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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 10 mai 2005




Á 1120
V         Le président (L'hon. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.))
V         M. Daniel Jean (sous-ministre adjoint, Développement des politiques et des programmes, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration)
V         Le président
V         M. Daniel Jean

Á 1125

Á 1130
V         Le président
V         M. Daniel Jean
V         Le président
V         M. Inky Mark (Dauphin—Swan River—Marquette, PCC)
V         M. Daniel Jean
V         M. Inky Mark
V         M. Daniel Jean
V         M. Inky Mark
V         Le président
V         Mme Meili Faille (Vaudreuil-Soulanges, BQ)
V         M. Clark Goodman (directeur par intérim, Division de la citoyenneté, greffier de la citoyenneté par intérim, Direction générale de l'intégration, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration)

Á 1135
V         Mme Meili Faille
V         M. Clark Goodman
V         M. Daniel Jean
V         Mme Meili Faille
V         Le président
V         M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas, NPD)
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Clark Goodman
V         M. Bill Siksay

Á 1140
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Clark Goodman
V         M. Bill Siksay
V         M. Clark Goodman
V         M. Daniel Jean
V         Le président
V         L'hon. David Anderson (Victoria, Lib.)
V         M. Daniel Jean
V         L'hon. David Anderson
V         M. Daniel Jean
V         L'hon. David Anderson

Á 1145
V         M. Daniel Jean
V         L'hon. David Anderson
V         M. Clark Goodman
V         L'hon. David Anderson
V         M. Clark Goodman
V         L'hon. David Anderson
V         Le président
V         M. Lui Temelkovski (Oak Ridges—Markham, Lib.)
V         M. Daniel Jean
V         M. Lui Temelkovski
V         M. Daniel Jean
V         M. Lui Temelkovski
V         M. Daniel Jean
V         M. Lui Temelkovski
V         Le président
V         M. Roger Clavet (Louis-Hébert, BQ)

Á 1150
V         M. Daniel Jean
V         M. Roger Clavet
V         M. Daniel Jean
V         M. Roger Clavet
V         M. Clark Goodman
V         M. Roger Clavet
V         M. Clark Goodman
V         M. Daniel Jean
V         M. Roger Clavet
V         Le président

Á 1155
V         L'hon. Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.)
V         Le président
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Clark Goodman
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         M. Bill Siksay
V         M. Daniel Jean
V         Le président
V         M. Inky Mark

 1200
V         M. Daniel Jean
V         M. Inky Mark
V         M. Daniel Jean
V         M. Inky Mark
V         M. Daniel Jean
V         M. Inky Mark
V         Le président
V         Le président
V         Mme Melynda Jarratt (historienne, Canadian War Brides)

 1215

 1220

 1225
V         Le président
V         M. Inky Mark
V         Mme Melynda Jarratt
V         M. Inky Mark
V         Mme Melynda Jarratt

 1230
V         M. Inky Mark
V         Le président
V         Mme Meili Faille
V         Mme Melynda Jarratt
V         Le président
V         M. Bill Siksay
V         Mme Melynda Jarratt

 1235
V         Le président
V         Mme Melynda Jarratt
V         Le président
V         L'hon. David Anderson
V         Mme Melynda Jarratt
V         L'hon. David Anderson
V         Mme Melynda Jarratt
V         L'hon. David Anderson
V         Mme Melynda Jarratt
V         L'hon. David Anderson

 1240
V         Mme Melynda Jarratt
V         L'hon. David Anderson
V         Mme Melynda Jarratt
V         Le président
V         Mme Melynda Jarratt
V         Le président
V         M. Bill Siksay
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 059 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 10 mai 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

Á  +(1120)  

[Traduction]

+

    Le président (L'hon. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.)): La séance est ouverte.

    Le Comité de la citoyenneté et de l'immigration a sillonné le pays pendant la majeure partie du mois d'avril. Nous avons visité toutes les capitales ainsi que Montréal, Vancouver et Waterloo. Une question dont nous avons beaucoup parlé est celle des épouses de guerre. Comme vous vous en souviendrez, nous avons tous été assez scandalisés lorsque nous en avons entendu parler. Nous recevons donc M. Jean, qui va nous dire où en est ce dossier du côté du gouvernement.

[Français]

+-

    M. Daniel Jean (sous-ministre adjoint, Développement des politiques et des programmes, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci, monsieur le président.

    Je suis accompagné de Clark Goodman, notre directeur des programmes de la citoyenneté. Son expertise concernant les questions de citoyenneté est beaucoup plus complète que la mienne.

    On vous a distribué un dossier de présentation qui décrit un peu l'historique de nos lois en matière de citoyenneté et les mesures qui ont été prises dans ce domaine. Cela va nous permettre de comprendre un peu mieux la question des épouses de guerre.

[Traduction]

+-

    Le président: Pourriez-vous attendre un instant? Je veux être certain que tout le monde a le document.

    Allez-y.

[Français]

+-

    M. Daniel Jean: À la page 2, on présente un historique de la citoyenneté canadienne. Jusqu'en 1947, les personnes qui habitaient au Canada étaient des sujets britanniques. Le 1er janvier 1947, le Canada a mis en vigueur sa première loi sur la citoyenneté. Cette loi définissait qui était canadien le 1er janvier 1947, qui le deviendrait après cette date et qui perdrait sa citoyenneté canadienne après cette date.

    Le 1er janvier 1947, qui était canadien? La majorité des personnes nées au Canada et y habitant, la majorité des gens nés à l'étranger mais habitant légalement le pays, les femmes qui étaient arrivées au pays avant le 1er janvier 1947 et qui avaient épousé un Canadien avant cette date, en particulier les épouses de guerre ainsi que les enfants de ces hommes et des épouses de guerre.

    Il s'agissait de notre première loi sur la citoyenneté, et tous les gens sont devenus citoyens canadiens lors de sa mise en vigueur. Or, il est important de comprendre qu'il n'existait pas à ce moment-là de processus permettant de préciser le statut de tous ces gens. Pour cette raison, une personne qui serait devenue canadienne le 1er janvier 1947 par le biais de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi et qui, pour une raison quelconque, n'aurait jamais eu à fournir la preuve de sa citoyenneté, que ce soit pour voyager ou pour obtenir des services, pourrait bien ne jamais avoir eu en sa possession de documents attestant sa citoyenneté canadienne. C'est là que semble être le problème concernant les épouses de guerre.

    Qui est devenu canadien après le 1er janvier 1947? Les personnes nées au Canada, les personnes nées à l'étranger d'un père canadien en vertu des liens du mariage et enregistrées comme citoyens canadiens à l'intérieur d'une période de deux ans, les individus nés à l'étranger d'une mère canadienne hors mariage et enregistrés comme citoyens canadiens à l'intérieur d'une période de deux ans, et les personnes naturalisées au Canada. À ce moment-là, se qualifier pour la naturalisation demandait cinq ans. Le délai était moins long dans le cas des sujets britanniques ou des épouses de Canadiens. Il y avait à cet égard une distinction entre les Britanniques et conjoints de Canadiens, d'une part, et les autres, d'autre part.

    À la page 5, on nous indique qui pouvait perdre sa citoyenneté à cette époque. Il s'agissait des personnes nées à l'étranger qui avaient quitté le pays. Celles-ci devaient présenter une demande de rétention de leur citoyenneté avant l'âge de 25 ans, sinon elles perdaient leur citoyenneté canadienne. Elles devaient donc démontrer qu'elles voulaient demeurer canadiennes. Il s'agissait également des personnes qui, à l'âge adulte, prêtaient un serment de répudiation devant un autre pays. Il faut se rappeler qu'à cette époque, on ne reconnaissait pas la double citoyenneté. On perdait sa citoyenneté si on renonçait à celle-ci pour en acquérir une autre. On parle aussi des personnes dont les parents avaient acquis une autre citoyenneté. C'est la mesure que corrige le projet de loi S-2 adopté la semaine dernière.

    En outre, jusqu'à 1967, les personnes qui avaient vécu à l'étranger durant une période de 10 ans après avoir obtenu leur naturalisation perdaient leur citoyenneté. C'était là des mesures propres à la Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947.

[Traduction]

    Après le 14 février 1977, une nouvelle loi est entrée en vigueur. Elle n'apportait pas beaucoup de changements par rapport à la précédente. Elle éliminait certaines dispositions concernant la perte de la citoyenneté en autorisant, par exemple, la double citoyenneté. Seules les personnes de la deuxième génération doivent faire une demande de rétention, si bien que les gens de la première génération qui s'absentent pendant de nombreuses années n'ont plus à faire de démarches pour conserver leur citoyenneté. Cette loi redonnait la citoyenneté aux personnes qui avaient perdu la nationalité canadienne. C'est une question dont nous avons longuement discuté au comité au cours des deux dernières années.

    Après la nouvelle Loi de 1977, ceux qui étaient Canadiens avant ont continué d'être Canadiens. Il y a de nouvelles règles de naturalisation. La période de résidence est maintenant de trois ans au lieu de cinq et il n'y a plus de règles particulières pour les sujets britanniques. L'exigence en matière de moralité a été remplacée par des interdictions clairement définies en ce qui concerne les conditions d'admissibilité à la citoyenneté.

    Pourquoi semble-t-il y avoir certains problèmes de communication? Nous devons assumer notre part de responsabilité. S'il y a des idées erronées qui circulent quant à savoir si les gens sont vraiment Canadiens ou non, cela veut sans doute dire que nous devons mieux informer le public et nous espérons certainement pouvoir le faire.

    Pourquoi doute-t-on de la citoyenneté canadienne des épouses de guerre? Elles ont automatiquement obtenu la citoyenneté en 1947. Toutefois, un bon nombre d'entre elles n'ont peut-être jamais demandé une preuve de citoyenneté. Comme je l'ai déjà dit, c'est parce qu'elles n'ont pas eu à voyager. Elles n'ont pas eu besoin de demander des prestations pour lesquelles il faut produire une preuve de citoyenneté. Certaines d'entre elles n'ont peut-être jamais eu à se demander où se trouvait la preuve de leur citoyenneté.

    Pourquoi les épouses ont-elles maintenant de la difficulté à obtenir un passeport? Depuis 1969, Passeports Canada, l'agence qui délivre les passeports et qui relève du ministère des Affaires étrangères, exige une preuve de citoyenneté canadienne soit un certificat de naissance canadien ou un certificat de citoyenneté canadienne, et il faut obtenir ces certificats pour pouvoir demander un passeport. Avant cela, ce certificat n'était pas exigé. Jusqu'en 1969, les épouses de guerre qui devaient voyager n'avaient pas besoin de cette preuve de citoyenneté pour demander un passeport. C'est devenu nécessaire à compter de 1969.

