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Bon après-midi, mesdames et messieurs.
Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration se réunit aujourd'hui, le mardi 11 mai 2010, pour sa 14e séance. Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 29 avril 2010, l'étude du projet de loi , est à l'ordre du jour.
Pour la première heure de nos travaux, nous recevons un certain nombre de témoins et d'invités.
Nous accueillons d'abord des représentantes du Conseil canadien pour les réfugiés, Wanda Yamamoto et la directrice Judy Dench... pardon, ce n'est pas Judy Dench — je pensais à quelqu'un d'autre, j'en suis désolé —, mais Janet Dench.
Nous recevons également des représentants d'Amnistie internationale: la coordonnatrice des réfugiés, dans la Section canadienne francophone, Claudette Cardinal, et le président de la Section anglophone, Mike Bossin.
Bonjour à vous tous.
Notre quatrième invité n'est pas encore arrivé, mais je suppose qu'il ne devrait pas tarder.
Chacun de vous dispose de sept minutes pour son exposé.
Nous commençons par le Conseil canadien pour les réfugiés, et je pense que l'une d'entre vous parlera.
Nous sommes heureuses d'avoir l'occasion de vous parler de cet important projet de loi, qui aura de profondes répercussions sur les réfugiés qui veulent obtenir la protection du Canada. Nous avons présenté un mémoire détaillé, qui renferme nos observations sur projet de loi et des modifications que nous proposons à ce texte.
Malheureusement, nous n'aurons, aujourd'hui, que le temps d'effleurer les sujets qui nous préoccupent. La vitesse avec laquelle le comité mène l'étude du projet de loi interdit l'examen réfléchi qu'il mérite. Nous vous rappelons que vous intervenez dans un processus complexe. Toute erreur peut entraîner et elle entraînera très probablement le renvoi de personnes vers la persécution et même leur envoi vers la mort.
Contrairement à la plupart des autres réformes des lois sur l'immigration qu'il a proposées, le gouvernement a choisi, cette fois-ci, de ne pas faire de consultations à l'extérieur. Nous nous attendions alors que les députés reconnaîtraient le besoin particulier d'une étude approfondie. Nous avons entendu chez nos membres des manifestations non équivoques de consternation et de désillusion lorsqu'ils ont constaté la précipitation de vos audiences.
Les objectifs de la réforme concernant les réfugiés nous paraissent manifestes et largement partagés. Nous avons besoin d'un système qui reconnaît rapidement les réfugiés, qui ferme la porte aux personnes qui n'ont pas besoin de protection et qui traite efficacement les demandes des réfugiés qu'il accueille. Le projet de loi possède des qualités, mais, en raison de plusieurs défauts graves, il expose des réfugiés, les plus vulnérables notamment, au risque d'être déportés vers la persécution. Des dispositions risquent également de rendre le système plus inefficace. D'autres encore augmenteront probablement le contentieux.
Bon point en faveur du projet de loi , il offre à la plupart des demandeurs d'asile l'accès à la Section d'appel des réfugiés. Le droit d'en appeler du fond des décisions aurait dû exister depuis longtemps, et il est absolument nécessaire de s'assurer de ne pas commettre d'erreurs. Nous n'avons que trop conscience, également, des très longs délais auxquels doivent faire face les demandeurs du statut de réfugié en attente de la détermination de leur statut et nous appuyons l'objectif d'accélérer l'accès à une audience.
En revanche, l'introduction de la notion de pays d'origine sûrs ou désignés est, d'après nous, une grave erreur. Nous souscrivons à l'objectif de combattre les demandes répétées et non fondées, mais, d'après nous, la solution est ailleurs. Si le projet de loi est adopté, les réfugiés qui ont besoin de protection subiront une injustice. Il risque aussi de causer des problèmes pratiques non voulus qui neutraliseront l'objectif d'efficacité.
C'est mal d'accorder aux demandeurs de statut un traitement différent d'après leur nationalité, parce que c'est discriminatoire. La détermination du statut de réfugié exige l'évaluation individuelle de chaque cas, et non des jugements sur les pays d'origine.
La notion de pays d'origine sûrs vient d'Europe, où elle a été extrêmement controversée. Beaucoup de problèmes graves de détermination du statut de réfugié ont récemment mené à l'adoption, par le Conseil de l'Europe, d'une résolution sur l'amélioration de la qualité et de la cohérence des décisions concernant l'asile, par laquelle, l'Assemblée parlementaire, dans sa résolution 1695, a invité les États membres à s'abstenir d'utiliser des listes de pays d'origine sûrs
afin de garantir un examen individuel de chaque demande d'asile, en examinant avec rigueur la situation particulière de chaque demandeur vis-à-vis du pays concerné.
En vertu du projet de loi, les ressortissants des pays désignés n'auront pas de droit d'appel du fond d'une décision. Ils devront même affronter des préjugés au premier échelon, puisque les décideurs connaîtront l'opinion du gouvernement sur les pays en question. Il n'y aurait pas de quoi fouetter un chat si nous étions sûrs qu'aucun ressortissant de pays désigné ne serait un réfugié ayant besoin de protection. Or, l'expérience nous montre que, au contraire, cela arrivera probablement.
Presque aucun pays n'est entièrement sûr. Dans ceux qui paraissent généralement sûrs, les femmes, souvent, sont gravement persécutées parce qu'elles sont femmes, et de graves abus sont commis contre les gais et les lesbiennes.
Le ministre prétend utiliser les dispositions du projet de loi pour cibler des groupes de demandeurs, quand on craint que le système soit utilisé de façon abusive. Pourtant, l'expérience des dernières années nous montre que, généralement, il se trouve dans les groupes des individus qui ont vraiment énormément besoin de protection, même si la plupart des membres n'en ont pas besoin.
