PROC Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 22 novembre 2011
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
La séance est ouverte. Nous tenons aujourd'hui une réunion publique. Conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 3 novembre 2011, nous étudions le projet de loi C-20, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867, la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales et la Loi électorale du Canada.
Notre séance d'aujourd'hui sera divisée en deux périodes d'une heure. Nous recevrons trois témoins dans chaque cas.
Nous accueillons donc ce matin M. Andrew Sancton, professeur de sciences politiques à l'Université Western Ontario. C'est un bon citoyen de London qui a également déjà fait partie de commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Si nous avons des questions à ce sujet, le moment serait bien choisi pour les poser.
M. Nelson Wiseman de l'Université de Toronto est également des nôtres. Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous. Nous recevons aussi M. Michael Pal, du Mowat Centre.
Chacun de vous peut nous faire une déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions des membres du comité.
Monsieur Sancton, voudriez-vous commencer?
C'est un plaisir pour moi d'être ici. Comme l'indiquait monsieur le président, j'ai été membre de commissions de délimitation des circonscriptions électorales en Ontario en trois occasions et j'ai déjà été appelé à témoigner trois ou quatre fois sur des questions liées à la modification de la répartition des sièges. En outre, j'ai rédigé en 2010 un essai pour le Mowat Centre sur le principe de la représentation selon la population dans la politique fédérale canadienne.
Le premier point que je souhaiterais souligner est que le projet de loi C-20 modifie la Constitution du Canada. La Constitution prévoit que le Parlement peut, seul, modifier la répartition des sièges à la Chambre des communes entre les provinces, pourvu qu'il ne contrevienne pas aux « principes de la représentation proportionnelle des provinces » et qu'aucune province ne se voit attribuer moins de députés qu'elle ne compte de sénateurs. Il n'existe aucune autre restriction à ce que le Parlement peut adopter en la matière.
Je suis heureux que le gouvernement propose de modifier la répartition des sièges à la Chambre afin d'améliorer la représentation relative de l'Ontario, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta. À mon avis, ne pas prendre une telle mesure aurait laissé la porte ouverte à une éventuelle contestation constitutionnelle de la répartition actuelle au motif qu'elle respecte de moins en moins le « principe de la représentation proportionnelle des provinces ». Je me réjouis également que le gouvernement propose qu'aucune province surreprésentée du fait de la répartition actuelle ne se retrouve sous-représentée après la modification de cette dernière.
Mais je ne saurais appuyer une modification de la répartition des sièges qui va en accroître le nombre de façon importante. Le gouvernement a bien sûr raison de souligner que, si nous voulons équitablement refléter la croissance démographique rapide de certaines provinces sans augmenter de façon importante le nombre de sièges, il nous faudra alors réduire le nombre de sièges d'autres provinces.
Selon mes calculs, on dénombre 22 occasions, depuis le début de la Confédération, où des provinces ont perdu des sièges lors d'une modification de la répartition au terme d'un recensement décennal. Ce phénomène se produit régulièrement au sein d'autres confédérations, et notamment aux États-Unis, où la taille de la Chambre des représentants est constante et où la représentation de chaque État est révisée, à la hausse ou à la baisse, à tous les 10 ans. La Constitution américaine ne permet pas au Congrès seul d'accomplir ce que le gouvernement souhaite que le Parlement accomplisse en adoptant le projet de loi C-20.
La fameuse « clause grand-père », qui fait qu'une province ne peut pas perdre de sièges d'une répartition à une autre, ou qui empêche que le nombre de sièges d'une province diminue sous le niveau de 1985, a été adoptée par le seul Parlement en 1985. Elle peut tout aussi aisément être abrogée par le seul Parlement en 2011. Et c'est très exactement ce que je vous invite à faire.
Si le Parlement permet à nouveau que des provinces perdent des sièges, les provinces à croissance démographique rapide pourront être traitées plus équitablement sans pour autant que la taille de la Chambre des communes ne s'accroisse trop — ou, en fait, sans qu'elle ne s'accroisse du tout. En adoptant le projet de loi du gouvernement qui prévoit qu'aucune province actuellement surreprésentée ne soit sous-représentée, vous garantirez qu'aucune province, de petite taille ou connaissant une croissance démographique lente, ne soit traitée inéquitablement. C'est la raison pour laquelle je favorise une intervention en ce sens. Certains pourraient y voir un avantage pour d'autres provinces que le Québec, et je pense tout particulièrement ici au Manitoba et à la Saskatchewan.
