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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 040 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 2 décembre 2010

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Nous en sommes à la 40 e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Nous sommes aujourd'hui le jeudi 2 décembre 2010. Nous vous avons présenté l'ordre du jour d'aujourd'hui, soit l'étude du projet de loi C-48, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la défense nationale en conséquence.
    Pendant la première heure, nous accueillons la Criminal Lawyers' Association, représentée par son vice-président, M. Joseph Di Luca.
    Pendant la deuxième heure, nous espérons accueillir Mme Susan O'Sullivan, ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels.
    Revenons à notre premier témoin, M. Di Luca. Bienvenue encore une fois au comité. Je pense que vous connaissez nos habitudes. Vous avez une dizaine de minutes pour un exposé, puis nous passerons aux questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    La Criminal Lawyers' Association est ravie de comparaître devant le comité sur l'importante question soulevée par le projet de loi C-48.
    Comme beaucoup d'entre vous le savent, nous sommes un organisme sans but lucratif fondé en 1971. Nous représentons plus de 1 000 criminalistes de la province de l'Ontario. Les objectifs de notre organisation sont l'éducation, la promotion et la représentation de nos membres sur des questions se rapportant aux droits criminel et constitutionnel.
    Avec les procureurs de la Couronne, nous sommes les travailleurs de première ligne, si l'on peut dire, du système de justice pénale et nous nous intéressons de près à cette mesure législative et à d'autres semblables. Nous avons aussi vu en pratique l'incidence des changements législatifs sur le fonctionnement du système judiciaire. Vous le savez tous sans doute, le système judiciaire est organique et ces éléments coexistent dans un équilibre délicat. Cet équilibre repose sur des compromis destinés à atteindre divers objectifs, de la protection du public à l'administration juste et équitable des peines en passant par la réadaptation et la réinsertion des contrevenants.
    En effet, depuis longtemps, notre système de justice est caractérisé par une attitude mesurée et équilibrée relativement aux peines imposées. Sur les plans national et international, je dirais, nous sommes fiers de notre capacité de rendre justice avec pondération. Nous ne jetons pas simplement les gens aux oubliettes, nous leur offrons de l'espoir, même l'espoir d'une dernière chance. Nous prenons en compte des intérêts contraires et veillons à ce qu'aucune idéologie ne prime sur les autres. Il n'y a qu'à voir les objectifs et principes de la détermination de la peine énoncées dans le Code criminel pour le constater.
    Les membres du comité ne seront pas étonnés du fait que la Criminal Lawyers' Association n'appuie pas le projet de loi C-48. À notre avis, cette mesure législative est une solution qui cherche un problème, plutôt qu'une solution législative à un problème réel. En d'autres termes, pourriez-vous nous dire quel problème cette mesure législative est censée régler? Y a-t-il véritablement une remise de peine pour ceux qui commettent plus d'un meurtre ou est-ce une question de perception? En comprenant la situation, constate-t-on qu'il n'y a pas véritablement de remise de peine.
    Je comprends qu'aux yeux de beaucoup de gens, quand il y a plus d'une victime de meurtre, la peine n'est pas proportionnelle pour les deux crimes, comme si le deuxième meurtre était impuni. Ce n'est qu'une perception, la réalité est bien différente, croyez-moi. Pour commencer, un meurtrier condamné pour un meurtre ou plus d'un meurtre reçoit une peine d'emprisonnement à perpétuité. Au Canada, c'est l'essence exacte de l'expression: c'est une peine d'emprisonnement à vie. La possibilité d'une libération conditionnelle, ou l'admissibilité à la libération conditionnelle est un élément de la peine, mais cela ne change rien à la peine elle-même, soit de passer sa vie en prison. Ce concept d'emprisonnement à vie a un sens. En effet, certains contrevenants n'obtiennent jamais de libération conditionnelle et meurent en prison.
    Dans l'arrêt R. c. C.A.M, la Cour suprême a bien constaté le caractère intransigeant d'une peine d'emprisonnement à vie. Elle a aussi souligné que l'admissibilité à une libération conditionnelle n'allait pas à l'encontre de la dénonciation ou de la dissuasion, deux objectifs de la détermination de la peine. Le projet de loi dont vous êtes saisi laisse entendre que le nombre de meurtres n'a pas d'effet sur la peine réelle imposée au meurtrier. J'ai deux réactions, à ce sujet. Premièrement, lorsque les juges décident de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle pour de multiples infractions de meurtre au second degré, je vous garantis qu'ils considèrent le nombre de victimes comme un facteur aggravant lourd, ce qui prolonge la durée de la période d'inadmissibilité. Nous le voyons tous les jours. Deuxièmement, dans le cas des meurtres au premier degré, la période d'inadmissibilité ne peut être portée au-delà de 25 ans, mais le fait qu'un accusé a commis plus d'un meurtre au premier degré ne saurait échapper à la vigilance de la Commission nationale des libérations conditionnelles, 25 ans plus tard. En réalité, ceux qui ont commis plus d'un meurtre reçoivent une peine plus lourde.
    Toutefois, ce projet de loi semble ajouter un élément mathématique purement linéaire dans l'équation. L'individu accusé d'un seul meurtre est passible d'une peine minimale de 10 à 25 ans d'emprisonnement, pour un double meurtre, c'est de 20 à 50 ans et pour un triple meurtre c'est de 30 à 75 ans. La méthode de calcul adoptée dans ce projet de loi a été rejetée depuis longtemps par nos tribunaux. Cette notion de totalité de la peine, telle que décrite dans la jurisprudence, consiste à empêcher une simple addition des peines consécutives et à ordonner au juge de tenir compte de l'incidence nette d'une peine envisagée compte tenu de tous les objectifs sous-jacents au processus de détermination de la peine. Quelle que soit la gravité du crime, la peine ne doit pas être écrasante au point d'oblitérer toute possibilité réaliste de mise en liberté et d'espoir de réadaptation.
    Bien que la Cour suprême du Canada ait rejeté la possibilité d'établir un plafond quand à la valeur numérique de la peine, elle reconnaît toutefois que:
Passé un certain point, les objectifs utilitaristes et normatifs de la détermination de la peine commencent éventuellement à perdre leur pertinence dès que la peine envisagée dépasse toute estimation raisonnable du temps qu'il reste normalement à vivre au délinquant.
    Malgré cette remarque, la Cour suprême du Canada a refusé d'établir un plafond pour la durée des peines et a préféré laisser les juges exercer leur pouvoir discrétionnaire. Elle estime qu'en se remettant à leur bon jugement, on évite l'imposition de peines à durée fixe trop sévères.
    Dans ce contexte, est-ce réaliste de s'attendre à ce que les juges commencent à imposer des peines écrasantes en fonction d'une échelle linéaire? D'après moi, probablement pas, à l'exception peut-être de cas extrêmement rares, et même en pareille situation, il s'agirait des mêmes cas dont la Commission nationale des libérations conditionnelles est déjà saisie. D'ailleurs, elle agit actuellement de façon adéquate en refusant la mise en liberté.
    J'aimerais que vous gardiez à l'esprit une donnée statistique. Ce n'est pas moi qui va vous la transmettre, car je ne la connais pas. En moyenne, combien de temps les auteurs de meurtres multiples passent-ils en prison avant de se voir accorder une libération conditionnelle? Voilà le chiffre que vous devez trouver. Quand vous connaîtrez ce chiffre, vous serez en mesure d'évaluer si ce projet de loi est effectivement nécessaire en fonction d'un fondement probatoire. Si vous ne connaissez pas ce chiffre, et je n'ai moi-même pas pu trouver cette donnée statistique nulle part, vous vous contentez de deviner si ce projet de loi est nécessaire. J'ai l'impression que si vous découvrez ce chiffre, vous constaterez que les auteurs de meurtres multiples passent déjà beaucoup plus de temps en incarcération et qu'il n'y a pas de véritable réduction nette de la peine.
    J'ai déjà été invité à plusieurs reprises à témoigner devant votre comité au sujet de la constitutionnalité d'un projet de loi. Vous serez donc heureux d'apprendre que pour une fois, j'estime qu'il n'y a pas de problème constitutionnel avec le projet de loi qui nous occupe. D'ailleurs, je félicite le comité et les rédacteurs à cet égard. Dans ce projet de loi, on prévoit que les juges pourront exercer un minimum de pouvoir discrétionnaire. J'avancerais même que ce pouvoir discrétionnaire, qui offre une option au juge de première instance, pourrait même en fin de compte parer ce projet de loi contre des déficiences constitutionnelles.
    Cela étant dit, je constate que le projet de loi présente comme aspect problématique le fait que le pouvoir discrétionnaire est binaire. On prévoit une simple addition mathématique qui consiste à additionner une période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle à une autre. Cela ne donne pas aux juges assez de pouvoir discrétionnaire pour déterminer un juste milieu. Par juste milieu, j'entends une position plus clémente ou, par exemple, dans le cas où l'individu aurait commis deux meurtres au premier degré, les seuls choix possibles sont 25 ans ou 50 ans d'emprisonnement.
    Je crois que le risque de contestation de la constitutionnalité du projet de loi réside dans le fait qu'il n'est pas le seul dans sa catégorie. D'autres projets de loi sont à l'étude en ce moment, par exemple le projet de loi visant à abroger la clause de la dernière chance. L'entrée en vigueur de tous ces projets de loi entraînera un effet cumulatif pouvant entraîner une contestation. J'attire l'attention du comité sur la décision Luxton de la Cour suprême du Canada, qui avait défendu la constitutionnalité des peines à perpétuité obligatoires comportant une période de 25 ans d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. Dans le cadre de cette décision, la Cour suprême du Canada semblait indiquer que l'existence de la clause de la dernière chance atténuait dans une certaine mesure la sévérité de la peine. C'est en se fondant sur cette clause que la Cour suprême a reconnu la constitutionnalité du texte de loi. Les projets de loi à l'étude qui visent à éliminer la clause de la dernière chance ainsi que d'autres mesures semblent comporter un risque.
(1540)
    Je vais terminer, je sais qu'il ne me reste plus de temps.
    Je vous demande de penser à ce qui suit. Beaucoup de nouvelles lois pénales sont destinées à améliorer la reddition de comptes en matière criminelle et à rétablir la confiance du public. Je respecte cet objectif; il est juste et bon. Mais au bout du compte, je demande au comité de se poser des questions sur la nécessité d'un projet de loi, à partir de faits probants, avant d'agir. Le droit criminel est un outil brutal qui ne doit pas servir à des fins purement politiques, en l'absence d'un besoin manifeste.
    Deuxièmement, je sais que quand on parle d'adéquation des peines, ce n'est qu'un slogan. Je vous demande de garder en tête que, sauf votre respect, ce n'est pas ici d'adéquation des peines qu'il s'agit, mais d'éducation du public. Si le public était bien renseigné sur la dynamique de la détermination de la peine et des statistiques relatives aux peines pour meurtre, il comprendrait bien autrement ce dont est saisi le comité.
    Enfin, n'oubliez pas que la libération conditionnelle est une carotte, un espoir pour des gens qui n'en auraient pas, autrement. Si la carotte est fixée au bout d'un trop long bâton, soit une peine de 50 ans, dans certains cas, une petite partie négligée de notre société n'aura plus d'espoir de réadaptation, de réinsertion dans la collectivité.
    Je vous remercie de votre attention et j'ai hâte d'entendre vos questions.
(1545)
    Merci.
    Nous commençons la première série de questions. Monsieur Murphy, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur Di Luca.
    C'est une question très intéressante. Comme tout avocat, j'essaie de voir les deux côtés de la médaille.
    Avez-vous déjà défendu des meurtriers?
    Oui, de nombreuses fois.
    Il est intéressant de voir les refrains employés par les deux côtés, dans ce débat.
    Puisque vous êtes contre ce projet de loi, je vais vous demander si vous approuvez ces deux phrases. Voici la première: les circonstances sont différentes pour chaque meurtre et une solution pour tous pourrait causer des injustices, dans des cas particuliers.
    Pensez-vous que ce soit vrai?
    Oui, à 100 p. 100.
     Voici la deuxième: en détermination de la peine, un principe fondamental veut qu'une peine soit proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du contrevenant.
    Est-ce juste selon vous?
    Oui.
    N'est-ce pas curieux que ces phrases proviennent du discours prononcé par le secrétaire parlementaire M. Petit lorsqu'il a appuyé ce projet de loi? Je trouve intéressant que le pouvoir discrétionnaire peut être utilisé comme argument pour maintenir ce projet de loi. Il s'agit d'un des aspects positifs de ce projet de loi. C'est ce que nous rabâchons depuis un bon bout de temps auprès de ce gouvernement. Ils se sont fait à l'idée que les juges sont dignes de notre confiance, c'est un aspect positif — voilà le bon côté; on cherche toujours ce que ceux de l'autre côté ont pu dire de bon.
    Mais laissez-moi vous présenter un cas difficile. À la fin des années 1970, dans ma collectivité, deux policiers, M. Bourgeois et M. O'Leary, ont été tués par M. Hutchison et M. Ambrose. Je m'en souviens, j'étais enfant. Ils ont admis avoir commis les meurtres et ils ont été condamnés. Bien sûr, c'était à la fin des années 1970, après l'abrogation de la peine de mort. Ils seront bientôt admissibles à une audience de libération conditionnelle.
    Je peux vous dire que l'idée que cela pourrait se produire scandaliserait tous les partisans de partis — libéral, conservateur ou même le Bloc québécois — à Moncton, s'il y en a.
    Lorsque vous dites qu'il n'y a pas de problème, ce que vous dites en fait c'est que nous devons faire confiance à la Commission des libérations conditionnelles à ce sujet. Je ne suis pas certain, il s'agit peut-être d'une question distincte, car bon nombre de personnes ne font pas confiance à la Commission des libérations conditionnelles. Pourquoi devrions-nous faire confiance à la Commission des libérations conditionnelles? Dans ce cas, j'imagine qu'un juge local, la collectivité locale, ou un jury local aurait de l'influence s'il laissait entendre que ces deux individus, Hutchison et Ambrose, auraient dû — et il s'agit clairement de deux meurtres — être inadmissibles à la libération conditionnelle pendant 50 ans. Il me semble évident que c'est ce qu'un juge aurait décidé dans ce cas-ci s'il en avait eu la discrétion. Il me semble que c'est très clair.
    Donc pourquoi devrions-nous faire confiance à la Commission des libérations conditionnelles, pourquoi devrait-elle jouer le rôle d'un juge?
    J'ai quelques réponses à votre question. Premièrement, les juges infligent une peine de 25 ou peut-être de 50 ans à quelqu'un avant que cette personne soit admissible à la libération conditionnelle. Ils jugent donc une personne peu après qu'elle a commis l'infraction. Le juge voit donc ces personnes au moment où elles sont les moins aptes à se réinsérer.
    Le droit criminel est un outil peu nuancé. Nous en sommes tous conscients, et on aimerait bien que ces marges soient plus nuancées qu'elles ne le sont, car le Parlement a trouvé juste d'imposer une peine à vie de 25 ans pour tous les meurtres au premier degré, point final, que ce soit un meurtre au premier degré crapuleux ou pas. Je comprends qu'il y a une gamme de meurtres au premier degré selon leur gravité. Mais pour cette infraction, nous avons une peine unique.
    Par contre, ce que nous avons fait, cette fois-là du moins, c'est que nous avons accordé à la Commission des libérations conditionnelles la discrétion pour une très longue période — 25 ans, c'est une très longue période — et nous leur avons accordé le pouvoir, de façon éclairée et nuancée, d'évaluer comment cette personne a réagi à ces 25 ans d'incarcération, puis juger si il est sûr de la libérer. Ils les étudient et appliquent des critères très différents de ceux d'un juge.
    Un juge ne peut pas, le jour du prononcé de la peine, dire qu'un contrevenant pourra être libéré en toute sécurité dans 25 ans ou dans 50 ans. Mais à une certaine étape, la Commission des libérations conditionnelles a l'expertise, et devrait bénéficier de l'expertise et de la confiance de ce comité, de dire, selon ses connaissances, que cette personne peut maintenant être libérée. Je comprends que 50 ans, certainement pour certains crimes, comme celui dont vous avez parlé, semblent tout à fait juste. Vous êtes assis là et vous dites qu'une personne mérite une peine de 50 ans. C'est étouffant.
(1550)
    Je n'ai que quelques minutes, et c'est un dossier différent. Vous dites que nous n'avons pas les statistiques qui nous permettent de déterminer quelle est la peine moyenne purgée par un auteur de meurtres multiples. Je ne pense pas que nous le savons, nous non plus. Mais nous avons des statistiques qui indiquent la peine moyenne purgée pour les meurtres au premier degré: 28 années environ, et 29 aux États-Unis. Mais nous avons des statistiques d'autres pays qui sont des démocraties occidentales civilisées et leurs moyennes sont bien inférieures. Savez-vous pourquoi? Leurs systèmes de détermination de la peine sont-ils différents?
    Il s'agit peut-être d'un compromis canadien classique. Mais lorsqu'on a voulu abolir la peine capitale, en échange, nous avons hérité d'une peine pour les meurtres au premier degré, dont la durée était probablement surprenante pour d'autres pays du Commonwealth et des pays semblables. Il se pourrait donc qu'il s'agisse du prix politique, si vous le permettez, de la lutte contre la peine de mort. Mais pour résultat, nous avons un taux d'incarcération dont nous ne devrions pas être fiers à titre de Canadiens. Nous sommes à égalité avec les États-Unis, et dépassons de loin d'autres pays.
    Je pense que vous avez raison. Je ne sais pas s'il y a une différence pour ce qui est de l'imposition des peines. Je pense qu'il s'agit simplement d'une différence en ce qui concerne le pouvoir discrétionnaire lors de la détermination de la peine et de l'octroi des libérations conditionnelles.
    Ont-ils les catégories de meurtres au premier et au deuxième degrés au Royaume-Uni, par exemple?
    Je ne peux répondre précisément à cette question, mais je sais qu'il y a davantage de discrétion pour ce qui est de la libération selon les statistiques, qui au Royaume-Uni montrent un taux beaucoup plus bas que le nôtre.
    Elle est de 12 ou 13 ans, je pense.
    Merci.
    Monsieur Lemay, vous avez sept minutes.

