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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des finances


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 31 octobre 2005




 1205
V         Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.))
V         M. Dennis Howlett (directeur général, Organisation nationale anti-pauvreté)
V         Le président
V         Mme Paulette Halupa (présidente, Conseil d'administration, Organisation nationale anti-pauvreté)

 1210
V         M. Dennis Howlett

 1215
V         Le président
V         Mme Ginette Petitpas-Taylor (présidente, Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick)

 1220

 1225
V         Le président
V         Mme Manon Cormier-Viel (fondatrice du groupe, Parents pour des services de garde de qualité)
V         Mme Jody Dallaire (coordonnatrice, Parents pour des services de garde de qualité)

 1230
V         Le président
V         M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC)
V         Mme Jody Dallaire

 1235
V         M. Rob Moore
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Rob Moore
V         Mme Rosella Melanson (directrice générale, Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick)
V         M. Rob Moore
V         Le président
V         M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ)
V         Mme Rosella Melanson

 1240
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Rosella Melanson
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Ginette Petitpas-Taylor
V         M. Yvan Loubier
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Yvan Loubier
V         Le président
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)

 1245
V         Mme Rosella Melanson
V         M. Yvon Godin
V         Mme Rosella Melanson
V         M. Yvon Godin
V         Mme Jody Dallaire

 1250
V         Le président
V         L'hon. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.)
V         M. Dennis Howlett
V         L'hon. Charles Hubbard
V         M. Dennis Howlett
V         L'hon. Charles Hubbard
V         Mme Paulette Halupa
V         L'hon. Charles Hubbard

 1255
V         Mme Jody Dallaire
V         L'hon. Charles Hubbard
V         Mme Jody Dallaire
V         L'hon. Charles Hubbard
V         Mme Jody Dallaire
V         Le président
V         M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC)
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Monte Solberg

· 1300
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Monte Solberg
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Monte Solberg
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Monte Solberg
V         Mme Jody Dallaire
V         M. Monte Solberg
V         M. Dennis Howlett
V         Le président

· 1305
V         Mme Rosella Melanson
V         Le président
V         Mme Rosella Melanson
V         Le président
V         Mme Paulette Halupa
V         Le président
V         Mme Paulette Halupa
V         M. Monte Solberg
V         M. Dennis Howlett
V         Le président










CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 126 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 31 octobre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

  +(1205)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Massimo Pacetti (Saint-Léonard—Saint-Michel, Lib.)): La séance est ouverte. Nous sommes ici réunis dans le cadre de nos consultations prébudgétaires 2005, conformément à l'article 83.1 du Règlement.

    Je vais vous inviter à nous faire une déclaration liminaire de sept à huit minutes. Si vous pouviez vous en tenir à cela, je vous en serais reconnaissant. Je m'efforcerai de ne pas vous couper la parole, mais le temps dont nous disposons est limité, et les membres du comité vont également vouloir vous poser des questions.

    M. Harvey n'est pas ici. C'était lui le premier sur ma liste.

    J'accueille donc M. Howlett, de l'Organisation nationale anti-pauvreté.

+-

    M. Dennis Howlett (directeur général, Organisation nationale anti-pauvreté): C'est en fait Paulette qui va commencer. Paulette est présidente de l'Organisation nationale anti-pauvreté.

+-

    Le président: C'est très bien.

+-

    Mme Paulette Halupa (présidente, Conseil d'administration, Organisation nationale anti-pauvreté): L'Organisation nationale anti-pauvreté (ONAP) est un organisme sans but lucratif représentant 4,9 millions de Canadiens vivant sous le seuil de la pauvreté. Notre mandat est d'éliminer la pauvreté au Canada. Notre conseil de 19 membres est composé de personnes vivant ou ayant vécu à un moment ou à un autre de leur vie en dessous du seuil de la pauvreté, ce qui nous vaut la qualification de « voix des pauvres ». Nous comptons parmi nos membres des personnes à faible revenu, des organismes fournissant directement ou indirectement des services aux pauvres et d'autres Canadiens préoccupés par la question de la pauvreté.

    Je sais que vous avez notre mémoire, alors je me contenterai d'en parcourir les points saillants pour vous expliquer ce à quoi ressemble selon nous la pauvreté aujourd'hui. Cela nous inquiète que le seuil de la pauvreté ait été sous-évalué depuis 1989, ce qui fait que le taux de pauvreté est en fait plus élevé qu'on le pensait. Bien sûr, cela n'étonnera personne qui a déjà vécu dans la pauvreté ou qui travaille auprès des démunis. Les chiffres nous paraissaient en effet très bas, alors cet état de choses ne nous a guère étonnés, mais cela a pu étonner certains qui étaient moins sensibles au problème que nous.

    Le degré de pauvreté continue d'augmenter, surtout chez les bénéficiaires de services sociaux. Le Conseil national du bien-être social distribue chaque année un rapport sur les revenus de bien-être social. En vérité, les gens qui, comme moi, oeuvrent dans ce domaine estiment que même ces chiffres-là sont artificiellement haussés. En effet, le Conseil, dans sa compilation des données, donne le point le plus élevé sur l'échelle de revenu que pourrait toucher une personne. Il ne donne pas le montant exact de ce que touche chaque personne. Si vous avez des besoins spéciaux ou autres, cela viendrait s'y ajouter. Et cela ne correspond pas à ce que chacun reçoit, et ces chiffres sont donc artificiellement augmentés. Ils ne sont pas bons pour commencer, alors l'on peut imaginer jusqu'à quel point les choses vont mal.

    La pauvreté chez les jeunes est devient un problème sérieux. Même à l'Île-du-Prince-Édouard, d'où je viens, nous constatons qu'un nombre toujours croissant de jeunes vivent dans la pauvreté. Nous avons des jeunes qui essaient de suivre des cours universitaires et collégiaux et qui n'ont pas les moyens de vivre, et qui passent leur temps à dormir chez l'un, chez l'autre sur un canapé. Il y en a même qui ont cette année vécu dans la rue.

    La pauvreté infantile est quant à elle de nouveau à la hausse. Il y avait eu des améliorations, mais l'incidence de la pauvreté infantile est de nouveau très élevée. D'autres pays, comme le Danemark et la Finlande, affichent des taux de pauvreté de 2,4 et de 2,8 p. 100, et le Canada devrait certainement s'efforcer de leur emboîter le pas, étant donné que nous sommes un pays très riche.

    Le fait de travailler n'est plus une garantie que vous n'allez pas vivre dans la pauvreté. Il y a des chefs de famille monoparentale qui ne parviennent pas à subvenir aux besoins de leur famille. Il y a des familles dans lesquelles les deux parents travaillent et qui vivent toujours en dessous du seuil de la pauvreté étant donné que la plupart des emplois aujourd'hui sont des emplois à temps partiel. Des employeurs comme Wal-Mart et McDonald's et d'autres sociétés encore sont sans cesse à la recherche de personnes qu'ils puissent maintenir en dessous de ce niveau. Ils ne veulent pas payer de prestations, ils ne veulent pas verser un salaire correct, alors ils visent les jeunes.

    J'aimerais maintenant vous parler logement et logements sociaux. Nous sommes très préoccupés par cet aspect. Nous sommes ravis du projet de loi que vient d'adopter le Comité des finances et de ce qui est prévu côté logement, mais nous savons que le travail ne peut pas s'arrêter là. Nous savons qu'il faut que ces efforts soient accrus. Il nous faut un gouvernement qui dise que le logement social est pour lui une priorité et qu'il va faire le nécessaire pour que l'argent requis soit là dans les années qui viennent. Nous ne voulons pas d'une approche ponctuelle unique; nous voulons un financement permanent qui nous permette d'atteindre nos objectifs.

    J'ai assisté, il y a deux semaines, à une séance de consultation des Nations Unies à Washington et le rapporteur était très préoccupé par les abus envers les femmes. Selon lui, il s'agit d'un problème systémique, un si grand nombre de femmes souffrant de ne pas pouvoir se trouver un logement convenable, obligées de continuer de vivre dans des situations familiales violentes, dans des lieux inadéquats, certaines maisons n'étant même pas salubres, mais vous continuez d'y vivre parce que vous n'avez pas le choix. L'argent que touche une femme seule, voire même une famille assistée, ne suffit pas pour leur permettre de vivre dans une maison qui soit...

