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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 148 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 mai 2019

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

     Bonjour à tous. Nous en sommes à la 148e séance du Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique, conformément aux sous-alinéas 108(3)h)(vi) et (vii) du Règlement, étude de la publicité électorale sur YouTube.
    Nous accueillons aujourd’hui, de Google Canada, Colin McKay, chef, Politiques publiques et relations gouvernementales. Nous accueillons également Jason Kee, conseiller en politiques publiques et relations gouvernementales.
    Avant que nous ne commencions, j’aimerais annoncer à la salle que le communiqué a été annoncé à 15 h 30, de sorte qu’il est diffusé en ce moment même, en ce qui concerne la question dont nous avons traité mardi, alors surveillez-le bien.
    Nous allons commencer par M. McKay.
     Merci, monsieur le président, et merci beaucoup de m’avoir invité à m’adresser à vous aujourd’hui.
    J’aimerais commencer par une observation. D’abord et avant tout, nous tenons à préciser que nous estimons qu’il y a une inexactitude dans le texte de la motion à l’origine de cette étude. Plus précisément, la motion nous invitait à expliquer notre décision de ne pas faire de publicité pendant les prochaines élections et notre refus de nous conformer au projet de loi C-76. Notre décision de ne pas accepter de publicité politique réglementée ne constitue pas un refus de nous conformer au projet de loi C-76 et à la Loi électorale du Canada, mais elle a plutôt été prise précisément pour nous y conformer.
    Des élections libres et justes sont essentielles à la démocratie, et nous, chez Google, prenons très au sérieux notre travail de protection des élections et de promotion de l’engagement civique. En ce qui concerne la cybersécurité, nous avons mis au point plusieurs produits qui sont offerts gratuitement aux campagnes politiques, aux organismes électoraux et aux organes de presse. Il s’agit, comme je l’ai déjà mentionné, du Projet Shield, qui utilise l’infrastructure de Google pour protéger les organisations contre les attaques par déni de service et de notre programme de protection avancé, qui protège les comptes de personnes à risque d’attaques ciblées en mettant en œuvre l’authentification à deux facteurs, en limitant le partage de données entre les applications et en prévoyant une autorisation spéciale au titre des demandes de recouvrement de comptes. Cela va au-delà des protections robustes que nous avons déjà intégrées à nos produits.
    Nous avons également entrepris d’importants efforts pour lutter contre la propagation intentionnelle de la désinformation dans les moteurs de recherche, sur les sites d'actualités, sur YouTube et dans nos publicités. Ce travail repose sur trois piliers fondamentaux: insister sur la qualité, lutter contre les mauvais joueurs et donner un contexte aux personnes.
    Je vais maintenant céder la parole à mon collègue.
     Nous insistons sur la qualité en identifiant et en classant les contenus de haute qualité dans les moteurs de recherche, les sites d'actualités et sur YouTube afin de fournir aux utilisateurs l’information qui fait le plus autorité en réponse à leurs requêtes de nouvelles. Cela consiste à accorder un poids plus important aux informations qui font autorité, par opposition à leur pertinence ou à leur popularité, en réponse aux requêtes de nouvelles, surtout en temps de crise ou de nouvelles de dernière heure.
    Sur YouTube, cela comprend également la réduction des recommandations de contenu limite qui enfreint presque nos politiques sur le contenu, du contenu qui peut induire les utilisateurs en erreur de manière préjudiciable ou du contenu de faible qualité qui peut entraîner une mauvaise expérience de l’utilisateur.
    Nous combattons les mauvais joueurs en coupant leurs flux d’argent et de trafic. Nous mettons constamment à jour notre contenu et nos politiques de publicité pour interdire les comportements trompeurs, comme la fausse représentation dans nos annonces ou l’usurpation d’identité sur YouTube, et pour interdire les publicités de contenu offensif, haineux ou violent ou celles qui dissimulent des questions controversées ou des événements délicats.
    Nous appliquons ces politiques avec vigueur, en utilisant les dernières avancées de l’apprentissage automatique pour identifier le contenu et les publicités qui enfreignent nos politiques, et nous avons une équipe de plus de 10 000 personnes qui y travaillent.
    Bien que la diversité de l’information soit intrinsèquement intégrée dans la conception des moteurs de recherche de nouvelles et de YouTube, chaque recherche offre de multiples options provenant de diverses sources, ce qui accroît l’exposition à diverses perspectives. Nous travaillons également à fournir plus de contexte aux utilisateurs de l’information qu’ils lisent. Pour ce faire, nous avons mis sur pied des comités de connaissances en recherche qui fournissent des renseignements de haut niveau sur une personne ou un enjeu; des étiquettes de contenu dans la recherche et les nouvelles de façon à préciser lorsqu’elles ont fait l'objet d'une vérification des faits ou qu'elles constituent un article d’opinion; et sur YouTube, des rayons dédiés à l’information pour s’assurer que les utilisateurs sont exposés à des sources d’information faisant autorité durant des événements d’actualité et des comités d’information qui précisent si une chaîne donnée est financée par l’État ou par le secteur public, et des informations faisant autorité sur des sujets bien établis qui font souvent l'objet de campagnes de désinformation.
    En ce qui concerne les élections, nous travaillons en partenariat avec Élections Canada et des organes de presse canadiens pour fournir de l’information sur la façon de voter et des renseignements essentiels sur les candidats. Nous soutiendrons également la diffusion en direct des débats des candidats sur YouTube et nous créons une chaîne YouTube consacrée à la couverture électorale à partir de sources d’information faisant autorité.
    Notre travail de lutte contre la désinformation ne se limite pas à nos produits. Un écosystème de l’information en santé est essentiel à la démocratie, et nous consacrons des ressources importantes au soutien d’un journalisme de qualité et des efforts connexes.
    L’initiative Google Actualités a élaboré une gamme complète de produits, de partenariats et de programmes pour appuyer l’industrie de l’information et a engagé 300 millions de dollars pour financer des programmes. Nous soutenons également la compréhension de l'actualité au Canada, y compris au moyen d'une subvention d’un demi-million de dollars à la Fondation canadienne du journalisme et à CIVIX pour développer NewsWise, un programme de compréhension de l'actualité qui rejoint plus d’un million d’étudiants canadiens, et une autre subvention d’un million de dollars à la Fondation canadienne du journalisme annoncée la semaine dernière pour appuyer la compréhension de l'actualité chez les Canadiens en âge de voter.
    Nous finançons ces programmes parce que nous croyons que les Canadiens de tous âges comprennent comment évaluer l'information en ligne.
(1535)
     Dans le même ordre d’idées, nous appuyons pleinement l’amélioration de la transparence des publicités politiques. L’an dernier, nous avons volontairement mis en place des exigences de vérification améliorées pour les annonceurs politiques américains, des divulgations dans les publicités électorales, ainsi qu’un nouveau rapport sur la transparence et une bibliothèque de publicités politiques pour les élections de mi-mandat aux États-Unis. Nous avons déployé des outils semblables pour les élections parlementaires en Inde et dans l’Union européenne. Même si nous avions l’intention d’adopter des mesures semblables au Canada, malheureusement, les nouvelles dispositions relatives aux plateformes en ligne présentées dans le projet de loi C-76 ne reflètent pas le fonctionnement actuel de nos systèmes de publicité en ligne ou des rapports sur la transparence. Il n’était tout simplement pas possible pour nous de mettre en oeuvre les changements importants qui auraient été nécessaires pour répondre aux nouvelles exigences dans le peu de temps que nous avions avant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions.
    Premièrement, la définition de « plateforme en ligne » comprend un « site Internet ou une application Internet » qui vend des espaces publicitaires « directement ou indirectement », et le projet de loi impose la nouvelle obligation de registre à toute plateforme qui atteint certains seuils minimums de consultation. Cette disposition englobe non seulement les médias sociaux ou les grandes plateformes de publicité en ligne, mais aussi la plupart des éditeurs de nouvelles nationaux et régionaux, pratiquement toutes les publications multiculturelles et les sites Web et applications les plus populaires financés par la publicité, ce qui en fait une disposition d'application extraordinairement vaste.
    Deuxièmement, les dispositions exigent expressément que chaque site ou application tienne son propre registre. À la différence de certaines entreprises, Google offre une vaste gamme de produits et de services publicitaires. Les annonceurs peuvent acheter des campagnes par l’entremise de Google qui seront diffusées sur des sites Google et/ou sur des sites d’éditeurs tiers. Ces systèmes sont automatisés. Souvent, il n’y a pas de lien direct entre l’annonceur et l’éditeur. Pendant le chargement de la page, le site enverra un signal indiquant qu’un utilisateur répondant à certains critères démographiques peut recevoir une annonce. Les annonceurs soumissionneront ensuite pour la possibilité d’afficher une annonce à l'intention de cet utilisateur. Le serveur publicitaire de l’annonceur gagnant affiche l’annonce gagnante dans le navigateur de l’utilisateur. Tout cela se produit en quelques fractions de seconde. L’éditeur ne sait pas immédiatement quelle annonce a été affichée et n’a pas immédiatement accès à l’annonce qui a été diffusée. Pour tenir compte des nouvelles dispositions, nous aurions dû mettre en place des systèmes entièrement nouveaux pour informer les éditeurs qu’une publicité politique réglementée avait été affichée, puis remettre une copie de cette annonce et les renseignements requis à chaque éditeur pour qu’ils les inscrivent dans leur propre registre. Cela n’était tout simplement pas possible dans le très court laps de temps qui a précédé l’entrée en vigueur des dispositions.
    Troisièmement, les dispositions exigent que le registre soit mis à jour le jour même où la publicité politique réglementée est affichée. Cela signifie en fait que le registre doit être mis à jour en temps réel, puisqu’une annonce politique réglementée qui était affichée à 23 h 59 devrait être incluse dans le registre avant minuit. En raison de la complexité de nos systèmes de publicité en ligne, nous ne pouvions tout simplement pas nous engager à respecter un tel délai.
    Une dernière complication est que la « publicité électorale » comprend la publicité qui favorise l'élection d'un candidat « par une prise de position sur une question à laquelle est associé un parti enregistré ou un candidat ». On les appelle généralement des « publicités thématiques ». Les publicités thématiques sont très contextuelles et il est notoire qu’elles sont difficiles à cerner de façon fiable, surtout que leur définition est vague et qu’elle évolue au cours d’une campagne. Compte tenu de ces défis, nous interdisons en général cette catégorie de publicité dans les pays où elle est réglementée, comme c'est le cas avec notre récente interdiction en France.
    Nous tenons à souligner que notre décision de ne pas accepter la publicité politique réglementée au Canada n’a pas été prise à la légère. Nous croyons sincèrement à l’utilisation responsable de la publicité en ligne pour rejoindre l’électorat, surtout pour les candidats qui n’ont peut-être pas l'aide d'un parti bien préparé derrière eux, et pour les tiers légitimes qui veulent défendre une gamme de dossiers. Il convient également de souligner que chaque fois que nous décidons de ne plus accepter une catégorie de publicité, il en résulte nécessairement des répercussions négatives sur nos revenus. Cependant, après plusieurs mois de délibérations internes et d’exploration de solutions possibles pour essayer de satisfaire autrement aux nouvelles exigences, il est devenu évident que cela ne serait tout simplement pas possible dans les quelques mois dont nous disposions. En conséquence, il a été décidé de ne pas accepter les publicités politiques réglementées et de concentrer nos efforts sur la promotion de l’engagement civique et d’autres initiatives.
(1540)
    Au cours des prochaines semaines, notre décision de ne pas accepter la publicité politique réglementée au Canada se reflétera officiellement dans nos politiques publicitaires. Nous continuerons d’informer toutes les parties concernées du changement. Comme pour les autres catégories d’annonces que nous n’acceptons pas, la politique sera appliquée par une combinaison de systèmes automatisés et d’équipes spécialisées dans l’application des politiques sur les publicités, qui suivront une formation rigoureuse sur la nouvelle politique. Nous poursuivrons également notre travail avec Élections Canada et le commissaire aux élections fédérales sur les questions d’interprétation et d’application de la loi et les organisations pertinentes de l’industrie qui travaillent à des mesures visant à aider les plateformes en ligne et les éditeurs à s’acquitter de leurs nouvelles obligations.
    Nous sommes heureux d’avoir l’occasion de discuter de nos activités électorales au Canada et de notre décision d’interdire la publicité politique réglementée.
    Merci.
    Merci à vous deux.
    M. Erskine-Smith sera le premier intervenant pendant notre tour de sept minutes.
    Je crois savoir que Facebook et Google comptent ensemble pour 75 % des revenus de publicité numérique. La décision de Google de ne pas accepter les publicités politiques est donc assez importante pour les prochaines élections. Êtes-vous d’accord avec cela?
     Nous pensons qu’il est important pour nous de prendre une telle décision. Toutefois, ce chiffre est généralisé. Cela ne reflète peut-être pas le marché de la publicité politique.
    C’est une décision importante pour les élections canadiennes.
    Maintenant, je veux mettre en contraste et comparer deux très grandes entreprises qui opèrent dans cet espace.
    Avez-vous lu le récent rapport du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada sur l’atteinte à la sécurité de Facebook-Cambridge Analytica?
    Oui.
    D’accord. Prenons cet exemple. Si le Commissariat à la protection de la vie privée faisait enquête sur Google et faisait des recommandations conformes à ce qui s’est passé avec Facebook, est-ce que Google se conformerait aux recommandations du Commissariat?
    Je dirais que nous avons toujours travaillé avec les commissaires à la protection de la vie privée pour en arriver à des conclusions convenues, puis nous les avons mises en oeuvre.
    D’accord. Je pense que Google s’est fixé une norme plus élevée. Le commissaire à la protection de la vie privée dit que le cadre de protection des renseignements personnels de Facebook était vide et qu’il est encore vide. Vous ne considérez pas que le cadre de protection des renseignements personnels de Google est vide, n’est-ce pas?
    Nous sommes deux entreprises très différentes, avec deux approches très différentes de la protection des données et de la protection des renseignements personnels.
    Encore une fois, vous respectez des normes plus élevées. Rappelez-moi combien d’argent Google a-t-il rapporté l’an dernier?
    Je ne connais pas ces chiffres par coeur.
    J’ai ici des chiffres qui montrent un revenu de 8,94 milliards de dollars, seulement pour le quatrième trimestre de 2018. Nous parlons donc d'une entreprise qui amasse des milliards de dollars et qui se conforme à des normes plus élevées que celles de Facebook, sur un certain nombre de questions différentes. Pourtant, Facebook est en mesure de mettre en oeuvre les règles prévues dans le projet de loi C-76.
    Pourquoi Google ne le peut-elle pas?
    Comme Jason l’a mentionné tout à l’heure — et il a parlé du Sénat qui se penchait sur les amendements au projet de loi C-76 —, nos systèmes et la gamme d’outils de publicité que nous offrons aux annonceurs sont beaucoup plus vastes que ceux de Facebook. Je ne peux pas parler de la décision de Facebook à cet égard.
     Je peux dire que nous avons passé beaucoup de temps cette année à essayer d’évaluer comment nous mettrions en oeuvre des changements qui nous permettraient de respecter les obligations du projet de loi C-76. En raison de l’ampleur des outils de publicité que nous offrons — et Jason a mentionné les nombreux facteurs différents qui touchent nos partenaires de l’édition et nos annonceurs —, nous avons pris à contrecoeur la décision de ne pas accepter de publicités politiques cette année.
