:
La séance est ouverte; nous allons commencer.
Nous avons deux groupes de témoins. Nous devrons aussi parler brièvement des travaux du comité à la fin de la séance. Nous allons donc réduire quelque peu le temps accordé à chacun des témoins.
Nous sommes ici aujourd'hui, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 3 novembre 2011, projet de loi .
Nous accueillons comme premier témoin aujourd'hui M. Wayne Smith, notre statisticien en chef.
Monsieur Smith, je crois comprendre que vous allez faire une déclaration préliminaire. Je vous demanderais de nous présenter vos collègues, de faire vos déclarations, puis nous passerons aux questions.
Monsieur Lukiwski.
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Je voudrais tout d'abord vous remercier, monsieur le président, de m'accorder cette occasion de m'adresser aux membres du comité relativement à l'étude du projet de loi .
Aujourd'hui, je suis accompagné de deux experts de Statistique Canada en méthodes de recensement et en méthodes d'estimation de la population, c'est-à-dire M. David Dolson, directeur de la Division des méthodes d'enquêtes sociales, et Mme Johanne Denis, directrice de la Division de la démographie.
[Traduction]
Comme vous devez le savoir, le rôle de Statistique Canada dans la révision des limites des circonscriptions électorales consiste à fournir des données démographiques à l'appui, d'abord, de l'application de la formule de répartition des sièges aux provinces et aux territoires, et en deuxième lieu, de la délimitation des circonscriptions électorales dans les provinces et les territoires. Pour ce qui est de la délimitation des circonscriptions électorales dans les provinces et territoires, il n'y a qu'une seule source de données démographiques qui fournit les ventilations géographiques détaillées nécessaires, et cette source est le recensement de la population, qui est mené tous les cinq ans.
Quant à la répartition des sièges entre les provinces et les territoires, il existe deux sources possibles de données sur la population qui pourraient être utilisées. La première source, celle qui a été utilisée dans le passé, consiste dans les chiffres de population non corrigés du recensement décennal de la population de 2011 que Statistique Canada publiera le 8 février 2012. La seconde source est constituée par le programme d'estimation démographique de Statistique Canada. Ce programme produit des estimations annuelles et trimestrielles de la population des provinces et des territoires. Les estimations de ce programme reflètent, à tout moment donné, tous les renseignements que Statistique Canada possède, afin de fournir la meilleure évaluation possible de ces populations.
Le projet de loi propose un changement par rapport à la pratique précédente, qui consiste à utiliser les estimations démographiques provinciales et territoriales du 1er juillet 2011 disponibles à l'heure actuelle, aux fins de calculer la répartition des sièges entre les provinces et les territoires. Ces estimations reflètent les résultats du recensement de 2006 qui ont été ajustés pour le sous-dénombrement net, augmentés par les chiffres représentant les naissances et l'immigration depuis la date du recensement, et réduits par les chiffres représentant les décès et l'émigration.
Étant donné que l'objectif du projet de loi est de lancer le processus de réajustement en ce moment, l'enjeu statistique significatif faisant l'objet d'un examen par le comité est de déterminer, entre les deux mesures possibles de la population des provinces et des territoires, laquelle est la plus susceptible d'être plus proche de la valeur réelle: les estimations démographiques disponibles à l'heure actuelle ou les chiffres de population non ajustés du recensement de la population de 2011 qui seront publiés en février. Pour répondre à cette question, les deux estimations doivent être comparées aux estimations démographiques définitives pour 2011 que Statistique Canada produira en 2013, et qui refléteront les estimations du sous-dénombrement net de la population des provinces et des territoires qui seront générées par des études en cours, mais pas disponibles.
Laissez-moi vous expliquer brièvement la notion de sous-dénombrement net du recensement. Les statisticiens attitrés de tous les pays savent qu'un recensement de la population, quelque bien mené qu'il soit, va manquer certaines personnes tout en comptant d'autres deux fois. Statistique Canada, après chaque recensement, mène une étude statistique de ces deux effets.
Les estimations des recensements de 1996, 2001 et de 2006 indiquent que le sous-dénombrement net, parce qu'on manque davantage de personnes quand on compte deux fois, représente généralement 2 à 3 p. 100 des chiffres de population dans le recensement canadien. Nous ne pouvons pas savoir en ce moment quel sera le niveau de sous-dénombrement net, pour le recensement de la population de 2011 — l'étude nécessaire, comme je l'ai dit, n'a pas encore été terminée — nous ne pouvons pas savoir avec certitude non plus si les estimations de l'accroissement naturel et de la migration qui sous-tendent les estimations démographiques seront confirmées.
