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Bonjour, mesdames et messieurs. Bonjour à tous. Bienvenue à la 51
e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
Aujourd'hui nous allons examiner le projet de loi , un projet de loi émanant des députés.
M. Vincent est ici. Nous sommes censés accueillir deux autres témoins — du ministère de l'Industrie, M. Bilodeau et Mme Einbinder-Miller. Veuillez vous approcher. Assoyez-vous.
Je vais commencer par M. Vincent pour 10 minutes, puis M. Bilodeau aura 10 minutes pour faire une déclaration préliminaire. Nous allons ensuite passer à la période des questions comme à l'habitude, et les députés pourront poser des questions soit au parrain du projet soit aux représentants du ministère.
Sans plus tarder, monsieur Vincent.
[Français]
Monsieur Vincent, bienvenue! Vous avez 10 minutes, monsieur.
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Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs du comité, le projet de loi , donnerait au commissaire du Bureau de la concurrence le mandat de faire enquête sur une industrie entière, s'il le juge nécessaire, et vise à corriger une importante lacune de la Loi sur la concurrence pour donner plus de mordant au Bureau de la concurrence. L'objectif est de donner un pouvoir d'enquête au Bureau de la concurrence pour qu'il puisse agir par lui-même sans attendre les plaintes des citoyens. Ce projet de loi accorderait au Bureau de la concurrence les pouvoirs nécessaires pour prendre des mesures contre les sociétés ou les personnes qui tentent de profiter des consommateurs canadiens.
Un bref retour sur la réforme législative de la Loi sur la concurrence nous démontre que l'étude du Comité MacQuarrie, en 1952, a apporté plusieurs modifications à la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions, notamment une disposition se rapportant aux enquêtes à des fins de recherche. À l'époque, la Commission sur les pratiques restrictives du commerce, la CPRC, fonctionnait comme un organisme décisionnel qui, parallèlement, effectuait des investigations et des enquêtes à des fins de recherche.
À la suite de nouvelles modifications mineures, en 1976, l'article sur les enquêtes à des fins de recherche prescrivait que le directeur pouvait, de sa propre initiative initiative, et devait, sur l'ordre du ministre de procéder à une enquête.
Officiellement, l'objectif était de répondre au désir de s'assurer que le tout nouveau Tribunal de la concurrence (le « Tribunal ») serait un organisme strictement décisionnel.
Une recherche du Bureau de la concurrence du Canada intitulée Étude de marché: Un aperçu contextuel mentionnait: « On ne recense aucune enquête sur des problèmes de la concurrence en vertu de la Loi sur les enquêtes depuis l'abrogation de l'article 47 en 1986 ». La raison est simple, le Bureau de la concurrence a perdu son pouvoir d'enquête.
Mais comment le Bureau de la concurrence peut-il faire son travail? Seulement lorsqu'il est convaincu, d'après une dénonciation faite sous serment ou affirmation solennelle, qu'une enquête est amorcée en application de l'article 10 de l'actuelle Loi sur la concurrence et qu'une personne détient, ou détient vraisemblablement, des renseignements pertinents pour l'enquête en question.
Le Bureau de la concurrence serait beaucoup plus efficace et crédible face aux conservateurs s'il avait un vrai pouvoir d'enquête. Toutes ces conditions arrivent rarement.
D'ailleurs, M. Konrad von Finckenstein, alors commissaire de la concurrence et maintenant président du CRTC, avait fait la déclaration suivante: « [...] même si le mandat du Bureau inclut le rôle très important d'enquêteur et de promoteur de la concurrence, la législation actuelle ne donne pas au Bureau [de pouvoirs d'enquête s'il mène] une étude sur l'industrie. »
Il est certain que le Bureau de la concurrence n'hésite pas à intervenir lorsqu'il découvre une preuve manifeste de fixation des prix. En 2008, le bureau a mis au jour une entente de fixation des prix entre les détaillants d'essence dans quatre municipalités au Québec. À la mi-avril 2009, quelques particuliers et entreprises avaient plaidé coupable. L'enquête se poursuit.
Mais pour ce faire, il faut d'abord une dénonciation qui doit être faite sous serment. De plus, le commissaire ne peut avoir accès qu'aux renseignements disponibles au public ou qui lui sont fournis volontairement par l'industrie.
