Je vous souhaite un bon retour de cette relâche parlementaire plutôt longue. J’espère que mes collègues ici présents ont tous eu l’occasion de discuter avec leurs électeurs et même de se détendre. Nous en avons pour longtemps, car d’ici la fin du mois de juin, le Parlement siégera pendant neuf semaines, et il n’y aura que deux semaines de relâche. Nous avons beaucoup de travail à faire.
Je tiens à remercier M. Lightbound d’avoir assuré la présidence pendant mon absence lors de la semaine précédant la relâche.
Aujourd’hui, nous accueillons M. Drapeau, de l’Université d’Ottawa, qui n’en est pas à sa première comparution au Parlement. Bienvenue. Nous accueillons également l’ambassadeur de Suède, M. Per Ola Sjogren. Soyez le bienvenu, monsieur. Enfin, M. Toby Mendel, du Centre for Law and Democracy, témoignera par vidéoconférence.
Messieurs, nous vous sommes reconnaissants d’être avec nous ce matin. Nous commencerons par vos exposés.
Nous étudions la Loi sur l’accès à l’information. Pour vos exposés, vous avez 10 minutes chacun; puis, nous passerons aux questions. Je vais suivre l’ordre qui figure sur la liste.
Nous commençons par vous, monsieur Drapeau; allez-y, s’il vous plaît.
:
Merci de cette introduction, monsieur le président. Je remercie également les membres du Comité de m’accorder l’honneur de comparaître au Comité ce matin.
[Français]
En guise d'ouverture, permettez-moi de vous dire que je m'intéresse depuis 1992 au fonctionnement de la Loi sur l'accès à l'information, et ce, à titre de demandeur au profit de mes clients, d'auteur d'un texte sur la Loi sur l'accès à l'information et de professeur qui enseigne le droit de l'accès à l'information.
[Traduction]
Au cours des deux dernières décennies, j’ai assisté à l’érosion graduelle de la pertinence du régime d’accès à l’information. Je suis convaincu que cette situation ne tient pas tant de lacunes ou de la désuétude de la Loi sur l’accès à l’information qui empêcheraient la prise en compte de changements radicaux. À mon avis, cette descente dans l’insignifiance découle plutôt de deux facteurs interreliés.
Le premier est l’effet conjugué du manque de volonté systémique des institutions fédérales à respecter l’esprit et la lettre de la Loi sur l’accès à l’information et de l’absence de surveillance par ceux qui sont tenus d’exiger des comptes à tout ministère récalcitrant ou fautif. Par conséquent, il n’existe aucune pénalité ou aucune réprimande relativement à la violation du droit d’accès quasi constitutionnel — une situation à laquelle s’habituent les Canadiens —, de sorte que le non-respect de la Loi sur l’accès à l’information est maintenant une pratique acceptée dans bien des secteurs de l’appareil fédéral. Chaque année, des milliers d’utilisateurs du régime d’accès voient leurs demandes d’information traitées dans le mépris total de leur droit à obtenir une réponse complète dans les délais prescrits par la Loi.
Deuxièmement, seule une faible proportion des utilisateurs privés de leurs droits se prévaut du droit de porter plainte prévu dans la Loi. La plupart du temps, toutefois, ceux qui portent plainte doivent attendre un an ou deux, voire plus longtemps, pour obtenir une réponse. Évidemment, ils se rendent rapidement compte que plus ils attendent, moins leur plainte est pertinente. En outre, ces gens seront moins portés par la suite à se prévaloir du droit de porter plainte pour obtenir des informations. Cela se transforme en un cercle vicieux qui enlève tout pouvoir aux demandeurs d’accès.
Je souligne au passage que pendant le dernier exercice, 78 000 demandes d’accès ont été présentées aux divers organismes fédéraux. De ce nombre, 1 600 dossiers ont fait l’objet de plaintes auprès du commissaire à l’information. Cela signifie qu’à peine 2 % des requêtes initiales ont fait l’objet de plaintes auprès du commissaire à l’information.
Comme je l’ai indiqué dans mon mémoire, je suis préoccupé par le débat continu sur la réforme de la Loi sur l’accès à l’information. Premièrement, je suis contre l’idée d’accorder au commissaire un pouvoir d’ordonnance pour le règlement de certaines plaintes. Deuxièmement, je m’inscris en faux contre l’hypothèse non encore prouvée selon laquelle accorder un tel pouvoir au commissaire améliorerait le régime d’accès.
Permettez-moi d’apporter des précisions.
[Français]
Premièrement, je crois véritablement que l'intention de donner au commissaire le « pouvoir d'ordonner » désavouerait la validité même de la doctrine et des principes fondamentaux qui forment l'assise du régime d'accès. Cela transformerait le rôle du commissaire de façon magistrale, à savoir en celui d'un officier de justice n'ayant pas le moindre impact sur le sort de la très grande majorité des demandeurs d'accès.
[Traduction]
Deuxièmement, je suis convaincu que les pères du régime d’accès ont trouvé la bonne formule dans le Livre blanc de 1977 en choisissant l’option parlementaire, une option qui donne au commissaire un droit d’accès au Parlement et l’oblige à rendre des comptes de son rendement directement à ce comité.
Dans un tel scénario, le Parlement demeure un des acteurs principaux quant à la gestion et au contrôle du régime d’accès. Toutefois, comme je l’ai indiqué plus tôt, accorder à la commissaire un pouvoir d’ordonnance modifierait forcément cette relation. La commissaire deviendrait alors une fonctionnaire judiciaire qui serait, à ce titre, tenue d’agir judiciairement à l’égard du Parlement, des institutions fédérales et des utilisateurs du régime d’accès. De plus, cela obligerait également la commissaire à accroître davantage son effectif déjà important.
Par conséquent, je suis loin d’être certain qu’accorder un pouvoir d’ordonnance au commissaire permettrait d’atténuer le malaise qui règne actuellement concernant le régime d’accès. Je suis plutôt d’avis qu’il ne faut pas modifier de façon importante le rôle fondamental du commissaire. Je propose et recommande que le vérificateur général mène un examen exhaustif et systématique de la structure, de l’organisation et de l’effectif du Bureau d’accès à l’information de façon à assurer la mise en place de la structure organisationnelle la plus économique et la plus efficace possible. À mon avis, ce n’est pas le cas actuellement.
Dans le même ordre d’idées, je recommande aussi, pour le Commissariat à l’information et le Commissariat à la protection de la vie privée, la remise en place d’un service administratif commun semblable à ce qui existe actuellement au Service administratif des tribunaux judiciaires. Je recommande aussi de rationaliser les postes de gestion, d’administration et des services juridiques jugés redondants par le vérificateur général et d’utiliser ces ressources pour accroître l’effectif actuel d’enquêteurs, ne serait-ce que pour réduire l’arriéré important de plaintes. Actuellement, le temps de traitement est de deux ans.
[Français]
Dans mon mémoire, je m'attarde aussi sur 12 propositions de réforme. Par exemple, je propose que les coordinateurs de l'accès à l'information, qui sont éparpillés dans quelque 200 institutions fédérales, soient dorénavant nommés par le gouverneur en conseil. Après tout, ces coordinateurs sont dans le feu de l'action. Ils sont les premiers et souvent les seuls intervenants à l'intérieur du régime d'accès. Ils sont aussi ceux et celles qui ont le lourd devoir de répondre aux demandeurs d'accès tout en tenant compte des directives et des décisions prises par la chaîne hiérarchique au sein de chaque ministère concernant l'accessibilité aux documents demandés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.
S'ils étaient nommés par le gouverneur en conseil, ces coordinateurs, au sein des divers ministères, auraient dorénavant l'autorité et l'indépendance requises pour faire respecter le droit d'accès des demandeurs.
