Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne tient aujourd'hui, le mercredi 2 février 2011, sa 45e séance.
L'ordre du jour se trouve devant vous. Nous poursuivons aujourd'hui l'étude du projet de loi .
Pour nous prêter main-forte, nous accueillons de nouveau parmi nous le ministre de la Justice et procureur général du Canada, l'honorable Rob Nicholson ainsi que des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice. Il s'agit de Mme Carole Morency, avocate générale intérimaire, Section de la politique en matière de droit pénal et de M. Donald Piragoff, sous-ministre adjoint principal, Secteur des politiques.
Soyez tous les trois bienvenus parmi nous.
Une fois que le ministre nous aura quittés, nous accueillerons aussi M. Matthias Villetorte, avocat, Section de la politique en matière de droit pénal.
Je tiens à rappeler à tous les membres du comité de faire parvenir toute proposition d'amendements à la greffière. Nous espérons passer à l'étude article par article pendant la deuxième moitié de la prochaine réunion, lundi prochain. Ce travail se poursuivra peut-être à la réunion suivante, qui aura lieu mercredi. Quoiqu'il arrive, il nous serait très utile, tant à la greffière qu'aux membres du comité d'avoir ces amendements en main.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis heureux de m'adresser aux membres du comité au début de leur examen du projet de loi , la Loi sur la protection des enfants contre les prédateurs sexuels.
[Traduction]
L'objectif que nous poursuivons grâce à ce projet de loi est double. D'abord, il veut faire en sorte que toutes les infractions sexuelles commises contre des enfants soient traitées avec rigueur et de manière cohérente aux fins de la détermination des peines. En second lieu, il propose des réformes qui favoriseront la prévention des infractions sexuelles commises à l'égard des enfants.
Les réformes portant sur la détermination de la peine inscrite dans le projet de loi visent l'imposition de peines obligatoires dans le cas de toutes les infractions sexuelles dont la victime est un enfant. Tout sévice sexuel commis à l'égard d'un enfant est une infraction grave et doit être d'emblée dénoncé. Le gouvernement estime que les délinquants sexuels ayant agressé des enfants doivent faire l'objet de peines reflétant la gravité de leurs crimes et le danger qu'ils représentent pour nos enfants.
Les membres du comité n'ignorent sans doute pas que les agressions sexuelles commises à l'endroit des enfants peuvent faire l'objet d'une inculpation en vertu d'infractions portant spécifiquement sur les enfants ou en vertu des infractions d'agressions sexuelles générales s'appliquant à la fois aux adultes et aux enfants qui en sont victimes. Ces deux catégories d'infractions visent une inconduite semblable mais n'imposent pas les mêmes peines lorsque la victime est un enfant.
Ainsi par exemple, certaines des infractions sexuelles portant spécifiquement sur les enfants s'accompagnent de peines minimales obligatoires, ce qui n'est le cas dans aucune infraction sexuelle de nature générale. En outre, les variations dans la détermination de la peine entraînent souvent des condamnations à l'emprisonnement avec sursis — la détention à domicile, comme on l'appelle souvent — dans le cas de certaines infractions mais pas d'autres.
Il résulte de ces écarts de traitement que le système de justice ne traite pas avec autant de rigueur toutes les agressions dont sont victimes les enfants. En fait, étant donné que 80 p. 100 des incidents des sévices sexuels rapportés par la police en 2008 ont fait l'objet d'inculpations en vertu de l'infraction d'agressions sexuelles générale telle qu'elle figure à l'article 271 du Code criminel, cela signifie que la très grande majorité des incidents d'abus sexuels à l'égard des enfants ne s'accompagne pas d'une peine minimale obligatoire. Ce projet de loi modifie justement la donne.
À l'heure actuelle, 12 infractions sexuelles portant spécifiquement sur les enfants imposent des peines obligatoires. Des amendements apportés à ces infractions en 2005 ont eu pour effet d'imposer des peines obligatoires ajoutées à certaines des infractions portant spécifiquement sur les enfants et à aucune des dispositions relatives aux agressions sexuelles de nature générale. De telles modifications ont donné lieu à une démarche bien aléatoire et incohérente par rapport à des peines obligatoires, à tel point qu'elles ne reflètent pas de manière satisfaisante la gravité des crimes commis.
Pour mettre fin à ces incohérences et faire en sorte que les prédateurs sexuels soient condamnés à des peines reflétant l'extrême gravité de leurs crimes, le projet de loi propose d'ajouter sept nouvelles peines obligatoires à des infractions n'en imposant pas à l'heure actuelle. Trois d'entre elles portent spécifiquement sur les enfants: les dispositions relatives à la bestialité, au fait de leurrer un enfant au moyen d'Internet et à l'exhibitionnisme, dans le cas d'un enfant de moins de 16 ans. Les quatre autres sont des infractions sexuelles de nature générale, et les peines obligatoires s'appliqueront dans le cas d'une victime de moins de 16 ans, qui correspond à l'âge du consentement.
Il s'agit de l'article 155 relatif à l'inceste; de l'article 271 portant sur l'agression sexuelle; de l'article 272 relatif à une agression sexuelle armée, s'accompagnant de menaces ou entraînant des légions corporelles et enfin, de l'article 273 portant sur l'agression sexuelle grave.
Le projet de loi propose des pénalités obligatoires plus lourdes dans le cas de sept infractions sexuelles portant spécifiquement sur les enfants et qui s'accompagnent déjà de peines obligatoires. Grâce à de tels amendements, la peine obligatoire sera non seulement proportionnelle à la gravité du crime en question mais aussi cohérente par rapport aux autres infractions s'accompagnant de peines obligatoires.
Ainsi par exemple, le projet de loi augmenterait la peine obligatoire actuelle inscrite à l'article 151 sous la rubrique Contacts sexuels, qui s'accompagne d'un maximum de 10 ans lors de la mise en accusation, la faisant passer d'un minimum de 45 jours obligatoires à un an obligatoire. De cette manière, la peine obligatoire plus lourde serait cohérente par rapport à la nouvelle peine obligatoire proposée à l'article 271, la disposition d'agressions sexuelles de nature générale.
Le projet de loi cherche également à prévenir la perpétration d'agressions sexuelles à l'égard d'un enfant. Il le fait en proposant la création de deux nouvelles infractions et en exigeant des tribunaux qu'ils envisagent d'imposer deux nouvelles conditions précises qui chercheraient à empêcher qu'un suspect ou qu'un délinquant sexuel déjà condamné ne s'adonne à un comportement qui faciliterait la perpétration de leurs infractions sexuelles.
La première nouvelle infraction proposée dans ce projet de loi interdirait à quiconque de rendre accessible, distribuer ou vendre du matériel sexuellement explicite à une jeune personne en vue de faciliter la perpétration à son égard d'une infraction. Les agresseurs sexuels d'enfants fournissent souvent ce genre de matériel à leurs victimes envisagées afin d'abaisser leurs inhibitions sexuelles; autrement dit, ils le font pour conditionner leur victime.
Aujourd'hui, si ce matériel constitue de la pornographie juvénile, quel que soit le but envisagé, il fait déjà l'objet d'une interdiction. Le projet de loi ne modifie nullement cela. Toutefois, lorsque le matériel n'est pas de la pornographie juvénile — autrement dit, lorsqu'il décrit des activités sexuelles auxquelles s'adonnent des adultes, selon la définition de la nouvelle infraction — le Code criminel ne peut présentement intervenir à moins que le matériel soit conforme à la définition très exigeante de matériel obscène en vertu de l'article 163.
