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Bonjour à tous. Nous sommes le mardi 30 janvier 2007 et il s'agit de la 38
e séance du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.
Je tiens à profiter de l'occasion pour souhaiter à tous un bon retour. J'espère que vous avez tous passé un joyeux Noël et que vous avez profité des vacances que vous avez passées avec votre famille et vos amis.
Je tiens à souhaiter une bienvenue toute spéciale à Mme Lalonde qui a eu un long —
Des voix: Bravo, bravo!
Le président: Je puis vous assurer que nos prières et nos meilleurs voeux ont été avec vous, madame. Mme Lalonde siège à ce comité depuis longtemps et est un membre très précieux du comité; nous lui souhaitons donc un bon retour.
En ma qualité de président, je tiens également à souhaiter la bienvenue aux nouveaux membres du Comité des affaires étrangères et du développement international. C'est bon d'avoir du sang neuf. Je peux dire avec une certaine fierté que ce comité a toujours entretenu de très bonnes relations de travail avec tous les membres de tous les partis. Au cours des dernières années, nous avons essayé de travailler par consensus et je crois que notre travail en fait foi.
Nous poursuivons notre étude sur le développement démocratique. Il s'agit de la principale étude du comité sur le rôle du Canada à l'appui du développement démocratique dans le monde. La semaine prochaine, notre comité se rendra à Washington et à New York dans le prolongement de notre voyage de l'automne dernier à Oslo et dans d'autres destinations européennes. Notre comité fait face à un horaire passablement éprouvant à son retour et pourtant je suis sûr que nous accordons tous une très grande valeur à ce que nous voyons et apprenons et aux expériences que nous vivons à l'occasion de ces voyages et lors de nos réunions ici comme comité.
Aujourd'hui, au cours de notre première heure, nous entendrons l'Association du Barreau canadien. Nous recevons Robin Sully, directrice du développement international, John Hoyles, chef de la direction, et William Goodridge, membre du Comité de développement international. Nous vous souhaitons la bienvenue ce matin.
Comme vous le savez, c'est la première fois que nous nous réunissons depuis la relâche. Votre témoignage de ce matin devrait certes nous aider dans notre étude étant donné que nous en apprendrons davantage sur l'importance du principe de la primauté du droit et les meilleures pratiques pour la promouvoir. Nous vous souhaitons la bienvenue et sommes impatients d'entendre votre exposé.
Monsieur Goodridge, je crois comprendre que vous avez un exposé et qu'ensuite, tous les membres de votre groupe répondront aux questions des membres du comité.
Bienvenue.
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Comme le savent la plupart d'entre vous, nous sommes une organisation nationale qui représente environ 37 000 membres. Nos membres sont des avocats, des juges, des notaires du Québec et des professeurs de droit de tout le Canada. Nous avons accumulé beaucoup de savoir-faire en développement international.
Depuis 1990, l'Association du Barreau canadien a réalisé des projets de réforme législative et judiciaire et veillé au renforcement des capacités dans 29 pays de l'Asie, de l'Afrique, de l'Europe centrale et des Caraïbes. Dans tous ces projets, nous préconisons notre attachement à l'accès à la justice par le biais des valeurs d'une profession juridique indépendante, d'une magistrature impartiale, de la primauté du droit et de la dignité de la personne.
Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles le Canada devrait promouvoir la démocratie à l'étranger : amélioration des débouchés économiques, intérêts en matière de politique stratégique étrangère et même renforcement de la sécurité nationale. Mais, de notre point de vue, la raison la plus importante pour laquelle le Canada doit appuyer la démocratie est d'accroître le développement — c'est-à-dire réduire la pauvreté et la faim, soutenir les droits humains fondamentaux, améliorer la santé et la sécurité et protéger l'environnement.
Par rapport aux nombreuses questions que vous avez énoncées, nous allons aujourd'hui nous attarder sur trois en particulier : la nature que doit prendre l'appui du Canada au développement démocratique, les leçons tirées des expériences menées à l'appui du développement démocratique et la question de savoir si le Canada peut et devrait faire davantage.
Concernant la nature du soutien du Canada, nous estimons que la meilleure façon de promouvoir la démocratie à l'étranger est de promouvoir une bonne gouvernance dont la primauté du droit constitue un élément essentiel. Sans cette dernière, la démocratie ne peut être durable. Les deux concepts sont inextricablement liés, et un pays ne peut améliorer son sort à long terme sans une bonne gouvernance.
Qu'est-ce qu'une bonne gouvernance? Elle comporte de nombreuses caractéristiques. Elle a des valeurs spéciales, des règles, et peut-être ce qui est le plus important, des institutions qui prennent des décisions et exercent le pouvoir. Une bonne gouvernance favorise la participation et est à l'écoute des citoyens; elle est transparente, responsable, juste et efficace. Il y a beaucoup d'adjectifs, mais tous sont importants pour le concept.
La valeur de la démocratie, c'est qu'elle constitue la meilleure forme de gouvernement qui incarne toutes ces caractéristiques, mais à elle seule, elle ne suffit pas à créer une bonne gouvernance. Nous pouvons voir de nombreux exemples dans le monde où des élections justes et libres n'ont pas réussi à améliorer de façon magique le développement, faute d'une bonne gouvernance.
Une démocratie ne peut fonctionner sans primauté du droit. Par exemple, comment des élections pourraient-elles être considérées comme libres ou équitables si les règles électorales ne sont pas appliquées équitablement, justement et uniformément; ou si le mécanisme de votation n'est pas accessible au public ou encore si les différends relatifs à des irrégularités en matière de scrutin ne sont pas réglés par des tribunaux et des juges indépendants? Donc, dans sa forme la plus élémentaire, la primauté du droit signifie que tous sont assujettis à la même loi — les représentants du gouvernement, les législateurs, les juges, les entreprises et les particuliers. Mais cela signifie aussi que le gouvernement est lié par la loi. Tous les actes du gouvernement doivent être autorisés par la loi. La règle de droit signifie que les lois doivent être claires, cohérentes et stables et appliquées de manière prévisible et sans arbitraire, corruption, copinage ou favoritisme.
Cela dit, je vais maintenant passer à la deuxième question que nous aimerions aborder : les leçons tirées des expériences menées à l'appui du développement démocratique. Dans notre exposé écrit, nous avons énuméré certaines des leçons que l'Association du Barreau canadien a apprises comme réalisateur d'un projet de réforme juridique et judiciaire, si bien que ce matin je ne vais évoquer que quelques exemples. Le rapport comporte plus de détails.