[Français]

    Chers collègues, vous êtes criminalistes. J'imagine que vous avez déjà plaidé des causes que vous saviez presque perdues d'avance, ou qui étaient difficiles à gagner.

[Traduction]

    Cette semaine?

[Français]

    Je peux vous dire que celle-là, vous ne la gagnerez pas. Pour répondre à votre question, il va être très difficile, compte tenu de la position des différents partis politiques dans cette salle, d'empêcher l'adoption du projet de loi C-48. Malheureusement, il va passer.
    Une seule chose dans ce projet de loi me rassure. C'est l'addition de l'article 745.51 qui accordera un pouvoir discrétionnaire aux juges, comme vous l'avez si bien souligné. Pour répondre à votre première question, savez-vous pourquoi les conservateurs veulent absolument que ce projet de loi passe? Vous n'avez qu'à lire le titre abrégé, l'article 1, et vous allez comprendre toute leur philosophie. D'ailleurs, ils vont revenir avec ça plus tard. L'article se lit comme suit: « Loi protégeant les Canadiens en mettant fin aux peines à rabais en cas de meurtres multiples ». C'est fort, ça! Il est évident que c'est la seule chose sur laquelle on va s'entendre, quelques-uns d'entre nous. En tout cas, de ce côté-ci de la table, on veut empêcher l'adoption de l'article 1. Ça va être à peu près tout. Je vais vous dire pourquoi.
    La discrétion qui est prévue à l'article 745.51 me rassure. Je ne sais pas comment vous poser la question, qui porte sur la violence dans les pénitenciers. J'ai fait comme vous, probablement. J'ai pratiqué le droit criminel pendant plusieurs années et j'ai défendu des gens accusés de meurtre, notamment. S'il n'y a pas de lumière au bout du tunnel, s'ils ne voient pas la probabilité de sortie, pensez-vous sérieusement que la réhabilitation soit possible, surtout dans les cas de double meurtre?
(1555)

[Traduction]

    Je pense que la réinsertion représente un grand défi dans tous les cas, mais dès que l'on éteint la lumière au bout du tunnel, ou que le tunnel est si long qu'il n'y a vraiment plus d'espoir, je pense que l'on risque de non seulement mettre fin à l'espoir d'avoir droit à la réinsertion — et je suis d'accord qu'il s'agit parfois seulement d'un espoir — mais l'on augmente également la probabilité de violence dans les établissements, de perte de contrôle dans ces établissements, car une personne n'a pu plus rien à perdre. Si l'on dit à quelqu'un de 25 ans, qui a commis un crime inimaginable: « Si votre comportement est exemplaire, à 75 ans vous pouvez faire une demande de libération conditionnelle », cette personne n'a pas d'espoir. Elle n'essaiera pas de bien se comporter. Elle n'a vraiment rien à s'accrocher. C'est simplement irréaliste.

[Français]

    Chers collègues, avec respect, vous allez l'entendre. Je ne sais pas qui, parmi les conservateurs, va prendre la parole, mais vous allez voir que c'est leur façon de protéger les victimes. Je ne sais pas si vous voyez ça comme moi, mais je ne suis pas certain qu'en imposant 50 ans de détention, on protège plus les victimes. En tout cas, certains députés du Parti conservateur aimeraient mieux rétablir la peine de mort, mais on trouve une façon délicate: on enferme quelqu'un et on jette la clé pendant 50 ans.
    Toutefois, on a vu des criminels, comme Clifford Olson, essayer d'obtenir une libération conditionnelle. C'est clair, le Parti conservateur fait du populisme avec ça. Tout le monde savait — sauf les membres du Parti conservateur — que jamais la Commission des libérations conditionnelles ou même un juge de la Cour supérieure n'auraient accepté que cet homme obtienne une libération conditionnelle. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. On est pris avec ça.

[Traduction]

