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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 26 avril 2001

• 1530

[Traduction]

Le président (David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.)): Mesdames et messieurs, d'après ma montre il est 15 h 30 et je crois que nous devrions commencer.

C'est avec un réel plaisir que j'accueille aujourd'hui les représentants de la Conférence des associations de la défense, le colonel Alain Pellerin, le lieutenant-général Belzile et le colonel Henry. Messieurs, soyez les bienvenus.

Avant de commencer, j'ai vu—et d'ailleurs il est toujours là au fond de la salle—une personne qui est très familière de ces lieux, de ces salles de comité, un ancien ministre de la Défense nationale, l'honorable Jean-Jacques Blais. Jean-Jacques, soyez le bienvenu. Nous sommes heureux de vous voir.

Je ne vois pas d'autre raison d'attendre et en conséquence, général Belzile, vous avez la parole.

Le lieutenant-général Charles H. Belzile (retraité) (président, Conférence des associations de la défense): Merci beaucoup, monsieur le président.

Comme je vous en ai déjà touché un mot, monsieur le président, mesdames et messieurs, j'aimerais commencer par faire une petite digression et profiter de ma présence pour vous indiquer qu'en plus de mes responsabilités au sein de la Conférence des associations de la défense, j'assume celle de la présidence de la Fondation canadienne de la bataille de Normandie. Nous envoyons des étudiants en Europe et généralement je m'y trouve au début du mois de juin pour les cérémonies de commémoration et tout particulièrement pour celles près de la ville de Caen le 7 juin. Et si vous me le permettez, monsieur le président, si l'un ou l'une d'entre vous se trouve en Europe à ce moment-là, c'est avec plaisir que je l'invite à me le laisser savoir et nous nous occuperons de vous, nous vous ferons rencontrer nos étudiants et parcourir avec nous certains des champs de bataille.

Merci.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Peter et moi y serons très certainement.

[Français]

Lgén Charles Belzile: Tel que mentionné, je suis le lieutenant général Charles Belzile et je suis président de la Conférence des associations de défense, ou CAD. Je suis accompagné du colonel Pellerin, aussi retraité militaire, et directeur exécutif, et du colonel Sean Henry, retraité, analyste principal de défense.

La CAD est la plus importante organisation promilitaire de sensibilisation du public au Canada. Elle exerce ses activités depuis 1932. Aujourd'hui, elle est constituée de plus de 30 organisations membres, lesquelles représentent quelque 600 000 Canadiens. Notre mandat est de conseiller le gouvernement et le public en matière de politiques de défense avantageuses et de forces armées efficaces permettant de mettre en oeuvre ces politiques.

L'attention que vous accordez à la capacité opérationnelle des Forces canadiennes est à la fois importante et opportune. Nous espérons que cet intérêt sera un catalyseur aussi efficace que votre travail d'il y a deux ans en matière de qualité de vie. L'approbation subséquente, par le gouvernement, de fonds additionnels pour le ministère de la Défense nationale a été bien reçue, mais les montants accordés sont insuffisants pour arrêter le déclin des Forces canadiennes et jeter les bases d'une remise en état.

[Traduction]

À la Conférence des associations de défense, nous poursuivons nos efforts pour sensibiliser le public à la crise qui continue de sévir dans le secteur de la défense. Notre étude de stabilité et prospérité publiée en septembre 2000 est un outil important de cette campagne. Nous vous en avons fait parvenir des exemples et je vous incite à la lire en portant une attention particulière aux parties consacrées au processus budgétaire et à l'analyse du budget 2000 du MDN. Le grand message de l'étude, c'est que les fonds alloués à la défense sont des fonds bien investis puisqu'ils améliorent la paix et la sécurité et, ce faisant, favorisent le commerce international, base même de la prospérité et du bien-être du Canada.

• 1535

Il ressort de l'étude que les récentes augmentations du budget de la Défense sont d'environ 50 p. 100 inférieurs à ce qui serait nécessaire pour assurer la stabilité et le rétablissement des Forces canadiennes. Autrement dit, il subsiste un trou budgétaire d'environ 2 milliards de dollars, principalement dans le budget de fonctionnement du ministère. Cela ne comprend pas les 5 ou 6 milliards de dollars supplémentaires qui seraient nécessaires, selon le vérificateur général, pour remplacer l'équipement au cours des cinq à dix années à venir. Notre étude a suscité beaucoup d'intérêt et a été jugée crédible par le MDN, le vérificateur général et des représentants des organismes centraux et du monde universitaire.

Notre intention a toujours été de publier un supplément indiquant les différentes lacunes que permettraient de combler les 2 milliards de dollars nécessaires à court terme. Cependant, nous sommes préoccupés depuis peu par l'impression qu'on semble avoir que les Forces canadiennes sont en mesure de remplir tous leurs engagements et qu'elles sont plus aptes au combat qu'elles ne l'étaient il y a dix ans. Comme ces déclarations nous paraissent très discutables, nous avons l'intention d'élargir la portée de notre étude supplémentaire de manière à les étudier par rapport aux insuffisances chiffrées. L'étude portera donc sur la préparation opérationnelle des Forces canadiennes et sur la question de savoir si elles sont en mesure de remplir les engagements indiqués dans le Livre blanc de 1994, le document officiel du gouvernement.

Vous comprendrez donc pourquoi nous sommes heureux que vous ayez décidé vous aussi d'étudier la préparation opérationnelle des Forces canadiennes. Cette synergie tombe à point. Notre étude ne sera publiée qu'en septembre 2001 de manière, nous l'espérons, à influer sur le Comité permanent des finances et le budget fédéral de 2001. Aujourd'hui je vous entretiendrai de la façon dont nous comptons procéder, ce qui peut vous êtes utile dans vos propres entreprises. Nous espérons avoir l'occasion de témoigner à nouveau devant vous après la publication de l'étude.

Je commencerai par vous rappeler que, du point de vue de la CAD, les problèmes sérieux du MDN et des Forces canadiennes, qui couvent en fait depuis une trentaine d'années, tiennent à deux grandes causes: le sous-financement et la démilitarisation. Le sous-financement a été le plus aigu au moment des réductions effectuées dans le cadre de l'examen des programmes entre 1994 et 1996. Quant à la démilitarisation, elle remonte au début des années 70 et c'est elle qui risque d'être le plus dommageable. De toute manière, les deux facteurs ont un impact très négatif sur la préparation opérationnelle des Forces canadiennes.

Plus récemment, le vérificateur général a déclaré dans son rapport 2000 et devant votre comité que l'état de préparation opérationnelle des Forces canadiennes laissait toujours à désirer pour ce qui est à la fois de le définir et de le mesurer. Le problème est lié en partie à notre héritage militaire britannique. Les Britanniques, comme vous le savez tous, ont toujours attaché beaucoup d'importance à la responsabilité personnelle qui incombe aux commandants à tous les niveaux de définir l'état de préparation des troupes qui relèvent d'eux. Cette attitude est en soi valable, mais il y a eu réticence à soumettre les commandants et leurs unités à des tests objectifs de leur préparation. La complexité des opérations militaires modernes rend cette approche contestable. Les Américains l'ont reconnu depuis un certain temps et soumettent maintenant officiellement leurs unités militaires à des tests au Centre national d'entraînement de Fort Irwin en Californie dans le cas de l'armée et à la base aérienne Nellis au Nevada dans le cas de l'aviation. Les tests de préparation opérationnelle ne sont pas tout à fait absents au Canada, notamment dans la marine et dans l'aviation, mais il reste beaucoup à faire pour que cette vérification atteigne un niveau satisfaisant à l'échelle des Forces canadiennes.

• 1540

Au Canada, il y a un problème encore plus fondamental, à savoir que tant le gouvernement que le public comprennent mal comment et pourquoi les forces armées sont organisées comme elles le sont et comment elles fonctionnent.

Il est utile de comparer les forces armées à un orchestre symphonique dans la mesure où il s'agit dans un cas comme dans l'autre de produire à partir d'éléments divers des résultats harmonieux, ce qui est un processus complexe, même pour des musiciens. Un orchestre a besoin d'une organisation rationnelle, d'individus qualifiés, d'une partition, d'instruments et de temps pour s'exercer avant que le rideau ne se lève. Les forces armées ont besoin d'éléments semblables en plus de quelques autres qui tiennent à leur spécificité.

Dans le cadre de notre étude sur la préparation opérationnelle, nous comptons nous guider sur les facteurs ou les critères suivants: structure de base; doctrine; ressources humaines; équipement; instruction; logistique; stabilité et éthique militaire. Même si certains pourront discuter sur les points de détail, ces facteurs correspondent généralement aux définitions de la préparation opérationnelle qu'on trouve à l'OTAN, dans les pays alliés et dans les Forces canadiennes.

Nous évaluerons la préparation opérationnelle actuelle des Forces canadiennes au regard de chacun de ces facteurs. Nous mesurerons ensuite les résultats par rapport à chacune des tâches qui sont assignées aux Forces canadiennes dans le Livre blanc de 1994 parce que l'essentiel est là.

Nous établirons ensuite une cote d'efficacité opérationnelle et d'aptitude à remplir les engagements. La norme en fonction de laquelle chaque tâche sera évaluée se trouve dans le Livre blanc:

    Il faut au Canada des forces armées en mesure de combattre contre un ennemi puissant, côte à côte avec les forces modernes de nos alliés et des pays dont nous partageons les valeurs. Cela implique une force capable de se battre aux côtés des meilleurs, contre les meilleurs.

Je serais tenté d'ajouter «et de gagner».

J'aimerais conclure mon intervention en citant un passage du livre de Michael Ignatieff, Virtual War. Je crois que cette citation touche à l'essentiel de ce qui nous occupe.

    Ceux [...] qui croient à l'usage de la force comme dernier recours pour défendre ou protéger les droits de l'homme doivent comprendre beaucoup mieux la puissance militaire que nous ne le faisons généralement. Si nous voulons la fin, nous avons intérêt à vouloir les bons moyens, car les moyens choisis peuvent trahir notre fin.

J'ai hâte de pouvoir vous faire part des résultats de notre étude et je me tiens maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.

Le président: Général, nous vous remercions infiniment.

Je suis sûr que les candidats ne manqueront pas.

Monsieur Goldring, vous avez la parole.

M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, AC): Merci, monsieur le président.

Général, messieurs, je vous remercie.

Je commencerai mes questions par un commentaire à propos de ce paragraphe où vous faites allusion au fait que tant le gouvernement que le public comprennent mal pourquoi les forces armées sont organisées comme elles le sont.

Faites-vous allusion au fait que même à la Chambre des communes et au Sénat, il y a très peu de gens qui ont une expérience de la chose militaire? Est-ce que cette situation a aussi une incidence sur les lois que nous proposons?

Lgén Charles Belzile: Monsieur le président, je n'irais pas tout à fait jusque-là. Ce qui nous inquiète c'est que nous le constatons chez beaucoup, même au gouvernement. Il m'est souvent arrivé lors de conversations personnelles de constater un manque de compréhension de la structure organisationnelle.

Cela amène à des questions comme: «Vous avez 57 000 soldats dont 3 000 sont déployés à l'étranger, où est le problème?» Le problème c'est que ces 2 000 ou 3 000 soldats déployés outre-mer sur un cycle constant sont en vérité tirés d'un réservoir, d'un corps de combat, qui compte un total de 9 000.

M. Peter Goldring: La confusion n'est-elle pas poussée à son comble quand par exemple, pendant la guerre du Kosovo, le chef de l'état-major, le général Baril, prétend que le Canada pourrait déployer 20 000 soldats outre-mer si nécessaire? Était-ce crédible, selon vous? Posé ainsi, ce déploiement aurait pu être fait pendant combien longtemps? N'était-ce ni quantifier ni qualifier?

• 1545

Lgén Charles Belzile: La seule chose que je puisse dire, me trouvant dans l'incapacité de lire la pensée du général Baril quand il a fait cette déclaration, c'est qu'un déploiement de 20 000 soldats épuiserait l'armée. La présence et le maintien d'un tel effectif outre-mer pendant n'importe quelle période de temps poseraient d'énormes problèmes.

Si vous incluez ceux qui servent à bord des bateaux, tout le personnel de soutien aérien, etc., vous pouvez arriver à 20 000. Le vrai ratio au niveau individuel traduit un grand déséquilibre. Pour ceux qui sont sur le terrain, qu'il s'agisse de missions de maintien de la paix, d'interpositions ou de combats, il n'y en a probablement pas plus de 3 000 ou 4 000. Les autres sont les effectifs nécessaires à la logistique, aux services arrières jusqu'au Canada.

M. Peter Goldring: Selon vous, nous ne pouvons en tout temps ne déployer qu'un maximum de 3 000 ou 4 000 soldats sur le terrain. Pendant combien de temps? Pendant des rotations très brèves? Peut-on faire entrer dans ces rotations des réservistes?

Lgén Charles Belzile: Vous savez peut-être qu'il y a six ans j'ai participé comme commissaire à une étude sur la restructuration des réserves sous l'égide du regretté Brian Dickson, l'ancien juge en chef. À l'époque nous avions dit que non seulement il fallait de 18 p. 100 à 20 p. 100 de réservistes pour compléter les forces que nous déployons outre-mer mais que certains de ces réservistes, tout naturellement, disparaissaient dans la nature une fois rentrés et qu'il fallait toujours les retrouver deux ou trois mois à l'avance. Ce ne sont pas des militaires à plein temps. Ils n'ont pas de protection d'emploi. Ils le font parce qu'ils veulent le faire. On ne peut pas compter sur eux de manière soutenue, un point c'est tout.

On les recrute pour un an et trois mois sont consacrés à l'instruction au sein des unités avec lesquelles ils doivent être déployés. Ils sont envoyés outre-mer pour six ou sept mois. Quand ils reviennent ils retournent dans leurs communautés aux quatre coins du pays. Ils ne restent pas forcément dans l'armée.

