:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Premièrement, je m'excuse car je ne parle pas bien le français.
[Traduction]
Chaque fois que j'ai eu à suivre un cours, on m'a envoyé sur le théâtre d'une autre opération des Nations unies, loin d'Ottawa, ce qui n'était pas une mauvaise chose.
Étant donné que c'est votre dernière journée ici avant de retourner dans vos circonscriptions, je vous remercie de votre présence. Les choses se passaient autrement lorsque j'allais à l'école. Pendant mes années au service de l'armée, on m'envoyait ici avec des points de discussion établis par le gouvernement; je suis heureux de pouvoir exprimer ma propre opinion ce matin sans craindre de recevoir demain matin un appel du CEMD ou du ministre.
J'aimerais commencer par dire que j'estime que vous avez placé la charrue devant les boeufs. Vous ne vous êtes pas demandé quelle sera la politique étrangère qui dictera l'emploi de nos militaires après l'Afghanistan. Malheureusement, j'ai remarqué que votre comité n'est pas le seul à agir ainsi. C'est habituellement de cette manière que sont élaborées les politiques en matière de défense au Canada. Si vous faites des recherches à ce sujet, vous constaterez que dans le passé, les examens de la politique de défense ont toujours eu lieu avant les examens de la politique étrangère, ce qui est très étrange.
On peut présumer que les questions qui m'ont été communiquées à propos des opérations de paix laissent entrevoir qu'elles seront une priorité pour les Forces canadiennes après l'Afghanistan. Si on en croit les sondages, les émissions-causeries et les lettres d'opinion publiées dans les journaux, ces mesures iraient de pair avec l'opinion publique dominante. Remarquez que cette opinion publique ignore que notre réputation auto-proclamée en tant que nation vouée au maintien de la paix est un des grands mythes de ce pays. Pour pouvoir être désigné ainsi, il faut certainement que le Canada ait fait du maintien de la paix une priorité en matière de politique étrangère, ce qui n'a jamais été le cas. Cette priorité s'inscrivait loin derrière la souveraineté, la défense de l'Amérique du Nord et les obligations découlant des coalitions et des alliances, dont celle avec l'OTAN coûtait le plus cher et nécessitait le plus d'effectifs. Pendant la guerre froide, nous n'avions qu'un petit nombre de troupes déployées sur le théâtre d'opérations de maintien de la paix, comparativement au très nombreux militaires des forces aérienne et terrestre postés en permanence sur le front central en Europe. Il m'a semblé que les gouvernements endossaient les uns après les autres un mythe de maintien de la paix parce qu'ils pouvaient le faire à bon marché et sabrer dans les budgets de défense tout en maintenant une certaine présence sur la scène internationale.
Ce n'est qu'au début des années 1990, après la chute du mur de Berlin en 1989, que nous avons massivement déployé des troupes pour des opérations de paix. Nous avons envoyé de nombreux soldats en Bosnie, en Croatie, à Chypre, au Golan, au Cambodge et en Somalie. Trois de ces missions, à savoir la Bosnie, la Croatie et la Somalie, ont transformé les activités de maintien de la paix et se sont démarquées des 13 autres qui avaient eu lieu entre 1956 et 1990.
La différence, passée inaperçue chez la plupart des gens du public, c'est que les missions de maintien de la paix menées après la guerre froide impliquent des situations de paix rompue par des factions et non par des pays. Les factions n'ont pas de drapeaux hissés devant l'édifice des Nations Unies à Manhattan. Elles n'y ont pas de délégations. Elles n'ont rien à cirer des Nations Unies, puisque les forces de maintien de la paix des Nations Unies, tenues de respecter des règles d'engagement des Nations Unies, ne peuvent en rien leur nuire.
Je vous dis ces choses en tant que personne appelée par d'autres le Casque bleu le plus expérimenté du monde, non seulement en raison des neuf missions auxquelles j'ai participé, mais parce que j'ai détenu tous les grades pendant mon service pour les Nations Unies, de lieutenant à major-général, exception faite du grade de colonel. J'ai également commandé une mission des Nations Unies — pas seulement sa composante militaire — en Amérique centrale et j'ai établi et commandé une mission subsidiaire à Sarajevo, où je faisais directement rapport aux Nations Unies, du moins lorsque quelqu'un y décrochait le téléphone.
