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Bonjour. C'est un privilège pour moi de me retrouver parmi nos législateurs.
Nous allons discuter d'un sujet très intéressant: les hélicoptères. Vous avez déjà peut-être volé dans un de ces appareils, mais il se peut que vous ne vous soyez pas attardé au système de vol des hélicoptères. Le sujet d'aujourd'hui sera la création d'une organisation appelée l'International Helicopter Safety Team. Nous allons parler du contexte de l'IHST, de la raison derrière sa création, des résultats de l'analyse que nous avons réalisée, des recommandations et de la façon dont cette analyse s'applique au Canada.
Je partagerai la déclaration. Je m'appelle Somen Chowdhury et je travaille comme gestionnaire de la recherche chez Bell Hélicoptère. Mon collègue, Sylvain Séguin, travaille pour Canadian Helicopters Limited, à titre de vice-président de la sécurité et du marketing.
Comme vous le savez, l'hélicoptère n'est pas une machine très simple à faire fonctionner. Un système aéromécanique très complexe permet à l'hélicoptère de voler selon un mode bidimensionnel, ce que très peu de moyens de transport peuvent faire. Un avion à voilure fixe n'a pas la manoeuvrabilité d'un hélicoptère, de sorte qu'il s'agit en quelque sorte de la réalisation du rêve de voler, mais tous les avantages viennent avec des risques.
L'hélicoptère vole dans un secteur du terrain, dans les limites de la terre, comme nous le disons, à très basse altitude. Il vole dans toutes les conditions météorologiques. Il effectue toutes sortes de missions qui ne pourraient pas être réalisées autrement, de sorte qu'il est confronté à des situations beaucoup plus dangereuses que les autres modes de transport. Toutefois, je tiens à souligner que l'hélicoptère n'est pas un système ou un véhicule dangereux.
Toutefois, lorsque l'on examine les statistiques, comme on le voit sur le graphique, on constate qu'entre 1991 et 2005 — dans la zone rouge du graphique montrant les données américaines — le taux d'accidents impliquant des hélicoptères est demeuré stable, à environ 200. Les chiffres n'ont pas diminué. Pendant la même période, la moyenne mondiale était d'environ 550 à 600.
S'il est vrai que nous avons réussi à faire diminuer les taux d'accidents des autres modes de transport, en particulier le transport aérien, les chiffres concernant les hélicoptères sont demeurés les mêmes. Il est vrai que ces chiffres ne sont pas très élevés, mais le fait qu'ils soient demeurés stables, constants, a attiré notre attention.
Les membres de notre association, l'American Helicopter Society et les membres du groupe de fabricants se sont donc réunis pour discuter de la situation et ont décidé qu'il fallait faire quelque chose, que ce soit grâce à l'initiative du gouvernement ou non. Nous nous sommes réunis et avons décidé de prendre des mesures, pas parce que les chiffres étaient élevés, mais parce qu'ils sont demeurés stables au cours des années.
Pour vous donner une idée de ce à quoi ressemble un accident, un accident n'est plaisant ni à regarder ni à vivre. C'est désastreux. Cela cause de nombreux dommages du point de vue de la vie humaine, des préjudices causés, de la perte d'équipement, etc. Un accident est suffisant pour justifier tous les investissements que nous avons faits en sécurité. La sécurité n'est pas une question d'investissement monétaire. Il ne s'agit pas de se demander si on doit dépenser l'argent ou non. Il faut le faire.
En 2005, nous nous sommes réunis et j'ai organisé une conférence à Montréal. Encore une fois, le Canada a pris les devants. Nous avons réuni environ 265 représentants mondiaux de l'industrie de l'hélicoptère, y compris les représentants des organismes de réglementation: le National Transportation Safety Board, l'OACI et les autorités d'enquête en cas d'accident de la France et de partout dans le monde. Les exploitants et les fabricants sont également venus. Nous avons tous convenu qu'il fallait faire quelque chose.