Les 80 p. 100 restants sont des militaires ordinaires qui reviennent au Canada. De six à 12 mois plus tard, les 2 000 militaires qui font l'objet d'une rotation tous les six mois se déplacent de nouveau, en particulier les officiers de la gestion des crises et les sous-officiers. Tout cela entraîne beaucoup de fatigue et de situations cauchemardesques comme on en découvre aujourd'hui, notamment les effets du stress post-traumatique et divers autres problèmes de santé.

Je ne suis pas médecin, mais je considère que nous envoyons à l'étranger des gens qui sont en bonne santé. Quand ils reviennent, ils ne le sont plus. J'estime en quelque sorte qu'il faut leur accorder le bénéfice du doute. Ce ne sont pas eux qui créent tous ces problèmes. C'est plutôt la fatigue et le stress, qui résultent de l'insuffisance de la relève.

En réalité, l'armée canadienne se contente d'assurer une rotation pour 2000 personnes tous les six mois.

M. Peter Goldring: Général, comme vous parlez de trois à quatre mille militaires affectés pour une période relativement courte, je suppose que c'est là la capacité de roulement rapide des Forces armées canadiennes dans le contexte actuel. Qu'en était-il il y a 10 ans, à partir de 1990? Quelle était notre capacité à l'époque, sur la base d'une approximation comparable concernant le changement de matériel, les changements de théâtre et tout le reste? Nous parlons ici en chiffres bruts de trois à quatre mille soldats présents sur le front. Quelle était notre capacité en 1990?

Lgén Charles Belzile: J'ai quitté l'armée peu de temps avant 1990. Lorsque je participais encore au commandement de l'armée canadienne, le total des effectifs était de près de 75 000 personnes. Depuis lors, on est passé à 60 000. Un peu avant, lorsque j'étais toujours en uniforme, nous disposions de 80 000 personnes. Nous avions des soldats non seulement au Canada, mais comme vous le savez, jusqu'en 1993-1994, nous avions une brigade en Allemagne. C'est même cette brigade qui a été envoyée initialement en Bosnie.

Dans le cas de l'armée de terre, nous avions une brigade supplémentaire. Et je ne parle pas de l'armée de l'air ni de la marine. Nous avions une brigade de plus qu'aujourd'hui. La brigade qui a été ramenée au Canada a disparu. En fait, elle n'a pas été ramenée, elle a disparu.

• 1550

M. Peter Goldring: Notre capacité a donc été divisée par deux, n'est-ce-pas?

Lgén Charles Belzile: Nous en sommes à peu près aux deux tiers des effectifs d'autrefois.

M. Peter Goldring: Compte tenu de l'effectif total des forces armées—évidemment les approvisionnements et les services sont très importants et notre aviation a changé—, vous dites que les effectifs de l'armée de terre ont pratiquement diminué de moitié en 10 ans.

Lgén Charles Belzile: Oui, à peu près.

M. Peter Goldring: Merci.

Le président: Merci, monsieur Goldring.

Monsieur Bachand, vous avez la parole.

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Merci, monsieur le président.

Je voudrais aussi vous féliciter pour votre présentation et surtout pour le document Stabilité et prospérité. Je trouve que c'est une véritable mine d'or. Pas plus tard qu'hier, je suis allé sur votre site Internet. Mon adjointe est ici; je lui avais dit que les gens de cette association semblaient assez compétents en la matière et qu'il serait peut-être intéressant de les rencontrer. Je n'avais pas remarqué que votre association témoignait aujourd'hui et j'avais même demandé à certains de mes collègues si cette association d'anciens militaires était sérieuse. Ils m'ont répondu que c'était très, très sérieux. Effectivement, on voit aujourd'hui que vous faites preuve de beaucoup de sérieux.

J'ai deux petites questions à vous poser, dont l'une me semble un peu bénigne. Comme vous le savez, dans mon comté de Saint-Jean, on a été victimes du grand verglas. On parlait du triangle noir de Saint-Jean, Granby et Saint-Hyacinthe. On avait eu besoin des Forces armées canadiennes. De votre côté, vous employez des mots un peu durs à l'égard du budget de la Défense nationale. Vous dites qu'il y a un détournement interne de fonds. Eh bien, je trouve que, si l'armée canadienne veut hausser sa cote auprès du public, quand il y a un désastre naturel, elle doit d'abord aller au secours de ses propres concitoyens.

Actuellement, on court partout sur la planète pour aider les gens, en Érythrée, au Timor-Oriental, etc. Il me semble qu'on aurait parfois du mal à justifier cela. On va aider au Timor-Oriental alors qu'il y a un désastre naturel chez nous et que l'armée n'intervient pas. Vous dites que les versements aux provinces pour des catastrophes naturelles constituent un détournement interne de fonds. Pouvez-vous essayer d'atténuer la portée de ces propos?

Lgén Charles Belzile: Je voudrais d'abord essayer d'expliquer ce que veulent dire ces choses. Le budget est de presque 12 milliards de dollars à l'heure actuelle. De cette somme, quelque 3 milliards de dollars n'ont aucun effet sur la capacité opérationnelles de l'armée. Ils servent à payer des comptes de cartes de crédit, des ajustements de pension, des dépenses encourues dans le cas du Kosovo, par exemple. On sait que 450 ou 500 millions de dollars ont été dépensés là. En anglais, on appelle cela du flow-through cash. Donc, l'efficacité opérationnelle des Forces canadiennes peut compter sur seulement 9 de ces 12 milliards de dollars. C'est le premier problème.

Quand on parle de détournements internes, il s'agit de détournements internes au gouvernement, en ce sens que même si la Défense nationale reçoit cet argent, elle ne peut pas l'utiliser, à toutes fins pratiques. On ne s'oppose pas à ce que l'armée aille servir dans la province de Québec ou n'importe où ailleurs où il y a des désastres naturels. Au contraire, c'est valorisant pour les troupes et elles apprécient ce genre de travail.

M. Claude Bachand: Voici maintenant une question sur un nouveau concept qui semble se développer et qui s'appelle: «tôt à entrer, tôt à sortir». Ça ne fait pas longtemps que je suis au Comité de la défense nationale, mais j'ai été syndicaliste et j'ai toujours constaté que les institutions avaient tendance à développer des concepts en fonction du budget, en fonction de la quantité d'argent à leur disposition. Ce qui me frappe depuis que je suis arrivé ici, c'est que, plutôt que de partir d'une philosophie voulant qu'il y ait tel nombre de militaires et que ce nombre de militaires exige un budget de tant, on fait le contraire. Est-ce que je me trompe? Le gouvernement impose des coupures budgétaires, ce qui exige une diminution du nombre de militaires, et on est soudainement obligé de se trouver un nouveau concept. Quel nouveau concept va convenir au cadre budgétaire nouvellement imposé? On trouve cette espèce de concept pour ne pas s'éterniser trop longtemps parce que ça coûte cher. Il faut arriver vite, mais il faut repartir vite. Est-ce que je me trompe quand je dis que le cheminement conceptuel de la chose est totalement conditionné par le budget actuellement?

• 1555

Lgén Charles Belzile: Vous avez parfaitement raison. Monsieur le président, si vous me le permettez, je vais faire quelques commentaires sur le concept du «tôt à entrer, tôt à sortir», dont les limites me semblent complètement artificielles. On est rendu au stade où 2 000 personnes font une rotation à tous les six mois.

Comme vous le dites, le même gouvernement nous donne de l'argent et nous donne des tâches qu'on n'a pas pu prévoir. Ces tâches apparaissent soudainement, mais il y a un plafond artificiel. On dit qu'on peut avoir 432 troupes qui vont aller quelque part. Cela a probablement été décidé au sein du ministère, mais c'est parce que c'est tout ce qu'on a le moyen d'envoyer à ce moment-là. Ce n'est pas un concept, à mon point de vue. En fait, personnellement, je trouve que ce n'est pas à nous de décider combien de temps on va être là. C'est beau de dire qu'on va entrer vite et sortir vite, mais on va sortir vite si le problème nous laisse sortir. En temps d'opérations de guerre, nos tactiques sont souvent dictées par l'ennemi. Il faut réagir à ce qui se passe ailleurs.

On ne peut pas dire qu'on peut organiser tout cela à l'avance.

M. Claude Bachand: Êtes-vous en train de dire que votre ennemi est le gouvernement parce que c'est lui qui fixe le budget?

Lgén Charles Belzile: Non, non.

M. Claude Bachand: Je comprends mal.

Lgén Charles Belzile: Le gouvernement nous donne la tâche d'y aller, mais il n'a pas nécessairement, à ce moment-là, d'argent supplémentaire ou de troupes suffisantes pour tout faire. Il demande alors au ministère ce qu'il peut faire, et on se retrouve alors avec une organisation ad hoc qui, à mon avis, est dangereuse.

M. Claude Bachand: «Tôt à entrer, tôt à sortir» est une organisation ad hoc, n'est-ce pas?

Lgén Charles Belzile: Elle est souvent ad hoc. Autrement dit, elle n'est pas basée sur une unité homogène où les gens se connaissent bien, ont travaillé ensemble, se sont entraînés ensemble. Si tout va bien, il n'y a pas de problème, mais si les choses tournent mal, il y a des possibilités de problèmes plus graves que si on avait une entité plus homogène telle qu'un groupe de bataille, au niveau du bataillon.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Bachand.

Monsieur O'Reilly, allez-y.

M. John O'Reilly: Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci beaucoup, général. Je suis heureux de vous voir de nouveau parmi nous, et j'essaierai d'honorer votre invitation concernant cette rencontre en France. En fait, je dois y représenter le ministre le 6 juin dans la région...

Lgén Charles Belzile: Je serai heureux de vous y rencontrer.

M. John O'Reilly: Nous essaierons de nous souvenir de l'endroit et de ce qui s'y est passé. C'est une partie importante de notre histoire.

Il y quelques éléments que je ne parviens pas à saisir dans votre document. Vous insistez sur le fait qu'il faut deux milliards de dollars de financement supplémentaire. Je ne sais pas comment ce montant doit être réparti. Comment avez-vous obtenu ce chiffre de deux milliards de dollars? Sur quels éléments pouvez-vous vous fonder pour justifier ces deux milliards de dollars?

Lgén Charles Belzile: Je veux demander au colonel Henry de répondre à cette question; c'est lui qui a fait la recherche pour l'essentiel de ce document.

Le président: Colonel Henry, je vous en prie.

Colonel Sean Henry (retraité) (analyste principal en matière de défense, Conférence des associations de la défense): Merci beaucoup, monsieur le président.

Si vous voulez vous reporter au document principal, je peux vous signaler, à titre de réponse préliminaire, qu'on trouve au bas de la page 12 une liste représentant environ 2 milliards de dollars de crédits dits transitoires. Le budget de la Défense nationale, qui est d'environ 11,199 milliards de dollars, s'en trouve immédiatement réduit à 9 milliards pour ce qui est des crédits utiles à consacrer à l'efficacité militaire.

Si nous avions le temps, je pourrais vous montrer qu'on peut considérer qu'un montant supplémentaire d'un milliard de dollars n'est pas véritablement disponible. Il est consacré à des mesures institutionnelles imposées par le Conseil du Trésor, etc.

• 1600

Voilà pour les données approximatives. Mais je crois que l'essentiel de votre question concerne précisément la façon dont l'argent doit être dépensé. Nous allons apporter la réponse dans l'étude en cours actuellement, mais je peux dire de façon générale que le problème au MDN, c'est qu'on gère quotidiennement une situation déficitaire. C'est comme une facture de carte de crédit. J'assistais aujourd'hui même à une réunion de l'armée, et l'armée gère un déficit d'environ 18 p. 100 pour ce qui est de son budget par rapport à ses besoins, pour que l'organisme reste en vie et continue à fonctionner. Les 2 milliards de dollars supplémentaires seraient initialement consacrés aux dépenses des opérations et de la maintenance, aux dépenses opérationnelles, de façon à enrayer le déclin de l'armée, de la marine et de l'aviation, pour stabiliser la situation et amorcer un rétablissement.

La page 13 donne des chiffres intéressants. On trouve un chiffre de 894 millions de dollars dans la colonne de droite intitulée «Accroissement», mais regardez la composition de ce montant. Le crédit un, dépenses de fonctionnement, accapare 728,8 millions de dollars sur ce montant de 894,5 millions. Ainsi, l'essentiel des crédits supplémentaires du budget de l'an 2000 ont été absorbés comme l'eau par une éponge pour acquitter la facture de la carte de crédit. Le reste a été consacré à différentes choses comme la qualité de vie, etc.

Tout d'abord, il faut régler le problème de la facture de la carte de crédit et maîtriser le poste des dépenses des opérations et de la maintenance. Actuellement, pour acquitter ces dépenses à partir d'un budget insuffisant, il faut prendre de l'argent destiné aux investissements. Il en résulte un ralentissement du programme de remplacement du matériel, et nous allons nous retrouver avec du matériel périmé, mais aussi, comme l'a dit le colonel MacDonald, nous risquons d'assister à un effondrement complet du secteur équipement d'ici 10 à 15 ans.

Il faut absolument stabiliser la situation de façon qu'on n'ait plus à emprunter de l'argent du compte des investissements. Actuellement, par exemple, l'armée doit rembourser à son compte des investissements des montants qu'elle y avait prélevés, si bien que son compte des opérations et de la maintenance, c'est-à-dire sa facture de carte de crédit, augmente d'autant plus vite.

M. John O'Reilly: Merci beaucoup de cette réponse. Dès qu'on commence à citer des chiffres et à parler de milliards de dollars, on a tendance à en tirer un argument pour justifier ou pour contester tel ou tel rapport. C'est pour cela que je vous ai posé cette question.

Je ne veux pas préjuger du nouveau rapport qui s'en vient. Vous n'avez pas à me donner cette information immédiatement. Il faudra peut-être que j'attende la parution de cette nouvelle étude pour obtenir la réponse à mon autre question.

