:
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs, les membres du comité.
D'abord, je vous remercie de me donner l'occasion de vous rencontrer si tôt après mon entrée en fonction.
Je me présente: Robert Décary. J'ai 66 ans. Je suis juge à la retraite de la Cour d'appel fédérale et, depuis le 18 juin dernier, commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications. Je suis juriste de formation. D'expérience récente, j'ai été juge d'appel pendant une vingtaine d'années. Je suis montréalais de naissance, gatinois d'adoption, londonien d'éducation.
J'ai consacré une bonne partie de ma carrière à la vie publique. J'ai été adjoint pendant deux ans de l'honorable Mitchell Sharp, alors qu'il était secrétaire d'État aux Affaires extérieures. J'ouvre une parenthèse pour dire que c'est avec une certaine émotion que j'ai franchi tout à l'heure le seuil de l'édifice de l'Est. En effet, il y aura 40 ans en décembre prochain, j'occupais mes nouvelles fonctions avec M. Sharp et mon bureau se trouvait au premier étage de l'édifice de l'Est. Il y a donc un peu d'émotion liée à ma présence ici aujourd'hui. Je ne suis pas revenu ici depuis 38 ans.
J'ai ensuite été, pendant un an, chef de cabinet du sous-secrétaire d'État aux Affaires culturelles, M. Yvon Beaulne. J'ai pratiqué le droit dans un cabinet de Montréal. Je suis revenu à Ottawa comme directeur adjoint de la recherche à la Commission de l'unité canadienne, la commission Pépin-Robarts. J'ai ensuite pratiqué dans un cabinet de Hull et j'ai combiné cette pratique à une carrière de chroniqueur juridique et politique en page éditoriale du Devoir et de La Presse et à plusieurs émissions d'affaires publiques de Radio-Canada et de TVA. Je suis également l'auteur de nombreux ouvrages et articles de revues.
Ma pratique d'avocat à Hull m'a mené plus souvent qu'aucun autre avocat québécois, à l'époque, devant la Cour suprême du Canada où j'ai agi pendant près de 10 ans comme correspondant du procureur général du Québec et d'une trentaine de cabinets d'avocats.
[Traduction]
En mars 1990, l'honorable Kim Campbell, alors ministre de la Justice, m’a nommé à la Cour d'appel fédérale, le deuxième tribunal en importance au Canada. J'ai instruit quelque 2 060 affaires et rédigé des motifs dans un peu plus de 700 d'entre elles. J’ai siégé dans toutes les provinces canadiennes et dans les Territoires du Nord-Ouest, de St. John's à Vancouver, en passant souvent par Montréal, Ottawa et Toronto.
Il est peu de domaines du droit fédéral qui aient échappé à mon attention. Outre mon pain quotidien, formé de questions relatives à l'immigration, l'assurance-emploi et l'impôt sur le revenu, j'ai eu le privilège, notamment, d'être le premier juge d'appel à se pencher sur le statut de la Loi sur les langues officielles, sur la validité constitutionnelle de la Loi antiterroriste et sur la portée de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.
J’ai pris ma retraite en juillet 2009, avec comme seul projet à l’époque de travailler comme bénévole aux Jeux olympiques de Vancouver. On m'a assigné l'agréable tâche d'adjoint aux dignitaires canadiens, ce qui m’a permis de servir de guide au premier ministre Jean Charest ainsi qu'au premier ministre Danny Williams
Rassurez-vous, Dieu merci pour moi, je ne leur ai pas servi de guide en même temps.
Des voix: Oh, oh!
[Français]
L'hon. Robert Décary: Le 18 juin dernier, le , l'honorable Peter MacKay, m'a nommé commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications. Je vous avoue que c'est avec une appréhension et une trépidation tout à la fois que j'ai accepté de faire un retour — à temps partiel, faut-il le préciser — à la vie publique. Appréhension, parce que je devrai chausser les souliers des grands juristes que furent les juges Antonio Lamer, Claude Bisson, Charles Gonthier et Peter Cory. Trépidation, parce que la conciliation entre le droit des Canadiens au respect de leur vie privée et le besoin de collecte de renseignements étrangers aux fins d'assurer la sécurité du Canada constitue un défi absolument fascinant.
Mon rôle, vous le savez, est établi dans la Loi sur la défense nationale. Il consiste, de manière générale, à examiner les activités du CST pour en contrôler la légalité, à effectuer toute enquête que j'estime nécessaire en réponse à une plainte relative au CST, et à informer le ministre de la Défense nationale et le procureur général du Canada de toute activité du CST que j'estime ne pas être conforme à la loi.