Je crois, d'après ce que j'ai pu suivre du débat jusqu'à présent, que l'on accorde beaucoup trop d'importance au fait de déterminer quelles provinces obtiendront plus de sièges et combien elles en obtiendront, alors que le fond de la question est de savoir si la répartition sera équitable et quelles répercussions elle aura sur la représentation relative de chacune des provinces par rapport à l'ensemble des autres. Si ce n'est pour les députés en poste, ou ceux qui aspirent à être députés, je crois que le nombre de sièges dans un province donnée n'est pas vraiment pertinent.
Ce dont se soucie le reste d'entre nous est que le pouvoir relatif des provinces à la Chambre reflète leur poids respectif en termes de pourcentage de la population totale du Canada. Je ne doute pas que tout le monde sache ici que la répartition des sièges au Sénat a pour conséquence de protéger la représentation des petites provinces du Canada atlantique, mais pas du Manitoba et de la Saskatchewan. Si l'approche que je privilégie est adoptée, je suis le premier à admettre que ces deux dernières provinces perdront relativement plus de sièges que les provinces atlantiques. Une mesure d'atténuation pourrait donc s'avérer nécessaire.
Mais le problème serait alors bien sûr, comme avec toute mesure d'exception, que les provinces à croissance démographique rapide y perdraient en termes de représentation relative, alors que le projet n'a justement d'autre objet que de rétablir une représentation équitable des provinces. Je serais donc favorable à ce qu'on offre certaines garanties en promulguant une règle qui a déjà été en vigueur de telle sorte qu'aucune province ne puisse se retrouver avec moins de députés qu'une autre dont la population est inférieure.
Je souhaiterais conclure ma présentation par une anecdote personnelle découlant de mon expérience au sein des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. J'ai été commissaire pour la première fois au cours des années 1980. J'avais consacré mes premiers articles universitaires à la question dans les années 1970. Au début des années 1980, j'ai été choisi par le Président de la Chambre des communes pour être l'un des trois membres de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales pour l'Ontario.
En vertu de la formule de l'amalgame adoptée en 1974, l'Ontario devait se voir accorder 10 sièges supplémentaires, et le nombre total de sièges à la Chambre des communes passer de 282 à 310. Nous avons rempli notre mandat de commissaires. Nous avons travaillé à un projet de nouvelle carte électorale, qui s'est révélée nécessiter un important redécoupage — et j'insiste sur ce point. Lorsqu'on ajoute beaucoup de sièges, il faut s'attendre à devoir changer encore plus de limites des circonscriptions. On ne peut pas simplement ajouter les sièges sans rien bousculer; toute la carte est transformée. Quoi qu'il en soit, nous avons tracé cette carte et l'avons présentée lors d'audiences publiques comme le prévoit la loi.
Sans exagération, nous avons alors dû affronter un déferlement de critiques. Pourquoi tous ces changements? Pourquoi plus de députés? Le juge, aussi sage qu'aimable, qui présidait notre commission a essayé d'expliquer que c'était dans l'intérêt de l'Ontario. Nos auditoires n'ont pas été convaincus, car ils savaient instinctivement, et à juste titre, qu'accroître la taille de la Chambre des communes pour refléter la croissance démographique rapide de l'Ontario ne pouvait être la seule façon de procéder.
Le gouvernement Mulroney a alors déposé un projet de loi abolissant notre commission et comportant une nouvelle formule, celle de la clause « grand-père » ou des droits acquis, qui a eu pour effet, avec le temps, d'aggraver la sous-représentation des provinces à croissance démographique rapide.
C'est cette formule que le projet de loi C-20 vise à modifier, mais sans abolir la clause « grand-père ». Je crains donc que, avec le projet de loi C-20, nous ne fassions que répéter cette grave erreur du passé. Les Canadiens souhaitent une représentation juste et équitable. C'est certainement ce que les Ontariens veulent et je suis entièrement de leur avis. Mais les gens ne veulent pas qu'il y ait plus de députés. Toutes les fois que je dis à quelqu'un ce que je fais dans la vie, c'est ce qu'il me fait savoir: « Nous ne voulons pas plus de députés ». Il est peut-être difficile, actuellement, de prendre la pleine mesure de leur mécontentement, mais je crois que, si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, ce mécontentement ira croissant à l'idée que l'augmentation du nombre des députés puisse devenir une réalité.
Merci, monsieur le président.
Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui.
Merci de m'avoir invité.
Je vais vous présenter brièvement mes observations en deux volets. Dans un premier temps, je vais vous parler des mesures positives incluses dans le projet de loi C-20, avant de vous entretenir de quelques modifications possibles pour d'autres problèmes que le projet de loi ne règle pas entièrement en vue d'optimiser tous les avantages de la représentation proportionnelle.
