:
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les députés. Je suis heureux de comparaître aujourd'hui pour parler de la décision du gouvernement de remplacer le formulaire long obligatoire de recensement par un formulaire à participation volontaire.
La raison pour laquelle notre gouvernement a décidé de remplacer le questionnaire détaillé obligatoire de recensement par une enquête nationale à participation volontaire est claire. Nous croyons qu'il est inapproprié d'obliger les Canadiens à donner de nombreux renseignements personnels et privés. On ne devrait pas menacer les Canadiens d'amendes, de peines d'emprisonnement ou des deux pour qu'ils répondent à des questions comme : Combien de congés de maladie avez-vous pris l'an dernier? Ces congés étaient-ils payés? À combien s'élevaient le total de vos paiements pour votre résidence principale l'an dernier? Devez-vous réparer le carrelage de votre salle de bain?
Nous comprenons que l'information recueillie dans le questionnaire long de recensement est précieuse. Toutefois, nous estimons par ailleurs que le gouvernement doit trouver un équilibre lorsqu'il souhaite recueillir des données sous la menace d'amendes ou de peines d'emprisonnement.
Même si le premier recensement remonte à 1871, le questionnaire long n'existe que depuis 1971. Le nombre d'informations personnelles détaillées que les Canadiens doivent fournir au gouvernement a augmenté. Les huit questions principales sont restées les mêmes pendant des dizaines d'années, mais les questions complémentaires que l'on a commencé à poser en 1971 ont été modifiées et d'autres se sont ajoutées à chaque recensement.
[Français]
La version courte du recensement est obligatoire et comporte huit questions obligatoires sur de l'information démographique de base, comme la date de naissance, le sexe, l'état civil et la langue maternelle. Ce formulaire est envoyé à tous les ménages canadiens.
[Traduction]
À titre de député et de ministre responsable de Statistique Canada, j'ai reçu un message très clair de particuliers et de groupes qui estiment que le gouvernement ne devrait pas menacer les gens de poursuites judiciaires lorsqu'il recueille des renseignements personnels détaillés. C'est pourquoi notre gouvernement a annoncé qu'il ne punirait plus les Canadiens qui choisissent de ne pas remplir le formulaire de 40 pages, envoyé à 20 p. 100 des ménages.
Ceux qui critiquent cette décision croient qu'un Canadien qui refuse de remplir le questionnaire long mérite une amende maximale de 500 $, une peine d'emprisonnement de trois mois ou les deux sanctions à la fois. Le gouvernement a demandé à Statistique Canada de proposer des options pour un questionnaire long volontaire. Je veux être clair là-dessus : c'est notre gouvernement qui a décidé d'abandonner l'idée d'imposer des amendes et des peines d'emprisonnement à défaut de remplir le formulaire de 40 pages. Dans la foulée de notre demande à Statistique Canada de soumettre des options concernant une enquête volontaire fiable, nous avons créé et mis en oeuvre l'enquête nationale auprès des ménages.
L'objectif de cette approche raisonnable et responsable, c'est de trouver un meilleur équilibre entre la collecte de données nécessaires et la protection du droit à la vie privée des Canadiens. Les données du formulaire long seront désormais recueillies grâce à cette nouvelle enquête à participation volontaire, l'enquête nationale auprès des ménages. Les questions de ce sondage seront les mêmes que celles qui auraient été posées dans le questionnaire détaillé obligatoire de recensement. De plus, nous avons suivi les recommandations des responsables de Statistique Canada, conscients que l'échantillon diminuerait avec le formulaire long volontaire, en envoyant le questionnaire de l'enquête nationale à 4,5 millions de ménages canadiens, près du double de l'échantillon de 2006. Il n'y aura jamais eu autant de formulaires de sondage envoyés à la population dans l'histoire du Canada.
Le formulaire court de recensement demeure obligatoire. Nous comptons sur tous les Canadiens pour fournir cette information de base, comme ils l'ont fait lors des recensements précédents. Statistique Canada administrera l'enquête nationale auprès des ménages ainsi que le recensement et emploiera divers moyens non coercitifs pour encourager les Canadiens à y répondre. Nous intensifierons également nos efforts de communication et de publicité afin d'assurer un taux de réponse suffisant à cette enquête.
C'est la première fois que Statistique Canada mène l'enquête nationale auprès des ménages. L'agence surveillera attentivement les résultats et appliquera les mêmes normes et méthodes rigoureuses utilisées pour tous les sondages à participation facultative. Ainsi, nous atteindrons l'équilibre nécessaire en répondant au besoin de recueillir de l'information sur les ménages pour élaborer des politiques publiques sans toutefois recourir à des mesures législatives exagérées pour forcer la main aux Canadiens.
[Français]
Un certain nombre de préoccupations ont été soulevées après l'annonce, et permettez-moi d'essayer d'apporter un peu de lumière dans ce débat.
[Traduction]
Certains ont soulevé des préoccupations sur l'impossibilité pour le gouvernement de remplir ses obligations en vertu de la Loi sur les langues officielles.
[Français]
Cependant, je vous assure que toutes les questions en rapport avec les langues officielles posées dans le questionnaire de recensement de 2006 seront conservées dans le questionnaire de recensement court de la population de 2011.
[Traduction]
La nouvelle enquête auprès des ménages comprend des questions sur les connaissances des Canadiens en matière de langues officielles, la langue maternelle et les langues parlées à la maison. Comme toujours, le gouvernement s'engage à part entière à tenir compte des priorités du Commissariat aux langues officielles concernant l'élaboration et la mise en oeuvre de ses politiques, de ses programmes et de ses services.
[Français]
Les spécialistes en généalogie nous ont aussi dit qu'ils s'inquiétaient de ne plus pouvoir consulter l'information personnelle contenue dans la version longue du questionnaire après 92 ans sans le consentement du répondant. Pour dissiper ces préoccupations, j'ai spécifiquement demandé à Statistique Canada d'inclure dans l'enquête nationale auprès des ménages une question pour demander le consentement du répondant afin que les renseignements personnels le concernant puissent être communiqués après 92 ans.
[Traduction]
De nouveau, notre gouvernement sentait qu'il fallait trouver un équilibre juste et raisonnable entre imposer l'obligation de répondre à des questions personnelles et intrusives et rendre ces questions totalement facultatives. Néanmoins, l'opposition ou les critiques n'ont jamais indiqué les questions qui devraient être obligatoires et celles qui devraient être volontaires. Les partis d'opposition ont promis de contraindre tous les Canadiens à répondre à des questions indiscrètes sur leur vie privée sous peine d'amendes et d'emprisonnement.
Étant donné que l'opposition n'a pas appuyé le programme de répression de la criminalité de notre gouvernement, je trouve curieux que les seules personnes que l'opposition souhaite punir soient les Canadiens honnêtes qui ne veulent pas communiquer des renseignements personnels détaillés aux représentants de l'État. Cependant, j'estime que notre nouvelle approche, qui comprend un formulaire court obligatoire de recensement et un questionnaire long volontaire, nous permet d'atteindre l'équilibre nécessaire entre le besoin de données pour établir des politiques publiques et le respect de la vie privée des Canadiens.
J'aimerais faire un bref commentaire sur le rôle du Cabinet et l'idée selon laquelle les politiciens ne devraient pas avoir leur mot à dire dans ces décisions.
Selon l'article 31 de la Loi sur la statistique, il est obligatoire de répondre aux questions de recensement. Les Canadiens qui refusent de répondre sont passibles d'amende ou d'emprisonnement. Je comprends que, selon certains, les députés ne devraient pas être consultés pour prendre cette décision, mais ce n'est pas ce qui est stipulé dans la loi. Il est mentionné que les élus doivent se prononcer avant que l'État ne sévisse. Plus particulièrement, il est indiqué au paragraphe 21(1) que le Cabinet doit approuver les questions auxquelles les Canadiens sont tenus de répondre.
Monsieur le président, cela tombe tout à fait sous le sens. Si un Canadien est passible d'emprisonnement pour ne pas avoir répondu à une question, on doit lui assurer que les questions obligatoires ont été approuvées par le gouvernement, élu démocratiquement. En outre, les citoyens doivent pouvoir en appeler de ces décisions auprès de leurs représentants élus, au lieu qu'on leur dise qu'ils n'ont aucun droit, étant donné que la responsabilité démocratique n'a pas sa place dans le recensement.
Comme je l'ai dit, depuis le gouvernement Trudeau dans les années 1970, les ministres libéraux ont ajouté un nombre considérable de questions obligatoires. On peut être en accord ou en désaccord avec ces décisions, mais elles ont été prises par les gouvernements élus s'acquittant de leur responsabilité aux termes de la loi.
À l'inverse, notre gouvernement a exercé sa responsabilité législative en réduisant le nombre de questions obligatoires et en augmentant le nombre de questions facultatives. La loi permet de le faire. Donc, je demande simplement aux gens de l'opposition et à ceux qui ont remis en question non seulement la décision, mais aussi le pouvoir de la prendre, qui devrait décider des circonstances qui font qu'une personne est passible d'emprisonnement. Les députés dûment élus ou quelqu'un qui n'a pas de comptes à rendre à la population?
Je crois que notre gouvernement a réussi à atteindre l'équilibre entre le besoin de recueillir des données et la protection de la vie privée des Canadiens.
J'ai hâte de connaître le point de vue des intervenants de la réunion d'aujourd'hui. J'invite tous les Canadiens qui le désirent à remplir le formulaire de l'enquête nationale auprès des ménages. Statistique Canada continuera de gérer tout le processus de recensement. Ses employés s'en tiendront aux mêmes normes et méthodes rigoureuses déjà appliquées à tous les sondages de l'agence.
Merci, monsieur le président.
:
Merci de votre question.
Bien entendu, nous savions que des Canadiens -- pas tous, mais certains -- trouvaient les questions du formulaire long trop personnelles et trop indiscrètes et que, comme c'est le cas à l'approche de chaque recensement, ces préoccupations allaient refaire surface. D'après nos données, le nombre de plaintes émises par la population augmente à chaque recensement. C'est ce à quoi nous nous attendions pour 2011.