Par conséquent, la meilleure solution à la question de savoir laquelle des mesures sera plus proche de nos estimations définitives, les estimations démographiques disponibles à l'heure actuelle ou les chiffres de population non ajustés du recensement de 2011, consiste à regarder ce qui s'est passé dans les recensements précédents. Ayant effectuer ce travail, je peux informer le comité que les estimations démographiques provinciales et territoriales qui sont disponibles au moment de la diffusion des chiffres du recensement ont été généralement beaucoup plus proches des estimations définitives que les chiffres du recensement non ajustés eux-mêmes.
Pour démontrer cela, j'ai fait préparer un tableau, que vous avez devant vous je crois, avec les données du recensement de 2006, qui brosse essentiellement un portrait de la situation au moment du recensement de 2006. Le tableau compare les chiffres non ajustés du recensement de la population de 2006 et les estimations démographiques publiées en septembre 2006 — qui représentent essentiellement la même génération d'estimations dont il est question aujourd'hui même pour 2011 — aux chiffres ajustés du recensement de la population de 2006 publiés en septembre 2008.
À l'échelle canadienne, les estimations publiées en septembre 2006 ont été plus élevées de 0,3 p. 100 que les chiffres de population définitifs, alors que les chiffres non ajustés étaient plus bas de 2,8 p. 100. Tout comme l'ensemble du pays, à l'échelon provincial et territorial, les estimations démographiques étaient invariablement beaucoup plus proches des chiffres de population définitifs que les chiffres non ajustés.
En conclusion, même avec la publication, le 8 février 2012, des chiffres non ajustés du recensement de la population de 2011, Statistique Canada estime que les estimations démographiques du 1er juillet actuellement disponibles représentent la meilleure évaluation démographique des provinces et des territoires qui est disponible en ce moment ou qui sera disponible le 8 février. À notre avis, il convient donc de les utiliser aux fins du projet de loi .
Je vous remercie.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie de votre présence, monsieur Smith. Votre exposé m'a été utile parce que je crois que la plus grande question pour nous tous concerne les estimations démographiques et leur fiabilité.
La formule que le ministre nous a tous expliquée est fondée sur les estimations démographiques. Si nous voulons procéder à une redistribution relativement juste, ou dans le cas en l'occurrence à une augmentation, des sièges par population, nous devons avoir la certitude que les chiffres dont nous nous servons sont fiables.
Je suis assez confiant, compte tenu de votre exposé, mais je voudrais avoir un peu plus d'information et aller peut-être un peu plus en profondeur, si vous le permettez, afin que non seulement moi, mais aussi d'autres membres du comité aient une certaine confiance dans les estimations démographiques, par opposition aux données du recensement, comme étant les chiffres que nous devrions utiliser aux fins du projet de loi .
Vous nous avez donné un tableau des données de recensement et des estimations démographiques de 2006. Vous avez dit, et c'est démontré dans le graphique, que les estimations démographiques sont, pour reprendre vos paroles, invariablement plus justes.
Pourquoi les estimations démographiques sont-elles plus justes? Est-ce parce que vous avez conçu une meilleure formule, ou est-ce peut-être parce que les données de recensement sont seulement publiées à quelques années d'intervalle?
Je crois qu'il est important pour nous de savoir pourquoi nous pouvons compter sur les estimations démographiques et pourquoi nous devrions compter sur elles pour ce qui est de l'exactitude des chiffres de population à la fois au Canada et dans les provinces.
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Il y a deux éléments à la réponse.
D'abord, aux fins de l'estimation de la population, nous avons des sources d'information très riches au Canada. Nous avons de l'information très fiable provenant des statistiques des naissances, des décès, et de l'immigration au pays. Nous avons des dossiers administratifs extrêmement utiles qui nous permettent de mesurer la migration interprovinciale. Il revient ultimement à savoir si oui ou non les données ont été ajustées pour le sous-dénombrement net et la taille normale de cet ajustement.
Compte tenu de la précision des mesures prises pour les estimations démographiques et du fait que les estimations démographiques ont été ajustées aux fins du sous-dénombrement dans les recensements précédents, on peut presque garantir qu'au Canada, et c'est certainement le cas depuis de nombreux recensements maintenant, les estimations seront encore plus justes parce qu'elles reflètent un ajustement qui tient compte du sous-dénombrement, que les chiffres non corrigés que nous publions au début du mois de février. La différence attribuable aux personnes manquées dans le recensement net est de l'ordre de 2 à 3 p. 100. Cette différence est assez grande que toute erreur possible dans le processus d'estimation est dépassée par cette erreur.
