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Je déclare la séance ouverte.
Nous entamons la 13e réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous sommes le mardi 20 avril 2010.
Vous avez devant les yeux l'ordre du jour. Pendant la première heure et demie de la réunion, nous allons continuer et peut-être achever notre étude du crime organisé. Je reconnais qu'il faudra peut-être donner d'autres instructions à nos analystes. Ces derniers travaillent à la version préliminaire d'un rapport.
Durant la dernière demi-heure, nous allons entendre John Weston, député de West Vancouver — Sunshine Coast — Sea to Sky Country. Pas si mal, hein? Il nous parlera du projet de loi C-475, son projet de loi.
Pour mieux mener notre étude du crime organisé, nous accueillerons des représentants de Statistique Canada, et plus particulièrement du Centre canadien de la statistique juridique. Julie McAuley, qui en est la directrice, est parmi nous; nous accueillerons aussi Mia Dauvergne, qui est analyste principale, et Craig Grimes, qui est chef conseiller du programme des tribunaux. Nous accueillons aussi John Martin de l'University of the Fraser Valley. Il est criminologue à l'université en question.
Je crois que vous avez été informé de la marche à suivre. Statistique Canada, vous disposez de 10 minutes pour présenter un exposé. Monsieur Martin, vous disposez de 10 minutes. Ensuite, nous inviterons les membres de notre comité à poser des questions.
Madame Dauvergne, allez-vous parler en premier?
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Merci de l'occasion que vous nous offrez de vous présenter ce matin un exposé sur le crime organisé. Mes collègues, M. Craig Grimes et Mme Mia Dauvergne, m'aideront à répondre à toute question que vous voudrez bien poser.
Veuillez vous reporter à la première diapositive de la présentation; vous verrez que c'est la première d'une série de diapositives qui nous renseignent sur les homicides liés à une organisation criminelle ou à un gang de rue. Les graphiques présentés laissent voir le nombre d'homicides attribuables aux gangs et le nombre d'homicides non attribuables à des activités de gang depuis 10 ans. Ce sont les cas où la police a déterminé que l'homicide est attribuable à un groupe criminalisé organisé ou à un gang de rue.
En 2008, la police signale 611 homicides au total commis au Canada. Dans un cas sur quatre, soit 138 cas, l'homicide est attribuable à un gang selon la police. Cela représente une augmentation de 20 par rapport à 2007.
Les homicides attribuables à des gangs ont augmenté en nombre depuis 10 ans, comme le graphique de gauche vous permet de le voir. Cette montée fait contraste avec la tendance constatée quant au nombre d'homicides non attribuables à des gangs, comme on le voit à droite. Les armes à feu sont plus susceptibles d'avoir servi à commettre un homicide attribuable à des gangs que tout autre type d'homicides. En 2008, 77 p. 100 des homicides attribuables à des gangs ont été commis au moyen d'une arme à feu, par rapport à 20 p. 100 environ des homicides où il n'est pas question de gangs.
Les deux diapos qui suivent indiquent les lieux où ont été commis les homicides attribuables à des gangs. La première diapo présente une répartition régionale. À la fin des années 1990, le plus grand nombre d'homicides attribuables à des gangs étaient commis au Québec. Toutefois, ces dernières années, il y a eu aussi de nombreux homicides attribuables à des gangs en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique. Le nombre global d'homicides a augmenté en Alberta et en Colombie-Britannique de 2007 à 2008. Les deux tiers de l'augmentation en Alberta s'expliquent par une augmentation des homicides attribuables à des gangs. En Colombie-Britannique, les homicides attribuables à des gangs comptent pour le tiers environ de l'augmentation du nombre d'homicides dans la province.
Si vous voulez bien passer à la diapo 4, vous verrez que la plupart des homicides attribuables à des gangs ont été commis dans les plus grandes villes du Canada. Les 10 plus grandes régions métropolitaines de recensement ont été le lieu de près de la moitié des homicides commis au Canada en 2008, mais de plus des deux tiers des homicides attribuables à des gangs. Ce sont en particulier Toronto, Vancouver, Montréal et Calgary qui présentent le nombre le plus élevé d'homicides attribuables à des gangs. Ensemble, ils comptent pour 55 p. 100 du total des homicides du genre en 2008.