Nous avons créé l'International Helicopter Safety Team et avons déterminé sa mission. La participation à l'équipe est pleinement volontaire. Aucune exigence ne nous a été imposée, mais nous nous sommes réunis et nous nous sommes donné pour mission de jouer un rôle de direction auprès du gouvernement, de l'industrie et des exploitants afin de développer et de mettre en oeuvre une stratégie intégrée, fondée sur des données — ce qui est très important, la stratégie doit être fondée sur des données — visant à améliorer la sécurité aérienne à bord des hélicoptères. L'équipe résulte donc de la collaboration entre trois partenaires, une collaboration volontaire.
Ensuite, selon notre vision, nous devons atteindre les niveaux de sécurité les plus élevés dans les activités internationales d'exploitation d'hélicoptères. Notre but était très précis. Nous parlons sans cesse de sécurité, mais nous n'agissons jamais. Nous avons donc décidé qu'il fallait réduire de 80 p. 100 le nombre d'accidents impliquant des hélicoptères en 10 ans. C'était un objectif très bien ciblé pour l'année 2016, parce que nous avons lancé l'initiative en 2006.
L'IHST était donc créée. Nous avions un comité exécutif comptant cinq ou six membres. Il y a deux coprésidents. L'un d'eux est Mark Schilling, de la FAA et de la région du sud-ouest de Rotorcraft Directorate. L'autre vient de l'industrie; il s'agit de Matt Zuccaro, d'HAI, Helicopter Association International.
Je fais partie du comité exécutif. Il y aussi Bob Sheffield de Shell Aircraft. Nous avons aussi, d'AHS, Rhett Flater. Il y a également Fred Jones, d'HAC, qui est membre du comité, de même que Jean-Pierre Dedieu d'Eurocopter.
Nous avons ensuite créé les JHSAT à l'échelle mondiale; il s'agit des équipes mixtes d'analyse de la sécurité des hélicoptères, qui nous permettent de commencer à analyser les données. Vous voyez dans le graphique ici que nous en avons une au Canada, une aux États-Unis, une en Inde et une en Australie. En Europe, l'AESA s'est portée volontaire. Nous travaillons maintenant avec le Japon, la Russie et l'Afrique du Sud, et nous tentons d'élargir notre rôle partout dans le monde, étant donné qu'il s'agit d'une équipe internationale.
Le plus important, c'est que les fabricants d'hélicoptères en font partie. Bell Hélicoptère, Sikorsky, Eurocopter, Agusta: ce sont les fabricants d'hélicoptères. Mais leurs hélicoptères volent partout dans le monde, de sorte qu'un accident touchant un hélicoptère d'un de nos membres est notre accident à tous, et c'est important. Il ne s'agit pas d'opposer le nous au vous. Que vous fassiez une erreur ou non, votre accident est notre accident. C'est ainsi que nous avons envisagé la situation, et que nous avons formé ces équipes.
Je dois maintenant souligner la commission Gore, en 1996, qui a créé un comité appelé Civil Aviation Safety Team, ou CAST, l'équipe pour la sécurité de l'aviation civile. Son mandat était de se pencher sur le taux de mortalité dans les accidents d'une flotte de transport d'une compagnie aérienne et de réduire ce chiffre de 80 p. 100 en 10 ans. Cela signifie qu'entre 1996 et 2006, l'équipe a dû réduire les taux de mortalité de 80 p. 100.
L'équipe a monté une base de données des accidents et créé un système d'analyse que nous avons examiné très attentivement. Nous avons constaté que ce système s'inscrit dans notre façon de penser, de sorte que nous avons adopté le mode d'analyse et l'approche de cette équipe. Il s'agit d'une approche fondée sur les données et les dates.
Dans le modèle que je vous montre ici, vous avez les JHSAT, l'équipe d'analyse, et les JHSIT, les équipes de mises en oeuvre. L'équipe d'analyse étudie les données de l'accident, établit les facteurs de causalité et élabore une stratégie d'atténuation. L'équipe de mise en oeuvre met en oeuvre la stratégie d'atténuation par l'intermédiaire des exploitants, des organismes de réglementation et des entités gouvernementales.