La première expérience... Dans chacun de nos projets, nous avons eu besoin d'un engagement et d'une responsabilité à l'échelle locale pour être efficaces. Le Canada doit appuyer des programmes qui sont sensibles aux besoins locaux et sont pris en charge à l'échelle locale. À notre avis, sans cela, les programmes sont voués à l'échec. Il faut également faire participer les intervenants locaux à la planification, à la mise en oeuvre et à la surveillance des programmes. D'après notre expérience, l'approche la plus fructueuse est celle où les acteurs et décideurs locaux sont habilités à faire des choix. Un élément important de notre aide doit donc viser le renforcement des capacités. Amener les citoyens à exprimer leur point de vue dans leur propre pays est un moteur de changement beaucoup plus puissant à l'échelle nationale que d'avoir des groupes de défense étrangers ou un gouvernement étranger tenter de faire la même chose.
À l'engagement et à la responsabilité à l'échelle locale se greffe la nécessité d'une coopération régionale. Je vais vous donner un exemple que nous avons connu par le biais de l'Association du Barreau canadien. En Afrique de l'Est, l'Association du Barreau canadien travaille avec les barreaux de l'Ouganda, de la Tanzanie et du Kenya depuis 1998. Une partie du travail y a consisté à renforcer les capacités de leurs ordres d'avocats de sorte qu'ils puissent promouvoir plus efficacement, entre autres choses, la réforme du droit.
Les ateliers de développement des capacités régionales donnés par l'Association du Barreau canadien ont attiré des participants de l'Afrique de l'Est et des partenaires de l'Afrique australe. Nos partenaires ainsi réunis ont pu partager leurs expériences, apprendre des uns des autres comme ils ont appris des Canadiens et comme nous avons également appris d'eux. Grâce à ces ateliers, l'Association du Barreau canadien a facilité l'établissement de relations qui ont conduit à une collaboration suivie entre ces barreaux africains. L'approche régionale leur confère une voix plus forte que ce qu'ils pourraient obtenir individuellement.
En 2005, les barreaux de l'Afrique de l'Est et de l'Afrique australe se sont unis et ont aidé le Barreau du Zimbabwe à présenter une plainte aux termes de la Charte africaine des droits de la personne. La plainte concernait des amendements à la Constitution du Zimbabwe qui violaient le droit à une protection égale de la loi et le droit à la liberté de mouvement. Plus particulièrement, dans ce cas, il s'agissait d'une loi qui autorisait la confiscation des passeports par des résidents du Zimbabwe.
La deuxième leçon que l'Association du Barreau canadien a apprise, c'est que nous ne pouvons pas supposer qu'un seul modèle donnera les meilleurs résultats. Il existe de nombreux modèles différents d'un système juridique et judiciaire, et des modèles différents peuvent être efficaces en différents lieux, à des époques différentes. Par exemple, dans la plupart des pays, y compris le Canada, la grande majorité des gens ne s'adressent qu'aux instances inférieures du système judiciaire. En fait, la plupart des gens renoncent à recourir aux tribunaux et recourent à d'autres types de règlement des différends. Paradoxalement, à l'heure actuelle, la majorité de l'aide fournie au système judiciaire par le Canada vise les cours suprêmes, les ministères de la Justice et d'autres institutions qui n'ont que très peu d'influence, voire aucune, sur la vie des pauvres et des défavorisés.
La troisième leçon que l'Association du Barreau canadien a apprise, c'est que la réforme juridique ne peut réussir sans l'appui de défenseurs acharnés dans le pays en cause. Dans certains cas, la meilleure approche, c'est quand l'appui vient du haut — c'est-à-dire par le biais d'un solide engagement politique et la collaboration avec les institutions publiques et les ministères. Dans d'autres cas, la société civile, ou l'approche dite « ascendante », est un meilleur point de départ pour l'engagement. À long terme, aucune de ces deux stratégies ne peut porter fruit sans l'engagement de tout un éventail d'acteurs. Les activités comme la formation des juges, l'amélioration des systèmes de gestion et la fourniture d'ordinateurs au système judiciaire n'auront qu'une incidence limitée si elles ne sont pas conjuguées à des approches « ascendantes ». Cette approche pourrait comporter une sensibilisation du public envers les droits, et une aide juridique pour faire appliquer ces droits.
Par conséquent, nous, les membres du Barreau canadien, recommandons que le Canada appuie davantage les partenaires de développement des ONG et de la société civile à l'étranger.
Je vais vous donner un exemple concret de raison pour laquelle il est si important de renforcer la société civile. En Chine, le système de justice pénale est encore riche en incidents de torture, de détention arbitraire et en refus d'application régulière de la loi. Les avocats de la défense en droit pénal sont sur la ligne de front de la défense des droits de la personne fondamentaux, et l'Association du Barreau canadien travaille actuellement avec l'Association de tous les avocats de la Chine afin de mobiliser ses membres et à les faire participer activement à une réforme du système de justice pénale et à la défense des droits.
L'Association de tous les avocats de la Chine s'inspire des connaissances qu'elle tire du système de justice canadien et des normes juridiques internationales, qu'elle a acquises grâce au projet de l'ABC, pour exhorter le gouvernement chinois à réformer en profondeur le système de justice pénale d'une façon qui aura des effets directs et positifs sur les droits de la personne. Elle a fait des propositions au gouvernement chinois pour qu'il réforme la procédure pénale et améliore la protection des suspects et des défendeurs en vertu du droit pénal. L'association est également en train d'élaborer des lignes directrices sur la défense contre la peine de mort afin de créer un rôle pour les avocats de la défense afin que les condamnations à la peine de mort soient réexaminées par les tribunaux supérieurs.
Ainsi, les avocats d'aujourd'hui en Chine font partie d'une nouvelle catégorie d'avocats qui utilise le système juridique du pays et se bat pour la justice sociale. Ils génèrent un changement petit, mais significatif et réalisent des victoires significatives qui étaient inimaginables il n'y a que quelques années encore.
