Mme Minna.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à l'Association canadienne pour la promotion des services de garde à l'enfance. Vous avez fait l'éloge du système public pour les garderies. Le fédéral s'est beaucoup inspiré de ce qui se faisait au Québec, pour la mise en oeuvre de son nouveau programme. Il y a 5 milliards de dollars sur cinq ans. Au Québec, environ 200 000 places coûtent 1,7 milliard de dollars par année.
Comment percevez-vous la situation? Les ententes se font maintenant avec chacune des provinces, peut-être parce qu'on ne veut pas aller au même rythme avec chacune. Cela implique aussi les provinces. La pression sur ces dernières va être très forte à cause du déséquilibre fiscal entre elles et Ottawa.
L'autre débat porte sur le système privé et le système public. On dit que le gouvernement n'est pas assez restrictif dans sa volonté d'établir un système public. Les ententes avec les différentes provinces donnent-elles cette impression?
[Traduction]
Mme Lynell Anderson: Je crois que votre question porte sur les différences entre les ententes et sur le leadership manifesté dès le début par le Québec. Je vais répondre à cette question et traiter du coût de l'approche universelle en matière de garde d'enfants.
Je veux être bien claire. Dans tout le pays, lors de nos consultations et dans les études que nous avons réalisées l'an dernier, nous avons élaboré un plan de 15 ans, basé sur un investissement public substantiel et sur une loi nationale, pour réaliser des progrès en vue d'instaurer un régime de services de garde d'enfants universel et de qualité. Plus des trois quarts des femmes font partie de la population active aujourd'hui, et nous savons que c'est ce dont les familles ont besoin. Nous savons aussi que le système est coûteux, tout comme notre système d'éducation public, et qu'il produit des retombées, tout comme notre système d'éducation public.
Nous savons que lorsque le système est ancré dans les collectivités et que les organisations communautaires répondent aux besoins locaux, là où il y a de nombreuses familles nouvellement arrivées au Canada, les services sont définis en fonction de leurs besoins, ou pour répondre aux besoins des travailleurs de quart. Où que vous viviez, une organisation communautaire peut répondre à vos besoins.
Pour ce qui est du leadership assumé dès le départ par le Québec, nous constatons que les choses évoluent très différemment selon la région du pays pour la signature d'ententes bilatérales. Vous avez raison, les provinces et les territoires n'en sont pas tous au même point, mais nous espérons sincèrement qu'ils établirons des plans et des priorités, chacun à son rythme, et nous continuerons de les appuyer dans cette tâche.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je vais reformuler ma question. Selon vous, les restrictions que le fédéral a imposées pour avoir accès aux fonds de son programme pour les garderies sont-elles suffisantes par rapport aux secteurs privé et public? Sentez-vous qu'on fait plus de place au système public dans ces accords, et que les restrictions sont bien établies?
[Traduction]
Mme Monica Lysack: Premièrement, je vous demande d'excuser mon incapacité à répondre en français.
Vous vous interrogez au sujet des services de garde d'enfants commerciaux par opposition aux services publics. Oui, c'est vrai, nous sommes très préoccupés par cette question. À l'heure actuelle, l'ACPSGE commandite la tournée de conférences nationale d'un spécialiste australien des services de garde d'enfants, qui présente la situation en Australie. Contrairement au Québec, qui a limité le développement dans le secteur commercial, l'Australie s'est engagée dans cette voie et est maintenant profondément préoccupée des conséquences. La principale, en matière d'accessibilité, est celle que Mme Ambrose a soulevée ici. Cela est tout à fait inquiétant.
Le secteur commercial s'intéresse aux services de garde d'enfants dans des créneaux lucratifs. Il ne s'intéresse pas à Iqaluit ou aux autres régions isolées ni aux enfants difficiles ou qui ont des besoins complexes. Nous sommes très inquiets du peu de restrictions à cet égard. Seulement deux provinces ont effectivement déclaré que leur investissement se limiterait au secteur sans but lucratif. Une province a déclaré qu'elle souhaitait un développement commercial.
C'est une question préoccupante.
º (1645)
[Français]
Le président: Merci, Madame Gagnon.
Ms. Minna.
[Traduction]
L'hon. Maria Minna: Merci, monsieur le président.