    Oui, je sais. Pis encore, la discrétion est binaire, donc on donne un choix au juge, ce n'est pas du tout nuancé. Il doit choisir entre 25 ou 50 ans. J'imagine que la plupart des juges qui doivent choisir entre ces deux peines vont faire preuve de prudence et de retenue judiciaire et remettre la cause aux autorités chargées des libérations conditionnelles. Je pense que cette loi sera utilisée très rarement, voire jamais.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    M. Comartin a maintenant la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Di Luca, d'être venu aujourd'hui.
    Certains des arguments entendus lors du débat à la Chambre avant que le projet de loi ne soit renvoyé au comité étaient que nous dévaluons la deuxième ou la troisième vie. Je ne suis pas d'accord. Je pense qu'il s'agit d'un argument fallacieux. En particulier, une des choses que j'aimerais souligner — et j'aimerais savoir si vous êtes d'accord — c'est que si vous êtes dans une situation où une personne est condamnée pour meurtres multiples, et lors d'un procès subséquent ou après l'interjection d'appel, la personne est déclarée innocente pour un de ces meurtres, convenez-vous que pour l'autre meurtre même s'il s'agit du deuxième ou du troisième meurtre pour lequel cette personne est condamnée, elle purgera quand même une peine à vie pour le reste de sa vie?
    C'est exact.
    Et cela ne change pas dans le cas d'un acquittement pour une des deux accusations.
    Pas du tout.
    Pour ce qui est de la disposition dans le projet de loi, le paragraphe 745.21(1) suggéré, où le juge a l'obligation de demander à un jury après condamnation pour meurtre au premier degré s'il veut faire une recommandation, je ne vois pas une telle disposition dans le projet de loi. Je suppose savoir la réponse, mais est-ce qu'un avocat de la défense aura l'occasion de faire des soumissions à cette étape?
(1600)
    Voilà qui est intéressant. Les dispositions de détermination de la peine pour meurtre au deuxième degré en ce moment permettent à un juge de demander à un jury de recommander le nombre d'années d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. Bien que ce ne soit pas inclus dans le code, en pratique, la plupart des juges accordent quelques minutes à l'avocat pour faire des soumissions à ce sujet.
    Ce qui est intéressant, c'est que l'on s'attendrait à ce que si la sécurité publique était importante à un point tel que l'on soit de l'avis que tous les meurtriers devraient mourir en prison, les recommandations du jury seraient de façon unanime et routinière d'infliger des peines maximales d'incarcération. Il est surprenant de voir à quel point les recommandations d'un jury relatives à la peine sont variées. Souvent, un ou deux jurys recommandent 10 ans, quelques jurys recommandent 12 ou 13 ans et quelques-uns recommandent 15 ans et un ou deux recommandent 24 ou 25 ans. C'est la gamme complète. Il n'y a pas de consensus, même parmi les jurys qui assistent aux procès.
    Dans ce cas, si la pratique ne change pas, si ce projet de loi est adopté... et il y a une possibilité qu'il ne le soit pas, étant donné l'attitude des libéraux à cet égard, en cas d'élections et de défaite du présent gouvernement. Mais sinon, ce projet de loi sera certainement adopté. S'il est adopté et que la pratique se poursuit, vous n'aurez pas l'occasion de présenter à un jury des informations telles que la durée de temps que purge les meurtries au premier degré en ce moment, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    Et vous ne présenterez pas des données au jury montrant qu'un meurtrier n'a pas commis un meurtre subséquent après sa libération par la Commission des libérations conditionnelles, n'est-ce pas?
    On demandera au jury, à toutes fins pratique, de tirer au sort, sans fondement probatoire à leur disposition, car on ne leur présentera pas de preuve, même sur la personnalité, les antécédents du contrevenant, ou des facteurs qui influenceraient la décision du juge. Le jury n'aura pas accès à ces renseignements. On leur demande simplement: « Regardez cette personne. Vous avez vu ce qu'elle a fait. Dites-nous si vous recommandez 25 ou 50 ans ». Ou 10 ou 20, selon la façon dont ils veulent diviser le temps.
    Ils auront les mêmes problèmes que le juge. Ils peuvent soit recommander 25 ou 50 ans, mais pas une peine intermédiaire.
    C'est exact.
    Avez-vous une idée du nombre d'auteurs de meurtres multiples condamnés au Canada?
    Je n'ai pas les chiffres exacts avec moi, mais je les ai vus dans les documents législatifs préparés pour ce comité au sujet de ce projet de loi. Le nombre d'auteurs de meurtres multiples est assez faible comparativement à celui des auteurs d'un seul meurtre. Il s'agit d'un très petit nombre de personnes. En pourcentage, je pense qu'ils représentent 5 ou 6 p. 100 des meurtres en une année. Je me trompe peut-être, mais il s'agit quand même d'un faible pourcentage.
    Depuis 1997, aucun d'entre eux n'a eu droit à la libération avant d'avoir purgé 25 ans?
    Cela ne me surprendrait pas.
    En fait, d'après mon analyse, aucun d'entre eux n'a été libéré avant d'avoir purgé 30 ans.
    C'est cela.
    Si un jury le recommande et qu'un juge impose une peine de 50 ou de 75 ans avant d'être admissible à une libération conditionnelle, la Charte serait-elle invoquée à titre d'argument pour les cas individuels comparativement aux cas collectifs?
    Je pense que l'élément de pouvoir discrétionnaire pourrait épargner ces dispositions. Nous verrons en temps et lieu — mais oui, dans les cas particuliers.
    Les valeurs de la Charte ont clairement une influence sur les décisions prises dans les tribunaux criminels, et le fait de déterminer la peine en tenant compte des valeurs de la Charte permettrait certainement de donner de l'espoir à un individu. Je pense donc qu'un juge qui cherche à décider s'il utilisera ou pas la peine fixe de 25 ou 50 ans, s'il s'inspire de la Charte, conclura sûrement que le fait de faire preuve de réserve ou de souplesse dans le cadre d'une démarche plus nuancée serait approprié et n'exigerait donc pas cette peine fixe dans ce cas-là.
    Monsieur Di Luca, étant donné l'expérience que nous avons eue au Canada avant l'abolition de la peine de mort, et étant donné les expériences constatées aux États-Unis, convenez-vous que l'effet de ce projet de loi, si il est imposé — et je suis d'accord avec vous, en passant, il sera probablement utilisé très rarement, du moins avec les juges que nous avons actuellement — aboutira inévitablement, dans tous les cas, à au moins un appel à la Cour d'appel de la province, et pour la plupart de ces cas, aussi à un appel à la Cour suprême du Canada?
(1605)
    Dès que vous augmentez les pénalités, vous observerez non seulement une augmentation du nombre de contestations de la pénalité mais également une augmentation des poursuites. Une personne qui s'est vue infliger une peine de 50 ans n'a rien à perdre et se battra pour tout ce qu'elle peut.
    Pour ce qui est de protéger des victimes d'une exposition à la disposition de la dernière chance, ils devront encore une fois subir des procès — lors de l'interjection d'appel puis lors de l'appel subséquent à la Cour suprême.
    Bien sûr. Et qu'arrivera-t-il quand une des deux condamnations pour meurtre est interjetée en appel et que la peine est mise de côté? Il faudrait tenir une audience pour déterminer une nouvelle peine car la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle devra être déterminée à nouveau puisque la personne n'est plus coupable. Il faudra envisager refaire bon nombre d'audiences de détermination de la peine, avec des déclarations des victimes, la participation de la collectivité et tous les documents de ce genre. Il faut également en tenir compte.
    Et nous savons, si l'on prend pour exemple la Cour d'appel de l'Ontario, qu'il y a un bon nombre de causes pour meurtres qui doivent être recommencées. C'est un nombre considérable de procès pour meurtres.
    Merci.
    M. Rathgeber a sept minutes.
     Merci, monsieur Di Luca, pour votre exposé et votre présence.
    J'ai quelques questions pour vous, et je vais répondre à une des questions de mon ami M. Comartin.
    Selon le Service correctionnel, depuis août 2009, 457 personnes au Canada ont été condamnées et incarcérées pour meurtres multiples. De ceux-là, 26 p. 100 ont eu droit à la libération conditionnelle.
    Ce chiffre m'a alarmé. J'ai d'abord pensé que c'était une erreur. Je pensais que cela devait être 26, mais en fait c'est 26 p. 100. Soit un quart. J'ai demandé aux représentants de vérifier cette statistique et ils me disent que c'est exact. Si c'est le cas, comment concilier ce fait avec votre suggestion lors de votre déclaration préliminaire que ce n'est qu'une question de point de vue, qu'il n'y a pas en fait de remise de peine? Vingt-six pour cent des auteurs de meurtres multiples ont eu droit à la libération conditionnelle.
    La réduction ne se produit que si l'on sait à quel moment ils ont été mis en libération conditionnelle. Était-ce après 25, 35, 45 ou 50 ans? Si on sait à quel moment en fait ils ont été mis en libération conditionnelle et pendant combien de temps ils ont purgé une peine d'emprisonnement, cela permettra de savoir si en fait il y a eu une réduction.
    N'oubliez pas que même avec le système actuel, lorsqu'il s'agit de déterminer la peine pour des meurtres multiples, un juge n'accordera pas la période minimale d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. Il prévoira une période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle plus longue. J'imagine qu'il serait plus probable que la Commission des libérations conditionnelles qui examinerait deux cas de meurtres au premier degré, l'un pour lequel il n'y aurait qu'une seule victime et l'autre pour lequel il y aurait des victimes multiples, toutes autres choses étant égales, accorderait la libération conditionnelle plus rapidement à celui qui n'aurait tué qu'une personne plutôt qu'à celui qui en aurait tué deux. Cela sera et est considéré, sans aucun doute, comme un facteur aggravant.
    Quand on ne sait pas exactement combien de temps ces auteurs de meurtres multiples passent réellement en prison, on ne peut pas vraiment savoir s'il y a une réduction.
    La réduction de la peine est une perception, et je pense que c'est une perception incorrecte. On reconnaît dans la loi qu'on ne peut pas tout simplement utiliser une calculatrice pour ajouter une peine d'emprisonnement à vie de 25 ans pour chaque crime commis ou pour chaque infraction. En fait, la Cour d'appel de l'Ontario en a longuement parlé. Il y a eu un cas il y a de nombreuses années où un homme était entré par infraction dans 15 chalets. Le juge a examiné la question et l'a condamné à huit mois de prison pour une introduction par infraction, donc huit fois quinze équivaut à x nombres de mois d'emprisonnement, et c'est la peine que je vous impose. La Cour d'appel a dit, écoutez, on ne détermine pas la peine de cette façon. Ça ne tient pas compte de la totalité. Cela ne tient pas compte des circonstances personnelles, de l'espoir de réadaptation ou d'un équilibre.
    Cela, d'une part, je pense, atténue l'argument. D'autre part, nous devons avoir ce chiffre. Nous n'avons pas les statistiques. Les gens dont vous parlez, soit 25 p. 100 de 100 personnes, seront peut-être mises en liberté conditionnelle beaucoup plus tard que quelqu'un d'autre qui serait dans la même situation mais qui n'aurait commis qu'un seul meurtre.
    Cela dit, nous savons tous que la Commission des libérations conditionnelles a une certaine expertise à cet égard. La Commission des libérations conditionnelles ne tire pas au sort le nom des personnes qu'elle libère. Il n'est pas facile de convaincre une commission des libérations conditionnelles. Prenez l'exemple de Clifford Olson, c'est une cause perdue. Il n'obtiendra jamais une libération conditionnelle. Nous avons confiance en la Commission des libérations conditionnelles, elle ne le fera pas. C'est exactement ce qui se produit. Il va mourir en prison, selon toutes les probabilités. De cette façon, le système fonctionne.
    Je sais qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité est une peine d'emprisonnement à perpétuité. Presque tous ceux qui sont ici dans cette pièce sont des avocats, et nous savons tous qu'une peine d'emprisonnement à perpétuité est une peine d'emprisonnement à perpétuité. À votre avis, est-ce que c'est quelque chose qui est compris de façon générale dans la société? Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que bien des membres de la société civile, si je peux utiliser ce mot incorrectement — mais je sais que vous savez ce que je veux dire — ceux qui ne sont pas des avocats — pensent qu'un meurtre au premier degré vaut une peine d'emprisonnement de 25 ans?
(1610)
    Je conviens que les avocats et les civils voient les choses différemment. Je suis également entièrement d'accord, c'est sans doute l'une des questions qui devrait le plus faire l'objet d'une sensibilisation auprès de la population. C'est l'une des questions les plus urgentes et l'une des idées fausses les plus répandues tant chez les médias que dans la population en général. La plupart des gens diront: « Voyons, si quelqu'un commet un meurtre au Canada, il sera libéré au bout de sept ans, de cinq ans, de neuf ans, de dix ans, peu importe ». Ils ne comprennent pas que l'emprisonnement à perpétuité est vraiment à perpétuité.
    Vous comprenez donc pour ces gens, il ne s'agit pas d'un recours obscur pour chercher un problème, comme vous l'avez dit. C'est vraiment une mesure qui vise à corriger ce que l'on considère comme étant une réduction de peine en ce sens que ceux qui ont été trouvés coupables de meurtres multiples se voient imposer une peine de 25 ans pour tous les meurtres qu'ils ont commis plutôt que de se voir imposer une peine individuelle pour chaque meurtre.
    Je ne demande pas si vous êtes d'accord avec cette façon répandue de voir les choses. Vous serez cependant d'accord avec moi pour dire que c'est là une perception assez répandue.
    Je conviens que c'est une perception qui est répandue. La seule chose que je peux répondre à cela, c'est qu'il faudrait plutôt éduquer la population, obtenir les bonnes statistiques, analyser les faits et ensuite agir, si cela est nécessaire.
    Je suis d'accord avec mon collègue, M. Lemay, un individu comme Clifford Olson n'obtiendrait jamais une libération conditionnelle, et Dieu merci il ne l'a pas obtenu cette semaine. Pour sa gouverne, et vous voudrez peut-être faire des commentaires à ce sujet, la raison pour laquelle les victimes d'Olson et d'autres auteurs de meurtres multiples sont victimisées c'est que l'idée même qu'il y ait une audience et qu'elles puissent participer à cette audience si elles choisissent de le faire les victimise à nouveau. Et c'est ce qu'elles vous diront. Sharon Rosenfeldt a comparu devant notre comité au sujet d'un autre projet de loi, le projet de loi sur la dernière chance. Elle est la mère de l'une des victimes d'Olson. Elle vous dira avec beaucoup d'éloquence et de passion que chaque fois qu'elle lit le nom d'Olson dans des journaux, elle se sent victimisée. Elle a tout au moins l'impression qu'elle est victimisée.
    Que dites-vous aux gens qui demandent ce type de mesures législatives car ils craignent que les meurtriers qui ont assassiné des êtres qui leur sont chers reçoivent en fait une réduction de peine?
    J'ai certainement beaucoup de sympathie pour eux à cet égard. Il est évident que ces personnes ont été victimisées non seulement lors du crime initial mais par le processus qui se déroule au fil des ans — il ne fait aucun doute. Au bout du compte, je ne pense pas qu'il soit possible de faire quoi que ce soit pour que le nom de Clifford Olson ne puisse jamais plus être mentionné dans les médias ou éliminer l'application normale de la loi que prévoit la Constitution à son égard. Cependant, c'est quelqu'un que nous méprisons. Il s'agit d'un sous-produit du système que nous cherchons à limiter, mais c'est malheureusement un sous-produit du système qui est nécessaire et qui prévoit l'application de la loi à l'égard de tous, bon et mauvais.
    Dans les quelques secondes qui me restent, vous serez d'accord avec moi pour dire que si le projet de loi à l'étude était en vigueur, et si M. Olson devait purger 11 fois une peine de 25 ans — je ne sais même pas quelle est la durée de sa peine — avant d'être admissible à une libération conditionnelle, et ce ne sera pas rétroactif, cela épargnerait à Sharon Rosenfeldt et d'autres victimes comme elle de revivre ce cauchemar à chaque demande de libération conditionnelle.
    Je suis d'accord. Si on pousse cet argument à sa conclusion logique, alors on refuse d'accorder la libération conditionnelle à tous ceux qui se retrouvent avec une peine d'emprisonnement à perpétuité, sans jamais pouvoir espérer sortir un jour, et on s'assure que leur nom n'est plus jamais mentionné publiquement de façon à ce que personne ne puisse être victimisé à nouveau.
    Au Canada, nous administrons la justice avec un peu plus de compassion sans perdre de vue cependant, bien sûr, que cela trouble les victimes. Nous ne pouvons légiférer en tenant compte seulement du fait que la famille d'une victime sera revictimisée par un élément de l'application de la loi.
    Je comprends ce que vous dites, et je vous remercie de comprendre le point de vue de la victime.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Murphy pour cinq minutes.
    Merci.
    C'est un débat intéressant, car à la suite des questions posées par M. Rathgeber, tous ceux qui sont ici dans cette pièce sont d'accord pour dire que les civils qui sont à l'extérieur de la pièce ont l'impression que l'emprisonnement à perpétuité est à perpétuité, non pas une peine d'emprisonnement de 25 ou de 28 ans, qui est en réalité la moyenne selon les statistiques, et qu'il y a des meurtriers qui sortent après sept ou neuf ans suite aux décisions de la Commission des libérations conditionnelles — des meurtriers, coupables de meurtres au second degré, après 10 ans, 17 ans, ou autres.
    C'est ainsi que fonctionne la Commission des libérations conditionnelles. On applaudit le travail que fait la Commission des libérations conditionnelles car on lui confie la tâche de libérer des gens qui ont commis des meurtres et qui se sont fait imposer une peine d'emprisonnement à perpétuité par des juges. Je ne pense pas que la population voit les choses de cette façon. Il semble que ce soit un peu une erreur de la part du gouvernement de ne pas examiner — et peut-être qu'il le fait — soit l'aspect éducatif, soit l'aspect législatif de la Commission des libérations conditionnelles. Il me semble que ce soit là l'un des problèmes, d'après ce qu'ils disent eux-mêmes.
    C'est précisément parce que chaque meurtre est différent. Je ne pense pas que quelqu'un ici présent estime aussi que Clifford Olson devrait être admissible à une libération conditionnelle de temps à autre. Il devrait être en prison pendant 275 ans, comme il devrait purger 11 peines. Cela ne devrait jamais se produire, mais comme l'a dit le gouvernement lui-même, il reconnaît le problème de meurtre en général.
    Monsieur Petit, encore une fois, les types de meurtres multiples sont extrêmement variés. On a les meurtres en série commis de sang-froid en passant par les meurtres à forfait, les meurtres non prémédités sous l'aveuglement de la passion, les parents qui tuent leurs enfants, les meurtres de collègues en milieu de travail jusqu'aux meurtres commis par des personnes qui ont des hallucinations causées par l'alcool, les drogues et les maladies mentales. Je pense que ce que vous dites, c'est qu'il y a des cas où des meurtriers devraient être admissibles à une libération conditionnelle car ils pourraient apporter une contribution à la société. Je comprends cela.
    Dans le cas de meurtres multiples, le représentant du ministère de la Justice nous a beaucoup aidés en tentant de trouver une façon d'amender le projet de loi ou de voir pourquoi il ne pourrait pas y avoir un pouvoir discrétionnaire. Il me semble que l'article 745.51 qui est proposé pourrait être amendé à la fin pour donner au juge le pouvoir discrétionnaire de choisir entre 25 et 50 ans. On ne peut pas préciser de chiffres car c'est un multiple du nombre de meurtres commis, mais cela pourrait se situer entre 10 et 20, et entre 20 et 40. Si on ajoutait cela, on aurait vraiment un pouvoir discrétionnaire que, selon le gouvernement, les juges devraient avoir à l'heure actuelle, et je pense que nous croyons la même chose de notre côté. Cela ne serait-il pas un bon amendement? Je ne pense pas que cela irait au-delà de la portée du projet de loi. Que penseriez-vous de ce genre d'amendement?
(1615)
    J'applaudirais certainement ce genre d'amendement car il renaît l'espoir que les juges fassent exactement chaque jour ce pourquoi ils ont prêté serment. Ils ont les compétences pour faire cela. Ils auraient les preuves devant eux pour faire cela. Cette mesure de souplesse, franchement, ferait en sorte qu'une mesure législative qui serait sans aucun doute jamais ou rarement utilisée puisse l'être dans les cas appropriés.
    Permettez moi d'ajouter un autre élément. Si vous devez examiner la Commission des libérations conditionnelles, vous pouvez faire preuve d'un peu plus de créativité au lieu d'utiliser l'instrument contondant du droit pénal et en disant 25 ou 50. Que pensez-vous d'ajouter peut-être une fonction d'examen approfondi à la Commission des libérations conditionnelles? On le fait à l'heure actuelle en ce qui concerne la disposition de la dernière chance. Il n'existe pas de droit automatique à cette disposition. Il faut présenter son cas tout d'abord à un juge, sur papier. Si le juge estime qu'il y a des chances raisonnables de succès, il est alors possible de présenter une demande à cet effet. Cela a été fait pour empêcher que les familles des victimes soient traumatisées à nouveau.
    Pourquoi la Commission des libérations conditionnelles ne pourrait-elle pas exercer une fonction d'examen approfondi d'une demande sur papier et dire: « Cela est sans espoir, et cela ne sera pas examiné lors d'une audience en bonne et due forme »? Un type comme Olson ne pourrait plus alors se retrouver dans les médias régulièrement au fil des ans et traumatiser les gens. Il y a des façons plus créatives de s'y prendre.
    Certainement, si on donne réellement un pouvoir discrétionnaire au juge, cela pourra considérablement adoucir le projet de loi à l'étude et le rendre davantage utilisable, franchement.
    Je pense que c'est à nous maintenant?
    Une minute.
    Il serait possible de régler cette question par un amendement. J'espère que mes collègues acceptent cette proposition qui n'enlève rien au projet de loi. On dit que l'on donne en réalité... Le hic, c'est que nous sommes d'accord pour dire que le juge a un pouvoir discrétionnaire ici, mais cela équivaut à dire que l'on peut conduire sa voiture à 10 milles à l'heure ou à 100 milles à l'heure. Parfois les gens veulent quelque chose entre les deux. Les gens sensés veulent cela; les juges sensés veulent cela.
    Croyez-vous que les juges seraient favorables à un tel pouvoir discrétionnaire réel?
    Je pense que si on leur posait la question, les juges répondraient sans doute qu'ils ont des compétences qui se développent et se fondent sur des preuves. Ce qui a caractérisé le processus de détermination de la peine au Canada jusqu'à tout récemment, a été l'exercice judicieux du pouvoir discrétionnaire pour imposer des peines individualisées, des peines sur mesure afin d'essayer de trouver un juste équilibre entre tous les facteurs que l'on retrouve dans les articles 718 à 718.2 du Code criminel.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous allons revenir à M. Lemay pour cinq minutes.