La quatrième leçon que nous retenons, c'est que nous devons conserver un regard à long terme. L'instauration du principe de la primauté du droit au Canada ne s'est pas faite du jour au lendemain. Nous ne devrions pas nous attendre à plus dans les autres pays, particulièrement dans ceux qui ont connu des conflits ou des défis sociaux, politiques et économiques. Le renforcement des valeurs prend beaucoup plus de temps que le transfert de compétences technocratiques. Comme l'incidence des activités qu'appuient les donateurs pourrait ne pas être manifeste avant 10 ans sinon plus, la planification des projets et les attentes doivent être ajustées en conséquence. Nous devons fixer des objectifs réalistes et nous assurer que la mesure du rendement les reflète adéquatement.
La dernière leçon que nous retenons, c'est que nous devons concevoir de meilleures techniques d'évaluation. Il est facile d'évaluer l'incidence d'un nouveau pont ou d'un nouveau barrage dans un pays en développement, mais il est difficile d'évaluer l'incidence de projets de réforme de la justice ou de l'appareil judiciaire. L'art et la science de la mesure du rendement doivent être améliorés. Un bon point de départ consisterait à partager davantage les expériences entre donateurs et organismes d'exécution.
Bref, d'après ce que nous retenons de nos expériences, le sentiment d'appartenance et la participation locaux sont importants, nous avons besoin d'approches descendantes comme d'approches ascendantes et nous avons besoin de plans stratégiques à long terme ainsi que de meilleurs outils d'évaluation.
Prenons maintenant la troisième question que nous souhaitons aborder, c'est-à-dire si le Canada peut et devrait en faire plus. Où devrait-il concentrer ses efforts?
Le Canada a beaucoup à offrir. Nous sommes une démocratie parlementaire dotée d'un système fédéral de gouvernement parlementaire et de traditions démocratiques solides. Notre Constitution, y compris notre Charte, est prise pour modèle par les autres pays. Notre système de justice, qui conjugue la common law avec le droit civil, est tenu en haute estime. Nos juristes sont très respectés dans le monde. L'expérience du Canada des processus participatifs de réforme de la justice civile et criminelle, des enjeux sur l'enregistrement des terres et des titres ancestraux et des enjeux liés à la justice réparatrice sont tous des exemples de l'expertise que nous pouvons partager avec le monde. En outre, les organisations canadiennes ont démontré leur capacité de travailler efficacement dans un domaine qui nécessite une grande sensibilité politique et culturelle. Bref, il serait honteux de gaspiller ces atouts et de ne pas les utiliser pour promouvoir la démocratie et la primauté du droit dans le monde.
Quant à la façon dont nous pouvons en faire plus, nous croyons qu'il n'y a aucune organisation existante ou nouvelle qui peut ou qui devrait tout faire. La promotion de la démocratie, le renforcement de la primauté du droit et le soutien à la bonne gouvernance nécessitent beaucoup de choses différentes dans beaucoup de domaines différents.
Diverses institutions existantes de très grande qualité excellent dans tous les domaines dans lesquels nous devons travailler. Par conséquent, nous croyons que la meilleure façon de faire est d'accroître le pouvoir de ces organismes canadiens de jouer un rôle international accru. Cela comprend d'améliorer les connaissances et l'expertise au sein du gouvernement canadien pour produire des programmes plus efficaces.
Bien que le Canada ait le potentiel d'en faire plus dans ce domaine, les institutions du pays sont nettement restreintes par le manque de ressources. Alors que le besoin de ressources et d'expertise dans le domaine ne cesse de croître, le financement des organisations canadiennes a stagné ou baissé ces dernières années. Le manque de ressources rend impossible la mise en oeuvre des pratiques exemplaires dont j'ai déjà parlé, comme l'amélioration de la recherche et de l'évaluation, le partage des connaissances et l'engagement stratégique.
Je vous remercie tous de votre temps.
Bien entendu, notre mémoire écrit est plus détaillé, mais nous sommes ici pour répondre à toutes vos questions de notre mieux.
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Je peux peut-être commencer par les tribunaux.
Ce qui se passe à Arusha est très intéressant, parce qu'on dépense des millions et des millions de dollars pour ce tribunal, mais qu'au tribunal local d'Arusha, on ne peut pas obtenir de décision écrite, parce qu'il n'y a pas de papier. Les avocats doivent apporter leur propre papier pour une obtenir une décision.
Le fossé qui existe entre les ressources mises à la disponibilité des tribunaux internationaux et celles qu'on trouve dans l'environnement local est une immense question. La plupart des gens qui travaillent dans les tribunaux internationaux viennent de partout dans le monde, donc il n'y a pas de centre d'intérêt particulier. Bien entendu, il y a des gens qui viennent de l'Est africain, mais ils viennent de partout en Afrique, et certains avocats de la défense viennent même du Canada, en fait.
Il y a donc absolument des ressources et de la formation. Il y a des ressources bibliothécaires qui pourraient être très utiles. Nous devrions certainement essayer de les conserver, si possible.
Nous dirions toutefois que le plus important est de ne pas perdre l'objectif de vue. Il y a aussi tout le problème du lien entre ces tribunaux et les instances nationales. Il y a des problèmes à Arusha quant à la relation qui existe entre ce tribunal et les instances nationales du Rwanda.
Cela dit, je pense qu'en gros, nous voulons surtout renforcer les capacités, non seulement avec les avocats, mais également avec les juges et tous les acteurs du pays lui-même. Bien que nous ayons certaines leçons à tirer de cette expérience, son incidence sera utile, mais je pense qu'il serait préférable de continuer de travailler à l'échelle nationale, d'établir les institutions et de leur donner les ressources nécessaires pour se développer à l'interne. Le Rwanda est un bon exemple. Un système de justice qui fonctionne aura probablement une incidence bien plus grande sur le Rwanda que le tribunal du Rwanda.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Avant de poser quelques questions, j'aimerais saisir l'occasion de souhaiter la bienvenue à Mme Lalonde, dont la participation nous a beaucoup manqué ces derniers temps. Je suis certaine que tous les députés partagent le même sentiment que moi.
C'est peut-être parce que je souffre d'un énorme choc culturel après avoir passé les deux dernières semaines au Kenya et en Ouganda que j'ai tant de mal à comprendre où vous voulez en venir. Je dois être très honnête avec vous. Je suis tout à fait d'accord que l'absence d'infrastructure à divers égards en Afrique subsaharienne est un obstacle ahurissant à de véritables avancées, qu'il s'agisse des objectifs de développement du millénaire ou de n'importe quel autre indice que vous voudriez adopter. Mais je suppose qu'après le voyage que certains d'entre nous venons de faire, après avoir constaté l'absence totale d'infrastructure d'hygiène ou de distribution d'eau potable sûre, dans des endroits où les politiques de la Banque mondiale ont mené à l'anéantissement total des programmes d'éducation et de santé qui existaient, il y a un énorme pas à franchir pour essayer de comprendre l'application et la pertinence de ce que vous proposez, peut-être seulement parce que cela nous semble assez abstrait après ce que nous avons vu.