    Se pourrait-il qu'il y ait actuellement au Canada des enfants d'épouses de guerre qui sont sans statut? Certaines personnes qui ont passé la majeure partie de leur vie au Canada peuvent s'apercevoir, à l'âge adulte, qu'elles n'ont pas la citoyenneté. Cela arrive parfois. Nous avons vu des cas de ce genre. Ce sont des cas isolés, mais on m'a présenté tout récemment, au cours des deux dernières semaines, le cas de deux enfants d'un soldat—un soldat plus récent et non pas de la Seconde Guerre mondiale—qui ont reçu par erreur des documents du gouvernement canadien qui les avait autorisés à venir ici parce qu'on supposait qu'ils étaient Canadiens, il y a 25 ans, alors qu'ils n'avaient jamais vraiment obtenu la citoyenneté. Le gouvernement avait commis une erreur. Ces personnes sont venues ici. Elles ont vécu pendant 25 ans comme si elles avaient la citoyenneté. C'est seulement lorsqu'elles ont fait une demande de passeport et qu'elles ont dû produire une preuve de citoyenneté qu'elles se sont rendu compte qu'elles n'y avait pas droit.

    Effectivement, ce ne sont pas des citoyens, mais avons-nous l'obligation morale et légitime de nous pencher sur leurs cas et de dire que ces personnes sont venues ici et ont vécu comme des citoyens pendant 25 ans? La Loi sur la citoyenneté contient des dispositions qui nous permettent de tenir compte de ces cas particuliers et d'accorder la citoyenneté dans des circonstances exceptionnelles.

    Ces personnes avaient été admissibles à la citoyenneté pendant de nombreuses années, mais ni leurs parents ni elles n'avaient fait de demande. Dans ces circonstances inhabituelles, les gens peuvent obtenir la citoyenneté par décret, comme je l'ai dit, au moyen d'une procédure d'exception. Une politique et des instructions à cet effet existent depuis des années pour les cas de ce genre.

    Étant donné les problèmes qui semblent se poser à cet égard—le fait que les épouses de guerre avaient la citoyenneté canadienne, pour la plupart, en 1947, lors de l'entrée en vigueur de la première Loi canadienne sur la citoyenneté—qu'avons-nous fait jusqu'ici et qu'allons-nous faire pour remédier à la situation?

    Tout d'abord, nous allons faire en sorte que les épouses de guerre soient pleinement informées de la manière dont elles peuvent obtenir une preuve de citoyenneté. Nous sommes en train de mettre à jour notre site Web afin d'y inclure des renseignements destinés expressément aux épouses de guerre. Un lien leur permettra d'accéder directement aux renseignements dont elles ont besoin. Nous signalerons les demandes présentées par des épouses de guerre afin de faciliter leur traitement et pour que nos centres accordent une attention particulière à ces demandes étant donné la complexité supplémentaire de ces dossiers.

Á  +-(1125)  

    Nous allons nous veiller à ce que les agents de nos télécentres soient en mesure de répondre aux questions des épouses de guerre portant sur la citoyenneté. Nous allons travailler de concert avec des organismes qui représentent les épouses de guerre. En fait, la semaine dernière, nous avons rencontré Mme Jarratt, qui est votre prochain témoin, et nous lui avons promis de faire le maximum pour lui communiquer l'information requise ainsi que les liens avec notre site Web qui permettront à ces personnes d'obtenir l'information nécessaire le plus facilement possible. Elle a déjà apporté quelques changements à son site Web—et nous l'en remercions—pour tenir compte de la situation réelle de ces épouses de guerre.

    Nous allons également continuer de travailler de concert avec Passeports Canada et Développement social Canada afin de déterminer et de réduire les obstacles auxquels font face les épouses de guerre lorsqu'elles doivent prouver leur citoyenneté pour obtenir des prestations ou un passeport. Vous connaissez nos difficultés, car nous en avons déjà parlé. Nous avons un arriéré de demandes tant en ce qui concerne l'octroi de la citoyenneté que la délivrance de preuves de citoyenneté. Le gouvernement nous a accordé, il y a quelques semaines, des crédits supplémentaires qui nous permettront de ramener nos délais de traitement à leur niveau antérieur. En ce qui concerne les preuves de citoyenneté, le délai est maintenant de plus de six mois. Nous voudrions le ramener à quatre mois environ. Nous avons également mis en place un processus au Bureau des passeports pour les gens qui ont un voyage urgent à faire. Ce processus permet de délivrer une preuve de citoyenneté en l'espace de quelques jours.

    Nous avons donc pris certaines mesures pour faciliter les choses et nous sommes certainement déterminés à continuer de travailler avec le comité et les intervenants comme Mme Jarratt afin que les personnes en question aient accès plus facilement à l'information et à nos services.

    Merci.

Á  +-(1130)  

+-

    Le président: J'aimerais un éclaircissement. À la page 8, à propos des idées erronées, vous dites que les épouses de guerre ont obtenu automatiquement leur citoyenneté en 1947. Leurs enfants ont également obtenu automatiquement la citoyenneté.

+-

    M. Daniel Jean: Si les enfants étaient ici avec elles, ils ont obtenu la citoyenneté canadienne comme tous les citoyens canadiens, en effet.

+-

    Le président: Merci.

    Nous allons passer aux questions. Le premier tour sera de sept minutes. Ce sera pour les questions et les réponses. Nous allons commencer par M. Mark.

+-

    M. Inky Mark (Dauphin—Swan River—Marquette, PCC): Merci, monsieur le président.

    Merci d'être venus et de nous avoir communiqué ces renseignements. Lorsque les membres du comité ont voyagé dans l'Ouest, ils ont été scandalisés d'apprendre que des gens qui avaient vécu ici toute leur vie se trouvaient dans la situation intolérable de ne pas savoir s'ils étaient Canadiens.

    J'ai une ou deux questions à vous poser. Savez-vous combien d'épouses de guerre ne sont pas considérées comme des citoyennes canadiennes?

+-

    M. Daniel Jean: Non, ce serait très difficile.

+-

    M. Inky Mark: D'après la dernière page de votre document, vous travaillez avec d'autres organisations. Avez-vous contacté Anciens combattants Canada? Le ministère des Anciens combattants pourrait-il envoyer une lettre aux anciens combattants qui vivent encore pour leur demander des renseignements au sujet de leurs épouses et de leurs enfants afin que nous obtenions des données pour déterminer qui se trouve réellement au Canada?

+-

    M. Daniel Jean: Je crois que c'est une excellente suggestion, monsieur Mark. Nous allons écrire une lettre à Anciens combattants Canada et référer ce ministère au lien spécial sur notre site Web.

+-

    M. Inky Mark: Pour conclure, j'apprécie de voir le ministère s'efforcer de résoudre cette question. Je sais que les Canadiens sont aussi stupéfaits que nous d'apprendre que cela puisse se passer à notre époque. C'est certainement de la faute de tous les gouvernements antérieurs qui ont laissé ce genre de choses se produire.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci.

    Madame Faille.

[Français]

+-

    Mme Meili Faille (Vaudreuil-Soulanges, BQ): Je vais abonder un peu dans le même sens que M. Mark. Il est important de joindre ces personnes.

    Dans ma circonscription, cinq personnes se sont présentées à la suite de la parution d'un article dans un journal. Compte tenu du fait que je demeure près de Sainte-Anne-de-Bellevue, il y a plusieurs familles d'anciens combattants dans ma circonscription. Nous avons eu un très bel accueil, compte tenu de l'intérêt que nous portions à cette question.

    Ma question est relative aux documents. Quels sont les documents requis? On sait que cela date de plusieurs années. On peut donc penser que plusieurs personnes ne les ont probablement plus. Quels documents allez-vous accepter en guise de preuve de la citoyenneté?

[Traduction]

+-

    M. Clark Goodman (directeur par intérim, Division de la citoyenneté, greffier de la citoyenneté par intérim, Direction générale de l'intégration, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Les documents à fournir pour obtenir la citoyenneté canadienne sont par exemple un certificat de mariage, pour les femmes qui ont épousé des soldats canadiens, et deux pièces d'identité. Selon le cas, des documents supplémentaires pourraient également être exigés.

    C'est très clairement indiqué dans notre site Web et sur le formulaire de demande. Ce sont des documents tout à fait courants.

Á  +-(1135)  

[Français]

+-

    Mme Meili Faille: Comme c'est le cas pour les gens qui font une demande de citoyenneté, ils doivent fournir les documents habituels, plus le certificat de mariage.

[Traduction]

+-

    M. Clark Goodman: Je pourrais peut-être préciser qu'il ne s'agit pas d'une demande de citoyenneté. Vous demandez une preuve de citoyenneté. Il ne faut pas confondre les deux. Vous avez d'une part la citoyenneté et de l'autre la preuve de citoyenneté.

    Merci.

+-

    M. Daniel Jean: Je peux essayer de vous expliquer la différence entre les deux.

    Deux de mes trois enfants sont nés à l'étranger, si bien qu'ils n'ont pas de certificats de naissance canadiens. Ils ont reçu des documents attestant qu'ils sont des citoyens canadiens. Lorsqu'ils demandent un passeport, ce sont ces documents qu'ils doivent fournir. Comme ils sont encore mineurs, je suis toujours responsable de ces documents. Si je les perds, je devrai demander une preuve de citoyenneté à notre bureau de Sydney et c'est ce document que je devrai utiliser.

    De la même façon, pour les Canadiens qui sont nés ici, c'est leur certificat de naissance qui constitue leur preuve de citoyenneté. Si vous perdez votre certificat de naissance, vous devez en demander un autre aux autorités civiles.

+-

    Mme Meili Faille: Très bien.

+-

    Le président: Monsieur Siksay.

+-

    M. Bill Siksay (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président.

    Merci, monsieur Jean et monsieur Goodman, d'être venus.

    J'ai deux brèves questions.

    Qu'est-ce qui a vraiment changé suite à l'annonce de la semaine dernière? Cela a-t-il vraiment changé la façon dont le ministère traite les épouses de guerre?

+-

    M. Daniel Jean: Sur le plan de la politique, rien n'a changé étant donné que ces personnes avaient la citoyenneté canadienne comme quiconque était au Canada en 1947 au moment de l'entrée en vigueur de la première Loi sur la citoyenneté.

