ETHI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 28 mai 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare ouverte la séance no 154 du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique et, dans une plus large mesure, de notre Grand Comité international sur les mégadonnées, la protection des renseignements personnels et la démocratie.
Il n'est pas nécessaire de répéter la liste des pays que nous avons déjà mentionnés. Je vais présenter les témoins, rapidement.
Du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, nous accueillons M. Daniel Therrien, le commissaire à la protection de la vie privée du Canada.
Témoignant à titre personnel, nous avons M. Joseph A. Cannataci, rapporteur spécial sur le droit à la vie privée aux Nations unies.
Nous avons des problèmes avec la diffusion vidéo à partir de Malte. Nous poursuivrons malgré tout. Le greffier m'informe que nous devrons peut-être nous contenter de l'audio. Nous ferons le nécessaire.
Nous aimerions aussi accueillir la présidente de la Commission électorale fédérale des États-Unis, Mme Ellen Weintraub.
Tout d'abord, j'aimerais parler de l'ordre et de la structure de la réunion. Ce sera très semblable à celui de notre première réunion de ce matin. Nous aurons une question par délégation. Pour le groupe canadien, il y aura une question par parti, puis nous poursuivrons avec divers représentants jusqu'à ce que le temps alloué à la question soit écoulé.
J'espère que c'est assez clair. Vous verrez au fur et à mesure que nous procéderons.
Je tiens à remercier tous les membres qui ont assisté à la période de questions ce matin. Pour ma part, je remercie le Président de la Chambre d'avoir souligné la présence de la délégation.
Je donne à M. Collins l'occasion de commencer.
Allez-y, monsieur Collins.
Nous allons entendre les déclarations, en commençant par M. Therrien.
Allez-y; vous avez 10 minutes.
Mesdames et messieurs les membres du Grand Comité, je vous remercie de l'occasion de vous parler aujourd'hui.
Mon allocution portera sur trois points qui, à mon avis, sont des éléments essentiels de votre étude. Tout d’abord, la liberté et la démocratie ne peuvent exister sans la protection de la vie privée et de nos renseignements personnels. Ensuite, pour faire face aux risques posés par les préjudices numériques, comme les campagnes de désinformation, nous devrions renforcer nos lois afin de mieux protéger nos droits. Enfin, à titre d’expert de la réglementation canadienne en matière de protection de la vie privée, je ferai part de mes suggestions sur les mesures qui doivent être prises au Canada afin de mettre en place des lois modernes pour assurer la protection efficace du droit à la vie privée des Canadiens.
Je suis convaincu que ces suggestions formulées dans le contexte canadien ont aussi toute leur pertinence dans le contexte international.
Comme vous le savez, dans son rapport sur la protection des renseignements personnels et le processus politique, l'Information Commissioner's Office — le pendant de mon commissariat au Royaume-Uni — a clairement conclu que le laxisme en matière de respect de la vie privée et le microciblage par les partis politiques ont révélé des lacunes dans le paysage de la réglementation. Ces lacunes ont à leur tour été exploitées pour cibler les électeurs au moyen des médias sociaux et pour diffuser de la désinformation.
[Français]
Le scandale de Cambridge Analytica a mis en lumière des pratiques inattendues en matière d'utilisation de renseignements personnels. En plus, mon enquête sur Facebook a révélé un cadre de protection de la vie privée qui était en fait une coquille vide. Cette affaire a rappelé aux citoyens que la vie privée est un droit fondamental et une condition préalable nécessaire à l'exercice d'autres droits fondamentaux, notamment la démocratie. En fait, la vie privée n'est rien de moins qu'une condition préalable à la liberté, c'est-à-dire la liberté de vivre et de se développer de façon autonome, à l'abri de la surveillance de l'État ou d'entreprises commerciales, tout en participant volontairement et activement aux activités courantes d'une société moderne.
[Traduction]
Les membres de ce comité ne sont pas sans savoir que les incidents et les atteintes à la vie privée qui sont maintenant trop fréquents vont bien au-delà des questions de protection de la vie privée, aussi graves soient-elles. Outre les questions de protection de la vie privée et des données, les institutions démocratiques et la confiance même des citoyens dans notre processus électoral font maintenant l'objet de méfiance et de suspicion. Les organismes publics, notamment les organismes de réglementation électorale, souhaitaient que les outils numériques, comme les réseaux sociaux, puissent mobiliser une nouvelle génération de citoyens. Toutefois, ces outils sont aussi utilisés pour subvertir nos démocraties, et non les renforcer.
L'interaction entre la protection des données, le microciblage et la désinformation représente une menace réelle pour nos lois et nos institutions. Dans certaines parties du monde, on tente de répondre à ces risques en proposant différents types de règlements. Je vais en souligner quelques-uns.
Le Livre blanc du Royaume-Uni sur les préjudices numériques publié récemment propose la création d'un organisme de réglementation numérique et offre plusieurs interventions potentielles auprès des organisations commerciales pour réglementer un ensemble de problèmes. Le modèle proposé pour le Royaume-Uni consiste à ajouter un nouvel organisme de réglementation pour des plateformes numériques qui permettra d'élaborer des codes de conduite précis pour traiter des cas d'exploitation des enfants, de propagande haineuse, d'ingérence électorale étrangère et d'autres préjudices pernicieux en ligne.
En outre, plus tôt ce mois-ci, l'appel de Christchurch pour éliminer le contenu terroriste et extrémiste violent en ligne a souligné la nécessité d'assurer une application efficace des lois, une application des normes d'éthique et une coopération appropriée.
Enfin, il y a à peine une semaine, ici même au Canada, le gouvernement a publié une nouvelle proposition de mise à jour de notre loi fédérale sur la protection des données commerciales, ainsi qu'une charte numérique visant à protéger la vie privée, à contrer l'utilisation abusive des données et à assurer que les entreprises communiquent clairement avec les utilisateurs.
[Français]
Toutes ces approches reposent sur la nécessité d'adapter nos lois aux nouvelles réalités de notre monde numérique interconnecté. De plus en plus de gens comprennent que l'ère de l'autoréglementation doit cesser. La solution n'est pas de faire en sorte que les gens éteignent leur ordinateur ou cessent d'utiliser les médias sociaux, les moteurs de recherche ou les autres services numériques. Un bon nombre de ces services répondent à des besoins réels. L'objectif ultime est plutôt de permettre aux individus de profiter des services numériques pour socialiser, apprendre et, de façon générale, se développer en tant que personnes tout en demeurant en sécurité et en étant confiants que leur droit à la vie privée sera respecté.
[Traduction]
Certains principes fondamentaux peuvent, à mon avis, guider les efforts gouvernementaux visant à rétablir la confiance des citoyens. Mettre les citoyens et leurs droits au centre de ces discussions est d'une importance vitale selon moi, et le travail des législateurs devrait être axé sur des solutions fondées sur les droits.
Au Canada, le point de départ devrait être de conférer à la loi une base fondée sur les droits, conforme au statut quasi constitutionnel du droit à la vie privée. C'est le cas dans de nombreux pays, où la loi définit explicitement certains droits à la vie privée comme tels, avec des pratiques et des processus qui appuient et font appliquer ce droit important.
Je pense que le Canada devrait continuer d'avoir une loi neutre sur le plan technologique et axée sur des principes. Une loi fondée sur des principes reconnus internationalement, tels que ceux de l'OCDE, rejoint un objectif important, soit l'interopérabilité. Adopter un traité international pour la protection de la vie privée et la protection des données personnelles serait une excellente idée, mais d'ici là, les pays devraient viser l'adoption de lois interopérables.
Nous avons également besoin d'une loi fondée sur des droits, autrement dit une loi qui confère aux personnes des garanties juridiques, tout en permettant une innovation responsable. Une telle loi définirait la vie privée dans son sens le plus large et le plus véritable, par exemple le droit d'être libre de toute surveillance injustifiée, qui reconnaisse sa valeur et son lien avec les autres droits fondamentaux.
La vie privée ne se limite pas au consentement, à l'accès et à la transparence. Ces mécanismes sont importants, mais ils ne définissent pas le droit lui-même. La codification de ce droit, en plus de la nature fondée sur des principes et neutre sur le plan technologique de la législation canadienne actuelle, lui permettrait de perdurer, malgré les inexorables progrès technologiques.
Un dernier point que je souhaite soulever à cet égard est l'importance d'une surveillance indépendante. La protection de la vie privée ne peut être assurée sans la participation d'organismes de réglementation indépendants, habilités à imposer des amendes et à vérifier la conformité de façon proactive, afin de veiller à ce que les organisations soient véritablement responsables de la protection des renseignements.
Cette dernière notion de responsabilité démontrable est une mesure nécessaire dans le monde d'aujourd'hui, où les modèles d'affaires sont opaques et où les flux d'information sont de plus en plus complexes. Il est peu probable qu'une personne dépose une plainte si elle n'est pas au courant d'une pratique qui pourrait lui nuire. C'est pourquoi il est si important que les organismes de réglementation aient le pouvoir d'examiner de façon proactive les pratiques des organisations. Lorsqu'il n'est ni pratique ni efficace d'obtenir le consentement — un point soulevé par de nombreuses organisations à notre époque — et qu'on s'attend à ce que les organisations comblent les lacunes en matière de protection au moyen de la responsabilisation, ces organisations doivent être tenues de démontrer garder une responsabilité véritable.
Les solutions que je vous ai présentées aujourd'hui ne sont pas de nouveaux concepts. Cependant, comme ce comité adopte une approche globale pour faire face au problème de la désinformation, il s'agit aussi d'une occasion pour les acteurs nationaux, c'est-à-dire les organismes de réglementation, les représentants gouvernementaux et les représentants élus, de reconnaître les pratiques exemplaires et les solutions émergentes et de prendre des mesures pour protéger nos citoyens, nos droits et nos institutions.
Merci. Je répondrai maintenant à vos questions.
Merci encore, monsieur Therrien.
Vérifions si la connexion avec M. Cannataci fonctionne. Non.
Nous passons à Mme Weintraub pour 10 minutes.
Je suis désolé, madame Weintraub.
Nous venons d'entendre des commentaires. Il peut nous parler.
Je suis désolé, madame Weintraub. Nous allons l'écouter, puisque la communication est établie.
Monsieur Cannataci, la parole est à vous, pour 10 minutes.
Monsieur le président, membres du Grand Comité, merci beaucoup de l'invitation à comparaître.
Je vais essayer de m'appuyer sur les propos de M. Therrien afin d'aborder quelques points supplémentaires. Je reviendrai aussi sur certains propos tenus par d'autres témoins.
Premièrement, j'essaierai d'adopter une perspective plus internationale, même si les thèmes abordés par le Comité ont certainement une dimension mondiale. Voilà pourquoi, lorsqu'il est question d'un traité mondial... Le témoin précédent a parlé d'un traité international. Comme je vais l'expliquer, l'une des raisons pour lesquelles j'ai décidé d'examiner diverses priorités en matière de protection de la vie privée, dans le cadre de mon mandat aux Nations unies, c'est que le cadre juridique général de la protection de la vie privée et des données — un traité international à cet égard — ne relève pas spécifiquement de l'ONU. Il s'agit de la Convention 108 ou de la Convention 108+, qui a déjà été ratifiée par 55 pays. Le dernier pays à présenter un document de ratification est le Maroc, qui l'a fait hier.
Les rencontres tenues à Strasbourg ou ailleurs pour discuter des actions et de l'interopérabilité dans un cadre international comprennent déjà 70 pays, États signataires et observateurs. Les discussions portent sur le cadre offert par cet instrument juridique international. J'encourage d'ailleurs le Canada à envisager d'y adhérer. Bien que je ne sois pas un spécialiste du droit canadien, je l'étudie depuis 1982. Je pense que le droit canadien est très similaire dans la plupart des cas. Je pense que l'adhésion du Canada à ce groupe de pays de plus en plus nombreux serait un atout.
Pour ce qui est du deuxième point que je voudrais aborder, je serai bref. Je suis aussi préoccupé par la situation de la démocratie et le recours croissant à diverses méthodes de surveillance des profils sur Internet pour manipuler l'opinion des gens. L'exemple parfait qu'il faut examiner est celui de Cambridge Analytica, mais il y en a d'autres dans plusieurs autres pays du monde.
Je dois aussi préciser que les six ou sept priorités que je me suis fixées pour mon mandat à l'ONU résument dans une certaine mesure, certains des principaux enjeux de protection de la vie privée et des données auxquels nous sommes confrontés. La première priorité ne devrait pas vous surprendre, mesdames et messieurs, car elle est liée à la raison d'être de mon mandat. Il s'agit de la sécurité et de la surveillance.
Vous vous souviendrez que mon mandat à l'ONU m'a été confié dans la foulée des révélations de Snowden. Vous ne serez donc pas surpris d'apprendre que nous avons accordé une grande attention à la sécurité et à la surveillance à l'échelle internationale. Je suis très heureux que le Canada participe très activement à l'une des tribunes, le Forum international sur les mécanismes de contrôle des services de renseignement, car, comme le témoin précédent vient de le mentionner, la surveillance est un élément clé auquel nous devons accorder notre attention. J'ai également été ravi de constater les progrès importants réalisés au Canada au cours des 12 à 24 derniers mois.
La surveillance est un vaste sujet, mais puisque mes 10 minutes sont presque écoulées, je pourrais répondre aux questions à ce sujet. Pour le moment, je dirai simplement que les problèmes sont les mêmes partout dans le monde. Autrement dit, nous n'avons pas de solution appropriée en matière de compétence. Les enjeux relatifs à la compétence et à la définition des infractions demeurent parmi nos plus importants problèmes, malgré l'existence de la Convention sur la cybercriminalité. La sécurité, la surveillance et, fondamentalement, le nombre accru d'actions dans le cyberespace qui sont parrainées par des États demeurent des problèmes flagrants.
Certains pays sont plutôt réticents à évoquer leurs activités d'espionnage dans le cyberespace, tandis que d'autres les considèrent comme leur propre cour. En réalité, il est évident que les intrusions à l'égard de la vie privée touchent des centaines de millions de personnes, pas dans un seul pays, mais dans le monde entier, et ces actions sont le fait de services parrainés par un acteur ou un autre, notamment la plupart des puissances permanentes des Nations unies.
