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CIMM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration


NUMÉRO 017 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 25 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bon après-midi, mesdames et messieurs.
    Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration tient aujourd'hui, mardi le 25 mai 2010, sa 17e séance. Nous avons à l'ordre du jour, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 29 avril 2010, le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés et la Loi sur les Cours fédérales.
    Nous accueillons trois témoins aujourd'hui, trois invités. L'un comparaît par téléconférence de St. John's; nous avons des problèmes de connexion, mais rien ne nous empêche de commencer avec les autres témoins en attendant. Je vous présente donc nos témoins.
    Je vous souhaite la bienvenue au Comité de l'immigration dans le cadre de l'étude de ce projet de loi; il nous tarde d'entendre vos observations et commentaires. Nous accueillons la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, représentée par Stephan Reichhold, directeur, et Richard Goldman, responsable du volet protection. Nous accueillons également Action Réfugiés Montréal, représentée par Glynis Williams, directrice, et Maude Côté, coordonnatrice des programmes.
    Chaque groupe a jusqu'à sept minutes pour faire son exposé. Je vous remercie de votre présence.
    Nous allons commencer par vous, monsieur Reichhold.

[Français]

    Bonjour. Mon nom est Stephan Reichhold, je suis le directeur de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, qui regroupe 140 organismes qui travaillent au Québec auprès des personnes réfugiées, immigrantes et sans statut également. Nous avons travaillé très étroitement avec le Conseil canadien pour les réfugiés; nous avons collaboré à leur mémoire. Notre organisme appuie tous les principes du mémoire du Conseil canadien pour les réfugiés. Plusieurs éléments du projet de loi nous inquiètent, malgré que certains éléments soient positifs, comme on l'a mentionné dans le mémoire.
    Je vais passer la parole à mon collègue Me Goldman, qui est responsable du volet « protection » chez nous, à la Table de concertation. Il va parler d'un sujet particulier, soit toute la question de l'étude des considérations humanitaires qui seraient abolies pour les demandeurs d'asile dans le projet de loi. C'est un élément dont on voulait vous parler. Je passe donc la parole à mon collègue.

[Traduction]

    Monsieur le président, honorables députés, je vous remercie de nous donner l'occasion de comparaître devant votre comité. Je m'appelle Richard Goldman, comme Stephan l'a dit, je suis responsable du volet protection à la Table de concertation. Je suis aussi le coordonnateur du Comité d'aide aux réfugiés, un petit organisme non gouvernemental confessionnel qui aide les revendicateurs du statut de réfugié. Sur une note personnelle, je travaille dans le système dans le domaine de la détermination du statut de réfugié à divers titres depuis avant la création de la CISR en 1989.
    Aux fins de notre exposé, nous estimons qu'un exemple réel donne toujours le portrait le plus clair des répercussions réelles d'une loi. Nous allons donc présenter un cas réel actuellement en cours. Nous allons changer le nom, évidemment. Ce cas a fait l'objet d'un article d'opinion rédigé par Paula Kline, de notre organisation soeur, la Mission de la ville de Montréal. J'ai d'ailleurs rédigé l'article avec elle.
    Je vous l'ai remis. Je ne sais pas s'il a été traduit et distribué. Oui? Très bien.
    Nous croyons que l'article illustre les répercussions réelles surtout en ce qui concerne la question des considérations humanitaires, mais aussi les courts délais.
    Voici donc le récit, brièvement. Il s'agit de l'histoire de Brihan. Ce n'est pas son vrai nom. Ce nom signifie lumière en amharique, sa langue maternelle. Elle a été donnée en mariage à l'âge de 12 ans par ses parents. Elle était l'aînée d'une famille de neuf enfants. Elle est née dans un village dans le nord de l'Éthiopie. Elle n'a jamais été à l'école. Le lendemain de son 14e anniversaire, elle a donné naissance à son premier enfant, un garçon. Au cours des cinq années suivantes, elle a eu un autre fils et deux filles.
    En 1998, la guerre a éclaté entre l'Éthiopie et l'Érythrée. Son mari a dû aller se battre à la guerre, et on présume qu'il est mort au combat. Entre-temps, les autorités éthiopiennes ont commencé à accueillir et à expulser les personnes d'origine érythréenne. La mère de Brihan, qui est érythréenne, a été expulsée vers l'Érythrée. Brihan a elle-même été arrêtée et détenue pendant une semaine dans une cellule minuscule avec plus de 40 autres détenus. Elle a été battue, torturée et brutalement violée. En plus des séquelles émotionnelles, son état de santé s'est fortement aggravé.
    Après cette semaine d'horreur en prison, elle a été libérée et a fui vers le Soudan, où elle a occupé divers emplois pendant cinq ans. Elle craignait toujours d'être expulsée vers l'Éthiopie. Évidemment, elle a dû laisser ses quatre enfants. Finalement, en 2004, une connaissance a fait pour elle les démarches nécessaires pour qu'elle puisse prendre un vol vers le Canada.
    Elle est arrivée à Montréal sans papier et sans connaissance de l'anglais ni du français. Elle était en fait analphabète, même dans sa langue maternelle. Parce qu'elle n'avait pas de document d'identité, elle a été détenue par les autorités de l'immigration pendant trois mois, ce qui a en fait eu comme conséquence de devancer son audience. Je suis certain que vous avez entendu parler de gens qui devaient attendre deux ans ou plus avant leur audience, mais parce qu'elle était en détention, le processus a considérablement été accéléré.
    Comme elle avait très peu eu accès à son avocat de l'aide juridique ou à des interprètes et qu'elle avait eu très peu de temps pour préparer son dossier, sa demande de statut de réfugié a été refusée. Toutefois, avec l'aide du Comité d'aide aux réfugiés et de la Mission de la ville de Montréal, elle a pu par la suite présenter une demande de résidence permanente pour des motifs humanitaires, en présentant des preuves de son état de santé aggravé par les voies de fait qu'elle avait subies. Ces preuves n'étaient pas disponibles au moment de son audience. Grâce à ces preuves et à d'autres considérations humanitaires convaincantes, comme l'intérêt de ses enfants, notamment de ses deux filles, qui doivent faire face au même risque d'être mariées de force à un jeune âge, la demande pour des motifs humanitaires a été acceptée. Si tout va bien, elle devrait être réunie avec ses enfants très bientôt.
    Comme je l'ai dit, il s'agit d'un cas réel, et en fait, la semaine dernière nous avons obtenu l'excellente nouvelle selon laquelle les visas de ses quatre enfants avaient été délivrés en Nairobi; ses quatre enfants devraient donc littéralement arriver dans quelques jours, si tout va bien. Ils seront réunis avec leur mère après une séparation de 10 ans.
    Entre-temps, Brihan a très bien réussi à s'intégrer. Elle a appris à lire et à écrire les deux langues officielles du Canada, et elle a déjà obtenu une certaine expérience de travail au Canada. Si les réformes proposées dans le projet de loi C-11 étaient en place, elle n'aurait pas pu présenter cette demande avec l'aide d'un organisme. Elle aurait été expulsée vers l'Éthiopie dans les 12 mois, possiblement vers la détention et la mort, laissant ainsi ses enfants orphelins.
(1535)
    Il vous reste une minute, monsieur.
    D'accord. Je vais sauter la question des courts délais et ne parler que des demandes CH.
    Nous croyons que le récit de Brihan représente les meilleurs aspects de la tradition humanitaire canadienne. Lorsqu'il est question d'immigration, nous estimons qu'il n'y a pas lieu de mettre fin à cette piste de solutions importantes. Il s'agit de la seule façon de prendre en considération l'intérêt supérieur de l'enfant et de décider si oui ou non un enfant ou une famille peut rester au Canada. C'est encore moins logique quand on pense aux demandes pour motifs humanitaires et au fait qu'elles ne suspendent pas les expulsions. Nous recommandons donc de garder les demandes pour motifs humanitaires telles quelles, possiblement avec davantage de ressources pour réduire les délais, ou de transmettre la compétence à la CISR, soit en première instance ou par l'intermédiaire de la SAR, afin d'admettre quelqu'un pour des motifs humanitaires.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup, monsieur.
    Nous allons maintenant passer à Mmes Côté ou Williams, une ou l'autre, mais pas les deux en même temps.
    Vous avez jusqu'à sept minutes également, madame Williams.

[Français]

    Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous présenter nos préoccupations sur le projet de loi, et plus particulièrement M. St-Cyr, qui a fait parvenir notre candidature au comité.
(1540)

[Traduction]

    Action Réfugiés a été fondée en 1994 par les églises anglicanes et presbytériennes de Montréal. Depuis, notre mandat est d'aider des demandeurs du statut de réfugié détenus au centre de détention de l'Agence des services frontaliers du Canada à Laval. Nous faisons aussi le jumelage de demandeuses de statut de réfugié et de bénévoles à leur arrivée à Montréal. Notre troisième programme consiste à parrainer des réfugiés de l'étranger.
    Nous croyons que notre force réside dans le fait que nous travaillons à la fois avec les demandeurs de statut de réfugié sur place et les réfugiés à l'étranger. Il s'agit d'une situation quelque peu unique au Canada.
    Il y a 22 ans, j'ai commencé à travailler avec des demandeurs de statut de réfugié détenus. À titre de directrice fondatrice de cet organisme, nous avons choisi de faire du programme de détention notre priorité, dont nous allons vous parler plus en détail bientôt.
    En 2007, j'ai participé à un programme de déploiement à très court terme avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés en Syrie en menant des entrevues avec des réfugiés irakiens. J'ai entendu les récits de plus de 350 réfugiés irakiens en quatre mois; je n'ai pas les mots pour vous décrire la violence et la souffrance énormes qui ont eu lieu en Irak. Nous avons donc bien accueilli l'annonce du ministre selon laquelle le nombre total d'établissements augmenterait, et je sais que ça ne fait pas partie du projet de loi. Toutefois, il est extrêmement injuste de rendre cette augmentation conditionnelle à l'adoption du projet de loi. De dire qu'un groupe mérite la protection du Canada tandis qu'un autre groupe est bidon — autrement dit, on mesure les demandeurs sur place aux demandeurs à l'étranger — est une stratégie qui va à l'encontre de la tradition humanitaire canadienne.
    Je veux vous donner un exemple réel. Un jeune Irakien que j'ai rencontré — appelons-le Yousuf — a été kidnappé à Bagdad. Une rançon importante a été demandée, puis payée par son père. Yousuf avait été torturé, et sa famille l'a envoyé en Syrie au moment de sa libération, mais même là il ne se sentait pas à l'abri de ses ravisseurs. Puis le père de Yousuf a été kidnappé et une rançon de 200 000 $ a été demandée. La rançon a été payée, et son corps a été retourné. Il avait été tué par les terroristes.
    Le frère de cet homme est un citoyen canadien, qui a été très perturbé par la mort violente de son propre frère et le traumatisme vécu par son neveu, Yousuf. Il a donc aidé Yousuf à se rendre au Canada. Action Réfugiés l'a rencontré alors qu'il était détenu au centre de détention de l'Agence des services frontaliers du Canada, ayant demandé le statut de réfugié directement à l'aéroport. Yousuf aurait sans doute pu faire partie de la catégorie des renvois par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, mais il était terrifié à l'idée de rester dans la région, alors il est venu au Canada. Son récit illustre pourquoi on ne devrait même pas laisser entendre que les revendicateurs du statut de réfugié sont moins méritants que les réfugiés à l'étranger.
    Les pays d'origine sûrs désignés mettent l'accent sur l'idée voulant que certains réfugiés soient plus méritants que d'autres. La disposition est discriminatoire et omet de reconnaître que la plupart des pays peuvent être dangereux pour certains de leurs citoyens à un moment donné — les revendications fondées sur le sexe et les victimes de discriminations fondées sur l'orientation sexuelle sont des exemples évidents.
    Le fait que les demandes refusées des pays désignés sûrs n'auront pas accès à l'appel est vraiment inquiétant. Les revendications de statut de réfugié sont par définition fondées sur le risque individuel de persécution, alors la désignation de pays sûrs est un principe contradictoire. Il semble probable que de désigner des pays comme étant sûrs augmentera le nombre d'examens judiciaires pour les revendicateurs de ces pays dont la demande est refusée. La Cour fédérale est susceptible d'accorder l'examen aux personnes qui ont au moins eu un appel dans le cadre de la SAR.
    Nous comprenons les préoccupations en ce qui concerne les demandes de réfugiés douteuses, alors pourquoi ne pas permettre à l'ASFC de désigner un certain nombre de demandes comme prioritaires pour le traitement à la CISR? Cette pratique correspond beaucoup mieux au principe de détermination du statut de réfugié, qui est un statut individuel.