Je répète que nous avons donné suite aux objections selon lesquelles les Canadiens ne devraient pas être tenus par la loi de répondre aux questions détaillées dont j'ai parlé et que je peux très brièvement répéter. On parle des prestations alimentaires pour enfants ou pour conjoint à la question 53, des réparations au logement, des revenus détaillés et de l'heure à laquelle la personne se rend habituellement au travail. Voilà le genre de questions posées.
Nous en sommes venus à la conclusion qu'il est inapproprié de menacer les gens d'emprisonnement et d'amendes. Espérons que personne doive jamais purger trois mois d'emprisonnement pour avoir refusé de répondre à ces questions personnelles.
C'est pourquoi nous avons cherché des options et discuté avec les responsables de Statistique Canada pendant des mois. Nous voulions savoir s'il était possible d'obtenir des données utiles et fiables à un coût raisonnable sans sanctionner ou punir les Canadiens qui refusent de donner ce genre d'information personnelle. C'était notre décision.
Voilà ce que nous avons essayé de faire et ce qui nous a motivés à augmenter l'échantillon à 4,5 millions de ménages. Il s'agit de la plus grande enquête de l'histoire du pays.
C'est une différence fondamentale entre notre parti et l'opposition. Selon nous, il ne faut pas menacer la population d'emprisonnement ou d'amendes pour recueillir de l'information détaillée. Les Canadiens doivent, tout au moins, avoir le droit de refuser de répondre.
Je suis content de pouvoir discuter avec vous ce matin, monsieur le ministre.
Vous avez sans doute délibérément déformé la réalité. Ou bien, vos collègues et vous-même êtes peut-être aveugles à un point tel que vous l'avez fait sans le vouloir. La différence fondamentale entre votre parti et le nôtre, c'est que nous attendons d'un ministre de l'Industrie qu'il fonde ses décisions sur les faits, pas sur une légende urbaine, une hypothèse ou les dires de participants aux tribunes téléphoniques qui voient là de l'intimidation de la part du gouvernement.
Mon collègue, M. Lake, a bien décrit la situation. Il doit tenir des réunions pour mettre en garde ses électeurs... Ces derniers ne savent pas qu'ils pourraient aller en prison. On veut faire croire que l'armée va débarquer chez les pauvres immigrants et leur en faire baver.
J'ai examiné les statistiques. En 40 ans, personne n'est jamais allé en prison. C'est une crise fabriquée de toutes pièces.
Il faut donc se demander si on a agi avec la diligence requise et effectué des travaux préparatoires pour justifier cette décision. Pourriez-vous fournir l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée concernant le recensement de 2011? Y avait-il des problèmes selon ce document?
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Je vous pose la question, parce qu'on s'attend du ministre de l'Industrie qu'il fonde ses décisions sur autre chose qu'une idéologie aveugle. Je pensais que vous auriez pu parler de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, dans laquelle on dit qu'aucun problème n'a été constaté. Je croyais que vous auriez contacté la commissaire à la protection de la vie privée, qui s'occupe de ces questions, mais vous ne l'avez pas fait. Mon collègue Brian Masse a communiqué avec elle et m'a dit qu'on a déposé seulement trois plaintes en 10 ans.
Si vous appreniez aux électeurs qu'ils sont menacés, comme l'a fait M. Lake, je présume qu'ils pourraient y voir un problème. Cependant, il s'agit d'une crise fabriquée de toutes pièces. Vous n'avez aucune preuve indiquant que c'est un problème croissant.
Vous parlez du besoin de trouver un équilibre et de l'absence d'options. Lundi dernier, un groupe -- un amalgame plutôt diversifié regroupant notamment la Canada West Foundation, des banquiers éminents, des planificateurs municipaux, des théoriciens provinciaux et les économistes de toutes les grandes banques -- a essayé de vous rencontrer pour trouver des solutions. Toutefois, vous avez rejeté l'idée du revers de la main.
Comment pouvez-vous trouver un équilibre si vous préférez écouter les tenants de la théorie de la conspiration et vous refusez de discuter avec des gens crédibles, qui se fient aux données et veulent trouver des solutions?
Pourquoi avez-vous écarté cette proposition de rencontre?
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur le ministre. Merci d'être venu.
J'aimerais vous poser une question d'ordre général. Je viens du Québec et, selon le dernier sondage, nous sommes la province la plus réticente à répondre sous la menace d'emprisonnement. Plus de 62 p. 100 des gens que je représente ne veulent pas répondre à ce type de questions alors qu'on est menacé de prison ou d'amendes. C'est la réalité qui est vécue dans mon comté. C'est la province de Québec qui est la plus réticente.
Monsieur le ministre, j'aimerais savoir exactement ceci. Les médias ont fait beaucoup de bruit quand notre gouvernement a décidé de transformer certaines questions obligatoires en questions volontaires. Comme je l'ai dit dans le préambule, je ne crois pas que les Canadiens doivent être obligés, sous la menace d'amendes ou d'emprisonnement, de divulguer des renseignements privés et personnels.
D'abord, je vous remercie d'avoir le courage d'aider à la protection de la vie privée. C'est très important. Depuis 30 ans, c'est le premier gouvernement qui protège la vie privée de cette façon.
Pourriez-vous expliquer aux Canadiens pourquoi le gouvernement a pris cette décision et pourquoi vous en êtes arrivé à cette décision, outre le fait que les sondages démontrent que le Québec ne veut pas de ce qu'on appelle le système obligatoire?
:
Je vous remercie de votre question.
En fait, la version courte du formulaire de recensement est obligatoire et est envoyée à tous les ménages canadiens. Cependant, la version longue du formulaire de recensement de 2006, par exemple, était un questionnaire de 40 pages comportant plus de 66 questions très détaillées sur la langue, l'éducation, le logement, l'ethnie, la religion, la citoyenneté et l'immigration, le revenu, les activités, etc. L'article 31 de la Loi sur la statistique indique qu'une personne qui refuse ou néglige de fournir cette information est passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d'une amende maximale de 500 $ ou d'une peine maximale d'emprisonnement de trois mois, ou les deux. C'est une mesure très dure.
Nous avons donc décidé qu'il était important d'avoir un juste équilibre entre le besoin des entreprises privées, des institutions, des provinces et des territoires d'obtenir plus d'information et la protection des citoyens. Ainsi, si un citoyen décide que cette information est très personnelle, un choix s'offre à lui.
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Merci, monsieur le président.
Bonjour, monsieur le ministre. Bonjour, monsieur Dicerni.
Le débat qu'on tient présentement sur la question du recensement est vraiment très troublant. D'abord, il faut savoir que les conservateurs ont aussi administré ce recensement en 1986, à l'époque du Parti progressiste conservateur, et en 1991, sous le règne de M. Mulroney. Il s'agissait d'un recensement comportant les mêmes paramètres.
En ce qui a trait à la question de l'emprisonnement, ne pourrait-on pas partir du fait que jamais personne n'a été emprisonné? Pourquoi ne prenez-vous pas les devants en éliminant tout simplement cet aspect? Plutôt que d'en faire une psychose ou quelque chose du genre, on n'en parlerait tout simplement plus. Le fait que vous vous accrochiez à ce genre d'argument pour reculer est extrêmement troublant.
Par ailleurs, des scientifiques dont le gagne-pain consiste à réaliser des études à partir de statistiques, dont celles de Statistique Canada, ont dit clairement que, sur le plan scientifique, on n'arrivait pas aux mêmes résultats lorsqu'il s'agissait d'un questionnaire rempli de façon volontaire plutôt qu'obligatoire. Ce n'est pas moi qui le dis: ce sont des gens qui détiennent un doctorat et qui travaillent dans ce domaine. Il ne s'agit pas de rumeurs de couloirs ou d'une quelconque volonté politique visant à ne pas faire peur aux citoyens. Que je sache, 95 p. 100 des gens qui reçoivent ce formulaire long le remplissent. On est donc en train de créer une psychose, un faux problème.
Il faudrait peut-être d'abord savoir d'où viennent les recensements. À l'ère moderne, dans laquelle j'aimerais que vous restiez plutôt que de retourner à l'obscurantisme qu'on a déjà connu, lorsqu'on est passé des monarchies absolutistes à certaines formes de démocratie, on a eu besoin de données afin d'aider les citoyens à tous les égards. L'objectif était notamment de combattre la pauvreté et d'améliorer les conditions en matière de santé. À l'époque, on appelait ça des mathématiques politiques. C'est devenu des statistiques. C'était très utile pour l'État, précisément pour venir en aide à la population.
Monsieur le ministre, en choisissant d'envoyer le long formulaire à 30 p. 100 de la population plutôt que 20 p. 100, du fait que c'est un processus volontaire, vous êtes prêt à courir le risque qu'il y ait moins de données et moins de bons résultats sur le plan scientifique. Les éléments comparatifs ne seront plus acceptables.
N'oublions pas que dans ces conditions, on ne rendra plus le même service aux citoyennes et aux citoyens. La Ville de Gatineau s'est prononcée contre votre approche, de même que la province de Québec. La tonne d'organismes, d'institutions — parlementaires ou autres — et de représentants des citoyens qui se sont prononcés contre cette modification sont une montagne à côté des quelques alliés dont vous nous parlez.
Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à reculer, à accepter que vous avez suivi une mauvaise piste et à convenir que l'approche courante doit être maintenue, et ce, à la lumière des propos dont nous ont fait part des gens qui connaissent ce domaine?
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Monsieur le président, messieurs les membres du comité, je tiens à vous remercier de me donner la chance de témoigner devant vous aujourd'hui.
Étant donné les discussions récentes sur le recensement, je crois qu'il pourrait vous être utile de mieux connaître le processus. C'est essentiellement ce dont je parlerai au cours des cinq prochaines minutes.
Avant de décrire brièvement ce processus, voici deux des objectifs poursuivis par Statistique Canada: recueillir des données de la meilleure qualité possible au coût le plus bas possible. C'est grâce à ce genre d'objectifs que Statistique Canada jouit d'une excellente réputation à l'échelle internationale.