Une équipe d'analyse des données est créée actuellement pour examiner les stratégies de mise en oeuvre et pour les communiquer à l'équipe d'analyse, à l'équipe de mise en oeuvre et au comité exécutif, afin de boucler la boucle, et d'apporter les changements nécessaires au processus.
Nous voyons maintenant que tout accident n'est que la pointe de l'iceberg. Ce n'est qu'un événement qui s'est produit. Pour que cet événement se produise, toutes sortes de problèmes systémiques sont survenus. On ne voit jamais ces problèmes systémiques. C'est un peu comme s'ils étaient sous le niveau de l'eau. Nous devons vraiment régler ces problèmes systémiques, que nous appelons « énoncés d'un problème standard » pour régler le problème.
Par l'analyse que nous faisons, nous examinons un incident ou un accident, puis nous examinons les énoncés d'un problème standard, puis nous analysons les causes de l'accident. C'est l'analyse que nous avons faite.
Normalement, environ 1 200 situations peuvent mener à un accident visible. C'est la statistique moyenne. C'est l'histoire de toute l'industrie du transport aérien. En 1941, le taux d'accidents était de huit ou neuf par million de décollages. Ce taux a diminué, grâce à différentes interventions, à près de zéro par million de décollages. Pour chaque million de départs, les taux d'accidents du transport aérien ont diminué de façon spectaculaire. Nous voulons répéter ce succès dans le domaine de l'hélicoptère.
Je travaillerai avec vous pour vous montrer certaines des données avec lesquelles nous travaillons.
Voici le résultat de l'étude américaine, le travail de l'équipe d'analyse entre 2006 et 2009. Pour l'année 2000, 197 accidents ont été rapportés par le NTSB; en 2001, ce chiffre est passé à environ 200. Nous avons étudié cela grâce au travail de l'équipe d'analyse, aux États-Unis. Vous voyez que d'une année à l'autre, les lignes bleues et les lignes jaunes que l'on voit ici ne changent tout simplement pas. La tendance reste exactement la même.
Si vous regardez les facteurs de causalité, vous constaterez que le jugement et l'action du pilote sont devenus les plus communs... 80 p. 100 des situations d'accident ont quelque chose à voir avec le jugement du pilote. Le manque de données sur les accidents domine également la liste des problèmes majeurs auxquels nous devons nous attaquer. Le système de gestion de la sécurité est aussi prédominant. L'absence d'un système de gestion de la sécurité est un facteur qui contribue à de nombreux accidents.
Ainsi, lorsque nous avons examiné l'énoncé de problème standard, c'est de cette façon que la situation se déroulait aux États-Unis, et cela ne variait pas d'une année à l'autre. C'est presque toujours la même chose. Je vous montrerai des résultats obtenus partout dans le monde à la suite de la compilation de ces données.
Ce sont ici les stratégies d'intervention que nous avons trouvées à partir de ces facteurs de causalité.
Nous avons constaté que la formation en simulateur et l'instruction sont essentielles pour prévenir la plupart des accidents. Aujourd'hui, dans l'univers des hélicoptères, en particulier pour les hélicoptères légers, il n'y a aucun simulateur et il n'est pas nécessaire de suivre une formation en simulateur.
Si on ne suit pas de formation en simulateur, on ne peut pas voler jusqu'aux limites du secteur. On ne peut pas simuler les situations à risque et les scénarios hypothétiques: que faites-vous instantanément si cette lumière s'allume pendant le vol? Il faut prendre des décisions capitales. C'est là que le jugement et l'action du pilote entrent en ligne de compte.