Premièrement, je veux remercier tous ceux qui nous ont présenté un exposé. Nombre des questions ne sont pas nouvelles — nous nous connaissons tous. Nous en discutons depuis très, très longtemps.
Je veux souhaiter la bienvenue à M. Vandezande, que je n'ai pas vu depuis quelque temps. Je crois que nous sommes restés en contact avec pratiquement tous nos autres témoins.
Revenons à la question de la garde d'enfants. Je sais que nous nous y sommes tous frottés, mais elle est importante, et le débat perdure. Selon Mme Ambrose, le gouvernement se demande s'il convient de s'engager dans l'éducation et la garde des jeunes enfants. Eh bien, nous l'avons fait; nous n'en discutons plus. À mes yeux, ce n'est qu'un premier versement, et je pense que vous en convenez tous. Je l'ai mentionné précédemment. Nous devons investir très rapidement si nous voulons vraiment avoir un impact dans ce domaine.
Même le gouverneur de la Banque du Canada a affirmé qu'en matière de productivité, puisque c'est ce qui nous intéresse, l'éducation des jeunes enfants est la voie de l'avenir. S'il avait un cent à dépenser et rien de plus, c'est là qu'il l'investirait. Alors si M. Dodge dit cela...
L'autre commentaire que je tiens à relever, et qui a été fait à l'audience de l'an dernier par Mme Ambrose, concerne les familles d'immigrants, qui aimeraient mieux garder leurs enfants à la maison — je ne sais pas si l'on peut vraiment faire un tel commentaire au sujet des familles d'immigrants, avec tout le respect que je vous dois. Je peux en parler, je viens d'une famille d'immigrants, je connais beaucoup d'immigrants, et les trois quarts d'entre eux travaillent. Les mères travaillent, comme toutes les autres mères, comme bien d'autres femmes. Les immigrants ne sont pas si différents du reste de la société.
Il s'agit donc de savoir s'il faut remettre de l'argent directement aux familles, ce qui est l'envers de la médaille, ou adopter le régime universel que je préfère et que nous avons commencé à définir, dans une certaine mesure, et de l'entente qui fera intervenir les organisations sans but lucratif, ce qui me pose des difficultés, comme vous le savez... Dans notre dernier rapport, nous avons dit quelque chose de différent, et nous n'y sommes pas encore.
Je vous demande d'essayer de régler la question une fois pour toute. Est-ce que le gouvernement doit investir dans l'infrastructure, dans l'éducation des jeunes enfants et dans des services de garde qui, dans tout le pays, appliqueraient des normes de qualité et feraient appel à des professionnels bien formés et adéquatement rémunérés?
Pour ce qui est de l'accès, je ne pense pas que nous manquions d'imagination dans notre pays; nous sommes capables de définir des programmes en milieu rural et dans les petites collectivités, car le financement et les quatre principes généraux n'empêchent pas... Les mécanismes de prestation ne sont pas définis par le gouvernement du Canada.
J'aimerais que vous me disiez si vous pensez qu'il serait avantageux de remettre l'argent aux parents. J'ai de la difficulté à accepter cela. Je ne crois pas que cela soit opportun. Nous ne procédons pas ainsi pour l'école primaire. Nous considérons que l'éducation est d'une importance capitale pour notre société, pour notre productivité, pour nos enfants, mais nous n'envoyons pas de chèques aux parents en leur disant d'aller construire une école. Nous avons un système scolaire dans notre pays, dans toutes les provinces, et tous les enfants y ont accès, en milieu rural comme ailleurs. La collectivité type, bien sûr, a d'importants besoins auxquels nous devons répondre dans ce domaine. Mais je ne vois pas la différence de philosophie entre cela et l'éducation et les services de garde des jeunes enfants.
Je vous demande de revenir à la base et de me dire si, dans le cadre de vos audiences et de vos consultations, vous constatez que la population veut vraiment que nous élaborions un programme national d'éducation et de services de garde des jeunes enfants qui soit accessible, de qualité, abordable... Tout ce que nous en avons dit. Je parle de demande réelle. Donnez-moi une bonne explication. Je connais la réponse, je vous le dis honnêtement, mais j'aimerais que vous me la confirmiez. Dites-moi pourquoi vous pensez que c'est ainsi qu'il faut procéder.