Le processus se divise en six étapes.
Au cours de la première étape, StatCan consulte les parties intéressées et les utilisateurs des données. Le Guide de consultation sur le contenu du Recensement de 2011 a été publié en juillet 2007 et le Rapport de consultation sur le contenu du Recensement de 2011, en juillet 2008. Plus de 150 organisations et citoyens ont envoyé plus de 1 200 suggestions à Statistique Canada sur le contenu du recensement.
La deuxième étape consiste à élaborer les questions à la lumière de ces consultations. Afin d'assurer la continuité par rapport aux données antérieures, les modifications apportées d'un recensement à l'autre sont généralement assez minimes. Le questionnaire d'aujourd'hui contient encore 60 p. 100 des questions du recensement de 1971. Après le recensement de 2006, on a laissé tomber les questions sur le travail non rémunéré. Pour 2011, de nouvelles questions sur le temps consacré aux déplacements, sur l'aide pour les services de garde d'enfants et les coûts qui y sont associés et sur les logements subventionnés ont été ajoutées.
En troisième lieu, il faut choisir quelles questions figureront au questionnaire court et au formulaire détaillé. C'est en 1971 qu'on a utilisé les deux formulaires pour la première fois; auparavant, il n'y en avait qu'un.
Statistique Canada ne se base pas sur l'importance des questions pour les répartir entre les deux formulaires, car elles répondent toutes aux besoins de divers utilisateurs. Par exemple, il se peut que la question du formulaire court sur le dénombrement soit la plus importante aux yeux des gouvernements pour la distribution des sièges ou les transferts entre le fédéral et les provinces. Pour ceux qui s'occupent de la planification des transports d'une ville, ce sont plutôt les renseignements sur les moyens de transport utilisés pour se rendre au travail et sur le temps consacré aux déplacements qui comptent le plus; ces questions se trouvent sur le formulaire détaillé.
Ce n'est donc pas l'importance des questions qui détermine si elles feront partie du questionnaire court ou du formulaire détaillé. On se base plutôt sur l'évaluation de la rentabilité: comment pouvons-nous recueillir les données de la meilleure qualité possible au coût le plus bas?
À ma connaissance, les employés de Statistique Canada qui travaillaient au recensement de 1971 ont déterminé que certaines questions devaient être posées à la population entière pour que les données recueillies soient d'une qualité raisonnablement comparable aux autres. Ces questions se sont retrouvées dans le formulaire court. Pour les autres questions, il était possible d'atteindre le niveau de qualité requis en les envoyant à un échantillon de population représentatif méthodiquement sélectionné qui devait obligatoirement y répondre; c'est ce qui est devenu le long questionnaire.
Naturellement, envoyer le questionnaire à un échantillon représentant le cinquième de la population, plutôt qu'à la population entière, réduit considérablement le coût du recensement. Cela permet aussi de réduire énormément la quantité de réponses à traiter.
Depuis 1971, les spécialistes de la méthodologie chez Statistique Canada évaluent la répartition des questions entre les deux formulaires à chaque recensement. C'est la seule raison pour laquelle la question — et je cite — « Quelle est la langue que cette personne a apprise en premier lieu à la maison dans son enfance et qu'elle comprend encore? » se trouve dans le questionnaire court, alors que « Pendant la semaine du dimanche 1er mai au samedi 7 mai 2011, combien d'heures cette personne a-t-elle travaillé à un emploi salarié ou à son compte? » figure au formulaire détaillé.
En quatrième lieu, Statistique Canada soumet au gouvernement la liste des questions proposées. Ce dernier les examine et détermine celles qui seront retenues pour le recensement avant d'en aviser l'agence.
La cinquième étape est la collecte des données. Dans le cadre des efforts constants de Statistique Canada pour réduire ses coûts, l'agence a eu recours au Web dans une large mesure pour collecter les données du recensement de 2006. Le test du recensement de mai 2009 a indiqué que le taux de réponse en ligne pourrait doubler lors du recensement de 2011 pour atteindre environ 40 p. 100.
En dollars canadiens de 2009-2010, le coût du recensement de Statistique Canada est de 43,77 $ par ménage, comparativement à 126,18 $ aux États-Unis et 49,68 $ en Australie, deux pays auxquels nous nous comparons régulièrement.
La sixième étape consiste à transformer les données brutes en données dont les utilisateurs peuvent se servir, puis à les diffuser. Il faut environ un an avant de pouvoir diffuser les résultats, puisqu'il y a une grande quantité de données à traiter, à préparer et à vérifier pour en assurer l'exactitude, l'exhaustivité et l'homogénéité. Les données sont analysées en profondeur pour que les résultats soient bien compris avant d'être rendus publics.
Il faut approximativement sept ans pour compléter l'ensemble du processus de recensement.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le comité. J'ai préparé un exposé préliminaire un peu plus long, mais je ne le lirai pas. Le texte vous sera distribué, si ce n'est pas déjà fait.
J'aimerais aussi dire que j'ai demandé à la greffière du comité de distribuer la déclaration « À la recherche de solutions » faite hier par le Conseil national de la statistique.
Je parlerai de quelques points seulement.
Tout d'abord, je tiens à souligner à quel point je suis impressionné — même moi, après avoir passé 51 ans à Statistique Canada, suis impressionné — par le grand appui manifesté envers le recensement, ce qui témoigne bien de son utilité et de son importance. Je n'aurais pas imaginé qu'un si grand nombre de groupes puissent ainsi se mobiliser et prendre la parole pour souligner toute l'importance que revêt pour eux le recensement. On ne peut le nier.
Deuxièmement, j'aimerais souligner que tout questionnaire à participation volontaire donne nécessairement des résultats faussés. Cela a beaucoup d'importance, car, contrairement aux erreurs d'échantillonnage, ce risque de distorsion ne peut pas être évalué à partir des données d'une enquête. Dans le cas des erreurs d'échantillonnage, nous pouvons accompagner les résultats d'un énoncé, comme dans un sondage. Par exemple, nous pouvons dire que la marge d'erreur est de 2 ou 3 p. 100, 19 fois sur 20. Le risque de distorsion est sournois et omniprésent; nous essayons toujours de le comprendre sans jamais y parvenir. Plus l'étendue des données est importante et plus elles sont décomposées finement, comme dans le cas d'un recensement, plus le risque de distorsion devient pernicieux, puisque nous ignorons d'où il vient. Utiliser des résultats à grande échelle sans analyser la probabilité de biais statistique représente un risque sociétal majeur. Ce n'est pas un risque statistique; c'est un risque pour la société.
Je ne vous demande pas de me croire sur parole. La Société statistique du Canada et l'American Statistical Association ont tous les deux fait des déclarations catégoriques et sans équivoque à ce sujet.
Le risque de distorsion est d'autant plus préoccupant que la plupart des utilisateurs ne sont vraiment pas intéressés à n'avoir qu'un simple aperçu; ils veulent savoir comment la situation a évolué depuis le dernier recensement. Toutefois, si les dernières données ont été recueillies à l'aide d'une méthode fiable, mais que les prochaines ne le sont pas, les résultats ne pourront pratiquement pas être utilisés pour déterminer l'évolution de la situation. Même si on peut en quelque sorte utiliser ces données pour brosser un tableau général de la conjoncture actuelle, on ne pourra vraiment pas les comparer pour observer ce qui s'est passé depuis le dernier recensement. Et il s'en est passé des choses, notamment la crise financière de 2008.
Le troisième élément sur lequel j'aimerais attirer votre attention, c'est la protection des renseignements personnels, qui est au coeur des préoccupations de Statistique Canada et l'a toujours été. Nous avons pris d'innombrables mesures pour améliorer la situation, qui était déjà très bonne au départ.
Tout d'abord, il n'est jamais arrivé que la source des renseignements fournis à Statistique Canada soit révélée — c'est-à-dire que l'on ait identifié la personne ayant fourni les renseignements.
Ensuite — et je désire simplement rétablir les faits —, ce n'est pas le formulaire détaillé qui a été utilisé pour la première fois en 1971. C'était plutôt le formulaire court. Avant 1971, tout le monde recevait le formulaire détaillé au complet, à 100 p. 100.
En 1971, grâce à une initiative personnelle — je n'étais pas encore statisticien en chef à l'époque, mais j'occupais un poste assez important pour prendre ce genre d'initiative — nous avons pour la toute première fois introduit l'échantillonnage dans le processus de recensement, et avons créé le questionnaire court. Le formulaire détaillé était désormais envoyé à une personne sur cinq.
Je ne mentionnerai pas toutes les autres mesures prises pour améliorer la protection des renseignements personnels, car le président vient de m'indiquer que mon temps est presque écoulé. J'aimerais quand même aborder un point fondamental sur lequel, je l'espère, vous me poserez des questions: qu'allons-nous faire maintenant? Statistique Canada et, par le fait même, tous ses utilisateurs se trouvent face à une situation tout à fait particulière; nous devons trouver des solutions constructives.
J'aimerais attirer votre attention sur une solution proposée par le Conseil national de la statistique, un organisme désigné par le ministre pour conseiller le statisticien en chef. Pour nous sortir de l'impasse, le conseil a formulé hier des propositions qui, selon moi, sont tout à fait constructives.
C'était mon dernier point. Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier MM. Sheikh et Fellegi d'être ici aujourd'hui. Je crois que c'est extrêmement important. C'est incroyable qu'un tel enjeu surgisse ainsi en plein milieu de l'été. Je suis député depuis 17 ans, et je n'ai jamais été témoin d'une décision du gouvernement qui a suscité une telle opposition partout au pays.
Arthur Carty, le conseiller national des sciences; Jean-Pierre Kingsley, l'ancien directeur général des élections; Linda Keen, la présidente de la Commission de sûreté nucléaire; Peter Tinsley, l'ancien président de la Commission d'examen des plaintes concernant la police militaire; Paul Kennedy, l'ancien commissaire des plaintes du public contre la GRC; Adrian Measner, l'ancien président de la Commission canadienne du blé; et maintenant, vous, monsieur Sheikh: après une brillante carrière de 38 ans au service de la population, pour laquelle nous vous sommes très reconnaissants, vous avez été forcé de démissionner étant donné la situation dans laquelle vous vous trouviez.