[Traduction]
Pour comprendre mon rôle, il faut d'abord bien comprendre le mandat du CST, ainsi que ses limites. Depuis la promulgation de la Loi antiterroriste en décembre 2001, les fonctions du CST sont essentiellement les suivantes — vous comprendrez que je les réduis ici à leur plus simple expression —: faire la collecte de renseignements électromagnétiques étrangers; aider à protéger les renseignements électroniques et les infrastructures d'information importantes pour le gouvernement du Canada; et apporter un soutien technique et opérationnel aux organismes fédéraux chargés de l'application de la loi et de la sécurité, comme la Gendarmerie royale du Canada et le Service canadien du renseignement de sécurité.
[Français]
En ce qui a trait aux deux premières de ces fonctions, les activités du CST sont sujettes à trois limites législatives de la plus haute importance. En ce qui concerne la première, le CST n'est pas autorisé à exercer des activités qui viseraient des Canadiens, où qu'ils se trouvent dans le monde, non plus que des personnes qui se trouvent au Canada.
En ce qui concerne la deuxième limite, comme il peut arriver que, dans l'exercice de ces deux activités, le CST intercepte fortuitement une communication destinée au Canada ou en provenance du Canada, ou encore obtienne des informations qui concernent des Canadiens, et comme il peut arriver que ces informations se révèlent être essentielles aux affaires internationales, à la défense ou à la sécurité, la loi permet qu'elles soient utilisées et conservées, mais seulement si des mesures de protection de la vie privée des Canadiens sont en place lors de leur utilisation et conservation.
En ce qui concerne la troisième limite, pour encadrer de façon formelle l'interception fortuite de communications privées, la loi exige qu'elles soient autorisées expressément par le une fois qu'il est convaincu que sont remplies certaines conditions définies par la loi. Il s'agit là du processus connu sous le nom d'« autorisation ministérielle ».
[Traduction]
Dans ce contexte, ma tâche est d'abord de m'assurer que le CST, dans sa façon d'exercer ses activités, ne vise que des entités étrangères hors du Canada; de m'assurer ensuite que les activités que le CST mène en vertu d'autorisations ministérielles sont celles autorisées par le ministre et de faire rapport à ce dernier à cet égard; de m'assurer enfin qu'eu égard à toutes les activités qu'il mène, le CST a mis en place et applique effectivement des mesures de protection des renseignements personnels des Canadiens.
En ce qui a trait à sa troisième fonction — elle d'aider les organismes fédéraux d'exécution de la loi et de sécurité —, le CST agit alors comme agent de l'organisme en question, et ses activités sont sujettes aux mêmes restrictions que celles auxquelles l'organisme est lui-même assujetti en vertu des lois qui lui sont applicables. Mon rôle consiste, là encore, à m'assurer que les activités du CST sont menées conformément à la loi. Le contrôle de la légalité des activités de ces autres organismes est confié à d'autres entités, tels le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada.
Chaque année, le commissaire remet au ministre un rapport sur l'exercice de ses activités, rapport que le ministre est tenu de déposer au Parlement. Par ailleurs, en cours d'année, le commissaire remet au ministre des rapports classifiés qui l'informent du résultat des examens des activités du CST. Je tiens à préciser que le Bureau du commissaire est devenu, il y a deux ans, un organisme autonome et indépendant doté de son propre crédit parlementaire.
[Français]
Monsieur le président, mesdames et messieurs, au moment de l'adoption de la Loi antiterroriste, en décembre 2001, le législateur se trouvait devant un dilemme. Au Canada, chacun a un droit quasi constitutionnel au respect de sa vie privée. Chacun a aussi un droit constitutionnel à la sécurité de sa personne. Par ailleurs, l'État a l'obligation de protéger l'un et l'autre de ces droits individuels et d'assurer aussi la sécurité du pays. Ces droits et obligations ne sont pas faciles à réconcilier: que serait en effet le droit à la vie privée, que serait le droit à la sécurité de la personne dans une société dont la sécurité ne serait plus acquise et qui ne serait plus libre et démocratique? Dans la Loi antiterroriste, le Parlement s'est livré à un effort de réconciliation délicat. Il a adopté une solution qu'il estimait juste, nécessaire et appropriée dans les circonstances, aux fins de permettre à l'État d'assurer sa sécurité et celle des Canadiens tout en respectant le droit de chacun à sa vie privée. Il a confié au commissaire que je suis, eu égard aux activités du CST, la mission de veiller à ce que le CST se conforme en tout temps aux obligations que lui imposent la partie V.1 de la Loi sur la défense nationale, telle qu'elle a été modifiée par la Loi antiterroriste, et toute autre loi canadienne y compris la Charte des droits et libertés. Le Parlement a investi le commissaire de pouvoirs extraordinaires pour s'acquitter de ses fonctions. Je n'hésiterai pas, au besoin, à les exercer.