    Je crois que l'attention que le comité a portée à cette question lors de ses consultations, ainsi que l'excellent travail de Mme Jarratt et d'autres, ont mis en lumière un problème de communication. Pourquoi ce problème de communication est-il plus important maintenant qu'avant? C'est sans doute dû parce que certaines personnes avaient l'habitude de se rendre aux États-Unis en présentant seulement leur permis de conduire. Elles doivent maintenant produire une preuve de citoyenneté. Il y a beaucoup de gens qui demandent un passeport, même s'ils n'en ont pas besoin pour aller aux États-Unis.

    Le fait que, dans le contexte actuel, de plus en plus de gens ont besoin de documents prouvant leur citoyenneté a fait naître l'incertitude dans l'esprit de ces personnes qui, pendant des années, n'ont eu aucun document attestant qu'elles avaient la citoyenneté canadienne.

+-

    M. Bill Siksay: Pourquoi le ministère n'a-t-il pas pu répondre à leurs questions et à leurs demandes avant que cela ne retienne autant l'attention? S'il n'y a eu aucun changement de politique, pourquoi autant de personnes voient-elles leur demande rejetée ou ont-elles de la difficulté à établir leur citoyenneté canadienne?

+-

    M. Daniel Jean: Je vous répondrais deux choses.

    Pour ce qui est des cas particuliers, nous réglons les cas particuliers depuis des années. Ce n'est pas un problème récent. Voilà pour la première question.

    J'en ai discuté avec Mme Jarratt avant la réunion. Nous nous sommes rencontrés la semaine dernière. Elle nous a appris que certaines personnes, qui ont la citoyenneté canadienne étant donné qu'elles étaient là avant 1947, se sont fait dire qu'elles n'étaient pas Canadiennes. Si c'est le cas, c'est un problème et nous voulons qu'il nous soit signalé.

    C'est également pour cette raison que, lorsque nous l'avons rencontrée la semaine dernière, nous avons convenu de signaler ces demandes à Sydney afin que notre personnel comprenne bien qu'il doit les examiner avec un soin particulier en raison de leur complexité. Il ne s'agit pas d'établir si vous avez un certificat de naissance ou non.

    Nous allons prendre toutes les mesures possibles pour améliorer les choses.

+-

    M. Bill Siksay: Je suis au courant de l'excellent travail que Mme Jarratt a réalisé à ce sujet, comme beaucoup d'autres personnes dont nous avons entendu parler. Mme Jarratt a beaucoup insisté sur le fait qu'elle a examiné les listes des passagers des navires qui sont arrivés au Canada à l'époque. Est-ce le genre de preuve qu'il faut produire? Faut-il établir la date de son arrivée? Cela fait-il partie des preuves à fournir pour demander un certificat de citoyenneté?

+-

    M. Clark Goodman: Les listes de passagers dont vous parlez peuvent être utiles lorsque nous essayons d'établir si une personne est arrivée au Canada avant 1947, c'est-à-dire avant l'adoption de la loi précédente, ou après cette date.

+-

    M. Bill Siksay: Est-ce une exigence à laquelle les gens devront satisfaire ou est-ce le genre de recherche que le ministère pourrait faire lui-même au lieu d'en imposer le fardeau à des gens comme Mme Jarratt?

Á  +-(1140)  

+-

    M. Daniel Jean: Le problème ne se pose pas uniquement pour les épouses de guerre. Cela vaut pour toutes les personnes qui ont obtenu la citoyenneté canadienne en 1947 car, comme la plupart des gouvernements de la plupart des pays qui ont pris des mesures similaires, le gouvernement canadien n'a pas commencé par délivrer un certificat de citoyenneté à chaque citoyen.

    Par conséquent, cela imposait aux citoyens la responsabilité de fournir la preuve qu'ils étaient là avant 1947, de la même façon que lorsque vous faites une demande de passeport, si vous avez perdu votre certificat de naissance, vous devez en demander un nouveau aux autorités provinciales.

    Par conséquent, toute personne qui cherche à obtenir la citoyenneté ou qui a besoin d'une preuve de citoyenneté pour obtenir un passeport a certaines responsabilités à assumer. Vous pouvez effectivement nous demander quelles mesures nous pouvons prendre pour faciliter le processus au maximum et faire en sorte que les exigences ne soient pas trop lourdes.

+-

    M. Bill Siksay: C'est là où je veux en venir, monsieur Jean. Que faisons-nous, ou que pouvons-nous faire pour faciliter les choses aux personnes qui font cette demande maintenant, étant donné leur âge et étant donné la confusion qui a régné au ministère à ce sujet pendant des années? Que pouvons-nous faire pour les aider au lieu de laisser tout cela sur leurs épaules?

+-

    M. Daniel Jean: Je vais demander à Clark de vous répondre, mais il n'y a eu aucune confusion au ministère. Le ministère considère que ces personnes ont la citoyenneté canadienne et qu'elles l'ont toujours eue. C'est seulement lorsqu'elles ont besoin d'une preuve de leur citoyenneté, lorsqu'elles demandent cette preuve…

+-

    M. Bill Siksay: Mais il semble que les gens aient obtenu des réponses différentes à ce sujet.

+-

    M. Daniel Jean: S'il y a eu des cas isolés où des erreurs ont été commises, le ministère veut certainement en être informé et corriger ces erreurs.

+-

    M. Clark Goodman: Les dossiers d'établissement des immigrants que conserve le ministère remontent à un certain nombre d'années et si ces personnes cherchent à prouver leur citoyenneté canadienne, je leur suggère, encore une fois, de consulter notre site Web. Elles y trouveront des liens indiquant comment établir à quelle date elles ont été admises au Canada et ces renseignements les aideront également à déterminer la date de leur arrivée au pays. L'important c'est toujours d'établir si vous êtes arrivé avant le 1er janvier 1947 ou après cette date.

+-

    M. Bill Siksay: Les dossiers du ministère remontent jusqu'à cette période?

+-

    M. Clark Goodman: Nos dossiers d'établissement remontent aux années 20 ou aux années 30, je crois.

+-

    M. Daniel Jean: Nos dossiers d'établissement électroniques remontent, je crois, à 1973 mais les dossiers antérieurs sont sur microfiches et remontent aux années 20. Par conséquent, dans bien des cas, nous avons peut-être déjà un dossier qu'il nous sera facile de retrouver. Il faut que nous cherchions dans notre système, mais nous pourrons peut-être attester que ces personnes ont bien la citoyenneté canadienne.

+-

    Le président: Monsieur Anderson.

+-

    L'hon. David Anderson (Victoria, Lib.): Pour résumer, si je comprends bien, il s'agit surtout d'obtenir une preuve de citoyenneté. En principe, les exigences sont les mêmes que pour toute autre personne qui désire obtenir un passeport ou un avantage tel qu'une pension du gouvernement et qui doit fournir des preuves. C'est bien cela?

+-

    M. Daniel Jean: Vous avez parfaitement raison.

+-

    L'hon. David Anderson: Encore une fois, je vais vous citer un cas qui m'a été soumis à titre de député, ou du moins pour lequel je suis intervenu si je n'étais pas député à ce moment-là. C'était une dame qui avait vécu au Canada pratiquement toute sa vie, qui avait épousé un officier canadien, qui était d'origine britannique, mais qui était née en Inde. Elle n'avait aucune preuve, aucun certificat de naissance ou aucun document de ce genre. Donc, les difficultés qu'elle a eues sont les mêmes que celles de ces personnes…

+-

    M. Daniel Jean: C'est exact. Si elle était au Canada avant 1947, elle est Canadienne comme toute autre personne qui vivait au Canada à ce moment-là et la question est donc…

+-

    L'hon. David Anderson: C'est ce que j'avais compris à l'époque de même que le ministère, mais je dirais simplement que dans ce cas particulier c'était la preuve de citoyenneté qui posait un problème et non pas la citoyenneté comme telle.

    Étant donné qu'un très grand nombre de ces épouses sont d'origine britannique et que la plupart d'entre elles sont âgées de 75 ans et plus, peut-on dire, sans faire de profilage racial, qu'il est très peu probable que ces personnes se livrent à des activités terroristes si elles se rendent aux États-Unis ou dans un autre pays et que nous devrions donc pouvoir accélérer le traitement de leurs demandes? Êtes-vous limités par des considérations telles que le profilage racial?

Á  +-(1145)  

+-

    M. Daniel Jean: Non. En fait, à la fin de mon exposé, j'ai dit que nous allions essayer de signaler les demandes de ces personnes afin qu'elles soient traitées avec l'attention particulière qu'elles méritent. Si elles doivent faire un voyage urgent, nous traiterons leurs demandes comme nous le faisons habituellement. Lorsque les gens ont un voyage urgent à faire, nous essayons de répondre à leurs besoins.

+-

    L'hon. David Anderson: Laissons les épouses de côté pour nous intéresser aux enfants des soldats canadiens et de leurs épouses de guerre. Si ces enfants sont venus au Canada après être nés à l'étranger, cela leur confère-t-il automatiquement la citoyenneté canadienne, quel que soit le temps qu'ils ont pu passer au Canada ou les autres liens qu'il faut avoir conservé avec le Canada dans certains cas?

+-

    M. Clark Goodman: Comprenons-nous bien, car chacun de ces cas est unique. Si ces enfants sont nés du mariage d'un père et d'une mère canadiens, ils ont obtenu la citoyenneté par filiation. Par conséquent, ils n'ont pas à satisfaire à des exigences concernant la durée de leur résidence au Canada pour avoir la citoyenneté canadienne.

+-

    L'hon. David Anderson: Leur situation est donc différente de celle des enfants d'un couple de Canadiens qui ne sont jamais venus au Canada, qui sont restés en Europe, qui sont maintenant âgés de 60 ans ou plus et qui n'ont plus la possibilité de demander la citoyenneté canadienne.

+-

    M. Clark Goodman: C'est exact.

+-

    L'hon. David Anderson: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci.

    Lui.

+-

    M. Lui Temelkovski (Oak Ridges—Markham, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Merci, monsieur Jean et monsieur Goodman.

    À la page 10, vous dites que vous travaillez de concert avec des organismes qui représentent les épouses de guerre. Avez-vous déjà travaillé avec eux avant ou ce travail commence-t-il seulement maintenant? Avez-vous reçu des renseignements de ces organismes au sujet des personnes qui ont eu des difficultés à obtenir leur citoyenneté ou une preuve de citoyenneté?