    Quand vous parlez de cette année, vous voulez dire que vous travaillez activement à ce dossier, pour vous assurer que vous accepterez les publicités politiques lors des prochaines élections canadiennes?
    C’est un point important. Nous sommes déterminés à encourager un discours politique fort et éclairé. Ce fut une décision très difficile à prendre pour nous.
    Dois-je interpréter cette réponse comme un oui?
    Oui.
    Vous accepterez des publicités politiques aux prochaines élections fédérales après 2019.
    Ce que je peux dire, c’est que nous essayons de faire évoluer nos produits au point où nous pouvons nous conformer à la réglementation canadienne. Pour l’instant, nous ne pouvons pas le faire. C’est une tâche extrêmement difficile.
    Qu’en est-il de l’État de Washington? Allez-vous accepter des publicités politiques au niveau local dans l’État de Washington?
    Nous ne l’avons pas fait au cours du dernier cycle.
    Avez-vous pris l'engagement de le faire au cours du prochain cycle?
     Je ne peux pas parler en particulier des obligations à respecter dans l’État de Washington. Je n'ai pas suivi leur évolution.
(1545)
    Je vais vous expliquer la cause de ma frustration. Vous avez une entreprise qui fait des milliards de dollars et qui examine le petit territoire de l’État de Washington et le petit territoire du Canada et qui se dit: « Votre démocratie ne nous importe pas assez. Nous n’allons simplement pas y participer. » Si un gros joueur décidait de changer les règles, je vous garantis que vous les suivriez.
    Nous sommes trop petits pour vous. Vous êtes trop gros. Vous êtes trop important, et nous ne sommes tout simplement pas assez importants pour que Google nous prenne au sérieux.
    Je conteste cette observation parce que, comme nous l’avons mentionné, il y a eu d’autres exemples où nous avons dû prendre cette décision. Nous ne le faisons pas volontairement. Nous cherchons tous les moyens possibles de mettre cet outil à la disposition des électeurs.
    Quelle est la plus grande administration où vous avez pris une telle décision?
    Comme Jason vient de le mentionner, la publicité doit être bloquée en France. C’est la réalité. La réalité pour nous ici ne concerne pas un engagement envers la démocratie au Canada. La réalité, c’est le défi technique auquel nous sommes confrontés, avec les modifications apportées à la Loi électorale. L’évaluation interne a mené à la conclusion que nous ne pourrions pas relever les défis techniques à temps pour le cycle électoral.
    Je reconnais que le calendrier constitue une contrainte. Ce qui me pose problème, c’est lorsque vous ne me donnez pas de réponse directe quand je vous demande si vous vous engagez à le faire pour la prochaine élection fédérale ou pour la prochaine élection au niveau local dans l’État de Washington.
    C’est une source de frustration évidente. Pouvez-vous simplement dire: « Oui, nous sommes déterminés à y arriver. Nous allons le faire », pour répondre clairement à ma question?
    La raison pour laquelle j’ai fait une pause avant de vous répondre, c’est que dans un système parlementaire, il y a des élections à date fixe. Mais on peut imaginer qu’il pourrait y avoir des élections d’ici six, neuf ou 18 mois.
    D’accord, mais disons qu’il s’agit d’un cycle de quatre ans. Pensez-vous que c’est raisonnable?
    Ce que je vous dis, c’est que nous travaillons à améliorer tous nos outils électoraux et à répondre aux attentes de nos utilisateurs, et surtout à celles de la réglementation. Nous avons toujours l’intention d’améliorer la qualité et la portée de ces outils.
    Lorsque nous examinons les obligations en vertu de la Loi électorale, nous essayons de respecter ces normes. À l’heure actuelle, nous n’avons pas pu le faire pour cette élection.
     Je comprends. Je m’attends à ce que vous puissiez le faire d’ici 2023.
    Oui.
    C’est dommage que vous n’ayez pas pu y arriver, mais que Facebook ait réussi de son côté.
    La dernière question que je veux poser, parce que vous l’avez soulevée, concerne les vidéos recommandées sur YouTube. Vous avez récemment pris une décision. Après avoir passé de nombreuses années à ne pas considérer cela comme un problème, en janvier dernier, vous avez décidé que le contenu limite ne serait pas recommandé. Est-ce exact?
    C’est exact.
    Je ne suis pas d’accord pour dire que nous ne considérions pas cela comme un problème. Nous examinons cela depuis un certain temps et nous faisons diverses expériences avec le système de recommandations afin d’améliorer la qualité du contenu que voient les utilisateurs.
    Alors vous n’êtes pas d’accord avec le...
    La politique sur le contenu limite a été présentée plus tôt cette année. C’est exact.
    Je faisais allusion à un certain nombre d’ex-employés de Google qui ont été cités sur Bloomberg et qui suggéraient que vous deux aviez activement dissuadé le personnel d’être proactif à cet égard. Je suppose que vous n'êtes pas d'accord?
    Enfin, je comprends l’idée d’exonération de responsabilité, selon laquelle vous ne pouvez pas être tenu responsable de tous les contenus et de toutes les vidéos que publient les gens. Cependant, êtes-vous d’accord pour dire que dès que vous recommandez des vidéos, dès que votre algorithme publie un contenu particulier, qu’il favorise un contenu particulier et qu’il encourage les gens à voir ce contenu, vous devriez être responsable de ce contenu?
    Je suis d’accord avec vous dans la mesure où, lorsqu’il y a une différence entre les résultats obtenus ou entre le résultat d’une requête passive par rapport à une recommandation proactive, notre niveau de responsabilité est accru.
    En ce qui concerne les notions de responsabilité, le problème réside actuellement dans l'opposition binaire entre le fait d'être un éditeur ou une plateforme. À titre de plateforme qui diffuse également, dans le cas de YouTube, 500 heures de vidéo par minute et dont le contenu est visionné plus d’un milliard d’heures chaque jour, d’être en mesure de...
    Je ne parle que du contenu que vous recommandez en particulier.
    Oui. Dans ce cas, nous nous efforçons, dans le cadre du processus de recommandation, de fournir essentiellement un contenu qui correspond à ce que nous pensons que l’utilisateur veut regarder, dans un corpus qui est beaucoup plus grand que celui dont s’occupent les éditeurs conventionnels.
    C’est une longue réponse pour à peu près ne rien dire. La réponse est évidemment oui.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mme Kusie, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Lors de la rédaction du projet de loi C-76, votre organisation a-t-elle eu l’occasion de rencontrer la ministre?
    Non.
    Avez-vous eu l’occasion de rencontrer le personnel ministériel?
    Pendant que le projet de loi était en cours de rédaction, non, nous n'avons pas eu cette occasion.
    Après l’ébauche initiale, une fois les articles proposés, la ministre a-t-il communiqué avec vous?
    Nous avons pris connaissance des articles proposés qui ont été présentés lors de l’étude article par article au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, en fait lorsqu’ils ont fait l’objet d’un rapport public. À ce moment-là, nous nous sommes adressés au cabinet de la ministre, d’abord pour obtenir de plus amples renseignements, parce qu’il n’y avait pas beaucoup de détails sur le contenu de ces articles, et ensuite pour discuter sérieusement avec le cabinet de la ministre afin d'exprimer certaines de nos préoccupations et d’élaborer des amendements qui permettraient d'apaiser ces préoccupations.
    Est-il donc juste de dire que vous n’avez pas été consulté par la ministre ou par le personnel ministériel avant que le projet de loi C-76 soit étudié article par article, avant qu’il soit rendu public?
(1550)
    C’est exact.
    C’est assez important.
    Lorsque vous avez parlé de l’étude article par article du projet de loi C-76, je suppose que c’était au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, PROC. Est-ce exact?
    C’est exact.
    Avez-vous expliqué à ce moment-là que vous ne seriez pas en mesure de respecter cette loi telle qu’elle avait été présentée?
    Lorsque le projet de loi C-76 a été amendé pour inclure les nouvelles dispositions sur les plateformes en ligne, la liste des témoins avait malheureusement déjà été établie. En conséquence, nous n’avons pas eu l’occasion d’en discuter avec les membres du comité.
    Nous en avons discuté avec les membres du comité afin d’exprimer certaines des préoccupations à ce moment-là, et nous avons certes soulevé la question au Comité sénatorial de la justice.
    D’accord.
    Vous dites donc que vous n’avez pas eu l’occasion, au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, d’expliquer pourquoi cette loi ne fonctionnerait pas pour votre organisation, pourquoi vous ne pourriez pas vous y conformer. Je sais qu’il a été dit dans le préambule que vous n'aimez pas cette formulation, mais vous avez dit vous-même qu’il vous aurait été difficile de vous y conformer, reconnaissant que, comme l’a dit M. McKay, en décidant de ne pas faire de publicité électorale, vous ne risquez pas de ne pas vous y conformer.
    L’avez-vous dit à ce moment-là?
     Voulez-vous dire après le dépôt du projet de loi? Désolé, je suis...
    Oui, pas de problème. Avez-vous pu dire à ce moment-là que vous ne seriez pas en mesure de vous conformer à la loi telle qu’elle était formulée?
    Oui. Une fois que nous avons pris connaissance des dispositions et que nous avons pu obtenir une copie des amendements proposés, nous avons communiqué avec le cabinet de la ministre. Nous avons essentiellement examiné ce que nous venons d’examiner avec vous tous, c’est-à-dire qu’il y a certains aspects de ces dispositions qui posaient problème en raison de nos systèmes de publicité particuliers. L’un des résultats possibles serait que nous ne serions pas en mesure d’apporter les changements nécessaires dans le temps qui nous était alloué et qu'en conséquence, nous ne serions pas en mesure d'accepter les publicités électorales pour les élections fédérales.
    La ministre et son personnel savaient que vous ne seriez pas en mesure de vous conformer aux dispositions du projet de loi C-76. Qu’a-t-elle répondu à ce moment-là, quand vous avez dit que votre organisation ne serait pas en mesure de se conformer à la loi telle qu’elle avait été présentée?
    La ministre et son personnel espéraient que nous pourrions nous adapter aux nouveaux changements.
    Comment? À quoi s’attendaient-ils, si je peux me permettre de poser la question?
    Ils n’ont rien dit de plus à ce sujet, si ce n’est qu’ils souhaitent que nous puissions mettre en oeuvre les nouveaux changements. De plus, à ce moment-là, du point de vue de la procédure, ils ont dit qu’étant donné que le projet de loi avait déjà été étudié article par article et qu’il allait être renvoyé au Sénat, nous devrions essentiellement faire part de nos préoccupations au Sénat dans l’espoir d’obtenir les amendements que nous demandions.
    Avez-vous eu des conversations avec la ministre ou son personnel au sujet des outils que vous avez mis en place aux États-Unis et dont vous avez parlé en détail ici?
    Oui.
    Qu’a-t-elle répondu au sujet des outils mis en place aux États-Unis par rapport aux mesures législatives présentées dans le projet de loi C-76? Qu’a-t-elle répondu par rapport à ces outils et a-t-elle mentionné s’il y avait un écart entre les deux?
    Eh bien, ils étaient certainement au courant des outils que nous avions mis en place aux États-Unis pour les élections de mi-mandat, et essentiellement, ils espéraient qu’avec les changements apportés au projet de loi C-76, nous présenterions des outils semblables au Canada. Il s’agissait vraiment d’examiner en détail les raisons pour lesquelles les dispositions précises du projet de loi C-76 rendaient cette tâche difficile, et c’est là que nous avons eu des échanges. Essentiellement, ils voulaient que nous introduisions des outils semblables à ceux que nous avions là-bas.
    En cherchant à introduire des outils semblables à ceux que vous avez aux États-Unis, pourquoi n’êtes-vous capable et pourquoi ne se conforment-ils pas au projet de loi C-76?
    Bref, comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, nous avons des systèmes qui servent à la publicité sur les sites d’éditeurs tiers, mais nous ne pouvons pas leur fournir la création publicitaire et l’information requise en temps réel, comme l'exige le projet de loi C-76. Il y a aussi des complications liées au registre en temps réel en soi, et c’est pourquoi, même pour les sites que nous possédons et exploitons comme Google Search ou YouTube, nous ne serions pas non plus en mesure de nous y conformer — du moins, nous ne nous sentions pas à l’aise de le faire.
    Enfin, il y a la complication supplémentaire liée à l’inclusion de la publicité thématique. En gros, les registres que nous avons dans d’autres pays n’incluent pas la publicité thématique parce que, comme je l’ai dit, il est très difficile de l'identifier de façon convaincante. En conséquence, nous craignions de ne pas être en mesure d’identifier les publicités à inclure dans le registre.
(1555)
    En résumé, vous n’avez pas été inclus à l’étape de la rédaction du projet de loi C-76. Vous n’avez pas été consulté par la ministre ou son personnel lorsque le gouvernement a présenté le projet de loi C-76 dans le but de déterminer la réforme électorale du Canada.
    C’est en grande partie exact. Je dois également modifier le compte rendu. Nous avons eu une discussion avec le cabinet de la ministre peu de temps après le dépôt du projet de loi C-76, pour discuter des contours de la loi telle qu’elle était libellée à l’étape de la première lecture, avant l’ajout de l’une ou l’autre des dispositions sur les plateformes en ligne et avant l’ajout de toute exigence de registre. C’était une discussion sérieuse, mais à l’époque, puisque nous n’avions pas envisagé que de nouvelles dispositions seraient introduites, nous n’en avons pas parlé. À part cela, il n’y a pas eu de consultation.
    Bien sûr.
    Quels conseils donneriez-vous à la prochaine législature au sujet de ce projet de loi?
    Comme nous l’avons dit au comité sénatorial et ailleurs, ainsi qu’au cabinet de la ministre, nous appuyons sans réserve l’idée d’accroître la transparence de la publicité électorale et nous avions l’intention de créer le registre au Canada.
    Il y a eu un certain nombre d’amendements extrêmement ciblés. Essentiellement, je pense que nous avons modifié 15 mots qui auraient amendé suffisamment le projet de loi C-76, de sorte que nous aurions pu satisfaire aux exigences.
    Ma recommandation, si c’est possible, serait qu’une future législature examine ces recommandations, qu’elle examine essentiellement les difficultés ajoutées par les nouvelles dispositions — et il vaut la peine de souligner, comme l’a fait la CBC, que de nombreuses plateformes ont également annoncé qu’elles n’accepteraient pas de publicité électorale en raison des difficultés que posent les révisions particulières — et qu’elle il détermine si des ajustements peuvent être apportés pour atténuer les préoccupations.
     Merci.
    Nous cédons maintenant la parole à M. Dusseault, pour sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    C'est avec plaisir que je me joins à ce comité aujourd'hui. J'ai le privilège de revenir à ce comité que j'ai eu la chance de présider pendant quelques années avant vous, monsieur le président. Je suis heureux de revoir des visages que j'ai déjà vus dans le passé.
    Messieurs McKay et Kee, vous savez l'influence que vous avez. Je suis sûr que vous connaissez l'influence que vous avez sur les élections et sur l'information qui circule pendant les élections, qui influe sur les électeurs et, ultimement, sur leur décision. C'est dans ce contexte qu'il est important d'avoir une discussion avec vous à propos des annonces que vous avez faites récemment en ce qui a trait aux publicités électorales.
    Ma première question se rapporte au préambule que d'autres collègues ont fait. D'autres compagnies assez importantes sur le marché ont dit qu'elles étaient en mesure de se conformer à la Loi électorale du Canada, dans sa version modifiée. Compte tenu du fait que vous avez effectué de nombreux investissements dans d'autres pays pour faire de tels registres, par exemple aux États-Unis et en Europe, et aussi du fait que vous avez investi des millions de dollars dans certains marchés, comme celui de la Chine, pour pouvoir adapter votre moteur de recherche à leurs lois — en Chine, on s'entend, ce sont des lois très strictes, et vous le savez très bien —, j'ai de la misère à comprendre pourquoi Google n'est pas capable de s'adapter à une loi canadienne comme celle-là en vue de la prochaine élection fédérale.
    Selon vous, qu'est-ce qui fait en sorte que vous n'êtes pas capables de vous adapter à la loi canadienne?
    Est-ce en raison du fait que les règles ne reflètent pas les pratiques internationales ni la façon dont les publicités en ligne fonctionnent? Est-ce parce que vous n'avez pas les moyens de le faire ou, tout simplement, vous n'avez pas la volonté de le faire?
    Je m'excuse, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