Monsieur Sheikh, pourriez-vous nous parler de votre geste courageux et sans précédent, c'est-à-dire de votre démission du poste de statisticien en chef au pays?
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Permettez-moi de faire une analogie afin de clarifier une question qui est peut-être venue à l'esprit de certains. Nous menons de nombreuses enquêtes à participation volontaire, bien entendu; nous réalisons aussi des enquêtes obligatoires; et nous nous occupons du recensement. Certains pourraient se demander pourquoi le recensement doit être obligatoire, puisque nous effectuons aussi des enquêtes sur une base volontaire.
Nous pourrions nous comparer à un fabricant d'automobiles qui produit des berlines, des véhicules utilitaires sport et des camions de 56 pieds. Nous croyons en chacun de nos produits. Toutefois, je ne recommanderais jamais d'utiliser une berline pour effectuer régulièrement la livraison de marchandises à un Wal-Mart, tout comme je ne recommanderais à personne d'utiliser un camion de 56 pieds pour se balader à deux dans la ville d'Ottawa. Chaque produit est conçu pour une utilisation spécifique et est excellent, pourvu qu'il serve à cette fin.
Nous nous opposons au remplacement du recensement obligatoire par une enquête volontaire parce qu'avec cette dernière, comme l'a expliqué M. Fellegi, nous ne pouvons pas évaluer le risque de distorsion et régulariser la situation. Le recensement obligatoire ne pose pas ce problème. Cet enjeu est important parce que nous savons fort bien que, dans certaines régions, le taux de réponse serait insuffisant, et qu'il est très bas pour certaines catégories de personnes. En plus, c'est précisément ces groupes pour lesquels nous avons besoin de renseignements, si le gouvernement veut mettre en place des politiques à leur intention. On parle notamment des autochtones, des personnes à faible revenu ou qui ont un niveau de scolarité inférieur, des minorités visibles et des immigrants. Le taux de réponse de ces groupes est plutôt faible.
Si nous menons une enquête à participation volontaire, nous n'aurons donc pratiquement aucun renseignements sur ces catégories de personnes; bien entendu, les moyennes seront aussi faussées pour l'ensemble de l'enquête.
Les enquêtes à participation volontaire que nous menons régulièrement présentent un risque de distorsion. Nous pouvons toutefois corriger les distorsions décelées dans les résultats en comparant les données à celles du recensement. Or, si ce dernier est dorénavant mené sur une base volontaire, il n'existera plus de point de référence pour régler le problème des enquêtes à participation volontaire. C'est la difficulté avec laquelle nous serions aux prises.
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Merci, monsieur le président. Je partagerai le temps qui m'est alloué avec mon collègue, M. Gravelle.
Messieurs, je suis très heureux que vous ayez pu être des nôtres bien que les circonstances soient certes désolantes, surtout dans le cas de M. Sheikh. Je fais appel à votre indulgence à notre endroit, car les politiciens ne sont que de grands généralistes. Nous ne savons pas — aucune d'entre nous ne le sait — quelles sont les meilleures méthodes de calcul statistique. Ce n'est pas notre rôle. Comme vous l'avez indiqué, Monsieur Sheikh, nous devons nous en remettre au professionnalisme et à l'impartialité de nos fonctionnaires. C'est ce qui nous distingue des oligarchies, des dictatures, Nous ne comptons pas sur des flagorneurs pour nous conseiller; nous nous tournons plutôt vers les professionnels de notre fonction publique.
Monsieur Sheikh, vous avez indiqué qu'il fallait d'abord consulter les intervenants avant de passer aux étapes suivantes du processus de recensement. J'ai essayé de savoir quels intervenants le ministre a rencontré à cet effet. Il n'a pas parlé à la commissaire à la protection de la vie privée. Il a refusé de rencontrer nos grands experts en économique, les banquiers et les planificateurs sociaux.
Cela nous amène donc à conclure qu'il s'en est remis uniquement aux conseils des gens de votre ministère. Le ministre a indiqué clairement qu'il avait le soutien de votre organisation, non seulement pour éliminer le caractère obligatoire du recensement, mais aussi pour tripatouiller les questions, en fonction de l'idée que se font les conservateurs de l'atteinte à la vie privée.
Comme vous l'avez indiqué tout à l'heure dans votre déclaration, vous avez dû démissionner car votre rôle consiste d'abord et avant tout à sauvegarder la crédibilité de l'agence. Peut-on conclure que vous n'aviez d'autres choix que de démissionner à la suite des commentaires du ministre indiquant que Statistique Canada appuyait les changements proposés?
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Pour en revenir au jour de ma démission, il y a eu différents articles publiés et, notamment, une manchette à la page 4 du
Globe and Mail qui soutenait que le statisticien en chef était favorable aux mesures envisagées par le gouvernement.
Comme je crois l'avoir déjà dit, mon travail consistait à fournir les meilleurs conseils possibles au gouvernement. Celui-ci a tout à fait le droit de décider des politiques qui devraient être mises en oeuvre. Même si je ne partageais pas nécessairement l'avis du gouvernement, j'étais tenu de donner suite aux décisions prises. Alors, peu importe la voie empruntée par le gouvernement, Statistique Canada devait en assurer l'application au meilleur de ses capacités.
Le ministre a parlé d'un équilibre à atteindre. C'est un objectif qu'il est tout à fait en droit de viser. Même si, pour nous, un problème se pose au niveau de la qualité des données, il faut reconnaître. comme le ministre l'a lui-même fait, que les décisions sont prises par le gouvernement, et non par les fonctionnaires.
Si j'ai quitté mes fonctions, c'est en raison de certains reportages médiatiques suivant lesquels le rôle de Statistique Canada ne se limitait pas à la mise en application de la décision du gouvernement, mais que nous avions en fait recommandé de tels changements.
:
Nous allons maintenant continuer la séance du mardi 27 juillet 2010.
[Traduction]
Au nom de tous les membres du comité, je souhaite la bienvenue à nos témoins pour la poursuite de cette 29e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous sommes ici aujourd'hui pour étudier le long formulaire de recensement.
Parmi ce nouveau groupe de témoins, nous accueillons M. Simard,
[Français]
qui est professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi.
[Traduction]
Nous recevons M. McLeish, président de la Société statistique du Canada; M, Tanny, professeur agrégé à l'Université York; et M. Doucet, éditeur anglophone de la revue Le Québécois libre.
Bienvenue à tous. sans plus tarder, nous allons passer aux questions et commentaires des membres du comité en débutant par M. Rota.
:
J'aimerais tout d'abord préciser que je suis géographe et urbaniste, de même que professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi, et ces données de recensement sont très utiles pour les recherches appliquées que l'on fait, qui touchent l'environnement, les transports, la construction résidentielle, l'urbanisme, etc. Ces recherches sont fréquemment faites en collaboration avec les municipalités locales, qui sont également de grandes utilisatrices de données de recensement.
Pour ma part, je suis en défaveur des modifications ou de la réforme que l'on veut mettre en place actuellement. Je joins donc ma voix à celle de l'Association canadienne des géographes et à celle de l'Institut canadien des urbanistes, deux organisations dont je suis membre et qui ont clairement indiqué leur opposition à ces modifications. Nous nous y opposons pour une raison technique, c'est-à-dire que cela peut sembler un changement assez mineur, mais ce changement mineur, lorsqu'on connaît la méthodologie des sondages et la méthodologie scientifique, risque d'avoir des conséquences majeures sur la validité et la fiabilité des données de Statistique Canada.
C'est malheureux, parce que Statistique Canada est une institution fort respectée au Québec comme dans l'ensemble du Canada, une source de fierté pour beaucoup. Les données risquent donc d'être considérées comme moins fiables, en particulier pour la recherche universitaire. Cela risque de limiter nos recherches, de les rendre moins précises comparativement à celles qui se font dans d'autres pays. Cela risque également d'avoir des conséquences sur les entreprises privées qui font des études de marché pour localiser des restaurants ou des commerces. Dans le domaine des politiques publiques également, cela posera de très grands problèmes, spécialement aux échelles locale et régionale où les données risquent d'être encore davantage imprécises.
On y voit donc plusieurs conséquences négatives. Finalement, on se demande pourquoi il faudrait revenir sur quelque chose qui fonctionne bien. Si on était dans l'émission The Red Green Show, on dirait: « If it ain't broken, don't fix it. »
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais profiter de cette occasion pour répondre à une question de mes collègues de l'opposition.
Ce matin, mes collègues libéraux et bloquistes ont dit qu'il n'y avait pas de problème au Canada, que 95 p. 100 des citoyens remplissaient le questionnaire long et détaillé portant sur leur vie privée. On a dit que ce débat ne servait à rien, que tout allait bien et que les gens étaient contents de remplir ce questionnaire détaillé de 40 pages. Ce que je veux dire aux gens de l'opposition, c'est que les gens le remplissent à cause de la menace qui est présente, qu'il s'agisse d'une peine d'emprisonnement ou d'une pénalité. Si les gens de l'opposition veulent améliorer le taux de participation, je leur suggère d'accroître la menace, de faire en sorte que les Canadiens doivent payer une amende de 5 000 $ plutôt que de 500 $ et que la peine d'emprisonnement soit de trois ans plutôt que de trois mois.
Là n'est pas là question, monsieur le président. C'est bien simple. C'est une question de principe. À mon avis, les gens devraient être libres de répondre ou non à certaines questions qui touchent leur vie privée. À ce sujet, j'aimerais entendre le point de vue de M. Doucet.
Croyez-vous qu'il est normal, dans une société démocratique, de menacer les gens d'une peine d'emprisonnement ou d'une pénalité de 500 $ s'ils refusent de répondre à des questions portant par exemple sur le nombre de chambres à coucher que compte leur résidence ou l'heure à laquelle ils quittent la maison pour aller travailler?
