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HRPD Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES

COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 4 novembre 1998

• 1533

[Français]

La présidente (Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.)): La séance est ouverte. J'aimerais vous remercier de votre présence. J'ai demandé au vérificateur général du Canada de venir rencontrer les membres du comité cet après-midi pour discuter d'un aspect des plus troublants quant à la confiance que nous pouvons avoir à l'égard du système des numéros d'assurance sociale. Il s'agit des fausses identités, qui constituent un problème important.

[Traduction]

Il concerne l'ensemble des Canadiens, aussi bien les contribuables, par la mise à jour des fraudes à l'endroit des services sociaux, que les simples citoyens, par la mise à jour des fraudes à l'identité préjudiciables à la cote de crédit, etc. Nous savons déjà qu'on s'est servi du NAS pour permettre à certaines personnes de travailler illégalement au Canada, d'obtenir frauduleusement des cartes d'assurance-maladie, des prestations d'assurance-emploi, de bien-être social, de sécurité de la vieillesse ainsi que divers services, comme les téléphones cellulaires et les cartes de crédit, pour ne mentionner que ceux-là. De toute évidence, il nous incombe de protéger les contribuables et les consommateurs des menées des criminels qui se servent du NAS pour s'introduire dans leur vie privée.

Je voudrais demander à M. Desautels de nous donner son avis sur la façon de remédier à la situation actuelle. Nous écoutons votre exposé.

M. L. Denis Desautels (vérificateur général du Canada): Merci beaucoup, madame la présidente. Il me fait plaisir, ainsi qu'à mes collègues, d'avoir l'occasion de témoigner devant le comité pour discuter du chapitre 16 de mon rapport de septembre 1998, intitulé «La gestion du numéro d'assurance sociale». Je suis accompagné aujourd'hui de M. David Rattray, vérificateur général adjoint, et de Maurice Laplante, qui a participé très activement aux travaux préparatoires à la rédaction de ce chapitre.

• 1535

Dans le chapitre 16, madame la présidente, nous soulignons que le numéro d'assurance sociale (ou NAS) est devenu la porte d'entrée à une multitude de programmes fédéraux et provinciaux. Le NAS sert à identifier et à recueillir de l'information sur les contribuables et les bénéficiaires de programmes sociaux, à vérifier l'admissibilité à certains types de pensions et prestations, et enfin à comparer et à échanger des renseignements entre programmes. À l'origine, le NAS devait servir de numéro de dossier aux clients de l'assurance-chômage, du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec. De nos jours, quelque 20 lois, règlements et programmes du gouvernement fédéral autorisent l'utilisation du NAS. Celle-ci s'est aussi répandue dans les programmes sociaux provinciaux et dans le secteur privé.

Les rôles et responsabilités à l'égard du NAS sont partagés entre divers ministères et organismes fédéraux. Développement des ressources humaines Canada attribue les NAS, gère le Registre d'assurance sociale et conduit des enquêtes sur les abus présumés. Le Conseil du Trésor est responsable de la politique et des lignes directrices sur la collecte et l'utilisation du NAS. Le Commissariat à la protection de la vie privée fait enquête sur les plaintes concernant l'utilisation du NAS. Le ministère de la Justice répond aux demandes de renseignements du public sur l'utilisation du NAS par le secteur privé.

Le Registre d'assurance sociale est administré à Bathurst, au Nouveau-Brunswick. On y produit environ un million de cartes chaque année. Les coûts de fonctionnement annuels s'élèvent à sept millions de dollars, dont deux millions de dollars sont perçus auprès des demandeurs de cartes de remplacement. Les cinq millions de dollars restants sont récupérés auprès des principaux utilisateurs du NAS—c'est-à-dire Revenu Canada, le Régime de pensions du Canada, le Régime de rentes du Québec et le compte d'assurance-emploi.

[Français]

Madame la présidente, nos vérifications nous ont permis de déceler un certain nombre de faiblesses dans la gestion des numéros d'assurance sociale. L'information sur la naissance et le décès du titulaire d'un numéro d'assurance sociale n'est pas toujours complète ou exacte. Par exemple, dans la catégorie des personnes âgées de 20 ans ou plus, il y a près de quatre millions de numéros d'assurance sociale de plus que le nombre de Canadiens. En outre, 11,8 millions de numéros n'ont pas été authentifiés et des milliers de personnes sans statut juridique au Canada détiennent des cartes toujours valides.

Depuis le milieu des années 1990, la direction responsable du Registre d'assurance sociale reçoit de l'information de Revenu Canada, de Citoyenneté et Immigration Canada, du Régime de pensions du Canada et de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Toutefois, ces sources ne sont pas utilisées à fond et on pourrait faire davantage pour obtenir des statistiques de l'état civil administrées par chacune des provinces.

Les faiblesses relevées entravent la bonne gestion des programmes sociaux. Elles peuvent aussi être à l'origine d'erreurs, d'abus, de fraudes et, dans l'ensemble, les répercussions pourraient être considérables. Des mesures urgentes s'imposent pour protéger les fonds public et en même temps les contribuables.

Le ministre du Développement des ressources humaines, l'honorable Pierre Pettigrew, a accepté nos recommandations. Son ministère, a-t-il dit, s'est déjà mis à améliorer l'intégrité de l'information contenue dans le registre. Et M. Pettigrew a ajouté que Développement des ressources humaines Canada collabore avec les gouvernements provinciaux afin d'améliorer la situation.

[Traduction]

L'utilisation répandue du numéro d'assurance sociale m'inquiète aussi parce qu'elle mine la protection des renseignements personnels. Je pense que le moment est venu d'examiner les rôles, les objectifs et l'utilisation actuels du numéro d'assurance sociale. Le gouvernement devrait déterminer ce qu'il veut faire du numéro d'assurance sociale et, par la même occasion, étudier les autres options possibles.

En outre, je crois qu'il est essentiel que le Parlement joue un rôle important dans la discussion de ces questions et dans la recherche d'une solution satisfaisante. Le comité pourrait considérer une recommandation au Parlement de clarifier—par l'intermédiaire de ses comités—les rôles, les objectifs et l'utilisation du numéro d'assurance sociale. Les parlementaires pourraient aussi débattre les autres options possibles, préciser les niveaux appropriés pour l'intégrité du Registre d'assurance sociale et pour la protection des renseignements personnels.

Madame la présidente, voilà qui met fin à mon commentaire. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.

[Français]

La présidente: Merci. Nous entreprenons le premier tour de questions.

Madame Ablonczy.

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Merci, madame la présidente.

Je voudrais vous remercier, monsieur le vérificateur général. Votre intervention a été d'une brièveté étonnante. On voit bien que vous n'êtes pas un homme politique. Je n'ai jamais vu un sujet traité aussi rapidement, et je pense qu'il en va de même pour mes collègues.

• 1540

La chose la plus importante que vous mentionnez se trouve au paragraphe 12. Vous dites que le comité pourrait considérer une recommandation pour clarifier les rôles, les objectifs et l'utilisation du numéro d'assurance sociale. Au départ, puisque vous et vos collègues êtes nos témoins experts, pourriez-vous m'en dire davantage sur l'à-propos des rôles, des objectifs et de l'utilisation actuelle du NAS? Vous pourriez peut-être nous expliquer quelles limites pourraient être proposées dans des recommandations ou nous en dire davantage sur la liste actuelle de ces choses-là.

M. Denis Desautels: Eh bien, madame la présidente, c'est une question qui comporte de nombreux aspects. Dans notre chapitre, nous avons essayé de décrire la foule d'utilisations que l'on fait maintenant du NAS, en commençant par le RPC jusqu'à l'application de 24 lois différentes—je crois que c'est bien 24—à l'heure actuelle, pour ne parler que du gouvernement fédéral. Directement ou indirectement, le gouvernement fédéral encourage également l'utilisation du NAS dans le secteur privé. Par exemple, lorsque les gens encaissent des obligations d'épargne du Canada, ils doivent fournir leur NAS. Ce n'est qu'un exemple. À partir de là, les institutions financières ont répandu l'utilisation du NAS. Comme vous le savez, les provinces et les municipalités en font également un usage accru.

L'utilisation réelle du NAS a beaucoup augmenté au fil des ans. Cette utilisation est bien supérieure à ce que le gouvernement et le Parlement avaient prévu au départ. Pourquoi cela s'est-il produit? Le rôle du NAS pose-t-il un problème? Comme je l'ai dit, un certain nombre de ministères se penchent sur cette question, mais on ne saurait nécessairement confier la tâche à un seul ministère. En fait, aucun ministère ne dirige particulièrement ce travail. DRHC joue un rôle très important, mais on peut en dire autant du secrétariat du Conseil du Trésor, pas seulement en ce qui a trait aux utilisations du NAS, mais aussi aux autres activités de correspondance des données connexes au gouvernement.

Pour régler ce problème, il faudra une solution qui s'appliquera à tout le gouvernement. Il serait très difficile, à mon avis, de confier à un seul ministère la tâche de corriger le problème tout entier. Mais ce n'est pas un problème qui touche uniquement le NAS. Les ministères doivent également travailler de concert pour trouver des solutions applicables à l'ensemble du gouvernement dans le cadre de bon nombre d'autres programmes.

Le partage actuel des responsabilités au titre du NAS n'est pas particulièrement mauvais. Ce qu'il faut, c'est indiquer clairement aux principaux intervenants qu'ils doivent collaborer et trouver des solutions aux problèmes que nous avons soulevés et à d'autres problèmes que vous souhaitez peut-être voir corriger.

Mme Diane Ablonczy: Pour être plus précis, vous avez parlé de l'utilisation des numéros d'assurance sociale. Vous n'avez pas mentionné cette question de façon très approfondie dans votre rapport, mais vous savez sans doute que tous les travailleurs de la fonction publique de la présente décennie se sont vu attribuer un CIDP, c'est-à-dire un code d'identification de dossier personnel. En outre, tous les membres des forces armées ont un numéro de matricule. Ces deux programmes ont coûté cher à mettre en oeuvre, mais on estimait qu'il était nécessaire d'attribuer un numéro d'identification personnel et que ce numéro ne devait pas être le numéro d'assurance sociale. On a donc créé cet autre programme parallèle.

• 1545

Croyez-vous qu'il faille avoir plus de numéros d'identification, qu'il s'agisse du numéro d'assurance sociale, du numéro d'identification du dossier personnel ou d'autre chose? Nous essayons de voir quel serait le juste usage du numéro d'assurance sociale, et il faudra peut-être d'autres numéros pour combler les lacunes.

M. Denis Desautels: Madame la présidente, on pourrait faire valoir la nécessité d'un système commun d'identification, ce qui aiderait grandement à l'administration de certains programmes gouvernementaux. Il a été très difficile de faire accepter cette idée en raison des inquiétudes en matière de protection de la vie privée; c'est pourquoi on a généralement mis au point des systèmes d'identification individuels, comme l'a mentionné l'honorable députée. On peut également se demander si c'est la façon la plus efficace de procéder.