     Je tiens à souligner que notre décision a été prise par suite d’une évaluation technique visant à déterminer si nous pouvions nous y conformer. Il ne s’agissait pas d’une question précise au sujet du cadre de réglementation au Canada ou de notre engagement à l’égard du processus électoral au Canada et de notre contribution à le maintenir éclairé et transparent.
    Nous sommes en voie, dans d’autres pays, de mettre en place des outils comme ceux décrits dans la loi, d’améliorer ces outils et de travailler à l’infrastructure technique en aval pour rendre ces outils plus informatifs et plus utiles pour les utilisateurs ainsi que pour tous les participants à une élection.
    Nous en sommes arrivés à une décision très difficile parce que nous étions confrontés à un calendrier serré et à des modifications législatives qui sont très importantes dans le contexte canadien et pour nous, Canadiens, comme électeurs et participants au processus électoral. Nous avons donc dû déterminer si nous pouvions ou non nous conformer à la loi dans les délais impartis, et nous ne le pouvions pas. Nous nous sommes donc contentés de ne pas accepter de publicité électorale. Cela ne reflète en rien notre attitude personnelle ou celle de notre entreprise à l’égard de l’autorité et de la compétence du Canada en matière de réglementation de cet espace, et ce n’était certainement pas une expression de notre opinion au sujet des modifications apportées à la Loi électorale.
    Cela a été très difficile pour nous, mais la décision n'a été motivée que par les difficultés techniques et les délais auxquels nous étions confrontés.
(1600)

[Français]

    J'ai une question complémentaire par rapport au registre que vous avez mis en place au cours des élections américaines de mi-mandat et celui que vous prévoyez mettre en place en Europe pour le Parlement européen.
    Ces registres, ou ces règles, sont-ils une initiative de Google ou leur mise en place découle-t-elle d'une obligation imposée par des lois?
    Pouvez-vous clarifier la raison pour laquelle vous allez de l'avant aux États-Unis et en Europe? Êtes-vous obligés de le faire, ou le faites-vous de votre propre chef?

[Traduction]

     Nous le faisons en fait de notre propre gré. Essentiellement, il s’agissait d’une initiative entièrement volontaire à la lumière des préoccupations soulevées dans la foulée des élections fédérales américaines. De toute évidence, il y a eu beaucoup de discussions sérieuses sur la façon d’assurer une plus grande transparence du processus des publicités électorales. En conséquence, Google, Facebook et un certain nombre d’autres entreprises ont toutes travaillé très fort, pour être honnête, afin de commencer à instaurer la transparence, à savoir qui obtient les registres et les rapports, ce qui donnerait à nos utilisateurs beaucoup plus de contexte en ce qui concerne les publicités électorales auxquelles ils sont exposés. Il ne s’agit pas seulement de l’accès aux copies des publicités en soi, mais aussi de renseignements contextuels sur les raisons pour lesquelles elles ont été ciblées, sur l’auditoire visé par la vérification, sur les sommes dépensées par l’annonceur, ce genre de détails.
    Une fois cela établi pour les élections de mi-mandat aux États-Unis, il y a eu — comme Colin l’a dit — un processus d’apprentissage. Nous avons des équipes mondiales qui s’en occupent et qui, essentiellement, passent d’une élection à l’autre, tirent des leçons de chaque élection et améliorent les processus. Essentiellement, nous avions un modèle en place que nous étions capables de déployer en Inde, que nous pouvions déployer dans l’Union européenne, et que nous nous attendions à déployer ailleurs. De plus, nous avions établi des processus individuels en plus du registre en soi. Quel est le processus que nous utilisons pour vérifier l’identité de l’annonceur politique? Dans le cas des États-Unis, nous vérifions non seulement l’identité de l’annonceur en lui demandant de fournir une pièce d’identité, mais nous vérifions aussi s’il est autorisé à faire de la publicité électorale auprès de la Federal Election Commission des États-Unis.
    Nous avons dû adapter ce processus au fur et à mesure que nous mettons en oeuvre le registre dans d’autres pays parce que l’organisme de réglementation de chaque élection n’est pas en mesure de fournir le genre de validation que nous obtenons aux États-Unis. Donc, nous adaptons ce processus et nous en tirons aussi des leçons.
    Ce sont des mesures que nous avons prises de plein gré, sans y être contraints par la loi.

[Français]

     Dans ces cas-ci, vous êtes heureux de le faire parce que ce sont vos propres normes et règles. Cependant, lorsque vous devez vous conformer à des règles établies par d'autres, vous êtes beaucoup plus réticents à le faire. La décision que vous avez prise fera en sorte que vous vous conformerez à la Loi, parce que, tout compte fait, il n'y aura pas de publicité électorale.
    Étant donné le temps qu'il me reste, j'aimerais aborder un sujet complémentaire. Il s'agit de l'annonce dont vous avez parlé dans votre introduction, qui porte sur une chaîne consacrée à la campagne électorale, prévue pour pallier un peu votre décision de ne pas autoriser de publicité.
    Je m'interroge quant à la transparence de cette plateforme et quant aux algorithmes utilisés pour diffuser le contenu. Quel contenu sera diffusé? Vous dites que c'est du contenu de sources faisant autorité, mais qu'est-ce que cela veut dire vraiment? Le public aura-t-il accès à ce type d'informations sur la plateforme en question? Aura-t-il accès aux politiques utilisées pour diffuser le contenu et pour garantir que tous les candidats ou tous les partis auront une couverture équitable?
    Comme c'est une décision qui revient évidemment à Google, qui décide de cette couverture? Vous savez l'influence que vous avez et que vous pouvez avoir. Qui va déterminer ces questions de politiques que vous allez publier sur cette plateforme au cours de la campagne?
(1605)

[Traduction]