º (1650)
Mme Monica Lysack: Premièrement, je dirais que peu importe le montant d'argent que vous avez, vous ne pouvez pas acheter ce qui n'existe pas. Nous devons créer un système, pas simplement donner de l'argent aux Canadiens pour encourager le travail non rémunéré. Nous ne souhaitons pas que toutes les familles soient tenues de participer à ce régime, c'est évident. Mais nous savons que la grande majorité des familles qui ont accès à des services à la petite enfance et peuvent se les payer en profitent. C'est ce qu'indiquent les taux d'inscription au jardin d'enfance et le nombre d'enfants d'âge préscolaire qui fréquentent actuellement des programmes pour la petite enfance.
L'idée de payer les parents... Je veux attirer votre attention sur la page 6, où nous disons que les mesures fiscales ne sont pas la solution. Je pense qu'il est important d'examiner honnêtement ce qu'il en coûterait de payer les parents. Par exemple, les économistes estiment que si toutes les mères qui ont des enfants de moins de six ans devaient quitter la population active, l'emploi au Canada régresserait d'environ 7,5 p. 100. À long terme, cela grèverait l'économie canadienne de quelque 83 milliards de dollars par année. C'est la conclusion des économistes Cleveland et Krashinsky, à l'Université de Toronto. C'est environ huit fois le coût d'un régime universel de services de garde. Alors si nous parlons de vraiment appuyer les familles pour que les parents restent à la maison et élèvent leurs enfants, c'est une dépense de cet ordre qu'il faut envisager.
Si nous parlons d'un allégement fiscal, d'un bon pour les services de garde — c'est-à-dire une rétribution — pour compenser ou reconnaître le travail essentiellement non rémunéré des femmes, c'est tout ce que nous obtenons pour notre argent.
Le président: Merci, madame Lysack.
Il me reste moins de neuf minutes et trois intervenants. Vous avez donc trois minutes chacun, madame Oda, monsieur Bouchard et monsieur Bell.
Madame Oda.
Mme Bev Oda (Durham, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais préciser quelque chose. La proposition du parti d'opposition ne consiste pas à abolir quelque chose d'existant; nous voulons permettre aux citoyens de choisir entre le système public ou une formule de rechange pour les services de garde, nous voulons leur laisser le choix. Nous n'avons pas l'intention — et je pense qu'il est fallacieux de l'affirmer — de détruire un régime public quelconque de cette façon.
Je veux aussi souligner que lorsque j'ai pris connaissance de l'entente négociée avec l'Ontario, je n'y ai pas vu d'échéance pour le nombre de nouvelles places en garderie et il m'a semblé que l'essentiel des fonds alloués au cours des premières années serviraient à l'élaboration des programmes, à des études, etc.
J'ai donc deux questions à poser dans les quelques minutes qui me sont allouées. À quel moment est-ce que l'Ontario créerait effectivement des places en garderie? Et qu'est-ce que je dois dire à mes électeurs dont les enfants d'âge scolaire font actuellement entre 45 minutes et une heure et quart en autobus pour se rendre à l'école la plus proche? Les parents ne veulent pas imposer cela à leurs petits de trois et quatre ans. Cela se passe en milieu rural, etc. Je ne peux pas leur promettre qu'on leur offrira des places en garderie à une distance raisonnable. Vous avez parlé de ce qui se passe « dans les collectivités ». Eh bien, c'est ce qui se passe dans les collectivités qui ne sont pas de grands centres urbains.
Pouvez-vous répondre à ces deux questions?
Mme Lynell Anderson: Tout d'abord, pour ce qui est de l'entente, je vais préciser que toutes les provinces et tous les territoires qui ont signé des ententes devaient soumettre des plans d'action. Ils débutent à des dates variées. Pour l'Ontario, je crois que c'est le 31 décembre.
Nous sommes très intéressés, comme tout le monde je pense, à ce que les fonds fédéraux considérables alloués aux services de garde d'enfants permettent la réalisation de plans concrets et mesurables.
Là encore, notre association vous demande deux choses. Nous voulons en premier lieu un financement fédéral adéquat et continu, pour pouvoir améliorer les services à l'intention de tous les enfants et de toutes les familles, dans l'ensemble des collectivités. Deuxièmement, nous voulons des plans provinciaux et territoriaux qui optimiseront l'utilité de ce financement.