Il n'est pas facile de trouver un équilibre entre efficacité, d'une part, et protection des renseignements personnels, d'autre part. Il y a probablement des solutions, car c'est un dilemme auquel se heurtent également d'autres pays. Toutefois, la situation actuelle réunit les pires éléments. Nous avons un numéro d'assurance sociale que nous contrôlons très mal, et qui par conséquent n'est pas très efficace pour administrer les différents programmes qui l'utilisent. En même temps qu'il est mal administré, il ne cesse de prendre de l'expansion, ce qui cause des problèmes à tous ceux qui souhaitent protéger les renseignements personnels.

[Français]

La présidente: Monsieur Crête, vous avez la parole.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Je vous remercie de votre document, qui est de très grande qualité, comme tout le travail que fait habituellement le Bureau du vérificateur général.

Je veux juste rappeler ce que vous dites dans les points saillants, parce que je pense que le noeud du problème est là.

    Dès le départ, le NAS a fait l'objet d'un intérêt et d'un débat intenses au Parlement. La controverse portait en grande partie sur les répercussions d'une expansion possible de son utilisation qui en ferait un code d'identification universel.

D'après le contenu de votre recommandation, au paragraphe 12, je conclus que le même débat se poursuit toujours et que l'expérience confirme que cette expansion possible de l'utilisation du NAS s'est effectivement produite. J'aimerais que vous y reveniez un peu plus tard.

Vous nous dites aussi, et c'est un autre aspect que je voulais vérifier auprès de vous, que ce ne sont pas là les deux éléments principaux. Dans ce paragraphe, il est question de débattre des autres options possibles. Au point 9, vous parlez du ministère de M. Pettigrew: «Son ministère, a-t-il dit, s'est déjà mis à améliorer l'intégrité de l'information contenue dans le Registre.» Je m'interroge sur cet «a-t-il dit». Est-ce qu'il sous-entend qu'il faudrait explorer, avec les employés du ministère, les mesures qui ont été prises par rapport au registre actuel? À ce moment-là, ce n'est pas le principe du NAS qui est remis en question dans son entier, mais plutôt la façon dont il est actuellement géré. J'aimerais avoir votre avis sur ce point mais, auparavant, je terminerai par un exemple.

J'ai ici la photocopie—je m'excuse de sa mauvaise définition—d'une carte émise par le ministère du Développement des ressources humaines. Ce n'est pas une carte d'assurance sociale; c'est une carte qu'on émet quand les gens atteignent 65 ans. Le numéro d'assurance sociale y est inscrit et on invite les gens à s'en servir pour obtenir tous les avantages commerciaux possibles.

Autrement dit, on recommande aux gens qui ont atteint 65 ans de se servir de cette carte pour faire la preuve de leur âge, pour certaines réductions, etc. Or, chaque fois qu'on la fait voir à une caissière, à un caissier ou à n'importe qui, on fait voir en même temps le numéro d'assurance sociale qui y est inscrit et que n'importe qui peut enregistrer. Le fait que le ministère du Développement des ressources humaines se rende lui-même coupable d'un tel abus démontre bien qu'on a perdu le contrôle.

Ma dernière question, liée à celle-là, porte sur le projet de loi sur le commerce électronique dont le Parlement est actuellement saisi. Est-ce qu'il n'y a pas un lien très direct entre le numéro d'assurance sociale, l'utilisation qu'on en fait en termes de gestion et le projet de loi sur le commerce électronique?

• 1550

Si ce projet de loi est mis en application dans le contexte actuel, il va permettre une utilisation très large, pour ne pas dire aberrante de l'information. Ce qu'on va pouvoir apprendre sur une personne, en utilisant son NAS, est assez impressionnant.

M. Denis Desautels: Madame la présidente, le premier point soulevé par M. Crête portait sur l'élargissement de l'emploi du NAS. Effectivement, nous sommes d'accord, et je pense que tout le monde s'entend sur ce point. C'est un élargissement qu'on peut constater, non seulement à l'intérieur de l'appareil fédéral, mais également à d'autres niveaux de gouvernement, dans d'autres juridictions canadiennes et même dans le secteur privé.

En fait, il est énormément utilisé dans le secteur privé. À titre d'exemple, j'ai reçu une lettre de plainte, la semaine dernière, dans laquelle on disait avoir été forcé, pour louer un logement, de divulguer son numéro d'assurance sociale. Autrement, on ne pouvait même pas faire la demande de location pour ce logement. Donc, les gens sont de plus en plus forcés de s'en servir. De fait, le numéro d'assurance sociale est devenu un numéro universel d'identification ou presque.

M. Paul Crête: Vous reconnaissez donc que le problème dépasse la seule compétence du Comité du développement des ressources humaines. Ce que vous dites au paragraphe 12 touche plusieurs ministères.

M. Denis Desautels: Effectivement, dans ma déclaration, j'ai recommandé que les comités appropriés se penchent sur le problème. Sans avoir fait l'étude complète du mandat de chaque comité, je présume que le sujet peut dépasser le mandat du Comité du développement des ressources humaines. Je pense que dans l'ensemble, tout le monde s'accorde sur la constatation générale qui vient d'être faite.

Ensuite, vous avez fait allusion au paragraphe 9 de ma déclaration, où je parle de ce que le ministre lui-même a déclaré.

M. Paul Crête: Et de la gestion du registre.

M. Denis Desautels: Oui. En fait, dans tout ce que nous disons, on trouve des recommandations à deux niveaux. Celles qui sont d'un premier niveau portent sur ce qui peut être amélioré immédiatement. Peu importe ce qu'on décidera à long terme, je pense qu'il y a des choses à resserrer immédiatement.

À un deuxième niveau, on trouve les grandes questions de politique sur ce qu'on veut faire de cela éventuellement. Si j'ai bien compris les déclarations du ministre, il s'est engagé... En fait, il a déclaré qu'il avait déjà commencé à corriger certaines des faiblesses, de premier niveau, que nous avons notées.

Cependant, comme c'est la coutume chez nous, nous allons retourner au ministère pour vérifier le suivi qu'on a donné à nos recommandations et la façon dont le ministère est passé à l'action, en vue de faire rapport au Parlement d'ici deux ans sur les progrès accomplis.

Pour ce qui est du dernier point soulevé par M. Crête, madame la présidente, qui portait surtout sur le projet de loi proposé au Parlement actuellement et sur toute la question du commerce électronique,...

M. Paul Crête: En rapport avec le NAS.

M. Denis Desautels: ...j'aimerais peut-être reporter ma réponse à plus tard là-dessus. Je vous dirai simplement que nous sommes à compléter une étude sur le commerce électronique dont nous ferons état dans notre rapport au Parlement qui sera déposé le 1er décembre.

Je répondrai donc simplement au comité que nous travaillons sur la question, si vous le voulez bien, monsieur Crête, et que nous allons rendre compte au Parlement dans notre prochain rapport.

M. Paul Crête: Est-ce que votre étude inclut la recommandation de se renseigner sur ce que le Québec a fait pour la protection des renseignements personnels dans le secteur privé comparativement à ce qui est contenu dans le projet de loi que nous avons ici, ou si elle est plus générale?

M. Denis Desautels: Madame la présidente, c'est quelque chose d'un peu général. En fait, notre étude ne tenait pas nécessairement compte du projet de loi dont vous parlez maintenant, mais plutôt des mesures de sécurité qu'on doit employer dans le commerce électronique.

• 1555

La présidente: Merci. Monsieur Dubé.

M. Jean Dubé (Madawaska—Restigouche, PC): Merci beaucoup, madame la présidente et merci, monsieur Desautels de votre présentation et de la disponibilité dont vous faites preuve vis-à-vis de ce comité.

Il me vient de nombreuses questions à la vue de ce que vous nous dites aujourd'hui. Il est très embarrassant de constater l'abus qu'on fait de notre numéro d'assurance sociale.

Je reviens à votre paragraphe 9, où vous dites:

    Le ministre du Développement des ressources humaines, l'honorable Pierre S. Pettigrew, a accepté nos recommandations. Son ministère, a-t-il dit, s'est déjà mis à améliorer l'intégrité de l'information contenue dans le Registre.

Par ailleurs, je lis dans un article paru dans le Globe and Mail de ce matin, en anglais:

[Traduction]

    Nous avons interrogé des fonctionnaires du Développement des ressources humaines, de Justice Canada, d'Industrie Canada et du Commissariat à la protection de la vie privée et constaté qu'aucun ministère ne semble vouloir assumer la responsabilité d'une réforme du numéro d'assurance sociale.

[Français]

Il y a donc là une contradiction, à ce que je vois, et cela me semble déplorable.

Revenons au problème de la carte. Est-ce la solution que d'engager plus d'enquêteurs et d'augmenter le montant des pénalités imposées aux fraudeurs?

Pensez-vous, monsieur Desautels, que l'accès à nos numéros d'assurance sociale est devenu trop facile?

On a aussi eu des problèmes, comme vous le savez, avec les numéros d'assurance-maladie; les non-Canadiens utilisent les cartes d'assurance-maladie au Canada. On dirait qu'il s'établit un modèle d'abus de nos cartes.

Cependant, croyez-vous vraiment que

[Traduction]

nous devons remanier tout le système des cartes,

[Français]

ou bien si on devrait engager un plus grand nombre d'enquêteurs?

M. Denis Desautels: Madame la présidente, je vais répondre le premier à la question de M. Dubé, et je demanderai à mon collègue, M. Rattray, de compléter ma réponse.

Il y a plusieurs choses qui peuvent être corrigées assez rapidement si on a la volonté de le faire, si on pense que c'est assez important pour le faire. Ce que nous avons voulu faire dans notre chapitre, c'est signaler les problèmes et l'importance de corriger certains problèmes.

Comme vous le dites, d'une certaine façon, le numéro d'assurance sociale, ou la carte d'assurance sociale, facilite l'accès à une foule de programmes gouvernementaux et à certaines transactions dans le secteur privé. Il est donc important de corriger ces faiblesses le plus rapidement possible. Cela coûte de l'argent au secteur public et au secteur privé. Cela constitue aussi une sorte de vol des données personnelles, comme c'est le cas parfois lorsqu'on substitue son numéro à celui de quelqu'un d'autre.

Je pense qu'il est possible de colmater le système, du moins selon la perception actuelle qu'on peut en avoir. Mais cela ne réglera pas certains des problèmes plus fondamentaux quant à l'étendue de l'utilisation du numéro d'assurance sociale à l'intérieur et à l'extérieur du gouvernement.