    Il y a en fait deux points de discussion distincts que vous avez soulevés.
    Le premier concerne l'expression « faisant autorité ». Qu’entend-on par là? C’est une question tout à fait légitime. C’est essentiellement un critère qui éclaire Google Search, Google News et YouTube également. Nous avons en fait des lignes directrices très rigoureuses, soit environ 170 pages de lignes directrices sur les évaluateurs de recherche. Nous utilisons des bassins d’évaluateurs externes qui évaluent les résultats que nous obtenons pour nous assurer que nous fournissons des résultats aux utilisateurs en réponse à des demandes qui sont vraiment pertinentes pour leurs demandes et qui proviennent en fait de sources faisant autorité.
    Par « faisant autorité », nous parlons d'un classement établi en fonction du caractère officiel, du caractère professionnel et d’une troisième classification... Je peux vous faire parvenir l’information. J'ai un trou de mémoire.
    Nous nous fondons sur l’information que nous obtenons des guides de recherche des évaluateurs. Comme je l’ai dit, nous faisons appel à des bassins d'évaluateurs, alors tout se fait globalement, ce qui nous aide à recueillir des renseignements qui font autorité. Ce sont les mêmes signaux que nous utilisons, comme je l’ai dit, pour identifier cette catégorie d’information et la pondération tend ainsi à aller aux organisations établies et ainsi de suite qui sont à l'origine du résultat initial. Nous n’évaluons pas le contenu des travaux. Nous déterminons simplement s’il s’agit d’un site qui se spécialise réellement dans le domaine dans lequel il le prétend.
    En ce qui concerne la chaîne YouTube, c’est très différent. Il s’agit d’un canal très précis et personnalisé qui sera disponible sur YouTube. Nous l’avons offert lors des élections de 2015. Dans ce cas, nous avons demandé à un organisme tiers, Storyful, de s’en occuper pour nous. Ce n’est pas un service algorithmique; il est effectivement surveillé. Nous faisons donc la même chose, c’est-à-dire qu'une tierce partie s’en occupe en tirant des renseignements de diverses sources.
    Nous établissons avec cette tierce partie quelles sont les lignes directrices au titre de l'inclusion de l'information, que nous publions ensuite pour que les gens sachent comment l’information est incluse. Il s’agit surtout de renseignements publiés sur YouTube par des diffuseurs et des organes d’information bien établis que nous ajoutons simplement à la chaîne pour que les gens puissent les voir.
    Tous ces renseignements seraient également disponibles, par exemple, sur le site Web de la CBC, du National Post et ainsi de suite. Ils seraient également disponibles sur ces sites individuellement.
     Merci.
    C’est maintenant au tour de M. Graham, pour sept minutes.
    Merci. Je suis heureux de vous revoir tous les deux.
    Comme vous le savez probablement, j’ai été parmi les premiers à adopter Google. J’utilise Google depuis une bonne vingtaine d'années. Je pense que c’est un bon service, mais il s’est développé massivement et est devenu un outil très puissant. Or, comme qui dit grande puissance dit aussi grandes responsabilités, je pense qu’il est très important d'avoir cette discussion.
    La partie du projet de loi C-76 dont nous parlons est l'article 208.1, et vous vouliez changer 15 mots. Quels étaient ces 15 mots?
    Je me ferai un plaisir de vous remettre une copie des amendements que nous avons proposés, par souci d'exactitude.
    Ce serait utile.
    Vous opposez-vous aux changements que nous avons apportés au projet de loi C-76 ou appuyez-vous le projet de loi, d’un point de vue philosophique?
    Tout à fait.
    Êtes-vous favorable à l’utilisation des registres de publicité en général, pas seulement en contexte électoral, mais en tout temps?
    C’est un aspect que nous examinons. Comme dans le contexte politique, il y a évidemment une certaine urgence à régler les problèmes avec la transparence attendue, et ainsi de suite. C’est un volet que nous examinons, pour voir comment nous pouvons accroître la transparence pour nos utilisateurs. En fait, pas plus tard que cette semaine, nous avons annoncé des mesures supplémentaires à cet égard.
    Colin, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Oui. Lors de notre conférence des développeurs, nous avons annoncé une extension de navigateur pour Chrome. Il permet de voir plus en détail les publicités affichées, d’où elles viennent — quels réseaux — et comment elles sont arrivées sur la page. Nous en faisons un outil ouvert, de sorte que d’autres réseaux de publicité qui diffusent des annonces sur des sites et des pages que l'internaute consulte puissent également acheminer cette information.
    Comme la chose est importante, nous cherchons à fournir le plus d’information possible aux utilisateurs sur les raisons pour lesquelles ils reçoivent des publicités.
    Ce qui m’amène à ma prochaine question. Vous avez parlé des limites techniques dans l'application du projet de loi C-76, et j’essaie de comprendre, moi qui suis technicien. Comme j’ai une assez bonne idée du fonctionnement de vos systèmes, j’essaie de voir ce qui vous empêche, au cours des cinq prochains mois, d'ajouter les sous-programmes nécessaires pour traiter la publicité politique et l’utiliser.
    Si vous m’aidez à comprendre l’aspect technique, je vais saisir. Je voudrais savoir en quoi consistent les problèmes.
    Certainement. Notre principale difficulté tient à l'idée qu'il faudrait mettre le registre à jour en temps réel. En effet, nous avons un très large éventail de systèmes de publicité. Ceux qui mènent des campagnes sur Google font des recherches de publicité, ce qui apparaît dans les résultats de recherche. Il peut s’agir de publicités sur YouTube, de vidéos ou de TrueView. L'utilisateur peut les sauter et aussi afficher de la publicité qui apparaît sur les sites éditeurs tiers.
    Dans le cas des sites éditeurs tiers, ces publicités viennent souvent de serveurs publicitaires tiers. Nous n’avons pas nécessairement un accès immédiat aux créateurs nous-mêmes. Il nous serait très difficile de mettre à jour même notre propre registre en temps réel, sans parler du registre d’un tiers qui doit tenir son propre registre.
    Que se passe-t-il si vous vous en tenez à vos propres serveurs, en laissant de côté ceux des tiers?
    Nous pourrions faire la mise à jour plus rapidement. À l’heure actuelle, la mise à jour en temps réel demeure un défi, compte tenu de nos systèmes, simplement parce que nous devons connaître le serveur de la publicité, puis être en mesure de faire la mise à jour immédiatement après.
(1610)
    J’en oublie le nom, mais il y a une page sur Google où on peut voir toutes les données que Google possède sur soi. Elle est facile à trouver, et on peut y voir tout ce qu'on a fait et que Google connaît, en temps réel. Si vous pouvez faire cela pour un particulier, pourquoi ne pouvez-vous pas le faire pour une publicité?
    Principalement parce que les systèmes de publicité sont un peu différents en ce qui concerne le téléchargement, le stockage et la gestion à l'interne. C’est pourquoi j’ai dit que c’était un objectif que nous allions poursuivre, mais nous ne nous sentions pas à l’aise cette fois-ci pour nous engager à respecter ce genre de délai.
    Quel ordre d’investissement en temps et en ressources faudrait-il pour y arriver, si vous décidiez de le faire? Vous dites que c’est possible pour les élections de 2023. C'est donc possible. Que faudrait-il pour y arriver?
    Pour être honnête avec vous, je ne peux pas répondre. Après avoir étudié la question sérieusement, nous avons conclu qu'il était impossible de respecter le délai. Je ne pourrais vous donner aucune estimation du temps qu’il faudrait ni des ressources nécessaires.
    Avez-vous une idée des profits que Google retire du Canada par rapport à ce qu'il y a investi?
    Je répondrais de deux façons distinctes. En fait, la question est plus vaste, car, compte tenu de la façon dont nos plateformes et nos services fonctionnent, nous sommes souvent un outil pour les entreprises et les sociétés canadiennes, étant donné nos services gratuits ou payants qui en soutiennent l'infrastructure.
    De plus, dans un domaine aussi vaste que la publicité, c’est certainement... Les revenus de la publicité en ligne chez Google sont souvent partagés avec les plateformes et les sites. Il n'y a donc pas seulement deux parties en présence. Les entreprises canadiennes utilisent notre technologie pour placer des publicités, payer leurs services et produire elles-mêmes des revenus.
    Nous sommes très fiers des investissements réalisés au Canada, au nom de Google, pour faire croître nos équipes d'ingénieurs et de R-D et nos bureaux.
     Monsieur Kee, sauf erreur, vous avez participé récemment à l’étude du ministère de l’Industrie sur le droit d’auteur. L’une des questions abordées a été celle des systèmes de gestion des droits et celle du principe de l’utilisation équitable dans l'application du droit canadien. La réponse de Google et de Facebook a été non. Ils ne se conforment pas à ce principe. Ils appliquent leurs propres politiques.
    Comment en arriver au point où Google pourrait dire: « Le Canada est suffisamment important pour que ce soit une priorité de respecter les lois locales dans des domaines où notre société a une grande responsabilité »?
    Cela n’a rien à voir avec la perception relative de l’importance du Canada ou des lois locales dans l’application de notre système d’identification du contenu.
    Pour la gouverne des autres membres du Comité qui ne le connaissent pas nécessairement, Content ID est notre système de gestion du droit d’auteur sur YouTube. Voici comment cela fonctionne: le titulaire de droits nous fournit un fichier de référence — une copie du fichier qu’il veut gérer en ligne — et nous appliquons ensuite une politique pour chaque téléchargement sur YouTube.
    Comme le système est automatisé, il ne gère pas très bien le contexte ni les exceptions. L’utilisation équitable, dans le régime de droit d’auteur canadien, est en fait une exception. Aux termes de la loi, il s'agit d'une exception à la violation générale et elle repose sur un certain raisonnement de base. Elle nécessite une analyse du contexte. C’est pourquoi nous réagissons aux exceptions par un système d’appel solide. Si Content ID signale un contenu de façon inappropriée, vous interjetez appel de cette décision parce que vous estimez avoir un argument très solide en faveur du principe de l’utilisation équitable, et vous affirmez que ce principe s’applique. Une évaluation est alors faite.
    Dans le cas du droit d’auteur, vous mettez en place un système qui ne respecte pas le droit canadien, mais assorti d'un dispositif d’appel. Dans le cas du projet de loi C-76, vous dites: « Nous n’allons rien faire, parce que cela ne se justifie pas sur le plan pratique. »
    Dans l’application du droit d’auteur, vous ne vous souciez pas du droit canadien, très franchement, parce que si quelqu’un a une exemption fondée sur le principe de l’utilisation équitable, il ne devrait pas lui incomber de prouver son droit de faire quelque chose qu’il a absolument le droit de faire.
    J’essaie de comprendre pourquoi vous allez de l’avant dans le cas du droit d’auteur et pas dans celui du projet de loi C-76. À mon avis, la tâche, pour être difficile, est tout à fait réalisable. Comme M. Erskine-Smith l’a dit tout à l’heure, si nous étions aux États-Unis, je suis sûr que la question serait déjà réglée.
    Essentiellement, la principale différence, au risque de devenir un peu technique, c’est que l’utilisation équitable au Canada est une exception à la violation. C’est un moyen de défense qu’on invoque en réponse à une allégation selon laquelle on a violé le droit d'auteur. La gestion est très différente.
    Dans ce cas-ci, le projet de loi C-76 introduisait des obligations positives. Non seulement il fallait créer un registre des publicités, mais la façon de le faire était aussi imposée. Nous ne pouvions tout simplement pas nous conformer dans le délai imparti. C’est la principale différence entre les deux cas.
    Merci.
    Ce sera maintenant M. Gourde, qui aura cinq minutes.
(1615)

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici ce matin.
    Nous savons qu'il reste seulement une courte période de temps avant les élections. Vous avez parlé des problèmes techniques, des problèmes pour se conformer à la Loi électorale du Canada.
    Au Canada, la réalité est telle que nous pouvons mettre de la publicité sur vos plateformes, mais que la loi canadienne limite les plafonds de dépenses électorales et la diversité des endroits où les partis politiques et les candidats peuvent dépenser leur argent. Cela détermine une certaine part de marché, que vous avez peut-être évaluée.
    Premièrement, est-ce que vous avez évalué cette part de marché?
    Deuxièmement, cela représentait peut-être un montant tellement dérisoire, compte tenu de tous les projets que vous menez simultanément sur votre plateforme, que cela ne valait tout simplement pas la peine de vous conformer à la Loi, cette année, en raison du montant que cela pourrait vous rapporter?
    Est-ce qu'il y a une évaluation qui a été faite à l'interne par vos gestionnaires? Par exemple, pour avoir un revenu supplémentaire de 1 million de dollars, cela aurait coûté 5 millions de dollars. Cela ne valait peut-être pas la peine de vous conformer à la Loi pour l'élection de 2019. Est-ce exact?

[Traduction]

    Ce n'est pas un calcul que nous avons fait pour parvenir à nos décisions. Il s'agissait essentiellement de savoir comment nous allions satisfaire aux exigences, de voir si c’était techniquement réalisable, compte tenu de la façon dont nos systèmes fonctionnent actuellement et des délais et, à dire vrai, de notre tolérance au risque, car nous ne savions pas ce qui arriverait si nous commettions une erreur. Voilà toute l'explication.
    Il n’a jamais été question de calcul de rentabilité. En fait, il vaut la peine de le souligner, nous avons choisi de nous retirer de la seule activité liée aux élections qui nous rapporterait des revenus. Au lieu de cela, nous faisons des investissements qui ne nous rapportent pas, comme notre engagement auprès d’Élections Canada pour promouvoir l’information sur les élections au moyen de groupes de recherche et d’information, etc., avec YouTube et par diverses autres mesures, dont une subvention d’un million de dollars au FJC pour la littératie en information, avant les élections canadiennes.
    Essentiellement, nous avons redoublé d'efforts sur les éléments qui ne rapportent pas pour compenser le fait que nous ne pouvions tout simplement pas satisfaire aux exigences du projet de loi C-76.

[Français]

    Dans votre réponse, vous avez parlé de la tolérance au risque. Est-ce que c'était trop risqué, étant donné que certaines dispositions du projet de loi modifiant la Loi électorale du Canada étaient relativement vagues et ne vous permettaient pas d'être certain de la façon de mettre en application de nouvelles plateformes?

[Traduction]

     Une partie du libellé est vague. Il y avait donc les préoccupations dont j'ai parlé au sujet de la publicité, mais il y a aussi le délai de mise à jour du registre, étant donné cette idée, énoncée dans la loi, qu'elle doit se faire le même jour. Est-ce que cela signifie littéralement en temps réel ou non? Quelle latitude nous était laissée?
    Nous avons eu de solides discussions avec le commissaire aux élections fédérales et Élections Canada sur des questions d’interprétation. Vous avez peut-être vu les directives d’Élections Canada il y a environ une semaine et demie à ce sujet, qui confirmaient en grande partie certaines de nos appréhensions. C'est plutôt cela qui a motivé notre décision.

[Français]

    Il peut arriver que certaines publicités faites par des tiers directement ou indirectement ne soient pas nécessairement considérées comme des publicités électorales, mais qu'elles attaquent certains partis. Vous avez parlé de contrôle de vos plateformes effectué par des êtres humains. Ces personnes ont-elles l'expertise nécessaire en politique canadienne pour faire la distinction entre une publicité qui attaque réellement d'autres partis et une publicité qui fait la promotion d'un enjeu électoral canadien? En fait, j'aimerais savoir quelle est l'expertise des personnes qui vont surveiller ces plateformes. Ont-elles une expertise en politique canadienne, en politique américaine ou en politique d'un autre pays dans le monde?