[Traduction]
Avant de terminer, je souligne que l’une des recommandations de mon mémoire est d’assujettir la Chambre des communes et le Sénat à la Loi sur l’accès à l’information. Comme vous le savez probablement, c’est la situation qui prévaut actuellement au Royaume-Uni; cela permet d’offrir aux résidants des îles britanniques un droit à l’accès à la fois important et bienvenu à certains documents qui relèvent des parlementaires. Les Canadiens ne doivent s’attendre à rien de moins.
En conclusion, le Canada mérite d’avoir un gouvernement ouvert, honnête et responsable. Cela peut se faire — du moins en partie — par la mise en place d’un régime d’accès à l’information fonctionnel. Or, à l’heure actuelle, le régime d’accès à l’information est en crise. La priorité actuelle qui consiste à accorder au commissaire le pouvoir d’ordonner la communication de documents ne devrait pas être vue comme une panacée permettant de pallier les lacunes de la Loi sur l’accès à l’information, qui a été rendue inopérante, en quelque sorte. Le Québec a appris cette leçon, et semble réticent à maintenir le pouvoir d’ordonnance comme mode de fonctionnement pour le commissaire à l’information de la province.
Cependant, même si ce pouvoir d’ordonnance était accordé, il convient de garder l’esprit que cela permettrait de s’attaquer qu’à une très faible proportion de la pointe de l’iceberg. Par conséquent, j’exhorte respectueusement le Comité à se concentrer plutôt sur les 90 % des demandeurs — ou le reste de l’iceberg —, dont les dossiers relèvent actuellement exclusivement du coordonnateur de l’AIPRP de chaque organisme. Je suis d’avis que la commissaire a un rôle important à jouer au sein du régime d’accès à l’information. Elle est en effet chargée de recevoir et d’examiner les plaintes des utilisateurs de l’accès à l’information, d’en faire rapport et de tenir le Parlement au courant. La Loi sur l’accès à l’information offre à la commissaire un arsenal complet de pouvoirs exhaustifs en matière d’examen des plaintes, et ces pouvoirs doivent être pleinement utilisés, ce qui n’est pas le cas en ce moment. De plus, la commissaire dispose d’un puissant droit d’accès au Parlement qui lui permet d’alerter les acteurs de la démocratie canadienne lorsque le gouvernement et les institutions civiles manquent à leurs obligations. Messieurs, cela doit être maintenu.
C’est là-dessus que se termine mon exposé.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je remercie les membres du Comité de m’avoir invité à présenter un aperçu des mesures législatives de la Suède en matière de liberté d’expression et d’accès à l’information.
Permettez-moi d’abord de dire que l’ouverture est l’une des valeurs fondamentales de la Suède. La liberté d’opinion, la liberté d’expression et le respect des principes liés à un accès libre et gratuit aux documents officiels figurent parmi les pierres d’assise d’une société ouverte. L’enjeu dont le Comité est saisi est donc une question qui nous préoccupe.
J’aimerais d’abord vous parler brièvement de la constitution suédoise. La constitution fixe les modalités de la composition du Parlement et du gouvernement, et leurs modalités de fonctionnement. La liberté d’opinion et d’expression ainsi que d’autres droits et libertés bénéficient d’une protection spéciale en vertu de la constitution. Trois des quatre lois fondamentales qui forment la constitution suédoise régissent les droits et libertés liés à la liberté d’opinion et d’expression. Ces droits sont donc fortement ancrés dans notre constitution.
J’aimerais d’abord parler des documents que j’ai fait parvenir aux membres du Comité. Le premier document est un aperçu des trois lois fondamentales liées à la liberté de parole, d’expression et d’opinion. La première porte sur les instruments du gouvernement; le chapitre 2 de la loi protège la liberté d’expression personnelle, « que ce soit de vive voix, par des illustrations, par écrit, ou par tout autre moyen. »
La deuxième loi fondamentale est la Loi sur la liberté de presse, qui protège la liberté de la presse écrite, ainsi que le principe d’accès libre et gratuit aux dossiers publics — l'enjeu dont le Comité est saisi aujourd’hui — et le droit de communiquer de l’information à la presse de façon anonyme.
La troisième loi fondamentale est la Loi fondamentale sur la liberté d’expression, qui prévoit des protections semblables à celles offertes par la Loi sur la liberté de presse pour d’autres médias, notamment la télévision, la radio et les sites Web que l’on trouve sur Internet. Il s’agit de la plus récente des lois fondamentales de la Suède.
La quatrième loi n’est pas l’une des lois fondamentales, mais elle a toute sa pertinence par rapport à cet enjeu. Il s’agit de la Loi sur l’accès à l’information et sur la confidentialité, qui a été adoptée par le Parlement en 2009. Elle contient des dispositions complémentaires à la constitution, en particulier la Loi sur la liberté de presse, et porte sur le droit d’obtenir des documents officiels. L’ouverture est une règle fondamentale; la confidentialité doit être clairement définie, et c’est ce que fait la loi.
La Loi sur la liberté de presse a été adoptée par la Suède en 1776 et est devenue, dans son intégralité, la loi fondamentale il y a déjà 250 ans. La Suède est alors devenue le premier pays du monde à permettre la liberté de presse.
La protection constitutionnelle offerte en vertu de la Loi sur la liberté de presse et de la Loi fondamentale sur la liberté d’expression signifie que l’administration publique ne peut limiter la liberté d’expression que dans les cas précisés dans ces deux lois fondamentales, et selon les modalités prescrites. L’interdiction de la censure est l'un des aspects centraux de la Loi fondamentale sur la liberté d’expression; ce principe était déjà énoncé dans la version de 1766.
Il est aussi important de souligner que la Loi sur la liberté de presse vise les organismes administratifs et d’autres organismes publics.
La Loi sur la liberté de presse et la Loi fondamentale sur la liberté d’expression protègent les organismes de presse par l’intermédiaire de deux dispositions traitant respectivement du caractère public des documents officiels et de la protection des sources.
Les règles constitutionnelles sur le caractère public des documents officiels sont énoncées au paragraphe 1 du chapitre 2. Vous les trouverez dans le troisième document que je vous ai distribué aujourd’hui. On y lit ce qui suit:
Chaque citoyen suédois a droit à un accès libre et gratuit aux documents officiels, afin de favoriser l’échange d’opinions et la disponibilité de renseignements complets.
Tout document conservé par les organismes publics est, par définition, un document officiel, peu importe s’il a été reçu ou rédigé par l’organisme, et sans égard à son contenu.
Un document officiel peut donc être public ou confidentiel. Le chapitre 3 de la Loi sur la liberté de presse comprend aussi d’autres définitions et restrictions. Par exemple, les registres de données électroniques ainsi que d’autres documents physiques et électroniques sont considérés comme des documents.
Dans le cas des documents émanant d’un organisme public, on considère en général qu’ils deviennent publics lorsqu’ils sont présentés sous forme définitive. Les ébauches et les propositions deviennent aussi des documents publics si elles sont classées et enregistrées après le traitement d’un dossier.
Donc, en principe, tout document officiel est public. Il doit être accessible, habituellement sous sa forme initiale, à toute personne qui souhaite l’obtenir. Les particuliers ont le droit de recevoir une transcription ou une copie du document, et peuvent aussi le reproduire ou en faire une copie à l’aide de leur propre équipement.
Les exceptions au principe du caractère public des documents officiels, c’est-à-dire les cas où un document officiel doit demeurer secret, doivent être énoncées dans une mesure législative spéciale. Il s’agit de la Loi sur l’accès à l’information et sur la confidentialité, dont j’ai parlé plus tôt, et d’autres mesures législatives qui renvoient à cette loi, dans les cas exceptionnels.
