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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 059 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er mars 2011

[Enregistrement électronique]

(1630)

[Traduction]

    Bonjour à tous et bienvenue à la 59e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
    Nous entendrons aujourd'hui M. Clement, ministre de l'Industrie, des sciences et de la technologie.
    Vouliez-vous parler de votre avis, monsieur Rota, avant que le ministre Clement n'entame son exposé?
    Oui. J'ai déposé une motion devant le comité pour que, nonobstant toute autre activité prévue du comité, le comité invite l'hon. Tony Clement, ministre de l'Industrie, et l'hon. Gary Goodyear, ministre de l'Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l'Ontario, à témoigner au sujet du Budget supplémentaire des dépenses (C) de 2010-2011 le 10 mars 2011 de 15 h 30 à 17 h 30.
    Je crois que c'est assez simple. Le ministre est ici et nous sommes si contents de le voir que nous voulons le convoquer de nouveau.
    Merci, monsieur Rota.
    Nous ne discuterons pas de la question pour l'instant. Il s'agit simplement d'un avis de motion de M. Rota dont nous parlerons jeudi.
    Maintenant, monsieur le ministre, nous sommes heureux de vous accueillir parmi nous. Je vous laisse faire votre exposé.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également mes collègues du comité de m'avoir invité à leur donner mon opinion sur la question de la facturation à l'utilisation pour les services Internet de gros, et à formuler des remarques d'ordre plus général.

[Français]

    À titre de ministre de l'Industrie du Canada, j'ai pour travail de contribuer à encourager la mise en place d'un marché novateur et concurrentiel, et de faire en sorte que les consommateurs canadiens aient des choix réels parmi les services qu'ils achètent.

[Traduction]

    Même si les technologies de l'information et des communications ne représentent qu'environ 5 p. 100 du PIB, je suis convaincu, statistiques à l'appui, qu'elles favorisent le rendement des 95 p. 100 restants. Les TIC constituent le moteur et le carburant qui nous propulsent en avant. Jamais nous ne devons perdre leur importance de vue.
    Voilà pourquoi, en ma qualité de ministre de l'Industrie, j'ai fait des TIC et, de façon plus générale, de l'économie numérique l'une de mes priorités personnelles; je lancerai d'ailleurs ce printemps la première stratégie canadienne exhaustive de l'économie numérique.
    Je tiens également à m'assurer que nous n'oublions pas les consommateurs quand nous discutons de cette économie et élaborons des plans qui la concernent. Les entreprises sont évidemment importantes, et j'y reviendrai dans quelques instants. Les initiatives universitaires et gouvernementales le sont également. Mais si nous oublions le consommateur, je crois que nous omettons un élément essentiel à la réussite de la stratégie de l'économie numérique et de l'économie en général.
    Qu'est-ce que j'entends par là? Eh bien, il est évident que l'accroissement de la concurrence et de l'offre proposée aux consommateurs favorise l'adoption de l'économie numérique et nous aide à devenir plus concurrentiels et novateurs. Nos citoyens peuvent devenir plus créatifs, et nos petites entreprises ont plus de chances de réussir. Tous ces éléments seront nécessaires à une société fondée sur l'économie du savoir.
    Nous cherchons donc à assurer un sain équilibre sur le marché afin d'offrir un environnement propice à la réussite des entrepreneurs, à l'émergence de nouvelles idées novatrices et d'occasions réelles, et à la création d'emplois.

[Français]

    Nous devons nous assurer que les politiques gouvernementales permettent d'encourager les investissements, d'accroître les choix des consommateurs, de réduire au minimum la réglementation et d'assurer le libre jeu des forces du marché. Voilà nos politiques et notre orientation.
    Sans aucun doute, les sociétés canadiennes de télécommunications ont effectué d'importants investissements dans l'infrastructure au cours des dernières années. Par suite de ces investissements, les Canadiens ont maintenant accès à de multiples réseaux de pointe et à des services d'envergure mondiale d'un bout à l'autre du Canada.

[Traduction]

    Les fournisseurs de services canadiens investissent parce que c'est payant pour eux de le faire. Ils réagissent aux demandes de leur clientèle. De plus, ils stimulent eux-mêmes la demande en proposant de nouveaux services et des vitesses supérieures en faisant de la publicité et de la promotion.
    Tenant compte de ce nouvel environnement, notre gouvernement a, en 2006, donné au CRTC des instructions en matière de politique afin de reconnaître l'importance de la concurrence et de l'équité.
(1635)

[Français]

    Dans les instructions, nous ordonnions au CRTC de se fier aux forces des marchés dans la plus grande mesure possible et, lorsqu'il utilise des mesures réglementaires, d'assurer la neutralité technologique et concurrentielle dans toute la mesure du possible pour permettre la concurrence issue des nouvelles technologies, et de ne pas favoriser artificiellement soit les entreprises titulaires ou les petits fournisseurs de services Internet.

[Traduction]