+-

    M. Daniel Jean: Comme je l'ai dit tout à l'heure en réponse à une question de M. Siksay, au cours des années, nous avons eu à régler certains cas isolés. Certains d'entre eux nous ont été soumis par le ministère des Anciens combattants ou par d'autres organismes. C'est la première fois de l'histoire récente que des intervenants externes abordent le sujet. Voilà pourquoi nous avons tenu à discuter avec certains d'entre eux pour voir ce que nous pouvions faire pour simplifier les choses. C'est un dossier très complexe, comme vous pouvez le voir d'après nos réponses à ces questions. Comment pouvons-nous mieux informer ces personnes par l'entremise de ces intervenants? Comment ces intervenants peuvent-ils leur donner accès à nos outils d'information tels que notre site Web? Voilà les choses que nous essayons de faire.

    Pour ce qui est du caractère permanent de ce problème, Mme Jarratt sera sans doute mieux en mesure que moi de vous en parler. Ce sont des cas isolés qui ont été portés à notre attention au cours des années.

+-

    M. Lui Temelkovski: Il n'y a aucun organisme qui vous ait donné 10 000 noms en vous disant que ces personnes…

+-

    M. Daniel Jean: Non.

+-

    M. Lui Temelkovski: Pas encore. Serait-il souhaitable que les députés fassent connaître votre site Web aux épouses de guerre potentielles? La plupart d'entre nous faisons chaque semaine des envois à nos concitoyens. Nous pourrions accélérer le processus en communiquant ce renseignement.

+-

    M. Daniel Jean: Absolument. Si vous rencontrez des épouses de guerre qui ont des questions concernant leur citoyenneté, il serai bon de les diriger vers notre site Web ou vers notre centre d'appels.

+-

    M. Lui Temelkovski: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Clavet.

[Français]

+-

    M. Roger Clavet (Louis-Hébert, BQ): Merci, monsieur le président.

    Je n'étais pas aux audiences lorsque les veuves de guerre ont présenté leur témoignage. Par contre, selon la documentation qui nous est remise, certaines questions peuvent être soulevées, notamment en ce qui concerne les enfants de guerre canadiens.

    Un peu comme Mme Jarratt le faisait remarquer, ces enfants de guerre canadiens, qui, dans de nombreux cas, sont considérés comme des enfants illégitimes, n'ont pas accès aux dossiers militaires de Bibliothèque et Archives Canada s'ils veulent retracer leur généalogie et retrouver leur père. Je me mets à la place d'un de ces enfants, qui doit se dire aujourd'hui que cela a déjà été assez difficile. Comment pourrions-nous les aider dans ces situations extrêmes? À l'époque, on parlait d'enfants « illégitimes ». Mais qu'est-ce que cela signifie aujourd'hui, en 2005? On se pose la même question au sujet des gouvernements; on ne sait pas s'ils sont légitimes ou illégitimes. Cela ne veut plus rien dire.

    On se dit que le minimum serait de permettre aux enfants de guerre canadiens d'avoir accès au dossier militaire de leur père à Bibliothèque et Archives Canada. Y a-t-il quelque chose de prévu à cet égard? Comment peut-on justifier cette attitude encore aujourd'hui?

Á  +-(1150)  

+-

    M. Daniel Jean: En ce qui concerne les exigences de citoyenneté, nous pouvons certainement faire tout ce qui est en notre pouvoir pour nous assurer que l'information est disponible et qu'il y a un point d'accès pour les gens qui ont des questions. En particulier, la situation des enfants qui n'étaient pas ici en 1947 devient beaucoup plus difficile — comme vous pouvez le voir —, compte tenu de ce qu'étaient les exigences de citoyenneté à ce moment-là.

    Donc, je pense que nous avons le devoir de donner la meilleure information possible, de nous assurer que, dans les cas particuliers, les gens y aient accès, afin que nous puissions les aider.

    L'autre question que vous m'avez posée relève d'un champ de compétence bien plus large, qui n'est pas de mon ressort. Je peux certainement essayer d'attirer l'attention d'autres institutions sur ce sujet, mais je ne serais pas en mesure de vous répondre.

+-

    M. Roger Clavet: Dans un livre qu'elle a écrit et dans un autre témoignage, Mme Lister disait:

La correspondance que les épouses de guerre recevaient du Bureau des femmes canadiennes portait l'en-tête, « section du rapatriement des civils ».

    Poursuivant la même logique, elle se posait la question à savoir comment il était possible de rapatrier des civils en les inscrivant comme des immigrants reçus. Il y avait une espèce de reconnaissance de facto. Si on envoie cette information par l'entremise du Bureau des femmes canadiennes et qu'on les considère comme des civils, comment seraient-elles devenues, entre-temps, des immigrantes reçues? Il y avait une espèce d'invraisemblance dans cette formulation.

    J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

+-

    M. Daniel Jean: Je ne suis pas un spécialiste des questions militaires. Toutefois, d'après ce que vous me dites, lorsqu'on parlait de rapatriement des civils, cela voulait certainement dire les conjoints, les personnes à la charge des officiers en service, par rapport aux civils.

    Si ces gens sont revenus ici avant 1947, à cette époque, il n'y avait pas de citoyenneté canadienne. S'ils étaient présents au pays en 1947, ils sont tous devenus citoyens canadiens, comme toutes les autres personnes qui avaient un statut légal au Canada à ce moment-là.

    Dans une telle situation, lorsque ces gens sont arrivés, ils avaient possiblement un statut de résident permanent jusqu'à ce qu'ils obtiennent ce qui était à l'époque la citoyenneté britannique, le statut de sujet britannique. Cette situation a été corrigée par la première Loi sur la citoyenneté canadienne de 1947.

+-

    M. Roger Clavet: On parlait des enfants d'épouses de guerre qui vivent aujourd'hui sans statut. Dans des cas spéciaux, le gouverneur en conseil peut intervenir.

    Est-ce qu'on connaît la fréquence des cas où le gouverneur en conseil a attribué la citoyenneté à certaines personnes sur une base spéciale? Est-ce une mesure très répandue, ou est-ce une mesure exceptionnelle?

[Traduction]

+-

    M. Clark Goodman: C'est seulement dans des cas exceptionnels que la procédure d'exception est utilisée. Normalement, il y a d'autres façons d'accorder aux gens la citoyenneté ou de les aider à prouver leur citoyenneté. Ce n'est donc pas fréquent.

+-

    M. Roger Clavet: Quelle est cette fréquence?

+-

    M. Clark Goodman: Je crois que l'année dernière il y a peut-être eu cinq à 10 cas de ce genre.

[Français]

+-

    M. Daniel Jean: Monsieur Clavet, comme nous aimons bien fournir des faits au comité, nous pourrions revenir avec une lettre qui vous dirait combien de fois la procédure d'exception a été utilisée.

    Dans le cas spécifique examiné aujourd'hui, il est important de vous rappeler qu'il y avait déjà, avant même qu'une attention particulière soit portée à la question, des instructions en vigueur relatives à ce genre de cas. Nous ferons certainement tout notre possible, tant sur le plan de la formation que de l'information, pour nous assurer que les gens comprennent bien que cette procédure d'exception existe dans ces cas particuliers.

+-

    M. Roger Clavet: Merci beaucoup.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Docteur Fry.

Á  +-(1155)  

+-

    L'hon. Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Je n'ai pas de questions, merci.

+-

    Le président: Monsieur Siksay.

+-

    M. Bill Siksay: Merci, monsieur le président.

    J'en reviens à la page 5 de votre mémoire, monsieur Jean. Vous indiquez qui peut perdre sa citoyenneté et vous mentionnez que les personnes nées à l'étranger ou qui ont quitté le pays devaient présenter une demande de rétention de leur citoyenneté avant l'âge de 25 ans pour ne pas perdre leur citoyenneté canadienne. Était-ce une disposition de la Loi sur l'immigration de 1947 ou d'une loi ultérieure?

+-

    M. Daniel Jean: C'était une disposition de la loi de 1947. La loi de 1977 oblige seulement les personnes de la deuxième génération à faire une demande de rétention.

+-

    M. Bill Siksay: Nous avons entendu le témoignage du fils d'une épouse de guerre et d'un soldat canadien qui est arrivé au Canada en 1946 avec sa mère. Le couple a divorcé peu de temps après et sa mère l'a ramené en Angleterre avec elle. Il a essayé récemment de rétablir sa citoyenneté canadienne. Je crois qu'au départ sa demande a été rejetée, mais il avait l'impression qu'il tombait sous le coup d'un règlement adopté en 1952. Savez-vous si certaines dispositions adoptées en 1952 ont pu se répercuter sur sa situation?

+-

    M. Daniel Jean: Je ne peux pas vraiment discuter ici d'un cas précis, mais si vous nous fournissez des précisions, nous nous ferons un plaisir de l'examiner. Clark est beaucoup plus ferré que moi sur les questions de citoyenneté. Il me dit qu'il ne se souvient pas d'un règlement adopté en 1952, mais nous allons également vérifier.

+-

    M. Bill Siksay: De façon générale, une personne qui est venue au Canada dans ces circonstances et qui est retournée en Grande-Bretagne ne garde pas automatiquement sa citoyenneté canadienne. Il fallait qu'elle demande à la conserver avant son 25e anniversaire.

+-

    M. Clark Goodman: Il fallait soit que cette personne dépose un certificat de rétention, soit qu'elle revienne résider au Canada à l'âge de 24 ans ou avant.

+-

    M. Bill Siksay: La plupart de ces personnes pensaient avoir la même citoyenneté que leur père lorsqu'elles sont arrivées au Canada—cela vaut autant pour les épouses que pour les enfants—alors est-il normal qu'on puisse la leur retirer à un moment de leur vie qui a été fixé arbitrairement?

+-

    M. Daniel Jean: Vous laissez entendre que beaucoup de gens ont perdu leur citoyenneté pour toutes sortes de raisons différentes. À la façon dont vous formulez votre question, vous semblez dire qu'on ne devrait perdre sa citoyenneté en aucun cas. Ce n'est pas ce que prévoit la Loi sur la citoyenneté.

+-

    M. Bill Siksay: J'estime en effet qu'il devrait être très difficile de perdre sa citoyenneté.

+-

    M. Daniel Jean: Le ministère est certainement d'accord sur ce point.

+-

    M. Bill Siksay: Je pourrais peut-être vous poser une autre question. Quand ces gens arrivaient au Canada y avait-il une procédure particulière ou une politique en place? Y avait-il un décret? Y avait-il une loi disant que les épouses de guerre et les enfants des soldats canadiens auraient la citoyenneté canadienne? Comment cela a-t-il été établi?