Prenons, par exemple, les demandeurs de statut mexicains. Ils sont attirés au Canada par des motifs économiques, mais beaucoup ont fui leur pays pour protéger leur vie. Au Mexique, les droits de la personne subissent des atteintes graves et généralisées. En 2009, 516 Mexicains ont été acceptés comme réfugiés par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Le refus d'un processus juste à ces demandeurs les expose à un retour forcé dans une situation de persécution, en contravention avec les droits de la personne.
Priver ces demandeurs d'un droit d'appel, c'est faire preuve de myopie, si l'objectif est d'avoir un système qui fonctionne bien. Souvent, ils font partie de ceux qui en ont le plus besoin, en raison des difficultés que leur situation présente sur le plan des faits et du droit, par exemple en ce qui concerne l'existence d'une protection de l'État. C'est le cas, par exemple, des demandes provenant du Mexique, où la Cour fédérale a renversé à plusieurs reprises les décisions de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, parce qu'elle avait mal appliqué le critère de la protection de l'État.
La décision prise au stade de l'appel possède l'avantage de pouvoir faire jurisprudence, ce qui permet une prise de décisions améliorée et plus cohérente. Il se peut qu'en privant des demandeurs de statut d'un droit d'appel le fonctionnement du système devienne, en fait, plus coûteux et plus lent que si on leur accordait un droit d'appel, puisque la Cour fédérale est susceptible de se sentir obligée d'examiner plus minutieusement leurs cas.
Nous remarquons qu'il a été proposé de prévoir dans la loi des critères pour les pays désignés. D'après nous, ce maquillage ne saurait racheter un vice rédhibitoire du projet de loi.
Je cède maintenant la parole à Janet.
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Bonjour, nous remercions le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration de nous donner l'occasion de lui faire part de nos préoccupations par rapport au projet de loi , qui est fort important pour les personnes demandant l'asile au Canada. Quoique nous n'ayons qu'une présentation, Me Bossin parlera au nom de la Section canadienne anglophone d'Amnistie internationale et, pour ma part, je parlerai au nom de la Section canadienne francophone.
Notre document conjoint vous sera remis dans quelques jours. Aujourd'hui, nous voulons vous entretenir sur deux points particulièrement troublants pour nous: la désignation des pays d'origine sûrs et l'empressement à entendre les demandeurs d'asile.
Selon le projet de loi , l'entrevue d'un demandeur d'asile aura lieu huit jours après son arrivée; et l'audience, soixante jours plus tard.
Nous sommes d'accord: les demandeurs d'asile attendent actuellement trop longtemps pour être entendus et recevoir leur décision. Cependant, la rapidité ne doit pas être le principe directeur de la loi amendée. Il faut plutôt un processus équitable, et nous craignons qu'une accélération, telle que prévue, ne produise des décisions négatives erronées risquant de violer les obligations internationales du Canada et de mettre à risque la vie des demandeurs d'asile.
Actuellement, le demandeur d'asile a le temps de préparer le formulaire de renseignements personnels comprenant son récit de vie, son éducation, ses expériences de travail, le nom des membres de sa famille, ses lieux de résidence antérieurs, ainsi de suite. Plus important encore, le demandeur aura le temps de préparer le récit détaillé du pourquoi de sa demande d'asile, et cela, avec l'aide d'un conseiller juridique compétent qui connaît la loi et ce qui constitue la preuve.
Souvent, le demandeur doit obtenir de son pays d'origine des documents médicaux, juridiques et policiers, etc., et il doit les faire authentifier. Il faut aussi faire traduire ces documents ici. Parfois, on doit chercher un témoin expert. Tout cela prend du temps. De plus, on doit tenir compte d'un facteur très humain, c'est-à-dire de certaines situations telles que le viol, les abus sexuels et la torture —, situations qui font qu'un demandeur ne se sentira pas à l'aise de se confier à un étranger qu'il vient à peine de rencontrer, et ce, s'il est assez chanceux pour trouver un conseiller dans un court laps de temps. Il y a aussi le facteur de désorientation dont on doit tenir compte. Un individu qui est ici depuis seulement huit jours et qui ne parle pas la langue risque de ne pas comprendre grand-chose. Et plus souvent qu'autrement, cette personne a aussi besoin d'un interprète.
En plus de la rapidité, nous nous préoccupons du fait que le projet de loi ne décrit pas clairement le but de cette première entrevue. Vise-t-elle seulement à obtenir des informations ou s'agit-il plutôt d'une entrevue sur le fond? Et les paramètres de la seconde entrevue, c'est-à-dire l'audience, ne se trouvent pas dans le texte de lois, mais plutôt dans les règlements ou même seulement dans les règles de procédure interne.
Tout ce qui nous préoccupe par rapport aux premières entrevues demeure également vrai pour l'audience. Nos préoccupations sont plus explicites dans le document à venir. Nous avons trois recommandations sur ce point: éliminer la première entrevue telle que décrite dans le projet de loi; conserver le formulaire de renseignements personnels ou le remanier pour le rendre plus simple; inscrire le cas au rôle de la CISR lorsque la personne est prête à procéder ou dans les six mois du renvoi du cas.
Maintenant, Me Bossin va partager ses inquiétudes par rapport à la désignation des pays d'origine sûre.
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Je vous offre une analogie qui s'applique à la liste des pays désignés. Imaginez un quartier où il se commet beaucoup de crimes, un quartier dont, d'après les études, 95 p. 100 des habitants qui sont accusés d'avoir commis une infraction criminelle sont reconnus coupables. Décidé de s'attaquer au problème, le gouvernement adopte une loi pour priver du droit d'appel les futurs condamnés du quartier. Ils auront un procès, ils pourront témoigner, mais, s'ils sont déclarés coupables, ils n'ont pas droit à un appel. Ce refus du droit d'appel abaissera la criminalité, il dissuadera les habitants du quartier de commettre des crimes et il désencombrera les tribunaux d'appel.
Cette mesure a toutes les apparences d'être assez bonne, mais je pense qu'aucun membre du comité ne voterait en faveur d'un tel projet de loi. Pourquoi? Parce qu'il est discriminatoire. Parce qu'il est injuste. Parce qu'il traite les gens non pas en fonction de leurs actions, mais de l'endroit d'où ils viennent.