Je pense toutefois que les problèmes du premier niveau peuvent être corrigés. Il est possible d'obtenir des provinces l'information sur les naissances ou les décès, par exemple, pour ensuite radier les numéros qui doivent l'être. Il est possible aussi, je pense, d'avoir un meilleur contrôle sur les permis temporaires qui sont émis et d'en assurer le suivi. Donc, ce sont toutes des choses faisables, si on veut les faire.

J'ai bon espoir que cela sera corrigé avant longtemps.

[Traduction]

David, vous voulez répondre?

• 1600

M. David Rattray (vérificateur général adjoint, Direction des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Madame la présidente, je serai bref et j'aborderai trois aspects.

Pour commencer, une mise à jour pour vous expliquer dans quels domaines le ministère a agi et dans quels domaines il n'a pas agi. Le jour du dépôt du rapport, le ministre s'est levé à la Chambre et a déclaré: «J'ai déjà pris des mesures pour améliorer l'intégrité du système.» Comme cela remonte à quelques semaines seulement, nous n'en avons pas encore entendu parler, comme M. Desautels vous l'a dit. Nous allons suivre cela, mais il n'y a pas eu de développement au cours de ces derniers jours.

Certains ont parlé de la nécessité de consacrer plus d'enquêteurs à cette tâche. C'est une notion qui est à nouveau à l'étude, en particulier en ce qui concerne le numéro d'assurance sociale. À l'heure actuelle, les indicateurs de performance du ministère portent principalement sur les économies possibles, et par conséquent on donne la priorité au compte de l'assurance- emploi, au RPC, et à d'autres services où il est possible de récupérer de l'argent très rapidement lorsqu'on détecte des fraudes, des utilisations trompeuses, ou de fausses déclarations de gains ou de périodes d'emploi, etc.

En ce qui concerne la réaction, nous avons été heureux d'entendre que le ministère avait l'intention de réexaminer ces indicateurs de performance, et, le cas échéant, d'oublier temporairement les économies réalisables pour s'intéresser un peu plus aux sujets que nous soulevons, comme la mauvaise utilisation des numéros d'assurance sociale.

Troisièmement, le ministère a également répondu à notre rapport, et nous pensons qu'ils ont dû commencer à prendre des mesures pour mieux vérifier l'identité des gens qui demandent une carte, pour aller plus loin qu'un simple certificat de naissance.

La présidente: Merci.

Monsieur Dubé, une question très courte.

M. Jean Dubé: J'ai une question très courte. Dans cet article du vérificateur général, on dit également:

    Les faussaires gagnent des millions de dollars avec de fausses cartes [...] et la base de données contient des erreurs. Elle contient des dossiers actifs pour 311 000 Canadiens âgés de 100 ans ou plus, bien que la presque totalité d'entre eux soient morts.

Vous semblez avoir des informations à ce sujet. Nous avons cela ici, sur le papier. Que pouvons-nous faire? C'est probablement une question pour M. Rattray. Qu'est-ce que le ministère a fait au sujet de ces 311 000 Canadiens qui n'existent pas?

M. David Rattray: Madame la présidente, je peux difficilement vous dire ce que le ministère a fait au cours de ces dernières semaines. Ce n'est pas que je veuille éviter la question, mais il serait préférable de leur poser la question directement.

La présidente: Nous allons avoir la visite des représentants du ministère à une date ultérieure.

M. David Rattray: Je sais que les chiffres que nous leur avons soumis les inquiètent beaucoup. Nous avons pris la base de données de 33 millions de dossiers et nous l'avons mise à l'épreuve de notre propre programme d'ordinateur et comparé les résultats avec les données de Statistique Canada. Les différences et les écarts viennent de là, et je sais que le ministère les a pris très au sérieux et s'en occupe. Quant aux mesures précises prises aujourd'hui ou la semaine dernière, je préférerais qu'ils vous en parlent eux-mêmes.

La présidente: Merci.

Monsieur Godfrey.

M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je veux m'assurer que j'ai bien compris les premiers principes. De là ma première question: vous considérez que le problème de l'efficacité, les abus, le rapport efficacité-coût est un problème si grave qu'il convient de faire quelque chose immédiatement. Est-ce bien votre position? Nous ne pouvons nous permettre de laisser cela traîner.

M. Denis Desautels: À mon avis, des mesures doivent être prises immédiatement, et sur plusieurs fronts.

M. John Godfrey: Deuxièmement, en ce qui concerne la responsabilité des mesures à prendre, le ministre, a je crois, déclaré à la Chambre qu'il fallait ignorer l'article du Globe and Mail; le ministre, comme vous le dites au point 9 de votre exposé, a pleinement accepté la responsabilité et a l'intention de donner suite à vos suggestions, quand il ne l'a pas déjà fait. Autrement dit, tout dépend dans une large mesure du DRHC. Cela n'exclut pas l'intervention du Conseil du Trésor, du ministère de la Justice et de tous les autres, mais quelqu'un doit attacher le grelot, et à votre avis cette responsabilité revient au DRHC. Est-ce que c'est bien votre position? Il faut que quelqu'un assume la responsabilité?

M. Denis Desautels: Madame la présidente, c'est le DRHC qui est responsable du registre. Comme c'est l'intégrité de ce registre qui est en cause, je pense que ce ministère est le premier concerné et le mieux à même de prendre des mesures.

M. John Godfrey: Comme ils ont déjà accepté cette responsabilité, ce n'est pas un problème.

• 1605

Quant à la question soulevée par M. Dubé, j'ai relu votre chapitre, mais je ne suis pas certain d'en avoir tiré une impression très nette de votre position; vous voulez que nous parvenions à une plus grande efficacité, mais est-ce que vous considérez qu'il suffirait de réparer le système actuel, ce qui aurait évidemment ses limitations, ou bien pensez-vous qu'un nouveau système s'impose? Vous ne semblez pas vous prononcer, ou peut-être ai-je raté quelque chose. Qu'est-ce que vous préféreriez, étant donné notre dépendance par rapport au système actuel?

M. Denis Desautels: Comme nous le disons dans notre chapitre, en fin de compte, c'est une question que nous posons aux parlementaires. Nous vous disons que vous devez réparer le système, et que le système peut être réparé dans une large mesure. Toutefois, si vous choisissez cette solution, il faudra tout de même reconnaître qu'on utilise aujourd'hui le numéro d'assurance sociale pour beaucoup de choses qui n'avaient pas été prévues au départ, et cela constitue toujours un problème.

Comment allez-vous résoudre ce problème? Faut-il ramener le système à ses objectifs de départ ou bien aller dans l'autre direction et établir un code d'identification universel? C'est une question d'ordre politique tout à fait fondamentale, une question que les parlementaires vont devoir régler. Le commissaire à la protection de la vie privée doit également avoir des idées très arrêtées sur la meilleure solution.

Je le répète, l'important c'est que le système actuel a besoin d'être réparé.

M. John Godfrey: Si on réparait le système conformément à vos suggestions, qui s'occuperait principalement des réparations? Est- ce que notre vérificateur général serait beaucoup plus heureux et considérerait que le problème n'a plus la même urgence, ou bien resterait-il un certain nombre de problèmes résiduels impossibles à résoudre avec de simples réparations, des problèmes suffisamment urgents pour que vous nous demandiez de...

M. Denis Desautels: Si vous mettiez suffisamment d'ordre dans le système pour avoir une base de données résistant à nos tests d'intégrité, d'exactitude, cela réglerait une grosse part de nos préoccupations. La plupart des choses dont nous parlons dans ce chapitre concernent l'exactitude et l'intégrité de la base de données.

Toutefois, il reste d'autres problèmes relatifs à l'utilisation élargie qu'on fait de ce petit morceau de papier, de cette petite carte, ou à l'utilisation idéale qu'on devrait en faire.

M. John Godfrey: Merci.

La présidente: Permettez-moi de faire une courte intervention au sujet du désordre qui règne dans la base de données. Avez-vous cherché à calculer les coûts et les avantages pour les contribuables de ce grand nettoyage par rapport aux économies qu'il permettrait de réaliser?

M. David Rattray: Madame la présidente, nous n'avons pas déterminé ce qu'il en coûterait pour mettre de l'ordre dans la base de données. Toutefois, si vous considérez les avantages, comme nous l'expliquons dans les exemples au niveau fédéral, il suffirait d'une période de temps très limitée pour récupérer au moins 33 millions de dollars. Autrement dit, sans vouloir préjuger du résultat d'une étude de coût, les avantages seraient énormes, et je peux vous le dire sur la base de quelques exemples seulement. Il est presque impossible de quantifier l'énormité des pertes subies par les différents paliers de gouvernement, fédéral, provincial et municipal. Donc, non, nous n'avons pas fait une étude de coût.

Tout cela nous ramène à notre observation de départ, le fait de vérifier l'exactitude de la base de données, de vérifier les numéros d'assurance sociale actuellement utilisés. D'autre part, comme le groupe de travail interministériel et intergouvernemental le dit, il y a peut-être d'autres options à envisager.

La présidente: Merci.

Monsieur Johnston.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Merci, madame la présidente. Je tiens à remercier le vérificateur général pour l'exposé qu'il nous a fait aujourd'hui.

• 1610

Dans votre déclaration d'ouverture, vous nous avez dit que plusieurs ministères étaient concernés par le numéro d'assurance sociale, et vous avez ajouté que ce n'était pas vraiment un problème. Peut-être pourriez-vous développer cette idée, car il me semble qu'en présence de tant de ministères personne ne se sent véritablement responsable.

Le ministre actuel a beau dire qu'il est prêt à assumer le fardeau et à s'occuper de la question, en fait je ne vois pas ce qui l'y oblige. Peut-être trouverez-vous ma question tendancieuse, mais j'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. David Rattray: Madame la présidente, pour commencer, je vous ferai observer que la déclaration du ministre à la Chambre le jour du dépôt de notre rapport était tout à fait conforme aux responsabilités du ministre du DRHC; il disait que son ministère avait déjà pris des mesures pour vérifier l'intégrité de la base de données du registre.

Lorsqu'il s'agit de rôles multiples, comme ceux que nous décrivons dans notre rapport, ce qui devient important, ce sont les rôles et les objectifs et les principes fondamentaux qui régissent l'utilisation d'un système, qu'il soit utilisé comme code d'identification national ou qu'il s'agisse d'un nouveau système qu'on mettrait en place.

Je peux seulement vous dire que le ministre s'occupe actuellement de l'intégrité de la base de données et prend toutes les mesures nécessaires pour que ces données respectent certaines marges de tolérance acceptables. On s'en occupe actuellement.

Mais le problème va plus loin, et il va falloir également faire intervenir tous les ministères et organismes intéressés. Or, pour cette tâche, il n'y a personne actuellement pour coordonner tous ces efforts et énoncer une position gouvernementale qui pourrait être soumise à un comité parlementaire comme le vôtre.