Dans le prochain document que j’ai fait circuler, on traite du paragraphe 2(2) de la Loi sur la liberté de presse. Ce chapitre précise les motifs liés à la confidentialité. L’accès au document ne peut être restreint qu’en conformité à ce principe et aux lois subséquentes et subordonnées.
Je ne ferai pas la lecture de ces sept principes. À titre d’exemple, toutefois, pour mon ministère, le premier principe — les relations avec un autre État ou une organisation internationale — est naturellement le motif le plus fréquemment invoqué pour justifier le caractère confidentiel d’un document.
Si une autorité publique autre que le Parlement de la Suède ou le gouvernement refuse une demande d’examen d’un document public, le demandeur peut interjeter appel auprès du tribunal administratif de première instance. Si l’appel est rejeté par la cour d’appel, l’appelant peut s’adresser à la Cour administrative suprême. La procédure d’appel est définie au paragraphe 2(15). Tout appel concernant une décision d’un ministre se fait auprès du gouvernement.
Tous les dossiers concernant l’accès aux documents officiels doivent être traités rapidement. Le libellé exact du dernier paragraphe de la Loi sur la liberté de presse — le paragraphe 2(13) —, c’est que toute demande d’une transcription ou d’une copie d’un document officiel doit être traitée dans les plus brefs délais. Concrètement, cela signifie qu’il faut la traiter immédiatement. Lorsque nous recevons une demande d’accès à un document, nous devons y répondre immédiatement.
Je vais maintenant parler brièvement de deux autres principes liés au principe de l’accès libre et gratuit aux documents officiels.
Comme le prévoient les dispositions préliminaires de la Loi sur la liberté de presse et de la Loi fondamentale sur la liberté d'expression, les sources ne sont pas assujetties à une responsabilité légale. La protection à l'égard de la responsabilité légale ne se limite pas aux procédures judiciaires. Une source ne peut pas être tenue légalement responsable dans le cadre de procédures spéciales lorsqu'il est jugé que la divulgation de l'information contrevient à la loi, qu'elle constitue une infraction. Dans la pratique, le cas le plus important est celui du fonctionnaire d'une administration locale ou autre qui transmet à un destinataire compétent, à des fins de publication, des renseignements visés par la Loi sur les secrets officiels. La principale règle est que le fonctionnaire ne peut pas être reconnu coupable d'avoir contrevenu à l'obligation de garder le secret.
Le deuxième principe, qui se rapporte également à la question à l'étude, est le droit de demeurer anonyme, dont il est question au chapitre 3 de la Loi sur la liberté de presse. La divulgation du nom de sources ou d'auteurs qui souhaitent garder l'anonymat est une infraction punissable pour tous ceux qui participent à la production de documents imprimés, ou d'un élément d'information protégé par la constitution. Ils peuvent se soustraire à l'obligation de garder le secret seulement dans des cas très spéciaux, qui sont énoncés au paragraphe 3(3) de la Loi sur la liberté de presse.
C'est ce que je voulais dire en guise d'introduction au sujet de la législation dans son ensemble et de la façon dont la liberté d'accès à l'information provenant de documents publics est réglementée dans la constitution et dans des lois connexes. Je serai heureux de participer aux discussions et de faire mon mieux pour répondre aux questions. J'ajoute que nous sommes très favorables à ce que des démarches soient entreprises afin qu'un constitutionnaliste suédois comparaisse devant votre comité, si vous le souhaitez. Si les membres du Comité veulent également se rendre à Stockholm pour approfondir davantage leur étude des règles suédoises portant sur ces questions, ils sont les bienvenus.
Merci.
Je suis heureux de me joindre à vous à distance. J'espère qu'Ottawa s'est remis de sa récente chute de neige. À Halifax, nous avons l'habitude de ce genre de tempêtes et de la sloche, et nous vous plaignons donc un peu.
Je vais faire quelques observations préliminaires au sujet de mon organisme, le Centre for Law and Democracy, ou le CLD, dont le siège se trouve à Halifax. C'est un organisme international de défense des droits de la personne qui fait la promotion des droits fondamentaux à la démocratie, notamment ce que nous appelons le droit à l'information, ou l'accès à l'information dans le langage canadien, car c'est reconnu comme un droit de la personne en vertu du droit international.
Nous travaillons dans ce dossier à l'échelle internationale. Je crois qu'il est juste de dire que nous collaborons avec les principales organisations intergouvernementales qui se concentrent sur ce droit: le Rapporteur spécial de l'ONU sur la liberté d'expression, d'autres organismes des Nations unies, le Conseil de l'Europe, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et ainsi de suite.
Le CLD est d'avis — ce qui, je crois, ne diffère pas du point de vue général de la société civile au Canada — que le système fédéral d'accès à l'information ne fonctionne pas. Même en tant qu'organisation de la société civile, nous pesons très soigneusement nos paroles. Nous n'employons pas très aisément des expressions comme « ne fonctionne pas », mais je pense, à ce stade-ci, que c'est un point de vue bien connu, qui est appuyé par de nombreuses études menées sur une très longue période de temps. Nous pensons qu'il est approprié de dire que la loi ne fonctionne pas.
Je souscris à la plupart des critiques formulées par M. Drapeau, mais je ne suis pas du même avis que lui au sujet de la loi. Mon organisme a collaboré avec Access Info Europe pour créer un classement des lois en matière de droit à l'information. Il s'agit d'une méthode reconnue à l'échelle internationale pour évaluer les forces et les faiblesses des cadres juridiques qui régissent le droit à l'information. Je dirais que cette méthode est reconnue partout dans le monde. À titre d'exemple, des acteurs comme la Banque mondiale et l'UNESCO s'en servent souvent pour faire leur travail dans différents pays. D'ailleurs, pas plus tard qu'hier, l'UNESCO m'a contacté parce qu'elle étudie la possibilité de recourir au classement pour évaluer un projet de loi sur l'accès à l'information qui est préparé en Palestine. De concert avec la Banque mondiale et l'UNESCO, nous avons souvent utilisé le classement à ce genre de fins.
Le Canada, c'est-à-dire le cadre fédéral, a obtenu 79 points sur un total possible de 150 points. Je crois que c'est grave. Le pays ayant obtenu la meilleure note, qui, fait surprenant, est la Serbie, a obtenu 135 points, ce qui montre que le classement n'est pas un ensemble irréaliste de mesures rigoureuses. Beaucoup de pays obtiennent une note supérieure à 100.
Ce qui est encore peut-être plus révélateur, c'est que le Canada se classe maintenant au 59e rang parmi les 102 pays dont les lois ont été évaluées, et qu'il occupe chaque année un rang de plus en plus inférieur à mesure que d'autres pays réforment leur législation ou en adopte une qui est plus rigoureuse que celle du Canada. Je crois que le classement des lois en matière de droit à l'information indique très clairement que le cadre juridique canadien présente de graves problèmes.
Nous aimerions d'abord mentionner que nous voyons d'un très bon oeil les améliorations rapides que a annoncées le 31 mars. Nous avions demandé toutes ces modifications à la loi. Nous pensons qu'elles sont d'une importance cruciale. En même temps — et je crois que le classement des lois en matière de droit à l'information le montre clairement —, c'est loin d'être suffisant. Nous estimons qu'une réforme plus en profondeur de la loi est absolument nécessaire pour la faire concorder davantage à ce que la plupart des Canadiens considéreraient comme une position respectable pour le Canada à l'égard d'un droit de la personne reconnu à l'échelle internationale, à savoir le droit à l'information.