[Français]

    Je vais maintenant passer la parole à ma collègue Maude Côté.
    Merci. Je suis la coordonnatrice des programmes auprès d'Action Réfugiés Montréal. Comme mentionné par Mme Williams, notre organisme visite le Centre de prévention de l'immigration toutes les semaines afin de donner de l'information juridique et un soutien moral aux détenus. Ce centre est l'un des trois lieux de détention pour fins d'immigration au Canada.
    Quoique certaines personnes soient détenues avant de faire face à un renvoi, une réalité qui est très peu connue et qui fait partie de notre quotidien est celle des demandeurs d'asile qui sont détenus pour motifs d'identité à la suite de leur arrivée. Il est, selon nous, primordial de ne pas confondre les gens détenus en raison d'un renvoi imminent et ceux qui le sont pour motifs d'identité, à la suite de leur revendication du statut de réfugié.
    Nous sommes d'avis que les délais relatifs à une entrevue dans les huit premiers jours de l'arrivée d'un demandeur, de même que la conduite d'une audience dans les soixante jours, sont tout à fait irréalistes dans le contexte des demandeurs d'asile qui sont détenus. Nous sommes extrêmement préoccupés par le fait que ces nouvelles mesures proposées leur seraient préjudiciables, à la fois en raison de leur droit de retenir les conseils d'un avocat afin de les assister dans la préparation de leur dossier, de même qu'en raison de la très grande difficulté à obtenir des documents ou à faire avancer leur dossier en étant détenus par les autorités.
    Par exemple, un demandeur d'asile congolais, fuyant le conflit et incapable de contacter sa famille, car il en a perdu la trace pour les mêmes raisons, peut rester en détention quelques mois, traumatisé, incapable de fournir les pièces demandées. Cette situation est malheureusement la réalité de plusieurs.
    Nous sommes aussi préoccupés par le fait qu'un fonctionnaire, lors de l'entrevue aux huit jours, « aiderait le demandeur à remplir le formulaire correctement ». Ce rôle est actuellement celui d'un avocat indépendant qui agit comme conseiller du demandeur afin de protéger ses droits. Ce droit à l'avocat prévu à l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés ne devrait être amputé d'aucune manière, particulièrement dans la législation qui doit protéger des personnes si vulnérables.
    Puisque les conditions de détention ne facilitent pas la collecte de documents — les détenus doivent obtenir des cartes d'appel, n'ont pas accès à Internet, le centre de détention est éloigné de la ville —, il est dangereux de forcer la tenue d'audiences trop rapides, car celles-ci défavorisent les demandeurs, qui ne seront pas prêts à temps. De même, puisque la section d'appel des réfugiés sera restreinte — tant dans sa forme que dans son fond —, nous risquons de voir un plus grand nombre de demandes s'accumuler à cette section d'appel, car refusées en première instance et ultimement refusées en raison de la restriction de présenter seulement des nouveaux éléments de preuve. Cela nuira gravement à la réputation du Canada en matière de protection des réfugiés.
    De plus, puisque les délais proposés seraient si courts, nous sommes d'avis que la détention serait favorisée, en raison du processus expéditif souhaité par le ministre Kenney, afin de pouvoir garder un meilleur contrôle de la situation. Puisque les effets de la détention sur les demandeurs d'asile fuyant la persécution — qui pour la plupart n'ont jamais été détenus — sont non négligeables, nous sommes inquiets des conséquences de l'augmentation de la détention des personnes qui viennent rechercher la protection du Canada.
(1545)

[Traduction]

    Madame Côté, pourriez-vous conclure?

[Français]

    En terminant, nous aimerions vous présenter les cinq recommandations suivantes. Premièrement, il s'agit de supprimer le paragraphe 100(4) concernant les entrevues après huit jours de l'arrivée au Canada.
     Deuxièmement, il s'agit de permettre à la Section de la protection de la CISR le soin de fixer la date de l'audience en consultant les demandeurs et leur conseil, selon la disponibilité de la preuve documentaire et leur niveau de préparation, sans les obliger à se présenter à une audience dans les soixante jours de l'entrevue.
    Troisièmement, il s'agit de modifier les paragraphes 110(3) à 110(6) et l'alinéa 113a) afin que la Section d'appel des réfugiés tienne systématiquement des audiences, et ce, en considérant tous les éléments de preuve relatifs aux demandes d'asile.

[Traduction]

    La quatrième recommandation vise à supprimer l'article 12 et proposer un nouvel article 109.1 à la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés aux fins de la désignation de pays d'origine sûrs.
    La dernière recommandation est de traiter les demandes de toute évidence non fondées en amendant la loi pour donner au ministre de la Sécurité publique l'autorité de répertorier un nombre limité de demandes que la CISR aurait à examiner de façon prioritaire.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie.
    Notre dernier témoin, par vidéoconférence de St. John's, est Julia Porter de l'Association for New Canadians. Elle est travailleuse sociale de la réinstallation.
    J'aimerais vous souhaiter la bienvenue au Comité de l'immigration. J'ai hâte d'entendre vos commentaires relativement au projet de loi.
    Vous avez jusqu'à sept minutes pour faire votre exposé, madame Porter.
    Je vous remercie de votre présentation. Je m'appelle Julia Porter et je suis travailleuse sociale de la réinstallation à l'Association for New Canadians. Nous sommes un organisme communautaire à but non lucratif basé à St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous offrons des programmes d'aide à la réinstallation et des programmes d'aide aux immigrants et à l'installation aux nouveaux arrivants à St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous travaillons surtout avec des réfugiés et des immigrants subventionnés par le gouvernement. Nous ne travaillons pas souvent avec des revendicateurs du statut de réfugié.
    Aujourd'hui, en ce qui concerne le projet de loi, je voulais surtout vous parler, compte tenu de mon expérience, des délais très stricts. De passer de 60 jours à 19 mois me semble assez considérable comme écart. Pour les clients avec qui je travaille, qui peuvent venir de régions rurales ou qui peuvent avoir des parents éparpillés partout dans le monde, il est vraiment très difficile d'obtenir certains documents et de tout organiser tel qu'exigé. Alors 60 jours avant l'audience me semble assez strict. Aussi, pour les huit jours, il serait très important qu'une certaine pratique ou que certaines approches soient mises en place, compte tenu de la nature délicate de nombreuses demandes, et on pourrait même élaborer des partenariats dans la communauté pour faire en sorte que certains avocats puissent travailler avec les demandeurs du statut de réfugié.
    Je crois qu'il est fantastique de planifier la réinstallation de davantage de réfugiés en vertu du Programme de parrainage privé et du Programme de réfugiés subventionné par le gouvernement, mais comme d'autres personnes l'ont dit, il est déplorable que le processus de demandes de statut de réfugié soit touché.
    C'est tout ce que j'ai à dire de notre côté. Comme je l'ai dit, nous travaillons surtout avec des réfugiés subventionnés par le gouvernement, et je suis très ravie d'avoir eu l'occasion de participer à cette séance.
(1550)
    Nous sommes tout aussi ravis.
    Nous avons maintenant des questions des membres du comité. Il y a quatre caucus, et chaque caucus aura jusqu'à sept minutes pour le premier tour.
    La première question sera posée par M. Karygiannis. Vous avez la parole, monsieur.
    Je remercie tout le monde ici de même que le témoin qui se joint à nous de St. John's. Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion d'entendre ce que vous aviez à dire.
    Je crois qu'il y a quelques points litigieux. Il y a les huit jours, les 60 jours, et le fait de ne pas pouvoir s'adresser à un organisme et utiliser la même information présentée à l'audience.
    Je me demandais si vous pouviez nous donner votre avis sur les huit jours. Est-ce suffisant? Actuellement, si je ne m'abuse, le délai est censé être de 28 jours. Selon vous, à quel moment la première audience devrait-elle avoir lieu? Dans les huit jours? Les gens devraient-ils seulement se prêter à une entrevue? Devraient-ils pouvoir soumettre un FRP?
    Je comprends que le témoin de St. John's disait qu'il faudrait y avoir des avocats en attente pour donner des conseils. Pouvez-vous nous donner votre avis sur les huit jours, les 60 jours ainsi que le fait que les organismes ne puissent pas utiliser l'utilisation présentée à l'audience?
    Je travaille surtout avec des demandeurs en détention. Souvent, je les rencontre après huit jours. Je visite le centre une fois par semaine. On n'y a pas trouvé d'avocat. Les gens ne savent pas comment trouver un avocat. Nous sommes là pour leur donner les premiers outils pour enclencher le processus de demandes de statut de réfugié. Ainsi, je crois qu'il est inconcevable pour eux d'avoir à entreprendre et terminer la première étape primordiale d'une demande de statut sans cette aide essentielle.
    Dans votre cas, ces gens sont en détention. S'ils n'ont pas droit à consulter un avocat, comment justifier le tout au point de vue juridique? Vous savez, si vous êtes arrêté, vous avez un avocat de service. Dois-je comprendre que ces gens ne se voient attribuer aucun avocat de service, qu'ils ne peuvent communiquer avec un avocat ou qu'ils ne savent pas comment en rejoindre un?
    En fait, il faut faire une distinction. À l'heure actuelle, le processus pour remplir un formulaire de renseignements personnels est de 28 jours. Cet exercice se fait avec l'aide d'un avocat de service. Manifestement, les gens ont le droit d'avoir accès à un avocat pour ce faire, mais ce qui nous inquiète, c'est le fait que pendant huit jours, et si le formulaire est rempli par un employé du gouvernement, ils n'ont pas l'occasion de consulter un avocat. C'est un droit fondamental qu'ils ont, et ce droit devrait être maintenu dans la nouvelle loi.
    Corrigez-moi si j'ai tort. Selon la nouvelle loi, la première chose que vous faites, c'est une entrevue, ce qui veut dire que vous ne remplissez pas de formulaire de renseignements personnels, ou FRP. Vous faites une entrevue. Ai-je bien compris?
    C'est ce que nous avons compris.
    Qui serait à même de transcrire ce FRP? Les audiences peuvent durer une heure, ou deux heures. S'il n'y a personne... Si vous faites l'objet d'une enquête préalable, si vous entamez des poursuites, il y a quelqu'un qui sait comment diviser le tout.
    Comment ça fonctionnerait?
    Peut-être un de mes collègues veut-il répondre?
    Nous ne savons vraiment pas comment cela fonctionnerait. Je dois dire en toute honnêteté que nombre d'entre nous dans la communauté des organismes de revendications sommes déroutés par le but de cette entrevue.
    Mon collègue, Me Côté, a parlé des aspects pratiques. Je suis tout à fait d'accord, huit jours, c'est rarement suffisant pour que quelqu'un s'y retrouve le moindrement pour qu'il ait accès à un avocat de service. Comme vous le savez probablement, bien des gens sont traumatisés et vulnérables lorsqu'ils arrivent. La CISR a des procédures spéciales en place qui s'appliquent aux demandeurs vulnérables et à la façon dont on entend leur témoignage, notamment. Il est impossible de déterminer en moins de huit jours si quelqu'un est vulnérable. Il faut effectuer un examen, organiser une consultation avec un psychologue, et ainsi de suite.
    Donc, tous les aspects pratiques nous semblent totalement irréalistes. Le but nous semble très obscur. Est-ce que cela remplacera le FRP ou non?
(1555)
    Devrions-nous continuer d'employer le FRP? Est-il utile?
    Oui, du moins à mon avis et de l'avis de bien d'autres. Il s'agit d'un aspect du système qui ne semble pas particulièrement problématique: 28 jours, c'est un délai raisonnable. Vous remplissez un formulaire. Certains ont du mal à le faire en 28 jours, alors imaginez en huit, mais le système semble fonctionner assez bien. Il est difficile d'imaginer comment le fait de s'asseoir avec quelqu'un après seulement huit jours, sans objectif clair, permettra d'accélérer les choses. En fait, on ne fait qu'ajouter une procédure qui n'existe pas à l'heure actuelle. On ajoute une nouvelle procédure alors que le gouvernement prétend que le projet de loi vise à rationaliser le processus. Nous trouvons cela déconcertant.
    Les demandeurs devraient-ils pouvoir utiliser les faits et les chiffres indiqués dans leur demande de statut de réfugié pour des raisons d'ordre humanitaire quand ils déposent des demandes plus tard ou en même temps? Devraient-ils pouvoir utiliser l'information qu'ils ont fournie?
    Oui.
    Selon la proposition actuelle, les énoncés et les faits fournis dans le cadre d'une demande de statut de réfugié ne peuvent pas être utilisés pour une demande CH.
    Nous trouvons cela tout aussi déconcertant. Nous ne pouvons pas du tout comprendre le fait que vous ne pourriez ni inclure ni invoquer dans une demande CH ce que nous appelons les facteurs en vertu de l'article 96 ou 97, soit la définition de réfugié, l'article 96 de la loi, la torture, la peine cruelle ou inhabituelle et l'article 97.
    Comme il est mentionné en détail dans le mémoire du Conseil canadien pour les réfugiés, la distinction entre la discrimination, disons, qui est quelque chose de difficile à vivre, et la persécution, est pratiquement impossible à faire. Nous ne comprenons pas comment présenter une demande CH dans laquelle vous ne pourriez pas mentionner les facteurs qui pourraient être considérés comme de la persécution ou un risque pour la vie. Nous ne comprenons tout simplement pas l'objectif de ces mesures dans le projet de loi.
    Selon le modèle actuel, avant d'être renvoyé, vous avez une dernière chance et vous pouvez faire ce que l'on appelle un ERAR ou examen des risques avant renvoi. À votre avis, le projet de loi C-11 est-il censé éliminer l'ERAR?
    Le projet de loi C-11, tel que rédigé, éliminerait l'ERAR pour pratiquement tous les demandeurs déboutés sauf ceux qui n'ont pas été renvoyés en moins de 12 mois. Mais manifestement, le but est de renvoyer les gens en moins de 12 mois.
    Alors, quelqu'un vient ici, demande le statut de réfugié et les choses dans son pays d'origine empirent... Cette personne nous fournit de l'information, disons, le 1er janvier 2010, mais lorsqu'elle est renvoyée le 31 janvier 2011, les choses pourraient avoir changées, et nous ne pouvons pas en tenir compte. Les changements qui se produisent dans le pays d'origine... nous ne pouvons pas en tenir compte selon la nouvelle proposition.
    C'est ce que nous avons compris. Il n'existe aucun mécanisme pour tenir compte de l'évolution de la situation.
    Est-ce que cela vous inquiète? N'est-ce pas une sorte d'avertissement?
    Absolument. C'est effrayant. Les circonstances pourraient changer dramatiquement et il n'y aurait aucun mécanisme en place pour en tenir compte.
    Merci.
    Merci, monsieur Goldman.
    Monsieur St-Cyr.