M. Dale Johnston: Il est certain que je n'aime pas l'idée qu'on utilise le numéro d'assurance sociale comme une sorte de code d'identification universel, et il m'est souvent arrivé de refuser de donner mon numéro d'assurance sociale à des vendeurs qui l'exigeaient pour accepter un chèque, par exemple, ou quelque chose de ce genre.

Si j'ai bien compris, au départ ce numéro devait servir uniquement à identifier les gens aux fins du droit à pension et de l'impôt sur le revenu. C'est une pièce qu'on demande fréquemment aux gens et qu'ils fournissent sans poser de question.

Pourriez-vous nous dire quelles pièces sont actuellement utilisées au Royaume-Uni ou aux États-Unis, à la place du NAS, comme code d'identification universel?

M. David Rattray: Madame la présidente, je vais répondre le premier, après quoi je demanderai à mon collègue, M. Laplante, de développer si vous le souhaitez.

À la pièce 16.10, à la page 16-34 de notre rapport, nous parlons d'une étude interne effectuée pour le compte de DRHC et du groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur le code d'identification commun. Cette étude remonte à janvier de cette année seulement et examine la situation dans plusieurs pays qui figurent dans le tableau. Ces pays n'utilisent pas tous un code d'identification commun au même degré. J'irais même jusqu'à dire, si je me souviens bien, que le pays le plus avancé est la Belgique (on parle du «modèle de Bruxelles»), suivi par la France probablement.

Les autres pays mentionnés dans l'étude ont tenté d'adopter des codes d'identification communs, mais ont renoncé à ces efforts ou sont revenus en arrière dans une certaine mesure, le plus souvent à cause de préoccupations sur le plan de la protection des renseignements personnels. Je ne sais pas si vous voulez de plus amples détails au sujet des États-Unis et de la situation actuelle dans ce pays-là.

M. Dale Johnston: Pouvez-vous nous dire très rapidement ce qu'on utilise aux États-Unis?

M. David Rattray: Je vais demander à mon collègue, M. Laplante, de vous répondre.

[Français]

M. Maurice Laplante (directeur, Direction des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Madame la présidente, différentes choses été tentées dans différents pays. On a essayé, dans différents pays, d'instituer un identifiant commun. Dans certains pays, on l'a fait assez largement, dans d'autres, on n'a appliqué cela qu'à certains types de programmes.

• 1615

Ainsi, en Grande-Bretagne, on a étudié la possibilité d'élaborer et de mettre en oeuvre un code commun d'identification, mais on s'est vite aperçu qu'on devait rejeter cette option. Ce qu'on a préféré faire, en Grande-Bretagne, c'est améliorer l'intégrité du système actuel et le conserver.

Aux États-Unis, on a également examiné cette option. Encore là, on a tenté de faire différentes choses. On a essayé de voir s'il était possible d'en étendre l'utilisation à plus de secteurs que celui de l'aide sociale. Mais, actuellement, on semble vouloir s'en tenir à celui-là.

[Traduction]

La présidente: Merci.

Une question très courte, monsieur Johnston.

M. Dale Johnston: Merci, madame la présidente.

Il me semble qu'avec n'importe quel système, n'importe quelle carte qui contient une série de chiffres, qu'il s'agisse d'une carte de crédit, d'une carte d'assurance sociale ou d'un code d'identification commun, le potentiel de fraude est gigantesque. Avec un tel système, l'intégrité doit être préservée avec le plus grand soin.

La présidente: Merci, monsieur Johnston.

Monsieur Wilfert.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je tiens à remercier le vérificateur général pour sa visite. Je suis désolé d'avoir raté le début, mais j'ai tout de même lu vos observations.

De toute évidence, les Canadiens veulent un système dans lequel ils peuvent avoir confiance, un système dont l'intégrité est certaine. Après avoir lu le rapport et vos observations, je constate que le public comprend très mal la raison d'être de la carte d'assurance sociale. C'est évident quand on voit des gens réclamer la carte pour des raisons qui ne sont pas justifiées. Comme nous l'avons constaté, le système n'est plus du tout utilisé comme on l'avait prévu.

Il y a quelques années, il y avait une publicité qui disait: «Payez-moi maintenant ou payez-moi plus tard.» À mon avis, nous pouvons tenter, soit de réparer le système, soit de le reconstruire entièrement. Personnellement, je me demande vraiment s'il est réparable.

Les dangers d'abus m'inquiètent toujours beaucoup. Dans ce pays, on cherche toujours à trouver un équilibre entre la quantité d'information qui est nécessaire à des fins légitimes et la quantité d'information que nous communiquons. Personnellement, je considère que nous donnons beaucoup trop d'information sur nous-mêmes, et c'est un problème.

D'autre part, je ne sais pas ce qu'il faudrait faire pour régler le problème, et, bien sûr, ce n'est pas à vous de nous le dire. De toute évidence, c'est une cuisine où il y a nettement trop de cuisiniers. Rien qu'au gouvernement fédéral, de très nombreux organismes sont intéressés. Il faut ajouter à cela toute l'information qui nous provient des provinces, et qui est peut-être exacte, mais qui ne l'est peut-être pas. Lorsque les gens meurent, ils ne rendent pas leur carte d'assurance sociale juste avant de mourir, et, par conséquent, c'est un problème.

Mme Brenda Chamberlain (Guelph—Wellington, Lib.): Ce serait une bonne idée: on pourrait interdire aux gens de mourir tant qu'ils n'ont pas rendu leur carte.

M. Bryon Wilfert: Je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais je vois l'accord signé par les provinces le 27 octobre, à l'exception du Québec, cette entente sur le partage des informations d'assistance sociale dans le cadre du système actuel, de la législation actuelle, et je me dis que cela va encore faciliter les abus.

Au Québec, quand les nouvelles cartes d'assurance-maladie ont été émises, il y a 75 000 personnes qui ne les ont pas demandées. La raison est évidente.

Je pense donc qu'il faudrait probablement reconstruire le système. Je ne sais pas, c'est peut-être une chose qui devrait nous occuper exclusivement, car c'est une entreprise énorme, mais à mon avis nous n'avons pas les moyens de réparer un système qui n'est plus réparable.

Vous l'avez d'ailleurs expliqué très clairement, et le ministre des Ressources humaines a accepté vos recommandations, mais à mon avis il ne peut pas et ne doit pas en assumer seul la responsabilité. C'est donc une affaire de volonté politique. Est-ce que nous avons la volonté nécessaire pour entreprendre ce voyage et le mener à bien? En effet, si nous nous engageons dans cette voie, nous devons être certains de pouvoir terminer.

Vous avez soulevé des problèmes particulièrement importants. La législation sur la protection des renseignements personnels prévoit depuis peu de nouvelles formes de partage des informations, et, pour cette raison, c'est un sujet dont on parle beaucoup, dont les provinces et le gouvernement fédéral parlent, mais, à mon avis, ce n'est pas une question politique. L'important, c'est de s'assurer que les Canadiens ont un système auquel ils peuvent faire confiance, qu'il s'agisse des cartes d'assurance sociale ou de toute autre information aux mains des gouvernements.

Vous savez, aux États-Unis, il y a entre 10 et 15 dossiers actifs sur chaque Américain. C'est une idée que je n'aime pas. Je ne sais pas combien il y en a au Canada, mais c'est probablement encore trop.

• 1620

Je ne sais pas si j'ai vraiment une question à poser, ou si je manifeste seulement ma frustration. Nous ne sommes pas ici pour porter des accusations, nous sommes ici pour nous assurer que tout le monde est prêt à prendre des mesures. Cela dit, nous avons besoin d'un plan d'action, et nous devons commencer le plus vite possible.

Si j'ai une question à poser, et elle est peut-être injuste, c'est de vous demander si le système est réparable. D'après ce que vous avez vu, pensez-vous qu'il soit possible de réparer le système, ou faut-il envisager un nouveau modèle, sans toutefois préciser en quoi il consiste?

M. Denis Desautels: Madame la présidente, il y a beaucoup de problèmes que vous avez soulevés et qui sont réparables, à condition que la volonté d'agir existe et que les gens se rendent compte de l'importance de cette tâche. Il ne faut pas minimiser non plus l'importance de l'intégrité de la base de données. J'imagine que c'est la position du ministre; il est déterminé, je pense, à réviser le registre pour en faire une base de données sûre.

Vous avez raison, cela ne règle pas les problèmes d'ordre général. Par conséquent il va falloir qu'on vous soumette, à vous et au reste du Parlement, une série de choix et d'options à envisager, et également une étude des coûts et des avantages de ces options. Il faudra comparer cela au statu quo ou à un statu quo quelque peu modifié. C'est une des choses que nous expliquons dans notre chapitre. Il faut que les parlementaires prennent part à ce débat élargi. Si nous ne faisons rien, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous allons nous retrouver avec les pires éléments: une base de données imparfaite sans pour autant que les renseignements personnels soient protégés.

La présidente: Vous avez parlé de la possibilité de réparer le système, et M. Wilfert nous a dit à quel point il était frustré de voir le système aussi mal administré. D'autre part, il est nécessaire de protéger les consommateurs des artistes fraudeurs. Pensez-vous qu'il serait bon d'associer aux cartes d'assurance sociale un numéro de code, un numéro NIP? Les citoyens pourraient venir s'enregistrer, et on leur donnerait un numéro de code pour que personne ne puisse utiliser leur carte frauduleusement. Est-ce que cette idée a été suggérée?

M. David Rattray: Madame la présidente, je vais donner une première réponse à cette question.

Pour envisager un numéro NIP, il faut partir d'un numéro d'assurance sociale existant, ou encore d'un numéro modernisé ou modifié. Un numéro de code, c'est une méthode parmi plusieurs.

À la pièce 16.6, nous soumettons au Parlement certaines innovations technologiques qui sont possibles à l'heure actuelle. Les spécialistes vous diraient probablement que les cartes avec numéro de code sont une solution parmi d'autres. Il y a également les méthodes d'identification biotechnologique, l'encodage, etc. Par conséquent, le NIP est une option, mais je pense qu'elle sera peut-être dépassée avant qu'on puisse la mettre en application.

La présidente: Il y en aura de plus perfectionnées, oui.

M. David Rattray: Pour répondre à votre question précise, donc, le fait d'ajouter un numéro de code au système de carte d'assurance sociale actuel n'est probablement pas une solution rapide à un problème qui va plus loin. Comme vous pouvez le voir dans ce tableau, si la carte d'assurance sociale ou un numéro quelconque devait servir de pièce d'identité, il y a toute cette gamme d'options, des options que les gens des Ressources humaines, entre autres, doivent bien connaître. Cela pourrait être un point de départ lorsqu'ils auront reçu des indications sur l'option retenue et sur la portée de leurs responsabilités.

La présidente: Autrement dit, ce serait un mécanisme très primitif. Je vois que vous avez ici une liste de solutions beaucoup plus perfectionnées.