Le projet de loi modifiera cela. Il propose d'interdire de fournir à une jeune personne du matériel sexuellement explicite en vue de faciliter la perpétration d'une infraction à son égard. Cette nouvelle infraction s'accompagne d'une peine semblable à celle imposée dans le cas des infractions relatives à l'obscénité et à la corruption des moeurs, telles que visées à l'article 163.
Le projet de loi cherche également à interdire à quiconque d'utiliser des moyens de télécommunications pour convenir avec un tiers de commettre une infraction d'ordre sexuel contre un enfant. De plus, le projet de loi propose d'autres amendements corrélatifs dont, par exemple, l'ajout des deux infractions proposées au paragraphe 7(4.1) du Code criminel, qui attribue aux tribunaux canadiens une juridiction extraterritoriale leur permettant de poursuivre des Canadiens s'adonnant au tourisme sexuel. Ces deux nouvelles dispositions s'accompagneraient de peines obligatoires d'emprisonnement.
En dernier lieu, le projet de loi propose d'élargir les pouvoirs des tribunaux afin qu'ils interdisent à un agresseur sexuel d'enfant reconnu coupable en vertu de l'article 161 du Code criminel et à une personne suspecte d'être un agresseur sexuel d'enfant en vertu de l'article 810.1 d'avoir un comportement pouvant faciliter la perpétration d'une ou de plus d'une des infractions sexuelles ou d'enlèvement énumérées. Premièrement, on élargirait la liste des infractions de telle manière à inclure quatre crimes liés à la prostitution dans le cas où la victime serait un enfant; en second lieu, les tribunaux recevraient la directive précise d'envisager qu'il soit interdit au délinquant d'avoir tout accès sans surveillance à une jeune personne et tout accès sans surveillance à Internet.
L'imposition de telles conditions aiderait à empêcher le délinquant sexuel d'être dans une situation lui donnant accès à un enfant et la possibilité de l'agresser sexuellement et d'avoir un accès sans entrave à des moyens comme Internet et d'autres technologies, lesquelles jouent un rôle tellement important lorsqu'il s'agit de commettre des infractions liées à la pornographie juvénile ou à l'exploitation sexuelle des enfants.
Il s'agit là des éléments essentiels du projet de loi. Tout comme tous les Canadiens respectueux des lois, le gouvernement sait fort bien que l'exploitation sexuelle des enfants cause un préjudice irréparable aux membres les plus jeunes et les plus vulnérables de notre société. Le message contenu dans le projet de loi est clair et net: les dangereux prédateurs sexuels qui commettent des sévices contre les enfants iront dorénavant en prison.
Je vous remercie beaucoup.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie de nous avoir donné un aperçu du projet de loi.
Monsieur le ministre, il est curieux d'observer qu'avant de vous entendre, nous avons fait l'audition d'autres témoins, dont M. Rushfeldt, qui nous a présenté un mémoire très intéressant. Je me suis aussi entretenu avec Nathan Cooper de ce même groupe, au sujet de la définition de la pornographie juvénile telle que visée à l'article 163.1. J'aimerais attirer votre attention là-dessus.
Justement, bien qu'il soit en général favorable au projet de loi, M. Cooper estime que la définition devrait refléter de manière plus précise ce qui est représenté et est utilisé ou fait l'objet d'un trafic quelconque; j'entends par là pour revenir aux termes utilisés par les témoins que la définition corresponde davantage au « matériel découlant de l'exploitation sexuelle des enfants ». Les images correspondant à la définition dépeignent des sévices sexuels. Il s'agit de viols, d'agressions. Or il s'agit là des crimes les plus odieux, ce qui m'amène à poser la question suivante.
J'ignore si votre représentante ici présente est avocate. Je ne sais pas non plus si elle connaît ces dispositions précises du code. Elle a toutefois affirmé que la définition de la pornographie juvénile inscrite à l'article 163.1 est l'une des plus vastes au monde et ne laisse aucun doute que des crimes odieux sont illégaux.
Je suis toutefois frappé par les témoignages de ceux qui travaillent sur le terrain dans ce domaine. Vous aussi devez certainement avoir un peu d'empathie pour eux. Là où je veux en venir, c'est que les images sont ce qui correspond à une définition plus rigoureuse que celle de la pornographie juvénile que l'on trouve à l'article 163. Si les crimes pour lesquels vous cherchez à alourdir ou à accélérer les peines sont très graves, leur gravité devrait être fidèlement reflétée.
Voilà pour ma première question. Je me demande donc si — peut-être pas dans ce projet de loi, qui ne convient peut-être pas — vous seriez disposé à modifier la définition, ou si vous vous rangez à l'avis de votre représentante à cet égard.
Monsieur le ministre, étant donné que vos réponses sont longues car vous êtes très éloquent, je vais ajouter une autre question.
Pourquoi n'avez-vous pas déposé ce projet de loi plus tôt? Il ne s'agit pas ici d'une nouvelle mouture d'un projet de loi précédent. Je me demande donc pourquoi il a fallu attendre si longtemps. Vous avez franchement insisté sur le fait que tout le monde a constamment entravé votre travail et que les libéraux commencent à peine à se familiariser avec le sujet et avez ajouté toutes sortes de sottises à l'autre endroit. Pourtant, cela fait cinq ans que je suis ici et je ne me souviens pas de ce projet de loi. J'aurais bien aimé le voir cependant.
Cela fait trois ou quatre ans que je discute avec Nathan Cooper bien que je parle en mon propre nom ici, mais quoi qu'il en soit, je n'ai pas entravé votre travail à chaque étape. Non, monsieur le ministre. Alors, pourquoi n'avez-vous pas présenté ce projet plus tôt? Aussi, seriez-vous disposé à cette...? J'aimerais savoir comment vous comparerez la définition de la pornographie juvénile à la définition du matériel découlant de l'exploitation sexuelle des enfants.
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Monsieur le ministre, gardez vos discours pour un autre public.
Si je vous posais ces questions, c'est parce que la question des sévices n'est pas inscrite à l'article 163.1. Je m'en remets cependant aux technocrates qui connaissent bien ce domaine.
J'aimerais maintenant vous poser des questions au sujet des remarques faites hier par l'inspecteur Naylor. Il m'a semblé être un responsable de l'application de la loi très franc et direct. Selon lui, nous pourrions toujours utiliser plus de moyens. Il était évidemment favorable au projet de loi. Il s'agit ici de l'utilisation des télécommunications en vue de communiquer avec un tiers pour convenir de commettre une infraction sexuelle, ce qui constitue un point très subtil de ce projet de loi. On nous a rappelé que le projet de loi , si je ne m'abuse, a été au Feuilleton jusqu'au moment où votre gouvernement l'a laissé mourir en décidant de suspendre les travaux de la Chambre, or il aurait accordé des pouvoirs d'enquête. Êtes-vous en mesure de me dire où nous en sommes à cet égard et si vous voulez...
Si nous pouvions tous exagérer un peu moins, je suppose... En fait, c'est un mea culpa de ma part.
Je vois bien que vous riez, car vous riez toujours, Bob, mais il n'empêche que nous tenons à ce que des choses se fassent. Le projet de loi dont nous sommes saisis est un bon texte de loi à adopter, tout comme le projet de loi C-46. Où est-il?
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Des pouvoirs d'enquête pour le 21
e siècle.
Je ne manquerai pas de dire au leader du gouvernement à la Chambre combien vous avez hâte de voir le projet de loi adopté. Nous en serions ravis.
Oui, j'ai eu des discussions avec les organismes d'application de la loi. Ils tiennent beaucoup à la mise à jour du Code criminel en ce qui concerne les pouvoirs d'enquête.