Il s'agit d'une explication très technique, mais voilà en gros ce dont il s'agit.
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Ceux de 20 à 35 ans. C'est en fait une question de mobilité. Ils sont très difficiles à dénombrer, il y a une certaine incertitude dans les ménages lorsque Johnny est à l'université ou dans un camp de travail dans le nord de l'Ontario. On se demande où il doit être dénombré et s'il faut l'inscrire au formulaire. On a tendance à en manquer certains, de façon significative.
Parce que les immigrants récents vivent souvent dans des circonstances inhabituelles, il est encore plus difficile pour nous de les trouver, et aussi il y a un certain degré de malaise de la part de nouveaux immigrants, compte tenu de leur expérience personnelle avec les gouvernements. La barrière linguistique est aussi une autre source de problème pour nous avec les nouveaux immigrants.
Évidemment, les gens qui n'ont pas une adresse bien établie donne lieu à des difficultés. Il y a aussi certains défis reliés aux personnes à faible revenu. Les Autochtones urbains, par exemple, peuvent poser des difficultés. Les sans-abri sont de toute évidence aussi un problème pour nous.
Essentiellement, c'est une question de mobilité. Les gens qui sont très mobiles et n'ont pas un attachement important à une adresse fixe sont ceux que nous risquons davantage de manquer.
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Merci, monsieur Smith. Ça va; vous avez répondu à ma question.
Voici ma prochaine question. Étant donné que cette nouvelle formule est célèbre parce qu'elle est utilisée pour les paiements de transfert, ce qui est assez important et exige un niveau d'acceptabilité par tous en tant que chiffre non partisan, bla, bla, bla... vous voyez où je veux en venir. Étant donné que l'on fait ce changement et que vous pensez que c'est une amélioration, prévoyez-vous conseiller au gouvernement de changer la formule pour les paiements de transfert également, puisque c'est un meilleur chiffre?
Et voici mon autre question. Si le gouvernement faisait cela, diriez-vous que c'est effectivement une meilleure formule que celle que l'on a présentement?
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Je pense que M. Dion a soulevé un point intéressant. J'ai souvent pensé qu'il était bizarre que la formule utilise le nombre de sièges pour les provinces seulement plutôt que tous les sièges. C'est une bizarrerie. Je ne sais pas si elle est arrivée avec la formule de 1985 ou si c'est un reste de la formule passée qui a subi de grandes transformations. C'est une particularité dont nous avons héritée. C'est une particularité législative, plutôt que statistique.
Monsieur Smith, j'ai examiné les chiffres que vous avez présentés. J'ai fait une comparaison rapide entre les colonnes A et B. J'ai vu qu'elles mènent à des changements relativement mineurs si l'on considère les chiffres bruts pour les provinces, ou la plupart des provinces. Il y a des changements importants pour le Québec, l'Ontario, la Colombie-Britannique et l'Alberta. J'ai fait ces calculs rapidement.
La différence de population pour Terre-Neuve entre les colonnes A et B est de seulement 4 000; l'Île-du-Prince-Édouard, 3 000; la Nouvelle-Écosse, 21 000; le Nouveau-Brunswick, 20 000; le Manitoba, 29 000; la Saskatchewan, 13 000. Il y a une différence de 105 000 pour le Québec; 526 000 en Ontario. La colonne A est toujours plus élevée que la colonne B. L'Alberta, c'est 85 000; la Colombie-Britannique, 197 000.
Est-ce que cela signifie que si l'on se base sur les chiffres de la colonne A, comme le propose le projet de loi, plutôt que la colonne B, qui représente le statu quo, c'est-à-dire ce que propose la formule de 1985, et si on ne change rien d'autre, on aurait plus ou moins un siège supplémentaire pour le Québec, quatre ou cinq pour l'Ontario qu'il n'obtiendrait pas autrement, un siège chacun pour la Colombie-Britannique et l'Alberta? Est-ce plus ou moins les conséquences concrètes de cette formule?
Merci beaucoup pour votre exposé. Je m'intéresse particulièrement à l'observation que vous avez faite sur la sous-représentation et le sous-dénombrement. Peut-être que je ne le comprends pas bien, alors permettez-moi de poser deux questions, et j'irai ensuite peut-être dans une autre direction, selon votre réponse.