Lors de nos rencontres à ce comité, la principale question qu'on se posait était de savoir ce qui se faisait ailleurs dans le monde. Voici les résultats. Aux États-Unis, ces études peuvent être entreprises de trois façons: lorsque le Congrès exerce son pouvoir législatif pour demander à la Federal Trade Commission de rédiger un rapport précis; lorsque les membres du Congrès ou d'un comité du Congrès demandent, sans exercer le pouvoir législatif de celui-ci, à la FTC de mener une étude; et lorsque la FTC décide de mener une étude de son propre chef.
Au Royaume-Uni, l'Office of Fair Trading a effectué des études de marché sur divers secteurs de l'économie, notamment sur le marché de l'assurance de responsabilité civile, sur les garanties des automobiles neuves, la dentisterie privée, les services de taxi, les cartes privatives et les pharmacies.
Lorsqu'il existe des motifs raisonnables de soupçonner qu'une caractéristique ou un ensemble de caractéristiques d'un marché empêche réduit ou fausse la concurrence, une enquête peut être menée.
Pour ce qui est de l'Union européenne, la Commission européenne est habilitée à effectuer des enquêtes générales sur tout le secteur de l'économie si « l'évolution des échanges entre États membres, la rigidité des prix ou d'autres circonstances font présumer que la concurrence peut être restreinte à l'intérieur du marché commun ». Ce pouvoir a été peu utilisé dans le passé mais plus fréquemment depuis 2005.
En janvier 2005, deux enquêtes sectorielles ont été lancées: une sur la concurrence dans le secteur de l'énergie, plus spécialement les marchés de l'électricité et du gaz, et une autre dans le secteur des services financiers.
En Australie, l'Australian Competition and Consumer Commission peut effectuer des enquêtes générales sur tous les secteurs de l'économie. L'enquête peut donc être ouverte par le commissaire.
Certains me diront que le projet de loi C-10 donne des nouveaux pouvoirs au commissaire du Bureau de la concurrence, mais je dois vous dire le contraire.
Les principaux éléments sont les suivants: augmenter les sanctions applicables; retirer certaines dispositions criminelles relatives à des pratiques de détermination des prix; créer un mécanisme plus efficace de poursuites criminelles; introduire un mécanisme d'examen des fusions et permettre au Tribunal de la concurrence d'imposer des sanctions administratives pécuniaires aux entreprises qui ont abusé de leur position dominante sur un marché.
M'appuyant sur l'historique du fonctionnement du Bureau de la concurrence, notamment l'abrogation de l'article 47 faite en 1986, et sur le peu d'efforts du gouvernement actuel pour l'améliorer et, à la lumière de ce qui se passe dans d'autres pays, il me semble qu'il faut adopter le projet de loi et redonner au Bureau de la concurrence le pouvoir d'ouvrir une enquête sur tous les secteurs de l'industrie. En conclusion, je m'interroge toujours sur la façon dont les pétrolières fixent des prix semblables sans se consulter. Je suis maintenant prêt à répondre aux questions.
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Bonjour, je m'appelle Richard Bilodeau et je suis sous-commissaire adjoint intérimaire à la Direction générale des affaires civiles du Bureau de la concurrence. Rhona Einbinder-Miller, directrice exécutive et avocate générale principale aux Services juridiques du Bureau de la concurrence, m'accompagne aujourd'hui.
Dans un premier temps, je tiens à remercier le comité de m'avoir invité à parler du projet de loi . Je voudrais mettre en lumière deux aspects qui ont d'importantes répercussions sur le projet de loi à l'étude. Pour commencer, j'expliquerai brièvement la portée de certaines modifications apportées à la Loi sur la concurrence en 2009, puisqu'elles ont trait aux questions dont le comité est saisi aujourd'hui. Ensuite, j'évaluerai brièvement certaines conséquences de ce projet de loi s'il devait être édicté.
[Traduction]
La Loi sur la concurrence et le régime de la concurrence au Canada ont beaucoup changé à la suite des modifications qui ont été adoptées par le Parlement en mars 2009. Ces modifications, qui représentent les changements les plus importants apportés à la loi en plus de 20 ans, visaient à moderniser le texte et à l'harmoniser davantage avec les lois connexes des principaux partenaires commerciaux du Canada.