    Dans ces instructions, le gouvernement indiquait que la réglementation, si elle s'avérait nécessaire, devait être modérée et proportionnelle aux objectifs visés.
    J'attaquerai directement la question de la facturation à l'utilisation pour dire que l'accès à Internet est une facette de plus en plus importante de la vie des Canadiens. J'affirmerais même que c'est plus qu'important; à notre époque, cet accès est rapidement en train de devenir un maillon essentiel de la trame sociale et économique du pays. L'abordabilité et le choix sont donc au coeur de la question. Nous sommes certainement conscients de l'importance des réseaux à large bande pour l'innovation entrepreneuriale.
    Dans ce contexte, la décision du CRTC d'imposer la facturation à l'utilisation aux fournisseurs de services de gros est malheureuse et incompatible avec une saine politique publique. Les FSI indépendants ne doivent pas être obligés d'adopter la même stratégie de prix de détail que les compagnies titulaires, car cela limiterait l'offre et entraverait la concurrence sur le marché.
    De plus, si pareille décision était maintenue alors que le gouvernement a fait de 2011 l'« Année de l'entrepreneur », elle aurait des répercussions à grande échelle non seulement sur les consommateurs, mais également sur les entrepreneurs, les créateurs, les innovateurs et les petites entreprises de toutes les régions du pays.
    En outre, un grand nombre de nouvelles entreprises novatrices qui s'implantent ici, au Canada, ont besoin de pouvoir offrir à leur clients des services ou du contenu par Internet. Dans le secteur de pointe des services informatiques dématérialisés, il faut que les consommateurs et les clients — qui sont nombreux à utiliser une ligne résidentielle — aient un accès équitable et abordable à Internet. S'il n'y a pas suffisamment de concurrence, la facturation à l'utilisation risque de faire disparaître ces entreprises novatrices et les avantages qu'elles peuvent apporter aux consommateurs canadiens et à l'économie numérique du pays.
    Quant aux FSI indépendants eux-même, le fait est que dans bien des cas, ils font bien plus que de revendre les services de réseau des compagnies titulaires, allant souvent jusqu'à fournir plus qu'un simple accès à Internet. Nombreux sont ceux qui offrent un autre produit final à leurs utilisateurs, servant parfois des créneaux qui, même s'ils sont relativement petits si on les compare aux marchés des compagnies titulaires, sont essentiels à l'innovation, à la concurrence et à l'offre proposée aux consommateurs.
    Monsieur le président, j'ai entendu l'avis d'un nombre impressionnant de Canadiens dans ce dossier. Ce sont littéralement des centaines de milliers de citoyens qui ont communiqué avec moi et avec le gouvernement concernant la question qu'étudie le CRTC ainsi que d'autres sujets, comme le prix de détail, la qualité et l'offre de services, le choix actuellement offert au Canada, la neutralité du Net et d'autres questions afférentes. Je tiens à remercier publiquement la population canadienne d'avoir participé au débat essentiel que nous tenons continuellement sur le sujet.
    Je crois qu'actuellement, le point principal qui ressort des échanges que nous avons eus jusqu'à présent avec les Canadiens et que de nombreux intéressés ont soulevé, dont les FSI eux-mêmes, c'est que la meilleure manière de stimuler une offre réelle de services aux consommateurs et d'éviter d'imposer la facturation à l'utilisation consiste à favoriser l'établissement d'une concurrence vigoureuse.
     Le CRTC ne réglemente pas les prix de détail, et si nous pouvons résoudre la question dont nous sommes saisis aujourd'hui pour assurer une concurrence saine et équitable dans le secteur des services de gros, il ne devrait pas avoir à le faire dans l'avenir non plus.
    Je crois que les propriétaires de réseau ont des attentes raisonnables en voulant obtenir une rétribution équitable de leurs investissements constants; il faut toutefois agir de manière à ne pas restreindre l'offre proposée aux consommateurs. Je crois que les divers intéressés soumettront de meilleures solutions que celles que le CTRC a envisagées initialement dans le cadre de son processus d'examen et je suis certain que l'organisme en tiendra compte.
(1640)
    Nous en sortirons tous gagnants si les Canadiens ont accès à des réseaux évolués, à une variété de services et à des occasions leur permettant de tirer parti des technologies et des services qui font leur apparition sur le marché. Ce sont là les fondements d'une économie numérique florissante.
    Le gouvernement continuera de surveiller les développements de l'industrie pour assurer l'efficacité des cadres stratégiques et réglementaires du Canada.
    Si la décision du CRTC ne permet pas de combler adéquatement les besoins des consommateurs, des petites entreprises, des innovateurs et des créateurs canadiens, le gouvernement peut intervenir aux termes de la Loi sur les télécommunications.
    Je dirai enfin, monsieur le président, que quand le CRTC se penche sur les questions de la restriction de services et de l'engorgement des réseaux et de leur incidence sur les FSI, il dispose déjà d'un cadre prévu pour la gestion du trafic Internet. Pour régler le problème de congestion, il faut avant tout investir pour moderniser et améliorer les réseaux. De toute évidence, les FSI ont tout intérêt à s'efforcer constamment d'offrir un meilleur accès aux réseaux à une vitesse plus rapide afin de faire face à la concurrence.
    Cependant, il se peut que ces investissements ne permettent pas d'aplanir toutes les difficultés ou ne constituent pas la solution la plus appropriée pour résoudre un problème. En pareil cas, le CRTC autorise le recours à des mesures économiques transparentes pour atténuer la congestion — et j'insiste sur le mot « transparentes ».
    La congestion des réseaux fait l'objet de débats, où l'on remet en question l'existence même de cette congestion et l'ampleur que lui prêtent les compagnies titulaires. Il est toutefois évident que l'application ou l'imposition de la facturation à l'utilisation aux FSI indépendants n'a rien de transparent. La corrélation directe entre l'imposition de ce modèle d'affaires et les coûts réels des services de gros n'est pas transparente non plus.
    Je concluerai, monsieur le président, en soulignant que notre gouvernement met l'accent sur l'économie et la création d'un environnement favorable à la prospérité des créateurs d'emplois et des entreprises. Les Canadiens peuvent compter sur nous pour agir dans l'intérêt supérieur des consommateurs.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de témoigner aujourd'hui. Je répondrai avec plaisir aux questions que vous pourriez avoir.
    Je vous remercie, monsieur Clement.
    Nous entamons maintenant notre première série de questions.
    M. Garneau a la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, de comparaître aujourd'hui.
    Vous me pardonnerez d'être un peu sceptique. Vous vous gargarisez de belles paroles, mais quand vient le temps d'agir, c'est une autre paire de manches.
    J'ai, moi aussi, écouté un grand nombre de Canadiens et d'intervenants du secteur des télécommunications. Vous avez dit en avoir entendu des milliers, et j'espère que ce n'étaient pas de simples gazouillis, mais des échanges sérieux. Vous êtes, après tout, ministre de l'Industrie.
     J'ai l'impression qu'un immense vide politique règne au pays. Le secteur des télécommunications réclame à cor et à cri une forme d'orientation stratégique, alors que votre gouvernement est au pouvoir depuis cinq ans. On ne s'étonnera pas que vous renversiez fréquemment les décisions du CRTC, puisque cet organisme patauge lui-même en plein vide politique. Lui aussi a besoin que vous et Industrie Canada lui donniez une orientation stratégique pour que ses décisions ne finissent pas par être invalidées. En fait, vous et le CRTC gardez le contact et êtes sur la même longueur d'ondes. Dans le cours normal des choses, il devrait être extrêmement rare que les décisions du CRTC soient invalidées.
    Je passerai outre la question de la facturation à l'utilisation pour vous demander comment vous avez procédé pour aviser le président du CRTC que vous alliez vous opposer à sa décision.
    J'ai parlé à Konrad von Finckenstein quand il a comparu devant notre comité il y a quelques temps et je lui ai demandé comment il avait été informé que vous n'étiez pas d'accord avec la décision du CRTC. Il m'a répondu que ni vous ni le ministère n'avaient communiqué avec lui, et qu'il avait appris la nouvelle comme tout le monde, par l'un de vos messages sur Twitter.
    Se pourrait-il que le gouvernement annonce ses politiques et ses décisions en diffusant des messages de 140 caractères au milieu de la nuit pour dire au CRTC, un organisme de réglementation respecté, comment les décisions se prennent au pays?
(1645)
    Si vous me le permettez, monsieur Garneau, j'aimerais réagir à certains de vos propos.
    Sachez d'abord que je ne partage pas votre avis sur la politique du gouvernement. Je la considère au contraire limpide; nous l'avons énoncée dans les instructions en matière de politique que nous avons données au CRTC. Nous sommes favorable au choix et à la concurrence. C'est on ne peut plus clair.
    Dans mes fonctions de ministre de l'Industrie, je me suis appuyé sur cette politique pour prendre des décisions stratégiques, dont certaines prêtent quelque peu à controverse. C'est toujours à cette politique que je me suis fié pour mettre en oeuvre les résultats des enchères du secteur des services sans fil afin d'assurer l'arrivée de nouveaux joueurs sur le marché. J'agis donc de la même manière concernant l'accès à Internet
    Je crois que les Canadiens, tout comme les intervenants du secteur des télécommunications et de l'accès Internet, comprennent que cette politique vise à favoriser la concurrence et le choix. Je sais que c'est votre rôle d'être en désaccord, mais la politique est très claire.
    Je vous ferais cependant remarquer, monsieur le ministre, que vous avez invalidé la décision du CRTC parce que ce dernier essaie d'interpréter son mandat. Par exemple, il a indiqué qu'en 2006, il a interprété à sa manière les instructions que lui a données votre prédécesseur, M. Bernier, sur la façon de gérer la concurrence. Qu'on soit d'accord ou non, il n'en reste pas moins que votre opinion diffère, de toute évidence, de celle qu'avait le ministre Bernier en 2006; vous avez donc annulé sa décision.
     En ce qui concerne Globalive, un autre dossier dans lequel vous avez renversé la décision du CRTC, l'affaire est maintenant devant les tribunaux.
    Il me semble pourtant que si la machine gouvernementale fonctionnait comme il se doit, il serait très rare que l'on annule des décisions du CRTC.
    Mais c'est effectivement rarissime. Je ne me souviens pas des chiffres exacts, mais des quelque 2 200 décisions du CRTC, nous en avons modifié trois et renvoyé trois. C'est donc l'exception plutôt que la règle. Je ne suis pas d'accord avec vous.
    M. Marc Garneau: Monsieur le ministre, où sont...
    L'hon. Tony Clement: Puis-je répondre à vos questions? Est-ce possible?
    Eh bien, c'est ce que vous venez de faire, il me semble.
    Je n'ai pas répondu à toutes, et j'aimerais poursuivre sur un autre sujet que vous avez abordé, soit celui de mon utilisation de Twitter.
    Je considère que dans nos fonctions d'agents du gouvernement et de politiciens, nous devrions exploiter tous les moyens à notre disposition pour entretenir le dialogue avec les Canadiens afin de leur rendre des comptes et d'être responsables envers eux.
    Je compte probablement des milliers...
    Devrait-on tenir compte de l'outrage au Parlement?
     Je vous demande bien pardon?
    Devrait-on tenir compte de l'outrage au Parlement?
    Bien sûr que non.
    Je dirais donc que des 12 000 personnes qui me suivent sur Twitter, probablement 2 000 à 3 000 sont des représentants des médias, principalement des médias canadiens. Ainsi, l'annonce d'une politique sur les médias sociaux ne diffère pas de la publication d'un communiqué, de la tenue d'une conférence de presse ou de toute autre mesure prise traditionnellement par les politiciens. Il n'y a rien à craindre. Je vous encouragerais même à adopter ces médias sociaux.
(1650)
    Sachez que lorsque j'étais président de l'Agence spatiale canadienne — c'est-à-dire avant l'avènement de Twitter — , quand le ministre de l'Industrie voulait m'informer de quelque chose, il ou elle s'assurait de m'en parler avant que tout le monde le sache.
    Eh bien, je peux vous assurer que je suis avant tout au service des citoyens canadiens, et pas nécessairement à celui du président du CRTC, et que je n'ai pas à m'en excuser.
    Je crois que vous l'avez indiqué assez clairement.
    L'hon. Tony Clement: Mais je le respecte encore.
    M. Marc Garneau: Quelle est votre politique au chapitre de la neutralité du Net, monsieur le ministre?
    Je crois en avoir parlé pendant mon exposé, monsieur Garneau. J’ai indiqué que le CRTC avait, à cet égard, établi une politique selon laquelle les compagnies titulaires et les autres FSI ne peuvent tout bonnement imposer des restrictions pour contrôler le trafic s’ils n’ont pu y parvenir autrement. Ils peuvent utiliser d'autres outils que je privilégie évidemment, en investissant notamment dans leurs réseaux et en recourant à d’autres moyens moins interventionnistes de gestion du trafic, si c’est là l’objectif visé. La transparence est de rigueur.
    Je conviens donc avec le CRTC qu’un fournisseur ne peut décider, du jour au lendemain, de contrôler le trafic sans en parler à ses clients et sans organiser ses activités de manière à recourir à d’autres solutions pour régler le problème de congestion avant d’imposer des restrictions.
     Vous réalisez, monsieur le ministre, que c’est la première fois que nous entendons cela aujourd’hui. Où est votre politique?
    Monsieur Garneau, vous avez vraiment dépassé votre temps. Merci.

