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Je vous remercie, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.
J'ai fait circuler un document présentant brièvement certains des points que j’aimerais aborder aujourd’hui. Certains vont se répéter. Dans ce genre de discussion, il y a des points qui sont toujours soulevés, mais cela n’enlève rien de leur importance, et j’estime qu’ils valent toujours la peine d’être répétés.
Pour vous mettre un peu en contexte, Macdonald Youth Services est une organisation caritative à but non lucratif privée qui est active depuis 1929 et qui offre du soutien et des services aux jeunes et à leur famille dans les collectivités de Winnipeg. Notre dénomination sociale est Sir Hugh John Macdonald Memorial Hostel. Un groupe de citoyens préoccupés a créé l’organisation en 1929, à la mort de Sir Hugh John, fils de John A. Macdonald, qui a joué un certain nombre de rôles au Manitoba, dont celui de magistrat de police. Dans la démarche plutôt évolutive qu’il a définie relativement à l’administration de la justice, il a envisagé des solutions qui n’incluaient pas seulement les amendes et l'incarcération. De fait, il a déterminé que les ressources, un endroit où se loger, l’accès à des emplois et un certain réconfort étaient également des moyens valables d’exercer la justice.
Nous offrons actuellement une variété de programmes axés sur les jeunes à Winnipeg et dans les environs, ainsi qu’à The Pas et à Thompson, dans le Nord du Manitoba. Nous recevons des fonds des ministères provinciaux des Services à la famille, de la Justice et de l'Éducation, ainsi que de Centraide de Winnipeg. Pour ce qui est du financement fédéral, le Programme Logement et Sans-abri nous donne des fonds pour soutenir un centre d’hébergement pour jeunes que nous exploitons. De même, nous recevons du financement de Connexion compétences de Service Canada pour un programme où l’on utilise un modèle de service communautaire appuyé par des conseillers bénévoles comme moyen pour que les jeunes acquièrent les compétences dont ils ont besoin. Ce programme est né de notre collaboration avec le ministère de la Justice et le Community Service Order Program, pour chercher des moyens de travailler avec les jeunes à changer leur façon de voir le monde, ainsi que la manière dont le monde les perçoit et leurs compétences.
En ce qui concerne l'état du crime organisé au Canada, nous mettons l’accent sur les programmes axés sur les jeunes et l'importance d’investir dans la prévention. Nous voyons les jeunes qui font partie des gangs de rue et qui prennent part à des activités criminelles, et nous estimons qu’il y a également une occasion d'intervenir à cet égard. De fait, nous avons confiance en la capacité des jeunes de faire de bons choix quand on leur donne des options réalistes. Nous connaissons également la difficulté que représente le changement et nous savons qu’il est nécessaire d’avoir des programmes accessibles, souples, résistants et efficaces. Lorsque les gens parlent d’intervention et de prévention précoces, ils se concentrent souvent sur les jeunes de zéro à six ans. Notre organisme se concentre sur les jeunes de 12 à 17 ans, ainsi que sur certains programmes qui se prolongent jusqu’au début de l'âge adulte — nous voyons également beaucoup d’occasions d'intervention et de prévention à ces stades-là. Ce qui m’inquiète, c’est que nous avons parfois tendance à considérer les adolescents comme un groupe inatteignable autrement que par les tribunaux ou la police.
Il y a certains domaines dont il n’est pas question aujourd'hui — la police et l’appareil judiciaire — qui constituent une partie importante de notre travail. Notre organisation offre quelques programmes qui ne donnent les résultats escomptés que là où l’appareil judiciaire a rendu une décision et une ordonnance de probation qui soutient notre travail. Je crois que les causes profondes de certains problèmes sont bien documentées en ce qui concerne la pauvreté, la discrimination, la toxicomanie et la violence. Je n'ai pas beaucoup de renseignements précis sur le crime organisé, mais nous nous considérons vraiment comme les adversaires du crime organisé par rapport aux jeunes avec lesquels nous travaillons. C'est l’une de leurs perspectives de carrière, si vous voulez. Nous voulons leur fournir des options pour qu'ils choisissent de ne pas s’engager sur cette voie. C'est toutefois une question difficile.
Je vais seulement parler des programmes de manière générale parce que je n’ai que 10 minutes. Je pourrais en dire beaucoup plus à leur sujet, et si vous voulez des détails, je vous en donnerai volontiers.
Les programmes doivent disposer d’employés pour prendre contact avec les jeunes. De nos jours, nous axons de plus en plus nos efforts sur l'accès à Internet et aux ordinateurs. Les jeunes avec lesquels nous travaillons ont besoin de ce contact humain pour nouer des relations et commencer à régler des questions dont ils n'ont pas voulu ou pu parler. Il faut faire participer les jeunes dans la collectivité. Nos programmes leur offrent des possibilités de travailler dans des endroits tels que la société Winnipeg Harvest, les centres pour personnes âgées, et la Société protectrice des animaux. Ainsi, ils ont l’impression de faire partie de la collectivité qui, à son tour, change d’opinion à leur sujet et les considère comme une partie viable de la collectivité.
Il faut s’élever contre le stéréotype négatif que ces personnes ont envers elles-mêmes et que la collectivité a envers ces personnes. Quand elles préparent une commande de nourriture pour des gens moins fortunés, elles se retrouvent en position d’aider, un rôle qu'elles n'ont pas joué souvent.
Nous devons permettre aux jeunes de cerner et de développer leurs points forts. Leurs forces ne sont peut-être pas reliées aux études. L’école ne les a pas soutenus dans leur perfectionnement scolaire, mais ils ont développé davantage leur intelligence émotionnelle, la capacité de nouer des relations. Je crois que certaines occasions que nous leur offrons leur confirment qu'ils ont ces compétences. Lorsque des adolescents qui se disent difficiles se retrouvent dans un centre pour personnes âgées et qu’ils sont très empathiques envers des personnes âgées qui sont fâchées et mécontentes de la situation, ils peuvent se rapprocher d’elles et établir une relation. Ils ont beaucoup de compétences, mais ils n’ont pas nécessairement l’impression que c’est le cas.
Il faut que les programmes soient accessibles. Ils doivent être souples. Je crois que c'est un point où mon expérience de parent et de professionnel travaillant auprès des jeunes et où le fait que chacun passe par l'adolescence et les défis à surmonter… Il faut de la souplesse. Nous devons montrer que nous croyons en la jeunesse et en sa valeur. Nous devons être ouverts aux échecs. L'échec constitue généralement une expérience d'apprentissage très importante, mais ces jeunes considèrent souvent que tous leurs acquis s'écroulent. Nous devons donc offrir des programmes qui peuvent les aider à traverser ces moments difficiles.
Il y a des défis à relever en ce qui concerne les programmes, et je crois que c'est généralement le cas pour la plupart des programmes. Habituellement, le financement est fonction des projets et doit être renouvelé chaque année. On consacre beaucoup de temps et d'énergie à demander du financement, à élaborer un contrat et à déposer des demandes, et nous ne sommes pas certains si le financement sera renouvelé. Cela peut rendre la dotation difficile. On demande à quelqu'un de relever le défi de travailler avec ces jeunes à long terme, mais les fonds sont épuisés en six mois. Il y a une certaine contradiction à cet égard. Étant donné qu’il s’agit de financement en fonction des projets, on ne tient souvent pas compte des prestations de maladie et de retraite, et les jours fériés sont limités au strict minimum. Encore une fois, nous demandons aux gens de s'engager à faire carrière en intervention auprès des jeunes, et il faut qu’ils comprennent, tout comme les jeunes, qu'il s'agit d'un important domaine de travail.
En général, on établit le financement, puis le montant disponible est réduit ou n’est pas majoré l'année suivante, ce qui représente une réduction en fin de compte, car les coûts augmentent. L'autre élément dont il est difficile de parler, c’est l'évaluation de ces programmes. Elle est souvent à court terme. On peut vous dire quand ils ont quitté le programme, ce qu'ils ont fait, mais ce que nous aimerions savoir, c’est ce qu’ils font un an ou deux plus tard. C’est habituellement parce que nous n'avons pas la capacité de suivi, sauf de manière anecdotique, pour connaître précisément les répercussions qu’ont les programmes.
En ce qui concerne notre plan d'intervention pour aider les jeunes à choisir une voie différente, il y a des défis que doit relever la collectivité. Nous sommes en concurrence avec le crime organisé ou les gangs de rue pour l’embauche de ces jeunes, et il s’agit d’adversaires féroces. Ils ont beaucoup à offrir, ce qui est attirant à court terme. Souvent, les jeunes ne voient pas d'avenir pour eux dans notre collectivité. C'est malheureux, mais quand ils se tournent vers l'avenir, le message qu'ils reçoivent, c’est qu'il n'y a pas d’endroit viable pour eux. Ils croient que nous ne sommes pas bienveillants. Nous disons que nous les avons à cœur et que les jeunes sont notre avenir, mais les messages que nous leur envoyons relativement à l’aide disponible sont généralement contradictoires.
Dans le contexte de l'économie mondiale, un certain nombre croissant de bons emplois ne sont plus disponibles, et je crois que ce phénomène touche les jeunes en général et non seulement ces jeunes-là. Toute une gamme d'emplois ne requérant pas de formation universitaire ne sont maintenant plus disponibles au Canada. Une personne pourrait décrocher un emploi raisonnable et en faire une carrière, mais j’estime que ces emplois ne sont pas disponibles.
Enfin, on apprend dans le journal d’aujourd’hui que les centres d'appels de Convergys vont fermer leurs portes. À un moment donné, ils comptaient 2 200 employés, dont des jeunes qui venaient d’entrer sur le marché du travail. C’est là que mon fils a eu son premier emploi. Il est ensuite allé travailler ailleurs, mais il a développé de nombreuses compétences grâce à cette expérience, et ce ne sera plus possible. Un diplôme universitaire n’était pas requis.
À mon avis, nous devons donc reconnaître qu’il faut beaucoup plus d’éducation qu’auparavant pour occuper la plupart des emplois que nous aimerions voir les jeunes occuper. Pour de nombreux jeunes avec lesquels nous travaillons, l'éducation n'est pas accessible, ce qui ne leur permet pas d'apprendre ce qu'ils doivent savoir. Bien souvent, ils retiennent exactement ce que nous ne voulons pas — qu'ils ne peuvent pas apprendre, qu'ils sont stupides et qu'ils n'ont pas leur place sur les bancs d'école.
Notre population autochtone est l’un de nos plus grands atouts. Il s’agit d’un segment jeunesse en croissance rapide, mais ce qui nous préoccupe, c’est que nous ne percevons pas cela comme un atout, et les Autochtones n’ont pas nécessairement l’impression que nous les considérons ainsi. Heureusement, à Winnipeg, le nombre de groupes autochtones qui travaillent auprès des jeunes avec succès est en croissance, et j’estime que cet investissement a un double impact. Cela permet non seulement de tendre convenablement la main aux jeunes, mais aussi de constater qu’ils ont un avenir dans leur collectivité. Ils voient des gens qui occupent des emplois et des programmes grâce auxquels on peut les embaucher. Ils se rendent compte qu’il vaut la peine d’investir de l'énergie et de relever le défi du changement.
Ce sont là certains des éléments que je voulais vous présenter. Je vais peut-être en rester là pour l’instant. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.
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Merci beaucoup de m’avoir invité à participer aux travaux de votre comité.
Je suis probablement la seule personne ici présente qui souhaiterait ne pas avoir à témoigner. De fait, TJ, mon fils de 20 ans, a été sauvagement assassiné le 5 janvier 2003. Son meurtre avait été soigneusement préparé par quatre jeunes hommes âgés de 17 à 20 ans. Mon fils a été frappé par deux d’entre eux. On lui a injecté du Drano dans le cou, puis on l’a étranglé avec un lacet en le tirant par le cou vers le siège avant d’un véhicule. On l’a presque entièrement dévêtu, puis on l’a jeté dans un fossé où l’un des jeunes s’est amusé à faire des sauts avec écart sur sa poitrine. Mon fils a reçu de nombreux coups de couteau dans le cou et n’a été retrouvé que cinq semaines plus tard sous trois pieds de neige.
Trois personnes ont été condamnées, dont deux à perpétuité avec possibilité de libération conditionnelle après 15 ans d’incarcération. L’un des inculpés sera justement remis en liberté conditionnelle dans quelques semaines seulement. L’auteur du meurtre, âgé de 17 ans, a été acquitté parce que personne n’a voulu témoigner contre lui.
C’est ainsi qu’a commencé l’aventure qui m’a mené jusqu’ici aujourd’hui. Ce voyage qui a démarré dans la fureur et l’incrédulité s’est transformé en un engagement en faveur de la prévention. Ma femme Karen, qui se trouve derrière moi, et moi-même avons créé la TJ's Gift Foundation. C’est aujourd’hui un organisme de bienfaisance enregistré qui amasse 50 000 $ par année, intégralement reversés à des programmes de prévention de la toxicomanie par les pairs dans les écoles du Manitoba.
J’ai récemment quitté le monde des affaires, et il y a tout juste huit semaines, le ministère de la Justice du Manitoba a investi dans ma nouvelle organisation, le Gang Awareness for Parents, ou GAP. Ma mission est de sensibiliser les parents pour éviter que leurs enfants n’intègrent des gangs et de leur prodiguer des conseils pour les aider.
Ce voyage n’a pas été facile. Il a été à la fois déchirant, déprimant, instructif et enrichissant. Au cours de ces sept années, j’ai rencontré de trop nombreuses victimes et beaucoup de jeunes toxicomanes, de recrues aspirant à appartenir à un gang et de membres de gangs de rue.
Comment ces gens en sont-ils arrivés là? Il n’est pas de cadeau plus précieux que celui d’être parent, mais trop de personnes en abusent et le gaspillent. Les jeunes ainsi maltraités sont la plupart du temps pris en charge par le système.
Nous avons tous grandi avec l’adage selon lequel il faut tout un village pour élever un enfant, mais le problème, c’est que trop d’enfants sont mis en prison. Permettez-moi de citer l’exemple des enfants qui volent des voitures. Ils retournent encore et encore en prison pour y purger des peines toujours plus longues. Est-ce ainsi que nous voulons vraiment élever nos enfants? Est-ce l’usage que nous voulons réserver à ce cadeau qui a été offert à la collectivité lorsqu’ils ont été abandonnés? Continuons-nous sur cette lancée en les repoussant? Non. Nous les soignons, nous les soutenons, nous les aidons, nous les aimons et nous croyons en eux.
La semaine dernière, j’ai participé à une conférence sur les gangs à Toronto. J’ai écouté de nombreux anciens membres de gangs qui avaient changé de vie et je leur ai parlé. Aucun d’entre eux ne m’a dit que c’est son incarcération ou la menace d’être incarcéré qui l’a changé. Je leur ai demandé quel était l’élément déclencheur. Ils m’ont répondu qu’ils avaient changé parce qu’ils avaient été soutenus et qu’on avait cru en eux. C’est ce dont ils avaient besoin: des personnes qui se souciaient d’eux. Quelqu’un du village s’est soucié d’eux. Maintenant, ces gens maltraités et abandonnés s’occupent d’autres personnes. C’est tout un village qui élève un enfant.
Le public exige que le gouvernement remédie au problème des gangs au Canada. Des modifications ont donc été apportées à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents: davantage de peines minimales obligatoires, des peines plus longues et, en conséquence, beaucoup plus de monde dans les prisons. Le gouvernement canadien dépense actuellement 1 000 $ par jour pour l’incarcération de trois des meurtriers de mon fils. Cette seule affaire coûte 360 000 $ par année. Ces frais vont se poursuivre pendant encore bien des années, et à juste titre dans mon cas, puisque ces personnes ont assassiné mon fils. Nous ne parlons pas ici de prisonniers ordinaires, mais bien de meurtriers. Je ne peux néanmoins m’empêcher de me demander pourquoi nous n’aurions pas pu investir dans la prévention ce montant quotidien d’un millier de dollars — ou même la moitié. Peut-être n’aurais-je pas eu alors à être présent ici aujourd’hui.
