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Mesdames et messieurs, bonjour. Je vous souhaite la bienvenue à la 46
e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
Nous accueillons de nombreux invités aujourd'hui; je vais donc sauter les formalités de présentation des invités, et j'espère que vous me pardonnerez.
J'aimerais aussi mentionner que bon nombre des membres, de tous les partis, qui sont absents sont coincés à la Chambre. C'est pourquoi je commence quand même. Le quorum n'est pas nécessaire pour entendre les témoignages. Les membres qui ne sont pas arrivés pourront certainement consulter les épreuves pour savoir ce qui s'est dit avant leur arrivée.
Sans plus attendre, je vais commencer par la vidéoconférence.
Monsieur Davis, je vais maintenant vous demander de présenter votre déclaration. Je vais devoir limiter les interventions à au plus cinq minutes.
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J'aimerais remercier le président et les membres du comité de nous avoir invités à participer à cette audience importante sur le projet de loi .
De toute évidence, le projet de loi C-501 attribue une priorité sur tous les biens d'un débiteur dans le cas des indemnités de départ ou de cessation d'emploi non payées et au plein montant de tout déficit de pension. Dans le projet de loi C-501, la charge inclut, et je cite, « tout montant considéré comme satisfaisant aux normes de solvabilité conformément à l'article 9 de ce règlement » — soit les normes de prestations de pension — « que l'employeur est tenu de verser au fonds ».
La charge ne se limite pas aux paiements spéciaux en arrérages le jour où commencent les mesures de redressement. Le député de Thunder Bay — Rainy River a dit, au moment de la présentation du projet de loi, que, si le projet de loi C-501 était adopté, cela voudrait dire que tous les Canadiens qui travaillent peuvent être tranquilles parce qu'ils savent que leur pension, leur retraite, est protégée en totalité.
Le projet de loi n'entraînera pas seulement une augmentation des coûts des emprunts sur le marché des obligations. Les petites et moyennes entreprises empruntent des fonds à des banques à partir des marges de crédit d'exploitation pour payer leurs dépenses quotidiennes. L'accès aux marges de crédit dépend de la sûreté accessoire des entreprises. La plupart des marges de crédit d'exploitation sont accessibles sur demande ou sont régies par de strictes dispositions de révision, et l'imposition de priorités qu'entraînera le projet de loi C-501 permettra leur application. Si le projet de loi C-501 est adopté, les prêteurs vont modifier les exigences de la marge et imposer des réserves discrétionnaires supplémentaires en fonction de la base d'emprunt. Cela retirera du calcul du nantissement disponible un montant égal à celui de tout droit prioritaire.
C'est exactement ce qui s'est produit quand les droits prioritaires ont été accordés pour les salaires non payés. Cependant, dans le cas des indemnités de cessation d'emploi, des indemnités de départ et du déficit de pension impayés, les exclusions seront beaucoup plus élevées. Cela limitera donc grandement l'accès au crédit pour tous les employeurs, surtout pour les promoteurs d'un régime de pension. Le projet de loi aura des répercussions concrètes sur les entreprises solvables. Il viendra sonner le glas de bon nombre d'entreprises qui luttent pour leur survie qui ont des difficultés financières.
Au Canada, la pierre angulaire des lois sur l'insolvabilité, c'est la souplesse offerte aux entreprises qui connaissent des difficultés financières pour les aider à tenter une restructuration, et à demeurer en exploitation. C'est l'une des meilleures façons de protéger les obligations associées aux employeurs. Les droits prioritaires et les critères obligatoires de restructuration ajoutent des obstacles à l'atteinte de ces objectifs. Ils entraînent des difficultés financières pour les employeurs déjà en difficulté et nuisent grandement à leur capacité de restructuration. Cela ne peut donc qu'accroître le nombre d'entreprises insolvables qui n'ont pas d'autres choix que de se diriger vers une liquidation.
Il faut une réforme en profondeur du droit canadien en matière de pension si l'on veut éliminer les faiblesses que les événements économiques des 10 dernières années ont fait ressortir. Cependant, le fait de s'attaquer aux dispositions législatives sur l'insolvabilité et d'élargir les droits prioritaires et d'établir des conditions minimales pour la restructuration constitue une mesure inappropriée, inefficace et imprudente sur le plan commercial. Le fardeau financier supplémentaire qu'entraîne le projet de loi aggravera la situation de la très grande majorité des entreprises solvables et n'offrira que peu d'avantages aux employés du mince pourcentage d'entreprises qui deviennent insolvables. Le projet de loi C-501 ne fera que favoriser l'insolvabilité puisqu'il créera les conditions propices à un marché du crédit plus serré en réduisant le nombre d'entreprises qui pourront réussir une restructuration après être devenues insolvables. Fait tout aussi important: le fardeau financier imposé aux employeurs canadiens nuira à leur compétitivité sur le marché mondial, et tout cela, à une époque de reprise économique fragile pour les entreprises canadiennes.
M. Davis et moi serons heureux de répondre aux questions des membres du comité.
C'est ainsi que se concluent mes commentaires.
Merci beaucoup.
Je m'appelle John Farrell et je suis directeur administratif des Employeurs des transports et communications de régie fédérale. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Michael Boychuk, président de BIMCOR, qui est aussi le gestionnaire du fonds de retraite de Bell Canada. En outre, il est l'ancien trésorier de Bell Canada et de BCE. Il est bien placé pour parler de ces questions.
Employeurs des transports et communications de régie fédérale est constitué d'environ 600 000 travailleurs qui relèvent du fédéral. Les régimes de pension administrés par ces entreprises valent environ 75 milliards de dollars.
Au cours des derniers jours, tandis que je me préparais pour mon témoignage, j'ai entendu des conversations très intéressantes avec deux spécialistes reconnus de l'insolvabilité et de la restructuration. Il s'agit de M. Bruce Robertson, chef de la restructuration pour AbitibiBowater, et de l'ancien juge James Farley, qui est le juge le plus important dans les affaires d'insolvabilité et de restructuration au Canada et qui est, depuis plus récemment, responsable de la restructuration à General Motors et à Air Canada.
Si j'ai le temps, je ferai part aux membres du comité du contenu de mes conversations avec ces deux messieurs, mais, pour l'instant, comme nous n'avons pas beaucoup de temps, je vais laisser la parole à M. Boychuk.
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Thank you, Mr. Farrell.
Merci au comité de nous donner l'occasion de nous exprimer aujourd'hui.
[Traduction]
En termes simples, le fait d'élever le statut de créancier du passif non capitalisé des régimes de retraite au-delà du niveau des créanciers ordinaires — ce qui inclut la plupart des obligations de sociétés au Canada — entraînera un lourd fardeau financier supplémentaire pour les employeurs qui offrent un régime à prestations déterminées. De fait, le projet de loi C-501 viendrait fragiliser plutôt que protéger la sécurité des prestations pour les membres d'un régime à prestations déterminées.
Ceux qui ressentiraient les premiers les répercussions du changement de statut pour le passif d'un régime de pension non capitalisé seraient les détenteurs de ces obligations d'une valeur de plus de 200 milliards de dollars émises par ces employeurs qui ont un régime à prestations déterminées. Un pourcentage important de ces obligations sont détenues par les régimes de pension canadiens, mais aussi par des Canadiens et des Canadiennes dans leur REER, que ce soit de façon directe ou par des investissements dans des fonds communs de placement. Pour les Canadiens, la seule façon de se protéger de ces pertes est de vendre ces obligations avant l'entrée en vigueur du projet de loi C-501. Ce projet de loi aurait comme résultat d'entraîner des répercussions négatives pour des millions de Canadiens qui comptent sur ces titres pour leur revenu de retraite.
Philips, Hager & North, qui sont des investisseurs canadiens reconnus dans la gestion des actifs à revenu fixe, ont estimé que l'augmentation moyenne des coûts d'emprunt parmi tous les émetteurs d'obligations de bonne qualité pourrait aller jusqu'à atteindre 17,5 milliards de dollars. Des coûts d'emprunt plus élevés pour les entreprises canadiennes signifient des investissements en capital inférieurs pour ces entreprises, et moins d'emplois pour les Canadiens.
Aucun autre pays possédant des actifs importants sous la forme de régimes de pension à prestations déterminées dans le secteur privé n'accorde, dans ses régimes de pension à prestations déterminées, un statut de créancier prioritaire aux déficits non capitalisés. Si le Canada devait décider de le faire, il créerait un précédent dangereux. Cela entraînerait aussi un désavantage en ce qui a trait au coût du capital pour les entreprises qui sont les promoteurs d'un régime de retraite PD et pour les autres, tout en entraînant d'énormes injustices entre les membres d'un régime de retraite PD et les membres d'autres types de régimes de retraite.
Il est important de souligner que les régimes de retraite ne se sont pas encore entièrement remis de l'effondrement récent du marché des actions en 2008, le pire effondrement depuis la Crise de 1929. Ensuite, le rendement des obligations du Canada à long terme — les taux mêmes que l'on utilise pour les évaluations actuarielles de la solvabilité — stagnent à des niveaux plus bas que tout ce qu'on a vu au cours des 50 dernières années. Mis à part quelques rares exceptions, les employeurs financent leurs régimes de pension et font d'importantes cotisations pour ramener à un niveau de 100 p. 100 la capitalisation de leurs régimes. Leurs cotisations respectent certaines des règles de financement les plus strictes au monde. Au Canada, les régimes de pension à prestations déterminées parrainés par le secteur privé doivent capitaliser leur déficit sur une période précise de cinq ans.
Pour réagir à la sous-capitalisation actuelle des régimes de pension, le comité doit absolument tenir compte des mesures que le gouvernement fédéral a mises en place récemment pour protéger les membres de régimes de retraite à prestations déterminées de régie fédérale, y compris de l'évaluation actuarielle annuelle obligatoire, des limites imposées en ce qui concerne les exonérations de cotisations de l'employeur, et de l'interdiction de la bonification des prestations des régimes capitalisés à moins de 85 p. 100. La plupart des gouvernements provinciaux envisagent ou adoptent des mesures semblables pour accroître la sécurité des prestations des membres. Grâce à ces mesures, les membres des régimes de pension sont aujourd'hui mieux protégés qu'ils ne l'étaient il y a deux ou trois ans.