J'ai quelques questions très précises. Vous avez mentionné qu'il fallait accorder davantage la priorité à la primauté du droit. Il est absolument clair qu'il faut prendre des mesures et progresser vers l'élimination de la corruption, cela ne fait aucun doute. Je suppose que la grande question est la façon d'y arriver. Vous avez dit que les groupes de défense de l'extérieur n'y parviendraient pas. Vous parlez donc de véritable renforcement des capacités par le renforcement de la primauté du droit. Cela m'inquiète beaucoup que ce soit l'un ou l'autre.
Je vais vous poser quelques brèves questions, parce que je veux vraiment que vous preniez le temps d'y répondre.
Premièrement, où croyez-vous que le Canada en est dans ses efforts pour respecter les obligations internationales qu'il a prises et reprises dans le cadre des objectifs de développement du millénaire et ce qu'on considère comme le minimum, et non le maximum, de la norme internationale de 0,7 p. 100 du revenu national consacré à l'aide officielle au développement.
Deuxièmement, vous avez dit que l'instauration de la primauté du droit donnerait aux pauvres le pouvoir de se défendre, en plus de réduire efficacement la pauvreté et d'assurer l'accès aux services d'un avocat pour les pauvres. En fait, on observe plutôt au Canada, depuis une bonne dizaine d'années, l'érosion significative des programmes qui permettraient aux personnes qui vivent dans la pauvreté de faire valoir leurs droits, une érosion grave au point où nous faisons bien mauvaise figure dans le monde parmi les pays développés à cet égard. Je me demande ce que vous en pensez. Je ne sais pas s'il y a un équivalent juridique à l'adage « Médecin, guéris-toi toi-même », mais je pense que la barreau devrait vouloir jouer un rôle à cet égard.
Troisièmement, il est parfois tout aussi important de regarder chez le voisin que chez soi. Ce comité, et particulièrement le Sous-comité des droits internationaux de la personne, est très au courant qu'en Colombie, par exemple, il y a des personnes qui sont tuées sans ménagement pour avoir participé à des activités politiques, que les dirigeants syndicaux sont assassinés par millier. Je me demande si la situation actuelle en Colombie, par exemple, illustre la pertinence de votre proposition et si vous êtes intervenus d'une manière ou d'une autre en Amérique du Sud ou Centrale pour réagir à ces problèmes juridiques très graves et très évidents ou encore si vous considérez que ce que vous proposez à un quelconque lien avec tout cela.
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Merci, monsieur le président. Je vous sais gré de cette occasion de comparaître devant le comité.
Vous avez été bien gentil de souligner mon changement de carrière imminent, mais je tenais à donner brièvement une petite idée de mon cheminement. Vous avez fait remarquer que j'ai travaillé au National Democratic Institute. J'ai beaucoup travaillé au Kosovo. J'ai aussi travaillé en République populaire de Chine, en Irak, en Égypte, en Palestine et au Cambodge. Comme vous l'avez dit, dès le début de mars, je travaillerai à temps plein pour le Programme des Nations unies pour le développement, c'est-à-dire le PNUD, à Hanoï, au Vietnam.
Mon travail s'est concentré surtout sur les domaines de gouvernance. Quand je parle de gouvernance, il faut entendre le pouvoir du Parlement et le pouvoir exécutif. Mais j'ai aussi travaillé auprès de partis politiques et de la société civile et agi comme observateur d'élections. Je tenais à dire, au départ, que je ne me prétends pas théoricien, mais bien praticien. J'ai fait ce travail pendant plusieurs années et, de toute évidence, étant donné mon changement de carrière, mon engagement est ferme.
Mon point de vue est donc celui de quelqu'un qui, sur le terrain, a fait ce travail de concert avec les gouvernements et la société civile. Je tenais à vous expliquer ce point de vue et, avec un peu de chance, vos questions en tiendront compte.
J'aimerais vous parler plus particulièrement de ce qui ne va pas dans l'approche actuelle du gouvernement du Canada.
Une des choses que je tiens à préciser puisque je travaille sur le terrain, c'est que le Canada n'est pas un intervenant sérieux en matière de développement de la démocratie. Quand on voit des pays comme le Royaume-Uni, avec sa Westminster Fondation for Democracy, les Américains avec leur NED, NDI et IRI, les Allemands avec leurs Stiftungs, entre autres, la plupart affirmeraient que le Canada n'a même pas commencé à se pointer au niveau international dans les domaines plus particuliers du pouvoir parlementaire et exécutif et du développement de partis politiques.
Je l'affirme, mais je tiens aussi à faire observer que le Canada a effectivement — et je crois avoir entendu le dernier groupe de témoins l'affirmer également — beaucoup d'excellentes personnes qui font un travail incroyable, un travail fantastique. Il faut en prendre acte. L'autre point, c'est qu'il existe beaucoup d'organismes au Canada même qui touchent de l'argent de l'ACDI et du gouvernement et qui font de l'excellent travail. J'estime simplement que le travail accompli soit n'est pas bien présenté, soit est mal vendu, ce qui pourrait aussi faire partie du problème. D'après certains témoignages que j'ai entendus tout à l'heure et la lecture de certains autres entendus lors d'audiences précédentes, je crois que ces groupes font du bon travail, mais je ne suis pas sûr que ce travail soit présenté de manière à inspirer le respect.
J'aimerais vous parler de ce que je conçois comme une nouvelle approche et certains de ses avantages. D'une part, si nous investissions vraiment dans le développement et la gouvernance, nous aurions accès à ces pays. Dans le cadre d'une politique étrangère, des affaires étrangères, je ne crois pas qu'on puisse surestimer l'importance de cet accès. En débloquant des fonds pour le développement de partis politiques, d'une société civile, d'un parlement, d'un pouvoir exécutif et d'un pouvoir judiciaire, nous créerions des programmes qui auraient une influence directe sur les dirigeants de certains pays.