À la diapo suivante, nous nous penchons sur le cas des jeunes auteurs présumés d'homicides attribuables à des gangs. En 2008, 501 personnes ont été accusées d'homicides, dont 55 jeunes ayant entre 12 et 17 ans. Nous savons que les jeunes auteurs présumés d'homicides font souvent partie d'un gang. Chez les auteurs présumés d'homicides, 32 p. 100 des cas attribués à des jeunes sont liés à un gang, par opposition à 11 p. 100 des cas attribués à un adulte. Comme les cas ne sont pas nombreux, le nombre de jeunes accusés d'homicides attribuables à des gangs fluctue d'une année à l'autre. Comme le graphique de gauche permet de le voir, le taux d'homicides a tendance à augmenter depuis 2002, de façon générale, même si une baisse se fait voir en 2008.
Je vous prie de passer à la diapo 6. Il est très difficile de jauger l'ampleur de l'activité criminelle organisée au Canada. Certains organismes, par exemple le Service canadien des renseignements criminels, rassemblent des informations détaillées sur les organisations criminelles, mais c'est d'abord et avant tout un travail de renseignement qui prend souvent un caractère secret. De manière générale, les informations prennent une forme qui ne se prête pas à une analyse statistique.
À Statistique Canada, nous disposons d'information sur quatre infractions au Code criminel attribuables au crime organisé. C'est l'objet de la diapositive que vous avez devant les yeux. Les informations sont limitées sur les autres infractions commises par les organisations criminelles, par exemple les infractions liées aux drogues, à la prostitution ou à la fraude. Nous collaborons actuellement avec les services policiers à essayer d'améliorer cet aspect du travail.
Outre les quatre infractions énumérées, le vol de véhicules à moteur représente le seul cas de crime où nous pouvons estimer la participation des organisations criminelles. Après l'hypothèse selon laquelle la police ne retrouve pas la plupart des véhicules volés par une organisation criminelle, il est établi que quatre vols de véhicules à moteur sur dix commis en 2008 sont attribuables à une organisation criminelle.
Comme on le voit à la diapo 7, plusieurs des parutions à venir de Statistique Canada sont susceptibles d'éclairer le travail de votre comité. Citons notamment les tableaux de données sur les activités des gangs de rue, qui seront publiés en juin, et les statistiques des crimes déclarées par la police, qui seront publiées en juillet et qui nous renseigneront notamment sur les tendances à court et à long termes en ce qui concerne le nombre global de crimes avec ou sans violence commis à l'échelle nationale, provinciale et territoriale, et à l'échelon des régions métropolitaines de recensement.
Les statistiques sur les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes seront publiées en juillet. Ce sera un résumé des tendances des tribunaux provinciaux et territoriaux de juridiction criminelle pour adultes dans tout le Canada. Les caractéristiques des cas survenus et des personnes accusées, le pourcentage de verdicts de culpabilité et les tendances relatives aux peines attribuées figurent parmi les informations qui y seront présentées, aux côtés de questions connexes. Des données semblables sur les tribunaux de la jeunesse seront publiées en même temps.
À partir de ces données, il sera possible de produire des statistiques sur les cas où la personne est accusée d'avoir commis une infraction au Code criminel qui se rapporte en particulier au crime organisé. Les données tirées du cycle de 2009 sous forme d'une enquête sociale générale sur la victimisation seront publiées en août. L'enquête en question permet de réunir des données sur la victimisation et sur la perception qu'a le public de la criminalité et du système de justice. Elle mesure le risque de victimisation avec violence et de victimisation des ménages, l'utilisation que font les victimes des services offerts et les perceptions et craintes nourries à propos de la criminalité.
Enfin, les données tirées de l'enquête de 2009 sur l'homicide au Canada seront publiées en octobre. Nous serons heureux de revenir témoigner à l'automne pour vous présenter les statistiques à jour tirées de ces sources de données. Encore une fois, merci de l'occasion offerte de prendre la parole ce matin. Voilà qui conclut l'exposé.
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Merci beaucoup. J'apprécie au plus haut point l'invitation à témoigner devant le comité. Je tiens cela pour tout un honneur.
Je suis criminologue. Je fais ce travail à la University of the Fraser Valley depuis plus de 20 ans.