Nous n'appuyons pas l'idée de remettre à 2018 l'examen complet de la loi. Nous pensons que les Canadiens, de toute allégeance politique et des différents secteurs, demandent maintenant depuis de nombreuses années la réforme de cette loi. À notre avis, il est inutile et essentiellement inacceptable de la reporter de deux ans.
Nous signalons également avec inquiétude que les améliorations rapides annoncées par Scott Brison sont identiques aux engagements figurant dans sa lettre de mandat.
Nous craignons que remettre la réforme à 2018 puisse entraîner d'autres retards et d'autres prolongations, de sorte qu'elle n'aurait pas lieu au cours de la présente législature. Nous estimons que ce serait très regrettable.
En janvier 2013, nous avons préparé une présentation dans le cadre de l'examen de la loi effectué par le Commissariat à l'information, et nous avons proposé des modifications dans quatre domaines.
Le premier concerne la portée ou l'application de la loi. C'est ici que les améliorations rapides qui ont été proposées ont la plus grande incidence et font donc avancer le plus les choses. Parallèlement, nous avons remarqué qu'il y a plusieurs domaines dans lesquels la portée de la loi serait malgré tout trop limitée. Nous attirons l'attention sur l'exclusion générale du Cabinet dans la portée de la loi; le caractère limité de la liste d'organismes publics de l'annexe 1 qui n'est pas régulièrement mise à jour à mesure que la nature de ces organismes change; et le fait que la loi se limite aux citoyens et aux résidants plutôt qu'aux particuliers, contrairement à la loi suédoise dont nous venons d'entendre parler et à beaucoup d'autres lois.
Le deuxième domaine dans lequel nous avons constaté que des changements étaient nécessaires se rapportent aux exceptions de la loi. Les améliorations rapides ne comportent pas de propositions de modification à cet égard. Nous signalons que l'annexe 2 comprend presque 60 [Note de la rédaction: difficultés techniques] garder le secret. L'ambassadeur de la Suède vient tout juste de nous dire que son pays a une loi qui établit les principes pour les cas d'exception, et qu'aucune autre loi ne peut s'en écarter. Nous appuyons fermement cette approche. Malheureusement, les exceptions de l'annexe 2 vont bien au-delà des principes établis dans la Loi sur l'accès à l'information ou qui sont mieux reconnus en vertu du droit international.
Nous signalons également que plusieurs exceptions sont trops vastes ou foncièrement illégitime. Beaucoup d'exceptions ne satisfont pas au critère de préjudice. La divulgation nuirait à un intérêt particulier — ce genre de langage. En vertu du droit international, le principe est que toutes les exceptions devraient être dictées en fonction du préjudice. L'information ne devrait être retenue que lorsqu'elle porterait atteinte à un intérêt protégé.
Enfin, nous faisons remarquer, encore une fois pour ce qui est des exceptions, que la dérogation fondée sur l'intérêt public que comporte la loi est très limitée. En 2010, la Cour suprême du Canada a étendu sensiblement la portée du critère de l'intérêt public en l'étendant à toutes les exceptions non obligatoires, ce qui signifie que les organismes publics doivent maintenant tenir compte de l'intérêt public pour ce qui est de l'ensemble des exceptions non obligatoires, ce qui n'est toujours pas le cas.
À propos des procédures, je suis certain que d'autres témoins vous en ont parlé. La version actuelle de la loi comporte deux principaux problèmes. L'un d'eux est les délais. M. Drapeau a parlé des cas où des organismes publics obtiennent un vaste pouvoir discrétionnaire afin de prolonger le délai dans lequel ils doivent répondre à une demande d'accès à l'information. Par conséquent, il faut parfois attendre très longtemps avant qu'une demande soit traitée, contrairement à ce qui est fait dans les autres pays, qui ont des échéanciers strictes et fixes. Nous avons des propositions très concrètes pour améliorer ce système. Nous estimons que c'est une des choses les plus importantes à régler.
L'autre question qui doit être réglée par rapport aux procédures concerne les frais. Des frais peuvent être imposés en vertu de la loi. Un barème de frais a été préparé. Il n'est pas conforme aux estimations de coûts réalistes. Même le montant demandé pour les photocopies est beaucoup plus élevé que ce qu'un Canadien pourrait s'attendre à payer auprès d'une entreprise commerciale.
Il s'agit de deux questions se rapportant aux procédures.
Enfin, pour ce qui est des appels, je suis encore une fois en désaccord avec M. Drapeau en ce qui a trait au pouvoir exécutoire du commissaire à l'information. C'est une question que mon organisme a étudiée très soigneusement. Comme vous le savez, dans beaucoup d'autres pays et dans différentes provinces canadiennes, il y a un mélange de pratiques. Compte tenu des preuves irréfutables provenant de l'étranger et du Canada, nous pensons qu'un pouvoir exécutoire est beaucoup plus important et efficace. Nous signalons qu'un tel pouvoir aurait vraisemblablement une forte incidence positive non seulement sur les processus décisionnels entrepris par le commissaire, mais aussi sur les processus de médiation.
Il y a de bonnes raisons de croire qu'avoir en main le pouvoir exécutoire, si je puis m'exprimer ainsi, dans un contexte où il y a des procédures de médiation, lesquelles sont au coeur du règlement des différends en vertu de la législation sur l'accès à l'information, rend ces procédures plus efficaces. Nous appuyons donc fermement l'octroi d'un pouvoir exécutoire au commissaire. Nous convenons que ce n'est pas une panacée en vertu de la loi. Beaucoup de changements doivent être apportés, et nous convenons aussi qu'il doit y avoir une vague de changements culturels pour ce qui est de la façon dont la loi est appliquée. Nous estimons toutefois que ces importantes modifications doivent être apportées à la loi.
Je terminerai en disant que, partout au Canada, la réforme des lois sur l'accès à l'information a fait l'objet d'un peu d'immobilisme, alors qu'il arrive souvent que certaines provinces comparent leur loi à celle d'autres provinces et constatent qu'elle n'est pas très différente, que cela fonctionne suffisamment bien. Nous faisons remarquer que Terre-Neuve est sortie du lot en apportant des modifications audacieuses à sa loi, et qu'elle devance donc de loin les autres provinces canadiennes au classement des lois en matière de droit à l'information. Nous encourageons vivement le gouvernement fédéral à s'engager dans un processus semblable de réforme pour ce qui est de la Loi sur l'accès à l'information.
Merci.
:
Permettez-moi d'être franc un instant, car je pense que c'est mon devoir de l'être. Il y a bien longtemps, sous le gouvernement de en 1979, vos prédécesseurs au pouvoir ont écouté et ont créé un Livre vert sur l'accès, puis ils ont examiné différentes options y compris l'émission d'ordonnances. À l'autre extrémité, ils se sont penchés sur le modèle de l'ombudsman, qu'ils appelaient l'option parlementaire. Pourquoi? Ils voulaient tenir un ministre responsable devant la Chambre, le public et les contribuables de l'utilisation efficace de l'accès, de sorte que ce ministre doive rendre des comptes à votre Comité. En vertu de la loi, la commissaire a en fait un rôle de commissaire, de médiatrice et d'ombudsman.
Nous utilisons le modèle suédois, qui nous a bien servi. J'ai discuté avec M. Clark et , qui était le ministre des Communications responsable de l'introduction de la loi initiale en 1980; il l'avait présentée à la Chambre et avait fini par la faire adopter en 1983. C'est ainsi que notre système fonctionne depuis. C'est une sorte de mécanisme de médiation, et le Commissariat à l'information ne fait enquête que sur les plaintes qui sont signalées au ministère chaque année, et il s'adresse à votre Comité aussi souvent que nécessaire pour que la pression du public demeure sur les décideurs, à savoir les ministres.