Bien sûr, cette influence donne en retour l'accès. Nous aurions ainsi manifestement un certain pouvoir dans des dossiers comme le commerce et les droits de la personne et lors de différends bilatéraux ou multilatéraux. Quand bien même ce ne serait que pour cette seule raison, considérez les efforts de développement de la démocratie comme le moyen de nous ouvrir des portes, très utiles si nous avons besoin de soutien dans d'autres domaines.
Je tiens également à souligner que cette approche peut être très rentable. De par l'expérience que j'acquise sur le terrain, je sais que pour une contribution annuelle de deux millions et demi de dollars par pays, le Canada peut s'imposer non simplement comme une forte présence, mais comme le plus important joueur dans un pays. C'est ce que mon expérience dans des sociétés d'après-guerre m'a appris, plus précisément au Kosovo. Donc, en investissant chaque année deux millions et demi de dollars par pays, le Canada peut avoir un fort bon programme, probablement le meilleur de bien des pays. Pour 25 millions de dollars par année, par exemple, le Canada pourrait s'imposer comme un intervenant sérieux dans dix pays. Si nous les choisissons bien, en fonction de notre histoire, de notre diversité, je crois que nous pouvons y avoir beaucoup d'impact.
Naturellement, le domaine évident que d'autres ont également souligné est la liberté et la sécurité. Tout avantage, tout investissement dans ce domaine peut améliorer la démocratie et la sécurité.
Vous vous demandez peut-être, étant donné le peu de temps dont je dispose, à quoi je veux en venir quand j'aborde ce sujet. Deux choses. La structure que je recommanderais est double. D'une part, je crois que le Canada a besoin d'un organisme de financement qui traite particulièrement de la démocratisation, qui offrirait des subventions et des fonds aux organismes, en s'inspirant plus ou moins de ce que fait le National Endowment for Democracy aux États-Unis, c'est-à-dire le NED. Je crois que c'est une bonne façon de s'y prendre. Vous auriez un organisme qui se consacrerait expressément à la démocratisation, et je crois que cela pourrait fonctionner.
D'autre part, j'aimerais bien qu'il y ait un organisme s'apparentant à la Westminster Foundation du Royaume-Uni. Alors que les Allemands et les Américains sont passés à des groupes sectaires, je recommanderais un groupe multipartisans comme le Westminster Foundation, un groupe qui permettrait à toutes les parties de se concerter pour travailler au développement des pouvoirs exécutif, judiciaire et parlementaire, pour agir en tant qu'observateur lors d'élections et pour favoriser la naissance de partis politiques. Ce serait bien.
De plus, à mon avis, grâce à une version canadienne du NED, on pourrait faire participer au processus de plus petits entrepreneurs ou des sous-traitants. Cela serait aussi source de concurrence et permettrait aux petits organismes de pouvoir fournir eux aussi leur expertise.
En guise de conclusion, je tenais à dire que le Canada a besoin d'une approche purement canadienne en matière de politique étrangère. Si nous allons en ce sens, alors il faut favoriser la démocratisation. Nous avons besoin de pouvoir disposer de fonds qui nous donnent accès aux ordres les plus élevés du gouvernement, de la société civile, des partis politiques et du pouvoir judiciaire.
Enfin, j'aimerais dire qu'il y a beaucoup de Canadiens qui font ce travail à temps plein. Ils le font pour le compte d'organismes britanniques, d'organismes américains, d'organismes des Nations Unies et du Commonwealth. Il existe un énorme bassin de Canadiens qui ont accumulé beaucoup d'expérience dans ce domaine et, pour les avoir écoutés, pour avoir discuté avec eux, je sais qu'ils affirment souvent qu'ils aimeraient pouvoir le faire pour un organisme canadien, qu'ils aimeraient que nous ayons une version canadienne du NED ou de la Westminster Foundation.
En conclusion, je vous demanderais d'envisager la possibilité de créer une version canadienne des autres organismes. Je sais que cela pourrait avoir beaucoup d'impact dans le monde et permettrait aux Canadiens de faire le travail qu'ils font si bien, qu'ils seraient fiers d'accomplir pour un organisme canadien.
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Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je crois que le texte de ma déclaration a été distribué dans les deux langues officielles.
Permettez-moi d'abord de féliciter le comité pour cette étude bien d'actualité sur un sujet de la plus haute importance.
Les événements qui se déroulent dans certaines parties du monde continuent de démontrer que la démocratie ne se trouve pas au bout du fusil et qu'on ne peut pas conclure qu'elle a pris racine tant que des éléments n'ont pas permis de mettre en place un parlement et un gouvernement qui jouissent de la confiance de la population.
Remarquez que j'ai dit « un parlement et un gouvernement ». Ce sont là deux institutions distinctes, le parlement étant au coeur même de la démocratie. Le gouvernement est l'organe exécutif, et le pouvoir exécutif est confié à un premier ministre ou à un président qui désigne les membres de son cabinet à son gré. Le premier ministre ou le président est investi de grands pouvoirs. Dans une démocratie, toutefois, certaines contraintes s'appliquent à ces pouvoirs. Il ne peut les exercer qu'avec le consentement du parlement qui représente la population.
Le parlement est une institution qui exige et rend des comptes, et non une institution de gestion. Il ne dirige pas le gouvernement, mais il a le pouvoir d'approuver ses plans, il a un droit de regard sur les mesures qu'il prend et il le tient responsable de son rendement. Les parlements doivent être forts, car seules des institutions solides peuvent encadrer des dirigeants puissants.
C'est ce que j'appelle la « théorie du sablier », et nous connaissons tous le triangle de la structure organisationnelle. Dans les nations souveraines, la population, au bas du triangle, est servie par la fonction publique. Celle-ci reçoit ses directives des ministres du cabinet et leur rend des comptes. Le cabinet siège selon le bon vouloir du premier ministre. C'est le triangle classique d'une organisation, que j'appelle le triangle des services, chapeauté par une personne et allant en s'élargissant en nombre vers le bas. Mais sans reddition de comptes ou sans contrainte imposée par la démocratie, cette personne devient un dictateur. La société est au service du dictateur.
Pour que la reddition de comptes démocratique se fasse, les parlements se sont vus confiés au fil des ans le pouvoir constitutionnel de tenir le premier ministre ou le président responsable de ses actes. Voilà pourquoi il existe, au-dessus du triangle de services, un triangle inversé que j'appelle le triangle de gouvernance. Le gouvernement rend des comptes au Parlement, qui à son tour rend des comptes à la population grâce à des médias ouverts et indépendants.