[Français]

    Monsieur Cardin, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Mesdames, monsieur le ministre, bonjour et bienvenue.
    Dans le fond, tout a commencé par le décret Bernier en 2006. On voit que, dans votre décret 2009-2007, vous avez demandé au CRTC de revoir la décision de radiodiffusion 2008-117 et l'ordonnance de télécom 2009-111, sur la vitesse équivalente, que l'on appelle le speed matching. Pourtant, à ce moment-là, le CRTC protégeait clairement la compétitivité des fournisseurs indépendants contre les volontés des compagnies titulaires. Vous avez tout de même ordonné au CRTC de revoir ces décisions en donnant la priorité aux arguments de Bell.
     En quoi les décisions du CRTC sur la vitesse équivalente étaient-elles mauvaises? Pourquoi devaient-elles être invalidées?

[Traduction]

     Ici encore, notre principe de base est la concurrence et le choix du consommateur.

[Français]

    Nous nous appuyons sur les principes du choix du consommateur et de la concurrence.
    Oui, mais, dans ce cas, monsieur le ministre...

[Traduction]

     Je crois que notre dialogue avec le CRTC sur la question de la vitesse équivalente s'est appuyé sur ces principes. Nous voulions nous assurer que les marchés Internet s’établissent de manière à permettre aux Canadiens de tirer pleinement parti d’Internet et de l’économie numérique. Ainsi, quand le cabinet a demandé au CRTC de revoir ces décisions, c’était de toute évidence avec cet objectif en vue. Dans le décret, nous avons indiqué qu’il était essentiel que le régime de réglementation forme un cadre unifié et prospectif, propre à encourager les investissements constants dans les infrastructures à large bande, à stimuler la concurrence et l’innovation, et à offrir du choix aux consommateurs.
    Selon moi, toutes ces mesures cadrent avec le principe selon lequel la concurrence et le choix sont importants pour les consommateurs et notre économie.

[Français]

    C'est le message général en réponse à presque toutes les questions.
    Cependant, dans ce cas-là précisément, avec des vitesses variables, ça donne un avantage automatique à Bell. Les personnes qui naviguent moins sur Internet optent pour ses services, alors la concurrence s'en trouve complètement éliminée. On se demande si Bell a maintenant le pouvoir d'ordonner à votre gouvernement de réexaminer les décisions du CRTC. Est-ce maintenant Bell qui gère?