Votre Comité a joué un rôle très important au fil des ans, de même que dans la création de l'accès à l'information en 1983. J'ai parlé à chaque commissaire qui a été en poste. Le fait d'apporter des modifications changerait le mécanisme de même que la relation avec la commissaire, qui ne viendrait plus ici pour vous rendre des comptes. Vous ne joueriez plus le rôle que vous êtes actuellement censé jouer, aux termes de la loi. Lorsque la commissaire aurait des fonctions judiciaires, comme c'est le cas au Québec, elle ne mènerait plus les enquêtes qui sont réalisées en ce moment. Il s'agirait d'un processus judiciaire dans lequel chaque parti ferait des demandes écrites ou verbales. Au Québec, une personne qui porte plainte doit ensuite se présenter devant le comité. Elle doit se rendre à Montréal pour passer devant le comité, retenir les services d'un avocat et présenter ses observations. Le commissariat fait ensuite une déclaration, puis rend sa décision. Si vous n'êtes pas satisfait, vous pouvez faire appel aux tribunaux. Peu de gens le font tellement le processus est long. J'ai représenté des entreprises dans le système québécois, et elles ont décidé de retirer leur plainte à mi-chemin. Pourquoi? Parce qu'elles n'avaient toujours pas été appelées devant le comité un an et demi plus tard. Est-ce bien ce que nous voulons?
Regardez la taille actuelle du Commissariat à l'information, avec son personnel, ses 14 avocats et tout le reste. L'organisation va continuer à prendre de l'ampleur. Vous allez perdre le contrôle, puis vous lirez dans le Globe and Mail qu'une décision a été rendue, mais vous n'aurez aucune idée de la direction que doit prendre l'accès à l'information, ni aucun contrôle là-dessus.
J'ai une dernière remarque. Les commentaires émis par vos dirigeants et qui se trouvent dans le budget ne sont le fruit du travail intellectuel ni de votre Comité, étant donné que vous n'étiez pas formé, ni du Comité de la législature précédente. C'est ce que proposent de nombreux partis très intéressés de la société civile, de même que la commissaire à l'information. Mais je m'y oppose. Comme prévu, le rôle de la commissaire à l'information consiste à appliquer la loi telle qu’elle a été rédigée, et non pas à la modifier ni même à la réformer.
Vous qui êtes nos représentants élus, je vous supplie de prendre position sur une chose aussi fondamentale qu'un droit quasi constitutionnel. C'est ce qu'ont dit la Cour suprême, la Cour d'appel fédérale et la Cour fédérale. Il vous incombe de prendre une décision et de structurer la loi. Vous voudrez peut-être la restructurer. Je vous encourage à le faire, mais la décision doit venir de votre Comité, et non pas de gens de l'extérieur, encore moins de bureaucrates qui ont pour tâche d'appliquer la loi.
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Je vous ai présenté dans mon mémoire la composition du personnel, que j'ai obtenue au moyen d'une demande d'accès à l'information. Lorsque je dis qu'il y a 28 enquêteurs et 14 avocats au Commissariat à l'information, je considère que ce sont les employés de première ligne qui mènent les enquêtes et rendent les décisions. Les quelque 52 autres employés sont des gestionnaires comme le directeur du personnel, le directeur des relations avec les médias, le directeur des ressources humaines et d'autres directeurs généraux qui s'occupent de divers aspects. Dans toute entreprise, et il s'agit bel et bien d'une entreprise ici, il faut que les employés de première ligne qui s'occupent du volet opérationnel, et qu'on appelle les baïonnettes en termes militaires, soient davantage... C'est en quelque sorte le ratio de l'effectif opérationnel à l'effectif de soutien.
Je constate une chose: soit il y a quelque chose que je ne saisis pas, soit la situation est tellement complexe qu'un aussi grand nombre de gestionnaires est nécessaire.
Je ferai remarquer que Me Racicot, le coauteur de l'ouvrage, a travaillé au Commissariat à l'information entre 2001 et 2007. Je lui ai demandé combien d'avocats étaient en poste à l'époque, et il m'a dit qu'il y en avait quatre, et que le nombre de plaintes était le même qu'aujourd'hui. Or, ils sont aujourd'hui 14.
Nous pouvons retenir les services d'avocats jusqu'à ce que... Le retard est maintenant de deux ans ou plus, mais je suis d'avis qu'il devrait plutôt être de deux mois ou plus. Vous devriez compter le délai en mois, si vous voulez respecter le droit d'accès et lui donner un sens.
Il est aujourd'hui plus rapide d'obtenir un examen judiciaire à la Cour fédérale — le délai est de neuf mois — que de porter plainte au Commissariat à l'information. Ce système ne fonctionne pas.
Voilà pourquoi je demande au vérificateur général d'examiner la question et de donner des conseils.
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En vertu des normes internationales, les exceptions devraient être définies à partir de trois critères. Premièrement, elles doivent protéger les intérêts légitimes. L'ambassadeur de la Suède affirme que la loi nationale prévoit une liste de sept principes qui correspondent aux sept catégories d'intérêts. Or, le droit canadien compte bien plus d'exceptions. Il vaudrait mieux avoir un nombre relativement limité d'intérêts pouvant être protégés, comme c'est le cas ailleurs. Bien sûr, les modalités particulières d'une telle protection pourraient être définies dans une autre loi. Par exemple, la législation sur l'accès à l'information reconnaît que la protection des renseignements personnels est un intérêt. La Loi sur la protection des renseignements personnels vient ensuite préciser cette protection.
Le deuxième critère en vertu du droit international, c'est que les exceptions doivent uniquement s'appliquer si la divulgation de l'information porte préjudice à l'intérêt.
Je vous vois hocher la tête, étant donné que c'est tout à fait logique et évident.
C'est seulement lorsque la divulgation de l'information pourrait porter préjudice que l'information peut être cachée, ou que sa divulgation peut être refusée. Or, de nombreuses exceptions prévues à la législation canadienne ne respectent pas ce critère. Nul besoin que la divulgation porte préjudice. Les documents du Cabinet sont systématiquement protégés, un point c'est tout — ce qui ne correspond pas au critère du préjudice, ni même à celui de l'intérêt. Si une tierce partie estime qu'un renseignement est confidentiel, celui-ci demeurera confidentiel même si sa divulgation ne porte préjudice à aucun intérêt légitime. C'est une sorte de droit de veto des tierces parties. Il y a donc toutes sortes d'exceptions dans la législation canadienne.
Enfin, les normes internationales et les pratiques exemplaires prévoient une dérogation dans l'intérêt public. Si une divulgation est dans l'intérêt du public de façon générale — n'oublions pas que le droit d'accès est le plus souvent considéré comme un droit de la personne au Canada, et qu'il fait partie du droit à la liberté d'expression —, l'intérêt du public doit avoir préséance sur la confidentialité. Disons que j'ai un intérêt mineur en matière de protection de la vie privée, mais que l'information apporte une preuve de corruption. Celle-ci devrait tout de même être divulguée.
Dans bien d'autres textes législatifs — comme la loi suédoise, la loi de l'Inde, la loi de l'Afrique du Sud et la loi du Mexique —, les exceptions respectent ces trois critères. Ce n'est toutefois pas le cas de nos lois. Je pense que si nous adoptions ces principes, des exceptions fort différentes seraient prévues au Canada. Ce serait selon moi plus logique et plus facile à appliquer pour les fonctionnaires. Aussi, moins de motifs déraisonnables seraient invoqués pour refuser de fournir de l'information sans raison valable. Je pense qu'il y a beaucoup de chemin à faire sur le plan des exceptions.
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En ce qui concerne le gouvernement, et il s'agirait ici de la décision d'un ministre ou de ministres, la question est renvoyée au gouvernement, pour une décision en appel. C'est la procédure qui est suivie.