Pour ce qui est du sujet dont est saisi le comité aujourd'hui, les modifications les plus importantes qui ont été apportées à la loi visait la disposition sur les complots criminels, que l'on appelle plus généralement la disposition anti-cartel; c'est d'ailleurs sur cette question que doit se pencher le comité aujourd'hui. Ces modifications ont donné lieu à des dispositions criminelles permettant de lutter plus efficacement contre les formes de cartel les plus dommageables. En effet, il est maintenant illégal de s'entendre entre concurrents pour fixer les prix, attribuer des marchés ou limiter la production, sans égard à l'incidence de l'entente sur la concurrence de ce marché ou à d'autres facteurs.
Les sanctions dans le cas de violation des dispositions sur les cartels criminels ont été durcies et correspondent à une peine d'emprisonnement maximale de 14 ans et une amende maximale de 25 millions de dollars par infraction.
Les changements à la disposition sur les cartels sont appliqués depuis le 12 mars 2010, soit un an après les autres changements, ce qui a permis aux entreprises d'adapter leurs pratiques en vue de se conformer à la nouvelle loi. En même temps, ces modifications ont mené à l'établissement d'une nouvelle disposition qui permet de soumettre d'autres formes de collaboration potentiellement anticoncurrentielles à l'examen du Tribunal de la concurrence, en vertu d'une disposition civile connexe.
[Français]
Maintenant que toutes les modifications apportées à la loi sont en vigueur, la priorité du bureau est de veiller à les faire respecter, de façon efficace et efficiente. Il importe également pour le bureau que les poursuites qu'il intente soient responsables, de manière à bien remplir le mandat de la mise en application donné par le Parlement.
De plus, dans ce nouvel environnement juridique, il importe de clarifier les limites de ce que constitue un comportement acceptable et non acceptable, tout en s'assurant que les entreprises et consommateurs canadiens ne doutent pas que la loi sera appliquée avec vigueur. Cela m'amène au projet de loi à l'étude aujourd'hui.
J'aimerais profiter de cette occasion pour décrire certains enjeux qui pourraient naître de ce projet de loi concernant le fonctionnement de la loi et la portée des pouvoirs qui seraient conférés au bureau, si le projet de loi devait être adopté. Selon l'interprétation que nous en faisons, le projet de loi aurait notamment pour but de remédier au fait que la commissaire ne dispose pas des outils nécessaires pour mener des enquêtes efficaces et poursuivre en justice ceux qui sont reconnus coupables de fixation de prix dans le secteur pétrolier.
Cependant, ce projet de loi a été introduit avant que les nouvelles dispositions anticartel de la loi n'entrent en vigueur. Il est maintenant illégal de s'entendre avec un concurrent pour fixer les prix, attribuer les marchés ou limiter la production. Le caractère illégal de ces infractions est clair et sans équivoque. Les dispositions antérieures n'étaient pas aussi limpides. La nouvelle loi établit des limites faciles à comprendre pour toutes les entreprises sur ce que constitue un comportement acceptable. La commissaire n'a plus à prouver que ces ententes nuisent à la concurrence, ce qui nous aide à rendre responsables de leurs actes les individus et les entreprises qui s'adonnent à des pratiques néfastes.
En effet, la loi prévoit de nouveaux outils très efficaces auxquels la commissaire peut recourir pour régler les problèmes qui sont au coeur de ce projet de loi. Cependant, il est encore trop tôt pour que le bureau et le milieu des affaires puissent mesurer l'efficacité de ces outils dans la mesure où ceux-ci ne sont en vigueur que depuis huit mois. Nous croyons que l'efficacité réelle de cette nouvelle disposition plus claire deviendra apparente au cours des prochaines années.
[Traduction]
Lors des débats entourant le projet de loi, on a tenté de déterminer si la commissaire a le pouvoir de lancer une enquête de sa propre initiative, ou si elle doit recevoir une plainte au préalable.