Le parlement, dans une démocratie, a quatre responsabilités fondamentales : approuver au nom de la population les mesures législatives proposées par le gouvernement; approuver, au nom de la population, le budget que propose le gouvernement afin de prélever des impôts et des taxes et d'amasser les fonds nécessaires pour diriger le pays; approuver, au nom de la population, le budget qui contient des dépenses détaillées et donne au gouvernement le pouvoir d'affecter des sommes précises à des programmes précis; et enfin la quatrième, la plus importante à mon avis, le gouvernement fait rapport et rend des comptes au parlement.
Étant donné ces quatre responsabilités, il va de soi que le parlement se doit d'être aux commandes. Mais dans les faits, dans une démocratie qui fonctionne bien, le pouvoir politique ultime appartient à la population. Celle-ci délègue au parlement la responsabilité de surveiller le gouvernement, mais conserve le droit de réprimander les députés au moment des élections.
Le parlement, une tribune publique, approuve les mesures législatives, les budgets et les budgets des dépenses requis par le gouvernement et tient ce dernier responsable de ses actes. Le parlement conserve également le droit de refuser son consentement, de dissoudre le gouvernement ou de destitutuer le président.
De son côté, le gouvernement fournit des services à la population par l'intermédiaire de la fonction publique et tient les fonctionnaires responsables du rendement et de la prestation des services.
Monsieur le président, un pays démocratique a donc son modèle de gestion (le triangle des services) et son modèle de reddition de comptes ( le triangle de gouvernance).
Le pouvoir politique ultime est largement subdivisé afin de réduire au minimum les risques d'abus. Cependant, bien des pays qui se disent démocratiques sont affligés de corruption et d'abus de pouvoir incontrôlables. Pourquoi? Parce que le parlement n'assume pas l'obligation qui lui incombe d'être un surveillant indépendant du gouvernement; celui-ci le gagne à ses vues et lui fait accepter son programme d'action. Le modèle de reddition de comptes démocratique du triangle de gouvernance ne peut pas donner de bons résultats si le parlement est bousculé ou corrompu par le gouvernement.
Dans beaucoup de pays, si le gouvernement ne peut venir à bout des parlementaires par un débat bien articulé, il peut les acheter. S'il ne peut pas les acheter, il peut les intimider. S'il ne peut pas les intimider, il peut les défaire à l'élection suivante en manipulant les résultats. S'il ne peut pas les défaire, il peut les emprisonner. Et pour les quelques durs-à-cuire qui refusent obstinément de se laisser enrôler dans un régime corrompu, il y a toujours l'assassinat et l'élimination.
Les dirigeants puissants doivent être encadrés par des institutions bien solides. L'institution la plus forte d'un pays doit être son parlement, la voix du peuple.
Seul le parlement a le pouvoir constitutionnel de restreindre l'action des dirigeants et des gouvernements, d'exiger des comptes et de les émettre, s'il juge approprié de le faire. Aucune autre organisation d'un pays n'a ce genre de pouvoir, mais trop souvent le parlement n'a rien d'autres que le nom. C'est une marionnette du gouvernement, et la société en souffre.
Le concept est simple. Quand le parlement n'exige pas de reddition de comptes du gouvernement, ce dernier manque à son devoir de diriger le pays. Quand le gouvernement manque à son devoir, la société s'affaiblit. Le parlement est la pierre angulaire. Si le parlement fonctionne bien, la société prospérera.
Par contre, si le parlement manque à son devoir de surveillance, le gouvernement perd sa fibre morale, et la corruption s'installe. Il sert alors ses intérêts en taxant les pauvres pour s'enrichir. Il dérobe l'argent destiné à construire des écoles et des hôpitaux. Il soutire des pots-de-vin des citoyens. Il manipule les tribunaux et les organismes de réglementation à son avantage. Il élimine la dissidence démocratique légitime. Il intimide les médias. Il arrange les élections et nuit au processus démocratique. Il modifie la constitution pour demeurer au pouvoir.
Un manque de vigilance de la part du parlement permet à la corruption de s'étendre. La corruption tue la prospérité économique et, si vous regardez l'indice de perception de la corruption de Transparency International, vous observerez une relation inverse entre la corruption et la prospérité. Le développement économique et le respect des droits de la personne et de la primauté du droit relèvent du gouvernement. Mais quand le parlement se soustrait à son devoir d'exiger des comptes du gouvernement, ce dernier se soustrait à celui de servir les citoyens. Voilà pourquoi, monsieur le président, tout dépend de nous.
L'indépendance parlementaire et la démocratie dans le monde ont un besoin criant d'aide, et je suis heureux de vous dire que cette aide est sur le point d'arriver. En octobre 2002, 170 parlementaires des quatre coins de la planète se sont réunis dans notre Chambre des communes pour créer l'Organisation mondiale des parlementaires contre la corruption (GOPAC). Ils ont adopté un règlement constitutif et élu un conseil d'administration et un comité de direction. J'ai été élu président de l'organisation.
La GOPAC a une mission : rendre les parlements plus efficaces en tant qu'institutions démocratiques de surveillance des gouvernements. Sa mission repose sur trois piliers. Tout d'abord, l'appui des pairs. Nous aidons les parlementaires qui malgré les embûches et les périls ont décidé de tenir tête à la corruption. Le deuxième est l'éducation des parlementaires. Nous envoyons nos jeunes à l'université pour qu'ils deviennent avocats, médecins, ingénieurs et comptables, mais qui forme nos parlementaires et leur enseigne à surveiller le gouvernement? Enfin, il y a le leadership axé sur les résultats. Les belles paroles ne suffisent pas. Il est temps que nous, parlementaires, exigions des comptes de nos gouvernements et prenions des initiatives pour lutter contre la corruption et faire régner l'honnêteté et l'intégrité dans la gestion des affaires publiques.
En septembre dernier, à Arusha, en Tanzanie, la GOPAC a tenu sa deuxième conférence mondiale à laquelle ont pris part quelque 250 parlementaires venus des quatre coins du monde. Pour donner du poids à l'organisation et démontrer que nous voulons axer le leadership sur des résultats, la conférence a adopté huit résolutions. Chaque résolution exigeait la création d'un groupe de travail mondial de parlementaires pour animer le débat et encourager son adoption partout dans le monde. Ces résolutions concernent notamment l'institution du parlement, la promotion de lois anticorruption et la transparence du financement international.