J'aimerais traiter de la question du crime organisé dans le contexte de mesures de lutte contre la criminalité organisée qui, en vérité, tiennent à une évolution fondamentale de notre façon de procéder à certains égards au Canada dans le domaine de la justice pénale. J'ai pu parcourir le témoignage des personnes qui ont déjà pris la parole devant le comité. Il a beaucoup été question de mesures de répression et de projets de loi précis à venir, ce que j'applaudis. Tout de même, à mon avis, en l'absence d'une révision fondamentale de l'approche de justice pénale appliquée, les résultats demeureront limités.
Je traiterai de cette question sous trois aspects.
Premièrement — et cela me trouble beaucoup —, nous sommes presque résignés à accepter, à tolérer le niveau de criminalité particulier qu'il y a. Encore et toujours, fraîchement renseignés par Statistique Canada, certains commentateurs brandissent les dernières données et clament: « Vous voyez! La criminalité est à la baisse. » L'argument est souvent utilisé pour remettre en question les projets de loi que propose le gouvernement en place. Les gens disent: « Eh bien, nous n'avons pas besoin de changer les pratiques de détermination de la peine; nous n'avons pas besoin de toucher au cautionnement, étant donné que la criminalité est à la baisse. »
Les gens qui disent cela prennent tous pour référence les pics atteints durant les années 1970 et 1980, après lesquels il ne pouvait y avoir qu'une baisse. La criminalité a atteint des sommets inégalés durant la période en question; maintenant, elle se maintient plus ou moins à ce niveau, près du sommet. Nous sommes nombreux à souhaiter que la criminalité baisse jusqu'à atteindre le niveau qu'elle avait au début des années 1960, au pied de la montagne. Je ne connais à peu près aucun commentateur qui se reportera au taux de criminalité observé au début des années 1960. Or, le taux de criminalité est nettement plus élevé aujourd'hui, particulièrement dans le cas des infractions avec violence.
Cela devrait être considéré comme troublant, selon moi, puisque nous avons l'illusion que, d'une façon ou d'une autre, la criminalité chute et que, évidemment, tout est beau, inutile d'instaurer quelque réforme spectaculaire. Je dirais que, oui, la criminalité a diminué quelque peu, mais elle est loin de correspondre à ce qu'elle a déjà été.
Ce qui me trouble, c'est qu'on tienne cela pour normal. En rapport avec d'autres mesures gouvernementales, nous aspirons à la tolérance zéro. On pourrait faire valoir qu'il y a aujourd'hui beaucoup moins d'hostilité envers les gais et les lesbiennes qu'il y a 20 ans, qu'il y a beaucoup moins de racisme non dissimulé qu'il y a 20 ans, mais personne n'irait faire valoir que nous ne devons pas préconiser des mesures à cet égard, que nous ne devrions pas adopter des projets pour sensibiliser les gens et favoriser la diversité. Nous essayons de faire en sorte que ça baisse encore plus.
Je trouve ça très bizarre. Là où il s'agit de revendeurs de drogues, là où il s'agit de délinquants violents, nous disons: « Eh bien, la criminalité a beaucoup baissé par rapport aux années 1970 ou 1980; les mesures que nous appliquons en ce moment fonctionnent visiblement, inutile d'adopter les nouvelles initiatives qui sont proposées. »
Je demande donc que les statistiques citées soient envisagées non pas en référence aux années 1980, mais plutôt au début des années 1960. Je crois que nous avons commencé à réunir des renseignements sur la question en 1962; aujourd'hui, nous sommes très loin des niveaux constatés à l'époque. C'est le premier point que je ferais valoir.
Le deuxième, qui est lié au premier, consiste à réagir au mantra qui est employé: les sanctions ne fonctionnent pas, les peines sévères ne fonctionnent pas. Une des difficultés qui se présentent, c'est que les gens définissent très rarement les termes qu'ils emploient. Qu'entendons par ce qui « fonctionne » ou ce qui « ne fonctionne pas »? Les sanctions sont clairement utiles. C'est un élément fondamental de la psychologie, du comportement des êtres humains. La dynamique des punitions et récompenses est universelle. Les parents y recourent pour élever leurs enfants. Les employeurs y recourent. Nous l'employons partout. On ne peut simplement rejeter les peines prolongées du revers de la main en prétextant que, pour une raison ou une autre, punir n'est pas vraiment efficace — la notion ne tient pas la route. Le délinquant qui se trouve en prison ne peut plus agir. Il est retiré de la circulation. Un bandit en taule ne peut plus jouer son rôle.