Je tiens à préciser les choses: la commissaire n'a pas besoin d'attendre le dépôt d'une plainte à son bureau avant d'amorcer une enquête. Dans le cas où la commissaire détient des renseignements indiquant qu'une des dispositions de la loi a été ou est sur le point d'être violée, quelle que soit la source de ces renseignements, l'article 10 de la Loi sur la concurrence donne à la commissaire le pouvoir de lancer une enquête lorsqu'elle considère que c'est nécessaire. Parmi les enquêtes du bureau présentement en cours, approximativement 30 p. 100 de celles-ci ont été lancées sans qu'il y ait eu de plainte.
En conclusion, j'aimerais réitérer que lorsque le Parlement a amendé la Loi sur la concurrence il y a 21 mois, il a donné au bureau des moyens efficaces d'appliquer les lois canadiennes sur les complots criminels à l'encontre des contrevenants qui s'entendent pour fixer les prix, attribuer des marchés ou limiter la production. Ces amendements à la loi, entrés en vigueur en mars 2010, combinés à nos pouvoirs actuels pour recueillir des preuves et protéger ceux qui dénoncent des agissements anticoncurrentiels, permettent au bureau d'agir de façon plus efficace dans l'intérêt supérieur des entreprises canadiennes ainsi que des consommateurs.
[Français]
Sans aucun doute, le débat entourant le projet de loi et les projets de loi qui l'ont précédé mettent en évidence des questions dans certains secteurs de l'industrie qui sont importants pour les consommateurs ainsi que le bureau. Nous avons à notre disposition, particulièrement depuis les amendements de mars 2009, des moyens légaux efficaces et des outils pour recueillir des preuves nous permettant de répondre énergiquement lorsque des questions sont soulevées en vertu de la Loi sur la concurrence.
Le Bureau de la concurrence se réjouit de pouvoir contribuer aux délibérations du comité. Nous demeurons confiants qu'avec les nouvelles règles adoptées par le Parlement, nous pourrons continuer de permettre aux entreprises et aux consommateurs canadiens de prospérer dans un marché concurrentiel et innovateur.
Je suis maintenant prêt à répondre à vos questions, merci.
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On a le pouvoir d'enquête. On l'avait avant les amendements du projet de loi C-10, entrés en vigueur en mars dernier.
Lorsque la commissaire a des raisons de croire qu'il y a eu une infraction à la loi ou une ordonnance qui devait être rendue devant le tribunal, elle a le pouvoir de déclencher une enquête en vertu de l'article 10.
Les amendements entrés en vigueur en mars 2010 ont simplifié le contexte dans lequel on peut enquêter sur les cartels. Auparavant, lorsqu'on faisait allusion à des cartels qui fixaient les prix, par exemple, nous devions prouver non seulement qu'il y avait une entente pour fixer des prix, mais que celle-ci avait un effet significatif sur la concurrence.
Le Parlement, par le projet de loi C-10, nous a donné la responsabilité de prouver qu'il y a eu une entente pour fixer des prix entre des concurrents, sans toutefois avoir besoin de prouver qu'il y a eu un effet sur la concurrence. Il suffit de prouver que l'entente fixe les prix entre les concurrents, alloue des marchés ou réduit la production entre concurrents.
On n'a plus à prouver cet aspect-là.
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J'essaie de clarifier les différences qu'il y a entre les deux. Je les ai lus et je vois des choses semblables.
Je m'inquiète du fait qu'il puisse y avoir enquête sans qu'une plainte ait été portée, sans qu'il y ait de — je ne veux pas dire « sans qu'il y ait de raison », mais... Je suis inquiet de voir le poste devenir politisé. Tout d'un coup, on pourrait avoir ce qu'on appelle un witch hunt — je ne connais pas la traduction française de ce terme. Par exemple, un secteur de l'industrie pourrait présenter un problème, et tout d'un coup, la commissaire pourrait s'en mêler et commencer à chercher un problème qui n'existe pas, ou à inventer un problème. Dans le passé, on a vu des gouvernements qui avaient cette tendance à politiser les enquêtes, les situations.
Qu'est-ce qui nous garde de tels effets?
Je commencerai par entendre la réponse de M. Bilodeau. Par la suite, j'entendrai celle de M. Vincent.