Lorsque vous avez expliqué pourquoi il y avait de la sous-représentation et du sous-dénombrement, vous avez fait allusion à des facteurs très précis. La sous-représentation, par exemple, ne tient pas compte des tendances économiques. Il y avait une époque où la Saskatchewan perdait des habitants à un taux assez dramatique, et puis l'économie s'est améliorée et la population de la province s'est mise à augmenter de façon très importante. Ce type de facteurs ne fait pas du tout partie de vos estimations pour l'avenir. Est-ce exact?
En fait, je veux poursuivre à ce sujet, en partie pour revenir sur certaines des questions de M. Dion.
Vous faites des échantillons au niveau national, et comme nous l'avons lu, lorsque l'on prend un échantillon et qu'on commence à le diviser, il devient de moins en moins représentatif. Alors il n'est pas habituel pour nous d'utiliser deux méthodes.
L'échantillon national dont vous parlez ne fonctionnerait pas pour ma province du Nouveau-Brunswick. Il commence à être moins précis, et donc on se tourne vers les chiffres du recensement lorsque l'on divise les circonscriptions. Est-ce exact?
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Monsieur le président, chers membres du comité, c'est pour moi un grand plaisir de comparaître à nouveau devant vous. C'est la deuxième fois que je le fais depuis que j'ai quitté mon poste. Je me souviens d'échanges très intéressants lors de la comparution précédente. Comme je l'ai toujours fait, je considère d'ailleurs que c'est un privilège de comparaître devant les gens qui représentent les Canadiens et les Canadiennes à la suite d'une élection. Pour moi, c'est le plus grand honneur possible.
C'est avec empressement que j'ai accepté l'invitation qui m'a été faite mardi midi. Je tiens à préciser qu'il se pourrait que, pour certaines questions que vous allez soulever, je n'aie pas de réponse. Si tel est le cas, j'aimerais que la greffière en prenne note, et je vous reviendrai par écrit, si cela vous intéresse, ou en personne si cela vous intéresse davantage.
Les documents que j'ai eu l'occasion de parcourir, sans les étudier à fond, incluent évidemment le projet de loi , avec ses nombreux scénarios, selon la date de passation, ainsi que les témoignages de mardi dernier où le ministre M. Uppal et M. Marc Mayrand, mon successeur, ont comparu devant vous. J'ai eu aussi l'occasion de parcourir mon rapport de 2005 ainsi que les répartitions des sièges de 2001 et de 1991.
Je voulais également vous rappeler que lorsque je travaillais au bureau au cours des années 1990 — je ne me souviens pas de la date précise —, le directeur général des élections avait proposé de limiter le nombre de sièges à environ 300. Il y avait 301 circonscriptions à l'époque et les gens étaient préoccupés par la possibilité que cela continue à augmenter. D'ailleurs, hier, quelqu'un a cité M. Harper à l'époque.
De plus, il y a eu une suspension de l'exercice de redécoupage, à un moment donné. Cela a, en pratique, chamboulé tout le travail. C'est une chose à éviter dans la mesure du possible. Une fois qu'une commission a commencé son travail, elle devrait continuer jusqu'au bout sans interruption, sans nouvelles données, sans changement de données.
[Traduction]
Selon moi, pour ce qui est du projet de loi dont vous êtes saisis, à propos de trois questions et de délais plus courts, c'est-à-dire sept mois plutôt qu'un an pour se préparer, nous y sommes arrivés. Je me souviens bien que M. Martin, premier ministre à l'époque, voulait tenir des élections moins de six mois plus tard. J'ai dû lui dire que c'était impossible avant sept mois, même si la loi m'en garantissait 12. Sept mois était le délai minimal, et nous avons pu le respecter.
Les 30 jours au lieu de 60 et les 10 mois au lieu de 12 proviennent d'exposés, d'arguments formulés par les commissions elles-mêmes, parce que nous avions fait un bilan et que nous avions des questions. Le minimum de 30 jours est un minimum. Ça ne signifie pas qu'on a éliminé tout le reste.
C'était des idées qui venaient des commissions elles-mêmes et que nous avons voulu étudier.