Pour ce qui est du programme ontarien, ma collègue est sans doute plus à même de répondre que moi.
º (1655)
Mme Monica Lysack: Nous sommes un organisme pancanadien, et je parlerai de la question en général, mais je sais que l'on exerce actuellement des pressions sur la collectivité des services de garde d'enfants en Ontario pour qu'elle crée très rapidement de nouvelles places. C'est toujours le dilemme, ou on se précipite ou on attend. Il semble que nous attendons depuis... Je travaille dans le dossier de la garde d'enfants depuis 25 ans, sinon plus, et voilà que l'on nous bouscule pour que les choses progressent très rapidement. Il faut du temps pour créer des places en garderie et des programmes pour la petite enfance.
Le président: Merci, madame Lysack.
Monsieur Bouchard, puis M. Bell.
[Français]
M. Robert Bouchard (Chicoutimi—Le Fjord, BQ): Merci, monsieur le président, et merci à tous pour vos présentations.
Ma question s'adresse à l'organisme Campagne contre la pauvreté des enfants. Les enfants naissent tous égaux, mais la pauvreté des enfants est directement attribuable à la pauvreté des parents. Vous faites d'ailleurs plusieurs recommandations pour venir en aide aux parents, ce qui améliorerait forcément le sort des enfants pauvres.
Vous parlez notamment du logement. On sait qu'il y a un surplus de quatre milliards de dollars à la SCHL. Ces surplus ont été accumulés au fil des ans pour des gens qui avaient pour projet de faire construire une résidence familiale.
Seriez-vous d'accord pour que les surplus de la Société canadienne d’hypothèques et de logement soient versés ou consacrés à la mise sur pied d'un programme de logements abordables pour les familles et les enfants défavorisés?
[Traduction]
M. Simon Rosenblum: Il faut être prudent lorsque l'on parle d'excédents budgétaires, qu'il s'agisse des excédents gouvernementaux ou de ceux d'une autre organisation. S'il ne s'agit pas d'excédents permanents, sur lesquels on peut compter année après année. Ils ne peuvent être dépensés qu'une seule fois. Par conséquent, pour ce que vous faites valoir, même si je ne conteste pas vos affirmations je dirais que ce n'est pas, en soi, la solution au problème. Sur une base annuelle, il faudrait injecter des montants considérables. Nous avons discuté avec des organisations et des particuliers dans les milieux spécialisés, et le montant de deux milliards de dollars a souvent été mentionné.
Le milieu du logement social, du moins ce que nous en savons et d'après nos contacts avec lui, n'a pas d'idéologie particulière. Tout le monde s'entend pour dire que l'argent sera dépensé de diverses façons. Il y aura des dépenses directes au titre du logement social, et des fonds seront réservés à des suppléments au loyer. Il ne faut pas essayer d'appliquer la même solution à tous les problèmes.
La situation du logement est complexe, mais je crois que le gouvernement fédéral aura besoin de... Il faut reconnaître que des progrès ont été réalisés. Il y a un an ou deux, nous constations une frustration beaucoup plus grande dans le dossier du logement. Sur le plan conceptuel, il y a eu des progrès qu'il faut les consolider.
» (1700)
Le président: Merci, monsieur Bouchard.
Monsieur Bell, vous avez trois minutes.
M. Don Bell (North Vancouver, Lib.): Merci.
Merci de vos exposés. Je suis heureux que nous ayons aussi vos mémoires, parce que nous n'aurons pas le temps de poser toutes les questions que nous devrions adresser à chacun d'entre vous. Nous pourrons peut-être faire un suivi.
Je veux aborder deux aspects, dont un a déjà été discuté dans une certaine mesure. Je vous remercie de l'information que vous nous avez fournie sur la question du choix parental — je m'adresse à Monica Lysack — merci de cette explication et de l'information au sujet de votre conférencier. J'aimerais en savoir plus à ce sujet, parce qu'évidemment, nous considérons la garde d'enfants et le développement de la petite enfance comme une grande priorité. J'étais en Colombie-Britannique au moment de l'annonce, et j'ai été heureux de voir que les choses progressent là-bas.
J'ai aussi remarqué que l'Alliance nationale pour les enfants insiste sur l'importance d'un système véritablement national. J'allais vous interroger sur la création d'un mécanisme de reddition de comptes, mais nous n'aurons sans doute pas le temps d'aborder cette question. Brièvement, pouvez-vous me dire comment vous envisasez ce mécanisme de reddition de comptes?