+-

    M. Daniel Jean: Cela soulève deux questions différentes. Nous supposons que ces personnes sont arrivées avant 1947. Quelle était donc leur statut à leur arrivée alors qu'il n'y avait pas encore de loi sur la citoyenneté? C'est de toute façon purement théorique étant donné que si ces personnes étaient déjà au Canada en 1947, elles ont toutes obtenu la citoyenneté canadienne.

    Mais j'ai l'impression—et nous pouvons certainement vous informer par écrit de ce que nos archives pourront nous révéler—que ces personnes étaient des sujets britanniques et qu'elles sont arrivées comme résidentes permanentes dans un pays du Dominion britannique. Nous pouvons certainement vérifier. Quoi qu'il en soit, c'est purement théorique étant donné qu'en 1947, tous ceux qui vivaient au Canada légalement, y compris ces personnes, sont devenus des citoyens canadiens.

+-

    Le président: Monsieur Mark.

+-

    M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

    Je veux seulement dire qu'il y a un problème au niveau des preuves et des documents, comme l'a mentionné M. Anderson, mais qu'il y en a un autre au niveau des ministères. Je ne pense pas qu'ils échangent beaucoup de renseignements et il est difficile d'amener un ministère à vous fournir les renseignements qu'il est censé avoir.

    En fait, je vais vous raconter une histoire personnelle. Mon frère, qui a immigré au Canada en 1956, a pris sa retraite il y a deux ans. Il a eu beaucoup de difficulté à obtenir sa pension de vieillesse. C'est parce qu'il n'avait pas la preuve de sa citoyenneté canadienne. Il n'avait pas de certificat de baptême ou de naissance et il avait perdu ses papiers d'immigrant reçu.

    J'ai essayé de l'aider à récupérer ses papiers par l'entremise du ministère de la Citoyenneté, mais sans succès. En fait, le seul moyen dont il a pu prouver sa citoyenneté est que j'atteste qu'il était mon frère. On lui a alors versé sa pension de vieillesse. Il a travaillé et vécu au Québec presque toute sa vie et il y réside toujours. Cette expérience me permet de conclure qu'il y a un manque de coordination. Il est difficile d'obtenir des renseignements.

    Par exemple, si je perds les papiers que j'ai obtenus à mon arrivée en 1955, comment pourrais-je les récupérer? Je n'avais pas de certificat de naissance. C'est la première chose qu'on vous dit : Vous avez besoin d'un certificat de naissance. J'ai un certificat de baptême, mais si je n'en avais pas, qu'est-ce que je ferais?

  +-(1200)  

+-

    M. Daniel Jean: Je pense que vous soulevez plusieurs questions très importantes. Premièrement, le ministère a certainement la responsabilité d'informer le public le mieux possible. Comme je travaille dans la bureaucratie, je dirais que cette information doit être communiquée dans un langage facile à comprendre, ce que nous ne faisons pas toujours très bien. C'est une chose dont nous devons nous rendre compte.

    Deuxièmement, nous fournissons 50 000 preuves de citoyenneté. C'est à peu près le nombre de demandes que nous avons traitées l'année dernière. Vous parlez de cas isolés, n'est-ce pas? La plupart du temps, c'est un processus assez simple. Je peux vous dire que c'est beaucoup plus facile que d'obtenir un certificat de naissance dans certains pays. Pour ce qui est des cas particuliers comme ceux dont vous avez parlé, pouvons-nous faire mieux pour ce qui est du traitement des cas exceptionnels? Nous faisons certaines exceptions.

    Est-il possible d'accorder à ces personnes un peu plus d'attention et d'aide pour les aider à surmonter leurs difficultés? Je pense que oui; nous devons nous pencher sur la question. Nous sommes en train de chercher des moyens d'améliorer nos services. Nous constatons que nous fournissons un excellent service dans un certain nombre de nos secteurs d'activité. Prenez les visas de visiteur et les visas de résident temporaire; aucun autre pays au monde n'est supérieur au Canada dans ce domaine. Mais cela ne compte pas. Peu importe que nous offrons nos services dans un délai de 48 heures ou moins à trois quarts de million de gens, car si pour vous, le délai est de deux mois, c'est tout ce qui compte à vos yeux. C'est à ce niveau-là que nous sommes prêts à essayer d'améliorer notre travail.

    Il faut donc utiliser une information générique et présenter les renseignements dans un langage que les gens comprendront. Il faut qu'ils puissent y avoir accès facilement. Au cours d'une des conversations que j'ai eues avec Mme Jarratt, nous avons conclu que même si vous avez un excellent site Web, très bien construit, s'il n'y a pas de liens directs permettant d'obtenir la réponse à vos questions, vous avez trop de choses à lire.

    Par conséquent, pour les cas particuliers comme ceux dont vous avez parlé qui semblent exiger beaucoup plus d'efforts pour obtenir une preuve de citoyenneté, pourrions-nous essayer de faciliter les choses?

    Nous en prenons bonne note.

+-

    M. Inky Mark: Le ministère dispose donc des renseignements voulus quant à la date à laquelle ces personnes sont arrivées au Canada, n'est-ce pas?

+-

    M. Daniel Jean: Oui.

+-

    M. Inky Mark: Pourquoi est-il si difficile de fournir ces renseignements aux gens qui les demandent, que ce soit mon frère ou qui que ce soit d'autre?

+-

    M. Daniel Jean: En principe, une personne qui a perdu sa fiche d'établissement peut demander un document de remplacement et, si nous avons les renseignements voulus dans nos dossiers, cela ne devrait pas poser de problème. Je ne sais pas pourquoi il y en a eu un dans ce cas particulier, mais je peux vous dire que c'est une chose que nous faisons régulièrement. Nous émettons régulièrement des documents de remplacement aux personnes qui ont perdu leur fiche d'établissement et cela ne pose normalement pas de problème si c'est dans nos dossiers.

+-

    M. Inky Mark: Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Pour terminer, je mentionnerais qu'il y a eu environ 48 000 épouses de guerre et plus de 22 000 enfants. Cela vise près de 70 000 personnes et je ne sais pas exactement combien d'entre elles éprouvent des difficultés.

    Une des personnes à qui nous avons parlé à Dartmouth était M. Martin. Il ne fait aucun doute qu'il avait tous les documents requis. Il avait la photo du passeport de son père. Son nom figurait dans le passeport. Il avait la photo de l'arrivée de la famille au Canada ainsi que la médaille de son père. Il a énormément de difficulté à obtenir la citoyenneté canadienne. Ce n'est pas qu'il manque de preuves. Il a ces preuves.

    Ce qui m'inquiète c'est que nous ignorons combien de personnes se trouvent dans cette situation, et il va falloir l'établir. Lorsque nous étions dans les Maritimes, Melynda Jarratt nous a dit qu'elle a beaucoup travaillé sur ce dossier, mais qu'elle n'a reçu aucune aide. J'ai l'impression que le ministère devrait faire appel au maximum d'experts pour résoudre ce problème.

    Entre-temps, j'ai lu le livre intitulé Voices of the Left Behind: Project Roots and the Canadian War Children of World War Two dont Mme Jarratt est l'auteure. Il y est question des enfants qui sont nés hors des liens du mariage ou qui sont retournés en Angleterre après être venus au Canada. Il semble que cela pose un véritable problème. Il est important de connaître ses antécédents familiaux, surtout sur le plan médical. Nous avons des obligations à cet égard, d'autant plus que c'est l'Année des anciens combattants. Soixante ans plus tard, nous parlons de leurs enfants, qui sont tous dans la soixantaine et nous devons faire le maximum pour eux.Je vous exhorte à faire appel aux experts comme Mme Jarratt qui ont fait des recherches à ce sujet, et d'utiliser leurs services au maximum.

    Notre comité ne devrait pas avoir à voyager pour entendre parler de ce problème qui nous préoccupe beaucoup. Personne ne nous avait averti de son existence. Notre comité tient à faire de son mieux pour remédier à cette situation.

    Monsieur Jean, merci d'être venu. Nous comptons sur vous pour nous tenir au courant. Je suis certain que vous allez rester au cours de la prochaine demi-heure pour écouter le témoignage de Mme Jarratt.

    Merci.

    Nous allons suspendre la séance pendant une minute pendant que nous changeons de témoins.

  +-(1208)  


  +-(1211)  

+-

    Le président: Le témoin suivant est Mme Melynda Jarratt. C'est un sujet qu'elle connaît bien. Elle est l'auteure d'un livre très intéressant, Voices of the Left Behind, qui porte sur les épouses de guerre et les enfants des soldats canadiens.

    Madame Jarratt, pourriez-vous parler au comité? C'était un plaisir de vous rencontrer quand nous étions dans les Maritimes, à Fredericton. Les membres du comité qui n'étaient pas là-bas vont pouvoir vous entendre parler de ce sujet très important.

+-

    Mme Melynda Jarratt (historienne, Canadian War Brides): Merci beaucoup.

    C'est un grand plaisir pour moi d'être ici aujourd'hui. C'était une surprise; je ne m'attendais pas à ce que vous me rappeliez. Je m'en réjouis, car cela veut dire qu'on a compris l'importance de cette question et je dirais qu'il est grand temps. Cela arrive avec seulement 60 ans de retard.

    Tout d'abord, je voudrais vous raconter une petite histoire. Ce matin, j'ai pris l'avion et il y avait à bord un homme que vous connaissez tous. En fait, je l'ai rencontré vendredi matin ici, à Ottawa, et je lui ai remis un exemplaire de mon livre. Il se trouve que le sénateur Roméo Dallaire est l'un des enfants dont nous parlons, les enfants des épouses de guerre. Il est arrivé au Canada à bord de l'Empire Brent, le 13 décembre 1946. Il a débarqué à Halifax à l'âge de six mois, dans les bras de sa mère; il a vécu au Canada et a grandi au Québec. En 1972, quand il a dû demander un passeport, on lui a dit qu'il n'était pas citoyen canadien. Le sénateur Dallaire m'a dit ce matin, lorsque je l'ai de nouveau rencontré dans l'avion, de bien vouloir vous raconter son histoire. Il m'a dit : « Melynda, vous pouvez vous servir de mon histoire. Allez-y. Dites bien à tout le monde au comité que je vais surveiller cette question de près et que je veux savoir ce qui se passe ». Cela intéresse donc le sénateur Dallaire, et je crois que lorsqu'il donne des ordres, il vaut mieux l'écouter.