J'ai dégagé quatre changements principaux en vertu desquels le projet de loi C-20 améliore la situation. Premièrement, il permet de supprimer le plafond artificiel quant à la taille de la Chambre des communes. Suivant la formule de répartition actuelle, la population de chaque province est divisée par 279. Cette formule ne permet pas d'ajouter suffisamment de sièges aux provinces connaissant une croissance rapide, soit l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique. En supprimant ce plafond, il devient possible d'assurer une représentation de la population beaucoup plus fidèle qu'elle ne l'est actuellement.
Deuxième élément positif du projet de loi C-20, on accorde davantage de sièges à ces mêmes provinces dont la population croît rapidement. Ainsi, l'Alberta et la Colombie-Britannique auraient droit à ces six sièges supplémentaires, alors que l'Ontario en recevrait 15 de plus. M. Sancton a abordé la question de la représentation provinciale. Je crois qu'il faut surtout s'intéresser à la représentation des électeurs. C'est le traitement équitable de ceux-ci qui compte. Au-delà du nombre de sièges accordés à chaque province, il faut surtout se demander quel est le pouvoir électoral de chaque citoyen canadien. Dans l'état actuel des choses, les citoyens de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique sont sous-représentés. Il en est ainsi depuis des décennies. La croissance de la population dans ces provinces est surtout concentrée dans les secteurs urbains et suburbains. On le sait depuis assez longtemps.
L'évolution démographique fait en sorte que c'est désormais l'immigration qui fait croître les populations. Les immigrants, des membres des minorités visibles en vaste majorité, choisissent de s'établir dans les grandes zones urbaines de ces trois provinces — par exemple, dans le secteur du 905 autour de Toronto, dans l'agglomération de Vancouver, ou à Calgary et Edmonton. Nous essayons ici de déterminer quels électeurs sont sous-représentés. Il s'agit de plus en plus de néo-Canadiens qui vivent en banlieue et font partie d'une minorité visible. En donnant plus de sièges aux provinces à croissance rapide, le projet de loi C-20 améliore les choses en offrant un traitement plus équitable à ces électeurs. On augmente leur poids électoral.
Troisième aspect positif du projet de loi, on traite l'Ontario de la même manière que les autres provinces dont la population croît rapidement, soit l'Alberta et la Colombie-Britannique. Comme vous le savez sans doute, les versions antérieures de ce projet de loi prévoyaient une formule qui ne permettait pas une augmentation du nombre de sièges octroyés en Ontario dans une mesure aussi rapide qu'en Alberta et en Colombie-Britannique. Ce projet de loi traite les trois provinces de la même manière, et j'estime qu'il s'agit d'un point très positif.
En quatrième lieu, il faut penser que l'ajout de sièges à la Chambre des communes a l'effet non désiré de diluer la représentation proportionnelle du Québec. Ce projet de loi accorderait trois sièges supplémentaires au Québec. Je pense qu'il s'agit d'une bonne solution, car le pourcentage de sièges québécois à la Chambre des communes ne deviendrait pas ainsi inférieur à sa proportion de la population canadienne.
C'était donc les quatre éléments positifs.
Qu'est-ce que le projet de loi C-20 pourrait faire de plus afin de vraiment régler la question de la représentation proportionnelle? Le projet de loi s'attaque aux iniquités entre les provinces, comme pour le cas d'un agriculteur ontarien dont le poids électoral est inférieur à celui d'un agriculteur du Manitoba ou de la Saskatchewan. Le projet de loi règle cette problématique, mais pas celle du déséquilibre dans le pouvoir électoral au sein même des provinces. Dans chaque province, les résidents des banlieues et des villes ont un poids électoral nettement inférieur à celui qu'ont généralement leurs concitoyens des secteurs ruraux, sans compter qu'il y a aussi des disparités régionales.
Comme vous le savez, une fois que ces sièges sont alloués aux différentes provinces, ce sont des commissions indépendantes et non partisanes qui déterminent les limites des circonscriptions. Je pense que la plupart conviennent du bon fonctionnement de ces commissions, mais le problème se situe au niveau législatif.
La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales permet aux commissions de s'écarter de 25 p. 100, en plus ou en moins, de la moyenne d'une circonscription au sein de la province. On dit même que dans des circonstances exceptionnelles — lesquelles ne sont pas définies —, on peut aller encore plus loin. Pour une province dont les circonscriptions comptent en moyenne 100 000 personnes, la commission peut donc aller aussi bas que 75 000 et aussi haut que 125 000, sans même faire intervenir la disposition applicable aux circonstances exceptionnelles. Il s'agit en fait d'une déviation très importante qui distingue les circonscriptions fédérales de tout ce qui se fait ailleurs, tant au pays qu'à l'étranger.