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J'aimerais donner deux points de vue.
Tout d'abord, je ne crois qu'il s'agisse d'un débat technique. La raison pour laquelle je ne le crois pas... Il y a la question des statistiques. Je ne le nierai pas, en tant que statisticien, si l'on rend le formulaire volontaire sans ajouter d'autres mesures incitatives, il y aura certainement des changements dans le taux de réponse. Cependant, tout le monde devrait savoir que le taux de réponse a déjà changé. Et tout le monde devrait savoir également qu'il faut prendre d'autres facteurs en considération.
En 2006, Statistique Canada a eu recours à Internet. Bon nombre de gens ne savent pas, par exemple, comment utiliser Internet et ils délèguent la tâche à leurs enfants. Par conséquent, nous ne savons pas exactement dans quelle mesure la qualité des renseignements que nous obtenons est bonne une fois que les données sont communiquées sur Internet. Ce pourrait être un adolescent de 15 ans, plutôt qu'un adulte qui inscrit les renseignements, comme nous le faisions dans le passé.
Ensuite, je souscris au concept ou au principe général selon lequel utiliser Internet est un moyen moins coûteux et probablement plus efficace, mais à mon avis, d'autres facteurs entrent en jeu pour évaluer la qualité des renseignements et déterminer dans quelle mesure les gens peuvent se fier aux données que nous avons.
Deuxièmement, le Canada est l'un des seuls pays — une poignée de pays — qui tient un recensement complet tous les cinq ans. Des recensements sont faits continuellement. Les Américains ont établi le recensement qu'on appelle « American Community Survey ». Au Canada, nous avons une enquête auprès des ménages.
Bien entendu, les responsables de l'American Community Survey envoient un certain nombre de formulaires tous les mois et contraignent les gens à participer. Aux États-Unis, c'est obligatoire. Cependant, je n'approuve pas cette façon de procéder. Lorsqu'on rend une enquête obligatoire, cela crée des distorsions négatives. Des études à ce sujet visent à déterminer comment on en vient à bout.
Eh bien, jetons-y un coup d'oeil. Voici notre enquête. D'un côté, il y a les sanctions. Si vous voulez vous assurer que tout le monde répond à une enquête donnée, infligez une peine de 10 ans d'emprisonnement, 10 ans pour ne pas avoir répondu à des questions...
:
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Les questions de M. Bernier me laissent plutôt perplexe.
Ce matin, M. Anderson a tenté de nous faire croire que les questions qui étaient posées venaient de Statistique Canada, alors qu'elles viennent toutes du gouvernement, à qui le recensement appartient. Il appartient au gouvernement.
Le recensement de 2006 appartient donc à M. Bernier. S'il croit tant à l'emprisonnement, aux menaces ou aux amendes, ou aux questions qui sont posées, pouvez-vous me dire pourquoi il n'a pas modifié le recensement lorsqu'il était ministre de l'Industrie? Il avait l'occasion de le faire, car le recensement appartient au ministre de l'Industrie. Il appartient au gouvernement.
S'il y croit tant, pourquoi n'a-t-il pas modifié le recensement, ou pourquoi n'a-t-il pas entrepris le processus d'y apporter des modifications? Ou bien, cette question a-t-elle peut-être été soulevée parce que c'est l'été, et qu'on cherche l'attention médiatique? Je suis perplexe.
Est-ce que quelqu'un peut me répondre?
:
Je ne peux pas répondre pour M. Bernier, mais je peux parler en mon propre nom. Je n'ai pas eu l'occasion de présenter un mémoire, mais si vous n'y voyez pas d'objection, j'ai une courte déclaration à faire.
Le remplacement du long formulaire de recensement obligatoire par une enquête nationale à participation volontaire a suscité des discussions animées, captivantes et fructueuses. Selon Statistique Canada, un des principaux défis est de clairement démontrer l'importance du recensement aux yeux des Canadiens. C'est ce qu'il a évoqué à la page 3 de l'article Études en vue du recensement canadien de 2011.
Les médias nous ont certainement aidés en ce sens sans occasionner de coûts pour Statistique Canada. Tous les contribuables devraient en être reconnaissants. Cependant, les médias n'ont pas contribué à bien situer le débat dans son contexte. La décision du gouvernement d'abolir le long formulaire de recensement obligatoire s'inscrit dans le plus vaste débat sur les droits de la personne par rapport aux droits de l'État dans une société libre et démocratique. La question du devoir des particuliers envers l'État et du devoir de l'État envers les particuliers constitue une partie importante de cet éternel débat.
Le gouvernement a conclu, et avec raison je pense, qu'une personne a le droit de choisir de participer ou non à une enquête, même s'il s'agit d'un long formulaire de recensement. Il ne s'agit pas de l'utilité économique ou sociale d'une enquête. Il ne s'agit pas de savoir combien de personnes se sont plaintes. Il ne s'agit pas d'agir en bons citoyens. Il ne s'agit pas du caractère privé des renseignements recueillis. Il s'agit de savoir dans quelle mesure l'État a le droit d'obliger les gens à fournir des renseignements. Il s'agit de savoir à quelle occasion une personne a le droit de dire non, sans explication.
À une certaine époque, au Canada, la police pouvait arrêter une personne et lui demander de s'identifier, sous peine d'arrestation. De toute évidence, ce droit est tout à l'avantage de l'État pour ce qui est d'exercer l'obligation de prévenir les crimes et d'appréhender les criminels. Mais, en dépit des avantages et de la vraisemblable économie des coûts, la société canadienne a fermement et librement choisi de limiter ce droit qui appartient à la police. Le tollé qui a éclaté au sujet d'une loi ontarienne temporaire rétablissant ce pouvoir de la police dans un espace public restreint, et uniquement dans le cadre des réunions du G8 et du G20, montre que les Canadiens n'ont pas changé d'opinion sur la nécessité de ce droit individuel.
Obliger une personne à faire quelque chose parce que c'est bon pour la société est l'une des pentes glissantes auxquelles on fait souvent allusion. De façon plus concrète, je vais vous donner deux exemples que je ne cautionne pas.
Le premier exemple porte sur le vote obligatoire. Dans certains pays, comme l'Australie, il est obligatoire de voter aux élections fédérales. Ce n'est pas le cas au Canada, même si le taux de participation des électeurs a diminué. Lorsque sa population vote, une société libre devrait en bénéficier. Il n'y a pas une grande différence entre obliger les gens à remplir le long formulaire de recensement et les obliger à révéler le candidat qu'ils préfèrent dans le cadre d'un processus beaucoup plus anonyme.
Le deuxième exemple porte sur le fait d'exiger que tous les enfants fréquentent les écoles publiques durant les heures où elles sont ouvertes. On soutient que les écoles publiques seraient renforcées, que les enfants de tous les milieux se mêleraient entre eux, et que nous en ferions de meilleurs citoyens. Les enfants auraient toujours le droit de fréquenter les écoles privées à d'autres moments, et on ne leur retirerait donc pas leur droit à l'enseignement privé — c'est du moins ce que feraient valoir les tenants de cette idée.
D'ailleurs, l'argument selon lequel le gain obtenu par la société l'emporte sur les droits des parents ressemble étrangement à ce qu'on dit au sujet du long formulaire...
:
Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je veux apporter rapidement une précision sur les remarques de M. Gravelle au sujet du dernier recensement. Bien entendu, le décret qui a établi le recensement de 2006 était daté du 22 mars 2005, sous l'ancien gouvernement libéral. Il s'agit en fait du premier recensement dont ce gouvernement est responsable.
À propos du sujet du jour, il semble qu'il y a peut-être un malentendu. Il semble que selon certaines personnes, c'est une question de statistique. Mais en réalité, la question fondamentale que nous examinons porte sur la société libre et démocratique du Canada.
Dans une société libre et démocratique, comme celle du Canada, devrait-on menacer les citoyens de peine d'emprisonnement ou d'amende si, pour toutes sortes de raisons, ils refusent de répondre à des questions portant par exemple sur le nombre de chambres qu'ils ont dans leur maison ou le temps qu'ils ont consacré aux travaux ménagers ou qu'ils ont passé avec leurs enfants la semaine précédente? Toutes ces questions faisaient partie du recensement de 2006. Dans une société libre et démocratique, devrait-on menacer quelqu'un d'incarcération ou d'amende si, pour une raison quelconque, il ne répond pas à ces questions ? La raison invoquée importe peu.
Bien entendu, le Parti libéral a dit que oui, il doit en être ainsi. Notre parti soutient le contraire, et c'est la raison pour laquelle nous apportons des changements. C'est le sujet du débat d'aujourd'hui.
Il va de soi que nous prenons en considération l'aspect statistique et nous faisons intervenir des spécialistes pour y répondre en ce qui concerne la meilleure façon de recueillir les renseignements dont nous avons besoin. À cet égard, nous nous en remettons aux spécialistes de Statistique Canada.
Monsieur McLeish, je veux vous poser la question fondamentale. À votre avis, les Canadiens comme votre fille — car vous avez parlé de votre fille — devraient-ils être menacés de peine d'emprisonnement ou d'amende s'ils ne veulent pas dire le temps qu'ils ont consacré aux travaux ménagers la semaine précédente, parce qu'ils ne veulent tout simplement pas donner ce renseignement?
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Ça aura sûrement des impacts. On n'aura pas d'outil.
Prenons un cas fictif. Si on nous dit que 67 p. 100 de la population parle anglais à Montréal, on ne saura pas si c'est exact. En réalité, la proportion sera peut-être de 61 p. 100 ou de 77 p. 100. On ne pourra pas mesurer l'inexactitude, mais on sera toujours dans l'incertitude.
Dans une société de l'information, des scientifiques du domaine des sciences sociales, des sciences de l'environnement ou de tout autre domaine ne pourront plus vraiment utiliser ces données, qui seront reconnues comme étant peu fiables et inexactes. Ça pourrait avoir une influence sur la notoriété des recherches des Canadiens qui publient leur travail sur la scène internationale.