Cela m'amène à la question de la capacité ou de l'incapacité des Nations Unies de diriger des opérations des Nations Unies dans le cadre desquelles le recours à la force meurtrière est autorisé, et de fournir les ressources nécessaires à cet égard. Il y a 18 ans, certains d'entre nous ont dit que les Nations Unies étaient incapables de diriger les missions d'après-guerre froide. Bien que nous ayons été fustigés ou, dans mon cas, réprimandé, pour l'avoir dit, mais nous avons été encouragés d'entendre le sous-secrétaire général des Nations Unies pour le maintien de la paix dire exactement la même chose quelques années plus tard.
Confier par sous-traitance à un pays la responsabilité de diriger une mission pour le compte des Nations Unies peut se révéler un exercice fructueux, comme ce fut le cas pour les missions dirigées par les États-Unies en Somalie et par l'Australie au Timor-Leste.
J'ai vu certains d'entre vous grimacer lorsque j'ai dit que les États-Unis avaient mené une mission couronnée de succès en Somalie. L'attaque dirigée par les États-Unis en décembre 1992 a été l'intervention la mieux réussie dans l'histoire des Nations Unies. La force, notamment composée de Canadiens, a complètement dominé la situation et établi des conditions de sécurité ayant permis d'acheminer l'aide humanitaire en toute sécurité. Ce n'est que six mois plus tard, lorsque les Nations Unies ont repris le contrôle de la mission — et j'étais sur place pour observer la passation des pouvoirs pour CTV — que le leadership de la mission s'est auto-détruit et que tous les participants à la mission ont quitté le pays la tête basse. En passant, et pour le compte rendu, le commandant de cette force d'intervention, le général Johnston des États-Unis, était prêt à comparaître à tout moment devant la commission d'enquête sur la Somalie pour dire que le Régiment aéroporté du Canada était la meilleure unité parmi sa force de 36 000 personnes. Il est regrettable qu'on ait mis fin aux travaux de cette commission avant qu'il n'ait la chance d'y comparaître.
À supposer que notre politique étrangère future continuera de prévoir la participation de militaires canadiens aux opérations menées par des alliances ou des coalitions, parfois avec le consentement de l'ONU, parfois sans, nous devons maintenir une force militaire souple et apte au combat. Nous ne devons plus jamais obliger nos militaires à se conformer à des règles d'engagement ridicules des Nations Unies, élaborées dans des bureaux du centre-ville de Manhattan.
Si bénigne soit la mission, nous devons être prêts à affronter la pire des situations et non la meilleure; pourtant, l'ONU articule de fois en fois sa pensée autour de la situation optimale, étant donné que c'est celle qui coûte la moins cher. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.
Pendant que je commandais une mission à Sarajevo, je trouvais important de défendre l'aéroport contre les lourds chars d'assaut qui se trouvaient à quelque 400 ou 500 mètres. J'ai demandé aux Nations Unies la permission de m'approvisionner, auprès des Canadiens en service en Croatie, en TOW sous blindage, qui sont des systèmes de missiles filoguidés à poursuite optique, lancés par tubes. Nous avions adopté puis placé cette technologie sur le dessus des transports de troupes blindés. Les Nations Unies m'ont répondu que je pouvais m'approvisionner en lance-missiles mais pas en missiles. Bien entendu, j'ai fait fi de cette directive, j'y ai désobéi, et j'ai fait venir les missiles quand même.
J'ai demandé des mortiers. Ils ont dit que je pouvais m'approvisionner auprès du contingent canadien, mais que je n'avais pas droit aux munitions brisantes, seulement aux projectiles éclairants afin, paraît-il, que je puisse voir les gens qui nous attaquaient une fois la noirceur installée. J'ai également fait fi de cette directive.