[Français]

    Je vous remercie d'être présents aujourd'hui.
    Je vais revenir sur la question de l'entrevue, que vous avez abordée, madame Côté. J'avoue qu'on n'en a pas encore beaucoup parlé dans le cadre du comité. C'est intéressant. Le gouvernement nous a présenté la chose comme un avantage pour les demandeurs, du fait que remplir des formulaires n'est pas toujours facile, que les gens ne sont pas toujours à l'aise à l'écrit, etc. On parle de leur faire passer une entrevue avec un spécialiste pouvant les aider et les diriger correctement.
    Dois-je comprendre que vous n'adhérez pas nécessairement à ce point de vue et que vous préféreriez conserver la forme actuelle, soit un formulaire écrit?
    Exactement. Vous parlez d'un spécialiste chargé d'aider les demandeurs. Selon moi, il s'agit là du rôle de l'avocat. C'est lui qui est le spécialiste en droits des réfugiés. Il y a un genre de vide. On ne sait pas dans quel contexte va se tenir l'entrevue, quelles questions celle-ci va inclure. C'est comme si on allait piger des informations dans une boîte. Or il faudrait savoir si ces informations vont être pertinentes ou non. Les gens arrivent traumatisés, très fragiles. Ils ne font pas confiance aux autorités et ne savent pas comment répondre aux questions. Il est important qu'ils reçoivent les services et l'aide auxquels ils ont droit pour être en mesure de répondre à ces questions importantes qui vont décider de leur sort.
(1600)
    Bref, vous suggérez qu'on retire l'entrevue et qu'on garde le formulaire de renseignements personnels. Pour ce qui est des délais, rien n'est indiqué dans la loi, à l'heure actuelle. C'est dans les règlements. On a parlé de huit jours.
    Pensez-vous qu'on devrait inclure un délai minimum dans la loi, de façon à ce que les gens puissent obtenir jusqu'à un nombre donné de jours, à tout le moins s'ils le demandent? Quel serait ce délai?
    Mon collègue pourrait peut-être répondre.
    Un délai de 28 jours nous paraît raisonnable, comme je l'ai mentionné plus tôt. D'après mon expérience, ça ne convient pas à certains, mais c'est quand même raisonnable. On ne comprend pas du tout quelle est l'idée derrière les huit jours. En ce qui a trait à l'audience, je pense que certains sont prêts après 60 jours et passent à l'action sans problème.
    Par contre, d'autres ont besoin d'une expertise médicale ou psychologique, de documents provenant de leur pays, etc. S'ils ne sont pas prêts après 60 jours, pourquoi leur fixer une date d'audience pour ensuite demander un ajournement? C'est une perte de temps. On devrait passer à l'action au moment où ils sont prêts à le faire.
    Si on établissait un autre délai, par exemple 120 jours, comme l'ont suggéré d'autres organismes avant vous, est-ce que ce serait plus raisonnable, à votre avis?
    Comme point de départ, par défaut, oui. Je pense que la plupart des revendicateurs et des groupes de défense des droits seraient très satisfaits d'un tel délai. On connaît des Haïtiens, par exemple, qui attendent deux ans avant de passer en audience, alors que leur famille est dans la rue, à Port-au-Prince. Un délai de quatre mois serait raisonnable, mais à condition qu'on puisse demander une extension si on attend une expertise, notamment.
    Il n'y a aucun délai dans la loi, présentement. C'est entièrement inclus dans la réglementation. Or si on n'en inclut pas, le ministre actuel ou futur pourra déterminer, par voie de règlement, n'importe quel délai. C'est le cas de l'actuel délai de 28 jours. C'est ce qui me préoccupe.
     Partagez-vous cette préoccupation? Pensez-vous que le comité devrait inscrire dans la loi des délais minimums auxquels les gens pourraient demander d'avoir recours? Bien entendu, s'ils veulent passer plus vite à l'action, c'est très bien.
    Ce n'est pas une mauvaise idée, mais en fin de compte, si les ressources ne sont pas disponibles, ça va être un délai fantôme.
    Vous avez parlé plus tôt de la multiplication des niveaux, en ce qui a trait à l'entrevue. D'après votre compréhension de la loi qui est présentée, l'entrevue s'ajoute-t-elle au FRP, soit le formulaire individualisé, ou le remplace-t-elle?
    Pour moi, ce n'est pas clair. Je ne sais pas si ça a été clarifié dans le cadre du comité...
    Je comptais sur vous pour le faire.
    Je pense que selon les documents se trouvant présentement dans le site Web de Citoyenneté et Immigration Canada, entre autres une grille, ça le remplacerait. C'est du moins ce que j'ai compris.
    D'accord. Je pense qu'il était clair, dans toutes vos présentations, qu'il fallait retirer de la loi le concept de pays désignés. Le CCR a proposé quelque chose qui a été repris par Mme Williams, je pense, à savoir qu'on permette à l'Agence des services frontaliers d'identifier des cas sur une base individuelle plutôt que nationale, par exemple ceux qui sont davantage sujets à caution. On propose que ces cas fassent l'objet d'un traitement accéléré.
     Est-ce que les deux autres intervenants seraient également favorables à cette mesure d'accélération?
    Oui, ce serait la voie à emprunter quant aux cas considérés par l'agence comme étant mal fondés. À mon avis, il est important que les rôles demeurent clairs. Ce n'est pas le rôle de la CISR d'identifier les cas à l'avance: c'est celui de l'agence. En effet, il s'agit d'un rôle contradictoire, comme lorsque l'agence intervient à propos des exclusions. Il lui incombe de faire valoir des arguments défavorables aux demandeurs quand elle croit qu'il y a lieu de le faire. Ce n'est pas le rôle de la CISR ou de CIC. Au moins, de cette façon, c'est transparent. Il n'appartient pas à la CISR de décider quels cas devraient être traités en priorité du fait qu'ils sont considérés comme mal fondés, d'une façon ou d'une autre.
    Madame Porter, que pensez-vous de cette proposition? L'avez-vous entendue?
(1605)

[Traduction]

    Au sujet de...?

[Français]

    C'est à propos d'un mécanisme visant à accélérer le traitement.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Y êtes-vous favorable?

[Traduction]

    Oui. Les clients avec lesquels je travaille, qui reçoivent de l'aide du gouvernement par rapport à leur demande CH s'inquiètent surtout du fait que ces demandes prennent beaucoup de temps. Ce serait idéal si on pouvait accélérer le traitement.
    Merci, madame Porter.
    Madame Chow.
    Les néo-démocrates, et les bloquistes, je crois, ont dit d'emblée qu'ils n'appuieraient pas la désignation de pays sûrs. Nous estimons que tous les réfugiés devraient être traités également. Peu importe le pays dont ils proviennent, ils doivent être évalués en tant que personnes.
    À ce sujet, le Parti libéral n'a pas dit s'il appuierait ou non la désignation de pays sûrs. Certains députés ont dit qu'ils l'appuieraient; d'autres non. Le porte-parole semble dire que ça ne lui pose pas problème, mais je ne veux pas parler en son nom. Voilà pourquoi je veux en parler tout particulièrement. On a discuté du délai de huit jours, notamment, mais je pense que la désignation de pays sûrs est vraiment... compte tenu qu'environ 10 p. 100 des demandeurs de statut de réfugié proviennent de pays soit disant « sûrs » par rapport à ce qui se passe dans d'autres pays...
    Essayez-vous d'expliquer à certains députés qu'ils soient libéraux ou conservateurs, pourquoi la désignation de pays sûrs constitue un problème grave? J'aimerais inviter tous les témoins à répondre. Peut-être pourriez-vous aussi nous expliquer comment vous avisez les gens auxquels vous fournissez des services, que l'on parle de votre organisation ou de vos membres, que cet élément n'est pas acceptable dans le projet de loi?
    Je laisserai le soin à ma collègue, Mme Williams, de répondre à cette question.
    Ceux qui travaillent dans le domaine de l'immigration depuis très longtemps — je répète, très longtemps — se souviennent que nous avions autrefois un fondement crédible, un minimum de fondement. À l'époque, l'idée semble presque identique à ce que nous faisons, à ce qui est proposé maintenant dans la loi.
    La désignation de pays sûrs constitue un effort ou une tentative visant à minimiser, à réduire, le nombre de demandes. Il semble qu'il s'agisse de l'un des facteurs principaux du nouveau projet de loi. Mais cela contredit tout à fait la détermination du statut de l'individu. Toute la convention portant sur le statut de réfugié tourne autour du fait qu'un individu doit prouver pourquoi il est persécuté ou pourquoi sa vie est en danger, et nous lui retirons cette possibilité lorsque nous désignons les pays entiers. Comme nous l'avons mentionné auparavant — on pourrait même revenir au cas cité par Richard un peu plus tôt — les cas entourant le genre et l'orientation sexuelle... On peut venir d'un pays qui a des normes minimales en matière de droits de la personne. Mais il y aura toujours certains individus qui seront ciblés.
    Prenons ce que le Malawi fait dans les cas d'orientation sexuelle, tout comme le Zimbabwe et d'autres pays en Afrique. Je pense que désigner ces pays sera cauchemardesque. Et il n'est pas nécessaire de le faire. Il s'agit d'une réelle contradiction dans la loi. Mais en même temps, nous comprenons — je pense que la plupart des gens sont assez réalistes — que des demandes moins fondées suscitent quelques préoccupations, comme nous les décrivons, qui ne semblent pas atteindre le même niveau... pourquoi ne pas accorder la priorité à ces demandes? Le processus d'accélération, qui donne une chance aux gens d'être entendus, de voir une décision rendue ou d'interjeter appel — nous espérons — s'ils ont l'intention de le faire, alors pourquoi pas?
    Que faisons-nous avec notre propre groupe-client? Nous sommes une organisation responsable. Nous rencontrons les gens en détention. Nous n'avons pas d'agent qui travaille à l'étranger pour aider les gens ou leur dire quoi dire ou quand le dire. Je pense que les gens auront beaucoup de mal à comprendre qu'il y a ici deux processus — l'un si l'on vient d'un pays ou de plusieurs pays, l'autre si l'on vient d'autres pays — et de savoir comment se préparer. Encore une fois, cela revient toujours à la documentation. Et certains d'entre eux...
    Ce n'était pas vraiment ma question. Ma question était la suivante: que faites-vous pour indiquer à vos élus que ce projet de loi n'est pas acceptable?
    Eh bien, nous espérons que l'intervention d'aujourd'hui sera utile. Il s'agit d'un programme humanitaire qui est complexe. Tout le monde est d'accord. L'immigration n'est pas du tout simple.
    Nous sommes ici aujourd'hui. Action Réfugiés Montréal a également écrit aux députés. Les membres de notre conseil ont tous signé ce document, qui indique que ce projet de loi est inacceptable et que nous n'allons pas atteindre nos objectifs en matière d'équité et d'accélération du processus. Cela ne réduira pas les chiffres. Le minimum de fondement, en 1989, était un échec complet et cuisant. Il a créé un autre niveau de bureaucratie qui coûte de l'argent et n'a pas atteint son objectif. Pourquoi répéter cette erreur?
(1610)
    Merci.

[Français]

    J'abonde dans le même sens que Mme Williams. En observant un peu ce qui se passe dans les pays européens qui ont fait plusieurs tentatives... Plusieurs pays ont essayé d'utiliser ce concept de pays désignés pour réduire l'accès ou pour renvoyer plus rapidement les gens et, sur toute la ligne, ça a été un désastre. Ça n'a pas fonctionné.
    Il y a un dernier exemple en titre: en Allemagne actuellement, devant la Cour constitutionnelle, on conteste le fait que la Grèce soit désignée comme un pays sûr. Il y a de bonnes chances que la Cour constitutionnelle accepte le fait que la Grèce n'est pas en effet un pays sûr pour un renvoi.
    Sans arrêt, c'est ingérable autant en ce qui a trait aux critères pour lesquels un pays serait désigné, autant pour le casse-tête diplomatique que ça pourrait engendrer.

[Traduction]