Récemment, le Manitoba, la Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick et Terre-Neuve ont tous adopté des taux de variation beaucoup moins élevés. Ces provinces permettent désormais des écarts se situant entre 5 et 10 p. 100, sauf dans le cas des circonscriptions dont la situation géographique rend impossible de s'en tenir à la stricte représentation proportionnelle. Mais ces exceptions sont généralement plutôt marginales.
Comme le disait M. Sancton, les États-Unis tiennent au principe de l'égalité absolue des électeurs. Je signale d'ailleurs aux membres du comité que le Royaume-Uni étudie actuellement un projet de loi qui aurait pour effet de réduire le taux de variation à 5 p. 100, à quelques exceptions près.
Le Mowat Centre est d'avis que ce projet de loi devrait être modifié pour permettre une variation se situant entre 5 et 10 p. 100, à l'exception de quelques circonscriptions comme le Labrador. Le Labrador est séparé du reste de la province par un détroit. Même s'il ne compte que 25 000 à 30 000 résidents, il n'apparaît pas logique de vouloir le rattacher à une autre circonscription terre-neuvienne. C'est justement le genre de circonscription qui devrait être exemptée.
Je voudrais soulever un dernier point. Bien que ce projet de loi supprime la formule de calcul basée sur un quotient de 279 pour établir la taille de la Chambre, l'augmentation future du nombre de députés demeure limitée. Le projet de loi prévoit un quotient électoral de 111 161 pour la modification de 2011, ce qui nous rapproche grandement de la représentation proportionnelle — malgré que l'Ontario demeure légèrement sous-représentée. Mais la formule indiquée à l'article 6 du projet de loi fait en sorte que ce quotient de 111 000 sera augmenté en fonction du taux moyen de croissance de la population provinciale. En pratique, cela signifie que ce quotient de 111 000 se rapprochera davantage de 120 000, si les prévisions à moyenne échéance de Statistique Canada sur la population se révèlent justes. Selon l'interprétation que je fais de ces chiffres, la taille moyenne des circonscriptions en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique — non pas pour cette révision-ci en 2011, mais pour la prochaine en 2021 — continuera de croître pour atteindre des niveaux que le Parlement devrait selon moi considérer problématiques.
En vertu de la formule prévue dans le projet de loi C-20, les circonscriptions de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique compteront en moyenne quelque 122 000 personnes, alors que cette moyenne se situera à environ 82 000 dans le reste du Canada — et on ne parle ici que des moyennes. Il y a bien évidemment des cas extrêmes qui s'écartent beaucoup de ces moyennes. Nous proposons donc comme solution que l'on conserve le nombre de 111 161 comme quotient électoral permanent pour l'avenir.
Ce projet de loi aura donc pour conséquence d'ajouter des sièges à la Chambre des communes. M. Sancton a soulevé des préoccupations tout à fait valables à cet égard. Mais si notre objectif véritable est d'assurer la représentation selon la population, une modification à la formule prévue nous aidera à y parvenir.
Voilà qui conclut mes observations.
Merci beaucoup pour le temps que vous m'avez consacré. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie de m'avoir invité et je vous prie de m'excuser de ne pas pouvoir m'adresser à vous en français.
J'ai pris connaissance du débat en deuxième lecture qui s'est tenu le 2 novembre. Je dois aussi remercier Michelle, votre greffière, qui m'a permis de me connecter à l'enregistrement audio de vos séances de la semaine dernière. J'ai aussi trouvé fort intéressant le document de recherche préparé par la Bibliothèque du Parlement en avril de l'an dernier concernant le projet de loi C-12, le précurseur de celui-ci.
Cette question de la répartition des sièges est bien sûr abordée dans les lois constitutionnelles de 1867 et 1915, mais a également fait l'objet d'un certain rafistolage législatif, non seulement en 1985 avec la clause des droits acquis, mais dans les années 1940, en 1946, en 1951 et en 1974. J'aimerais revenir sur certains des éléments soulevés par M. Pal, mais mon point de vue est un peu plus critique.