    L'on parle beaucoup cette année des coûts énergétiques. Le coût de l'énergie est tel que les gens n'ont pas les moyens d'avoir une maison bien isolée. Nos pouvoirs publics disent que si nous optons pour des maisons bien isolées... Par exemple, à l'Île-du-Prince-Édouard, ils vont nous offrir des bourrelets de calfeutrage pour nos portes et fenêtres. N'empêche qu'il nous faudra toujours payer le fuel-oil domestique. Si vous avez une maison tout à fait étanche à l'air, dans quelle mesure allez-vous mieux vous porter — mais si vous habitez une vieille maison de ferme que vous n'arrivez pas à chauffer, alors que faire? Il vous faut alors vous passer de manger.

  +-(1210)  

    Je vais maintenant céder la parole à Dennis.

+-

    M. Dennis Howlett: J'aimerais vous entretenir de la question de la productivité, l'un des thèmes dont vous nous avez demandé de traiter.

    Il existe deux façons d'augmenter la productivité. La première est ce que j'appellerais la méthode « vicieuse », où l'on réduit les salaires, réduit les impôts et réduit l'investissement dans les programmes sociaux. Cela peut résulter en une augmentation de la productivité. Mais il existe une autre méthode, que j'appelle la méthode « virtueuse », d'augmenter la productivité: investir dans l'éducation, un des avantages qu'a le Canada mais qu'il risque fort de perdre très bientôt; venir en aide aux gens pour leur permettre de faire partie de la population active, car nous ne bénéficions toujours pas de la productivité d'un grand nombre de personnes qui sont aujourd'hui sans emploi; et augmenter le salaire minimum. Si le salaire minimal était augmenté, cela favoriserait l'accroissement de la productivité, car cela encouragerait l'investissement dans les outils qu'utilisent les travailleurs pour produire. Vous voulez, avec des salaires supérieurs, obtenir le maximum de vos travailleurs.

    L'augmentation du salaire minimum réduirait par ailleurs le taux de roulement du personnel. De nombreuses études montrent qu'il serait très rentable d'augmenter le salaire minimum. Il y a en fait un certain nombre de dirigeants d'entreprise qui appuient l'idée d'augmenter le salaire minimum, car vous réduisez ainsi les coûts d'embauche, les coûts de formation et l'absentéisme, et vous augmentez de ce fait la productivité. Des pays comme l'Irlande et l'Angleterre, qui ont augmenté le salaire minimum, ont constaté une incidence économique positive.

    L'autre aspect que je tiens à souligner est l'importance de l'adoption d'une stratégie de réduction de la pauvreté. Nous sommes très heureux que le dernier budget ait comporté plusieurs mesures visant les services de garde d'enfant et le logement social. Ce sont là des mesures importantes. Nous commençons à avancer à petits pas dans la bonne direction, après de nombreuses années de recul dans la lutte contre la pauvreté, mais il ne suffit pas d'avoir un programme par-ci ou par-là. Il nous faut une stratégie de réduction de la pauvreté.

    Je reviens tout juste de Terre-Neuve, où j'ai rencontré les responsables au gouvernement provincial. Ils ont pris des mesures en vue de l'élaboration d'un plan de réduction de la pauvreté pour Terre-Neuve. Il s'agit là d'une chose qui doit être faite au niveau fédéral, et ce, conjointement avec les efforts des provinces. Comptent parmi des mesures devant faire partie d'un plan de réduction de la pauvreté certaines des choses que nous mentionnons dans notre mémoire, notamment l'augmentation de la prestation fiscale canadienne pour enfants. Des augmentations sont prévues jusqu'en 2007, mais le gouvernement ne s'est pas engagé à consentir de nouvelles augmentations au-delà.

    La prestation fiscale canadienne pour enfants est une demi-mesure, et je dis cela dans le sens positif. Cette prestation a produit des résultats concrets de réduction de la pauvreté, mais le niveau d'aide n'est pas suffisant pour éliminer la pauvreté chez les enfants. Nous estimons que cette prestation devrait être portée à environ 4 900 $.

    L'autre problème est que des mesures de récupération fiscale sont en place dans de nombreuses provinces. En effet, huit des dix provinces réduisent leur aide sociale d'un montant équivalent ou presque à celui de la prestation. Cette pratique doit cesser. Il nous faut également rétablir le salaire minimum fédéral et améliorer l'assurance-emploi.

    J'aimerais, pour conclure, dire quelques mots au sujet du régime fiscal. Le simple fait de réduire les impôts ou les taxes ne va pas aider les pauvres, à moins que de telles réductions ne soient ciblées. Une étude que nous avons effectuée l'an dernier a fait ressortir que le meilleur moyen de réduire l'incidence du régime fiscal sur les pauvres serait d'augmenter le crédit de TPS ou de réduire le montant de TPS. Si vous consentez une baisse générale de l'impôt — en portant, par exemple, la limite individuelle à 10 000 $ ou 12 000 $ — d'après nos calculs, avec un chiffre de 12 000 $, seuls 3,4 p. 100 des avantages reviendraient en vérité aux personnes à faible revenu.

  +-(1215)  

+-

    Le président: Merci.

    Nous allons maintenant entendre Mme Petitpas-Taylor, du Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick.

+-

    Mme Ginette Petitpas-Taylor (présidente, Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick): Bonjour.

    Je m'appelle Ginette Petitpas-Taylor, et je suis présidente du Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick. Je suis accompagnée aujourd'hui de Rosella Melanson, directrice générale.

    Merci d'avoir accepté notre demande de venir comparaître devant vous aujourd'hui. Je représente un organisme sans lien de dépendance du gouvernement provincial, et dont c'est le rôle de porter les questions relatives à la situation de la femme à l'intention du gouvernement et du public.

    S'il existe des conseils consultatifs c'est que l'objectif de l'égalité des femmes demeure, au mieux, un projet en cours de réalisation. En dépit de certains gains importants qui ont été enregistrés, les femmes continuent de gagner moins que les hommes et sont plus susceptibles d'être victimes de violence conjugale. Elles sont par ailleurs nettement sous-représentées parmi les postes de décideur et elles font l'objet de discrimination dans bien des aspects de leur vie quotidienne, surtout si elles sont autochtones ou handicapées.

    Le Canada a un piètre dossier s'agissant de l'application de la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Il nous faut de meilleurs mécanismes pour porter les préoccupations des femmes à l'attention des décisionnaires. C'est pourquoi nous recommandons la nomination d'un ministre affecté exclusivement au portefeuille de la condition féminine et que le Comité permanent du Parlement sur la condition féminine continue de jouer un rôle dans la surveillance de l'exécution du plan d'action du Canada en matière d'égalité des sexes.

    Il manque encore un autre morceau essentiel pour que le Canada soit en mesure de saisir chaque occasion d'améliorer la situation ou en tout cas de veiller à ce que nos dépenses ne servent pas à creuser les écarts. Les budgets gouvernementaux sont l'instrument technique grâce auquel les engagements se concrétisent. Si l'on ne tient pas compte du sexe, alors que cela est important, c'est une forme de discrimination. Lorsque les programmes, lois et budgets d'un gouvernement sont élaborés sans tenir compte des vies et des besoins très différents des hommes et des femmes, seule une partie de la population pourra bénéficier de ces programmes, lois ou dépenses budgétaires.

    Le Canada doit exiger des pays en développement bénéficiaires d'aide qu'ils incluent l'analyse comparative entre les sexes. Or, le Canada n'a lui-même pas appliqué cet outil à ses propres pratiques budgétaires. Le gouvernement canadien doit inclure dans son processus budgétaire une analyse de l'incidence des mesures fiscales proposées et sur les hommes et sur les femmes. Il y aurait lieu, dans le cadre de ce processus, de poser des questions du genre: quelles données utilisées dans le cadre de la planification budgétaire et de l'évaluation des programmes ne sont pas disponibles avec une ventilation selon le sexe? Deuxièmement, les allocations budgétaires sont-elles conformes à l'engagement du gouvernement envers l'égalité? Troisièmement, le budget traite-t-il de façon équitable les hommes et les femmes et vise-t-il à combler les écarts lorsqu'il y en a? Et, enfin, quelle est l'incidence des politiques fiscales ou de revenu et sur les femmes et sur les hommes?