C'est vrai pour l'aviation, parce qu'on vole à grande vitesse; en hélicoptère, on vole à 250 ou 300 kilomètres à l'heure, très près du sol, dans différents types de conditions du terrain et des limites autour de nous. Il faut réagir, et réagir vite, et il se peut qu'on ne réagisse pas de la bonne façon. Dans tous les accidents que nous voyons, même l'accident du Cougar, lorsque l'hélicoptère a plongé dans l'eau, dans l'est... Il ne s'agit pas de critiquer qui que ce soit pour leur jugement et leurs actions.
Mais en fait, la réalité exige plus de formation, et davantage de formation en simulateur plutôt que de la formation sur des appareils Robinson légers, qui sont impliqués dans un grand nombre d'accidents en raison du rôle qu'ils jouent. Notre principale recommandation est de mettre en oeuvre le système de gestion de la sécurité.
Le manque de données sur les accidents est critique. Nous devons examiner les appareils de bord qui recueillent des données de sorte que si un accident se produit, on peut revenir en arrière, voir ce qui s'est passé et prendre des mesures d'atténuation des risques. Nous ne pouvons pas le faire actuellement pour les hélicoptères légers. Seuls les grands hélicoptères ont des systèmes de gestion des données de vol.
La maintenance est un enjeu. Ce n'est pas un enjeu aussi majeur que les autres, mais il n'en demeure pas moins qu'il faut en tenir compte.
Nous avons examiné les systèmes et l'équipement. Il s'agit de l'équipement supplémentaire qui doit être à bord pour assurer au pilote une conscience situationnelle supplémentaire afin de l'aider à prendre des décisions fondées sur son jugement. Cela signifie que plus on met de systèmes et d'équipement dans un hélicoptère, plus il devient cher et lourd, et moins il devient rentable. Il faut établir un équilibre pour les hélicoptères légers et déterminer l'équipement supplémentaire à ajouter à moindre coût, tout en fournissant l'information nécessaire au pilote.
La réglementation a un rôle à jouer, mais ce n'est pas essentiel.
Bien entendu, l'infrastructure est importante. Par infrastructure, je veux dire les conditions météorologiques. Lorsqu'on pilote des hélicoptères à basse altitude, très près du sol, on n'a pas de capacité pour fournir des prévisions météorologiques de microniveau au pilote qui va du point A au point B et qui voit un nuage givrant se former sur son chemin.
Ces hélicoptères ne sont pas certifiés pour voler dans des conditions de givrage. Que font les pilotes? Traversent-ils le nuage pour se rendre dans un endroit sécuritaire? Le contournent-ils? Reviennent-ils? Ils ne le savent tout simplement pas. Lorsqu'on est coincé dans des conditions de givrage, on ne sait pas non plus comment réagir. Ce n'est qu'une situation possible.
Il pourrait y avoir des orages. Il pourrait y avoir des éclairs. Les conditions météorologiques sont un facteur très important, particulièrement lorsqu'on vole en mer et qu'on n'a pas de capacités de prévision météorologique de microniveau.
Je vous montrerai ici un autre scénario, que je vous demanderais de regarder, s'il vous plaît.
[Présentation vidéo]
M. Somen Chowdhury: Si vous regardez cet accident, vous constaterez qu'il s'agit d'un hélicoptère naval militaire capable de flotter et d'amerrir. Sa coque est conçue pour amerrir. Les coques d'hélicoptères ne sont pas conçues pour amerrir, à moins d'être conçues spécifiquement pour le faire. On peut amerrir grâce à des dispositifs de flottaison, mais on ne peut pas s'écraser dans l'eau. C'est ainsi qu'ils sont certifiés.
Permettez-moi de revenir à celui-ci. Je veux que vous remarquiez que le pilote a décollé, qu'il y a eu une interruption de l'alimentation — ou une interruption simulée, je ne sais pas — et qu'il a amerri de façon bien sécuritaire. Qu'a-t-il fait par la suite? Il a pris la décision de décoller à nouveau. D'après ce que nous voyons, je ne sais s'il avait récupéré suffisamment de puissance, mais il avait récupéré une partie de sa puissance. Il a tenté de décoller et a actionné le manche cyclique, ce qui fait que l'appareil s'est incliné vers l'avant et a touché l'eau... il n'aurait pas dû faire cela.