J’utilise le terme « investir » et je suis ravi que Paul l’ait également préféré à celui de « dépenser ». Nous investissons pour obtenir un retour. Nous dépensons pour réparer les erreurs.
Vous formez le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. J’ai trouvé le titre approprié. Pour ce qui est de la justice, il faut cependant passer le relais concernant le crime organisé et les gangs. Il est difficile de rédiger des lois suffisamment précises pour faire ce qu'il faut ou ce qui s’impose. La portée des lois est généralement trop vaste. Il faudrait rédiger des lois — mais j’ignore comment parce que je ne suis pas juriste — qui traitent spécifiquement des gangs faisant partie du groupe organisé à un plus haut niveau et leurs sous-groupes. J’estime que notre pays doit effectivement prendre des mesures pour mettre un frein à ces gangs.
Je connais personnellement un membre d’un sous-groupe qui a récemment été arrêté à Winnipeg. Je le connais depuis sa naissance. Il ne vient pas d’un milieu défavorisé. Il a fait des choix au cours de sa vie en sachant pertinemment où ils pouvaient le mener. Il savait ce qu’il faisait.
Il a fait beaucoup d'argent. Il a vécu pleinement sa vie, a conduit des voitures rapides et avait tous les gadgets. Ce n'est que maintenant, alors qu'il doit purger une peine de 12 ans, qu’il se rend compte qu'il doit changer. Il venait de sortir de prison après plusieurs années et essayait de changer. Du moins, c’est ce qu’il m’a dit un mois seulement avant son arrestation. Il est toutefois retombé très rapidement dans cette situation, mais il savait quelles étaient les conséquences de ce choix et il l’a fait quand même. Il n'est pas différent des autres membres de ces sous-groupes. De fait, il est la norme, et je suis certain que vous avez entendu parler de ces genres de gangs dans d'autres villes.
Cependant, chaque province a des gangs qui sont uniques à leurs villes. Les gangs de rue de Winnipeg n'existent pas à Vancouver, Toronto ou ailleurs. Il faut traiter les gangs de rue différemment, et tenir compte des raisons pour lesquelles ces jeunes en sont arrivés là. Aujourd'hui, les juges tiennent compte de l’ascendance autochtone et de l'éducation. Lorsqu’il détermine la peine, le juge la réduit souvent. En fait, c’est ce que l’on exige du juge. Il faudrait tenir compte des mêmes genres de facteurs pour ces membres de gangs de niveau inférieur.
Quand je rencontre des membres des gangs de rue, et j'en ai rencontré beaucoup, leur histoire est complètement différente de celle que je viens de raconter. Chacun en est arrivé là pour des raisons de pauvreté, de maladie mentale, de séjours dans divers foyers d'accueil et pour une foule d'autres raisons. Les autres témoins présents aujourd'hui, comme les porte-parole des programmes Just TV et Turning the Tides, travaillent auprès de ces jeunes et réussissent bien à les tenir loin des gangs. J'espère que mon organisation fera de même. De nombreux groupes de ce genre tentent de sauver ces enfants. En fait, ils sont tous réunis aujourd'hui, par hasard, deux étages plus bas.
Les droits de la personne constituent l’autre composante de votre comité. En tant que pays — le village —, le Canada a la responsabilité de donner à nos enfants toutes les chances de survivre et de prospérer, car leurs droits sont en jeu. Malheureusement, ils n’auront pas tous cette occasion. Certains vont passer entre les mailles du filet. Nous devons être là pour ramasser les morceaux. Hier, j'ai lu que le gouvernement canadien veut majorer de 27 p. 100 son budget pour les prisons, le portant à 3,1 milliards de dollars. J'encourage votre comité à insister pour que le gouvernement réaffecte la totalité de cette augmentation prévue au budget pour les prisons dans les droits de la personne et dans la prévention. Ce revirement se traduirait par un investissement dans l'avenir de notre pays, et le public ne le verrait pas du tout comme un coût.
Je sais ce que représente la perte d’un proche.
Pardonnez-moi…
J’aurais seulement aimé que quelqu'un ait consacré du temps aux meurtriers de TJ et se soit occupé d’eux. Ils auraient peut-être eu de l’estime d'eux-mêmes et ils se seraient peut-être souciés de TJ.
Merci.
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Bonjour à toutes et à tous. Merci de m’avoir permis d’être ici. C’est un honneur pour moi. J’espère sincèrement que nous réussirons aujourd’hui à influencer le changement. J’y tiens vraiment.
Je représente une organisation qui intervient dans la rue auprès des jeunes âgés de 0 à 29 ans — et je dis zéro parce que ces jeunes ont souvent des bébés, que nous prenons aussi en compte.
J’ai fait circuler le mémoire que j’ai rédigé. Je vais me contenter de le résumer, car je sais que le temps nous est compté, mais j’aimerais vous présenter le parcours d’un enfant tel que j’en ai rencontrés durant mes 30 années d’expérience dans le domaine.
Tout débute par une rupture familiale. La marginalisation commence à la maison. De nombreux jeunes sont les victimes d’abus et de négligence de la part de leur réseau de soutien immédiat.
La pauvreté au sein du foyer mène à la marginalisation économique, dont le cycle est difficile à rompre. Des traumatismes familiaux, perpétrés par la toxicomanie, les abus et les négligences ou par tout un ensemble de circonstances tragiques imprévisibles, telles que la mort d’un parent, peuvent susciter des sentiments d’aliénation et de marginalisation. Sans intervention digne de ce nom, ces jeunes se retrouvent privés du soutien ou des compétences nécessaires pour affronter leurs problèmes comme il se doit. C’est à ce moment-là que la protection de l’enfance peut faire irruption dans leur vie ou non.
La rupture du système éducatif est le second obstacle qui les attend. Dans la plupart des écoles du parcours régulier, les circonstances sociales personnelles ne sont pas la priorité, qui est accordée au respect du programme pédagogique. Des problèmes psychologiques se manifestent fréquemment à l’adolescence, mais sont rarement relevés et, s’ils le sont, le comportement est mal interprété. Les difficultés d’apprentissage passent le plus souvent inaperçues, ce qui va à l’encontre des besoins de l’enfant. Le style d’apprentissage propre à chaque jeune n’est respecté que s’il reflète les valeurs personnelles de chaque professeur. Si les besoins spécifiques ne sont pas comblés, l’échec des élèves peut se produire à plusieurs niveaux, notamment social, scolaire ou sportif. On voit alors se profiler un comportement et un mode de pensée qui ne s’inscrivent pas dans la culture prédominante de notre école. Ce genre de situations se solde généralement par une expulsion de l’établissement ou un abandon des études.
Un professeur du département d’éducation de l’Université de Winnipeg a été cité lorsqu’il a affirmé que la société a tendance à considérer que les élèves qui mettent fin à leur scolarité se laissent aller, sans tenir compte du système qui met tout en œuvre pour tirer les personnes vers le bas.
Place à la rue, maintenant. Un jeune fait son apparition dans les rues mal pourvu et déconnecté de la réalité, souvent hanté par la colère ou la peur. Sans ressources, sans argent et sans habileté fondamentale, la rue devient la solution qui s’offre à lui à la suite d’une rupture familiale et scolaire. De nombreux jeunes m’ont confié qu’ils se sentaient plus en sécurité dans la rue que chez eux.
La délinquance devient rapidement le prochain volet de leur comportement. Le besoin d’appartenance, de protection et de soins est une inclination humaine naturelle que l’on retrouve chez les jeunes des rues. Ce besoin est amplifié à l’infini.
Malheureusement, la rue ne regorge ni d’exemples positifs à suivre ni de fréquentations saines. Les jeunes, victimes de leur histoire, deviennent apathiques, sont habités par la colère et se mettent rapidement à déverser leurs émotions et leur rage contre cette société qui n’a pas su leur venir en aide. Ils ne font pas confiance aux systèmes qui les ont blessés et se mettent alors à les détester.
Le manque de surveillance, de conseils prodigués et de bonnes fréquentations devient un terreau de la délinquance. Nous nous transformons alors en société aux problèmes sociaux exacerbés, comme en attestent nos systèmes florissants et balbutiants.
La délinquance est en majeure partie le fruit de l’incivilité des jeunes et du manque de surveillance de la part des adultes ou bien sert uniquement de moyen de survie. L’activité criminelle précoce se manifeste par les infractions au Code de la route, les larcins, les infractions de domiciles, les intrusions dans des propriétés privées, les agressions, les balades dans des voitures volées, les incivilités, la possession de biens d’autrui, la consommation d’alcool par les mineurs, les nuisances publiques, les nuisances sonores, la mendicité, les troubles à l’ordre public, les escroqueries, la complicité et la destruction des biens d’autrui. Sans intervention réelle, ces activités de petits malfaiteurs sont susceptibles de se développer, avec ou sans affiliation à un gang.
Les jeunes des rues sont considérés par la police et la majorité des citoyens comme des éléments perturbateurs délinquants qui doivent être sévèrement punis ou, au contraire, laissés pour compte. Les bavures policières sont monnaie courante à mon organisation. Les possibilités d’entrer en contact avec les représentants mêmes des forces de l’ordre sont réduites à néant. La frustration et la colère des jeunes dégénèrent. Leurs espoirs s’amenuisent, l’apathie grandit et les jeunes passent alors à l’étape suivante: possession avec intention de vendre, attaque à main armée, détention d’une arme à feu, recel d’armes à feu, vol à main armée, agressions au domicile, violence familiale, vol de voiture, destruction de biens, exploitation, homicide involontaire, production de substances dangereuses et meurtre.
Les jeunes marginalisés, quelles que soient les ressources de leur famille d’origine, se retrouvent coupés des systèmes mêmes qui ont été conçus pour leur venir en aide. Sans intervention, la délinquance persiste. Les jeunes prennent conscience des avantages immédiats que leur procure une vie de délinquant: la plupart du temps, il s’agit d’argent. Ils comprennent que l’argent est synonyme de pouvoir, de choix. La jeunesse délinquante, qui a proliféré, est amenée à devenir plus sophistiquée, mieux organisée et à avoir bien saisi que de nombreux jeunes souhaitent la même chose: le pouvoir et les choix. C’est alors que commence la phase de recrutement.
La toxicomanie peut elle aussi engendrer la délinquance. Le désir physique implacable peut se concrétiser par un acte criminel désespéré visant à maintenir un « high » individuel. Cet état permet à ces jeunes d’échapper à leur réalité, une réalité qu’ils ne souhaitent pas affronter ou contre laquelle ils ne veulent pas lutter.
Arrive ensuite la prison. Le Centre de détention provisoire de Winnipeg a été conçu pour pouvoir accueillir 289 détenus avant leur procès. On y trouve actuellement 416 détenus. En me fondant sur mes observations et mon expérience dans le domaine, j’en ai conclu que les personnes qui peuplent nos installations de détention sont exactement les mêmes que celles qui sont tombées dans toutes les failles de tous les systèmes.
Les systèmes — social, éducatif, des services correctionnels pour les jeunes, du logement — sont en fait en partie responsables d’avoir engendré les délinquants et le climat de délinquance tel que nous le connaissons aujourd’hui.
À RaY, nous avons eu l’occasion de rencontrer de nombreux adolescents et jeunes adultes au parcours similaire qui sont entrés en conflit avec la loi. La prison n’exerce aucun effet de dissuasion sur eux. Les jeunes affirment que l’incarcération constitue souvent un frein à leur vie sociale, mais ils expliquent qu’ils apprécient avant tout le fait de pouvoir bénéficier de trois repas complets par jour et l’assurance d’un endroit où dormir. La prison est donc un échelon au-dessus de leur existence précédente. La plupart d’entre eux ne considèrent pas les autres détenus comme un problème ou une menace, car ils se sentent en famille. Pour les délinquants primaires, la prison devient un lieu de rencontre où des associations négatives voient le jour, fleurissent et se développent. La prison offre un environnement dans lequel le détenu peut se nourrir, se reposer, s’entraîner, recevoir des visites conjugales, devenir plus fort et, dans de nombreux cas, se refaire une santé. Le système pénal fournit un cadre où les programmes peuvent être élaborés, les gangs recrutés et où le crime s’organise généralement davantage.
Les délinquants qui tirent bel et bien un enseignement de cette épreuve et qui sont prêts à changer se heurtent souvent à l’échec. Bien souvent, une fois relâché, le détenu se retrouve dans l’incapacité d’accéder aux soutiens dont il a besoin pour pouvoir changer de vie de manière significative. En dépit des efforts ténus et de la volonté assidue des agents de libération conditionnelle pour programmer leur sortie, les ressources en dehors de la prison ne sont pas toujours disponibles. Si elle se retrouve dans l’incapacité de bénéficier des subventions de base et d’accéder aux services tels que le logement ou aux ressources communautaires et aux opportunités d’emploi, la personne en liberté conditionnelle devra se heurter à des fossés et à des barrières en matière de services et d’aides une fois sortie de prison.
Je ne cherche pas à orienter le discours sur les problèmes, car je crois au contraire qu’il est important de parvenir à des solutions. Si l'on me demandait d’émettre une recommandation personnelle, j’aimerais simplement démanteler l’ensemble des systèmes en place et les reconstruire pour qu’ils soient plus accessibles et bien moins bureaucratiques. Nous savons que ce n’est pas possible, du moins pas de notre vivant. Je pourrais citer une cinquantaine de recommandations destinées à lutter contre la délinquance, mais je me restreindrai à une liste de 10 priorités. Cela dit, j’appuie toutes les recommandations formulées par le récent rapport du Sénat.
Si nous souhaitons œuvrer contre la délinquance, nous devons aborder les causes et les problèmes fondamentaux qui y conduisent. Nous devons apporter un soutien aux familles qui rencontrent des problèmes qui sont autant d’entraves à l’éducation de leurs enfants. Les écoles publiques doivent collaborer avec les collectivités, les établissements scolaires doivent être équipés d’une gamme de services et de ressources destinés à aborder les besoins complexes de tous les élèves. Les allocations doivent être augmentées. Nous avons besoin d’un parc immobilier plus sûr et plus abordable. Nous devons développer et renforcer les services de santé mentale dans la collectivité et au sein des établissements carcéraux. Davantage de ressources doivent être attribuées au secteur des services de toxicomanie, davantage de lits de traitement sont nécessaires pour réduire les temps d’attente. Les services de toxicomanie et de santé mentale doivent être intégrés et collaborer, pour mettre en place des programmes d’aide individualisés. Les organisations communautaires qui œuvrent dans la rue doivent se doter d'un financement des activités de base stable pour pouvoir continuer à offrir des services de qualité. Les établissements carcéraux doivent élaborer un programme de réhabilitation obligatoire plus strict, à base d’évaluations de santé mentale, et j’entends par-là des évaluations fonctionnelles, par l’intermédiaire desquelles on découvre comment fonctionne le client, pas une simple appellation, et une programmation fondée sur des données probantes pour les personnes touchées par l’ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale. Nous avons besoin d’une programmation d’aide globale qui se concentre sur la sortie d’incarcération et la réintégration de la société, ce qui nécessite une planification transversale. Ces points exigeront une coordination et une communication régulières à travers les départements de la justice, de la santé et des services à la famille. Et je ne me suis même pas encore aventurée à parler du Nord.
Voilà qui met fin à mon exposé. Merci de m’avoir invitée.
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Merci, monsieur le président. Je vous suis reconnaissant de me donner l'occasion de comparaître devant le comité.
Les Clubs des garçons et des filles de Winnipeg existent depuis plus de 30 ans. Nous offrons des programmes après l'école et en soirée destinés aux enfants. L'an dernier, nous avons desservi presque 4 000 enfants et jeunes âgés de 6 à 18 ans dans nos dix centres situés dans des secteurs de la ville où ces programmes sont les plus nécessaires. Soixante-dix pour cent de nos membres sont des Autochtones et 25 p. 100, des enfants et des jeunes nouvellement arrivés au pays. La plupart de nos familles de nouveaux arrivants viennent de pays ravagés par la guerre.