    À l'heure actuelle, le recours aux analyses comparatives entre les sexes à l'échelle du gouvernement fédéral est inégal. Certains ministères centraux n'ont aucune politique en place. L'application systématique d'analyses comparatives entre les sexes (ACS) devrait être une exigence de la loi pour toute initiative fédérale, et les vérifications du rendement du gouvernement en matière d'égalité des femmes devraient être rendues publiques et à la disposition de tous.

    Un autre sujet de préoccupation est le cas des femmes autochtones. Il y a environ deux ans, un comité des Nations Unies a montré du doigt la discrimination systématique et persistante à laquelle les femmes autochtones du Canada font face dans tous les aspects de leur vie et demandé que le Canada prenne des mesures proactives pour veiller à ce que les femmes autochtones puissent exercer leurs droits dans tous les domaines. Il existe des conflits de compétence entre les gouvernements fédéral, provinciaux et des Premières nations, mais le gouvernement fédéral doit trouver une solution pour accélérer les efforts visant à corriger les inégalités auxquelles sont confrontées les femmes autochtones au Canada. Nous songeons à des mesures qui cibleraient la pauvreté, la violence et les problèmes liés au statut et à l'appartenance à une bande.

    Les Canadiens devraient être scandalisés du fait que la législation sur les droits de la personne ne protège pas les Autochtones. La loi ne protège pas non plus les femmes autochtones à la dissolution du couple. Les femmes vivant en réserve ont moins de droits à l'égard de leur foyer matrimonial, tant pendant le mariage qu'à sa dissolution, que les femmes vivant hors réserve, étant donné que les lois provinciales-territoriales prévoyant le partage égal des biens matrimoniaux ne s'appliquent pas dans les réserves.

    Même dans les cas de violence conjugale, les femmes n'ont pas le droit de demeurer temporairement dans le foyer conjugal après la rupture du mariage ou de l'union de fait. Il faut mettre cela en contraste avec la situation des femmes mariées vivant hors réserve, qui ont droit à une répartition égale des biens immobiliers matrimoniaux et, dans les cas de violence familiale, peuvent recourir aux tribunaux et demander la possession exclusive du foyer conjugal. La question des biens immobiliers matrimoniaux n'est qu'un problème parmi tout un entrelacs de difficultés auxquelles sont confrontées les femmes autochtones.

  +-(1220)  

    Voyons maintenant un petit peu la situation en ce qui concerne la garde d'enfants. À l'heure actuelle, au Nouveau-Brunswick, il y a plus de raisons de ne pas avoir d'enfants que d'en avoir. La garde d'enfants est un obstacle. La plupart des enfants au Nouveau-Brunswick, et ailleurs au Canada, sont gardés dans des cadres qui ne respectent pas les normes minimales, la plupart du temps parce qu'il n'y a pas d'autre solution disponible ou abordable pour les parents.

    Il y a encore un autre défi, que le Nouveau-Brunswick partage avec plusieurs autres provinces, celui de la prestation de services de qualité en région rurale. Un engagement ferme à l'égard de normes de qualité de base et de financement public suffisant est essentiel si nous voulons progresser. L'entente fédérale-provinciale sur les services de garde, lorsqu'elle sera signée, devra fournir des programmes de soins éducatifs à la petite enfance qui soient accessibles à tous, subventionnés par l'État et de qualité.

    Penchons-nous maintenant sur les congés de maternité et parentaux. Les dispositions de congés qui sont à l'heure actuelle prévues dans le programme d'assurance-emploi constituent une nette amélioration, mais elles sont très inadéquates, étant donné les besoins des familles. Les travailleurs autonomes devraient pouvoir cotiser à l'AE en vue d'être admissibles aux congés de maternité et parentaux. Un congé payé de paternité non transférable de 46 semaines devrait être créé pour encourager les pères à participer. La période d'attente devrait être éliminée et le pourcentage des gains assurables devrait être porté de 55 à 65 p. 100, sur la base des 12 meilleures semaines de revenu des trois à cinq dernières années, par exemple. Il faudrait par ailleurs élaborer une stratégie nationale pour les personnes soignantes destinée aux familles qui soignent des parents autres que leurs enfants.

    Je vais maintenant vous entretenir de la question du régime fiscal. Les familles avec de jeunes enfants sont aux prises avec des défis financiers particuliers et ont le sentiment d'être très nettement sous-évaluées dans le cadre de notre régime fiscal. D'importants crédits d'impôt remboursables pour les enfants à charge devraient être consentis à toutes les familles ayant des enfants afin de mieux tenir compte de ce que cela coûte d'élever des enfants.

    Les versements de pension alimentaire devraient être non imposables pour le bénéficiaire et non déductibles pour le payeur, tout comme c'est déjà le cas des prestations pour services à l'appui de la santé. Un nombre relativement faible de femmes touchent une pension alimentaire, mais il n'y a aucune raison de traiter deux personnes qui ne sont plus des conjoints comme constituant une seule et même unité fiscale. Le partage du revenu n'est pas autorisé pour les personnes qui sont encore unies par le mariage. Les versements au titre d'une pension alimentaire étant un revenu imposable, certains bénéficiaires subissent une réduction de leur crédit pour TPS et de la prestation fiscale canadienne pour enfants, étant donné que ces crédits diminuent au fur et à mesure que le revenu augmente.

[Français]

    Le financement de l'aide sociale. Les mécanismes fédéral-provinciaux de financement de l'aide sociale actuellement en place ont grandement besoin d'être remaniés. Au cours de la décennie qui a suivi le remplacement du régime d'assistance publique au Canada par un financement global, les gouvernements provinciaux et territoriaux ont réduit leurs programmes sociaux, et on a vu une hausse des inégalités des revenus à l'échelle du pays.

    Le Transfert canadien en matière de programmes sociaux devrait être divisé en deux enveloppes distinctes pour les services sociaux et l'éducation postsecondaire. Des normes nationales minimales devraient être mises en place au chapitre de l'aide sociale. La stabilité des fonds accordés devrait être garantie.

    Finalement, les programmes d'aide juridique ont fait l'objet de compressions importantes, et les services offerts à l'échelle du pays sont limités, incomplets et non uniformes. Le gouvernement fédéral doit mettre en place des normes nationales et augmenter les sommes accordées. Actuellement, les provinces établissent leurs propres règlements quant aux types de cas admissibles à l'aide juridique, ainsi que les critères financiers qui déterminent qui a droit aux services juridiques subventionnés.

    Au Nouveau-Brunswick comme dans les autres provinces, l'aide juridique est très limitée. Les femmes ont particulièrement été touchées, étant donné leurs revenus moins élevés et leurs responsabilités familiales. Les appels reçus à notre bureau et les faits signalés aux organismes oeuvrant pour la réforme du droit nous apprennent que de nombreuses femmes qui doivent composer avec de graves problèmes en matière de droit civil, notamment des cas de divorce ou la question de la garde des enfants, ont dû présenter leur cause personnellement. De plus, les femmes se défendent seules dans des causes complexes ou ne réussissent pas à faire valoir leurs droits légaux et ceux de leurs enfants.

    Enfin, je souhaite vous faire part d'une étude que le conseil consultatif a commanditée l'an dernier et qui démontre que l'égalité a ses bienfaits, non seulement pour les femmes mais aussi pour l'économie. Le conseil consultatif revendique depuis nombre d'années des mesures pour faire disparaître l'écart entre les salaires moyens des femmes et des hommes.

    Nous nous sommes posé une question très simple, à savoir quels seraient les effets pour le Trésor public si on éliminait la discrimination salariale contre les femmes au Nouveau-Brunswick. En d'autres mots, quel est le coût de l'écart salarial actuel? Nous avons demandé à GPI Atlantic d'étudier cette question en tenant compte des revenus fiscaux du gouvernement et des coûts liés aux soins de santé et aux programmes sociaux.

    L'étude GPI Atlantic a conclu que l'élimination de la disparité salariale entre les hommes et les femmes pourrait entraîner une augmentation d'environ 11 p. 100 en entrées d'impôt sur le revenu des particuliers aux niveaux provincial et fédéral au Nouveau-Brunswick. Le gouvernement du Nouveau-Brunswick pourrait recevoir environ 105 millions de dollars de plus au titre des impôts sur le revenu des particuliers à la suite de la seule élimination de cet écart salarial.