Lorsque les Danois se sont joints à la mission et qu'ils ont dit qu'ils venaient équipés de chars Leopard, l'ONU a refusé. Les Néerlandais ont choisi de les apporter quand même et ont tiré à quelques reprises sur des gens qui faisaient feu sur eux. Plus personne ne leur a tiré dessus pendant leur période de service de six mois. Je n'ai pas besoin de vous rappeler ce qui s'est passé lorsque les Néerlandais sont entrés dans Srebrenica armés seulement de petits fusils.
En terminant, je vais vous parler d'un dossier en faveur duquel je milite sans succès depuis 50 ans. De tous les pays du monde, le Canada est celui qui devrait voir à maintenir une capacité expéditionnaire amphibie. Nous nous vantons sans cesse de nos trois océans.
Un millier de soldats à bord d'un navire spécialement construit, capable de se déployer à court préavis, contrairement à aujourd'hui; un de ces navires dans chaque océan... Ces navires coûtent moins cher qu'un destroyer ou qu'une frégate et n'ont pas besoin d'aussi gros équipages. Ne vous méprenez pas: le projet du navire de soutien interarmées actuellement en suspens ne répond pas à ces critères. Il n'y a pas suffisamment de place à bord du NSI pour accueillir des militaires équipés pour le combat.
Une telle capacité serait inestimable, non seulement du point de vue des opérations d'intervention, mais du point de vue des missions humanitaires, comme celles qui ont eu lieu récemment à la suite des catastrophes naturelles en Haïti et dans l'océan Indien, sans oublier celle pour laquelle nous demeurons prêts à intervenir à tout moment sur la côte Ouest de notre propre pays; c'est tout aussi important.
Les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Espagne, l'Italie, la Hollande, l'Australie, la France et la Russie ne peuvent pas toutes se tromper; elles sont toutes en train de développer leurs forces amphibies. Malheureusement, nous n'avons pas cette capacité, un point c'est tout.
Je serais heureux de discuter de cette question pendant les questions et réponses et je vous encourage à examiner pendant vos délibérations la possibilité d'ajouter cet outil précieux à nos capacités militaires.
Merci beaucoup.
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Merci beaucoup, monsieur le président. Général MacKenzie, il fait bon vous revoir.
Je suis certainement d'accord avec ce que vous avez dit d'entrée de jeu comme quoi nous devrions établir notre politique étrangère avant d'établir notre politique de défense. Bien entendu, nous devons déterminer quels sont nos intérêts vitaux pour pouvoir ensuite nous doter des capacités appropriées pour les défendre.
Vous avez parlé du maintien de la paix et du mythe et, comme vous le savez, les mythes ont souvent beaucoup plus d'emprise que la réalité. Ce comité est bien entendu sous l'impression que les soldats canadiens participeront à des missions internationales de maintien de la paix après 2011 et, en fait, toute notre étude s'articule autour de ce principe. Nous sommes peut-être prisonniers de ce mythe, car nous continuons de penser que nous allons participer au maintien de la paix sous une forme ou sous une autre.
J'imagine que ma première question pour vous est celle-ci. Certains diraient que le conflit en Afghanistan est caractéristique des conflits à venir. En d'autres mots, il s'agit à la fois de renforcer la paix et de tenter d'établir une paix. L'Afghanistan constitue peut-être alors le test. Tout comme il ne saisissait pas ce qui se passait en Somalie, le public canadien ne comprend pas qu'il y a, d'une part, le maintien traditionnel de la paix et, d'autre part, l'établissement de la paix.
Auriez-vous quelque chose à dire à ce sujet et pouvez-vous nous dire où vous voyez le Canada dans l'avenir? J'aimerais ensuite vous parler des forces armées axées sur la marine.
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Vous mettez le doigt sur un handicap très important.
J'ai rédigé les règles d'engagement pour l'ONU pendant que je commandais la mission en Amérique centrale. C'était si ennuyant que je n'avais pas grand-chose d'autre à faire. La guerre était presque terminée, et les Contras avaient été démobilisés.
J'ai recommandé la cessation de la mission. Ça n'a pas été accepté parce que beaucoup de civils choisissaient d'en faire une carrière. Par conséquent, quand la mission a été interrompue, elle s'est simplement déplacée au Salvador. Elle s'appelle UNOSAL.