En conclusion, le fait d'accorder un statut de créancier plus élevé au passif non capitalisé des régimes de retraite aurait des répercussions négatives importantes et à grande échelle, de même que de nombreuses conséquences imprévues qui toucheraient non seulement les employeurs qui sont les promoteurs de ces régimes, mais aussi les millions de Canadiens dont les économies de retraite dépendent de ces obligations.
Le fait d'élever le statut de créancier des régimes de retraite à prestations déterminées nuirait à la capacité des promoteurs de réunir des capitaux de façon rentable, ce qui fait qu'ils seraient moins en mesure d'investir dans l'économie canadienne et de demeurer concurrentiels. Ils seraient donc incapables de faire croître leurs activités et d'embaucher de plus en plus de travailleurs canadiens, et même, dans certains cas, de maintenir les niveaux d'emploi actuels. Cela pourrait aussi entraîner des cas d'insolvabilité qui n'arriveraient pas autrement. L'ironie, c'est que, avec ce projet de loi, les entreprises auraient encore plus de difficultés à capitaliser le déficit de leur régime de pension. Toutes ces conséquences auraient des répercussions négatives sur la sécurité des prestations des membres.
Le fondement même de la sécurité des prestations des membres d'un régime de retraite demeure un promoteur solide sur le plan financier.
Bonjour. Je m'appelle Bill Randle. Je suis chef adjoint du contentieux à l'Association des banquiers canadiens. Je suis accompagné aujourd'hui par Bill Kennedy, vice-président de l'unité d'intervention à la Banque Nationale du Canada. Nous vous remercions de nous donner l'occasion de comparaître devant le comité pour discuter du projet de loi .
Nous compatissons avec les Canadiens qui font face à une réduction de leurs revenus de retraite actuels ou futurs à la suite de la faillite de leur ancien employeur, et nous félicitons de leurs efforts les députés et les sénateurs qui essaient de trouver des solutions à ce problème. Nous sommes d'avis qu'il ne faut ménager aucun effort afin d'empêcher les Canadiens de vivre de telles circonstances ardues. Cela dit, nous sommes ici aujourd'hui pour vous exposer nos préoccupations au sujet de la solution proposée dans le projet de loi et de ses répercussions possibles sur la capacité des employeurs qui parrainent des régimes à prestations déterminées d'investir dans la recherche, le nouveau matériel et l'expansion; la capacité des employeurs d'effectuer une restructuration efficace et de préserver les emplois et les activités dans le cas où l'entreprise se retrouve dans une situation difficile; et l'épargne, y compris l'épargne-retraite, de millions de Canadiens qui détiennent des obligations de sociétés dans leur REER, dans leur régime de retraite parrainé par l'employeur, et à travers les prestations du Régime de pensions du Canada et du Régime de rentes du Québec.
Au fil des ans, un équilibre délicat a été atteint dans l'ordre de priorité des dispositions législatives en matière de faillite. Cet équilibre veille, d'un côté, à ce que les divers créanciers puissent obtenir leurs droits et, de l'autre, à ce que les entreprises puissent accéder au crédit à un coût raisonnable, pour financer leurs opérations et faire les investissements nécessaires à leur croissance et à leur réussite dans un marché de plus en plus international. Des modifications de l'ordre de priorité en cas de faillite représentent une sérieuse menace pour cet équilibre délicat, et leurs effets se feront ressentir dans l'ensemble de l'économie.
Notre principale préoccupation au sujet de ce projet de loi, c'est le fait que, en accordant la priorité au passif non capitalisé des caisses de retraite, qui peut être très important, on réduit les fonds disponibles pour rembourser les autres créanciers. Ainsi, les prêteurs et les investisseurs seront exposés à un risque considérable.
Comme vous le savez, les banques gèrent le risque de façon très prudente, et le degré de risque qu'elles peuvent prendre est strictement réglementé par le gouvernement fédéral. La récente crise financière a bien prouvé le mérite d'une réglementation serrée du risque que doivent assumer les institutions financières.
L'une des principales méthodes suivies par les institutions financières pour gérer le risque est de bien évaluer le montant qui serait disponible pour rembourser un prêt si une entreprise entamait des procédures de faillite. Par conséquent, si la priorité est accordée au passif non capitalisé des caisses de retraite d'une entreprise, comme le propose le projet de loi, et que le montant qu'un prêteur peut s'attendre à recevoir est réduit par la valeur de ce déficit, une réduction correspondante sera appliquée au montant qu'une entreprise sera en mesure d'emprunter. En effet, les pratiques de prêt prudentes, qui nécessitent une grande précaution, conduiront probablement à des pressions accrues sur la disponibilité du crédit pour réduire les risques de perte.
Les grandes entreprises bien établies se tournent souvent vers le marché financier lorsqu'elles veulent emprunter des fonds. Pour les investisseurs qui achètent des instruments financiers comme les obligations, un changement dans l'ordre de priorité encore une fois augmentera le risque de ne récupérer qu'une plus petite partie de leur placement si jamais l'entreprise a des difficultés financières. Ce risque accru rendra les investisseurs moins enthousiastes à acquérir des obligations de sociétés, privant ainsi les entreprises de financement, ou enclins à le faire seulement si la prime de risque sur ces obligations est plus importante, ce qui implique un coût de financement plus élevé. En fait, un risque plus élevé augmente le coût de financement, ce qui, à son tour, empêchera certaines entreprises de financer efficacement leurs activités ou leur expansion. Au bout du compte, le résultat sera une croissance économique réduite et une création d'emplois limitée.
En plus des répercussions directes sur les marchés financiers et le coût de financement pour les entreprises, le fait d'accorder une superpriorité, comme le propose le projet de loi, aura d'autres conséquences négatives, notamment les suivantes: d'abord, les entreprises qui offrent un régime de retraite à prestations déterminées se trouveraient en situation concurrentielle désavantageuse par rapport aux entreprises qui n'offrent pas un tel régime et aux compétiteurs internationaux qui sont basés dans d'autres pays. Les employeurs auront ainsi une autre motivation pour adopter plutôt un régime de retraite à cotisations déterminées ou ne plus accepter de nouveaux participants au régime à prestations déterminées au détriment des jeunes Canadiens. De plus, d'autres créanciers non garantis, comme les fournisseurs, dont un grand nombre sont de petites entreprises, feront face eux aussi à la possibilité de ne pas pouvoir récupérer leur dû, ce qui peut affecter leur propre situation financière. Étant donné que les prêteurs et les investisseurs seront moins enclins à avancer des fonds pour contribuer à sauver une entreprise à cause du risque accru, il pourrait être plus difficile, pour les entreprises, de se restructurer et d'éviter, au bout du compte, la faillite. Enfin, cette superpriorité augmente le risque associé à bon nombre d'obligations d'entreprises, ce qui pourrait avoir un impact négatif sur les investissements et l'épargne-retraite de millions de Canadiens.
Comme je l'ai mentionné précédemment, le défi que doivent relever les décideurs et les intervenants est de savoir comment atteindre le parfait équilibre pour trouver une solution au passif non capitalisé des régimes de retraite sans miner la capacité des entreprises d'obtenir un financement pour investir dans la recherche et le développement ou pour élargir leurs activités, ce qui peut venir limiter leur croissance et leur réussite potentielles. À notre avis, les modifications de la législation en matière de faillite et d'insolvabilité ne constituent pas une solution adéquate et pourront même faire basculer cet équilibre de façon à entraver la croissance économique, ce qui, en fin de compte, sera néfaste pour les travailleurs puisque les entreprises auront du mal à pouvoir se restructurer ou à investir dans des projets susceptibles d'amener la création d'emplois et la hausse des salaires.
Nous serons ravis de répondre à vos questions.
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Monsieur le président, mesdames et messieurs, les membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous.
Je vais commencer par apporter des précisions au sujet de certains malentendus qui n'ont peut-être pas été dissipés par les intervenants précédents.
D'abord, un milliard de dollars représente beaucoup d'argent. Si vous prenez un dénominateur qui est assez grand, comme, par exemple, l'économie du Canada tout entière, il est possible de donner l'impression qu'à peu près n'importe quelle perte ou n'importe quel coût est petit ou possible à gérer. Cependant, dans le contexte du marché des obligations de société au Canada, ce qui devrait être le contexte que nous examinons présentement, d'après moi, un montant de quelques milliards de dollars causerait beaucoup, beaucoup de dommages. En fait, même une perte d'un milliard de dollars serait très importante et difficile à récupérer.
Les obligations de société sont des investissements relativement sûrs, surtout au Canada, où elles ont, pour la plupart, une bonne cote de solvabilité. Les obligations ayant une bonne cote de solvabilité sont peu volatiles, ce qui les rend plus sûres que les capitaux propres ou les unités de fiducie. Si cette faible volatilité représente une perte de 1,5 p. 100, ou quelque autre perte que ce soit, ce serait difficile, voire impossible, de récupérer rapidement et facilement le montant perdu.
J'aborde maintenant une autre question, celle des swaps sur défaillance. Il y a une très faible protection nette des swaps sur défaillance associée aux obligations de sociétés canadiennes. Habituellement, la protection nette en assurance des swaps sur défaillance ne dépasse pas l'encours des obligations, et ce n'est certainement pas le cas en ce qui concerne le marché des obligations de sociétés canadiennes.
Ces obligations n'appartiennent pas à des spéculateurs anonymes ou tout simplement, à quelques riches personnes de la haute société; elles appartiennent à des Canadiens ordinaires, des travailleurs et des retraités, qui ont des économies dans des fonds de placement, dans des polices d'assurance-vie et dans des régimes de pensions. Ces placements sont administrés par des gestionnaires professionnels qui ont la responsabilité fiduciaire d'éviter tout risque inutile et de prévoir une indemnité adéquate pour les risques qu'ils prennent en détenant ces obligations.
Comme vous le savez, les agences de notation ont commis de graves erreurs avec tout le PCAA et les autres titres structurés, et leur réputation a subi tout un coup. Cependant, les agences de notation comprennent et évaluent très bien le crédit des sociétés, dans la plupart des cas, ce qui signifie que les gestionnaires professionnels de placement accordent encore de la valeur à ce que disent les agences de notation.
Quand il est question du projet de loi, l'image qui revient souvent est celle d'une file d'attente, et ce qu'on se demande, c'est qui se trouve à la tête de la file d'attente. C'est exactement de cette façon que les agences de notation voient le scénario d'une faillite. Si, à la suite de l'adoption du projet de loi, les obligations de sociétés se retrouvaient tout à coup derrière le passif non capitalisé des régimes de retraite, des déclassements pourraient se produire dans bien des cas.