Vous me permettrez, en terminant, de saluer le travail formidable de l'équipe qui m'entoure, petite en nombre mais grande en qualité. Ce sont des gens compétents, travailleurs, consciencieux, dévoués à leur mission, qui ont fort habilement facilité mon entrée dans ce monde fascinant mais combien complexe des renseignements étrangers. Je sais gré aussi au chef du CST, M. John Adams, qui a mis en place toute une série de séances d'information, lesquelles m'ont permis de mieux comprendre le rôle et les activités du CST. Je suis toutefois conscient que mon apprentissage ne fait que commencer.
Je vous remercie. J'aurai dorénavant le plaisir de répondre à vos questions.
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Merci, monsieur le président.
Le président vous a déjà remercié de votre présence parmi nous, et, bien entendu, je vous remercie également de tout coeur d'avoir accepté ce rôle. Je souhaite vous faire part de notre reconnaissance, au nom de notre gouvernement ainsi qu'en celui de nos collègues du caucus.
La simple lecture de votre curriculum vitae est une tâche impressionnante. Je ne crois pas que nous ayons de questions pertinentes qui pourraient d'aucune manière nous permettre de juger de votre compétence pour occuper ce poste; je pense tout de même qu'il serait utile, pour moi à tout le moins, que vous nous donniez quelques détails sur les divers organismes qui seraient touchés —, la GRC et, manifestement, la Défense nationale —, sur l'ampleur de tous les divers types de renseignements que vous examineriez.
Dans votre déclaration, vous avez affirmé ce qui suit:
Mon rôle, vous le savez, est établi dans la Loi sur la défense nationale […] pour en contrôler la légalité, à effectuer toute enquête que j'estime nécessaire en réponse à une plainte relative au CST […]
Je vous poserais la question suivante: étant donné que le CST a été mis sur pied en 2001, pourriez-vous nous donner une idée, un chiffre approximatif, du nombre de plaintes en cours de traitement à l'heure actuelle ainsi que du nombre de plaintes réglées pendant une année donnée?
Au paragraphe suivant, vous dites:
[…] les fonctions du CST sont, essentiellement, les suivantes (vous comprendrez que je les réduise ici à leur plus simple expression): a) faire la collecte de renseignements électromagnétiques étrangers; b) aider à protéger les renseignements électroniques et les infrastructures d'information importantes pour le gouvernement du Canada;
Il y a quelques années, on a tenté de prendre le contrôle de MacDonald Dettweiler, une société privée. Notre gouvernement a essentiellement rejeté cette acquisition en s'appuyant sur l'importance d'une partie de la technologie et de l'information que possédait l'entreprise. Je sais que vous n'occupiez pas le poste à l'époque, mais est-ce le genre de situation où le CST ou vous-même auriez prodigué des conseils au gouvernement, ou quelque chose du genre?
Vous pourriez peut-être me donner des détails. À la page 3, vous affirmez encore:
[…] chacun a un droit quasi constitutionnel au respect de sa vie privée. Chacun a aussi un droit constitutionnel à la sécurité de sa personne.
Je ne suis pas avocat. Je ne suis qu'un simple garçon de ferme de Lacombe, en Alberta. Pourriez-vous m'expliquer ce que signifie l'expression quasi constitutionnelle?
:
Je ferai de mon mieux en quelques minutes.
[Français]
Vous devriez d'abord lire le texte de la loi qui confère ses pouvoirs au CST. Vous constateriez d'abord que ce dernier recueille des renseignements étrangers. Par définition, il ne peut pas rechercher de l'information sur un Canadien, que celui-ci soit au Canada ou ailleurs dans le monde. Quand on parle des activités du CST, il faut donc toujours garder en tête le fait qu'elles sont extrêmement limitées sur le plan des objectifs et que le nombre d'interceptions reliées à des Canadiens est très restreint. Je profite de l'occasion pour enchaîner directement sur la question des plaintes.