[Traduction]

    Il s'agit en fait d'une combinaison de tous ces éléments.
    Ce qui se passe, c’est que, pour mettre en œuvre l’interdiction, nous mettrons à jour nos politiques publicitaires. Je le répète, il y a des catégories entières de publicités que nous n’accepterons pas, comme la publicité sur le cannabis. Il y a une autre catégorie de publicité qui est assujettie aux exigences d’enregistrement. Tout cela est régi par nos politiques en matière de publicité.
    Cette décision se reflétera dans ces politiques publicitaires. Nous aurons des équipes d’application de la loi en matière de publicité dans diverses régions du monde qui seront sensibilisées à ces politiques d’application de la loi.
    Quant aux questions précises relatives à l’utilisation de la publicité, chaque catégorie de publicité que vous avez décrite semble relever du projet de loi C-76 et être visée par l’interdiction.
    Nous aurons en fait des équipes qui seront formées à cet égard, mais aussi, en tenant compte du point de vue canadien, en nous fondant sur les conseils que nous avons reçus de toutes les équipes fonctionnelles d'ici, au Canada.
(1620)

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Picard, à votre tour. Vous avez cinq minutes.
    Vous venez de dire à mon collègue que vous n’avez pas calculé le rendement sur l’investissement dans ce cas-ci?
    C’est exact. Cela n'a pas joué dans l'élaboration de la décision.
    Vous ai-je bien compris? Vous avez dit qu'un de vos problèmes d'ordre technique est que, dans la publicité de tiers, lorsqu’on a recours à des « courtiers » publicitaires tiers, ou peu importe comment on les appelle, il est difficile, voire impossible, de savoir d’où vient la publicité? Par conséquent, puisqu'il est impossible de divulguer le nom de l’auteur, le cas de cette publicité est trop compliqué pour l’instant, de sorte que vous refusez de vous avancer et de publier de la publicité pendant la prochaine campagne électorale.
    Le problème ne tient pas tant à la source de la publicité qu'à la capacité de faire une mise à jour en temps réel: celui qui a diffusé la publicité et l'information présentée dans la publicité politique. Puis, il faut communiquer l'information et le nom de l'auteur pour que la mise à jour des registres soit possible.
    La pratique suivie en matière de publicité est-elle la même dans d’autres pays, à l'égard des sources et des intermédiaires?
    Cela dépend de la pratique qui a cours dans les divers pays. J’hésite à parler de la loi électorale d’autres pays parce que je ne la connais tout simplement pas.
    En ce qui concerne nos propres politiques sur la publicité politique dans les pays où nous avons déployé un rapport de transparence, un registre, nous avons en fait eu recours à des exigences semblables su sujet de la vérification des annonceurs et de la recherche de moyens de vérifier que l’annonceur en question était autorisé à faire de la publicité politique par l’organisme local de réglementation électorale.
    Qu'y avait-il de différent, là où vous avez pu appliquer ces dispositions? À lumière de cette expérience, quelle est la différence propre à notre situation qui vous empêche de passer à l'action?
    Les systèmes que nous avons déployés aux États-Unis, dans l’Union européenne et en Inde n’auraient pas permis de répondre aux exigences précises du projet de loi C-76. Si nous étions allés de l'avant, nous aurions mis en place un système semblable.
    En fait, nous avons eu des entretiens préliminaires avec Élections Canada à ce sujet, mais en fin de compte, il est devenu évident que, étant donné le projet de loi C-76 et l’exigence particulière voulant que chaque éditeur tienne son propre registre, nous aurions beaucoup de mal à satisfaire aux exigences.
     Monsieur le président, je cède le reste de mon temps de parole à M. Erskine-Smith.
    Je n'ai pas autant de compétences techniques que M. Graham, mais je peux lire le projet de loi C-76 et je l’ai sous les yeux.
    C’est le délai de publication du registre qui est à l'origine de votre problème. Est-ce exact?
    C’est exact.
    D’accord.
    On ne dit pas « en temps réel ». Vous avez dit « en temps réel » à plusieurs reprises, mais ce n’est pas ce que dit la loi.
    La loi dit ceci: « commençant le jour de sa première publication ». C’est de cela que vous parlez.
    C’est exact. Si l’annonce était affichée à 23 h 59, il faudrait que le registre soit mis à jour avant minuit.
    C’est une interprétation. On pourrait en donner une autre, plus raisonnable: une période de 24 heures. Vous avez des avocats grassement payés et je présume qu’ils ont raison. Je réfléchis librement, sans avoir fait une analyse détaillée comme la vôtre, mais il est certain qu'une solution consisterait à reporter la publication de la publicité.
    Pourquoi ne pourriez-vous pas reporter la publication afin d’avoir un délai de 24 ou de 48 heures avant la première publication? Tout serait alors très facile, n’est-ce pas?
    Je le répète, techniquement, ce n’était pas possible pour nous.
    Pourquoi pas?
    Nos ingénieurs nous ont dit que ce ne serait pas réalisable.
    Donc quand je fais paraître une annonce sur Facebook, les responsables ne la publient pas tout de suite. Il y a un délai et on essaie de voir s'il y a lieu de la publier.
    Vos ingénieurs ne sont pas arrivés à comprendre un processus de report de 24 heures, de 48 heures ou même de sept jours, et vous dites que c'est à cause de nous si les exigences sur la programmation de la publicité électorale sont telles et que nous avons été impitoyables avec vous en imposant des délais serrés. Avec tout votre argent, vous avez été incapables de trouver une solution.
    Il nous aurait été difficile de restructurer en six mois tous les systèmes sous-jacents de la publicité en ligne.
    Je dois dire que je trouve les réponses ahurissantes. Par exemple, comment croire qu'un million de dollars représente quelque chose de pharamineux alors que vous avez réalisé des gains de 8 milliards de dollars au quatrième trimestre de l'an dernier. En ne prenant pas les choses assez au sérieux, vous portez préjudice à notre démocratie. Vous auriez dû faire bien mieux que cela.
    Merci.
    Monsieur Gourde, vous avez la parole. Cinq minutes.

[Français]

    Je vais revenir à une question d'ordre pratique.
    Élections Canada portera une attention particulière à toutes les plateformes numériques au cours de cette élection-ci. Si un problème surgit en raison d'une fausse publicité, d'une fausse nouvelle ou d'autre chose du genre, avez-vous un protocole d'entente pour travailler directement avec Élections Canada, le plus rapidement possible, afin de remédier à la situation?
(1625)

[Traduction]

    Nous n’avons rien d’aussi officiel qu’un protocole d’entente. Nous avons eu des échanges extrêmement sérieux avec Élections Canada et le commissaire aux élections fédérales. Le Bureau du commissaire s’occupe de l’application de la loi, tandis qu'Élections Canada administre les élections.
    Nous travaillons surtout avec Élections Canada pour trouver l'origine des données sur les candidats et des renseignements qui peuvent apparaître dans Google Search, par exemple, lorsqu'un internaute cherche des renseignements de cette nature.
    Chose certaine, avec le commissaire aux élections fédérales, nous travaillons à des mesures d’application de la loi. Nous nous intéressons moins à sa grande préoccupation, la publicité, puisque nous n'en faisons pas, mais il y a aussi des mesures supplémentaires qui ont été prévues dans la loi au sujet de l’usurpation d’identité, par exemple, et nous travaillons avec lui à ces questions. Nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec lui.

[Français]

    Cela m'inquiète tout de même un peu, parce qu'aujourd'hui, tout va si vite à l'ère numérique. S'il se produisait une irrégularité au cours de ma campagne électorale, j'irais faire une plainte auprès d'Élections Canada, et un représentant d'Élections Canada vérifierait peut-être auprès de vous dans la journée même. Vous me dites que vous n'avez aucun protocole d'entente, que vous n'avez jamais négocié afin de mettre en place des façons de fonctionner et que vous n'avez pas désigné des personnes. Un représentant d'Élections Canada va appeler chez vous, mais à qui s'adressera-t-il?
    La plainte sera transférée d'une personne à l'autre, et quelqu'un finira par y répondre? Y a-t-il déjà une personne désignée au sein de votre compagnie pendant toute la période d'élections pour parler à un représentant d'Élections Canada et pour répondre aux plaintes?

[Traduction]

    Oui. Essentiellement, il y aura une équipe, selon le problème précis en cause, pour répondre aux questions précises qui seront soulevées. Nous parlons à ce sujet de cheminement hiérarchique.
    Essentiellement, lorsque nous sommes en présence d'organismes de réglementation établis comme le Bureau du commissaire ou Élections Canada, ceux-ci ont les moyens d’obtenir des réponses immédiates à des questions urgentes simplement parce qu’ils font remonter les problèmes les plus graves. En pareil cas, nous faisons abstraction des circuits ordinaires et accélérerons les processus de rapport normaux.
    Il vaut également la peine de noter que, au cas où vous verriez quoi que ce soit dans l’un de nos systèmes, nous avons une grande variété de mécanismes qui permettent de nous le signaler directement. Nous vous encourageons à les utiliser.

[Français]

    Cette équipe est-elle déjà en place? Existe-t-elle déjà ou sera-t-elle formée pendant l'été?

[Traduction]

    Nous sommes en train de mettre l’équipe sur pied.

[Français]

    Merci.
    C'est tout pour moi.

[Traduction]