Comme je l'ai dit auparavant, monsieur le président, les criminels ne s'appellent plus au téléphone. Ils ont perdu l'habitude de s'envoyer des télégrammes. Les lois du pays doivent donc être mises à jour pour refléter l'état actuel de la technologie. Les projets de loi portant sur l'accès légal et les pouvoirs d'enquête sont donc une autre priorité de notre gouvernement.
Comme je l'ai dit, je ne manquerai pas de rapporter au leader du gouvernement à la Chambre combien certains membres du Parti libéral tiennent apparemment à voir le projet de loi adopté. Ne baissez pas les bras et adoptons ces projets de loi.
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Tout d'abord, ce n'est pas en 2006 que je suis arrivé au ministère de la Justice, c'était en 2007, il y a un peu plus de quatre ans maintenant.
J'ai eu connaissance de plusieurs rapports. On me dit parfois que les Américains ont des peines obligatoires très sévères dans ce domaine. Plusieurs pays du Commonwealth n'ont pas de peine obligatoire. Il s'agit ici d'une approche canadienne. Je pense qu'elle fonctionnera, monsieur Ménard.
J'espère que vous appuierez le projet de loi, parce que nous protégeons les personnes les plus vulnérables dans notre société. Je sais que certaines personnes — vous en faites partie — n'aiment pas les peines obligatoires. Mais je le répète: il faut faire passer un message clair. Le problème s'est considérablement aggravé ces dernières années.
C'est ce que me disent les organismes chargés de l'application de la loi. Selon eux, le nombre d'images a quadruplé depuis 2003, par exemple, et toutes représentent des enfants victimes d'abus et d'exploitation sur Internet. Il faut prendre des mesures pour lutter contre cela. Le problème ne s'améliore pas depuis quatre ou cinq ans et le projet de loi répond précisément à nos besoins.
J'aimerais que vous étudiez tout particulièrement les nouvelles infractions visant à prévenir ce type d'activité: deux personnes qui s'entendent pour mettre un enfant dans cette situation ou une personne qui donne à un enfant du matériel sexuellement explicite. Ce sont des infractions conçues pour empêcher l'exploitation sexuelle des enfants avant qu'elle n'aboutisse à sa conclusion inévitable.
Donc, intervenir en amont et moderniser la loi constitue, selon moi, précisément la direction à suivre. Le problème a beaucoup empiré ces dernières années et il nous faut une mesure législative de ce type pour y remédier.
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Merci, monsieur le président.
Et merci à vous, monsieur le ministre, de votre présence ici aujourd'hui.
Je voudrais revenir à M. Rushfeldt. Lors de sa comparution devant nous, il a indiqué que, il y a environ un an, son organisme avait envoyé un mémoire à votre ministère, mais n'avait jamais obtenu de réponse. Il représentait la Coalition de l'action pour la famille au Canada. Ils avaient soumis un mémoire à votre ministère, il y a environ un an, sans jamais obtenir de réponse.
Êtes-vous disposé à transmettre le mémoire au comité, afin que nous puissions en prendre connaissance? Quand M. Rushfeldt était ici, ce sont d'autres renseignements que nous lui avons demandés. Nous ne lui avons pas demandé le mémoire.
En ce qui concerne les renseignements qu'il nous a fournis, d'autant plus précieux que nous avions peu de temps à passer avec lui, il a indiqué que, malgré la formulation généralement acceptée — comme vous l'avez déjà indiqué, au niveau de l'ONU —, un État australien, New South Wales ou Queensland, avait effectivement adopté le type de formulation qu'il propose, soit le terme d'abus, dans une mesure législative.
Je lui ai demandé s'il y avait eu des contestations judiciaires et si cela s'était révélé plus efficace que la formulation actuelle de pornographie juvénile utilisée dans notre loi. Mais il n'a pas pu nous répondre.
Je me demandais si votre ministère s'était penché sur l'expérience de l'Australie.
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Merci du fond du coeur pour ce compliment.
D'après les informations que j'ai eues et qui restent les mêmes depuis plusieurs années... Dans ce domaine, je remonte à 1993, quand nous avons adopté le premier projet de loi sur le téléchargement de pornographie juvénile. Je me souviens avoir appris, lors des séances d'information, il y a 18 ans, que l'expression « pornographie juvénile » s'appliquait à toute une gamme d'activités exploitant les enfants. Mon opinion reste la même à ce sujet.
Dans les réunions que j'ai eues avec des ministres du G8, le terme de « pornographie juvénile » est fréquemment utilisé.
Le fait que vous souleviez la question m'intéresse. Autant que possible, nous nous efforçons de faciliter le transfert d'information entre pays. J'aime l'idée d'utiliser la même expression afin de nous encourager les uns les autres à obtenir de l'information sur les gens qui s'adonnent à ces activités. L'une des raisons pour lesquelles j'aimerais donc que le terme reste inchangé est que je préférerais ne pas compliquer les choses en changeant les définitions dont dispose le Canada. L'expression « pornographie juvénile » fonctionne, pour les raisons que j'ai évoquées et je recommanderais au gouvernement de continuer à l'utiliser.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie d'être ici aujourd'hui et d'avoir présenté ce projet de loi. Je peux vous dire que je reçois d'innombrables courriels et coups de téléphone de membres de ma circonscription, de victimes, de groupes de victimes et du grand public, me disant à quel point ils trouvent ce projet de loi important. À titre de député, je pense que c'est la chose qu'il importe le plus à faire si nous voulons protéger les enfants. J'aimerais donc vous remercier d'avoir présenté ce projet de loi.
J'ai été agréablement surpris et amusé d'entendre mon collègue de l'opposition, M. Murphy, parler de temps opportun et de son désir de procéder rapidement avec cette loi. Vous savez, lors de notre examen de tous les projets de loi contre la criminalité présentés par notre gouvernement, lui et ses collègues de la coalition de l'opposition ralentissent toujours notre démarche. Ils aiment débattre des titres abrégés des projets de loi. Ils veulent qu'ils soient plus précis, et ils sont prêts à passer des heures à débattre des titres abrégés des projets de loi. Ils aiment changer les virgules de place, de paragraphe à paragraphe, et y passent énormément de temps.
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Monsieur le président, si je peux demander que mes collègues d'en face soient indulgents, ils constateront la pertinence de mes propos par rapport au projet de loi que nous étudions aujourd'hui.
La dernière fois que nous nous sommes réunis, monsieur le ministre, nous avons entendu un certain nombre de témoins qui représentaient des victimes, et dans un cas, une victime nous a elle-même raconté son histoire difficile et nous a dit pourquoi le projet de loi est si important. Je lui ai demandé ce qu'elle pensait du moment où ce projet de loi a été présenté.
Dans notre pays, il y a eu au cours des derniers mois et dernières semaines d'incessantes suppositions sur l'éventualité d'un déclenchement d'élections au printemps, certainement pas par le gouvernement mais par d'autre partis de la Chambre des communes, et une élection dans un avenir rapproché semble préoccuper les gens assis en face. Si cette élection avait lieu... Et je peux vous dire que les gens de Mississauga me disent, me supplient de ne pas déclencher une élection, de continuer de travailler; de nous concentrer sur l'économie et sur la protection de nos familles et de nos collectivités. Je leur ai donc demandé ce qu'ils pensent de la possibilité d'une élection au printemps qui retarderait ce projet de loi.