Si nous aspirons au développement, à la prospérité, à la paix, au respect des droits de la personne et à une réduction importante de la corruption dans le monde, il faut que les principes démocratiques s'épanouissent à l'intérieur des pays. C'est là que la GOPAC prend toute son importance. La GOPAC s'adresse aux parlementaires animés d'une volonté de réforme, soucieux d'honnêteté et d'intégrité. Elle leur permet de développer leurs talents et leur capacité politiques d'exiger des comptes de leur gouvernement.
Les agences de développement peuvent offrir de l'aide, mais ne peuvent faire le travail à leur place. Je suis heureux de dire que la communauté du développement international considère maintenant que le développement démocratique est essentiel à la prospérité. Le gouvernement du Canada le reconnaît aussi, et je le remercie, ainsi que l'Agence canadienne de développement international, de leur appui à la GOPAC.
Je vous demande par conséquent de souligner dans votre rapport au Parlement l'importance de l'indépendance parlementaire dans une démocratie, de dire que la démocratie ne peut s'épanouir qu'à l'intérieur d'un pays, avec l'aide de l'extérieur toutefois, et que la GOPAC est peut-être le meilleur moyen de rejoindre les parlementaires étrangers qui oeuvrent à l'avancement de la démocratie, de l'éthique, de la surveillance et de la probité.
Je vous remercie beaucoup.
Très brièvement, j'aimerais d'abord dire à John Williams qu'évidemment, je connais très bien l'Organisation mondiale de parlementaires contre la corruption et son utilité. Vous faites du bon travail; je tiens à vous le dire. Continuez ainsi. Nous sommes très heureux que l'organisation vous ait confié cette tâche.
Cela a un impact. Lorsque je discute avec eux, les parlementaires d'Afrique de l'Est et du reste du monde reconnaissaient l'importance du rôle du Parlement tel que vous l'avez décrit, ainsi que les responsabilités qu'ils doivent assumer. Bien sûr, ils font parfois face à des obstacles insurmontables, à de la corruption et tout ce qui s'ensuit; cependant, lentement mais sûrement, ils progressent. Nous devons prendre de telles mesures, comme le fait votre organisation. J'aimerais donc vous féliciter pour cela, John.
Je m'adresse maintenant à Kevin. Bien que je convienne avec vous qu'il faille changer certaines choses, je suis totalement en désaccord avec vous quant au fait que par le passé, les Canadiens n'ont pas fait le travail et n'avaient aucune politique. Je siège à ce comité depuis presque sept ans et j'ai constaté que les Canadiens ont accompli un travail colossal, que ce soit au Canada ou à l'étranger, en matière de politique étrangère. Et même si nous n'avons pas atteint l'objectif de 0,07 p. 100 — ce qu'Alexa continue de répéter —, je vous dis que nous sommes respectés par de nombreux pays dans le monde ainsi que de nombreux organismes d'aide pour notre expertise et la façon dont nous la transmettons.
Vous avez mentionné, et j'ai déjà été d'accord avec vous, que le Canada s'occupait de 104 pays. Mais l'ACDI se concentre maintenant sur 25 pays pour être bien certaine d'appliquer ce que vous recommandez.
Je crois donc que nous devrions également nous féliciter et éviter de dire continuellement que nous n'avons pas agi. Nous avons fait du bon travail, et il est reconnu. Mais il y a toujours moyen d'apporter des améliorations; nous allons donc nous concentrer là-dessus et étudier le développement démocratique. Il y a place à l'amélioration, et nous irons dans cette direction.
C'est tout ce que j'avais à dire là-dessus.
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Merci, monsieur le président.
M. Casey a raison: il existe beaucoup de pseudo-démocraties.
La démocratie signifie qu'un gouvernement doit être tenu responsable. C'est le principe fondamental. Ici, au Canada, la corruption est contrôlée parce que les gouvernements ont des comptes à rendre. Partout dans le monde développé, des parlements tiennent les gouvernements responsables. C'est la démocratie. Un parlement n'est pas un édifice où les gens se réunissent et votent pour accorder à leur président ou à leur premier ministre ce qu'il veut. Il s'agit de tenir les dirigeants responsables devant la population grâce à un organe indépendant. Lorsque cela ne fonctionne pas, tout le système s'écroule.
Par conséquent, à mon avis, monsieur le président — je partage en grande partie l'opinion de Kevin —, nous devrions appuyer le développement démocratique de cette institution. Des dirigeants forts peuvent seulement être encadrés par des institutions fortes. Nous devons construire cette institution qu'est le parlement, la seule qui a le pouvoir, entre autres, de démettre un gouvernement.
Ainsi, je crois que nous devrions, en tant que Canadiens, injecter davantage d'argent dans des organismes comme la GOPAC, qui repère les parlementaires armés d'une volonté de réforme dans tous les parlements. Peu importe le degré de corruption, je pense que dans chaque parlement se trouvent des personnes qui croient en l'honnêteté, l'intégrité, l'éthique et la probité. Nous devons les aider.
Certaines personnes risquent leur peau. Je pense au président de la Commission anticorruption du Nigeria. Lorsque je lui ai parlé, je lui ai demandé s'il avait peur. Il m'a répondu que oui, qu'il pourrait être assassiné, mais qu'il préférait mourir jeune pour une bonne cause que vivre vieux sans avoir rien fait.
Ces personnes ont besoin de soutien, car elles tentent de faire bouger les choses: instaurer la reddition de comptes démocratique. C'est pourquoi, avec la GOPAC, qui intervient directement dans les parlements et trouve ce type de personnes, les rassemble et leur offre outils, éducation, soutien et ainsi de suite, il y a quelque chose à faire.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais poser trois questions, et on manque toujours de temps. Mais je tiens à remercier Kevin Deveaux d'avoir dit clairement que les deux entités ne vont pas l'une sans l'autre.
Je pense que c'est assez effrayant, en fait, si l'on imagine prélever une somme sur l'allocation existante, terriblement insuffisante, qui doit servir à remplir nos obligations en matière d'APD, afin de l'injecter dans les projets dont vous nous parlez. Pourtant, il serait absolument ridicule pour quiconque parmi nous a eu le privilège, en tant qu'élu, de voyager et de constater de visu ce qui se passe dans de nombreux pays, de nier que la corruption est un grave problème. Cela ne fait aucun doute.
Afin d'illustrer mes propos, j'aimerais prendre l'exemple du Kenya, que nous venons de visiter. Le plus grand désastre qui afflige ce pays aujourd'hui est la pandémie du VIH-sida.