J'estime malheureux que cette question donne maintenant lieu à des querelles partisanes et soit politisée plus qu'il ne le faudrait. Je ne crois pas que nous devrions refaire l'exercice à tous les 10 ou 20 ans. Je pense qu'il faut établir un nombre fixe de sièges à la Chambre des communes, et je vous rappelle d'ailleurs que celle-ci devrait être considérée comme la Chambre des citoyens. Ce n'est pas la Chambre des provinces — ce serait plutôt le Sénat. En votre qualité de députés, vous redoublez d'ardeur d'abord et avant tout pour vos commettants et commettantes. C'est ce qu'on retrouve dans les sondages. Et les députés ne votent pas en fonction de leur province d'origine; ils votent dans la vaste majorité des cas en suivant la ligne de parti.
Bill Casey l'a appris brutalement à ses dépens. Il croyait devoir voter pour sa province et il en a payé le prix. Lorsque les députés terre-neuviens ont voté pour leur province, j'ai noté que leur chef a été pointé du doigt pour avoir manqué de rigueur.
Le ministre et d'autres intervenants ont indiqué que les Canadiens veulent que leur vote ait un poids égal à celui de leurs concitoyens, mais la véritable iniquité, comme l'a signalé M. Pal, se situe entre les secteurs ruraux et urbains. J'ai entendu au cours des audiences le député de Brampton Ouest parler de sa circonscription, et il me semble qu'il n'est pas aussi pertinent de comparer celle-ci à un comté rural de la Saskatchewan que de la mettre en parallèle avec une circonscription de l'Ontario rural. J'ajouterais que si vous remontez aux années 1960, voire encore plus loin, vous constaterez que la plus grosse circonscription au Canada est toujours dans la région de Peel, qui inclut Brampton Ouest. Donc, ce n'est rien de nouveau.
Ma position est conforme à celle adoptée par le premier ministre actuel, Stephen Harper, lorsqu'il a déclaré en tant que membre de ce comité en 1994-1995: « Il n'y a pas de raison que nos circonscriptions ne contiennent qu'une fraction seulement de la population des circonscriptions électorales des autres démocraties. »
Il proposait alors un maximum de 273 sièges. Je crois pour ma part que le maximum devrait être d'environ 260. La Chambre des communes a fonctionné plutôt bien avec un nombre de sièges semblable pendant plusieurs décennies. Selon la proposition du premier ministre actuel, huit provinces auraient perdu des sièges.
Permettez-moi de souligner que toutes les provinces canadiennes, à l'exception de Terre-Neuve, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, ont déjà perdu des sièges lors d'exercices de la sorte. Cela inclut le Québec qui comptait 75 sièges de 1953 jusqu'en 1965, mais n'en avait plus que 74 de 1968 jusqu'aux élections de 1974. Il fut une époque où la Saskatchewan avait le troisième plus important contingent de députés à la Chambre des communes. Je pense que ce fut le cas pendant plus de 30 ans. Comme nous le savons, son contingent actuel est le plus petit avec le Manitoba à l'extérieur des provinces de l'Atlantique. L'Ontario a aussi perdu des sièges durant la Première Guerre mondiale. Je crois qu'on se préoccupe trop de la représentation provinciale.
Je tiens à souligner que les députés sont ceux qui, d'abord et avant tout, parlent au nom de leur province, de leur premier ministre, de leur gouvernement ou de leur assemblée législative. C'est une question de compétence fédérale et je ne crois pas que nous ayons besoin de la contribution des provinces. Elles peuvent bien donner leur avis, mais il n'est pas nécessaire que nous les consultions — comme plusieurs intervenants dans le débat l'ont fait valoir — si nous souhaitons réduire le nombre de sièges. Cela n'exige pas une consultation auprès des provinces, comme M. Sancton l'a fait remarquer, pas plus que le soutien unanime de celles-ci, une autre affirmation erronée que l'on aurait entendue au cours du débat.
Lorsqu'il a comparu la semaine dernière, le ministre a indiqué que les provinces n'avaient pas été consultées lors de la préparation de ce projet de loi. Comme vous le savez sans doute, une consultation des provinces ne serait nécessaire qu'en cas de modification du nombre de sièges au Sénat. Pour supprimer la clause des droits acquis de 1985, il faudrait un amendement constitutionnel. Selon le National Post, la participation des provinces est requise pour ce faire. C'est une autre erreur que l'on ne cesse de perpétuer. À mon avis, cette clause pourrait et devrait être abrogée par la Chambre des communes, parce que sans cela, nous nous assurons d'une augmentation ininterrompue du nombre de sièges.