Madame Campbell, qui est une victime et qui représente des enfants victimes d'exploitation sexuelle a dit:
Je suis d'accord, et pendant que nous sommes assis ici à discuter aujourd'hui, combien d'enfants sont torturés, violés? C'est donc urgent. Je vous encourage vraiment à, je l'espère... Permettez-nous de vous appuyer de toutes les façons possibles afin de sensibiliser le public. Nous sommes prêts à le faire.
Elle et M. Rushfeldt nous ont exhorté d'agir rapidement.
Je me demande si vous pouvez nous dire de quelle façon, à votre avis, nous devrions gérer ce projet de loi ainsi que la menace qu'il soit retardé en raison d'une élection non désirée.
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Un grand merci, monsieur Dechert. Merci de votre contribution au système de justice pénale de notre pays. Elle est certainement très appréciée.
Évidemment, je suis contre tout ce qui pourrait retarder ces projets de loi ou ralentir leur adoption. J'ai été franc avec les gens. Il y avait des gens, par exemple, pendant le congé de Noël qui me demandaient pourquoi le projet de loi visant à nous débarrasser de la disposition de la dernière chance n'était pas devenu loi dans ce pays. J'ai été obligé de leur dire. Si vous pouvez l'imaginer, je leur ai dit, entre autres, que les libéraux n'aimaient pas le titre. Mais comme je l'ai dit c'est ce avec quoi nous devons composer.
Je pense que la plupart des gens au courant du projet de loi comprennent les défis auxquels nous faisons face. Ce que je veux souligner à ce sujet, au sujet de tous ces projets de loi qui visent à mieux protéger les enfants, c'est qu'il s'agit d'un objectif qui en vaut la chandelle pour tous, qu'il s'agisse ou non d'un gouvernement minoritaire. Je le sais, on me l'a dit, qu'il s'agit d'un gouvernement minoritaire. Encore une fois, je dis toujours que ce n'est pas une excuse pour ne pas défendre les victimes ou les Canadiens respectueux des lois de ce pays.
Je demande donc au comité de faire tout ce qui est possible pour accélérer les choses.
C'est mieux pour le Canada; le Canada est un meilleur pays lorsque nous avons des lois qui protègent mieux les enfants. Les deux nouvelles infractions dont je parle, dans lesquelles vous avez deux adultes qui s'arrangent pour leurrer un enfant... Le Canada serait un endroit meilleur si les lois contre ce genre d'activité existaient.
Ce projet de loi est solide, comme les autres. Ils sont raisonnables. Les victimes veulent de ce genre de loi. Je vous remercie donc. Tout ce que vous pouvez faire au sein du comité pour étudier ce projet de loi et l'envoyer à la Chambre sans qu'il soit retardé pour quelque raison que ce soit reçoit mon appui et celui, je pense, de tous les Canadiens.
La dernière fois que nous nous sommes réunis, monsieur le ministre, nous avons également discuté avec les mêmes représentants des groupes de victimes à propos des peines minimales obligatoires prévues dans le projet de loi. Plus particulièrement, l'opposition et d'autres parties nous critiquent souvent à propos des coûts élevés des peines minimales obligatoires: il y aura plus de gens en prison. Certains de ces prédateurs sexuels ne seront plus dans nos rues; ils passeront plus de temps derrière les barreaux. Cela coûtera plus cher. Nous avons besoin peut-être de plus de cellules et de gardes dans les prisons pour veiller à ce qu'ils ne soient plus dans nos rues, et qu'ils soient loin de nos enfants.
Je leur ai demandé s'ils pensaient, si c'était le cas — si l'on présume qu'il est vrai que les coûts de l'incarcération des gens augmentent — que c'était de l'argent bien dépensé. Je peux vous dire que, selon M. Rushfeldt de la Coalition de l'action pour la famille au Canada et Mme Ellen Campbell qui représente des enfants victimes d'exploitation sexuelle, ce serait de l'argent très bien dépensé.
Pourriez-vous en toucher un mot et nous dire ce que vous pensez que cela représente aux yeux des Canadiens, surtout en ce qui concerne les peines minimales obligatoires prévues dans le projet de loi, qui mettent nos enfants à l'abri des agresseurs sexuels d'enfants?
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Je tiens à répondre à M. Dechert, qui semble suggérer que les partis de l'opposition demandent des élections. Il semble un peu dérouté. Si j'ai bien compris, c'est toujours le premier ministre qui se rend à Rideau Hall et demande la dissolution de la Chambre afin de lancer une élection. Il doit exister une nouvelle constitution dont je ne suis pas au courant.
Peu importe, monsieur le ministre, merci d'être ici aujourd'hui. J'aurais pensé qu'avec toute l'importance que vous accordez à ce projet de loi et aux autres projets de loi, vous auriez été en mesure de nous accorder plus d'une heure, mais j'ai mes cinq minutes, et je sais que vous devez retourner à votre bureau en vitesse afin de travailler sur d'autres titres abrégés de projets de loi.
Ma question porte sur un aspect du projet de loi. C'est une question plutôt technique. Elle porte sur la possibilité d'être pris au piège. Ça n'a rien à voir avec les objectifs principaux du projet de loi, sur lesquels je suis certain que tous les membres du comité sont d'accord.
L'article 15 du projet de loi, qui est en réalité le nouvel article 172.2 proposé du Code criminel, contient quelques nouvelles dispositions qui font trois choses. Elles ajoutent une présomption portant sur ce que l'accusé pensait être l'âge de la personne mineure, une présomption. Puis le paragraphe (4) proposé retire la composante de la mens rea où il est indiqué que ce que vous pensiez savoir n'a pas d'importance à moins que vous n'ayez pris les mesures raisonnables. Ce que vous saviez n'a pas d'importance.
Puis le prochain paragraphe proposé du projet de loi retire une autre défense pour dire qu'il n'importe pas qu'il n'y ait réellement pas eu de victime et qu'il n'est même pas important qu'il y ait eu ou pas de réelle personne. Autrement dit, il pourrait s'agir d'un scénario complètement artificiel pour piéger des personnes.
Je n'ai pas d'illusion. La police cherchera à arrêter le contrevenant, c'est certain. Ils ne perdent pas leur temps avec des innocents. Mais supposons qu'un policier corrompu décide de piéger quelqu'un. Supposons-le. Nous savons qu'il n'y a pas beaucoup de policiers corrompus, mais disons qu'il y en a un, et qu'il décide de mettre en place un piège. Cette séquence de paragraphes proposés établit, sous forme d'une loi, un piège. Il ne s'agit pas d'utiliser un piège pour enquêter une infraction réelle. Il s'agit de l'établissement dans une loi d'un scénario de prise au piège qui retire la défense, imposant une présomption, et disant qu'il n'importe pas qu'il s'agissait d'une vraie ou d'une fausse personne. Peu importe s'il y a eu une réelle personne, vous êtes tout de même coupable, pas d'avoir commis une infraction criminelle réelle, mais de l'avoir facilitée, établie, invitée.
À mon avis, nous établissons dans notre Code criminel un mécanisme de prise au piège construit artificiellement, où la personne accusée pourrait se voir retirer par la loi certains mécanismes de défense.
Les tribunaux peuvent quand même dire qu'ils ne peuvent pas accepter que cette personne soit reconnue coupable de l'infraction qui lui est reprochée, mais je n'aime tout de même pas ce mécanisme.
Avez-vous examiné ce processus? Vos représentants ont-ils examiné ce processus? Je comprends pourquoi nous voulons des lois sévères, mais les procédures doivent être justes du point de vue constitutionnel, et ce projet de loi m'inquiète.
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Encore une fois, nous sommes tout à fait confiants que toutes les dispositions de ce projet de loi sont constitutionnelles.