D'après mon expérience, on peut être à peu près sûr qu'il y aurait des déclassements. J'ai travaillé pour deux agences de notation pendant 12 ans, et j'ai eu comme tâche de critiquer et de prédire les mesures des agences de notation dans le cadre de mon emploi pour Scotia Capitaux, soit depuis près de 10 ans. Si les agences de notation procèdent à un déclassement, et, plus encore, si le marché est d'accord avec le raisonnement des agences de notation, les pertes relatives aux obligations en cours seraient très importantes, et elles seraient très difficiles, voire impossibles, à récupérer.
En outre, étant donné que ces pertes sur le marché des obligations seraient fondées sur des estimations prudentes de scénarios futurs éventuels faites par des gestionnaires qui souhaitent éviter le risque, il n'y a pas lieu de croire à un juste équilibre entre les montants perdus à cause des déclassements et de l'augmentation des écarts de taux et les montants que pourraient gagner les personnes relativement peu nombreuses qui devraient profiter du projet de loi. Les pertes pourraient facilement l'emporter sur les avantages.
J'ai publié une recherche sur les répercussions du projet de loi sur le marché des obligations, et il a été transmis à la greffière du comité. Il peut sembler technique, mais j'espère, en tout respect, qu'il pourra être utile au comité et l'aider à comprendre de quelle façon le marché canadien des obligations pourrait réagir si le projet de loi était adopté.
Je peux dire aux membres du comité que les professionnels du marché des obligations auxquels j'ai parlé de ma recherche au cours des dernières semaines s'entendaient tous pour dire que le projet de loi les préoccupe beaucoup. Ils comprennent qu'il a des intentions louables, mais il pourrait avoir de très graves conséquences imprévues.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, les membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître aujourd'hui et je vous remercie de m'avoir écouté. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
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Bonjour, monsieur le président et membres du comité.
Je m'appelle John McKenna, et je suis accompagné, aujourd'hui, de Jean-Daniel Breton. Nous représentons l'Association canadienne des professionnels de l'insolvabilité et de la réorganisation, l'ACPIR en français ou la CAIRP, en anglais.
L'ACPIR est un organisme national sans but lucratif qui représente environ 900 professionnels de l'insolvabilité et de la réorganisation au Canada. À titre de syndics de faillite, de séquestres, de contrôleurs et de conseillers financiers, les membres de l'ACPIR participent et ont participé à tous les grands dossiers d'insolvabilité et de réorganisation au Canada, à titre d'organisme, mais aussi à titre personnel.
Par conséquent, les commentaires de l'ACPIR sur le projet de loi sont ceux de professionnels chevronnés de l'insolvabilité qui sont constamment appelés à appliquer les lois sur l'insolvabilité.
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Essentiellement, le projet de loi aborde trois aspects, qui concernent tous la protection des employés. Comme nous n'avons pas beaucoup de temps aujourd'hui, nous allons parler seulement du troisième aspect, concernant un changement apporté à la Loi canadienne sur les sociétés par actions qui vise à faciliter le traitement des réclamations contre les administrateurs.
Au sujet du premier aspect, le projet de loi propose qu'une superpriorité soit accordée à tous les arriérés de paiements spéciaux. Dans la mesure où il s'agit d'un changement envisagé, nous appuyons ce changement puisqu'il n'y avait, à notre avis, aucun motif important sur le plan des politiques publiques qui justifierait que l'on traite différemment les arriérés de coûts normaux et les arriérés de paiements spéciaux, et cet écart pourrait être éliminé grâce à une efficacité raisonnable des procédures en matière d'insolvabilité.
Cependant, dans la mesure où ce que l'on veut, c'est créer une protection pour la totalité du déficit des régimes de pensions, l'ACPIR a cerné un certain nombre d'enjeux importants qui auraient des répercussions négatives importantes sur les entreprises qui promeuvent des régimes de pensions à prestations déterminées. Ces enjeux sont décrits en détail dans le document de l'ACPIR, mais on peut en résumer les effets nets. Premièrement, ils risquent d'entraîner une diminution qui pourrait être importante du crédit offert à toutes les entreprises dont le régime de pension à prestations déterminées a ou est considéré comme ayant un déficit. Une entreprise insolvable pourrait aussi être incapable d'emprunter pour financer ses activités pendant une restructuration.
Deuxièmement, ces enjeux pourraient entraîner un déclassement des cotes de crédit ou une augmentation des taux d'intérêt pour ces entreprises. Troisièmement, ils pourraient accélérer le risque d'insolvabilité pour ces entreprises puisqu'elles auraient moins accès à du crédit garanti et non garanti. Quatrièmement, ils pourraient rendre les procédures d'insolvabilité plus longues et plus coûteuses.
Enfin, ils pourraient nuire à la possibilité de réussir une restructuration. À notre avis, ce sont des enjeux qui nuiraient aux intérêts de nombreuses parties intéressées, comme les employés actuels, les fournisseurs, les clients et les investisseurs, et nous savons, par expérience, que les restructurations créent plus de valeur pour les créanciers et protègent les emplois.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Et merci beaucoup à vous tous d'être venus ce matin. L'intensité de vos commentaires vient certainement appuyer nos préoccupations en ce qui concerne le projet de loi .
De notre point de vue, évidemment, nous sommes très préoccupés par les répercussions du projet de loi, mais nous sommes aussi très préoccupés par l'importance d'aider les gens, comme les employés de Nortel dont nous avons entendu parler cette année, qui ont perdu une si grande part de leur revenu de retraite. Comment allons-nous nous y prendre pour les protéger?
Le projet de loi est très limité en ce qui concerne cette catégorie de paiements spéciaux en particulier. M. Rafferty a mentionné qu'il préférait passer à la catégorie des créanciers non garantis privilégiés plutôt qu'au statut de superpriorité. Il s'agit seulement de ces paiements spéciaux. Nous essayons de trouver une façon d'aider des personnes qui souffrent, de toute évidence, à la suite de faillites. Je suis certaine que vous êtes tous sympathiques à leur cause. Je l'ai entendu dans votre ton. La question, c'est de savoir comment nous pouvons changer la situation. Comment pouvons-nous corriger les choses?
Pouvez-vous nous proposer des façons d'aider les Nortel de ce monde? Est-ce que ce projet de loi aidera Nortel?
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Pour répondre à votre question, madame Sgro, je dirais que la meilleure façon d'offrir une sécurité aux personnes qui participent à un régime de pensions, c'est de garantir la santé ou la solidité financière du promoteur ou de l'employeur. C'est la meilleure protection que vous pouvez offrir. Le Canada offre déjà des mesures de protection parmi les meilleures avec les règles sur l'insolvabilité de la LACC, en plus des mesures provenant de la réforme du gouvernement tout récemment, au tout début de l'année, de fait. Ce sont là des mesures de protection solides.
M. Dafoe nous a dit que le fait de ramener le statut de superpriorité à priorité ou à privilégié n'a aucune importance. Je crois que ce serait une grave erreur d'essayer de passer avant les institutions qui sont celles qui alimentent nos sociétés qui, à leur tour, fournissent et créent des emplois.
À mon avis, il faut que l'employeur, l'employeur financier ou le promoteur financier demeure en bonne santé de façon à pouvoir continuer à verser des pensions dans le cadre des régimes à prestations déterminées ce à quoi, en passant, très peu de gens ont la chance d'avoir droit, si l'on observe la situation dans le reste du Canada. Qu'allons-nous faire pour les personnes qui avaient un régime de pension à cotisations déterminées ou tout autre type de dispositions pour leur retraite? À cause de l'effondrement de l'économie en 2008, leurs économies ont diminué d'une part pouvant aller jusqu'à 60 p. 100. Qu'allons-nous faire pour ces personnes?
En plus de mes responsabilités à titre de gestionnaire des ETCOF, j'ai joué un rôle, et je joue encore un rôle, dans l'industrie des pâtes et papiers, entre autres. J'ai la responsabilité de collaborer avec les entreprises pour coordonner les activités dans le cadre des négociations collectives, de la frontière du Manitoba jusqu'à Terre-Neuve.
AbitibiBowater fait partie de ce groupe, que je gère depuis plus de 25 ans. Par conséquent, je connais les dirigeants et les membres de l'entreprise. Hier, justement, j'ai parlé à Bruce Robertson, qui est le chef de la restructuration d'AbitibiBowater. Heureusement, après presque deux ans de restructuration, l'entreprise est en train de se sortir de la protection de la faillite prévue par la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, ce qui est une très bonne nouvelle pour toutes les personnes qui vivent dans les collectivités où AbitibiBowater exerce ses activités.
Comment y sont-ils parvenus? Une entente a été conclue avec le régulateur des régimes de pension au Québec et en Ontario de façon à préserver la valeur des régimes de pension pour les retraités actuels, ce qui a permis de sauver le régime, en plus de prévenir la cristallisation des pertes du régime.
L'entreprise et le syndicat se sont aussi entendus pour mettre fin, dans l'avenir, au régime à prestations déterminées et pour le remplacer par une forme de régime à prestations cibles, semblable à un régime à cotisations déterminées, et comportant beaucoup moins de risque. Ils ont réussi à collaborer avec le régulateur pendant une période de deux ans pour trouver une solution à la restructuration. Heureusement, ils ont réussi et ils n'ont pas eu besoin de faire faillite.
J'ai donc posé la question à Bruce Robertson: « Que se serait-il passé si le projet de loi avait été en vigueur il y a deux ans? » Il a répondu que le risque aurait alors été beaucoup plus élevé, qu'il aurait été impossible de réussir la restructuration et que nous aurions probablement fait face à une liquidation. À la suite d'une liquidation, l'entreprise aurait été obligée d'éliminer 8 500 emplois directs.
Dans une collectivité où se trouve une usine de pâtes et papier, quand toute la collectivité dépend de l'exploitation de l'usine, on sait bien que chaque emploi qui disparaît à l'usine entraîne la disparition de quatre autres emplois dans la collectivité. Cela aurait donc pu entraîner la disparition éventuelle de 34 000 emplois de plus, ce qui signifie que 42 500 emplois au total auraient été perdus si AbitibiBowater avait été incapable de trouver une solution à son problème de pension et à ses enjeux en matière de restructuration.
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Merci, monsieur le président.
Évidemment, j'ai beaucoup de questions pour chacun d'entre vous. N'hésitez pas à être brefs.