    Ce sera maintenant M. Baylis. Cinq minutes.
    Je voudrais revenir un peu sur ce que disait mon collègue, M. Erskine-Smith. De toute évidence, nous avons du mal à vous croire au sujet de votre capacité de satisfaire aux exigences du projet de loi C-76. Facebook dit pouvoir y arriver. Êtes-vous au courant?
    Nous sommes au courant.
    Vous savez donc.
    Quelles compétences ont ses ingénieurs que les vôtres n’ont pas?
    Ce n’est pas une question de compétences. Ses systèmes de publicité fonctionnent très différemment des nôtres et Facebook a pu répondre aux exigences d'une manière qui est impossible pour nous.
    Que se passe-t-il si, lorsqu'on veut publier une annonce, qu'on va sur la page, affiche la publicité et coche la petite case pour indiquer qu'il s'agit d’une publicité politique? Ensuite, vos programmeurs font exactement ce que M. Erskine-Smith a décrit, ce qui entraînerait un délai d'au plus 24 heures.
    Pourquoi ne pas faire comme cela? C'est une solution qui semble assez simple.
    À cause du mode de fonctionnement de nos systèmes publicitaires, la solution n’est pas aussi simple qu’elle pourrait le sembler à première vue. Ce sont des systèmes extrêmement complexes et le moindre changement a des effets en cascade. Après de longues discussions sur la capacité de mettre en place des systèmes comme ceux-là, il est devenu évident que nous ne pouvions pas y arriver à temps.
    C’est devenu clair, alors vous avez eu une longue discussion. Bien entendu, lorsque vous avez eu cette discussion, vous avez établi un calendrier raisonnable, n’est-ce pas?
    Nous cherchions à respecter la date limite du 30 juin, date à laquelle les exigences...
    J’ai compris. Vous avez dit que vous ne pouviez pas respecter cette date.
    Lorsque vous avez eu cette solide discussion, vous avez clairement dit que vous aviez tout examiné et que vous ne pourriez pas y arriver cette fois-ci. Vous aviez un calendrier à respecter. Quelle était la date à respecter?
    Le 30 juin était la seule date à prendre en considération parce que c’est celle de l'entrée en vigueur des exigences de la loi.
    Disons que je dois réaliser un projet et que je dois le faire d’ici le 30 juin. Je me demande comment je vais m’y prendre, je vois les étapes à franchir et je fixe une date, et je me demande si je peux la respecter ou non.
    Je ne dis pas simplement qu’en tant qu’ingénieur, je ne peux pas y arriver pour le 30 juin. Les ingénieurs ont dû faire des calculs et des projections. Voilà ce que je vous demande. Ils ont sûrement fait ces calculs pour dire qu’ils ne pouvaient pas atteindre tel ou tel objectif. Quand ils ont fait ces projections, à quelle date sont-ils arrivés?
    Il n’y avait pas d'autre date que le 30 juin, la date d'entrée en vigueur des obligations prévues par la loi. Si le système n'était pas élaboré et mis en place à ce moment-là, nous dérogerions à la loi. Par conséquent, si c’était...
(1630)
    Comment sont-ils arrivés à la conclusion qu’ils ne pouvaient pas respecter cette date?
    Simplement en examinant la charge de travail à accomplir...
    D’accord, alors ils ont examiné le travail nécessaire et ils ont dit que c’était une lourde charge. J’ai compris. Ils devaient dire combien de temps il faudrait si le travail s'amorçait aujourd’hui. Combien de temps ont-ils dit qu'il faudrait?
    Ils ne nous ont pas donné cette projection.
    Je voudrais comprendre quelque chose. Nous avons dit qu’il fallait apporter les changements au plus tard le 30 juin. Les ingénieurs ont fait une sorte de projection, concluant qu'ils ne pouvaient pas y arriver. Mais ils n'ont pas dit quand ils pouvaient y arriver; seulement qu'ils ne pouvaient pas le faire. Mais ils doivent dire, par exemple qu'il leur faut six mois, sept mois, 10 mois, 10 ans, et ajouter ensuite que, s'ils s'y mettent aujourd'hui, ils peuvent achever le travail à une certaine date. Quelle est cette date?
    Je ne peux pas vous donner cette information. On leur a simplement demandé s'ils pouvaient y arriver à une date donnée.
     Même si on demande: pouvez-vous faire cela d'ici... Disons que je veux me faire construire une maison dans les 10 jours. Le constructeur fait ses calculs et me dit qu'il lui en faut 30. Parfait. Donc, à compter d'aujourd'hui, vous avez 30 jours.
    Mettons que je veuille programmer quelque chose, et c’est vraiment compliqué.
     Je comprends, monsieur Kee, que ce soit très compliqué. Je fais donc mes calculs, je dis qu'il me faut sept mois alors qu'on me demande de m'en tenir à six. Ce n’est pas possible. Je comprends. Mais je veux un chiffre, que ce soit sept mois ou 10 jours. Je veux connaître la date que donnent les prévisions. C’est une question simple. Les ingénieurs ne peuvent pas se contenter de dire que ce n’est pas possible, parce qu’ils n’ont pas fait le travail.
    Me suivez-vous ou non?
    A-t-on établi un calendrier pour dire quand cela pourrait se faire? Il faut qu’ils aient fait cette étude pour pouvoir dire qu'il était impossible de respecter le délai.
    Je n’ai pas cette information. Je peux me renseigner.
    Je ne vous demande pas seulement de vous renseigner. Je vous demande de revenir ici et de nous donner la date précise découlant de leurs calculs. C'est clair?
    Absolument.
    Comprenez-vous ce que je demande?
    Je vois ce que vous voulez savoir. Pouvons-nous communiquer cette donné, étant donné qu’il s’agit de renseignements techniques confidentiels internes...
    Vous ne pouvez pas divulguer...
    Je dis que je n’ai pas été informé des dates prévues.
    Je comprends que vous n’en avez pas été informé, mais ce renseignement existe. Allez-vous le communiquer ou non? Est-ce une sorte de secret qu’il faut... Fait-il partie des secrets de Google?
    Soit dit simplement, je ne peux pas m’engager à divulguer des renseignements sans avoir des échanges à l'interne au préalable.
    Je voudrais voir les calculs exacts que les ingénieurs ont faits avant de dire qu'ils ne pouvaient respecter une date donnée. Est-ce une question logique ou non? Est-ce une question qui ne tient pas debout? Je suis curieux.
    Étant donné que, à compter du 30 juin, des obligations légales sont en vigueur et que... [Inaudible]
    Ils ne pouvaient pas respecter les exigences, j’ai compris.
     La question appelait un oui ou un non: « Pouvez-vous y arriver avant cette date? » La réponse a été non. Voilà où nous en étions.
    D’accord, alors comment les ingénieurs en sont-ils arrivés à dire non? On leur a demandé s'ils pouvaient faire le travail en six mois et ils ont répondu par la négative.
    Comment en sont-ils arrivés là? Ont-ils simplement dit: « Non, impossible », ou ont-ils fait un calcul quelconque?
    C’est une question simple. Je vous demande: « Pouvez-vous faire le travail dans tel délai? » La réponse est négative. Avez-vous simplement dit non comme ça, ou avez-vous fait un travail quelconque avant de conclure que c'était impossible?
    Facebook a dit: « Nos ingénieurs sont peut-être un peu plus intelligents », ou: « Nos systèmes ne sont manifestement pas aussi complexes que leurs merveilleux systèmes » ou encore: « Nous avons plus d’argent que Google pour faire le travail ». J'ignore ce qu'on a fait chez Facebook, mais ces gens-là ont fait des calculs et conclu qu'ils pouvaient y arriver.
    Vous avez fait des calculs avant de répondre non, ou avez-vous simplement dit comme ça: « Non, impossible »?
    Avez-vous répondu spontanément ou avez-vous au moins fait un certain travail? C’est ce que je demande; et si vous avez fait un certain travail, je voudrais en prendre connaissance.
    Je le répète, nous avons examiné les exigences et il a été évident que nous ne pouvions vraiment pas nous y conformer dans le délai imparti. Soyons clairs: il est également évident que Microsoft ne peut pas y arriver; Yahoo! n'a pas encore annoncé sa décision, mais il probable qu'il ne pourra pas non plus; beaucoup d’autres ne seront pas en mesure de satisfaire aux exigences.
     Facebook peut le faire; et vous dites que Microsoft...
    Yahoo! fait des calculs pour voir s'il est possible d'y arriver.
    Vous avez fait des calculs, ou avez-vous pris une décision spontanée?
    C’est une question simple: avez-vous fait des calculs ou simplement décidé que c'était impossible?
    Nos équipes d’ingénieurs nous ont dit que nous ne serions pas en mesure de satisfaire aux exigences. C’est cela...
    Votre équipe d’ingénieurs a-t-elle répondu sans trop réfléchir ou a-t-elle fait un travail quelconque?
    Pourquoi ces mystères? Si vous avez fait le travail, répondez simplement: « Écoutez, Frank, nous avons examiné la question; il nous faudrait 2,2 ans et quatre mois. »
    Pourquoi êtes-vous si contrarié? Dites-le-moi. Pourquoi ces mystères?
    Il ne s’agit pas d’être contrarié. C’est plutôt qu’il y avait un délai ferme et qu'il fallait répondre par oui ou non. La réponse...
    D’accord, mais comment êtes-vous parvenus à la réponse?
    J'ai dit qu'il nous faudrait voir.
    Les ingénieurs ont-ils répondu spontanément ou ont-ils fait des calculs? Vous avez dit que Yahoo! est en train de faire des calculs.
    Je vous ai déjà dit qu’il faudrait nous renseigner.
    Allez-vous nous communiquer les dates...
    Je dois me renseigner.
    ... et les calculs?
     Je dois me renseigner. Je ne peux pas m’engager à vous communiquer les calculs.
    S’ils l’ont fait...
    Merci, monsieur Baylis. Nous aurons encore un peu de temps. Si vous voulez intervenir de nouveau, vous pourrez demander à le faire.
    C’est maintenant au tour de M. Dusseault.
    Mesdames et messieurs, il nous reste passablement de temps. Nous avons 55 minutes. Les témoins sont là pour le reste de la période. Quoi qu’il en soit, dites-moi. D'habitude, nous essayons de terminer à 17 heures le jeudi, mais nous verrons où cela nous mènera.
    Monsieur Dusseault, vous avez trois minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Cette fois-ci, je vais me concentrer davantage sur YouTube, une plateforme très populaire qui a beaucoup d'influence, tout comme Google — dont elle fait partie. J'en parlais d'ailleurs tantôt. YouTube dirige parfois des usagers vers des contenus extrêmes, peu fiables, qui font état de théories conspirationnistes ou qui en font aussi l'éloge à l'occasion. YouTube fait passer ces contenus pour de la véritable information.
    Je me demandais si vous aviez quelques détails à nous donner sur l'algorithme utilisé concernant les usagers, une fois qu'ils sont sur une page Web affichant, disons, un contenu de nature politique, puisque c'est le sujet de notre discussion aujourd'hui. L'algorithme va leur donner des suggestions d'autres vidéos à droite de la page qu'ils consultent, ou sous la vidéo s'ils utilisent un téléphone mobile. Quel algorithme est utilisé et quel est le degré de transparence de cet algorithme qui suggère du contenu aux usagers quand ils sont sur une page Web en particulier?
    Quel mécanisme y a-t-il pour s'assurer que ce contenu ne fera pas l'éloge de théories de conspiration ou ne donnera pas de fausses nouvelles, de l'information peu fiable ou, peut-être aussi, de l'information non équilibrée, c'est-à-dire de l'information qui fait peut-être juste la promotion d'une idée ou d'une vision, d'un parti politique?
    Quel degré de transparence et quel mécanisme avez-vous mis en place pour vous assurer que le contenu qui est suggéré aux usagers est un contenu de qualité, qu'il est équilibré en matière de politique publique, de partis politiques et d'idées politiques également?
(1635)

[Traduction]

     Un certain nombre de facteurs entrent en ligne de compte dans le système de recommandation. Il vaut la peine de souligner que la pondération qui se fait autour des informations et du contenu est différente, disons, de celle qui s'applique au divertissement. Au départ, les recommandations visaient davantage le contenu de divertissement comme la musique, etc. En fait, cela fonctionne extrêmement bien à cet égard.
    Lorsque le système a été appliqué à l'information, il est devenu plus évident qu’il y avait des difficultés à surmonter, et c’est même pourquoi nous avons modifié le système de pondération. Ce que cela signifie, c’est qu'il faut examiner le facteur lorsque nous évaluons la vidéo et voir ensuite dans quelle mesure elle fait autorité: surpondération pour ce qui fait autorité et sous-pondération pour l’information qui ne fera pas nécessairement autorité ou qui ne sera pas digne de confiance.
    C’est très contextuel. Cela dépend des détails de votre signature. L’information est disponible pendant votre temps de navigation. On se fonde sur l’information sur la vidéo que vous regardez, sur le genre de vidéo que d’autres personnes ont aimé regarder et sur les autres vidéos que les gens qui ont aimé cette vidéo aiment regarder, etc. C’est pourquoi tout est vraiment dynamique, évolue et change constamment.
    En plus d’apporter des rajustements et des changements au système au fil du temps pour veiller à ce que nous fournissions de l’information faisant davantage autorité dans le cas des informations, nous ajoutons également des éléments contextuels supplémentaires, grâce auxquels nous aurons en fait des indicateurs clairs, des étiquettes et des cases contextuelles pour indiquer s’il y a des sujets ou des personnes qui font souvent l’objet de désinformation. Par exemple, il y a les théories du complot que vous avez évoqués.
     En gros, si l'internaute voit une vidéo qui donne à penser qu'il a une certaine hésitation à l’égard de la vaccination, etc., il obtiendra de l’information disant qu'il n'y a pas de confirmation scientifique et fournissant des données contextuelles sur le sujet de la vidéo. La même chose s’applique par exemple aux théories du complot concernant les attentats du 11 septembre. Ce sera un processus ininterrompu.
     Nous voulons surtout nous assurer que, même si un utilisateur voit de l’information, on lui donne le contexte pour qu’il puisse l’évaluer lui-même.

[Français]

    J'aimerais utiliser les secondes qu'il me reste pour discuter de la transparence de cet algorithme. Plus tôt, je pense que M. McKay a parlé de cette question de transparence pour ce qui est des publicités, à savoir pourquoi certaines publicités vous sont présentées. Il y a même, semble-t-il, une nouvelle fonctionnalité du navigateur Chrome qui permet justement aux usagers de voir pourquoi telle publicité leur a été proposée.
    Serait-il possible d'avoir cette même fonctionnalité pour ce qui est du contenu recommandé aux utilisateurs de YouTube? Ces derniers pourraient ainsi un peu mieux comprendre pourquoi tel contenu leur est suggéré plutôt qu'un autre.

[Traduction]