Au-delà de tout ça, on se demande comment, à l'ère de la mondialisation et de l'information, un gouvernement peut réduire la fiabilité des informations portant sur la société, l'économie et le pays. C'est un peu comme si on faisait exprès pour se créer des difficultés.
:
Merci, monsieur le président.
Ma question s'adresse à M. Simard.
Je pense que vous venez de la même région que M. Bouchard. En fait, vous enseignez à l'Université du Québec à Chicoutimi. Vous dites que vous utilisez les statistiques du Canada. Vous savez qu'il y a à la fois des questions volontaires et des questions obligatoires. On en a parlé suffisamment depuis le début.
Lors du dernier recensement, en 2005 — je n'étais pas encore député à ce moment-là —, la réponse à toutes les questions dans le long formulaire était obligatoire. La seule chose que l'on veut faire, c'est rendre la réponse à ces mêmes questions volontaire au lieu d'obligatoire.
Tout à l'heure, vous avez répondu à certaines questions très précises de mon collègue. Selon vous, le fait de demander à quelle heure je pars pour aller travailler serait-il une question à laquelle on devrait répondre de façon obligatoire ou sur une base volontaire? Les nuances sont très subtiles.
Pourriez-vous me donner votre opinion à cet égard? C'est exactement de cela qu'on parle.
:
Monsieur Simard, je dois vous interrompre parce que mon temps est très limité.
Comme moi, vous avez lu le long formulaire puisque vous êtes ici justement pour témoigner à cet égard. Vous avez remarqué que certaines des questions contenues dans ce formulaire me sont posées chaque année par mon gouvernement provincial et par le gouvernement fédéral dans mes déclarations de revenus. En plus, dans le même questionnaire, on me demande d'additionner les impôts des deux sources, ce qui ne se fait pas dans les autres provinces. Moi, je suis obligé de les additionner. Seriez-vous d'accord à ce que je sois emprisonné et qu'on m'impose une amende parce que j'ai fait une erreur dans mon calcul d'impôts? Selon vous, est-ce obligatoire ou volontaire? J'ai déjà donné ces renseignements volontairement, les gouvernements les ont en main. Est-ce par paresse qu'ils ne veulent pas se transférer les renseignements, ou y a-t-il véritablement quelque chose que je ne comprends pas entre ce qui est obligatoire et ce qui est volontaire?
J'ai déjà donné ces renseignements au complet: si je reçois une pension de vieillesse, si j'ai reçu de l'assurance-emploi, les frais de garde que j'ai déboursés. J'ai donné tous ces renseignements aux gouvernements, et ce chaque année, accompagnés de mon adresse, de mon numéro de téléphone, de mon code postal. J'ai même dit avec qui je vivais, comment je vivais, si je vivais avec quelqu'un du même sexe. J'ai donné ces renseignements chaque année. Pourquoi devrais-je les fournir encore aujourd'hui de façon obligatoire? Pourquoi cela ne se ferait-il pas sur une base volontaire? Puisque je les ai déjà donnés, je vais les donner de nouveau. Ne croyez-vous pas que le volontariat soit quelque chose de bon?
:
Le fait de poser les mêmes questions à deux reprises peut paraître bête. Je suis d'accord avec vous pour dire qu'on pourrait préciser que certaines questions ne seront pas dans le recensement parce qu'on peut obtenir ces renseignements par d'autres manières, par exemple dans le formulaire de déclaration de revenus.
Cependant, je crois que l'enjeu ici n'est pas cela. Pour revenir à la question du caractère obligatoire du formulaire, à mon avis, dans la Loi sur la statistique, il faudrait changer la question des peines d'emprisonnement, car c'est évidemment excessif.
Il faut quand même remettre cela en perspective. L'obligation que l'on demande aux citoyens est très faible. Ce n'est pas impossible à faire. Il s'agit de quelque chose relativement simple à faire, et on le fait au nom du bien commun. À mon avis, le citoyen qui se plaint de la longueur du formulaire regrettera ou vivra peut-être, dans deux ou cinq ans, les effets de l'absence d'une politique publique ciblée pour les groupes dans sa situation. Alors, c'est dans l'intérêt du citoyen de le remplir, même s'il n'en a pas conscience.
Revenons les pieds sur terre. Ce qu'on lui demande de faire, ce n'est pas des travaux forcés pendant six mois en Sibérie; on lui demande de remplir un formulaire qui prend dix minutes à remplir.
:
Merci, monsieur Garneau.
Comme mes collègues, je suis d'avis que le recensement est l'outil idéal. Un sondage volontaire peut entraîner des distorsions très particulières. Le grand problème, comme le disait M. Drummond, est que bien qu'on puisse malgré tout obtenir quelque chose qui fonctionne, nous n'en sommes pas certains. Le recensement lui-même est un outil très précis qui est utile pour tous les secteurs de la santé. En effet, il nous indique s'il y a des problèmes économiques, sur le plan de l'éducation, etc.
[Traduction]
Nous sommes en mesure de travailler localement pour mieux comprendre les adaptations et les ajustements à apporter à nos programmes. Il s'agit du seul outil du genre au pays, et d'ici à ce que nous en mettions un meilleur au point, nous devrons l'utiliser. Il a été tellement examiné au fil des années que nous avons parfaitement compris son taux d'erreur lorsqu'il y a surreprésentation ou sous-représentation dans certains secteurs.
Pour la santé et le bien-être des Canadiens, nous avons besoin de cet outil. Il influence les planificateurs des politiques dans les régions. En fait, des responsables de la santé publique m'ont envoyé des courriels pour me fournir des exemples précis des répercussions sur leur collectivité.
Par exemple, si vous voulez mettre en place un programme de soins dentaires à Ottawa ou à Toronto, où l'établirez-vous? Si vous êtes un responsable de la santé publique dans cette collectivité, où déployez-vous vos ressources du secteur de la santé? Grâce aux renseignements recueillis lors du recensement, vous pouvez cibler ces ressources. De la même façon, vous pouvez retirer vos ressources des secteurs qui, selon vous, n'en ont peut-être pas besoin, comme les quartiers riches de Toronto. C'est un outil de très grande valeur dans les collectivités et dans tous les secteurs du gouvernement.
Mes opinions sont clairement expliquées dans mon article. Je pourrais continuer, mais je vais m'arrêter pour le moment.
:
Je suis médecin, mais je ne pratique pas dans le secteur public. Je connais donc mieux les enjeux du secteur privé. Cependant, mon journal publie beaucoup d'articles qui portent sur la santé publique du Canada. Les chercheurs du Canada utilisent ces données pour écrire dans nos publications.
L'impact sur les chercheurs canadiens serait énorme. On me dit que faire un sondage volontaire va coûter 30 millions de dollars de plus. Les effets sur le plan économique sont beaucoup plus importants. À Montréal et dans les régions du Québec, on a besoin de cet instrument de santé publique pour déterminer où seront ciblés les programmes, par exemple dans les secteurs de Montréal où la situation socioéconomique est moins favorable, où il y a des populations d'immigrés. Il pourrait y avoir un véritable impact sur la livraison des programmes à l'échelle régionale.
Hier, j'ai envoyé un courriel mentionnant ma participation à la réunion de ce comité. Une dizaine de médecins du secteur public m'ont fait parvenir une liste de programmes qui seraient touchés directement par la disparition du recensement. J'ai en main une liste de 15 à 20 programmes, comme des programmes dentaires dans des communautés, des programmes de santé publique, même des programmes de vaccination contre la grippe A(H1N1). Comment allons-nous diriger ces programmes? À quelles communautés s'adresseront-ils? Comment saura-t-on qui va bien et qui ne va pas bien? Comment aura-t-on une description de ces gens?
L'échantillonnage du recensement est beaucoup plus important que l'on pense. Il s'agit du fondement de tous nos sondages. Statistique Canada effectue de 250 à 280 sondages par année et utilise le recensement pour tous les autres sondages. Nos chercheurs en santé publique au Canada prennent ces données de recensement et font du couplage de données. Ils sont en mesure de voir dans les grandes bases de données canadiennes ce que cela signifie lorsqu'on les couple avec les données de ce recensement. Il y aurait donc deux gros impacts: le premier, sur tous les autres sondages et le deuxième, sur toute la recherche liée à d'autres bases de données. Au Canada, on est très bon sur ce plan.
J'ai apporté avec moi plusieurs documents.
[Traduction]
Combien de Canadiens recevront un diagnostic de diabète entre 2007 et 2017? Il s'agit d'une étude menée dans le cadre d'un sondage de Statistique Canada. J'en ai environ une vingtaine. Des études d'impact sur l'obésité, sur le diabète, sur le vieillissement de la population utilisent l'échantillonnage du long formulaire, comme on l'a mentionné plus tôt.
:
Je crois qu'une des principales inquiétudes, c'est le manque de continuité.
Une voix: Absolument.
M. Don Drummond: Prenons par exemple les études qui permettent de faire des prévisions sur le diabète. Personne ne fonde une recherche sur un recensement précis; on observe toujours les changements sur une période de cinq ans. On examine donc les déterminants de la santé en 2006, mais aussi en 1991, en 1996, en 2001, et on observe les changements dans les styles de vie, puis on peut faire des prévisions.
Même si l'enquête à participation volontaire fonctionne assez bien, nous ne serons jamais en mesure d'établir un pont entre 2006 et 2011. Comme je l'ai dit, selon moi, il faut trois ou quatre cycles d'enquête à participation volontaire avant d'être capable d'en tirer quoi que ce soit. Nous continuerons d'avoir des données utiles jusqu'en 2006, puis je crois que nous devrons attendre quelques cycles avant de voir la lumière au bout du tunnel.
C'est dommage pour ceux qui ont pris le temps de remplir le formulaire en 2001, en 2006 et avant. Nous ne tirerons pas entièrement parti de leurs réponses, parce que cela aboutira dans un cul-de-sac.
:
Cette façon de procéder porte donc atteinte à la vie privée dans une plus grande mesure que celle que nous employons à l'heure actuelle.