Je mentionnerai seulement que l'une des raisons pourquoi tout ceci devient très possible est la très grande capacité des ordinateurs qui existent aujourd'hui pour la cartographie, par exemple, et pour utiliser les données de Statistique Canada en ne retenant que ce dont on a besoin pour aider les commissions. Auparavant, il fallait deux mois pour préparer une série de cartes, mais il en faut aujourd'hui qu'un jour et demi. En ce qui concerne la formule elle-même, nous avons entendu ce qu'a dit le statisticien en chef. Selon moi, il est évident qu'un nouveau chiffre a été établi en ce qui concerne les provinces médianes. La formule d'indexation pour les exercices de redécoupage futurs tiendra compte de la moyenne de la croissance de la population de chaque province.
Cela aura comme effet de réduire légèrement le quotient, par rapport à l'utilisation de la population totale, la moyenne de la population canadienne dans son ensemble, ce qui signifie que les sièges seront un peu plus nombreux, et c'est d'ailleurs ce que cet exercice cherche à accomplir.
L'attribution de sièges par le projet de loi , qui en donne 15 à l'Ontario, 6 à l'Alberta, 6 à la Colombie-Britannique et 3 au Québec, est extrêmement positif.
Essentiellement, l'Ouest et l'Ontario ne reçoivent pas exactement ce à quoi ils auraient droit, mais ils seront certainement mieux représentés, du point de vue de ce que représente la démocratie. En ce qui concerne le Québec, il demeurera bien représenté, ni surreprésenté, ni sous-représenté, en fonction du nombre total de sièges. C'est un objectif qu'on cherche à atteindre depuis longtemps. Je pense que M. Reid y a fait allusion dans son témoignage, hier. Depuis longtemps, le Québec est une province pivot. Il y a des provinces sous-représentées et d'autres surreprésentées. Le Québec est en plein milieu. Cette approche me paraît tout à fait raisonnable et j'y suis tout à fait favorable.
Merci monsieur le président.
:
Très bien, merci beaucoup.
Tout d'abord, j'étais ici lors de la dernière redistribution et je faisais partie du sous-comité de notre comité qui s'occupait des appels des parlementaires, et ainsi de suite. Je me souviens que le processus faisait l'objet d'un échéancier serré, probablement plus serré que vous le souhaitiez, mais, au bout du compte, l'objectif a été atteint.
Quand je regarde tout cela, ce qui me frappe, c'est que les problèmes qui sont survenus dans le processus semblaient principalement provenir — d'après mon souvenir, il y avait une insatisfaction généralisée dans l'une des plus petites provinces, la Saskatchewan, où le nombre de sièges ne changeait pas. Sinon, les problèmes semblaient principalement survenir en Ontario et au Québec, peut-être parce qu'il s'agit de grandes régions.
Ce qui m'a frappé, c'est que tous les problèmes concernant le délai de 30 jours venaient de ces grandes provinces. Si vous revenez à vos bilans, vous souvenez-vous de problèmes particuliers concernant les obstacles que vous rencontrez lorsque vous avez tant de sièges à gérer, des problèmes mentionnés par les représentants des commissions du Québec et de l'Ontario?
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Je ne me souviens pas que les commissions du Québec et de l'Ontario se soient plaintes des délais courts. Je me souviens des autres provinces qui ont dit qu'elles pourraient commencer avant 60 jours, si les gens étaient prêts à être entendus en moins de 30 jours.
L'idée derrière la recommandation que nous avons formulée lorsque j'étais à Élections Canada, c'est que ce délai devrait être de 30 jours dès le commencement du travail. On publie un avis public et les gens vous avisent s'ils sont intéressés; ce processus peut commencer dans les 30 jours. Il peut aussi commencer 50 jours plus tard. Il faut simplement que l'avis soit publié dans les 30 jours. Vous savez, la communauté italo-canadienne, où qu'elle se trouve, veut faire valoir son point de vue.
Cet avis peut être formulé, puis planifié selon le moment où ils sont prêts et le moment où la commission est prête à entendre les exposés. Il s'agit d'un délai minimum. C'est comme dans le cas d'élections générales; la campagne doit durer au moins 37 jours, mais en 2005-2006, elle a duré 53 jours.
Une voix: Ah, le bon vieux temps.
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Oui, je m'en souviens. Je me souviens avoir fait de la sollicitation pendant cette campagne.
Très bien, ça me donne une idée.
Je réalise que vous ne siégiez pas à la commission, mais vous avez un point de vue venant du fait que vous avez écouté toutes les commissions. C'est ce dont je veux vous parler.