[Français]

    M. Murphy a soulevé un point, mais je me demande comment on pourrait amender la loi. Selon l'article 745.51, le pouvoir discrétionnaire du juge veut dire qu'il accepte la demande ou non. Cela voudrait donc dire 25 ans de plus avant d'être admissible. Par contre, selon moi, le projet de loi C-48 ne peut permettre que ce soit moins de 25 ans, ce n'est pas dans le projet de loi. Il faudrait amender l'article 745.2 ou le début de l'article 745, mais cela n'existe pas. Malheureusement, je ne m'attendais pas à cela, mais il me semble, si ma mémoire m'est fidèle et selon ce qu'on a ici, que le juge ne peut pas faire autrement. En Québécois, on dirait: « ou bedon, ou bedon », c'est-à-dire on accorde le pouvoir discrétionnaire ou pas. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi. Sinon il faudrait amender le début de l'article 745.
(1620)

[Traduction]

    Je suis d'accord qu'à l'heure actuelle le choix est binaire: c'est l'un ou c'est l'autre, un point c'est tout. Pour changer cela, j'approuve la reformulation d'autres articles du Code criminel afin de refléter la capacité d'un juge d'exercer un plus grand pouvoir discrétionnaire. Cela va au-delà de l'article contenu dans le projet de loi à l'étude.

[Français]

    Si je vous comprends bien — et je suis d'accord avec vous —, on ne peut étendre la portée du projet de loi C-48. Ce sera cela ou ce ne sera pas cela.

[Traduction]

    Sous le libellé actuel du projet de loi, je suis d'accord avec vous. Tel qu'il est écrit, c'est tout ou rien. À mon avis, il faudrait modifier considérablement ce projet de loi, car il devrait avoir davantage d'impact sur les périodes d'inadmissibilité à la libération conditionnelle, ou tout au moins accorder un pouvoir discrétionnaire au juge à cet égard. Or, ce n'est pas quelque chose de compliqué. On peut le faire en ayant un renvoi aux articles qui... Ce n'est pas compliqué pour moi.

[Français]