Si l'on tient compte du remplacement de l'équipement, est-ce qu'on parle de l'équipement nécessaire ou simplement du remplacement de l'équipement actuel?

Vous savez que plusieurs études indiquent qu'il nous faudrait des blindés légers, d'autres navires, d'autres... Il y a cette révolution dans les affaires militaires, qui comporte une amélioration du matériel informatique, on a un nombre limité de CF-18 alors que... Vous trouvez que dans ce domaine, les compressions ont été excessives, mais je crois savoir que nous en avons quand même plus que ne le prévoyait le Livre blanc. J'ai parfois du mal à m'y retrouver dans ces chiffres tels qu'ils apparaissent dans différents rapports, et vous pourriez peut-être me dire ce que vous en pensez.

Lgén Charles Belzile: Si vous permettez, monsieur le président, je voudrais revenir sur votre première question concernant l'emploi de ces deux milliards de dollars, pour compléter la réponse de mon collègue.

Lorsque le vérificateur général était ici—je m'en souviens, car je me trouvais assis sur le côté—, il a utilisé des chiffres beaucoup plus élevés que les nôtres. À ma grande surprise, nous étions très raisonnables par rapport à lui. Il a parlé d'un manque de trois milliards de dollars au lieu de deux, soit environ 750 millions de dollars par an.

C'est donc un élément à prendre en compte, mais les crédits que nous obtenons et les montants supplémentaires que nous voudrions obtenir, visent en fait à stopper l'érosion. L'équipement, les remplacements et les opérations de ce genre illustrent bien le scénario que vous avez évoqué.

• 1605

J'ai ici un document dont je suis le seul à disposer, et où l'on trouve certains éléments auxquels le colonel Henry vient de faire référence. Il est intitulé «The Mass Extinction Scenario of 2010-2015». Actuellement, l'équipement des Forces armées canadiennes est soit périmé, comme les hélicoptères de la marine, ou a été remis en état, mais uniquement jusqu'à l'an 2000. Dans ce cas, les opérations de remise en état doivent être renouvelées à plusieurs reprises.

Chaque élément important de l'équipement des forces armées devra être remplacé d'ici 2010 ou 2015. Est-ce qu'on le remplacera par la même chose? Évidemment, il faudra tenir compte de l'évolution de la technologie, de la RAM et de tout ce dont on a parlé pour chiffrer les besoins en fonction des effectifs disponibles et des missions à effectuer.

À ce propos, je signale que lorsqu'on achète de l'équipement, on achète aussi des pièces de rechange pour 20 ans, des ensembles complets de remise en état, etc. Quand on parle du coût de l'équipement, on parle en réalité d'un coût sur toute la durée d'utilisation. Le prix d'un camion est sans doute le même que sur le marché civil, mais dans l'armée, il faut sans doute le payer trois fois, parce qu'on a des pièces de rechange pour 20 ans, on a trois ensembles de remise à neuf, des transmissions, un certain nombre de moteurs, etc. Le matériel militaire semble coûter cher, mais il en va sans doute de même pour le matériel des grandes sociétés de transport qui doivent remplacer leurs parcs de matériel roulant.

Le président: Général, je dois vous interrompre ici, car le temps alloué à M. O'Reilly est écoulé.

Monsieur Stoffer, avez-vous des questions?

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci, messieurs, de comparaître devant le comité aujourd'hui. Je dois reconnaître que d'après ce que j'ai lu de ce document jusqu'à maintenant—et j'ignore totalement vos préférences politiques—, on dirait qu'il a été rédigé par un néo-démocrate, et je tenais à vous en remercier.

Des voix: Oh, oh!

Col Sean Henry: C'est un simple soldat qui l'a rédigé. C'est un document apolitique.

M. Peter Stoffer: Je voudrais citer la page 6, à l'intention de mes collègues de tous les partis:

    Aussi longtemps que l'on ne se sera pas attaqué de façon satisfaisante aux disparités entre riches et pauvres, il y aura sans doute des turbulences dans les affaires tant internationales que nationales.

Je tiens à vous féliciter pour cette affirmation.

À la page 11, vous dites encore quelque chose qui me semble très vraie. Personnellement, je crois que c'est véritablement le point crucial de votre rapport:

    Le plus important de tout, peut-être, c'est que l'intérêt national est axé sur le bien-être public produit par des programmes sociaux évolués. Il n'est pas logique de faire de la défense d'un côté et des programmes sociaux de l'autre une somme à jeu nul. En fait, une défense saine et une aide sociale efficace vont main dans la main au service de l'intérêt national.

Je tenais particulièrement à vous en remercier.

J'en viens maintenant à ma question, monsieur le président.

Dans le Chronicle-Herald de Nouvelle-Écosse, Scott Taylor a présenté pendant une semaine une analyse très critique de l'armée canadienne. Il dit qu'il y a beaucoup trop de généraux et de gradés de haut rang par rapport au nombre des réservistes. À votre avis, a-t-il raison ou tort?

Lgén Charles Belzile: Me permettrez-vous de dire tout d'abord qu'il y a un peu des deux?

M. Peter Stoffer: D'accord.

Lgén Charles Belzile: L'état-major constitue actuellement une structure très lourde. Cela ne fait aucun doute. Mais à y regarder de plus près, la lourdeur ne vient pas forcément du personnel en uniforme. Parmi les cadres supérieurs des forces armées et de la Défense nationale, il y a beaucoup plus de... Si nos propos sont publics, je devrais peut-être utiliser un meilleur terme.

Le président: Prenez bien la mesure de vos propos.

Lgén Charles Belzile: Il y a beaucoup plus de civils qui ont rang d'officiers que de militaires en uniforme.

N'oublions pas non plus qu'au cours des années 70—ou même dès la fin des années 60, lorsque les armes ont été réunies—, on a multiplié le nombre des généraux par deux d'un simple trait de plume, en nommant brigadiers-généraux ceux qu'on appelait précédemment brigadiers. On pourrait en diminuer le nombre d'un même trait de plume en supprimant les brigadiers de la liste des généraux et en les nommant colonels. Mais maintenant que cette mesure a été prise, elle fait partie de la Loi sur la Défense nationale.

• 1610

Il est vrai qu'en temps de guerre, comme pendant la Seconde Guerre mondiale, les généraux étaient moins nombreux par rapport aux effectifs envoyés outre-mer. L'état-major ne change pratiquement quand les effectifs diminuent. Il reste très important, mais il se compose en grande partie de civils.

Mais même si l'armée était beaucoup moins importante, l'état-major ne diminuerait pas sensiblement à cause de tous ces éléments qui ne concernent pas nécessairement la défense et qui relèvent du domaine administratif ou de la réglementation du Conseil du Trésor. Il faut doter tous ces postes et il en résulte naturellement un grand nombre de cadres, qui n'interviennent pas nécessairement dans les activités opérationnelles de l'armée.

M. Peter Stoffer: Merci beaucoup.

À la page 24 vous dites:

    Les Forces canadiennes sont une pièce maîtresse de la structure nationale. Elles aident à définir le Canada en tant que pays souverain et offrent un éventail de services vitaux à la population.

Ma question concerne la diversification des modes de prestation de services, décidée par le gouvernement fédéral il y a quelques années. Vous avez dû avoir de nombreux contacts avec les services civils rattachés aux différentes bases militaires de l'ensemble du pays. Personnellement, je pense que ces services civils constituent un élément essentiel de la fonction militaire. Ceux qui y travaillent sont très inquiets de leur avenir si l'on privatise dans l'espoir de permettre de réaliser des économies. Est-ce que vous avez étudié la diversification des modes de prestation des services ou est-ce que vous avez l'intention de l'étudier et de voir quels en seront les effets, non seulement sur le plan économique, mais aussi pour le moral des personnes concernées?

Lgén Charles Belzile: Monsieur le président, nous ne nous y sommes pas intéressés en détail. Cependant, comme j'ai consacré plusieurs années aux industries de défense après avoir quitté l'uniforme, je sais qu'on y trouve de nombreuses entreprises axées sur la défense et de nombreuses entreprises de soutien.

Il faut faire à ce propos une mise en garde, à laquelle vous avez fait vous-même référence. Il est certain que l'ouvrier qui doit se déplacer manifeste une certaine nervosité. Quand on va en Bosnie, on s'en rend bien compte. On se retrouve avec un groupe de civils qui travaillent à proximité du front. Le commandant se sent moralement tenu de les protéger. Ils ne sont pas armés et ne peuvent pas se prendre en charge. Je ne leur en fais pas le reproche. Les soldats ont une responsabilité illimitée, ils sont là pour se battre au besoin, mais ce n'est pas le cas des civils. Et on n'en tient pas nécessairement compte. Je pense qu'il faut regarder la situation de près, car elle préoccupe considérablement les gens de métier. Ils considèrent que leur sort au sein des forces s'est détérioré à cause de la diversification des modes de prestation des services.

Du point de vue des retombées, du point de vue social et de l'emploi pour les Canadiens, l'armée joue efficacement son rôle. En revanche, ceux qui travaillaient dans l'armée de terre, dans l'armée de l'air et dans la marine à des activités qui ont été prises en charge par la diversification des modes de prestation de services sont désormais sans emploi. Mais bien souvent, ce sont les mêmes qui sont recrutés par une société privée et qui continuent le même travail. Pour ceux qui étaient proches de la retraite, c'était une situation idéale, mais ils ne font plus partie de l'armée. Ils ne sont plus tenus par les mêmes règles de discipline. Ils ne sont plus tenus de se battre en cas de besoin.

Le président: Excusez-moi, monsieur Stoffer, mais votre temps est écoulé.

La parole est à Mme Wayne.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Général Belzile, je lisais l'autre jour un article où l'on signalait que l'âge de la retraite était passé de 55 à 60 ans. D'après vous, quelles en seront les conséquences pour les hommes et les femmes de l'armée?

Lgén Charles Belzile: Monsieur le président, je dois dire que je ne le savais pas.

Cette mesure va accentuer la stagnation. Je veux parler de... Voici un autre message de la CAD. Je vous le livre à titre personnel. J'ai pris ma retraite à 53 ans. La vie militaire est une affaire de jeunes gens et de jeunes femmes. Il ne faut pas y rester jusqu'à l'âge de la deuxième retraite, même si on est expert dans son domaine et qu'on a acquis de l'expérience.

Quand les militaires reviennent au Canada, les systèmes de soutien ne posent aucun problème. Mais n'oublions pas que nous parlons ici de généraux et de colonels qui vont devoir commander des troupes au combat si un problème apparaît. Sauf tout le respect qui leur est dû, certains d'entre eux pourront encore le faire à 60 ans, mais je pense personnellement que les forces armées doivent faire appel assez rapidement à un personnel plus jeune et néanmoins expérimenté.

• 1615

Le président: Colonel Henry.

Col Sean Henry: Je suis bien d'accord.

À ma connaissance—et les attachés de recherche pourront le confirmer—, l'âge de la retraite s'applique à certains officiers spécialisés, comme les médecins et les juges. C'est ce qu'on voit habituellement dans les armées d'autres pays. Mais en revanche, je crois que les Forces armées canadiennes envisagent des engagements à court terme pour des jeunes qui partiront avant d'avoir atteint cet âge. Je crois que l'âge de la retraite dont vous parlez concerne les officiers spécialisés.

Mme Elsie Wayne: Comme vous le savez sans doute, je m'intéresse de très près au remplacement des Sea Kings. Je me préoccupe de la façon dont le gouvernement envisage ce remplacement et des contrats qu'il a signés, en vertu desquels nous perdons les Sikorsky et les Cormorants pour rester avec l'Eurocopter.

Je suis convaincue que la politique n'a pas sa place dans le domaine militaire. J'en suis tout à fait convaincue en ma qualité de membre honoraire de l'artillerie. Je suis la seule femme qu'on ait nommé membre honoraire du Troisième régiment d'artillerie de campagne, et immédiatement après, on a imposé le contrôle des armes à feu. On disait que je ne pouvais pas me servir d'un canon.

Des voix: Ah, ah!

Mme Elsie Wayne: Mais tout cela me préoccupe très sérieusement. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. C'est pour moi un véritable souci. Je suis convaincue que le ministre de la Défense nationale s'en préoccupe également. Je crois qu'il aimerait revenir en arrière pour permettre à tout le monde de soumissionner, de façon qu'on puisse donner à nos militaires les meilleurs outils pour remplir les missions qui leur sont confiées.

Lgén Charles Belzile: Monsieur le président, je ne peux qu'être d'accord. Les militaires font partie de la famille. Ce sont nos conjoints, nos fils, nos filles, nos frères et nos soeurs. Nous leur demandons de partir n'importe où, d'assumer une responsabilité illimitée, il faut donc leur donner les meilleurs outils possible.

Mais malgré qu'on en ait, il n'appartient pas à l'armée de décider des impératifs politiques qui entrent parfois en jeu, comme le développement régional ou la possibilité de faire construire tel ou tel appareil au Canada pour stimuler l'emploi. Cela ne relève pas de la compétence de l'armée. Je ne connais pas un seul militaire qui souhaiterait que l'on se contente d'un deuxième choix à cause d'une politique d'achats dictés. Comme tout le monde, nous devons nous accommoder des procédures d'acquisition conçues par le gouvernement de notre pays. Quels que soient ses motifs et même si ses décisions éliminent certaines personnes ou multiplient le nombre des requérants, cela ne relève pas de notre compétence. Vous me demandez ici un énoncé politique.

J'ai bien connu le problème lorsque j'ai dû participer au remplacement d'une catégorie d'armes légères. Une société allemande est intervenue en faisant appel à un important cabinet d'avocats de Montréal et il a fallu rouvrir toute la procédure pour une arme qui n'était même pas prête. Cela n'a rien à voir avec la qualité des achats.