Depuis la fondation du Bureau du commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications, seulement deux plaintes ont été portées à notre attention, et aucune des deux n'a justifié la tenue d'une audience publique. Très peu de renseignements concernant les Canadiens sont acheminés au CST. De plus, ceux-ci sont si bien contrôlés, à mon avis, qu'ils peuvent susciter très peu de plaintes.
Quant aux structures informatiques du gouvernement, ce dernier a décidé que certaines installations étaient plus critiques que d'autres. Il veut s'assurer que son système d'ordinateurs, notamment en matière de défense et d'affaires extérieures, est à l'abri de toute attaque cybernétique. Il appartient au CST de trouver les moyens techniques nécessaires pour prévenir ces attaques. Ce n'est pas un domaine où j'aurai à intervenir beaucoup, en tant que commissaire, parce qu'il est peu probable que ces attaques concernent des Canadiens ou la vie privée de Canadiens. À mon avis, le chef du CST, M. Adams, pourrait répondre à cette question mieux que moi.
Pour ce qui est de la distinction entre les droits quasi constitutionnels et constitutionnels, la Charte canadienne des droits et libertés confère à chaque Canadien le droit à la sécurité. Ce droit est inscrit dans la Constitution. C'est pourquoi je dis qu'il est de nature constitutionnelle. Le droit à la vie privée, pour sa part, est consacré par la Loi sur la protection des renseignements personnels. Les tribunaux ont déclaré que c'était un droit quasi constitutionnel. Il ne comporte donc pas la même qualité pour exercer une action, mais dès qu'il est en cause dans une affaire traitée par un tribunal, celui-ci lui donne un statut à peu près équivalent. C'est ce que je faisais quand j'étais juge et c'est ce que je vais continuer à faire en tant que commissaire.
:
... et c'est Ken Dryden qui gardait les buts pour le Canada. J'ai toujours été fâché contre lui parce que, quand j'étais jeune, je rêvais d'être le premier avocat à jouer dans la LNH.
Des voix: Oh, oh!
Robert Décary:Je ne crois pas que M. Dryden soit ici aujourd'hui.
[Français]
Il est important de préciser que je fais trois sortes de rapports. Il y a le rapport annuel que vous avez ici et qui, évidemment, ne contient aucune information classifiée. Vous allez remarquer que les 55 rapports auxquels vous avez fait référence ne sont pas identifiés à proprement parler de façon très précise, et, évidemment, c'est important pour les questions de sécurité.
Le rapport annuel est un rapport dans lequel je dis au ministre ce que j'ai fait et ce qu'a fait mon équipe durant l'année. Je lui dis quelle sorte d'examen des activités du CST j'ai fait durant l'année. C'est un rapport d'information, finalement, beaucoup plus qu'autre chose.
Les rapports auxquels fait allusion le rapport annuel sont des rapports privilégiés qui concernent une activité précise du CST que j'ai examinée ou que mes officiers ont examinée au cours de l'année. Dans ces rapports, on va au fond des choses. Notre examen se fait sur place, à même les ordinateurs du CST. Nous examinons comment ils obtiennent leurs informations, comment ils évaluent si une information concerne une communication privée avec un Canadien et comment ils conservent et utilisent cette information. On examine leurs politiques. On a accès à tous leurs documents.
À l'aide de cet examen, je suis en mesure de dire au ministre si oui ou non, à mon avis, le CST s'est conformé à la loi. Jusqu'à maintenant, dans l'histoire du CST, à chaque occasion, la conclusion a été que, oui, il y a eu conformité à la loi, mais il y a des améliorations à apporter au système. Évidemment, ce ne sont pas des choses dont je peux parler publiquement. Toutefois, si on est d'avis qu'une policy du CST pourrait être améliorée, on fait une recommandation en ce sens.
Jusqu'à présent, comme je le dis dans le rapport annuel, 94 p. 100 des recommandations qu'on a faites ont été suivies par le CST. Pour ce qui est des 6 p. 100 de recommandations restantes, ce n'est pas qu'elles n'ont pas été suivies, c'est simplement que les circonstances ont changé, et il n'y a pas eu lieu d'y donner suite.