Fondamentalement, il s'agit d'un problème de compétence et de définition des limites. Nous avons préparé une ébauche d'un instrument juridique sur la sécurité et la surveillance dans le cyberespace, mais le contexte politique mondial ne semble pas propice à de grandes discussions sur ces aspects. Cela a mené à des mesures unilatérales, notamment aux États-Unis, avec le Cloud Act, une mesure qui n'obtient pas un grand appui pour le moment. Toutefois, peu importe que des mesures unilatérales soient efficaces ou non, j'encourage la discussion, même sur les principes du Cloud Act. Même si les discussions ne mènent pas à des accords immédiats, elle amènera au moins les gens à se concentrer sur les problèmes actuels.
Je passe maintenant aux mégadonnées et aux données ouvertes. Comme nous avons peu de temps, je vous invite à consulter le rapport sur les mégadonnées et les données ouvertes que j'ai présenté à l'Assemblée générale des Nations unies en octobre 2018. En toute franchise, je vous invite à ne pas regrouper les deux enjeux et à éviter de considérer les données ouvertes comme une panacée, comme le font les politiciens qui ne cessent d'en vanter les avantages. La vérité, c'est que les principes des mégadonnées et des données ouvertes sous-tendent un examen des enjeux fondamentaux clés en matière de protection de la vie privée et des données.
En droit canadien, comme c'est le cas dans d'autres pays, notamment dans les lois de tous les pays qui adhèrent à la Convention 108, le principe de la spécification des finalités selon lequel les données ne devraient être recueillies et utilisées que pour une fin précise ou compatible demeure un principe fondamental. Ce principe est toujours d'actualité dans le règlement relatif à la protection des données récemment adopté en Europe. Il convient toutefois de garder à l'esprit que souvent, ceux qui ont recours à l'analyse des mégadonnées visent à utiliser ces données à d'autres fins. Je vous invite encore une fois à consulter mon rapport et les recommandations détaillées qui s'y trouvent.
J'ai présenté un document au sujet des données sur la santé, à des fins de consultation. Le document fera l'objet de discussions en vue de la présentation de recommandations lors d'une réunion spéciale qui aura lieu les 11 et 12 juin prochains, en France. J'espère que le Canada y sera bien représenté. Nous avons reçu de nombreux commentaires positifs au sujet du rapport. Nous essayons d'établir un consensus sur les données sur la santé. J'aimerais attirer l'attention du Comité sur l'importance de ces données. On collecte de plus en plus de données sur la santé chaque jour à l'aide de téléphones intelligents, de bracelets Fitbit et d'autres dispositifs portables. Ces appareils ne sont pas vraiment utilisés comme il était prévu il y a 15 ou 20 ans.
J'aimerais attirer l'attention du Comité sur un autre document de consultation. Il porte sur le genre et la protection de la vie privée. J'espère organiser une consultation publique. Une campagne de consultation a déjà été lancée en ligne, mais j'espère tenir une réunion publique, probablement à New York, les 30 et 31 octobre. Le genre et la protection de la vie privée demeurent des sujets très importants, mais controversés. Je serais heureux que le Canada continue de contribuer et de participer aux discussions à cet égard.
À mon avis, vous ne serez pas surpris d'apprendre que parmi les cinq groupes de travail que j'ai créés, un groupe de travail étudie l'utilisation des données personnelles par les entreprises. Je me fais un point d'honneur de rencontrer les dirigeants de grandes entreprises, notamment Google, Facebook, Apple et Yahoo. Je rencontre aussi ceux de certaines entreprises non américaines, dont Deutsche Telekom, Huawei, etc. J'essaie de tenir au moins deux réunions par année. Je les réunis autour d'une table pour obtenir leur collaboration afin de trouver de nouvelles mesures de protection et de nouveaux recours en matière de protection de la vie privée, en particulier dans le cyberespace.
Cela m'amène au dernier point que je veux mentionner pour le moment. Il est lié à l'enjeu précédent concernant les entreprises et l'usage qu'elles font des données personnelles. C'est la priorité en matière de protection de la vie privée.
Les questions de protection de la vie privée me préoccupent de plus en plus, en particulier celles qui touchent les enfants, qui deviennent des citoyens numériques à un âge précoce. Comme l'a indiqué le témoin précédent, nous étudions certaines lois nouvelles et novatrices, comme celles du Royaume-Uni, non seulement la loi sur les préjudices numériques, mais aussi la loi sur les comportements adaptés à l'âge et sur la responsabilité des entreprises. J'aborderai officiellement ces questions avec les dirigeants d'entreprise lors de notre réunion de septembre 2019. J'ai hâte de pouvoir réaliser des progrès sur l'enjeu de la vie privée et des enfants, ainsi que sur celui de la responsabilisation et l'action des entreprises afin de préparer, dans les 12 à 18 prochains mois, une série de recommandations à cet égard.
C'est tout pour le moment, monsieur le président. C'est avec plaisir que je répondrai aux questions.
Merci, monsieur Cannataci.
Nous passons maintenant à Mme Weintraub.
Je veux simplement vous expliquer pourquoi les lumières clignotent. Au Parlement canadien, cela indique que des votes auront lieu dans environ 30 minutes. Les partis ont convenu qu'un député de chaque parti resterait ici et que les autres iraient voter. Nous poursuivrons la réunion avec ceux qui restent, sans nous arrêter. Ce n'est pas une alarme incendie. Poursuivons.
Puisque je suis le seul néo-démocrate, la question est de savoir, comme dirait le groupe The Clash: should I stay or should I go?
Des voix: Ha, ha!
Je voulais simplement que le fonctionnement soit clair.
Nous passons maintenant à Mme Weintraub, pour 10 minutes.
Monsieur le président, membres du Comité, merci.
Je suis la présidente de la Commission électorale fédérale des États-Unis. Je représente un organisme bipartisan, mais les opinions que je vais exprimer sont entièrement les miennes.
Je vais passer du sujet de la protection de la vie privée aux campagnes d'influence.
En mars de cette année, le conseiller spécial Robert S. Mueller III a terminé son rapport d'enquête sur l'ingérence russe dans l'élection présidentielle de 2016. Ses conclusions donnaient froid dans le dos. Le gouvernement russe s'est ingéré dans l'élection présidentielle de 2016 de manière générale et systémique. Tout d'abord, une entité russe a mené une campagne dans les médias sociaux qui a favorisé un candidat à la présidence et dénigré l'autre. Deuxièmement, un service de renseignement russe a mené des opérations d'intrusion informatique contre des entités de la campagne, des employés et des bénévoles, puis a divulgué des documents volés.
Le 26 avril 2019, au Council on Foreign Relations, le directeur du FBI, Christopher A. Wray, a lancé une mise en garde contre une campagne d'influence étrangère agressive, malveillante et intensive consistant à « utiliser les médias sociaux, les fausses nouvelles, la propagande, les fausses personnalités, etc., pour nous monter les uns contre les autres, semer la discorde et la division, et saper la foi des Américains à l'égard de la démocratie. Il ne s'agit pas seulement d'une menace liée au cycle électoral; il s'agit plutôt d'une menace permanente, 365 jours par année. Et cela a manifestement continué. »
Bien qu'il ait noté que « d'énormes progrès ont été réalisés depuis 2016 par l'ensemble des organismes fédéraux, les responsables électoraux des États et des municipalités, les entreprises de médias sociaux, notamment, pour protéger l'infrastructure physique de nos élections », il a déclaré: « Je pense que nous reconnaissons que nos adversaires vont continuer à adapter et à améliorer leur jeu. Nous voyons donc 2018 comme une sorte de répétition générale pour le grand spectacle de 2020. »
La semaine dernière, à la Chambre des représentants, un représentant du département de la Sécurité intérieure a également souligné que la Russie et d'autres pays étrangers, dont la Chine et l'Iran, ont mené des activités d'influence lors des élections de mi-mandat de 2018 et des campagnes de communication qui visaient les États-Unis pour promouvoir leurs intérêts stratégiques.
Aux États-Unis, comme vous le savez probablement, l'administration des élections est décentralisée. Cela relève des États et des administrations locales. Cela signifie que la protection des infrastructures physiques des élections relève d'autres fonctionnaires. Je parle des installations physiques gérées par les gouvernements des États et les administrations locales. Il est essentiel qu'ils continuent d'assurer ce rôle.
Cependant, depuis mon siège à la Commission électorale fédérale, je travaille tous les jours avec un autre type d'infrastructure électorale, le fondement de notre démocratie: la conviction que les citoyens savent qui influence nos élections. Cette conviction a été la cible d'attaques malveillantes de la part de nos ennemis étrangers, par l'intermédiaire de campagnes de désinformation. Cette conviction a été minée par l'influence corruptrice de fonds occultes qui pourraient masquer des bailleurs de fonds étrangers illégaux. Cette conviction a subi les assauts répétés de campagnes de publicité politique en ligne de sources inconnues. Cette conviction a été ébranlée par des cyberattaques contre des responsables de campagnes politiques mal équipés pour se défendre par leurs propres moyens.
Cette conviction doit être restaurée, mais elle ne peut l'être par la Silicon Valley. Nous ne pouvons laisser la reconstruction de cet élément de notre infrastructure électorale aux sociétés de technologie, celles qui ont conçu les plateformes que nos rivaux étrangers utilisent à mauvais escient en ce moment même pour attaquer nos démocraties.
En 2016, le contenu généré par de faux comptes établis en Russie a été vu par 126 millions d'Américains sur Facebook et 20 millions d'Américains sur Instagram, pour un total de 146 millions d'Américains alors que pour cette élection, on comptait seulement 137 millions d'électeurs inscrits.
Aussi récemment qu'en 2016, Facebook acceptait le paiement en roubles pour des publicités politiques sur les élections américaines.
Pas plus tard que l'année dernière, en octobre 2018, des journalistes se faisant passer pour des sénateurs du Sénat des États-Unis — tous les sénateurs — ont tenté de placer des annonces en leur nom sur Facebook. Facebook a accepté dans tous les cas.
Par conséquent, lorsque ceux qui faisaient partie de l'autre groupe de témoins n'arrêtaient pas de nous dire qu'ils contrôlent la situation, nous savons que ce n'est pas le cas.
Je souligne au passage que j'ai aussi invité M. Mark Zuckerberg et M. Jack Dorsey, et d'autres, à venir témoigner lors des audiences de la Commission portant sur la divulgation de la publicité sur Internet. Encore une fois, ils ne se sont pas présentés, mais sans envoyer de représentant, cette fois. Ils se sont contentés d'envoyer des commentaires écrits. Donc, je compatis avec vous.
C'est tout simplement très important pour nous tous. Aux États-Unis, les dépenses en publicité politique numérique ont augmenté de 260 % de 2014 à 2018, d'une élection de mi-mandat à l'autre, pour un total de 900 millions de dollars en publicité numérique lors des élections de 2018. C'était toujours moins que les dépenses pour la publicité radiodiffusée, mais en matière de publicité politique, le numérique est évidemment la voie de l'avenir.
Des propositions constructives ont été présentées aux États-Unis pour tenter de régler ce problème. Il y a la loi sur les publicités honnêtes, qui assujettirait les publicités sur Internet aux mêmes règles que les publicités radiodiffusées, ainsi que la Disclose Act, qui accroîtrait la transparence et la lutte contre les fonds occultes. Au sein de mon propre organisme, je tente de promouvoir une règle qui permettrait d'améliorer les avis de non-responsabilité pour toute publicité en ligne. Jusqu'à présent, tous ces efforts ont été contrecarrés.
Or, les plateformes ont heureusement tenté de faire quelque chose. Elles ont essayé d'aller plus loin en partie pour éviter la réglementation, j'en suis convaincue, mais aussi pour répondre à l'insatisfaction généralisée à l'égard de leurs pratiques en matière d'information et de divulgation. Elles ont amélioré, du moins aux États-Unis, leur processus de divulgation des commanditaires des publicités, mais ce n'est pas suffisant. Des questions reviennent sans cesse, par exemple sur les critères qui déclenchent l'obligation de publier un avis de non-responsabilité.
Peut-on se fier aux avis de non-responsabilité pour identifier correctement les sources des publicités numériques? Selon l'étude portant sur les 100 annonces des sénateurs, cela ne semble pas possible, du moins pas toujours. Lorsque le contenu est transmis, l'information d'identification est-elle transmise en même temps? Comment les plateformes gèrent-elles la transmission d'informations cryptées? La communication poste-à-poste est une avenue prometteuse pour l'activité politique, et elle soulève un lot d'enjeux potentiels. Quelles que soient les mesures adoptées aujourd'hui, elles risquent fort de cibler les problèmes du dernier cycle et non du prochain, et nous savons que nos adversaires ne cessent d'améliorer leur jeu, comme je l'ai dit, d'improviser et de modifier constamment leurs stratégies.
Je suis également très préoccupée par le risque d'un afflux de fonds étrangers dans notre système électoral, en particulier par l'intermédiaire des entreprises. Cette préoccupation n'a rien d'hypothétique. Nous avons récemment clos un cas d'application de la loi lié à des ressortissants étrangers qui ont réussi à verser 1,3 million de dollars dans les coffres d'un super PAC lors des élections de 2016. Ce n'est qu'une des méthodes employées par les ressortissants étrangers pour faire sentir leur présence et exercer une influence, même dans nos campagnes politiques au plus haut échelon.
Aux États-Unis, les cas et les plaintes de ce genre sont de plus en plus courants. De septembre 2016 à avril 2019, le nombre d'affaires dont la Commission a été saisie — ce qui comprend les violations présumées de l'interdiction visant les ressortissants étrangers — est passé de 14 à 40. Au 1er avril de cette année, 32 affaires étaient en instance. Il s'agit d'une autre préoccupation constante liée à l'influence étrangère.