    J'ai trouvé cela intéressant. Cela montre que les enfants des épouses de guerre sont partout, là où on s'y attend le moins. Une petite leçon d'histoire. Entre 1942 et le 31 mars 1948, 43 454 épouses de guerre—dont environ 94 p. 100 étaient Britanniques—et leurs 20 997 enfants ont été rapatriés au Canada lors d'une vague d'immigration massive parrainée et financée par le gouvernement canadien par l'entremise d'un organisme appelé le Bureau des femmes canadiennes. Ce bureau relevait du ministère de la Défense nationale. Il avait été créé en 1944 lorsqu'on s'était rendu compte que la guerre serait bientôt terminée et qu'il fallait ramener au pays près de 70 000 personnes à charge, c'est-à-dire les épouses des soldats et leurs enfants nés à l'étranger.

    Compte tenu de l'expérience de la Première Guerre mondiale, les autorités d'immigration étaient très inquiètes, car elles savaient que cela allait poser un problème. L'Immigration s'est d'abord occupée du dossier. Il a ensuite été confié à la Défense nationale par l'entremise du Bureau des femmes. Ensuite, en janvier 1947, alors que la majorité de ces femmes étaient déjà au Canada, c'est l'Immigration qui s'en est de nouveau chargée. Telle est donc la situation.

    Soixante ans plus tard, la moitié des épouses de guerre sont sans doute encore vivantes. Je ne connais pas les chiffres exacts. Je dirais qu'un bon nombre de ces 20 997 enfants sont toujours vivants. Le plus vieux a dû naître en septembre 1940, si bien que ces enfants doivent avoir aux alentours de 65 ans et s'apprêtent à demander leur pension de vieillesse, le RPC, etc. Le plus jeune a dû naître en mars 1948 étant donné que le rapatriement des personnes à charge au Canada a été autorisé jusqu'à cette date. Ces personnes sont donc âgées entre 59 et 65 ans. Ces enfants me téléphonent à Fredericton au Nouveau-Brunswick. Je suis l'experte des épouses de guerre canadiennes, car cela fait plus de 20 ans que je fais des recherches sur le sujet. J'en sais plus que n'importe qui au Canada sur la question des épouses de guerre canadiennes. Je n'ai pas peur de le dire. C'est un sujet qui me passionne. Cela m'intéresse et je vais continuer à m'y intéresser.

    Je ne prétends pas être une experte de la Loi sur l'immigration, car ce n'est certainement pas le cas. Je ne suis pas une experte non plus de la Loi sur la citoyenneté, mais je sais ce que je sais. Je sais que le sénateur Roméo Dallaire s'est fait dire en 1972 qu'il n'était pas un citoyen canadien. Je sais que Jan Walker, qui est également arrivée à bord de l'Empire Brent et qui réside maintenant à Wasaga Beach, en Ontario et qui est la fille de Brigitte Mary Simms, s'est fait dire qu'elle n'était pas une citoyenne canadienne.

  +-(1215)  

    Je sais qu'Anne Withrow, fille de l'épouse de guerre Doris Lloyd, qui est arrivée au Canada le 28 novembre 1944 à bord de l'Île de France, s'est fait dire qu'elle n'était pas une citoyenne canadienne. Je sais que Michael et Gerry Thompson, les fils d'Alice Lorna Thompson, une épouse de guerre britannique, qui sont arrivés au Canada en 1947 à bord du Queen Mary, se sont fait dire qu'ils n'étaient pas des citoyens canadiens. Ken Smith, le fils d'une épouse de guerre, Maree Smith, qui est venu au Canada la 15 juin 1945 à bord du SS Letitia, a beaucoup de difficultés. J'ai toutes les lettres qu'ils ont échangées avec moi.

    Susan Bishop, la fille d'une épouse de guerre qui est arrivée au Canada en janvier 1945, s'est fait dire qu'elle n'avait pas la citoyenneté canadienne. Ken Ross, fils d'une épouse de guerre, est arrivé au Canada en 1946 et s'est fait dire également qu'il n'était pas citoyen de ce pays. Richard Cooper, fils d'une épouse de guerre, est arrivé au Canada en 1946 et s'est également fait dire qu'il n'avait pas la citoyenneté canadienne.

    Comme vous le voyez, j'ai pris note de tout cela. J'ai écrit ces notes à bord de l'avion ce matin.

    Richard Cooper, fils d'une épouse de guerre, qui est arrivé au Canada le 12 août 1946 à bord du Queen Mary, s'est également fait dire qu'il n'était pas un citoyen de notre pays. Susan Leir, fille de l'épouse de guerre Catherine Mary Spittle, qui est arrivée au Canada en septembre 1946 à bord du Letitia, s'est également fait dire qu'elle n'avait pas la citoyenneté canadienne. Carolyn Sidnell, fille de l'épouse de guerre Kathleen Shepperd, est arrivée au cours de l'été 1946 à bord du Queen Mary....

    Ce ne sont là que quelques-unes des personnes qui ont été en mesure de me contacter pour me raconter leur terrible histoire, leur expérience cauchemardesque avec la bureaucratie du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration qui est devenue un véritable bourbier en ce qui concerne le dossier des épouses de guerre.

    Nous avons parlé de communication. Il en a été question plusieurs fois au cours du témoignage de M. Jean et de M. Goodman et je crois très important, lorsqu'on parle de communication, de ne pas oublier que les épouses de guerre et leurs enfants sont des citoyens canadiens. La communication est très importante.

    J'ai une amie qui est infirmière. Elle m'a dit hier qu'en milieu hospitalier, tous les documents destinés aux patients devaient être compréhensibles pour une personne n'ayant qu'une 4e année de scolarité. Si vous voulez trouver quelque chose sur les épouses de guerre dans le site Web de CIC, tout d'abord, il faut que vous sachiez comment faire une recherche en inscrivant les mots entre guillemets. Il faut inscrire les mots « épouses de guerre  » entre guillemets pour pouvoir aboutir aux documents que vous recherchez.

    La semaine dernière, j'ai rencontré Patricia Birkett, la registraire de la Citoyenneté, qui m'a promis qu'il y aurait un lien sur le site Web. Je sais que M. Jean et M. Goodman en ont parlé. Ce n'est pas encore fait. Je ne dis pas que je m'attendais à ce que ce soit là ce matin…

    Si, en fait, je m'attendais à ce que ce soit là ce matin. Cela fait une semaine. Je pense que cela laissait suffisamment de temps pour ajouter un lien dans un site Web. Dès mon retour à Fredericton, je vais ajouter un lien dans mon propre site Web. Ce n'est pas difficile à faire et les gens du ministère sont payés beaucoup mieux que moi. Je ne suis pas payée pour faire ce travail.

    Deuxièmement—je réponds seulement à des questions qui ont été soulevées—je constate qu'on a beaucoup insisté sur la date du 1er janvier 1947. Les épouses de guerre et leurs enfants continuaient d'arriver le 31 mars 1948. Que faites-vous de ces femmes et de leurs enfants?

    Troisièmement, en ce qui concerne l'obligation morale d'accorder la citoyenneté, M. Jean a déclaré tout à l'heure que ces personnes étaient comme toutes les autres. Je ne suis pas d'accord. Les épouses de guerre ne sont pas comme toutes les autres personnes. Il s'agit d'un groupe de citoyens bien particuliers qui sont arrivés au Canada parrainés par le gouvernement canadien. Le premier ministre Mackenzie King ne tarissait pas d'éloges à l'égard des épouses de guerre, le 28 août 1946, lorsqu'il s'est réjoui de voir arriver au pays ces nouveaux citoyens, ces petits bébés aux joues roses, ces nouveaux citoyens canadiens. Le premier ministre de notre pays ne tarissait pas d'éloges à l'égard des épouses de guerre.

    Je dirais que ce sont des personnes différentes des autres Canadiens. En fait, je ne connais pas d'autres groupes d'immigrants—pas récemment en tout cas—à qui ont ait fait l'honneur de dédier une enveloppe commémorative comme cela a été fait dimanche. Postes Canada a émis un pli commémoratif en l'honneur des épouses de guerre canadiennes. Je le sais, car j'ai apporté mon aide aux Postes. Si cela a été fait, c'est parce que ces femmes sont spéciales. Elles ne demandent pas à être traitées différemment des autres, mais elles ne veulent pas qu'on leur dise, à elles et à leurs enfants, qu'elles n'ont pas la citoyenneté canadienne.

  +-(1220)  

    C'est un problème de communication. Il y a une connexion qui ne se fait pas à Citoyenneté et Immigration Canada. Toutes les personnes dont je vous ai cité le nom se sont fait répondre qu'elles n'avaient pas la citoyenneté canadienne, alors je ne suis pas d'accord pour dire que ce sont des cas isolés. Je regrette, mais il ne s'agit pas de cas isolés. Cela se produit constamment et le problème ne date pas d'hier, mais ces femmes ont souffert en silence.

    Quatrièmement, je m'inquiète du sort des enfants nés hors mariage, ce qui me ramène à ce qu'a dit M. Clavet au sujet des enfants qui recherchent des renseignements sur leur père dans la section des archives personnelles des Archives nationales, à Ottawa. Mon livre, Voices of the Left Behind, porte sur cette question, et c'est un sérieux problème.

    La Loi sur la protection des renseignements personnels est toujours invoquée pour empêcher ces enfants d'avoir accès au dossier militaire personnel de leur père. C'est une situation qui ternit énormément la participation du Canada à la Seconde Guerre mondiale. Il y a 30 000 de ces enfants dits « illégitimes »—une expression qui n'est plus utilisée—, qui ont été considérés comme des bâtards pendant leur enfance et qui ne peuvent pas obtenir des renseignements sur leur père pour établir s'ils possèdent des droits. On leur a complètement fermé la porte.

    C'est un problème distinct de celui des enfants des épouses de guerre. Le père et la mère des enfants des épouses de guerre étaient mariés.

    En cinquième lieu, on s'est demandé pourquoi cette question n'a pas été soulevée plus tôt. Si on en parle maintenant, c'est parce que nous célébrons le 60e anniversaire de la fin de la guerre. Les médias sont à l'affût de bonnes histoires.