Le troisième point porte sur la non-compliance. C'est très important. Ce n'est pas du tout relié aux rapports. Si j'arrivais à la conclusion, en examinant une activité du CST, qu'il y a une infraction à la loi, mon devoir serait alors d'envoyer un avis immédiatement au ministre de la Défense nationale et au procureur général du Canada, les informant qu'il y a eu manquement à la loi et, évidemment, les invitant à entreprendre les démarches qui s'imposent.
Moi, je ne peux évidemment pas savoir quelles démarches s'imposeraient alors, mais cela ne s'est encore jamais produit dans l'histoire du bureau.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, bonjour. Je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à me faire entendre aujourd'hui.
Je suis ravi d'avoir l’occasion de vous parler de ma nomination à la présidence de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire, CEPPM.
C'est vraiment un honneur pour moi d'avoir été nommé président de cette commission par la gouverneure en conseil le 14 mai dernier, et d’avoir été membre de la commission depuis septembre 2007. Juste avant ma nomination en mai dernier, j'occupais par intérim ce poste depuis le 11 décembre 2009.
Je crois que vous avez tous reçu une copie de mon CV. J’ai l’intention de décrire le rôle et les fonctions du président de la CEPPM, ainsi que de la commission dans son ensemble, et de faire un survol de mes antécédents et de mon expérience.
Le président et les autres membres de la commission sont nommés conformément à l'article 250.1 de la Loi sur la défense nationale, et exercent leurs fonctions à plein temps ou à temps partiel. En général, la fonction de président s'exerce à plein temps et celle de membre, à temps partiel. À l'heure actuelle, la commission compte trois membres, dont moi-même. En plus de m'occuper personnellement des dossiers de plaintes, c’est à moi qu’il revient de décider de déléguer et de distribuer les tâches aux autres membres. En tant que président de la commission, j'en suis également le premier dirigeant et le responsable de la supervision et de la direction des travaux et du personnel.
La CEPPM est chargée par le Parlement d'assurer une surveillance civile indépendante de la police militaire canadienne en faisant enquête sur les plaintes relatives à la conduite des policiers militaires ou à l'ingérence présumée dans les enquêtes de la police militaire. La CEPPM assure la surveillance civile de la police militaire canadienne en s'occupant des plaintes qui portent sur la conduite de la police militaire et sur son ingérence.
La plupart des plaintes portant sur la conduite de la police militaire sont d'abord acheminées aux fins d'enquête et de décision au chef de la police militaire des Forces canadiennes, le grand prévôt des FC. La CEPPM examine le traitement des plaintes par le grand prévôt et mène ensuite sa propre étude ou enquête, à la demande d'un plaignant mécontent. Dans le cas de plaintes portant sur l'ingérence, la CEPPM a le pouvoir exclusif de faire enquête.
Exceptionnellement, le président peut juger qu'il est dans l'intérêt du public d'ouvrir une enquête, avec ou sans audiences, sur une plainte, outrepassant ou suspendant du même coup les obligations d'enquête du grand prévôt des Forces canadiennes.
La CEPPM tient actuellement une audience d'intérêt public sur une plainte concernant un présumé manquement de certains policiers militaires à leur devoir de faire enquête sur le transfert de détenus afghans aux forces de sécurité de l'Afghanistan au mépris d'un risque présumé de torture. Étant donné que je suis membre du panel saisi de cette plainte, vous comprendrez qu'il serait inconvenant pour moi de discuter de ce cas hors du cadre de l'audience prévue à cette fin.
En tant que militaires et professionnels chargés d'appliquer les lois, les policiers militaires assument une fonction importante et exigeante au sein des Forces canadiennes. Je suis honoré de participer à l'importante tâche de surveiller la police militaire.
Certes, nous traitons d'allégations de mauvaise conduite, mais la CEPPM n'est pas un organisme disciplinaire; cette responsabilité incombe à d'autres organismes des Forces canadiennes.
À mon avis, la procédure de plainte établie par la partie IV de la Loi sur la défense nationale, du fait qu'elle donne une perspective extérieure sur la résolution des plaintes, est un moyen d'encourager l'amélioration constante du professionnalisme, de l'intégrité et de l'indépendance de la police militaire et d'assurer la confiance envers celle-ci. Après tout, mon expérience professionnelle m'a enseigné que, au bout du compte, le bon fonctionnement de la police dépend de la confiance qu'elle inspire à la collectivité qu'elle sert.