Mais peut-on lui dire aujourd'hui, de façon rétroactive, qu'il n'aurait pas dû faire cela? Lorsque l'on a un appareil d'une telle puissance qui utilise un rotor...
Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible.]
M. Somen Chowdhury: D'accord.
Il s'agit donc d'une situation mettant en cause le jugement du pilote, qui a pris la mauvaise décision.
Voyons maintenant le scénario suivant, pendant un spectacle aérien, à Dubaï.
[Présentation vidéo]
M. Somen Chowdhury: Cet accident tourne autour de la conscience situationnelle des pilotes; ils ne savaient pas à quel point ils étaient proches. Lorsqu'on fait des vols en formation, cela fait partie de l'entraînement. Il faut savoir à quelle distance on se trouve. Il doit y avoir des appareils pour le savoir. Cette situation aurait pu être évitée si des mesures adéquates avaient été prises.
En regardant les données mondiales que l'on voit ici, on peut voir les tendances. On voit que le jugement et l'action du pilote viennent en tête de liste partout dans le monde, même au Canada. Pour la partie canadienne de cette étude, le Canada a été inclus. Le jugement et l'action du pilote arrivent en tête de liste; il y a ensuite les problèmes liés aux données.
À l'échelle internationale, tous les accidents étudiés suivent la même tendance. Pour ce qui est des stratégies d'atténuation, encore une fois, l'instruction et la formation ressortent comme étant les exigences principales à titre de moyens d'atténuation des risques pour la formation en simulateur; la mise en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité se classe également en haut de la liste.
Les études américaines ont donné lieu aux recommandations suivantes: systèmes de gestion de la sécurité, formation en simulateur, systèmes et équipement afin d'améliorer le jugement et l'action des pilotes et la conscience situationnelle, les informations axées sur les données à la suite des accidents, la maintenance, les recommandations en matière de réglementation et l'infrastructure.
Il y a une chose qui est très importante ici. Vous voyez que 85 p. 100 de la flotte nord-américaine se compose de petits exploitants ayant cinq aéronefs ou moins. C'est dans ce secteur que la plupart des accidents se produisent. Ce ne sont pas les grands exploitants comme CHL, CHC, Bristol et PHI; ce sont les petits exploitants. Dans toute la flotte, 85 p. 100 sont de petits exploitants et ils n'ont pas encore l'habitude d'un processus de sécurité structuré ou, autrement dit, de la mise en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité, de la formation, et ainsi de suite. Nous devons leur tendre la main et faire avancer les choses.
Je vais passer le reste en revue rapidement, compte tenu du temps. Ce diagramme montre une diminution par rapport à 2006. Ce sont des données américaines. On voit que nous avons commencé avec 9,3 par centaine de milliers d'heures de vol. Notre objectif est une diminution de 80 p. 100 — jusqu'à 1,9 — et au cours des années, les chiffres diminuent. D'après les données de 2009, on peut voir des diminutions considérables aux États-Unis. Ce graphique montre la moyenne mondiale. Nous avons commencé ici et nous voulions descendre jusqu'à 1,9. Voilà une réduction. On peut voir la tendance à la baisse.
Nous ne savons pas si c'est dû à ce que nous faisons, mais au moins, nous parlons et les gens écoutent, ce qui a des incidences. Nous n'avons pas encore commencé à mettre en oeuvre nos stratégies, de sorte que nous devrions voir plus de changements lorsqu'elles le seront.
Les données canadiennes sont incluses ici dans ce graphique, qui démontre que le Canada se situe au-dessus de la moyenne mondiale. Nous avons commencé à 11,93 par centaine de milliers d'heures de vol, de sorte qu'une diminution de 80 p. 100 nous amènerait à 2,4. Enfin, en 2006, nous étions à 12,8. Nous estimons que les chiffres pour 2009 sont de huit par centaine de milliers d'heures de vol. Sylvain parlera de cette situation de façon beaucoup plus détaillée.