Ma deuxième question s'adresse à M. Barr et à Mme Hunter. C'est évident, vous parlez tous des enfants. Ils sont notre bien le plus précieux. Ils sont l'avenir du pays. J'ai des enfants et des petits-enfants, et cette question m'importe beaucoup. Qu'il s'agisse des enfants du Canada ou des enfants du monde, nous prenons très au sérieux la question de la pauvreté.
Est-ce que vous savez à quel montant correspond ce 0,7 p. 100 ?
Commençons par l'Alliance.
Mme Carol Hunter: J'aimerais parler de la reddition de comptes. Il existe un lien entre les coopératives d'habitation et les garderies coopératives qui offrent un modèle en vertu duquel les parents peuvent s'engager dans des garderies et dans des coopératives d'habitation qui peuvent être à la fois viables et faire intervenir les membres de la collectivité. Je pense que les coopératives ont montré que dans leur structure commerciale les utilisateurs sont essentiellement les membres et qu'elles rendent dûment des comptes aux organisations. C'est un modèle tout à fait viable, parce que les coopératives rendent des comptes à leurs collectivités, qu'il s'agisse de logement ou de garderies.
M. Don Bell: Je veux savoir ce que représente le 0,7 p. 100, puis je reviendrai à M. Barr. Je n'ai pas vu de chiffres et je suis curieux.
Mme Carol Hunter: Je laisserai à M. Barr le soin de répondre à cette question.
M. Gerry Barr: C'est un peu moins de huit milliards de dollars, monsieur Bell. Effectivement, si vous doublez le budget canadien de l'aide au développement, vous atteindrez 0,7 p. 100. Nous nous situons à environ 0,34 ou 0,35 p. 100 actuellement. Cela devrait diminuer, parce que les contributions annuelles de 250 millions de dollars disparaîtront en l'absence de nouvelles augmentations, alors nous tomberons à environ 0,32 p. 100. Mais en dollars constants, c'est ce que cela représente, environ huit milliards. Si vous pensez à ce qu'il en coûtera entre aujourd'hui et 2010 pour réinvestir 15 p. 100 annuellement, cela représente en tout 1,9 milliard de dollars en plus de l'argent déjà engagé dans le huit pour cent, et il faut planifier des augmentations de huit pour cent.
M. Don Bell: Le dernier aspect qui m'intéresse est le fait que certains des pays qui ont fait des promesses les ont assorties de conditions ou de réserves — ce ne sont pas vraiment des engagements. Autrement dit, ils ont fait des déclarations sans... C'est la question du premier ministre; si nous devons le faire, nous allons le faire, et nous voulons faire une promesse que nous pouvons tenir.
En outre, êtes-vous satisfait de la reddition de comptes ou de l'absence de corruption dans ces pays? Pensez-vous que l'argent ira effectivement là où il doit aller?
M. Gerry Barr: Je répondrai d'abord à votre première question. Il y a toujours des réserves, quelle que soit la fermeté de l'engagement d'un gouvernement. Les engagements sont liés à la capacité du gouvernement de tenir les promesses qu'il fait. Cela vaut pour le Canada comme pour l'Allemagne, la France, le Royaume-Uni ou les deux autres tiers des pays donateurs du monde qui se sont engagés à atteindre des cibles similaires.
Pour ce qui est de votre deuxième question, la reddition de comptes, c'est précisément pour cela que nous avons proposé un mandat législatif pour dépenser les fonds d'aide; nous voulons que l'aide soit affectée à la réduction de la pauvreté dans un contexte de droits de la personne, en resserrant l'obligation de rendre compte des parlements et en exigeant des rapports publics. C'est précisément la raison pour laquelle nous avons demandé cela — et je dois le souligner, cela ne coûterait rien et augmenterait légèrement l'efficacité des dépenses d'aide.
M. Don Bell: Merci.
» (1705)
Le président: Merci, monsieur Bell.
Je crois que j'ai oublié de remercier nos témoins d'être venus ici aujourd'hui et je veux le faire maintenant.
Nous avons un horaire chargé. Je sais que nous avons commencé avec quelques minutes de retard, mais nous devons nous arrêter ici.
La séance est levée.