    La pauvreté étant une cause importante des problèmes de santé, nous avons considéré dans notre étude l'incidence de la hausse du revenu sur l'utilisation des soins de santé. Nous avons conclu qu'en 2003, le Nouveau-Brunswick aurait évité près 60 millions de dollars en frais de soins de santé.

  +-(1225)  

+-

    Le président: Merci.

[Traduction]

    Nous allons maintenant entendre les représentantes de Parents pour des services de garde de qualité, Mme Dallaire et Mme Cormier-Viel.

[Français]

+-

    Mme Manon Cormier-Viel (fondatrice du groupe, Parents pour des services de garde de qualité): Bonjour. Nous ferons toutes deux une présentation: moi, en français; Judy, en anglais.

    Parents pour des services de garde de qualité est un groupe qui a été formé en 2001 dans la région du Grand Moncton. Notre mandat est de préconiser des services de garde à l'enfance de haute qualité, accessibles et abordables dans la province du Nouveau-Brunswick.

    Nous félicitons le Comité permanent des finances, composé de représentants de tous les partis politiques, de sa reconnaissance des nombreux éléments clés requis pour créer un système de services de garde à l'enfance adaptés aux besoins en milieu communautaire et pancanadien.

    Dans vos recommandations, vous demandez un régime de services de garde national accessible, abordable, de haute qualité et sans but lucratif, financé et réglementé par le secteur public. Nous sommes ravis de constater que le Canada commence à aller de l'avant. Les engagements fiscaux envers les services et le soutien aux familles qui ont de jeunes enfants ont augmenté au niveau fédéral. Grâce à cela, certaines provinces ont commencé à développer un plan de services de garde complet et axé sur la communauté.

    Au lieu de réitérer ce que nous pensons au sujet de la recherche et des évidences qui appuient le besoin d'un service de garde pancanadien, nous allons plutôt vous entretenir sur la façon de nous assurer que nos investissements dans le secteur des services de garde augmentent l'indice de productivité au Canada. Nous avons préparé et soumis au comité des mémoires détaillés, en anglais et en français, que vous trouverez devant vous. Tel que demandé, nous avons axé nos recommandations dans le contexte de la productivité pour le Canada.

    Aujourd'hui, nous aimerions attirer votre attention sur deux éléments clés: les services de garde augmentent l'indice de productivité s'ils sont de bonne qualité, abordables et accessibles pour tous les enfants et leurs familles, et

[Traduction]

requièrent un investissement public au moyen de financement de programme ciblé.

[Français]

    Nous pensons qu'une approche universelle est nécessaire en matière de services de garde. Un nombre croissant d'études confirment que les services de garde de qualité profitent à toutes les classes sociales et économiques de la société. Cela procuré des avantages pour les enfants, les familles et à la société en général. C'est pourquoi l'investissement public dans des services de garde de qualité doit prendre appui sur des principes d'abordabilité et d'accessibilité pour tous, autrement dit d'universalité.

[Traduction]

+-

    Mme Jody Dallaire (coordonnatrice, Parents pour des services de garde de qualité): Bonjour. Je m'appelle Jody Dallaire et je représente moi aussi Parents pour des services de garde de qualité, un groupe de revendication qui a son siège à Moncton. Je vais vous entretenir de l'incidence de la garde d'enfants sur la productivité.

    La puériculture favorise l'augmentation de la productivité au Canada. Un investissement public ciblé en vue de l'établissement d'un système de soins à l'enfant influera sur au moins deux des domaines d'intervention relative à la productivité définis par le comité permanent: le capital humain et le capital physique.

    Pour ce qui est du capital humain, nous savons que l'amélioration de la croissance de la productivité au Canada nécessitera une main-d'oeuvre qualifiée. Les données disponibles confirment que des services de garde de qualité, abordables et accessibles favorisent la participation au marché du travail, l'acquisition de compétences et l'acquisition continue du savoir, surtout chez les femmes. Des services de garde favoriseront également l'émergence d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée pour le futur.

    La productivité du Canada s'appuie sur les mères actives ayant de jeunes enfants. Leur contribution est d'autant plus importante que surviennent aujourd'hui les pénuries de main-d'oeuvre qualifiée qui avaient été largement prédites, fait que le comité permanent reconnaît en demandant aux répondants de songer à des mesures qui encourageraient les citoyens à s'engager dans du travail plutôt que dans des loisirs et à investir dans l'acquisition continue du savoir.

    Pour ce qui est du capital physique, une collectivité devient un endroit où les gens ont envie de vivre et de travailler lorsqu'on accorde de l'importance aux enfants et aux familles, lorsqu'on offre du soutien à ceux qui ont besoin de soins et d'attention supplémentaires et lorsque les services sont dotés de ressources suffisantes. Le fait d'investir dans des services de garde d'enfant communautaires, tout comme dans des écoles et des bibliothèques, favorise l'établissement de collectivités où il fait bon vivre.

    L'investissement public dans des services de garde à l'enfance passe par les dépenses de programme. Il nous faut, pour réaliser nos objectifs en matière de services de garde d'enfants, un investissement public par le biais des dépenses de programme, ainsi qu'une politique publique efficace établie en vertu d'une loi nationale. Dans l'intervalle, les ententes actuelles en matière de garde d'enfants entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux peuvent servir de base sur laquelle bâtir un système de services de garde d'enfant pan-canadien. Si l'investissement public fédéral par le biais de dépenses de programme est accru et maintenu à long terme, si les provinces et territoires mettent en oeuvre des plans fondés sur les preuves recueillies et des politiques destinées à améliorer la qualité des services offerts, alors l'abordabilité sera accrue et les services communautaires élargis.

    L'investissement public par le biais des dépenses de programme dans les services de garde à l'enfance est nécessaire, mais la façon dont ces fonds publics sont investis par les provinces et territoires est également d'une importance capitale. Par exemple, des propositions en vue du versement de fonds directement aux parents peuvent être séduisantes en surface, mais elles n'ont rien de nouveau et elles ne sont pas non plus efficaces. Cela fait 30 ans que frais d'usager et subventions sont les principales sources de financement pour la garde d'enfants à l'échelle du pays; or, à l'extérieur du Québec, des services de garde de qualité, abordables et accessibles ne sont toujours pas monnaie courante.

    La reddition de comptes publique exige l'investissement de nouveaux fonds dans les mécanismes le plus susceptibles de résoudre les problèmes. Un système de garde d'enfants efficace aura besoin de fonds publics considérables afin d'être en mesure d'élaborer et d'offrir des programmes de garde communautaires et sans but lucratif. Un financement public direct exigera des services communautaires qu'ils élaborent des programmes qui correspondent aux besoins des familles locales et assurent accessibilité et qualité.

    Cette approche établit un lien entre investissement public et résultats publics. Si nous voulons qu'existent dans nos collectivités une gamme de services à l'enfance axés sur la famille et la qualité, alors il importe que les responsables des programmes bénéficient de financement public direct important et soutenu et aient à en rendre compte.

    Merci.

  +-(1230)  

[Français]

+-

    Le président: Merci, madame Dallaire.

[Traduction]

    Je rappelle aux témoins que les députés disposent chacun de cinq ou six minutes, mais cela inclut les questions et les réponses. Si vous pouviez vous en tenir à des réponses brèves, je pense que nous vous en serions tous reconnaissants.

    Monsieur Moore, nous allons commencer avec vous, pour cinq minutes.

+-

    M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Merci à tous les témoins. Il a été intéressant d'entendre tous vos commentaires.

    Ma première question s'adresse à Parents pour des services de garde de qualité. Votre proposition tombe, bien sûr, à point nommé, car c'est justement de cela que nous discutons à l'heure actuelle. Vous venez de la région de Moncton, et, comme vous le savez, la question qui se pose toujours au Nouveau-Brunswick est celle de savoir très exactement comment cela va fonctionner. Le Nouveau-Brunswick est l'une des seules provinces à ne pas encore avoir signé à ce jour.

    Ma circonscription de Fundy Royal se trouve elle aussi au Nouveau-Brunswick, dans le quartier voisin de celui-ci. Il y a donc un mélange de régions urbaines et rurales. Vous avez abordé la question du versement de fonds directement aux parents, et je m'interroge sur la position de votre groupe.