Nous voulons donc établir ces filtres afin de pouvoir prévenir les accidents avant qu'ils n'arrivent sous le niveau de l'eau, comme je vous l'ai montré. Nous avons créé trois outils jusqu'à maintenant: le système de gestion de la sécurité, conçu pour les petits exploitants et visant ceux-ci, le système de surveillance des données de vol, et la formation en simulateur, avec un programme de cours.
Sylvain peux poursuivre.
Je change de sujet, pour passer à la sécurité des lignes aériennes.
Bonjour, mesdames et messieurs les membres du comité, et merci de m’avoir donné l’occasion de témoigner à la présente réunion.
L’Association du transport aérien international (IATA) apprécie le leadership dont le comité fait preuve pour s’occuper de problèmes d’une importance vitale pour la sécurité et la sûreté de l’aviation. Nous espérons que les discussions d’aujourd’hui favoriseront un dialogue très nécessaire sur l’avenir de l’inspection des passagers, non seulement au Canada, mais dans le monde entier.
Aujourd’hui, je voudrais passer quelques minutes à discuter du contrôle de sécurité des passagers et à présenter les cinq recommandations de l’IATA concernant la sûreté de l’aviation. Commençons par l’inspection.
Tandis que le comité passe en revue les événements qui ont suivi le 25 décembre, nous nous attendons à ce que beaucoup recherchent des solutions à court terme aux lacunes des contrôles de sécurité. En fait, certains changements de procédure pourraient être justifiés. Cependant, l’installation d’une nouvelle technologie dans les contrôles de sécurité ne constitue pas à elle seule une solution pour l’avenir et ne garantit pas l’amélioration de la sécurité. La meilleure technologie au monde ne peut détecter les personnes dangereuses.
Les gouvernements ne peuvent laisser la demande de nouveaux équipements masquer le fait qu’une modification à long terme doit être apportée aux contrôles de sécurité. L’IATA et ses 230 transporteurs aériens membres, américains et étrangers ont une vision de l’avenir de l’inspection des passagers fondée sur un changement de paradigme dans les principes sur lesquels repose le fonctionnement des contrôles de sécurité. Nous croyons que les contrôles de sécurité de prochaine génération doivent être axés sur la recherche des « personnes dangereuses » et pas seulement des « choses dangereuses ».
Je vous demande d’examiner un moment notre vision d’un contrôle de sécurité efficace axé sur la recherche des personnes dangereuses plutôt que des choses dangereuses: les passagers sont traités avec dignité; les bébés et les enfants dont les noms sont semblables à ceux d’adultes placés sur les listes de zones d'interdiction aérienne, de personnes sélectionnées ou de la protection des passagers traversent les contrôles de sécurité sans incident; et la possession de ciseaux à ongles d’orteil ou de coupe-ongles n’entraîne pas d’interrogatoire.
Dans ce scénario, le contrôle de sécurité de l’aéroport n’est plus la première ligne de défense, mais le lieu d’une seconde inspection. Les pièces du puzzle sont assemblées par les organismes du renseignement avant que les passagers n’atteignent les contrôles de sécurité. Les plans sont déjoués longtemps avant l’arrivée à l’aéroport. Et les responsables des contrôles recherchent dans le comportement des indices qui justifient une inspection plus approfondie du passager.
L’IATA croit que les contrôles de sécurité d’aujourd’hui fonctionnent et ne préconise pas leur remplacement immédiat par les contrôles de sécurité de la prochaine génération. Cependant, le jour où les concepts vieux de quarante ans qui en sont à la base ainsi que ceux de la quasi-totalité du système de l’aviation deviendront obsolètes approche à grands pas.