    Si on veut simplifier ou accélérer les choses, nous pensons que l'accès à un processus d'appel est probablement l'une des pires façons de le faire. La Section d'appel des réfugiés serait conçue de façon à corriger les erreurs, il semble donc illogique d'éliminer une étape qui est là pour corriger les erreurs et pour établir une jurisprudence claire.
    Pour utiliser l'exemple du Mexique, Peter Showler, l'ancien président de la SAR, a souligné que de nombreuses personnes sont en danger au Mexique. Certaines ne le sont peut-être pas. C'est ce genre de décisions qui se fondent souvent sur la crédibilité et doivent profiter d'une étude menée par la commission; et l'appel pourrait établir une jurisprudence claire qui faciliterait énormément la prise de décisions par le premier niveau.
    Merci, monsieur Goldman.
    Madame Grewal, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, mesdames et messieurs, pour votre temps et vos présentations.
    J'ai quelques questions, mais elles sont très simples. J'aimerais savoir si vous pensez que le système de prise en charge des réfugiés se prête aux abus.
    Oui, tout à fait. Nous sommes entièrement d'accord. La situation n'est pas idéale au départ. Le système a des problèmes qui doivent être réglés.
    Comme le gouvernement l'a indiqué, l'un de ces problèmes est l'attente extrêmement longue de traitement des demandes de statut de réfugié. Plus une personne attend longtemps, plus c'est injuste pour les véritables réfugiés, mais plus l'idée de présenter une demande frauduleuse est séduisante. Il faut absolument régler ce problème.
    Il y a certains problèmes concernant les procédures de nomination des membres de la commission. De grandes améliorations ont été apportées au fil des ans, mais le système n'est toujours pas entièrement dépolitisé. Nous pensons qu'il devrait être entièrement fondé sur le mérite et que les nominations devraient être décidées par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié elle-même, en se fondant entièrement sur le mérite. Je m'écarte peut-être de la question des abus.
    Il faut apporter des améliorations, mais le système est foncièrement très solide et constitue un modèle pour les pays de partout dans le monde. Nous pensons qu'il est très sage d'avoir une décision de premier niveau rendue par un tribunal indépendant et professionnel; si on obtient la meilleure décision possible la première fois, alors on se préoccupe moins de corriger les erreurs et on a moins de chance de voir les gens abuser du système.
    Quelqu'un d'autre aimerait-il répondre? Très bien.
    Comment ces réformes sont-elles positives pour les demandeurs?
    Parlez-vous des réformes actuelles?
    Oui.
    Eh bien, il y a certains aspects très positifs. Depuis l'adoption de la LIPR, en 2001, nous, ainsi que de nombreuses autres personnes, disons qu'il devrait y avoir une section d'appel des réfugiés. Nous félicitons le gouvernement d'en avoir finalement créé une.
    Pour ce qui est des délais, nous pensons que huit jours et 60 jours relèvent malheureusement de la fantaisie, je le dis en me fondant sur l'expérience de 20 ans que j'ai avec le système. Ces délais irréalistes sont mis de côté très rapidement, mais si une décision était rendue et qu'une audience avait lieu, que ce soit en deux mois, quatre mois ou six mois, ce serait une amélioration énorme pour les réfugiés authentiques.
(1615)
    Compte tenu de la mise en oeuvre de cette nouvelle section d'appel des réfugiés et de l'accès continu à l'objectif des réfugiés, pensez-vous qu'il soit raisonnable de limiter l'accès aux autres moyens de recours et de permettre un court délai pour expulser un demandeur déchu?
    Je pense qu'on ne peut expulser un demandeur déchu qu'une fois qu'il a fait toutes les démarches. Comme Rick vient de le mentionner, la Section d'appel des réfugiés arrive à point nommé. Nous attendons depuis 2002, depuis l'adoption de la loi, et nous pensons qu'il est extraordinaire que cette réforme l'ait créée.
    Si vous parlez de l'évaluation des risques avant renvoi et des CH, l'examen des risques avant renvoi ne fonctionne pas tellement bien. Une section d'appel des réfugiés efficace nous satisfait certainement beaucoup plus qu'un examen des risques avant renvoi. Selon nous, il s'agit d'un excellent échange du point de vue de l'équité.
    Pour ce qui est des demandes pour les motifs humanitaires, comme je l'ai dit un peu plus tôt dans mon exposé, nous ne voyons pas pourquoi cela est éliminé. C'est le seul cas dans lequel l'intérêt supérieur de l'enfant, par exemple, nos obligations au titre de la Convention sur les droits de l'enfant, est réellement examiné dans la prise de décisions visant à déterminer si un enfant ou une famille peuvent rester ou non au Canada, sans suspendre le renvoi. Nous ne voyons absolument pas pourquoi cette approche est éliminée.
    Madame Wong.
    Ma question s'adresse à l'Association for New Canadians. J'ai l'impression que vous n'avez pas eu la possibilité de répondre aux deux questions que Mme Grewal vient de poser. Pensez-vous que le système actuel se prête aux abus, selon votre expérience?
    Je pense effectivement que le système actuel se prête aux abus, et c'est l'une des raisons pour lesquelles certains de mes collègues parlaient d'un système d'établissement des priorités. C'est une bonne possibilité pour les demandeurs de parler de leurs histoires sans fermer... avoir ces systèmes en place. Mais en même temps, il est très difficile de déterminer qui décide qu'une demande n'est pas correcte ou suffisamment raisonnable pour que la personne obtienne le statut de réfugié.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute entière.
    Je crois comprendre qu'en Angleterre, le système des pays d'origine sûrs est utilisé. Au Ghana, par exemple, les hommes ne sont pas considérés comme vulnérables dans le cadre des demandes de statut de réfugié, mais les femmes le sont en raison de certaines pratiques ayant cours contre les femmes dans ce pays. Selon vous, pourrait-il s'agir d'une sorte de solution, si c'est ce qui vous préoccupe?
    Vous pouvez tous répondre à cette question.
    Je ne pense pas que nous comprenions bien la question.
    L'un des problèmes que je... oh, excusez-moi.
    Allez-y, madame. Nous pouvons vous écouter.
    L'un des problèmes que me pose toute cette question entourant les pays sûrs et les pays désignés comme étant sûrs, c'est que cela met de côté les cas individuels. Il peut y avoir un homme au Ghana qui vit une expérience tout à fait horrible, mais son cas serait-il entendu dans d'autres pays sûrs, en particulier un pays comme le Mexique?
    Je suis certaine que ces demandeurs seront entendus dès le départ.
    Excusez-moi, vous n'avez plus de temps.
    Monsieur Dryden, bienvenue au comité. Vous avez cinq minutes.
    Merci monsieur le président.
    Vous avez tous parlé en des termes assez évocateurs des huit jours et des 60 jours ainsi que des pays désignés. J'aimerais donc vous demander ce qui suit. Imaginons que ce système soit mis en place demain et qu'après cinq ans nous ayons pu le voir à l'oeuvre. Qu'est-ce qui se passerait? Quelle serait l'expérience vécue par chacun de ces demandeurs? Qui réussirait? Qui échouerait? Pourquoi échoueraient-ils? Si, en fait, cela devait arriver, qu'est-ce qui se passerait?
(1620)
    Je pense que nous verrions des gens qui seraient renvoyés à des destins inconnus, parce que leurs demandes auraient été rejetées. Nous parlons de personnes. Nous avons tous tenté de présenter des êtres humains avec qui nous avons travaillé ces dernières années, et la loi au sujet des réfugiés porte sur des personnes et leur vie. Dans le domaine de la détention, nous avons vu des gens qui n'ont pas pu faire une demande de statut de réfugié alors qu'elles en avaient l'intention, et dans certains cas, elles ont été renvoyées et ont fini en prison. J'ai travaillé avec des Iraniens qui se sont retrouvés à la prison d'Evin.
    Je pense que nous ne devons pas perdre de vue le fait que dans cinq ans, nous pourrions voir davantage de cas de gens qui verraient leurs demandes refusées à tort, exclus très rapidement et faire l'objet de conséquences que nous ne subissons pas.
    Quelqu'un d'autre?
    Je suis tout à fait d'accord. Je dois dire, honnêtement, qu'il est difficile d'imaginer que le système tel qu'il est présenté pourrait fonctionner. Il reste tant de questions. À quoi sert l'entrevue de huit jours? Comment serait-elle réalisée?
    Mais disons que l'initiative est lancée. Certaines personnes ne seront sans doute pas prêtes à parler. Je me suis retrouvé dans mon propre bureau avec des gens qui étaient ici depuis deux ans et qui étaient si traumatisés qu'il a fallu une heure avant qu'elles soient prêtes à parler de...
    Ce que j'essaie de faire, encore une fois, c'est d'imaginer que le système est en place. Ces demandeurs du statut de réfugié ont huit jours pour l'entrevue. Vous avez dit qu'il s'agit d'une période inadéquate. Ils ne disposent que de huit jours, puis ils arrivent à la période de 60 jours. Ils doivent faire beaucoup de choses pendant cette période de 60 jours et de nombreux renseignements ne sont pas faciles à obtenir en 60 jours. Ils doivent déposer un dossier et présenter de bons arguments lorsque l'audience arrive, après un certain nombre de jours, tout en ayant moins accès, semble-t-il, à l'information qui pourra prouver l'authenticité de la demande.
    Concrètement, c'est ce que je veux dire. Qu'est-ce qui va arriver? Qui sera pénalisé par tout ceci? Quelles sont les circonstances individuelles qui seront problématiques ici?
    Je pense que je comprends mieux votre question maintenant. Pour ce qui est de ceux qui seront pénalisés par l'entrevue de huit jours, au cours des années, il y a eu toutes sortes d'expériences avec ce que l'on appelle les notes prises au point d'entrée, lorsqu'un réfugié arrive à la frontière ou à l'aéroport et subit une courte entrevue au cours de laquelle les questions sont très peu structurées et les notes sont prises de façon très sommaire. Au cours des années, nous avons souvent vu ces mêmes notes utilisées lors de l'audience de détermination du statut de réfugié, alors qu'on demandait: « Oh, pourquoi n'avez-vous pas mentionné ceci et cela pendant l'entrevue? » ou « Vous avez dit quelque chose d'un peu différent à l'aéroport », et ces notes sont utilisées et ont de graves conséquences sur la crédibilité d'une personne.
    En fait, c'est une bataille qui se joue devant la CISR et les tribunaux depuis plus de 20 ans, jusqu'au point où Citoyenneté et Immigration Canada et l'ASFC ont plus ou moins laissé tomber les notes prises au point d'entrée parce qu'elles causent plus de problèmes qu'elle ne permettent d'en résoudre. Pourtant, le gouvernement...
    J'invoque le Règlement.
    Un rappel au Règlement.
    Excusez-moi, la suggestion et la recommandation sur ce que sera l'entrevue de huit jours et le fait de parler des notes qui sont prises au point d'entrée sont des choses absolument distinctes et différentes. Il n'est pas juste d'en parler.
    Ce n'est pas un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Je ne pense pas que ce soit un rappel au Règlement.
    J'aimerais dire, même s'il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement, que nous ne connaissons pas l'utilité, de sorte que si ce n'est pas...
    Je serais heureux de vous en parler. Il me ferait plaisir de vous le faire savoir.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement, si vous me le permettez.
    Rappel au Règlement, monsieur le président.
    Monsieur Karygiannis, vous invoquez le Règlement.
    Monsieur le président, je pense qu'une question a été posée aux témoins. Ils ont le droit d'y répondre. Je ne pense pas que M. Dykstra devrait intervenir et les harceler.
    Monsieur Karygiannis, j'ai parlé à M. Dykstra, nous passons à autre chose.
    Monsieur Goldman.
(1625)
    Pour répondre à votre question du mieux que je le peux au sujet de ceux qui seront pénalisés, je pense que cela ramènerait un problème semblable à celui des notes prises au point d'entrée dans le système. Les gens qui pouvaient être très vulnérables, incapables de parler de leurs expériences, se verraient donc attribuer les notes qui les suivraient pendant tout le processus, et pourraient ensuite être utilisées pour dire: « Pourquoi n'avez-vous pas dit ceci? » ou « Vous avez dit quelque chose d'un peu différent. Vous n'êtes pas crédible. Nous ne vous croyons pas. Vous n'êtes pas un réfugié. »
    Merci.
    Monsieur St-Cyr.

[Français]

    Je poserai mes questions en rafale, car je veux connaître votre opinion sur un certain nombre de sujets.
    Dans la loi qui est devant nous, il y a le nouveau paragraphe 25(1.3), selon lequel lors de l'étude d'une demande de résidence permanente pour des motifs humanitaires, le ministre va exclure de l'étude les « facteurs servant à établir la qualité de réfugié».
    Êtes-vous favorable au retrait de cet article de la loi?
    Oui, je pense que M. Goldman l'a mentionné. Il a expliqué les raisons pour lesquelles, en effet, ce n'est pas une bonne idée.
    Êtes-vous d'accord avec lui? Bien.
    Dans le même article, à l'alinéa 25(1.2)c), on mentionne aussi l'interdiction de faire une demande pour motifs humanitaires dans les 12 mois qui suivent, y compris lorsque le désistement a lieu avant même que l'audience ait été tenue.
    Ne penseriez-vous pas qu'on devrait plutôt permettre aux gens qui se désistent avant l'audience de passer par la voie de demande pour motifs humanitaires, ne serait-ce que pour des raisons d'efficacité? Ça éviterait que des gens qui s'aperçoivent qu'ils ont fait une erreur soient bloqués dans la voie des réfugiés, alors qu'ils auraient dû emprunter la voie des motifs humanitaires?
    De toute façon, comme on l'a dit, on ne voit aucune justification pour supprimer la voie des demandes pour motifs humanitaires. S'il fallait la supprimer, ce serait mieux, au moins, d'ouvrir la porte aux personnes qui se sont désistées de leur demande de réfugié. De toute façon, on ne voit aucunement comment on justifie, en matières d'efficacité et d'équité, la suppression de la voie des motifs humanitaires.
    D'accord.
    En plus de ces raisons, on veut garder la voie des demandes pour motifs humanitaires parce qu'on s'est aperçu que, parfois, on peut lire dans les décisions de la CISR que des personnes refusées devraient être acceptées pour motifs humanitaires parce qu'elles auraient besoin de protection, mais qu'elles ne correspondaient pas aux définitions des réfugiés.
    C'est très important qu'on garde cette possibilité de recours.
    Par ailleurs, on a parlé de prendre la bonne décision à la première étape. Des gens qui ont témoigné devant nous ont suggéré que les fonctionnaires qui vont étudier le cas au premier niveau, plutôt que d'être nommés en suivant les règles de la fonction publique, soient nommés par le président du conseil —, un peu au même titre que le directeur général des élections nomme les directeurs du scrutin. Donc, qu'on permette au président du conseil, de la commission, d'aller chercher directement dans le grand public des éléments particulièrement compétents à ce sujet.
    Êtes-vous favorable à cette proposition?
    Tout à fait. On n'a rien contre les fonctionnaires, mais on pense que le bassin de candidats ne devrait pas être restreint aux fonctionnaires. D'ailleurs, cela devrait être basé sur le mérite, que ce soit un fonctionnaire, un travailleur communautaire, un avocat ou un universitaire. Il faut que ce soit complètement au mérite et que les personnes soient nommées par la commission elle-même.
    Y êtes-vous favorable aussi?
    Oui.
    Dans la loi, présentement, il y a des dispositions qui disent que le ministre peut réglementer les représentants des demandeurs et à quel moment un demandeur peut être représenté en ce qui concerne son dossier.
    Par contre, rien n'est dit précisément — à mon sens — qu'en tout temps et pendant tout le processus, quelqu'un peut être représenté par un avocat, peut être, à tout le moins, accompagné et conseillé par un avocat. Je ne l'ai pas vu dans la loi.
    Partagez-vous cette préoccupation? Pensez-vous qu'on doive, pour être sûr, mettre dans la loi qu'en tout temps, à n'importe quelle étape, un avocat puisse être assis aux côtés du demandeur pour le conseiller?
    C'est évident que l'avocat est nécessaire à toutes les étapes du processus. Présentement, les avocats ne sont pas toujours présents aux entrevues à l'aéroport et avec les agents d'immigration. C'est évident que leur présence est nécessaire.