J'ai beaucoup de peine pour M. Davis, ici, qui est incapable de répondre à quelque question que ce soit. Monsieur Davis, j'ai donc quelques questions pour vous. Monsieur Hill, n'hésitez pas à intervenir vous aussi.
À l'institut d'insolvabilité, vous êtes tous des avocats, n'est-ce pas? Votre organisme est constitué d'avocats qui s'occupent de restructuration et d'insolvabilité en appliquant les lois du pays, quelles qu'elles soient. Est-ce exact?
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Merci, monsieur Boychuk.
J'aimerais poser une question aux représentants de l'Association des banquiers canadiens et dire, aux fins du compte rendu, que vous avez été très gentils de me rencontrer il y a quelques semaines. Je vous en remercie. Ce que j'ai cru comprendre, c'est que vous pourriez améliorer en partie votre façon de faire les choses. Je crois que c'était une partie du message.
Comme vous l'avez dit dans votre déclaration, monsieur Randle, tout est une question de risque. C'est vraiment le facteur qui compte — tout est une question de risque. Si des changements étaient apportés au projet de loi, par exemple, s'il était dilué de façon à couvrir les dettes non garanties ou les dettes privilégiées, est-ce que l'Association des banquiers canadiens pourrait approuver ce type de changement? Est-ce que cela changerait votre point de vue?
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Merci, monsieur le président.
À titre de législateur, si j'ai devant moi un bénéficiaire qui me dit qu'il a cotisé à un régime de retraite pendant toute sa carrière et qu'il considère sa pension comme un salaire différé, que son entreprise fait faillite lorsqu'il touche sa pension, on peut probablement dire qu'il a très peu d'options, mis à part le fait d'absorber une perte de revenu de retraite. Je comprends tout cela. Je comprends aussi l'importance que l'on accorde, dans votre milieu, à l'accès au crédit pour les entreprises si l'on veut qu'elles puissent prospérer et croître et si l'on veut pouvoir avoir confiance dans le marché.
En réalité, le projet de loi a une portée très limitée, même si bien des gens n'ont pas eu cette impression. Il y est question non pas de rétroactivité, mais seulement d'arriéré en ce qui concerne les paiements spéciaux jusqu'au moment de la faillite. Cette période peut varier d'une faillite à une autre.
Ce qui m'a étonné, c'est l'écart entre les analyses et les estimations des répercussions du projet de loi. J'ai entendu dire qu'il n'y avait pas de quoi en faire tout un plat et qu'il n'entraînerait pas l'instabilité du marché des obligations, mais j'ai aussi entendu dire qu'il aurait des répercussions vraiment grandes.
J'essaie d'y voir clair dans tout cela. Je n'ai pas encore réussi à y voir clair. À titre de législateurs, nous discutons de l'ordre de priorité et des répercussions sur divers groupes, que ce soit les bénéficiaires ou les marchés des obligations, et ce serait très utile pour nous d'avoir une idée des véritables répercussions du projet de loi, puisque nous nous retrouvons à devoir rendre un jugement de Salomon.
Je pense, monsieur McKenna, que vous avez abordé cette question. La question des arriérés de paiements spéciaux ne semblait pas être un enjeu impossible à régler. J'aimerais que vous et d'autres me parliez un peu de ce sujet, que vous me disiez où se situe le problème, à votre avis.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous d'être venus. Vous nous avez appris bien des choses.
Je suis heureux d'entendre dire — je l'avais déjà entendu auparavant — qu'AbitibiBowater s'est restructurée et s'est sortie de la protection de la faillite.
Malheureusement, le dialogue est en grande partie fondé sur l'idée selon laquelle c'est eux contre nous. Je crois que c'est là un exemple évident qui prouve que ce n'est tout simplement pas le cas.
J'aimerais que vous disiez encore une fois au comité pourquoi, dans une situation comme celle-là, il est important de ne pas forcer la main à qui que ce soit, si je puis dire. Vous pouvez peut-être dire au comité combien d'entreprises, dans le contexte du marché actuel, compte tenu du fait que ce marché a été beaucoup secoué, se retrouveraient, si un projet de loi comme le projet de loi devait être adopté, dans une situation telle que les banques devraient appuyer sur la gâchette? Pouvez-vous nous dire, rapidement, quelle serait votre évaluation?
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Le BSIF, qui est l'organisme de réglementation fédéral, peut vous fournir le nombre exact de sociétés sous réglementation fédérale qui ont un déficit de solvabilité et le pourcentage que représentent ces déficits. Ces données sont disponibles.
Ce qu'il y a, c'est que chacune des sociétés qui disposent d'un régime de pension à prestations déterminées et qui aura un déficit de solvabilité aura encore plus de difficulté à se procurer des capitaux quand elle en aura besoin puisque ce projet de loi augmentera le risque associé à ces sociétés.
Si votre société a d'importants déficits de solvabilité, comme c'est le cas pour bon nombre de sociétés de l'industrie des pâtes et papier et pour bon nombre de grandes sociétés canadiennes de l'industrie minière, le projet de loi créerait une situation telle que, si votre société est au bord de la faillite, elle ne serait pas capable d'obtenir le capital dont elle aurait besoin. Comme me l'a dit M. Robertson hier soir, nous n'aurions pu réussir la restructuration si le projet de loi avait été en vigueur.
D'une certaine façon, donc, même si ce projet de loi a pour but de protéger les employés et les bénéficiaires d'un régime de retraite, il risque malheureusement de faire disparaître des entreprises qui luttent pour leur restructuration, et il y aura de véritables pertes d'emplois à l'échelle du pays. Une autre chose risque aussi de se produire: les employés du pays qui profitent actuellement de régimes de pension à prestations déterminées très attrayants ne pourront plus en profiter puisque leurs conseils d'administration viendront dire que, maintenant, avec l'adoption du projet de loi C-501, ces régimes comportent beaucoup plus de risques qu'auparavant, alors ils se retireront de ces régimes. Cela signifie donc que des centaines de milliers de Canadiens qui jouissent aujourd'hui de régimes de pension fantastiques et qui travaillent pour des sociétés qui peuvent se permettre de tels régimes pour toujours verront ces régimes disparaître à cause du projet de loi, tout simplement.
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Je peux peut-être répondre à cette question.
L'effet que l'on constaterait à plus grande échelle, c'est qu'il y aurait beaucoup plus de sociétés de touchées puisque les petites et moyennes entreprises empruntent généralement par l'entremise de ce que nous appelons des marges de crédit d'exploitation. En général, il y a une formule; autrement dit, une banque ou un prêteur fournira 75 p. 100 des comptes débiteurs, plus 50 p. 100 du stock de produits finis, moins les priorités.
À l'heure actuelle, nous pouvons nous appuyer sur la Loi sur le Programme de protection des salariés pour déterminer ce que sont la paie et l'indemnité de départ: il s'agit de 2 000 $ par employé. C'est ce qui vient en premier. Si vous avez une entreprise qui compte 200 employés, à coups de 2 000 $ par employé, cela signifie, tout simplement, qu'il y aura 400 000 $ de moins de disponible dans votre marge de crédit.
Si le total de l'indemnité de départ, qui peut couvrir jusqu'à 42 semaines, devient une priorité, je pense que cela viendrait limiter grandement le crédit et pourrait même le rendre indisponible.
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Messieurs, je vous souhaite de nouveau la bienvenue.
Nous allons maintenant entendre les témoins. Je vais commencer par des témoins qui représentent la même organisation, mais qui en représentent deux aspects distincts. Je vais commencer par le volet national du Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier, puis nous entendrons le témoin du volet local.
D'après ce que je comprends, monsieur Caron, vous allez parler pendant environ deux minutes et demie, puis ce sera au tour de M. Carrière de parler pendant environ deux minutes et demie.
Allez-y, commencez, je vous en prie.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci beaucoup aux membres du comité d'accepter de nous entendre.
Vous ne serez pas surpris d'apprendre qu'on en est en faveur du projet de loi . On pense que le système actuel fonctionne vraiment au détriment des travailleurs et travailleuses, comme plusieurs exemples l'ont démontré durant la grande récession. J'aimerais vous parler d'un exemple en particulier.
Dans certains cas, nous avons pu sauver les meubles. Dans le cas d'AbitibiBowater, par exemple, nous avons réussi à négocier avec la compagnie pour pouvoir protéger les pensions des retraités. Évidemment, ça a requis des concessions de la part des travailleurs et travailleuses, mais les pensions ont été protégées durant la grande crise, en raison particulièrement du fait qu'il était possible de travailler avec AbitibiBowater.
Il y a une histoire beaucoup plus triste, qui est celle de Papiers Fraser. Une entreprise, Brookfield Asset Management, possédait la compagnie dans une proportion de 70 p. 100. Cette entreprise était l'une des plus viables en matière de foresterie. Papiers Fraser pouvait passer au travers de la crise et s'en sortir de meilleure manière que le reste de l'industrie.
Pourtant, Brookfield Asset Management a décidé de placer Papiers Fraser sous la protection de la Loi sur la faillite. Le plan de restructuration qui a été adopté faisait en sorte qu'une nouvelle compagnie était créée, dont l'actionnaire majoritaire était toujours Brookfield Asset Management, et celle-ci a réussi à se faire rembourser l'argent que Papiers Fraser lui devait sur papier et à repayer les créanciers prioritaires. En fin de compte, ce que ça a voulu dire pour les travailleurs et travailleuses, c'est que l'usine de Thurso a fermé ses portes. Les travailleurs n'ont toujours pas reçu leur indemnité de départ.
Quant aux autres retraités, leur paie a été coupée de 30 à 35 p. 100. Tout ça, parce que Brookfield Asset Management n'avait aucun remords à fermer une usine qui était rentable et qui s'en sortait mieux que les autres, afin de pouvoir obtenir ces concessions en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. C'était un abus flagrant d'une utilisation de la LACC à des fins particulières qui, au bout du compte, a brimé les travailleurs et travailleuses.
En ce sens, la LACC est un outil présentement désuet, et nous prônons l'adoption du projet de loi . En ce qui a trait à la question des investisseurs — je sais que ça a fait l'objet de maintes discussions et que vous avez entendu des compagnies, des spécialistes de la restructuration qui vous disent que c'est impossible —, nous avons une proposition en ce sens, que je n'aurai pas le temps de vous présenter, mais je vous invite à me poser des questions à ce sujet. Je me ferai un plaisir d'y répondre.