J'ai l'impression qu'il existe une différence pratique entre faire le recensement d'une très grande province — j'imagine que je parle surtout de l'Ontario — et faire celui d'une province beaucoup plus petite où les changements ne sont pas très importants; le nombre de sièges est différent.
J'imagine qu'en Ontario, et c'est probablement vrai en Colombie-Britannique également, la croissance se fait surtout dans un grand centre, d'où tout émane et cela produit un effet domino. On a une région où il y a toutes sortes d'endroits isolés — un peu comme le Nunavut ou les Territoires du Nord-Ouest —, mais aussi des régions fortement peuplées.
A-t-il été fait mention des problèmes liés à un travail aussi vaste et varié parce qu'il n'existe pas vraiment d'approche commune pour faire le recensement de ces différents types de régions ni pour être équitable envers toutes les différentes régions de la province?
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J'aimerais revenir à votre première question et y répondre de façon plus complète. Le défi auquel font face les grandes provinces les plus populeuses en ce qui concerne leurs commissions — l'Ontario et le Québec sont d'excellents exemples, ainsi que la Colombie-Britannique dans une certaine mesure — est le nombre d'audiences qu'elles doivent tenir partout en province, ce qui signifie qu'il est impossible de toutes les tenir en moins de 30 jours; c'est pour cette raison que ces provinces ont besoin de plus de temps.
Pour répondre à votre deuxième question, je tiens à vous expliquer le processus. Lors de l'exercice de redistribution de 2001, un logiciel a été développé qui permet à l'ordinateur de délimiter un certain nombre de circonscriptions tout en essayant, dans la mesure du possible, de respecter les configurations actuelles des circonscriptions. Dans le cadre de cet exercice, par exemple en Ontario, l'ordinateur génère des circonscriptions plus petites géographiquement, mais qu'on essaiera de garder dans les limites actuelles.
Je me souviens d'un député qui m'a écrit pour me dire: « Monsieur Kingsley, ma circonscription est parfaite. N'y touchez pas, s'il vous plaît. » Eh bien, toutes les circonscriptions seront touchées; cela ne fait aucun doute.
C'est le genre de chose que cet ordinateur peut faire. Ensuite, les commissions peuvent examiner le résultat et déterminer si c'est logique ou non.
Je dois au ses ssi vous dire que cet outil a été créé pour une autre raison: pendant que la commission siège, elle peut décider de déplacer une partie des limites. En faisant ce déplacement, les chiffres peuvent changer et le programme peut vous indiquer que vous venez de déplacer 3 500 Italo-Canadiens ou un certain nombre de personnes d'origine catholique, ou autre. Il vous donne toutes ces données démographiques afin de pouvoir commencer par tenir compte de tous ces intérêts communs. Cela facilite grandement le découpage initial — la tâche initiale consistant à créer les premières limites — afin qu'elles puissent être examinés par la commission, analysées par la commission et publiées comme première ébauche publique; la population pourra ensuite formuler ses commentaires.
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Je vois. C'est grandement amélioré?
M. Jean-Pierre Kingsley: Oui.
M. David Christopherson: J'aimerais savoir ce que vous pensez. C'est un peu une image à grande échelle, compte tenu de votre rôle précédent. Comme vous l'avez remarqué, nous continuons d'avoir un problème — je ne parlerai pas du Québec, parce qu'il s'agit d'une question vraiment politique — puisque, comparativement aux autres provinces, l'Ontario et la Colombie-Britannique ne sont toujours pas aussi près de leur représentation proportionnelle.
Premièrement, qu'en pensez-vous, du point de vue de la santé de notre démocratie, alors que nous maintenons cet écart, surtout dans notre plus grande province et notre troisième province? Et deuxièmement, savez-vous ce que nous pourrions faire pour éliminer ces anomalies, puisqu'elles viennent de l'extérieur de la formule? Avez-vous quelque chose à nous proposer, même s'il s'agit d'une solution ponctuelle, qui serait conforme à cette idée tout en nous rapprochant de la parité en ce qui concerne le nombre de sièges que l'Ontario et la Colombie-Britannique devraient avoir?
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L'idéal serait, bien sûr, que chaque province ait un nombre de sièges proportionnel à sa population.
Y a-t-il une façon d'améliorer ce projet de loi? Pour ce faire et établir une formule, du point de vue mathématique, il faut travailler avec le quotient. Il faudra réduire le quotient pour accroître les sièges. À un moment particulier, vous ne pouvez pas le faire uniquement pour une province. Il faut se baser sur une formule.