Nous savons tous que, en vertu d'un tel système, même si 99 p. 100 des accusés qui viennent de ce quartier seront déclarés coupables, le tribunal condamnera un jour un innocent, qui ira en prison, qui n'aura aucun droit d'appel. On aura commis une injustice. Pour cette seule raison, je dirais que ce genre de loi est injuste.
Le projet de loi obéit à la même logique. Pourtant, nous envisageons sérieusement de l'adopter. Il institue un système à deux niveaux pour les réfugiés, ceux qui viennent de pays de bonne réputation et ceux qui viennent de pays mal famés. Le système ne les traite pas de la même façon. Non pas à cause de leurs actions, mais à cause de leur pays d'origine.
Bien sûr, ils continueront d'avoir droit à la révision judiciaire, mais j'oserais dire que si la révision judiciaire était un remède convenable, le gouvernement ne proposerait pas la mise sur pied de la Section d'appel des réfugiés pour la plupart des demandeurs.
Amnistie internationale s'occupe de surveiller et de signaler les atteintes aux droits de la personne. Chaque année, on aimerait que nous produisions une liste des 10 pires pays. Une telle liste nous rendrait très populaires, et nous recueillerions probablement beaucoup plus d'argent qu'actuellement. Dans notre mémoire, nous énumérons un certain nombre de bonnes raisons pour expliquer que c'est simplement une méthode peu fiable pour déterminer si tel ou tel pays est sûr. Il serait irresponsable de notre part de dresser une telle liste, à laquelle, d'ailleurs, on ne pourrait pas se fier.
Amnistie internationale appuie sans réserve l'amélioration de notre système de détermination du statut de réfugié.
À l'instar de toutes les organisations non gouvernementales qui comparaissent devant vous, nous serons heureux de collaborer avec vous et avec le gouvernement pour qu'un tel souhait se réalise. Cependant, nous sommes tout à fait opposés à l'aggravation des choses.
Nous recommandons fortement au comité de réfléchir un instant aux conséquences que pourrait avoir l'adoption du projet de loi et de le débarrasser de toutes les dispositions injustes, discriminatoires et irréfléchies. Prenez tout le temps qu'il faudra pour bien faire les choses.
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Merci, monsieur le président.
Contrairement aux autres témoins d'aujourd'hui, je pense qu'il est généralement reconnu que le régime actuel de l'asile souffre de défauts graves et qu'il a perdu la confiance du public. Son vice principal est de ne pas distinguer les personnes qui ont véritablement besoin de notre protection de celles qui tentent de profiter de lui pour entrer au Canada en évitant de se conformer aux règles en matière d'immigration.
Il a d'autres défauts graves. Il est terriblement coûteux, il est exploité par les trafiquants de personnes et les passeurs, il nuit à notre tourisme et à nos échanges commerciaux et il est nocif à nos relations bilatérales avec un certain nombre de pays. Il neutralise également notre capacité de contribuer à aider le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, ou HCR, à résoudre les graves problèmes que posent à l'échelle mondiale les réfugiés et les personnes déplacées.
On estime que près de 42 millions de personnes relèvent du HCR. Elles se trouvent dans des camps; 16 millions sont qualifiées de réfugiées, et 26 millions sont des déracinés.
Le Canada a traditionnellement été le chef de file des pays qui tentaient de résoudre les problèmes mondiaux de réfugiés, mais, maintenant, en continuant de tolérer un régime dysfonctionnel, nous n'exerçons plus ce rôle. Nous sommes également menacés de rétorsion par l'Union européenne, si nous continuons d'exiger des visas de visiteur aux ressortissants de certains États membres. L'Union européenne nous a avertis que si nous ne corrigions pas le régime, les Canadiens qui visitent l'Europe devront se munir de visas de touriste.
Il n'y a pas qu'au Canada où des gens abusent du système en cherchant le meilleur pays d'asile. Au cours des 25 dernières années, les pays occidentaux ont reçu environ 10 millions de demandes d'asile; le Canada, 800 000. Moins de 20 p. 100 des demandeurs se sont révélés être de véritables réfugiés, et les coûts ont été vertigineux: 400 000 demandeurs d'asile chaque année dans les pays occidentaux coûtent, estime-t-on, 10 milliards de dollars US. Quand on compare ce montant au budget annuel du HCR, pour s'occuper de quelque 40 millions de personnes, c'est-à-dire avec 4,5 milliards de dollars, on constate que la volonté constante de séparer les véritables réfugiés des migrants économiques est une entreprise très coûteuse.
Toutes les tentatives de réforme au Canada ont déclenché une résistance farouche de la part des avocats spécialistes de l'immigration, des conseillers en immigration et des défenseurs actifs des réfugiés. Tout système doit concevoir un programme qui filtre efficacement les demandes illégitimes avant qu'elles ne l'encombrent. Nous ne pouvons plus gaspiller nos maigres ressources financières au profit de ceux qui abusent du système depuis des années. Le projet de loi est un pas dans cette direction. Il tente de trouver le juste milieu entre l'équité et le fait évident que les demandeurs d'asile venant de pays démocratiques qui respectent la Convention des Nations Unies et la primauté du droit n'exigent pas un examen aussi approfondi que ceux qui viennent directement de pays qui sont des persécuteurs avérés.
C'est en effet un système de triage rapide, appliqué par tous les pays de l'Union européenne et sanctionné par le HCR. Le projet de loi tente de réformer un système détraqué, qui s'est révélé impraticable et nocif non seulement pour le Canada, mais pour les intérêts des véritables réfugiés. Il mérite l'appui du comité.
D'après moi, les changements proposés dans le projet de loi risquent d'être trop timides et d'arriver trop tard. La clé est de savoir si le premier niveau de décision peut être rendu suffisamment rapide pour faire fonctionner efficacement le système. S'il ne fonctionne pas, le nouveau système sera aussi mauvais que le système actuel, sinon pire.