[Traduction]

    Non. Il est évident que nous examinons chaque question séparément, mais de manière à être cohérents dans nos échanges avec le CRTC. Nous avons, selon moi, été cohérents dans ce dossier en indiquant que nous voulions offrir aux consommateurs les meilleurs services sur le marché. Voilà pourquoi nous avons adopté cette position au chapitre de la vitesse équivalente. Je crois que cette décision s’est avérée judicieuse. Nous ne sommes peut-être pas d’accord, monsieur Cardin, mais je crois qu’au bout du compte, nous sommes cohérents et ne cherchons que le bien du consommateur.
(1655)

[Français]

    Vous savez que depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement conservateur, il y a eu plusieurs décisions défavorables aux consommateurs, aux fournisseurs indépendants et à la compétition en ce qui concerne Internet.
    Auparavant, quand les décisions ont été favorables à Bell ou aux autres compagnies titulaires, le gouvernement n'est jamais intervenu.
    En fait, la seule fois que le CRTC a protégé la concurrence, votre gouvernement lui a demandé de revoir sa décision en donnant la priorité aux principaux arguments de Bell.
    Ne croyez-vous pas que vous envoyez des messages complètement contradictoires au CRTC en lui demandant de revoir ses décisions sur la facturation à l'utilisation alors qu'elles respectent totalement l'esprit de votre directive 2009-2007?
    Je crois qu'il est important d'avoir un réseau qui fonctionne pour les consommateurs. Il est important d'avoir, comme je l'ai déjà dit, le choix et la concurrence au sein du marché. La directive de 2006 décrivait clairement notre position.

[Traduction]

    Vous m’avez demandé si j’obéissais aux ordres de Bell. Je vois mal cette compagnie se présenter ici pour affirmer que je fais ce qu’elle me dit au chapitre de la facturation à l’utilisation. Je ferais respectueusement remarquer que nous avons des positions diamétralement opposées à ce sujet. Mais c’est ainsi.
    Pour que notre économie non seulement survive, mais prospère, il faut accroître le choix et la concurrence. Ce segment de notre économie progresse à la vitesse de la lumière, et nous devons veiller à ce que les intérêts de tous soient servis et que si un fournisseur n’offre pas des services, des choix ou des tarifs qui répondent aux besoins des consommateurs, des propriétaires de petite entreprise ou des créateurs, ces derniers disposent d’autres choix. C’est essentiel, je crois.

[Français]

    Il est certain que cela peut avoir une influence quand environ 500 000  personnes réagissent en peu de temps pour dire qu'elles sont contre une décision. Cela peut contribuer à vous faire changer d'idée face à Bell. Toutefois, vous n'avez jamais donné de directives, c'est Bell qui a demandé le report de 60 jours au CRTC. Par la suite, c'est venu tout seul. Vous avez dû appuyer cette demande malgré vous, parce que tout cela répond quand même au décret Bernier, ça vise à réglementer le moins possible. Si on consulte le décret comme tel, on le voit très clairement au point d), dans les différentes directives que vous donniez au CRTC:
d) si l'incidence de ces exigences liées aux services de gros nuit indûment à la capacité des compagnies de téléphone titulaires d'offrir de nouveaux services convergents, comme la télévision sur protocole Internet (TVIP).
    La directive était là et la façon d'y arriver, c'est par la facturation à l'utilisation pour soi-disant libérer l'ensemble du réseau et y inclure la télévision IP.
    Pouvez-vous nous expliquer en quoi les décisions 2008-117 et 2009-111 sur la vitesse équivalente ne respectaient pas le décret Bernier de 2006?

[Traduction]