Les règles du chapitre 6 étaient faciles à rédiger — vous savez, 30 cartouches de munitions, ne transportez jamais une arme chargée, soyez neutre, soyez impartial. Il était très rare qu'on se faisait tirer dessus. C'était généralement un jeune soldat étourdi qui voulait s'attaquer à un observateur ou à un soldat de l'ONU.
Aujourd'hui, c'est beaucoup plus compliqué, et les pays refusent maintenant de laisser le siège social de New York déterminer les règles d'engagement. Chaque pays a ses avocats, ses militaires et ses spécialistes de la politique étrangère qui se réunissent et écrivent les règles d'engagement, et sincèrement, ils parviennent rarement à suivre le rythme, parce que la situation sur le terrain change énormément. C'est à ce moment que les commandants méritent leur salaire, car ils doivent adapter les règles à la situation. C'est effectivement un problème majeur.
Personne, je dis bien personne, n'a déterminé de règles d'engagement pendant la Seconde Guerre mondiale. Il fallait en tuer le plus possible, s'en débarrasser et s'emparer du territoire. Aujourd'hui, ce serait politiquement incorrect de déterminer ou d'énoncer une telle règle d'engagement.
C'est très frustrant pour les soldats, et ça le deviendra encore davantage, j'imagine, parce que plus aucun pays ne se soumettra désormais à des règles d'engagement de l'ONU ou de l'OTAN, selon moi.
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Je veux dire qu'ils ne sont pas en position d'influencer réellement la situation dans la plupart des missions.
Prenons l'exemple du Congo. Il y a actuellement 7 armées étrangères et 11 factions qui combattent au Congo. Si nous y envoyions un groupe tactique de 1 200 ou 1 400 membres, ils ne seraient qu'une goutte d'eau dans l'océan. La plupart du temps, ça leur prendrait des jours pour parcourir 10 ou 15 kilomètres en raison du manque d'infrastructures.
La très grande majorité, c'est terriblement choquant mais c'est la vérité... J'ai commandé des soldats du Nigeria, du Pakistan et du Bangladesh. Ce sont d'excellents soldats. Leur pays reçoit pour chacun 150 $ par mois, qui sont versés dans les coffres de l'État. Ils sont une source de revenus pour ces pays. Ces soldats sont donc nettement sous-payés — et j'en ai vécu les conséquences. Ils se tournent vers le marché noir, le trafic des femmes, la prostitution, et j'en passe. Tout ça est annoncé et raconté publiquement dans les médias. C'est un vrai cauchemar pour un commandant. À l'heure actuelle, grâce aux effectifs très nombreux, on a peut-être réussi à neutraliser une partie de la capitale du Congo. Voilà donc le genre de belles réussites que raconte l'ONU.
Il y a des endroits où les factions veulent de l'aide pour rétablir la paix. L'exemple parfait, et probablement le plus récent, est celui de l'Érythrée et de l'Éthiopie. C'était une mission de maintien de la paix traditionnelle au titre du chapitre 6. « Nous sommes fatigués de combattre. Venez s'il vous plaît vous interposer entre nos deux armées le long d'une frontière commune, et donnez-nous la chance de prendre un moment de répit. »
Oui, nous pouvons participer à ces missions. Mais la question est: quelle sera notre influence? Mais ce n'est pas seulement ça, car on ne nous demande pas des soldats; on nous demande de la logistique, des communications, des mesures juridiques. Quand nous envoyons ces gens à l'étranger, nous ne pouvons pas les former ici, parce que nous avons besoin de nos bataillons des services.
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Personnellement, je ne crois pas, parce que l'ONU est la somme de ses parties. Je le sais pour l'avoir entendu plusieurs fois. Le fait est qu'il y a cinq membres permanents au Conseil de sécurité qui dictent l'emploi des ressources au sein des Nations Unies. En 1945, ces cinq membres sont restés au Conseil de sécurité pour éviter qu'ils se battent les uns contre les autres, et non pour prendre des décisions brillantes et unanimes. Comme vous le savez, les décisions doivent être prises à l'unanimité, même si des recommandations ont été formulées pour exiger deux vétos plutôt qu'un parmi les cinq membres permanents. C'est l'organisme de contrôle. L'assemblée générale débloque ensuite les fonds. La bureaucratie de l'ONU se retrouve toujours devant un dilemme: recevoir des directives sans disposer des ressources nécessaires.