Le crime organisé a une incidence sur nos membres par l'entremise des gangs de jeunes, qui sont sous l'emprise du crime organisé qui contrôle le trafic de drogues illégales.
Il y a toujours eu des gangs de jeunes à Winnipeg. À l'origine, c'était des gangs de quartier peu organisés. La violence entre les différents groupes se résumait principalement à des bagarres de coups de poing et, à l'occasion, on utilisait une sorte de massue.
Au début des années 1990, tout a changé. Les gangs de territoire se sont mis à imiter les gangs de jeunes aux États-Unis. Ils ont commencé à se livrer au trafic de drogues et à contrôler la prostitution. Les quartiers des centres-villes sont devenus des endroits dangereux. Les couteaux, et plus tard les pistolets, sont devenus les armes de choix. Les gangs se sont mis à recruter activement. Les jeunes y adhéraient car ils avaient peur de refuser. Des jeunes ont été mutilés et tués parce qu'ils se trouvaient dans le mauvais secteur de la ville et qu'on les soupçonnait de faire partie de gangs rivaux.
Nous croyons qu'il faut un engagement en vue de mettre sur pied des programmes de prévention du crime qui sont axés sur la création de possibilités positives pour les jeunes, et plus particulièrement ceux qui sont les plus à risque. Ces programmes sont non seulement une manière plus efficace de réduire la criminalité, mais ils constituent également des méthodes d'élimination du crime et d'intervention moins coûteuses. Il est sept fois plus efficace d'investir dans des programmes parascolaires et d'autres systèmes de soutien que d'incarcérer les délinquants.
Les Clubs des garçons et des filles de Winnipeg fournissent un lieu sûr pour les enfants après l'école, et nous renforçons la résilience des enfants. On comprend assez bien l'objectif visant à offrir un lieu sûr. Nous fournissons un endroit pour les enfants où des adultes responsables supervisent ce qui se passe et s'assurent que les enfants interagissent avec respect et se conduisent d'une manière acceptable.
C'est souvent la partie qui porte sur la « résilience » qu'il faut expliquer. Le terme décrit souvent la capacité de se relever d'une épreuve difficile ou de surmonter l'adversité, une compétence qui nous interpelle tous. Dans un milieu de vie sain, la compétence peut être acquise et entretenue. Dans un milieu de vie moins sain et plus ardu, il est beaucoup plus difficile d'y parvenir.
Un grand nombre de nos jeunes et de leurs familles de Winnipeg viennent de communautés du Nord isolées ou de pays ravagés par la guerre. Chacune de ces situations entraîne des obstacles culturels et sociaux uniques, mais ces deux groupes font face à quelques défis communs.
De toute évidence, l'adaptation à la société urbaine de notre ville constitue un défi pour bon nombre de nos enfants et leurs familles. De nombreux membres des deux groupes sont confrontés à des barrières linguistiques et n'ont pas accès au soutien de leur famille et de leurs amis. S'adapter à différentes attentes dans des situations de société et d'emploi est souvent difficile. Des ressources et un accès à du soutien limités exercent également plus de pressions sur eux. Les défis et les obstacles auxquels les gens sont confrontés sont multipliés dans une famille monoparentale.
Il est bien connu que les jeunes sont plus susceptibles de se laisser entraîner dans des activités criminelles lorsqu'ils sont confrontés à la pauvreté, à l'isolement social, à des échecs à l'école et à des chances de réussite future faibles. Les crimes avec violence commis par des jeunes sont souvent liés aux gangs, lesquels ont un énorme pouvoir d'attraction sur les jeunes dépourvus de possibilités, car ils leur offrent statut, profits, protection, mentorat, affiliation et excitation. Ce sont là des besoins normaux en matière de développement qui sont satisfaits de façons malsaines.
Nous n'aurons jamais les ressources humaines ou financières pour régler tous les problèmes auxquels chacun de nos membres est confronté, mais nous offrons des programmes qui renforcent la confiance de nos membres et qui les inspirent et les encouragent à apprendre, à poursuivre leurs études, à caresser des espoirs pour leur avenir; ce sont des programmes qui augmentent leur résilience et réduisent les risques qu'ils adhèrent à des gangs.
Nous offrons des programmes emballants qui couvrent un éventail de sujets d'intérêt pour les enfants. Nous veillons à ce que les jeunes participent à des programmes où ils ont beaucoup de chances de réussir, car nous savons que le succès engendre le succès. Plus une personne réussit, plus elle risque d'essayer de nouvelles choses et d'apprendre de nouvelles compétences.
Pour ce faire, nous devons être très sélectifs au moment d'embaucher le personnel et les bénévoles qui nous appuient dans notre travail. Nous retenons des gens qui veulent travailler avec les enfants, qui interagissent bien avec eux, qui sont de bons modèles, qui représentent la communauté dans laquelle ils travaillent et qui ont des expériences de vie enrichissantes ou l'éducation postsecondaire appropriée.
Si nous pouvons aider les enfants à croire en eux, à avoir confiance en leur capacité d'apprentissage et à résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés, ils seront moins vulnérables aux influences négatives et à la pression des pairs. Si nous leur offrons des possibilités de participer à un sport organisé, à s'adonner aux arts et à poursuivre leurs études, plus ils croiront en leur potentiel, plus ils deviendront résilients et mieux nos communautés et nos familles s'en porteront.
La criminalité coûte aux Canadiens 70 milliards de dollars chaque année. Je cite là les propos de Vic Toews. Ainsi donc, il en coûte 2 000 dollars à chaque citoyen annuellement. Plus de 70 p. 100 des contrevenants qui sont condamnés à purger des peines dans des prisons fédérales sont des décrocheurs au niveau secondaire; 70 p. 100 d'entre eux ont des antécédents d'emploi instables; quatre personnes sur cinq ont un problème de toxicomanie au moment de leur condamnation; et deux jeunes sur trois dans le système de justice pénale souffrent de deux troubles mentaux ou plus.
L'un des éminents chercheurs en criminalité chez les jeunes, M. Michael Chettleburgh, dit ce qui suit:
... les programmes parascolaires supervisés et stimulants de haute qualité se sont avérés une méthode efficace pour contrer la délinquance et l'oppression et profitent grandement aux enfants... Ces programmes sont déjà offerts partout au Canada, mais en raison de leur sous-financement chronique, ils sont incapables de résoudre les problèmes grandissants liés aux gangs.
Dans un rapport récemment publié par le Centre national de prévention du crime du Canada, on décrit les programmes de loisirs après les classes comme étant un outil prometteur pour prévenir le crime. James Alan Fox, un criminologue bien connu aux États-Unis, a récemment dit que « les activités parascolaires offertes au moment le plus propice pour le crime juvénile (telles que les Clubs des garçons et des filles) rapportent beaucoup plus que l'argent investi.
Il ajoute que nous devons:
cerner et promouvoir des moyens plus sains pour leur [les jeunes] permettre de satisfaire leurs besoins, de leur fournir des façons constructives d'être bien dans leur peau et de caresser des espoirs pour l'avenir, et ce, tout en s'amusant. C'est là où les initiatives d'enrichissement destinées aux jeunes jouent un rôle important, un rôle qui, compte tenu des tendances actuelles, doit être élargi.
Pour que les interventions soient fructueuses, elles doivent être fiables et à long terme. L'efficacité de nombreux programmes a été minée parce qu'ils étaient d'une durée limitée ou qu'ils se sont terminés après la phase pilote. Assurer la disponibilité et la fiabilité de programmes concluants de prévention du crime chez les jeunes doit être notre priorité. Les jeunes eux-mêmes soulignent l'importance d'avoir accès à des programmes qui sont accueillants et sécuritaires et qui sont offerts de manière continue. Soutenir des programmes par l'entremise d'investissements pluriannuels et des politiques publiques est un élément crucial pour engendrer des répercussions durables sur la délinquance et la prévention du crime, et pour atteindre des résultats positifs.
En 1993, la Commission Horner a demandé que l'équivalent de 5 p. 100 du budget fédéral affecté au système de justice pénale soit consacré à la gestion des facteurs de risque associés au crime. Nous croyons que c'est un investissement raisonnable et que plus de la moitié du budget devrait être des investissements durables dans des programmes communautaires de prévention du crime pour les enfants et les jeunes. Plus particulièrement, nous sommes d'avis qu'une partie de ces investissements devraient être destinés à des programmes de loisirs parascolaires fructueux qui ont fait leurs preuves.
De plus, nous croyons que du financement durable doit être débloqué pour les populations mal desservies qui ont de grands besoins, telles que les enfants et les jeunes autochtones et nouvellement arrivés au pays, les jeunes qui font partie de gangs, les jeunes filles et les jeunes qui vivent dans la pauvreté. Il est absolument crucial que les fonds soient affectés d'une manière qui appuie le financement pluriannuel d'organisations dignes de confiance existantes qui travaillent auprès des jeunes.
L'un des principes fondamentaux de l'affectation des ressources devrait être la création de possibilités et de milieux positifs qui font participer les jeunes et qui favorisent le développement sain des jeunes. Ceux-ci ont défendu vigoureusement qu'il fallait des programmes qui leur permettent d'acquérir des habiletés et de bâtir leur confiance, ce qui n'est possible qu'avec le temps et dans des milieux positifs où ils peuvent établir des relations de confiance.
En offrant du financement de base adéquat, en renforçant la capacité des organisations à élargir et à améliorer leurs programmes et en appuyant l'évaluation pour mesurer les incidences à long terme, le gouvernement veillerait à ce que ses fonds profitent à la communauté de façon optimale.
Nous croyons qu'investir des sommes importantes dans la prévention du crime chez les jeunes profitera à tous les Canadiens puisque les jeunes et les membres de leur famille mèneront de meilleures vies et seront des citoyens productifs à part entière qui participeront à la population active. Cet investissement fera économiser gros aux contribuables puisqu'on aura moins recours à un système de justice pénale coûteux pour réagir aux crimes.
Merci.
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Merci, monsieur le président. Merci de l'occasion que vous me donnez.
Je représente le Broadway Neighbourhood Centre. Je vais tout d'abord présenter un bref aperçu de ce que nous faisons.
Nous sommes établis au coeur de Broadway, en plein centre. Il y a des gangs importants dans le secteur. Nous sommes régulièrement aux prises avec de nombreux problèmes sociaux et la pauvreté. Le centre fournit une halte-accueil pour les jeunes et une banque alimentaire, de même que de nombreux autres programmes.
Je m'occupe principalement du programme Just TV. Je coordonne un programme de prévention des gangs et d'intervention offert au Broadway Neighbourhood Centre. Notre programme est destiné aux jeunes âgés de 16 à 24 ans. Just TV a été conçu pour donner aux jeunes l'occasion de s'exprimer par l'entremise des multimédias dans un environnement sûre et créatif et pour ainsi éviter qu'ils cèdent aux influences négatives comme les gangs et les drogues.
Les participants au programme Just TV touchent à toutes les facettes de l'industrie de l'audiovisuel. Nous travaillons avec les jeunes pour leur apprendre des compétences. Nous tentons de les attirer grâce à la technologie. Bon nombre de nos jeunes s'intéressent aux vidéoclips. Le programme n'est pas axé précisément sur la musique, mais c'est ce qui semble toutefois attiré les jeunes. Ils peuvent créer ce qu'ils veulent, pour autant que ce soit approprié et qu'aucun comportement négatif ne soit encouragé.
Cela ne veut pas dire qu'ils ne peuvent pas parler de leurs expériences. Ils font part de ce qu'ils ont vécu dans les gangs et avec les drogues, mais ils font ressortir les aspects négatifs ou comment ils en ont été affectés. Les paroles de musique constituent une façon socialement acceptable pour les jeunes de raconter à leurs pairs leurs expériences. Il n'est souvent pas acceptable pour eux d'exprimer leurs sentiments dans une conversation normale lorsque leur ami se fait tirer dessus. Mais s'ils font de la musique, c'est acceptable, surtout si c'est de style hip-hop. Nous estimons que c'est très thérapeutique.
Les vidéos que les jeunes ont produit traitent de sujets tels que la pauvreté, le racisme, la participation à des gangs et la toxicomanie. Nous offrons un environnement stimulant, positif et encourageant, et nous espérons faire naître chez nos participants un sentiment d'appartenance à quelque chose de mieux que ce qu'ils ont connu, ce qui réduit les risques qu'ils se joignent à des gangs. Nous donnons aux jeunes une voix qu'ils n'ont peut-être pas l'impression d'avoir autrement. Nous organisons un festival du film à la fin de chaque année où ils peuvent inviter leurs travailleurs sociaux, leurs agents de probation et les membres de leur famille. C'est souvent une avenue pour ces jeunes d'exprimer ce qu'ils ressentent, avenue à laquelle ils n'auraient pas accès autrement.
Nous produisons 500 DVD chaque année que les jeunes créent. Nous les envoyons à d'autres organismes pour tenter d'influencer d'autres jeunes. Le fruit de leur travail vise à aider d'autres jeunes, à raconter leurs histoires et à discuter... L'un de nos vidéos, par exemple, s'intitule Caught Up. Il a été réalisé par trois membres de gangs qui parlent de se laisser entraîner dans la vie des gangs et d'être incarcérés. Le message véhiculé est donc très puissant.
Par conséquent, notre programme cible les jeunes qui risqueraient autrement d'échapper au système, que les programmes de sports ou les clubs d'aide aux devoirs ne rejoignent pas et qui ne fréquentent peut-être pas l'école.
Vu les groupes avec lesquels nous travaillons, il s'agit donc d'un programme de prévention et d'intervention, comme je l'ai signalé. Certains de nos jeunes participants sont très à risque d'adhérer à des gangs. Par conséquent, ils peuvent être touchés par la pauvreté et le chômage, avoir abandonné leurs études, être affiliés à des gangs, ou peut-être qu'un membre de leur famille est associé à un gang. Le fait est que certains jeunes sont nés dans des gangs. Autrement dit, les membres de leur famille font déjà partie de gangs, si bien qu'ils sont exposés au milieu dès leur enfance.
Un grand nombre de nos jeunes ont eu des démêlés avec la justice, qu'ils aient été reconnus coupables d'une infraction ou non. Presque 50 p. 100 affirment avoir fait partie d'un gang — 44 p. 100, en fait — et 77 p. 100 disent qu'il y a des gangs dans les secteurs où ils vivent.
Si les programmes sociaux, les possibilités et les occasions font défaut, on peut imaginer ce que c'est de quitter la maison tous les jours et faire face à l'attrait de se joindre au gang. L'attrait des activités criminelles et certaines de ces influences négatives chez les jeunes sont assurément plus présents.
En 2007, le Centre national de prévention du crime, dans son rapport « Les gangs de jeunes: Les facteurs de risque favorisant l'adhésion », a indiqué que « les principaux facteurs de risque favorisant l'adhésion à un gang comprennent: des influences négatives dans la vie du jeune, un faible sentiment d'appartenance à la collectivité, une trop grande confiance envers des pairs à personnalité antisociale, une supervision parentale inadéquate, l'abus d'alcool ou de drogues, un faible potentiel au plan scolaire et une faible employabilité, et un besoin de reconnaissance et d'appartenance ».
Nous essayons de trouver un endroit où les jeunes ont l'impression de se retrouver, et même si certains continuent d'être affiliés à des gangs, mais que deux soirs par semaine, ils ne traînent pas dans les rues et ils sont dans un milieu où ils peuvent être eux-mêmes pour un moment, nous estimons avoir réussi. Nous avons été témoins de nombreux succès, tels que des jeunes qui ont reçu des subventions pour les films qu'ils ont créés ou qui ont quitté les gangs. Le simple fait que nous ayons parfois des jeunes de gangs rivaux qui participent aux programmes et qui se perçoivent en tant que personnes plutôt que groupes opposants est une réussite.