     Comme je l’ai indiqué, le cabinet et le CRTC ont échangé sur la question. Ce dernier a conclu que si les services de gros n’augmentaient pas leur vitesse pour égaliser celle des services de détail, les compagnies de téléphone et les câblodistributeurs formeraient un duopole dans ce secteur. À moins d’offrir des vitesses équivalentes, le duopole perdurerait. Je crois que c’est ce que le CRTC a décidé. Nous avons respecté cette décision, car au final, il importe de faire des compromis.
    Dans votre intervention, vous avez fait une remarque sur la réponse que nous avons obtenue des Canadiens. Je n'ai pas à m’excuser de lire des courriels et des billets. Si les gens veulent m’envoyer des signaux de fumée, je les lirai aussi. Le fait est que, par une coïncidence heureuse et du fait de notre saine politique, la population est d’accord avec nous. La facturation à l’utilisation imposée aux fournisseurs de gros ne peut que nuire aux consommateurs, aux petites entreprises et aux entrepreneurs. Les Canadiens et nous sommes d’accord là-dessus.
(1700)
    Monsieur Cardin, je sais qu’il y a beaucoup de questions, mais vous avez de loin dépassé votre temps. J’essayais de permettre au ministre de répondre à vos questions.
     Nous devons maintenant entendre M. Lake, qui a la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Quand nous avons entendu les témoins qui ont comparu devant le comité, certains nous ont indiqué que la décision ne toucherait que 6 p. 100 des Canadiens. Peut-être pourriez-vous nous parler de l’importance de ce segment de la population et des FSI qui les servent. Qu’en est-il de la concurrence sur le marché?
    Voilà un point que je crois important, car même si ce pourcentage ne constitue qu’un segment minime du marché, il peut, dans bien des cas, stimuler le choix et la concurrence. C’est ainsi que la concurrence fonctionne. Si une compagnie sait qu’un concurrent offre un produit qui attire la clientèle, gagne du terrain, bénéficie d’un bon soutien et intéresse les consommateurs, il est plus probable qu'elle reverra son offre de services en conséquences.
    Même si ce segment ne représente que 6 p. 100 du marché, il faut comprendre que la concurrence existe et que les gens peuvent effectuer divers choix s’ils le désirent. Or, en imposant un modèle de prix similaire aux FSI de gros indépendants, on élimine ce choix. C’est ce qui me préoccupe le plus dans la décision initiale du CRTC.
    Tout minime que soit ce segment du marché, je crois qu’il est important, car il permet de maintenir un certain équilibre. S’il n’existait pas, on se retrouverait essentiellement avec une offre de produits monochrome et moins de choix sur le marché.
    Il a beaucoup été question des instructions en matière de politique données en 2006. Les membres de l'opposition en ont beaucoup parlé, notamment. Mais je me demande s’ils ont jamais pris la peine de les lire, car elles portent beaucoup sur le marché, la concurrence et la neutralité au chapitre de la concurrence. Comme vous l’avez souligné, le gouvernement demandait au CRTC de s’en remettre le plus possible aux forces du marché; s’il fallait recourir à des mesures de réglementation, il faudrait être aussi neutre que possible en matière de technologie et de concurrence afin de stimuler la concurrence dans le domaine des nouvelles technologies et ne pas favoriser artificiellement les compagnies titulaires ou les FSI indépendants.
     Peut-être pourriez-vous nous en dire un peu plus à cet égard? Il me semble que la décision ne cadre pas avec ces critères.
    Le CRTC a fait un travail considérable après avoir reçu les instructions en matière de politique; il a non seulement appliqué les instructions comme telles dans une perspective d'avenir, mais a également réalisé un examen exhaustif des politiques en vigueur à l'époque, en 2007 et 2008. Après avoir terminé cet examen, il a pris de nombreuses mesures pour mieux se conformer aux instructions en matière de politique. Cette période a vraiment constitué un point tournant pour notre gouvernement et la politique publique dans ce domaine.
    Le Conseil a modifié certaines de ses règles administratives et de ses exigences antérieures, jugées disproportionnées ou inapplicables dans le cadre d'une approche axée sur le marché. Il a ainsi établi une toute nouvelle architecture.
    Il a fallu ensuite réserver du spectre pour les nouveaux arrivants dans le secteur des services sans fil. C'est, je crois, un autre élément important de l'équation, quand on examine le domaine des télécommunications dans son ensemble, en ne pensant pas seulement à Internet. C'était, une fois de plus, une décision capitale pour le choix et la concurrence, laquelle a permis d'accroître la concurrence dans le secteur des services sans fil.
    On peut d'ailleurs observer les retombées positives de ces démarches. Même les compagnies titulaires offrent un plus grand nombre de services pensés en fonction de ce qu'elles considèrent comme la menace des nouveaux arrivants. Voilà qui est excellent, car c'est ce que l'on veut sur le marché: du choix, divers modèles de prix et de services, etc.
    Je crois que ces cinq dernières années, nous avons mené une révolution dans ces domaines cruciaux de notre économie.
(1705)
    Vous avez indiqué que peu importe ce que le CRTC décide, le cabinet renversera la décision. Je voulais discuter un peu de la relation qu'entretiennent le gouvernement et le CRTC. Vous avez effleuré la question un peu plus tôt. Combien de fois le gouvernement a-t-il annulé une décision du CRTC?
    Le CRTC a pris quelque 2 200 décisions dans le domaine des télécommunications seulement, sans compter le secteur de la radiodiffusion. L'organisme réglemente bien sûr les domaines des télécommunications et de la radiodiffusion, mais si on laisse de côté ce dernier secteur, le CRTC a pris environ 2 200 décisions en matière de télécommunications depuis que nous sommes au pouvoir. De ces décisions, nous en avons modifié trois et renvoyé trois autres, pour un total de six sur 2 200.
    Il est donc faux de nous accuser d'usurper les pouvoirs du CRTC et de tenter de prendre sa place. Cependant, quand nous devons défendre les instructions en matière de politique, le choix et la concurrence dans l'intérêt des consommateurs, nous interviendrons.
    Bien, c'est ce que j'allais vous demander. D'aucuns se demanderont pourquoi le gouvernement, sans égard aux chiffres, pourrait dicter sa conduite au CRTC, un organisme indépendant.
    Je dirais tout d'abord que la loi nous y autorise. En vertu de la Loi sur les télécommunications, le gouverneur en conseil et le cabinet ont le pouvoir et même l'obligation de modifier ou de renvoyer une décision qu'ils jugent contraire à la politique publique. Et croyez-moi, ce n'est pas une mesure que l'on prend tous les jours. On ne le fait que rarement, si l'on considère que le CRTC rompt d'une manière quelconque avec une saine politique publique en vigueur. Ce n'est que dans ces situations que l'on devrait intervenir, et c'est ce que nous avons fait.
    Mesdames et messieurs, la seule chose qui échappe au régime de réglementation du CRTC, c'est la proximité de votre BlackBerry par rapport au microphone. Le brouillage empêche l'interprète de traduire vos propos. Je vous demanderais donc de maintenir une certaine distance entre les deux appareils pour ne pas produire de brouillage.
    Je laisse maintenant la parole à M. Masse.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, de comparaître.
    La révolution que vous avez menée a poussé les consommateurs canadiens à la révolte. On voit bien que certaines compagnies titulaires essaient de restreindre les services et d'imposer la facturation à l'utilisation. Dans la presse d'aujourd'hui, on peut lire à la une que Rogers porte la question des frais de services de télévision devant les hauts tribunaux du pays après avoir failli perdre le combat, que la guerre est déclarée concernant l'espace attribué aux services sans fil et qu'il faut s'attendre à payer davantage pour les services de télédiffusion.
    Il y avait bien eu des plaintes de l'industrie et quelques décisions avant aujourd'hui. Mais maintenant, le diable est aux vaches. Vous dites vouloir stimuler la concurrence et avez parlé des enchères du spectre, mais vous avez manqué votre coup la dernière fois. Maintenant, l'affaire est devant les tribunaux et l'incertitude règne plus que jamais.
    Qu'est-ce qui vous permet de croire que les Canadiens peuvent vous faire confiance pour vous occuper de cet important dossier lors de la prochaine ronde?
    Vous me permettrez, j'espère, de ne pas être d'accord avec vous concernant la manière dont j'exécute mes fonctions de ministre de l'Industrie.