    Êtes-vous en train de dire, donc, qu'en ce qui concerne les parents qui élèvent leurs enfants à la maison, que c'est là le mauvais choix, qu'ils ne devraient pas le faire? Le système que vous préconisez prévoirait le versement de deniers publics uniquement pour le système public et universel. Êtes-vous en train de dire que les parents qui choisissent de faire autrement ne devraient rien toucher?

+-

    Mme Jody Dallaire: Non, ce n'est certainement pas là la position que nous préconisons, soit que les parents qui restent à la maison ne reçoivent rien. À l'heure actuelle, au Nouveau-Brunswick, 75 p. 100 des mères ayant de jeunes enfants font partie de la population active rémunérée. Les appels que nous recevons, en tant que comité de parents, nous viennent principalement de femmes qui ne parviennent pas à trouver de place de garderie pour leur enfant afin de pouvoir retourner au travail.

    J'estime donc qu'il nous faut reconnaître la contribution faite par les parents qui choisissent de rester à la maison, mais je ne crois pas qu'il nous faille prendre les fonds limités qui sont présentement disponibles pour les services de garde d'enfants et les diluer, car le financement dont bénéficiera la province ne suffira même pas pour couvrir tous les besoins qui existent déjà en vue de la création d'un système.

  +-(1235)  

+-

    M. Rob Moore: Très bien. Il existe à l'heure actuelle toute une gamme d'options de garde d'enfant. Il y aurait un système comme celui dont vous parlez, il y a des parents dont les enfants restent avec leurs grands-parents ou encore des parents qui, pour une raison ou une autre, préfèrent que leurs enfants soient gardés par un voisin qu'ils connaissent et qui offre ces genres de services. Qu'envisageriez-vous de prévoir à l'avenir sur le plan soutien aux personnes qui font ce genre de choix?

    Je vais vous donner un exemple. Il y a dans ma région une forte composante rurale. Les gens qui travaillent dans la région de Sussex, par exemple, font peut-être la navette pour se rendre à Saint John ou à Moncton, mais ils voudront peut-être qu'un grand-parent s'occupe de leur enfant. Proposeriez-vous quelque chose pour venir en aide à ces familles-là?

+-

    Mme Jody Dallaire: Je connais cette situation en tant que mère active, et d'après ce que me disent d'autres parents, ils n'ont pas le choix. Seul un enfant sur neuf a accès à une garderie réglementée. Souvent, ceux qui recourent à des grands-parents ou à des services de garde d'enfant non réglementés n'en font pas forcément le choix; ils le font par nécessité. Certains continueront de choisir les grands-parents ou un service de garde non réglementé, mais je pense qu'il nous faut emprunter ce chemin vers l'établissement d'un système qui permettra véritablement aux gens de faire un choix. Ce choix n'existe pas à l'heure actuelle.

+-

    M. Rob Moore: Merci.

    J'ai maintenant une question pour le Conseil consultatif sur la condition de la femme. Vous pourriez peut-être étoffer un peu vos commentaires au sujet de ce qui se passe avec les communautés autochtones. Vous savez sans doute que le sénateur Kinsella, qui est originaire du Nouveau-Brunswick, a déposé un projet de loi d'initiative parlementaire traitant justement de la question d'étendre les droits énoncés dans la Loi canadienne sur les droits de la personne aux résidents de communautés autochtones.

    J'aimerais savoir quel effet cela aurait, selon vous, si ces mesures de protection étaient consenties également aux personnes vivant en communauté autochtone, dans le cas surtout des femmes.

+-

    Mme Rosella Melanson (directrice générale, Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick): Nous sommes au courant de la possibilité que cela aille de l'avant, et c'est bien; il faut faire tout ce qui est nécessaire pour assurer aux femmes une protection en vertu de la Commission des droits de la personne. Je pense que les femmes seraient les premières à chercher à être protégées ou à porter plainte, ou en tout cas les plus désireuses de le faire, car les femmes nous livrent leurs doléances en la matière, qu'il s'agisse de logement, de biens matrimoniaux, ou autre. Lorsqu'on entend parler de questions autochtones au Canada, cela a rarement à voir avec des questions de femmes autochtones. Or, ce sont sans doute elles qui constituent le groupe le plus défavorisé au Canada.

+-

    M. Rob Moore: Merci.

+-

    Le président: Merci, monsieur Moore.

[Français]

    Monsieur Loubier.

+-

    M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Merci, monsieur le président. J'aurais plusieurs questions à poser et plusieurs commentaires à faire. Comme le temps nous manque, je vais le faire en rafale.

    Il y a une chose que je ne comprends pas au sujet des femmes autochtones. J'ai été porte-parole de mon parti pour les Affaires indiennes et du Nord canadien pendant deux ans. Nous avons reçu la plupart des chefs autochtones au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. La très grande majorité — M. Hubbard pourra en témoigner, car il était également présent — voulait régler la question du partage du patrimoine en cas de séparation. Cela existe depuis des années. En 1997, lorsque le rapport Erasmus-Dussault de la Commission royale sur les peuples autochtone a été publié, on faisait état de cette situation. Il semblait y avoir un consensus.

    Comment se fait-il que le gouvernement fédéral, qui est fiduciaire des Autochtones au Canada, donc responsable de ce qui peut se passer en vertu des lois fondamentales touchant les libertés et les droits dans les réserves, n'ait pas bougé plus rapidement sur cette question, alors qu'on en parle depuis au moins 10 ans de façon intensive?

+-

    Mme Rosella Melanson: C'est une bonne question qu'il faudrait poser à Ottawa, et non ici. Il y a plein de gens qui ont un intérêt à ce que cela se fasse, mais on dirait que pour beaucoup d'autres, ce n'est pas une priorité. En effet, c'est un problème qu'on connaît depuis longtemps. Il n'y a pas de bonne raison pour laquelle cela n'a pas été résolu.

    Comme vous, nous avons beaucoup de dossiers à régler et nous commençons à réaliser qu'il faudra mettre celui-ci en tête, de façon à ce qu'il ait l'attention qu'il mérite, parce que les femmes sont au premier rang en termes de gravité des besoins.

  +-(1240)  

+-

    M. Yvan Loubier: Si j'ai bien compris la problématique, seulement un changement législatif ferait que la Charte des droits et libertés puisse s'appliquer aux réserves à cet égard, en matière de partage du patrimoine. C'est tout simplement cela. Ce ne sont pas des montants d'argent, c'est une question de bien-être des deux conjoints.

+-

    Mme Rosella Melanson: Évidemment, il y a des intérêts. Cela doit changer quelque chose dans la vie des conseils de bande. Cependant, on est en droit de croire que les droits de la personne au Canada s'appliquent à toutes les personnes dans les réserves.

+-

    M. Yvan Loubier: Le gouvernement du Nouveau-Brunswick a-t-il adopté une loi pour atteindre l'équité salariale? Le cas échéant, est-ce que les résultats tardent à venir? Est-ce comme au Québec?

+-

    Mme Ginette Petitpas-Taylor: La province n'a pas adopté de loi comme telle. Cependant, nous travaillons au dossier de l'équité salariale. Nous rencontrerons la ministre la semaine prochaine et nous discuterons de ce sujet plus longuement.

+-

    M. Yvan Loubier: D'accord. Même si une loi est adoptée, assurez-vous que le processus soit rapide. Ce n'est pas toujours évident.

    J'ai une question concernant les services de garde. Au Québec, nous expérimentons ce service depuis six ans. Avant d'en arriver au dépôt du projet de loi à l'Assemblée nationale, il y a eu tout un débat, semblable à celui qui existe au Canada à l'heure actuelle, surtout avec mes amis conservateurs. On parle de liberté de choix, de laisser les gens choisir de rester à la maison avec les enfants, de les faire garder par les grands-parents ou dans des centres de garde spécialisés.

    La loi a été adoptée au Québec, et après deux ou trois années d'application, il n'y avait plus de contestation. On s'est aperçu que c'était ainsi que cela devait fonctionner. Cela ne fonctionne pas à la perfection, à 150 p. 100. Il y a des ajustements à faire, comme pour tout nouveau régime. Cependant, fondamentalement, les parents sont contents.

    Est-ce ce type de régime que vous voulez appliquer ici? Est-ce que la population semble préférer l'idée d'avoir une espèce de crédit d'impôt ou un traitement fiscal particulier pour leur permettre de payer les garderies, ou aimerait-elle mieux laisser au gouvernement le soin de verser de l'argent directement aux centres de la petite enfance pour qu'elles puissent assurer un très faible tarif journalier de 5 $ ou 7 $ par jour?