    C'est aussi parce que je connais la journaliste de la Presse canadienne à Fredericton. Elle m'a téléphoné mercredi soir, la veille de vos audiences à Fredericton pour me dire : « Melynda, vous comparaissez devant un comité demain matin. C'est à quel sujet? » Je lui ai répondu que j'ignorais que j'étais censée comparaître devant le comité. Je n'en avais pas été informée. Je peux comprendre qu'il s'agissait d'une erreur, mais il semble que…le destin en a décidé autrement. Je suis donc très contente que la journaliste de la Presse canadienne, Chris Morris, m'ait appelée pour me questionner à ce sujet. C'est une simple erreur; je ne vous reproche rien, Bill. Ce genre de choses arrivent. Je me réjouis simplement qu'elle m'ait appelée parce qu'autrement nous ne serions pas en train de discuter ici aujourd'hui et les choses auraient pris une tournure différente.

    Cette question a retenu l'attention suite au travail réalisé par un tas de gens différents. Les Canadiens « perdus » parlent des épouses de guerre depuis des années et le problème a été porté à notre attention parce que ces enfants, qui sont maintenant dans la soixantaine, en ont assez. Ils n'acceptent plus de souffrir en silence, comme l'ont fait leurs mères et avec l'Internet ils peuvent maintenant communiquer rapidement avec les gens.

    Le problème a toujours existé, car ces 43 454 épouses de guerre… Qu'est-ce qu'une preuve de citoyenneté? J'avais moi-même du mal à le comprendre. Je suis née à Bathurst, au Nouveau-Brunswick. Quelle est ma preuve de citoyenneté? Je sais que c'est mon certificat de naissance, mais si vous n'êtes pas né au Canada, quelle est votre preuve de citoyenneté? On ne sait pas trop. Il suffit de dire aux gens : « C'est bien simple, c'est un certificat de citoyenneté ». Il n'est pas nécessaire de compliquer les choses inutilement. Pourquoi est-ce aussi compliqué? Tout doit être compliqué. Simplifiez les choses.

    Incluez dans le site Web un lien concernant les épouses de guerre, un texte de deux paragraphes pour expliquer ce que vous faites. Si vous faites partie de telle catégorie, vous vous rendez là. Si vous faites partie de tel autre groupe, allez là-bas.

    En sixième lieu, il y a le site Web et les différents outils. Oui, il serait bon que les députés fassent tout ce qu'ils peuvent. D'après mon ami Kevin Ross, qui est le fils d'une épouse de guerre, il y aurait des choses à faire à un certain nombre d'endroits. Par exemple, on pourrait placarder des affiches à la Légion, distribuer des circulaires et publier des annonces dans le magazine de la Légion. C'est assez évident.

    Pour ce qui est des Archives nationales, comme je l'ai mentionné, il faudrait permettre aux enfants de guerre d'avoir accès aux dossiers.

    Huitièmement, le gouverneur en conseil peut accorder la citoyenneté. Je voudrais en savoir plus à ce sujet. J'aimerais obtenir ces renseignements afin de pouvoir les communiquer aux personnes qui me posent la question.

  +-(1225)  

    Neuvièmement, il y a les listes de passagers qui prouvent votre admission au Canada. J'ai accès à ces renseignements. Ils sont très difficiles à obtenir, c'est le moins qu'on puisse dire, et comme l'a déclaré M. Inky Mark, pour pouvoir les obtenir… Je dirais quant à moi qu'on a l'impression d'être en train d'arracher des dents. C'est très difficile.

    J'aurais bien d'autres choses à dire. Je pourrais continuer pendant des heures. C'est un sujet intéressant. Je m'en abstiendrai, car je sais que vous avez sans doute d'autres choses plus importantes à faire aujourd'hui. Je dirais simplement que les épouses de guerre sont des personnes importantes qui occupent une place spéciale dans l'histoire du Canada et qui méritent d'être traitées avec beaucoup d'affection. Leurs enfants, qui ont maintenant aux alentours de 65 ans, le méritent également car ils ont hérité de cette histoire et du symbole que représentent leurs parents.

    C'est tout ce que je dirai pour aujourd'hui.

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Jarratt.

    Nous allons poser nos questions très rapidement car nous manquons de temps. Si possible, limitez-vous à trois minutes environ.

    Monsieur Mark.

+-

    M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

    Merci d'être venue. Je crois que notre pays a une dette envers vous pour le travail professionnel que vous avez réalisé sur ce sujet.

    Vous avez raison de dire que cela 60 ans trop tard. Peut-être qu'en effet, sans cet anniversaire, cette question ne retiendrait pas autant l'attention de la presse. Les épouses de guerre ne sont pas des personnes ordinaires. Un bon nombre d'entre nous ont grandi aux côtés d'enfants d'épouses de guerre, surtout dans les petites localités comme celle où j'ai grandi. Ces personnes ont énormément apporté à notre pays. Il est sidérant que cette question puisse encore se poser 60 ans après la guerre.

    J'ai plusieurs questions. J'aimerais vraiment que vous répondiez à la question suivante. Pour la plupart d'entre nous, il y a une façon bien simple de résoudre ce problème. S'il est si difficile à régler est-ce pour une question de politique ou à cause de la bureaucratie?

+-

    Mme Melynda Jarratt: Je ne pense pas que ce soit une question de politique, mais plutôt une question de bureaucratie. Je pense que la bureaucratie est incapable de régler ce qu'elle appelle des cas uniques ou des cas isolés. Ils n'ont rien d'unique étant donné qu'ils sont nombreux. J'en reçois beaucoup. Je peux citer tout de suite 10 cas uniques si quelqu'un veut se donner la peine de les examiner. Ils sont, certes, intéressants et compliqués comme l'est la vie des gens. À mon avis, c'est un problème bureaucratique, mais qui n'est pas impossible à surmonter.

+-

    M. Inky Mark: Devrions-nous adopter une solution simple, peut-être établir certaines conditions et reconnaître des droits acquis à ces personnes? Ne serait-ce pas la façon la plus simple de régler la question au lieu d'obliger les gens à suivre un processus qui leur impose le fardeau de la preuve? C'est interminable et n'aboutit nulle part.

+-

    Mme Melynda Jarratt: Tous les enfants qui sont venus ici dans le cadre du rapatriement des épouses de guerre ont leur nom sur les listes de passagers. J'ai ces listes où je les ai vues et elles ne sont pas impossibles à obtenir. Leur mère était une épouse de guerre.

    Si quelqu'un conteste le fait qu'une femme soit une épouse de guerre, c'est facile à vérifier. Tous les journaux du pays ont réservé un accueil chaleureux à toutes les épouses de guerre et ont publié leurs noms. On se moquait bien de la protection des renseignements personnels à l'époque. Il n'y avait pas de loi sur la protection des renseignements personnels. Les journaux ont publié le nom de chaque femme, sa destination, le nom de son mari et le nom de ses enfants pour annoncer la bonne nouvelle. On était à la recherche de bonnes nouvelles dans le Canada de l'après-guerre. L'arrivée de ces bébés et de ces femmes, de ces nouveaux citoyens était considérée comme une bonne nouvelle.

    Ces renseignements ne sont pas difficiles à trouver; il suffit que quelqu'un se charge de ce travail.

  +-(1230)  

+-

    M. Inky Mark: Merci.

+-

    Le président: Merci.

    Madame Faille.

[Français]

+-

    Mme Meili Faille: On a soulevé ce sujet l'autre soir. Quelle sont les conditions financières des personnes qui font appel à vos services? Les personnes qui se sont présentées à moi ne sont pas très fortunées et trouvent excessifs les montants demandés. J'aimerais que vous nous en donniez une idée, parce que cela touche des dossiers de ma circonscription. Comme je le disais plus tôt, je demeure près de l'hôpital Sainte-Anne pour les anciens combattants, ce qui fait que les familles de plusieurs d'entre eux se trouvent dans ma circonscription. Après la parution d'un article dans un journal, cinq personnes se sont présentées à mon bureau. Combien y en a-t-il? Vous l'avez établi, il y en a plusieurs. J'aimerais connaître les conditions financières de ces personnes, parce qu'elles avancent en âge et que, compte tenu des histoires que l'on entend, il se peut qu'elles aient été défavorisées. Décrivez-nous leurs conditions.

[Traduction]

+-

    Mme Melynda Jarratt: Je peux vous dire qu'au Canada, le travailleur moyen gagne moins de 25 000 $ par année et ce n'est pas tout le monde qui possède un REER et tout ce qu'il faut pour se protéger. Si on vous demande de fournir la preuve de votre citoyenneté, cela peut vous obliger à récupérer des documents historiques en Angleterre ou en Hollande.

    Chacun de ces documents coûte cher à obtenir et cela peut coûter des centaines de dollars. Jan Walker a dépensé 1 500 $. En fait, j'ai ses reçus qu'elle a conservés dans l'espoir qu'un jour quelqu'un la rembourserait, car elle était ulcérée. Je connais une autre personne qui n'a pas les moyens de dépenser 200 $… Une dame qui a le cancer vient de m'écrire; Susan Bishop a appris qu'elle avait le cancer et s'inquiète beaucoup au sujet de sa citoyenneté, car elle a de bonnes raisons de vouloir régler sa situation. Je n'ai pas à vous expliquer pourquoi.

    Comme vous le savez, 200 $ ou 300 $, c'est beaucoup d'argent pour ces personnes et les coûts sont donc souvent prohibitifs. J'aimerais que les droits exigés soient annulés pour les épouses de guerre et leurs enfants.

    Après tout, on les a fait venir ici. Leur situation est très différente et très particulière. Elle ne se compare pas à celle des autres Canadiens. Il n'y a aucune autre situation qui se compare à la leur. À ma connaissance, le phénomène des épouses de guerre ne s'est jamais répété dans l'histoire de l'immigration canadienne.

    Alors en effet, pourquoi pas? Étant donné la situation financière de la plupart des gens, s'ils n'ont pas les moyens de payer, pourquoi ne pas leur permettre d'obtenir ce service gratuitement? Pourquoi pas?

    Les riches peuvent payer, peu leur importe d'avoir à payer 75 $, 25 $, 55 $ et 105 $. Je sais que pour moi ce serait prohibitif. Je n'en aurais pas les moyens.

+-

    Le président: Monsieur Siksay.

+-

    M. Bill Siksay: Merci, monsieur le président.

    Merci, madame Jarratt, d'être venue de nouveau témoigner et d'avoir été aussi claire et aussi directe que la dernière fois. Cela nous est très utile.