    Je me permettrais également d'indiquer que nous avons été limpides. Nous privilégions les politiques qui favorisent le choix et la concurrence, que ce soit dans les services sans fil, l'accès Internet ou d'autres segments du secteur. Et si nous considérons que quelque chose risque d'entraver cette concurrence, nous y voyons une menace grave pour l'avenir de notre économie. Par exemple, le Canada devrait être un chef de file dans le domaine des services dématérialisés, mais si la structure en place ne convient pas, nous manquerons le coche dans un domaine où les enjeux sont pourtant élevés.
    Vous avez en outre évoqué mes désaccords avec le secteur. Je n'ai pas d'excuses à présenter à cet égard. Je considère que je défends les intérêts des consommateurs, des créateurs, des entreprises et des innovateurs, conformément à mon mandat.
(1710)
    Mais en quoi les consommateurs bénéficient-ils du système que vous avez implanté, du déroulement des dernières enchères du spectre et des démarches judiciaires dont fait l'objet le gouvernement du Canada parce qu'il a renversé une décision du CRTC? Quel bien cela fait-il aux entreprises qui envisagent d'investir au Canada? Vous avez permis que l'on change la donne lors des dernières enchères du spectre, et certaines compagnies, criant à l'injustice, se sont adressées aux tribunaux et ont eu gain de cause. L'affaire pourrait maintenant se rendre jusqu'en Cour suprême. Les compagnies ne savent donc plus si elles devraient investir et qui sont leurs véritables concurrents.
    De nouvelles enchères auront bientôt lieu. Que se passera-t-il? Donneront-elles lieu elles aussi à des poursuites? Tout cela retarde l'innovation et l'investissement dans l'industrie. Que ferez-vous cette fois-ci lors des enchères du spectre?
    Sachez tout d'abord que personne n'aime se retrouver devant les tribunaux. Mais il arrive parfois que l'on doive...
    Vous vous êtes mis vous-même dans cette situation.
    Excusez-moi, Brian, mais je ne crois pas m'être mis dans cette situation. Le ministère, après avoir analysé les faits, a décidé que Globalive était une compagnie canadienne assujettie à la Loi sur les télécommunications. Le CRTC était d'avis contraire. L'affaire a pris le chemin des tribunaux parce qu'un des autres joueurs a intenté des recours, comme il était en droit de le faire. Notre motivation est toutefois restée la même. Nous avons des raisons juridiques de croire que nous avons raison dans ce dossier. Je vous ferai grâce des détails. Mais outre les raisons juridiques, nous nous appuyons sur la politique publique: nous voulons accroître la concurrence, favoriser l'arrivée de nouvelles compagnies sur le marché et permettre aux consommateurs de choisir leurs services sans fil, sans être assujettis à un duopole ou à un oligopole. J'aurais cru, en fait, que nous serions d'accord à ce sujet.
    Oui, je suis d'accord, mais je pense que les enchères du spectre que nous venons de tenir n'ont pas créé le niveau de certitude dont l'industrie aurait besoin selon moi.
    Vous savez que j'ai travaillé dans ce domaine, Brian. Il y a de la certitude. Les gens d'affaires créent de la certitude. Mais savez-vous quoi? Quand on est en affaires, on n'a jamais de certitude à 100 p. 100. Ils doivent donc l'accepter et composer avec la situation. C'est la raison pour laquelle ils sont en affaires.
    N'oublions pas que nous parlons ici de milliards de dollars qui viennent des contribuables. Cela représente beaucoup pour les Canadiens.
    C'est vrai.
    Est-ce que la stratégie sur le numérique va sortir avant les prochaines enchères du spectre ou allez-vous les tenir avant?
    Je m'excuse, j'ai mal compris le début de votre question.
    Vous avez mentionné une stratégie sur le numérique dans votre allocution, quand les Canadiens y auront-ils accès? Nous en avons besoin depuis longtemps. Allez-vous l'annoncer...
    J'ai dit que j'allais l'annoncer au printemps, oui.
    Au printemps. Est-ce que ce sera avant les enchères du spectre ou après?
    En fait, il y aura certains éléments avant, des éléments qui y sont liés.
    Très bien. Il y a déjà mésentente entre différents fournisseurs sur la façon de faire. Ne serait-il pas plus logique de mettre en place la stratégie sur le numérique, puis de lancer les enchères du spectre après pour qu'elles respectent bien les règles...
    Je pense que c'est ce que je dis, oui.
    Cela dépendra en partie des détails des enchères du spectre. Il y a des principes généraux qui pourront sortir au printemps. Nous venons de terminer une série de consultations sur le 700 mégahertz. Nous avons tenu auparavant des consultations sur le 2 500. Nous étudions les mémoires que nous avons reçus à ce sujet et en temps et lieu, dans le respect de la politique publique, nous pourrons donner à l'industrie et aux Canadiens en général notre vision sur la meilleure façon de procéder.
    Si ces enchères menaient à une autre poursuite, croyez-vous que ce serait bon ou mauvais pour les Canadiens?
    Comme je l'ai dit, personne n'aime être porté devant les tribunaux, mais en revanche, je ne plierai pas l'échine simplement parce que quelqu'un n'est pas content que je sois du côté des consommateurs.
    Ce n'était pas vraiment le côté des consommateurs, parce que le CRTC a déterminé...
    J'étais du côté des consommateurs.
    Non, par cette décision, je dirais plutôt que vous avez reporté les investissements au Canada dans ce domaine.
    Non, pas du tout. J'ai seulement dit...
    Il y a encore plus d'incertitude aujourd'hui qu'avant. Nous pouvons participer à ces enchères, qui constituent une ressource très précieuse, et nous allons y risquer des milliards de dollars. Comment pouvez-vous nous garantir que vous n'allez pas...
    Je ne sais pas d'où vous tenez tout cela, Brian. Le fait est qu'il n'y a personne qui investit dans le 700 mégahertz pour l'instant parce que personne ne connaît les règles. Nous demandons aux gens de l'industrie de nous donner leur opinion, ce qui est très bon dans une perspective de politique publique. Nous venons à peine de terminer nos consultations.
    Pour ce qui est des enchères du spectre qui ont eu lieu en 2008, les gens ont misé et ils ont obtenu du spectre. Ils l'utilisent. Il y a aujourd'hui des téléphones et d'autres appareils qui fonctionnent grâce à ce spectre. C'est un domaine en croissance. Il y a de plus en plus de concurrence. Cela signifie que les fournisseurs doivent mieux accorder leurs flûtes pour servir le consommateur. Je ne peux pas croire que vous êtes contre cela.
(1715)
    Non, je ne suis pas contre. Je veux toutefois qu'il y ait un processus juste et ouvert, pour ne pas nous retrouver encore une fois avec des poursuites sur le dos quand nous allons nous lancer...
    C'est la même chose pour moi.
    Mais c'est à cause de votre intervention que c'est arrivé, monsieur le ministre, vous avez encore renversé la décision du CRTC...
    Non, je pense que c'est parce que j'étais...
    Le CRTC était d'avis que ce processus n'était pas juste.
    Eh bien, son opinion est inspirée par ses propres intérêts d'affaires, mais je ne suis pas là pour les défendre. Je suis là pour appliquer une bonne politique publique.
    Le CRTC n'est pas une entreprise.
    Merci.
    Nous avons dépassé notre temps de beaucoup. J'ai essayé de laisser au ministre une minute pour répondre à votre question.
    Nous allons maintenant faire un second tour de cinq minutes, et nous devons nous y tenir, par souci d'équité.
    Monsieur Rota, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être parmi nous aujourd'hui.
    Comme vous le savez, le CRTC est un organisme indépendant. Il réglemente et supervise les réseaux de radiodiffusion et de télécommunications au Canada. Il est indépendant. Il est là. Il est censé faire son travail. Son mandat est de veiller à ce que les réseaux de radiodiffusion et de télécommunications servent l'intérêt du public canadien.
    Les objectifs du CRTC découlent de la Loi sur la radiodiffusion et de la Loi sur les télécommunications, qui guident ses décisions politiques. D'après ce que je peux voir, il a pour ligne directrice, pour balise, la position exprimée par le ministre de l'Industrie à l'époque, c'est-à-dire votre cabinet, en 2006, c'est-à-dire qu'il doit laisser agir les forces du marché.
    Cela semble être une bonne idée de laisser agir les forces du marché. Quand on parle de forces du marché, je m'imagine qu'on ne fait qu'ouvrir la porte et qu'on laisse le marché suivre son cours. C'est ce que j'entends de l'autre côté. Cela semble être un mantra conservateur que de laisser le marché suivre son cours, et tout se règlera de lui-même. J'ai des réserves à cet égard.