[Traduction]

     Merci.
    Voilà qui met fin à notre séance avec vous. Je tiens à vous remercier tous pour votre contribution à nos travaux. Nous avons pris bonne note de vos observations et merci encore une fois.
    Merci aussi à notre témoin à Terre-Neuve-et-Labrador.
    Merci à vous.
(1630)
    Nous suspendons nos travaux pour quelques instants.

    Nous reprenons nos délibérations, mesdames et messieurs.
    Nous entendrons quatre témoins.
    Chacun des témoins aura sept minutes de temps de parole pour traiter du projet de loi C-11.
    Nous accueillons M. John Norquay, avocat-conseil en immigration pour la clinique d'aide juridique sur le VIH et le sida, en Ontario.
    Où se trouve votre organisme?
(1635)
    À Toronto, très bien.
    Soyez le bienvenu.
    Merci.
    Nous entendrons également, par vidéoconférence, M. David Matas qui est avocat.
    Également présent, M. Ezat Mossallanejad, du Centre canadien pour victimes de torture, analyste des politiques et recherchiste pour cet organisme.
    Enfin, nous entendrons par vidéoconférence M. William Bauer, qui se trouve à London et est l'ancien ambassadeur du Canada et membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada.
    Je vous accorderai chacun un maximum de sept minutes.
    Commençons par M. Norquay, qui est ici avec nous.
    À vous, monsieur Norquay.
    Merci.
    Je remercie votre comité de me permettre de lui présenter le point de vue de mon organisme sur le projet de loi C-11. Je m'en tiendrai aux modifications proposées aux articles de la LIPR traitant de la prise en compte des raisons d'ordre humanitaire.
    J'exhorte le comité à examiner de près les modifications proposées aux demandes CH dans le projet de loi. Alors que beaucoup de modifications proposées sont de nature procédurale, celles qui touchent les demandes CH comprennent un changement au genre de cas pouvant être acceptés. Ces mesures représentent un virage par rapport à la tradition canadienne qui existe depuis des décennies de prendre en considération les raisons d'ordre humanitaire et le principe de l'équité en common law dont elle s'inspire.
    Je dois vous interrompre, monsieur. Tout ce que vous dites est interprété en français, si bien que je vous demanderais de parler un peu plus lentement.
    Désolé. Merci de ce conseil.
    Mon organisme, HIV and AIDS Legal Clinic Ontario, est un service d'aide juridique sans but lucratif desservant les personnes séropositives ou atteintes du sida en Ontario depuis 1995. Une proportion importante des 4 000 demandes de services que nous recevons chaque année ont trait au droit de l'immigration et au droit d'asile; au fil des ans, nous avons donné des services d'aide juridique à des centaines de personnes séropositives qui demandaient le droit d'asile au Canada.
    Permettez-moi de situer un peu le contexte avant de commenter le projet de loi proprement dit. La situation des Canadiens séropositifs s'est énormément améliorée au cours des 20 dernières années. Grâce à la découverte de médicaments antirétroviraux efficaces, beaucoup d'entre eux jouissent maintenant d'une espérance de vie semblable à celle de l'ensemble des Canadiens.
    Malheureusement, dans beaucoup de pays en développement, l'infection par le VIH demeure une condamnation à mort. L'espérance de vie est grandement réduite par la pénurie de médicaments anti-VIH et la perturbation des services de santé engendrée par des conflits civils et l'instabilité économique. De plus, les personnes séropositives font face à une hostilité presque inimaginable pour nous de la part de la population. Ils peuvent être rejetés carrément par leur famille et leurs amis, expulsés de leurs villages parce qu'on craint la maladie et être quasiment incapables de trouver du travail ou un logis.
    La situation dans laquelle se trouvent les chercheurs d'asile séropositifs et d'autres personnes en situation irrégulière au Canada explique pourquoi les motifs d'ordre humanitaire ont toujours pu être évoqués et demeure un recours capital de nos jours. Ils permettent d'accorder l'asile d'une façon discrétionnaire aux personnes se trouvant dans des situations non prévues par les lois d'immigration; autrement dit, aux personnes qui autrement seraient laissées pour compte.
    On cite souvent une affaire de 1970, Chirwa, selon laquelle les motifs d'ordre humanitaire s'appliquent aux cas qui inciteraient une personne raisonnable dans une société civilisée à vouloir soulager la souffrance d'autrui. D'après cette analyse, on considère tous les éléments et toutes les circonstances de la personne.
    Bien sûr, les décisions fondées sur des motifs d'ordre humanitaire sont discrétionnaires et c'est au demandeur qu'il incombe de plaider sa cause. Il n'y a pas de règle absolue quant aux cas devant être acceptés. Les lignes directrices du ministère en la matière parlent seulement de difficulté indue, non méritée ou disproportionnée.
    Au cours des 15 dernières années, beaucoup de nos clients séropositifs qui étaient aux prises avec des difficultés extrêmes dans leur pays d'origine ont été accueillis au Canada sur la base de motifs humanitaires. Cela vaut également pour les demandeurs d'asile déboutés et pour ceux qui n'ont jamais présenté de demandes d'asile.
    Si le projet de loi C-11 est adopté tel quel, la plupart sinon tous les demandeurs d'asile accueillis pour des motifs d'ordre humanitaire n'auraient pas pu faire une demande ou, s'ils l'avaient fait, cette demande aurait été rejetée. Cela aurait entraîné l'expulsion de personnes et de familles séropositives dont certaines mènent une vie productive et en santé au Canada à leur pays d'origine où leur vie aurait été mise en danger à cause de systèmes de santé déficients ou d'atteinte grave aux droits fondamentaux de la personne.
    Les deux articles en question sont, premièrement, le paragraphe 25(1.2), qui interdit les demandeurs d'asile qui invoquent des motifs d'ordre humanitaire de présenter une nouvelle demande moins d'un an après le rejet de leur demande. La deuxième disposition est le paragraphe 25(1.3), qui interdit à tous les demandeurs d'asile qui souhaitent invoquer des motifs d'ordre humanitaire d'invoquer de présenter des arguments en rapport avec le risque personnalisé.
    En ce qui concerne l'interdiction d'un an, il est fréquent que des demandeurs d'asile séropositifs présentent une nouvelle demande pour des motifs humanitaires immédiatement après avoir été déboutés, lorsqu'il n'existe pas dans leur pays des possibilités appropriées des traitements de l'infection par le VIH. La Commission de l'immigration et du statut de réfugié ne pourra pas tenir compte du fait que leur vie est en danger à cause d'une pénurie de soins de santé parce que ce motif est expressément exclu par le sous-alinéa 97(1)b)iv) de la LIPR.
    La CISR ne pourra pas admettre ces demandeurs dont la vie est en danger parce qu'ils sont séropositifs. Un agent d'examen des motifs humanitaires peut admettre ces cas et, d'après mon expérience, le fait pratiquement toujours. Mais il sera impossible de présenter une nouvelle demande dans l'année qui suit le rejet d'une demande CH.
    Et ce qui est encore pire, la plupart des demandeurs d'asile ne savent pas qu'ils sont séropositifs avant de passer l'examen médical exigé des demandeurs d'asile. Il est alors trop tard pour fonder sa demande sur des motifs d'ordre humanitaire au lieu d'invoquer le statut de réfugié parce que l'interdiction d'une année s'appliquerait même s'ils retiraient leurs revendications du statut de réfugié.
    Nous croyons par ailleurs que cette interdiction d'un an pousserait vers la clandestinité les demandeurs déboutés malgré de sérieux motifs humanitaires. Car si une personne demande l'asile pour de sérieuses raisons humanitaires et sait le danger qu'elle si elle retourne dans son pays d'origine, elle fera naturellement tout ce qu'elle pourra pour éviter son renvoi et demeurer au Canada, dans l'espoir qu'après un an, elle puisse faire admettre une nouvelle demande fondée sur des motifs humanitaires. Évidemment, cela ferait grimper les coûts d'application de la loi et entraînerait des litiges coûteux.
(1640)
    Comme l'ont dit d'autres témoins qui ont comparu devant vous, le fait de présenter une demande par un organisme n'entraîne pas de sursis aux mesures de renvoi. Beaucoup de témoins ont remis en question la nécessité d'une interdiction d'un an ou l'interdiction d'une demande simultanément présentée par un organisme, et je suis d'accord avec eux.
    Il vous reste moins d'une minute.
    Merci.
    J'ai beaucoup d'inquiétude également au sujet du paragraphe 25(1.3) proposé, qui restreint les facteurs dont peut tenir compte un agent d'immigration au moment d'étudier une demande fondée sur des motifs humanitaires. Cette disposition vise à éliminer la prise en compte de facteurs liés à des décisions relatives au statut de réfugié ou au risque pour la vie ou au risque de torture, aux termes de l'article 97. À l'heure actuelle, les agents peuvent présenter les faits comme ils le souhaitent. J'imagine que cette disposition vise à empêcher les demandeurs d'asile déboutés de faire une nouvelle tentative, c'est-à-dire d'invoquer certains faits dans une demande fondée sur des motifs humanitaires pour voir s'ils pourraient avoir gain de cause. Le problème, c'est que cet article va bien au-delà de cet objectif, d'une façon qui, à mon avis, n'est pas justifiée. Premièrement, il restreint la prise en compte de tous les facteurs de risque personnalisés, que la personne ait ou non présenté une demande d'asile, et encore moins soulevé ces facteurs de risque dans une demande fondée sur des motifs humanitaires. Dans le cas de mes clients, l'agent d'immigration ne pourrait pas tenir compte du fait qu'il leur est impossible de trouver du travail à cause d'un test obligatoire de dépistage du VIH ou du fait qu'ils seraient expulsés de leur logement parce qu'ils sont séropositifs.
    Désolé, mais vous devez conclure, monsieur.
    Pour gagner du temps, je pourrais peut-être...
    Je sais que les membres du comité vous poseront des questions sur tous ces aspects.
    En effet, et j'essaierai d'inclure ces éléments d'information dans mes réponses.
    Merci, monsieur.
    Monsieur David Matas.
    Le projet de loi C-11 est intitulé Loi sur des mesures de réforme équitables concernant les réfugiés. On prétend qu'il vise à concilier une meilleure protection des réfugiés et une meilleure prévention des abus.
    Pour ce faire, il faut que cinq conditions soient réunies: premièrement, il doit être nécessaire d'améliorer la protection des réfugiés; deuxièmement, le projet de loi doit effectivement améliorer cette protection; troisièmement, il faut mieux prévenir les abus; quatrièmement, le projet de loi doit effectivement améliorer la prévention des abus; et cinquièmement, on doit renforcer tant la protection des réfugiés que la prévention des abus, et ce, de façon à peu près égale.
    Le projet de loi répond-il à ces cinq exigences? Il répond certainement à la première condition. Il faut effectivement améliorer la protection des réfugiés, parce qu'il n'y a pas de système d'appel à l'heure actuelle et qu'il en faut un.
    Le projet de loi corrige-t-il cette lacune? Oui, mais partiellement. Il établit une section d'appel, mais trois problèmes se posent. Premièrement, tous les demandeurs déboutés ne peuvent pas interjeter appel; c'est le cas de ceux qui proviennent de pays désignés. Deuxièmement, même pour les autres demandeurs, il peut y avoir un délai de deux ans avant l'entrée en vigueur des dispositions relatives au droit d'appel. Troisièmement, le système réduit les protections dans d'autres domaines en éliminant partiellement le recours à des demandes fondées sur des motifs humanitaires, les permis de résidence temporaire et l'évaluation des risques avant le renvoi.
    Je reviens à la troisième question: Y a-t-il des abus qu'il faudrait corriger? À mon avis, le processus est trop long. Il y a de longs délais et qu'ils soient attribuables ou non à des abus, on n'a pas à en juger parce que ces longs délais ne servent l'intérêt de personne, ni des véritables réfugiés, ni du système, bien entendu.
    Le projet de loi réussira-t-il à raccourcir les délais? Il y a en principe deux causes pour ces délais. La première est la fragmentation du système en de nombreuses étapes qui prennent du temps. S'il y a trop d'étapes, cela prend trop de temps. S'il y a des étapes inutiles, on perd du temps. Sous sa forme actuelle, le projet de loi ne s'attaque pas à cette cause des longs délais. En ce moment, le système comporte deux étapes inutiles: la détermination de l'admissibilité et l'évaluation des risques avant renvoi. Ces étapes demeureront. Je ne dis pas que l'évaluation de l'admissibilité et des risques avant renvoi n'ont pas leur place dans le processus, mais il faut faire la distinction entre les étapes et les normes. Il n'est pas nécessaire d'ajouter une étape différente pour chaque norme. La détermination de l'admissibilité pourrait être faite par la commission qui déciderait de l'exclusion ou de sa compétence. La commission pourrait également évaluer les risques avant renvoi au moment de rouvrir la demande.
    En fait, le projet de loi ajouterait une nouvelle étape, soit l'entrevue, qui va venir allonger encore le processus. On a entendu parler de huit jours pour l'entrevue et de 60 jours après l'entrevue pour l'audience par la commission, mais cela semble quelque peu irréaliste. Premièrement, ni le gouvernement ni le ministre ne détermine ces délais; aux termes du règlement, c'est le commissaire qui le fait. Deuxièmement, les délais ne peuvent être respectés que s'ils sont réalisables. Il est impossible pour le demandeur et pour la commission de tenir l'entrevue huit jours après la présentation de la demande. Il y a eu bien des cas dans le passé où nous avons légiféré pour établir des délais qu'il était impossible de respecter parce qu'ils étaient tout simplement irréalistes.
    Prenez par exemple la règle des trois jours, selon laquelle l'admissibilité doit être déterminée dans les trois jours suivant la présentation d'une demande. Dans la pratique, cette règle n'est presque jamais respectée dans le cas des demandes présentées dans des points d'entrée terrestres; en principe, elle n'est respectée que parce que les trois jours commencent à s'écouler à partir du moment où les agents peuvent les respecter. Voilà ce qu'il adviendra des délais pour l'entrevue, dans la pratique.
    À moins d'ajouter de nouvelles ressources, il faudra prendre des ressources ailleurs pour réaliser les entrevues. On ne peut pas savoir d'avance de combien cela allongera le processus, mais ce sera sans doute assez long.
(1645)
    Une étape qui n'entraîne pas de retards, contrairement à ce que les auteurs du projet de loi semblent penser, est une demande de résidence permanente fondée sur des motifs humanitaires ou une demande de résidence temporaire. Par conséquent, on a imposé des restrictions à ces demandes, ce qui ne raccourcit pas les délais de renvoi parce que les personnes peuvent actuellement être renvoyées pendant l'examen de telles demandes.
    Outre les étapes inutiles, les arriérés contribuent à l'allongement des délais. Si le système est débordé, il y a une liste d'attente. Or, l'accumulation des demandes en souffrance ne dénote pas nécessairement des abus; ce peut être simplement attribuable à une capacité insuffisante par rapport au nombre de demandes.
    Deux raisons sont à l'origine de l'accumulation de demandes non traitées. Il y a premièrement le changement du processus de nomination depuis l'arrivée au pouvoir du nouveau gouvernement et le fait qu'aucun commissaire n'a été nommé pendant quelques années en attendant que le système soit modifié, ce qui a entraîné un important arriéré. Les effectifs de la commission sont maintenant complets, mais l'arriéré n'a pas disparu. Deuxièmement, il y a les nombreuses demandes présentées par des ressortissants de la République tchèque et du Mexique avant l'instauration du visa obligatoire. Maintenant qu'on exige des visas, ces délais devraient se résorber.
    Les rédacteurs du projet de loi semblent penser que si on accélère le système, on pourra lever l'exigence d'un visa pour la République tchèque et le Mexique et peut-être pour d'autres pays. À mon avis, c'est une opinion irréaliste. Si le délai est assez court pour dissuader les gens originaires de pays pour lesquels aucun visa n'est exigé, le système ne sera pas efficace pour ce qui est de protéger les véritables réfugiés.
    Le projet de loi ne parvient pas à assurer l'équilibre qu'il est censé établir parce qu'il sera mis en oeuvre progressivement: des mesures d'application de la loi, la restriction de l'accès à des demandes de résidence temporaire fondées sur des motifs humanitaires vont entrer en vigueur immédiatement. La section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié ne sera établie, quant à elle, que deux ans plus tard.