Nous devons maintenant traiter un énorme arriéré de demandes non réglées, environ 62 000. Les coûts sont simplement vertigineux. Le ministère a dit qu'ils équivalaient à 50 000 $ par réfugié et par année. Faites les calculs.
Le travail de votre comité se poursuivra quelque temps, et le projet de loi risque de ne pas être adopté avant de nombreux mois, s'il finit par l'être. Entre-temps, les trafiquants de personnes et les passeurs savent que la loi sera rendue plus rigoureuse, et je soupçonne qu'il y aura une ruée pour venir ici avant son adoption.
Je pense que le comité prend ses responsabilités au sérieux. J'espère qu'il continuera de le faire et qu'il franchira ce premier pas plutôt timide pour la réforme d'un système détraqué depuis des années.
Merci.
L'Ontario Council of Agencies Serving Immigrants, ou OCASI, vous remercie de l'occasion que vous lui offrez de s'exprimer sur cet important projet de loi. Malheureusement, je ne serai pas en mesure de vous faire connaître en détail tous ses motifs de préoccupations dans le peu de temps dont je dispose, comme à peu près tous les autres témoins. Je me concentrerai donc sur les points qui préoccupent le plus nos organismes membres. Nous vous ferons parvenir sous peu un mémoire à ce sujet.
S'il était adopté, l'important projet de loi changerait profondément le régime de protection des réfugiés au Canada, sur qui il aurait un effet considérable. Il mérite une étude minutieuse et une prise en considération réfléchie par le comité. Les Canadiens méritent d'avoir le temps d'être entendus sur cette question très importante. L'une de nos plus grandes inquiétudes est la vitesse à laquelle le projet de loi est soumis au processus parlementaire et même à l'étude en comité.
Il est une chose que les réfugiés et les immigrants qui arrivent au Canada constatent très rapidement: c'est qu'il est permis aux Canadiens, on les y encourage même, de se prononcer dans le processus de décision des divers niveaux de gouvernement. Beaucoup ont dit, entre autres choses, qu'ils appréciaient pouvoir comparaître devant un comité tel que le vôtre, et beaucoup l'ont fait au fil des ans, pour faire connaître leur expérience et se faire entendre dans la discussion sur d'importants projets de loi qui les touchaient et qui touchaient les futurs Canadiens. C'est ce que nous appelons l'engagement civique. Tous les niveaux de gouvernement ainsi que nous-mêmes l’avons activement encouragé.
Malheureusement, le processus auquel sera soumis le projet de loi ne donnera presque pas lieu à une consultation et il ne permettra presque pas à ceux qui travaillent effectivement avec les réfugiés de faire connaître leur opinion.
L'OCASI chapeaute des organismes ontariens qui sont au service des immigrants et des réfugiés. Les organismes qui en sont membres comprennent ceux qui travaillent avec les réfugiés qui ont connu la torture, les réfugiés du Mexique, de Hongrie et d'autres pays, qui arrivent ici pour obtenir la protection du Canada et qui remplissent une demande d'asile. Ce sont notamment des organismes tels que le Centre canadien pour victimes de torture, reconnu dans le monde entier pour son travail avec les survivants de la torture; le Centre communautaire rom qui, pendant des années, a travaillé avec des réfugiés roms de Hongrie et d'autres pays; le Centre de réfugiés des Fidèles Compagnons de Jésus et de nombreux autres qui prennent en charge les personnes qui nous arrivent du Mexique et d'autres pays, pour obtenir une protection au Canada.
Nos organismes membres travaillent en première ligne avec ceux qui risquent d'être profondément touchés par les modifications proposées dans le projet de loi. Ils peuvent vous dire de première main comment ces modifications toucheront leurs clients. À la différence d'autres occasions où d'importantes modifications aux lois canadiennes sur l'immigration et la protection des réfugiés sont soumises à examen, ils n'auront pas l'occasion de comparaître devant vous pour vous faire part de leur expérience.
Au nom de ces organismes et d'autres, l'OCASI aimerait vous dire qu'il n'est pas trop tard pour prendre le temps de les écouter. Votre comité permanent est l'un des rouages essentiels de notre système parlementaire, dont l'objet est de donner aux organismes communautaires et aux gens ordinaires la chance d'être entendus sur des sujets très importants, de manière juste et transparente.
Au sujet du projet de loi, nous nous réjouissons de l'intention exprimée par le ministre d'introduire une réforme qui est rapide et juste. Nous sommes heureux de la création, enfin, d'une section d'appel des réfugiés. Nous saluons l'esprit dans lequel le projet de loi est présenté, la reconnaissance que les réfugiés méritent, eux aussi, un processus d'appel juste. La possibilité de présenter des faits nouveaux leur est accordée grâce aux dispositions du projet de loi. Malheureusement, l'appel ne serait pas offert à tous les demandeurs des pays désignés par le ministre comme pays sûrs.
Le Conseil canadien pour les réfugiés et Amnistie internationale vous ont fait connaître leurs craintes à l'égard du projet de liste des pays sûrs, et l'OCASI s'en fait l'écho.
Nous redoutons particulièrement les répercussions éventuelles chez ceux qui chercheront protection contre la persécution en raison de leur sexe ou de leur orientation sexuelle et qui peuvent venir d'autres pays que le ministre estime sûrs mais qui sont encore vraiment en danger. Nous craignons que ce processus ne se politise fortement et que, ensuite, il ait des conséquences pour les réfugiés, peut-être même tragiques.
Nous accueillons favorablement la proposition du ministre d'accélérer le processus. Pour ceux qui attendent que leurs demandes soient réglées, c'est une bonne chose. Nos organismes membres peuvent parler de l'effet que peut avoir une attente de plusieurs années sur les individus. C'est pourquoi, nous sommes d'accord pour dire que c'est une bonne idée que d'accélérer le processus, mais nous craignons que la justice ne soit sacrifiée à la célérité.