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Justement, c'est le pouvoir d'enquête.
Comme je le disais plus tôt, si chaque usine de raffinage, autant au Canada qu'au Québec, décide de ses prix du raffinage de pétrole chaque mois et qu'il n'y ait aucune disparité... Il faut comprendre que ces gens ne se parlent pas. D'après eux, il n'y a pas de consultations entre les raffineries pour établir le prix chaque mois. Car ce prix est établi chaque mois dans les usines de raffinage. Si ces gens ne se parlent pas, comment se fait-il que le prix de l'essence à la pompe, tous les mois, est le même pour tout le monde et est égal partout, en tout temps?
Puisque les gens du Bureau de la concurrence ont tous les pouvoirs, comme ils l'expliquent, si j'étais eux, je me poserais cette question: comment se fait-il, si l'on ne se consulte pas, que le prix, tous les mois, est le même pour toutes les raffineries, nonobstant la pétrolière? Il me semble que c'est un indicateur. Et si j'avais des pouvoirs d'enquête, j'irais voir tout de suite ce qu'il en est. Avec les pouvoirs d'enquête que ces gens disent avoir, j'irais faire une enquête pour savoir pourquoi les pétrolières fixent le même prix.
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais remercier nos invités d'être ici aujourd'hui.
Je n'ai pas vraiment beaucoup de questions, mais j'ai quelques commentaires.
Tout d'abord, j'ai participé à la fusion Texaco-Esso. Il ne s'agissait pas d'une fusion. Ils ont liquidé leur unité Texaco en raison d'une poursuite au sud de la frontière. J'étais employé par Texaco et finalement je suis devenu employé de Imperial Oil pendant un certain nombre d'années — j'ai adoré Texaco et je n'ai rien à dire au sujet d'Imperial Oil.
J'aimerais commencer par M. Vincent. Monsieur Vincent, j'ai siégé à un comité avec vous déjà auparavant. J'apprécie votre engagement. Voici la question que j'aimerais soulever. Il s'agit de mon troisième projet de loi émanant des députés au cours des dernières semaines, et celui-ci comporte maintenant un ou deux articles. Un des projets de loi comporte sept articles et huit amendements. Un autre comporte maintenant seulement un article. Ce projet de loi a un seul article. Je ne suis pas très favorable aux projets de loi émanant des députés. Je pense que ça souligne le problème. Mais voici un projet de loi qui comporte un seul article, et on dit qu'il s'agit d'un texte législatif.
J'aimerais savoir qui vous avez consulté. Vous l'avez envoyé à la Bibliothèque du Parlement pour qu'elle vous soumette la terminologie légale, mais à part ça, qui avez-vous rencontré? Avez-vous discuté de votre proposition avec le Bureau de la concurrence? Avez-vous rencontré des gens qui connaissent le sujet? Ce que je n'aime pas de ces projets de loi, c'est qu'habituellement il n'y a aucune consultation. Les projets de loi normaux, les projets de loi émanant du gouvernement, comprennent un cartable rempli de documents, ont fait l'objet d'une consultation en bonne et due forme auprès du public. Pouvez-vous me dire avec qui vous avez discuté de ce projet de loi avant de le présenter?
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Monsieur Vincent, je me ferai un plaisir de répondre à cette question.
Voici comment on procédait lorsque je travaillais chez Texaco Canada il y a 25 ans. Selon le territoire que je représentais, j'étais responsable de 28 à 30 stations d'essence. Chaque détaillant avait des jumelles. Nous pouvions voir ce qui se passait à tous les coins de rue, chez nos concurrents. Nous décidions alors si nous allions égaler leur prix.
Savez-vous qui prenait cette décision? C'était moi, pour mes stations d'essence. Les détaillants m'appelaient — et je travaillais pour Texaco à l'époque — et me disaient: Imperial Oil, Esso affichent ce prix; Shell affiche ce prix; Sunoco affiche ce prix — que voulez-vous faire?
À 23 ans, je décidais du prix. La façon de procéder était un peu différente lorsque j'ai commencé à travailler pour Esso, mais ça fonctionnait aussi par appel. On décidait des prix selon ce que les autres faisaient.