+-

    Mme Jody Dallaire: Nous désirons un système similaire à celui du Québec, universel. Comme il y a beaucoup de gens qui vivent en milieu rural dans notre province, il faudrait trouver des façons innovatrices de fournir des services dans ces régions. Il y a des femmes qui viennent d'autres parties du Canada qui ont fait des choses intéressantes dans le but de fournir des services réglementés en milieu rural. Nous voulons apprendre d'elles et savoir comment répondre à nos besoins, tout en tenant compte de la nature rurale de la province.

+-

    M. Yvan Loubier: Il y a des centres de la petite enfance sur tout le territoire rural au Québec. Je viens d'un comté semi-rural, et il y a des centres de la petite enfance dans la partie rurale. Ils ont été créés; il y en a de petits, de minuscules, de plus grands, mais cela correspond à la réalité sociodémographique de la région. Alors, c'est faisable. Ce n'est pas une question de densité de population, c'est tout simplement qu'il y a des initiatives qui peuvent être subventionnées par le gouvernement.

+-

    Le président: Merci, monsieur Loubier.

    Monsieur Godin, vous disposez de deux minutes.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Effectivement, nous n'avons pas beaucoup de temps pour discuter de sujets aussi importants.

    Parlons du statut de la femme au Nouveau-Brunswick. J'aimerais souligner un point regrettable et je ne sais pas si vous avez fait des pressions à ce sujet auprès du gouvernement provincial, puisque votre organisme a été mis en place par le gouvernement provincial. Cependant, c'est un sujet qui concerne également le gouvernement fédéral.

    Saviez-vous qu'environ 800 femmes travaillent pour la Croix-Rouge et offrent des services à domicile aux personnes âgées? Ces femmes gagnent le salaire minimum. Je me souviens qu'en 1992, elles n'étaient pas payées les jours fériés, parce qu'elles étaient considérées comme des domestiques. Donc, le gouvernement provincial offre des salaires de crève-faim aux employées de la Croix-Rouge.

    Or, tout à l'heure, des groupes nous ont dit qu'il devait y avoir des enveloppes distinctes pour les services sociaux, l'éducation et les soins à domicile, afin d'aider les personnes qui veulent rester à la maison. Encore là, ce sont les femmes qui en souffrent, puisque ce sont elles qui travaillent en majorité dans ce domaine.

    Je me souviens avoir rencontré une ministre responsable de la condition féminine. Elle se demandait pourquoi on payerait une femme 7 $ l'heure pour donner des soins à domicile alors qu'on peut engager une travailleuse sociale à 3,50 $ l'heure. Je crois que l'attitude du gouvernement n'a pas changé à ce niveau.

    Quelle recommandation budgétaire feriez-vous au gouvernement fédéral à cet égard?

  +-(1245)  

+-

    Mme Rosella Melanson: En ce qui nous concerne, les services de soutien à domicile sont une grande préoccupation. En effet, il y a beaucoup de similarités avec les travailleuses en garderie: la plupart sont des femmes et elles sont mal payées.

    L'hiver dernier, nous avons fait une campagne dans le but d'amener une trentaine de municipalités et 25 associations à adopter une motion pour faire des pressions auprès du gouvernement à cet égard. Nous croyons que ce genre de service social va mener à une crise. On réglera le problème, soit parce qu'il y aura une crise, soit parce qu'on fera un grand effort de syndicalisation ou parce qu'il y aura un scandale. D'une façon ou d'une autre, une crise se prépare.

    Enfin, le conseil consultatif siège au Comité d'adaptation de la main-d'oeuvre, afin d'étudier la situation. Il tente de proposer des solutions pour régler les problèmes de rétention et de recrutement dans ce domaine. Évidemment, c'est parce que le travail ne paie pas et qu'elles doivent payer leurs dépenses, etc.

+-

    M. Yvon Godin: J'aimerais discuter de l'assurance-emploi. J'ai fait une tournée nationale dans 22 villes et j'ai assisté à 53 réunions en l'espace de 30 jours. J'ai constaté que beaucoup de femmes ont été mises à pied dans le domaine du secrétariat et qu'elles exercent maintenant leur profession à la maison. Donc, ce sont des travailleuses autonomes qui ne se qualifient pas pour l'assurance-emploi, mais qui pourraient avoir besoin d'aide, car elles travaillent à la pièce. Présentement, je crois que seulement 32 p. 100 des femmes se qualifient pour l'assurance-emploi. Il y a également l'aspect de l'équité salariale, qui est en rapport avec les revenus des personnes qui ont été exclues du système.

    Avez-vous abordé ce sujet dans vos recommandations au gouvernement fédéral en matière d'assurance-emploi.

+-

    Mme Rosella Melanson: En fait, en ce qui concerne l'assurance-emploi, nous avons évoqué les congés de maternité et parentaux. Nous sommes conscients que de plus en plus de femmes ont des emplois atypiques, soit qu'elles travaillent à la maison ou à temps partiel. Cela nous préoccupe beaucoup et c'est ce qui, en partie, explique l'écart salarial. On en parle lorsqu'il est question de l'écart salarial qui existe toujours au Nouveau-Brunswick.

+-

    M. Yvon Godin: En ce qui concerne les garderies, vous voulez un système qui ressemble plutôt à celui du Québec, qui convient aux femmes qui décident d'aller travailler et qui n'ont pas la chance d'avoir une gardienne à la maison.

    Que pensez-vous du fait que le premier ministre du Nouveau-Brunswick retarde l'entente avec le fédéral à cet effet? Je crois que cela fait beaucoup de tort aux femmes qui travaillent, n'est-ce pas?

+-

    Mme Jody Dallaire: C'est exactement cela. Nous aimerions qu'une entente soit signée le plus rapidement possible et que l'on injecte l'argent dans des garderies réglementées, tel que stipulé.

    Les femmes ou les hommes qui choisissent de rester à la maison pourraient, eux aussi, bénéficier d'un système de service de garde à temps partiel pour la socialisation de leur enfant durant quelques heures par semaine, si on leur en donnait la possibilité. Mais pour le moment, cette option n'est pas à la disposition des familles du Nouveau-Brunswick.

  +-(1250)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Godin.

    Monsieur Hubbard.

[Traduction]

+-

    L'hon. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, monsieur le président.

    J'ai quelques petites questions mineures à vous poser. Premièrement, on lit ceci à la page 2 du mémoire de l'organisation anti-pauvreté: « L'écart de pauvreté chez les assistés sociaux demeure épouvantablement élevé: il va jusqu'à 18 937 $... en Ontario ».

    Que signifie véritablement ce que vous dites là? Une famille de quatre en Ontario devrait avoir quel niveau de revenu pour être au-dessus du seuil de la pauvreté?

+-

    M. Dennis Howlett: Ce dont nous parlons là c'est de l'écart négatif qui sépare une telle famille du seuil de la pauvreté. Il existe diverses mesures de la pauvreté. Celle qui est le plus couramment utilisée est le seuil de faible revenu.

+-

    L'hon. Charles Hubbard: Mais ce que je vous demande, c'est le seuil de pauvreté que vous utilisez. Est-ce, mettons, 30 000 $ par an pour une famille de quatre?

+-

    M. Dennis Howlett: Oui, environ. Mais cela dépend de la taille de la ville. Une ville comme Toronto a un seuil de pauvreté supérieur étant donné son coût de la vie. Le seuil de la pauvreté est en fait légèrement inférieur dans une province comme le Nouveau-Brunswick, le coût du logement étant sensiblement plus bas.

+-

    L'hon. Charles Hubbard: Dans le cas de Summerside, à l'Île-du-Prince-Édouard, quel serait ce seuil pour une famille de quatre? Le savez-vous?

+-

    Mme Paulette Halupa: Non, je n'ai pas les chiffres avec moi — mais je pourrais vous en parler, d'un point de vue personnel.

+-

    L'hon. Charles Hubbard: Non, nous pourrions sans doute tous faire cela. S'agissant d'élaborer un programme national, cela est très difficile, car le logement est un si gros facteur à Toronto, par exemple, comparativement à Moncton ou Summerside.