Lors du débat en deuxième lecture, le secrétaire parlementaire, M. Lukiwski, a déclaré, et je cite, que « c'est un principe fondamental de notre démocratie, que chaque vote devrait avoir le même poids ». Mais comme le signalait M. Pal, le Parlement ne respecte pas ce principe, car sa loi permet une variation de 25 p. 100, en plus ou en moins, par rapport à la taille moyenne des circonscriptions d'une province, lorsqu'on tient compte des sièges alloués à chacune d'elles. La Cour suprême a confirmé la validité d'une variation semblable. Je n'y vois pas de problème si ce n'est que je préférerais, comme M. Pal, que l'on réduise l'écart à peut-être 10 ou 15 p. 100.
La jurisprudence canadienne est bien différente. Aux États-Unis, on s'en tient rigoureusement au principe du droit à un vote d'un poids égal. Ce n'est pas la tradition au Canada. Chez nous, les tribunaux ont plutôt mis l'accent sur le droit égal au vote, si bien que ce droit a été octroyé à plusieurs qui n'en bénéficiaient pas auparavant, comme les juges, les Canadiens vivant à l'étranger, les détenus et certains autres comme les directeurs de scrutin.
Je ne crois pas que nous pouvons nous permettre une Chambre des communes qui demeure aussi imposante et ne cesse de prendre de l'expansion. Je note d'ailleurs qu'on a déjà diminué la taille de la Chambre des communes. En 1965, le nombre de sièges a été réduit de 265 à 264, et est demeuré à ce niveau jusqu'en 1979.
Mes critères ne sont pas principalement liés à des questions économiques. Les économies sont négligeables lorsqu'on considère que le budget approche les 300 milliards de dollars. J'espérerais plutôt qu'une Chambre des communes de dimension restreinte puisse permettre des échanges plus civils et un plus grand esprit de camaraderie entre des députés moins nombreux qui se connaîtraient mieux. Ce qu'il y a de paradoxal actuellement, c'est qu'on augmente la taille de la Chambre des communes tout en ayant recours davantage à l'attribution de périodes de temps, ce qui fait que moins de députés ont l'occasion de prendre la parole en Chambre. Cela me semble contradictoire.
J'ai entendu un député s'inquiéter du fait qu'une réduction de la taille de la Chambre causerait une anomalie du fait qu'une province maritime comme le Nouveau-Brunswick ou la Nouvelle-Écosse pourrait compter 10 députés, alors que le Manitoba et la Saskatchewan n'en auraient que six. Selon mon interprétation, cela ne peut pas se produire, car la loi prévoit notamment, selon le résumé législatif de la Bibliothèque du Parlement, qu'aucune province ne peut compter moins de sièges qu'une autre dont la population est inférieure.
Je proposerais un minimum de 10 sièges pour chaque province, à l'exception de l'Île-du-Prince d'Édouard et de Terre-Neuve, et je répartirais le reste des sièges proportionnellement. Il en résulterait bien sûr une légère sous-représentation pour toutes les autres provinces, mais il est question ici de pourcentages très faibles. Dans bien des cas, nous parlons de fractions de 1 p. 100, lesquelles disparaîtraient de toute manière lorsque les chiffres sont arrondis.
Il y a aussi la question du Québec qui est plus délicate.
D'accord, je vais me permettre un commentaire politique.
Je réside en Ontario. Dans les années 1990, le gouvernement ontarien a présenté un projet de loi que l'on a appelé la Loi réduisant le nombre de députés. Plusieurs des ministres principaux de ce gouvernement-là occupent désormais des postes semblables au sein du cabinet fédéral. Je note que le projet de loi porte le nom de Loi sur la représentation équitable. À l'époque, on a évité l'appellation Loi sur la représentation inéquitable, tout comme aujourd'hui, on ne parle pas de Loi augmentant le nombre de députés.
Je ne crois pas vraiment qu'il y ait urgence. J'ai entendu un ministre déclarer qu'il s'agissait d'un engagement pris durant la campagne électorale. Je ne me souviens pas d'avoir entendu un candidat ou encore le premier ministre déclarer: « Si vous nous élisez, mon parti et moi, nous allons augmenter le nombre de sièges à la Chambre des communes », pas plus d'ailleurs que je ne l'aurais lu sur un feuillet déposé dans ma boîte aux lettres.
Merci.
Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous nos témoins pour leur présence aujourd'hui.
J'aurais plusieurs commentaires à faire à ce sujet, mais je vais adresser ma première question à M. Sancton, et peut-être également à M. Wiseman, car vous êtes tous les deux d'avis que nous devrions diminuer le nombre de députés, plutôt que de l'augmenter. Avez-vous l'un ou l'autre consulté les provinces qui pourraient être touchées par l'approche que vous suggérez, notamment le Manitoba ou la Saskatchewan?