    Ce n'est pas compliqué pour vous, vous êtes criminaliste. Ce ne le serait pas pour moi non plus, ni pour M. Murphy non plus.
    Par contre, je pense que de l'autre côté, cela serait très compliqué, parce que ce n'est pas ce qu'ils veulent.
    Je n'ai pas d'autres questions mais je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons donner la parole à M. Woodworth pour cinq minutes.
    Merci beaucoup d'être ici avec nous aujourd'hui.
    Je voudrais tout d'abord vous poser une question un peu technique pour avoir un petit éclaircissement. Je ne connais pas très bien la pratique au terme de l'article 745.2 qui est en vigueur à l'heure actuelle, selon lequel un jury est autorisé à faire une recommandation concernant l'inadmissibilité à la libération conditionnelle.
    Est-ce que vous dites qu'un juge ne peut libérer le jury qu'après le prononcé de la peine?
    Non. En fait, ce qui arrive c'est que le jury revient dans la salle et dit: « Nous déclarons l'accusé coupable de meurtre. » Le juge lit ensuite la disposition du Code criminel. Le jury quitte la pièce et revient cinq ou dix minutes, ou une heure plus tard et dit: « Voici la peine que nous recommandons. »
    Est-ce une pratique ou une règle?
    C'est une pratique.
    Ce qui se passe en fin de compte, c'est que lors de l'audience de la détermination de la peine, qui a lieu une semaine, un mois ou trois mois plus tard, le juge tient compte de la recommandation du jury pour déterminer la peine.
    Donc il s'agit tout simplement d'une question de choix du moment, peut-être, qui ferait que le jury ne pourrait être libéré tant que l'audience pour la détermination de la peine n'a pas eu lieu.
    Eh bien, certes, si l'on envisage que leur rôle ne sera pas tout simplement de décider au hasard s'il faut ou non des peines consécutives.
    Quoi qu'il en soit, d'une façon ou d'une autre, c'est ainsi que les choses se font à l'heure actuelle. Le projet de loi à l'étude ne change rien à cela.
    Non. En fait, ce n'est qu'une question de plus à laquelle ils doivent répondre.
    Bien.
    Dois-je comprendre que vous avez confiance dans la capacité de nos juges d'exercer correctement ce pouvoir discrétionnaire, sans oublier qu'ils savent que ce pouvoir est binaire, et que vous avez confiance qu'ils exerceront ce pouvoir discrétionnaire sur le plan judiciaire?
    Je suis en faveur du pouvoir discrétionnaire des juges et en fait je suis fermement convaincu que non seulement cela est conforme à la Charte mais que c'est également conforme ultimement à la pratique canadienne, à l'échelle nationale et internationale.
    Je ferais confiance aux juges à cet égard, mais ils hésiteront à exercer un pouvoir discrétionnaire qui est autant binaire.
    Très bien. Je ne tenterai pas de le dire à un juge. Dans le projet de loi à l'étude, tout ce que nous faisons, c'est donner au juge un choix qu'il n'avait pas auparavant, n'est-ce pas?
    C'est assez exact.
    Puisque vous êtes en faveur du pouvoir discrétionnaire pour les juges, je croirais que vous ne feriez pas valoir trop fermement qu'il ne faut pas donner à un juge un choix qu'il n'avait pas auparavant.
    Comme je l'ai dit au départ, j'applaudis l'existence de ce pouvoir discrétionnaire, et je pense que cela est essentiel pour faire en sorte que ce projet de loi respecte les limites constitutionnelles.
    Ce n'est pas tout à fait ce que je disais.
    Vous applaudissez le fait que nous donnions à un juge un pouvoir discrétionnaire, une option, que le juge n'avait pas auparavant?
(1625)
    Absolument. Je suis heureux que l'on ait ce pouvoir discrétionnaire, mais je veux que vous...
    Parce que c'est ce que le projet de loi à l'étude fait.
    Je remets en question le fondement probatoire pour lequel vous voyez le besoin ou percevez le besoin de faire cela.
    Eh bien, parlons de cela quelques instants, particulièrement en ce qui a trait au cas de Clifford Olson.
    Après tout, ce dont nous parlons ici, c'est de qui va prendre la décision au sujet de l'admissibilité à la libération conditionnelle à cette étape, c'est-à-dire est-ce le juge ou est-ce la Commission des libérations conditionnelles, n'est-ce pas?
    M. Joseph Di Luca: Mm-hmm.
    M. Stephen Woodworth: Vous devez répondre oui ou non.
    Je dirai oui...
    Merci.
    Il y a rappel au Règlement.
    M. Woodworth s'intéresse vivement à cette question, et je comprends son enthousiasme. Il a interrompu à deux reprises le témoin qui était en train de répondre, et maintenant il dit que le témoin doit répondre oui ou non.
    Monsieur le président, j'aimerais bien que vous encouragiez le témoin à donner une réponse complète à la question et je voudrais encourager M. Woodworth à laisser le témoin répondre.
    Monsieur Murphy, comme je l'ai dit auparavant, je respecte l'indépendance de chacun des membres de notre comité. Je respecterai le droit de chaque membre du comité à poser des questions comme bon lui semble. J'ai fait preuve de courtoisie à cet égard envers les députés des deux côtés de la table. Je vais continuer à le faire.
    J'interviendrais seulement si en fait le témoin et celui qui lui pose la question parlent si fort qu'on ne les comprend plus. À ce moment-là, j'interviendrais.
    Sinon, je permettrais à chacun des membres de notre comité de poser des questions comme bon lui semble.
    Puis-je faire une observation au sujet de ce rappel au Règlement avant de revenir à mes questions?
    Je remercie M. Murphy de son intervention. Je respecterai certainement les exigences de courtoisie, mais je voudrais dire que lorsque j'ai demandé au témoin de ne pas répondre tout simplement « mm-hmm », c'est, je suppose, par habitude, comme avocat, car je suppose que s'il y a une transcription, l'expression « mm-hmm? », ne sera pas vraiment facile à transcrire.
    Je voulais tout simplement, avec le plus de courtoisie possible, demander au témoin de dire oui ou non, et je ne voulais certainement pas manquer de courtoisie à son égard.
    Puis-je continuer? Merci.
    En ce qui concerne M. Clifford Olson, la seule question consiste à savoir si c'est le juge ou la Commission des libérations conditionnelles qui décide de l'inadmissibilité à la libération conditionnelle, tout au moins pour ce qui est du projet de loi à l'étude. Est-ce exact?
    C'est exact.
    Au moins dans le cas de Clifford Olson, nous pouvons dire avec le recul qu'il aurait été peut-être approprié que le juge fasse la présélection. Qu'en pensez-vous?
    Je ne pense pas que ce soit juste de dire cela et pour la seule raison que vous demandez à un juge de dire de façon prospective où sera une personne dans 50 ans. Un juge ne peut pas dire que pendant 49 ans, la libération de cette personne pose un risque, mais qu'à la cinquantième année elle devrait pouvoir présenter une demande de libération conditionnelle.
    Laissez-moi tout simplement dire que tout au moins dans le cas de Clifford Olson, je dois être tout à fait en désaccord avec vous, en ce sens que cela aurait été évident pour un juge, dans le cas d'un tueur en série comme Clifford Olson, et qu'il n'aurait pas été obligé d'attendre la décision de la Commission des libérations conditionnelles.
    Mais à part cela, j'aurais une autre question technique que j'aimerais aborder. Je ne suis pas un expert en ce qui concerne les audiences de libération conditionnelle, je dois l'avouer, mais si j'ai bonne mémoire, la Commission des libérations conditionnelles a des politiques et des précédents pour la guider lorsqu'elle doit décider d'accorder ou non une libération conditionnelle. Si j'ai bonne mémoire, ces politiques et précédents mettent l'accent sur la sécurité publique et aussi sur le remords et la réadaptation.
    Je ne me souviens pas qu'il y ait une politique ou un précédent qui permette à une commission des libérations conditionnelles de refuser la libération conditionnelle en se fondant tout simplement sur le nombre d'infractions commises initialement.
    Êtes-vous en train de dire qu'il existe une telle politique? Je croyais vous avoir entendu dire qu'une commission des libérations conditionnelles prendrait cela en compte.
    Je ne pense pas qu'il y ait une politique officielle qui dise une telle chose, mais si la Commission des libérations conditionnelles doit examiner le degré de risque posé par un individu lors de sa libération, le fait que ce dernier ait tué plus d'une personne — peut-être lors d'infractions distinctes, peut-être dans des circonstances distinctes — montre certainement bien le degré de risque lié à la libération de cette personne.
    Si on parle du risque, c'est tout à fait exact. Cependant, si on dit tout simplement qu'il s'agit d'une condition en soi, je ne le pense pas.
    Combien de représentations avez-vous reçues de vos membres au sujet du projet de loi C-48?
    Je consulte mes membres et mon exécutif directement sur ces questions. Nous avons un comité sur la législation...
(1630)
    Combien en avez-vous reçues?
    Nous n'avons pas de chiffres précis.
    Avez-vous reçu des représentations de vos membres sur le projet de loi C-48?
    Nous n'en avons pas reçues spécifiquement de nos membres. Notre comité sur la législation est chargé de défendre les intérêts de l'organisation. Le comité se réunit pour débattre certaines questions et déterminer une position qui...
    Ce comité compte combien de membres?
    Merci. Le temps est écoulé.
    Je peux répondre à cette question. Le comité est composé de quatre personnes.
    Très bien.
    Merci infiniment, monsieur Di Luca. Votre témoignage nous aidera dans notre étude du projet de loi.
    Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes, puis nous entendrons Mme O'Sullivan.

    Nous allons reprendre nos travaux. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-48.
    Je suis heureux d'accueillir de nouveau Mme Susan O'Sullivan, qui a été nommée récemment ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels.
    Vous êtes de nouveau la bienvenue. Vous avez 10 minutes pour votre déclaration préliminaire, si vous le souhaitez, puis nous passerons aux questions.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler de nouveau du projet de loi C-48, qui habiliterait les juges à imposer, avec la latitude voulue, des périodes d'inadmissibilité à des libérations conditionnelles consécutives plutôt que simultanées.
    J'aimerais commencer par décrire brièvement notre bureau. Je vous ferai part ensuite de nos opinions et de nos recommandations en ce qui concerne le projet de loi et son incidence sur les victimes d'actes criminels au Canada.

[Traduction]

    Le Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels a été créé pour donner une voix aux victimes à l'échelle fédérale. Nous nous acquittons de cette responsabilité à travers les activités prévues dans notre mandat, c'est-à-dire, entre autres en recevant et en examinant les plaintes des victimes; en promouvant et facilitant l'accès aux programmes fédéraux et aux services à l'intention des victimes d'actes criminels grâce à la diffusion de renseignements et aux renvois; en promouvant les principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité; en sensibilisant le personnel du système de justice pénale et les responsables de l'élaboration des politiques aux besoins et aux préoccupations des victimes; et en identifiant les questions systémiques et nouvelles qui ont une incidence négative sur les victimes d'actes criminels.
    En ce qui concerne le projet de loi C-48, permettez-moi de commencer en déclarant notre soutien pour le projet de loi et pour le sens du projet de loi visant à offrir aux juges la possibilité, s'il y a lieu, d'infliger des périodes d'inadmissibilité à la libération conditionnelle qui sont consécutives plutôt que simultanées.
    Le projet de loi C-48 vise à traiter deux préoccupations particulières que les victimes ont soulevé à de nombreuses reprises: la nécessité de tenir les coupables responsables de chaque vie enlevée; et l'anxiété et la dévastation causées aux victimes lorsqu'on accorde à un délinquant une audience de libération conditionnelle.
    Pour ce qui est de la responsabilisation, la plupart des victimes souhaitent que justice soit rendue lorsqu'elles perdent un être cher, ce qui à mon avis est compréhensible. Dans le cas d'un meurtrier en série, les familles des victimes veulent que l'on accorde de l'importance au fait qu'un de leur proche a perdu la vie, et que l'on tienne le coupable responsable de chaque vie enlevée.
    Selon le régime actuel, lorsqu'on condamne un délinquant à l'emprisonnement à perpétuité, il n'est pas admissible à la libération d'office. Si une libération conditionnelle est accordée, il demeure, pour le restant de sa vie, sous la supervision du Service correctionnel du Canada. La période durant laquelle un meurtre est inadmissible à la libération conditionnelle n'est pas automatiquement prolongée en fonction du nombre de personnes qu'il a tuées. Ainsi, il n'existe pas de conséquence ou d'élément dissuasif manifeste qui pousserait une personne à ne tuer qu'une personne plutôt que six par exemple. Cette réalité est une source de frustration pour certaines victimes.
    Les victimes ne pensent pas toutes que des peines d'emprisonnement plus sévères soient la meilleure solution. Cependant, toutes les victimes à qui j'en ai parlé s'entendent pour dire qu'elles ne veulent pas que d'autres personnes aient à partager leur sort. Le projet de loi C-48 prévoit qu'un juge peut imposer des périodes consécutives d'inadmissibilité à la libération conditionnelle et veiller ainsi à la protection des victimes et du public. Ce pouvoir discrétionnaire est un élément essentiel du projet de loi. Il permet au juge de prendre une décision en fonction des circonstances particulières et de l'intérêt de tous les Canadiens.
    La deuxième préoccupation visée par le projet de loi C-48 est l'anxiété et les difficultés auxquelles les victimes font face lorsqu'elles se préparent et participent à une audience de libération conditionnelle. Il est opportun que je sois présente ici aujourd'hui. Il y a à peine deux jours, j'ai participé, à titre d'observatrice, à la plus récente audience de libération conditionnelle du tueur en série Clifford Olson. Je sais que nous connaissons tous les crimes horribles qu'il a commis, et je ne tiens aucunement à accorder plus d'attention à lui ou à ses crimes. Je souhaite cependant parler de l'effet émotionnel que de telles audiences de libération conditionnelle ont sur les victimes d'un acte criminel.
    Je suppose que vous avez tous, dans une certaine mesure, suivi l'affaire dans les médias. D'après ces commentaires, il est évident que le délinquant n'éprouve aucun remords relativement à ses actes et aucune compassion pour la perte qu'a subie la famille de ses victimes. Peu importe, il a droit de demander la libération conditionnelle tous les deux ans, ce qui signifie que la famille de ses victimes doit continuellement être confrontée à sa perte dévastatrice.
    Je puis vous assurer, après en avoir discuté avec Sharon Rosenfeldt, que ces audiences sont très difficiles. Certaines victimes choisissent de ne pas participer aux audiences. Pour celles qui choisissent de le faire, qui préparent des déclarations de la victime et qui se retrouvent dans une pièce en compagnie de l'homme qui a tué leur fille ou leur fils, l'expérience pour rouvrir des plaies. L'incidence de ces audiences ne se fait pas uniquement sentir durant les jours au cours desquels la Commission des libérations conditionnelles se réunit et prend sa décision. Elle se manifeste plusieurs années auparavant, car les victimes savent que la période d'inadmissibilité à la libération conditionnelle tire à sa fin. Elle se manifeste des mois à l'avance, lorsqu'on informe les victimes du fait que le délinquant aura droit à une audience et qu'elles doivent se préparer. Et elle continue de se faire sentir après l'audience, période au cours de laquelle les victimes tentent de poursuivre le chemin de la guérison. Ces audiences nécessitent du temps, de l'argent et, la plupart du temps, un déplacement de la part des victimes. Elle pose un défi particulier pour des personnes qui ne sont pas bien ou qui ont des problèmes de santé.
    Évidemment, notre système de justice doit être équitable pour toutes les parties concernées. Je ne propose pas que l'on enlève aux délinquants toute possibilité de libération conditionnelle. Mais dans des cas tels que ceux-ci, le projet de loi C-48 donnerait aux juges un outil supplémentaire pour garantir que les victimes ne soient pas soumises à ce processus sans raison.
(1635)
    Enfin, bien que j'appuie la présente version du projet de loi C-48, je souhaite également formuler deux brèves recommandations à son égard. Je crois comprendre que selon le projet de loi C-48, les juges qui choisissent de ne pas infliger des peines consécutives doivent justifier leur décision oralement ou par écrit. Bien que je sois consciente du fait que ces décisions fassent partie des archives publiques, et je laisserai certainement cette question être discutée par les experts. Je recommande que cette disposition soit modifiée de manière à ce que, premièrement, les victimes aient explicitement le droit d'avoir accès à ces renseignements, si elles le souhaitent, et, deuxièmement, même dans les cas où un juge décide d'infliger des peines consécutives, il doive justifier ses décisions oralement ou par écrit et que les victimes aient explicitement le droit d'avoir accès à ces renseignements, si elles le souhaitent.