Les enclaves de sécurité en Bosnie sont un parfait exemple. Lorsque j'ai comparu comme témoin devant le comité du Congrès américain, on m'a demandé: « Général MacKenzie, combien faut-il de troupes pour défendre les enclaves de sécurité en Bosnie? » J'ai répondu « 125 000 ». « Pourquoi autant? » « Eh bien, comme une pierre lancée dans un lac calme, l'effet d'entraînement représente les tirs d'artillerie. Vous avancez de 30 milles, ils reculent de 30 milles. Il faut avancer 30 milles de plus pour faire cesser les tirs d'artillerie et réussir à pacifier tout le pays. »
Le général Briquemont, qui était l'un de mes disciples à Sarajevo, a déclaré: « Je suis d'accord avec le général MacKenzie; j'essaierais avec 70 000. » Boutros Boutros-Ghali, le secrétaire général, est comparu devant le Conseil de sécurité et a plaidé pour 27 500. Le Conseil de sécurité en a approuvé 12 500 et six mois plus tard, il en est arrivé 2 000. Ils sont donc revenus et ont réécrit le mandat afin d'indiquer que l'ONU ne défendrait pas les enclaves de sécurité mais que, par sa présence, elle découragerait les attaques contre les enclaves de sécurité, ce qui a eu pour résultat Screbenica.
Qui est responsable de Srebenica? L'ONU l'est à plus de 50 p. 100. Ça n'a pas changé. L'administration de l'ONU a les mains liées par le manque de ressources des pays donateurs, le Canada y compris, et le processus décisionnel de Neandertal des cinq membres permanents. Auparavant, il était interdit que les cinq membres permanents effectuent des opérations dans le cadre du mandat de l'ONU. Seuls les Britanniques étaient l'exception, comptant deux bases souveraines à Chypre: Akrotiri et Dhekelia. Mais maintenant ils participent aux opérations, ils ont donc encore plus d'intérêt et d'influence au sein du processus décisionnel et du Conseil de sécurité par rapport aux lieux des missions.
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Les C-17 sont incroyablement utiles. Il nous en faut plus. Mais on ne transporte pas une unité de combat munie d'équipement lourd par voie aérienne, mais par voie maritime. On la garde ensemble. On transporte son premier contingent. On transporte une compagnie d'infanterie. Croyez-moi, c'est cent fois mieux que c'était avant. Il est possible de transporter des équipes comme l'EICC.
Dans ma déclaration préliminaire, je n'ai pas parlé d'une des leçons que nous avons tirées: nos unités sont beaucoup trop petites. Même si vous diminuez le nombre d'unités, augmentez leur taille. Nous envoyons ce que nous appelons des groupements tactiques. Il s'agit en fait de groupes-bataillons. Nous envoyons les groupements tactiques en Afghanistan. Il faut un an pour qu'ils soient prêts, parce qu'aucune unité n'est assez grosse pour y aller seule. Il lui faut une compagnie de 200 soldats provenant d'un autre bataillon. Il lui faut un grand nombre de réservistes — que Dieu les bénisse —, nous n'y arriverions pas sans eux. Il lui faut toute sorte de choses pour créer une unité, et ensuite il faut l'organiser.
Vous n'avez pas encore d'unité à ce stade. Il vous faut un groupe de personnes faisant preuve de leadership. Elles doivent apprendre à se connaître. Elles doivent se faire confiance. Elles doivent tirer des leçons de l'Afghanistan. Ça prend un an. Ensuite, vous les envoyez sur le terrain pendant six mois. Elles reviennent, et plusieurs d'entre elles seront recyclées et y retourneront assez tôt.