Beaucoup de demandeurs viennent de pays ou sont passés par des régimes qui font qu'ils peuvent ne pas bien connaître le processus d'audience des réfugiés. À cause des circonstances, ils peuvent encore être terrifiés, être en état de choc et, probablement, être peu préparés à confier à un étranger les motifs détaillés de leur besoin de protection. Beaucoup peuvent ne pas pouvoir se rappeler des détails, ne pas pouvoir raconter de façon cohérente ce qui leur est arrivé.
C'est qu'il faut reconnaître que chaque circonstance est exceptionnelle et qu'elle mériterait la prise en compte complète et équitable de ses valeurs intrinsèques. Nous craignons que le processus accéléré ne le permette pas.
Peut-être certains demandeurs seraient-ils prêts pour une audience initiale en moins de huit jours, mais, indéniablement, d'autres ne le seraient pas. Allons-nous adopter un projet de loi qui met en place un système identique pour tous, quand des vies sont en jeu? Ne serait-il pas préférable de pécher par excès d'équité, pour que chaque personne qui cherche protection ait une chance de témoigner?
Notre seconde crainte tient au fait que le décideur de la première audience serait un fonctionnaire plutôt que quelqu'un de nommé par le gouvernement. Le problème est que les fonctionnaires ne posséderaient pas l'indépendance nécessaire.
Le fait de confier la détermination du statut de réfugié à des fonctionnaires fait fondamentalement problème, parce qu'ils ne sont pas indépendants. En ne nommant que des fonctionnaires, on se priverait de certains des décideurs les plus compétents qui, ayant des antécédents différents, pourraient faire appel à leur expérience dans la prise de décisions. La qualité des décisions en souffrirait donc.
Ce que nous venons de dire nous a été inspiré par le Conseil canadien pour les réfugiés, dont l'OCASI est également membre. Nous pourrions en dire encore beaucoup plus, mais, encore une fois, nous manquerions de temps.
Malheureusement, le projet de loi ne fait rien pour comprimer les retards actuels et réduire l'arriéré déjà accumulé dans le système, ce qui était les motifs vraisemblables de son dépôt. Il ne s'occupe que des demandes qui seront déposées à l'avenir. C'est pourquoi, tout en faisant bon accueil à la proposition du ministre de répondre à certains de ces motifs importants d'inquiétude, nous aimerions imputer le problème dont souffre actuellement le système au manque de ressources. Nous accueillons donc favorablement la proposition du ministre de fournir plus de ressources au nouveau système proposé pour qu'il fonctionne mieux. Nous aimerions savoir cependant pourquoi on ne ferait pas de même pour le système actuel?
Nous demandons au comité d'envisager d'investir ces ressources dans le système actuel, pendant qu'il prend le temps d'étudier ce qui est proposé dans le projet de loi , afin de donner aux réfugiés une chance raisonnable.
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Merci, monsieur le président.
Je dois vous avouer que, pour un projet de loi si important, je trouve qu'on est très pressé, surtout compte tenu des questions que l'on pose aujourd'hui. Je pense qu'il faudra reconsidérer le tout.
Je connais bien le Conseil canadien pour les réfugiés, Amnistie internationale et M. Bissett, notamment. J'aimerais que l'on utilise mon temps pour approfondir certains éléments.
C'est un projet assez important et qui comporte des éléments inacceptables, à mon avis. Une des valeurs canadiennes est de reconnaître que chaque cas est unique. Que l'on décrète que parce que quelqu'un vient d'un certain pays il ne peut pas être considéré comme un réfugié m'apparaît totalement inacceptable.
Madame Dench, madame Yamamoto, j'aimerais que vous me disiez ce que vous pensez. J'aimerais vous donner un peu de temps. On est d'accord, mais on considère cela sur le plan de la procédure. J'étais moi-même à St. John's, Terre-Neuve-et-Labrador, lorsque j'ai suspendu le droit d'appel, mais on avait de bonnes raisons de le faire.
Sur le plan administratif, êtes-vous satisfaite qu'une équipe de fonctionnaires s'occupe du premier droit d'écoute et que, par la suite, il y ait un appel? Avez-vous des objections, même si on aura un droit d'appel au mérite?
[Traduction]
Monsieur Bissett, vous êtes un ancien directeur. Nous nous connaissons depuis un moment.
Pensez-vous qu'il est juste de mettre en place un système qui revient à dire aux réfugiés que, parce qu'ils viennent de tel ou tel pays, ils ne peuvent pas demander asile au Canada?
Y a-t-il une façon de dire qu'il y a cependant des exceptions, et le fait que les homosexuels vivent certains problèmes...? Ce sont des situations dont nous avons été témoins au Mexique, par exemple.
Ne pensez-vous pas que l'on pourrait préconiser d'améliorer le processus et de fournir...?
Je suis d'accord avec vous, l'échéancier répugne — nous devons l'écourter — mais devons-nous vraiment dire que nous devrions désigner des pays et que, parce qu'un réfugié provient d'un tel pays, eh bien, sa cause est déjà entendue?
Nous acceptons qu'il y ait un problème et que, de temps en temps, il faut qu'il y ait une façon de traiter certains cas qui ne sont pas fondés ou dont la majorité n'est pas fondée. En même temps, il faut qu'il y ait un système équitable qui donne une audience juste à tout le monde, à titre d'égalité. C'est pourquoi les pays désignés, ce n'est pas acceptable de notre point de vue.
Nous estimons également que le concept de pays désignés risque de poser problème sur le plan juridique, car il y aura probablement des contestations en vertu de la Charte. Il y a une vulnérabilité à cet égard. Nous cherchons donc une solution qui reconnaît que la CISR, moyennant le système de détermination du statut de réfugié, doit non seulement traiter de façon équitable tous les demandeurs, mais aussi reconnaître les préoccupations relatives à l'exécution de la loi du fait qu'il se peut que certains groupes de personnes n'aient pas, à première vue, besoin de protection. Nous leur donnons donc la possibilité de passer par le processus.