    Nous cherchons constamment des moyens d’accroître la transparence et de faire en sorte que les utilisateurs comprennent le contexte dans lequel ils reçoivent l’information.
    En fait, nous avons publié un rapport — je crois qu’il comptait 25 pages — sur la façon dont Google lutte contre cette information. Cela comprend toute une section consacrée à YouTube qui explique une bonne partie de ce que je vous ai décrit, ainsi que, encore une fois, les facteurs généraux qui entrent en ligne de compte. Nous nous efforcerons d’atteindre cet objectif, comme nous le faisons pour les publicités sur la plateforme YouTube.
(1640)
    Je voudrais ajouter quelque chose à ce que M. Kee vient de dire. Dans le cas du compte Google, l'internaute peut aller dans « myaccount » et il y trouve ce que nous avons identifié comme ses intérêts pour l’ensemble de nos produits et services. Il peut aller dans myaccount et voir qu’en général, il aime la musique des années 1980 et les vidéos de course, par exemple Il y trouve cette observation générale, qu'il peut ensuite corriger. Il peut supprimer cette information ou ajouter des intérêts supplémentaires afin que nous puissions mieux comprendre ce qui l'intéresse et ce qu'il ne veut pas recevoir.
    Sur la page elle-même, il y a une petite barre de trois points à côté des vidéos, les vidéos spécialement recommandées — sur les appareils mobiles, comme vous l’avez dit — où l'internaute peut signaler que tel contenu ne l'intéresse pas ou qu'il en voudrait davantage. Il y a un contrôle fin qui permet de ne pas voir telle ou telle chose dans son flux vidéo, sur son fil de nouvelles ou dans les services de Google.
    Merci.
    Nous allons passer au prochain tour, qui sera le dernier. Nous avons quatre autres questions à poser, ou quatre autres créneaux. Sur la liste figurent M. Graham, M. Erskine-Smith, M. Nater et M. Baylis, qui ont chacun cinq minutes.
     Cela vous convient-il?
    Allez-y, monsieur Graham.
    Merci.
    Je voudrais revenir sur d’autres questions concernant les délais. Au tout début, pendant le premier tour, nous avons essayé de savoir si vous seriez prêts pour les prochaines élections, en 2023. Il semblait difficile de répondre à cette question. Je n’ai jamais eu de réponse disant que Google serait prêt à appliquer les dispositions du projet de loi C-76 d’ici les élections fédérales de 2023. À supposer qu'elles aient lieu cette année-là.
    Si nous savons que le système sera prêt pour 2023 et ne le sera pas pour le 30 juin 2019, savez-vous à quoi vous en tenir? Y travaillez-vous sérieusement en ce moment? Savez-vous s’il sera prêt à un moment donné entre ces deux dates?
    En termes simples, ce serait clair si je disais que nous allons nous efforcer d'être prêts d’ici 2023. Je ne peux pas prendre d'engagement précis quant à la date.
    Il vaut la peine de souligner autre chose: nous sommes une entreprise mondiale et nous travaillons à des élections dans le monde entier. Les équipes chargées de ce travail déploient le rapport de transparence d’un endroit à l’autre. Cela continuera d’évoluer et de croître. De plus, nos propres systèmes de publicité continueront d’évoluer et de croître.
    C’est pourquoi il est très difficile de fixer une date ferme, de dire par exemple qu'il faudra deux ans. D'ici là, il y aura un certain nombre de changements, qui ont du reste déjà été amorcés dans le système et qui auront des répercussions à cet égard.
     Compris.
    Lorsque le RGPD est entré en vigueur, assez récemment, combien de temps vous a-t-il fallu pour le mettre en place?
    Je crois qu’il a fallu plus de quatre ans pour discuter du RGPD et de son application. La mise en oeuvre se poursuit. Dès le départ, nous nous sommes concentrés sur le RGPD en participant à la discussion sur le contenu, le ton et les objectifs du texte, en travaillant en étroite collaboration avec la Commission européenne et son personnel, puis en veillant à ce que nous ayons les systèmes en place pour pouvoir nous y conformer. C’est un processus qui se poursuit.
    Pour faire une analogie, disons qu'il y a une distinction extrême entre la façon dont les amendements au projet de loi C-76 ont été examinés et mis en oeuvre et la manière dont les lois sont normalement étudiées et mises en oeuvre.
    Je comprends ce que vous voulez dire.
    Monsieur Kee, pendant le dernier tour, j’ai parlé des changements de 15 mots. Entre les tours, j’ai parcouru mes notes, car je siège au Comité de la procédure et j’ai participé au processus du projet de loi C-76 du début à la fin. Nous avons entendu de nombreux témoins et reçu beaucoup de mémoires, mais je n’en trouve aucun de Google. Sur ces 15 mots, comment...
    C’est parce que les changements ont été apportés lors de l’étude article par article après la clôture de la liste des témoins, de sorte que nous n’avons pas fait de représentations au comité parce que l'on n’étudiait pas les dispositions en question à ce moment-là.
    Comme je l’ai dit, je me ferai un plaisir de les distribuer maintenant. C'est à ce stade qu'elles ont été fournies au comité sénatorial.
    D’accord. Merci. C’est bon à savoir.
    C’est tout pour l’instant. Je vous remercie de votre participation. La réunion a été intéressante, et je vous en remercie beaucoup.
    Merci.
    Allez-y, monsieur Baylis.
    Vous n’accepterez pas les publicités politiques. C’est la décision qui a été prise, n’est-ce pas?
    C’est exact.
    D’accord.
    Comment allez-vous m’empêcher de faire de la publicité? Vous ne voulez pas accepter ma publicité, mais je suis, disons, vilain. Je ne suis pas un bon acteur, alors je vais essayer de faire passer une annonce de toute façon. Comment m’en empêcherez-vous?
    Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, toute la publicité entrante sera évaluée par une combinaison de systèmes automatisés et des équipes d'inspecteurs chargées d'en faire la police.
    D’accord. Pour m’arrêter, vous allez mettre en place ce système permettant d'identifier une publicité, n’est-ce pas?
    M. Jason Kee: C’est exact.
    M. Frank Baylis: Et à côté vous aurez une équipe de contrôleurs — un système automatisé, une équipe non automatisée —et ils vont aussi identifier ces publicités, n’est-ce pas?
(1645)
    Oui. En général, le système automatisé fait un premier tri dans les publicités basé sur la recherche de signaux ou de balises indiquant qu’il s’agit probablement d’une publicité politique. Puis, éventuellement, l’examen est confié à une équipe humaine, s’il faut par exemple une analyse contextuelle que les machines ne peuvent tout simplement pas fournir.
    D’accord. Vous n’êtes pas en mesure de créer le registre dans ce délai, mais vous êtes en mesure de mettre en place les programmes, le personnel et les ressources nécessaires pour y mettre fin, n’est-ce pas?
    C’est exact.
    D’accord. J’arrive avec ma pub. Vous pouvez soit l'accueillir dans le registre, soit tout simplement la bloquer, mais vous pouvez clairement l’identifier, n’est-ce pas? Nous sommes d'accord là-dessus. Vous venez de dire que vous pouvez l’identifier.
    Nous utiliserons nos systèmes pour identifier et appliquer nos politiques publicitaires, oui.
    Vous avez admis que vous pouvez identifier la publicité.
    C’est exact.
    D’accord.
    Une fois que vous pouvez déterminer qu’il s’agit de la publicité, au lieu de dire: « J’ai toute ma technologie et les gens pour la bloquer » — vous l'avez — pourquoi ne pouvez-vous pas simplement dire: « D’accord, je l’ai identifiée, et je vais simplement la verser au registre »?
    Simplement parce que, encore une fois, on aurait du mal à actualiser le registre en temps réel et, comme je l’ai dit, on fournirait aussi par là cette information à des tiers.
    Vous ne pouvez pas le faire en temps réel.
     Disons que j’arrive. Vous avez votre système automatisé. Voici la pub. elle n’est pas bonne, mais vous ne le savez pas parce que vous ne pouvez pas le faire en temps réel, n’est-ce pas? C’est sur votre page ou votre plateforme Google pour le temps qu’il vous faut... Vous ne pouvez pas le faire en 24 heures, alors combien de temps vous faut-il... Deux jours? Donnez-moi un chiffre.
    Eh bien, comme je l’ai dit, elle serait étiquetée, puis examinée...
    Je sais, mais combien de temps vous faudra-t-il pour l’identifier? Pas moins de 24 heures, n’est-ce pas? J’ai compris. En combien de temps pouvez-vous le faire? Une semaine? Un jour? Deux jours?
    Encore une fois, je ne pourrais pas vous donner de délais précis.
    Disons 48 heures. Pouvons-nous dire cela simplement pour les besoins de la discussion?
    J’arrive. Voici ma publicité — boum. J’ai un système pour l’identifier. Mais ça prend 48 heures, n’est-ce pas? Ma pub est dans votre système pendant 48 heures avant que vous ne disiez: « Bigre, ça nous a pris 48 heures pour identifier cette pub et maintenant on doit la retirer. » C'est ce qui va se passer?
    Comme je l’ai dit, on aura à la fois les systèmes automatisés et notre équipe d’inspection de publicité pour l'identifier et...
    Mais seront-ils en mesure de l’identifier en temps réel?
    M. Jason Kee: ... qui s’appliqueront essentiellement...
    M. Frank Baylis: En temps réel?
    Le plus rapidement possible.
    D’accord, mais vous devez le faire dans les 24 heures, n’est-ce pas?
    Il y a une différence entre la capacité d’identifier et de supprimer une pub et celle de mettre à jour un registre de publicité.
    D’accord. Je veux m’assurer de bien comprendre. Il y a une différence entre le fait de pouvoir l’identifier et la retirer dans les 24 heures, aucun problème... Pour l’identifier et la retirer, j’ai un système automatisé et le personnel qui va avec. Disons que j’ai identifié la pub et que je l’ai retirée — Ouf, on a eu chaud. Je peux l’identifier et l’enlever en 24 heures, mais je ne peux pas l’identifier et l’inscrire dans un registre, comme une grosse base de données — d'ailleurs même pas si grande, j’imagine, selon vos normes. Est-ce bien ce que je comprends?
     En raison d’autres aspects complexes liés aux exigences du registre, c’est la raison pour laquelle on n’a pas pu déployer le système. Comme je l’ai dit, nous le faisons dans d’autres pays, n’est-ce pas?
    Oui, j’en suis sûr.
    Soyons clairs sur ce que vous dites. Vous pouvez identifier et bloquer la pub dans les 24 heures, à l’aide d’une combinaison de logiciels et de personnes.
    Vous pouvez l’identifier et la bloquer dans les 24 heures. Est-ce exact?
    Comme je l’ai dit, on appliquera la loi de façon très rigoureuse en ce qui concerne la détection et le retrait.
    Vous avez les systèmes, avez-vous dit. C'est l'oeuvre de vos ingénieurs.
     Disons que j’ai identifié et bloqué la pub dans les 24 heures. Une fois que vous l’avez identifié, quelle que soit la programmation... parce qu'il en faut un peu pour dire, « paf, retirez-le dans les 24 heures ». J’imagine que vous pouvez le faire instantanément ou est-ce qu'elle restera 24 heures? Je ne sais même pas. Combien de temps restera-t-elle? C’est la question que je vous pose.
    Comme on le fait pour toutes les catégories de publicité, on essaie de les supprimer immédiatement après la détection.
    Oh, immédiatement. Qu’est-ce que c’est? Instantanément?
    Immédiatement après la détection.
    D’accord. Vous pouvez donc la capturer et la supprimer immédiatement, mais vous ne pouvez pas la capturer et, dans les 24 heures, programmer son transfert dans cette base de données? Bien franchement, c’est trop demander. Vos programmeurs ne peuvent pas le faire, mais bien sûr qu'ils peuvent faire le programme, la trouver, constituer une équipe de soutien et la retirer instantanément. Cette pub n'est pas diffusée. Disons que je connais la pub et que je l’ai trouvée instantanément, mais vous voudriez que je programme une base de données? Allons donc, nous ne sommes que Google...
     Combien de milliards d’heures êtes-vous regardé par jour, avez-vous dit? Était-ce 500? Quel était votre chiffre?
    Sur YouTube, il y a un milliard d’heures de contenu regardé chaque jour.
    Un jour? Vous avez donc une assez grosse base de données. Puis-je le supposer?
    Il y a une multitude de bases de données, mais encore une fois...
    Pour une petite base de données pour un tas de publicités légales à mettre... Je ne peux pas imaginer que cette base de données représente un dixième d’un dixième de votre réseau matériel/logiciel, mais vos ingénieurs ne peuvent pas programmer... Ils peuvent tout faire. Ils peuvent l’attraper et l’identifier instantanément, mais ils ne peuvent tout simplement pas l’inscrire dans une base de données parce que c’est trop compliqué? la gestion des bases de données n’est-elle pas l’une des spécialités de Google? Est-ce que je me trompe?
(1650)
    Comme je l’ai déjà dit, nous ne pouvions tout simplement pas répondre aux exigences particulières.
    Pouvez-vous mettre...
    Monsieur Baylis, cela met fin au temps dont vous et M. Erskine-Smith disposiez ensemble.
    Nous avons quelqu’un d’autre, puis nous reviendrons à vous.
    D’accord. C’est juste.
     Il semble que c’est ce que vous demandez.
    Nous passons maintenant à M. Nater, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureux de faire partie de ce comité. Je siège habituellement au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, alors c'est bon de changer un peu de décor.
    En ce qui concerne YouTube, vous avez des politiques en place touchant ce qui peut être et ne pas être diffusé sur YouTube. Mais bien souvent, il y a des situations où certaines des vidéos les plus virales, ou celles qui frôlent la ligne sans vraiment la franchir... Comment déterminez-vous à quel point vous êtes près de cette ligne? Quel type d’analyse contextuelle y a-t-il? Quels types de mesures de protection sont en place pour établir où se trouve la limite et quand quelqu’un la frôle sans nécessairement la franchir? Quels types de procédures avez-vous mis en place?
    Essentiellement, toute vidéo identifiée comme tangente, au moyen d'un rapport ou de nos systèmes automatisés, qui, on l'a dit, vérifient la conformité des vidéos, est soumise à un examen manuel pour une analyse humaine. L’examen, en gros, conclura, d’accord, ceci ne va pas vraiment jusqu’au discours haineux qui incite à la violence, mais ça a quelque chose de dénigrant et la vidéo sera classée parmi les cas limite.