Les unités ne sont pas suffisamment grosses. On a 1 100 soldats formés pour vivre sur un navire et préparés à être déployés à partir de chaque côte. Le processus décisionnel est ralenti dans le bâtiment là-bas. Pourquoi? À l'heure actuelle, quand le gouvernement du Canada décide d'envoyer des troupes quelque part, le CEMD déclare: « Eh bien, il faut affréter un navire, et le moins cher disponible se trouve dans l'océan Indien, il arrivera donc ici dans environ trois mois. Nos forces seront là dans environ quatre mois. »
Après le 11 septembre, quand sommes-nous arrivés? C'était en mars de l'année suivante. Nous n'avons pas la capacité stratégique. Nous avons les C-17 qui sont absolument essentiels pour le déploiement rapide du groupe de reconnaissance. Le transport d'une unité devrait se faire par bateau. Autre chose, lorsque les C-17 atterrissent, il leur faut la permission. Ils doivent obtenir l'autorisation d'atterrir en sol étranger. Lorsqu'un navire arrive dans des eaux internationales, il jette l'ancre au large de la côte ouest de l'Afrique ou ailleurs. Il peut attendre là jusqu'à ce que le Parlement prenne sa décision et lorsqu'il donne son aval, les unités peuvent être là en trois heures, pas en quatre mois.
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Je crois en effet qu'il s'agit d'une question que se posent beaucoup de personnes dans cette capitale.
Je tiens d'abord à dire que les ordres viennent d'en haut. Il faut que les plus hauts dirigeants du pays expliquent à la population. Je déteste le terme « populaire », mais je me réjouis du mouvement populaire le long de l'Autoroute des héros. Et cela ne signifiait pas grand chose pour nous jusqu'à ce que d'autres pays commencent à faire des documentaires à ce sujet et nous disent à quel point nous avons bien fait, et maintenant les États-Unis font la même chose et le Royaume-Uni d'une certaine manière. Ce sont des réactions de la population, ce qui est tout simplement fantastique. La mission n'est pas prise en compte et l'accent est mis sur les troupes, c'est fantastique.
Mais en ce qui concerne la façon de faire, ayant consacré du temps aux médias, je crois que s'ils mènent, ils mènent. Ma principale préoccupation en Afghanistan, c'est que lorsqu'un soldat est tué, il meurt sur le terrain, il meurt encore à la cérémonie d'adieu, il meurt à nouveau à Trenton, il meurt sur l'Autoroute des héros, et il meurt lorsqu'il est mis en terre, et le seul moment où nous pouvons voir le leadership des Forces canadiennes, c'est à ces stations de chemin de croix. La population associe donc notre leadership à la mort, et je crois que c'est malheureux.
Je n'ai pas répondu à votre question, mais je crois vraiment qu'il faut un peu plus d'ouverture. Vous et moi savons que les meilleurs ambassadeurs de l'armée auprès des médias sont les caporaux, les sergents et les jeunes lieutenants et capitaines, et on ne les entend pas souvent.
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Prédire l’avenir est toujours périlleux, j’en suis conscient, mais il est certain que nous devrions commencer par faire un virage important vers l’ouest, vers la zone du Pacifique, le Sud-Est asiatique, et ainsi de suite. Les retombées économiques en vaudront la peine pour le Canada. Nous voulons aussi maintenir une bonne relation fonctionnelle avec les États-Unis. Il est étonnant de voir l’effet incroyable exercé par la très faible contribution globale que nous apportons aux forces armées américaines.
Grâce à une invitation de Colin Powell, j’ai donné pendant 13 ans un cours de guerre interarmées pour officiers supérieurs à Montgomery, en Alabama, destiné à leurs généraux à deux et trois étoiles. Quand je mentionnais l’importance de nos effectifs, les généraux ne disaient rien et attendaient, sûrs que c’était une plaisanterie. Ils n’en revenaient pas. Ils me disaient ensuite qu’on voit les Canadiens partout. Je leur répondais que oui, mais en assez petit nombre. Et ils répétaient que les Canadiens sont malgré tout omniprésents. Ces généraux avaient 800 000 hommes et se plaignaient de la pénurie de ressources.