Vous avez dit que nous envisageons une situation où des gens se préparent à une éventuelle exploitation sexuelle d'un enfant. Ce que nous voulons faire, en partie, c'est prévenir ce genre d'activité au départ. C'est ce que nous essayons de faire. Je le dis surtout à l'égard des nouvelles infractions que nous avons dans le projet de loi. Nous voulons arrêter ces individus avant qu'ils n'agissent. Et je sais que l'argument que vous soulèverez est que si la personne commet l'infraction, les éléments sont là. Nous essayons d'appuyer cet argument.
Maintenant, en ce qui concerne vos préoccupations à propos de la prise au piège, les dispositions portant sur la prise au piège du Code criminel continueront de s'appliquer, et elles s'appliqueront à toutes les dispositions du projet de loi. Donc vous connaissez peut-être les éléments d'un piège où la police va au-delà de la simple discussion, et ces dispositions continueront d'assurer la défense d'une personne. Mais nous allons arrêter dès maintenant ceux qui font des arrangements pour exploiter un enfant. Si c'est bien ce qu'ils font, ils commettent une infraction dans ce pays.
Maintenant, pour ce qui est de la personne qui dit « Je me suis fait prendre au piège » ou « Je me suis fait duper » ou « On m'a poussé à le faire », ces arguments peuvent être soulevés, car l'article sur la prise au piège s'applique toujours. Mais pour ceux qui s'entendent pour préparer un enfant, ils ne peuvent pas exiger une défense simplement parce qu'ils ont eu cette discussion avec un agent de police. Le piège sera là, mais le crime est de faire des arrangements pour exploiter un enfant.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je vous remercie, vous et ceux qui vous accompagnent, d'être venus cet après-midi.
J'aimerais attirer votre attention sur ce qui vient d'être discuté. On parle des peines minimales obligatoires. Je ferais remarquer que je viens du Québec. Nous en avons discuté avec les autres députés du Québec. Nous ne sommes pas tous du même avis que les gens du Bloc québécois. Nous sommes quand même capables de voir que les peines minimales obligatoires sont importantes. En effet, nous avons considéré des choses comme la situation de la dame qui était venue et qui avait subi une agression sexuelle. Nous avons considéré l'aspect des enfants, comme il est défini par le Code criminel.
J'admire notre projet de loi et j'admire aussi votre constance depuis le début en matière de justice. On nous reproche souvent d'avoir une approche law and order. Je vous remercie pour une chose. Qui ce projet de loi va-t-il protéger? Les enfants des partisans libéraux, les enfants des partisans du Bloc québécois, les enfants des partisans du NPD et les enfants des partisans des conservateurs. Cela touche tout le monde. Nous ne sommes pas ici pour le gouvernement, nous sommes là pour protéger nos enfants. Nous ne sommes pas là pour faire de la partisanerie. De ce côté, monsieur le ministre de la Justice, je vous remercie.
D'autre part, dans mon comté comme partout ailleurs, il y a beaucoup d'appels aux lignes ouvertes. C'est continuel au Québec. On donne ce qu'on appelle des « sentences bonbons ». Les gens sont fatigués et écoeurés que des prédateurs profitent de ce qu'on appelle des « portes tournantes ». Ils passent et ils sortent le lendemain matin. Ça va très, très vite. C'est incroyable ce qui se passe présentement. Actuellement, certains prédateurs sont des avocats, des médecins, des journalistes, des acteurs, des parents. On a tout cela devant les tribunaux.
Je vous demande si vous pensez — et je veux que vous regardiez cela de très près — que les peines minimales obligatoires vont être instaurées. Cela permettrait, je pense, de redonner confiance en la justice. On a perdu confiance en la justice. Vous disiez que la justice est une adhésion volontaire et on semble avoir perdu confiance en elle.
Pensez-vous que les peines minimales obligatoires permettraient de retrouver cette confiance?
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Je pense qu'elles aident les gens à avoir confiance au système de justice pénale. Mais je suis conscient et je comprends que des gens s'opposent à ces mesures. Je pense que dans le cadre de nos fonctions de parlementaires, nous avons pour tâche de présenter aux Canadiens différentes opinions à ce sujet.
Nous sommes très clairs, dans ce projet de loi. Si vous agressez ou exploitez sexuellement des enfants, vous allez en prison. Comme vous pouvez le constater, certains députés s'y opposent ou s'opposent à des peines obligatoires pour ça, mais je pense que cela fait partie des discussions que nous avons avec la population de votre province et des autres provinces pour souligner les différences qui existent entre les positions des différents partis politiques.
Nous avons été très constants, comme vous le savez. Nos projets de loi en matière de justice ont toujours été une priorité. Nous avons été constants. Nous voulons moderniser le Code criminel. Nous voulons, comme vous le dites, accroître la confiance des gens envers le système de justice pénale. Il s'agit donc d'une étape de plus afin de nous assurer que notre système de justice pénale comprenne et protège les droits des victimes.
Monsieur Petit, merci encore, à vous et à vos collègues, de votre appui pour ces mesures. Elles sont très très importantes, et je vous souhaite de réussir, comme je le souhaite à tous les membres du comité, à faire adopter ce projet de loi le plus rapidement possible.
Merci, monsieur le président.
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Monsieur Comartin, la demande des témoins a été envoyée par courriel, je crois, le 7 ou le 8 décembre. C'était il y a plus d'un mois et demi. Je pense même que la greffière a fait un suivi par téléphone.
Je trouve qu'il s'agit d'un problème récurrent au comité: les demandes sont envoyées. Mais, tout le monde se penche sur cette question une fois que nous avons entamé l'étude du projet de loi et que nous nous apprêtons à faire l'étude article par article; et tout d'un coup on nous dit qu'il faut inviter d'autres témoins.
Nous avons ajouté d'autres témoins. Mais sûrement, avec un préavis d'un mois et demi, nous aurions pu les placer dans notre calendrier et en tenir compte dans notre budget.
J'ai discuté avec la greffière qui m'a avisé qu'en cas de coûts supplémentaires pour les témoins, un budget supplémentaire ou amendé sera présenté au comité qui pourra l'adopter également.
Ce que je demande en ce moment tient compte des témoins que nous avons déjà entendus et des témoins prévus. Nous avons ce budget. Pouvons-nous l'adopter, en sachant très bien qu'un budget supplémentaire pourra être approuvé plus tard?
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Certainement. Et c'est comme l'a dit le ministre: nous avions l'intention de cibler cette conduite prédatoire avant qu'une agression sexuelle n'ait été commise. Et, oui, bien sûr, nous connaissons les pratiques d'enquête utilisées par les services policiers à l'heure actuelle aux termes des infractions du Code criminel ainsi que les techniques qui pourraient être employées relativement à cette nouvelle infraction. Alors oui, nous nous sommes arrêtés à cette question.
Comme je l'ai dit plus tôt, je peux présenter au comité quelques exemples qui montrent exactement, dans le contexte de leurre d'enfants sur Internet, où la défense a réussi dans un cas et a subi un échec dans l'autre. Je dois rajouter que l'échec avait trait à un cas où l'accusé était un agent de police qui évidemment n'a pas commis d'infraction dans le cadre de son travail.
En fait, comme a voulu le souligner l'inspecteur Naylor, il s'agit d'une pratique courante. Et nous sommes au courant.
Évidemment, les policiers sont formés pour savoir où sont les limites dans ce genre de pratique. Mais, typiquement ils poursuivent leur travail. Lorsqu'on lit certains des cas qui ont été rapportés, on y décrit, par exemple, qu'un agent de police participait à une opération clandestine dans un bavardoir dont on connaît le nom et qu'il y fréquentait notamment des agresseurs sexuels d'enfants et qu'il entrait en communication avec ces gens de cette façon.