[Français]

    En conclusion, je crois que le projet de loi C-48 aura une incidence positive sur les victimes d'actes criminels. En donnant au juge le pouvoir discrétionnaire d'infliger des périodes d'inadmissibilité à la libération conditionnelle consécutives plutôt que simultanées, on contribuera à tenir les coupables responsables de chaque vie enlevée et, s'il y a lieu, on retardera ou on évitera le traumatisme et la dévastation causés aux victimes par la tenue d'audiences de libération conditionnelle.

[Traduction]

    Les victimes méritent d'être prises en compte dans le système de justice pénale, et j'espère que j'ai contribué à vous transmettre leurs préoccupations aujourd'hui.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Murphy, vous avez sept minutes.
    Merci.
    Je vous remercie de votre présence.
    Au sujet de ce que vous disiez à la fin, sur les raisons, si j'ai bien compris, le projet de loi prévoit que les raisons seront fournies. Quelles modifications est-ce que vous proposez?
(1640)
    Parmi toutes les questions, préoccupations et plaintes que nous recevons à mon bureau, la principale concerne la frustration que ressentent les victimes et leurs familles, non seulement en raison de leur absence de droits, mais aussi parce qu'elles n'ont pas accès à l'information. Comme je le disais, je sais que ces décisions sont du domaine public, et qu'elles cherchent les raisons des décisions, pour savoir si celles-ci prévoient ou non des périodes consécutives d'inadmissibilité à la libération conditionnelle. Elles veulent savoir à la fois pourquoi telle ou telle décision a été prise et si les périodes d'inadmissibilité consécutives s'appliquent ou non.
    Pour les raisons et la décision?
    Oui.
    Très bien. Je comprends cela et j'approuve cette démarche.
    Certains témoins qui ont comparu dans le cadre de notre étude du projet de loi ont recommandé que le juge puisse augmenter la période d'inadmissibilité de 25 à 50 ans dans le cas d'un double meurtre au premier degré et de 25 à 75 ans dans le cadre d'un triple meurtre. Prenons le cas d'un double meurtre. Dans ma collectivité, un crime odieux a été commis lorsque j'étais enfant. Deux policiers ont été tués brutalement et délibérément par des personnes qui, juste après l'abolition de la peine de mort, avaient été condamnées à perpétuité, ce qui, dans l'esprit des gens de Moncton, voulaient dire qu'ils allaient passer le reste de leur vie en prison. Dans cette pièce, nous pensons tous que perpétuité ça veut dire perpétuité. Nous savons que le public pense la même chose. Or, nous savons que cela veut dire une période d'inadmissibilité de 25 ans. Cela veut dire qu'en moyenne, le détenu passe 28 ans en prison.
    Des témoins nous ont dit que la Commission des libérations conditionnelles devrait traiter ces dossiers après 25 ans. Je souhaiterais un moyen terme: si le juge a un vrai pouvoir discrétionnaire, il peut imposer une période d'inadmissibilité de 45 ans pour deux meurtres. Dans le cas d'un des deux tueurs, M. Hutchison, sa condamnation a réellement été à vie, car il était dans la quarantaine lorsqu'il a commis ce meurtre. Est-ce que vous pensez qu'il y a un moyen terme? Ce matin, un avocat qui a déjà défendu des personnes accusées de meurtre nous a dit que s'il avait à choisir entre 25 et 50 ans pour un quadragénaire trouvé coupable de meurtre au premier degré, le juge ferait probablement preuve de ce qu'ils appellent la « retenue judiciaire » et imposerait une période de 25 ans. En d'autres mots, la période d'inadmissibilité ne sera peut-être pas plus longue dans certains cas si nous essayons de trouver un moyen terme. Comprenez-vous ce que je dis?
    Je crois que oui. Comme vous le savez bien, je suis ici pour parler au nom des victimes, et je peux vous dire catégoriquement que les victimes ne souhaitent pas que ce qui leur est arrivé arrive à d'autres.
    Je pense que le projet de loi C-48 tient compte des préoccupations de part et d'autre et permet au juge d'exercer sa discrétion et de ne pas imposer des périodes d'inadmissibilité consécutives s'il a des raisons d'agir ainsi... le projet de loi permet cela. Les victimes souhaitent que nous pensions... ceux dont nous parlons, si je puis me permettre de citer Priscilla de Villiers, sont « les pires parmi les pires ». Nous parlons de personnes qui ont commis de multiples meurtres. Lorsque je parle de responsabilité et de compassion, je pense à un très faible pourcentage de personnes qui ont commis ces multiples meurtres et je dis que les familles des victimes ne devraient pas être forcées de revivre des audiences de libération conditionnelle à répétition, comme on l'a vu, par exemple, lundi. Rappelez-vous que du point de vue des victimes, en vertu de projet de loi, ce sont les juges qui peuvent exercer leur discrétion et que ces personnes qui ont commis des meurtres multiples doivent être tenues responsables et que dans leur cas à perpétuité veut dire à perpétuité.
    Eh bien justement, à ce sujet, je pense que dans un cas où le juge fait preuve de retenue judiciaire, 35 serait mieux que 25. Je sais que tout cela est hypothétique...
    Oui, je ne sais pas si c'est à moi de parler de la décision d'un juge. Je ne sais pas si je suis placée pour... Je vois où vous voulez en venir, et je respecte certainement votre opinion, mais je pense qu'au bout du compte, du point de vue d'une victime, une personne qui a commis de multiples meurtres est le pire parmi les pires. Nous voulons qu'à perpétuité signifie vraiment à perpétuité et que la discrétion... D'après mon interprétation du projet de loi, les trois critères qu'un juge applique pour prendre cette décision sont les mêmes que ceux qui sont prévus à l'article 745. Je pense que le juge utilise les mêmes critères lorsqu'il exerce ce pouvoir discrétionnaire que...
    Parlons maintenant de la Commission des libérations conditionnelles. Encore une fois, dans ma circonscription, dans un cas de meurtre au premier degré plus récent, le tueur s'est vu imposer une période d'inadmissibilité de 25 ans. Je sais que la famille de la victime et moi-même avons formulé une plainte auprès de votre prédécesseur au sujet de la façon dont la Commission des libérations conditionnelles traite les victimes dans certains cas, en refusant de payer d'avance leurs frais de déplacement pour qu'elles puissent se rendre à un pénitencier au Québec. Il y a des questions juridiques concernant l'avis d'annulation d'une audience de libération conditionnelle prévue. Le système actuel continue à victimiser ces personnes.
    Je me demande si vous pourriez m'indiquer quelle loi ou quelle réponse vous obtenez... Je sais que vous occupez votre poste depuis peu de temps, mais qu'est-ce que les victimes vous disent au sujet de l'insensibilité constante de ces audiences et quel progrès pouvons-nous espérer?
(1645)
    En fait, j'ai communiqué avec le Centre de la politique concernant les victimes, qui est responsable des paiements. On m'a informée qu'il va mener un examen, puisqu'il existe maintenant depuis près de cinq ans. Nous attendons les résultats de cet examen. Bien sûr, nous avons établi des voies de communication avec ce centre pour discuter de tout problème concernant les paiements et l'utilisation de ces fonds. Au bout du compte, nous voulons tous nous assurer que les victimes ont les moyens financiers nécessaires au bon moment pour assister aux audiences.
    Vous avez absolument raison lorsque vous parlez de la frustration des victimes quand les audiences sont annulées à la dernière minute. C'est quelque chose qui dépend bien sûr du délinquant. Vous avez absolument raison, et notre bureau va continuer à travailler avec les organismes compétents pour nous assurer de réduire autant que possible cette frustration et de faire entendre le point de vue des victimes sur les lacunes et les faiblesses du système et pour trouver des solutions et faire des recommandations.
    Je tiens à vous remercier de tout le bon travail que vous faites. Je sais que dans ce comité, nous vous appuyons et nous souhaitons que vous restiez en poste le temps qu'il faudra pour améliorer la situation des victimes.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Lemay, vous avez sept minutes.

[Français]

    J'ai écouté votre discours. On étudie ce projet de loi et on a aussi étudié le projet de loi S-6. Ces deux projets de loi portent sur des crimes comme le meurtre. Selon moi, il y a deux sortes de victimes. Je ferai attention au choix de mes mots, afin que les gens de l'autre côté ne sautent pas au plafond.
    Il y a certaines victimes, comme celles du cas Olson, dont vous avez parlé. À mon avis, ces victimes seront marquées à vie. On se sert de l'exemple d'Olson, mais j'ai dit il y a plusieurs années que jamais cet homme n'obtiendrait de libération conditionnelle. C'est comme Paul Bernardo, en Ontario. Toutefois, il y a d'autres types de meurtriers.
    Un peu plus tôt, mon collègue M. Rathgeber, ou M. Woodworth, a dit qu'il y avait 424 personnes coupables de meurtres multiples. Personnellement, je m'inquiète d'autres meurtriers. Je donne un exemple. Ce peut être un père qui tue sa femme et ses deux enfants. Dans les prisons, on trouve pas mal plus de cas comme celui-là que comme celui d'Olson. Une chose m'inquiète dans ce projet de loi: on ne fait pas beaucoup de différence entre les deux. En fait, on n'en fait pas du tout.
    J'essaierai d'être diplomate et politiquement correct. Selon moi, il y a deux sortes de victimes. Le reste de la famille du père qui a tué sa femme et ses deux enfants vont aussi vivre avec cela. Ça prendra beaucoup de temps avant que la cicatrice ne se referme.
    J'ai à l'esprit l'exemple d'une cliente. Son mari, ses deux enfants et elle avaient fait un pacte de suicide. Tous les quatre devaient mourir, mais la dame a survécu. Elle a été accusée et condamnée pour les trois meurtres. Selon moi, la prison n'est pas un endroit pour elle. Elle aurait beaucoup plus besoin d'aide psychiatrique.
    Je sais que j'ai fait un long détour, mais croyez-vous que le pouvoir discrétionnaire prévu à l'article 745.51 permettra une telle possibilité? N'y aurait-il pas lieu d'augmenter ce pouvoir discrétionnaire, parce que, en vertu de l'article 745.51, le juge peut utiliser ce pouvoir, sinon la peine serait de 25 ans au minimum?
    Peut-être que l'on devrait évaluer si, en vertu de l'article 745.2, on ne devrait pas donner plus de pouvoir discrétionnaire au juge. Je suis favorable à ce qu'un criminel purge une sentence de plus de 25 ans avant d'être admissible à une libération conditionnelle, selon le cas. Il faudrait que l'on accorde un certain pouvoir discrétionnaire au juge. Ne croyez-vous pas que cela pourrait être acceptable pour les victimes?
(1650)

[Traduction]

    Je comprends ce que vous essayez de dire avec tant de délicatesse, et je pense que quiconque a subi une perte en raison d'un meurtre sera marqué à vie. Les familles dont vous parlez le seront aussi.
    Je pense que ce que vous essayez de dire, c'est que chaque cas est entouré de circonstances particulières qui doivent être prises en considération au moment de rendre une décision. Je pense que la plupart des victimes seraient prêtes à reconnaître que les mêmes trois critères — auxquels vous faites allusion, si j'ai bien compris — s'appliqueraient également en vertu de ce projet de loi, de sorte que le juge aurait ce pouvoir discrétionnaire et serait tenu de prendre en considération le caractère du délinquant, la nature et les circonstances de l'infraction, et toute recommandation formulée par le juré. Ces mêmes critères sont également prévus dans le projet de loi C-48.
    Je pense que nous reconnaissons tous que les circonstances, les faits et les questions entourant chaque cas sont différents et qu'il appartient au juge d'exercer sa discrétion dans l'application de ces critères, comme je le disais. Mais en ce qui concerne l'effet dévastateur sur les familles, je répondrai que chaque victime a ses besoins uniques et qu'il faut répondre à ces besoins. Je ne prétendrai pas déterminer moi-même quels sont ces besoins; c'est à la victime de le dire. Ce que je peux vous dire, c'est qu'elle souhaite avoir des options.
    Je pense que le projet de loi a été présenté pour répondre à ce très petit nombre de cas où les chances d'une réhabilitation sont vraiment minimes, et il éviterait aux victimes d'avoir à vivre cela... Comme je l'ai dit, il n'y a pas que le jour, ou les deux jours de l'audience; il y a tout le traumatisme qui précède: va-t-il présenter une demande? Ne va-t-il pas présenter une demande? Il le fait. L'audience aura lieu tel jour. Je dois y assister et revivre le drame.
    En réponse à votre question, je pense que le projet de loi permet d'appliquer les mêmes critères de manière discrétionnaire.