Quant à mes compétences pour la présidence de la CEPPM, évidemment, je vous laisse en juger, vous, honorables membres du comité, ainsi que d'autres. Outre le fait d'avoir été récemment président et membre de la commission, je possède une vaste expérience de la police civile, à tous les niveaux. Je compte 37 ans de service à la police de Windsor, en Ontario, dont neuf en tant que chef de police, de 1999 à 2008. Pendant ces années, j'ai travaillé à tous les échelons et dans toutes les divisions de ce corps policier. Vous verrez également dans mon CV que j'ai suivi de nombreuses formations avancées dans divers domaines, au Canada et aux États-Unis. J'ai deux baccalauréats ès arts — l'un en sociologie et l'autre en criminologie — de l'Université de Windsor.
J'ai toujours cherché à participer activement à ma collectivité. C'est pourquoi, en plus de faire partie de diverses fondations caritatives et organisations de services, j'ai adhéré des associations de chefs de police à l'échelle internationale, nationale et provinciale. J'ai d'ailleurs été président de l'Association des chefs de police de l'Ontario.
Je suis toujours membre de cette association et de son équivalent fédéral, avec lesquels je maintiens des relations. Je fais également partie du conseil de direction de l'Association canadienne de surveillance civile du maintien de l'ordre, la CACOLE.
En reconnaissance de mon travail au sein de la police, j'ai été nommé officier de l'Ordre du mérite des corps policiers et j'ai aussi reçu la Médaille du jubilé de la Reine. Bien que je n'aie aucune formation juridique, j'ai déjà mené des audiences judiciaires, étant donné que j'ai été poursuivant et agent d'audience dans des tribunaux disciplinaires de la police, comme le prévoit la Loi sur les services policiers de l'Ontario. De plus, j'ai une grande expérience du système de justice pénale en tant qu'enquêteur et officier responsable à tous les niveaux des services d'enquête pénale.
J'ai également accès à des avis juridiques professionnels du conseiller juridique de la CEPPM. En outre, comme je l'ai déjà mentionné, la CEPPM n'a tenu que deux audiences d'intérêt public jusqu'à présent. La vaste majorité des cas dont elle est saisie sont réglés au moyen d'enquêtes et de rapports sans audience, et les conclusions et recommandations de la CEPPM ne sont pas contraignantes.
De par sa nature, la commission a pour fonctions de faire enquête, et non pas de porter des accusations ni de rendre des décisions. De plus, nous sommes chargés par le Parlement, comme le prévoit l'article 250.14 de la Loi sur la défense nationale, de régler les plaintes de manière aussi informelle et avec autant de célérité que possible.
Je serai enchanté de répondre à vos questions. Je vous remercie.
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Merci, monsieur Harris.
Je ne vais pas faire de commentaires précis portant sur l'audience publique actuelle, mais je parlerai des enjeux qui portent sur les questions d'expertise juridique, si vous le permettez.
D'après la manière dont ces commissions, et particulièrement la nôtre, sont structurées — il s'agit d'information publique: si vous veniez dans l'une de nos salles d'audience, vous le constateriez de vos propres yeux —, le conseiller juridique de la commission est en réalité mon conseiller juridique, aux fins de cette audience publique. Le conseil de la commission compte plusieurs avocats. Ils sont quatre ou cinq, et le conseiller juridique principal est M. Ron Lunau. Ce sont eux qui fournissent et produisent les éléments de preuve dans le cadre d'une audience publique. Ce pourrait être celle-là, ou ce pourrait en être une autre. Ce sont eux qui produisent les éléments de preuve.
Pour revenir aux quatre avocats qui forment le conseil de la commission... Que je sois avocat ou pas, je me tournerais vers mon propre avocat général pour obtenir les conseils qui pourraient être nécessaires sur différentes questions. La commission d'examen des plaintes concernant la police militaire a la très grande chance d'avoir un avocat général très expérimenté, ainsi que d'autres avocats.
Que je sois avocat en exercice ou pas, à titre personnel, je leur demanderais conseil. Et c'est ce que je fais. Je suis très chanceux d'avoir ce genre d'expertise autour de moi, tant à la commission qu'à l'extérieur, en plus de ma propre expérience des rouages d'un tribunal ou d'une salle d'audience.
Nous ne comparaissons même pas devant la Cour fédérale, pas plus que notre conseiller juridique. Lorsqu'une requête est présentée à la Cour fédérale, que la personne soit représentée par un avocat ou pas, nous embauchons un conseil fédéral indépendant qui comparaîtra devant la Cour fédérale en notre nom. Je ne comparaîtrais pas, même si j'étais avocat.