Pour revenir au sujet sur lequel je me suis attardée aujourd'hui, c'est-à-dire la façon dont nous pouvons mieux nous équiper pour régler le problème du crime organisé, j'ai choisi une avenue. Je crois que la prévention et l'intervention sont indispensables. L'un des défis que je remarque dans les programmes pro-sociaux, c'est que le financement fait défaut ou est limité. Alors que nous perfectionnons vraiment ce que nous faisons et que nous trouvons ce qui est efficace — cela prend peut-être trois ans —, nous devons faire des pieds et des mains pour trouver du financement à nouveau. Alors que nous avons formé notre personnel à être très efficace dans son travail, il doit se chercher un emploi ailleurs car le financement a pris fin.
J'ai constaté qu'il y avait moins de compétition entre les groupes communautaires et plus de collaboration; ils échangent ce qu'ils ont appris, s'encouragent mutuellement pour trouver du financement et s'entraident. Il y a un certain nombre de bons programmes qui sont offerts, mais je crois que nous devons en offrir davantage. Si les programmes pro-sociaux communautaires étaient offerts pendants dix ans, ou s'ils faisaient l'objet d'une évaluation après trois ans et qu'ils étaient renouvelés pour trois autres années, nous pourrions être beaucoup plus efficaces.
Merci.
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Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'être venus.
Je pense que votre expérience, monsieur et madame Wiebe, nous a particulièrement touchés. Nous avons rencontré de nombreuses personnes qui représentent des victimes au fil des ans. Il est très intéressant de constater que beaucoup passent de l'état initial ou permanent de choc et de consternation à la prise de conscience qu'ils souhaitent concentrer les efforts à l'avenir sur la prévention et « ce qui aurait pu être ». Toutefois, certains — et je pense que vous serez probablement d'accord — ne sont pas aussi disposés, et avec raison, à songer à la prévention, mais sont plutôt disposés à se tourner vers ce que nous appelons la justice. C'est compréhensible. Nous prenons la chose très au sérieux; c'est la preuve directe des victimes.
Je suis également étonné que le thème du groupe soit la prévention et l'intervention chez les jeunes à risque, pour ainsi dire. Nous étudions ici le crime organisé. J'ai quelques questions à poser. Je serai bref.
Il y a des gens à Ottawa qui envisagent des programmes nationaux comme une politique relative aux services nationaux pour la jeunesse. Je comprends qu'il y a des compressions au fédéral et au provincial et que bon nombre des programmes dont nous parlons relèvent des provinces. Y a-t-il des programmes à l'échelle nationale que nous pouvons examiner pour susciter la participation des jeunes à des activités et les détourner de la criminalité?
Ensuite, le bureau d'ombudsman pour les victimes offre-t-il une aide quelconque? Des sommes considérables ont été investies dans ce bureau. Il y aura bientôt un nouvel ombudsman. Peut-on faire quelque chose avec ce bureau pour améliorer la situation?
Enfin, et c'est probablement le premier point que j'aimerais que vous abordiez, nous présumons que les jeunes sont soit directement impliqués, soit des pions dans le crime organisé ou de haut niveau. Il y a un an environ, j'ai rencontré des agents de police de Winnipeg qui m'ont dit que les membres les plus âgés des gangs utilisent des jeunes qui sont dans la fourchette d'âge établie dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents pour commettre des crimes — voler des voitures, ou peu importe —, se protégeant ainsi de tout blâme. Si vous avez du temps, vous pourriez peut-être parler du fait que l'on se sert précisément des jeunes pour gagner ce que nous avons tous appris être la manne de l'activité criminelle et du crime organisé plus particulièrement: l'argent.
Je demanderais à tous les témoins de répondre à la question, car il nous reste beaucoup de temps, n'est-ce pas? Nous avons quatre ou cinq minutes?
Ils auraient chacun une minute.
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Tout d'abord, pour répondre à votre dernière question en premier, quand nous parlions de l'ombudsman des victimes, je pense que le dont la Chambre est saisie est tout à fait bien rédigé. Il répond à bien des préoccupations des victimes.
En fait, nous assisterons à une audience de libération conditionnelle dans quelques semaines seulement, et il est insensé de constater comment les responsables décident de procéder. Le meurtrier s'assoit devant moi, et nous devons nous asseoir derrière lui. Nous n'avons pas le droit de le regarder, et il n'a pas le droit de nous regarder. Ne trouvez-vous pas cela rétrograde? Cet individu a tué quelqu'un, nous sommes là, et on nous demande de fournir une déclaration sur la manière dont cette personne a bouleversé nos vies.
Tout d'abord, nous devons soumettre notre déclaration deux semaines avant l'audience pour qu'il puisse la lire. Ensuite, après l'avoir lue, il peut simplement dire, « Eh bien, je ne rencontre pas ces parents; je renonce à l'audience ». Nous avons subi un enfer tout ce temps. Ce processus est en train d'être complètement remanié, d'après ce que je comprends. J'ai demandé en fait à cette commission des libérations conditionnelles si je pouvais faire face à l'individu, alors nous verrons bien. On ne m'a pas dit oui, alors nous verrons. Le projet de loi règle ce point.
En ce qui concerne le programme national, je sais que bon nombre d'entre nous parlent de ce qui se passe de nos jours à l'échelle locale et de ce que nous faisons au chapitre de la prévention. Je pense qu'au palier fédéral, des fonds sont disponibles pour enrayer le crime organisé, etc., mais essayez d'en faire la demande. J'invite chacun de vous à télécharger certains de ces formulaires de demande et d'essayer de les remplir vous-mêmes. Ne faites pas appel à un avocat, ni à personne d'autre; essayez de le faire vous-mêmes. Paul a mentionné le temps que nous consacrons — et je suis nouveau au comité, ce n'est que ma septième semaine. Mon épouse a essayé de remplir quelques-unes de ces demandes. Alors quand vous parlez de ce qui peut être fait, c'est une des choses que l'on peut faire.
À la fin de ma déclaration, je vous ai dit ne pas comprendre comment, en tant que pays, nous pouvons obtenir une hausse de 27 p. 100 de notre financement pour construire plus de prisons et embaucher 4 000 nouveaux employés. Pourquoi embaucher 4 000 nouveaux employés? Prenez ces employés et affectez-les aux programmes de prévention. Pour ma part, la question ne se pose même pas, car je crois que les 4 000 personnes qui travaillent avec les jeunes avant qu'ils n'adhèrent à des gangs peuvent certainement aider toutes les personnes qui sont condamnés à purger une peine bien avant qu'ils se rendent à la détention. C'est mon opinion. Et pour répondre à la question sur ce que le fédéral peut faire parfaitement, c'est exactement cela. Selon moi, c'est l'évidence même.
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Ça va? Parfait. J'espère que vous ne m'avez pas trop coupé de temps, monsieur le président. Merci.
Je veux donc vous féliciter pour le travail que vous faites, mais en même temps, je crois qu'il faut vraiment prendre les jeunes avant qu'ils se joignent à un gang de rue parce qu'une fois qu'ils sont à l'intérieur d'un tel gang, il est extrêmement difficile de les en sortir. Ils se font menacer et il y a toutes sortes de raisons qui font que le jeune ou la jeune ne pourra sortir facilement du système des gangs de rue. Je vous félicite donc pour le travail que vous faites.
Vous parlez de votre centre et je trouve cela extraordinaire. Je viens d'un milieu familial où, à l'âge de trois ans, j'ai été placée en famille d'accueil. J'ai vécu dans 13 familles d'accueil différentes. Vous pouvez vous imaginer que ce n'était pas une vie facile.
Je sais donc ce que c'est que de vivre à droite et à gauche. On ne nous garde pas toujours parce qu'on nous aime; on nous garde parce que c'est payant. Je sais aussi que l'attachement n'est pas là. On cherche donc toujours à s'attacher à quelque chose d'autre.
À l'époque, lorsque j'étais jeune, les gangs de rue n'existaient pas. Il y avait par contre les gangs de motards qui étaient beaucoup plus importants, mais, par chance, je n'ai pas vécu dans ce milieu-là. J'ai été bénie. Toutefois, il y en a d'autres qui ont connu ce milieu, et c'est extrêmement difficile d'en sortir.
Madame Johnson, votre centre est-il ouvert à tous les jeunes? Est-ce qu'un jeune, même s'il faut partie d'un gang de rue, peut aller dans votre centre et tenter de s'en sortir?
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Je crois avoir parlé justement de cela dans mes observations. Quand j'ai lu le nouveau projet de loi — j'en ai lu tellement ces derniers jours, 14 ou 15, que je ne me souviens plus lequel c'était —, où il était question du crime organisé, en fait, si je me souviens bien, c'est quelque chose de très laconique, qui dit que, si quatre ou cinq personnes s'unissent pour commettre une infraction punissable par mise en accusation, cela constitue du crime organisé. Vous m'excuserez, mais cinq gamins de 13 ans du groupe Mad Cowz, ce n'est pas la même chose que cinq membres du Zig Zag Crew ou des Hells Angels qui se rassemblent pour commettre un crime.
Je l'ai dit, je ne suis pas avocat. Je ne sais pas comment on pourrait définir cela. Les lois actuelles sur le crime organisé sont déjà bien mal faites, parce que, chaque fois qu'un tribunal est saisi d'une affaire qui s'y rapporte, rien ne va plus. Nous avons construit un énorme palais de justice au Manitoba il y a cinq ans, ou peut-être huit, et ça a été la pagaille. Il faudrait vraiment que le ministère de la Justice analyse le tout et, en fait, le fractionne.
Ce que je propose, c'est quelque chose de similaire à la détermination de la peine pour les contrevenants autochtones. Nous avons trouvé le moyen d'en venir à imposer aux Autochtones du pays des peines différentes de celles qui sont infligées aux autres à cause de ce qui les a menés là où ils en sont, et de la manière dont ils en fini par commettre un crime. Comment alors ne pouvons-nous pas en faire autant avec le crime organisé? Parce que c'est tout simplement trop vaste?
J'ai rencontré trop de ces jeunes assujettis à la Loi sur la stabilisation des mineurs toxicomanes. J'en ai trop vu à des cafés-restaurants — avec Kelly, d'ailleurs. Il y a ce gamin qui vit une horrible situation; il retrouve ses frères, ses potes, et ils partent ensemble faire quelque bêtise, voler des voitures par exemple, et certains en volent beaucoup, de voitures. L'un d'eux a d'ailleurs volé mon camion. Et pourtant, on ne peut pas prendre ces mêmes gamins et les traiter exactement de la même manière en vertu d'un projet de loi en leur disant: « Comme vous étiez cinq et avez fait quelque chose qui constituait un acte criminel, nous allons vous traiter de la même façon qu'un membre des Hells Angels. » C'est ce que je crains, parce que les juges d'aujourd'hui — et croyez-moi, je me suis retrouvé devant un bon nombre d'entre eux — agissent différemment les uns des autres. Ils ont besoin que les avocats de la défense et les procureurs de la Couronne leur disent que ce ne sont pas les mêmes criminels. On ne peut tout simplement pas les jeter en prison à cause de cette loi.
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Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous d'être ici ce matin.
Les questions qu'on a à vous poser sont en rapport avec une étude sur le crime organisé. Dans le crime organisé, on a la partie des jeunes qui peuvent aller vers les groupes plus organisés comme les Hells Angels ou d'autres groupes comme les Bandidos.
Vous nous parlez de plusieurs pistes de solution. Vous avez fait référence aux maladies mentales. On sait très bien que beaucoup de jeunes et même des personnes plus vieilles sont atteints de maladies mentales et se retrouvent dans le système pénitencier. On a un problème. Le système traitant les maladies est de juridiction provinciale et pas uniquement de juridiction fédérale. Donc, on a un conflit. Effectivement, beaucoup ont des maladies mentales et sont dans les systèmes pénitenciers.
Ensuite, madame Holmes, vous avez parlé d'alcoolisme foetal. On a effectivement discuté hier avec des personnes qui s'occupent des Amérindiens. Ils disaient qu'ils songeaient même à interdire l'alcool dans les réserves parce que toutes les réserves ne sont pas près des villes et que, effectivement, il y a un problème. Toutefois, quand on parle d'interdire l'alcool dans une réserve, on parle de prohibition. Quand on parle de prohibition, tout le monde dit que cela ne fonctionne pas parce que, dans les années 1930, cela n'a pas fonctionné. Donc, on a maintenant un autre problème. On se retrouve aux prises avec plusieurs problèmes.
Vous êtes sur le terrain. Monsieur Wiebe, vous avez témoigné. Vous avez vécu quelque chose d'extrêmement grave où vous avez perdu un membre important de votre famille, soit votre fils. C'est ce que j'ai compris. Hier, on a parlé des problèmes des jeunes par opposition aux gangs de rue. Ils recrutent des jeunes garçons et des jeunes filles de 12 ou 13 ans. Ils les utilisent pour faire de la prostitution parce que c'est plus payant que d'acheter de la drogue. Les jeunes filles et garçons vendent leur corps et rapportent de l'argent aux plus vieux. Il y a plusieurs niveaux.
C'est bien beau dire qu'on ne veut pas les enfermer, mais il faut essayer de trouver le moyen d'empêcher les jeunes de 12 ou 13 ans de se prostituer dans les rues. Vous en avez à Winnipeg. Il y en a en Alberta et il y en à Québec, dans ma ville. Il y en a partout présentement. Donc, quelles suggestions auriez-vous à nous apporter pour justement éviter que ces jeunes filles et garçons tombent par la suite dans le crime organisé à cause de la drogue?
Le principal problème est la drogue. Elle est produite et donnée. Tout à l'heure, l'une des personnes disait qu'il faudrait arriver à contrôler la drogue qu'offrent les gangs. On n'est tout de même pas pour leur donner de la drogue, aux jeunes, afin de les garder avec nous. On aura un problème.
Alors, de quelles façons pensez-vous qu'on peut le faire? La drogue est actuellement le principal malheur des jeunes filles et des jeunes garçons. À cause de cela, ils se prostituent, ils donnent de l'argent aux plus vieux et sont incapables de s'en sortir.
Qui veut prendre la parole? La question est ouverte à tout le monde.
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Actuellement, à l'échelle provinciale, nous travaillons à une initiative appelée Street Reach, qui réunit plusieurs de nos organisations. Il y avait huit directeurs exécutifs, et nous avons formulé une stratégie pour composer avec ce problème.
Nos filles qui sont dans la rue ou qui y ont été mises par leur famille dans certains cas ont parfois à peine huit ans. Cette initiative vient d'un policier qui a trouvé une gamine dans la rue et qui n'avait nulle part où l'amener; il a tourné en rond dans la ville pendant 17 heures à lui chercher un gîte.
Ces gîtes n'existent pas, parce que nous manquons d'argent. On attend de nous que nous soyons les premiers intervenants dans la rue pour aider ces enfants au plan émotif, alors que nous ne recevons pas de fonds permanents. On attend de nous que nous assurions la stabilité de ces jeunes, mais nous ne pouvons obtenir de fonds permanents. Pour faire ce genre d'intervention d'urgence, nous avons besoin de fonds permanents. On l'a dit et redit. On ne le répétera jamais assez.
Pour ce qui est de la prohibition, il est temps de se mettre au diapason du XXIe siècle. Ce n'est pas la solution. Nous n'en savons même pas suffisamment sur l'ETCAF pour le traiter. Il n'y a pas assez de recherche, à aucun titre, sur la santé mentale.
Nous avons assisté à une conférence de deux jours sur les gangs, où des agents de correction nous on parlé de détenus qui ont un QI de 72 ou moins, qui ont subi des traumatismes cérébraux, qui on des déficits intellectuels et toute une gamme de troubles concomitants.
Il y a un secteur du gouvernement qui s'occupe de santé mentale ici, un autre qui est chargé de la santé en général et un troisième qui est responsable de la toxicomanie et de l'alcoolisme, mais ils travaillent en vase clos. Il faut que les gens se parlent. Ce serait énorme, pour commencer.
J'ai une liste de recommandations, et j'ai le document d'information. Plusieurs recommandations, qui ont été formulées à maintes reprises, sont extraites du rapport du Sénat.