Pour ce qui est du comité constitutionnel de notre Parlement qui effectue de façon régulière un examen minutieux de tous les ministres qui accomplissent du travail lié à la transparence lorsqu'il s'agit de documents publics, il fait un examen administratif approfondi de chaque ministre tous les ans. Dans le cadre de cet examen, il peut également faire rapport sur les retards et les irrégularités relativement à la divulgation de documents.
Il peut s'agir également de la demande d'un parlementaire. Un parlementaire peut demander au comité constitutionnel d'examiner une pratique d'un ministère concernant la divulgation de documents. Par exemple, dans mon ministère, celui des Affaires étrangères, il y a, chaque année, un certain nombre de questions au sujet desquelles le ministre doit faire rapport au comité constitutionnel à cet égard. Cela peut avoir trait tant à la confidentialité qu'aux retards.
Puis, il y a l'ombudsman, qui examine l'ensemble de l'administration publique. Il se penche sur les plaintes et fait des recommandations à l'administration sur la mesure dans laquelle cela se rapporte à une demande de divulgation d'un document ou de documents. Dans un certain nombre de cas, l'ombudsman a dit que la divulgation devait se faire « immédiatement » — c'est le mot que j'ai utilisé —, ce qui signifie le même jour. Si un fonctionnaire du ministère suédois reçoit une demande, il faut principalement que cette personne agisse dans l'immédiat. S'il s'agit d'une question complexe, elle peut être renvoyée au responsable du ministère et, en dernier lieu, au ministre, mais il appartient à chaque fonctionnaire d'agir tout de suite après avoir reçu une demande de divulgation d'un document public.
Je dirais que nous avons une culture de transparence, ce qui fait en sorte que les tribunaux et le gouvernement reçoivent relativement peu de plaintes, mais je vous fournirai les données exactes.
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Ce que je voulais dire principalement au sujet de Terre-Neuve-et-Labrador, c'est qu'elle a entrepris un vaste processus de réforme, dans lequel elle a vraiment examiné la loi de fond en comble, déterminé ce qu'il fallait modifier, entre autres, et qu'elle a fini par adopter des mesures législatives beaucoup plus rigoureuses qu'auparavant. Autrement dit, la province s'est lancée dans un vrai processus de réforme et elle a nettement amélioré la loi.
Par exemple, dans notre évaluation de l'accès à l'information, nous avons grimpé de 20 points, et nous sommes au 15e rang mondial, je crois. Puisque seuls les pays sont évalués, nous ne sommes pas véritablement au 15e rang, mais si Terre-Neuve-et-Labrador était un pays, ce serait le cas.
J'encourageais le gouvernement fédéral à faire la même chose plutôt que d'entreprendre des réformes partielles maintenant et de remettre à plus tard une véritable réforme.
Le modèle de Terre-Neuve-et-Labrador est hybride en quelque sorte. Nous attendons toujours de voir à quel point il fonctionne bien. Il est vraiment unique. Il donne beaucoup de pouvoirs au commissaire concernant l'approbation sur les délais supplémentaires dans le traitement des demandes et le prolongement de la période pour la présomption du secret de 20 ans. Je ne me souviens pas exactement de ce que la loi stipule. On a vraiment resserré le régime des exceptions de façon significative, de sorte qu'il semble très différent de celui du fédéral ou de bien d'autres provinces canadiennes. Les procédures ont été améliorées de façon à ce que le processus de demandes, les frais, les prolongations, comme on l'a mentionné, doivent être approuvés par la commission.
Le modèle terre-neuvien a réglé bon nombre des aspects que j'ai soulevés dans mon exposé. Bien entendu, il n'est pas parfait. On est en train de l'analyser, et il est un peu difficile de déterminer si ce modèle hybride s'avérera la réussite espérée, mais ce que je voulais surtout dire, c'est que la province n'a pas entrepris qu'une réforme partielle. Elle s'est lancée dans un véritable processus de réforme.
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Formidable. Je vous remercie tous les deux de votre présence, qui nous aide énormément, et monsieur Mendel, merci de collaborer avec nous par vidéoconférence.
Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, monsieur le président, avant que je commence à poser mes questions, je veux dire que je suis déçu que cela soit inclus dans le budget. C'est quelque chose que nous avions entrepris, et le Comité était prêt à y consacrer beaucoup de temps. Nous avions une longue liste de témoins, mais malheureusement, il semble que le gouvernement va de l'avant dans l'élaboration d'un modèle, sans entendre le débat approfondi du Comité.
Cela dit, j'aimerais connaître l'opinion de chacun d'entre vous, je l'espère; cela dépend du temps dont nous disposons, mais j'aimerais commencer par vous, monsieur l'ambassadeur.
La commissaire à l'information recommande entre autres d'ouvrir cela aux gens qui ne sont pas des citoyens, qui ne sont pas Canadiens, mais qui font des demandes. J'espère avoir le point de vue de chacun d'entre vous sur ce que cela signifie pour le nombre de demandes et, monsieur l'ambassadeur, sur les engagements financiers qui pourraient encombrer le commissariat, selon l'expérience de votre pays.
Si vous le voulez bien, vous pourriez tous les trois en dire un peu plus à ce sujet.
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Merci de vos remarques, monsieur Drapeau.
Je suppose que s'il n'y a rien en place à l'heure actuelle, je suis d'accord avec vous qu'il faudra du temps pour y parvenir. Toutefois, le budget de 2016 prévoit 12,9 millions de dollars sur cinq ans, selon les données que j'ai ici, pour mettre sur pied un nouveau portail sur l'accès à l'information où les Canadiens peuvent demander de l'information. C'est le libellé.
Il y a également un délai de 30 jours pour des demandes d'information personnelle. Nous avons reçu des représentants des ministères de l'Immigration et de la Défense. Ces deux ministères ont indiqué qu'ils avaient du mal à répondre à ces demandes.
Monsieur Drapeau, vous avez également indiqué que le délai est très long. D'après votre expérience, je crois que vous avez dit que le délai au ministère de la Défense est entre six et sept ans?
Je crois qu'il nous reste environ une minute. Pourriez-vous tous vous prononcer sur cette suggestion d'avoir un portail d'information et des fonds de 12,9 millions de dollars — là encore, en tenant compte que nous ne savons pas vraiment combien de demandes supplémentaires arriveront si nous ouvrons le système aux étrangers également? Je vais m'arrêter ici; il vous reste maintenant environ 30 secondes.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir à M. Drapeau.
Votre position concernant le modèle exécutoire n'est peut-être pas une opposition de fond. Elle est peut-être surtout due au fait que, selon vous, il y a d'autres choses à régler avant d'adopter un tel modèle. Comme l'a mentionné M. Erskine-Smith, ce modèle donnerait lieu à un renversement du fardeau de la preuve, qui incomberait désormais au gouvernement. Si on accordait à la commissaire ces pouvoirs quasi judiciaires, ceux-ci lui permettraient d'ordonner la publication de certains documents. Il reviendrait alors au gouvernement d'en appeler de cette décision et de défendre son secret relativement à des exceptions et des exclusions.
Ce renversement est peut-être un bon moyen de raccourcir les délais. Même s'il faudrait un certain temps pour évaluer tous les faits de chaque côté avant la publication de documents, le fait que la commissaire puisse ordonner cette publication de documents pourrait améliorer la situation. Si le comité ou le gouvernement recommande d'adopter cette façon de faire, je pense que cela devra être assorti de ressources supplémentaires.
Dans le cas où ce modèle exécutoire serait adopté, seriez-vous d'accord pour qu'on accorde des ressources à cette fin, et ce, selon un mandat clair, plutôt que de considérer que les entités touchées n'ont qu'à assumer ces coûts, par exemple en modifiant leurs dépenses ou leur fonctionnement interne?