Il se peut que ces personnes ne soient pas des réfugiés. Néanmoins, puisque l'agence a déterminé qu'elles lui sont d'un certain intérêt, cela pourrait aider cette dernière à être plus cohérente dans ses actions en ce qui a trait à l'exécution de la loi. En effet, selon notre expérience, il arrive souvent que les personnes sont assez rapidement refusées par le système de détermination, mais, par la suite, aucune mesure n'est prise en ce qui a trait à l'exécution de la loi.
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Je pense que le système prête flanc aux abus parce qu'il est complètement ouvert. Autrement dit, nous sommes l'un des rares pays qui permettent à n'importe qui, quel que soit son pays d'origine, de prétendre qu'il est persécuté, d'être entendu par un tribunal quasi judiciaire et de bénéficier des diverses étapes de la procédure qui est prévue.
En 2002, par exemple, des ressortissants de 152 pays ont demandé l'asile au Canada. C'est ridicule. Des demandeurs d'asile sont venus de la Suisse, de l'Allemagne et des États-Unis. Voilà ce qui encombre le système. Nous devrions plutôt dire aux demandeurs d'asile qui arrivent des États-Unis et de l'Angleterre qu'ils seront entendus et qu'ils auront la possibilité d'expliquer pourquoi ils se disent persécutés, mais qu'ils n'auront pas droit à toute la procédure, parce que c'est trop long et ça coûte trop cher. Toutefois, si un tel demandeur souhaite contester la décision de première instance parce qu'il considère ne pas avoir été traité équitablement, il pourra s'adresser à la Cour fédérale pour avoir la permission d'en appeler de la décision. Si ce tribunal est d'avis que le demandeur a des motifs suffisants pour faire appel, il l'entendra.
À mes yeux, ce serait à peu près le seul système susceptible de bien fonctionner. Il a fallu longtemps à la Communauté européenne pour se rendre compte qu'elle était submergée de demandes d'asile. Comme je l'ai mentionné, l'Allemagne en reçoit 493 000 par année. Elle a dû changer sa constitution. La Communauté européenne a été frappée par la première vague de demandeurs d'asile. En fin de compte, elle a résolu le problème en adoptant un système qui prévoit que, lorsqu'un demandeur provient d'un pays sûr, signataire de la convention des Nations Unies, où règne la primauté du droit et où on ne persécute pas les gens normalement, ce demandeur est entendu, mais selon une procédure accélérée. Il y a un tri qui se fait, de telle sorte que l'on puisse gagner du temps pour en consacrer davantage aux demandeurs qui viennent des pays où il est de notoriété publique que les gens peuvent être persécutés et maltraités.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le président, il est injuste de traiter les témoins ainsi. Nous en accueillons quatre en une heure, nous leur donnons sept minutes chacun, puis nous les faisons sortir et passons au troupeau suivant. Je pense que nous devons changer cette façon de procéder parce que...
Monsieur le président, laissez-moi finir.
Nos travaux auront une incidence sur des êtres humains, dont les vies seront affectées. Compte tenu du Règlement, je crois qu'à notre retour de la pause, nous devrions remettre en question les audiences des quatre groupes de témoins. Nous devrions nous assurer que les gens qui ont donné leur nom ne recevront pas un courriel de la part du greffier leur disant que certains sujets seront portés à l'attention du comité, car on voit bien que le comité n'a pas pu se pencher sur ces sujets.
Si la présidence cherche à se défiler ainsi, c'est totalement inacceptable.
Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de vous donner notre point de vue sur le projet de loi , sur les changements au système de détermination du statut de réfugié.
Je travaille à la Metro Toronto Chinese and Southeast Asian Legal Clinic. Nous offrons des services à environ 3 000 clients par année. Les dossiers que nous ouvrons concernent principalement le droit de l'immigration.
Nous offrons des services juridiques en cantonais, en mandarin, en vietnamien, en khmer et en laotien.
J'aimerais soulever quelques points à propos de quatre éléments de la réforme. D'abord, sachez que nous sommes très enthousiastes à l'idée que l'on propose la création d'une section d'appel des réfugiés. Des erreurs se produisent inévitablement en première instance, et un appel sur le fond est parfois nécessaire pour corriger les erreurs.
Nous recommandons vivement que soit établi un processus de sélection fondé sur le mérite pour les membres de la section d'appel des réfugiés, afin d'éviter les nominations politiques et de s'assurer que la sélection repose sur un processus décisionnel de grande qualité pour la section d'appel des réfugiés.
Ensuite, il y a les considérations humanitaires. Les motifs humanitaires sont un recours nécessaire lorsqu'il est question des droits de la personne, y compris de l'intérêt supérieur de l'enfant. La distinction entre ce qui constitue une crainte fondée de persécution, au sens où on l'entend dans la définition de réfugié de la convention, et un préjudice très grave, soit le critère que l'on invoque dans les demandes pour des motifs humanitaires, n'est pas tout à fait claire.
Un membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié acceptera peut-être une demande de statut de réfugié, alors qu'un autre membre la rejettera en se fondant sur les mêmes faits. Comment alors pouvons-nous conseiller un client dans le choix d'une demande?
Il arrive souvent que des Chinois voient leur demande être acceptée pour des raisons d'ordre humanitaire après qu'elle ait été rejetée selon la définition de réfugié — par exemple, les gens qui craignent d'être persécutés en vertu de la politique de l'enfant unique.
Les considérations d'ordre humanitaire constituent un filet de sécurité pour ceux qui ne sont pas admissibles au statut de réfugié, mais qui s'exposent tout de même à des difficultés démesurées s'ils retournent dans leur pays.
Le nouveau système inciterait probablement ces clients à entrer dans la clandestinité pour un an ou plus, puisqu'ils devraient attendre de pouvoir présenter une demande pour des motifs humanitaires. Cette situation serait préjudiciable tant pour les clients que pour l'ensemble du système. Les gens ayant besoin d'un havre sûr au Canada perdraient un temps précieux au lieu de pouvoir entamer le processus d'établissement.