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Bonjour. Je remercie le comité, mesdames et messieurs, de nous recevoir. Je tiens d'abord à souligner que nous sommes d'accord sur le projet de loi . Cependant, nous croyons sincèrement que des ajouts devraient y être apportés afin de lui donner plus de « mordant ».
Pour quelles raisons? Dans le moment présent, qui subit le plus les lacunes du projet de loi ? La situation des travailleurs d'AbitibiBowater à Gatineau et à Dolbeau devrait suffire à entraîner des changements dans le projet de loi C-501. Mais comme mon confrère le disait plus tôt, il faut plus que ça. Ce qui s'est passé chez Papiers Fraser, c'est abominable.
On a enlevé 35 p. 100 du montant des prestations aux retraités qui touchaient déjà des prestations de retraite, en plus d'avoir « scrappé » les régimes de retraite, avant que d'autres propriétaires ne redémarrent l'usine.
Il y a une situation encore pire, celle de Papiers White Birch, anciennement Papiers Masson, où on est en pleines négociations. Là aussi, on est en train de travailler pour essayer de sauver les régimes de retraite et les conditions de travail. Des négociations sont en cours et, ce matin, il y a une séance de conciliation.
Le pire dans tout ça, c'est de faire sanctionner par les tribunaux toutes les actions posées à l'endroit des travailleurs et des travailleuses dans le secteur des pâtes et papiers. C'est accepté par les tribunaux, que nos conditions de travail soient grandement affaiblies. Les compagnies ont le droit de le faire pour se restructurer. C'est abominable et épouvantable. Permettez-moi de vous dire que la situation est extrêmement grave et préoccupante, car tout ça se fait avec l'autorisation des tribunaux par l'entremise de la Loi canadienne sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.
Les compagnies ont maintenant le droit et la possibilité de liquider leurs dettes. Croyez-vous qu'elles se gênent? Non, pas du tout. C'est pourquoi la loi doit être revue et corrigée afin de mieux protéger les sommes dues aux travailleurs et travailleuses, tout en équipant ces derniers pour qu'ils maintiennent leur régime de retraite, etc. Ce qui se fait est abominable, abominable, et ça s'étend à d'autres secteurs. Les employeurs ont trouvé une faille parce que le projet de loi C-501 est faible, il a des lacunes. Ils sont en train d'affaiblir nos conditions de travail, nos régimes de retraite, les préavis, les indemnités de licenciement, en plus de nous pénaliser en ce qui a trait au chômage. On va devoir faire des remboursements.
Merci beaucoup.
Je suis innovateur canadien en matière de retraites pour Towers Watson, une société internationale d'experts-conseils. Ma collègue s'appelle Karen Figueiredo; elle est responsable, au Canada, des pratiques de conseil en investissement. Nous sommes tous deux actuaires et spécialistes des pensions. Notre société a déjà présenté au comité nos observations, qui s'intitulent « Accorder une plus grande priorité aux déficits des régimes de retraite à prestations déterminées: résolution ou création de problèmes? »
Nous reconnaissons qu'il est vraiment important de protéger les membres de régimes de retraite à prestations déterminées, ou les régimes PD, en cas d'insolvabilité, mais nous craignons que le fait d'accorder une plus grande priorité à la totalité du déficit des régimes PD, en leur accordant le statut de superpriorité ou de créancier privilégié, entraînera des conséquences imprévues très graves pour les employés canadiens, pour les marchés de capitaux et pour l'industrie au Canada.
D'abord, cela augmentera le coût du financement pour bon nombre d'employeurs offrant des régimes PD. Quand ces employeurs ont l'argent, ils peuvent décider de réaffecter l'argent dans les régimes de pension pour gonfler le coefficient de capitalisation et éviter un déclassement de la notation de leurs obligations, mais cela peut se faire aux dépens des dépenses d'investissement dans la création d'emplois. Nous pensons que cela accélérerait grandement la tendance actuelle qui consiste à remplacer les régimes PD par des régimes de pension à cotisations déterminées, au Canada, ce qui fait que le risque reposerait non plus sur les épaules de l'employeur, mais bien sur celles de chacun des membres du régime, et que le montant de leur pension ne pourrait que diminuer, bien souvent d'une part importante. Bien des mesures menacent le maintien des régimes PD au Canada, mais ce projet de loi est, de loin, la mesure la plus dangereuse.
Ensuite, selon le sondage que nous avons effectué récemment auprès de spécialistes des titres à revenu fixe au sein de 23 grandes sociétés de placement et auprès de nombreux employeurs importants offrant des régimes PD, nous pensons que le projet de loi viendra affaiblir les marchés canadiens de capitaux et repoussera les investissements étrangers. À cause de l'augmentation des taux d'intérêt en ce qui concerne les obligations des sociétés et d'une volatilité accrue associée aux positions de capitalisation de la solvabilité des régimes PD, de nombreux émetteurs canadiens d'obligations seront désavantagés sur le plan concurrentiel par rapport à d'autres émetteurs d'obligations.
Les entreprises auront aussi plus de difficultés à se restructurer, à une époque où elles en ont particulièrement besoin. Par conséquent, cela pourrait, de fait, accélérer l'insolvabilité et faire courir davantage de risques aux employés canadiens qui participent à des régimes PD. L'augmentation des taux d'intérêt en ce qui concerne les obligations des sociétés aura aussi des répercussions négatives sur les investisseurs canadiens, y compris les bénéficiaires d'un régime de retraite, les participants à un régime à cotisations déterminées, les personnes qui cotisent à un REER, et tout autre investisseur personnel dont le portefeuille contient aujourd'hui des obligations de sociétés qui vont perdre de la valeur.
On ne peut pas exprimer les répercussions possibles de ce projet de loi sous la forme de coûts moyens, comme l'ont fait certains. Comme bien souvent, le fait d'utiliser des moyennes vient cacher les véritables enjeux. C'est un peu comme si l'on recommandait aux résidents d'Ottawa de ne pas acheter de manteau d'hiver parce que la température moyenne de l'année est de 10 degrés. L'une des leçons clés que nous avons apprises à la suite de notre sondage et des entrevues connexes réalisées avec des répondants, c'est que la détermination des répercussions d'un changement des priorités en cas de faillite est un enjeu très complexe, et qu'il est très difficile de faire des prédictions.
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Le coût associé à l'octroi du statut de créancier privilégié n'est pas réparti également entre tous les employeurs qui émettent des obligations. Les répercussions du projet de loi dépendront de leur cote de crédit, de la taille relative de leur régime PD, de leur position en ce qui concerne la capitalisation du régime PD, et des conditions économiques en vigueur. Même si les répercussions moyennes sur les taux d'intérêt des obligations des sociétés atteindront peut-être seulement un quart de 1 p. 100 dans des conditions de marché normales — par exemple, une augmentation de 5 à 5,25 p. 100 —, le coût sera beaucoup plus élevé pour certaines entreprises que pour d'autres.
Ian peut vous montrer une image qui représente les 60 principaux émetteurs d'obligations au Canada, et ce sont toutes des obligations de qualité supérieure, et vous pourrez voir que ceux qui sont en orange sont les émetteurs d'obligations BBB. Ce sont ces émetteurs d'obligations BBB qui ont un déficit en ce qui concerne leur régime PD qui risquent de voir leur cote de crédit révisée à la baisse à la suite du projet de loi, ce qui pourrait entraîner une augmentation de leurs coûts de financement de 2, 3, 4 ou même, 5 p. 100. Si leur cote est réduite à tel point qu'elles ne seront plus dans la catégorie des obligations de qualité supérieure, cela forcera — et non pourrait forcer — la plupart des régimes de pension canadiens à vendre leurs obligations.
Il est important de souligner la dichotomie qui existe au sein du marché canadien des obligations. La plupart des obligations de sociétés qui ont une cote élevée — celles qui profitent des taux d'intérêt les moins élevés — sont émises par des institutions financières, dont les régimes PD sont souvent moins importants si on compare avec leur bilan et leur état du revenu, et par les services publics réglementés qui, comme on peut le penser, ont la possibilité de transmettre automatiquement le coût des retraites à leurs clients. Bon nombre de sociétés ayant une cote BBB sont des sociétés industrielles bien connues, comme le Canadien Pacifique, Telus et Bell, dont les régimes PD sont énormes. De fait, c'est la base même de l'industrie canadienne qui subirait le plus grand choc si le statut de créancier privilégié ou de superpriorité devait être accordé aux déficits des régimes PD.
Il y aura une augmentation de la volatilité pour les émetteurs d'obligations de sociétés, et cela pourrait décourager des investisseurs étrangers d'investir dans des sociétés canadiennes ayant des régimes PD. De nombreux spécialistes des titres à revenu fixe nous ont dit qu'ils élaboreraient de nouveaux modèles pour évaluer les risques associés aux régimes PD, ce que bon nombre de sociétés étrangères d'investissement pourraient refuser de faire compte tenu du temps requis et de la complexité de la chose. En outre, les capitaux de placement pourraient aller davantage vers des possibilités de placement à l'extérieur du Canada. À mesure que les régimes PD entraîneront des risques pour les employeurs de leurs membres, il y aura un bouleversement du marché. Personne n'avait pu prédire à quel point les taux d'intérêt relatifs aux obligations auraient des répercussions sur la solvabilité des régimes PD au cours des cinq dernières années. Nous pouvons vous dire, en toute certitude, que la meilleure façon de garantir la sécurité des prestations de retraite versées aux membres d'un régime PD, c'est de garantir l'existence d'employeurs solides sur le plan financier et de dispositions législatives sur les prestations de retraite qui favorisent le financement de régimes continus, de façon équilibrée et sage.
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Merci, monsieur le président. Merci beaucoup de nous accueillir.
Les documents que je vous ai remis donnent un aperçu de nos activités de 2005 à 2010 concernant ce dossier.
L'année 2005 est importante parce que, cette année-là, des sociétés ont demandé pour la première fois un allégement des fonds de retraite aux prises avec des déficits, par exemple, et que c'est l'année qui a marqué la fin de la plus longue période de croissance économique qu'a connue le monde occidental.