Encore une fois, la loi est très claire sur la différence entre le piégeage et une pratique d'enquête légitime.
Il s'agit d'une autre question technique. Elle porte sur les dispositions de détermination de la peine pour quelqu'un ayant été trouvé coupable des crimes décrits dans ce projet de loi ou bien découlant des descriptions révisées des infractions.
Cela se trouve au paragraphe 26(2) du projet de loi et se rapporte à l'article 810 du Code criminel, qui est la description numérique la plus longue d'un article du Code criminel que j'ai jamais vu — alinéa 810.1(3.02)a.1). Cela porte sur la capacité d'un juge de défendre un interpellé d'utiliser Internet ou tout autre réseau numérique. Je comprends ce que l'on veut dire quand on parle d'Internet, mais lorsque dans le projet de loi on parle « d'autre réseau numérique », pour moi cela relève d'un scénario qui crée un manque de clarté et qui pourrait s'avérer problématique.
Parce qu'on ne mentionne qu'un autre réseau numérique... Nous savons tous combien il existe de nombreux réseaux numériques. Il y en a partout, dans des prothèses auditives, dans les ascenseurs, les métros, les capteurs dans les automobiles et les moniteurs cardiaques. Il existe des systèmes numériques partout. Lorsqu'on établit des pénalités ou des restrictions liées à la peine nous ne sommes pas clairs, qu'adviendrait-il si un juge se servait tout simplement du libellé du Code criminel et établissait qu'il est interdit d'utiliser Internet et tout autre système numérique dans son ordonnance?
Moi, je pense que ça peut poser problème parce qu'on n'établit pas clairement quels sont ces autres systèmes numériques. Par conséquent, le fait que l'on ne nomme pas ces systèmes numériques pourrait empêcher les juges de dresser la liste des restrictions dans le prononcé de la peine. Si les restrictions de la sentence ne sont pas suffisamment précises, cela se traduira par un échec à un moment donné. Je puis vous assurer que du point de vue juridique ou lors d'un appel cela se traduira par un échec.
Y a-t-il quelque chose que je n'ai pas compris ou que nous avons tout simplement ignoré dans notre zèle d'assurer davantage de flexibilité dans la détermination de la peine? Pourriez-vous me donner votre avis à ce sujet?
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Je vais faire de mon mieux. Je ne suis pas une experte technique sur le volet cybernétique du droit criminel. Si le comité le demande, si vous me le permettez, je pourrais obtenir la contribution d'un collègue qui pourrait vous aider.
Mais pour ce qui est de l'utilisation du mot « Internet », nous avons certainement examiné la terminologie qui est utilisée actuellement lors de l'élaboration du projet de loi C-54, tant dans la loi que la terminologie utilisée par les tribunaux. Lorsqu'on examine les décisions relatives à une sentence, on y retrouve fréquemment le terme « Internet ». Quelquefois, voire la plupart du temps, ce mot est écrit avec un i majuscule, mais on le voit aussi épelé avec un i minuscule, et quelquefois on ajoute des détails pour inclure d'autres modes particuliers de télécommunications. Pour ce qui est du libellé du projet de loi C-54... Et nous avons fait erreur antérieurement lorsqu'on a évoqué le projet de loi C-30, c'était plutôt en fait le C-32, soit la Loi sur la modernisation du droit d'auteur, où l'on retrouve également l'expression « Internet ou tout autre réseau numérique. »
D'après mes collègues qui s'y connaissent dans le domaine, « internet » épelé avec un i minuscule et « Internet » épelé avec un i majuscule évoquent des choses différentes. Pour ceux qui s'y connaissent le plus en la matière ces deux mots évoquent une réalité différente. D'après moi, je pense que dans les tout débuts, lorsque nous avons commencé à parler d'Internet, avec un i majuscule, cela ne représentait pas uniquement la grande toile mais également d'autres réseaux numériques, parce qu'il y en a d'autres qui pourraient être visés par ce terme.
Pour ce qui est du projet de loi C-54, nous voulions nous assurer que les tribunaux puissent être en mesure de déterminer dans tous les cas s'ils veulent rendre ou non une ordonnance et, le cas échéant, que cette ordonnance corresponde aux circonstances de cette affaire. Le libellé du projet de loi C-54 parle d'Internet ou d'autres réseaux numériques de façon très vaste de manière à ce que cela vise les courriels, les systèmes informatiques et d'autres réseaux de communications comme un iPhone par exemple où l'on communique au moyen d'un système informatique. Nous voulons cibler tout ça, parce que ce sont les outils que les agresseurs utilisent pour avoir accès aux enfants ou faciliter leur crime.
Nous voulions essentiellement utiliser la terminologie conforme aux autres lois fédérales. Lorsqu'on examine d'autres lois fédérales, le mot « Internet » est utilisé de différentes façons. C'est un concept encore relativement nouveau comparativement à d'autres concepts évoqués dans la loi. Quelquefois il sert à désigner un site Web. Dans d'autres circonstances ce mot désigne un mode de communication. Notre intention consiste à viser toutes ces exceptions.
Je peux peut-être faire une suggestion par rapport aux préoccupations de M. Lee, que je partage. D'ailleurs, après l'avoir écouté, je comprends très bien, mais peut-être que si on mettait la mention « et autres outils électroniques tels que décrits par le juge », nous aurions une ordonnance précise à suivre. J'imagine qu'au moment où on rend cette ordonnance, on pense à un certain nombre de choses. On pense à Internet, on pense à l'accès à ceci, à l'accès à cela et ainsi de suite, mais on ne pense pas aux moniteurs cardiaques et à ces objets.
Il y a une autre chose que je voudrais vous demander tout de suite. Plusieurs des sentences minimales qui ont été augmentées l'ont été pour des minimums qui avaient déjà été créés en 2005, particulièrement toutes les peines minimales relatives aux articles 3, 4, 5, 9, 11 et 12 du projet de loi . Elles ont été présentées pour la première fois en 2005 et mises en vigueur le 1er novembre 2005.
À votre connaissance, est-ce qu'une étude a été faite au ministère de la Justice, ou ailleurs, pour savoir quels ont été les résultats obtenus par l'imposition de sentences minimales en 2005?
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J'aimerais répondre en anglais.
[Traduction]
J'ai cru comprendre que certains collègues du Centre canadien de la statistique juridique vont se faire entendre devant le comité. Ces derniers devraient être en mesure de vous fournir davantage de détails. En 2005, 11 nouvelles peines minimales obligatoires sont entrées en vigueur et étaient rattachées à des infractions visant les enfants. Ces peines minimales obligatoires étaient fondées sur des données datant de 2005 et de 2006-2007. Nous avons étudié les condamnations, les peines infligées, la durée des peines ainsi que tous les autres types de sentences auxquels les tribunaux ont eu recours depuis 2005. Nous avons également étudié la jurisprudence pour déterminer quels changements les tribunaux qui déterminent la peine auraient pu apporter au régime.
Je peux affirmer au comité que les tribunaux qui déterminent la peine ont évolué dans leur façon de penser. Ils reconnaissent que l'objectif des amendements de 2005 consistait à faire de la dénonciation et de la dissuasion le principal facteur de détermination de la peine dans les cas où des enfants subissent des actes de violence.