Tout ce que vous avez entendu aujourd'hui indique qu'il faut réfléchir sérieusement à l'incidence des médias sociaux sur notre démocratie. La philosophie d'origine de Facebook, « bouger vite et bouleverser les choses », élaborée il y a 16 ans dans une chambre de résidence d'université, a des conséquences ahurissantes lorsque l'on considère que les médias sociaux sont peut-être en train de bouleverser nos démocraties elles-mêmes.
Facebook, Twitter, Google et autres géants de la technologie ont révolutionné notre façon d'accéder à l'information et de communiquer. Les médias sociaux ont le pouvoir de favoriser le militantisme citoyen, de diffuser de la désinformation ou des discours haineux de manière virale et de façonner le discours politique.
Le gouvernement ne peut se soustraire à sa responsabilité d'examiner les répercussions. Voilà pourquoi je me réjouis des travaux de ce comité et je suis très reconnaissante de tout ce que vous faites, car cela a des retombées dans mon pays, même lorsque nous sommes incapables d'adopter nos propres règlements alors que vous le faites, dans d'autres pays. Les plateformes ont parfois des politiques uniformes partout dans le monde, et cela nous aide. Merci beaucoup.
Je vous remercie aussi de l'invitation à participer à cette réunion. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Merci. Ma première question s'adresse à Mme Ellen Weintraub.
Vous avez mentionné les fonds occultes dans votre déclaration préliminaire. Dans quelle mesure êtes-vous préoccupée par la capacité des organismes de campagne à utiliser la technologie, en particulier la technologie de la chaîne de bloc, pour blanchir les dons non admissibles aux campagnes en les transformant en une multitude de dons modestes?
Cela m'inquiète beaucoup, notamment parce que tout notre système de réglementation repose sur l'hypothèse que les grosses sommes d'argent doivent être la préoccupation et que la réglementation doit être axée là-dessus. Sur Internet, cependant, il arrive que de très petites sommes d'argent aient une incidence considérable. Là, on ne prend même pas en compte la possible utilisation de Bitcoin et d'autres technologies pour masquer entièrement la provenance de l'argent.
Donc oui, cela me préoccupe considérablement.
Le problème avec les fonds occultes, c'est qu'on ne sait jamais vraiment qui est derrière tout cela. Au cours des 10 dernières années, environ 1 milliard de dollars en fonds occultes ont été dépensés dans le cadre de nos élections, et je ne peux pas vous dire qui est derrière tout cela. C'est la nature de la clandestinité.
Je me demandais simplement s'il y avait eu des allégations particulières ou s'il y avait lieu d'enquêter davantage sur ce qui pourrait être considéré comme une activité suspecte.
Nous recevons constamment des plaintes au sujet de fonds occultes. Le cas que je viens de décrire est l'un des exemples les plus marquants que nous ayons vus récemment. Il peut s'agir d'argent qui entre par l'intermédiaire de sociétés par actions à responsabilité limitée ou d'organisations indépendantes en vertu de l’alinéa 501(c)(4). Dans ce cas précis, la partie en cause était une filiale nationale d'une société étrangère.
Avez-vous des préoccupations quant à la façon dont des technologies comme PayPal pourraient être utilisées pour obtenir de l'argent de sources qui tentent de cacher leur identité ou même de l'étranger?
PayPal, les cartes-cadeaux et toutes ces choses suscitent d'importantes préoccupations. Si l'argent est versé directement à une campagne, les organisations ne peuvent accepter de sommes importantes sans en révéler la provenance, et elles ne sont pas autorisées à accepter des contributions anonymes importantes supérieures à un seuil par ailleurs très faible. Cependant, dès qu'il est question de groupes externes de bailleurs de fonds — les super PAC et autres groupes du genre —, elles peuvent accepter des dons de sociétés, ce qui, par définition, empêche d'en connaître la provenance exacte.
J'aimerais savoir ce que les trois témoins ont à répondre à ma prochaine question.
La transparence en matière de publicité semble être l'une des choses les plus importantes que nous devrions exiger. Au Royaume-Uni, certainement — et dans d'autres pays également, il me semble —, la loi électorale se fondait sur la compréhension de l'identité du messager. Les gens devaient révéler qui payait la publicité et qui cette dernière visait à faire connaître. Or, ces mêmes règles ne se sont pas appliquées dans les médias sociaux.
Même si les gestionnaires de plateforme affirment qu'ils exigeront la transparence, il semble que ces précautions soient faciles à déjouer, surtout dans le cas de Facebook. La personne qui se dit responsable des publicités n'est peut-être pas celle qui contrôle les données ou qui finance les campagnes. Ces renseignements ne sont vraiment pas clairs.
Je me demande si vous partagez nos préoccupations à cet égard et si vous avez une idée du genre de loi que nous pourrions devoir adopter afin d'assurer la divulgation pleine et entière de l'identité de ceux qui financent les campagnes.
Je les partage certainement. À ma connaissance, le problème vient en partie du fait que les gestionnaires de plateforme ne vérifient pas qui est derrière la publicité. Si quelqu'un affirme que Mickey Mouse la parraine, c'est ce qu'ils indiquent sur leur plateforme.
J'aimerais aussi connaître l'avis des deux autres témoins pour savoir s'ils ont des préoccupations et s'ils considèrent que nous devrions instaurer un système solide au sujet de la transparence en matière de publicité en ligne.
J'ajouterais que pour réduire le risque de mauvais usage de l'information dans le cadre du processus politique, il faut disposer d'une série de lois. Au Canada et dans un certain nombre de pays, comme les États-Unis, les partis politiques ne sont pas assujettis à la loi sur la protection des renseignements personnels, à l'échelle fédérale canadienne, du moins. Voilà encore une lacune observée dans les lois de certains pays.
Il faut instaurer une série de mesures, en ce qui concerne notamment la transparence en matière de publicité et la protection des données, ainsi que d'autres règles pour que l'écosystème des compagnies et des partis politiques soit adéquatement réglementé.
Il semble que les organismes de réglementation doivent impérativement être autorisés par la loi à effectuer des vérifications auprès des entreprises de technologie pour s'assurer qu'elles divulguent les bons renseignements.
Au Canada, nous pouvons faire enquête sur les entreprises, mais pas sur les partis politiques. Un bon régime autoriserait un organisme de réglementation à mener des enquêtes sur les deux.
Il fonctionne, merci, monsieur Collins. Je vous remercie également du travail que vous avez investi dans votre rapport, que j'ai — je dois dire — trouvé extrêmement utile dans le cadre de mon mandat.
Je dirai très brièvement que je partage les préoccupations des deux témoins précédents. Au chapitre de la transparence en matière de publicité, il est extrêmement important de connaître l'identité du messager. Je m'inquiète grandement du recours aux chaînes de blocs et à d'autres technologies de registre distribué. À dire vrai, il n'existe pas suffisamment de recherches en ce moment pour nous permettre d'examiner les problèmes concernés.
Il se trouve que le pays dans lequel je vis s'est proclamé l'île des chaînes de blocs, et nous déployons certains efforts pour légiférer en la matière, mais je crains qu'il faille effectuer encore bien du travail à ce sujet dans le monde. Si c'est possible, je proposerais au Comité de prêter son nom à des ressources sérieuses afin d'étudier le problème et de formuler des recommandations judicieuses.
Merci, monsieur Cannataci.
Nous avons dépassé le temps prévu, et certains membres doivent aller voter. Je dois donc accorder la parole à Mme Vandenbeld le plus rapidement possible.
Je tenterai de vous accorder de nouveau la parole si vous avez besoin d'une réponse plus exhaustive.
Madame Vandenbeld, vous avez la parole.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie grandement d'être ici et de faire des témoignages très instructifs.
Je voudrais poser mes questions sur les menaces étrangères à la démocratie et sur ce que j'appelle les technologies habilitantes, comme les médias sociaux et les « donnéeopoles » qui permettent aux menaces étrangères de prendre pied.
Je considère qu'à titre de législateurs, nous nous trouvons aux premières lignes de la démocratie mondiale. Si ceux d'entre nous qui sont les représentants élus de la population ne sont pas capables de résoudre le problème et de contrer ces menaces, alors que c'est vraiment à nous qu'il revient de le faire... Voilà pourquoi j'étais enchantée que le Grand Comité se réunisse aujourd'hui.
Je souligne également la collaboration que même notre comité a pu avoir avec le comité du Royaume-Uni au sujet d'AggregateIQ, qui était ici, au Canada, lors de notre étude sur Cambridge Analytica et Facebook.
Nous avons toutefois un problème: les plateformes ont beau jeu d'ignorer les pays pris individuellement, particulièrement les petits marchés, car elles sont si grandes que nous ne pouvons pas faire grand-chose contre elles. Nous devons donc unir nos efforts.
Madame Weintraub, considérez-vous que vous disposez actuellement des outils nécessaires pour que les élections américaines de 2020 ne subissent aucune influence étrangère ou en subissent aussi peu que possible?
J'hésite à répondre à cette question. Comme je l'ai souligné dans mon témoignage, je voudrais que le Congrès adopte diverses lois et j'aimerais persuader mes collègues de la commission d'accepter d'adopter certains règlements.
Je pense que nous ne sommes pas aussi solides que nous pourrions l'être, mais je sais que le département de la Sécurité intérieure, les États et les administrations locales travaillent d'arrache-pied afin de protéger les infrastructures physiques pour tenter d'éviter la manipulation des votes, laquelle constitue la plus grande crainte, bien entendu.
Sur le plan de l'influence étrangère, comme le directeur du FBI l'a indiqué, nous nous attendons à ce que nos adversaires modifient leur plan, et tant que nous ne verrons pas ce plan, nous ne saurons pas si nous sommes prêts à faire face à la menace.
Au Canada, le problème vient entre autres du fait qu'il est très difficile de savoir qui a le pouvoir de parler au cours d'une campagne électorale; nous avons donc instauré le Protocole public en cas d'incident électoral majeur. Il s'agit d'un groupe de hauts fonctionnaires qui seraient en mesure de rendre la chose publique si les organismes de sécurité décelaient une menace étrangère.
Les États-Unis ont-ils envisagé de mettre en place un protocole semblable? Est-ce une solution qui pourrait fonctionner à l'échelle mondiale?
Monsieur Cannataci, je vous demanderais de répondre également en ce qui concerne le contexte international. Je me demande si vous observez des initiatives qui pourraient, au cours d'élections, permettre à ce genre d'autorité de rendre la menace publique.
J'entendrai d'abord Mme Weintraub, puis M. Cannataci.
Je pense que ce pouvoir existe. Certains fonctionnaires ont le pouvoir de rendre ce genre de renseignements publics s'ils sont informés de la situation. Ce genre de transparence est toutefois limité pour des questions de sécurité nationale et de renseignement, bien entendu.
Monsieur Cannataci, vous avez indiqué qu'il existe certains traités internationaux sur la protection des données et des renseignements personnels, mais y a-t-il une sorte de centre d'échange des pratiques exemplaires internationales?
À lui seul, notre comité trouve d'excellents exemples de pratiques qu'il s'emploie à faire connaître, mais existe-il quelque part un endroit où les pratiques exemplaires sont échangées, mises à l'épreuve, étudiées et diffusées?
Pas à ce que je sache. Deux comités des Nations unies doivent se former bientôt, dont au moins un pourrait discuter de sujets connexes. Vous pourriez aborder la question auprès de ce qui s'appelle le groupe de travail ouvert des Nations unies, qui commencera probablement ses travaux à l'automne.
Je serais toutefois ravi de travailler avec le Comité afin d'élaborer un ensemble de mécanismes pouvant être échangés sur le plan des pratiques exemplaires, car la plupart des tentatives de manipulation électorale que nous avons observées recouraient au profilage dans un domaine ou dans un autre afin de cibler des gens pour influencer leur vote.
Je me ferais un plaisir de réaliser des travaux dans ce domaine avec le Comité, et quiconque souhaite nous faire part de pratiques exemplaires est le bienvenu.
Merci, madame Vandenbeld. Votre temps est écoulé.
Nous accorderons maintenant la parole à M. Angus pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie de témoigner, madame Weintraub.
Les Américains sont comme nos cousins germains et nous les aimons beaucoup, mais nous sommes légèrement suffisants, car nous observons ce qu'il se passe par-delà la frontière et nous nous disons que toutes ces folies ne pourraient jamais se produire au Canada. Je vous relaterai donc toute l'histoire de la fraude et de l'ingérence électorales au Canada depuis 10 ans.
Un jeune de 20 ans travaillant pour les conservateurs a mis la main sur des numéros de téléphone et a envoyé des renseignements erronés le jour du scrutin. Il a fini en prison.
Un membre de notre comité a demandé à ses cousins de l'aider à payer un stratagème électoral. Il a perdu son siège au Parlement et trouvé une place en prison.
Un ministre du Cabinet qui avait caché des dépenses de 8 000 dollars en voyages aériens au cours d'élections a dépassé la limite, perdant ainsi son poste au Cabinet et son siège.
Ces situations ont des conséquences; pourtant, on manipule les données au grand jour, et il semble que nous ne dispositions pas de lois pour intervenir ou que nous ne soyons apparemment pas certains de la manière dont nous pourrions nous attaquer au problème.
Je peux vous dire qu'en 2015, j'ai commencé à remarquer le problème lors des élections fédérales, alors que la situation est passée totalement inaperçue au pays. Notre région a été la cible d'une campagne intense contre les musulmans et les immigrantes, qui y a complètement chamboulé le discours électoral. L'information était issue d'une organisation extrémiste de la Grande-Bretagne. Je ne comprenais pas comment les gens de la classe ouvrière de ma région recevaient ces renseignements.
Je comprends aujourd'hui avec quelle rapidité le poison se répand dans le système et à quel point il est facile de cibler des gens et de manipuler les profils de données d'électeurs.
Quand le gouvernement fédéral aura de nouvelles lois de protection des élections, il pourrait s'agir des meilleures lois pour les élections de 2015, mais l'ingérence observée alors s'apparente à un vol de diligence si on la compare à celle que vous verrons lors des prochaines élections, lesquelles feront probablement office de banc d'essai pour les élections de 2020.