Le troisième élément que j'aimerais aborder concerne l'entrevue qui aurait lieu dans les huit jours de l'arrivée au Canada et l'audience, dans les 60 jours. La plupart de nos clients obtiennent des certificats d'aide juridique afin d'être accompagnés d'un avocat durant le processus de demande du statut de réfugié. Il est tout à fait déraisonnable de s'attendre à ce que l'on obtienne ces certificats dans les huit premiers jours de l'arrivée au Canada.
Les demandeurs n'ayant pas d'avocat devraient alors se représenter eux-mêmes ou être représentés par des consultants assujettis à aucune règle, qui sont souvent très peu fiables.
En outre, nos clients sont confrontés à des barrières linguistiques, et il serait presque impossible de leur fournir des services d'interprétation dans les huit jours suivant leur arrivée. Si les services d'interprétation sont inadéquats, la description des risques courus par le demandeur s'en trouve faussée, ce qui le prive d'un processus équitable.
Dans certains dossiers de la Chine, nous avons fait des demandes au nom de mineurs qui sont non accompagnés à leur arrivée au Canada. Il s'agit souvent de cas complexes qui touchent le trafic lié au commerce du sexe. Le nombre de ces cas est en hausse. En avril, on a reçu le 100e client du projet « Unaccompanied Minors Project » de McCarthy Tétrault.
Compte tenu de la crainte et des traumatismes en cause, nous doutons que des entrevues efficaces puissent être menées dans les huit premiers jours de l'arrivée au Canada. Dans bien des cas, les 60 jours alloués afin de réunir les éléments de preuve pour les demandes — c'est-à-dire préparer les affidavits, traduire les documents et obtenir les rapports d'experts — seront également insuffisants.
En plus d'une période suffisamment longue pour préparer les entrevues et les auditions, il nous faut des garanties nous assurant que les droits des mineurs non accompagnés et des autres demandeurs qui ont subi des traumatismes ou de la torture sont protégés tout au long du processus.
Pour terminer, j'aimerais aborder la question de la désignation des pays sûrs. L'utilisation d'une liste de pays sûrs politise le système de détermination du statut de réfugié et, par conséquent, menace les principes mêmes de la protection des réfugiés.
La détermination du statut de réfugié requiert un examen individuel au cas par cas afin de garantir l'équité. Les demandeurs d'asile venant de pays considérés comme sûrs, selon l'évaluation subjective du gouvernement canadien de la situation sociopolitique qui existe dans leur pays, ne seront pas traités de façon équitable. Il n'existe aucun critère objectif ni quantifiable qui permet de déterminer si un pays est sûr, et la situation des droits de la personne évolue souvent très rapidement.
C'est probablement la raison pour laquelle le projet de loi ne définit pas le principe de pays sûrs, ce qui encore une fois souligne le caractère politique de la décision consistant à étiqueter des pays comme étant sûrs, puis de priver les demandeurs de ces pays de leurs pleins droits, notamment de leur droit d'appel.
Voilà les principaux points que nous voulons faire valoir. Si nous insistons pour qu'il y ait un processus équitable pour tous les demandeurs, c'est qu'à défaut d'un examen équitable, ces personnes risquent d'être tuées ou blessées si on les renvoie dans leur pays. Nous demandons instamment au comité de tenir compte de ces éléments et nous aimerions vous soumettre notre mémoire écrit.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
À titre de représentants de l'Association du Barreau canadien, nous sommes très heureux de comparaître aujourd'hui devant le comité au sujet du projet de loi , la Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés.
L'Association du Barreau canadien est une association nationale bénévole qui compte environ 37 000 membres dans l'ensemble du pays. La Section du droit de l'immigration et de la citoyenneté est composée d'environ 1 000 juristes qui possèdent des compétences dans tous les domaines du droit de la citoyenneté, de l'immigration et du statut de réfugié. Les principaux objectifs de l'organisation étant l'amélioration du droit et de l'administration de la justice, c'est dans cette optique que nous formulons aujourd'hui nos observations.
Pour notre comparution d'aujourd'hui, nous vous avons distribué le sommaire exécutif de notre mémoire. Nous vous remettrons également le mémoire complet en temps voulu.
Je vais demander à M. Mitchell Goldberg, membre exécutif de la Section du droit de l'immigration et de la citoyenneté, de formuler des observations élaborées au sujet du projet de loi.
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Mais les Glorieux sont les Canadiens. J'aime à penser que je parle pour tout le Canada.
Plus sérieusement, je vais vous parler de ce qui plaît et de ce qui ne plaît pas à l'Association du Barreau canadien dans le projet de loi . Nous soutenons les principes de rapidité et d'équité. Nous croyons qu'il est très important de rationaliser le processus. Nous pensons aussi qu'un appel sur le fond est essentiel à l'équité. L'ABC se penche sur cette question depuis bien des années et recommande que l'article 110 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés soit appliquée. Nous félicitons le gouvernement d'en parler dans le projet de loi.
Nous sommes également très heureux de constater qu'il affectera davantage de ressources au processus de détermination du statut de réfugié. Toutefois, nous craignons beaucoup que l'équité soit compromise. Nous croyons qu'il n'est pas nécessaire de sacrifier l'équité pour accélérer le processus de décision et les mesures de renvoi.
D'abord, la liste des pays désignés politise inutilement le processus. Comme Mme Valiani l'a indiqué, cela a des conséquences graves, puisque les gens qui viennent de pays qui figurent sur cette liste de pays prétendument sûrs verraient cette importante demande d'appel sur le fond être rejetée pour les décisions de vie ou de mort.
Dans notre mémoire, nous faisons aussi des suggestions pour atténuer le préjudice que cela causerait. Si ce comité et le Parlement tiennent absolument à ce processus auquel nous nous opposons, nous croyons qu'à tout le moins, le comité qui choisit les pays désignés devrait être composé d'experts en matière de droits de la personne et les critères utilisés pour déterminer si un pays doit se trouver ou non dans cette liste devraient être fondés entièrement sur les droits de la personne et la protection de l'État, et rien d'autre.