    Je vais vous poser la même question qu'à M. Jean. Qu'est-ce qui a changé à la suite de l'annonce que le gouvernement a faite la semaine dernière? Cela a-t-il changé quoi que ce soit? Si j'étais très cynique, je dirais qu'apparemment, la seule chose qui ait changé est que vous pouvez écrire « épouse de guerre » sur votre enveloppe pour qu'elle aboutisse dans une pile spéciale à Sydney. Il semble que les exigences soient exactement les mêmes qu'avant. Avez-vous constaté des changements suite à cette annonce récente?

+-

    Mme Melynda Jarratt: Je voudrais pouvoir dire que le ministère va aborder ces cas parfois très compliqués de façon un peu plus humaine. Oui, ils sont compliqués. Aucun de ces cas n'est facile à résoudre et ils sont nombreux. Ils sont très nombreux.

    Voilà un changement que je voudrais constater. Je ne l'ai pas encore fait, sauf dans le cas de Michael et Gerry Thompson, qui apparemment, vendredi après-midi, grâce à l'intervention de M. Telegdi et d'un certain nombre d'autres personnes, y compris moi-même, et de David Chaplin, qui a travaillé avec moi et a fait le maximum à partir d'Ottawa…

    David? Où est-il passé? Il est parti? Il va être bien fâché.

    Quoi qu'il en soit, David a réussi à pénétrer la bureaucratie et a dirigé l'attention sur ces cas très difficiles.

    Je vais simplement vous raconter ce qui s'est passé. Michael Thompson est le fiduciaire de son frère Gerry, qui touche des prestations d'invalidité de l'Ontario. En novembre, il a reçu une lettre disant qu'il était temps de revoir son dossier, qu'on avait constaté qu'il n'était pas né au Canada et qu'il devait donc fournir la preuve de sa citoyenneté canadienne. Étant le fiduciaire de son frère, Michael s'est chargé des démarches pour obtenir la preuve de sa citoyenneté. Il a contacté CIC et environ un mois plus tard il a reçu une lettre disant : « Merci de votre demande, vous recevrez une réponse dans 10 mois ». C'était en janvier.

    Il y a deux semaines, en fait le jour de ma comparution devant le comité, à Fredericton, le 21 avril—il y a seulement deux semaines de cela?—il a reçu une lettre de l'administration des pensions d'invalidité de l'Ontario lui disant : « Nous vous avons accordé un délai suffisant. Vous n'avez pas produit de certificat. Vos prestations prendront fin le 6 mai ». Telle est la réalité. Je peux vous dire que ce monsieur, M. Gerry Thompson, se retrouverait à la rue s'il n'avait pas pu se faire aider par son frère. Voilà les conséquences. Voilà la conséquence directe de ce genre de choses et nous ne voulons pas que ce monsieur se retrouve à la rue. Nous ne voulons pas que qui que ce soit se retrouve à la rue, à cause d'une erreur bureaucratique.

    Il a effectivement la citoyenneté canadienne; ses papiers ont été remplis et il recevra son certificat cette semaine. Alors merci. Les gestes humanitaires sont vivement appréciés. Il en faudrait davantage.

    Pour ce qui est du reste, il faut inclure le lien dans le site Web de CIC. C'est assez évident. Il faut indiquer non pas « preuve de citoyenneté », mais « épouse de guerre ». Je ne serai pas satisfaite tant que ce ne sera pas fait. Et il faut inclure dans ce lien les renseignements nécessaires, c'est-à-dire peut-être deux paragraphes expliquant la procédure à suivre et qui contacter, une personne qui pourra dire : « Je comprends votre situation ». Et fournissez-moi ce renseignement afin que je puisse le diffuser sur mon propre site Web qui regroupe tous les renseignements concernant les problèmes des épouses de guerre. C'est ce qui s'est passé. Je ne m'attendais pas à ce que cela se passe ainsi, mais c'est ce qui s'est passé au fil des ans.

    Qu'est-ce qui a changé? Le ministère semble dire qu'il va faire quelque chose. Nous verrons bien si c'est vrai. Les 20 997 enfants et les je-ne-sais-combien d'épouses de guerre qui seront confrontés à la bureaucratie lorsqu'ils feront une demande en seront juges. Je les encourage. Nous avons également le sénateur Dallaire qui a dit clairement qu'il voulait que cette question soit réglée une fois pour toutes.

    Qu'est-ce qui a changé? Une certaine attention est portée à ce problème.

  +-(1235)  

+-

    Le président: Nous verrons si nous pouvons faire comparaître le sénateur Dallaire à un moment donné au sujet de cette question.

    Je tiens à vous remercier infiniment d'être venue.

    Je vous ai demandé, la dernière fois, d'apporter quelques-uns de vos livres…

+-

    Mme Melynda Jarratt: Je suis désolée--

+-

    Le président: ... car c'est un ouvrage important que devraient avoir les membres du comité.

    David?

+-

    L'hon. David Anderson: Je voudrais vous poser une question, si possible, car vous avez mentionné la difficulté d'obtenir des preuves en disant que les listes des passagers des services d'immigration de la Défense nationale étaient faciles à obtenir et que chaque nom y figurait. C'est ce que vous avez dit, je crois.

+-

    Mme Melynda Jarratt: Oui.

+-

    L'hon. David Anderson: Vous avez dit également qu'il était facile d'obtenir les articles parus dans les journaux. Avez-vous eu des cas où Citoyenneté et Immigration Canada a rejeté ce type de preuves, ces preuves faciles à obtenir?

+-

    Mme Melynda Jarratt: Non, je n'ai pas vu de cas où nous avons pu présenter ces documents en preuve. On m'a dit que ce ne serait pas suffisant.

+-

    L'hon. David Anderson: Vous n'avez aucun cas précis où le ministère a rejeté ces preuves?

+-

    Mme Melynda Jarratt: Non, il ne les a pas rejetées, car si vous ne répondez pas à ses exigences en produisant un certificat de naissance ou un certificat de mariage, apparemment, un article de journal de 1946 avec la photo d'une maman souriante qui tient le bébé dans ses bras et qui indique le nom de la mère et son lieu de destination n'est pas suffisant. Je n'ai vu aucun cas où ces preuves ont été rejetées, parce que les gens savent qu'il ne vaut même pas la peine d'essayer. C'est inutile. Toutefois, lorsqu'il n'y a pas d'autres preuves faciles à obtenir, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas utiliser celles-là. Qui aurait falsifié le Telegraph-Journal, de Saint John au Nouveau-Brunswick, en 1946? Il faudrait vraiment n'avoir rien d'autre à faire.

+-

    L'hon. David Anderson: Oui, mais le problème c'est que le gouvernement a la responsabilité de traiter tous les citoyens équitablement. Je comprends que vous vouliez placer un groupe de citoyens dans une catégorie à part, pour les raisons que vous avez invoquées, mais cela pose quand même le problème de l'équité et de l'égalité.

    Si ces dossiers existent, les dossiers d'immigration de la Défense nationale, les fiches d'établissement—oublions les journaux car vous pensez qu'ils peuvent constituer des preuves douteuses—je me demande alors pourquoi Immigration et Citoyenneté Canada ne les a jamais acceptés ou utilisés. Il me semble que ces preuves devraient suffire pour obtenir un document, que ce soit un passeport ou des prestations.

    Je voudrais simplement que vous me confirmiez qu'il est possible d'obtenir ces dossiers, qu'ils sont suffisamment clairs et qu'à votre connaissance Citoyenneté et Immigration Canada ne s'en est jamais servi.

  -(1240)  

+-

    Mme Melynda Jarratt: Ils sont disponibles; ils peuvent être obtenus aux Archives nationales. C'est ce qu'on appelle des listes nominales. Chaque passager, chaque femme et chaque enfant qui a été transporté au Canada par le Bureau des femmes canadiennes entre le 15 août 1944 et le 17 janvier 1947 est inscrit sur une liste de passagers, sur ce qu'on appelait une liste nominale. Cela indique le nom du mari; son numéro matricule de soldat, la circonscription d'où il venait, l'adresse à laquelle résidait l'épouse dans son pays d'origine; sa destination, y compris le nom et l'adresse de la personne chez qui elle allait; le nom de l'enfant; la date de naissance de l'enfant; le nom complet de l'épouse. Autrement dit, tout est là.

    Il s'agit de leur fiche d'établissement. En l'absence d'autres documents, cela devrait certainement prouver que cette femme est venue au Canada avec son bébé.

+-

    L'hon. David Anderson: Encore une fois, je suis d'accord avec vous et c'est là où je veux en venir. Pour ce qui est des personnes que vous avez citées et qui se sont fait dire qu'elles n'avaient pas la citoyenneté canadienne, toutes ces personnes qui ont maintenant 60 ans ou plus, ont-elles encore de la difficulté ou non à établir qu'elles étaient ce bébé dont le nom figure sur la liste?

+-

    Mme Melynda Jarratt: Quand je dis que les listes des passagers sont facilement accessibles, elles le sont pour moi car je sais où les trouver. Mais je ne suis qu'une petite dame de Fredericton qui examine les microfilms pendant deux ou trois heures à la fois après le travail, le jeudi soir ou le samedi après-midi. Il m'est impossible de fournir tous ces renseignements à toutes ces personnes.

+-

    Le président: Je vais vous interrompre, car je vous ai demandé de vous limiter à trois minutes. Vous en êtes maintenant à près de cinq minutes. Nous allons donc conclure. Je ne peux pas vous laisser continuer.

    Je tiens à vous remercier infiniment, madame Jarratt, d'être venue. Comme je l'ai dit, nous voudrions recevoir votre livre. Merci d'avoir contribué à attirer l'attention sur ce dossier, car c'est important. Bien entendu, nous allons surveiller le ministère de très près à cet égard. J'espère qu'à un moment donné il fera appel à vos connaissances en la matière, car je sais que le comité le fera.

    Merci beaucoup.

+-

    Mme Melynda Jarratt: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes.

+-

    M. Bill Siksay: Monsieur le président, pourriez-vous signaler au comité que j'espère que nous examinerons plus à fond la question des enfants de la guerre, des enfants dits « illégitimes » de nos soldats. Si le comité pouvait poursuivre ses travaux sur cette question, je crois que ce serait très important.

-

    Le président: Nous allons certainement le faire. Et j'ai demandé à Mme Jarratt de mettre son livre à notre disposition, car il contient des histoires bouleversantes au sujet des personnes dont vous parlez. J'espère que nous serons en mesure d'étudier cette question de façon beaucoup plus approfondie.

    Merci beaucoup.

    Je vais suspendre la séance, car nous allons nous réunir à huis clos.

    [La séance se poursuit à huis clos]