M. David Rattray: Madame la présidente, j'utilise actuellement un numéro NIP avec ma carte bancaire, et j'espère qu'il est toujours valable, mais j'imagine que l'année prochaine j'utiliserai quelque chose de très différent—reconnaissance vocale ou empreinte de la main, ou quelque chose de ce genre.

La présidente: Merci.

[Français]

Monsieur Crête.

M. Paul Crête: Je poserai une question rapide, mais à deux volets.

Le premier volet porte sur la carte que je vous ai montrée tout à l'heure, qu'on émet lorsque les gens atteignent l'âge de 65 ans. Selon vous, est-ce une utilisation abusive du numéro d'assurance sociale que de le faire apparaître sur une telle carte sans en même temps émettre des mises en garde sur son utilisation? C'est là le premier volet de ma question.

• 1625

Voici le deuxième. Dans votre rapport, à la page 16-23, vous dites:

    Comme le montre la pièce 16.7, il y a eu 2 730 enquêtes sur les abus sur l'utilisation du NAS en 1997-1998, soit une baisse de 52 p. 100 par rapport à 1993-1994.

Pouvez-vous m'expliquer comment il peut y avoir eu une baisse de 52 p. 100 au cours de ces cinq années? Est-ce parce qu'on a déplacé les inspecteurs du NAS pour les diriger vers les enquêtes sur l'assurance-chômage? Cette baisse s'explique-t-elle autrement? Si on revenait au niveau de 1993-1994, est-ce qu'on ne pourrait pas régler une grande partie des problèmes qui se posent, en tout cas des fraudes qui existent?

M. Denis Desautels: Madame la présidente, je vais tenter de répondre à la première des deux questions de M. Crête, et je vais demander à mes collègues de répondre à la deuxième.

La carte dont M. Crête nous parle, je ne l'ai pas vue. Tout ce que je puis dire, c'est que cela illustre peut-être ce qui est arrivé au numéro d'assurance sociale au cours des années. Pour toutes sortes de bonnes raisons, on a trouvé de nouvelles façons de s'en servir et, avec le temps, il est devenu de facto un numéro d'identification universel. Si vous en parlez au commissaire à la protection de la vie privée, il va vous dire qu'on s'en sert un peu trop librement. Donc, évidemment, cela illustre parfaitement ce qui est arrivé, au cours des ans, au numéro d'assurance sociale.

M. Paul Crête: C'est le ministère qui est chargé de la gestion des numéros.

M. Denis Desautels: Oui. Toutefois, si on examine la liste des 24 utilisations actuelles du numéro d'assurance sociale, dans le cadre fédéral, on constate que ce n'est pas le seul cas du genre.

David.

[Traduction]

M. David Rattray: Je vais demander à M. Laplante de répondre à la seconde question au sujet du paragraphe 16.6(4).

[Français]

M. Maurice Laplante: Madame la présidente, effectivement, on note un baisse importante du nombre d'enquêtes. Cette baisse peut s'expliquer par différents facteurs. Plusieurs choses se sont produites à l'intérieur du ministère durant cette période de temps. Il y a eu une très grande variation dans la charge de travail de l'assurance-emploi, mais, également, l'accent a été mis sur les indicateurs de rendement, sur des cibles que les enquêteurs devaient atteindre. Cela a donc eu pour effet d'orienter le travail des enquêteurs. Comme on l'a mentionné plus tôt, on en vient à orienter le travail sur les économies réalisables ou sur les pénalités qu'on peut imposer à la suite de fraudes commises envers l'assurance-emploi. Donc, le travail des enquêteurs se trouve orienté vers les fraudes commises dans l'assurance-emploi et vient diminuer, en quelque sorte, le travail qui serait fait sur les enquêtes portant spécifiquement sur le numéro d'assurance sociale.

La présidente: Monsieur Crête, une question toute courte.

M. Paul Crête: Vous nous avez parlé, monsieur Rattray, d'une réponse que vous auriez reçue du ministère du Développement des ressources humaines à vos recommandations. Serait-il possible de nous communiquer cette réponse? J'ai compris tout à l'heure que le ministère avait répondu à vos suggestions. Peut-être ai-je mal compris.

M. David Rattray: Madame la présidente, les deux réponses que j'ai mentionnées ont été incluses dans notre chapitre. Je peux vous indiquer dans quelles sections du chapitre on les trouve.

M. Paul Crête: Les deux réponses que vous avez obtenues?

M. David Rattray: Elles sont incluses dans notre chapitre.

M. Paul Crête: Vous n'avez pas eu d'autres réponses aux recommandations contenues dans tout le document?

M. David Rattray: Non.

M. Paul Crête: D'accord.

La présidente: Monsieur Vellacott.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): C'est une question pour Maurice Laplante à propos des pays qu'il a mentionnés, la France, la Belgique, et un autre, je crois, qui sont particulièrement avancés.

Si on nous demandait de choisir le pays du monde qui est le plus avancé, celui qui a les dispositions de sécurité les plus efficaces, pour avoir une idée de ce qui nous attend, lequel faudrait-il choisir? Je regarde la pièce 16.6, et c'est rassurant de voir que certaines de ces techniques sont déjà utilisées. À votre avis, parmi ces techniques, quelle est la plus sûre, et dans quel pays est-elle utilisée à l'heure actuelle? Est-ce que c'est la Belgique, la France... Est-ce que je peux me permettre de poser une telle question?

M. David Rattray: Je vais essayer de répondre.

Nous avons fait deux choses: nous avons considéré la situation dans les pays dont M. Laplante vous a parlé. Ce sont des pays qui envisagent une pièce d'identité unique, ou encore qui ont déjà adopté un tel système. Nous n'avons pas particulièrement considéré les aspects de sécurité et de protection des renseignements personnels que comportent les cartes ou les bases de données, à l'exception des références à l'étude effectuée pour le compte de DRHC.

• 1630

Je me trompe peut-être, mais vous vous référez en même temps à la pièce dont je parlais, celle où on trouve toute la gamme des contrôles possibles si une carte était utilisée, par exemple ici, au Canada. Nous n'avons pas du tout essayé d'établir un rapport entre le graphique où sont énumérés tous les contrôles possibles et le graphique qui contient la liste des contrôles précis mis en place par des pays où on envisage une pièce d'identité unique.

M. Maurice Vellacott: Au paragraphe 16.6, vous donnez une liste des caractéristiques de sécurité, mais sans ordre particulier. À votre avis, est-ce que certaines de ces caractéristiques sont plus avancées que d'autres? On a parlé tout à l'heure du NIP, et on a dit que c'était peut-être suffisant. C'est une méthode qui continue à vous inspirer confiance. À votre avis, est-ce que certaines de ces méthodes sont nettement préférables à d'autres sur le plan de la sécurité?

M. David Rattray: Madame la présidente, lorsque nous avons préparé ces documents, nous avons consulté des experts en matière de sécurité des cartes, cartes de crédit et autres, et vous avez sous les yeux un résumé de la situation actuelle sur la base des discussions que nous avons eues avec pas mal de gens. Nous ne les avons pas classés par ordre de priorité, mais nous savons que les numéros NIP sont utilisés actuellement et que, selon toute évidence, ils seront remplacés par des méthodes biométriques. Cela dit, avant de passer à l'étape suivante, il faut déterminer si c'est rentable, analyser les coûts et les avantages.

Nous ne les avons donc pas classés, mais je pense que les choses évoluent plus rapidement dans le secteur privé que dans le secteur public, et il est certain que les méthodes biométriques vont remplacer les simples numéros NIP que nous avons actuellement.

M. Maurice Vellacott: En se fondant sur les avantages-coûts, savez-vous quelle solution le secteur privé favorise actuellement? Les méthodes biométriques?

M. David Rattray: Non, mais je sais que les banques et les autres institutions financières étudient actuellement ces options. En fait, une des grandes banques a travaillé avec nous sur les options qui existent actuellement, de même qu'une personne assez haut placée dans la Gendarmerie royale du Canada. Nous avons également parlé à une des grandes firmes de comptabilité et de conseils pour connaître leur opinion. Il y a donc toute une gamme d'options possibles. Toutefois, nous ne sommes pas allés plus loin, car nous préparions seulement de la documentation; ce n'était pas une étude sur les avantages et les coûts. Il va maintenant falloir discuter de ces options et de leur rentabilité.

La présidente: Merci, monsieur Rattray.

Monsieur O'Reilly.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je vous souhaite la bienvenue encore une fois, monsieur Desautels, et je vous remercie infiniment pour toute l'expertise que vous nous apportez.

À mon avis, c'est un problème qui va beaucoup plus loin que les numéros d'assurance sociale, et les abus également vont beaucoup plus loin. Par exemple, j'ai des électeurs qui se sont plaints d'être sans cesse sollicités par des banques étrangères qui mettent sur le marché de nouvelles cartes de crédit. Il y a en particulier des organisations de cartes de crédit qui achètent des listes de clients, et ceux-ci subissent un barrage d'offres pour une nouvelle MasterCard émise par Bank One.

Cela donne lieu à des situations intéressantes. Par exemple, des gens qui m'ont écrit se demandaient comment le nom de leur chien avait abouti sur une demande de MasterCard qui portait leur numéro d'assurance sociale. Nous y avons regardé de plus près et nous nous sommes aperçus que la compagnie de toilettage du chien avait probablement vendu ce nom-là à un organisme qui dressait des listes. Une demande de carte MasterCard a donc été envoyée à leur chien avec leur numéro d'assurance sociale. Quand vous emmenez votre chien à la clinique, j'imagine que vous devez donner votre numéro d'assurance sociale au vétérinaire ou à son personnel. On a vu également des gens morts ressusciter. Il y a des chiens et des morts qui ont un numéro d'assurance sociale.

J'ai ces dossiers dans mon bureau, et lorsque j'ai vu qu'on parlait du NAS au chapitre 16, j'ai envoyé ce chapitre à la personne qui me demandait ce qu'elle devait faire de cette demande de MasterCard établie au nom de son chien. Cela dit, ce qui l'inquiétait vraiment, c'est l'usage qu'on faisait de son NAS. Il y a également une demande envoyée au père de quelqu'un, décédé depuis 12 ans, et portant son numéro NAS. J'aimerais donc savoir si vous vous êtes demandé quel type de législation pourrait mettre fin à de tels abus.

• 1635

N'importe quoi peut faire l'objet d'abus. Plus nous utilisons de gadgets électroniques, plus on voit des cas comme ces prisonniers qui téléphonent aux gens et leur demandent de bien vouloir appuyer sur *90 parce qu'on est en train de vérifier le bon fonctionnement de leur matériel. En fait, cela permet aux prisonniers d'utiliser leur numéro pour faire des appels interurbains. C'est leur numéro qui est facturé. Au fur et à mesure il faut trouver des sauvegardes.

Je me demande si vous avez pensé aux listes qui contiennent des numéros NAS et qui sont vendues à des sociétés privées.