Les années 2009 et 2010 sont importantes parce que le dernier cycle de consultation sur les enjeux relatifs aux pensions a eu lieu ces années-là. Nous voulons remercier et le , d'avoir accordé un aussi grand rôle à Teamsters Canada dans ces discussions. Nous voulons aussi souligner les mesures que le gouvernement a déjà prises. Par exemple, l'une de nos plus grandes sociétés, le CP, a investi 850 millions de dollars dans son fonds de pension au cours des deux dernières années, et cela contribuera grandement à régler le problème.
Je crois que ce dont il est vraiment question dans le cas qui nous occupe, ce sont les coûts et les risques. Les personnes qui s'opposent au projet de loi disent essentiellement qu'elles souhaitent que quelqu'un d'autre en assume les coûts et les risques. Le projet de loi nous indique comment verrouiller les portes de l'écurie quand les chevaux ont déjà été volés, et je suis d'accord pour dire que les mesures à favoriser doivent résulter de nos consultations sur la façon de régler le problème avant, plutôt qu'après, que les chevaux ont été volés.
Nous avons discuté de la question devant trois comités au cours des 18 derniers mois. Dans le cadre de l'une de ces rencontres, l'un des cadres présents a dit que sa société ne pouvait pas investir dans les régimes de pension parce qu'elle avait besoin de l'argent pour assurer l'avenir de leurs activités. Vraiment, c'est ce que les gens disent. Les sociétés ont besoin de taux d'intérêt moins élevés pour renforcer leurs activités, elles ont besoin de ceci ou de cela pour assurer l'avenir de leurs activités; pourtant, les travailleurs et les retraités touchant une pension sont les seuls de tous les prêteurs ou les créanciers qui ont une relation de confiance à laquelle est associée une obligation fiduciaire.
Si je regarde tout cela et que j'examine l'obligation fiduciaire, je ne vois rien qui dit que je peux utiliser l'argent pour assurer l'avenir de mon entreprise. Au bout du compte, ce que nous demandons, concrètement, c'est s'il est acceptable qu'il soit dit, dans une politique gouvernementale, que les risques associés au fait de diriger une entreprise doivent être transférés aux travailleurs et aux retraités, que l'importance de renforcer notre économie est si grande que cette responsabilité doit reposer sur les épaules des travailleurs et des retraités, et qu'il est si important, pour les titulaires d'obligations, de faire de l'argent, que les travailleurs et les retraités doivent assumer les risques associés.
Au sein d'un marché, il est habituellement beaucoup plus efficace de répartir les coûts adéquatement. C'est comme ça que l'on devient efficace. Ce n'est pas à l'aide de méthodes artificielles, et ce que nous avons devant nous est, de fait, une méthode artificielle. Nous sommes face à des banques qui, essentiellement, prêtent de l'argent — imaginons qu'il s'agit d'une hypothèque. Les banques prêtent de l'argent à des gens sous la forme d'hypothèques, mais elles n'ont pas examiné tous leurs antécédents financiers parce qu'elles n'étaient pas obligées de le faire. C'est ce qui s'est passé aux États-Unis, n'est-ce pas?
Nous nous retrouvons dans une situation où des gens nous disent que, parce qu'ils ne sont pas obligés de faire un examen, ils n'ont pas à tenir compte des facteurs coûts. Je vous dirais que, si l'on veut un marché efficace et discipliné, c'est une chose qu'il faudrait faire.
Je crois que les arguments contre le projet de loi sont peut-être attribuables au choix du moment. Devrait-on régler les problèmes de première ligne d'abord? C'est peut-être une question de mise en oeuvre progressive, c'est peut-être une question de plafonnement, mais, une chose est sûre, ce ne peut pas être une politique du gouvernement. Le Parlement ne peut pas avoir une politique qui dit: « Nous voulons faire reposer les risques sur les épaules des personnes qui ont le moins les moyens. »
Dans notre cas, nous avons travaillé avec les gens de Nortel et avec le groupe de syndiqués de Nortel, Flextronics. Ils obtiennent 26 ¢ par dollar. Ils viennent tout juste de recevoir, la semaine dernière, une lettre qui leur annonce que toutes leurs polices sont annulées. Tout le reste est annulé. Pensez-vous que c'est juste? C'est difficile de répondre à une telle question devant un comité, mais pensez-vous que c'est une façon efficace de diriger le marché? Nous pensons que non.
Voilà l'essentiel de notre message: si ce projet de loi n'est pas le bon, quel sera le bon projet de loi? Nous pouvons vous dire que nous allons collaborer avec le gouvernement, avec l'opposition et avec nos employeurs. Nous allons collaborer avec quiconque est intéressé à nous permettre d'atteindre nos objectifs, qu'il s'agisse de fermer la porte de l'écurie quand les chevaux s'y trouvent encore ou après, mais je pense que c'est une chose que nous devons faire. Nous n'avons pas le choix. L'argument selon lequel nous souhaitons faire porter les risques et les coûts aux employeurs et aux travailleurs ne tient tout simplement pas la route.
Ensuite, même si j'ai entendu aujourd'hui les employeurs nous parler de leur grande préoccupation pour les employés, je sais que, quand nous faisons affaire avec eux, ils se préoccupent habituellement davantage de faire augmenter la valeur des actions et de faire de l'argent et de permettre à leurs actionnaires d'en faire. S'il n'y a pas de règlements qui l'exigent, ils n'investiront pas dans les fonds de pension. C'est comme ça que ça s'est passé. Je reconnais les efforts du gouvernement, qui a pris quelques mesures pour obliger les entreprises à faire les bonnes choses — ou peut-être pas à faire les bonnes choses, parce que ce n'est pas ce qu'elles font, mais à faire ce qui doit être fait, c'est-à-dire à traiter ce document de fiducie, cette relation, avec la sincérité requise, et à respecter leur obligation fiduciaire.
Merci.
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Merci de nous donner l'occasion, à Michel et à moi, de parler aujourd'hui.
Je m'appelle Leigh Ann Bastien. Je suis avocate spécialiste des régimes de retraite. Je possède une expertise des lois sur les pensions au Canada, ce qui comprend la Loi sur les normes de prestation de pension, modifiée par le projet de loi .
Michel St-Germain est actuaire des régimes de pension. Depuis 36 ans, il offre des conseils au sujet de la capitalisation et de la conception de régimes de pension des employeurs.
La déclaration que nous venons faire aujourd'hui, en termes simples, est la suivante: le régime de retraite à prestations déterminées est une bonne chose. Il permet de continuer de verser des prestations à beaucoup de gens durant la plupart des périodes de repli du marché et des périodes de ralentissement des activités de l'employeur. Mais, le système de revenu de retraite est en péril. Les gouvernements tentent de renforcer le système de revenu de retraite dans son ensemble. Le projet de loi irait dans la direction contraire, compromettant la viabilité des régimes de pension offerts par les employeurs.
Les promoteurs de régimes de pension à prestations déterminées du secteur privé modifieront probablement la capitalisation et la conception de leur régime ou abandonneront carrément la formule à prestations déterminées si les modifications législatives en matière de faillites font du déficit des régimes de pension une créance entièrement garantie.
Je vais laisser la parole à Michel, qui va apporter des précisions.
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Merci, madame Bastien, monsieur le président.
Comme l'a dit Mme Bastien, les répondants des régimes de retraite traversent présentement une période difficile.
Nous estimons que plus de 90 p. 100 des régimes de retraite sont en déficit et que 30 p. 100 d'entre eux ont un déficit de plus de 20 p. 100 de la caisse. Dans plusieurs cas, le montant de ce déficit dépasse le milliard de dollars.
De plus, les déficits de régimes de retraite sont très changeants et peuvent facilement varier de plus de 10 p. 100 au cours d'une année.
[Traduction]
Si le niveau de priorité du déficit du régime de pension en cas de faillite est modifié, la réaction des promoteurs de régimes de retraite, c'est-à-dire nos clients, sera fonction des mesures prises par les prêteurs. Nous observerons une diminution de la sécurité de leurs prêts, car certaines dettes non garanties auront la priorité sur d'autres. Si les prêteurs majorent le taux d'intérêt des sociétés qui parrainent des régimes à prestations déterminées pour contrebalancer le risque additionnel, ils sont susceptibles de refuser d'accorder des prêts à ceux qui gèrent d'importants régimes à prestations déterminées ou d'ajouter des clauses restrictives d'emprunt, ce qui aura pour effet de limiter l'actif de retraite de tous les investisseurs dans un régime privé.
La modification de ces règles entraînera des conséquences imprévues. Les répercussions varieront d'un promoteur à l'autre, mais, à mon avis, elles se feront sentir davantage chez ceux qui gèrent d'importants régimes PD et accusent un déficit massif, ceux dont la notation financière se situe tout juste au dessus de la catégorie investissement et ceux dont l'exploitation dépend de l'accès au financement. Le changement se traduira, notamment, par une augmentation des coûts d'emprunt et une diminution de la capacité d'emprunter de l'argent.
La compétitivité des sociétés qui parrainent un régime de retraite à prestations déterminées diminuera également, car celles-ci devront composer avec une augmentation des coûts d'emprunt nécessaires à l'exploitation de leur entreprise, comparativement aux promoteurs de régimes de pension à cotisations déterminées ou à ceux qui n'en offrent pas du tout. En outre, leurs concurrents internationaux, en particulier ceux des États-Unis et du Royaume-Uni, ne sont pas visés par des lois qui prévoient que l'on accorde au déficit du régime de pension la priorité sur d'autres créances. Les coûts d'emprunt de ces concurrents internationaux seront moindres.
Les actionnaires sont déjà préoccupés au sujet des risques liés aux régimes de retraite à prestations déterminées et, par conséquent, bien des entreprises ont pris des mesures pour réduire ces risques en substituant à une partie de leur régime PD un régime à cotisations déterminées. Si les actionnaires de ces sociétés observent une augmentation des coûts d'emprunt, en plus de nouvelles restrictions, ils en feront encore davantage pour inciter les sociétés à substituer à leur régime à prestations déterminées un régime CD — un régime à cotisations déterminées —, et on transférera une proportion correspondante des risques aux employés. Selon nous, le rythme de la substitution des régimes à cotisations déterminées aux régimes à prestations déterminées, pour les nouveaux employés comme pour les anciens, augmentera de façon considérable. Vous et moi devrions être préoccupés par un tel transfert du risque aux employés.
Ceux qui dépendent de régimes à cotisations déterminées et de REER ont subi des pertes considérables en 2008, tandis que la grande majorité des bénéficiaires d'un régime à prestations déterminées touchent et continueront à toucher le montant intégral de leurs prestations, en dépit du mauvais rendement de la bourse des valeurs mobilières.