Au regard du recours massif aux outils servant à influencer les élections démocratiques, comment pouvons-nous instaurer des mesures pour mettre des bâtons dans les roues des mercenaires de données qui peuvent cibler chaque électeur en en exploitant les craintes?
Je ne sais même pas comment commencer à répondre à cette question.
Le système canadien diffère manifestement du nôtre. Je n'approuve pas toujours la manière dont la Cour suprême interprète le Premier amendement, mais ce dernier assure une protection extrêmement solide de la liberté d'expression. Cela a une incidence dans les domaines de la technologie, de l'argent occulte et de la politique.
S'il n'en tenait qu'à moi, je pense que la Cour suprême devrait s'inspirer un peu plus du modèle canadien, mais je n’ai aucune incidence à ce sujet.
Monsieur Therrien, je m'adresserai à vous.
C'est votre prédécesseure, Elizabeth Denham, qui a mis au jour la faiblesse de Facebook en 2008 et qui a tenté de forcer l'entreprise à se conformer. Si Facebook s'était exécutée, nous aurions peut-être évité bien des problèmes. Maintenant, en 2019, vous concluez qu'en vertu de la primauté du droit, dans votre champ de compétences, Facebook a violé la loi sur la protection des renseignements personnels.
Ce qui est très troublant, c'est que Facebook a tout bonnement refusé d'admettre nos compétences dans notre pays, affirmant que nous devions supposément lui prouver si des torts avaient été causés ou non.
Je ne suis pas certain si vous avez entendu le témoignage de M. Chan aujourd'hui, mais en ce qui concerne les droits des législateurs démocratiques d'assurer la protection des lois, comment pouvons-nous lutter contre une entreprise qui considère qu'elle peut choisir de respecter ou non les lois nationales?
Vous faites référence aux conclusions tirées par mes prédécesseurs il y a 10 ans. Il est certainement déconcertant que les pratiques observées il y a 10 ans et qui sont censées avoir été corrigées grâce à l'amélioration des politiques en matière de protection des renseignements personnels et de l'information communiquée aux utilisateurs n'ont, de fait, pas été rectifiées. Des améliorations superficielles ont été apportées, selon, nous, mais dans les faits, les mesures de protection des renseignements personnels de Facebook s'avèrent encore très inefficaces 10 ans après l'enquête du Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.
En ce qui concerne l'argument sur les compétences, je pense que la compagnie considère que puisque les citoyens canadiens n'ont pas été personnellement touchés par la manipulation de l'information à des fins politiques, le Commissariat n'a pas compétence en la matière. Nous ne nous sommes toutefois pas contentés d'examiner l'effet des pratiques de protection des renseignements personnels dans le processus politique canadien; nous avons étudié l'ensemble du régime de réglementation en matière de protection des renseignements personnels de Facebook lorsqu'il s'applique non seulement à une application de tierce partie, mais à toutes les applications semblables, lesquelles se comptent par millions.
Je me préoccupe certainement du fait que Facebook affirme que nous n'avons pas compétence en la matière, alors que nous nous sommes penchés sur la manière dont Facebook a traité les renseignements personnels de Canadiens et de Canadiennes au moyen de millions d'applications et non d'une seule.
Comment faire en sorte que Facebook ou d'autres entreprises respectent l'autorité du Canada? Eh bien, compte tenu du régime juridique qui est le nôtre, il nous reste la possibilité de les traîner devant la Cour fédérale du Canada — et c'est ce que nous ferons — pour qu'elle rende une décision sur les pratiques de Facebook, notamment en indiquant si l'entreprise doit respecter notre autorité. Nous ne doutons guère qu'elle doive la respecter, mais il faudra qu'un tribunal se prononce sur la question.
Nous aurons encore du temps vers la fin de la séance; je ferais donc mieux de poursuivre.
Nous entendrons maintenant notre témoin de Singapour pour cinq minutes.
Monsieur Tong, nous vous cédons la parole.
Madame Weintraub, merci beaucoup d'être là. En septembre 2017, vous avez écrit une lettre à la personne qui assumait alors la présidence de la Federal Election Commission, dans laquelle vous indiquiez qu'il fallait impérativement moderniser la réglementation de cet organisme pour que les Américains sachent qui paie les messages politiques qu'ils voient sur Internet.
Ai-je raison de présumer que vos inquiétudes découlent du fait que les activités étrangères influencent, voire corrompent les messages politiques, pas seulement lors d'élections, mais aussi dans la vie quotidienne des membres d'une société démocratique, et que si on leur laisse libre cours, ces activités chercheront à ébranler les institutions et le gouvernement, à influencer les élections et, au bout du compte, à renverser la démocratie?
Aurais-je raison de dire cela?
Je partage un grand nombre de ces préoccupations, et je crains vivement que ces activités visent non seulement à influencer les élections, mais aussi à semer la discorde et le chaos et à ébranler la démocratie dans de nombreux pays.
En fait, conviendriez-vous que le mode opératoire typique de tels mauvais acteurs viserait à semer la discorde quant aux questions sociales primordiales et à provoquer des problèmes qui ouvrent des lignes de faille dans la société pour que les institutions et, au final, les gouvernements soient ébranlés?
Vous avez parlé précédemment des entreprises de technologie. Je pense que vous avez dit qu'elles vous ont répondu qu'elles s'occupaient du problème. De toute évidence, c'est loin d'être le cas. Vous avez également indiqué que les entreprises ne vérifiaient pas qui se trouve derrière les publicités et les dons.
Connaissez-vous la Campaign for Accountability, ou CFA?
Après la diffusion des conclusions de Robert Mueller, je pense, une organisation sans but lucratif du nom de Campaign for Accountability s'est faite passer pour l'IRA et a très facilement acheté des publicités politiques. Elle a réussi à faire publier toute une série de publicités et de campagnes par Google pour un peu moins de 100 $US et a obtenu quelque 20 000 visionnements et plus de 200 clics avec ce genre de dépense.
Est-ce une situation qui vous préoccupe? Faudrait-il réglementer ce genre d'activité étrangère, qui montre également qu'on ne peut s'en remettre aux plateformes de médias sociaux pour surveiller la situation?
Je suis convaincue qu'il faut réglementer davantage le domaine pour que les gens puissent savoir qui est derrière les publicités qu'ils voient sur les médias sociaux.
Oui.
En ce qui concerne les règlements dont il est question dans la lettre que vous avez écrite, pourriez-vous nous dire, en 30 secondes, quels devraient être, selon vous, les principes fondamentaux sous-jacents à ces règlements pour que nous puissions mettre fin à l'influence et à la corruption étrangères dans les processus démocratiques?
Eh bien, comme je l'ai indiqué, je pense qu'il faut assurer une meilleure transparence. Quand les gens lisent des informations en ligne, ils doivent pouvoir en connaître l'origine.
Par exemple, l'Internet Research Agency de Russie a diffusé des publicités et des renseignements aux fins de propagande. Je ne connais personne qui veuille que ses nouvelles viennent d'une usine de trolls russe. Je pense que si les gens savaient que c'est de là d'où vient l'information, ils sauraient à quel point ils peuvent s'y fier.
Oui, car au bout du compte, la fausse information, ce n'est pas la liberté d'expression, n'est-ce pas?
Ma première question s'adressera à M. Cannataci. Elle concerne les lois que nous envisageons d'adopter en Irlande, lois qui pourraient éventuellement s'appliquer à l'échelle de l'Europe. Nous voulons créer un poste de commissaire à la sécurité numérique en ligne. Dans le cadre de l'élaboration de cette loi, la définition de « communication préjudiciable » donne notamment du fil à retordre à notre comité. Je me demande si vous pourriez nous aider. Existe-t-il à cet égard une pratique exemplaire ou une manière optimale de procéder?
Nous voulons éventuellement légiférer à l'échelle de l'Europe et, comme nous le savons, il faut protéger la liberté d'expression. Ces questions ont été soulevées ici. Avez-vous des observations à formuler à ce sujet?
La réponse brève est oui, je serais enchanté de vous aider. Nous sommes en train de mettre sur pied un groupe de travail précisément sur la protection des renseignements personnels, les enfants et les préjudices causés en ligne. C'est un sujet très difficile, car certains termes utilisés ne sont pas très clairs, notamment les mots « adapté à l'âge ».
Pour la plupart des enfants du monde, le niveau de maturité n'est pas lié à l'âge. Les enfants se développent à différents âges. Il faut vraiment mieux étudier le genre de préjudices dont ils peuvent être victimes en ligne. En fait, les études sur le sujet sont malheureusement rarissimes. Il en existe, mais pas suffisamment.
Je verrais certainement d’un œil favorable une approche irlandaise, européenne, voire internationale à ce sujet, car le problème transcende les frontières. Je vous remercie donc d'agir dans ce dossier.
Merci beaucoup. Je pense que nous nous préoccupons tous ici de cette définition.
J'interrogerai peut-être le commissaire à la protection de la vie privée, M. Therrien, au sujet du Règlement général sur la protection des données. Avez-vous une opinion quant au fonctionnement de ce règlement?
Comme vous le savez, le président de Facebook, Mark Zuckerberg, a demandé que le Règlement général sur la protection des données soit mis en application à l'échelle internationale. J'aimerais savoir ce que vous en pensez d'un point de vue professionnel.
Ce règlement est très récent et a été mis en oeuvre à l'échelle européenne, comme vous le savez. Que pensez-vous de ce règlement, de son fonctionnement et du fait que M. Zuckerberg en réclame l'application dans tous les pays, même s'il fallait pour cela le modifier?
Le Règlement général sur la protection des données est encore relativement nouveau; je pense donc qu'il faudra attendre encore un peu pour en déterminer les effets dans la pratique. Je considère certainement que les principes de ce règlement sont bons. Il s'agit de saines pratiques. Je pense que les divers pays devraient évidemment chercher à protéger le plus efficacement possible les renseignements personnels et les données, et s'inspirer des règles d'autres pays pour y parvenir.
Dans mon exposé, j'ai parlé de l'interopérabilité. J'ajouterais qu'il importe que les lois internationales, bien qu'elles soient interopérables et qu'elles reposent sur de bons principes comme ceux du Règlement général sur la protection des données, soient adaptées à la culture et aux traditions de chaque pays. Par exemple, le poids relatif accordé à la liberté d'expression et à la protection des données peut varier dans certains pays, mais le Règlement général sur la protection des données constitue un excellent point de départ.
D'accord, merci.
Je pense que ce sont toutes les questions que je voulais poser.
Le président: Vous disposez d'une minute.
Mme Hildegarde Naughton: Voulez-vous poser une question?
Monsieur le président, si vous le voulez bien, j'utiliserai la dernière minute, mais j'interviendrai de nouveau lors du deuxième tour pour utiliser mes cinq minutes.
Madame Weintraub, votre analyse de ce qu'il s'est passé lors des dernières élections était intéressante, particulièrement en ce qui concerne l'influence des États-nations.
Ces derniers ont comme dénominateur commun le fait qu'ils ne favorisent pas nécessairement un candidat au détriment d'un autre, mais cherchent à semer la discorde et à affaiblir les démocraties occidentales. Cela semble être un thème commun. Je pense que c'est le phénomène que nous avons pu observer lors du Brexit et des élections américaines. Comment pouvons-nous lutter contre ces interventions?
J'ai élaboré des mesures législatives s'apparentant à la loi sur la publicité honnête et à la loi sur la transparence dans les médias sociaux, fort d'objectifs très semblables. J'ai une question, à laquelle je reviendrai lors du deuxième tour, sur la manière dont nous pouvons appliquer ce genre de loi. La responsabilité incombe-t-elle à ceux qui font de la publicité ou à la plateforme?
Quelqu'un a affirmé qu'un organisme avait réussi à diffuser de fausses publicités sur les 100 sénateurs ou membres de la Chambre des représentants. Les plateformes devraient-elles être responsables des divulgations, des avertissements et des vérifications d'usage? Elles nous ont affirmé qu'elles ne pouvaient pas le faire. Devons-nous faire porter cette responsabilité à ceux qui placent les publicités ou à ceux qui les publient, si vous saisissez la distinction?
Les États-Unis ont coutume d'imposer ces obligations à ceux qui placent les publicités. Il me semble toutefois que nous pourrions exploiter les fameuses capacités d'apprentissage machine de l'intelligence artificielle de ces plateformes. Si les machines peuvent s'apercevoir que le nom sur la publicité n'a aucun lien avec la source du paiement, elle pourrait avertir un humain qui entreprendrait de vérifier si le nom figurant dans la publicité est le bon.
Ce n'est toutefois pas ainsi que nos lois fonctionnent actuellement.
Merci, monsieur le président.
Je commencerais avec M. Cannataci pour traiter de la collaboration internationale.
Nous avons indiqué plus tôt qu'il fallait collaborer à l'échelle internationale. C'est d'ailleurs l'objectif derrière la présente séance. Mais où verriez-vous des forums propices à la collaboration dans ces domaines? Cette année, par exemple, l'Allemagne accueillera le Forum sur la gouvernance d'Internet, une approche plurilatérale des Nations unies.
Voyez-vous d'autres approches?
Je vous remercie de cette question, monsieur Zimmermann.
Le Forum sur la gouvernance d'Internet est un endroit utile pour se réunir et discuter, mais nous devons faire très attention de ne pas nous en tenir aux belles paroles. Le problème, c'est que ce forum offre un endroit où les bonnes idées abondent, mais où la gouvernance est bien mince. À l'heure actuelle, les États tendent malheureusement à éluder la responsabilité de la gouvernance.
Je pense que nous verrons des pays se réunir, y compris le Parlement européen nouvellement élu, pour appliquer des mesures qui susciteront l'attention. Selon moi, les entreprises sentent le vent tourner; certaines d'entre elles l'ont d'ailleurs admis à demi-mot.
Rien n'attire l'attention comme l'argent. L'approche du Règlement général sur la protection des données, à laquelle on a fait référence, suscite une vive attention de la part des entreprises du monde, car aucune ne veut être obligée de payer une facture équivalant à 4 % de son chiffre d'affaires mondial. Je pense que cette mesure favorisera la reddition de comptes et la responsabilité. Pour répondre à la question précédente, je pense que cette démarche fera porter l'attention sur les plateformes au moins autant que sur ceux qui placent les publicités, car, comme quelqu'un l'a fait remarquer, il est parfois difficile de savoir si ces derniers sont les véritables responsables.