Il y a des gens qui sont condamnés pour 40, 50, 60 chefs d'accusation, qui reçoivent une peine avec surveillance dans la collectivité et puis qui se remettent à commettre des actes criminels. Je dirais pour ma part que le fait de priver ces gens-là de la possibilité de récidiver fonctionne bel et bien. De même, il faut prendre en considération l'exemplarité des peines plus sévères, autre objectif de la détermination de la peine. C'est entendu comme une forme de résolution. Les victimes et la collectivité ont l'impression que justice a été faite, autre objectif de la détermination de la peine.
Quand les gens affirment que punir ne fonctionne pas, ce qu'ils disent, en fait, c'est que ça n'a pas d'effet dissuasif. Les résultats des recherches sur ce point sont variables. Selon telle ou telle étude, les peines ont un effet dissuasif ou elles n'en ont pas, la chose étant variable en fonction de l'infraction et de l'auteur de l'infraction. Même si la peine n'a pas d'effet dissuasif, je ne crois pas que cela justifie de rejeter catégoriquement l'idée de peines plus sévères.
De la façon dont les statistiques sont présentées, la criminalité connaît un déclin, ce qui donne confiance, et des munitions, aux personnes qui affirment qu'ils ne vaut même pas la peine d'envisager l'adoption de peines plus sévères, qu'il ne vaut pas la peine d'envisager même de rajuster les règles de la libération conditionnelle, étant donné que la criminalité décline. Encore une fois, la mesure dans laquelle il s'agit bel et bien d'un déclin est discutable. Les données globales invitent peut-être à le penser, mais, si nous nous penchons sur le cas des crimes liés aux drogues, qui ne figurent pas dans les données pour la majeure partie, et que nous nous penchons sur le cas des crimes violents commis par les jeunes contrevenants, nous constatons qu'il n'y a pas de baisse; au contraire, le phénomène connaît une montée vertigineuse, ce qui devrait nous troubler.
Quand les gens font valoir que punir est inutile parce que c'est inefficace, habituellement, ils essaient de dire que les peines n'ont pas d'effet dissuasif. Les gens ne disciplinent pas leurs enfants pour donner l'exemple à l'enfant du voisin. Ils le font parce qu'ils y voient une façon de réagir au comportement affiché. Je crois que nous nous sommes éloignés d'une notion fondamentale — l'appréciation du comportement des êtres humains dans ce qu'il a de fondamental pour l'application des peines.
Le troisième point que je ferais valoir concerne le dialogue sur la question. Les statistiques servent à rejeter catégoriquement tout débat légitime, toute discussion légitime et tout dialogue. Lorsque quelqu'un a proposé une mesure ou un projet de loi, ce que j'ai noté chez des commentateurs, des universitaires, c'est l'usage des termes « draconien » ou « barbare » ou de phrases du genre: « Ah, vous voulez créer un système de justice à l'américaine, vous voulez faire comme les Américains. » Le gouvernement n'a rien proposé qui se rapproche même de ce que l'on fait aux États-Unis. Il n'y a pas de peine maximale qui s'applique à la troisième faute. Il n'y a pas de condamnation à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. Il y a quelques cas où s'applique un minimum obligatoire, qui n'ont rien à voir avec l'idée telle qu'elle s'applique chez les Américains. Ce sont des arguments toxiques qui empoisonnent le débat à mon avis. Cela nous amène vraiment à nous interroger sur la légitimité du dialogue qui a lieu sur les mesures adoptées dans le domaine criminel.
Statistiquement, nous avons devant les yeux des informations troublantes, particulièrement en ce qui concerne les crimes commis avec une arme à feu ou la violence chez les jeunes et encore l'ampleur de la criminalité transnationale ou internationale qui fait du Canada une sorte d'escale, qui n'entrent pas dans le calcul du taux de criminalité usuel. Ces phénomènes ont un effet dévastateur sur les collectivités, mais il n'en est pas même question dans la discussion. Il y a des renseignements limités que nous pouvons tirer des déclarations uniformes de la criminalité et des rapports sur la victimisation de Statistique Canada. Il ne me paraît pas responsable de bondir sur l'occasion qui se présente, comme nous l'avons fait, et de proclamer: voilà qui démontre rigoureusement que nous n'avons pas à adopter de réformes ou de nouvelles mesures.