[Français]

    Comprenez-moi. Sincèrement, madame O'Sullivan, j'aime mieux que les victimes aient plus d'information que pas assez d'information. J'aime mieux qu'on les avise que le criminel a fait une demande de libération et que sa demande a été rejetée plutôt qu'ils apprennent soudainement qu'il a été remis en liberté. Hélas, cela arrive. On parle de meurtre, mais dans des cas de vol par infraction, par exemple, on apprend soudainement que l'homme qui est condamné à 30 mois de prison est remis en liberté au bout de 3 mois, et personne n'est avisé.
    Je sais que ce n'est peut-être pas le temps d'en parler alors qu'on parle du projet de loi C-48, mais je pense qu'il y a un travail à faire en ce qui a trait à l'information aux victimes. Est-ce que trop d'information amène plus de victimisation? Est-ce que moins d'information amène plus de victimisation? On apprend tout d'un coup que la personne est remise en liberté et ça explose. Je suis partagé.

[Traduction]

    Je dois dire que je suis totalement d'accord avec vous. Nous devons mieux enchâsser les droits des victimes en ce qui concerne l'accès à l'information. Nous convenons pleinement que les victimes doivent avoir davantage de renseignements, et ce, plus rapidement. Nous respectons assurément la confidentialité. En fait, le bureau a publié un rapport portant sur 13 recommandations destinées à l'ARC qui, nous l'espérons, permettront de régler certains problèmes liés à la confidentialité. Nous attendons avec impatience de les présenter à ce comité.
    Vous avez raison. Les victimes ont besoin d'obtenir des renseignements, et cette information doit être fournie au moment opportun. Les victimes doivent jouer un rôle et contribuer à ce processus. On doit leur accorder de l'importance.
    Merci.
    Monsieur Comartin, vous avez sept minutes.
    Je n'ai pas de question, monsieur le président. Merci.
    Alors nous allons passer à M. Dechert. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame O'Sullivan, d'être venue ici aujourd'hui. Merci du bon travail que vous faites pour représenter les victimes.
    Tout comme vous, je ne veux pas donner à Clifford Olson plus de publicité qu'il n'en mérite. Toutefois, un certain nombre de familles de ses victimes ont pris la parole lors de son audience de libération conditionnelle, à laquelle vous avez participé, et qui portait sur le projet de loi S-6, que nous avons examiné il y a une semaine, et sur le projet de loi C-48. Je pense qu'on devrait rapporter ce que ces gens ont dit.
    Je lirai un extrait d'un article qui a été affiché sur le site Web de la CBC le 1er décembre, intitulé « Les familles des victimes d'Olson veulent un resserrement des lois régissant la libération conditionnelle ».
Le gouvernement fédéral comme les familles des victimes de Clifford Olson affirment que le processus dans le cadre duquel des tueurs en série peuvent obtenir une libération conditionnelle doit changer.
Les détenus comme Olson ont le droit de demander une audience de libération conditionnelle tous les deux ans après avoir purgé la plus grande partie de leur peine, mais les familles de leurs victimes doivent refaire le processus et présenter de nouveau leurs arguments qui expliquent pourquoi ils s'opposent à toute libération conditionnelle.
« Oh, c'est très difficile », a affirmé Raymond King, dont le fils a été tué par Olson, après l'audience mardi. « Chaque fois que j'entends son nom, je revis tout ce qui s'est passé. J'ai dû venir de loin pour tout ça... c'est très difficile. »
Sharon Rosenfeldt, la mère d'un autre garçon assassiné par Olson, a déclaré qu'aucune famille ne devrait avoir à revivre tout ça chaque deux ans.
S'ils peuvent adopter une loi pour éviter aux familles d'avoir à revivre toute cette douleur tous les deux ans, ce serait vraiment bien.
    Michael Manning s'est fait l'écho de ces propos. Il est le père d'une autre fille qui a été tuée par Olson.
« Des gens comme lui, des auteurs de meurtres multiples, ne pourront pas avoir une audience aux deux ans », a déclaré Rosenfeldt.
Michael Manning, dont la fille a été tuée par Olson, est venu à l'audience de mardi pour appuyer les autres familles et la loi proposée. « S'ils peuvent adopter une loi pour éviter aux familles d'avoir à revivre toute cette douleur tous les deux ans, ce serait vraiment bien. »
    Je pense qu'il s'agit de citations importantes que je devais lire à haute voix.
    Il y a des gens dans cette pièce et d'autres qui représentent les avocats de la défense qui diraient que vous n'avez pas à vous inquiéter d'individus comme Clifford Olson parce qu'il ne sera jamais libéré; il n'obtiendra jamais sa libération, alors il ne victimisera pas à nouveau les familles de ses victimes.
    Mais je pense qu'il faut savoir ce qu'il a dit. Voilà ce qu'a dit Clifford Olson mardi:
Je suis ici parce que j'ai le droit d'y être. Je ne demande pas à la commission qu'on m'octroie ma libération conditionnelle, parce que je sais que ma demande sera rejetée.
    Il a fait venir les familles des victimes de partout au Canada à son audience de libération conditionnelle pour qu'elles revivent leur douleur, tout simplement parce qu'il avait le droit de le faire.
    L'article souligne qu'il aura ce même droit dans deux ans. Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
(1655)
    Je pense que vous avez présenté la perspective des victimes. À leur avis, cette loi les aidera parce qu'ils n'auront pas besoin de prendre part à ce genre d'audience de libération conditionnelle. Encore une fois, comme je l'ai dit dans mon témoignage, on parle d'un petit groupe d'auteurs de meurtres multiples.
    Ils reconnaissent aussi qu'il existe des circonstances ou des faits particuliers, que le juge a toujours un pouvoir discrétionnaire en fonction des mêmes critères, qui sont énoncés dans l'article 745.
    Merci.
    Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'entendre le précédent témoignage, présenté par un représentant de la Criminal Lawyers' Association, mais il a invité les Canadiens à faire preuve de compassion. Voilà pourquoi nous devons donner le droit aux meurtriers, aux auteurs de meurtres multiples, aux gens qui ont commis des meurtres au premier degré, même s'il s'agit de Clifford Olson, de présenter une demande de libération conditionnelle après seulement 15 ans.
    À mon avis, nous avons aussi le droit et nous sommes tenus de...
    Quelqu'un invoque le Règlement.
    Monsieur Comartin.
    Ce n'est pas ce qu'a dit M. Di Luca. Il a affirmé très clairement que les auteurs de meurtres multiples ne peuvent pas invoquer la disposition de la dernière chance. Si M. Dechert veut fournir des faits et relater un témoignage que nous avons entendu, soit celui de M. Di Luca, il devrait au moins le faire de façon exacte afin que Mme O'Sullivan puisse réagir aux données exactes fournies par M. Di Luca, et non pas à celles qui viennent d'être inventées par M. Dechert.
    Je suis désolé, monsieur Comartin, mais ce n'est pas un rappel au Règlement. Comme vous le savez, c'est un point de discussion. Les membres de ce comité souvent...
    C'est un rappel au Règlement si...
    ... interprètent les témoignages différemment. Vous connaissez les règles.
    Je connais les règles. Vous ne les appliquez pas.
    À la Chambre, il y a des règles régissant le débat et d'autres qui portent sur les questions de procédure. Dans ce cas-ci, M. Dechert est en droit d'avoir une opinion sur le témoignage qui a été fait. Vous avez votre propre opinion. Vous n'avez pas saisi la chance de poser des questions au témoin.
    Je suis désolé, mais ce n'est pas un rappel au Règlement.
    En tant que président, vous êtes chargé de veiller à ce qu'on ne donne pas au témoin des faits trompeurs, et ces données fournies par M. Dechert sont trompeuses. Vous êtes responsable, monsieur le président, de protéger le témoin contre ce genre d'énoncé.
    D'abord, je ne suis pas chargé de protéger le témoin contre des énoncés, quels qu'ils soient. M. Dechert a le droit de poser les questions qu'il désire. Ce n'est donc pas un rappel au Règlement.
    Monsieur Dechert.
    Merci, monsieur le président.
    Tous ceux qui écoutent l'enregistrement sonore de la séance peuvent vérifier le compte rendu. Ils pourront regarder la transcription en temps voulu, probablement dans les 24 ou 48 heures. J'encourage tous les auditeurs à le faire, et M. Comartin peut le faire aussi.
    J'ai entendu cet homme dire... voici mon argument. Il affirmait que la libération anticipée d'un meurtrier, qu'il ait commis un meurtre ou plusieurs et qu'il soit relâché après 25 ans ou non, ce que stipule la loi actuelle... Nous avons ces lois au Canada parce que nous avons de la compassion pour les meurtriers.
    J'espère que M. Comartin écoute, parce qu'il ne semble pas du tout saisir, et les députés du Bloc non plus: certains députés libéraux le comprennent et d'autres, non, mais là où je voulais en venir et ce dont on parle de ce côté-ci de la table, c'est la compassion à l'égard des familles, des amis et des collectivités des victimes. À mon avis, ils sont aussi importants. Pour chaque meurtrier en détention, qui peut être incarcéré pendant 25 ans ou plus pour chacune des vies qu'il a enlevées, il y a beaucoup plus de victimes.
    Prenons Russell Williams — je déteste mentionner son nom. Il a traumatisé toute une collectivité. Dans 25 ans, il aura droit à une audience de libération conditionnelle tous les deux ans, et l'ensemble de la collectivité devra revivre ces meurtres affreux. Voilà de quoi nous parlons.
    Nous ne ciblons pas une seule personne; nous visons un groupe. Nous nous concentrons aussi sur la vision qu'a tout le monde au pays de l'intégrité du système de justice pénale. Quand nos tribunaux infligent une peine d'emprisonnement à perpétuité, cela signifie justement à perpétuité. Ils ne le comprennent pas, les avocats de la défense non plus. Ils reviennent constamment à cette question de la compassion pour cette personne qui est en prison car elle s'est emparée de la vie d'une ou de plusieurs personnes, des gens qui avaient des familles, des amis et des collectivités.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Merci.
(1700)
    Comme je l'ai dit dans mon témoignage, nous estimons que ce projet de loi répond à deux préoccupations précises soulevées par les victimes: la nécessité de rendre des comptes pour chaque vie perdue, de même que l'anxiété et la douleur que vivent les victimes lorsqu'on accorde à un délinquant une audience de libération conditionnelle. Ce projet de loi contribuera à améliorer ces deux aspects de la loi.
    Si vous me permettez, la remarque la plus percutante que j'ai entendue a été formulée par une mère qui a perdu son fils, dont l'ami a aussi été assassiné. Elle a dit: « Le droit le plus élémentaire, c'est le droit à la vie. » Lorsqu'un individu s'empare de ce droit, il le retire non pas à une personne mais à plusieurs, si bien qu'il faut ressentir aussi de la compassion pour les familles.
    Merci.
    Madame Neville, vous avez cinq minutes.
    Je ne sais pas si j'utiliserai mes cinq minutes, mais j'aimerais poser une question. Je ne suis pas un membre régulier de ce comité, et je ne vous ai jamais rencontrée auparavant. Je vous écoute parler au nom des victimes. J'ai cru comprendre que récemment, une audience de libération conditionnelle a été tenue et que nombre des familles des victimes étaient présentes. Comment recueillez-vous de l'information auprès des victimes pour pouvoir faire un exposé ici ou parler en leur nom? Est-ce qu'elles vous sollicitent? Effectuez-vous des sondages? Comment fonctionnez-vous?
    Nous employons divers moyens, mais vous avez soulevé un aspect que nous cherchons à élargir. Nous parlons directement aux victimes, aux victimes qui ont vécu un deuil. Nous parlons aussi avec les organisations nationales pour les victimes comme, par exemple, le Centre canadien de ressources pour les victimes de crimes et Victimes de violence.
    Je ne suis pas en poste depuis très longtemps, alors j'en suis encore à établir les fondements du bureau. Vous le savez peut-être, mais il a été créé il y a environ trois ans. Élargir le cadre national de consultation et de dialogue figure au nombre de nos priorités. Nous avons entamé des travaux à ce titre. J'ai rencontré personnellement les représentants de différents organismes et groupes de défense des droits des victimes à l'échelle du pays. Nous allons aussi investir de multiples façons pour élargir ces fondements.
    Donc lorsque vous venez témoigner devant un comité comme celui-ci — et je sais que cela ne se produit pas tous les jours — pour parler d'une loi en particulier, comment recueillez-vous votre information?
    Nous discutons de différentes questions avec les groupes de victimes. Comme les membres du comité le savent sans doute, j'ai reçu la convocation à comparaître devant ce comité à la fin de la journée lundi ou mardi...
    L'hon. Anita Neville: Ce n'est pas beaucoup de temps.
    Mme Susan O'Sullivan: .... j'ai donc eu très peu de temps. J'ai consulté autant de personnes que je pouvais avant de venir ici, et j'ai aussi passé en revue les travaux qui ont été faits et les échanges précédents, surtout les travaux préparatoires dans le cadre de l'étude du projet de loi S-6. Il s'agissait de discuter avec des organisations nationales et des gens comme Sharon Rosenfeldt, Heidi Illingworth et Priscilla de Villiers.
    Voici ma dernière question. Je connais certaines des personnes que vous évoquez. Consultez-vous toujours les mêmes personnes par rapport à des questions différentes, ou discutez-vous avec un groupe plus vaste?
(1705)
    Vous venez d'évoquer l'une de nos priorités. Je vous remercie de poser cette question parce que l'une des choses que veut faire ce bureau, et je répète qu'il vient d'être créé, c'est de travailler à cette priorité. Nous avons commencé nos travaux de sensibilisation et de sollicitation pour trouver des organisations nationales, provinciales et territoriales, des intervenants clés et des ONG dans les provinces et les territoires afin de commencer à élargir le cadre de discussion et de consultation pour pouvoir représenter un plus grand nombre de personnes la prochaine fois que nous témoignerons devant des comités.
    Merci.
    Si vous me le permettez, j'utiliserai le reste du temps.
    Le président: Oui, monsieur Lee. Il vous reste deux minutes.
    M. Derek Lee: Certainement.
    Dans vos remarques, madame O'Sullivan, vous faites allusion à la sécurité. Je pense avoir bien compris. Je pense que vous avez insinuez dans vos remarques que la sécurité n'est pas assurée adéquatement en cas de libération conditionnelle de meurtriers condamnés.
    Pourrais-je vous demander davantage de précisions? Je ne suis pas certaine de comprendre la question que vous me posez.
    J'ai cru comprendre que dans vos remarques, vous avez affirmé que l'adoption de cet amendement accroîtrait la sécurité.
    Sinon...
    La sécurité publique?
    La sécurité publique.
    Est-ce que c'était dans mon exposé liminaire ou dans les remarques que je viens de formuler? À quoi faites-vous allusion?
    Cette mention se trouve environ aux deux tiers de votre exposé liminaire.
    Ne vous en faites pas. S'il ne s'agissait pas d'un élément essentiel de vos remarques et de votre mémoire, c'est correct. J'étais seulement curieux. On semble dire que la sécurité publique s'en trouverait améliorée, et donc, qu'elle ne doit pas être bien assurée à l'heure actuelle en vertu de la loi qui est en place, que nous nous trouvons donc dans une situation qui n'est pas aussi sûre qu'elle pourrait l'être avec l'adoption de ce projet de loi. Mais si ce n'était pas votre intention d'affirmer une telle chose, c'est correct. Peut-être ai-je mal interprété vos propos.
    Ce à quoi nous faisions allusion, c'est que ce projet de loi permettrait aux victimes d'éviter de revivre toute la douleur causée par le processus de remise en liberté sous condition dans le cas des délinquants qui sont le moins susceptibles d'être relâchés ou réinsérés dans la société. Elles n'auraient pas à passer par ce processus. De plus, il y a toute cette question de responsabilité: condamnation à perpétuité pour chaque vie enlevée.
    Merci.
    Monsieur Lemay.