Monsieur Sancton?
Je n'ai pas consulté les gouvernements, mais je suis Manitobain. J'ai grandi au Manitoba et j'y étais lorsqu'on a réduit le nombre de sièges. Ce n'était pas un problème, car j'avais l'impression, à l'instar des autres Manitobains je crois, que l'important n'était pas le nombre de sièges, mais la représentation proportionnelle.
Je pense qu'on a réagi de la même manière en Saskatchewan. On y a perdu plus de sièges que dans toute autre province depuis la Confédération. La Saskatchewan est ainsi passée de 21 à 13 sièges. Ma thèse portait sur la politique dans les Prairies et je n'ai jamais constaté que cela avait pu poser problème au cours des trois premiers quarts du XXe siècle.
Je vous remercie.
Si j'ai posé la question c'est parce que, malgré la valeur de vos arguments concernant les sièges perdus en Saskatchewan, monsieur Wiseman, cela se passait il y a plus de 45 ans.
J'ai consulté les instances provinciales en Saskatchewan et je peux vous garantir que l'on ne se réjouit pas à l'idée de perdre des sièges. C'est la difficulté que je vois avec vos recommandations à tous les deux en faveur d'une baisse du nombre de sièges, car s'il est très facile d'en donner, il est très ardu d'en retirer.
Les choses ont changé au cours des 45 dernières années. Nous nous efforçons de créer un environnement propice à de saines relations fédérales-provinciales sur différents fronts. Si on commence à s'aliéner les provinces en leur enlevant des députés, je ne crois pas que ce soit la meilleure façon de procéder pour établir des relations semblables.
Je répète qu'aucune province ne s'est fait enlever des députés depuis plusieurs années déjà. Je comprends bien que bon nombre de Canadiens peuvent se dire, et je ne nie pas qu'ils se fassent cette réflexion, que la dernière chose au monde dont on a besoin, c'est bien davantage de députés au Parlement. Pourquoi toutes ces dépenses? J'entends sans cesse des arguments semblables relativement à d'autres questions, comme tous ces gens qui soutiennent que personne ne mérite un salaire d'un ou de plusieurs millions de dollars. Il est toujours facile de prétendre que cela coûtera trop cher.
J'estime que nous devons nous concentrer sur le fait qu'il nous faut un projet de loi qui, comme le soulignait M. Pal, va réduire l'écart au chapitre de la représentation proportionnelle en assurant une place plus équitable aux provinces dont la population augmente plus rapidement. Bien que ce projet de loi ne soit pas parfait — il ne permet pas une représentation égale et il y a encore sous-représentation dans le cas de la Colombie-Britannique, de l'Alberta et de l'Ontario — il comble assurément une grande partie du fossé.
Il convient peut-être alors de se demander s'il faut fixer un maximum quant au nombre de sièges. Devrait-on se limiter à 260, comme le suggérait M. Wiseman, ou aller un peu plus loin sans dépasser 308?
C'est un débat qui n'est pas prêt de se terminer. Mais j'ai consulté les provinces qui devraient subir une réduction du nombre de leurs représentants et je peux vous assurer — malgré ce que vous affirmez, monsieur Wiseman — qu'il y aurait du mécontentement.
Monsieur Sancton, je vois que vous souhaitez intervenir, alors je vais certes vous permettre...
J'aimerais répondre plus en détail à votre question concernant les consultations auprès des gouvernements provinciaux.
Si on ajoute 30 députés et que certaines provinces n'en n'obtiennent aucun, elles se retrouvent perdantes. J'aimerais donc savoir si vous avez demandé au gouvernement de la Saskatchewan ce qu'il pense du fait qu'il n'obtient aucun des 30 députés que l'on ajoute à la Chambre, parce que...
M. Tom Lukiwski: Oui, j'ai posé la question.
M. Andrew Sancton: Et ils croient que c'est préférable? Ils ne pensent pas qu'ils sont moins bien représentés?
Certainement, ils croient que c'est préférable, parce qu'ils comprennent que les provinces à forte croissance ont besoin d'une représentation plus équitable, mais ils ne veulent pas que l'on réduise le nombre de députés de la Saskatchewan.
Je comprends votre argument, monsieur. Je vous dis simplement ce qui est ressorti de mes discussions avec la province.
Merci, monsieur le président, et merci, messieurs, pour votre présence.
Je vais débuter avec M. Wiseman. Si l'on remonte jusqu'à 1867, avons-nous déjà eu une situation d'équité parfaite où tous les votes étaient égaux?