Je ferais valoir pour ma part que les mesures que nous appliquons ne fonctionnent pas. Vu l'évolution de la situation depuis plusieurs décennies, le taux de criminalité devrait correspondre à une fraction de ce qu'il est. La proportion de jeunes au pays n'a jamais été si faible.
Il y a la technologie améliorée, le 911, les services ambulanciers et les téléphones cellulaires qui nous permettent de réagir plus rapidement à un incident. Garder le taux de criminalité un peu en deçà de ce qu'il était ne me paraît pas adéquat, étant donné toutes les ressources que nous avons à notre disposition aujourd'hui, et qui n'existaient pas à une époque antérieure.
Merci beaucoup.
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Nous allons reprendre les travaux.
Nous allons maintenant nous pencher sur le projet de loi C-475, Loi modifiant la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, dont la méthamphétamine et l'ecstasy.
Nous accueillons parmi nous le parrain du projet de loi, John Weston, député de West Vancouver - Sunshine Coast - Sea to Sky Country. Voilà tout un nom, mais nous sommes heureux de vous accueillir. Vous disposez de 10 minutes pour présenter un exposé, mais avant que vous ne le fassiez, je tiens à rappeler aux membres du comité que nous avons demandé que nous parviennent au plus tard aujourd'hui les noms de tous témoins à convoquer. Si la liste n'est pas longue, nous allons aussi passer à l'étude du projet de loi article par article au moment de la prochaine réunion. Voilà ce que je propose.
À la prochaine séance aussi, vous devriez le savoir, nous allons peut-être pouvoir nous pencher sur deux nominations par décret, si le comité le souhaite. Il y a un décret prévoyant la nomination au poste de sous-ministre et sous-procureur général. Bien entendu, il y a aussi la nomination de l'ex-juge Iacobucci. Certes, nous pouvons accueillir un des hommes en question à notre prochaine réunion.
Si nous pouvons étudier le projet de loi article par article et traiter de cette question-là aussi, ce serait peut-être un bon plan.
De toute façon, M. Weston est parmi nous.
Je vous prie de commencer. Vous disposez de 10 minutes pour présenter un exposé.
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Merci, monsieur le président et membres du comité.
[Traduction]
Je suis très reconnaissant de pouvoir être là.
[Français]
Je suis étonné que vous ayez planifié votre horaire de la sorte.
[Traduction]
Voilà que vous m'accueillez aujourd'hui, six jours seulement après l'adoption du projet de loi en deuxième lecture à la Chambre. Je vous en remercie beaucoup.
C'est un honneur pour moi de parler de ce projet de loi, qui modifierait la Loi réglementant certaines drogues et autres substances. Nous venons à peine d'adopter à l'unanimité le projet de loi en question, en deuxième lecture, mercredi. C'est la première fois qu'un projet de loi émanant d'un député fait l'unanimité à la présente législature.
Au nom de la multitude d'organismes et de personnes qui ont appuyé le projet de loi en dehors de la Chambre, je tiens à remercier les membres du comité de leur soutien.
Durant la session précédente de la législature, la Chambre a aussi donné son appui unanime à une version du projet de loi. C'était le fruit du travail de mon collègue et ami, Chris Warkentin, député de Peace River, qui mérite également qu'on le remercie de la somme de travail et de temps qu'il a investie dans cette affaire.
Je tiens aussi à remercier les collègues qui m'accompagnent aujourd'hui, Joshua Peters et Andrian Reimer, qui ne comptent plus les heures qu'ils ont consacrées à préparer le projet de loi et à réunir des appuis à son égard. Je suis sûr que l'appui unanime reçu à la Chambre tient au travail d'une longue liste de partisans en dehors de la Chambre, et qui compte jusqu'à maintenant la Fédération canadienne des municipalités, le solliciteur général de la Colombie-Britannique, la B.C. Association of Chiefs of Police, la Crystal Meth Society de la Colombie-Britannique, la municipalité de Gibsons, la municipalité de Powell River, le district de Squamish, la municipalité de Bowen Island, le district régional de Squamish-Lillooet, le chef Gibby Jacob de la première nation Squamish et plusieurs autres groupes et personnes.