Il est aussi intéressant de se demander jusqu'à quel point les gens sont prêts à vouloir protéger leur vie privée au risque d'être jetés en prison? Jusqu'à maintenant, personne n'a été emprisonné, mais certaines questions pourraient apparemment mener à cela.
M. Anderson a dit ce matin que la rénovation compte parmi ces questions; elle semble l'offenser personnellement. Je suis surpris qu'un parti qui s'est vanté devant la Chambre de son crédit d'impôt pour la rénovation adopte une telle attitude. J'aurais cru que ce crédit était basé sur des données qu'il aurait pu obtenir grâce au recensement, et que ce parti appuierait fortement les rénovations ainsi que l'offre de crédits d'impôt .
Néanmoins, disons, par exemple, que 100 électeurs de M. Anderson sont très offensés par le fait que quelqu'un leur demande s'ils ont déjà rénové leur maison. N'est-il pas possible de retirer les questions à cet effet? Ne suit-on pas un processus de révision des questions avant de procéder au recensement? À ma connaissance, le ministre peut même déclarer: « Tant que je tiendrai les commandes, il n'est absolument pas question que vous ayez la permission de porter atteinte à la vie privée des gens en leur demandant s'ils ont déjà rénové leur maison. »
Le fait de retirer la question sur la rénovation modifiera-t-il la nature du recensement?
Monsieur Drummond, avec un taux d'inexactitude de 19 à 20 p. 100, dans quelle mesure le ministre des Finances de l'Ontario aura-t-il des ennuis, lui qui a déclaré la semaine dernière — le 20 juillet — que son ministère utilise les renseignements obtenus au moyen du recensement pour toutes les décisions relatives aux dépenses et à l'impôt? Vous avez travaillé au ministère des Finances fédéral, à titre de sous-ministre, je crois. Faute de renseignements exacts et fiables, ou avec un taux d'erreur de 19 à 20 p. 100, à quel point sera-t-il difficile pour le ministre, Jim Flaherty, de prendre ses futures décisions budgétaires, s'il conserve son poste de ministre, par rapport à la fiabilité des renseignements?
Évidemment, le fait qu'on ne recueille pas les renseignements d'une personne sur cinq faussera considérablement les données. À votre avis et selon votre expérience, quel sera l'impact sur le plan de l'ensemble des données recueillies? Quelle sera l'incidence, par exemple, sur une décision de nos collègues conservateurs de réduire radicalement les dépenses pour les programmes sociaux s'ils n'ont pas les renseignements exacts par rapport à ce qui est nécessaire pour le pays?
:
Je le répète, le fait qu'une personne sur cinq ne réponde pas n'est pas tellement important. En effet, peu de gens oseraient espérer que 25 millions de Canadiens répondent à un sondage. Si Angus Reid menait une enquête auprès de 1 p. 100 de la population, il considérerait l'échantillon comme étant énorme. Aussi, seulement 40 000 ménages participent à l'Enquête sur la population active, et beaucoup de choses sont fondées sur ses résultats; la taille n'est donc pas... La question clé serait de savoir si le 19 p. 100 qui n'a pas répondu est représentatif de l'ensemble de la population. Ainsi, ce qui compte, c'est la mesure dans laquelle la réponse est faussée, et non le nombre de réponses obtenues.
Encore une fois, nous pouvons seulement nous baser sur les résultats obtenus lors d'enquêtes antérieures, notamment l'expérience menée aux États-Unis en 2003, dans le cadre de laquelle on a lancé un projet pilote à participation volontaire et on a ensuite mesuré les résultats à l'aune du vrai sondage. Les gens qui n'ont pas répondu n'étaient pas du tout représentatifs de l'ensemble de la population.
Or, sans avoir fait une telle expérience, on ne peut pas vraiment savoir quelles parties de la population ne seraient pas représentées. La majorité des gens présumeraient certainement que ce seraient les groupes qui se trouvent aux deux extrémités de l'échelle des revenus, ainsi que les collectivités autochtones et les nouveaux immigrants.
Si nous connaissions le degré de distorsion, même cela ne poserait pas problème, mais nous n'avons aucune raison de le faire au préalable. Si, par exemple, en 2011, nous menions une autre fois le recensement obligatoire et que nous réalisions en même temps un projet pilote à participation volontaire, nous pourrions comparer les résultats. À ce moment-là, nous n'aurions probablement pas de problème, car nous saurions comment corriger les données en fonction des distorsions.
:
Merci, monsieur le président.
Bonjour, messieurs.
À mon avis, la grande question est d'ordre scientifique. Il faut un recensement scientifique, une méthode scientifique et, d'un recensement à l'autre, pouvoir s'assurer des tendances, voir le portrait, l'évolution ou la régression de la société.
Certains aspects ont été mentionnés. Ce matin, j'ai entendu le ministre M. Clément dire que c'est un risque, mais qu'on va envoyer un questionnaire long volontaire à 30 p. 100 de la population. Vous connaissez l'histoire.
J'ai entendu ici et ailleurs la question sous différentes formes. On a entendu le mot « tendance », on a entendu « bris de continuité », on a entendu « moins fiable » et une « question de repères ». Ce sont tous des aspects qui reviennent et c'est toujours l'aspect scientifique qui, à mon avis, prime. C'est le coeur du débat.
À cela, on a ajouté l'aspect de confidentialité. J'ai entendu le témoin de la Colombie-Britannique dire, un peu plus tôt, que ce changement nous permettrait de connaître le nom du conjoint ou de la conjointe de quelqu'un, alors que tout est confidentiel.
Maintenant, puisque vous êtes plusieurs et que je dispose de moins de cinq minutes, j'adresserai tout d'abord mes questions à M. Bricker de IPSOS Canada, puis à M. Boyko, M. Hébert et M. Drummond.
Va-t-on souffrir, sur le plan scientifique, si on suit le plan mis en avant par les conservateurs?
:
Je vous souhaite la bienvenue à la 29
e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, en ce 27 juillet 2010.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions le long formulaire de recensement.
Nous recevons aujourd'hui, dans le cinquième groupe de témoins, Mme Stoddart et M. Baggaley, du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada; M. Coleman, de la National Citizens Coalition; Mme Sheutiapik et Mme Cooper, d'Inuit Tapiriit Kanatami; M. Paul McKeever, à titre personnel; et, finalement, Mme Kenny, de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada.
Bienvenue à tous nos témoins.
Sans plus tarder, nous allons commencer la série de questions et de commentaires de la part des membres du comité. Je donne d'abord la parole à M. McTeague, qui partagera, je crois, son temps avec M. Rota.
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Le questionnaire long obligatoire de 2006, et des années précédentes, contient des questions de nature linguistique qui ont une portée très importante pour les communautés francophones et acadienne et les communautés anglophones du Québec. Ces questions nous permettent de mesurer la vitalité des communautés, servent à l'élaboration de programmes et de services. Je ne parle pas seulement sur le plan fédéral, mais également dans les provinces, puisqu'il y a des transferts de paiements et que les provinces se servent de ces données.
Selon nous, la décision du gouvernement contrevient à l'article 20 de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'à la Loi sur les langues officielles en ce sens qu'il n'y a pas eu de consultation et que le règlement de la partie IV de la loi, tel qu'il est formulé aujourd'hui, est entièrement basé sur les questions linguistiques posées dans le questionnaire long.
On s'apprête, après le recensement de 2011, à faire l'exercice de désignation des bureaux. On va donc décider si, chez moi, les bureaux seront désignés bilingues, ou chez vous. On n'aura pas les données puisque les questions ne seront plus posées. On pourrait avoir certaines données, mais on n'est pas en mesure de nous dire maintenant qu'on pourra avoir ces données sur le plan régional.
Ainsi, s'il n'y a pas suffisamment de citoyens qui répondent dans une petite communauté comme Falher ou St. Isidore-de-Bellevue, on n'aura pas les données pour cette région.
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Merci, monsieur le président.
Je veux clarifier un point auquel M. Anderson a fait allusion.
La seule chose qui m'inquiète — je ne suis pas du tout préoccupé par le formulaire long de recensement — c'est que le gouvernement a le pouvoir de modifier toute question si bon lui semble, et il a le pouvoir de lever la peine d'emprisonnement, et il ne le fait pas. Voilà ce qui me préoccupe; ce n'est pas le formulaire détaillé de recensement.
Il semble que M. Anderson et certains des conservateurs aient une ouïe sélective. Les experts nous ont fait savoir aujourd'hui à maintes et maintes reprises à quel point cette décision nuirait à Statistique Canada, à la collecte des données, mais ils refusent d'entendre ce que disent les experts.
J'aimerais poser cette question à chacun de nos témoins. Si le recensement n'était pas obligatoire, quelles seraient les conséquences pour les pauvres, qui sont les moins susceptibles de remplir le questionnaire si ce n'est pas obligatoire?
Quelles seraient les répercussions pour les minorités et les pauvres, madame Kenny?
Dans les localités du Nord, nous exerçons de nombreuses responsabilités distinctes. Aujourd'hui, je peux répondre au titre de toutes les différentes responsabilités que j'assume, que ce soit celle de présidente de Pauktuutit, ce qui fait de moi automatiquement un membre d'ITK, ou celle de maire d'Iqaluit et présidente de notre association, ce qui fait aussi de moi automatiquement un membre de la Fédération canadienne des municipalités. Cette décision a un impact sur toutes les organisations avec lesquelles je travaille.
Premièrement, je tiens juste à dire que pour conserver un Canada fort, nous avons besoin de savoir comment le pays évolue, où les gens vivent, travaillent et élèvent leurs familles. Le recensement nous aide pour cela.
[Le témoin s'exprime en inuktitut.]
En tant qu'Inuit, vu que nous sommes peu nombreux au sein de notre grande nation, nous sommes parfois oubliés, mais ces données nous apportent des renseignements réels dont nous avons besoin à tous les niveaux dans les organisations gouvernementales et non gouvernementales.
Merci.
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Monsieur le président, j'aimerais poser quelques questions à Mme Kenny.