À l'opposé, j'appelais mes détaillants et leur disais qu'aujourd'hui, nous allions « restaurer », ce que nous appelions une « restauration ». Nous augmentions notre prix de 5¢ selon le prix du baril et les coûts du raffinage. Nous attendions et espérions que nos concurrents feraient de même.
Savez-vous qui d'autre fait ça? Les producteurs de pain, les entreprises de pneus, ils magasinent tous les prix pour voir ceux de leurs concurrents. Savez-vous quelle est la différence, monsieur Vincent? Les prix sont dans la rue, pas sur l'étagère dans les épiceries, cela se fait dans toutes les industries. On sait ce que les gens dépensent dans les magasins de détail.
Je félicite M. Teague d'être capable de déterminer le prix. C'est une formule. Vous obtenez le prix du baril à New York et vous appliquez une formule, qui vous dit de façon approximative le prix de l'essence le jour suivant. Cela n'a rien de bien sorcier.
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Tout ce que M. Bilodeau vous a dit, toutes les démarches essentielles qu'il est obligé de faire pour arriver à la conclusion qu'il faut tenir une enquête, le projet de loi les éliminerait. On n'aurait pas besoin de poser toutes ces questions, on n'aurait pas besoin d'aller en cour, d'aller voir un juge pour pouvoir lancer une enquête. On aurait le droit de se présenter au bureau d'une entreprise pour saisir de la documentation. C'est là la lacune du pouvoir d'enquête.
Les enquêteurs ne peuvent pas se rendre dans les bureaux d'une industrie et saisir de la documentation. Ils ne peuvent qu'obtenir la documentation disponible. C'est donc de la documentation que l'industrie... Et je ne parle pas seulement de l'industrie du pétrole. Je parle de n'importe quelle sorte d'industrie. On le voit, dans l'industrie de la construction, en ce qui concerne la fixation des montants des contrats: il faudrait qu'il y ait une enquête. L'Union des municipalités a demandé au Bureau de la concurrence, au mois d'avril, de faire enquête sur la fixation des montants des contrats dans l'industrie de la construction, et je n'en ai pas encore entendu parler, je n'ai rien vu. On n'a rien entendu.
Pourtant, il me semble que c'est quelque chose de flagrant. Personne ne peut enquêter parce qu'il n'y a pas de pouvoirs d'enquête. Comme je le disais tantôt, il y a quatre autres pays — dont les États-Unis, l'Australie — en plus de ceux de l'Union européenne — qui les ont, ces pouvoirs d'enquête. Pourquoi on n'a pas de pouvoirs d'enquête, nous? C'est ça que je veux pour le Canada et pour les consommateurs canadiens: que le Bureau de la concurrence ait un vrai pouvoir d'enquête.
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Merci beaucoup de votre question.
Monsieur Bilodeau, je me préoccupe des ressources disponibles. En fait, j'ai deux questions pour vous. Une porte sur les ressources. Pensez-vous que, doté de ces pouvoirs additionnels, vous n'auriez pas les ressources vous permettant d'exécuter les tâches mandatées?
Pour ce qui est de ma deuxième question, d'après ce que j'ai compris, vous dites que vous avez déjà le pouvoir d'enquêter, de façon plus générale, pour toute l'industrie. Tout d'abord, veuillez préciser si vous pouvez enquêter pour toute l'industrie. Deuxièmement, si vous estimez vraiment que vous avez déjà les pouvoirs octroyés par ce texte de loi, quelles sont vos objections à l'égard du projet de loi s'il ne fait que préciser que vous avez ces pouvoirs?
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Bilodeau, vous dites que vous avez un pouvoir d'enquête. J'ai même cru entendre tout à l'heure, après la dernière question, que vous n'avez pas besoin d'un juge pour procéder à une enquête.
J'aimerais savoir, de votre part, ce qu'il faut pour faire une plainte. Si j'ai une plainte à adresser au Bureau de la concurrence, qu'est-ce qu'il me faut? Un coup de téléphone est-il suffisant? Dois-je donner mon numéro de téléphone? Faut-il que je dépose quelque chose par écrit, que j'aie des témoins, que ce soit fait sous serment? Dois-je apporter des preuves, faire une recherche?