Merci beaucoup.
La question de l'application devait suivre, mais vous y avez déjà répondu. Merci.
Je poserais une question à Mme Weintraub également.
Nous avons maintes fois parlé des trolls et des usines de trolls, mettant beaucoup l'accent sur la publicité. Qu'en est-il des trolls à l'oeuvre au pays? Nous avons constaté que dans une certaine mesure, des activistes qui sont en fait des trolls surpuissants sont en activité en Allemagne, particulièrement dans le mouvement d'extrême droite. On n'a pas besoin de les payer; ils agissent parce qu'ils veulent soutenir leurs groupes politiques.
Cachés dans l'ombre, ils décident d'utiliser des outils pour s'attaquer à un ou à une députée ou ils appuient simplement chaque publication d'un membre d'un parti. Ils font une utilisation optimale des algorithmes, sans avoir besoin d'argent pour le faire.
Vous intéressez-vous aussi à ce problème?
Je pense que vous soulevez une autre question très sérieuse. Aux États-Unis, nous avons constaté que certaines techniques instaurées par des activistes étrangers sont maintenant adoptées par des activistes américains, car ils ont vu qu'elles fonctionnaient. Ces techniques ont le même genre d'effet préoccupant que les démarches visant à semer la discorde et à répandre parfois les discours haineux. Elles permettent d'aller chercher, dans les crevasses de la communauté, des gens qui ont des idées et qui, seuls, n'ont pas beaucoup de pouvoir, mais qui, lorsqu'ils se réunissent en ligne et diffusent ces idées, deviennent bien plus inquiétants.
Nous n'avons pas d'outils efficaces pour lutter contre eux, car quand ces trolls sont des étrangers, il est facile de dire qu'ils cherchent à s'ingérer dans nos élections, et nous savons que ce n'est pas une bonne chose; c'est toutefois une autre paire de manches quand il s'agit de nos propres citoyens.
J'aborderai peut-être une dernière question.
Nous avons de nombreux règlements régissant les médias et stipulant ce qu'une station de télévision ou de radio peut faire, mais YouTube soulève actuellement tout un débat en Allemagne, car on y trouve des gens qui joignent essentiellement un auditoire plus vaste que celui de nombreuses stations de télévision, sans pour autant être soumis à la moindre réglementation.
Est-ce un problème que vous observez également?
Nous observons certainement le phénomène des influenceurs. Je ne passe pas moi-même beaucoup de temps sur YouTube, mais quand je vois certaines de ces personnes, je ne suis pas vraiment certaine de comprendre pourquoi elles ont autant d'influence, mais elles en ont.
Cela nous ramène au modèle qui est le nôtre. Le modèle de réglementation des États-Unis se fonde sur l'argent. Quand nous avons commencé à nous intéresser à l'activité politique sur Internet, YouTube en était à ses balbutiements, et la plupart des gens présumaient qu'il faudrait évidemment payer pour diffuser une publicité afin que le public la regarde. Nous évoluons maintenant dans un monde entièrement différent où tout ce contenu est diffusé gratuitement et devient viral. Il existe très peu de mesures de contrôle dans ce domaine.
Merci.
Nous allons maintenant revenir aux parlementaires, de retour de leurs votes.
Nous accorderons la parole à M. Kent pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Ma première question s'adresse au commissaire Therrien et concerne la révélation que le gouvernement a faite en réponse à une question inscrite au Feuilleton sur les annonces d'emplois discriminatoires publiées sur un certain nombre de plateformes, et Facebook a certainement été mentionnée. Un certain nombre de ministères auraient demandé que les annonces soient microciblées par sexe et par âge.
M. Chan, président et directeur général de Facebook Canada, a répondu que cela s'était effectivement produit, mais que les protocoles avaient changé, même si ses réponses étaient quelque peu imprécises ou ambiguës. Il a indiqué que le gouvernement fédéral avait été avisé que cette façon de faire était non seulement inacceptable, mais aussi potentiellement illégale en vertu des diverses lois relatives aux droits de la personne du pays.
Pourrais-je avoir votre réaction, monsieur le commissaire?
Je pense que cette affaire fait ressortir l'importance d'avoir des lois fondées sur les droits de la personne. Nous sommes ici en présence d'une pratique qui aurait pu engendrer de la discrimination. Je pense qu'il importe que les règlements tiennent compte de l'effet net d'une pratique et règlent la question en application des droits de la personne.
Sur le plan de la protection de la vie privée, nous tendons à considérer que la protection des données et des renseignements personnels prend la forme de règles entourant le consentement, la divulgation de l'objectif et d'autres facteurs. Je pense que l'affaire Cambridge Analytica a soulevé la question de la relation étroite entre la protection de la vie privée, la protection des données et l'exercice des droits fondamentaux, y compris, dans le cas de votre exemple, les droits à l'égalité.
Je pense que pour le genre de lois dont je suis responsable au Canada, nous assurerions une protection plus efficace et plus exhaustive en définissant la protection de la vie privée en fonction non pas des mécanismes importants comme le consentement, par exemple, mais des droits fondamentaux qui sont préservés grâce à la protection des renseignements personnels.
D'accord.
Madame Weintraub, la question que je vous poserai concerne les échanges que nous avons eus ce matin concernant Facebook au sujet de la vidéo falsifiée de Mme Pelosi et de la déclaration que Facebook a faite au Washington Post, selon laquelle l'entreprise n'avait pas de politique exigeant que les publications sur sa plateforme soient véridiques.
Il s'agit manifestement d'un cas de malveillance politique. Ce n'est pas une année électorale, mais de pareils actes entachent le processus démocratique et ciblent de manière évidente la réputation d'un dirigeant politique et le leadership politique. Je me demande ce que vous pensez de l'argument de Facebook.
La plateforme retirera une vidéo publiée par quelqu'un qui révèle la vérité sous une fausse représentation, mais laissera celle publiée par quelqu'un qui est manifestement prêt à dire que c'est une falsification, se contentant de publier un avertissement indiquant que le contenu ne semble pas véridique, même si, dans le cas de la vidéo de Mme Pelosi, la vidéo a été vue par des millions de personnes depuis le déclenchement de la controverse, laquelle sert le plan d'affaires de Facebook au sujet des clics et du nombre de visionnements.
Eh bien, ce matin, j'ai entendu un grand nombre de commentaires qualifiant d'insatisfaisante la réponse donnée par Facebook. Je dois dire que j'ai aussi trouvé cette réponse insatisfaisante, mais cela soulève une question très importante, c'est-à-dire que dans ce cas-ci, ils savent que l'information est fausse, mais de façon plus générale, on peut se demander qui sera responsable de discerner le vrai du faux.
Personnellement, je ne veux pas assumer cette responsabilité, et je crois que c'est dangereux lorsque le gouvernement assume la responsabilité de décider ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas. En effet, cela ressemble plutôt au type de gouvernance autoritaire qu'on retrouve dans un roman orwellien. Je ne crois pas que je serais à l'aise d'être la personne responsable de cela ou de vivre dans un régime où le gouvernement a ce pouvoir, mais si le gouvernement n’a pas ce pouvoir, on peut se demander à qui il revient. De plus, je ne suis pas à l'aise avec le fait que des plateformes ont le pouvoir de décider ce qui est vrai et ce qui est faux.
Dans les cycles électoraux, nous avons divers règlements qui régissent la publicité, s'il s'agit de publicité payée et si cette publicité mentionne le nom des candidats. Tous les membres de la Chambre des représentants doivent se faire réélire tous les deux ans. Je présume que les membres de la Chambre des représentants sont toujours au milieu d'un cycle, mais nous avons des règlements plus sévères qui régissent cela lorsque nous approchons d'une élection. En effet, dans les 30 jours précédant une élection primaire et dans les 60 jours précédant une élection générale, encore une fois, des règlements encadrent la divulgation. Toutefois, aucun règlement n'autorise mon organisme à ordonner à une plateforme de retirer une publicité.
Merci, madame Weintraub.
Certains des membres du Comité ne poseront pas de questions, et nous avons donc un peu plus de temps que nous le pensions. Si vous souhaitez poser une autre question, veuillez en aviser le président, et j'ajouterai votre nom à la fin de la série de questions.
Nous entendrons maintenant la représentante de l'Estonie.
Allez-y.
Madame Weintraub, j'aimerais vous poser une question.
La désinformation fait officiellement partie de la doctrine militaire de la Russie depuis un certain temps. On l'utilise essentiellement comme stratégie pour diviser l'Occident. On sait également que les Russes investissent 1,1 milliard d'euros par année dans la propagande et la diffusion de leur version des faits.
Vous êtes sur le point d'avoir des élections présidentielles. En sachant ce que nous savons au sujet de la dernière période électorale, êtes-vous prête maintenant? Si les événements de la dernière campagne électorale devaient se reproduire, pensez-vous que vous seriez maintenant en mesure de régler ces problèmes?
Je ne prétendrai pas que je peux personnellement résoudre le problème de la désinformation dans nos élections. Comme je l'ai dit plus tôt, je crois que des lois et des règlements ont été rédigés et qu'ils seront adoptés pour renforcer notre position.
Je crois également que, dans l'ensemble, nous devons accorder plus d'attention aux compétences numériques. En effet, un grand nombre de personnes croient toutes sortes de choses qu'elles voient en ligne et qu'elles ne devraient vraiment pas croire. Ma fille me dit que c'est une question de génération, car les gens de sa génération sont beaucoup plus sceptiques à l'égard de ce qu'ils lisent en ligne et que ce sont seulement les gens de ma génération, qui sont un peu crédules, qui considèrent qu'Internet est une nouveauté et qui présument que tout ce qu’ils lisent est vrai.
Je ne sais pas si je suis tout à fait d'accord avec elle sur le fait que cet enjeu se résume à une question de génération, mais je crois que dans l'ensemble, la communauté des démocraties doit réellement déterminer quelle est sa résilience face à la désinformation qui, nous le savons, sera diffusée un peu partout.
Comme je l'ai dit, nous menons toujours la dernière bataille, et nous pouvons donc rédiger des lois pour encadrer ce qui s'est produit la dernière fois, mais je suis certaine que lors des prochaines élections, de nouvelles techniques auxquelles personne n'a encore pensé seront mises au point.
Mon organisme s'occupe de réglementer les fonds dans la sphère politique. C'est notre priorité, et nous essayons de déterminer d'où proviennent ces fonds. C'est ce que nous surveillons en tout temps. Nous tentons de mettre en œuvre des mesures plus efficaces en matière de transparence, afin que nos électeurs comprennent mieux d'où viennent les fonds et qu'ils connaissent l'identité des intervenants qui tentent de les influencer. C'est réellement ma priorité.
Nous venons tout juste d'avoir les élections parlementaires européennes. Selon vous, avons-nous fait face à certains enjeux que vous pourriez utiliser pour vous préparer à votre prochaine élection? Dans quelle mesure coopérez-vous avec vos collègues européens?
Je suis toujours heureuse d'obtenir des renseignements de n'importe quelle source. C'est la raison pour laquelle je suis ici. En effet, c'est un événement très enrichissant pour moi. De plus, je serai heureuse de répondre à toutes vos questions.
Observez-vous déjà certaines choses liées aux élections parlementaires européennes que vous trouvez utiles?
Nous n'avons pas encore étudié le déroulement des élections parlementaires européennes.
Mme Keit Pentus-Rosimannus: D'accord.
Avez-vous terminé? Merci.
À titre d'information, nous allons recommencer le cycle. Nous entendrons d’abord M. Erskine-Smith, et nous donnerons ensuite la parole au parlementaire suivant. Nous entendrons donc M. Erskine-Smith, M. Lucas et M. Lawless.
Allez-y, monsieur Erskine-Smith.
Merci beaucoup.
Je suis récemment allé à Bruxelles, où j'ai rencontré le contrôleur européen de la protection des données. Il y a une excellente coopération entre les commissaires à la protection de la vie privée au sein de l'Union européenne. En effet, des conférences sont organisées pour leur permettre de se rencontrer et de discuter de ces enjeux, afin de favoriser la coopération entre les organismes de réglementation.
Madame Weintraub, le même niveau de coopération a-t-il été observé dans le cadre des élections?
Nos élections sont régies par nos propres règlements. Comme je l'ai dit plus tôt, je suis heureuse d'obtenir des renseignements de toutes les sources, mais étant donné que nos règlements diffèrent de ceux d'autres pays, surtout lorsqu'il s'agit de la transparence en matière de fonds et de politique et de la façon dont nous finançons nos élections, nous utilisons notre propre processus.
Lorsque j'ai laissé entendre à un ami du Colorado et à un autre ami du Mississippi que je voulais faire de la politique et que je leur ai dit que le plafond de mon district local était de 100 000 $ canadiens, ils ont ri un bon coup.
Des voix: Oh, oh!
Avant de m'adresser à M. Therrien, je tiens à préciser que je respecte absolument le fait que les règlements américains en matière de liberté d'expression sont beaucoup plus stricts que les règlements canadiens en la matière. Toutefois, lorsque vous parlez des gens responsables « de discerner le vrai du faux », il y a tout de même des conseils sur les normes et il y a toujours, dans le cas des radiodiffuseurs… Certainement, un radiodiffuseur, lors d'une élection… Je me trompe peut-être, mais je m'attends à ce qu'il y ait des conseils sur les normes et des lignes directrices en matière d'éthique et certains principes fondamentaux qu'ils seraient tenus de respecter, et qu'ils ne diffuseraient pas n'importe quoi.