Comme solution de rechange, cet élément pourrait être augmenté, mais c'est ce dont vous avez discuté l'autre jour. On se retrouve à un point où il y a trop de députés au Parlement, surtout lorsque l'on tient compte des gens au bas de la pyramide, c'est-à-dire les personnes qui sont surreprésentées, les provinces qui sont surreprésentées et elles le sont de façon considérable, pour certaines d'entre elles. Si vous fondez les changements sur ce facteur, afin d'en faire votre dénominateur commun, vous allez devoir accroître démesurément la taille de la Chambre des communes.
Je pense qu'il est bien d'éliminer cette partie de la solution. Vous mettez cela de côté et vous vous attaquez au reste. C'est pour cette raison que je pense que ce projet de loi ne peut probablement pas être amélioré.
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Merci, monsieur le président.
Monsieur Kingsley, je vous remercie d'être parmi nous.
Le projet de loi traite de la question de la répartition des sièges par province. Cela attire beaucoup l'attention, c'est normal, mais il y a aussi beaucoup d'autres aspects plus techniques. Vous en avez soulevé. Ce sont des aspects pour lesquels nous, parlementaires, n'avons pas forcément toute l'expertise. En tout cas, moi, je ne l'ai pas. Vous en avez considérablement plus que nous.
Ma question est donc très générale, mais importante. Voyez-vous dans ce projet de loi des choses que l'on pourrait améliorer, du point de vue du déroulement des élections, pour toutes les questions qui ne relèvent pas de la répartition des sièges par province?
:
Dans le rapport produit en 2005, quand j'étais directeur général des élections, toute une gamme de propositions visant à améliorer le processus avaient été faites. On a mis l'accent ici sur un projet de loi qui vise essentiellement une redistribution des sièges et une modification qui vise à accélérer les travaux. D'autres recommandations ont été faites qui, à mon sens, devraient être reprises par les commissions elles-mêmes. J'avais proposé de les considérer dans le texte de loi, mais ce n'est peut-être pas nécessaire.
M. Mayrand a indiqué, lors de son témoignage, qu'il prévoyait faire une conférence comme celle que j'avais organisée à l'époque, impliquant les présidents et les deux autres membres des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Il s'agissait d'une conférence réunissant 30 personnes qui durait trois jours. On épluchait alors les différents sujets et facettes, par exemple ce qui constitue une communauté d'intérêt, pour qu'il y ait une communauté de pensée à ce sujet. Les améliorations que je visais devraient, à mon avis, faire l'objet de discussions, donc être inscrites à l'ordre du jour de cette conférence précise, pour que ses membres puissent en arriver ensemble à un accord pour améliorer leur rendement.
Je vous donne un exemple. J'ai dit qu'il faudrait que l'on tienne compte des dimensions des réserves pour les Autochtones, les membres des Premières nations. Une réserve a été divisée en deux circonscriptions.
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Merci monsieur le président.
Nous avons parlé longuement de la formule, monsieur Kingsley. Vous avez également fait de nombreuses recommandations dans le rapport relativement aux commissions de délimitation des circonscriptions, au redécoupage et à la résolution de problèmes dans le cadre de ce processus. Et je suis heureux de constater que certaines de ces recommandations ont été adoptées.
En général, auriez-vous des propositions pour les commissions de délimitation des circonscriptions elles-mêmes? Que le projet de loi soit édicté ou pas, au début février, il faut que le processus d'établissement des commissions de délimitation des circonscriptions et les travaux de ces comissions se poursuivent.
Avez-vous constaté des problèmes au cours des dernières années lorsque vous gériez ce processus? Avez-vous des suggestions que vous aimeriez transmettre tant au comité qu'aux commissaires qui seront nommés dans bien des cas, et j'en suis certain, pour la première fois?
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Les recommandations que j'ai jugées pertinentes étaient contenues dans le rapport de 2005, parce que cela découlait de la rétroaction de la commission à l'intention d'Élections Canada. On leur a demandé de nous fournir de la rétroaction afin d'établir un consensus sur ce qui devait aller de l'avant. Les recommandations du rapport sont essentiellement ce que nous avons proposées.
Si je devais donner un quelconque conseil à une commission, je dirais que plutôt de viser un taux de variation de 25 p. 100 il faudrait mieux cibler un taux maximum de 15 p. 100. Si vous examinez les résultats, c'est généralement ce qu'elles font. Je ne pense pas qu'il y avait d'exceptions, sauf dans le cas d'une ou deux petites provinces, mais géographiquement vastes.