Enfin, quel est le minimum qu'il me faut pour enclencher une enquête au Bureau de la concurrence?
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Il n'est pas nécessaire de faire appel à un juge. L'enquête formelle est plutôt la deuxième étape.
Comme première étape, il faut faire un appel et dire quel est le problème. Il s'agit alors de ce qu'on appelle un examen préliminaire. On va vous poser des questions pour mieux comprendre. Comme je l'ai dit auparavant, cet appel peut être suffisant. Cela dépend des circonstances, de quelle industrie il est question et de l'information que vous nous donnez. Il y a peut-être d'autres industries. Il y a beaucoup d'information sur l'industrie de l'essence qui est disponible pour le public. On le sait, le prix du pétrole brut est public et le prix du gros occasionnel est aussi public. Il y a beaucoup d'information.
On a également acquis beaucoup d'expertise au cours des années. On est un peu plus éduqué dans le domaine de l'essence que dans d'autres industries, que l'on connaît moins ou au sein de laquelle on n'a jamais enquêté auparavant. Toutefois, un appel est suffisant, même s'il est mieux d'avoir des preuves.
Par contre, ça ne veut pas dire...
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Je pense que le citoyen s'attend à ce que le Bureau de la concurrence puisse faire un travail adéquat. Un travail adéquat veut dire deux choses selon moi. D'ailleurs, il nous l'a dit clairement quelquefois au cours de son témoignage.
Premièrement, il faut qu'il y ait une plainte, mais il faut qu'on pose plus de questions à la personne qui téléphone. Le plaignant possède-t-il lui-même des informations permettant d'entreprendre cette enquête, c'est-à-dire a-t-il quelque chose de concret? Prenons la question du prix de l'essence. Imaginons qu'un détaillant vous appelle pour vous dire que quelqu'un lui ait demandé de modifier le prix à la pompe. Ce serait concret. Le Bureau de la concurrence aurait donc quelque chose d'assez sérieux pour aller voir un juge et enquêter relativement à cette plainte, mais, à l'heure actuelle, il ne peut pas déclencher une enquête de lui-même.
Quels pouvoirs sont prévus par le projet de loi ? Comme M. Bilodeau l'a dit plus tôt, il manque de l'argent et des ressources. Pourquoi ne veulent-ils pas avoir plus de pouvoirs d'enquête alors que c'est ce qui manque? Comment va-t-on être capable de faire un travail sans argent et sans ressources? C'est là que ça accroche.
Je pense qu'il l'a bien expliqué plus tôt. Le point culminant lorsqu'on se penche sur un projet de loi, la question qu'on se pose à toutes les réunions de comité est si ça se fait ailleurs. Cela se fait dans quatre autres pays. On avait cela auparavant et on ne l'a plus. Qu'est-ce qu'on peut faire de plus? Avec ces pouvoirs, on économiserait encore plus d'argent parce qu'on pourrait entreprendre les enquêtes immédiatement sans être obligé de faire une analyse exhaustive et d'aller voir un juge.
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Je ne vous demanderai pas d'aller plus loin pour ces raisons, parce qu'il s'agirait d'une affaire en instance. Mais si j'ai bien compris, dans ce cas, une personne a par erreur donné l'information au bureau en pensant qu'en ne faisant pas partie de l'entente, il y avait une infraction quelconque à la Loi sur la concurrence. Le bureau n'a pas été en mesure d'utiliser l'information, de l'inscrire au dossier et de déposer des accusations, lesquelles sont en cours. On s'est beaucoup vanté lorsque c'est arrivé. On est resté dans l'ensemble avec l'impression, sans mes explications, que la Loi sur la concurrence fonctionnait. En fait, vous êtes tombé dessus par hasard.
Je vais m'en tenir à cela. Je veux poser une question relativement à ce que M. Wallace a signalé. En 1989, on avait de nombreux intervenants qui avaient leur propre prix de gros. Je ne parle pas du détail ici, parce que je crois que c'est assez clair. On peut débattre indéfiniment de l'inversion des prix. Si Costco à Mississauga ou ailleurs en Ontario ne veut pas faire payer la marge au détail et veut inviter les gens à venir, c'est sa décision.