Si le gouvernement décide que nous devons prendre part à une coalition — que ce soit l’ONU, l’OTAN ou une coalition de partenaires pour une même cause, laquelle me plaît parce qu’elle est constituée pour régler une crise et qu'il y a un changement à régler —, nous devons pouvoir réagir avec toute la flexibilité voulue. Pour cela, il nous faut des unités de la marine, des forces aériennes et de l’armée suffisamment larges pour qu’on n’ait pas à les combiner pendant un temps en une troupe hétéroclite avant qu’elle se transforme en une unité de combat. Si nous avons cela, et nous sommes bien près de l’avoir, et si nous ne permettons pas que nos forces s’atrophient — nous avons la mauvaise habitude de laisser nos forces s’atrophier à la suite d’un engagement opérationnel —, nous continuerons à apporter une contribution valable.
Je ne dirai rien au sujet du Moyen-Orient, parce que la situation y est tellement explosive que nous devons simplement nous mettre en attente d’une coalition de partenaires pour une même cause, puis décider au cas par cas d'y participer ou non.
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Deux choses peuvent arriver après le bilan de l'OTAN. Soit l'OTAN survit et change...
L'une des recommandations du Canada est la suivante: que les décisions au plus haut niveau politique à Bruxelles soient prises à l'unanimité. Ce que nous ferons, où nous irons, tout doit être unanime. Puis, pour les niveaux inférieurs, ceux qui sont plus près du terrain, c'est la majorité qui doit l'emporter. Il s'agit d'un changement tout à fait simple mais qui restructurerait totalement la chaîne de commandement de l'OTAN et la rendrait plus efficace. C'est facile à dire mais difficile à imposer.
Dans une province comme Kandahar, les directives du commandant ne peuvent être remises en cause par tout le monde.
C'est une des solutions: l'OTAN devra alors activement écouter ce que les pays comme le nôtre ont à dire, et plus particulièrement ce que l'étude de Madeleine Albright suggère quant à la restructuration de l'OTAN. De cette façon, l'OTAN se modifiera de lui-même et, on le souhaite, cessera de prendre de l'expansion.
Après la débâcle en Géorgie, pouvez-vous imaginer que quelqu'un ait confiance en l'OTAN pour venir les secourir, même le Canada? Ils ne pouvaient même pas s'y rendre. Pendant qu'ils combattaient une insurrection relativement mineure en Afghanistan, nous devions faire face à des Soviétiques qui s'introduisaient dans un pays qui aurait pu être un pays de l'OTAN. Pensez-vous que nous aurions attaqué la Russie à cause de cela? Allons, soyons sérieux.
Ou, l'OTAN échoue. Il se désintègre à cause de l'Union européenne qui resserre ses liens et qui revient en force. Mais bon, ils ont aussi leurs problèmes. L'Allemagne, la France et le Royaume-Uni ne sont pas toujours d'accord sur la façon de fonctionner. Si cela ne réussit pas, vous allez alors reconnaître ces noms: je verrai quelque chose comme une coalition de pays volontaires: les États-Unis, le Canada, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et bizarrement un certain nombre des pays satellites nouvellement libérés de l'ancienne Union soviétique qui ont pris beaucoup d'espace en Afghanistan. C'est ce que j'anticipe.
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Ce qu'il y a d'ironique avec les Nations Unies, c'est que tout ce qui a été ajouté depuis 1945 — le UNHCR, l'UNICEF, l'OMS, l'Organisation mondiale de la santé... je ne sais pas si vous vous rappelez que le maire Lastman de Toronto ne connaissait pas l'OMS. Qui sont ces gens de l'OMS qui traitent de la crise du SRAS?
De toute façon, ce que je voulais dire c'est qu'ils sont brillants. Bien sûr, les gens qui travaillent pour les droits de la personne ont certaines difficultés parce que la Libye occupe la présidence, mais au bout du compte, toutes ces institutions — Dieu sait que j'ai beaucoup travaillé avec l'UNICEF et l'UNHCR — sont extraordinaires et font de l'excellent travail. Ils sont la raison d'être des Nations Unies, qui avaient comme objectif de nous éviter les affres d'une troisième guerre mondiale, ce qu'ils ont réussi je crois. Nous n'avons pas eu de troisième guerre mondiale, Dieu merci.
Pendant la guerre froide, leur capacité de gérer des situations à Chypre et au Moyen-Orient, qui étaient à l'époque assez bénignes, était tout à fait adéquate. C'est l'après-guerre froide, où on voit surgir des factions partout dans le monde, des factions internes qui s'entre-déchirent.