Les promoteurs qui éprouvent des difficultés, dont ceux protégés par la LACC, seront particulièrement touchés. Parfois, l'accès à un financement immédiat est essentiel à l'exploitation, et nombre de ces promoteurs évoluent dans un secteur où les régimes à prestations déterminées d'envergure sont la norme. Un prêteur n'accordera pas de prêt à un promoteur qui éprouve des difficultés s'il y a un risque que les fonds servent à combler le déficit d'un gros régime de retraite.
Monsieur le président, on peut améliorer la sécurité des régimes à prestations déterminées en encourageant les promoteurs à mieux capitaliser leur régime. On pourrait facilement le faire en accordant aux promoteurs de régimes le droit au surplus s'ils capitalisent leur caisse de retraite de façon prudente.
Les promoteurs d'un régime demandent un...
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Je vais partager mon temps avec mon collègue, M. Garneau.
Très brièvement, je vais parler un peu au nom de mon parti. En ma qualité de critique, je peux vous dire que nous nous efforçons de trouver une façon de renforcer le système de revenu de retraite. Comment pouvons-nous amener plus de gens dans un régime de pension, idéalement un régime PD? Comment renforçons-nous le système de revenu de retraite de notre pays tout en encourageant les sociétés à y participer?
Dans 26 ans, il y aura 10,9 millions de personnes âgées de plus. L'incidence sur la capacité budgétaire de notre pays, à mon avis, sera énorme. Ainsi, il faut absolument que nous fassions certaines choses comme il faut. Et la question des régimes de retraite — comment les protéger, comment les encourager et comment les renforcer —, à mes yeux, est cruciale. Nous sommes tous ici en raison des problèmes qui ont fait surface cette année, surtout avec Nortel, et nous cherchons tous une façon de les régler.
J'ai déposé un livre blanc qui contient 28 recommandations. Si le projet de loi pose des problèmes, et vous me dites qu'il entraînera d'énormes répercussions et détruira le marché du crédit et tout le reste, alors de quoi avons-nous besoin? Que devons-nous faire?
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Nous sommes tout à fait d'accord.
Il y a trois choses que nous répétons sans cesse. Tout d'abord, le projet de loi demeure une possibilité. Mais nous ne sommes pas encore rendus là. Au préalable, nous devons instaurer des règles qui permettront de nous assurer que le modèle d'investissement des fonds ressemble un peu plus à celui d'une compagnie d'assurance, ce qui suppose l'acquisition d'une plus grande part d'obligations et de titres équivalents et, deuxièmement, il faut nous assurer que la capitalisation est adéquate. Une société ne devrait jamais pouvoir faire volte-face et dire: « Plutôt que d'injecter l'argent qu'il faut dans ma caisse de retraite, je vais l'utiliser aux fins de l'exploitation. »
J'estime que, si nous pouvions mettre de telles mesures en place, le projet de loi ne serait pas désavantageux, parce que le marché se serait déjà adapté. Il faut mettre de l'ordre dans tout ça, mais c'est assurément l'une de nos trois idées pour régler le problème. Et je crois que c'est nécessaire. Que ce soit dans le cadre de ce projet de loi, du prochain ou à un autre moment, nous devrons un jour adopter de telles dispositions.
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Merci, monsieur Garneau.
On comprend qu'il y a des inquiétudes du côté des compagnies, des investisseurs, des actuaires, des responsables des régimes de retraite, et une proposition que nous avions déposée l'an dernier pourrait répondre à ces inquiétudes.
En fait, au milieu de la crise l'an dernier, 70 p. 100 de nos membres travaillaient pour une compagnie qui se trouvait sous la protection de la Loi sur la faillite ou de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.
Notre proposition consiste en un fonds national d'investissements et de rentes, un peu à la manière de ce qui existe au Québec, et on a découvert entre-temps que les deux concepts se ressemblaient beaucoup. Le gouvernement fédéral pourrait instaurer un fonds sans investir d'argent. Le fonds serait administré par le Régime de pensions du Canada, séparément du régime lui-même, et on pourrait avoir une garantie que les actifs des compagnies qui se placent sous la protection des créanciers puissent y être placés afin de fructifier. À ce moment-là, ces fonds ne seraient plus soumis à une terminaison du régime et pourraient être gérés d'une manière moins conservatrice que les fonds des assureurs. Donc, on parle d'un mélange d'obligations et d'actions qui permettrait un rendement plus élevé.
Par la suite, cela viendrait en aide aux compagnies parce qu'elles n'auraient plus besoin de calculer, au bout du compte, lorsqu'elles sont en voie de restructuration, les montants qu'elles doivent sous la forme du déficit sur une base de solvabilité. Elles pourraient considérer le déficit sur une base de continuité étant donné qu'on aurait la garantie qu'il n'y aurait pas terminaison des régimes.
Je sais que c'est assez long à expliquer, mais j'ai inséré l'explication à l'intérieur de vos documents. Un tel fonds permettrait de pouvoir alléger les craintes des compagnies par rapport à cela et il devrait être un partenaire indispensable au projet de loi qui, lui, demeure absolument essentiel pour protéger les travailleurs et travailleuses et les retraités.
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Tout d'abord parce que les employeurs doivent arrêter de profiter des travailleurs et travailleuses et s'engager à respecter les lois provinciales et fédérales, à respecter les préavis des travailleurs et travailleuses, les indemnités de licenciement et les régimes de retraite. Oui, on veut être les créanciers prioritaires. Nos préavis et nos indemnités de licenciement doivent faire partie des créances garanties. Je vais vous le répéter: ce qu'ils font est abominable.
Depuis quand les travailleurs et les travailleuses se font-ils payer en actions? La multinationale va nous verser le montant de nos préavis et de nos indemnités de licenciement en actions, à hauteur de 36,5 p. 100 de ce qu'elle nous doit. Trouvez-moi un magasin Metro, un magasin IGA, un concessionnaire de voitures, une ville, qui va accepter des actions en guise de paiement? C'est ainsi que la multinationale veut nous payer, 36 p. 100 et non 100 p. 100 de la valeur de nos préavis, de nos indemnités de licenciement.
Les multinationales ne sont pas pénalisées par le projet de loi . Celui-ci n'a pas assez de « mordant ». Il faut lui en mettre. Les multinationales viennent chercher notre matière première et n'investissent pas dans les infrastructures. Elles la transportent dans d'autres pays quand ce n'est pas sur d'autres continents. Le projet de loi C-501 est si faible que les trois quarts des usines forestières canadiennes sont sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Ce n'est pas seulement AbitibiBowater, Fraser ou White Birch. Il y a eu Smurfit-Stone. Certaines font la queue pour se placer sous la protection de la loi, que ce soit Domtar, Catalyst Paper, dans l'Ouest, ou Cascades. Elles font toutes la queue. Tout le secteur va y passer parce que ces compagnies ne pourront pas concurrencer les compagnies qui vont s'être restructurées sous le couvert de la LACC, sans compter tous les autres secteurs de l'industrie canadienne qui vont vouloir profiter de la même occasion. C'est l'une des raisons pour lesquelles il faut donner du « mordant » au projet de loi.
De plus, j'ai entendu dire maintes et maintes fois que ce qui est arrivé dans le cas du renouvellement de la convention collective d'AbitibiBowater est bien. On a sauvegardé les régimes de retraite. Il ne faut pas oublier que la Régie des rentes a dérogé à sa réglementation provinciale. Au lieu de rembourser les prestations d'équilibre qui étaient de 1,3 milliard de dollars sur cinq ans, elle les a étendues sur dix ans.
Il y a aussi le fait qu'on est toujours demeurés dans un régime à prestations. On a respecté le système traditionnel, mais on commence un nouveau régime à AbitibiBowater par l'entremise du SCEP. C'est encore un régime à prestations. Les travailleurs et les employeurs vont payer plus. Je ne suis pas banquier, mais tout le monde sait que cela prend 15 p. 100 pour administrer un régime. On va y consacrer 18 p. 100, et 3 p. 100 vont être retenus. L'employeur n'aura plus d'exemption de cotisations. Il va devoir continuer à y verser sa part fixe pour rebâtir la solvabilité du régime.
Les travailleurs ont abandonné l'équivalent de 17 p. 100 de leurs conditions de travail lors du renouvellement de la dernière convention collective au printemps 2010, 10 p. 100 de la masse salariale et 7 p. 100 des avantages sociaux, sans compter ce qu'a fait le gouvernement du Québec pour sauvegarder cette multinationale. Ne venez pas me dire que si on met du « mordant » au projet de loi C-501, on va forcer davantage les multinationales à faire faillite. C'est faux. Dans le cas d'AbitibiBowater, ce qu'ont fait la Régie des rentes, les travailleurs et les travailleuses, aucune institution bancaire n'aurait été capable de le faire. Si la Régie des rentes du Québec et les travailleurs ne l'avaient pas fait, c'était la fin d'AbitibiBowater.
Pour nous remercier, les dirigeants veulent s'accorder des primes. Heureusement, les médias rapportent ce matin que la restructuration de l'entreprise a été acceptée aux États-Unis. On sait pourquoi cela achoppait. Les Américains ne voulaient pas que les gestionnaires canadiens s'accordent des primes. Ces compagnies viennent exploiter nos ressources naturelles au Canada. Elles n'ont pas le droit — pas le droit — de « domper » les travailleurs et les travailleuses. Ce sont des citoyens et des citoyennes du Canada, elles n'ont pas le droit de les « domper » comme elles l'ont fait. Cela ne se passe pas seulement à Gatineau, mais à Dolbeau, à Beaupré, à l'usine Belgo de Shawinigan, à Mackenzie, à Grand Falls à Terre-Neuve-et-Labrador, à Thunder Bay. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas clair. Elles n'ont pas à faire ça.
Pour toutes ces raisons, messieurs, nous pensons qu'il faut ajouter du « mordant » au projet de loi , pour les travailleurs.
Merci beaucoup de nous avoir entendus.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Markham, il semble que nombre des témoins que nous avons entendus craignaient que nous mettions trop l'accent sur le résultat final, dans un sens. J'imagine que c'est clairement ce que fait le projet de loi. Or, j'ai l'impression que, en nous concentrant sur le résultat final — en modifiant les règles régissant la faillite —, nous ouvrons la voie à d'importantes conséquences inattendues qui toucheront les sociétés et les travailleurs qui ne sont pas au bout, qui ne sont pas en situation de faillite. C'est un peu ironique, à mes yeux.