Je voulais vous poser une vraiment bonne question; nous ne sommes pas au Comité des comptes publics.

M. David Rattray: Madame la présidente, toutes les questions sont excellentes.

Des voix: Oh, oh!

M. David Rattray: Je vais essayer d'être bref. C'est particulièrement difficile quand on a tellement de documentation à ce sujet.

Pour commencer, en ce qui concerne la fraude et les abus, nous avons étudié les enquêtes et nous nous sommes penchés sur ce qui se fait dans les ministères qui sont responsables de cela. Ressources humaines est particulièrement un bon exemple, et la Commission d'assurance-emploi est un exemple parmi d'autres. Nous avons également consulté les dossiers de Revenu Canada. Nous n'avons pas essayé de faire nous-mêmes des enquêtes sur des cas de fraude, et, par conséquent, ce que vous avez là, c'est un simple état de la situation. Nous nous sommes intéressés aux efforts déployés—dans certains cas des efforts déclinants—pour détecter la portée des fraudes relatives aux numéros d'assurance sociale.

Nous n'avons pas considéré les programmes que vous avez mentionnés et les autres domaines où on fait des enquêtes en matière de fraude. Nous avons essayé de nous faire une idée des efforts déployés, pour pouvoir dire aux ministères qu'ils doivent remanier leurs indicateurs d'identité et peut-être même envisager très sérieusement de consacrer des ressources supplémentaires à des contrôles préventifs et à l'application de pénalités plus sévères. Dans un cas ou deux nous avons pu constater que les efforts diminuaient et que le problème était en pleine expansion.

Nous avons constaté que les peines administratives étaient extrêmement légères et peu nombreuses et que les inculpations qui pourraient avoir un effet dissuasif étaient pratiquement inexistantes. Cela nous a semblé inquiétant, et nous l'avons souligné. Cela dit, il faudrait des changements majeurs pour que cette situation change.

Voilà donc ce que je peux vous dire à ce sujet-là. Nous n'avons pas enquêté directement dans le domaine de la fraude. Nous nous sommes contentés de vous soumettre un tableau de ce que font d'autres services dans le cadre de leurs responsabilités. Également, nous vous avons fait part de nos préoccupations.

M. John O'Reilly: Si vous le permettez, j'aimerais vous parler d'une famille où deux cartes ont déjà été utilisées d'une façon frauduleuse. C'est tellement facile: il suffit d'acheter une liste de clients. Quand on considère toutes les cartes qui existent, si on peut trouver deux cas d'utilisation frauduleuse dans une seule famille, il doit y en avoir beaucoup plus que vous n'en avez trouvé.

M. David Rattray: Madame la présidente, nous avons simplement cherché à déterminer dans quelle mesure les ministères eux-mêmes faisaient des efforts pour détecter les cartes émises illégalement ou les cartes utilisées en double. Comme nous l'avons dit plus tôt, les efforts ralentissent, en particulier en ce qui concerne le numéro d'assurance sociale, car le secteur qui semble obtenir le plus de ressources, c'est celui où on peut réaliser des économies directes. Il est beaucoup plus facile ou plus approprié de s'attaquer aux abus de la TPS ou à la fraude de l'assurance-emploi, car cela permet de récupérer de l'argent immédiatement. Par contre, quand on saisit des cartes ou quand on les rappelle pour les supprimer, les économies ne sont pas immédiates.

Je sais que le problème va plus loin, mais lorsque vos indicateurs sont axés sur les économies réalisables, ce n'est pas en retraçant les cartes d'assurance sociale illégales que vous aurez des résultats immédiats. Nous avons fait cette observation, et le ministère est en train de réétudier ses indicateurs de performance. D'un autre côté, nous espérons qu'on intensifiera les efforts dans ce domaine et qu'on trouvera plus de cartes.

• 1640

M. John O'Reilly: Très bien. Merci beaucoup.

La présidente: M. O'Reilly nous a dit que certaines compagnies étaient devenues des points d'entrée pour les fraudes concernant l'identité. Je pense en particulier aux compagnies de téléphone cellulaire. On a utilisé le numéro d'assurance sociale de mon mari à des fins frauduleuses. Pensez-vous que le Parlement aurait intérêt à demander à toutes les sociétés qui sont réglementées par le gouvernement fédéral de se conformer à certaines normes de prévention de la fraude relatives aux numéros d'assurance sociale? Est-ce que ce serait un pas dans la bonne direction?

M. David Rattray: Madame la présidente, ce n'est pas à moi de dire au Parlement ce qu'il doit faire dans le domaine législatif.

La présidente: Nous vous demandons conseil. Les gens hésitent rarement à nous dire ce que nous devons faire.

M. David Rattray: À mon avis, tout ce qui peut avoir pour effet de décourager la fraude, de la dépister et d'imposer des sanctions justifiées est un pas dans la bonne direction et une façon avisée de dépenser les fonds publics. Quant aux téléphones cellulaires, je laisserai les parlementaires, les législateurs et les rédacteurs s'en occuper. Toutefois, je suis certainement en faveur de toute mesure ayant pour effet de dépenser l'argent du contribuable d'une façon plus avisée.

La présidente: Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Je suis d'accord avec ce que mon collègue vient de dire. Le ministère du Développement des ressources humaines pourrait probablement imposer une sorte de peine ou de sanction aux compagnies qui se prêtent à ce genre d'abus. Mais avant de proposer une nouvelle loi, il faudrait commencer par nous demander si nous utilisons vraiment les recours dont le gouvernement dispose actuellement. À mon avis, si ce genre d'abus existe vraiment, il doit y avoir un moyen de l'attaquer avec la législation actuelle.

En ce qui concerne la législation d'une façon générale, vous avez mis le doigt sur un problème, mais on a attiré notre attention sur une multitude de problèmes comparables, et cela, dans tout le pays. En fait, on insiste souvent pour que les gens fournissent leur numéro d'assurance sociale. Mais, au départ, je ne pense pas que telle ait été l'intention du Parlement. Il y a d'autres types d'abus très graves qui sont une grande source de frustration. Les gens ne réussissent pas à accomplir des transactions civiles très simples sans fournir leur numéro d'assurance sociale. Il y a plusieurs domaines où vous pourriez envisager de légiférer ou de modifier les dispositions actuelles.

La présidente: Merci. Nous attachons beaucoup d'importance à votre opinion.

Monsieur Dubé.

[Français]

M. Jean Dubé: Ce que je retiens de la discussion d'aujourd'hui, c'est le rôle de la carte d'assurance sociale, qui sert à obtenir des cartes de crédit et différentes autres choses. Je pense que l'accès à l'information rattachée à la carte est encore problématique.

Je retiens aussi ce qui a été mentionné tout à l'heure à propos de ce que j'ai dit des dossiers encore actifs de Canadiens qui n'existent plus, qui sont décédés mais dont on ignore le décès. Vous serez d'accord ou non sur ce que je vais dire, mais il me semble que l'information devrait être centralisée dans un même ministère, sous un seul chapeau, sous le plafond d'une même maison. Il deviendrait peut-être alors un peu plus facile d'obtenir l'information. C'est une suggestion, une observation.

• 1645

Ce que je vois dans le moment, c'est qu'on s'en sert aux ministères du Développement des ressources humaines, de la Justice et de l'Industrie. Également, toutes les émetteurs de cartes de crédit ont le numéro d'assurance sociale. Les employeurs ont les numéros d'assurance sociale. Cela devient a free market. Donc, je crois qu'on doit redéfinir le rôle de la carte d'assurance sociale et aussi essayer de coordonner cela d'un peu plus près.

M. Denis Desautels: Madame la présidente, je ne suis pas certain d'avoir bien compris ce que M. Dubé veut dire quand il parle de centralisation. Le Registre d'assurance sociale est centralisé et tombe sous la responsabilité du ministère du Développement des ressources humaines. Il a une responsabilité très claire en ce qui a trait à la garde et au maintien du registre.

Il y a des échanges de données entre le registre central et certains autres utilisateurs comme Revenu Canada et le compte d'assurance-emploi, qui font un usage courant et très répandu du numéro d'assurance sociale. Mais la responsabilité du maintien du registre est assez clairement attribuée. Elle relève, selon moi, d'un seul ministère. Donc, il existe déjà une certaine forme de centralisation.

M. Jean Dubé: Alors, c'est peut-être au niveau de l'échange de l'information qu'est le problème. D'où le ministère reçoit-il l'information? Je reviens au cas d'une personne décédée.

M. Denis Desautels: Pour maintenir le registre à jour, y inscrire les naissances et les décès, le gouvernement fédéral, ou le ministère, a besoin de renseignements lui venant des provinces. Donc, il doit y avoir des ententes avec chacune des provinces, qui fonctionnent, par lesquelles les décès ou les naissances lui sont rapportées. En fait, il s'agit surtout des décès. Les naissances sont moins importantes; éventuellement quelqu'un va faire une demande de numéro d'assurance sociale. En fait, il doit y avoir un échange d'information avec les registres civils de chacune des provinces.

La présidente: Madame Brown.

[Traduction]

Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je tiens à m'assurer que les conclusions que nous avons tirées du rapport du vérificateur général sont exactes. Je regarde le graphique à la page 12, où on trouve un exemple utilisé par le vérificateur général: il y a 311 000 personnes vieilles de 100 ans ou plus qui ont des cartes d'assurance sociale, mais 3 000 seulement d'entre elles figurent au recensement comme étant vivantes. Ne serait-il pas logique d'en conclure que 308 000 d'entre elles sont mortes, ou bien y a-t-il une autre explication?

Allons plus loin: étant donné l'âge de ces 308 000 personnes, il est fort probable qu'elles sont mortes, mais est-ce que vous avez utilisé cette même méthode pour évaluer combien de personnes pourraient être mortes dans les autres groupes? Autrement dit, en se fondant sur les probabilités actuarielles, combien y a-t-il de gens entre 80 et 89 ans qui ont des cartes supplémentaires et qui risquent d'être mortes, et combien y en a-t-il entre 70 et 79 ans? Autrement dit, si nous savons qu'une certaine proportion des plus de 100 ans sont morts, ce chiffre total devient suspect, ces 3 783 000. Je me demande si vous avez cherché à appliquer une formule d'évaluation pour déterminer les décès possibles dans les autres catégories.

M. Denis Desautels: Madame la présidente, je vais commencer, et M. Rattray terminera.

Ce que ce chiffre de 3 783 000 signifie, c'est qu'il y a des numéros qui sont toujours en circulation, qui peuvent toujours être utilisés par quelqu'un, bien que le titulaire du numéro soit décédé ou ait quitté le pays, ou pour une autre raison.

• 1650

Mme Bonnie Brown: Qui est-ce qui vous dit que leur décès n'a simplement pas été enregistré et que leurs descendants ont jeté leur carte à la poubelle quelques semaines plus tard?