Tout comme nous nous opposons à un accès politisé à la section d'appel des réfugiés, nous nous opposons également aux nominations politiques. Comme vous le savez, l'Association du Barreau canadien, ainsi que bien d'autres groupes, s'oppose fermement à tout ce qui s'écarte des nominations fondées sur le mérite. Nous croyons que le processus de nomination est encore inutilement politisé à l'heure actuelle, en particulier le processus de renouvellement de mandat à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
Nous croyons qu'à tout le moins, on devrait permettre à la section de la protection des réfugiés de choisir les meilleurs candidats possibles. Et cela signifie aller au-delà de la fonction publique. Nous ne voyons aucun inconvénient à ce que les membres choisis soient des fonctionnaires. Il y a beaucoup de membres compétents de la section de l'immigration qui viennent de la fonction publique, mais nous devrions également permettre à d'autres personnes qualifiées de mettre à profit leurs compétences.
Nous sommes aussi très préoccupés par un aspect de ce projet de loi qui n'a reçu, à mon avis, que peu d'attention. Pour tout dire, il est même difficile pour les avocats spécialistes de l'immigration ou pour quiconque de le comprendre. Nous nous sommes efforcés d'en saisir le sens. À notre avis, le projet de loi prévoit une mise en oeuvre par étapes qui manque d'équilibre, d'équité et d'explications.
Certaines parties du projet de loi pourraient entrer en vigueur seulement deux ans après la proclamation et d'autres pourraient être appliquées sur-le-champ. Nous craignons que cela signifie que la restriction relative aux demandes pour des motifs humanitaires et aux examens des risques avant renvoi pourrait être mise en oeuvre immédiatement, alors que la mise en oeuvre tant attendue de la section d'appel des réfugiés devrait attendre jusqu'à deux ans. Cela créerait une grave injustice pour les personnes concernées.
Comme bien d'autres, nous sommes également inquiets au sujet des retards dont on ne parle pas dans le projet de loi . Le gouvernement a annoncé, comme l'a indiqué Mme Valiani, qu'il y aurait une entrevue initiale dans les huit jours et qu'une audience serait immédiatement fixée 60 jours plus tard. Comme nous l'avons déjà dit, nous sommes extrêmement inquiets de la lenteur du processus actuel. Les réfugiés doivent avoir des certitudes et obtenir une réponse rapidement.
Bon nombre d'entre eux attendent de pouvoir faire venir les membres de leur famille, leurs enfants, au Canada. Nous sommes donc tout à fait d'accord pour que l'on accélère le processus. Cependant, nous croyons que quelques changements mineurs sont nécessaires, comme d'allouer 28 jours avant l'entrevue initiale et quatre mois avant l'audience. Ce n'est pas très différent de ce qui est proposé actuellement, mais cela devrait aider les réfugiés qui sont très vulnérables et permettre aux gens d'embaucher un avocat compétent.
Enfin, nous sommes préoccupés par la restriction relative aux demandes de permis de séjour temporaire et aux demandes pour des motifs d'ordre humanitaire. Je vais vous parler un peu de ce dernier élément, soit la restriction relative aux demandes pour des motifs humanitaires.
Ces demandes existent pour une bonne raison. Lorsque certains aspects du système sont critiqués et que nous défendons nos arguments devant les Nations Unies, ou lorsqu'on se soucie de protéger l'intérêt supérieur des enfants, par exemple, le gouvernement — qu'il soit libéral ou conservateur — mentionne toujours ce processus, ce que l'on appelle les demandes pour des motifs d'ordre humanitaire. Elles permettent de gérer les situations qui passent entre les mailles du filet et d'éviter les injustices.
Il est important de souligner ici que les demandes pour des motifs humanitaires n'empêchent pas les renvois. Contrairement à ce que l'on voit pour les examens des risques avant renvoi, il n'y a aucune restriction administrative pour les renvois lorsqu'une demande pour des motifs humanitaires est présentée. Par contre, le renvoi des demandeurs du statut de réfugié pour des motifs d'ordre humanitaire entraînera des violations des droits de la personne. J'aimerais vous donner un exemple venant de mon propre cabinet d'avocats. Je pourrais vous en donner bien d'autres, mais puisque notre temps est limité, je vais vous parler d'une situation parmi tant d'autres.
J'ai eu à m'occuper du dossier d'une charmante petite famille africaine. Il y avait le père, la mère et leurs deux enfants. Le membre de la section de la protection des réfugiés a accepté leur demande, a reconnu qu'ils craignaient la persécution et qu'ils avaient subi des actes de persécution atroces dans le passé en raison de leurs opinions politiques. Les parents étaient membres du parti de l'opposition. Toutefois, à cause d'une technicalité, le membre a refusé la demande des parents parce qu'ils détenaient une double nationalité. Ils étaient aussi des citoyens d'un autre pays d'Afrique. Or, les enfants n'étaient citoyens que d'un seul pays. Le membre a donc accepté les enfants. Ils ont été reconnus comme des réfugiés, mais la demande des parents a été rejetée.
Selon ce que l'on propose dans le projet de loi , les parents auraient très bien pu être renvoyés dans leur pays, alors que les enfants — des enfants mineurs — seraient restés au Canada. Heureusement, la famille avait le droit de présenter une demande pour des motifs d'ordre humanitaire. C'est ce qu'elle a fait, et sa demande a été acceptée. Je suis heureux de dire que toute la famille est ici au Canada.
Je vois également bien des cas où des femmes — et leurs enfants — sont victimes de violence familiale de la part de leur conjoint ici au Canada. Cela n'a rien à voir avec la Convention de Genève relative à la protection des réfugiés. Ces personnes ne correspondent pas à la définition de réfugié, mais elles se trouvent dans une situation très vulnérable, et les considérations humanitaires sont le seul moyen de les protéger.