    Comme vous l'expliquiez dans votre mémoire, ce sont les enfants qui sont le plus touchés — les enfants qui vont à l'école sans petit-déjeuner, qui n'ont pas d'argent pour le déjeuner, qui ne peuvent pas participer aux programmes de sport parce qu'ils n'ont pas les moyens d'acheter le matériel. Prenez même les Boy Scouts du Canada aujourd'hui; il en coûte environ 300 $ pour un scout de participer aux différents programmes sur une année. Il s'agit réellement d'une situation très difficile pour de nombreuses familles.

    J'estime, monsieur le président, qu'il nous faudrait prendre note de cela. J'ignore quelle politique nous pourrions adopter et qui fonctionnerait à l'échelle nationale.

    Un grand nombre d'arguments très forts nous ont été servis dans le mémoire du Conseil consultatif sur la condition de la femme. Je suis certain que la question du partage des biens matrimoniaux chez les Autochtones est bien plus complexe que le simple fait de se lever au Sénat, en toute bonne foi, pour déposer un projet de loi, car cela est très profond. Cela remonte aux questions constitutionnelles de 1982, qui ont été ramenées de Grande-Bretagne, et ainsi de suite, et à la Charte qui a été adoptée.

    Vous parlez également dans votre mémoire des femmes et de ce qui se passe quand un couple se sépare. Je pense qu'un aussi gros problème, bien souvent — et j'ai parcouru cela très rapidement — est la grande difficulté que l'on éprouve dans ce pays pour faire fonctionner les pensions alimentaires versées par un époux. Les provinces s'efforcent de traiter de cette question, mais j'aimerais savoir si vous auriez des suggestions pour un cas où le mari quitte Moncton pour aller travailler à Calgary, laissant derrière lui sans entretien sa femme et trois enfants. C'est là une situation très grave.

    Existe-t-il un quelconque mécanisme fédéral auquel l'on pourrait recourir pour instaurer un système permettant de veiller à ce que les pensions alimentaires soient véritablement versées? Je ne souhaite aucunement vous tendre un piège, mais il s'agit d'un très gros problème dans ce pays. J'ignore quel pourcentage des paiements au titre de pension alimentaire sont véritablement payés, mais dans un nombre appréciable de cas l'épouse doit trouver le moyen de traverser des frontières provinciales de façon à essayer de...

    Je vais peut-être passer maintenant aux services de garde d'enfant, et nous pourrions peut-être revenir là-dessus.

    Dans le cadre du système québécois, je pense que 60 p. 100 des enfants au Québec sont servis, mais il demeure encore un nombre important d'enfants qui ne jouissent pas de cette attention, de ce programme. Je sais que cela augmente, mais ils ont dû porter le coût à la journée à, quoi, 5 $ ou 8 $? Tout le monde au Québec est fâché par cette grosse augmentation, mais au Nouveau-Brunswick, il en coûte sans doute environ 25 $ ou 30 $ par jour par enfant, n'est-ce pas?

    Ce que vous êtes en train de dire, en réalité, c'est qu'il nous faudrait commencer avec ce que nous avons au lieu de nous inquiéter de ce que nous n'avons pas. Est-ce cela que vous dites, soit qu'il est préférable de financer ce que l'on a, d'y investir notre argent, au lieu de nous préoccuper du sort de quelqu'un qui habite dans un petit coin comme le mien, Red Bank, et qui n'a pas droit à sa place dans sa collectivité?

  +-(1255)  

+-

    Mme Jody Dallaire: J'imagine que notre position est qu'il nous faut bel et bien commencer avec ce que nous avons. À l'heure actuelle, dans notre province, environ 70 p. 100 des services de garde d'enfant sont assurés par des fournisseurs de type commercial, alors il nous faut certainement appuyer et les services à but non lucratif et les services à but lucratif. Mais je pense qu'il nous faut augmenter le nombre des places. Il nous également élargir géographiquement l'offre des services de garde d'enfants. Je pense qu'il nous faudrait commencer par cibler les régions où des services de garde d'enfant ne sont pas disponibles et nous efforcer d'en augmenter la couverture dans le temps.

+-

    L'hon. Charles Hubbard: Vous vous occupez toutes les deux activement du programme. Il y a environ 23 millions de dollars... j'oublie le chiffre exact. Quel est le chiffre pour le Nouveau-Brunswick? Quelqu'un le connaît-il?

+-

    Mme Jody Dallaire: C'est 100 millions de dollars sur cinq ans.

+-

    L'hon. Charles Hubbard: Ce qui donne environ 20 millions de dollars par an. Que cela vous permettrait-il de faire dans le cadre des programmes que vous connaissez, à Moncton, mettons? Il en coûte à l'heure actuelle à une mère ou à un père 25 $ ou 30 $ par jour pour maintenir un enfant dans un programme.

+-

    Mme Jody Dallaire: Je pense que cela dépend de la façon dont l'argent est investi. Je crois que l'argent ne devrait pas être versé sous forme de subvention aux parents mais être plutôt versé directement aux établissements, afin que ceux-ci puissent faire leur planification. À l'heure actuelle, un grand nombre d'installations sont sur le point de faire faillite. Si l'on veut leur permettre de planifier à long terme, alors il nous faut des cibles et des échéanciers de planification à long terme pour que le système soit durable. Il nous faut changer la façon dont nous finançons les services de garde d'enfant, car à l'heure actuelle cela est principalement financé par les contributions des parents.

+-

    Le président: Merci, monsieur Hubbard.

    Monsieur Solberg.

+-

    M. Monte Solberg (Medicine Hat, PCC): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à vous tous de vos exposés.

    J'aimerais commencer par dire que j'apprécie que le Conseil consultatif sur la condition de la femme ait soulevé la question des droits relatifs aux biens matrimoniaux, car il s'agit là d'une question qui me rend perplexe. Je m'explique. Je suis député depuis 12 ans maintenant, et c'est un dossier qui est tout le temps revenu à intervalles réguliers. Le sénateur Kinsella a bougé pour faire avancer les choses, et je sais qu'un des mes collègues, Brian Pallister, a de nombreuses fois poussé en ce sens.

    Je ne comprends pas pourquoi cette question n'a pas encore été résolue. Pour moi, il s'agit d'une question de justice fondamentale. Dans un pays qui se fait une fierté d'essayer d'être juste, cela me laisse perplexe. Je ne comprends pas. J'apprécie donc que vous souleviez la question. J'espère que vous continuerez de le faire. Vous jouirez certainement de notre appui si vous continuez de pousser en ce sens, comme nous avons nous-mêmes essayé de le faire plusieurs fois.

    Je tiens à aborder la question de la garde d'enfants. Mme Dallaire a soulevé la question du choix et le fait que de nos jours les parents n'ont bien souvent pas de choix. Il leur faut recourir aux services de garde d'enfant qu'ils trouvent, même s'ils préféreraient peut-être avoir une place dans une garderie réglementée. Je suis d'accord; je comprends que cela puisse être un problème. De l'autre côté, les gens qui aimeraient avoir le choix de rester à la maison n'ont peut-être pas cette possibilité parce qu'ils sont trop lourdement imposés, parce que les deux parents travaillent ou bien parce qu'ils n'ont pas des revenus suffisants, ou autre.

    Qu'y a-t-il de mal avec un système en vertu duquel vous payez les parents directement? Mme Petitpas-Taylor a soulevé la question d'un crédit remboursable. Qu'en serait-il si l'on payait les parents directement et si on les laissait tout simplement choisir? Si les gens préfèrent une place dans une garderie réglementée, alors ils pourraient choisir cela, ou alors ils pourraient choisir de rester à la maison ou demander à la grand-mère de s'occuper des enfants.

    Qu'y a-t-il de mal avec un tel système?

+-

    Mme Jody Dallaire: La première chose est que cela ne ferait rien pour créer des places. Comme je l'ai déjà dit, un grand nombre de services de garde d'enfants luttent pour leur survie financière car ils ne disposent pas de fonds qui leur permettent de planifier à long terme.

    Je suppose que l'autre chose est que je sais qu'il y a des économistes qui ont fait une étude portant exactement là-dessus, c'est-à-dire sur ce que cela coûterait de payer des parents pour qu'ils restent à la maison. Nous avons en fait inclus cela dans notre mémoire à la page 4. Ils estiment que si toutes les mères avec des enfants âgés de moins de six ans devaient quitter la population active, l'emploi au Canada diminuerait de 7,5 p. 100. À long terme, cela coûterait à l'économie canadienne 85 milliards de dollars par an, soit huit fois le coût de services de garde d'enfant universels.