Pas plus que vous, nous ne voulons que ces jeunes se retrouvent dans la rue. Ils ne devraient pas être considérés comme des criminels, rien que parce qu'ils sont dans la rue ou qu'ils sont les victimes de leur famille. Leurs parents sont des victimes — c'est un problème générationnel. Il faut des points d'intervention, et nous avons besoin de soutien pour pouvoir intervenir.
Je ne pourrais pas dire les choses plus clairement.
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Bonjour à tous. Je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui et de nous offrir vos témoignages.
Monsieur Wiebe, tout d'abord, je voudrais vous présenter toutes mes condoléances pour la perte de votre fils. Je salue votre courage et aussi votre grande humanité. Perdre un membre de notre famille peut parfois nous amener à la colère extrême et à l'aveuglement. Je salue votre témoignage, parce qu'il a beaucoup mis l'accent sur la compassion, la prévention et le fait de vouloir sauver des enfants avant qu'ils ne deviennent des criminels.
Je suis aussi membre du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous avons reçu, il y a quelques jours, le ainsi que tous les autres fonctionnaires. Ma question portait justement sur la prévention. Dans le budget actuel — et les budgets subséquents —, il n'y a pas vraiment d'augmentation sur le plan de la prévention, ce qui m'a été confirmé. Le budget varie entre 30 millions de dollars et 60 millions de dollars pour tout le Canada.
Je vous regarde, et vous m'apparaissez être des personnes exceptionnelles de par votre besoin de sauver les jeunes, bien que nous n'ayez que des grenailles, des petits montants pour ce faire. En regardant le budget, on se rend compte qu'il n'y a pas plus d'augmentation. C'était le premier point que je voulais confirmer, soit qu'il n'y aura pas d'augmentation en matière de prévention. C'est le cas depuis plusieurs années —, au-delà du gouvernement actuel.
J'aimerais aussi vous parler de la Loi sur les jeunes contrevenants avant d'en arriver à ma question. Cette loi veut criminaliser des jeunes de 14 ans, 15 ans ou 16 ans, selon les provinces.
Depuis tout à l'heure, j'écoute mes collègues qui se demandent ce que l'on peut faire. En fait, vous nous le dites depuis le début: prévention, prévention et prévention.
Il n'y a pas plus d'argent qui est investi en matière de prévention. Le CNPC nous dit à l'heure actuelle qu'il ne peut même plus faire de demandes pour des projets parce qu'il n'y a plus d'argent dans la caisse, et ce, jusqu'en 2001-2012. Que fait-on s'il n'y a plus d'argent qui est investi dans la prévention? On ne veut pas investir en prévention, mais on veut donner des peines plus sévères à des jeunes qui, à 14 ans, 15 ans ou 16 ans, ont peut-être commis des meurtres ou des crimes graves. Finalement, la vraie question à se poser est: que fait-on après avoir parlé de prévention et de non-criminalisation des jeunes? En fait, on se retrouve dans un système qui fera cela, c'est-à-dire qu'il criminalisera des jeunes et n'investira pas 1 ¢ de plus dans la prévention.
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Nous avions un jeune, celui qui a dirigé le meurtre de TJ. Il a passé 32 mois dans un centre de jeunes du Manitoba. Même si le meurtre est survenu avant l'entrée en vigueur de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents — c'était le 1
er avril 2003, et mon fils a été assassiné le 5 janvier 2003 —, ce jeune a été assujetti à la LSJPA plutôt qu'à la Loi sur les jeunes contrevenants.
Je n'en ai pas beaucoup à dire sur la LSJPA, mais pour en revenir à ce que disait Kelly, cette personne, qui a dirigé le meurtre de mon fils, n'a jamais reçu de soins d'un psychiatre, d'un psychologue: absolument rien. Je ne suis pas censé le savoir, mais je l'ai appris. Nous, les victimes, sommes incroyablement débrouillardes pour apprendre ce que nous ne sommes pas censés savoir. J'ai été tellement perturbé, même si j'étais en colère — ce garçon a eu 18 ans trois semaines plus tard —, qu'il ait pu convaincre trois autres personnes d'assassiner quelqu'un, parce qu'ils ne connaissaient même pas mon fils. Même si, comme le disait M. Murphy, cela pourrait me remplir de colère, ce qui m'enrage encore plus, c'est que ce gars a été détenu dans une institution pendant 32 mois avant d'être acquitté, sans bénéficier de la moindre mesure d'aide. Alors quel message est-ce cela envoie à ses pairs? Tout d'abord, il est détenu dans un établissement pour les jeunes, il y reste 32 mois, il ne bénéficie d'aucune mesure d'aide de santé mentale. Pensez-vous qu'il en a besoin? Il vient de faire assassiner quelqu'un.
J'ai du mal même à en parler, et rien n'a été fait. Alors, ce qu'a dit Kelly est absolument vrai. Ce gars a besoin d'aide. Autrement, il tuera encore, parce que non seulement il n'a pas bénéficié de la moindre intervention pendant 32 mois, mais il s'en est tiré, par dessus le marché. Pensez au pouvoir dont peut jouir ce jeune dans son milieu en ce moment.
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Merci, monsieur le président.
Depuis que nous avons commencé les audiences, les gens se sont certainement entendus sur quelques points. M. Wiebe l'a dit, et certains ont hoché la tête: le caïd reconnaissable, le marionnettiste principal, le cerveau du crime organisé qui se sert des jeunes, qui recherche la manne — c'est-à-dire l'argent —, qui utilise les outils — les drogues, les armes et la traite de personnes —, cette personne-là devrait être emprisonnée. Elle devrait être retirée de la société et obtenir du traitement, peut-être. Nous comprenons que le retrait de l'individu et la dissuasion sont des facteurs importants.
J'espère que tous sont d'accord que le pion — le jeune de 14 ans issu d'une famille désunie qui se laisse séduire par le fait d'appartenir à une gang, dont quelqu'un se sert et qui commet un crime dont il n'est pas responsable de façon permanente à titre de jeune —, cette personne-là ne devrait pas subir le même sort, du moins sans des efforts de la collectivité et du système. Il peut nous être facile de traiter de ce genre de cas.
Le problème — comme toujours —, c'est les personnes qui se trouvent au milieu. Qu'advient-il du jeune qui est à mi-chemin dans la hiérarchie et qui commet un crime d'adulte? Et les victimes, elles? Aussi, qu'en est-il de la possibilité de réadapter la personne et de l'effet dissuasif?
Aujourd'hui, nous avons parlé surtout de la réadaptation, et nous comprenons. Je pense que c'est sur le plan de l'effet dissuasif qu'il y a peut-être une divergence d'opinions au sein du comité, du Parlement et de la collectivité. Les gens pensent qu'en infligeant des peines lourdes et longues, on envoie un message.
De nombreux juges et même certains policiers nous ont dit que la dissuasion ne fonctionne pas chez les jeunes. Ils ne sont pas comme nous. Certains d'entre nous sont plus jeunes que d'autres, bien entendu, mais, vous savez, l'effet n'est pas le même. La dissuasion ne fonctionne pas, et c'est pour cette raison qu'elle n'est pas incluse précisément dans la LSJPA, nonobstant des conventions internationales sur le fait que les enfants sont une entité différente.
Qu'avez-vous à dire au sujet des personnes qui se trouvent au milieu? Nous nous dirigeons potentiellement vers une réforme de la LSJPA. Ce serait terrible d'emprisonner un jeune qui a commis un crime d'adulte et qui pourrait être réadapté, mais ce serait aussi terrible de libérer une personne qui est complètement fermée et qui présente un danger pour la société. Quels ajustements devrions-nous faire dans de tels cas? Je déteste employer le terme « réajustements ».
J'aime la direction que la discussion a prise au cours des dernières minutes. Je tiens à garantir à tout le monde que le gouvernement est bel et bien d'avis qu'il nous faut une approche équilibrée. Nous avons investi des ressources dans la prévention, dans la réadaptation et dans les solutions plus sévères.
Dans ma circonscription, Kitchener-Centre, par exemple, on a alloué il n'y a pas très longtemps 3,2 millions de dollars à une coalition de groupes communautaires locaux afin d'établir une stratégie de lutte contre les gangs. Des initiatives du genre sont lancées dans tous les coins du pays. Je voulais rassurer tout le monde sur ce plan.
Cela dit, j'ai très bien compris ce matin que vous participez tous aux efforts centrés sur la prévention. Il s'agit là d'un morceau essentiel du casse-tête, et je vous remercie donc également de votre travail.
Pour garder le sens des proportions, j'aimerais savoir quelles sont les sommes dont nous parlons. Dans un sens, on ne peut jamais investir assez dans la prévention, mais il faut aussi se fixer des cibles optimales. Puisque le but de notre tournée est de recueillir des faits, je me demande si vous vous sentez tous à l'aise de me dire quel est votre budget actuel, quel serait votre budget idéal et ce que le gouvernement devrait investir, à l'échelle nationale, dans la prévention du crime chez les jeunes. J'aimerais que vous me fournissiez ces données l'un après l'autre.
Monsieur Johnston, vous occupez le siège chanceux au bout de la rangée, si vous voulez bien partir le bal.
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J’aimerais commencer en disant
Anin et
Tansi, des mots dans nos langues, les langues de notre territoire. Je souhaite la bienvenue à tous les membres du comité ici, à Winnipeg et au Manitoba.
Dans notre travail, nous appelons Winnipeg la plus grande réserve du Canada, car c’est ici qu’habitent le plus grand nombre d’Autochtones de tous les territoires, même ceux de l’Est, du Sud et du Nord. Officiellement, nous pensons qu’environ 15 p. 100 de la population de Winnipeg est autochtone, mais en réalité, le pourcentage est bien plus élevé: il est probablement plutôt dans les environs de 20 p. 100 ou un peu plus. Nous représentons donc une population considérable.
L’organisation que je représente s’appelle Ka Ni Kanichihk. Il s’agit d’un mot cri qui signifie « ceux qui avancent » ou « ceux qui mènent ». Notre but est d’accomplir du travail au sein de notre collectivité, du travail qui corresponde, sur le plan culturel, à nos systèmes de valeurs et à nos conceptions culturelles.
J’aimerais commencer en citant les propos d'un jeune homme autochtone qui était membre d’une gang. Je pense qu’il appartenait à l’Indian Posse, l’une des grandes gangs autochtones de Winnipeg. Il s’est entretenu avec un professeur de sociologie de l’Université du Manitoba. En passant, la recherche se trouve sur le site Web du CCPA, du Centre canadien de politiques alternatives. Il a déclaré: « Pour changer la violence dans le quartier, il faut changer le quartier. » À mon sens, ces paroles signifient que, pour avoir du succès dans nos efforts de prévention et d’intervention, nous devons vraiment apporter des changements structuraux et systémiques qui permettront aux gens de participer et de se sentir appréciés, et qui empêcheront les jeunes de se joindre aux gangs.
J'oeuvre au sein de la collectivité depuis 1977 ou 1978, à peu près, et j’ai travaillé avec de nombreux membres de gangs. Je travaille avec les gens qui appartiennent aux gangs autochtones, et non pas avec les gangs dont vous avez entendu parler tout à l’heure, comme la Zig Zag Crew et les gangs asiatiques, quoiqu’il existe un lien, dont nous parlerons aussi.
Nous devons vraiment comprendre le point suivant. J’utilise l’analogie de la moisissure, qui pousse dans certaines conditions, soit notamment dans l’humidité et le noir. Il s’agit d’un processus naturel. De leur côté, les gangs croissent dans le même genre de conditions structurales. Lorsque les gens n’ont pas d’autres choix compte tenu de leur situation, ils se tournent naturellement vers les gangs. Il faut donc modifier les conditions.
Dans nos collectivités, nous parlons d’une approche de la prestation de services axée sur les droits de la personne. Selon moi, ce genre d’approche rend indispensable le fait de permettre aux Autochtones de s’occuper d'eux-mêmes. Si vous examinez tous les indicateurs — quels enfants sont en prison, font partie des gangs, sont mêlés au système de justice pénale ou se prostituent actuellement dans les rues de Winnipeg —, vous découvrirez que la grande majorité de ces enfants sont autochtones. Nous devons vraiment comprendre les conditions dans lesquelles ces familles et ces enfants vivent.
Depuis les 20 dernières années, nous établissons nos programmes en nous fondant sur la collectivité autochtone de Winnipeg. Nous essayons très activement de nous procurer des ressources qui nous permettent d’accomplir notre travail en ayant recours à nos propres connaissances et pratiques.
Je suggérerais très humblement que les gens et les organisations qui font ce travail pour nous depuis longtemps ont bien peu de succès; ils obtiennent de très piètres résultats. Je pense que c’est ce qu’une évaluation indépendante montrerait.
J’aimerais aborder brièvement des recherches qui ont été menées en Colombie-Britannique. Vous les trouverez en ligne en recherchant Michael Chandler et un autre professeur de sociologie de l’Université de la Colombie-Britannique dont le nom de famille est Lalonde. Les deux sociologues étaient intrigués par les taux de suicide chez les jeunes des collectivités autochtones de la Colombie-Britannique. S’ils se sont penchés sur la question, c’est parce que dans certaines collectivités, le taux de suicide chez les jeunes était 800 fois plus élevé que la moyenne nationale — ce qui est extrêmement significatif —, tandis que dans d’autres collectivités de la province, le taux était pratiquement inconnu. Ils étaient donc vraiment curieux de savoir ce qui faisait la différence.
Ce qu'ils ont découvert, c’est que le taux le plus bas était celui de la collectivité qui était la plus à même de se contrôler elle-même — on parle d'autodétermination. Ils ont appelé ces éléments de l'autodétermination « la continuité culturelle ».
Selon moi, ce point est très important. Nous devons examiner la recherche, puis créer des politiques en conséquence, y compris sur le plan de la justice et des droits de la personne. Je le répète: le fait que les Autochtones s'occupent eux-mêmes des questions qui les touchent constitue un droit de la personne, puisque tout nous a été enlevé. On nous a systématiquement destitués de notre langue, de notre culture, de nos institutions politiques, sociales et éducationnelles; on nous a tout enlevé. Toutes les institutions que nous connaissions et qui unissaient nos peuples ont été déformées, éliminées ou détruites par le colonialisme.
C'est sur ce plan que nous devons commencer à faire des changements afin d'améliorer les conditions au sein des collectivités autochtones. C'est ce que nous faisons ici, ce à quoi nous accordons de l'importance et nous travaillons fort. Or, une des choses qu'il nous manque, c'est une bonne compréhension et une analyse approfondie de la question. Les gangs proviennent des endroits où la moisissure pousse, où les gens n'ont pas une bonne estime d'eux-mêmes, où ils n'ont ni pouvoir ni statut sur le plan social ou matériel. Ils vont donc prendre les choses en main eux-mêmes pour réussir à modifier leur situation sociale.
J'ai vraiment eu le coeur brisé ce matin lorsque j'ai entendu un des témoins parler d'un jeune homme qui a organisé trois meurtres. Je peux vous le garantir, je sais que nos enfants sont désespérés, mais ce ne sont pas des criminels calculateurs. Ce ne le sont tout simplement pas. Ce sont des jeunes de 17 ans. Ce n'était qu'un bébé; c'était un jeune garçon. Il a commis des actes terribles, mais ce n'est pas un criminel calculateur. Je ne connais pas un seul jeune qui entre dans cette catégorie de criminalité.
Considérer les personnes comme irrécupérables et les cataloguer aussi catégoriquement... Il ne fait aucun doute que ses actions étaient terribles, mais selon moi, c'est notre enfant. C'est notre enfant à tous, et nous devons trouver des moyens de l'appuyer, car de nombreux jeunes sont comme lui.
Je voulais présenter d'abord ces observations au comité et je vous remercie de votre attention. Lorsque les témoins auront tous fait leur déclaration, je serai ravie de répondre à vos questions.