De plus, nous avons constaté que le régime de peines minimales obligatoires a commencé à avoir des répercussions. Avant l'entrée en vigueur de ce régime, il y avait une possibilité d'infliger une peine d'emprisonnement avec sursis, mais par la suite, cette possibilité était totalement exclue. Nous avons constaté une baisse de pourcentage d'affaires où une peine d'emprisonnement avec sursis n'était pas infligée. Nous pourrions donc observer une légère hausse de la proportion de peines à purger en incarcération ainsi qu'une augmentation du taux d'amendes et autres sentences. Il y aurait donc eu une légère hausse durant cette période.
Pour ce qui est des infractions précises, comme l'agression sexuelle, d'après les données de 2008, dans environ 80 p. 100 des cas d'accusations d'agressions sexuelles générales ayant pour victime un enfant, aucune peine minimale obligatoire n'y était assortie. La norme n'est donc pas similaire.
Derek, avec tout le respect que je vous dois, j'aimerais revenir sur la question des appareils numériques... Je sais que nous sommes en présence d'avocats, et je ne suis pas du nombre. Par contre, j'ai passé beaucoup d'heures assis à suivre différentes affaires, des agressions sexuelles aux menus larcins, alors je suis bien au courant des méthodes d'interprétation. Je me rappelle encore et encore...
Compte tenu de son expérience en matière de jurisprudence et d'interprétation, j'aimerais poser une question à Mme Morency au sujet du cheminement du juge ou de la Cour d'appel lorsqu'il faut se référer aux textes de loi... Ce que je crains, c'est qu'en adoptant l'approche de M. Lee, nous ne devenions normatifs à l'excès et, par le fait même, j'imagine que les tribunaux en viendraient à comprendre qu'un moniteur cardiaque, un stimulateur cardiaque ou un appareil auditif ne pourrait pas être utilisé pour transmettre des images ou des sons explicitement sexuels.
Cette question me préoccupe vraiment. Honnêtement, je ne dis pas cela pour être insultant ni pour offenser qui que ce soit. Je crains simplement que si nous mettons trop l'accent sur les détails, nous ne perdions de vue notre objectif. D'ailleurs, je pense que les tribunaux se sont déjà penchés sur ces questions. Vous avez parlé du voyeurisme et de certaines affaires qui ont fait jurisprudence à cet égard. J'aimerais que vous nous expliquez votre point de vue sur l'adoption d'une approche trop normative vis-à-vis de la loi. D'après votre expérience ou la jurisprudence, y a-t-il eu des cas où des juges ont été capables d'interpréter la loi ou encore des cas de policiers zélés qui auraient porté des accusations contre un délinquant en probation ou ayant été libéré sur engagement à la suite d'une affaire de pornographie juvénile car ce dernier portait un appareil auditif? En pareil cas, le tribunal lui retirerait son appareil auditif?
C'était ma première question. Pouvez-vous nous dire ce que vous en pensez? Prenez quelques instants pour répondre s'il le faut.
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J'ai une question précise et une question d'ordre général à poser.
Commençons par ma question précise. Lors des témoignages de la séance précédente, j'ai été frappé par certains propos entendus. Sur le coup, je ne savais pas quoi en faire. En Floride, on applique une peine minimale obligatoire de 25 ans aux condamnations pour agression sexuelle commise sur un enfant. Le ministre a déclaré que vous saviez tout madame Morency. J'aimerais que vous nous donniez un aperçu de ce que le reste du monde pense de la gravité des infractions de ce type.
Ma deuxième question d'ordre général est la suivante. Le ministre n'a pas réagi aux propos de M. Rushfeldt ni à ma question portant sur le changement de définition, mais si on jette un coup d'oeil sur le code, et tout le monde s'entend pour dire que le code a bien besoin d'être examiné de temps à autre, entre les articles 150 et 182 — sous les rubriques « Infractions d'ordre sexuel, Acte contraire aux bonnes moeurs et Inconduite » — d'après moi, les articles sont présentés par ordre de réprobation compte tenu de la gravité de l'infraction ou du degré d'irritation du grand public à l'égard de l'infraction.
Il est intéressant de constater que lorsqu'on emploie le terme « infractions sexuelles » — et le projet de loi a dans son titre l'expression « Infractions d'ordre sexuel à l'égard d'enfants » —, on s'attendrait à ce que ce soit le premier terme qui soit employé dans cette partie du Code criminel, mais cette infraction figure en fait sous la rubrique des actes contraires aux bonnes moeurs.
Par exemple, dans le contexte de toute l'étendue des infractions figurant entre l'article 150 et l'article 162, on trouve les « contacts sexuels », l'« incitation à des contacts sexuels », l'« exploitation sexuelle », l'« inceste », la « bestialité » et le « voyeurisme ». Nous passons ensuite à l'article 163, « infractions tendant à corrompre les moeurs », qui commence en faisant référence à du matériel obscène, c'est-à-dire des bandes dessinées et autres, avant de vraiment passer à la pornographie juvénile.
Je conçois que les choses ont changé et que la pornographie juvénile ne faisait pas l'objet d'une condamnation publique aussi vive au moment où le Code criminel a été rédigé par rapport aux amendements actuels. Je suis frappé par l'ordre de présentation des infractions dans le code, qui de nos jours semblent être désordonnées, compte tenu de la gravité des infractions et des rubriques auxquelles elles appartiennent... Certaines personnes voudraient que nous érigions en infraction des gestes posés contre des animaux, c'est-à-dire des êtres doués de sensation, pour qu'ils ne figurent plus sous la rubrique des biens, mais plutôt dans d'autres rubriques du Code criminel.
Peut-on espérer qu'un jour nous disposerons d'un Code criminel où les articles portant sur la pornographie et plus précisément les dispositions de ces articles portant sur la pornographie juvénile, auront droit à un classement supérieur exprimant ainsi une condamnation plus vive?
:
Commençons par votre première question. Le ministre a gentiment exagéré, je ne sais pas tout.
Par contre, ce que je sais, c'est qu'il existe des variations entre les pays pour ce qui est des peines minimales obligatoires qui peuvent être imposées. C'est bien connu qu'aux États-Unis, les peines minimales obligatoires sont bien plus sévères et il en va de même des peines maximales pour bon nombre d'infractions.
Prenez la pornographie juvénile, par exemple. Je pense que le témoin y faisait d'ailleurs allusion. Au Royaume-Uni, la peine maximale est généralement de 10 ans, et il n'y a aucune peine minimale obligatoire. En France, il y a un éventail de peines maximales également, mais aucune peine minimale obligatoire. En Australie, dans l'éventail des peines maximales, la moyenne est de 10 ans, mais il n'y a pas de peine minimale. Aux États-Unis, à l'échelon fédéral, car le droit pénal interétatique peut être invoqué, certaines infractions — par exemple, la distribution de matériel pornographique au moyen du courrier — sont assorties d'une peine minimale obligatoire de 5 ans et d'une peine maximale de 20 ans.
Chaque pays a une approche différente. L'approche préconisée dans le projet de loi, comme l'a indiqué le ministre, reflète le contexte canadien et l'intention d'assurer une certaine cohérence entre toutes les infractions où la victime est un enfant.
Je crois que votre deuxième question constituait davantage une observation. Je ne crois pas que vous cherchiez vraiment à savoir ce que je pense de l'ordre de présentation des infractions dans le Code criminel.
Avez-vous une question...?
:
En fait, c'est encore plus fondamental qu'il n'y paraît. L'infraction proposée se trouve à l'article 13 du projet de loi et elle peut être commise au moyen d'Internet, mais pas nécessairement. L'intention visée...