Bill Casey, aidez-moi à y voir clair. Il y a là-bas un Parlement de 314 députés, je crois — ils sont à peu près aussi nombreux que nous —, au sein duquel personne ne parle de VIH-sida, et encore moins ne défend cette population sacrifiée composée en majorité de gens qui meurent du VIH-sida, sont séropositifs ou encore sérieusement touchés parce qu'un membre de leur famille souffre de la maladie. Il est certain que bon nombre de leurs concitoyens sont infectés par le virus. Or, au Parlement, pas un mot là-dessus; on reste muet.
Pendant ce temps, des fonds sont alloués à chacune des circonscriptions pour les programmes et services de comté, fonds entièrement administrés à la discrétion des parlementaires. Nous avons entendu parler — et j'ai rencontré à plusieurs occasions des personnes ayant témoigné en ce sens — de la façon dont ces fonds sont gérés en totalité par le député, sans que celui-ci rende de comptes. Bien souvent, on n'en informe même pas les électeurs. Lorsqu'ils tentent de savoir où va l'argent et demandent transparence et responsabilité, on leur cloue le bec. Dans un certain cas, une source très fiable, dont le témoignage a été corroboré par d'autres, m'a dit qu'à quelques reprises, on avait débloqué l'argent destiné au comté et que le député en avait réclamé une partie pour lui-même en échange de son versement.
Face à une situation semblable, je me pose la question suivante: par où commencer pour faire avancer le développement démocratique quand personne, je dis bien personne au Parlement n'est prêt à parler de transparence et de reddition de comptes, ni à soulever la question du plus grand fléau qui affecte la population kényane?
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Merci, monsieur le président.
Mme McDonough a raison, ce n'est vraiment pas évident. Au Kenya, par exemple, les députés sont payés 165 000 $US par année, si je me souviens bien. C'est suffisant pour que tout le monde s'entende relativement bien dans ce pays.
Comme vous le savez, John Githongo présidait le comité de lutte contre la corruption. Il a dû s'enfuir pour sauver sa vie. Le CRDI lui apporte maintenant son aide du Canada et il sera au pays plus tard cette année.
Par où commencer? Je crois que dans chaque parlement, il y en a toujours qui croient en l'honnêteté et l'intégrité. Ils se font peut-être discrets, de peur d'être attaqués. Je me souviens de Musikari Kombo, qui brigue la présidence au Kenya et qui est membre de l'Organisation mondiale des parlementaires contre la corruption (GOPAC). Il essaie de défendre l'honnêteté et l'intégrité. M. Arap Moi, l'ancien président, a essayé de le discréditer en donnant des terres à son fils, afin qu'on le perçoive comme étant une personne corrompue.
La situation est vraiment difficile. Quand on pense à tous les pouvoirs qu'un gouvernement possède, c'est jouer à un jeu dangereux que de lui faire face seul. C'est même un jeu très dangereux. Pour cette raison, il est important qu'ils sachent qui les soutient dans le monde, et pas seulement dans leur pays.
Comme vous le savez, il y a une grande différence entre des députés élus et les mécanismes de soutien que l'on retrouve dans un parlement. Des améliorations restent à apporter des deux côtés. C'est pourquoi la GOPAC se concentre sur les députés élus. Il existe de nombreux autres programmes — et il devrait peut-être y en avoir encore plus — pour apporter un soutien technique aux parlementaires, afin qu'ils aient les ressources nécessaires.
Lorsque j'ai rencontré pour la première fois Musikari Kombo, qui était alors député de l'opposition, il m'a dit que tout ce dont il disposait, c'était l'accès à l'un des deux téléphones fixés au mur du couloir et qui ne fonctionnaient pas la plupart du temps. Rien de plus. Pensez à tous les moyens dont nous disposons pour demander à notre gouvernement de rendre des comptes : l'accès à l'information, le droit d'appeler des témoins, etc. — tout cela, relevant du domaine public et accessible lorsque nécessaire. Comparez cela avec l'accès à deux téléphones pour l'ensemble du pays, sans articles de papeterie ni bureaux ou employés: rien du tout.
Maintenant, nous avons un président qui a entrepris de lutter contre la corruption, mais ça ne semble pas fonctionner. Nous ne pouvons pas nous permettre d'abandonner. Nous devons poursuivre nos efforts.
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Merci, monsieur le président.
Je ne veux pas me lancer dans un débat sur ce que les libéraux ont fait et sur ce que les conservateurs ne se sentent pas obligés de faire parce que les libéraux, eux, ne l'ont pas fait. Toutefois, et je m'en souviens très bien, Mobina Jaffer a présenté au comité un rapport très détaillé et fouillé sur le travail qu'elle a effectué à titre d'envoyée spéciale au Soudan. De plus, je ne connais personne en dehors de Roméo Dallaire qui a parlé aussi souvent, ouvertement et en détail de son expérience. La suggestion voulant que ces deux personnes ont été bâillonnées et qu'elles ne voulaient pas parler me laisse donc un peu sceptique. Je pense qu'elles ont été très ouvertes et, en fait, très généreuses dans leurs commentaires.
Il y a une chose qui me déçoit en ce qui concerne le libellé des motions dont nous sommes saisis. Franchement, j'aurais été davantage prête à appuyer la motion de Francine Lalonde en premier lieu, car je ne crois pas que la question au centre du débat soit le rapport présenté au premier ministre. Le premier ministre ne tient absolument pas à en divulguer les conclusions. Il se peut que Wajid Khan, qui est un membre du comité, soit prêt à nous en faire part, mais que le premier ministre refuse qu'il le fasse. Il devra faire le point là-dessus.
À mon avis, le point en litige ici, c'est que M. Khan s'est rendu au Moyen-Orient et en Asie du Sud-Est aux frais du public, dans le but de remplir une mission d'intérêt public. Le comité a été saisi du dossier, et nous aimerions savoir quelles sont ses observations, ses conclusions, ses constatations.
Je ne sais pas si, dans le but d'obtenir ce que nous voulons, c'est-à-dire un compte rendu des constatations, nous pouvons proposer un autre amendement de pure forme ou essayer de convaincre Mme Guarnieri de demander non pas la divulgation du rapport présenté en tant que tel au premier ministre, mais plutôt la comparution de M. Khan devant le comité, pour qu'il puisse nous faire part de ses observations et conclusions.