Je crois que c'est vrai dans le cas des radiodiffuseurs, surtout pour des raisons de responsabilité professionnelle. Je pense que c'est l'un des dilemmes auxquels nous faisons tous face. Lorsque nous vivions dans un monde où il y avait moins de radiodiffuseurs et qu’ils étaient tous des journalistes professionnels, qu'ils avaient reçu la formation appropriée, qu'ils exerçaient un contrôle rédactionnel sur le contenu qu’ils diffusaient et qu’ils vérifiaient plus souvent les faits, ce monde était complètement différent de celui des renseignements que nous obtenons en ligne, où tout le monde est radiodiffuseur et même producteur de contenu, et…
Donc, c'est un peu…? Car c'est une chose que nous soyons amis sur Facebook et que vous publiez quelque chose et que je voie cette publication. Toutefois, c'est très différent si mon fil d'actualité, c'est-à-dire l'algorithme employé par Facebook, s’assure que je voie cette publication en raison de mes habitudes précédentes en ligne, ou si le système de recommandations de YouTube veille à ce que je voie une vidéo que je n'aurais pas vue autrement, car je ne l'aurais pas cherchée. Ces plateformes n'agissent-elles pas grandement comme des radiodiffuseurs lorsqu'elles utilisent des algorithmes pour veiller à ce que je voie une publication et qu'elles augmentent ainsi leur impact et leur portée?
Vous parlez de quelque chose de complètement différent. Je parlais des individus qui publient leur propre contenu. En effet, en raison de la façon dont les plateformes sont régies par les lois en vigueur aux États-Unis, ces gens n'ont pas les mêmes responsabilités que les radiodiffuseurs en vertu de l'article 230 qui…
S’ils prenaient leur responsabilité sociale d'entreprise au sérieux, comme le font les radiodiffuseurs, on peut présumer qu’ils deviendraient membres d'un conseil des normes ou qu'ils créeraient un tel conseil.
En ce qui concerne la transparence en matière de publicité, notre comité a recommandé… En fait, la loi sur les publicités honnêtes serait un bon point de départ, mais je crois que ce serait seulement la première étape.
Cela vous semble-t-il logique que si je reçois une publicité en ligne, surtout en période d'élection, je puisse cliquer sur l'annonce pour vérifier qui l'a payée, manifestement, mais également pour vérifier les données démographiques selon lesquelles j'ai été ciblé, ainsi que les critères de sélection choisis par l'annonceur, que ce soit Facebook ou Google ou une autre plateforme, par exemple si la publicité a ciblé un code postal particulier ou si c'est parce que je suis âgé de 25 à 35 ans? Convenez-vous que la transparence devrait être plus détaillée?
J'en conviens, mais évidemment, une partie de ce problème est liée au fait que très peu de personnes cliqueraient sur l'annonce pour trouver ces renseignements. L'une de mes préoccupations, c'est que tout le monde affirme que pourvu qu'il soit possible de cliquer sur une annonce et de trouver les renseignements quelque part, cela devrait être suffisant. Toutefois, je crois que certains renseignements devraient être affichés bien en vue sur l'annonce pour expliquer sa provenance.
D'accord.
Ma dernière question s'adresse à M. Therrien.
Hier soir et ce matin, nous avons entendu d'excellents témoins qui ont insisté sur le fait que le modèle opérationnel était le problème fondamental dans ce cas-ci, car il encourage cette accumulation sans limites de données.
J'aimerais avoir vos commentaires sur deux idées que je vais vous présenter. Tout d'abord, comment pouvons-nous régler le problème lié au modèle opérationnel qui a été cerné? Deuxièmement, comment pouvons-nous le régler tout en respectant aussi la valeur réelle des données agrégées de différentes façons?
Par exemple, les données agrégées publiées par Statistique Canada sont très utiles pour éclairer la politique publique. Lorsque j'utilise Google Maps chaque jour, comme les renseignements sur les utilisateurs sont intégrés au système, je n'ai pas besoin de savoir où je vais en tout temps; je peux utiliser Google Maps. Ce système utilise des données qui y ont été entrées, mais dans l'intérêt public.
Comment pouvons-nous régler les problèmes posés par le modèle opérationnel tout en protégeant l'utilisation des données agrégées dans l'intérêt public?
Je crois qu'une partie importante de la solution consiste à examiner les raisons pour lesquelles les renseignements sont recueillis et utilisés. C'est une chose qu'un organisme ou une entreprise collecte et utilise des données pour fournir un service direct à une personne. Cette utilisation est tout à fait légitime, et c'est le type de pratique qui devrait être autorisé. Toutefois, c'est une autre chose lorsqu'un organisme collecte autant de renseignements, peut-être sous le couvert d'un certain type de consentement, et que le résultat final ressemble énormément à une surveillance opérationnelle.
Je crois qu'il est important d'établir une distinction entre ces deux situations. Plusieurs règles techniques entrent en jeu, mais l'idée selon laquelle nous devrions définir la confidentialité au-delà des questions mécaniques tels le consentement et d'autres questions semblables, et la définir dans le contexte du droit protégé, c'est-à-dire la liberté de participer à l'économie numérique sans craindre de faire l’objet d'une surveillance, est une partie importante de la solution.
Mon temps est écoulé, mais j'aimerais ajouter une dernière chose. Lorsqu'il s'agit de la confidentialité du point de vue de la protection des consommateurs, il est curieux que lorsque j'achète un téléphone, je n'ai pas besoin de lire les modalités d'utilisation. En effet, je sais que si le téléphone est défectueux, je peux le retourner, car des garanties tacites me protègent. Toutefois, si je veux profiter de la même protection pour chaque application que j'utilise sur ce téléphone, je dois lire les modalités. Je crois que c'est insensé.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur Erskine-Smith.
J'aimerais parler de l'ordre des questions. Voici la liste des intervenants, dans l'ordre: M. Lucas, M. Lawless, M. de Burgh Graham, Mme Stevens, M. Gourde, M. Angus et M. Kent. Pour terminer, nous entendrons M. Collins, car il aura le mot de la fin. C'est la liste que nous avons pour le moment. Si quelqu'un d’autre souhaite poser une question, veuillez lever la main. Je tenterai d'ajouter votre nom à la liste, mais il ne reste plus beaucoup de temps.
La parole est maintenant à M. Lucas. Il a cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
J'ai été frappé par quelque chose qu’a dit M. Balsillie ce matin. En effet, il a dit que le modèle opérationnel des plateformes en ligne « subvertit le libre-choix » — et le libre-choix est essentiellement le fondement de la démocratie. Je me suis souvenu — il se peut que vous trouviez cela très amusant — qu’au Royaume-Uni, les radiodiffuseurs n'ont pas le droit de faire de la publicité politique. Autrement dit, nous n'avons pas les merveilleuses publicités que j'ai vues aux États-Unis, et qui sont également présentes dans d'autres pays, j'en suis sûr.
Croyez-vous qu'il y a lieu d'interdire les publicités politiques payantes en ligne sur ces plateformes?
Je ne vois pas du tout comment une telle mesure pourrait résister à un examen constitutionnel de notre Cour suprême.
Oui.
Monsieur Cannataci, si vous me permettez de vous poser une question, de nos jours, la publicité politique utilise-t-elle la radiodiffusion partout dans le monde? Y a-t-il des pays dans lesquels les radiodiffuseurs n'ont pas le droit de diffuser de telles publicités?
Je vous remercie de votre question, monsieur Lucas.
Je dois répondre que les pratiques varient selon les pays. Certains pays ont adopté un modèle qui ressemble plus à celui des États-Unis. D'autres ont adopté un modèle qui ressemble à celui du Royaume-Uni. Toutefois, nous constatons que dans un grand nombre de pays qui ont des lois plus restrictives, de nombreuses personnes et de nombreux partis politiques utilisent en réalité les médias sociaux pour contourner ces lois d'une façon qui n'a pas été prévue adéquatement dans le cadre de certaines lois.
Avec la permission du président, j'aimerais profiter de l'occasion, puisqu'on m'a posé une question, de mentionner une notion qui, selon moi, touche à tous les enjeux que nous avons abordés ici. Cela revient à la déclaration faite par Mme Weintraub sur les personnes qui seront responsables de discerner le vrai du faux. Dans plusieurs pays, cette valeur est toujours très importante. C'est un droit de la personne fondamental qui se trouve à l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel un grand nombre des pays représentés autour de la table, sinon tous, ont adhéré.
Dans le même article qui parle de la confidentialité, il y a une disposition sur la réputation, et les gens [Difficultés techniques] se soucient énormément de leur réputation. Il s'ensuit que dans de nombreux pays, y compris la France — je crois qu'on a également eu cette discussion au Canada —, les gens cherchent essentiellement à nommer une personne responsable d'établir la vérité. Cette personne peut porter le titre de commissaire d'Internet ou d'ombudsman d'Internet — on peut lui donner le nom que l'on veut —, mais en réalité, les gens veulent un recours, et ce recours consiste à s'adresser à une personne qui supprimera les publications qui contiennent de fausses informations.
Mais nous ne devons pas oublier — et cela s'applique également aux préjudices en ligne, notamment la radicalisation — qu'une grande partie des préjudices sur Internet sont causés pendant les 48 heures qui suivent la publication, et la suppression rapide d'une publication est donc le recours concret le plus important. De plus, dans de nombreux cas, même si on devrait respecter la liberté d'expression, on peut mieux respecter la vie privée et la réputation d'une personne si une publication est rapidement supprimée. Ensuite, si la personne responsable dans l'instance concernée juge que la publication a été injustement supprimée, elle pourra être rétablie. Autrement, il nous faut un recours.
Merci.
Je me rends compte, pour revenir au point que faisait valoir M. Smith, que lorsque j'ai créé un compte sur Facebook, je n'ai pas consenti à recevoir des publicités politiques ciblées, peu importe leur source. Je ne savais pas que cela faisait partie de l'entente. Ce n'est pas la raison pour laquelle les gens créent un compte sur Facebook.
Il me semble qu’au Royaume-Uni, nous avons réussi, à l'exception de quelques mauvais moments, à survivre comme démocratie sans la présence de publicités politiques à la télévision. Je cherche à restreindre un domaine particulier de la publicité, et je suis appuyé par le fait qu'on a insisté, ce matin, sur la façon dont le contrôle des données élimine réellement le libre-choix des gens dans ce processus.
À votre avis, dans quelle mesure les gens comprennent-ils la réglementation de l'information? Selon vous, comprennent-ils que c'est ce qui se passe actuellement?
Tout d'abord, permettez-moi de dire que de nombreuses personnes, aux États-Unis, adoreraient avoir un système dans lequel elles ne reçoivent pas de publicités politiques. Les gens n'aiment pas vraiment ce type de publicité.
Je crois que vous avez apporté une nuance très importante, et c'est que ce n'est pas… Notre Cour suprême n'autoriserait jamais une interdiction complète de la publicité politique, mais…
D'accord, mais vous parlez de l'utilisation des données personnelles des gens pour les microcibler, et il me semble que c'est un problème complètement différent. Je ne suis pas tout à fait certaine que cela ne résisterait pas à un examen constitutionnel.
Monsieur Lucas, pourriez-vous terminer très rapidement? Je déteste vous interrompre, car vous avez parcouru beaucoup de chemin.
Très brièvement, j'aimerais revenir sur un enjeu mentionné par M. Zimmermann. Il a parlé des trolls sur Internet. Les groupes fermés représentent aussi un énorme problème, car nous n'avons pas les renseignements nécessaires, et je pense que nous devons nous concentrer davantage sur ce problème.
Merci, monsieur le président. J'ai deux ou trois autres questions et observations.
Pour revenir sur quelque chose que disait, je pense, M. Erskine plus tôt, il s'agit souvent de savoir si ces plateformes sont des éditeurs autorisés ou des hôtes passifs qui affichent le contenu qui est placé devant eux. Je crois que l'un des arguments qui appuient le fait qu'il s'agit d'éditeurs et qu'ils ont ainsi une responsabilité juridique plus importante, c'est que ces plateformes ont des modérateurs et des politiques en matière de modération, et des gens prennent donc des décisions en temps réel sur ce qui devrait et ne devrait pas être publié. De plus, il y a manifestement des algorithmes de ciblage. Je crois que c'est une question intéressante, et c'est une observation que je tenais à formuler.
En ce qui concerne l’autre point que je ferai valoir, nous parlions plus tôt d’Etats-nations et de différents actes d'hostilité. Je présume que le sujet qui fait actuellement les manchettes, c'est la révélation la plus récente sur le gouvernement chinois et l’interdiction qui frappe Huawei, et le fait qu'au cours des derniers jours, Google a annoncé, je crois, une interdiction d'appuyer les combinés téléphoniques d’Huawei. Mais je trouve cela frappant, car je pense que Google nous suit dans nos déplacements par l'entremise de Google Maps et de toutes les autres applications grâce à nos téléphones. Je crois que j'ai lu quelque part qu'une personne qui marche en ville avec son téléphone dans la main ou dans la poche consomme habituellement, chaque année, 72 millions différents points de données. La différence réside peut-être dans le fait que Google a des modalités que nous sommes censés accepter, et que ce n'est pas le cas pour Huawei, mais les deux entreprises font la même chose, au bout du compte. Je tenais seulement à faire cette réflexion.
En ce qui concerne le cadre législatif, encore une fois, comme je l'ai mentionné plus tôt, j'ai tenté de rédiger des mesures législatives et de faire un suivi de certains de ces enjeux, et je suis arrivé à la loi sur les publicités honnêtes. L'un des enjeux et l'un des défis auxquels nous faisons face consiste à atteindre un équilibre entre la liberté d'expression et, je présume, la protection des électeurs et de la démocratie. Je déteste toujours criminaliser certains comportements, mais je me demande à quel moment il est nécessaire de le faire.
Je suppose qu'au départ, lorsque j'ai rédigé cette mesure, j'ai tenu compte du fait que selon moi, on peut publier ce que l'on souhaite, pourvu qu'on fasse preuve de transparence au sujet de l’auteur des paroles publiées, et des entités qui soutiennent, gèrent ou paient la publication, surtout s'il s'agit d'une publication commerciale payante. En ce qui concerne les robots Web et les faux comptes, et ce que j'appellerais les faux comptes à l'échelle industrielle, où de nombreux robots Web ou plusieurs centaines ou milliers d'utilisateurs sont manipulés par un seul utilisateur ou une seule entité pour ses propres fins, je crois qu'il s'agit probablement d'activités criminelles.