M. Denis Desautels: C'est fort possible, mais nous ne le savons pas. Ce dont nous sommes certains, c'est qu'il y a des fraudeurs qui utilisent des cartes ayant appartenu à des personnes décédées. Peut-être même qu'ils cherchent le numéro d'une personne après avoir lu son nom dans la chronique des décès.

Mme Bonnie Brown: Je sais bien que c'est possible, mais il est tout aussi possible que la carte soit dans la poubelle et qu'elle n'ait jamais été utilisée.

La façon dont on a abordé cette question depuis le moment du dépôt de votre rapport n'est pas sans conséquence, et vous venez justement d'amener de l'eau au moulin en laissant entendre que toute carte qui n'a pas été rayée de la liste sert probablement à un quelconque filou. Or, j'estime pour ma part que la plupart des cartes sont déjà au panier, à l'incinérateur, au dépotoir, si elles n'ont pas été découpées en morceaux par un proche de la personne décédée.

M. Denis Desautels: Sans vouloir insister trop lourdement sur cet aspect, je crois que le fait de jeter au panier la carte d'une personne décédée n'empêche pas quelqu'un d'autre de continuer à utiliser le numéro, dans la mesure où ce numéro continue d'être en vigueur au registre.

Nous ne sommes pas certains de l'importance du phénomène. Cela ne se produit pas souvent, mais, compte tenu du nombre de cartes en circulation qui ne sont pas annulées alors qu'elles devraient l'être, les possibilités sont tout de même considérables. Les cas de fraude constatés ont souvent rapport à l'utilisation de cartes qui auraient dû être annulées, mais qui ne l'ont pas été.

Le chiffre ne sert que d'indice. Plus il y a de cartes en circulation, plus certains problèmes risquent de se poser.

Mme Bonnie Brown: Mais vous ne parlez tout de même que d'éventualités.

J'aimerais passer maintenant au tableau où sont énumérés les divers types d'utilisation abusive du NAS. L'information est présentée d'une telle façon que, tout au moins dans les premiers jours après le dépôt à la Chambre de votre rapport, on a pu avoir l'impression que les 3,7 millions de numéros—et je préfère pour ma part parler de cartes mais vous vous parlez de numéros—servent à ce genre de fins.

Ne seriez-vous pas d'accord pour dire que le fait d'utiliser un numéro à l'une ou l'autre de ces fins implique essentiellement une intention criminelle, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'appliquer à la population canadienne en général?

Tout comme certaines personnes, y compris des représentants des médias, j'ai conclu que tous ces numéros circulaient et que tous ceux qui avaient accès à l'un d'entre eux s'adonnaient à ce genre d'activités. Ce n'est certainement pas ce que vous vouliez dire.

M. Denis Desautels: Il ne me semble pas que c'est ce qui ressort du chapitre.

Mme Bonnie Brown: En effet, mais le chapitre est structuré et formulé de telle manière que certains ont été incités à aboutir à ce genre de conclusion.

M. Denis Desautels: Il me semble que la formulation du chapitre est plutôt claire à cet égard. Nous avons décrit les problèmes existants de façon tout à fait factuelle. Rien de tout cela n'est exagéré, selon moi, et nos recherches succinctes nous ont même permis d'établir que des problèmes existent. Cependant, nous n'avons jamais déclaré que tous ceux qui disposent d'une carte agissent de la sorte. Ce n'est pas du tout ce qui ressort du chapitre.

Mme Bonnie Brown: Je n'ai pas affirmé que c'est ce qui était dit dans le chapitre, mais c'est tout de même la conclusion qu'ont tirée certaines personnes à l'examen des deux tableaux en question. On y constate qu'il y a en circulation un certain nombre de cartes, qu'elles peuvent faire l'objet d'un certain nombre d'usages, et on en déduit que les cas d'abus sont légion. Je vous invite tout simplement à dire que ce n'est certainement pas ce que vous vouliez laisser entendre.

La présidente: Souhaitez-vous commenter?

M. Denis Desautels: Nous ne l'avons pas laissé entendre et nous ne l'avons jamais dit non plus. Ce n'est pas ce qui ressort du rapport.

La présidente: Exactement.

Monsieur Wilfert, très rapidement. Nous passerons ensuite à M. Crête, puis à M. Clouthier.

M. Bryon Wilfert: Madame la présidente, de toute évidence, le vérificateur général sait très bien que l'utilisation du numéro d'assurance sociale ne fait l'objet d'aucune interdiction. Tout comme M. Johnston, j'ai été témoin de cas où on a demandé le NAS alors qu'on n'aurait pas dû le faire. Il y a certainement là un problème, et le système doit être soit corrigé, soit repensé.

En attendant—et je ne sais pas si cela fait partie de vos responsabilités—il me semble que nous avons besoin à court terme d'une loi pour remédier au fait que les gens ne savent pas à quoi devrait servir le NAS, ce qui donne lieu à des abus. Il faut mettre en place des sanctions, surtout à court terme, pour faire face à ce problème, parce que ce problème persistera jusqu'au moment où les faiblesses du régime seront corrigées ou jusqu'au moment où il y aura une refonte du système. Il nous faut des sanctions très sévères dans les cas d'abus.

• 1655

Le fait même qu'il y a des milliers de personnes sans statut juridique au Canada qui détiennent des NAS—c'est assez pour me donner des cheveux gris. Je vais me retrouver avec des cheveux gris ou perdre mes cheveux; je ne sais pas ce qui va arriver.

Une voix: Vous espérez vous retrouver avec des cheveux gris.

M. Bryon Wilfert: J'espère avoir des cheveux gris. Je ne sais pas ce que veut mon collègue ici.

Il nous faut une loi quelconque qui serait très sévère pour ces personnes-là ainsi qu'un programme pour sensibiliser le grand public à l'utilisation du NAS. Nous, les Canadiens, étant pour la plupart très gentils, avons tendance à faire cadeau de ces choses.

M. David Rattray: Madame la présidente, j'aimerais offrir une réponse à cela. Comme vous le savez, le projet de loi C-54, qui porte sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, vient d'être déposé. Je crois qu'on a tenu un vote hier, renvoyant le projet de loi au comité pour étude. Je ne suis pas sûr où il est, mais je crois que le vote a eu lieu hier.

Le projet de loi C-54 répond à une préoccupation que nous abordons ici dans notre rapport, c'est-à-dire l'utilisation répandue dans le secteur privé du numéro d'assurance sociale et d'autres formes de renseignements personnels ainsi que les abus éventuels reliés à cette utilisation. Pendant l'étude de ce projet de loi, on aura l'occasion d'étudier immédiatement les sanctions qui y sont proposées. Donc la question pourrait être abordée d'une façon très immédiate.

Deuxièmement, en ce qui concerne le secteur public, il faudrait plutôt examiner les lois qui gouvernent le fonctionnement du ministère du Développement des ressources humaines, et notamment le régime d'assurance-emploi, et qui établissent les sanctions. Dans notre rapport, nous signalons que l'amende administrative maximale pour l'emploi abusif d'un NAS est de 1 000 $. Nous avons examiné 325 cas, et une amende de 200 $ a été imposée dans seulement un cas. Alors on pourrait avoir un débat sur les sanctions dans le contexte de ces lois, ainsi que dans le contexte du projet de loi C-54, afin de juger si les sanctions sont assez sévères.

La présidente: Je me rends compte qu'il y a beaucoup de questions; donc elles seront posées dans l'ordre suivant: M. Crête, M. Clouthier, M. Johnston et Mme Chamberlain, qui aura le dernier mot. En fait, ce sont nos invités qui auront le dernier mot.

Monsieur Crête.

[Français]

M. Paul Crête: Monsieur Desautels, ma question porte sur deux points. S'il ne se fait rien par rapport au registre, quelle sera la situation dans cinq ans, selon vous? Sera-t-elle encore plus grave?

Si, en plus, on ne tient pas le débat de fond que vous recommandez au paragraphe 12, qui ne porte pas que sur le registre, mais sur toute la philosophie et les principes d'utilisation du numéro d'assurance sociale, quelles en seront les conséquences dans cinq ou dix ans? Choisissez l'horizon que vous voulez.

J'aimerais que vous nous disiez de façon claire ce que pourraient être les conséquences de l'inaction dans ces deux cas.

M. Denis Desautels: Madame la présidente, pour ce qui est du premier aspect, si rien n'est fait pour corriger l'intégrité du registre, la situation dans quelques années sera à peu près celle d'aujourd'hui. La situation d'aujourd'hui perdure depuis déjà un bon nombre d'années. Elle ne date pas d'hier ou de l'an dernier. Il y a cinq ans, elle était à peu près comme aujourd'hui. Elle empire toujours un peu, mais il n'y a pas de raison...

M. Paul Crête: Nous aurons encore plus de personnes âgées de 100 ans qui ne seront pas encore mortes.

M. Denis Desautels: En fait, je ne peux pas accepter que dans cinq ans, la situation soit la même. Les assurances qu'on nous a données, je les prends à leur juste valeur et j'espère qu'on va donner suite à nos recommandations. De notre côté, nous allons assurer un suivi sur ce plan pour nous assurer que dans cinq ans...

M. Paul Crête: Je ne présume pas que le ministère ne fera pas son travail. C'est seulement pour bien caricaturer la situation.

• 1700

M. Denis Desautels: Pour ce qui est de la question des fonds, il y a énormément de frustration pour ce qui est des abus. Quand je parle d'abus, je parle d'abus contre la protection de la vie privée. On demande trop souvent le numéro d'assurance sociale. Les citoyens vont être de plus en plus frustrés. Les gens nous en parlent et vous font part à vous aussi de leurs frustrations. Nous constatons que l'utilisation du numéro d'assurance sociale ne va pas en diminuant; à chaque mois, on constate qu'il y a sans doute de nouvelles utilisations, et dans le secteur privé et dans le secteur public. Donc, le niveau de frustration chez ceux qui s'inquiètent de la protection de la vie privée va aller en augmentant.

[Traduction]

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Madame la présidente, je crois que la plupart de mes questions ont déjà été posées, mais étant donné que la plupart des hommes politiques—et surtout ceux qui sont assis de l'autre côté de la table—aiment s'entendre parler, je ferai de mon mieux.

Monsieur Desautels, je vois que vous avez parlé d'astuce. Mon collègue ici à ma droite... Pour moi, l'astuce serait d'envoyer une carte MasterCard à mon chien plutôt qu'à mes trois adolescents, parce que cela me coûterait vraisemblablement beaucoup moins cher au bout de la ligne.

J'enchaîne avec une remarque très importante, monsieur Desautels. À mon avis, la majorité des Canadiens sont beaucoup plus préoccupés des renseignements concernant les cartes de crédit et les cartes bancaires que du NAS.

Avant de devenir député, j'avais des entreprises dans le vrai monde. Et je sais que les gens se préoccupaient beaucoup plus de leur carte MasterCard ou de n'importe quel renseignement personnel détenu par les banques que de leur NAS. Quelles en sont les répercussions?