    Or, les problèmes sont trop pressants pour qu'on attende aussi longtemps. Comme on a réduit les mesures de protection, en limitant l'accès à différents mécanismes qui existent à l'heure actuelle, on a fait un pas en avant avec la section d'appel de la CISR et deux pas en arrière. Le résultat net est que...
(1650)
    Pardonnez-moi, monsieur, mais il vous faudrait conclure. Je suis vraiment désolé, pourriez-vous terminer?
    Il me reste une phrase, pour conclure.
    Parfait.
    Au bout du compte, il y a détérioration.
    Merci.
    Je représente une organisation de première ligne qui aide les survivants de la torture, de la guerre, de génocide et de crimes contre l'humanité. Je prends également la parole en ma qualité de travailleur de première ligne au centre et d'ancien réfugié ayant passé par le processus.
    Depuis 33 ans, le Centre canadien pour victimes de torture a aidé plus de 16 000 survivants de 130 pays. Je vais donc vous faire part de certaines de nos préoccupations.
    Tout d'abord, notre première préoccupation concerne l'entrevue après huit jours. Notre expérience nous a montré que 50 p. 100 des demandeurs d'asile au Canada ont subi les affres de la guerre ou de la torture. Lorsqu'ils arrivent ici, ils sont grandement traumatisés. La plupart du temps, dès leur arrivée, ils ne peuvent pas divulguer tout ce qu'ils ont dû endurer. C'est particulièrement vrai pour les victimes de viol et d'autres types de torture fondés sur le genre.
    Ensuite, nous soutenons que la période de 60 jours prévue n'est ni juste ni faisable. Les victimes de torture ont souvent besoin d'une évaluation psychologique ou médicale, laquelle peut parfois nous prendre deux mois parce qu'il faut des rayons X, des IRM, et bien d'autres choses. De plus, il me faut parfois deux mois avant d'obtenir un rendez-vous avec un psychologue ou un psychiatre pour qu'il évalue la torture subie par une personne provenant d'un régime tyrannique. Ce n'est donc absolument pas faisable. Comment peut-on s'attendre à ce que ces personnes puissent soumettre tous les éléments requis?
    Notons également que les survivants de la torture et d'autres crimes internationaux se replient souvent sur eux-mêmes lorsqu'il est question de discuter de leurs affreuses expériences. Cela s'applique tout particulièrement aux divers types de persécution fondés sur le genre. Pour l'instant, nous avons l'examen des risques avant renvoi et les demandes fondées sur des motifs humanitaires. Il existe donc certains recours, mais je suis convaincu qu'il faudrait maintenir les demandes fondées sur des motifs humanitaires, parce que si on les refuse pendant un an, il n'y a plus de raisons d'ordre humanitaire; ce n'est plus une demande de ce type.
    Il ne faut pas oublier toute la question des pays d'origine sûrs, parce que certains survivants — peu importe d'où ils viennent — ont subi une torture en raison de leur orientation sexuelle. Il est parfois question de persécution fondée sur le genre ou de harcèlement. Je ne crois pas qu'on devrait refuser l'accès au système de détermination du statut de réfugié à ceux qui viennent d'un pays d'origine sûr.
    Ensuite, nous nous inquiétons également du sort qu'on réserve à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Pour l'instant, nous avons un système quasi-judiciaire. En ce qui concerne les fonctionnaires, on ne sait pas quelle sera l'incidence du nouveau projet de loi. Dans d'autres pays, on a observé que ces fonctionnaires ne sont pas qualifiés. Ils n'ont pas les connaissances nécessaires, donc ils se fient à des critères bureaucratiques.
    Considérons ensuite le principe de non-refoulement. En vertu de l'article 3 de la convention contre la torture et des articles 7 et 12 de la Charte canadienne des droits et libertés, on ne peut renvoyer qui que ce soit dans un pays où il se ferait torturer. La décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Suresh, en 2002, abonde en ce sens.
    Je crains que la mise en oeuvre du projet de loi C-11 ne place les nouveaux arrivants dans une situation incertaine, parce que ce genre de mesure législative ne peut absolument pas avoir préséance sur les obligations du Canada sur la scène internationale, telles qu'édictées dans les conventions contre la torture ou les dispositions constitutionnelles du Canada. Qu'arrive-t-il si on rejette des centaines de demandes? Ces gens resteront-ils dans l'incertitude? On ne peut pas les renvoyer chez eux. Cette incertitude est également une forme de torture et il existe de nombreux gouvernements tyranniques. Cela n'a fait que traumatiser à nouveau nos clients. Je soutiens que le renvoi de nos clients vers la torture les traumatiserait également. Ils considèrent que le Canada ne s'occupe pas de ce dossier important, ce qui pourrait exacerber leur détresse.
(1655)
    Je suis d'avis que si le projet de loi C-11 est adopté, il imposerait des coûts supplémentaires aux contribuables canadiens pour couvrir l'application de la loi, les renvois, la détention, et ce genre de choses.
    Enfin, depuis 1976, la Loi sur l'immigration a été modifiée à 52 reprises, sans pour autant que le système en soit amélioré.
    Honorables législateurs, la principale lacune que je souhaite porter à votre attention concerne l'immigration et les droits des victimes et la nécessité de nommer un ombudsman qui relève du Parlement pour entendre les griefs concernant la mise en oeuvre des lois sur les réfugiés.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur.
    Notre dernier intervenant est à London et se joint à nous par vidéoconférence. Monsieur Bauer, vous avez sept minutes.
    Oui. Nous devons nous habituer au bref délai entre Ottawa et London, ne l'oublions pas.
    Merci, vous avez la parole.
    D'accord.
    Je n'ai pas suffisamment de temps pour me pencher sur tous les aspects du projet de loi C-11, donc je vais essayer de me concentrer sur ceux qui ont attiré davantage l'attention.
    Le concept des pays d'origine sûrs est l'un de ceux ayant soulevé le plus la controverse. Il a été critiqué systématiquement par tous les groupes de pression qui ont comparu devant vous, je pense, et il s'agit en effet d'une corde très sensible.
    La plupart des pays de l'Union européenne ont adopté une variante de ce concept, dans l'espoir d'éviter l'embourbement du système par des demandes manifestement sans fondement. Les critères permettant de désigner les pays d'origine sûrs établis par le conseil de l'Union européenne sont extrêmement stricts, et même si les procédures et les détails peuvent varier d'un pays à l'autre, les critères de base doivent être respectés.
    On peut se baser sur différentes sources pour déterminer quels sont les pays d'origine sûrs, mais je n'en mentionnerai que deux qui sont très fréquemment utilisés. Les rapports sur les droits de la personne du département d'État américain sont publiés chaque année, et ce pour chaque pays du monde, y compris le Canada. On les considère en général comme étant impartiaux et objectifs, et ils sont utilisés depuis de nombreuses années par la CISR et le conseil. Le Home Office britannique dispose également d'un service d'information sur le pays d'origine.
    D'après la proposition du gouvernement, je ne crois pas que notre liste serait bien longue, mais je suis convaincu qu'on devrait mettre en place une procédure pour l'établissement de cette liste — si on choisit cette option — afin que celle-ci soit précise et objective.
    Certains ont critiqué le système en disant qu'il serait discriminatoire et que chaque demande devrait être évaluée séparément. Même en ce moment, la CISR a recours à des procédures discriminatoires dans ses directives sur la catégorisation nationale, qui permettent le traitement des demandes provenant d'une vingtaine de pays qui ne font pas d'audience, mais seulement une entrevue. Je n'ai entendu aucune organisation se plaindre de ce système, probablement parce qu'il aboutit presque automatiquement à une décision positive.
    La mesure législative initiale renfermait aussi une liste de tiers pays sûrs, qui prévoyait le rejet des demandeurs qui, avant d'arriver au Canada, étaient passés par un pays doté d'un système respectable de détermination du statut de réfugié, qui respecte les droits de la personne, et ainsi de suite. En théorie, quiconque fuyait la persécution demanderait l'asile à sa première destination, plutôt que d'étudier le marché pour trouver un endroit un peu mieux. Cette idée a été critiquée, de la même façon que le concept des pays d'origine sûrs l'est en ce moment, et au bout du compte, cette mesure législative n'a jamais été promulguée, et je présume qu'elle ne le sera jamais. La volonté politique n'est pas au rendez-vous.
    En ce qui concerne les échéances, on a dit que les demandeurs d'asile devaient discuter avec un fonctionnaire pendant une trentaine de minutes dans les huit jours après leur arrivée. Je ne vois pas le problème, et les critiques me semblent tout à fait de mauvaise foi. Pour l'instant, le réfugié doit rencontrer un agent d'immigration pour une entrevue au point d'entrée, qui se tient dans les pires conditions, alors que tout le monde est fatigué, que c'est bruyant, et qu'on a aucune description satisfaisante de ce qui a vraiment été dit. La période de huit jours permettrait au demandeur de décrire sa situation en détail dans des conditions bien meilleures, et il serait alors prêt pour son audience, 60 jours plus tard. Je doute que l'objectif des 60 jours soit respecté, mais il est louable, et il laisse suffisamment de temps de préparation.
(1700)
    En ce qui concerne le personnel de la CISR, je suis tout à fait d'accord pour qu'il s'agisse de fonctionnaires. Je sais que de nombreux groupes de pression ont critiqué ces derniers, disant qu'ils étaient incapables de faire preuve de jugement indépendant, qu'ils étaient contre l'immigration et qu'ils étaient de façon générale inférieurs à tous les autres Canadiens. Ces commentaires ont été réitérés au cours du débat concernant le projet de loi C-11, et je dois dire que je trouve ces critiques mesquines, insultantes et inexactes.
    J'ai travaillé avec des agents d'immigration pendant 40 ans dans divers pays, et je les ai trouvés bien formés, compatissants et justes, parfois dans les conditions les plus difficiles qu'on puisse imaginer. Ils exécutaient la loi du Canada, et non les désirs des ministres, disons-le. C'est ce que nous essayons tous de faire: appliquer les mesures législatives canadiennes adoptées par le Parlement.
    Le cas d'interférence et de partialité des plus flagrants que j'ai constaté concernait une personne nommée par décret à la CISR qui avait un fort parti pris contre les décisions négatives. Je me suis toujours opposé au népotisme à la CISR, et j'ai suivi avec attention les tentatives des dernières années pour l'éliminer ou du moins le limiter, et j'espère que ces tentatives porteront leurs fruits.
    En ce qui concerne la section d'appel, elle visait à l'origine à compenser...
(1705)
    Il vous faudra conclure, monsieur.
    D'accord.
    J'ai rédigé un document de huit pages à l'intention du comité en octobre dernier alors que celui-ci discutait du projet de loi d'initiative parlementaire. Les raisons pour lesquelles je crois que celui-ci est mal venu et qu'il n'améliorera en rien la situation sont toutes exposées dans ce document. On vous a probablement distribué ce premier mémoire.
    Je pense que non seulement la Section d'appel des réfugiés ne serait pas utile, mais qu'en outre, elle rendrait le système actuel moins efficace et moins juste.
    J'en resterai là, mais je tiens à signaler que les grands groupes ne semblent pas prêts à faire de compromis à l'égard de ce projet de loi, d'après mes lectures des témoignages et des lettres qui ont été envoyées aux députés. Si 80 p. 100 des Canadiens considèrent que le système est dysfonctionnel et inadéquat, je pense qu'il faut trouver une façon d'entendre le point de vue de ces gens, plutôt que celui de quelques organisations professionnelles dont le travail consiste à faire du lobbyisme.
    Je me ferai un plaisir de répondre aux questions que vous aurez concernant mon témoignage, ou d'autres questions, comme il vous plaira, monsieur le président.
    Je vous remercie beaucoup de votre exposé, monsieur Bauer.
    Monsieur Karygiannis, vous avez cinq minutes.
    Merci.
    Monsieur Bauer, pouvez-vous nous dire dans quels pays vous avez été ambassadeur?
    Eh bien, je peux vous dire où j'ai été affecté. Tout d'abord, en Pologne, de 1953 à 1955, au cours de la période stalinienne. Ensuite, dans le Nord-Vietnam où l'on enterrait des paysans jusqu'au cou pour faire avancer la réforme agraire. J'ai aussi été affecté à Genève, où j'étais responsable de l'OIT, du Comité intergouvernemental pour la migration européenne et d'autres organisations. J'ai travaillé à Rome, où j'étais responsable des services consulaires, et à Washington, où je m'occupais de la guerre du Vietnam et de l'Europe de l'Est.
    J'ai été ambassadeur en Thaïlande, au Laos et en Birmanie de 1975 à 1979, juste après la chute de Saigon. J'étais ambassadeur en Corée du Sud de 1981 à 1985. J'ai passé mes quatre dernières années en tant qu'ambassadeur à la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe, où j'ai défendu les droits de la personne et le Processus d'Helsinki.
    Monsieur Bauer, un député peut-il faire des représentations à l'étranger aux services consulaires?
    Bien évidemment. C'est toujours le cas.
    Ce n'est pas ce que vous avez dit il y a quelques années, n'est-ce pas, monsieur? Vous savez exactement de quoi je parle.
    Non, je n'ai pas dit le contraire. Répétez-moi mes propos, si vous êtes au courant de tout ce que j'ai dit.
    Enfin, j'en resterai là.
    Monsieur Bauer, vous n'appréciez certainement pas...
    Qu'ai-je dit? Monsieur le président, je ne sais pas ce que j'ai dit il y a deux ans.
    Monsieur Bauer, ma question est la suivante. Vous dites que la CISR...
    Monsieur Karygiannis, c'est vous qui avez abordé la question. Je vais laisser M. Bauer se défendre.
    Je vais...
    Attendez et laissez-le parler. C'est vous qui avez commencé.
    Monsieur Bauer, ma question est la suivante...
    Non, nous allons laisser la parole à M. Bauer. C'est à son tour.
    Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    M. Karygiannis a fait référence à mes propos d'il y a deux ans, et j'aimerais tout simplement savoir ce qu'il en était. Peut-être pourrais-je clarifier la situation pour lui.
    C'est moi qui pose les questions.
    Je n'aime pas qu'on laisse des choses en suspens.
    Ça va, monsieur Bauer.
    Vous avez dit aujourd'hui qu'il ne devrait y avoir aucune nomination politique à la CISR.
    Non, j'ai dit que je m'opposais au népotisme.
    Or, vous avez été l'objet d'une nomination partisane lorsque vous étiez membre de la CISR, n'ai-je pas raison?
    C'est tout à fait faux.
    On lit pourtant ici: « membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada ».
    Oui, évidemment, mais toutes les nominations à la CISR ne sont pas partisanes. J'avais lutté pour le respect des droits de la personne pendant 40 ans. Je connaissais de nombreux pays. Ma nomination était fondée sur mon mérite en tant que fonctionnaire.
    Qu'en est-il des autres personnes qui ont été nommées à la CISR?
(1710)
    En fait, je pourrais vous nommer des membres de la CISR qui sont extrêmement compétents et qui ont également été l'objet de nomination partisane. Je ne prétends pas que ce genre de nomination ne vise pas des gens compétents. Toutefois, voici comment cela pourrait fonctionner si les choix étaient majoritairement partisans: les gens compétents, qui ont la formation appropriée et qui deviennent d'excellents membres, pourraient se retrouver mis à pied advenant un changement de gouvernement. Il faut alors combler de nombreux postes. Or, il ne s'agit pas là d'une façon efficace d'administrer un tribunal, c'est tout.
    Monsieur Bauer, vous avez dit avoir été affecté à Rome. Étiez-vous responsable de Rome et de la Grèce à l'époque?
    J'ai été affecté à Rome de 1959 à 1961.
    Vous connaissez donc les Balkans, n'est-ce pas? Diriez-vous que la Grèce est un tiers pays sûr?
    Je dirais que la Grèce est assujettie aux règles du Conseil européen et de la Cour de justice européenne. J'ai lu les rapports sur la Grèce, car vous semblez poser cette question à beaucoup de gens.
    Est-ce un tiers pays sûr, monsieur? Oui ou non.
    Je n'en ai aucune idée. Je ne peux pas répondre oui ou non, monsieur Karygiannis.
    Il y a de nombreuses failles dans le système en Grèce au niveau local...
    Si vous ne pouvez pas répondre oui ou non, alors nous n'avons pas de liste des tiers pays sûrs. Il n'y a pas de oui ou non.
    Je n'aime pas devoir mettre fin à cet échange, mais c'est au tour de M. St. Cyr.
    Je n'ai pas mentionné la Grèce, monsieur Karygiannis.