Tout d'abord, vous constaterez que la définition de matériel explicitement sexuel exclut la pornographie juvénile. Il ne s'agit donc pas du cas d'une personne qui fournit de la pornographie juvénile à un jeune. Cette infraction comprend les cas où une personne prend du matériel explicitement sexuel et le remet à un enfant dans l'intention précise de faciliter la perpétration d'une infraction sexuelle contre ce même enfant.
Comment cela se produit-il? Comme vous l'avez mentionné, un délinquant sur Internet peut envoyer ce type d'image à un enfant. Ce pourrait également être le cas assez fréquent d'une rencontre en personne entre le délinquant et l'enfant, soit de la bonne vieille manière. D'après la recherche et les psychiatres légistes qui ont comparu devant le comité auparavant, les délinquants sexuels ont souvent recours à ce type de matériel pour faire perdre aux enfants leurs inhibitions en leur démontrant que ce type de comportement est normal, que d'autres enfants et adultes s'adonnent à ces pratiques; bref, l'intention est de banaliser ces comportements pour faciliter l'agression sexuelle sur l'enfant.
La nouvelle infraction qui serait érigée à l'article 13 porte sur ce type d'agissements, qu'ils aient lieu sur Internet ou par d'autres moyens.
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Merci, monsieur le président.
Madame Morency et monsieur Villetorte, merci d'être des nôtres aujourd'hui.
Vous avez sans doute entendu dire que les peines minimales obligatoires gonfleraient les coûts de notre système carcéral et de nos services correctionnels. Il s'agit évidemment d'une question de principe dont nous débattons actuellement, en tant que députés.
Vous savez peut-être que lors de notre dernière réunion, nous avons entendu le témoignage de M. Brian Rushfeldt de la Coalition de l'action pour la famille au Canada. Je lui ai demandé son avis au sujet de l'augmentation des coûts du système carcéral par suite de l'emprisonnement des personnes qui écoperaient des peines minimales obligatoires prévues dans le projet de loi. Voici ce qu'il m'a répondu:
C'est de l'argent bien dépensé car si on peut éviter l'abus d'un seul enfant, l'investissement aura été justifié.
Je ne vais pas vous demander ce que vous pensez de ces propos parce qu'il s'agit d'une question de principe et il nous appartient à nous, les élus, d'en débattre. Tous mes collègues du parti ministériel estiment que c'est de l'argent bien dépensé.
Voici ma question. Vous avez dit plus tôt que les peines minimales prescrites aux États-Unis sont comparables à celles qu'on prévoit pour les infractions dont nous discutons. Pourriez-vous nous donner plus de précisions au sujet des peines minimales obligatoires en vigueur aux États-Unis et les comparer aux peines prévues dans ce projet de loi.
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Pour comparer nos lois à celles d'autres pays, je pense qu'il faut examiner non seulement la peine minimale obligatoire, mais aussi la nature de l'infraction et la peine maximale pouvant être imposée pour cette infraction dans l'autre pays, car le projet de loi vise à établir une norme cohérente pour toutes les infractions définies au Canada.
Par exemple, aux États-Unis, le droit criminel relève de chaque État. En matière de pornographie juvénile ou d'autres types d'exploitation sexuelle des enfants, il existe entre les États un éventail de peines minimales et maximales ainsi que des approches différentes. Vous comprendrez que je ne suis pas en mesure aujourd'hui de décrire toutes ces législations.
Toutefois, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il existe au niveau fédéral des lois pénales portant sur la pornographie juvénile. Ainsi, l'auteur d'une première infraction de distribution de pornographie juvénile par la poste est passible d'une peine minimale de cinq ans et maximale de 20 ans. Toutefois, pour que le critère du commerce entre États s'applique, l'infraction doit avoir été commise en utilisant le service postal. En cas de récidive, la peine minimale est de 15 ans et la peine maximale de 40 ans, pour possession ou obtention délibérée de pornographie juvénile envoyée par la poste, par exemple.
Toutefois, j'ai également expliqué qu'il y a tout un éventail d'approches dans les autres pays. Au Canada, les peines minimales obligatoires prévues par le projet de loi sont compatibles avec les peines minimales déjà prescrites par le Code criminel. Ainsi, l'une des dispositions de ce projet de loi, l'ajout d'une peine minimale de cinq ans pour les infractions comportant une peine maximale de 14 ans, comme par exemple l'inceste, prévue dans l'article 155, serait comparable aux peines prévues à l'heure actuelle dans le Code criminel pour l'infraction grave de forcer un jeune à se prostituer en usant de violence, en vertu du paragraphe 212(2.1) du code.
En regroupant toutes ces dispositions, le projet de loi assure une plus grande cohérence.
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Je m'excuse infiniment, madame Morency, mais pour être sûr que vous compreniez mes trois questions, je vais les poser l'une à la suite de l'autre. Vous pourrez peut-être y répondre avec tout le temps qu'on vous donnera et, à ce moment-là, ce ne sera plus du temps pris sur le mien.
Premièrement, au sujet des peines minimales qui ont été imposées en 2005, je veux savoir s'il y a eu une évaluation des effets sur la criminalité. Je comprends que c'est sûr qu'il y a eu des effets sur les poursuites qui ont été entreprises, etc., mais je veux savoir si, effectivement, il y a eu des effets sur la criminalité. Si ces études existent, j'aimerais que vous nous les fournissiez.
Deuxièmement, vous connaissez peut-être l'étude de Julian V. Roberts, qui a été faite justement par la Division de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice, intitulée « Peines d'emprisonnement obligatoires dans les pays de common law: Quelques modèles représentatifs ». Pourriez-vous nous en fournir suffisamment de copies pour que tous les députés membres du comité en aient une?
Troisièmement, dans cette étude, nous constatons que dans la majorité des pays du Commonwealth, il y a ce qu'on appelle en anglais des saving clauses — que je traduirais peut-être par « clauses d'exception » — qui permettent à un juge qui estime que la sentence minimale serait absolument injuste, que l'application dans un cas particulier de l'obligation d'une sentence minimale serait trop injuste, de faire exception à condition d'exposer ses raisons, soit par écrit, soit oralement. Pourriez-vous nous donner des modèles de ces clauses qui existent dans les autres pays du Commonwealth?
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Permettez-moi de répondre brièvement à la première question. Vous demandez si nous avons évalué une éventuelle diminution des condamnations pour des infractions d'exploitation sexuelle des enfants depuis l'adoption des amendements de 2005. Effectivement, nous avons étudié les résultats et un certain nombre de causes. Je n'ai pas de données ou d'études à vous remettre mais le Centre canadien de la statistique juridique pourra peut-être répondre à votre question du moins partiellement lorsque ses représentants comparaîtront.
Je pourrais toutefois dès maintenant renvoyer le comité au bulletin Juristat produit par le Centre sur les enfants et les jeunes victimes de crimes violents signalés à la police, en 2008. Je me ferai un plaisir de remettre ce bulletin à la greffière.
Je crois nécessaire de faire une mise en garde à ce sujet. Il est souvent difficile d'établir une relation de cause à effet entre le changement du nombre d'incidents signalés et la réforme des dispositions juridiques précises, parce qu'on ignore si l'augmentation du nombre d'incidents est attribuable à l'augmentation des signalements ou de la fréquence des infractions. Il faut donc être prudent.
Par ailleurs, en ce qui concerne l'étude de Julian Roberts, nous n'en avons pas d'exemplaire original mais pourrions peut-être remettre des photocopies au comité.
Quant aux dispositions d'exception, qui permettent aux tribunaux dans d'autres pays de ne pas imposer la peine minimale obligatoire prévue dans des cas exceptionnels, nous nous efforcerons de rassembler des renseignements à ce sujet pour votre comité.