Je vous accorderai d'abord, chers collègues, que je ne suis nullement spécialiste de la lutte contre les drogues, mais je suis ici pour défendre l'intérêt public, les gens de ma circonscription et tous les Canadiens qui se soucient de la lutte contre le crystal meth et l'ecstasy. Dans le contexte, je vous invite à proposer des façons d'améliorer le projet de loi ou de faire qu'il permette mieux de réaliser l'objectif, soit d'éliminer la consommation de crystal meth et d'ecstasy au Canada.
Le projet de loi servirait à restreindre la disponibilité du crystal meth et de l'ecstasy en prévoyant des accusations supplémentaires pouvant être portées contre les fabricants des drogues. Il s'agit de drogues qui sont faciles à fabriquer, extrêmement toxicomanogènes, délétères pour la santé physique et mentale et, au moment de la fabrication, toxiques pour l'environnement. De plus en plus, les trafiquants de drogues mêlent du crystal-meth à d'autres drogues parce que ce n'est pas cher et que cela amplifie les qualités toxicomanogènes.
Le crystal meth est extrêmement toxicomanogène et produit une euphorie durable extrême. Ceux qui en consomment en deviennent vite dépendants. Son usage prolongé procure des effets plus intenses que les autres drogues.
Ces drogues ont produit leur effet sur un grand nombre de Canadiens. En Colombie-Britannique, d'après les estimations du ministère de la Santé, en 2003, 4 p. 100 des enfants d'âge scolaire avaient déjà consommé des drogues de type méthamphétamine. À la même époque, selon l'Alcohol and Drug Abuse Commission de l'Alberta, 5,3 p. 100 des enfants d'âge scolaire a déjà fait l'essai de stimulants de type méthamphétamine. Entre 2000 et 2004, 65 personnes sont mortes en Colombie-Britannique avec des traces de méthamphétamine dans leur organisme.
:
Si je parle français, est-ce mieux?
Des députés: Ah, ah!
[Traduction]
Ce nombre, qui augmente d'année en année, là où la statistique permet de saisir le phénomène, laisse entrevoir une tendance troublante pour tous les Canadiens. L'une des caractéristiques de ces drogues est leur façon insidieuse de créer la dépendance. L'ecstasy peut sembler être une drogue inoffensive aux yeux de certains. Elle se présente souvent sous forme de pilules colorées ornées d'un dessin amusant, par exemple, le petit visage souriant jaune, le happy face. La police a constaté que bon nombre des pilules d'ecstasy saisies contiennent des drogues plus dangereuses comme le crystal meth. Ces deux drogues combinées peuvent créer la dépendance et être toxiques. C'est une combinaison dangereuse. Les surdoses sont courantes, car ce sont des drogues qui ne sont pas réglementées, et le consommateur n'est pas en mesure de déterminer ce qu'il consomme vraiment.
Les effets secondaires de la méthamphétamine sont également inquiétants. Selon un mémoire produit en 2007 par le National Drug and Alcohol Research Centre de l'Australie, la consommation de méthamphétamine est souvent associée à la perpétration de crimes violents, et la drogue a la réputation de susciter des comportements violents.
[Français]
Le rapport des Nations Unies de 2004 illustre clairement le fléau que représente cette drogue pour les jeunes de notre pays. La consommation chronique de cette drogue entraîne de graves effets sur la santé, comme la dépendance, qui se caractérise par la quête compulsive de drogue et sa consommation, un trouble connu sous le nom de psychose amphétaminique ou méthamphétaminique caractérisée par de graves hallucinations et délires. La consommation à long terme de métamphétamine en cristaux et d'ecstasy peut entraîner la schizophrénie, un effet secondaire aux séquelles durables. Les traumatismes subis par les consommateurs comprennent notamment de graves préjudices physiques, psychologiques et moraux. Beaucoup trop de familles et de collectivités sont touchées par ces affreuses drogues.
[Traduction]
Outre le tort causé à la personne qui consomme et à sa collectivité, nous devrions, nous qui légiférons, prendre en considération les dangers pour l'environnement que pose la production de crystal meth et d'ecstasy. Comme les drogues sont produites clandestinement, il n'y a aucune façon d'en contrôler la qualité ni d'assurer la sécurité de la production ou des lieux de production. La production industrielle à grande échelle est de plus en plus courante, mais l'essentiel du crystal meth et de l'ecstasy est encore produit dans des petits laboratoires qui s'apparentent à une cuisine.