[Français]

    C'est à moi de toute façon. On va changer de sujet, ce ne sera pas plus mal.
    Je vais profiter du fait qu'on a deux avocats avec nous. J'ai une question un peu plus technique au sujet du projet de loi et de son interprétation, à propos justement du droit d'avoir un avocat qui représente les demandeurs à toutes les étapes du processus de demande de statut de réfugié.
    À l'article 8 du projet de loi, on modifie l'article 91 de la loi qui donne au ministre le pouvoir d'établir des règlements qui prévoient qui peut représenter ou ne peut pas représenter une personne devant le ministre, l'agent ou la commission, ou faire office de personne-conseil. On précise dans le projet de loi: « [...] notamment l'entrevue devant le fonctionnaire visé au paragraphe 100(4.1) [...] ». Donc, on vient préciser que le ministre pourra déterminer qui représentera ou non et qui pourra conseiller un demandeur au moment de l'entrevue.
    Plus loin dans le projet de loi, à l'article 23, on modifie le paragraphe 167(1) pour dire que: « L'intéressé et le ministre peuvent en tous cas se faire représenter devant la Commission, à leurs frais, par un conseiller juridique ou un autre conseil. » Ma préoccupation est qu'à cet endroit, on n'a pas pris soin d'indiquer que cela concernait notamment l'entrevue devant les fonctionnaires visés au paragraphe 100(4).
    Voilà pour l'aspect technique. J'en conclus que cela me semble flou. Donc, est-ce que lors de l'entrevue, le projet de loi garantit qu'un demandeur pourra être représenté par un avocat ou cela sera-t-il conditionnel à ce que le ministre le permette par réglementation? Je m'adresse aux deux avocats, entre autres, mais les autres peuvent faire un commentaire également. Est-ce que votre interprétation va dans le même sens que la mienne ou est-ce que je me suis trompé? Si vous êtes d'accord avec moi, est-ce que cela vous préoccupe? Dans ce cas, est-ce qu'on devrait spécifiquement inclure dans la loi qu'un avocat pourra conseiller les demandeurs à toutes les étapes, y compris lors de l'entrevue?

[Traduction]

    Je pense qu'il y a trois avocats ici.
    Je demanderais à M. Matas de répondre à la question.
    Vous avez la parole, monsieur.
    C'est avec plaisir que je tenterai de répondre à la question.
    Le projet de loi comme tel n'aborde pas ce point, et cela a soulevé certaines préoccupations. Ailleurs dans le projet de loi, on dit que le demandeur a le droit d'être représenté par un avocat lors des audiences de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. À mon avis, il serait utile d'ajouter dans ce projet de loi le droit d'être représenté par un conseiller juridique lors de ces entrevues.
    Essentiellement, l'article 8 dit que s'il y a un conseiller juridique, ce dernier doit être avocat et membre de la Société canadienne de consultants en immigration, ce qui est la limite imposée à l'heure actuelle pour une audience devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, mais l'article 8 ne dit rien au sujet du droit à un conseiller juridique, et à mon avis, cela ne devrait pas être le cas.
(1715)

[Français]

    D'accord.
    J'aime bien votre précision. Cela m'éclaire.
    Plus loin, à l'article 167(1) proposé, on dit que: « L'intéressé et le ministre peuvent en tous cas se faire représenter devant la Commission, à leurs frais, par un conseiller juridique ou un autre conseil.
    Quand on dit « devant la Commission », à votre avis, cela inclut-il le fonctionnaire qui va mener l'entrevue, au sens de la loi, ou cela se limite-t-il à l'audience proprement dite en salle d'audience?

[Traduction]