Mme Elsie Wayne: Je ne vous demande pas d'énoncé politique. Je m'inquiète de la formulation des contrats lorsqu'il y est question du prix le plus bas, et non pas de la meilleure qualité. Voilà ce qui m'inquiète. On peut acheter à vil prix, mais ce n'est pas la meilleure façon de donner à nos militaires les outils dont ils ont besoin pour remplir leur mission. Voilà ce qui m'inquiète.

Lgén Charles Belzile: Je suis tout à fait d'accord.

Mme Elsie Wayne: Merci.

Le président: Colonel Pellerin.

Colonel Alain Pellerin (retraité) (directeur général, Conférence des associations de la défense): Je voudrais ajouter un élément à la réponse du président. Je crois que Mme Wayne soulève une question importante. Je ne parlerai pas de l'aspect technique du remplacement.

Les militaires assument une responsabilité illimitée et mettent leur vie en jeu si l'État le leur demande. Ils l'acceptent. Cela fait partie de leur environnement professionnel. Mais le corollaire de cette situation, c'est que le gouvernement a aussi la responsabilité illimitée de veiller à ce que les militaires qui se retrouvent en danger disposent des meilleurs outils. Il faut s'en tenir à ce principe général.

Le président: Avez-vous quelque chose à ajouter, madame Wayne?

Mme Elsie Wayne: Non, c'est parfait. Merci beaucoup.

• 1620

Le président: Monsieur Anders, vous avez cinq minutes.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, AC): Merci beaucoup, monsieur le président.

Ma première question s'adresse au général Belzile. À votre avis, quel est l'équipement qu'il faut remplacer de toute urgence dans les Forces armées canadiennes et quelles sont les capacités que nous risquons de perdre? Qu'est-ce qui vous inquiète le plus?

Lgén Charles Belzile: Monsieur le président, je crois que Mme Wayne a évoqué le besoin le plus urgent, à savoir les hélicoptères embarqués. Tous les militaires en uniforme reconnaîtront sans doute que c'est là un équipement de première importance dont la durée utile a été plus que doublée. Je pourrais faire le jeu de l'arme dans laquelle j'ai servi en déclarant autre chose, mais faisons preuve de professionnalisme et admettons que c'est effectivement les hélicoptères embarqués qu'il faut remplacer en priorité.

En ce qui concerne les capacités que nous risquons de perdre, dans l'armée de terre, ce sont probablement les blindés. Nous avons un véhicule sur roues, qui n'est pas un char. Il y a ici un spécialiste des blindés qui pourra préciser la réponse. Mais en tant qu'ancien commandant d'un contingent outre-mer, j'estime que si je risquais de me retrouver sur le terrain d'une confrontation de forte intensité, je serais très inquiet d'y aller sans char, privé de la puissance de feu direct dont ils sont dotés.

Je pense également que le parc de camions de l'armée est en mauvais état. Les camions ont terriblement besoin d'une remise en état, ou, encore mieux, d'être remplacés par un parc complètement neuf. Nos problèmes viennent de la procédure d'acquisition, car apparemment nous ne sommes pas capables de fonctionner comme les sociétés du secteur privé. Par exemple, une entreprise de camionnage dotée de 200 camions en achète 20 par an et au bout de 10 ans, son parc est renouvelé. Pour une raison ou pour une autre, l'armée n'arrive pas à procéder de cette façon, et surtout parce que ces programmes surgissent subitement comme s'il y avait le feu, et on apprend du jour au lendemain qu'on a besoin illico de 10 nouveaux bâtiments pour la marine, et il faut ces 10 nouveaux bateaux tout de suite. Le malheur c'est qu'on ne peut pas les construire sur-le-champ. Il faut un certain temps pour cela.

La plupart d'entre nous évidemment aimeraient que l'on ait des programmes d'approvisionnement constant et régulier pour le matériel important, qui serait plus adapté à la RAM ou doté de meilleures capacités technologiques. De cette façon vous avez un remplacement de l'ensemble de votre parc.

Malheureusement, le système d'approvisionnement tel qu'il est géré aujourd'hui ne permet pas ce genre de choses, et je ne sais pas si c'est à mettre en rapport avec la durée de vie d'un gouvernement, ou si c'est une affaire de bureaucratie. C'est sans doute un petit peu des deux. Les gouvernements, au moins théoriquement, changent tous les quatre ou cinq ans, et évidemment les dirigeants ont envie que les choses bougent au moment où ils sont là. Nous nous trouvons finalement bloqués dans un système d'approvisionnement impossible.

Pour l'armée de l'air, je m'inquiéterais un petit peu de l'état des Hercules, qui commencent à prendre de l'âge.

Je m'inquiéterais également de notre capacité de déployer des matériels lourds par la mer., De toute évidence, il faut remplacer les AOR, ces pétroliers ravitailleurs d'escadre, pour que ça se fasse dans des délais raisonnables. Le moment est également venu de repenser la conception des bateaux pour leur donner plus de souplesse et permettre une capacité d'embarquement et de débarquement de matériel roulant, pour pouvoir déployer des matériels lourds plus rapidement outre-mer. À bien des égards, cela nous donne une capacité de déploiement supérieure même à ce qu'on peut faire avec des gros transporteurs aériens, parce qu'il faut à ce moment-là beaucoup de voyages pour déplacer, disons, 10 chars, à raison d'un char par voyage, alors qu'un bateau pourra faire ça plus rapidement. Voilà quelques exemples.

Voilà donc, de mémoire, ce à quoi il faudrait penser le plus rapidement possible en matière de remplacement des équipements et matériels importants.

Col Sean Henry: Je vais juste ajouter une petite chose, vu d'un point de vue de l'armée elle-même, et je reviens à la question de M. O'Reilly: je peux vous assurer que la RAM, cette révolution des affaires militaires, est très présente à l'esprit du commandant en chef des armées. Je viens juste de participer à quelques discussions là-dessus.

Ce qui est intéressant, c'est que pour rentabiliser l'utilisation des matériels, l'armée utilise le Léopard amélioré comme véhicule de soutien au tir direct. Comme vous le savez sans doute, le Léopard n'est pas de la classe des grands chars modernes de combat, mais c'est un excellent véhicule de soutien au tir direct. On va donc continuer encore à s'en servir quelques années.

• 1625

On voit donc se profiler à l'horizon une solution RAM au soutien au tir direct, et je crois qu'il est judicieux que l'armée attende de voir ce que ça va donner comme résultats.

Pour revenir à votre première question, il faudra encore engager des dépenses pour ce soutien au tir direct.

M. Rob Anders: Merci, messieurs. J'espère que vos collègues de la marine apprécient votre désir de faire avancer le dossier de remplacement de l'hélicoptère embarqué, même avant certains équipements qui intéressent l'armée de terre.

Le président: Monsieur Anders, je vais être obligé de vous interrompre.

M. Rob Anders: J'ai une dernière question, et ce sera tout.

J'aimerais savoir quelles sont vos positions personnelles sur la question de la défense contre les missiles balistiques et les projets américains d'utiliser le système de combat AEGIS pour protéger l'Amérique du Nord contre des missiles balistiques venus de l'extérieur. Quelles sont vos impressions?

Le président: Monsieur Anders, je vais être obligé de vous interrompre, vous avez largement dépassé votre temps, et c'est une question qui en demanderait encore beaucoup plus pour la réponse. Si vous voulez patienter, je vous redonnerai la parole plus tard.

Monsieur Bachand, à vous.

[Français]

M. Claude Bachand: Merci, monsieur le président.

Dans votre document, vous dites que le budget fédéral pour la Défense devrait être un important outil d'intervention pour une économie fragile.

Il est un fait, et cela a d'ailleurs été déjà invoqué dans plusieurs doctrines, que l'investissement militaire au Canada apporte, dans certaines régions, des retombées économiques très intéressantes. Bien sûr, on pourrait discuter longuement des militaires eux-mêmes, de leur salaire, des budgets de fonctionnement des bases militaires, dont celle qu'il y a dans mon comté de Saint-Jean, mais j'aimerais plutôt m'attarder sur l'équipement.

On a parlé d'Eurocopter. Pensez-vous que le gouvernement canadien a une marge de manoeuvre pour exiger que l'équipement comporte un contenu canadien? Je parle d'Eurocopter parce qu'on risque d'acheter une Lada parce qu'elle coûte moins cher qu'une Mercedes. Ce sont des exemples que j'ai employés en Chambre. Mais je me souviens aussi d'un débat sur les LAV III, où j'avais demandé au gouvernement d'examiner la possibilité de faire construire le véhicule chez GM en Ontario; la tourelle aurait pu aussi être faite chez Oerlikon, dans mon comté, plutôt que chez Delco, en Californie.

Je n'ai pas beaucoup regardé les contrats d'équipements. Est-ce que ce sont d'habitude des contrats clefs en main? Le gouvernement peut-il dire qu'il a un contrat à donner, mais qu'il veut que le contenu soit entièrement canadien? Je pense que les Américains, eux, ne se gênent pas pour dire que si on veut entrer dans leur marché, il faut qu'on aille bâtir notre industrie chez eux. Est-ce qu'on est capables de faire la même chose? Est-ce qu'on a les mains déliées comme les Américains, ou s'il y a une espèce de volonté internationale, surtout américaine, de faire en sorte que cela passe par chez eux avant de revenir chez nous, avec les taxes des contribuables?

Lgén Charles Belzile: Dans les cas d'équipements majeurs pour lesquels il y a un contrat, une compagnie est habituellement choisie comme maître d'oeuvre parmi les concurrents. Il y a aussi certaines contraintes que le gouvernement canadien impose à l'organisation, par l'intermédiaire de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, quand il fait l'adjudication ou le choix, même quand il y a cinq ou six personnes qui font une offre. Certaines parties de ces équipements doivent venir d'où on veut, mais beaucoup d'équipements et de technologies ne sont pas nécessairement disponibles au Canada. À ce moment-là, l'équipement peut venir de Delco ou d'ailleurs, mais il y a habituellement un arrangement qui est fait entre GM, à London, et les acheteurs du gouvernement canadien, qui doivent approuver tous les sous-traitants. Dans un tel cas, on confie à GM la maîtrise d'oeuvre, la gestion du projet. Il y a une certaine liberté, mais il ne faut pas oublier qu'il y a certaines capacités que l'industrie canadienne ne possède pas. C'est le premier point.

Le gouvernement, dans son système d'acquisition de matériel, a toute liberté de faire ce qu'il veut. Le gouvernement a insisté pour que tout vienne du Canada dans le cas de la frégate de patrouille, dans le cas des navires de guerre, mais là aussi, il y a des équipements ou des armements pour ces navires qui ont été achetés ailleurs et qui ont probablement été installés avec une technologie qui vient de l'extérieur, que ce soit des États-Unis ou de France. Les différentes composantes d'un équipement important comme celui-là viennent probablement de 200 sous-traitants, d'une foule de sous-traitants.

• 1630

M. Claude Bachand: Vous parliez plus tôt des bateaux. Vous souhaiteriez qu'on modernise notre flotte, surtout pour transporter le matériel lourd. Le gouvernement va en appel d'offres. Si Taiwan, pour des spécifications données, fait une offre inférieure de 1 000 $ à celle d'une industrie canadienne, le gouvernement n'a-t-il pas tendance à accepter l'offre de Taiwan parce qu'elle coûte 1 000 $ de moins?

Si des contrats de cette ampleur étaient donnés directement à nos chantiers maritimes, ça créerait énormément de richesse qui resterait à l'intérieur de nos frontières. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.

Lgén Charles Belzile: Je crois que dans la majorité des cas, on essaie de garder le plus de travail possible au Canada, mais il y a certaines difficultés qu'on n'est pas capables de régler nous-mêmes. Quels sont les choix à ce moment-là? Il faut se permettre un peu de flexibilité.

Dans l'industrie, j'ai eu l'expérience de l'achat, des Français, du système antichar Eryx. Je travaillais pour le compte de SNC, qui fabrique des munitions au Canada. Nous voulions faire l'ogive qui serait lancée, la roquette qui serait lancée pour détruire le char éventuel, mais les Français n'étaient pas prêts à nous la donner. À un moment, il a fallu décider si on voulait cet équipement même si les Français voulaient le faire au complet. Cette décision a été prise par le système gouvernemental d'acquisition de matériel. On a maintenant l'équipement. Il existe au Canada, mais avec une ogive française.

M. Claude Bachand: Très bien, merci.

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Bachand.

La parole est à M. Wilfert.

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, monsieur le président.

Général, messieurs, je suis ravi de vous revoir.

Tout d'abord, j'ai été frappé par quelques statistiques. La première était une statistique de la dernière enquête annuelle du ministère de la Défense, selon laquelle 92 p. 100 des Canadiens interrogés estiment qu'il est important que le Canada conserve une armée moderne capable de combattre. C'est donc un soutien massif. Ce n'est peut-être pas surprenant, mais c'est tout de même frappant lorsque l'on écoute tout ce qui a été dit ici.

Il est question de stabilité et de prospérité, d'après ce que j'ai lu, et j'ai pu reprendre cela aujourd'hui. En même temps, je lis cette publication du ministère sur les plans et les priorités de 2001—-2002. L'idée, bien sûr, c'est d'essayer de déterminer d'une certaine manière s'il y a des contradictions, ou si au contraire tout cela peut être harmonisé, et notamment par rapport à toutes ces questions que vous agitez. Dans les conclusions, en particulier, le ministère indique que l'on doit restructurer et moderniser nos forces armées. Vous en avez très clairement fait mention.

Le volet ressources humaines et gestion ministérielle doit être renforcé, le comité en a déjà parlé. Et le ministère de la Défense doit prouver, au-delà de tout doute, qu'il gère ses ressources de façon efficace et efficiente. Vous et vos collègues, général, avez dit tout à l'heure que le nouveau matériel c'est une chose, mais qu'il faut aussi être capable d'optimiser la mise en service de ce matériel en ayant le personnel adéquat. Vous avez aussi parlé de la stratégie aller-retour, ou de l'équipe d'activation du théâtre qui a été utilisée en Érithrée.