La question est d'autant plus difficile que même si on met le régime au rancart et repart de zéro avec un nouveau régime—comme certains le recommandent—nous serons quand même à l'ère de l'information. Tôt ou tard, peu importe le régime que nous adopterons, et surtout s'il a trait à des numéros, les gens se mettront au courant, et il y aura des abus dans ce régime.

J'ai donc deux questions. Croyez-vous que la sanction pour l'emploi abusif du NAS devrait être plus élevée? Si on regardait ce qui se fait dans d'autres pays du monde... je sais qu'il y a des gens beaucoup plus intelligents que moi, surtout de ce côté-ci de la table, mais de l'autre côté, j'en suis moins certain. Je me demande simplement ce qui se fait dans d'autres pays pour contrer les abus relativement au numéro d'assurance sociale. Est-ce qu'ils ont des mesures en place? David a dit plus tôt que certains pays ont essayé des solutions qu'ils ont par la suite été obligés de rejeter parce qu'elles ne marchaient pas. Il me semble que nous ne voyons jamais la fin; il me semble que nous tournons en rond.

La présidente: Monsieur Desautels.

M. Denis Desautels: Madame la présidente, je suis d'accord avec les propos de M. Clouthier selon lesquels les préoccupations qu'ont les gens au sujet de la protection des renseignements personnels ne se limitent pas en effet aux abus du NAS et à la violation de la vie privée au moyen du NAS. La vie privée peut être violée de plusieurs autres façons, et je suis complètement d'accord avec cela.

Est-ce que les sanctions en cas d'abus manifestes devraient être plus élevées? Comme le disait M. Rattray plus tôt, il y a déjà dans la loi des sanctions en cas d'abus manifestes du NAS, mais ces sanctions ne sont pas appliquées dans toute leur étendue. Donc il y a une marge de manoeuvre si on veut être plus sévère à cet égard. Il y a des options, et le DRHC doit aussi s'engager à appliquer ces dispositions avec plus de rigueur.

Comme M. Rattray nous l'a expliqué, à l'heure actuelle le système d'incitatifs favorise la tenue d'enquêtes dans d'autres domaines, et c'est pourquoi le nombre d'enquêtes dans ce domaine a chuté.

• 1705

En ce qui concerne les autres pays, comme nous l'avons expliqué plus tôt, nous avons examiné leurs efforts visant à améliorer leur équivalent du NAS. Nous avons décrit ces efforts de façon détaillée. Mais nous n'avons pas vraiment étudié les mesures d'application dans ces autres pays, ce qui serait un exercice différent. Je ne peux pas vraiment aller plus loin en abordant cette partie de votre question.

La présidente: Monsieur Rattray, voulez-vous faire une observation rapidement?

M. David Rattray: Madame la présidente, j'aimerais faire quelques commentaires rapidement.

À mon avis, la différence entre l'utilisation frauduleuse du NAS et d'autres abus, notamment l'utilisation frauduleuse des cartes de crédit, c'est que le NAS soulève la question de la vie privée. Cette question est d'autant plus importante que l'utilisation du NAS est de plus en plus répandue. Donc la question de la vie privée préoccupe les Canadiens autant que le problème de l'utilisation frauduleuse.

Après avoir déposé notre rapport au Parlement, nous l'avons mis sur notre site Web. Si ma mémoire est bonne, ce site accueille plus de visiteurs que les sites qui offrent d'autres rapports. En partie, je crois que c'est parce que d'autres bureaux nationaux de vérification ont exprimé leur intérêt envers ce rapport. Cela ne me surprendrait point si d'autres bureaux nationaux de vérification lançaient bientôt des vérifications semblables à la nôtre.

La présidente: Monsieur Johnston.

M. Dale Johnston: Merci, madame la présidente.

J'ai été tout à fait étonné d'apprendre qu'il y a tant de personnes âgées de plus de 100 ans qui détiennent des cartes, parce que votre exécuteur testamentaire devrait produire une déclaration finale de revenu indiquant votre NAS.

Dans le même ordre d'idées, il doit exister beaucoup de problèmes au niveau des communications interministérielles. Il me semble que Revenu Canada ne doit pas communiquer régulièrement avec DRHC. On ne peut pas enterrer une personne décédée dans notre pays sans avoir un certificat de décès. À ma connaissance, les seules personnes qui ne font pas appel à un salon funéraire ou à un embaumeur seraient peut-être les huttériens, qui enterrent leurs morts dans leur colonie.

Il paraît donc que tout est documenté. Donc, d'après vous, pourquoi est-ce que la main gauche ne semble pas savoir ce que fait la main droite?

M. David Rattray: J'essaierai de répondre à vos questions. Premièrement, pour ce qui est de Revenu Canada, il y a 20 comparaisons de données enregistrées avec le ministère du Développement des ressources humaines et les autres ministères, les agences et les provinces. Parmi ces comparaisons, 13 sont pour le Conseil du Trésor et le commissaire à la vie privée, et touchent Revenu Canada. Je n'ai pas la liste complète avec moi, mais la plupart des échanges de données se font avec Revenu Canada.

Deuxièmement, les dossiers sur les décès et les naissances sont tenus au niveau provincial. C'est majoritairement au niveau provincial qu'on inscrit la mort de quelqu'un, par exemple.

À l'heure actuelle, comme nous le mentionnons dans notre rapport, il y a un projet pilote qui prévoit que quand quelqu'un demande une carte, il y a un échange de données entre le ministère du Développement des ressources humaines et la province du Nouveau-Brunswick. Cela vise à assurer que la personne faisant la demande n'est pas déjà inscrite dans la base de données du registre.

Avant 1976, on ne demandait pas de preuve d'identité à ceux qui devaient s'inscrire à l'assurance-emploi et au Régime de pensions du Canada et du Québec. Donc, comme nous l'expliquons dans ce chapitre, il y a plusieurs millions de numéros d'assurance sociale encore dans le système pour lesquels on n'a jamais eu de preuve d'identité. Les gens à qui ces numéros appartenaient ne sont peut-être plus là, et ces numéros auraient dû être enlevés du système.

La présidente: Madame Chamberlain.

Mme Brenda Chamberlain: Ma question fait peut-être partie en quelque sorte de celle de Bonnie. Par exemple, si ma mère était décédée, et si je trouvais sa carte, je couperais la carte en petits morceaux. Et je suis sûre que 9 personnes sur 10 feraient la même chose.

Que devons-nous donc faire avec les cartes? Les retourner au ministère? C'est cela qu'il faudrait faire?

• 1710

M. Denis Desautels: Nous proposons que quelqu'un—une autre agence, le gouvernement ou les autorités provinciales—communique avec le registraire pour indiquer que la personne est décédée, et pour demander que ce numéro soit enlevé du système. On ne pourrait donc plus utiliser le numéro de la personne décédée. Le numéro serait tout simplement annulé.

Mme Brenda Chamberlain: Bon, mais comment pourrait-on accomplir cela? Est-ce que les gens en sont informés? Personne ne m'a jamais dit cela, si je ne m'abuse.

M. David Rattray: Il faut aussi respecter les questions de la vie privée, qui sont très importantes en ce domaine. Nous aimerions voir plus d'échanges avec les bureaux provinciaux de l'état civil—un peu comme le Nouveau-Brunswick le fait maintenant. Tout décès inscrit dans ces bureaux serait donc signalé. Si on pouvait respecter la vie privée et mettre en oeuvre la technologie qu'il faut pour s'assurer que les échanges de données respectent la vie privée des gens, on pourrait signaler les décès de cette façon-là et annuler le numéro d'assurance sociale de la personne décédée.

Vous pourriez donc garder votre carte. Si quelqu'un retrouvait les noms de personnes décédées dans les notices nécrologiques et essayait de faire une demande de numéro d'assurance sociale sous ces noms-là, ce serait impossible; on aurait en effet la preuve que le numéro d'assurance sociale de ces personnes-là a été annulé parce qu'on aurait accès aux données du registre des décès du bureau provincial de l'état civil. Cela réglerait probablement le problème. Donc déchirez votre carte, ou brûlez-la, mais en tout cas détruisez-la. Vous ne pouvez l'employer très facilement maintenant.

Mme Brenda Chamberlain: C'est donc ce que vous voulez faire.

M. David Rattray: Le ministère travaille à un système de ce genre. Nous vous avons donné l'exemple d'une province qui participe à des échanges de données. Mais il a fallu beaucoup d'efforts pour établir une entente avec le gouvernement fédéral et provincial, tout en prenant en compte les questions de la vie privée et les aspects technologiques, etc. Maintenant, nous verrons comment ça marche. On va surveiller le processus, et faire un rapport.

Mme Brenda Chamberlain: Dans mon cas, si j'étais une personne ordinaire, si je n'étais pas impliquée dans ce que je fais maintenant, je couperais tout simplement la carte en morceaux. Je trouverais probablement qu'elle est moins importante qu'une carte de crédit, comme l'a dit Hec. Instinctivement, je saurais qu'une carte de crédit est très importante. Quelqu'un pourrait la prendre et faire quelque chose avec.

Mais j'estime que la plupart des Canadiens ne savent pas trop quoi faire avec un NAS. Ils pensent qu'on l'utilise pour le travail seulement. Évidemment, il y a des gens qui savent que le NAS sert à autre chose aussi, mais la plupart des gens, qui sont honnêtes et qui ne pensent pas trop à la question, ne le savent probablement pas. En tout cas, c'est mon opinion.

La présidente: Bon, on va donc conclure...

Mme Brenda Chamberlain: Très brièvement, si vous le permettez, madame la présidente. Ma question est aussi pour vous, tout comme pour nos témoins.

Que ferons-nous maintenant? Quelle est la prochaine étape? Nous avons entendu les informations. Allons-nous étudier la question pour préparer des recommandations?

La présidente: Le comité directeur va se réunir dans 15 jours. Après cela, avec l'approbation du comité directeur et du comité plénier, nous avons l'intention d'entendre les fonctionnaires du ministère. Nous espérons compléter le processus par une étude productive, sans que ça traîne trop longtemps.

Mme Brenda Chamberlain: Aurons-nous des recommandations à faire? Avons-nous l'intention d'en formuler?

La présidente: Nous pourrions peut-être discuter de cela un peu plus tard. Il ne faudrait pas garder nos témoins ici pendant que nous discutons des projets du comité.

Mme Brenda Chamberlain: Très bien.

La présidente: J'aimerais vous remercier d'être venus ici aujourd'hui et de nous avoir sensibilisés à un problème très grave. Le comité a certainement la responsabilité de proposer des changements de façon à ce que le public et l'intégrité des services sociaux canadiens soient protégés. Merci beaucoup d'être venus aujourd'hui. Cela a été très utile.

La séance est levée.