Michael Ignatieff l'explique mieux que quiconque dans son livre Blood and Belonging. Une fois que l'on a retiré le ciment qui tenait ces deux groupes ensemble — l'Union soviétique et l'OTAN menés par les États-Unis —, une fois que ce ciment a disparu avec le démantèlement de l'Union soviétique, toutes les tensions ethniques, religieuses, territoriales et historiques ont explosé. En Yougoslavie, la situation a été de loin la pire parce qu'il y avait des dissensions ethniques et religieuses.
C'est donc que les Nations Unies jouent un rôle très utile. Elles ont de sérieux problèmes en ce qui concerne leurs responsabilités en matière de sécurité, mais c'est parce qu'elles ont les mains liées par les cinq membres permanents. Vous êtes probablement au courant que les ambassadeurs du Japon, de l'Inde et du Brésil qui, selon moi, sont des pays qui se qualifient amplement pour le titre de membre permanent, ont voyagé à travers le monde pendant un an pour solliciter le soutien de leur candidature à la permanence. Le rapport, qui a été publié il y a environ un an et demi, a déclaré que la question était compliquée mais qu'on allait sûrement reconsidérer la question dans 15 ans. Je n'ai jamais vu ça de ma vie: dans 15 ans.
Ces cinq membres permanents ont une emprise bien solide, non seulement parce qu'ils ont le droit de veto sur les questions de sécurité, mais parce que, très peu le savent, ils ont également le veto des procédures au sein du conseil de sécurité, ce qui signifie l'admission des nouveaux membres. Il n'en faut qu'un pour rejeter une candidature et c'est ce qu'ils font chaque fois.
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Je dois être réaliste. Lorsque j'ai pris une retraite anticipée quelques années plus tôt, en 1993, nous étions environ 85 000. C'est alors qu'a débuté la décennie de noirceur et qu'on a commencé à racheter les gens.
Dans l'idéal, je souhaiterais qu'on soit probablement environ 100 000, mais 85 000 me satisferaient pleinement. L'armée se diviserait alors en unité assez grande pour être déployée avec très peu d'augmentation. Nos forces navales ont une réputation qui dépasse de loin leurs ressources, parce qu'elles sont capables de commander et de piloter des navires étrangers. Les militaires étrangers, notamment les Américains, nous font confiance. Nous possédons des commandants expérimentés dans ce secteur. Les forces aériennes ont la réputation d'avoir des habiletés extraordinaires, et maintenant nous en sommes à réduire les heures de vol, à garder les aéronefs au sol, etc.
J'imagine que mon moment était probablement très bien choisi, parce que je vous dirais de revenir à la façon dont les choses fonctionnaient et à ce que nous faisions à l'époque avec moins de moyens. Nous avions un vaste contingent d'armée de terre et de l'air en Europe, et ces militaires devaient nous revenir. Malheureusement quelque part au milieu de l'Atlantique ils se sont évaporés et tout d'un coup nous avons perdu ces postes. C'est après que l'on a commencé à réduire les effectifs.
Je sais aussi que chacun d'entre vous aimerait posséder ce que les militaires souhaitent avoir, mais le fait est que cela prend tellement de temps, presque 10 ans, au Canada pour passer de l'étape où on dessine les plans à l'étape où l'on conduit ou pilote la machinerie. Ce dont les militaires ont réellement besoin sont des équipements que l'on peut acheter sur le champ. D'une certaine façon, nous sommes indemnisés ici au Canada pour cette question, mais nous devons être en mesure d'acheter directement, ce que nous avons été en mesure de faire en Afghanistan avec les pièces d'artillerie, les véhicules, etc. Nous avions un besoin et pouf il était comblé. Si nous devrions nous tourner vers le Canada pour remplacer ces pièces, elles seraient arrivées dans 10 ans.
Les Travaux publics et le MDN ont un réel problème à régler. Et je sais qu'il y a eu des milliers d'études de faites, mais si je pouvais accélérer le processus de procuration avec une baguette magique, ce serait une de mes priorités.