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Bonjour. Je suis ici aujourd'hui pour représenter Ndinawemaaganag Endaawaad (Ndinawe). Ndinawe est une organisation autochtone dont le siège est situé à l'extrémité nord de Winnipeg et qui a été créée en 1993 pour aider, au niveau de la communauté, le nombre élevé de jeunes autochtones victimes d'exploitation sexuelle.
Il a été constaté qu'un nombre considérable de jeunes n'avaient pas de cadre de vie sûr et stable, ce qui les exposait à des risques élevés. Depuis sa création, l'organisation s'est agrandie en réponse aux besoins des jeunes qu'elle aide et à la complexité des problèmes auxquels ces jeunes sont confrontés. Aujourd'hui, Ndinawe est une organisation de services intégrés pour les jeunes autochtones. Ces services sont axés sur les refuges, la culture, l'éducation, les activités récréatives, l'intervention et le soutien.
Je suis la coordinatrice de projet du programme d'intervention auprès des gangs de Turning the Tides. Il s'agit d'un projet pilote d'une durée de trois ans pour soutenir et guider les jeunes à risque qui font partie de gangs. À ce jour, 56 jeunes âgés de 14 à 19 ans ont participé à ce projet.
Je suis ici aujourd'hui pour parler au nom de ces jeunes, pour faire connaître leur situation et les raisons qui les ont poussés à rejoindre des gangs.
À l'extrémité nord de Winnipeg, les jeunes autochtones se heurtent souvent à des obstacles décourageants tels que la pauvreté et la marginalisation économique qui limitent leurs perspectives d'avenir et alimentent un sentiment de désespoir; l'éclatement de la famille qui, à son tour, prive les enfants d'affection et de socialisation; et la perte de la culture et de l'identité.
Un grand nombre de jeunes autochtones sont victimes de stéréotypes, notamment du racisme, de la peur et d'un stigmate d'infériorité qui contribuent au manque d'identité et d'appartenance.
Les nombreuses barrières, ajoutées aux graves lacunes des services et aux problèmes liés à la prestation de services permettent à beaucoup de jeunes de passer à travers les mailles du filet de sécurité sociale et les exposent à certains risques. Les jeunes sont exposés à des risques des systèmes qui ne les comprennent pas et ne leur accordent aucune valeur, ce qui a pour résultat des conditions de vie inadéquates, l'exploitation, la perte de tout espoir et des conséquences tragiques.
Winnipeg abrite la plus grande population autochtone urbaine au Canada. Les Autochtones comptent pour plus de 20 p. 100 de la population dans 14 districts de recensement, un taux unique au Canada.
En plus, on enregistre dans des quartiers de cette collectivité certains des taux de pauvreté les plus élevés au Canada.
Un fort pourcentage de ménages autochtones de Winnipeg sont au-dessous du seuil de faible revenu établi par Statistique Canada.
Le Manitoba enregistre le taux de scolarisation des jeunes autochtones le plus faible de toutes les provinces canadiennes. À l'extrémité nord, un jeune sur cinq obtient un diplôme d'études secondaires. Il n'est donc pas surprenant que les jeunes autochtones ont deux fois plus de chances d'être au chômage.
Au Manitoba, comme dans tout le Canada, les enfants et les jeunes autochtones sont considérablement surreprésentés dans les services d'aide sociale à l'enfance; ils comptent pour 85 p. 100 des enfants pris en charge. Beaucoup de ces jeunes sont arrachés à leurs familles seulement pour passer d'un foyer à un autre sans jamais trouver de stabilité ni d'endroit où ils peuvent établir des racines.
Pendant qu'il a été pris en charge, l'un des jeunes participant à mon programme est passé dans 18 foyers d'accueil. Ce jeune a appris à ne pas s'attacher à un foyer dont on le retirera vite, à ne pas s'installer confortablement, à ne pas accorder sa confiance, à rester insensible et à ne dépendre que de lui.
Les gangs des rues offrent une solution de rechange, un sens de la famille, d'appartenance et d'acceptation. Pour d'autres jeunes, l'appartenance à un gang est transmise d'une génération à l'autre; leurs mères, leurs pères, leurs frères et soeurs, leurs tantes et leurs oncles sont membres de gangs. Pour eux, c'est ainsi qu'ils ont grandi. C'est tout ce qu'ils connaissent, ils en ont hérité. Malgré l'aspect négatif associé à ce mode de vie, leur famille et leur identité en font partie. Le rejet de ce mode de vie équivaut au rejet de leur famille. Ce que l'on espère, c'est que les jeunes quittent les gangs pour devenir de dignes membres de la collectivité. Mais le leur demander, c'est leur demander de s'isoler et de s'aliéner de tout ce qu'ils connaissent.
Malgré tout, nos jeunes sont capables, s'ils disposent de ressources et de soutien adéquats, de bâtir un avenir brillant. Les jeunes disent qu'ils ont besoin d'espaces positifs qu'ils pourront fréquenter et non pour y être traités comme s'ils étaient un problème à régler. Ils veulent un endroit qui les aidera à avoir accès à ce qui les intéressent, à développer leurs talents et à renforcer leurs aptitudes au leadership, un endroit où ils seront plus que seulement la somme de leurs problèmes.
L'adoption du style de vie de la rue implique souvent des coupures. Le jeune s'éloigne des systèmes qui le gardent normalement dans la société, notamment la famille, l'école, la collectivité, les organismes de protection de l'enfance et les services correctionnels pour les jeunes. Tout ce qui les intéressent, c'est le présent, gagner de l'argent, se nourrir, trouver un logement, remplir leurs besoins essentiels, ce qui les conduit souvent à entrer dans des gangs d'où ils s'éloignent encore plus de la société.
Beaucoup de jeunes trouvent dans les gangs ce que la société ne leur offre pas. Il a été demandé à la prestataire de services de première ligne que je suis de faire des recommandations. Pour revenir aux statistiques que j'ai citées plus tôt, il est nécessaire de s'engager à garder les familles ensemble. Prendre en charge des enfants et laisser la famille régler les problèmes n'est pas une solution. Il faut s'occuper de la famille dans son ensemble.
Il faut des installations récréatives et des programmes de loisir qui assurent aux jeunes et aux familles de toutes les collectivités la possibilité de se réunir dans le cadre d'activités saines et sûres. Il faut accorder aux systèmes d'éducation les ressources nécessaires pour travailler avec les jeunes à qui les programmes standards ne s'appliquent pas.
Je sais que des écoles de transition se trouvent à l'extrémité nord de la ville, mais elles ne peuvent accepter qu'un nombre limité d'élèves et elles ne sont pas équipées pour affronter les problèmes des jeunes qui ont choisi ce mode de vie.
La santé mentale et l'ETCAF sont endémiques et souvent ne sont pas diagnostiqués. Il est stupéfiant de constater combien il est difficile à un jeune non diagnostiqué d'utiliser des ressources. Beaucoup de jeunes qui n'ont pas de diagnostic ne bénéficient de soutien ou de services qu'une fois incarcérés.
Les services de soutien au programme contre l'abus de substances psychoactives sont insuffisants. Un jeune qui participe à notre programme a attendu cinq mois pour recevoir un traitement. Les services disponibles ne sont pas conçus pour régler les questions connexes et ne tiennent pas compte des différences culturelles et beaucoup de jeunes qui réussissent à recevoir un traitement ne sont pas acceptés dans les programmes à cause de leur trouble du comportement.
Beaucoup d'efforts misent sur une réaction aux activités des gangs. Malheureusement, cette réaction a tendance à être punitive et n'aborde pas les facteurs qui ont créé chez les jeunes la vulnérabilité qui a permis aux membres de gangs de les recruter. Les peines plus sévères ne sont pas la solution. Si l'emprisonnement des jeunes procure un sentiment de sécurité à court terme à l'ensemble de la collectivité et, bien sûr, aux victimes, son effet n'est pas durable. Chaque jeune en détention peut constater la structure de gang créée justement par cette détention. Pour les gangs, l'incarcération de leurs membres n'est pas un moyen de dissuasion, en fait, elle accentue le recrutement de membres de plus en plus jeunes. Ce problème subsistera tant qu'il ne sera pas réglé.
Plutôt que d'emprisonner les jeunes pour en faire un exemple, le gouvernement devrait s'engager à oeuvrer pour la réadaptation, la réintégration et pour une justice réparatrice. La prison ne réadapte pas les détenus, elle en fait des criminels plus forts et mieux organisés.
Quand les jeunes sont incarcérés, on s'attend qu'une fois libérés, ils deviennent des membres productifs de la société et qu'ils ne commettent plus d'infraction. Hélas, les problèmes sous-jacents à l'origine de leur incarcération existent toujours, et sont même plus graves dans beaucoup de cas. Il n'y a pas de réadaptation ou de traitement.
Il faut le dire, l'incarcération n'est plus une menace. Pour beaucoup de jeunes, c'est comme un retour à la maison puisqu'ils sont incapables de fonctionner dans la société.
La justice réparatrice est une forme de restitution qui exige du délinquant qu'il assume la responsabilité de ses actes, mais elle permet aussi d'apaiser la victime et les collectivités touchées par le crime.
Permettez-moi de conclure par les réflexions suivantes. La population autochtone au Canada croît de manière générale, mais c'est le nombre des enfants et des jeunes Autochtones qui croît le plus rapidement. Les jeunes de moins de 25 ans comptent pour 48 p. 100 de la population autochtone. Il est temps d'agir.
Les collectivités autochtones pensent pouvoir relever ces défis en inculquant à leurs enfants une identité culturelle. Les dirigeants et les spécialistes du développement de l'enfant savent que les jeunes qui ont une idée positive de leur identité ont un plus fort sentiment d'appartenance à la famille, à la communauté, aux pairs et sont mieux armés pour affronter l'adversité. Qui plus est, ils pensent qu'il est essentiel d'inculquer à leurs enfants une forte identité culturelle pour panser les blessures dans leurs communautés ou pour la survie de leur culture.
Étant donné que l'ensemble de la population autochtone est bien plus jeune que l'ensemble de la population canadienne, le développement sain des jeunes Autochtones est particulièrement crucial pour l'avenir de nos communautés. En termes simples, les jeunes d'aujourd'hui sont les dirigeants de demain. La façon dont nous encourageons et soutenons leurs talents, leur énergie et leur créativité aujourd'hui établira la façon dont ils assureront leur leadership dans nos collectivités pendant très longtemps à l'avenir.
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Je ferai la déclaration pour nous deux ce matin.
Merci, tout d'abord, à mes soeurs et à nos organismes soeurs d'être présents ce matin compte tenu des défis et des possibilités de notre communauté relativement au crime organisé et aux gangs.
Je voudrais commencer par une référence à un rapport du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones, dont je me sers très souvent pour collecter des fonds pour le travail que je fais. Il s'agit du rapport Les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain: Plan d'action pour le changement publié en 2003. Il y a dans ce document un processus très similaire à celui que vous suivez dans tout le Canada, comportant des consultations avec des spécialistes et des témoins sur ce que sont aujourd'hui les jeunes Autochtones vivant en milieu urbain.
Je veux seulement citer un paragraphe qui se trouve à la page 84 du rapport:
Marginalisées et sans ressources, de nombreux jeunes Autochtones demeurent à la recherche d'un sentiment d'appartenance, d'une communauté et d'une identité. L'affiliation et l'appartenance à un gang peuvent donner au jeune Autochtone l'impression d'avoir une emprise sur sa vie et un but ainsi que le sentiment d'être accepté.
Les mots clés qui sautent vraiment aux yeux sont « emprise, but et sentiment d'être accepté » et j'en parlerai un peu plus quand vous nous connaîtrez un peu mieux.
Une mesure recommandée dans cette partie du rapport — intitulée Quitter le monde des gangs: Le besoin de sécurité — indique une certaine collaboration entre la province, le gouvernement fédéral et le gouvernement municipal:
... en consultation avec les organisations autochtones, appuie l'établissement de maisons d'hébergement pour aider les jeunes Autochtones urbains à quitter le milieu des gangs. Les programmes devraient cibler les grandes villes « à risque élevée ».
J'aimerais aussi vous lire un autre paragraphe qui a attiré mon attention:
Nous aimerions souligner que les facteurs sous-jacents qui contribuent à la présence de gangs et au comportement criminel sont largement liés aux contraintes importantes auxquelles les jeunes Autochtones sont soumis. Il faut se pencher sur les problèmes que sont l'isolement culturel, la ségrégation raciale et l'anomie des structures sociales et des mesures de soutien dans de nombreux quartier du centre des grandes villes. Les gouvernements doivent adopter des modèles de développement communautaire, fournir des logements sûrs et sécuritaires et prendre des mesures de revitalisation économique dans les secteurs urbains les plus exposés à la désintégration sociale.
Donc, je le répète, ce rapport a été utile et représente vraiment le message clé pour ces discussions sur les services aux collectivités et le travail avec des organismes communautaires, tout en mettant l'accent sur les organismes communautaires autochtones qui font le travail et qui collaborent.
Après cette introduction, permettez-moi de vous dire que Jackie et moi travaillons pour une organisation appelée Ma Mawi Wi Chi Itata Centre. C'est une organisation communautaire dirigée et contrôlée par des Autochtones qui fournit des services de soutien des ressources aux familles autochtones vivant à Winnipeg. Ces services s'adressent à tout le monde, des femmes et adolescentes enceintes jusqu'aux personnes âgées et aux aînés de notre communauté. Nous fournissons des services de soutien des ressources aux quatre étapes de la vie en mettant l'accent sur un traitement holistique qui guérit les gens et en veillant à ce que l'approche soit équilibrée.
Nous sommes très occupées par notre travail puisque nous vivons dans la capitale autochtone du Canada. Bien que notre organisation soit très bien accueillie par la communauté autochtone, nous continuons à nous heurter à des défis et nous avons des possibilités, en tant que communauté, d'offrir la guérison que nous devons offrir et de participer à la vie de nos communautés de façon significative.
Je veux parler de notre situation en termes de communauté autochtone, de nos jeunes Autochtones et de nos jeunes qui rejoignent des gangs. Notre organisation a élaboré, il y a quelques années, une stratégie de développement culturel des jeunes qui visait un grand nombre de jeunes.
Comme l'a mentionné Melissa de Ndinawe, les jeunes Autochtones sont une composante dynamique de Winnipeg. Ce sont les futurs dirigeants, éducateurs, professionnels et modèles d'identification de leurs quartiers et de l'ensemble de leur communauté. Ils constituent le lien avec l'histoire et la tradition du passé, mais ils détiennent aussi les connaissances et une vision du futur. C'est notre fondation et notre base de valeur pour soutenir les jeunes dans nos communautés.
De ces consultations, nous avons appris quatre choses essentielles qui sont la pierre angulaire de notre stratégie de développement culturel des jeunes. Le sentiment d'appartenance à un groupe, une famille, une culture ou une organisation doit être fermement établi et sauvegardé. Le sentiment d'appartenance permet d'apporter des changements positifs au niveau de la confiance en soi et de l'estime de soi et aide à opter pour des modes de vie positifs. Les ressources positives favorisent des expériences de vie positives. Par exemple, la reconnaissance concrète du travail bien fait, des possibilités de sortie et d'événements et une formation de qualité dans le développement des compétences. Les possibilités d'assumer et de comprendre ses responsabilités au sein de la communauté permettent l'épanouissement personnel et la compréhension.
Le développement des responsabilités personnelles au moyen de la participation à différents secteurs de la communauté et en jouant un rôle dans la communauté aidera à franchir les étapes visant le choix de modes de vie positifs. Être reconnu comme quelqu'un de spécial crée l'estime de soi. Une plus grande estime de soi permet d'agir de façon plus indépendante par rapport aux pairs et un peu moins subjectivement. Par conséquent, notre organisation s'est engagée à bâtir des ressources et des services pour aider nos jeunes.