À ce sujet, nous savons qu'il est essentiel d'avoir les derniers matériels pour être capable... L'évolution que nous attendons de notre appareil militaire aujourd'hui diffère de ce qu'on lui demandait à bien des égards au moment de la guerre froide. J'aimerais bien que vous développiez un petit peu cette question... C'est-à-dire qu'on ne pourra jamais remplacer les soldats par des moyens purement techniques. Mais comment assurer que nous serons en mesure d'optimiser l'utilisation du personnel, ce qui ne semble pas être le cas, d'après vous, et notamment en ce qui concerne cette stratégie aller-retour? Comment est-ce qu'on peut y parvenir? À quoi attribuez-vous cette évolution de la théorie—du moins dans les milieux politiques ou militaires—où l'on est passé d'une notion de présence de longue durée à une stratégie d'intervention rapide, que vous n'approuvez pas, si je vous comprends bien, car vous en arrivez à des situations où vous ne savez plus qui est à votre droite et qui est à votre gauche lorsque vous vous rendez sur place? Pouvez-vous développer?

• 1635

Lgén Charles Belzile: Je pourrai d'abord répondre à la dernière question, en laissant de côté cette dichotomie que vous avez peut-être remarquée entre les deux documents. En ce qui concerne les unités spéciales, ce à quoi on a recours pour certaines de ces interventions «rapides», on peut dire qu'elles ne sont pas les équipes soudées auxquelles les militaires devraient naturellement parvenir, où il y a un climat général de confiance mutuelle. Dans une certaine mesure, les soldats se font confiance, mais cette confiance est encore plus grande entre des personnes qui se sont retrouvées côte à côte dans la même tranchée, ou dans la même équipe de tankistes pendant cinq ou six mois. C'est une question purement humaine.

J'ai souvent discuté de ce que—c'est un petit peu comme au hockey—les gens ne sont pas forcément prêts à se battre pour Valcartier ou pour Petawawa. Ils vont se battre pour leur propre régiment. Ils vont se battre pour leurs compagnons d'arme. Ils vont se battre pour les gens qui les entourent immédiatement. C'est quelque chose d'essentiel pour nos militaires. Si vous avez une organisation que l'on a montée ponctuellement, elle n'aura pas l'homogénéité voulue. Tant que tout va bien, on s'en tire à bon compte et tout le monde est ravi. Mais si les choses tournent au vinaigre, on se retrouve plus vulnérable que des unités qui ont été bien préparées et équipées.

Mais savoir si le ministère, et nous-mêmes... Quand je regarde ces documents, je dois dire que c'est la première fois que j'ai celui-ci entre les mains. Je suis frappé immédiatement par un certain nombre de choses sur la photographie, en page couverture. Et tout d'abord je m'inquiète de constater qu'on ne voit pas une seule arme sur ces photos. Peut-être que par la suite il y en a. Mais je ne vois pas une seule arme ici. Je vois un titre «Plans et Priorités», je vois des écrans radar, des hélicoptères, et un soldat du 22e Régiment qui transporte apparemment un bébé quelque part, j'imagine, je vois une jeune femme, de toute évidence une technicienne, avec une chemise de la couleur de la marine, elle est donc quelque part sur un bateau, je vois des véhicules motorisés qui viennent du Canada, et aucune arme. Honnêtement...

Une voix: C'est politiquement correct.

Lgén Charles Belzile: Je ne sais pas si je dois utiliser ce terme de «politiquement correct» en présence de responsables politiques. Ce n'est peut-être pas un terme très populaire. Effectivement, c'est de toute évidence très politiquement correct. Qui a décidé cela? Je ne sais pas. J'aimerais ici rappeler nos soldats de la Première Guerre mondiale.

Ceci m'amène à ma conclusion, si vous le permettez, monsieur le président, en réponse à M. Wilfert.

Le président: Résumez rapidement, général.

Lgén Charles Belzile: On ne pourra jamais remplacer le soldat par le matériel. Quelle que soit votre révolution des affaires militaires, et le fait que des gens vous diront qu'on peut remplacer les soldats, je dirai qu'ils sont irremplaçables. Ce que nous leur devons par contre, c'est leur donner la capacité d'utiliser de façon optimale le matériel que nous mettons entre leurs mains, et dont nous espérons qu'il est de la meilleure qualité. Ils doivent apprendre à s'en servir correctement.

Le président: Merci, général.

Monsieur Stoffer, à vous la parole.

M. Peter Stoffer: Merci, monsieur le président.

La politique du ministère est d'assurer que nos forces régulières se stabilisent à 60 000, mais nous sommes maintenant en dessous de ce seuil. D'après vous, et je m'adresse à tous les témoins, quels devraient être les effectifs si l'on veut atteindre les objectifs que vous avez énumérés?

Col Sean Henry: Deux études ont été faites: l'une remonte à l'époque du Livre blanc de 1987, avec ensuite une étude de suivi avant la publication du Livre blanc de 1994. D'après ces deux études, néanmoins, il semble que nous nous soyons retirés d'Allemagne parce que, dans une certaine mesure, les objectifs restaient à peu près les mêmes. Les deux études montrent que lorsque vous avez des effectifs réguliers, globalement, de 78 000 soldats, c'est la limite.

Vous vous souvenez de la première réduction au début des années 90, avant l'examen des programmes, le chiffre était de 76 000? C'était juste en dessous de la limite, mais ça paraissait encore acceptable. Avec l'examen des programmes—et c'est là que tout a basculé—, on a eu des amputations de budget importantes. Pour que nos forces armées continuent à exister dans un environnement budgétaire aussi austère, il a fallu descendre à 60 000, étant donné les sacrifices financiers qu'on demandait subitement. La seule façon de faire ça rapidement a été de réduire les effectifs, et on en est en ce moment en chiffres réels à 57 000 soldats. Quelle que soit la façon de retourner le problème, le manque de ressources humaines est un élément critique de toute la problématique des forces armées.

• 1640

Le président: Colonel Pellerin, allez-y.

Col Alain Pellerin: J'aimerais faire suite à cela, et notamment à la question de M. Wilfert. Ces deux questions sont liées.

Quand vous parlez à certains, au QGDN, de cette réduction des effectifs—puisqu'on en est à moins de 60 000, et probablement plus près des 55 000—, on vous répond que ce n'est pas une question de nombres et d'effectifs, que c'est une question de capacité d'intervention, et c'est là qu'est tout le coeur de la révolution en matière d'affaires militaires. Dans le cas des Forces canadiennes, je pense que nous sommes maintenant en dessous d'un seuil critique, et je ne pense pas qu'on puisse justifier cela en parlant de RAM.

Les Coyotes en sont un bon exemple. Ce sont peut-être d'excellents véhicules, mais ils sont beaucoup plus complexes et nécessitent beaucoup plus d'entretien que les véhicules qu'ils remplacent. Il faudra plus de personnel pour entretenir ces véhicules.

C'est le problème, à l'heure actuelle, car le budget ne contient pas suffisamment d'argent pour traiter des questions relatives à la RAM, des questions qui doivent être traitées, en plus de payer les frais des ressources et du personnel. Nous justifions la réduction des effectifs par le fait que nous sommes engagés loin dans la RAM. Je crois toutefois que nous avons perdu notre masse critique et que c'est déplorable.

Col Sean Henry: Si vous me le permettez, monsieur le président, il est très important d'ajouter quelque chose à cela.

Pour revenir à la question que M. Goldring a posée au tout début, sur les faits que votre comité doit savoir, eh bien, il faut savoir surtout, entre autres, que les forces armées, surtout l'armée de terre, font l'objet de réductions d'effectifs arbitraires un peu partout. On enlève des sous-unités aux unités, etc., simplement pour continuer d'exister. C'est en soi une réponse à la question de la réduction du personnel ainsi qu'à ce que disait le colonel Pellerin sur le fait qu'il faut former davantage de gens pour des emplois nouveaux et principalement techniques. Le commandant de l'armée a dû amputer son organisation arbitrairement de diverses pièces. Il n'y a donc plus de structure cohérente. Pour revenir à l'analogie avec l'orchestre symphonique, cet orchestre n'est plus organisé pour jouer de la musique, il n'est plus organisé que pour exister.

Pour revenir à votre question, cela signifie qu'à toute fin pratique, l'armée est devenue une réserve de main-d'oeuvre, avec tout ce que cela implique. Tous les six mois, on prend 2 000 personnes et on les envoie ailleurs.

Ce n'est pas si terrible. Il y a un noyau de bataillons, mais aucun d'eux n'est suffisamment important pour faire ce travail lui-même.

C'est déjà mauvais en soi, mais cela ne fait qu'augmenter. Les gens perdent leur expérience et l'instabilité va toujours croissante. À mon avis, c'est le genre de question que vous devriez examiner en détail avec les fonctionnaires.

Le président: Dans l'intérêt de ceux qui posent les questions, je demanderais aux témoins de répondre aux questions qui viennent d'être posées plutôt qu'à celles qui ont été posées précédemment.

Monsieur Stoffer, je vais vous laisser un peu plus de temps, une minute et demie.

M. Peter Stoffer: Merci beaucoup, monsieur le président.

Cela nous ramène encore bien sûr aux problèmes que l'armée a à recruter, à essayer de convaincre de jeunes hommes et de jeunes femmes que l'armée peut leur permettre de se bâtir une excellente carrière.

Ma question porte sur la réduction du nombre d'heures de vol des Auroras sur nos trois côtes. M. Wilfert a déclaré que 92 p. 100 des Canadiens souhaitent avoir des forces armées prêtes au combat. Les Canadiens veulent également, à mon avis, que l'armée puisse au moins exercer une surveillance, qu'elle vérifie ce qui se fait dans nos océans pour lutter contre le trafic de drogues et d'humains, la pêche illégale et les problèmes environnementaux, ou qu'elle donne du moins l'impression qu'elle exerce cette surveillance.

Le MDN nous a dit que malgré la réduction du nombre d'heures, nous sommes encore en mesure de maintenir notre prétendue souveraineté économique sur nos trois côtes. Je ne suis pas d'accord avec les fonctionnaires du ministère à ce sujet et j'aimerais connaître votre opinion. L'armée peut-elle effectivement patrouiller les côtes de façon économique compte tenu des réductions qui ont été apportées à la flottille Aurora?

Lgén Charles Belzile: Malheureusement, aucun d'entre nous n'est aviateur. Nous sommes tous des soldats. C'est une bonne question à poser au commandant de l'aviation lorsque vous l'entendrez.

Ma réaction est semblable à la vôtre. Je ne comprends pas très bien comment ils peuvent faire plus avec beaucoup moins, mais ce sont des professionnels et c'est à eux qu'il revient, je suppose, de vous convaincre. Ce sont des questions légitimes qui devraient être posées.

• 1645

Si je vous disais que je suis en mesure de mener des missions de reconnaissance sur terre aussi bien qu'auparavant même s'il ne me reste plus que 20 p. 100 de mes ressources, vous exprimeriez probablement certains doutes et je serais d'accord avec vous.

M. Peter Stoffer: Je vous prie de m'excuser, messieurs, mais je dois maintenant partir. Je vous remercie d'être venus nous rencontrer.

Partez-vous également?

Mme Elsie Wayne: Je pars dans une minute, car je dois également prendre l'avion. Toutefois, j'ai une petite question à poser auparavant.

M. John O'Reilly: C'est jeudi.

Mme Elsie Wayne: C'est que nous sommes si populaires! On nous a invités à prononcer des allocutions, et vous, vous n'avez rien à faire.

M. Peter Stoffer: La Nouvelle-Écosse m'appelle, mon fils.

Mme Elsie Wayne: Vous avez parlé des navires et des besoins en navires de notre armée. Vous avez dit que ces navires devraient être construits en fonction d'un roulement, entre autres. Général Belzile, je ne sais pas si vous savez que notre comité a déposé unanimement un document à ce sujet juste avant les élections. Nous avons repris ce document et nous avons adopté de nouveau une motion. Nous sommes d'accord avec cette idée également.

Comme vous le savez, je viens de Saint John, où l'on a construit une frégate avec MIL Davie. Nous sommes convaincus qu'il faudrait réserver de l'argent de façon à avoir un programme permanent pour répondre aux besoins de notre armée et voir à ce que nos navires soient construits ici au Canada—au lieu d'importer des sous-marins anglais usagés qui ne peuvent prendre la mer et pour lesquels il faut payer 800 millions de dollars en réparation afin qu'ils puissent flotter. Nous croyons que les navires devraient définitivement être construits ici.

Lgén Charles Belzile: Je suis bien d'accord là-dessus. En fait, je suis désolé de ne pas l'avoir dit moi-même.

Il faut dire également que si l'on veut un roulement, les militaires ne seront pas les seuls à y participer. Ce n'est pas seulement une question de défense nationale...

Mme Elsie Wayne: C'est exact.

Lgén Charles Belzile: ... cela touche également le gouvernement et le conseil des ministres.

Mme Elsie Wayne: Je fais de mon mieux.

Lgén Charles Belzile: C'est une question qui touche plus d'un ministère et je crois que tous, y compris nous, seront d'accord avec cela.

Mme Elsie Wayne: Vous êtes venus nous présenter votre témoignage aujourd'hui, avec vos documents, vous nous avez parlé de stabilité et de prospérité, des avantages de l'investissement dans la défense, etc. Nous apprécions beaucoup ce que vous faites. Pour ma part, je suis convaincue que les politiques ne devraient pas influer sur la défense, mais vous dites que nous devons avoir la collaboration des différents ministères pour atteindre nos objectifs en matière de défense.

Votre groupe frappe-t-il à la porte de ces ministères et vos propos y sont-ils bien reçus également? C'est grâce à votre expérience et à vos connaissances que nous pourrons faire ce qu'il faut pour l'armée.

Lgén Charles Belzile: Oui, nous discutons avec les ministères et nous espérons comparaître non seulement devant votre comité de nouveau, mais aussi devant le comité des finances et celui des affaires étrangères.