     J’aimerais revenir un instant au projet de loi C-76.
    Quand on parle de technologie, d’innovation, d’économie numérique, ce n'est pas aux fonctionnaires du Bureau du Conseil privé, ni à ceux d’Élections Canada que je pense en premier lieu. Quand je pense à l'univers de l’économie numérique, je pense à des entreprises comme Google, Facebook, Twitter — celles qui innovent.
    Dans votre témoignage, vous avez mentionné que les rédacteurs du projet de loi ne vous avaient pas consulté. Je trouve cela troublant. Le gouvernement est probablement l’un des pires délinquants pour ce qui est de suivre l’évolution de la technologie, surtout lorsqu’il rédige des lois, lorsqu’il ne consulte pas les gens de l’industrie.
    La décision de ne pas faire de publicité était surtout d'ordre technique, avez-vous dit, en raison de l'échéance du 30 juin, 1 juillet, impossible à tenir. Je peux l’accepter, et je tiens à préciser pour le compte rendu la raison pour laquelle je l’accepte.
     Élections Canada a lui-même dit que les dispositions du projet de loi C-76auraient dû être en vigueur et recevoir la sanction royale au plus tard le 30 avril 2018. Le 30 avril 2018, le projet de loi avait tout juste été déposé à la Chambre des communes. Il n’a reçu la sanction royale qu'en décembre 2018.
    Si Google, YouTube, vos entreprises privées décident demain que vous ne voulez plus diffuser de belles vidéos de chats, il n’y a rien que le gouvernement du Canada puisse faire pour vous y forcer. Ce serait la même chose, je suppose, pour n’importe quel type de publicité. Si vous décidez de ne pas faire de publicité pour une raison autre que les violations des droits de la personne, rien ne vous oblige à le faire.
    Ce que je trouve fascinant, cependant — et c’est davantage une diatribe qu’une question —, c’est que le gouvernement du Canada, dans sa hâte de mettre en oeuvre ce projet de loi à la toute dernière minute, n’a jamais consulté ceux qui pour l'essentiel devraient le mettre en oeuvre .
    Les changements ont été apportés au cours de l’étude article par article. Il y en a eu plus de 200. J’ai participé à la plupart de ces discussions, hormis quelques séances manquées en raison d'une naissance. Ensuite, ils ont été déposés à la dernière minute, après que les témoins aient eu l’occasion de discuter...
    Ce n’est pas une question, mais vous pouvez faire des commentaires à ce sujet. Je suis tout simplement incrédule à l’idée que le gouvernement précipite l’adoption de ce projet de loi — la toute dernière période possible avant les élections — pour ensuite s’attendre à ce que toutes les entreprises privées se conforment aux règles pour lesquelles elles n’ont pas eu l’occasion a) d'être consultées ou b) de faire des suggestions pendant l’étude article par article.
     Je serais heureux de savoir ce que vous en pensez.
    Je peux répondre par une observation. Nous sommes en train de discuter du fait qu’une entreprise a déclaré ne pouvoir mettre en oeuvre cette mesure, en respectant l'échéance du 30 juin, et du fait que l'on a fourni de l’information sur les raisons pour lesquelles on ne peut pas mettre en place les outils répondant aux exigences de la Loi électorale telle que modifiée.
    La réalité, comme vous l’avez décrite, c’est que toutes les entreprises ont des produits et services différents dans cette industrie, que ce soit pour la publicité ou la diffusion de nouvelles, et qu'elles peuvent interpréter leurs obligations et leur capacité de les respecter de multiples façons. Jusqu’à maintenant, une seule entreprise a dit qu’elle allait mettre en oeuvre un outil décrit dans la loi.
    Je ne dis pas cela à titre de défense, mais pour refléter la complexité des questions. Comme vous l’avez fait remarquer, il faut beaucoup d’études et de discussions pour être en mesure de déployer des outils qui sont efficaces, qui durent longtemps et qui fournissent l’information de façon prévisible et fiable aux utilisateurs.
    On ne veut absolument pas se retrouver dans une situation où l'on ne serait pas en mesure de le faire. Notre travail consiste à fournir de l’information et des réponses aux questions de nos utilisateurs.
    Cependant, on est dans une situation inconfortable où le respect de la loi passe par la suppression de la publicité politique. La réalité, comme vous l’avez dit, c’est qu’avec d’autres consultations et une discussion sur les amendements déposés par M. Kee, ainsi qu’une plus grande considération de l’industrie, tant de notre point de vue que de celui des entreprises canadiennes et des sites canadiens, on aurait peut-être pu aboutir à une issue différente sur l’outil approprié pour les Canadiens permettant de leur fournir de l’information pendant ce cycle électoral.
(1655)
    On va maintenant recourir à une combinaison. On entendra d’abord M. Erskine-Smith, puis M. Baylis pour terminer. Il nous reste environ quatre minutes.
    Allez-y, monsieur Erskine-Smith.
    Merci beaucoup.
    J’aimerais d’abord vous poser une question au sujet de l’équipe chargée de la vérification. Évidemment, beaucoup dépend de l’honnêteté des utilisateurs, d’une certaine façon. On a eu écho de votre expérience dans l’État de Washington où des publicités politiques ont été placées dans certains cas.
    Quelle est la taille de l’équipe au Canada qui examinera cette question? Combien d’employés...
     Il y aura une équipe décentralisée qui sera renforcée au besoin pour répondre à la demande et appliquer la politique en matière de publicité.
    Vous visez quels effectifs?
    Je n'ai pas de chiffre précis à vous donner: un nombre suffisant pour assurer le respect de la politique.
    D’accord.
    Je pose la question au sujet des chiffres, parce qu’en ce qui concerne la confiance et la sécurité... Encore une fois, ceci est tiré d’un article de Bloomberg. Je crois savoir qu’il y avait un nombre modeste d’employés — seulement 22, je crois — qui devaient examiner le contenu pour garantir qu'il est fiable et sûr. Ce nombre est maintenant plus élevé.
     Quel est le nombre exact de personnes qui examinent actuellement le contenu pour garantir qu'il est fiable et sûr?
    Plus de 10 000.
    Vous êtes donc passé de 22 à plus de 10 000. C’est formidable.
    Peut-être pourriez-vous m’éclairer... En 2016, un de vos employés a proposé que le contenu frôlant la limite ne soit pas recommandé. YouTube n’a pas pris cet avis au sérieux et l’a rejeté.
    Vous dites maintenant qu’en janvier de cette année, ils ont accepté l’avis. Qu’est-ce qui a changé?
    Encore une fois, je ne dirais pas les choses de cette façon.
    Cela fait partie de l’élaboration et de l’évolution continue des politiques, je pense, et de la façon dont on aborde le contenu de la plateforme qui est limite, difficile, controversé, non autorisé et de piètre qualité. Il y a actuellement une évolution dans notre approche à cet égard et concrètement un déploiement de technologies supplémentaires, surtout par le biais d’algorithmes, etc. pour chercher à garantir que l'on fournit à nos utilisateurs du contenu de qualité qui fait autorité.
    Ce n’est donc peut-être pas parce que personne n’était attentif auparavant et que vous faisiez beaucoup d’argent, et maintenant les gens sont attentifs, vous avez mauvaise presse et vous avez décidé de changer vos pratiques en conséquence.
    Je ne partage pas cette interprétation.
    D’accord.
    Je vais maintenant aborder la question sous un angle différent.
    Google, mon collègue a dit que vous avez fait 8 milliards de dollars au dernier trimestre. J’ai vérifié. En fait, c’est 8,5 milliards de dollars américains, alors félicitations. C’est vraiment bon en dollars canadiens. C'est grâce à la vente de publicité, n’est-ce pas? J’aime telle vidéo musicale ou j’aime lire tel journaliste, alors vous me montrez cette information, puis vous lancez une publicité et vous faites beaucoup d’argent avec. Vous faites énormément d’argent.
    Cela a très bien fonctionné pour vous. En fait, ce qui est arrivé, c’est que le journaliste, le musicien, le photographe, l’écrivain, l’acteur, le producteur de film — tous ces gens — ne gagnent rien. Mais ça ne fait rien. On leur enlève leur droit d’auteur, ils ne gagnent rien et vous empochez tout, mais ça ne fait rien. Pourquoi ça ne fait rien? Comme vous l’avez bien dit, monsieur Kee, vous êtes une plateforme, pas un éditeur, et tant que vous restez une plateforme, vous bénéficiez de la protection dite de « safe harbour » (refuge sûr).
    Ce qui se passe, c’est que tous nos artistes, tous ceux qui ont des droits d’auteur, un photojournaliste... Autrefois, il leur arrivait de prendre une image incroyable, ils la vendaient et gagnaient beaucoup d’argent. Aujourd'hui vous prenez cette photo gratuitement, mais vous n’avez rien fait. Vous me montrez la photo; vous lancez une publicité et vous empochez tout. C’est de là que vient tout ce contenu, que vous ne payez pas et ne voulez pas payer.
    Le danger que vous courez — la raison pour laquelle vous ne voulez pas faire cela —, c’est que dès que vous commencez à contrôler ces publicités, vous cessez d’être une plateforme pour devenir incontestablement un éditeur. Une fois que vous êtes éditeur, vous êtes assujetti au droit d’auteur et à tout le reste.
    N’est-ce pas là la vraie raison? Le charabia technique que vous venez de me servir sur le fait que vous pouvez saisir instantanément la pub, la bloquer, mais pas la verser dans une base de données, ne vise-t-il pas en réalité à protéger ce modèle d’affaires qui vous permet de faire 8,5 milliards de dollars américains en un trimestre alors que tous ces gens protégés par le droit d’auteur ne peuvent pas faire un sou? Ils crient haut et fort qu’ils ne peuvent pas faire un sou, et que vous prenez tout cet argent. Vous ne voulez tout simplement pas être un éditeur, parce qu’une fois que vous êtes un éditeur, vous ne bénéficiez plus de la clause de « safe harbour ».
     N’est-ce pas là la véritable raison?
(1700)
    Pas du tout.
    C’est ce que je pensais...
    Il y a plusieurs choses ici.
    Premièrement, si c’était le cas, il est difficile de comprendre pourquoi on devrait prendre une décision qui nous coûte de l’argent, dans la mesure où on ne tire plus de revenus d’une catégorie de publicités. Plus important encore, en ce qui concerne nos partenaires éditeurs et les créateurs de YouTube, on fonctionne selon un modèle de partenariat dans le cadre duquel on partage les revenus. Dans le cas des sites Web, par exemple, qui utilisent l’infrastructure de Google — c’est pourquoi on a eu du mal à se conformer au projet de loi C-76, parce qu’ils affichent des publicités de Google sur leur contenu —, ils gagnent plus de 70 % des revenus pour chaque publicité diffusée parce que ce sont eux qui fournissent le contenu.
    Monsieur Kee, vous payez quelques dollars pour protéger votre modèle d’affaires. Vous ne payez pas pour... et n’essayez pas avec ça de vous faire passer pour de bons citoyens.
    L’an dernier seulement, nous avons versé plus de 13 milliards de dollars à des sites Web.
     Vous payez parce que vous ne voulez pas devenir éditeur. Êtes-vous prêt à dire ici et maintenant que vous êtes prêt à devenir éditeur, à vous appeler éditeur, et à être assujetti...
    Nous ne sommes pas un éditeur.
    Je sais que vous n’êtes pas éditeur. Je sais que vous vous protégez très bien de cette façon, parce que dès que vous devenez éditeur, vous devez commencer à payer pour tout cet argent que vous volez à tous les autres.
    Comme je l’ai dit, comme on fonctionne sur la base d'un modèle de partenariat, on verse des fonds aux créateurs et à ces éditeurs...
    Et vous avez négocié... Vous payez, et avec quels artistes avez-vous négocié le montant pour leur...
    On a des milliers d’accords de licence de musique avec toutes les grandes sociétés de gestion collective, les maisons de disques, etc. et on a versé plus de 6 milliards de dollars à l’industrie de la musique l’an dernier.
    Vous avez payé 6 milliards de dollars, et vous n’avez fait que 8,5 milliards de dollars par trimestre.
    Cela ne concerne que YouTube. Pas nos autres services.
    Justement! Vous avez gagné encore plus d’argent, je le sais.
    Cela s’ajoute aux plus de 13 milliards de dollars que l'on a versés aux éditeurs qui diffusent nos publicités. Comme on l’a dit, notre modèle fondamental est un modèle de partenariat.
     Êtes-vous en train de me dire pour le coup que toutes ces personnes ont des droits d’auteur, sont heureuses...
    M. Baylis...
    Voici ma dernière question.
    Êtes-vous en train de me dire que vous êtes un si bon citoyen corporatif que n'importe quel musicien, journaliste, photographe, écrivain, acteur ou producteur de films, me dirait: « On est tout à fait satisfait de ce que Google et YouTube nous paient »? Vous pouvez répondre à cette question par oui ou par non.
    On continuera de les consulter. On les traite comme des partenaires et c’est ce qu'on fera.
    Pouvez-vous simplement dire oui ou non? Diront-ils oui, ils sont heureux ou non?
    On continuera de les consulter et on a un partenariat avec eux.
    C’est une question simple. Seront-ils contents?
    Nous avons un modèle de partenariat avec eux.
    Merci.
    Cela nous amène à la fin de nos questions.
    Monsieur Erskine-Smith, un dernier commentaire, ou est-ce que c'est bon? D’accord.
    Monsieur Graham.
    J’aimerais faire un commentaire sur un autre sujet, sur quelque chose que Google a dit, parce que tout n’est pas mauvais.
    Je tiens à féliciter Google, qui a annoncé aujourd’hui que tous les Chromebooks seront bientôt directement compatibles avec Linux. Tout n’est donc pas négatif. Je suis très satisfait de certaines des choses que vous faites. Je vous en remercie.
    Encore une fois, monsieur McKay et monsieur Kee, merci d’être venus. Nous attendons avec impatience votre comparution et celle de Google à l’IGC. J’espère que les demandes sont prises au sérieux, comme nous l’avons demandé à votre PDG; nous espérons que vous y réfléchissez encore.
    Merci d’être venus aujourd’hui.
    La séance est levée.
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