Deuxièmement, en nous concentrant sur le droit de la faillite, nous poussons peut-être par inadvertance un plus grand nombre de sociétés à se placer sous la protection du droit de la faillite. C'est ce que nous ont laissé entendre des témoins.
Peut-être pourriez-vous nous parler de la nature de ces conséquences inattendues — l'incidence possible du projet de loi — et donner votre opinion sur la capacité subséquente des sociétés d'embaucher des travailleurs en premier lieu et de faire ces investissements essentiels qui les aideront à éviter la faillite à long terme.
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Mes commentaires précédents s'appuyaient sur l'idée selon laquelle il faut renforcer la capacité des employeurs de maintenir un équilibre. L'équilibre leur permet à long terme de verser plus d'argent dans leur régime de retraite et d'assurer la prospérité de leur entreprise.
À la lumière du sondage et des entrevues subséquentes et après avoir entendu les préoccupations de divers promoteurs de régimes, nous voulons absolument nous assurer qu'ils conservent leur régime à prestations déterminées — et le gèrent de façon efficace — pour toujours. Pour ce faire, ils doivent survivre.
Si nous comprenons bien, les conséquences du projet de loi C-501, qui accorde de fait la priorité à l'intégralité du déficit sur d'autres créances non garanties, mettent gravement en péril la capacité des prêteurs de fixer un taux d'intérêt raisonnable pour les employeurs. Ce n'est pas seulement l'affaire de 25 points de base — autrement dit, 0,25 p. 100 —, il y a des cas où la différence pourrait être considérable.
Nous craignons que, afin d'aider ceux qui ont déjà entrepris une procédure de faillite ou qui sont sur le point de le faire, on aggravera la situation de bon nombre d'autres organisations — dont certaines très larges, surtout celles qui ont la cote BBB. Certaines entreprises ne s'en sortiront peut-être pas, et cela touche beaucoup de travailleurs.
Pour que les fonds puissent continuer à se rendre jusque dans ces entreprises, malheureusement, certaines personnes, au moment de la faillite, ne toucheront pas le montant intégral de l'argent qui leur est dû. C'est très triste.
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Toute la question des régimes à prestations déterminées est intéressante. Depuis environ 40 ans, la réglementation avait pour but d'encourager les régimes à prestations déterminées. En toute franchise, je dirais que nous n'en verrons pas de nouveaux, à moins que ce ne soit le fruit de négociations, d'une convention collective ou d'autre chose. C'est un échec retentissant.
Si nous parlons des risques et des coûts, je suis en faveur du durcissement des règles de capitalisation — selon le modèle des compagnies d'assurance; il faut se détacher du marché. On peut faire beaucoup de choses à cet égard.
Du reste, il y a encore un risque, mais je n'ai pas parlé du risque et du coût. Je suis à la toute fin de la génération des baby-boomers. Lorsque nous prendrons tous notre retraite, si les pensions promises ne sont pas là, nous allons transférer le risque et le coût aux contribuables. Au bout du compte, si certains d'entre nous vont toucher 26 ou 36 p. 100 de ce qu'ils devraient recevoir, ils vont quand même profiter du supplément de revenu garanti et des crédits pour la TVH et la TPS.
Voilà une autre chose dont vous devez tenir compte en votre qualité de législateurs. Le projet de loi n'est qu'un élément de l'ensemble; ce n'est pas l'ensemble. Je crois que c'est quelque chose qu'il faudra faire à un certain moment, si ce n'est maintenant.
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Merci, madame Figueiredo.
Mme Bastien, M. St-Germain et vous-même avez parlé d'encourager l'élimination des régimes PD. Cela pourrait être l'une des conséquences du projet de loi. De fait, on a beaucoup parlé de la fin des régimes PD, ou de leur modification ou des solutions de rechange.
Permettez-moi d'hasarder une idée. Le modèle en place au Canada est bon. Nous avons le meilleur régime de retraite au pays, et je parle du RPC. Il est bien capitalisé. Il est massif. Même durant la dernière récession, il a pris un coup, mais cela n'avait rien à voir avec ce qu'on souffert les titulaires de REER.
L'avantage du RPC, c'est qu'il est géré par un conseil sans but lucratif. C'est un organisme bien géré. Peut-être que sa plus grande qualité tient au fait que, contrairement au régime d'AE, le gouvernement du jour ne peut pas y toucher. C'est là un point important qu'il ne faut pas oublier.
Qu'adviendrait-il si les régimes PD se faisaient plus rares ou disparaissaient et que, dans le cadre des négociations entre les employés et les employeurs, on disait: « Transformons notre régime PD en RPC »? J'imagine cela dans cinq ou dix ans.
Vos commentaires, je vous prie.
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Une dernière question pour les représentants de Towers Watson.
Selon votre mémoire, le projet de loi élargirait le marché des obligations industrielles. Je sais que vous ne vouliez pas aborder la question des points de base, mais vous avez parlé de 12 à 29 points. Votre propos concorde sans aucun doute avec d'autres témoignages que nous avons entendus. Le représentant de Philips, Hager & North — que je crois que vous connaissez — et M. Carte, que vous connaissez aussi, ont tous deux déclaré qu'ils prévoyaient que le marché des obligations industrielles ferait un bond d'un quart de point, ce qui correspond à environ trois ou quatre milliards de dollars en obligations de la catégorie investissement. Et on parle de celles qui ont le statut prioritaire. Il s'agit des obligations garanties.
Alors, lorsque nous parlons du projet de loi et que nous parlons de la valeur des obligations industrielles de la catégorie investissement, qui se chiffre environ à 300 milliards de dollars — je crois que c'est là l'estimation présentée dans le rapport —, nous parlons en réalité d'un bond de 1 p. 100 de la valeur des obligations de la catégorie investissement, de l'ordre de trois à quatre milliards de dollars.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais poser ma question à Mme Bastien.
Je sais que vous avez assisté à la dernière séance, alors peut-être que vous m'avez entendu poser une question à M. Breton. C'était au sujet de la question des arriérés et des paiements spéciaux. À mes yeux, le projet de loi visait cette question. Je voulais savoir quelle serait l'incidence réelle de ce projet sur les marchés. Il a fait valoir que les marchés ne seraient pas touchés seulement par le projet de loi C-501, ils y a aussi le projet de loi .
Je vous ai entendu mentionner que vous connaissiez le projet de loi C-9, alors je me demande si vous pourriez nous éclairer quelque peu sur le lien, pour expliquer pourquoi le phénomène est peut-être plus important que ce que j'avais compris.
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Je peux faire quelques remarques, tout d'abord, au sujet du projet de loi C-501.
Le projet de loi est le fruit d'une intention explicite de faire du déficit intégral une créance super-garantie. Le libellé du projet de loi C-501 est moins clair. Je dirais que, lorsque vous procéderez à l'étude article par article, il sera essentiel de vous assurer que les mots correspondent bien à votre intention.
Le projet de loi C-501 s'appuie sur un règlement d'exécution de la Loi sur les normes de prestation de pension. Il définit la responsabilité ciblée par le règlement. Le règlement d'exécution du projet de loi n'a toujours pas été remanié, mais il sera remanié.
Vous avez donc un contexte évolutif. Voilà ma première remarque.
Deuxièmement, en observant le projet de loi C-9 — le texte en tant que tel, avant de voir le règlement —, nous pouvons constater que des paiements spéciaux sont exigibles jusqu'à la date de fin du régime. Je crois que j'ai entendu un commentaire à cet égard plus tôt aujourd'hui. Certains croient que c'est là la portée voulue du projet de loi . Mais le projet de loi a instauré un nouvel élément à la capitalisation des régimes de pension. Il s'agit d'une obligation de capitaliser entièrement le déficit après la clôture d'un régime et de le faire sur cinq ans.
À mon avis, le libellé du projet de loi 501 n'est pas assez explicite pour que je détermine en toute certitude que cette responsabilité est exclue. En fait, je crois qu'on peut même l'interpréter de façon à croire que le déficit intégral est visé, même si le projet de loi C-9 prévoit une capitalisation du déficit intégral, non pas à un moment déterminé, mais sur une période de cinq ans.
Comme l'a suggéré le dernier témoin, j'ai demandé aux attachés de recherche de distribuer le rapport de l'OCDE à tous les membres du comité avant que l'on procède à l'étude article par article.
Avant que je laisse la parole à M. Braid pour cinq minutes, comme je crois que vous allez partir assez rapidement après nos travaux, je voulais vous rappeler que nous allons procéder à l'étude article par article jeudi. Si vous voulez proposer des amendements, veuillez les déposer au plus tard demain midi. Même là, le délai de traitement sera assez court, mais déposez-les au plus tard demain midi pour que nous puissions les examiner.
Monsieur Braid, vous avez cinq minutes.
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Autrefois, on percevait vraiment les régimes à prestations déterminées et tous les régimes de retraite comme un élément de la gestion des ressources humaines ayant pour but d'attirer les travailleurs et de les maintenir en poste. Vu la taille des régimes à prestations déterminées et les règles de capitalisation du déficit de solvabilité qui sont entrées en vigueur à la fin des années 1980 et au début des années 1990, facteurs qui ont eu des retombées sur le marché et ont contribué à l'accroissement de la taille de ces régimes, les décisions touchant l'avenir de ces régimes sont, de fait, dictées par les finances.
Le service des finances considère ces régimes en grande partie comme des filiales financières qui doivent être gérées avec toutes les autres filiales financières sous leur responsabilité. Cette filiale financière acquiert toutes sortes d'éléments d'actifs, dont des actions. Son portefeuille est extrêmement instable, et, dans le cas d'une somme très élevée, ces fluctuations se répercutent sur le sort de l'organisme. À un certain moment, la situation est insoutenable, et quelqu'un — le service des finances ou le conseil d'administration — décide qu'il faut faire quelque chose.
Regardez la situation au Royaume-Uni; regardez la situation aux États-Unis. Ils ont gelé une grande partie de leurs régimes à prestations déterminées; ils ne se sont pas contentés d'offrir des régimes à cotisations déterminées aux nouveaux employés, ils ont également dit à tout leur effectif en place: « À partir de maintenant, votre régime de retraite est à cotisations déterminées. » C'est peut-être la tendance, et nous avons peur que le projet de loi ne l'accélère.