Je ne veux pas répondre à l'avance à une question qu'on pourrait nous poser, mais si le gouvernement du Canada décidait prochainement de faire un nouvel examen de la politique, je répéterai ce que j'ai déjà dit, c'est-à-dire que le modèle adopté récemment par les Australiens pourrait facilement être appliqué ici.

Autrement dit, le ministère des Affaires étrangères examinerait sa politique en même temps que la Défense nationale ou même avant la Défense nationale. On a procédé à l'inverse en 1994. Il faut bien sûr que le ministère des Finances, le Conseil du Trésor et tous ces autres gens y participent également, comme cela s'est fait en Australie. Le Livre blanc australien qui a été publié a été bien reçu par tous les ministères, du moins pour le moment, et il a été signé par le premier ministre. De plus, on y a également consenti un financement, ou du moins on prévoit qu'il y aura un financement.

Quant à savoir si ce sera encore possible dans quatre ou cinq ans... Vous qui êtes députés au service du pays, vous savez mieux que moi comment le gouvernement fonctionne. Les choses peuvent parfois changer.

Mme Elsie Wayne: Dans vos prochaines démarches, vous pourriez peut-être leur demander si le chef des services d'examen ou le juge-avocat général devrait examiner ce qui se fait au titre des hélicoptères. Ils auront peut-être la bonne réponse.

Col Alain Pellerin: Avant que vous partiez, puis-je faire une brève observation?

• 1650

Avant de nous présenter devant votre comité et le comité des finances, nous avons également tenu de nombreuses consultations auprès de divers ministères, de fonctionnaires, etc. Ce qui ressort souvent, lorsque nous discutons avec des gens qui ne sont pas persuadés de la nécessité de la défense, c'est que lorsque nous leur présentons nos arguments comme nous l'avons fait devant vous, ils disent que nous demandons davantage d'argent pour la défense. Mais le ministère de la Défense nationale vient dire ensuite que nous sommes mieux en mesure de combattre maintenant qu'il y a 10 ans. Ils nous demandent donc pourquoi il faudrait investir davantage d'argent dans la défense si nous sommes mieux en mesure de combattre qu'il y a 10 ans. Ils disent que nous n'avons pas besoin d'argent.

Mme Elsie Wayne: Mais ce n'est pas le cas.

Col Alain Pellerin: Ce besoin doit être établi.

Mme Elsie Wayne: Nous allons nous en occuper également, n'est-ce pas, monsieur le président? Nous allons résoudre ce problème avant de terminer. Absolument.

Merci beaucoup.

Le président: Nous avons décidément bien du pain sur la planche.

Monsieur Price, allez-y.

M. David Price (Compton—Stanstead, Lib.): Merci, monsieur le président.

Merci beaucoup d'être venus nous rencontrer, messieurs. Il est très important que nous vous entendions car vos opinions—ces opinions qui se fondent sur toute votre expérience et votre capacité de prendre du recul—situent les choses dans une juste perspective. Vous n'êtes pas des lobbyistes rémunérés, et nous en entendons à l'occasion, des gens dont les objectifs ne sont pas nécessairement leurs objectifs propres ou ceux d'un groupe.

J'ai deux questions à poser. Premièrement, deux colonels nous ont dit—et je m'écarte peut-être complètement du sujet—que nos nouvelles recrues devraient peut-être passer au moins une année dans la réserve et que les militaires âgés d'environ 55 ans devraient aller passer une ou deux années dans la réserve pour former les réservistes. J'espère que je ne vous surprends pas trop, mais seulement...

Lgén Charles Belzile: Non. Et si vous me le permettez, monsieur le président, j'aimerais bien discuter de cette question.

Vous vous rappellerez qu'en 1995, je siégeais au sein d'une Commission spéciale avec le juge en chef Brian Dickson. La Commission avait déclaré catégoriquement que puisque maintenant les deux conjoints des ménages ont chacun leur carrière, il faudrait peut-être faciliter le passage de la réserve à l'armée régulière et permettre peut-être une carrière mixte, si l'on veut.

Lorsque leurs enfants sont jeunes, les parents veulent rester à la maison, ils ne veulent pas voyager. Vous ou votre conjoint pouvez entreprendre une autre carrière. Puis, quelques années plus tard, vous pouvez entrer dans les forces régulières et avoir un régime de pension proportionnel. Cela fonctionne déjà assez bien aux États-Unis, mais il semble que ce passage soit très difficile ici, pour une raison quelconque. Je dois avouer que c'était la situation lorsque j'étais en uniforme et que cela ne s'applique peut-être plus actuellement. Nous avons fonctionné de cette façon pendant longtemps.

Par exemple, nous n'avons pas été capables d'effectuer un recrutement conditionnel. Il faut des semaines ou parfois des mois pour effectuer les vérifications de sécurité des candidats. Les gens perdent patience, ils cessent d'attendre et se trouvent un autre emploi. C'est également vrai des réservistes.

Devraient-ils commencer dans la réserve ou non? Ce serait utile, mais ce serait également très difficile. Pendant l'année où ils seraient dans la réserve, à moins qu'ils suivent un entraînement relativement à plein temps, ils se retrouveront dans le même régime d'entraînement des réservistes qui existe à l'heure actuelle et ce régime n'est pas sans problèmes. Entre autres, compte tenu de la taille des unités, le cycle d'entraînement recommence à peu près chaque année en septembre avec les nouveaux réservistes et l'entraînement ne dépasse à peu près jamais le stade de l'entraînement individuel.

Nous disions en 1995—et je le dirai encore—qu'il faut ajouter une deuxième composante à cet entraînement afin que les réservistes puissent obtenir un entraînement collectif. On pourrait ainsi offrir un renforcement, par exemple, aux forces régulières en Bosnie, non seulement avec 50 personnes, mais avec un ou deux pelotons entraînés qui viendraient d'un régiment ou d'une région. Ces pelotons seraient entraînés ensemble et ils auraient cette homogénéité dont j'ai parlé. Ce serait l'idéal, mais je ne crois pas que ce soit possible maintenant.

M. David Price: Il y a deux choses à mon avis. Il y a d'une part votre idée de pelotons complets qui viendraient des réserves, mais ce dont je parle, c'est d'un entraînement préliminaire dans les réserves des recrues qui veulent s'enrôler dans les forces régulières. Ces recrues devraient d'abord passer une année dans les réserves. Il s'agit d'un entraînement préliminaire. On ne va pas bien sûr les entraîner au départ. C'est de cette façon que cela m'a été présenté.

• 1655

Lgén Charles Belzile: Si vous avez la mesure législative ou les conditions de service qui permettent un entraînement d'un an de ce genre, ce serait une très bonne idée. Cela permettrait également aux gens qui ne savent pas encore s'ils veulent faire carrière dans l'armée de prendre la décision. Je ne m'y opposerais pas. Il faudrait toutefois revoir une bonne partie des méthodes actuelles. Rien n'est impossible si on le veut vraiment.

Pour ce qui est des plus âgés, il existe dans la réserve des mesures comme la réserve supplémentaire. Cela se fait d'ailleurs déjà beaucoup. Bon nombre de sous-officiers principaux et certains officiers de rang moyen s'engagent dans des unités de réserve lorsqu'ils retournent à la vie civile et aident beaucoup ces unités grâce à leur expérience. On pourrait peut-être également les conserver comme entraîneurs un peu après l'âge de la retraite également. Cela ne devrait pas poser de problème.

M. David Price: Me reste-t-il du temps?

Le président: Malheureusement pas. Merci, monsieur Price.

Monsieur Goldring, à vous.

M. Peter Goldring: Merci, monsieur le président.

Colonel Henry, on nous a beaucoup chanté les louanges des véhicules VBL. À vrai dire, j'ai eu l'impression que c'est surtout sur ce véhicule que notre armée devrait se concentrer. Durant votre discussion, j'ai été très intéressé par vos encouragements à renouveler nos chars d'assaut en vue de leur utilisation possible en temps de guerre. Cela signifie-t-il qu'il faut passer à la génération suivante de chars d'assaut?

Également, on sait qu'on parle beaucoup dans le monde de l'utilisation d'uranium appauvri pour les munitions des chars d'assaut modernes. Si nous ne disposons pas des munitions des plus modernes dans notre arsenal, devrait-on envoyer ces chars d'assaut à l'étranger?

Col Sean Henry: Permettez-moi de répondre d'abord à votre dernière question. Les alliés de l'Ouest ont fait de nombreuses études pour trouver le moyen de remplacer l'uranium appauvri. On n'a pas encore trouvé ce moyen, mais les Forces canadiennes ont décidé il y a déjà quelque temps, même avant la controverse actuelle, de choisir un autre type de munitions. C'est ce que nous avons à l'heure actuelle pour le Léopard.

Laissons donc cette question de côté pour l'instant. Je suis content de votre première question, car j'espère ne pas avoir donné l'impression que les Forces canadiennes, l'armée, auront toujours besoin de chars d'assaut lourds. Ce que j'ai dit, c'est qu'il fallait disposer d'une capacité directe de tir suffisante pour appuyer les VBL III.

Mais qu'est-ce que ça veut dire maintenant? Les Américains ont eu l'idée de mettre un canon à faible recul de 105 millimètres sur les VBL III, ce qui devrait convenir encore quelque temps. Le problème, c'est qu'en faisant de même au Canada, il n'y aura pas d'autres améliorations avant 20 ou 30 ans. Entre-temps, comme je l'ai dit plus tôt, la nouvelle technologie sera bien supérieure au canon à faible recul de 105 millimètres. Elle sera offerte, mais nous n'aurons pas les moyens de nous l'offrir.

La solution que j'ai trouvée, soit d'utiliser le Leopard comme véhicule de tir d'appui direct intérimaire est une bonne solution, puisqu'on n'aura pas à se procurer un nouveau char de combat principal ni un véhicule de tir d'appui direct qui dispose de la technologie de pointe.

M. Peter Goldring: De combien d'années peut-on prolonger la vie d'un char Leopard? Quelle est sa durée utile?

Col Sean Henry: On peut s'en servir indéfiniment, tant qu'on peut obtenir les pièces de rechange.

M. Peter Goldring: Est-ce que le canon de 105 millimètres pourra tirer des munitions à uranium appauvri? Le retrait de l'arsenal des munitions à uranium appauvri, était-ce une décision politique ou un effort conscient, axé sur la sécurité?

Col Sean Henry: Je dirais que c'était une décision en partie politique. Quand on l'a fait, il y avait aussi le problème des coûts. Il aurait été très coûteux de se procurer des quantités durables de munitions à uranium appauvri. Il était préférable d'utiliser ce qu'on avait et d'envisager quelque chose d'un peu mieux.

Des recherches sont en cours pour remplacer l'uranium appauvri dans les munitions. Je ne sais pas où en sont ces recherches, mais elles sont en cours. Outre l'uranium appauvri, il y a des applications techniques pour lesquelles les munitions explosives ne sont plus nécessaires. Les canons à rails utilisent l'énergie électronique et les lasers, etc., et les forces armées seraient bien avisées d'attendre un peu pour investir dans ce genre de solution.

• 1700

M. Peter Goldring: Combien de temps faudra-t-il attendre?

Col Sean Henry: Je dirais certainement de 15 à 20 ans, mais si on ne peut pas trouver une solution perfectionnée d'ici là, il faudra certainement envisager autre chose.

Lgén Charles Belzile: La modernisation du char Leopard fait que ce véhicule peut être bon jusqu'en 2015, d'après notre théorie de remplacement de tout le matériel. J'ai reçu le premier lorsque j'étais en Allemagne. Il a été acheté au départ en 1978, et il va pouvoir durer jusqu'en 2015. La vie utile de ce char devait normalement durer de 1978 à 2005.

Autrement dit, vous parlez de 25 à 30 années de la vie d'un char. Il a bien sûr fait l'objet de quelques modernisations depuis: un bien meilleur système de contrôle de tir, du meilleur équipement de vision nocturne et de dispositif d'acheminement vers la cible. On modernise donc cet équipement, mais la carcasse est vraiment durable, à moins d'être bombardée. C'est de l'acier massif, blindé, qui dure longtemps. Il faut le repeindre, c'est sûr, mais tant que les entrailles, soit les composantes électroniques, les systèmes d'armes et de contrôles de tir sont mis à niveau avec les méthodes techniques, on peut envoyer le char au combat.

M. Peter Goldring: Est-ce que le canon est mis à niveau?

Lgén Charles Belzile: Le canon...

Le président: Je dois vous interrompre ici, puisque votre temps est depuis longtemps écoulé.

Col Sean Henry: C'est un canon de 105 millimètres, mais on se penche sur des munitions améliorées, outre simplement l'uranium appauvri. Il y a d'autres aspects des munitions que l'on perfectionne.

Voilà ce qu'auront les Américains. Quand de nouveaux produits seront offerts, ils pourront envoyer ceux-là à la casse ou les donner à la Garde nationale ou quoi que ce soit. Si nous nous les procurons maintenant, nous les garderons encore 20 ou 30 ans, même si de nouveaux produits nettement supérieurs seront très bientôt offerts.

Le président: Monsieur Regan, vous avez la parole.

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président.

Pour commencer, je tiens à vous dire comme je suis content que vous ayez pris la peine de dire à quel point la prospérité de notre pays dépend de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Il me semble que bien trop peu de Canadiens y songent suffisamment et envisagent l'incidence que la paix et la sécurité internationales ont sur la prospérité du Canada.

Cela étant dit, c'est le point de vue que je partage avec vous, de même que celui selon lequel la défense a un rôle important à jouer pour maintenir la paix et la sécurité. Mais je veux vérifier la validité de cette hypothèse et l'approfondir davantage en vous posant cette question.

De façon à réaliser l'objectif de la paix ainsi que de la sécurité et la stabilité internationales, dont vous avez parlé comme indispensable au maintien de la prospérité économique internationale et de la mondialisation, c'est nécessaire. Vous dites qu'un élément essentiel, c'est le maintien de forces armées modernes. Vous parlez ensuite de certains problèmes auxquels vous êtes confronté, dans le monde, comme la pauvreté, la maladie et l'ignorance si répandues.