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En tant qu'ancien fonctionnaire et ancien secrétaire du Conseil des Forces armées canadiennes, je peux vous dire que nous avions des difficultés à deux niveaux. Si ma mémoire est bonne, la première difficulté remonte à 1986-1987. Au cours de cette période, des compressions assez draconiennes ont été appliquées au sein de l'administration. On s'est tout simplement dépossédé de tout le personnel administratif qui s'occupait d'archiver les documents.
Pour les dossiers antérieurs à 1990, par exemple, ceux des Archives nationales sont normalement très complets et très bien répertoriés, ce qui facilite la recherche. Les choses ont changé depuis, parce que les services centralisés de contrôle des documents dans les grands ministères ont disparu, et ce, à peu près en même temps que les courriels ont fait leur apparition. Si vous me permettez l'expression, je dirai que c'est devenu alors un free-for-all. Le fait qu'il y ait ou non un contrôle et qu'on puisse avoir accès à certains renseignements lorsqu'on en fait la demande varie selon les dossiers, les ministères et les directions.
Je pense que le gouvernement dans son ensemble ainsi que les ministères essaient maintenant de remettre en ordre ce genre de processus, mais c'est long et difficile. En outre, cela nécessite des ressources financières et beaucoup de pouvoir informatique. Nos demandes réagissent en conséquence: dans certains cas, on reçoit ce qu'on avait prévu recevoir, dans d'autres cas, cela prend du temps et dans d'autres cas encore, il y a des trous béants, parce que les dossiers n'ont pas été conservés.
Je pense que ce problème appartient à notre siècle. Il est relié à l'abondante communication par courriel et autres moyens de ce genre. Il arrive que des perles fassent surface dans le cadre d'un échange de courriels, ce qui prend tout le monde par surprise, les ministères probablement autant que nous, d'ailleurs.
Il n'y a pas de solution évidente à cela. Je demeure à l'affût des diverses procédures que le gouvernement applique pour tenter de garder le contrôle sur cela, ce qu'il a intérêt à faire. Or ce parcours est rempli d'embûches. C'est un travail de bénédictin.
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La question de la culture est très importante, et je crois que notre culture de communication de documents publics est solidement établie. Pour plusieurs raisons: notre longue tradition d'accès aux documents publics, d'abord, qui remonte à 1766, grâce à une loi jamais modifiée.
Sur le plan pratique, nous y sommes initiés dès l'école, et, à notre arrivée dans la fonction publique, nous y sommes formés — c'est un enjeu. La responsabilité n'incombe pas en premier lieu au chef du service ou à la direction, mais au fonctionnaire. Pour celui qui reçoit une demande, la consigne générale est, quel que soit son niveau dans l'administration, de s'en occuper, toutes affaires cessantes, et de communiquer le document le jour même. Notre ombudsman recommande, et c'est le fondement des règles pratiques générales en la matière, un maximum de deux ou trois jours. Ce n'est pas compliqué.
Quand le document compte plusieurs centaines de pages, etc., 500 par exemple, nous le communiquons parfois par tranches: 100 une journée, 100 autres le lendemain, pour permettre la découverte d'éventuels secrets. C'est aussi une question de prestige pour le ministre de ne pas être critiqué pour avoir dirigé un ministère qui lambine avant de communiquer ses documents.
Aucun délai n'est fixé, mais nous devons nous plier à des règles très rigides, qui sont suivies à l'interne par chaque fonctionnaire et par l'administration, puis, en fin de compte, par les tribunaux et l'ombudsman.
Je comprends les questions sur notre processus d'appel, mais, sur cette question, les appels sont relativement peu nombreux. Il y en a et ils sont complexes, mais, pour nous, ce qui importe, c'est la gestion quotidienne de la question.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie aussi tous nos témoins, dont les exposés ont été très instructifs.
J'allais questionner M. Drapeau, mais je crois que je vais opter pour M. Mendel. Je viens, moi aussi, de la région de l'Atlantique. Je vais donc poser quelques questions à quelqu'un de ma région.
Encore une fois, les exposés d'aujourd'hui ont été excellents, mais plus j'entends... Je suis un nouveau venu en politique et je suis certainement un nouvel élu préoccupé et ébranlé. On entend des remarques comme « tomber dans l'insignifiance », « paralysie », « deux années d'arriéré », « la loi vise à refuser la communication », « les intérêts de l'État bernent ceux du public ». Puis vous, monsieur Mendel, vous venez nous parler de la qualité de notre droit d'accès à l'information qui nous place 59es sur 102. Et nous dégringolons.
Dans une vie antérieure, j'étais président d'une équipe de hockey et de plusieurs entreprises. Je reviens encore à la culture. Cela se change, mais pas du jour au lendemain. Il faut de l'effort, du renforcement, parfois beaucoup d'années.
Monsieur Mendel, qu'est-ce qui explique cette culture du retard, ou, essentiellement, une culture qui ne convient simplement pas? Pouvez-vous me donner votre opinion?
Ensuite, si nous avons le temps, je questionnerai M. Drapeau.
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Je pense qu'il faut décortiquer un certain nombre de niveaux. Pour moi, le droit et la culture interagissent en douceur.
Si la loi permet de fixer un long délai pour répondre à une demande de renseignements, sans, au fond, obligation de rendre des comptes — et M. Drapeau l'a très bien décrit, parce que, si on interjette appel, ce sera encore plus long — cela revient à dire aux fonctionnaires qu'il suffit, s'ils ne veulent pas communiquer un renseignement, d'assortir la communication d'un long délai. Si la loi fourmille d'exceptions malléables, formulées de façon générale, qui permettent d'invoquer le secret pour à peu près tout, le message aux fonctionnaires est que ce n'est pas sérieux, qu'on leur donne une foule de motifs pour protéger tout ce qu'ils ne veulent pas communiquer. C'est ainsi, essentiellement, que s'est développée cette culture au Canada.
Nous avons constaté que, dans beaucoup de pays, particulièrement les pays en développement, qui viennent souvent de traverser des périodes de secret vraiment nocives, comme la Bulgarie, le Mexique, l'Inde, où les fonctionnaires ont traité le public avec arrogance, et qui possèdent maintenant cet outil, la société civile et les citoyens rejettent cette culture, et les lois ne sont pas conçues pour qu'elle s'installe.
Je pense que le public canadien est devenu apathique, en raison de la complexité du processus de demande, de sa longueur et du risque de ne pas obtenir l'information. Indéniablement, la fonction publique ne prend pas la chose au sérieux, ne se sent pas responsabilisée et se croit à l'abri des sanctions. La loi en prévoit, mais elles ne sont jamais appliquées — cela n'est jamais arrivé depuis son adoption.
Les raisons sont multiples. Je pense que l'absence de pouvoirs clairs et contraignants de la part du commissaire à l'information y est aussi pour beaucoup. S'il pouvait forcer la main des organismes publics et déclarer que c'est absolument illégal, que les fonctionnaires sont obligés de le faire... Les facteurs sont très nombreux. Mais, pour nous, qui avons étudié les systèmes appliqués dans le monde entier, il faut vraiment commencer par réformer la loi. Il faudra du temps pour changer la culture des organismes publics, parce que, comme vous l'avez dit, c'est difficile et lent à changer.
Changer la loi ne se fait pas si rapidement, mais c'est plus rapide que changer la culture. Il faut passer par là pour provoquer un changement culturel.
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En fin de compte, cela se résume par un mot: leadership.