[Français]

    En tout respect, madame O'Sullivan, je pense que M. Dechert aurait intérêt à revoir certains articles du Code criminel, parce qu'il aurait alors vu que M. Olson s'est adressé à un juge de la cour supérieure — the superior court — de l'endroit où les meurtres ont été commis.
    Aucune victime n'a témoigné. Il a le droit de faire une demande, mais il a surtout le droit qu'on refuse sa demande. C'est ce que la population devrait comprendre. Cet individu, je vais le répéter et je l'ai dit ouvertement, n'obtiendra jamais de libération conditionnelle. Je ne pense pas qu'un juge le moindrement éclairé... C'est pour ça qu'existe le pouvoir discrétionnaire judiciaire, et c'est pour ça que le Code criminel avait été amendé. C'est pour qu'un juge établisse les balises et préside la première étape. C'est ce que M. Dechert et son équipe ne comprennent pas. Le problème...

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Quelqu'un invoque le Règlement.
    Je voulais être clair. Je pense que M. Lemay déforme les faits. Il a dit que M. Olson avait prononcé une déclaration devant un juge de la Cour supérieure du Québec. Ce n'est pas le cas. Il a fait cette déclaration, que j'ai lue, à la Commission nationale des libérations conditionnelles le mardi 30 novembre. J'ai la transcription ici, monsieur, si vous voulez que je...
    Monsieur Dechert, ce n'est pas un rappel au Règlement. Comme dans le cas de M. Comartin, il s'agit d'un point de discussion.
    Nous allons revenir à M. Lemay.

[Français]

    Il l'a dit à la Commission des libérations conditionnelles. Je pense que M. Dechert n'est jamais allé devant la Commission des libérations conditionnelles, car il saurait que son principal intérêt est la défense des victimes. C'est sa principale préoccupation.
    N'invoquez pas encore le Règlement, monsieur Dechert!
    Le débat porte sur la question suivante: comment fait-on pour protéger les victimes? On ne les informe pas. La meilleure façon est de ne pas les informer que M. Olson est allé devant la commission. Comme ça, ils ne seront pas traumatisés. Ah, mais non, il faut les informer! Le problème est là, et j'aimerais vous entendre à ce sujet, madame O'Sullivan.
     Comment fait-on pour préparer les victimes à une possible comparution d'un meurtrier récidiviste devant un juge ou devant la Commission des libérations conditionnelles, alors que tout le monde sait qu'il n'obtiendra pas une libération conditionnelle, même s'il veut faire une demande?
     C'est l'essence de cette question, l'information et la protection des victimes. À cet égard, préparez-vous quelque chose? Comment fait-on pour préparer ces victimes? Malheureusement pour certains conservateurs, d'autres vont aller devant la Commission des libérations conditionnelles ou les juges. S'est-on penché là-dessus? Envisagez-vous de le faire?
(1710)

[Traduction]

    Puis-je répondre à votre question en deux parties? D'abord, si ce projet de loi est adopté, les familles n'auront pas à comparaître devant la Commission des libérations conditionnelles si l'accusé reçoit des peines consécutives. Il s'agit là du premier enjeu. Ensuite, se présente le cas où il ne s'agit pas d'une peine consécutive et que la famille doit comparaître devant la commission. Notre bureau examine ces situations, et j'en ai notamment discuté avec la Commission des libérations conditionnelles et Service correctionnel Canada, à la fois avec leurs centres de services pour les victimes et leur centre de la politique concernant les victimes. Nous avons débattu de comment, car cela pose parfois problème, nous pourrions avoir une communication ouverte afin de nous assurer que nous tirons tous profit de nos connaissances et de nos expériences multiples pour veiller à ce que les victimes soient...
    Comment peut-on véritablement préparer quelqu'un? Comment peut-on préparer quelqu'un à faire face à la personne qui a tué un de ses proches? Je ne le sais pas. En fait, bon nombre des familles des victimes ont témoigné d'une véritable force et d'un engagement très vif parce qu'elles représentaient les gens qui n'ont plus voix au chapitre, les êtres chers qu'elles ont perdus.
    J'essaie de répondre avec beaucoup de respect à votre question. Vous nous posez des questions très difficiles quant à savoir comment nous pouvons appuyer... Vous avez ciblé un des plus grands besoins, soit celui d'obtenir des renseignements en temps opportun et de ne pas seulement parler de la procédure. De nouveau, je ne voudrais pas prendre trop de temps dans ma réponse, mais bon nombre des enjeux dont vous parlez ont été notés dans les recommandations que notre bureau a formulées. Nous avons hâte d'en parler davantage à l'avenir.
    Merci beaucoup d'avoir soulevé ces enjeux.
    Merci.
    Passons maintenant au tour de M. Norlock. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier nos témoins d'être venus.
    J'aimerais revenir à un point que vous avez soulevé. J'aimerais remercier le député, M. Lemay, d'avoir été aussi sensible, car je suis moi-même une personne très sensible.
    Vous avez dit que le droit le plus fondamental est celui du droit à la vie. Ai-je bien compris qu'une des raisons pour lesquelles vous êtes ombudsman pour les victimes, c'est que vous sentez l'obligation de représenter les gens qui ne peuvent plus se défendre — soit les personnes décédées —, les gens qui ne peuvent plus jouir de ce droit? Ce droit leur a été enlevé. Est-ce exact?
    D'après vous, comment est-ce que le dossier va évoluer à mesure que vous remplirez vos fonctions et votre rôle d'ombudsman aux victimes?
    Je vous dirais ceci. Je ne peux pas remplacer la voix des parents, des soeurs ou des mères qui ont perdu un proche. Tout ce que je peux faire, c'est de me faire leur porte-parole. Il s'agit de leur histoire. Il s'agit de leur douleur, de leur peine. Je dois le dire. Les victimes comprennent que dans bon nombre des contrevenants seront libérés. Elles ne veulent pas qu'ils récidivent. Elles veulent qu'ils puissent jouir du soutien dont ils ont besoin. C'est là que l'on parle de la population des contrevenants.
    Comme je l'ai mentionné au début de mon témoignage, un des plus grands rôles du bureau, c'est de donner à ces victimes voix au chapitre. Je sais que ce comité et bon nombre d'autres comités ont eu le privilège d'entendre des témoins qui ont perdu un être cher et des porte-parole nationaux, qui ont pu raconter leurs histoires et parler du besoin de changer le système judiciaire criminel.
    Lorsqu'on parle de droits, un des premiers enjeux, c'est que ces personnes ont plus de droits. Dans bon nombre de cas, il ne s'agit pas d'un choix. Il faut s'assurer que leurs droits sont mis sur un pied d'égalité. Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle.
    J'aimerais revenir aux observations qu'a faites M. Lemay. Comment est-ce qu'on peut leur fournir ces renseignements? Comment est-ce qu'on peut faire valoir leur voix pour qu'elles exercent une certaine influence?
    J'aimerais également revenir aux autres observations qui ont été faites quant à la façon dont on pourrait élargir le cadre national. Notre bureau s'engage pleinement dans cette voie. Nous avons été fort actifs dans ce dossier afin de pouvoir amener les meilleures renseignements possibles à cette table.
    Merci.
(1715)
    J'aimerais faire un bref rappel. Nous savons que vous avez été policière pendant 30 ans. Cela a-t-il commencé pendant les années 1970? Je me souviens que les services aux victimes n'existaient pas, ou du moins j'en ignorais l'existence. Quand j'ai pris ma retraite, j'ai constaté que les mentalités avaient beaucoup changé.
    Vous avez dit qu'il faudrait que toutes les pattes du tabouret soient égales. Les témoins que nous convoquons au comité donnent une idée des gens auxquels nous pensons le plus ou bien des gens à qui nous voulons communiquer notre message. Dans certains domaines, et particulièrement dans celui sur lequel porte le projet de loi que nous avons présenté, nous voyons défiler une série de témoins qui se soucient beaucoup des droits des accusés. Quant à nous, nous tâchons d'inviter les victimes et ceux qui ont été la cible de criminels à faire entendre leur voix. J'imagine qu'il faut trouver un équilibre, et j'espère que nous y parviendrons.
    Si vous avez des témoins à proposer à notre comité, n'hésitez pas à le faire. J'imagine que cela fait partie de votre rôle en tant qu'ombudsman, de recommander des témoins.
    Quand je vais parler aux jeunes dans les écoles, ils font toujours valoir d'abord leurs droits. Je leur réponds que leurs droits découlent de leurs responsabilités de citoyens. Je leur dit qu'avant d'avoir des droits, ils ont des responsabilités.
    Si vous étiez invité à prendre la parole devant un groupe de jeunes, tiendriez-vous des propos semblables? Comment décririez-vous votre rôle et vos fonctions les plus importantes pour expliquer ce que vous faites et ce que vous représentez?
    J'ai décrit tout à l'heure les priorités et le mandat de mon bureau. M. Comartin m'a parlé de ce qui se fait au Royaume-Uni lors d'une séance de notre comité. C'est intéressant parce qu'il me semble que les Britanniques ont une longueur d'avance sur nous en matière de respect des droits des victimes. Ils ne se demandent plus si les victimes ont des droits. Ils discutent des moyens à prendre pour que ces droits soient respectés... Voilà ce dont nous devrions parler au Canada.
    Que recommanderiez-vous à notre comité ou à nos attachés de recherche comme moyen d'y parvenir?
    Rapidement, s'il vous plaît.
    Je pourrais communiquer volontiers des suggestions.
    Merci.
    Il nous reste une dizaine de minutes.
    Monsieur Comartin, comme vous n'avez pas encore posé de question, je suis prêt à vous permettre de le faire, si vous le souhaitez. Vous n'en avez pas?
    Quelqu'un d'autre veut poser une question?
    Bon alors, je vous remercie, madame O'Sullivan, d'avoir comparu de nouveau devant notre comité. Je suis sûr que nous vous reverrons dans l'avenir.
    La séance est levée.
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