Pendant que je réfléchis aux meilleures façons de promouvoir les valeurs canadiennes dans le monde, et aux meilleures façons de lutter contre la pauvreté, la maladie et l'ignorance, j'aimerais que vous nous disiez quels sont les autres éléments essentiels à la paix, à la sécurité et à la stabilité?

Si on avait un milliard de dollars de plus à dépenser l'an prochain, quelle proportion devait en être consacrée à ces éléments? Vous savez, bien entendu, que c'est le défi que doit relever le gouvernement.

Col Sean Henry: Je pense que c'est une très bonne question. Malheureusement, la réponse comporte probablement une part d'idéologie.

Je crois que souvent, il faut offrir un cadre de stabilité par le recours aux forces armées, au maintien ou à l'imposition de la paix. Mais ensuite, je crains fort que la solution à la pauvreté et aux problèmes qui y sont associés, comme la surpopulation et le reste, soit entre les mains des personnes qui les vivent.

• 1705

Je pense que parfois, l'une de nos erreurs pour ce qui est de l'aide à l'étranger, c'est que l'argent aboutit dans un trou noir. Je dirais qu'une bonne part de l'argent devrait tout de même aller aux forces armées, afin que le Canada puisse faire un apport appréciable à la paix et à la stabilité internationales, et au lieu de ces séjours de six mois, rester un peu plus longtemps pour s'assurer que les conditions sont suffisamment stables pour que les gens du pays puissent commencer à s'aider eux-mêmes.

Le président: Avez-vous d'autres observations, mon général?

Lgén Charles Belzile: Je suis d'accord. Il n'y a pas de solution facile. Je ne crois pas que la puissance militaire soit la solution à tous les problèmes, évidemment, mais c'en est une partie parce qu'elle contribue à créer la stabilité. Et les missions de maintien de la paix, surtout à long terme, ont au moins apporté une certaine stabilité.

Mais si les principaux intéressés, comme on le voit maintenant dans l'ex-Yougoslavie, une fois acquise la stabilité, ne se débrouillent pas pour régler leurs propres problèmes idéologiques et sociaux, je ne crois pas qu'il incombe aux militaires de le faire pour eux. D'ailleurs, nous ne sommes pas équipés pour le faire. Mais on peut présumer qu'on va au moins instaurer la stabilité qui permettra à d'autres personnes de venir les aider, que ce soit dans le cadre d'une initiative du gouvernement canadien, avec l'ACDI, par exemple, dans le but de reconstruire quelque installation, d'apporter des techniques ou d'améliorer leur lieu de travail, par exemple.

Je suis d'accord avec Sean: au bout du compte, cela relève d'eux, en grande partie. Nous pouvons contribuer en instaurant des conditions qui, sans les pousser à l'action, seront propres de les aider.

M. Geoff Regan: J'ai une question au sujet de ce que vous appelez la révolution dans les affaires militaires, à bon droit. C'est déjà le cas pour les progrès techniques et les défis que cela représente pour les forces armées.

Vous dites dans votre document que c'est un facteur qui s'ajoute à la complexité de la sécurité nationale et internationale, reposant en grande partie sur les applications des puces électroniques, etc. On présume que la RAM se répandra rapidement à travers le monde. C'est ce que j'ai lu, je crois qu'on l'a désignée comme une vague, alors qu'à mes yeux, nous parlons en fait d'un processus en constante accélération.

Dans d'autres domaines, quand on considère la technologie avec laquelle on essaie toujours de rester à flot, on constate que c'est un défi pour les entreprises et pour le gouvernement, que de gérer les coûts qui augmentent toujours. Par exemple, si vous achetez un ordinateur, vous vous demandez: est-ce que j'achète celui-ci qui est assez rapide ou est-ce que j'attends 6 mois, pour acheter celui qui sera moins cher et un peu plus rapide? Si on attend toujours le prochain, le meilleur, on n'en achètera jamais. Dans le domaine de la défense, si du nouveau matériel arrive dans six mois, à ce moment-là je suis convaincu qu'il y en aura encore un autre en vue, encore plus intéressant.

Comment le gouvernement doit-il gérer ce défi?

Le président: Avez-vous une courte réponse à cette question?

Lgén Charles Belzile: Je peux rapidement vous donner mon avis.

C'est un processus en accélération, je n'en disconviens pas, mais cette accélération se fait à des rythmes différents selon les secteurs, dans le monde, à cause des progrès technologiques de chacun, par exemple. Pour chaque mesure, il y a une contre-mesure qu'on invente quelque part, ou une façon plus rapide ou plus légère ou plus petite de faire les choses. C'est inévitable. Mais il y a encore beaucoup de gens dans le monde qui ne sont pas vraiment touchés par cela. Je pense que la stabilité dont nous avons parlé peut susciter des conditions dans lesquelles ceux-là pourront aussi participer au processus.

Autrement dit, même si les choses évoluent très rapidement pour nous, ce n'est pas le cas pour certains pays africains.

Le président: Merci, mon général.

Monsieur Anders.

M. Rob Anders: Merci beaucoup, monsieur le président.

Je vais revenir à ma question relative au système national de défense antimissile.

Vous affirmez à la page 10:

    Mais il reste, néanmoins, nécessaire d'axer la politique de sécurité du Canada, dans son ensemble, sur l'aide et la collaboration aux initiatives prises par les États-Unis pour maintenir la stabilité internationale indispensable à leur prospérité et à leur progression.

Cela me semble plein de bon sens. Je me demande par conséquent si vous croyez que la dernière initiative de système de défense nationale antimissiles correspond à cet objectif.

• 1710

Comme vos réponses sont parfois longues et que je manque alors de temps, je pose aussi ma deuxième question, qui se rapporte à certaines autres, soulevées par M. Stoffer: le trafic de drogues, la contrebande de migrants, les questions de pêche, etc. Je comprends que vous êtes des soldats et que ce serait peut-être à la marine de répondre à certaines de ces questions, mais je me demande si vous pourriez nous donner le fruit de vos réflexions sur la meilleure façon de s'attaquer à ces problèmes.

Col Alain Pellerin: Je veux bien répondre à la première question, sur la défense nationale antimissiles.

Je dois dire que je suis une sorte d'agnostique, lorsqu'il s'agit de dire si la défense antimissiles est une bonne ou une mauvaise chose. Cette initiative relève du gouvernement américain, à mon avis, qui perçoit certainement la menace à contrer d'un point de vue très différent de celui du Canada.

On peut définir un certain potentiel en Irak ou en Corée du Nord, mais ce n'est pas perçu comme une menace par le Canada, parce que nous ne croyons pas que les nord-Coréens tireront des missiles sur nous, s'ils en ont deux ou six, alors que les Américains ont une responsabilité mondiale et doivent par conséquent protéger leurs forces déployées à l'étranger, selon ce qu'ils appelaient autrefois «défense contre les missiles de théâtre», qui est maintenant un grand bouclier de défense antimissiles. Et ce qui est la défense contre les missiles de théâtre pour la Corée, le Japon ou Taïwan, n'est en fait que leur propre système de défense nationale antimissiles.

Pour les Américains, il serait presque impossible de justifier la défense contre les missiles de théâtre dans ces régions, pour leurs troupes déployées, sans protéger aussi le territoire national, la patrie. Pour eux, il y a donc une dimension complètement différente, que nous n'avons pas.

Tout ce que nous avons dit dans le document, c'est que si les Américains décident de déployer le système de défense antimissiles, les alliés devront songer sérieusement aux conséquences d'un refus du système américain de défense antimissiles, parce qu'elles ne se feront pas sentir seulement du côté de la défense, mais auront une portée bien plus large.

Nous avons mentionné, par exemple, que 85 p. 100 de notre commerce se fait avec les États-Unis, et cela ne fait qu'augmenter. On a vu le problème des pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard, qui n'est rien, compte tenu de l'ensemble de la situation. Par conséquent, je dirais que la défense antimissiles...

Le président: Ne dites pas que ce n'est rien à l'Île-du-Prince-Édouard.

Col Alain Pellerin: Bien entendu, je suis convaincu que ce n'est pas rien pour l'île.

C'est une question très importante pour les Américains. À mon avis, ils vont donner suite à leur projet de défense antimissiles. Le gouvernement doit donc songer sérieusement aux conséquences d'un refus d'appuyer ce système de défense antimissiles. C'est essentiellement ce que nous avons dit dans notre document, sans nous prononcer pour ou contre.

Lgén Charles Belzile: Au sujet de la deuxième question de M. Anders, si j'ai bien compris, vous parlez en fait de ces questions que nous appelons des «menaces asymétriques» par exemple, et de notre capacité de les contrer.

Pour ces questions, comme l'interception des passeurs de drogue, les navires et aéronefs de transport de drogue, par exemple, les militaires appuient en fait l'immigration et les services de police fédéraux, etc. Pour nous, c'est l'une des conséquences d'avoir une force prête au combat, et une capacité de surveillance. En effet, vous avez alors la capacité de faire ce travail et d'être extrêmement utile au solliciteur général et à tout autre ministère préoccupé par ces problèmes, comme l'arrivée dans le Pacifique d'un vieux rafiot rouillé ayant à bord des personnes qui vont probablement entrer illégalement au pays, si on les laisse faire. Nous offrons aussi un appui en fournissant des camps, par exemple, pour certains des intéressés, comment on l'a déjà fait pour les Kosovars.

Mais il ne s'agit que de sous-produits, et je dis toujours que l'autre sous-produit, c'est notre capacité de maintenir ou d'imposer de la paix. Pour nous, c'est aussi ce qui justifie, dans une période d'accalmie apparente, quand il n'y a pas de conflits intenses pour nous, qu'il est préférable qu'on ait ce genre de capacité et qu'on puisse offrir ces services accessoires, comme auxiliaire à la Gendarmerie royale, puis d'intensifier les choses et de passer à une autre vitesse, ce qui serait bien plus difficile et peut-être même impossible à moins d'avoir le temps et les ressources nécessaires.

• 1715

Le président: Merci, mon général.

Madame Longfield.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Merci, monsieur le président.

Messieurs, vous avez fait un lien entre la stabilité internationale et la prospérité nationale, mais la CAD a aussi critiqué quelque peu l'insistance du Livre blanc de 1994 sur l'ONU, aux dépens de NORAD et de OTAN.

Étant donné la situation internationale actuelle, qu'elles peuvent être à votre avis les rôles de l'OTAN et de NORAD, et sur quoi faut-il insister?

Lgén Charles Belzile: Pour commencer, NORAD est une entité continentale, et ce qu'a dit le colonel Pellerin au sujet de la défense continentale et de la défense de la patrie que les Américains... Étant donné que 85 ou 86 p. 100 de notre commerce se fait avec eux... Je ne veux pas citer l'exemple de l'éléphant et de la souris de Pierre Trudeau, mais essentiellement le fait qu'on partage l'hémisphère avec ce pays va dicter dans une large mesure la façon dont nous fonctionnerons au plan national, et il nous incombe, je crois, de payer notre écot—par exemple, la proportion qui nous revient.

À mon avis, peu importe ce qu'ils font, il y aura des conséquences pour nous.

Mme Judi Longfield: Est-ce que cela s'applique également au système de défense antimissiles?

Lgén Charles Belzile: Oui cela s'applique au système de défense antimissiles.

Col Sean Henry: Le colonel Pellerin peut vous parler de l'OTAN, mais j'aimerais intervenir sur les Nations Unies. Il faut certes pouvoir cerner tous les secteurs d'intérêts, et je crois que tous ces organismes seraient inclus.

Néanmoins, jusqu'à maintenant les Nations Unies se sont montrées tout à fait incompétentes pour ce qui est d'opérations militaires. À mon avis, ça serait une erreur de mettre tous nos oeufs de potentiel militaire dans le panier des Nations Unies. Maintenant, permettons au colonel Pellerin de parler de l'OTAN.

Col Alain Pellerin: Oui.

Si, par le passé, nous étions critiques au sujet du maintien de paix, ce n'était pas tellement sur le maintien de paix. Je crois que c'était plutôt sur la façon dont ce concept nous avait été présenté—l'idée de sécurité humaine—et la manière dont on en a fait la promotion. Je me souviens, par exemple, d'avoir participé à un séminaire de deux jours offert par le ministère des Affaires extérieures et l'ACDI, où le ministre des Affaires extérieures à l'époque a parlé de la sécurité humaine pendant une demi-heure. Pendant tout ce temps-là, il n'a jamais mentionné le rôle des forces armées, ni de la GRC non plus, et à l'époque nous avions 3 500 soldats dans la région des Balkans.

Si le gouvernement juge bon d'envoyer 3 500 soldats dans les Balkans, c'est qu'il doit avoir un motif; c'est pour assurer cette stabilité que le colonel Henry a mentionnée, et qui est essentielle pour garantir la sécurité humaine.

Maintenant, sur la question de l'OTAN, je crois qu'il est essentiel que nous maintenions ce lien avec l'OTAN. À mon avis, l'OTAN représente une sécurité transatlantique avec des alliés avec lesquels nous partageons quelque chose. Nous avons tendance à oublier, lorsque nous parlons de maintien de la paix, au cours des dernières années, à un moment donné, plus de 75 p. 100 de nos soldats étaient sous le commandement de l'OTAN—le SFOR ou le KFOR. Ce ne sont pas des casques bleus, et leur rôle se distingue nettement du rôle traditionnel de maintien de paix que nous avons connu, par exemple, à Chypre. Il s'agit plutôt d'un effort de conciliation, et donc il est essentiel que ces soldats soient équipés, il faut s'assurer que si...

Certains critiqueront les militaires de planifier pour la pire situation, mais il faut le faire car si on planifie pour une situation idéale, c'est l'inverse qui va sans doute se produire.