L'exception pour les régions très éloignées, qui signifie qu'il peut y avoir une variation de plus de 25 p. 100, devrait être maintenue parce que c'est la réalité au Canada. C'est ainsi que sont les choses. Le nord de la Saskatchewan c'est le nord de la Saskatchewan. Et il en va de même pour l'Alberta. Ce sont des choses que l'on ne peut pas changer.
Par ailleurs, ayez une discussion approfondie sur les communautés d'intérêt. Nous avons essayé de redéfinir cette réalité à maintes et maintes reprises et ce n'est pas facile. Il s'agit de comprendre comment les commissions vont interpréter cette réalité.
Voilà les meilleures recommandations que je pourrais formuler.
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M. Mayrand a indiqué qu'il y avait deux possibilités pour les parlementaires. Si l'on veut être ouvert d'esprit, on pourrait dire qu'il y en a en fait trois.
Premièrement, ils pourraient le signaler à une commission. Un parlementaire pourrait écrire à une commission au moment où elle est établie et demander qu'elle tienne compte de tel ou tel élément. Cela vaut ce que ça vaut et on peut même exercer une certaine influence. Les commissions examineront tout ce qu'elles recevront peu importe de qui ça vient y compris des parlementaires et tiendront compte des préoccupations.
Un parlementaire peut également se rendre en personne et faire valoir son point de vue. Personne ne sera refusé. Si je me souviens bien, on ne refuse personne. C'est une excellente possibilité dont devraient profiter les parlementaires.
La deuxième occasion se présente en fait lorsque l'on voit les résultats. Vous vous trouvez à ce moment-là à l'avant dernière étape et il se peut que vous ayez des objections ou de véritables préoccupations. Mais, il faut que neuf autres personnes soient d'accord avec vous. Et cela s'applique même si vous êtes membre du présent comité. Il semble y avoir un peu de confusion dans les notes. Il faut qu'il y ait dix personnes pour que le comité examine tout type d'objection. Le comité présente ensuite son opinion à chaque commission en fonction de chacune de ses préoccupations.
Si je me souviens bien, environ 60 p. 100 des préoccupations exprimées se traduisent par des changements. C'est assez considérable. Même si je me trompe un peu sur les chiffres et qu'il s'agit plutôt de 40 p. 100, c'est quand même valable.
Dieu merci, ce sont les commissions qui prennent les décisions finales et, qui plus est, elles sont indépendantes.
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Je blague. S'il tient compte des propriétaires d'armes d'épaule en zone rurale également, il suffit d'établir une frontière à cet endroit et de voir comment vont les choses.
Je veux faire un suivi. Je songeais à ne pas le faire parce que je pensais que l'opposition libérale avait laissé tomber la suggestion de M. Garneau de maintenir le plafond à 308 sièges. L'autre jour, des témoins nous ont dit que cela pouvait se faire. Aujourd'hui il a été suggéré qu'il serait peut-être possible de le faire, et toutes sortes de chiffres sont présentés, mais nous n'avons toujours pas vu de chiffres qui, selon l'opposition libérale, nous permettraient de changer la composition, de maintenir les 308 sièges et de faire en sorte de nous retrouver où nous en sommes maintenant relativement à une ébauche de répartition.
Selon nos calculs, le Québec par exemple perdrait six sièges, ce qui pourrait être fait sans amendement constitutionnel. Je pense que les 75 sièges constituent un changement législatif et non pas un changement constitutionnel. Terre-Neuve perdrait un siège, la Nouvelle-Écosse perdrait un siège et la Saskatchewan et le Manitoba perdraient probablement quatre sièges chacune, pour un total de 16.
Comme moi vous n'avez pas les chiffres exacts. Selon vous quels seraient les effets de ces changements? Croyez-vous que c'est une solution raisonnable étant donné que la Saskatchewan et le Manitoba se retrouveraient avec 10 sièges chacune par exemple, ce qui correspond au même nombre de sièges que le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse, c'est-à-dire 10 sièges chacune? La population dans ces deux provinces se situe à environ un demi-million et ces deux provinces, bien sûr, n'ont que six sénateurs, tandis que le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse en ont chacune 10.
Quels seraient les effets de ces changements si nous conservions le plafond de 308 sièges, que nous apportions ces changements qui feront en sorte que ces provinces, y compris le Québec... perdraient les 75 sièges qui leur sont traditionnellement alloués et se retrouveraient probablement à 69 sièges?