Je crois que vous comprenez assez bien les changements apportés par notre gouvernement. En 2006, il y avait un questionnaire long et détaillé de 40 pages, auquel 20 p. 100 des Canadiens étaient obligés de répondre sous peine d'aller en prison ou de payer une amende.
Cette année, le ministre a fait en sorte que ce questionnaire soit un questionnaire volontaire pour respecter la liberté de choix des gens.
Malgré tout, il reste tout de même parmi les sept questions du recensement une question obligatoire qui porte sur la langue officielle, soit la question no 7: « Quelle est la langue que cette personne a apprise en premier lieu à la maison dans son enfance et qu'elle comprend encore? »
Il y a aussi une sous-question, et je cite:
[Traduction]
Si cette personne ne comprend plus la première langue apprise, indiquez la seconde langue qu'elle a apprise. Anglais. Français. Autre.
[Français]
J'imagine donc que cette question no 7 est très importante pour vous. Si je comprends bien votre position, vous souhaitez que toutes les autres questions qui faisaient partie du recensement en 2006 demeurent, mais qu'elles soient aussi obligatoires.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur présence. Étant donné que vous êtes le dernier groupe, j'ai pensé prendre quelques instants pour peut-être essayer de récapituler ce que nous avons entendu ici aujourd'hui et peut-être clarifier un ou deux autres points, car je crois qu'il règne une certaine confusion.
Je veux d'abord préciser que notre gouvernement ne préconise pas de supprimer le long formulaire de recensement. Certains membres de l'opposition prétendent que c'est là notre plan. Ce n'est pas le cas. Nous convenons que la plupart des renseignements recueillis au moyen du questionnaire détaillé sont précieux pour Statistique Canada. La seule question est de savoir ce qui devrait être obligatoire et ce qui devrait être facultatif. Nous admettons que le formulaire de recensement abrégé devrait rester obligatoire, mais notre position est que la réponse aux questions contenues dans le formulaire long devrait être optionnelle.
Je suppose que l'on peut chercher à déterminer si toutes les questions du formulaire long devraient y figurer, ou bien si certaines devraient être modifiées ou abandonnées, comme des témoins précédents l'ont suggéré. Mais nous ne disons pas que nous voulons le supprimer. Nous disons simplement que la participation devrait être volontaire, car il faut un juste milieu entre la protection de la vie privée des individus par rapport à la coercition ou à l'intrusion imposée aux Canadiens, et la nécessité pour le gouvernement de recueillir des données précieuses pour ses groupes de clients de tout le pays.
Je me permets aussi de souligner que le seul témoin que nous ayons entendu aujourd'hui qui se spécialise dans les enquêtes facultatives et l'analyse et la compilation des données qui en découlent, est M. Darrell Bricker. M. Bricker a estimé que 80 p. 100 des Canadiens seraient prêts, volontairement, à répondre au questionnaire détaillé. Il a ajouté que, à son avis, même les personnes qui pourraient tendre à être sous-représentées pourraient se laisser persuader de confier ces renseignements. Autrement dit, il dit qu'à son avis professionnel rendre le questionnaire facultatif permettrait de recueillir les renseignements dont a besoin le gouvernement. Et il est le seul témoin expert dans ce domaine à avoir comparu.
Je vous fais remarquer également qu'à l'heure actuelle nous faisons appel à des menaces ou à la coercition pour recueillir les renseignements contenus dans le long formulaire de recensement. Mme Stoddart, qui est la commissaire à la protection de la vie privée du Canada, a déclaré qu'elle jugeait cette façon de faire inappropriée. Nos sommes d'accord. Nous sommes totalement d'accord.
Ma première question s'adresse donc à M. Coleman. Que pensez-vous et que pense votre organisation de la contrainte, des menaces d'emprisonnement et d'amendes, qui accompagnent le long formulaire de recensement? Faudrait-il les maintenir ou, à votre avis, devrait-on plutôt opter pour une méthode volontaire afin de recueillir cette information?
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Oui, je pense que c'est justement la plus importante question à régler pour votre comité. C'est un problème crucial qu'il faut absolument régler. Dans un pays civilisé comme le Canada, je juge ridicule de menacer de jeter quelqu'un en prison parce qu'il ne veut pas remplir un formulaire de recensement.
Je pense qu'il y a de bons renseignements à glaner dans ce domaine. Mais si vous avez suivi toutes ces réunions de comité, et j'ai assisté à plusieurs, le groupe d'intérêt qui n'est pas représenté ici est celui du contribuable canadien, qui a peur de l'emprise de l'État et n'aime pas l'État tentaculaire, mais comprend le devoir de fournir l'information et l'obligation de l'exploiter de la bonne façon. Mais de là à penser que l'on va jeter quelqu'un en prison...
Comme Greg Weston l'a indiqué aujourd'hui dans son témoignage, on ne compte plus les histoires d'horreur de gens qui se font intimider et appeler chez eux. Votre comité doit régler ce problème et empêcher que cela se reproduise.
Je ne crois pas non plus que vous pouvez obtenir des renseignements fiables en menaçant les gens de cette façon. C'est mon opinion personnelle. Je pense qu'il faut trouver un équilibre entre la protection de la vie privée... le fait que nous sommes un pays civilisé et non une république bananière qui peut mettre un pistolet sur la tempe des gens pour les obliger à prendre la plume, en quelque sorte. J'estime qu'il s'agit là d'un problème réellement important que le comité doit régler.
Je crois sincèrement aussi que certains... Il se fait toutes sortes d'enquêtes d'opinions facultatives dans ce pays, pour les produits de consommation et tout ce que vous voudrez. Ces enquêtes, sondages et questionnaires produisent des renseignements très fiables. Il existe des douzaines de cas. Les banques les utilisent, les produits de consommation...
Je pense donc que l'on peut recueillir de bons renseignements en utilisant une méthode facultative. Je suis également d'avis qu'il faudrait mieux expliquer la situation au contribuable canadien.
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Monsieur Coleman, j'aimerais quelques explications complémentaires, si vous pouvez me les donner.
Comme nous l'avons vu, il semble exister une certaine confusion au sujet de la question fondamentale dont nous parlons. Certains pensent que c'est un enjeu statistique. Mais il va de soi que les mesures et les décisions prises par le gouvernement relevaient davantage d'une question de principe, celle de la liberté et de la démocratie: faut-il forcer les Canadiens à répondre à des questions?
Nous avons passé en revue plusieurs de ces questions, portant sur le nombre de chambres à coucher, la quantité de travail ménager effectué et le temps que les parents passent avec leurs enfants. Faut-il obliger les Canadiens à répondre à ces questions s'ils ne le veulent pas, quelle que soit la raison de leur refus, en les menaçant d'incarcération ou d'amende?
Nous pouvons même mettre de côté l'emprisonnement. Il semble que tout le monde, à l'unanimité, soit en faveur de supprimer l'emprisonnement. Mais même avec les amendes, si quelqu'un dans une piètre situation financière, un ménage à faible revenu qui, comme cela a été dit — par M. Garneau, notamment — est plus susceptible de ne pas répondre aux questions, pour une raison quelconque...? Est-ce que quelqu'un disposant d'un faible revenu devrait se voir menacer d'une amende de 500 $ parce qu'il refuse d'indiquer combien de temps il passe avec ses enfants? Pourriez-vous réagir à cela, et peut-être esquisser des solutions de rechange à cette contrainte, à cette obligation de répondre à ces questions?
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Écoutez, je crois que tout le monde considère que le gouvernement doit fournir ses services de manière efficiente, et donc je pense que vous avez l'obligation de trouver l'information par le meilleur moyen possible au moindre coût pour le contribuable et en veillant à surmonter nombre des objections exprimées ici. Mais, sincèrement, je crois tout simplement que dans une société comme le Canada, forcer les gens à répondre à des questions...
Désolé pour la référence à Greg Weston, mais j'ai lu une de ses chroniques où il parlait de cela.
Mais les gens sont victimes d'intimidation: on les appelle, on les menace de prison. Beaucoup de gens ont peur de l'État tentaculaire et de la bureaucratie qui l'accompagne, comme je l'ai dit. Je ne sais pas si cette menace produit des renseignements très fiables, et je pense donc qu'il faut sensibiliser les Canadiens aux raisons qui font que ces recensements sont importants, poser des questions pertinentes et laisser tomber celles qui franchement ne le sont pas.
Je l'ai lu dans l'avion en venant ici et ce formulaire contient quantité de questions qui n'apportent rien, à mon avis. Je crois qu'il faut travailler à formuler des questions qui vont rendre le pays plus efficace, plus efficient et mieux apte à profiter des possibilités qu'offre l'économie mondialisée d'aujourd'hui. Mais aller menacer les contribuables et les citoyens et leur dire « Faites ceci ou nous allons vous jeter en prison » est une chose dont aucun gouvernement, quel qu'il soit, ne devrait être fier.
Ceci ne devrait pas être un débat politique. Nous devrions tous être d'accord là-dessus. Jeter quelqu'un en prison ou le menacer de le faire n'a pas lieu d'être dans un pays comme le Canada.
Monsieur Coleman, peut-être pouvez répondre à cette question. Je crois savoir que pour garantir la fiabilité des enquêtes et des sondages, vous et d'autres organisations, quelles qu'elles soient, devez faire appel à Statistique Canada, et plus précisément au questionnaire long de recensement, pour établir les pondérations voulues. Il vous faut des points de comparaison, sinon, à toutes fins pratiques, vous calculez sur la base de rien, pour utiliser un aphorisme.
Je me demande pourquoi vous ne considérez pas cela comme important. Si l'étalon de pondération est inexact ou erroné de 20 ou 30 p. 100, le résultat sera forcément sans valeur. Mais je suis sûr que lorsqu'il s'agit des finances du pays et de la fiabilité requise si l'on veut que les contribuables en aient pour leur argent, ce pour quoi votre organisation milite, ne souhaitez-vous pas avoir des renseignements fiables, crédibles, impartiaux? Sinon votre argumentation ne tient pas debout, monsieur.