C'est donc une question pour Mme Weintraub.
Je suppose qu’une question connexe concerne un problème avec lequel nous sommes aux prises en Irlande et avec lequel sont aux prises de nombreux autres pays, je présume. Qui est responsable de maintenir l'ordre dans ce domaine? Est-ce la responsabilité d'une commission électorale? Si oui, cette commission électorale dispose-t-elle des pouvoirs nécessaires pour appliquer la loi et mener des enquêtes? Avez-vous des ressources en matière d'application de la loi à votre disposition? S’agit-il simplement des services de police de l’État? Ajoute-t-on à cela un commissaire à la protection des données? Nous avons différents types d'organismes de réglementation, mais cela peut devenir une véritable soupe à l'alphabet, et il peut être difficile de déterminer avec précision les personnes responsables. De plus, même si nous avons une personne responsable, cela peut être difficile, car cette personne n’a pas toujours les ressources nécessaires pour prendre les mesures qui s'imposent.
Ma première question est donc la suivante: la criminalisation est-elle un pas de trop? Où établit-on les limites? Deuxièmement, s'il y a criminalisation et qu'une enquête est exigée, quels types de ressources avez-vous à votre disposition ou quels types de ressources sont nécessaires, à votre avis?
Je répète que je me spécialise dans le système américain; je peux donc me prononcer en ce sens. Nous sommes un organisme d'application de la loi. Nos champs de compétences sont l'argent et la politique, et nous avons des pouvoirs d'exécution civile. Nous avons le pouvoir d'envoyer une assignation à témoigner. Nous pouvons mener des enquêtes. J'estime que certains de nos outils d'application de la loi pourraient être renforcés, mais nous avons aussi la capacité de saisir d'un dossier le département américain de la Justice si nous pensons qu'il y a des infractions criminelles, qui sont en gros des violations de la loi commises de manière délibérée et en connaissance de cause.
Pour revenir à quelque chose que vous avez dit plus tôt, en ce qui concerne notre système de réglementation, je ne crois pas que les droits garantis par le premier amendement s'appliquent aux robots. Ce ne sont pas des personnes. Je n'ai donc aucun problème avec... Je ne comprends pas pourquoi ces entreprises axées sur les technologies intelligentes ne sont pas en mesure de détecter les robots et de les retirer de leurs plateformes. Je ne crois pas que cela soulèverait d'inquiétudes par rapport au premier amendement, parce que ce ne sont pas des personnes.
En fait, c'est un bon point. Je vais le retenir pour l'utiliser plus tard.
Je crois que j'ai le temps de poser ma prochaine question. Il y a une autre facette de la question que nous voyons en Irlande et partout dans le monde, je présume. Nous l'avons aussi entendu aujourd'hui. En raison du raz-de-marée de fausses nouvelles et de désinformation, nous avons encore plus la responsabilité de soutenir — j'ose dire — les plateformes traditionnelles et les médias d'information, soit ceux que nous pourrions qualifier de médias d'information indépendants et de qualité.
Il y a un problème concernant la manière d'établir ceux qui décident ce qu'est un média indépendant et ce qu'est la qualité, mais je crois avoir entendu parler au Parlement canadien lorsque nous avons regardé la période des questions il y a quelques heures de l'une des approches que nous examinons. J'ai entendu des échanges similaires. L'une des solutions que nous envisageons, c'est que l'État subventionne ou parraine les médias indépendants. Cela ne viserait pas un média d'information en particulier, mais cela pourrait servir à un comité de diffuseurs ou à la création d'un fonds pour soutenir la couverture des affaires qui touchent les Autochtones ou une couverture médiatique indépendante.
Il peut s'agir de médias en ligne, de médias radiotélévisés ou de la presse écrite. C'est une manière d'assurer la présence et la promotion du quatrième pouvoir traditionnel et des freins et des contrepoids traditionnels de la démocratie, mais j'estime que cela permettra de le faire de manière intègre et soutenue, de nous demander à tous des comptes et de faire contrepoids aux fausses nouvelles qui nous inondent. Toutefois, c'est difficile à mettre en place, parce qu'il faut établir ceux qui déterminent si un média mérite d'être parrainé et subventionné ou s'il ne le mérite pas. Si vous pouvez démontrer que vous avez une véritable plateforme locale et légitime, je présume que vous y serez admissible. C'est une approche que nous examinons; cette option a fonctionné ailleurs, et elle semble fonctionner dans d'autres endroits dans le monde.
Madame Weintraub, pour donner suite à votre commentaire, si les droits garantis par le premier amendement ne s'appliquent pas aux robots, pourquoi est-ce le cas pour l'argent?
Eh bien, l'argent n'a pas de droits garantis par le premier amendement. Ce sont les gens qui dépensent cet argent qui ont des droits garantis par le premier amendement.
J'aimerais qu'une chose soit bien claire. Je n'aime pas vraiment la jurisprudence de la Cour suprême des États-Unis. J'adopterais volontiers la jurisprudence canadienne à cet égard, si je le pouvais, mais ce n'est pas du tout de mon ressort.
D'accord. Bref, dois-je comprendre que vous n'êtes pas nécessairement d'avis que l'arrêt Citizens United était une bonne décision?
D'accord.
Comme vous l'avez mentionné, le travail d'une commission électorale est de surveiller le financement des élections. Si une entreprise permet délibérément l'utilisation de son algorithme ou de sa plateforme pour influer sur les résultats des élections, considérerez-vous cela comme une contribution non monétaire réglementée?
C'est intéressant. Ma prochaine question est liée à cela.
Le PDG de Facebook détient la majorité des actions avec droit de vote de la société. Il détient donc les pouvoirs absolus au sein de cette entreprise. Sur le plan juridique ou réglementaire, qu'est-ce qui empêche cette entreprise de décider d'accorder son soutien ou d'intervenir comme elle l'entend lors d'élections?
Une société ne peut pas directement faire de contributions à un candidat, et cela inclut les contributions en nature.
Je m'excuse, mais je ne me rappelle plus la personne qui a lancé cette hypothèse. Une question a été soulevée plus tôt concernant la possibilité que Mark Zuckerberg brigue la présidence américaine et qu'il utilise tous les renseignements qu'a accumulés Facebook pour l'aider dans sa campagne. Ce serait une terrible infraction aux lois encadrant le financement électoral, parce que ces renseignements ne lui appartiennent pas. C'est à la société Facebook qu'appartiennent ces renseignements.
Le problème à cet égard est qu'en raison d'un jugement de la Cour suprême des États-Unis les sociétés peuvent faire des contributions à des supercomités d'action politique, ou les Super PAC, qui sont censés agir de manière indépendante des campagnes électorales. Si un Super PAC servait les intérêts d'un certain candidat, une société, comme Facebook, pourrait faire des contributions illimitées à ce supercomité pour l'aider dans son travail.
Je vois.
Je n'ai pas beaucoup de temps. J'aimerais poser une petite question à M. Therrien.
Par rapport au point soulevé plus tôt par M. Lucas, dans le monde des médias sociaux, sommes-nous des clients ou sommes-nous le produit?
Nous entendons souvent dire que, si c'est gratuit, vous êtes le produit, et cet adage a certainement un bon fond de vérité.
Lorsqu'une entreprise de surveillance ajoute des balises à un site qui ne lui appartient pas, avec le consentement du propriétaire du site — par exemple, Google Analytics est omniprésent sur Internet et a le consentement du propriétaire du site, mais pas celui des utilisateurs finaux —, considérez-vous que l'entreprise a le consentement implicite de recueillir ces données?
Si j'ai un site Web et que j'utilise Google Analytics, je consens à ce que Google utilise mon site Web pour recueillir des données, mais les utilisateurs de mon site Web ne savent pas que Google recueille des données sur mon site Web. Y a-t-il un consentement implicite ou est-ce illégal de ce point de vue?
C'est probablement l'une des lacunes du consentement; les conditions d'utilisation font en sorte que l'utilisateur y consente. Voilà pourquoi je dis que la protection de la vie privée ne se limite pas aux règles encadrant le consentement; cela vise aussi l'utilisation des renseignements et le respect des droits. Nous ne devrions pas considérer le consentement comme la panacée de la protection de la vie privée et des données.
Madame Weintraub, vous avez dit quelque chose de très intéressant, et je ne sais pas si nous avons déjà établi cette notion auparavant.
Dans l'hypothèse où M. Zuckerberg briguerait la présidence américaine, Facebook ne pourrait pas lui donner accès aux renseignements, parce que ce serait une immense contribution en nature. Avons-nous établi qui est le propriétaire de ces renseignements? Personne n'a consenti à la diffusion de ces renseignements, et je me demande donc si ces renseignements appartiennent à Facebook.
C'est une question très intéressante, mais je ne suis pas certaine que ce soit lié au financement des campagnes. Cela dépasse peut-être mon expertise.
Les règles concernant la propriété des renseignements ne sont pas très claires.
Du point de vue de la protection de la vie privée et des données, je crois que cela vise le contrôle et le consentement, mais la question de la propriété de ces renseignements n'est pas très claire au Canada.
Merci.
Les trois derniers intervenants sont Mme Stevens, M. Gourde et M. Angus, puis nous pourrons conclure la réunion.
Merci, monsieur le président.
Madame Weintraub, comme vous avez évidemment une expertise et un intérêt professionnels dans ce domaine, croyez-vous que les habitants du Royaume-Uni auraient davantage confiance en l'intégrité de nos élections et de nos référendums si nous avions une enquête, comme celle réalisée par M. Mueller, concernant le référendum de 2016 sur l'Union européenne?
Vous connaissez vos compatriotes mieux que moi. Je crois que vous êtes bien placée pour juger de ce qui contribuerait à renforcer leur confiance.
Ce sont des événements particuliers qui ont mené au déclenchement de l'enquête Mueller.
Voyez-vous des chevauchements entre ces événements ou des tendances qui se dégagent concernant ce qui s'est passé aux États-Unis et ce que vous savez du référendum sur l'Union européenne?
D'accord. Merci.
Nous aurons peut-être dans un avenir proche un deuxième référendum ici. Nous aurons peut-être un autre vote. Nous aurons peut-être même très bientôt des élections générales.
Quelles seraient vos recommandations concernant l'ingérence étrangère au Royaume-Uni et au gouvernement par le biais de contributions financières? À l'heure actuelle, je crois que nous reconnaissons de manière générale que nos lois électorales ne sont pas adaptées au monde numérique.
Comme je l'ai mentionné, je crois que cela concerne en grande partie la transparence. Avez-vous la capacité de savoir ceux qui se cachent derrière l'information que vous voyez en ligne et dans les autres médias?
Y a-t-il des endroits dans le monde où vous estimez que les lois électorales sont actuellement vraiment bonnes et adaptées aux fins voulues, compte tenu de tout ce dont nous avons parlé aujourd'hui par rapport à l'ingérence numérique? Y a-t-il un pays dans le monde qui serait un vrai bon modèle?
Je continue de chercher. J'assiste à des conférences à l'étranger, et j'espère y trouver quelqu'un qui aura la solution parfaite. Toutefois, je dois dire que je ne l'ai pas encore trouvée.
Si vous la trouvez, faites-le-moi savoir, parce que je serais aux anges de trouver enfin un pays qui a trouvé une solution.
J'aimerais poser la même question à M. Cannataci.
Connaissez-vous un endroit dans le monde que nous pourrions examiner pour en tirer des pratiques exemplaires en matière de lois électorales adaptées au monde numérique?
La réponse courte est non.
Je suis dans le même bateau que Mme Weintraub. Je cherche toujours la solution parfaite, mais je trouve seulement, au mieux, des demi-mesures.
Madame Stevens, nous resterons en contact à ce sujet, et je serai très heureux de vous communiquer l'information dès que nous trouverons quelque chose.
Vous avez deux minutes, madame Stevens.
Mme Jo Stevens: Ce sera tout.
Le président: D'accord.
La parole est maintenant à M. Gourde.
Vous avez cinq minutes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Ma question va porter sur un mot qui m'a semblé important tout à l'heure, soit le mot « responsabilité ».
Ce matin, nous avons reçu des représentants de plateformes numériques. Ils semblaient balayer du revers de la main une grande part de leur responsabilité.
Cela m'a choqué. Je pense qu'ils ont une responsabilité quant à leurs plateformes et aux services qu'ils offrent. Ils n'ont pas été capables de prouver, malgré des questions très précises, qu'ils ont le contrôle de leurs plateformes, dans le cas de diffusion par les utilisateurs de fausses nouvelles ou propagande haineuse qui peuvent vraiment changer le cours des choses et influencer énormément de personnes.
Les utilisateurs, ceux qui achètent une publicité, ont aussi une responsabilité. Quand on achète de la publicité, il faut que celle-ci soit juste et correcte, surtout en campagne électorale, mais également en tout temps.
Si, un jour, il y a une réglementation internationale, comment devrait-on déterminer la responsabilité des deux parties, soit celle des plateformes numériques et celle des utilisateurs, pour bien les encadrer?
Je pose la question à quiconque veut répondre.
Pour ce qui est de la protection des données ou de la vie privée, vous mettez le doigt sur un concept qui, à mon avis, est fondamental, soit celui de la responsabilité ou de la responsabilisation. Nous vivons dans un monde où la collecte de renseignements est massive et où les renseignements sont utilisés par les compagnies dans plusieurs buts autres que le but premier pour lequel ils ont été obtenus.
Les compagnies nous disent souvent, en partie avec raison, que le modèle de consentement ne protège pas efficacement la vie privée des citoyens ou des consommateurs. Leur suggestion consiste à remplacer le consentement, lorsqu'il est inefficace, par une responsabilisation accrue des entreprises. Je pense que cette proposition doit être accompagnée d'une véritable démonstration du fait que les entreprises sont responsables et qu'elles ne font pas simplement prétendre l'être. C'est pourquoi il est important que les organismes de réglementation s'assurent que les compagnies sont véritablement responsables.