    Si j'ai bien compris, à l'heure actuelle, l'article 167 ne concerne que l'audience comme telle et non pas l'entrevue préliminaire. Si vous voulez que le projet de loi traite expressément de l'entrevue, il faudrait donc insérer une disposition précise à cet effet.
    Merci.
    C'est au tour de Mme Chow.
    J'ai une question à poser à M. Norquay de la HIV and Aids Legal Clinic. Le Malawi et le Ghana figurent sur la liste des tiers pays sûrs de l'Angleterre, mais il me semble que le fait d'être gai ou lesbienne au Ghana soit punissable en vertu de la loi. Pouvez-vous décrire ce qui pourrait se produire, à votre avis, si un homme gai était par exemple renvoyé dans un pays comme le Ghana ou le Malawi, et d'après votre expérience, quelle est la propagation du VIH-sida dans certains de ces pays africains qui prétendent être démocratiques et sûrs? Pour moi, ils ne le sont certainement pas.
    Je sais que d'autres témoins ont soulevé le problème selon lequel, par exemple, les demandes qui se fondent sur la violence familiale ou l'homophobie seraient peut-être négligées car souvent, d'autres pays qui pourraient être considérés comme étant démocratiques ont des problèmes à cet égard. Je dirais certainement que la discrimination liée au VIH et au sida est un autre type de discrimination qu'il faudrait ajouter à cette liste. Je pense qu'il y a de très grandes possibilités que mes clients ne puissent pas porter une décision en appel.
    Je vais vous donner l'exemple du Mexique. Le Mexique est un pays où, dans une large mesure, les hommes gais se voient refuser le statut de réfugié à l'heure actuelle, qu'ils soient ou non séropositifs. Il y a de nombreuses preuves qui démontrent qu'ils ont énormément de difficulté, par exemple, à trouver de l'emploi. Donc si quelqu'un n'a pas les bonnes preuves la première fois, ou si après 60 jours, la personne n'est pas en mesure de fournir cet élément de preuve particulier, elle pourrait être déboutée dès la première audience, mais sa demande aurait été accueillie à la SAR, selon qu'un bureau au Mexique aurait figuré ou non sur cette liste. S'il y figurait, alors elle aurait perdu cette occasion.
    En ce moment, les bloquistes et les néo-démocrates ont clairement exprimé qu'ils étaient contre une disposition, que je crois être l'article 109.1, qui désigne des pays d'origine sûrs, refusant ainsi aux demandeurs d'asile provenant de ces pays de se prévaloir du processus d'appel. Votre organisation a-t-elle communiqué avec d'autres groupes pour essayer de convaincre les députés que ce n'est pas une bonne façon de faire ni un amendement positif à la LIPR?
    Oui. J'ai essayé de présenter mon point de vue et celui d'autres groupes d'avocats, par exemple la Refugee Lawyers' Association of Ontario et le Conseil canadien pour les réfugiés, pour bien communiquer notre opinion. Étant donné que les efforts sont concentrés dans ces organisations, je leur ai permis de s'occuper de cet aspect. Or, il n'en demeure pas moins qu'à mon bureau, nous sommes très préoccupés par cette question, même si, en toute honnêteté, les restrictions à l'égard des critères humanitaires et de compassion...
(1720)
    Ils sont également terribles.
    ... du système me préoccupent beaucoup, de même que mes clients.
    J'aimerais poser la même question à M. Matas et au Centre canadien pour les victimes de torture en ce qui a trait aux pays d'origine sûrs. Avez-vous des exemples qui montrent, lorsqu'il y a désignation, que certains demandeurs provenant de ces pays n'auraient pas le droit d'interjeter appel? Par conséquent, quel type de conséquences pensez-vous que cela aura?
    Merci beaucoup.
    Malheureusement, durant la première décennie du XXIe siècle, le seuil de la torture a monté d'un cran. Aucun pays n'est à l'abri de la torture, même les pays industriels avancés. Par conséquent, n'importe qui peut être torturé. Je crois qu'il n'y a aucun pays sûr au monde.
    Nous avons un problème avec la désignation des États-Unis d'Amérique à titre de pays sûr. Beaucoup de gens s'y rendent et sont ensuite renvoyés. Le système d'attribution du statut de réfugié est différent aux États-Unis par rapport au Canada. Le taux d'acceptation est beaucoup plus faible aux États-Unis. De plus, il n'existe aucun organe quasi judiciaire similaire à la commission.
    Je veux citer l'exemple de demandeurs provenant de Saint-Vincent. Saint-Vincent est un pays très démocratique, doté d'un système parlementaire, mais il n'y a rien de démocratique pour les homosexuels. Je représente beaucoup de clients qui viennent de Saint-Vincent. Ils ont été victimes de torture par leurs collectivités, leurs familles et des personnes religieuses, sans bénéficier d'aucune protection policière. Je crois qu'ils ont besoin de la protection du Canada. Pour la première fois dans l'histoire du Centre canadien pour les victimes de torture, j'ai accepté de défendre des clients qui affirment avoir été victimes de torture dans des pays démocratiques. C'est difficile à croire, mais c'est vrai.
    Alors, malheureusement, la torture...
    Merci beaucoup, monsieur. Votre temps est écoulé.
    Monsieur Calandra, vous avez la parole.
    Monsieur Norquay, Mme Chow a parlé du Ghana et du Malawi. D'après vous, le Ghana et le Malawi constitueraient-ils des pays d'origine sûrs?
    D'après mon expérience personnelle à l'égard de ces deux pays, ils ne me semblent absolument pas sûrs.
    Cela peut vous sembler stupide comme question, mais croyez-vous qu'il soit déraisonnable de présumer qu'un fonctionnaire formé pourrait ne pas tirer les mêmes conclusions que vous?
    Eh bien oui, s'il s'agit de fonctionnaires bien qualifiés qui étudient les mêmes preuves que moi.
    Le projet de loi permettrait d'établir des pays d'origine sûrs, mais également des groupes ou des régions au sein de ces pays et de les isoler — j'emploie cette expression, faute de trouver mieux — en envisageant des mesures de protection additionnelles.
    D'après vous, cela ne nous permettrait-il pas — peu importe la religion ou tout autre motif invoqué par la personne — d'apaiser certaines des préoccupations que vous et d'autres groupes avez soulevées?
    Je crois que l'on se préoccupe des critères d'établissement de la liste ainsi que de la surveillance. Il s'agit, à mon avis, des principaux enjeux. Il n'y a aucune disposition dans le projet de loi pour déterminer ni l'un ni l'autre. Je crois que c'est ce qui est véritablement alarmant, car nous n'avons pas assez de renseignements.
    Mais, en fin de compte, si nous avions recours à un processus qui comprend la consultation de personnes comme vous, de groupes comme le vôtre et de fonctionnaires qualifiés comme M. Bauer, qui compte plus de 40 ans d'expérience, nous pourrions probablement établir une liste qui cerne également ces groupes et ces régions. Croyez-vous que cela puisse être réalisable?
(1725)
    Oh, s'il vous plaît.
    Honnêtement, je suis très préoccupé par l'échéancier proposé pour la première audience, qui doit avoir lieu dans les 60 jours. Par exemple...
    Je désire aborder précisément la question du pays d'origine sûr.
    Ce qui me préoccupe au sujet du pays d'origine sûr, c'est que cette notion supprime le droit d'interjeter appel. Bien souvent, vous en êtes encore à la première audience qui a lieu dans un délai de 60 jours et vous n'avez pas terminé d'exposer l'ensemble de votre cas, pour tout un éventail de raisons. Par exemple, beaucoup de mes clients viennent juste de recevoir un diagnostic de séropositivité. C'est tout nouveau et ils en sont encore à essayer de se remettre de ce choc. Il n'est donc pas raisonnable de s'attendre à ce qu'ils soient en mesure de présenter leur cas comme il se doit.
    De plus, le...
    Mais, en fin de compte, seriez-vous d'accord pour dire que nous pourrions arriver à une entente sur le pays d'origine sûr si nous avons recours à des gens comme vous et à des fonctionnaires qualifiés?
    S'il y avait des mécanismes de surveillance et de reddition de comptes à l'égard de cette décision, alors...
    Nous pourrions nous pencher là-dessus, tant que ce sera un peu mieux ciblé et que des approches pourront être recensées sur la façon dont nous...
    Personnellement, je ne m'objecte pas catégoriquement à la désignation de pays d'origine sûr, mais il se peut que cela ne respecte pas la Charte.
    Je comprends très bien le besoin d'épurer le système pour se débarrasser des demandeurs illégitimes. Le problème, c'est qu'on empêchera également les demandes légitimes d'être présentées, ce qui n'est pas bien du tout. Il doit y avoir un plus grand équilibre.
    Oui, je comprends. Très bien.
    Je suis désolé, je n'ai pas bien compris le nom du collègue qui accompagne M. Matas. Votre nom ne figure pas sur ma liste, alors il m'échappe. Vous avez dit que l'un des problèmes avait trait au fait qu'il fallait attendre très longtemps pour obtenir les renseignements requis. N'y aurait-il pas d'autres façons de répondre aux exigences? Ne pourrait-on pas affecter des ressources additionnelles pour éliminer certains retards?
    Merci beaucoup. Je m'attendais à ce que vous fassiez allusion à mon nom.
    Oui, il serait très important d'affecter des ressources additionnelles, bien que cela ne permet pas de résoudre le problème. Nous devons maintenant évaluer les cicatrices physiques et psychologiques de la torture. Nous devons envoyer les clients chez un médecin...
    Je suis d'accord avec vous sur ce point. Nous n'avons que cinq minutes...
    Vous avez 30 secondes en fait.
    Il ne me reste que 30 secondes, alors je voulais m'assurer que vous étiez d'accord au sujet de la question des ressources.
    Je conclurai donc par une remarque.
    Monsieur Bauer, bon nombre d'entre nous ont abordé différents sujets aujourd'hui, mais vous, après 40 ans, vous avez défendu bien des causes, alors nous avons tout intérêt à tenir compte de vos conseils dans notre étude. J'aimerais vous remercier de vos 40 années de service dans des endroits très difficiles aux quatre coins du monde et d'avoir servi votre pays.
    Voilà, mon temps est écoulé.
    Messieurs, que vous soyez de Toronto, de London ou d'Ottawa, je vous remercie tous d'être venus et d'avoir exprimé votre point de vue au sujet du projet de loi. Cela met fin à la partie de la séance qui vous est consacrée. Merci d'avoir participé.
    Un témoin: Merci de nous avoir invités.
    Un témoin: Merci.
    Le président: Je rappelle aux membres du comité qu'il nous reste deux points à l'ordre du jour avant l'ajournement. Je continuerai de parler en public jusqu'à ce que quelqu'un me signale son intention de passer à huis clos, car je crois que cela ne saurait tarder.
    Vous avez en main deux budgets. Le montant le plus élevé représente une estimation des dépenses de la vidéoconférence pour le projet de loi C-11. Cette estimation est exhaustive. Le montant moins élevé représente les dépenses liées à la question d'Haïti.
    Tout le monde me regarde sans avoir l'air de comprendre ce dont je parle. Comprenez-vous?
    J'aimerais que quelqu'un propose une motion pour approuver ces budgets et autoriser les dépenses. Madame Chow et monsieur Karygiannis, vous voulez intervenir?
    (La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que vous me précisiez si la réunion du 1er juin aura lieu de 15 h 30 à 17 h 30...
(1730)
    Oui.
    Et la réunion du 3 juin aura lieu de 15 h 30 à 23 h 59.
    Interminable. Je ne devrais pas dire cela. La réunion peut durer jusqu'à 23 h 59, oui.
    Au plus tard. C'est à ce moment là que nous effectuerons l'étude article par article du projet de loi C-11.
    Ces deux séances seront consacrées à l'étude article par article. Oui, vous avez raison.
    Je voulais m'en assurer.
    C'est une bonne question.
    Alors oui, c'est ce qui...
    C'est ce qui est en train d'être planifié.
    Si vous le permettez, j'oserais même demander ce qui se passera si nous n'arrivons pas à terminer avant la fin de ces deux séances?
    D'après mon interprétation de la motion présentée par M. Bevilacqua, si nous n'avons pas terminé d'ici le 3 juin à 23 h 59, aucun autre amendement ne pourra être apporté. Par conséquent, vous devrez vous débrouiller pour faire adopter tous vos amendements. Vous pouvez contester ma décision à cet égard, mais c'est l'interprétation que j'en fais.
    Les amendements sont prêts, mais nous devrons les mettre aux voix pour nous assurer qu'ils sont bel et bien adoptés, n'est-ce pas?
    Le problème, c'est que d'après mon interprétation — et corrigez-moi si j'ai tort...
    Vous posez la question maintenant, mais plus tard...
    C'est la décision du président. Si l'un d'entre vous veut renverser ma décision, il faudra la contester.
    Oui, monsieur St-Cyr.

[Français]

    Je veux simplement ajouter que c'est moi qui ai proposé d'étendre la période jusqu'à l'achèvement du travail pour éviter d'en arriver à cette situation. Le comité doit étudier tous les amendements, point final. On peut procéder rapidement aux discussions. J'ai l'impression que l'on va avoir fini avant l'heure indiquée.
    Cependant, si la décision du président est d'arrêter à l'heure indiquée et que, dans ce cas, tous les amendements proposés tombent à l'eau, il va falloir revenir sur ce dont on avait convenu avec le gouvernement, c'est-à-dire de terminer notre étude ce jour-là. On ajoutera des réunions pour compléter le travail. Ce n'est pas vrai que l'on va se placer dans une situation où un parti pourrait faire de l'obstruction jusqu'à 23 h 59 pour éviter qu'il y ait des amendements. Cela n'a aucun sens. Tout le monde était de bonne foi à ce sujet. Si on se rend jusqu'à 1 heure du matin, ce n'est pas plus dramatique. Je ne pense pas que l'on va avoir à faire cela.

[Traduction]

    Alors nous pouvons le faire en une journée.
    Pouvez-vous me montrer où se trouve la motion de M. Bevilacqua?
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Il est 17 h 30. Ne pourriez-vous pas vous renseigner et nous fournir l'information plus tard?
    Ma décision est maintenue, à moins que quelqu'un puisse me démontrer que la motion indique autre chose.
    Je peux certainement vous donner des explications.
    Je sais que vous en êtes capable.
    Ce serait parfait si vous pouviez me donner la chance de fournir des explications pendant que vous faites vos recherches. Puis-je avoir la parole, monsieur le président?
    Attendez un instant. Il y a quatre jours, une motion a été présentée au sujet de l'étude article par article. La motion a été amendée pour que l'étude article par article dure deux jours, c'est à dire le 1er et le 3 juin. Voilà pourquoi cela porte un peu à confusion.
    On y indique que durant les deux derniers jours, des soirées additionnelles y seraient consacrées dans le cadre de séances pouvant durer jusqu'à trois heures, à compter du 6 juin, et que la dernière journée, la réunion se poursuivrait jusqu'au bout, c'est à dire jusqu'à 23 h 59.
    À la lecture que j'en fais, nous n'avons plus de réunions à y consacrer après 23 h 59, à moins d'obtenir le consentement unanime du comité. Voilà la décision.
(1735)
    Pourquoi ne pas vous entendre là-dessus entre collègues?
    Olivia, vous avez posé une question. La réponse est vraiment simple. Nous nous étions tous entendus pour mettre fin à nos réunions le 3 juin, à 23 h 59. Cela faisait partie des conditions permettant de le renvoyer à la Chambre à temps pour l'étape de la troisième lecture et celle du Sénat avant l'ajournement d'été. Nous avions convenu, premièrement, que le sous-comité allait se réunir pour passer en revue tous les amendements proposés par les quatre partis afin d'établir la méthodologie pour l'étude article par article. Ainsi, tout le monde serait traité sur un même pied d'égalité et tous les amendements seraient étudiés, sans surprise, et...
    Avant le 1er...
    Oui, c'est vrai, avant le 1er, alors nous devons déterminer cette réunion.
    Enfin, ce qui importe surtout de mentionner, c'est qu'il était entendu — nous y avons tous consenti solennellement — qu'il n'y aurait aucune obstruction. Nous avions promis qu'il n'y aurait pas de tentative d'échapper à un vote ou à une disposition en étirant le débat jusqu'à 23 h 59.
    Je crois que nous avons un excellent processus en place qui nous permettra de bien travailler pendant ces deux journées, et en fait, je peux garantir au président que nous n'allons pas, individuellement — c'est-à-dire chaque parti — essayer de ralentir les travaux, de changer quoi que ce soit ou d'essayer d'ajouter des éléments à la discussion ou au débat avant 23 h 59.
    Le président ne se rappelle pas certains éléments mentionnés, comme des ententes pour éliminer l'obstruction. Je présume qu'il s'agit d'une entente entre le...
    En effet, monsieur le président, je ne m'adressais pas à vous.
    Je présume qu'il s'agit d'une entente entre les porte-parole.
    En ce qui me concerne, il n'en demeure pas moins que les séances et l'étude article par article prendront fin le 3 juin à 23 h 59. Prenez-en bonne note si nécessaire.
    Monsieur le président, j'ai une question purement théorique. Je ne dis pas que cela peut se produire, mais j'aimerais savoir ce qui se passerait si un député du parti ministériel, parce qu'il n'aime pas un amendement ou qu'il craint qu'un amendement ne puisse pas être adopté, décidait de parler jusqu'à 23 h 59 pour empêcher la mise aux voix?
    M. Dykstra a dit, et je crois que cela ne fait pas partie de la motion, qu'il peut confirmer que cela ne se produira pas, car il y a une entente entre les porte-parole pour bannir toute obstruction.
    Une voix: C'est exact.
    Le président: Il est impossible de restreindre la durée des débats, alors je compte sur vous. C'est votre spectacle.

[Français]

    Dans tous les cas, ce sera toujours la majorité qui va l'emporter. Il n'y a rien à faire. Tout le monde est de bonne foi. On va bien s'en tirer. Si un partenaire n'est pas de bonne foi et qu'il soit minoritaire, il ne pourra pas entraver le processus parce qu'au bout du compte, c'est le comité qui va décider de quoi ce projet de loi aura l'air quand il sortira d'ici.

[Traduction]

    Madame Chow, est-ce que cela fait votre bonheur?
    Oui, je suis toujours heureuse.
    Très bien.
    La séance est suspendue jusqu'à 18 heures.
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