Nous estimons que les nouveaux contrôles de sécurité devraient reposer sur une détection approfondie et généralisée des comportements. Nous croyons que la présence d’agents de détection des comportements bien entraînés qui interrogeraient les passagers et observeraient leurs manières au cours du processus d’inspection renforcerait beaucoup la détection. Dans les contrôles de sécurité de demain, la détection des comportements serait renforcée en fournissant aux inspecteurs des informations contextuelles sur le voyageur pour faciliter le processus d’interrogation. Ce type de détection des comportements fondé sur le renseignement améliorerait la fidélité et l’objectivité de l’inspection.
Dans le système décrit ici, la sûreté est vue comme un ralentisseur sur la route des passagers de demain plutôt que comme une montagne. Nous croyons que les composantes de ce contrôle de sécurité sont disponibles, mais il faut posséder la volonté nécessaire pour les assembler et les implanter dans nos aéroports.
Je voudrais dire quelques mots au sujet de la technologie.
La sûreté et la technologie sont souvent confondues. L’IATA continue de craindre que les nouvelles technologies ne soient perçues comme une solution miracle pour l’avenir. Il n’y a pas de solution miracle. Quel que soit l’intérêt de ses capacités de détection, chaque technologie présente des faiblesses complémentaires.
Je relève que le comité a discuté des scanners corporels et de l’imagerie de la totalité du corps avec divers experts au cours de ses délibérations. L’IATA tient à vous mettre en garde contre la tentation de voir cette technologie comme la solution aux lacunes les plus graves dans notre sécurité. Elle ne l’est pas.
Elle est intéressante, elle a des capacités nouvelles et pourrait être utilisée pour l’inspection des passagers dans l’avenir. Cependant, ce serait une erreur d’installer ces appareils dans les aéroports et de nous reposer ensuite sur nos lauriers en nous disant que nous avons résolu les problèmes de la sûreté de l’aviation. Ce ne serait pas le cas.
Aussi, nous ne devons pas oublier le processus par lequel la technologie va du laboratoire à l’aéroport. Ce cheminement prend essentiellement trop de temps. Il est compromis par des exigences réglementaires toujours en évolution. Hélas, on obtient souvent un produit final qui ne fonctionne pas dans le monde réel.
Je voudrais maintenant dire quelques mots sur la sûreté dans les aéroports canadiens compte tenu des commentaires des transporteurs aériens membres de l’IATA.
La traversée des contrôles de sécurité est devenue le problème numéro 1 pour nos passagers. Je suis sûr que je n’ai pas besoin de rappeler au comité qu’après l’incident de décembre, les aéroports du Canada avaient les plus longs délais au monde aux contrôles de sécurité. Dans certains cas, les transporteurs aériens ont rapporté à l’IATA que les délais entraînés par les inspections atteignaient cinq heures et trente minutes. En moyenne, nous avons enregistré des délais de trois heures dans tout le Canada au cours des deux semaines qui ont suivi le 25 décembre.
Nous ne devons pas laisser une telle situation se reproduire. Les passagers méritent mieux que d’avoir à se présenter trois heures à l’avance pour un vol de cinquante minutes ou d’avoir à voyager avec un seul bagage à main.
Il y a toutefois une voie à suivre.
D’abord, le Canada et les États-Unis doivent mieux collaborer en matière de sûreté. Avec plus de 180 000 vols par année entre les deux pays, la coordination ne peut être laissée au hasard. Selon nous, en l'absence de cette coordination, les gouvernements ont laissé tomber le public voyageur après le 25 décembre.
Ensuite, les programmes pour grands voyageurs comme Nexus et Global Entry doivent être utilisés pour les inspections de sécurité. Il n’est pas logique que les passagers qui ont fait l’objet de vérifications approfondies effectuées par les organismes d’application de la loi dans le cadre de ces programmes doivent se soumettre aux mêmes contrôles de sécurité que tous les autres.
Troisièmement, l’ACSTA doit renforcer la transparence et la participation de l’industrie, entre autres en ce qui concerne les attentes concernant les niveaux de service, la dotation en personnel et la planification en cas de crise.