+-

    M. Monte Solberg: Merci de ces explications. Cela me fait cependant penser à une chose que disait Mme Halupa. Lorsque vous prenez le scénario de la pire éventualité et que vous la présentez comme étant le résultat, alors cela exagère de beaucoup, bien sûr, l'incidence réelle. Je ferai simplement une mise en garde contre cela. Je pense que Mme Halupa a dit quelque chose de tout à fait juste lorsqu'elle a soulevé cela tout à l'heure, alors qu'elle parlait des avantages.

    Cela étant dit, même si nous acceptons ce scénario apocalyptique, à qui revient en réalité le choix? Le choix ne devrait-il pas revenir aux parents? Si nous croyons au choix, et vous avez souligné cela tout à l'heure, alors celui-ci ne devrait-il pas leur revenir à eux?

·  +-(1300)  

+-

    Mme Jody Dallaire: À l'heure actuelle, les parents financent directement le service, et cela n'a pas donné lieu à la création de nouvelles places. La seule façon, donc, de multiplier les places est d'investir publiquement dans le système.

+-

    M. Monte Solberg: De quelle façon les parents sont-ils financés directement à l'heure actuelle?

+-

    Mme Jody Dallaire: À l'heure actuelle, il y a un financement pour les familles à faible revenu qui n'ont pas les moyens de payer des services de garde d'enfant, que ceux-ci soient non réglementés ou réglementés, mais cela ne fait rien pour multiplier le nombre des places. Les parents qui n'ont pas les moyens de payer bénéficient donc de subventions.

+-

    M. Monte Solberg: Mais il existe des places en sus de celles qui sont directement subventionnées par le gouvernement, n'est-ce pas?

+-

    Mme Jody Dallaire: Il y a dans la province des places pour un enfant sur neuf.

+-

    M. Monte Solberg: Ce que j'essaie de dire c'est qu'il y a certaines places qui sont créées — et peut-être que vous estimez qu'elles ne le sont pas en nombre suffisant, mais il y en a tout de même — même si celles-ci ne sont pas créées directement par le gouvernement. Elles résultent du fait que des parents achètent des places et que quelqu'un, que ce soit une organisation à but non lucratif ou une organisation à but lucratif, dise, « Nous pensons pouvoir lancer une affaire ou créer une organisation qui saura se maintenir pendant un certain temps », n'est-ce pas?

+-

    Mme Jody Dallaire: Je sais qui à l'heure actuelle subventionne réellement le coût des services de garde d'enfant: le personnel. Lorsque nous avions deux enfants d'âge préscolaire en garderie, nous payions 12 000 $ par an. Même avec un tel revenu en provenance des parents, dont certains bénéficiant de subventions gouvernementales, le personnel ne gagne que des salaires correspondant au seuil de la pauvreté. Ce sont eux qui, à l'heure actuelle, subventionnent ce programme.

+-

    M. Monte Solberg: Je m'adresse maintenant à la coalition anti-pauvreté. J'ai relevé dans votre mémoire une partie traitant du logement, mais je n'y ai rien vu au sujet de logements coopératifs. J'aimerais savoir si vous avez un avis là-dessus.

    Je ne pense pas que l'on ait construit d'unités ou de logements coopératifs dans ce pays depuis fort longtemps, et je me demande pourquoi. Cela m'a toujours paru être une façon meilleure et plus humaine de loger les gens au lieu d'empiler toutes sortes d'unités ensemble sans forcément avoir le bon mélange de logements pour produire les meilleurs résultats.

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    M. Dennis Howlett: Je conviens que les coopératives d'habitation sont un modèle formidable. C'en est un que le Canada a en fait créé et dont d'autres pays se sont inspirés. Le vrai problème est que le financement fédéral pour le logement a, à toutes fins pratiques, été éliminé en 1995 et que cela fait longtemps que l'on se débrouille sans rien voir venir. Le nombre de nouvelles unités que les coopératives d'habitation ont donc pu construire a été de beaucoup réduit.

    Nous comptons qu'une partie des nouveaux crédits promis dans le dernier budget seront disponibles pour appuyer les coopératives d'habitation. Le gouvernement vient en fait tout juste de signer une entente avec la Fédération de l'habitation coopérative du Canada en vue du soutien au secteur des habitations coopératives. Nous espérons donc que cela marquera un renouveau de cette partie de la solution au problème du logement, solution dont nous avons besoin.

    Il nous faudrait cependant faire une mise en garde: il importe, dans le cas des logements sociaux, d'avoir une garantie qu'une partie d'entre eux seront réservés aux personnes ayant un réel besoin de logement. Certains des programmes passés ont trop bénéficié à des personnes aux besoins en matière de logement ou au revenu modérés, alors qu'il y a une crise énorme sur le plan abordabilité pour les plus démunis. Il importe donc de réserver une certaine proportion de ces logements aux personnes aux revenus les plus faibles.

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    Le président: Merci, monsieur Solberg.

    Pour votre gouverne, au Québec, nous avons des coopératives, même dans ma circonscription, dont au moins une partie n'a pas besoin de logements abordables. Les gens ont élaboré un projet de coopérative et cela fonctionne très bien.

    Madame Petitpas-Taylor, vous recommandez, à la page 8 de la version française de votre mémoire, que les autorités fédérales entreprennent de consulter les provinces afin d'établir des normes nationales de protection de l'emploi en ce qui concerne les congés de maternité et parentaux. Mais cela n'existe-t-il pas déjà? Je pensais que nous avions déjà cela en vertu de l'assurance-emploi. Les congés de maternité existent déjà. Ceux-ci ne sont-ils pas régis par des normes nationales? Êtes-vous peut-être à la recherche de quelque chose de plus?

·  -(1305)  

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    Mme Rosella Melanson: La possibilité de prendre de tels congés devrait être la même dans toutes les provinces, ou en tout cas il devrait y avoir une meilleure norme applicable dans toutes les provinces. La situation n'est en fait pas si mauvaise que cela au Nouveau-Brunswick. Notre loi provinciale en matière de normes d'emploi dit que l'on a accès à ces congés même si l'on vient tout juste d'être embauché hier. Il n'est pas nécessaire d'avoir travaillé six mois ou un an, comme c'est le cas dans certaines provinces. Il existe des différences entre les lois en matière de normes d'emploi dans les différentes provinces. Et c'est cela que nous disons, soit que la situation devrait être plus uniforme à l'échelle des provinces.

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    Le président: Je pensais que cela était déjà prévu dans la loi fédérale. C'est donc provincial. Chaque province décide...

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    Mme Rosella Melanson: Chaque province a sa loi.

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    Le président: Cela n'est donc pas normalisé. Merci de ce renseignement.

    Merci aux témoins. C'était un petit groupe, mais, comme vous l'avez constaté, les questions ont été très variées.

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    Mme Paulette Halupa: Puis-je disposer de 30 secondes?

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    Le président: D'accord.

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    Mme Paulette Halupa: M. Hubbard demandait ce qui pourrait être fait à l'échelle fédérale pour améliorer la situation des enfants qui partent pour l'école la faim dans le ventre et qui n'ont pas accès aux programmes dont bénéficient d'autres enfants: mettez fin à la récupération de la prestation fiscale pour enfants. Chaque augmentation que vous me consentez m'est arrachée, à raison d'un dollar pour un dollar. Cela avait eu pour objet d'aider les parents pauvres. Il n'y a personne de plus pauvre que l'assisté social.

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    M. Monte Solberg: Pas au Nouveau-Brunswick; le Nouveau-Brunswick et le Manitoba ne font pas cela.

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    M. Dennis Howlett: C'est exact. Paulette vient de l'Île-du-Prince-Édouard. Nous devrions féliciter le Nouveau-Brunswick.

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    Le président: Merci.

    Nous allons conclure la réunion. Je comprends que ces questions ne sont pas faciles, mais c'est pourquoi nous sommes ici. Nous souhaitons recueillir vos idées.

    Merci encore de nous avoir accordé de votre temps. Nous vous en sommes reconnaissants.

    La séance est levée.