Voilà pourquoi ce lien avec l'OTAN demeure important, et le travail que nous faisons dans les Balkans pour le maintien de la paix demeure, à mon avis, essentiel pour assurer la sécurité et la stabilité en Europe, ce qui est un lien essentiel avec notre sécurité.

Col Sean Henry: On peut le voir d'un autre point de vue également, car les pays de l'OTAN ne sont pas dans la région des Balkans par simple générosité et pour des objectifs humanitaires, même si ce sont d'importantes raisons—je l'avoue. Ils sont là parce que la région des Balkans a toujours été un baril de poudre, et que si la région venait à se déstabiliser, il y aurait toutes sortes de conséquences, particulièrement dans le Moyen-Orient. Et qu'est-ce qu'on trouve au Moyen-Orient? Du pétrole.

• 1720

Voilà ce que je pense... Je suis certain que le gouvernement canadien a considéré cette perspective, tout comme ses alliés à l'OTAN. Selon eux, il faut étouffer l'affaire dans l'oeuf, sinon les conséquences à long terme pourraient être très graves. Je ne veux pas minimiser l'importance de l'aspect humanitaire, mais je dis qu'il faut assurer la stabilité.

Le président: D'accord. Monsieur Goldring.

M. Peter Goldring: Merci, monsieur le président.

Mon général, ce rapport fait état des réserves—du rôle des Rangers canadiens dans les réserves, aux fins de surveillance, et on donne des chiffres. Mais dans un autre rapport que j'ai reçu du ministère de la Défense nationale, sous la rubrique «enfants et familles», cela me préoccupe de voir comment leur rôle a été élargi, dans le cas du personnel Rangers, il y a eu une augmentation de 50 p. 100, et pour les jeunes Rangers, l'augmentation a été de 100 p. 100.

Étant donné la réduction des patrouilles de surveillance Aurora, êtes-vous de l'avis que les Rangers peuvent jouer un rôle logistique de surveillance qui peut être utile? Est-ce qu'ils peuvent couvrir une plus grande région que l'appareil Aurora? J'imagine qu'un appareil, à 20 000 pieds, je ne connais pas l'altitude des patrouilles, peut couvrir une bande de terrain de 1 000 à 2 000 milles. À mon avis ce n'est pas très réaliste de s'attendre que des gens en skidoo puissent couvrir autant de territoire qu'une patrouille par avion. Est-ce vraiment une approche pratique en ce qui concerne la surveillance de l'Arctique et les questions de souveraineté dans l'Arctique?

Lgén Charles Belzile: Si c'est de cette façon qu'on le décrit—et je ne l'ai pas lu—je peux vous assurer que ce n'est pas l'intention des Rangers. Les Rangers, comme organisation, coûtent presque rien. Si vous avez voyagé dans le Nord, vous savez que lorsqu'un étranger s'y pointe, pour n'importe quelle raison, même dans une petite collectivité... les gens l'apprennent, et si personne ne le connaît, ni ce qu'il fait, on s'adresse à la GRC. C'est ce genre de surveillance que font les Rangers. Ils ne remplacent pas des appareils, et personne ne dirait qu'ils devraient remplacer les patrouilles aériennes.

Nous donnons à ces Rangers quelques articles de vêtements, une carabine, et à peu près 200 cartouches, voilà ce qu'on leur paie. Et c'est qu'on leur demande. Nous leur permettons également de se servir de ces munitions pour chasser.

Je connais bien le programme des jeunes Rangers parce que c'est un programme que nous avons appuyé en 1995, vu les collectivités étaient trop petites pour avoir des Cadets de l'Armée, de l'Air, ou de la Marine, qui sont organisés en petits groupes. On a toujours cru qu'il fallait avoir à peu près 30 cadets dans un groupe, pour qu'il y ait des instructeurs qui... Essentiellement, c'était un programme pour donner aux jeunes Autochtones du Nord, âgés de 12 ans à 18 ans, quelque chose qui ressemblait à ce qu'on fait avec les Cadets de l'Armée, de l'Air, et de la Marine dans le Sud, mais conçu spécialement pour leur environnement géographique. Voilà essentiellement le but. Ils n'ont pas d'autre fonction, à part un peu de formation sur la citoyenneté et ou leur explique ce qu'il y a de bizarre à la présence d'étrangers que des étrangers seraient dans le Nord s'adonnant à des activités illicites. Ils ne remplacent pas les avions, et ça n'a jamais été l'intention du programme.

M. Peter Goldring: Eh bien, cela se comprend facilement, et je reconnais qu'on peut économiser beaucoup. Mais je vois qu'il y a une augmentation subite ici. Par ailleurs, alors on est en train de réduire le nombre des patrouilles aériennes, avec quoi les remplace-t-on? Est-ce l'idée derrière l'expansion de ce programme de Rangers? Leur nombre est maintenant considérable, entre 8 000 et 9 000 personnes. C'est beaucoup.

Lgén Charles Belzile: Oui. Mais si vous comptez les jeunes Rangers dans ce chiffre, c'est semblable aux 60 000 Cadets de l'Armée, de l'Air et de la Marine dans le pays. Ils n'augmentent pas le potentiel des forces armées. On ne leur forme pas dans ce but, quoiqu'il faut avouer que la plupart des jeunes qui entrent dans les forces armées ont été cadets, à titre de première expérience, ils ont développé un certain respect pour leurs instructeurs, et ils veulent poursuivre leur formation. Beaucoup d'entre eux reviennent. C'est la même chose avec les jeunes Rangers.

M. Peter Goldring: Mais on considère ces 4 800 Rangers comme l'équivalent des forces de réserve.

Lgén Charles Belzile: Ils en font partie. Ils font partie des réserves. Dans les réserves des Forces canadiennes, il y a la réserve marine, la réserve aérienne, et la réserve de l'armée, ou la milice, ce que nous appelons la première réserve. Il y a également le Cadre des instructeurs de cadets, qui comprend les officiers du CIC, qui fait également partie des réserves.

• 1725

Les Rangers font partie des réserves, tout comme la réserve supplémentaire, qui est souvent composée de personnes à la retraite non rémunérées qui gardent leur nom sur la liste, pour dire: «Si jamais vous avez besoin de moi, appelez-moi». C'est ce genre de réserve-là.

Col Sean Henry: Il y a un autre facteur dont on doit tenir compte. Si vous regardez la carte, il n'y en a pas beaucoup dans l'Extrême-Arctique. La plupart d'entre eux sont sur le territoire. Il y en a certains dans l'Extrême-Arctique, mais pas beaucoup.

Donc ce dont vous avez besoin aux fins de la souveraineté et aux fins de la surveillance... Il ne faut pas oublier les satellites. Les satellites sont le principal moyen de surveillance pour l'instant. Le problème avec les satellites c'est qu'ils ont une empreinte limitée, et ils orbitent à plusieurs heures d'intervalle, mais ils sont suffisants pour assurer une surveillance générale, et le Canada en profite.

Si vous référez quelque chose avec un satellite, vous devez envoyer un avion de surveillance par exemple pour savoir exactement ce que c'est. Alors, si la solution est appropriée, on peut envoyer des Rangers pour régler la situation.

Un rapport a été rédigé par le colonel Leblanc, le commandant des forces terrestres, région du Nord, il y a à peu près deux ans. Ce rapport est disponible, et vous en avez probablement vu une mention dans les journaux au cours des six derniers mois. Le rapport traite de façon assez détaillée des difficultés à maintenir la souveraineté dans le Grand Nord étant donné les compressions budgétaires. Il serait peut-être utile pour les membres du comité de lire ce rapport.

De toute évidence—et encore une fois il s'agit de mon opinion personnelle—je ne crois pas que deux patrouilles Aurora par année sont suffisantes dans le Grand Nord du Canada, surtout quand vous pensez à ce qui se passe là-haut. Il y a des brise-glaces russes qui entrent à titre de bateaux de croisière. Cela se passe. Personne ne sait qu'ils sont là, et tout à coup ils surgissent dans les communautés du Nord.

Il y a toutes sortes de personnes qui arrivent d'Europe ou du Japon qui peuvent atterrir et ensuite aller se balader dans la nature. Nous avons tout à fait besoin de surveillance pour assurer notre souveraineté.

Le président: Colonel Henry, il va falloir que je vous coupe la parole et que je cède la parole à M. Grose.

M. Peter Goldring: J'ai un rappel au Règlement, monsieur le président. Je me demande s'il serait utile pour nous de recevoir un exemplaire de ce rapport afin que nous soyons au courant des difficultés entourant la surveillance dans le Grand Nord. Je crois que ce serait très utile pour nous tous.

Le président: On pourrait certainement l'envisager.

M. Peter Goldring: Merci.

Le président: Nos attachés de recherche en ont pris note.

Monsieur Grose.

M. Ivan Grose (Oshawa, Lib.): Merci.

Mon général, étant donné que je suis directeur de la Ligue des cadets de l'air du Canada, je vous suis très reconnaissant de vos commentaires à leur sujet.

J'imagine que je suis une des rares personnes qui a une expérience militaire, mais étant donné la technologie moderne, cette expérience est marginale et remonte à déjà longtemps. Évidemment, je faisais partie des forces aériennes. Donc je suis tout à fait en faveur de grands avions de transport pour transporter votre équipement.

La difficulté, et vous l'avez mentionné vous-même, c'est que nous achetons de l'équipement militaire par lots. Nous n'évaluons jamais leur durée de vie, ou ne calculons pas le taux de dépréciation. J'ai lu ici quelque part que vous recommandez 2 milliards de dollars supplémentaires par an. Pour le contribuable canadien, c'est une grosse somme.

Pourriez-vous, ou quelqu'un d'autre, préparer un budget approximatif pour nous qui s'élèverait à 2 ou 3 milliards de dollars près de ce que nous dépensons maintenant—je vous propose 2 ou 3 milliards de dollars de plus et je serai certainement en faveur de cela—mais veuillez tenir compte de la dépréciation. Vous avez un parc de camions, et la plupart sont désuets, et on n'a jamais prévu d'en acheter de nouveaux.

Moi j'avais cinq camions, et chaque année dans le budget je pouvais acheter un nouveau camion puisque celui qui datait de cinq ans me coûtait trop cher en réparations. Cela faisait partie du... Les gens le reconnaissent. Ils achètent une voiture; ils savent que la valeur va déprécier. Mais on ne le fait pas.

Les citoyens du Canada n'ont aucune idée de ce qu'ils obtiennent 10, 11 ou 12 milliards de dollars, ce qui est le montant dépensé actuellement étant donné que ça se fait par lots. Si on avait une autre forme de budget... Si vous êtes prêt à le remettre, je serais prêt à le distribuer à mes électeurs. Est-ce que cela pourrait se faire?

Lgén Charles Belzile: Je pense qu'on pourrait certainement faire quelque chose du genre, mais j'aimerais vous faire remarquer que, jusqu'à un certain point, la dépréciation de l'équipement et ce genre de chose est calculé lorsque nous faisons des achats à l'heure actuelle.

Je ne suis pas d'accord avec des achats en vrac, mais ce n'est pas un système... Je suis désolé, je suis peut-être un peu imprécis, mais n'oubliez pas que nous avons créé au sein du gouvernement un système d'achats qui court-circuite la Défense nationale dans une large mesure. Le ministère de la Défense nationale est impliqué mais c'est la même organisation qui achète pour tous les services de l'État. Elle a son propre système de règles sous l'égide, sans doute du Conseil du Trésor et de personnes du genre. La Défense nationale a très peu voix au chapitre, nous devons vivre avec ce genre d'enveloppe.

• 1730

Nous avons un document ici, que n'avons pas eu l'occasion de vous remettre. Un colonel à la retraite à Toronto qui travaille pour le Conseil de l'Atlantique du Canada l'a préparé. Je l'ai mentionné à quelques reprises lorsque je parlais de l'an 2015 comme date d'échéance pour une certaine pièce d'équipement dont il a fait une étude du début à la fin de la vie utile.

Je ne sais pas si dans le système actuel des services gouvernementaux on pourrait créer un système du genre, mais il n'y a aucun doute dans mon esprit que ce serait un meilleur système que celui dont nous disposons maintenant.

M. Ivan Grose: C'est là notre tâche.

Mais avant de vous réjouir, sachez que je suis d'accord avec M. Wilfert pour dire que 92 p. 100 des individus veulent des brigades prêtes au combat. Le problème c'est que 92 p. 100 d'entre eux ne veulent pas être responsables de la note.

Lgén Charles Belzile: C'est exact.

M. Ivan Grose: Merci, monsieur le président.

Le président: Y a-t-il autre chose?

Col Alain Pellerin: J'aimerais dire un mot là-dessus. Je crois que le général y a déjà fait allusion.

Les Australiens ont vécu ce processus avec leur Livre blanc qui a été publié récemment. Le gouvernement s'est engagé non seulement à donner suite aux recommandations de ce Livre blanc mais ils s'est aussi engagé à le financer et à augmenter le financement sur une période de 10 ans. Je crois que c'est ce que nous devrions envisager. C'est le problème principal avec le Livre blanc actuel. On ne s'est jamais sérieusement engagé à en assurer le financement voulu. Il s'agit d'une approche improvisée pour de très gros achats, par exemple, parce qu'il n'y a pas d'engagement à long terme pour les achats d'équipement.

Col Sean Henry: Pour être juste envers le gouvernement, je crois que le Livre blanc dès sa parution a été frappé par la révision des programmes. Je crois que s'il n'y avait pas eu de révision des programmes entre 1994 et 1996, le résultat aurait été quelque peu différent. Il s'agissait simplement d'une très mauvaise période.

Le président: Le temps prévu pour la séance de notre comité est maintenant échu. Chaque membre du comité a eu l'occasion de poser des questions.

Donc, je tiens à remercier nos témoins de leurs commentaires fort intéressants sur cette question vaste et cruciale. Nous avons bien hâte de recevoir votre rapport à l'automne. Encore une fois, merci de votre participation.

La séance est levée.

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