    Un peu plus tôt, quand on vous a demandé ce que vous vouliez dire vraiment et quelle était la politique du gouvernement, vous avez parlé de choix et de concurrence. Tout cela semble très bien. C'est merveilleux. Cela semble bien, mais ne me donne aucun point de référence précis. Cinq ans se sont écoulés, et tout ce que nous pouvons offrir au CRTC, c'est l'objectif de laisser les forces du marché agir, de favoriser le choix et la concurrence. Si votre bureau n'est pas d'accord avec ses décisions, il les renverse.
    J'ai l'impression qu'on revient à la situation d'il y a quelques années. Si je regarde ce qui s'est passé depuis environ un mois concernant la facturation à l'utilisation, c'est un peu comme s'il y avait une nouvelle crise. Elle a été créée de toutes pièces. Mais voilà que le ministre vient se présenter en héros. C'est extraordinaire, n'est-ce pas? C'est comme si le gars qui avait mis le feu était un héros parce qu'il a appelé les pompiers. Je m'excuse, mais cela ne passe pas.
    Le CRTC a pris une série de décisions sur la facturation à l'utilisation conformément aux balises qu'on lui a données en 2006. Nous dites-vous que ces lignes directrices ont changé ou que le CRTC ne les a pas suivies? S'il ne les a pas suivies, en quoi contreviennent-elles aux politiques d'origine?
    Permettez-moi de dire quelque chose en réponse à cette série de questions.
    Premièrement, je distille un peu les questions de concurrence et de choix dans le contexte de cette audience, mais je pense avoir bien souligné l'importance de tout le processus.
    Pardon? Vous les laissez tomber ou vous nivelez par le bas?
    Non, j'ai dit « distille ».
    Merci, je voulais être sûr d'avoir bien compris.
    J'ai dit distille, mais je ne parle pas d'alcool, rassurez-vous.
    Manifestement, le CRTC a pris tout un train de mesures pour mettre en oeuvre la directive politique de 2006. Comme je l'ai dit, il a revu tous ses objectifs, ses procédures et ses règlements. C'est toute l'architecture qui est touchée. Je pense que les Canadiens qui nous regardent ou qui nous écoutent peuvent avoir l'assurance que tout cela a été pesé et soupesé, qu'il y a eu beaucoup de bonnes politiques publiques pour en arriver là, tant de la part de l'organisme de réglementation que du gouvernement. Je tiens à le mentionner.
    Il y a eu 2 200 décisions depuis le début de 2006. Comme je l'ai dit, il y en a plusieurs qui nous semblent dépasser la portée de la directive politique et qui pourraient avoir un impact négatif.
    Concernant la décision sur la facturation à l'utilisation, j'ai été très clair. J'espère que je me suis bien exprimé: ce n'est pas à moi d'en décider. Cela dit, si vous voulez qu'il y ait du choix et de la concurrence, vous ne pouvez pas forcer les fournisseurs de services Internet à adopter un modèle d'affaires qui les empêche d'être concurrentiels. Cela ne favorise ni le choix ni la concurrence.
    Je ne le conteste pas. Je trouve seulement curieux de voir que l'organisme de réglementation s'est vu remettre une politique. Il a pris une décision conformément à cette politique, qui lui a été dictée par le gouvernement, et soudainement, le gouvernement renverse sa décision. Je répète qu'il semble y avoir là une confrontation.
    Y a-t-il eu des discussions en ce sens auparavant? On dirait que soudainement, le 25 janvier, à la dernière minute, la décision du CRTC a été renversée. N'y a-t-il eu aucune discussion avant cela?
(1720)
    J'ai une réponse à cela. Sur l'avis que j'ai reçu du ministère, je ne pouvais pas parler à la commission ni au public de la question avant la fin de la période d'appel. J'ai toutefois pris la parole dès que la période d'appel s'est terminée.
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Rota, vous n'avez plus de temps.
    C'est le tour de M. Braid, pour cinq minutes.
    Merci infiniment, monsieur le président.
    Je remercie le ministre et ses hauts fonctionnaires d'être parmi nous cet après-midi.
    Monsieur le ministre, dans votre exposé, quand vous avez parlé de la facturation à l'utilisation, vous avez fait une distinction entre les services de détail et les services de gros. Vous avez dit que le modèle de facturation à l'utilisation pour les services de détail était pour ainsi dire imposé aux fournisseurs de services Internet indépendants de gros. Pourquoi faites-vous une différence entre les services de détail et les services de gros et en quoi cela justifierait-il que ce ne serait pas une bonne façon de faire?
    Comme je crois l'avoir mentionné, il n'est pas du ressort du CRTC de réglementer les prix ou la structure de prix des services de détail. Les services de gros existent parce qu'il a été déterminé, et je pense que c'est correct, qu'il faut réserver une partie de la largeur de bande aux FSI indépendants, faute de quoi on s'expose à un monopole ou à un duopole. Le CRTC a donc un certain pouvoir de réglementation dans le domaine du gros, parce que c'est lui qui a créé le marché des services de gros au nom des Canadiens et qui a décidé que les FSI indépendants devaient gagner leur accès à la largeur de bande réservée pour eux par l'organisme de réglementation, par Bell dans ce cas particulier. C'est pourquoi les services de gros diffèrent des services de détail.
    La seule raison pour laquelle le débat s'est un peu empêtré, c'est que l'un des arguments contre la position du gouvernement, c'est que si l'on permet aux fournisseurs de services de gros d'adopter un modèle d'établissement des prix permettant un accès à volonté, cela va toucher les services de détail. C'est l'argument effrayant qui nous est servi pour dire que quiconque dans l'univers ne fait pas partie de ce marché de 6 p. 100, mais plutôt de l'autre marché de 94 p. 100, s'il n'a pas son mot à dire et que la majorité ne force pas ces 6 p. 100 à adopter son modèle d'affaires, cela va avoir une incidence sur les coûts des autres 94 p. 100.
    J'ai été assez clair à ce sujet. Il vaut la peine d'en discuter, mais rien ne me prouve que c'est vrai. Rien ne prouve que ces 6 p. 100 ont une incidence aussi déterminante sur les 94 p. 100. Rien ne prouve que cela crée de la congestion et rien ne prouve que la structure de prix de la facturation à l'utilisation dans le marché de détail est la solution le cas échéant. Regardons un peu la structure des prix. Imaginons qu'il y a un plafond de 25 Go ou de 60 Go au-delà duquel l'utilisateur doit payer son utilisation par gigaoctet. Selon ce modèle, si l'on télécharge Netflix à 3 heures du matin et qu'on dépasse la limite, on se fait facturer par gigaoctet, même s'il n'y a pas de congestion à cette heure-là. Personne ne prétend qu'il y a de la congestion à 3 heures du matin. Tout le monde dit qu'il peut y en avoir à 18 heures ou à 20 heures, je ne sais trop, mais la structure des prix dans les services de détail n'a rien à voir avec ce problème et n'y réglera rien, si c'est un problème. C'est ce qui me met hors de moi.
    En toute honnêteté, je ne suis pas en train de dire que je vais proposer un règlement en ce sens demain matin, parce que tant qu'on crée un marché qui favorise la concurrence et le choix, si quelqu'un n'aime pas ce qui se passe à 18 heures chez un fournisseur de services Internet, il n'a qu'à aller voir ailleurs. C'est la meilleure solution à mon avis.
    Merci.
    Comme nous le savons, le CRTC est en train de revoir sa décision d'origine en matière de facturation à l'utilisation, suivant le processus prévu de 60 jours. Dans ce contexte, il mène des consultations publiques. À votre avis, monsieur le ministre, quelle serait pour vous la façon acceptable pour le CRTC de revoir sa décision? En quoi consisterait une décision acceptable du CRTC?
    Je vous remercie de cette question, mais je pense qu'il ne serait pas juste pour le CRTC ou le processus que je réécrive la décision du CRTC. Il revoie sa décision en toute bonne foi. Je pense que c'est très louable. Je vais donc le laisser le faire, bien sûr. Quand le président du CRTC a communiqué sa décision de le faire, j'ai répondu que c'était très bien qu'il revoie cette décision, mais qu'il ne devait pas oublier que s'il tirait la même conclusion qu'au départ, le problème resterait entier, parce que nous croyons toujours qu'elle ne favorise ni la concurrence ni le choix pour les consommateurs. C'est le prisme par lequel nous observons les démarches du CRTC. Sincèrement, ce n'est pas seulement à Tony Clement ou à quelqu'un d'autre de décider de ce qui est acceptable, c'est vraiment aux consommateurs d'en décider. Laissons-leur le pouvoir de dire que ceci ou cela est acceptable ou d'aller voir ailleurs. C'est le meilleur modèle à mon avis.
(1725)
    Merci, monsieur le ministre.
    Merci, monsieur Braid.
    Je vais donner la parole à M. Cardin pour cinq minutes.
    Je crois que vous allez partager votre temps avec M. Bouchard.