Selon un rapport produit par l'Université Carleton en 2004, la production de méthamphétamine se caractérise par sa souplesse. Des laboratoires clandestins ont été découverts dans des lieux aussi divers que des maisons privées, des chambres de motel, des chambres d'étudiants, des campings, des lieux d'entreposage et presque tout lieu qu'on peut s'imaginer. Les laboratoires paraissent inoffensifs de l'extérieur: ils sont situés dans des quartiers résidentiels, mais ils produisent des déchets toxiques, jusqu'à 5 kilogrammes de déchets pour chaque kilogramme de crystal meth qui est produit. Ils représentent aussi un risque d'incendie majeur. Selon un rapport de l'ONU, la production des laboratoires illégaux et leur démantèlement éventuel occasionnent d'importants dommages environnementaux et des dépenses considérables.
Bon nombre de mes collègues de la Chambre m'ont fait part de leurs préoccupations quant aux effets de ces drogues sur les Canadiens partout au pays. Cependant, la commercialisation du crystal meth et de l'ecstasy dépasse les frontières du Canada et ternit notre réputation sur la scène internationale. Selon un rapport de 2004 de l'ONU intitulé Prévenir la consommation de stimulants de type amphétamine chez les jeunes, des gangs de motards criminalisés et des organisations criminelles asiatiques basées au Canada ont augmenté considérablement la quantité de méthamphétamine qu'ils fabriquent et exportent aux États-Unis et aussi en Océanie, en Asie du Sud-Est et en Extrême-Orient.
Selon le même rapport, Canada est le principal fournisseur d'ecstasy de l'Amérique du Nord et, depuis 2006, tous les laboratoires d'ecstasy découverts au Canada étaient des installations de grande capacité principalement exploitées par des organisations criminelles asiatiques.
Nous avons beaucoup de ressources, de compétences et de produits de base à exporter. Il est malheureux de constater que le crystal meth et l'ecstasy comptent au nombre des exportations reconnues du Canada. En 2009, l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime a déclaré que le Canada est le plus gros fournisseur d'ecstasy des États-Unis et qu'il est également un fournisseur important du Japon et de l'Australie.
J'invite le comité à proposer des façons d'améliorer le projet de loi pour qu'il élimine autant que possible le crystal meth et l'ecstasy qui circulent illégalement au Canada. J'apprécierais aussi des idées sur la façon d'adopter rapidement le projet de loi au comité et à la Chambre, pour lui épargner le sort qu'a connu le projet de loi du député Chris Warkentin, mort au Sénat même s'il avait reçu l'appui unanime de la Chambre.
Encore une fois, je vous remercie, monsieur le président, et je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions que vous voudrez bien poser à propos du projet de loi.
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Pour répondre à mon collègue, M. Murphy, c'est sept ans qui sont prévus au paragraphe 4(3) de la loi.
J'ai une question à laquelle on ne pourra peut-être pas répondre. Pourquoi augmente-t-on la durée à 10 ans plutôt que de la laisser comme telle?
Premièrement, il est clair qu'on n'est pas contre votre projet de loi. Je suis même d'accord avec cela. Toutefois, les bandits sont beaucoup plus rapides que la police. Je suis inquiet, pour avoir été à l'Agence mondiale antidopage, pour ce qui est des athlètes olympiques et aussi des athlètes de tous les niveaux.
Tout est déjà prévu dans l'annexe I. Je l'ai examinée, et tout y est inscrit, « Méthamphétamine (N,a-diméthylbenzène-éthanamine), ses sels, dérivés », etc. Allez-vous demander à ce qu'on interdise les produits contre la grippe qui se vendent aux comptoirs des pharmacies? Ce n'est qu'une question pratique.
Je pense que tous les collègues sont d'accord avec ce projet de loi. Il n'y a aucun problème. Cependant, c'est la question pratique. N'aurait-il pas été préférable qu'on établisse un règlement, ce qui est beaucoup plus facile que d'amender une loi? Tout y est déjà. J'essaie de comprendre ce que cela apporte de plus. C'est ma question.