Avant de conclure, je veux attirer votre attention sur le fait qu'un crime organisé existe à l'extérieur de la communauté autochtone, et pour cette raison nous visons un objectif différent. Il s'agit du crime organisé qui exploite et cause du tort à nos femmes et nos enfants dans tout le Canada. Bien que nos jeunes qui entrent dans des gangs sont à l'origine de beaucoup de problèmes, ils ne s'enrichissent certainement pas. Le fait d'être membre d'un gang remplit un vide et c'est essentiellement un moyen de survivre.
Et, il y a le crime organisé qui est très bien organisé, très riche et il gagne énormément d'argent en exploitant nos femmes et nos enfants. Cette situation existe dans le Manitoba, du nord au sud, et dans tout le Canada où nos jeunes femmes et nos enfants, du nord au sud du Manitoba, sont victimes de la traite de personnes d'un océan à l'autre. Il me semble que l'un des exposés qui vous a été présenté était axé sur l'exploitation. Après les drogues et les armes, la traite de personnes est au troisième rang des activités les plus rentables.
Il faut une sacrée organisation d'un océan à l'autre pour mettre un frein à ces activités. Les organismes communautaires sont complètement démunis de ressources et ne peuvent pas suivre le degré d'organisation et de créativité du crime organisé, sa façon d'échapper au contrôle et comprendre comment se fait-il qu'on le laisse faire beaucoup de choses. Les femmes autochtones sont les cibles de l'exploitation sexuelle commise par le crime organisé.
Notre expérience à Winnipeg et dans le reste du Manitoba montre que les auteurs de ce type d'exploitation et qui font partie du crime organisé sont des immigrants ou des nouveaux canadiens vivant des communautés d'immigrants et de réfugiés; ces communautés se sont formées autour de la culture de leur pays d'origine. Ce sont eux qui ouvrent les repaires de trafiquants de drogues, les bordels et les endroits où nos jeunes enfants sont exploités.
Des choses ont été faites dans la province du Manitoba. Nous avons un gouvernement qui a vraiment travaillé avec la communauté et la communauté autochtone à l'élaboration d'une stratégie visant à mettre fin à l'exploitation sexuelle de nos enfants.
Il y a au Manitoba, une stratégie appelée Tracia's Trust qui a aidé bon nombre d'organisations communautaires à fournir des services aux victimes d'exploitation sexuelle.
Nous avons également travaillé dans ce domaine avec une plus grande coalition de communautés. Beaucoup de travail a été fait, mais il en reste encore tellement à faire.
Ce que nous recommandons, c'est de s'intéresser à nos jeunes, à la prévention et à l'intervention des jeunes Autochtones qui rejoignent des gangs et de nous aider à protéger nos femmes et nos enfants du crime organisé qui fait énormément de mal aux femmes. Le processus de guérison de la victimisation est très long. Nous avons besoin de ressources pour les accompagner dans leur guérison, mais nous devons aussi régler le problème de la demande. Tant que nous ne le ferons pas, la victimisation et la traite des femmes et des enfants autochtones dans tout le pays continueront.
Je vous remercie.
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Bonjour. Je viens de Le Pas, une ville située à quelque 600 kilomètres au nord de Winnipeg. De l'autre côté du pont se trouve la communauté de la Nation crie d'Opaskwayak. Nos deux collectivités, même si un pont les sépare, travaillent activement ensemble.
Je voudrais surtout vous parler aujourd'hui de prévention.
Quelques mots d'abord au sujet de Daniel Wolfe. Je ne sais pas si ce nom vous dit quelque chose, mais Daniel Wolfe était originaire de Le Pas. Il a passé les 12 premières années de son existence dans des familles d'accueil. Il a ensuite pratiquement grandi dans les rues de Winnipeg. Daniel Wolfe a été reconnu coupable de deux chefs d'accusation de meurtre au premier degré et de trois tentatives de meurtre. Il était incarcéré dans le pénitencier de Régina. Il s'est évadé de prison en compagnie de quelques détenus, qui ont fini par être retrouvés et réincarcérés. Daniel Wolfe a été tué au pénitencier par six codétenus.
Les gens qui entendent parler du cas de Daniel Wolfe considèrent celui-ci comme un criminel endurci. Or, à un moment donné, Daniel Wolfe était un petit garçon. Sa mère a avoué consommer de l'alcool et fumer de la marijuana avec lui. Selon ses dires, il s'est tourné vers les gangs de rue parce qu'il cherchait un foyer qu'elle n'a pas été en mesure de lui donner.
L'éducation des enfants constitue probablement l'élément le plus important de la prévention. Bon nombre de nos parents aujourd'hui, et je fais surtout allusion aux parents autochtones, vivent dans des conditions qui les exposent à des risques. Ils se sentent dépourvus, et foncièrement incapables d'exercer leur rôle parental. Bon nombre d'entre eux subissent encore les séquelles du système des pensionnats indiens. Ces problèmes ne sont toujours pas réglés.
Je sais que la Fondation autochtone de guérison a été mise sur pied dans le but de s'attaquer à cette question. Or, cette initiative, à mon avis, n'a fait que compliquer les choses. Il y a des plaies qui sont toujours ouvertes et rien, pour l'instant, ne peut aider à les refermer. Ce sont les enfants qui continuent de souffrir.
Chaque jour, quand je sors des bureaux de l'organisme, je constate la forte présence des gangs de rue. Nos locaux sont situés dans le complexe d'habitation Kelsey, à Le Pas, complexe connu sous le nom de « ghetto » qui relève du Bureau du logement du Manitoba. Quand on traverse la cour le matin, on voit des bouteilles de bière brisées, de la vitre cassée, des signatures laissées par des gangs de rue, des jeunes enfants qui errent alors que leurs parents dorment ou sont absents de la maison. En fait, il est très déprimant de rentrer au travail le matin.
Cette situation nous a amenés à créer un programme de prévention ciblé, inspiré d'un modèle prometteur, qui vise à dissuader l'affiliation aux gangs de rue. Il y a dans notre quartier des enfants de huit ou neuf ans qui affichent les couleurs de gangs de rue. Ils entrent et sortent des immeubles d'habitation, et nous savons qu'ils travaillent pour des membres de gangs. Ces jeunes, en fait, sont exploités. Bon nombre d'entre eux, semble-t-il, comptent, dans leurs familles, des personnes qui sont affiliées à des gangs. Il peut s'agir de leurs parents, de leurs oncles, tantes, grands-parents. C'est un cercle vicieux.
Ce que nous essayons de faire, essentiellement, par l'entremise de notre projet, c'est d'offrir aux enfants, et ce, dès l'âge de six ans, des solutions de rechange. Nous estimons qu'il est essentiel de commencer à travailler avec eux dès leur jeune âge, car souvent, à 14 ou 15 ans, ils sont déjà très bien insérés dans des gangs de rue. Il est très difficile à ce moment-là de les aider, comme le savent certaines des personnes ici présentes.
Au cours des trois dernières années, quatre jeunes de Le Pas ont été inculpés de six meurtres et de trois tentatives de meurtre. Récemment, soit tout juste après le Nouvel An, un homme été tué à bout portant dans un quartier résidentiel.
Ce crime n'est peut-être pas lié aux gangs, mais il témoigne de l'existence d'une sous-culture au sein de notre collectivité. Il y a quelques semaines, une fillette de six ans a été enlevée alors qu'elle se rendait à l'école et agressée sexuellement par un jeune de 17 ans. Au cours des dernières semaines, un jeune homme de Le Pas a été tué à Thompson par un membre du gang auquel il était affilié.
Voilà la situation à laquelle nous sommes confrontés, et les habitants de la collectivité, et surtout de notre quartier, n'en sont pas surpris. Les jeunes voient ce qui se passe et la plupart se disent que c'est l'avenir qui les attend. Pour eux, il n'y a rien d'autre. Les parents sont désemparés. Ils nous racontent des choses du genre: « Mon garçon a 12 ans. Il est toujours sorti. Il ne veut pas rentrer à la maison. Il fume, il boit, il est grossier. Il a abandonné l'école. C'est le genre de vie qu'il mène. »
Si nous avions été en mesure de travailler avec cette mère quand son fils est né, de l'aider à créer des liens avec son enfant et à lutter contre le TSAF, de soutenir les parents dans leur rôle parental, de leur donner les appuis nécessaire, nous n'aurions peut-être pas à composer avec ce problème aujourd'hui. L'enfant a 12 ans. Que lui réservera l'avenir? Le même sort que Daniel Wolfe?
Vous connaissez l'adage selon lequel il faut tout un village pour élever un enfant. Eh bien, il faut toute une collectivité pour sauver un enfant. Comme l'a déclaré le Dr Mark Totten, la meilleure façon de prévenir le crime est de mettre un terme à la violence faite aux enfants. Pour y arriver, il faut informer et soutenir les parents et les fournisseurs de soins.
Merci du temps que vous m'avez accordé.
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J'aimerais vous parler brièvement du travail qu'effectue notre organisme, un travail que des femmes font bénévolement, par amour.
Il y a environ quatre ans, il a été question, dans un article de journal, d'un aîné d'une collectivité du nord du Manitoba qui a été incarcéré pour avoir commis des gestes d'inceste envers sa petite-fille. Lorsqu'il a comparu devant la commission des libérations conditionnelles, la collectivité s'est ralliée derrière lui et a demandé sa remise en liberté. La commission a accepté. La jeune fille a été bannie de la collectivité. L'aîné a regagné la communauté des premières nations à laquelle il appartient et a récidivé, sa victime étant une autre de ses petites-filles.
L'histoire a fait la une des journaux. Tout incident négatif mettant en cause des Autochtones finit par faire, à tout le moins, la une des journaux. C'est ce qui s'est passé, bien sûr, dans ce cas-ci.
Quelques grand-mères et femmes se sont réunies et ont dit, assez. Nous tenions encore une fois à affirmer notre leadership en tant que femmes autochtones, une stratégie qui avait fait ses preuves dans le passé au sein de nos collectivités. En effet, aucune décision ne pouvait être prise sans d'abord consulter les grand-mères. Souvent, leur point de vue servait de base aux décisions de la collectivité. Il s'agit d'un autre exemple des valeurs, des principes qui ont été compromis par l'histoire de ce pays.
Donc, nous avons dit que nous devions nous organiser et dénoncer cette violence profonde dont sont victimes nos enfants, car c'est à cause des agressions que ces enfants subissent aux mains des membres de leur famille qu'ils finissent par se retrouver dans les autres systèmes. C'est là une autre façon de perpétuer le cycle de violence. Ajoutons à celui-ci les 500 femmes autochtones qui manquent à l'appel et qui ont été tuées, et la traite des femmes autochtones.
Nous sommes dirigées par trois kookums, ou chefs spirituels. Velma fait partie de ce groupe et elle vous transmet ses excuses. Elle a dû répondre à un appel d'urgence, car elle travaille pour un organisme qui s'occupe des survivants du système des pensionnats indiens. Ce sont des choses qui se produisent. Toutefois, je sais qu'elle voudrait que je vous dise que nous sommes en voie de reprendre la responsabilité qui est nôtre, c'est-à dire notre rôle de leader au sein des collectivités et de nos familles.
Depuis quatre ans, l'association Grandmothers Protecting our Children organise une marche sacrée le 21 septembre, journée importante pour les peuples autochtones puisqu'elle marque le passage entre l'été et l'automne. En effet, tout ce que nous faisons est lié aux valeurs qui nous définissent en tant qu'Autochtones. Cette marche a toujours été largement appuyée par la collectivité. Ce sera la quatrième année que nous tenons cette activité, qui a pour but de mettre un terme aux agressions commises envers les enfants autochtones, voire tous les enfants, sauf que nous savons, bien entendu, que dans cette ville, ce sont surtout les enfants autochtones qui sont victimes de violence.
Je trouve intéressant que le comité se penche sur la question de la justice et des droits de la personne, deux thèmes qui sont inextricablement liés: en effet, justice et droit de la personne sont synonymes. Encore une fois, cette responsabilisation — le profond sentiment d'impuissance qui amène les gens à penser que seuls les comportements négatifs comptent fait partie intégrante du processus historique qui a mené à cette situation.
Ces systèmes créent des monstres et personne ne sait comment leur venir en aide. Mais au fond, ce ne sont que de jeunes enfants qui ont peur, qui sont effrayés.
J'ai un ami qui fait partie de notre conseil d'administration. Il s'appelle Cecil Swinson, un sergent de patrouille des premières nations. Il affirme que les jeunes se montrent durs quand ils sont dans la rue. Mais une fois à l'intérieur de la voiture de police, ils réclament leurs mères. Nous pouvons travailler avec ces jeunes, mais il nous faut des outils, des ressources pour y arriver.
Ma collègue ici présente a parlé d'une initiative appelée Turning the tides, un des cinq programmes d'intervention antigang financé par l'entremise du Fond de lutte contre les activités de gangs de jeunes. Le financement du programme va prendre fin en mars 2011 et ne sera pas prolongé. Nous savons qu'après l'octroi de cet argent, il nous a fallu un an et demi pour mettre sur pied le projet Nous n'aurons plus de financement en 2011. Or, nous avons vraiment besoin d'aide et de ressources de la part de nos homologues fédéraux, provinciaux et municipaux pour mener à bien notre tâche.
Pour revenir à l'association, elle est entièrement composée de bénévoles. Nous avons posé un geste vraiment insolite récemment: nous sommes descendues dans la rue dans le cadre de la Semaine de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants organisée par le gouvernement provincial. Je circule beaucoup sur les rues de Winnipeg. Je vois des jeunes filles, des enfants, des jeunes qui sont exploités sexuellement. Or, quand vous voyez, rue après rue, des femmes, surtout autochtones, dans le noir, dans le froid, qui se font exploiter sexuellement, quand vous ciblez certains quartiers, que vous allez les rencontrer, vous voyez le problème sous un angle nouveau. C'est une situation extrêmement triste. Il y a beaucoup de désespoir. Mais nous savons que ce n'est pas tout ce qui les définit.
Ces femmes sont très heureuses de nous voir arriver, de se faire offrir un sandwich, un café, de l'amour, de savoir qu'elles valent beaucoup plus, qu'elles méritent quelque chose de mieux. Ces femmes sont nos enfants et nous les aimons. Nous devons avoir la possibilité, et il s'agit là d'un droit fondamental, de travailler avec nos propres enfants.
Nous pouvons renverser la vapeur. J'en suis convaincue. Les femmes qui, comme moi, travaillent dans ce domaine n'ont pas à poser sans cesse les mêmes gestes et à espérer des résultats différents. Nous savons comment travailler avec les nôtres. Nous savons aussi que nos efforts portent fruit. Tout ce qu'il nous faut pour y arriver, c'est l'appui des gouvernements.
Merci.
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J'aimerais ajouter deux choses. Je pense que l'éducation constitue un moyen parmi d'autres de briser les cycles. Il existe diverses solutions. La continuité des services peut avoir un impact positif, car les problèmes sont nombreux. Il n'est pas uniquement question ici de l'absence de logements, d'emplois.
À Winnipeg, dans les quartiers où nous sommes présents, un enfant sur cinq termine ses études secondaires. Ce n'est pas beaucoup. Nous savons que ces enfants, une fois qu'ils quittent l'école, se retrouvent dans le système de justice criminelle. C'est le cheminement qu'ils suivent et nous en sommes témoins.
La ville de Winnipeg a entrepris, au cours des deux ou trois dernières années, un processus qui met l'accent sur la prévention du crime. On a créé, dans le cadre de celui-ci, une division scolaire pour les Autochtones. Il y a, à Winnipeg, une petite école autochtone qui fait partie d'une division scolaire plus vaste et qui arrive à produire des diplômés de qualité. Elle figure, d'après la revue Maclean's, parmi les meilleurs établissements d'enseignement au Canada. Pouvons-nous reproduire ce modèle à plus grande échelle?
Il n'est pas question ici du contenu du programme, mais de ceux qui le dirigent. Si les enfants autochtones voient des adultes autochtones qui travaillent, qui sont en santé, qui sont engagés, qui réussissent, ils vont vouloir suivre leur exemple. Toutefois, s'ils voient que nous sommes faibles, que nous avons peu d'importance, que nous sommes peu engagés, que tous les autres groupes culturels fournissent des services, c'est l'image qu'ils vont retenir. Donc, ce qui importe, ce n'est pas le contenu du programme, mais celui qui en assure la prestation.