Je crois que M. Vincent est davantage préoccupé par ce qui se passe au niveau du gros, un portrait qu'on ne voit pas exactement. C'est dans ce cas qu'on peut voir des prix identiques par région. Est-ce en raison d'un manque de concurrence, ou d'une super concurrence? Quelqu'un décide du prix, et les autres suivent. Ou est-ce parce que, comme on l'a facilement signalé, on partage un produit, région par région, pour des fins d'efficacité? Je ne vais pas tirer de conclusion, mais je vais simplement signaler que toutes vos enquêtes, et on aurait pu le prédire, ont été inutiles et non pertinentes, parce qu'elles ne suivent que certaines présomptions à propos du marché. À part vos sources d'information et vos façons d'obtenir de l'information, il n'y a eu aucune autre étude détaillée de cette industrie, ou d'autres industries en fait.
Je me rappelle il y a très longtemps d'avoir tenté d'aborder l'enjeu de l'industrie des supermarchés. Le juge Kelen, qui est maintenant à la Cour fédérale, était coauteur. J'ai pris cette initiative parce que j'estimais que le bureau et la Loi de la concurrence qui avait été rédigée en 1986 ne tenaient pas compte des changements distincts et importants qui survenaient et qui avaient des répercussions sur les consommateurs et le processus concurrentiel partout au pays.
Ma question porte sur le pouvoir d'enquête, que vous voyez peut-être redondant par rapport aux pouvoirs que vous avez actuellement. Il n'y a eu aucun changement au paragraphe 10(1) à la partie « Enquête par le commissaire » de la Loi sur la concurrence. Ai-je raison?
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Vous avez raison, c'était le DER.
Vous vous rappellerez qu'avec Katrina — je soulève cette question à titre d'information —, il y avait eu une augmentation aux États-Unis d'environ 2 ¢ le litre dans la région du Texas. Pour le Canadien moyen, il s'agissait de 12,9 ¢. Le bureau à ce moment-là a indiqué qu'il s'agissait simplement d'une conséquence de la concurrence.
Monsieur Bilodeau, si vous deviez obtenir les pouvoirs que M. Vincent cherche clairement à vous donner, et que vous aviez les ressources, examineriez-vous entre autres le fait qu'aux États-Unis et dans chaque marché régional ainsi qu'entre divers joueurs, le prix de gros varie de plusieurs cents le gallon chaque jour? On pourrait sûrement le prouver grâce aux données de l'OPIS ou de Bloomberg, peu importe. On pourrait aussi expliquer pourquoi à chaque coin de rue aux États-Unis, comme l'auront remarqué les gens qui ont voyagé là-bas, il y a une différence de prix considérable, ce qui n'est pas le cas au Canada.
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Si vous donnez un exemple, maintenant que la raffinerie de Montréal a fermé ses portes, quel est votre marché pertinent? Je ne tente pas de vous tendre un piège, monsieur. Je tente de démontrer pourquoi aujourd'hui, plus que jamais, nous avons besoin de la mesure proposée par M. Vincent.
Personne n'a fait une analyse à jour de l'industrie sous sa forme actuelle, compte tenu du nombre de raffineries qui ont fermé leurs portes ou qui ont déménagé, ce qui est le cas pour nombre d'entre elles, comme je l'ai dit, pour des raisons gouvernementales ou environnementales. Il n'est pas nécessairement sensé du point de vue économique d'alourdir le système. Par conséquent, nous avons des prix de gros à échelons fixes et uniformes au Canada, ce qui n'est pas le cas en Europe, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Asie ou aux États-Unis. Les Canadiens ont raison de se demander pourquoi, si nous avons des prix de monopole ou des prix similaires, on peut conclure n'importe quoi sauf qu'il s'agit d'un monopole ici. Évidemment, on craint la collusion et le complot, parce que les mêmes joueurs se réunissent tard la nuit pour fixer les prix.
Si ce n'est pas le cas au niveau du gros et qu'il n'y a qu'un seul joueur qui prend les décisions, ne parlons-nous pas d'une loi désuète? Les pouvoirs d'enquête proposés ne permettraient-ils pas en fait au bureau, une fois pour toute, de comprendre la situation actuelle de l'industrie?