[Français]

     Merci, monsieur le président. En effet, je partagerai le temps dont je dispose avec M. Bouchard.
    Selon M. Lake, le décret Bernier de 2006 ne doit pas favoriser certaines entreprises indépendantes ou titulaires plus que d'autres. Or, le décret 2009-2007 — je reviens sur ce dont je parlais tout à l'heure — dit au CRTC, en des mots différents, de s'assurer que ses décisions ne nuisent pas à Bell en ce qui concerne sa télévision IP. Ce n'est pas une position neutre. La décision du CRTC sur le speed matching assurait la survie des fournisseurs indépendants et protégeait donc la concurrence. Le décret 2009-2007 demande de revoir la décision en favorisant Bell. Pourquoi?

[Traduction]

    Il y a beaucoup de détails dans ce dossier, mais je pense que vous mettez en relief que depuis cinq ans, l'organisme de réglementation semble aux prises avec les enjeux importants de l'âge d'Internet et que l'interaction entre l'organisme de réglementation et le gouvernement vise, en principe, à garantir la concurrence et la liberté de choix.
    Monsieur Cardin, il y a peut-être d'autres décisions du CRTC avec lesquelles vous êtes en accord ou non ou avec lesquelles je suis en accord ou non, mais de mon point de vue personnel, il revient au cabinet d'intervenir ultimement quand une décision, si elle est maintenue, a une telle incidence sur la liberté de choix et la concurrence que le cabinet n'a d'autre choix, en fait, que de la modifier ou de la renvoyer à l'organisme de réglementation.
    Nous essayons d'être justes et raisonnables. Je ne pense pas qu'il me revienne de renverser chaque décision du CRTC, pas plus qu'il ne me revient de fermer les yeux sur toutes les décisions du CRTC si elles ont une incidence négative sur le marché. C'est l'équilibre que nous cherchons.

[Français]

    Mon collègue se meurt d'envie de vous poser une question.
     Bonjour, monsieur le ministre. Bonjour, mesdames.
    À la suite des décisions du CRTC sur la facturation à l'utilisation, le citoyen Jean-François Mezei a envoyé une pétition au gouverneur en conseil demandant au gouvernement de suspendre l'application de ces décisions. Pourquoi votre gouvernement n'a-t-il pas publié cette pétition dans la Gazette du Canada?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question.
    La première fois que j'ai entendu parler de ce problème, c'est par un gazouillis d'un citoyen. Quand j'en ai été informé, j'ai demandé aux membres de mon cabinet de voir à quoi cela était dû. J'ai appris que si le CRTC suspend une décision, comme il l'a fait dans ce cas-ci, la norme veut que nous ne publiions pas la pétition. Je crois toutefois que nous nous sommes entendus pour que cette pétition soit publiée. Je pense qu'elle va être publiée dans la Gazette d'ici trois semaines.
    Je tiens à remercier le citoyen qui a porté cette question à mon intention sur Twitter. Nous sommes intervenus parce que c'était la chose à faire.

[Français]

    Au fond, ce citoyen partage à peu près votre position.
    Seriez-vous prêt à ordonner au CRTC de préétablir le statut essentiel du service d'accès par passerelle afin qu'il soit réglementé de façon proportionnelle et efficace, dans l'intérêt des consommateurs?
(1730)
    Comme je l'ai dit au sujet de la facturation à l'utilisation, il est important d'avoir des choix et de la concurrence. C'est pour cette raison que nous avons réagi et que j'ai annoncé qu'il était important qu'une autre décision soit prise par le CRTC. Ce n'est pas une décision adéquate dans le cas de notre système.

[Traduction]

    C'est pourquoi j'ai annoncé cette décision. Si vous parlez des services de détail plutôt que des services de gros — je ne sais pas trop si vous faites allusion à la facturation à l'utilisation en général ou seulement pour les services de gros —, je pense que je vais m'en tenir aux observations très équilibrées que j'ai exprimées dans mon exposé, quand j'ai dit qu'il ne serait pas nécessaire d'intervenir davantage dans les services de détail s'il y avait de la concurrence. Les gens auraient le choix. Ils pourraient se tourner vers d'autres fournisseurs s'ils n'aiment pas ce que leur fournisseur, leur FSI, leur offre. Pour moi, c'est ce qui montre par-dessus tout si le marché commence à fonctionner de la façon souhaitée.
    Merci, monsieur Bouchard et monsieur le ministre.
    C'est tout le temps que nous avions.
    Monsieur le ministre, vous nous avez déjà consacré beaucoup de temps, mais si vous voulez prendre la parole pour conclure en quelques mots...
    Non, ça va.
    C'est donc la fin de la séance.
    La séance est levée.
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