Le premier geste du président Obama, il y a huit ans, à son arrivée à la Maison-Blanche a été un décret sur la liberté de l'information par lequel il ordonnait aux fonctionnaires de privilégier l'accès à l'information, peu importe si le gouvernement risquait d'être embarrassé. Depuis, les choses ont changé de façon spectaculaire.
Dans l'administration antérieure, celle de Clinton, la ministre de la Justice Janet Reno a édicté que les chefs des organismes, l'équivalent de nos ministères, seraient aussi évalués. Pour les promotions, les bonus et ainsi de suite, on évaluerait leur rendement, entre autres choses la capacité de l'organisme qu'ils dirigeaient de répondre aux demandes d'accès à l'information.
Si notre et le greffier du Conseil privé devaient tous deux déclarer leur conviction que c'est une loi quasi constitutionnelle, qu'elle est exécutoire et que tous les niveaux de la hiérarchie doivent la respecter et y donner suite, le changement serait immédiat, grâce à cette impulsion qui viendrait d'en haut; tous le sauraient. Actuellement, il n'y a rien de tel.
Qu'arriverait-il si le greffier du Conseil privé devait charger son sous-ministre d'évaluer dès maintenant le rendement des dirigeants des organismes d'après les langues officielles, l'égalité entre les sexes, les rapports du vérificateur général et ainsi de suite, y compris l'accès à l'information, notamment le nombre de plaintes, de demandes et ainsi de suite? Du jour au lendemain, le sous-ministre convoquerait le coordonnateur de l'accès à l'information, pour lui demander s'il a besoin de plus de ressources, s'il comprend sa mission, et pour lui dire que son travail consiste à le bien faire paraître. Il y aurait alors du changement.
Actuellement, c'est presque le contraire: le mot d'ordre, implicite, subtil, est qu'on ne veut pas lire dans un grand quotidien de reportage inspiré par l'accès à des dossiers. Il s'ensuit que l'accès à l'information est essentiellement entravé.
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Je peux en parler. En ma qualité d'auteur, mon devoir est d'examiner le passé. Je pense que le système a commencé à changer dès sa mise en oeuvre. Il a essentiellement été mis en place par un gouvernement libéral, celui de M. Trudeau, mais le premier gouvernement à y être assujetti a été celui de Mulroney.
Peu après son arrivée au pouvoir, les accessoires de la loi aidant, l'information était effectivement accessible. Les demandes n'arrivaient pas encore en grand nombre, mais on en recevait. Une demande a concerné, si je m'en souviens bien, les dossiers reliés aux travaux d'aménagement, dans la résidence du premier ministre, promenade Sussex, d'un garde-robe pour les souliers de Mme Mila Mulroney. À l'époque, la consigne a été que, avant de communiquer de tels renseignements, qui faisaient de la femme du premier ministre de l'époque..., il fallait vérifier auprès de « Fred », c'est-à-dire, si je m'en souviens bien, le secrétaire du Cabinet du premier ministre.
Depuis, une sorte de résistance se fait sentir, une sorte d'instinct de survie. On se faisait dire, avant une communication de renseignements, qu'il fallait d'abord vérifier, de crainte de subir la colère des chefs politiques. À l'époque, une sorte de climat de précaution entourait ce qu'on pouvait communiquer en réponse à des demandes légitimes, un climat qui n'est jamais dissipé.
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M. Long est très intelligent. Il a utilisé près de 10 minutes du temps du Comité.
D'ici la fin — peut-être que nous ménageons le meilleur pour la fin — quelques collègues, ici, voudraient poser des questions supplémentaires. Il nous reste une dizaine de minutes.
Chers collègues, avec votre permission, je voudrais en poser moi aussi. Je ne veux pas manquer de temps. Je vais donc vous le demander. Pas de mutinerie, s'il vous plaît. J'en ai une ou deux, et si nous avons le temps, nous reviendrons aux membres du Comité. Êtes-vous d'accord?
Ma première question, je la pose principalement à MM. Drapeau et Mendel, simplement parce qu'ils ont fait des observations à ce sujet et qu'il y a désaccord sur le pouvoir exécutoire.
Monsieur Drapeau, je suis devenu très excité à vous entendre parler d'accorder des pouvoirs aux politiciens, aux comités ou aux députés et de responsabiliser davantage le Parlement. Je pense que c'est absolument fantastique.
Si vous n'êtes pas d'accord avec le système actuel ni avec les demandes actuelles de pouvoirs exécutoires par la commissaire, à qui confier ces pouvoirs, sachant que notre Comité n'en possède vraiment aucun officiel? Nous avons certains droits, parce que nous sommes un comité. Nous pouvons obliger des témoins à venir témoigner, mais pas le ministre. Je tiens à vous demander de m'éclairer sur un éventuel nouveau rôle pour notre Comité, après modification de la loi, et sur la nature des pouvoirs nécessaires et leur détenteur, si ce n'est pas la commissaire.
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Certaines oui, d'autres non. J'ai fait valoir mes arguments dans mon mémoire et dans mes remarques tout à l'heure.
L'accès à l'information peut être comparée à une longue chaîne de montage. Le demandeur croit que vous avez accès à certains renseignements. Ceux-ci doivent exister. Vous devez pouvoir les retrouver, les examiner pour savoir s'il y a une exemption, une exclusion, et ainsi de suite. C'est ce en quoi consiste le gros du travail. Ultimement, les renseignements sont communiqués au demandeur. S'il n'est pas satisfait, il porte plainte. Et s'il n'est pas satisfait du traitement de sa plainte et de la décision de la commissaire, alors il s'adresse aux tribunaux. C'est une chaîne.
Nous devons nous intéresser autant, sinon davantage, au premier maillon de la chaîne, où finissent 90 % des demandes, demandes qui voient leur sort entièrement décidé par le coordonnateur de l'accès à l'information du ministère en question. C'est là qu'il faut regarder. Ces bureaux ont-ils les effectifs nécessaires? Je ne crois pas. Je pourrais vous nommer plusieurs institutions qui manquent de personnel — des institutions comme la GRC, dont on s'attend qu'elle coopère et connaisse la loi. Pourtant, c'est l'une de celles qui sont le plus souvent visées par les plaintes. Pourquoi? Cela se passe avant même que la commissaire à l'information n'intervienne.
Je dis simplement qu'il faut se concentrer sur les deux endroits et en particulier au point de départ, c'est-à-dire à l'échelon ministériel. Sur ce point, je ne suis pas d'accord avec la commissaire à l'information. Son univers, ce sont les 1 600 plaintes qu'elle reçoit chaque année, tandis que le mien, ce sont les 78 000 demandes faites par les Canadiens.
J'ai une dernière question très brève pour M. Drapeau, étant donné qu'il a abordé le sujet. Notre Comité jouit d'un certain pouvoir et d'une certaine influence vu les 10 députés qui prennent place à la table. Vous demandez que le vérificateur général cherche des moyens de rendre les commissariats plus efficaces. Nous, les députés, mettons parfois ces commissaires sur un piédestal parce que, soyons francs, ils ont beaucoup d'influence et il nous arrive de les craindre. Mais en réalité, ils doivent eux aussi nous rendre des comptes, et je crois que nous pourrions fort justement reprendre une partie du terrain que nous semblons avoir perdu.
Il est intéressant de constater, quand on songe aux quatre commissariats, que le commissaire au lobbying et le commissaire à l'éthique ont chacun leur poste budgétaire, tandis que le commissaire à la protection de la vie privée et le commissaire à l'information partagent un seul et même poste dans le budget. Pourtant, chacun possède son propre appareil administratif, qui pourrait être plus efficace.
Je vais vous poser une question très claire. Si notre Comité était saisi d'une motion demandant que le vérificateur général fasse une étude sur ces deux commissariats en vue de formuler des recommandations, croyez-vous que ce serait une bonne idée?