Ce sont là des concepts clés, et c'est le message que nous devons transmettre aujourd'hui.
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Deux précisions. Ka Ni Kanichihk compte sur le financement provincial, fédéral, municipal et sur les dons de Centraide. Nous savons que nous devons manger à plusieurs râteliers pour faire fonctionner l'organisation. Notre portefeuille fédéral est le plus difficile à gérer. Voici quelques exemples.
Le ministère du Patrimoine canadien avait une initiative dite Centres urbains polyvalents pour jeunes Autochtones, qui s'appelle maintenant Connexions culturelles pour la jeunesse autochtone. Nous présentons une proposition au ministère en respectant l'échéancier qu'il a fixé, mais le ministère l'examine dans le cadre de ses propres processus. Quand elle parvient au ministre, il s'est souvent écoulé de six à huit ou même neuf mois depuis que le projet était censé démarrer en avril de l'exercice en cours.
Nous essayons ensuite de rattraper notre retard. Pour une organisation à entité unique, c'est très difficile, voire impossible. Ka Ni Kanichihk a accumulé assez de fonds pour tirer son épingle du jeu, mais, pour d'autres organisations, c'est simplement impossible.
L'autre élément dont je veux parler, ce sont les rapports à produire. Je comprends la notion de reddition de comptes, mais ce que l'on nous demande est insensé; c'est une tâche très lourde. Ce sont deux causes de difficultés très importantes. Comme Diane l'a dit, dans le cadre d'un projet triennal ou quinquennal, c'est simplement terrifiant. Nous essayons vraiment de remplacer les dollars que nous recevons de l'État fédéral par des dollars de la province. Dans les domaines ou nous pouvons prouver notre réussite, nous avons vraiment commencé à faire des démarches auprès de la province. Or, les ressources de la province sont limitées, du moins, c'est ce qu'elle prétend. Nous sommes souvent un peu serrés.
Actuellement, dans le cadre de notre programme Circle of Courage, nous nous occupons régulièrement de 14 garçons de 12 à 17 ans. Ils apprennent à se connaître en tant que jeunes hommes. Ka Ni Kanichihk a implanté son programme dans la collectivité. De la sorte, ses bénéficiaires n'ont pas à sortir de la collectivité pour obtenir le service. Tout comme Ndinawe, nous oeuvrons dans notre collectivité, sur l'avenue Pacific. J'aimerais vraiment que vous nous visitiez.
Nous faisons beaucoup de travail sur l'identité culturelle. Nous développons beaucoup les aptitudes à la vie quotidienne. Un emploi est la meilleure façon de se sortir de la pauvreté. Nous mettons donc nos protégés en relation avec Sobeys. Ils ne veulent pas que ce soit leur seul choix. Quand nous en avons la chance, nous exauçons leurs désirs. Ils aiment se percevoir comme de jeunes Autochtones capables de changer quelque chose dans leurs propres familles. Nous pouvons nous vanter de nombreux succès.
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J'aimerais attirer votre attention sur la réalité des organismes ancrés dans la collectivité. La plupart d'entre nous — ici, à Winnipeg, assurément — manquent déjà de ressources.
Si nous pouvons nous vanter de certaines réussites, toutes les organisations ici présentes embauchent, pour la plupart, les jeunes dont l'exemple constitue une réussite. Nous les embauchons pour aider d'autres jeunes et nous leur donnons l'occasion de remettre ce qu'ils ont reçu.
La réalité, pour le directeur de ces organisations, consiste à rédiger les propositions, à répondre au téléphone, à remplir les fiches de paie et à acheter le poisson pour le festin du vendredi. Tout cela parce que, 90 p. 100 du temps, soit on refuse de nous accorder les fonds que nous demandons pour l'administration, soit on révise nos demandes à la baisse.
Les organismes ne reçoivent pas assez de fonds pour construire leur propre infrastructure afin de pouvoir se faire connaître. Quand nous nous consacrons à une tâche, nous ne faisons plus rien d'autre. La plupart des organismes ancrés dans la collectivité se trouvent sur la ligne de feu, ils se retroussent les manches, dans les collectivités.
Une dernière chose. Grâce au financement fédéral et aux occasions d'établir les priorités et de financer les programmes tout à la fois, nous pouvons examiner les obligations en matière de production de rapports et apprécier les différences entre cette valeur et les nôtres. Actuellement, la plupart des obligations fédérales en matière de production de rapports consistent à compter les têtes de pipe et les problèmes. Telle n'est pas la démarche de notre travail dans les collectivités. Elle consiste plutôt à construire de l'intérieur les personnalités et les collectivités. Elle ne coïncide pas toujours avec vos besoins. Cela s'ajoute donc à notre tâche.
Les organismes subissent déjà beaucoup de stress, et nous ne recevons pas beaucoup d'aide.
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Merci, monsieur le président.
Mesdames, comme mes questions porteront sur un thème similaire, vous aurez l'occasion d'expliquer votre pensée.
Beaucoup d'entre vous ont mentionné les groupes qui profitent des femmes autochtones et des jeunes autochtones et qui les exploitent, des groupes de l'extérieur, parfois internationaux, qui ne sont pas autochtones, parfois bien organisés, parfois financés.
Il y a quelques semaines, dans l'avion qui me menait d'Ottawa à Toronto, j'ai conversé avec une infirmière de Pangnirtung, dans l'île de Baffin, qui y retournait. Elle-même de culture autochtone, d'une nation du sud-ouest de l'Ontario, elle m'a parlé des problèmes de santé provoqués par la drogue chez les 1 500 habitants de cette localité éloignée. Je lui ai demandé d'où venaient ces drogues. Elle m'a répondu que Pangnirtung comptait trois membres en règle des Hells Angels, des Montréalais, qui, depuis leur quartier général de Montréal, devant une carte du Canada, s'étaient demandé à quel endroit ils pourraient trouver de nouveaux clients. Croyez-le ou non, à Pangnirtung. Comme il y a trois vols par semaine, ces trafiquants doivent être faciles à repérer.
Deuxièmement, nous avons entendu parler, hier, d'une femme très courageuse d'Edmonton, qui a fait le trottoir. Elle nous a raconté comment elle avait été recrutée par une bande de motards, il y a quelques années, comment elle avait été abusée et exploitée, ainsi que beaucoup d'autres femmes comme elle et qu'elle a connues. Elle travaille maintenant avec ces femmes, pour les aider à sortir de leur milieu.
Alors, ma question est la suivante, qui sont ces groupes qui vivent aux dépens des peuples autochtones et des jeunes Autochtones? Comment devrions-nous agir à leur égard? En quoi la vie des Autochtones au Canada serait-elle différente si nous pouvions éliminer ces organisations criminelles de l'extérieur ou en réduire le nombre? Ma question s'adresse spécifiquement à Mmes Redsky et Omelan et, si nous en avons le temps, aux autres témoins également.
Il y a quatre ans, nous avons formé un cercle de grands-mères, Grandmothers Protecting our Children, car des enfants étaient victimes d'abus par leur grand-père dans le Nord. Il était dans le système carcéral, et quand est venu le moment de sa libération conditionnelle, 40 membres de sa communauté sont venus demander son retour à la maison, car il était leur guide, leur dirigeant. Il est retourné chez lui et a mis enceinte sa petite-fille. Ensuite, trois autres enfants ont déclaré qu'il les avait agressés. C'est pour cela que nous faisons notre marché sacrée: pour la protection de nos enfants.
Par ailleurs, le mois dernier, nous avons pris des arrangements avec le Ndinawe et le Ma Mawi, par l'entremise de Diane et de Ray également. Nous, les grands-mères, sommes allées deux soirs d'affilée visiter les jeunes dans les rues avec les intervenants qui s'occupent d'eux. Nous avons été très bien accueillies par ces jeunes, qui nous ont dit qu'ils ne pensaient pas qu'on se souciait d'eux; ils croyaient que personne ne s'inquiétait pour eux, ni même ne pensait à eux. Nous allons continuer de faire cela.
Nous avons assisté à une conférence sur l'exploitation de nos jeunes. On y parlait de « consommateurs ». Eh bien, quelqu'un qui a des rapports sexuels avec une personne qui n'a pas l'âge légal n'est pas un consommateur. Il faut appeler un chat un chat. C'est un pédophile, un agresseur et un prédateur. Voilà ce qu'il est. Ce n'est pas un client, et le système judiciaire devrait le traiter en tant que pédophile.
Cela me préoccupe énormément, et c'est la même chose pour toutes les autres Kokums, les grand-mères.
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Je vous remercie d'être ici cet avant-midi, même si ça se prolonge un peu. Il y a quelques aspects que j'aimerais vous soumettre pour m'assurer que je comprends vraiment bien.
On fait une étude sur le crime organisé — c'est ce que nous tentons de faire —, et un des aspects que j'ai retenus, c'est que le crime organisé est à l'extérieur de la communauté, quelle soit métisse ou autochtone. C'est ce que vous semblez nous dire. Je peux facilement concevoir comme vous qu'il est extérieur aux communautés.
Plus tôt, un de mes collègues s'est demandé comment nous devrions régler le problème. Vous essayez de sauver vos femmes, vos enfants, les jeunes, mais il y a toujours ce problème qui est à l'extérieur. C'est ce qu'on appelle le crime organisé. C'est vraiment de ça qu'il s'agit. Vous avez parlé plus tôt de certains groupes qui ne semblaient pas avoir les mêmes valeurs spirituelles que les Autochtones et qui semblent exploiter les enfants et les femmes beaucoup plus que d'autres groupes.
Il y avait l'aspect touchant les délinquants, particulièrement ce qu'on appelle le registre des délinquants. Il existe actuellement un registre des délinquants sexuels. Peu à peu, la police peut s'en servir aussi.
Il y a aussi le problème des peines. Naturellement, on est tous pour la vertu: on veut tous la réhabilitation, on a créé le poste d'ombudsman et toutes sortes de choses, et il manque toujours un peu d'argent partout.
Cela dit, ce que je veux savoir de vous, c'est comment vous voulez qu'on traite le crime organisé, qui exploite vos enfants qui ont huit ou neuf ans. On a besoin de savoir comment vous voulez qu'on le traite. Peut-être que vous allez nous dire que ce n'est pas grave, qu'on le laisse aller, parce que nos lois sont faibles. Je voudrais savoir ceci: comment devrait-on traiter le crime organisé et de quelle façon exactement peut-on vous aider? On peut faire des lois sévères. On en a en effet, mais on veut s'assurer de suivre le bon chemin. C'est de ça que j'ai besoin.
Les groupes autochtones, vous êtes très concentrés, comme à Winnipeg, par exemple. Alors, moi j'ai besoin de savoir, comment vous voulez qu'on réagisse dans la communauté extérieure. Plus tôt, j'ai cru entendre que, parmi vous, des gens voulaient qu'on soit plus sévère envers les hommes adultes qui couchent avec vos petites filles et vos petits garçons, qui ont des bordels. C'est ça qu'il faudra régler éventuellement, sinon on ne réglera pas l'autre problème, même si on vous aide. Donc, il faut travailler ensemble.
Alors, comment voyez-vous cela? Comment pouvez-vous nous aider? C'est pour cela qu'on fait une étude sur le crime organisé. Comment pouvons-nous vous aider? Je ne parle pas uniquement de ce qui se passe au sein de votre communauté, mais aussi de ses relations avec le crime organisé.
Peut-être que Mme Redsky ou Mme Spillett peut répondre. C'est une question ouverte. Je voudrais savoir comment vous voulez qu'on réagisse.
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J'aimerais élaborer sur cette question en l'intégrant dans ma réponse à un commentaire qu'on a fait plus tôt.
Au bout du compte, il y a des organismes communautaires et des travailleurs communautaires, dont certains se trouvent assurément à cette table, qui oeuvrent en première ligne dans nos communautés, et qui travaillent au quotidien avec les éléments les plus vulnérables de notre collectivité.
Qu'est-ce qui rend nos enfants et nos familles vulnérables? Nous devons examiner la question globalement, dans une perspective d'ensemble. Dans une perspective plus générale, il nous faut résoudre le problème de la pauvreté de manière concrète; il nous faut de meilleurs logements.
À cause de ces deux facteurs, un certain nombre d'enfants sont pris en charge. Dans la province du Manitoba, 7 000 enfants sont pris en charge — 5 000 dans la ville de Winnipeg —, dont 80 p. 100 qui sont autochtones. Plutôt que d'intervenir et d'assurer une protection, nous devons nous attacher à travailler avec les systèmes pour établir des stratégies de prévention et d'intervention afin de bâtir des communautés à partir de la base.
À mes yeux, travailler avec les organismes communautaires est la solution à tous ces maux. Nous avons de vastes connaissances et une grande expérience, et nous connaissons tout le monde dans la communauté. Nous savons ce qui fonctionne et de quel type d'aide on a besoin. Le fait d'avoir la possibilité de participer à l'élaboration de stratégies et à la détermination des ressources fera une énorme différence sur le plan des programmes et services qui seront offerts dans nos quartiers, et qui nous donneront les ressources et les outils dont nous avons besoin pour protéger nos enfants et nos familles.
À ce stade-ci, nos organisations luttent pour appliquer des mesures à la pièce. Nous travaillons 18 heures par jour pour établir ces partenariats. Mais cela revient à verser de l'argent dans un seau percé d'un énorme trou, et à recommencer encore et encore. Il faut que nous puissions nous réunir avec tous les ordres de gouvernement et avec la communauté pour combler ce trou. Une fois que nous l'aurons fait...
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Nous avons cherché à établir un cadre de reddition de comptes en expliquant comment les gens changent et de quelle manière les programmes, les initiatives et tout ce que nous offrons ont changé la vie des gens. Cela commence toujours par une approche axée sur les forces. Ainsi, lorsque les gens viennent nous voir, nous ne vérifions pas dans nos dossiers combien sont alcooliques, combien sont des criminels ou combien ont abandonné leurs enfants à l'assistance publique. Nous regardons plutôt combien nous avons de charpentiers, combien sont capables de travailler auprès des enfants, combien sont habiles de leurs mains ou savent jouer d'un instrument de musique.
Nous cherchons donc les forces de chacun, et c'est l'un des grands changements que nous avons fait, en cessant de produire des rapports axés sur les manques. Nous trouvons d'ailleurs ce genre de rapports plus difficiles à faire que ceux consistant à nous concentrer sur le renforcement des capacités et l'exploitation des forces. En recueillant ce type de données, nous accordons une importance à chacune des personnes qui vient nous voir, en la traitant comme un être humain qui a quelque chose à offrir, puisque nous tenons compte de ses habilités. Cela a pour effet de donner confiance et fierté aux gens.
Par ailleurs, nous faisons un suivi des programmes et des services auxquels ces personnes ont accès et de leur rôle dans la communauté. Même si tout le monde le fait, il y en a pour qui cela prend plus de temps que pour d'autres. Nous faisons rapport sur les activités des gens ainsi que sur la manière dont ils s'investissent dans la communauté et dont ils s'y prennent pour améliorer leur sort et celui de leur famille, que ce soit en retournant à l'école ou autre, et nous créons ces ouvertures au sein de l'organisation.
Ainsi, lorsque les gens viennent nous voir, ils font un peu de bénévolat, puis ils travaillent à temps partiel, avant de reprendre des études ou de trouver un emploi à temps complet. Notre organisation est constituée de tous ces gens qui sont venus, à un moment donné, demander des services. C'est ce que nous documentons. Pour nous, ce qui compte, ce n'est pas de savoir combien d'alcooliques nous avons aidés, mais combien ont changé ou pas; ce que nous voulons savoir, c'est combien de gens nous avons accueillis pour ce qu'ils sont, quelles opportunités ils ont saisi et ce qu'ils ont donné en retour.