[Traduction]
J'ai l'impression que ces plateformes occupent un secteur hybride. Ces entreprises affirment ne pas être des diffuseurs. Elles affirment qu'elles offrent seulement la plateforme et qu'elles ne sont pas responsables du contenu. Or, elles semblent croire qu'elles ont une certaine responsabilité, parce qu'elles prennent des mesures. Certains peuvent se dire que ces mesures sont inadéquates, mais ces entreprises prennent des mesures pour assurer une meilleure transparence.
Pourquoi le font-elles? Je crois que c'est parce qu'elles savent qu'elles ne peuvent pas s'en tirer en faisant tout simplement fi de ce problème. Ces entreprises ont une certaine part de responsabilité dans un sens plus général, voire dans un sens juridique, indépendamment du pays. Nous pouvons nous demander si ces entreprises auraient une plus grande part de responsabilité si des endroits dans le monde, individuellement ou globalement, décidaient que ces entreprises sont véritablement des diffuseurs et qu'elles doivent maintenant se comporter comme des diffuseurs. C'est une question pour les législateurs et non les organismes de réglementation.
[Français]
Oui, merci.
Je partage tout à fait l'avis de M. Therrien, mais j'aimerais ajouter quelque chose.
[Traduction]
Si je devais dire une chose par rapport à cet aspect, je dirais que, indépendamment du groupe qui décidera si quelque chose doit être retiré ou pas ou si c'est vrai ou faux, cela demandera de l'énergie et des ressources. Par ailleurs, ces ressources ne sont pas gratuites, et je regarde qui reçoit l'argent. Ce sont en grande partie les entreprises.
Il y aura bien entendu des cas où nous pourrons facilement dire que c'était le parti ou le commanditaire ou un autre qui a acheté cette publicité. Autrement, au bout du compte, je crois qu'un nombre croissant d'endroits dans le monde s'entendront pour dire qu'ils estiment que ce sont les entreprises qui reçoivent l'argent et qu'elles ont donc les moyens d'assurer un certain contrôle. Nous l'avons vu lorsque, par exemple, Facebook a eu besoin de personnes parlant la langue du Myanmar pour assurer un contrôle sur les propos haineux dans ce pays. Je crois que nous verrons de plus en plus d'endroits dans le monde et peut-être d'ententes internationales qui attribueront la responsabilité et l'obligation financière par rapport à ce qui se passe sur les plateformes aux individus qui reçoivent l'argent, soit normalement les plateformes elles-mêmes dans une large mesure.
Merci, monsieur le président.
Merci.
La parole est à vous, monsieur Angus. Vous avez cinq minutes, et nous entendrons ensuite M. Collins, et je prendrai aussi la parole.
Merci, monsieur le président.
Nous avons entendu une déclaration extraordinaire de Google aujourd'hui. Nous avons appris que la société a décidé de manière volontaire en 2017 de cesser d'espionner nos boîtes courriel. Elle a fait tout un geste magnanime, mais elle n'était pas prête à s'engager à ne plus nous espionner dans l'avenir, parce qu'elle peut s'en servir pour faire toute sorte de choses.
Je ne me souviens même plus de 2016; c'est très loin, mais l'année 2018 a changé nos vies à jamais. Je me rappelle que le Comité étudiait le consentement et que nous nous demandions si le consentement devrait être clair ou s'il devrait être renforcé et inclure moins de charabia.
Je ne me rappelle pas avoir donné mon consentement à Google pour espionner ma boîte courriel ou celle de mes jeunes filles. Je ne me rappelle pas avoir reçu une quelconque notification sur mon téléphone pour m'expliquer que, si j'activais la localisation sur mon appareil pour trouver une adresse, Google pourrait me suivre en permanence partout où j'irais et que l'entreprise serait au courant de tout ce que j'ai fait. Je ne me souviens pas d'avoir consenti à ce que Google ou tout autre moteur de recherche surveille tout ce que je fais. Or, à mon avis, à titre de législateurs, nous nous sommes fait embobiner par Zuckerberg pendant que nous débattions du consentement et des choses auxquelles les consommateurs peuvent consentir et que nous faisions valoir qu'il suffit de ne pas utiliser un service si vous ne l'aimez pas.
Monsieur Therrien, vous avez dit quelque chose de très profond la dernière fois que vous avez témoigné devant le Comité au sujet du droit des citoyens de mener leur vie sans être surveillés. C'est de cet aspect dont nous devons discuter. Je crois que les échanges sur le consentement ne sont plus à propos depuis 2016, je crois que nous devons affirmer que nous ne consentons pas à le donner aux entreprises. S'il n’y a aucune raison pour ce faire, elles ne peuvent pas l'avoir. Il faut que ce soit le modèle d'affaires de l'avenir: la protection de la vie privée et de nos droits.
Pour ce qui est de la question d'inclusion ou d'exclusion, je ne fais aucunement confiance à ces entreprises à cet égard.
Nous avons entendu M. Balsillie, Mme Zuboff et d'autres spécialistes aujourd'hui et hier. Est-ce possible au Canada, avec notre petit pays de 30 millions d'habitants, d'adopter une loi claire qui prévoit qu'une entreprise ne peut pas recueillir de renseignements personnels à moins d'avoir une raison claire et expresse de le faire? J'ai l'impression que c'est en partie ce que prévoit déjà la LPRPDE, soit notre loi sur la protection des renseignements personnels, mais je me demande si nous pouvons adopter de très graves conséquences financières pour les entreprises qui dérogent à cette règle. Pouvons-nous prendre des décisions au nom de nos citoyens et des droits privés?
Bien sûr, la réponse à cette question est oui. Je pense que le consentement a sa place dans certaines circonstances où la relation est bilatérale entre un fournisseur de services et un consommateur, où le consommateur comprend l'information nécessaire pour que le service soit offert. Dans le contexte de l'économie numérique actuelle, nous sommes allés bien plus loin. L'information est alors utilisée à bien des fins, souvent avec le consentement réputé du consommateur.
Bien que le consentement ait sa place, il a ses limites, et c'est pourquoi je dis qu'il est important que la loi sur la protection des renseignements personnels définisse la protection des renseignements personnels pour ce qu'elle est. Elle n'est pas du tout limitée à la question de forme du consentement. C'est un droit fondamental lié à d'autres droits fondamentaux. Quand, malgré le consentement réputé, la pratique d'une entreprise a pour effet de traquer le consommateur en vue de connaître la localisation de ses données ou le contenu des messages qu'il envoie, je pense que la loi devrait stipuler qu'il est sans importance qu'il y ait ou non consentement. Ce qui est en jeu est le non-respect de la vie privée des gens, soit la surveillance de la personne en question, et c'est une violation en tant que telle qui devrait entraîner des sanctions importantes. C'est possible de le faire.
Merci.
Ma dernière question porte sur la technologie de reconnaissance faciale. Un article publié dans le Toronto Star aujourd'hui rapporte que les services de police utilisent cette technologie. San Francisco a essayé de l'interdire, et d'autres administrations essaient au moins de la mettre en veilleuse.
La technologie de reconnaissance faciale vient enfreindre le droit d'un citoyen de pouvoir se rendre dans un lieu public sans être surveillé et sans devoir apporter une carte d'identité avec photo. Elle a, évidemment, des utilisations légitimes. Par exemple, si quelqu'un dont l'image est captée par une caméra de surveillance a commis un crime et qu'il y a une base de données, les tribunaux détermineraient peut-être qu'il s'agit d'une utilisation équitable; cependant, qu'arrive-t-il quand on se retrouve simplement au milieu d'une foule avec un certain nombre de personnes? Je suis sûr que Facebook et Google seraient plus qu'utiles, car ils ont des bases de données de reconnaissance faciale tellement importantes sur nous.
Vous qui travaillez au sein d'un organisme de réglementation canadien, croyez-vous que nous devions mettre en veilleuse la technologie de reconnaissance faciale? Comment faire pour appliquer les règles afin de protéger les droits des citoyens avec des garanties claires en matière d'utilisations policière et commerciale avant que des violations ne soient commises?
Je pense qu'en ce qui concerne les moratoires ou les strictes interdictions, je ferais la distinction entre l'utilisation d'une technologie — la technologie de reconnaissance faciale — et les utilisations qu'on en fait. Je pense qu'il est plus probable qu'une interdiction ou un moratoire soit judicieux pour des utilisations précises de la technologie plutôt que pour la technologie en tant que telle, car la reconnaissance faciale pourrait être utile à des fins publiques, y compris au chapitre de l'application de loi dans lequel, malgré les restrictions relatives à la protection des renseignements personnels concernant la reconnaissance faciale, on estime généralement que l'utilisation de cette technologie est pour le bien du public. J'envisagerais la question, encore une fois, en fait d'utilisations précises de la technologie. À cet égard, oui, il y aurait lieu d'interdire certaines utilisations.
Merci beaucoup.
Ellen Weintraub, compte tenu de ce dont nous avons parlé cet après-midi, de l'argent douteux en politique et de la difficulté d'assurer un quelconque type de surveillance adéquate de ce qui se passe sur des plateformes comme Facebook, est-ce que la nouvelle selon laquelle Facebook va lancer sa propre cryptomonnaie vous effraie?
Vous avez peur. Cette perspective vous effraie.
Je pense que vous avez raison d'être effrayée par cette perspective. Compte tenu de tous les autres problèmes dont nous avons discuté, cela semble une sorte de charte du blanchiment d'argent politique.
Ne pensez-vous pas que les gens repenseront un jour à cette période et diront que nous avions des démocraties et des sociétés avancées qui avaient élaboré, pendant des décennies, des règles et des règlements sur le financement électoral, la loi électorale, les droits individuels concernant les données et les renseignements personnels, la surveillance des médias et des médias d'information et d'autres sources d'informations, et que nous étions préparés à laisser une société comme Facebook contourner toutes ces décennies d'expérience, simplement parce que c'est ainsi que fonctionne son modèle d'affaires, et que notre position actuelle n'est pas viable?
La question de savoir si notre position est viable ou si elle doit être réglementée davantage est, selon moi, la raison précise pour laquelle vous êtes assis autour de cette table aujourd'hui.
Mais, de certaines façons, si on en juge par la discussion qu'on a tenue au cours de cette dernière séance, nous cherchons par tous les moyens à résoudre un problème causé par une société. En fait, il se pourrait que, au lieu de devoir abandonner bien des choses auxquelles nous attachons de l'importance parce qu'elles ont été mises en place pour protéger les citoyens et leurs droits, la solution soit de vraiment dire à ces sociétés ce que nous attendons d'elles et que nous allons le leur imposer si nous n'arrivons pas à être convaincus qu'il y a une autre façon de procéder. Et d'affirmer que nous ne sommes pas prêts à tolérer que les gens soient exposés à des chapeaux noirs, à l'ingérence d'acteurs malveillants dans les élections, à la désinformation, à la propagation non contrôlée du discours haineux, et qu'en fait, ce ne sont pas les normes auxquelles nous nous attendons dans une société décente. Nous le disons en reconnaissant que des plateformes comme Facebook sont devenues les principaux médias par lesquels les gens — soit entre le tiers et la moitié des Européens et des Américains — obtiennent des nouvelles et des informations.
Je crois qu'il est réellement risqué de prendre une série de règles qui ont évolué au cours du XXe siècle et de présumer qu'elles conviendront autant aux technologies du XXIe siècle.
Mon dernier commentaire est que je pense que c'est juste. Ces règles se sont révélées être dépassées en raison des nouvelles technologies et de la façon dont les gens dans le monde utilisent le contenu de l'information. Il devrait sûrement nous rester les valeurs qui ont justifié l'adoption de ces règles au départ. C'est une chose de dire qu'il faut modifier les règles pour les adapter aux changements technologiques. Nous ne devrions cependant pas dire que nous devrions abandonner ces valeurs simplement parce qu'elles sont devenues plus difficiles à appliquer.
J'aimerais terminer en soulevant un point. Nous parlons de la citation à comparaître de Mark Zuckerberg et Sheryl Sandberg depuis un certain temps et, à titre de président de ce comité, j'affirme que nous avons fait tout ce qui était en notre pouvoir pour nous assurer qu'ils soient présents aujourd'hui. Nous sommes limités par ce qui se trouve dans ce livre et les lois de notre pays, alors que les plateformes semblent exister dans leur propre bulle sans restriction dans nos administrations, et c'est frustrant pour nous, les législateurs.
Encore une fois, merci d'être venus témoigner aujourd'hui et merci de nous avoir aidés, surtout le commissaire Therrien. Merci d'avoir aidé le Comité, monsieur le commissaire. Nous nous réjouissons à la perspective de poursuivre ces discussions.
J'ai des questions administratives concernant l'horaire de ce soir. Le repas sera à 19 heures, en bas, dans la pièce 035. Nous sommes dans la pièce 225, alors le souper aura lieu deux étages plus bas, à 19 heures.
Pour être bien clair, chaque délégation doit donner un bref exposé sur ce que son pays a fait et compte faire pour régler ce problème. Je vais m'entretenir avec mes vice-présidents sur la façon dont nous allons présenter les mesures que nous prenons au Canada, mais je vous mets au défi de les préparer à l'avance. Encore une fois, l'exposé sera bref et peut être informel. Nul besoin d'un grand exposé écrit. Je vois des expressions très sérieuses, des gens qui semblent se dire « Dans quoi nous sommes-nous embarqués? »
Plus important encore, je vois beaucoup de visages fatigués. Je pense que nous sommes tous prêts à retourner à l'hôtel pour nous reposer pendant environ une heure avant de nous réunir à nouveau à 19 heures. Je pense que c'est tout ce que j'ai à dire pour l'instant, mais encore une fois, nous nous reverrons à 19 heures.
J'invoque le Règlement, monsieur le président, avant que vous tentiez de tous nous faire taire.
Je tiens à féliciter le personnel pour son excellent travail, nos analystes qui ont tout organisé, et M. Collins pour les travaux qui ont été réalisés en Angleterre. Vous vous êtes surpassés. Je pense que nous avons vraiment établi une norme. J'espère que dans le cadre de la prochaine législature, et peut-être dans d'autres administrations, nous pourrons poursuivre cette discussion. Vous avez accompli un travail extraordinaire dans ce dossier. Nous vous en félicitons sincèrement.
[Applaudissements]
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