Nous avons un cadre pour l’avenir que j’aimerais présenter au comité: les cinq recommandations sur la sûreté de l’aviation que l’IATA a présentées à l’Organisation de l'aviation civile internationale. Notons que celles-ci s’appliquent pleinement à Transports Canada et à l’ACSTA, ainsi qu’à tous les organismes de réglementation dans le monde.
Premièrement, il faut une consultation officielle entre les gouvernements et les transporteurs aériens intérieurs et étrangers. Les organismes de réglementation doivent comprendre que l’aviation est une entreprise qui a des interconnexions à l’échelle mondiale et doivent rédiger des règlements sur la sûreté qui reflètent cette réalité.
Le plus souvent, ces règles sont rédigées sans que l’industrie ait l’occasion de formuler des commentaires ou de les examiner. Ceci prive le processus de réglementation de l’expérience et des compétences opérationnelles que l’industrie du transport aérien pourrait lui apporter. Une meilleure collaboration permettrait sans doute de faire en sorte que les mesures de sécurité soient plus efficaces et efficientes.
Deuxièmement, il faut revoir l’émission des consignes d’urgence pour mieux tenir compte de l’environnement international. Les transporteurs aériens exercent leurs activités dans le monde entier et dans des environnements extrêmement différents: il faut tenir compte de la diversité des lois et des infrastructures et de la diversité culturelle, lors de l’adoption de règlements.
Les transporteurs aériens ont une expérience pratique de ces différents environnements. Cependant, souvent, les consignes d’urgence qui imposent des mesures uniques aux transporteurs ne peuvent tout simplement pas être mises en œuvre dans certains aéroports, pays ou régions.
Troisièmement, il faut éliminer les lacunes dans l’efficience du processus de collecte des données sur les passagers. L’IATA croit que la clé de l’avenir de l’inspection consiste à tirer parti de toute l’information sur les passagers recueillie à l’heure actuelle par les gouvernements avant le début des voyages. Les données recueillies au nom des douanes et de l’immigration doivent être combinées aux données recueillies aux fins de la sûreté. Ensuite, ces données exhaustives devraient être analysées par les organismes du renseignement du gouvernement avant que la décision de permettre l’embarquement ne soit prise.
Quatrièmement, il faut renforcer les liens entre les gouvernements aux fins de l’harmonisation et de la coordination en matière de sûreté. Les gouvernements du monde doivent travailler ensemble. Un moyen de le faire consisterait à utiliser pleinement le réseau des points de contact de la sûreté de l’aviation de l’OACI. Ceci permettrait aux États touchés de déterminer si une nouvelle procédure peut être mise en œuvre dans les aéroports du monde.
Cinquièmement, à plus long terme, il faut mettre l’accent sur la mise au point des contrôles de sécurité de la prochaine génération. L’incident survenu en décembre 2009 montre que dans l’avenir, l’aviation aura besoin de mesures d’inspection des passagers de la prochaine génération plus intelligentes et plus rapides pour faire face aux menaces nouvelles et émergentes. Bien que nos systèmes d’inspection actuels nous servent bien, leurs concepts et leur architecture opérationnels sous-jacents commencent à prendre de l’âge et doivent être remplacés.
L’IATA demande aux gouvernements de commencer à envisager la mise à l’essai d’un nouveau contrôle de sécurité. Entre-temps, nous devons améliorer les capacités du système actuel pour prolonger sa durée de vie utile et accroître ses capacités de détection.
En conclusion, tandis que le comité passe en revue les événements qui ont suivi le 25 décembre, nous nous attendons à ce que beaucoup à Ottawa recherchent des solutions à court terme aux lacunes des contrôles de sécurité. Cependant, la nouvelle technologie ne peut garantir une meilleure sécurité, ne peut détecter les personnes dangereuses et n’est pas la seule solution pour l’avenir. La solution réside dans un changement de paradigme dans la façon dont nous inspectons et protégeons les passagers.
Merci.