Non. Pendant la plus grande partie de l'histoire de notre pays, les limites des circonscriptions étaient plus souvent qu'autrement fixées par le gouvernement, ce qui donnait lieu à certaines manipulations. Je pense que nous avons vraiment fait beaucoup de progrès, car nous pouvons maintenant nous fier à ces commissions de délimitation indépendantes, sans compter les importantes améliorations apportées à la loi. J'estime que ce fut une grande percée. Cependant, je me préoccupe toujours du fait que l'on entende ici des commentaires de gens qui donnent l'impression de représenter les gouvernements provinciaux.
Les députés ne doivent pas perdre de vue leur rôle. Vous siégez à la Chambre des citoyens. Vous avez été élus par les citoyens de la Saskatchewan, pas par le gouvernement de la Saskatchewan. Je veux donc que l'on mette l'accent sur la représentation démographique, et c'est l'objectif que je nous donnerais, même si j'estime que la norme américaine est trop stricte. Ce n'est pas une question de relations interprovinciales; il s'agit de réduire les disparités entre les électeurs ruraux et urbains.
Si je comprends bien votre point de vue, vous seriez tout de même favorable à des exceptions dans des cas comme les territoires ou le Labrador, par exemple.
Oui. Je crois qu'il y aurait un siège pour chacun des territoires. On a parlé du cas du Labrador. Je dois signaler à ce sujet qu'il existe des circonscriptions séparées entre des îles et la terre ferme. Je pense notamment à celle d'Elizabeth May qui comprend les îles Gulf et la péninsule Saanich qui inclut une grande partie de Vancouver. Je ne crois pas que les îles Gulf devraient avoir leur propre circonscription. Pour le Labrador, les choses peuvent être différentes.
Pour les circonscriptions nordiques éloignées, je pense que les tribunaux ont accepté lors d'une cause en Saskatchewan une variation pouvant atteindre 50 p. 100. Mais il s'agit seulement d'un très petit nombre de circonscriptions, au maximum une dizaine. J'estime que nous devrions nous rapprocher d'une représentation véritablement proportionnelle, en réduisant par exemple la variation à 10 p. 100.
Je pense que c'est faisable. Je crois qu'on peut même aller plus loin, comme on l'a fait aux États-Unis. Je constate simplement que notre jurisprudence a plutôt toujours fait primer les intérêts de la collectivité et les traditions. Collectivement, nous accordons plus d'importance à nos traditions constitutionnelles que ne le font nos voisins américains qui mettent surtout l'accent sur l'individu. Je suis donc conscient de ces limites. Je crois simplement que le taux de variation actuel est beaucoup trop élevé.
La loi permet aux commissions de délimitation d'utiliser une variation maximale de 25 p. 100. Il leur est toujours possible d'indiquer qu'elles ne vont utiliser ce maximum que si c'est vraiment nécessaire.
Elles ne l'ont pas toujours fait; elles le font maintenant. Elles sont tout à fait à l'aise à l'intérieur de ces limites qu'elles considèrent normales. Ce sont les électeurs des banlieues qui en souffrent; ils sont sous-représentés dans l'ensemble par rapport aux électeurs des secteurs ruraux. Il y a aussi des cas où les électeurs des banlieues sont sous-représentés comparativement à ceux des grandes villes. Si vous habitez Brampton, votre vote a moins de poids que si vous résidez au centre-ville de Toronto. Il y a aussi d'autres anomalies comme le poids électoral de l'Ouest ontarien qui est différent de celui de l'Est de la province. Sur quels principes ces disparités se fondent-elles?
Il n'est pas nécessaire qu'on descende jusqu'à 5 p. 100 — je crois que le taux pourrait être de 5 ou 10 p. 100 — mais on s'est servi des exceptions légitimes comme la circonscription la plus au nord de l'Ontario, le Labrador ou les îles Gulf, pour établir la règle des 25 p. 100. Nous devrions plutôt fixer une norme plus stricte et prévoir des taux différents pour le petit nombre d'exceptions véritables.
Alors vous seriez favorable à des exceptions de la sorte. La circonscription de Timmins-Baie James en ferait par exemple partie.
Je dirais que ce serait sans doute le cas. Il faudrait examiner la situation des différentes circonscriptions pour voir s'il y a exception, mais je ne pense pas que l'on devrait laisser cette tâche aux commissions de délimitation, parce qu'elles finissent par se servir de ce pouvoir discrétionnaire pour sous-représenter certaines circonscriptions et en surreprésenter d'autres où une telle mesure est moins justifiée que pour le Labrador ou le nord de l'Ontario par exemple.
Alors comment définiriez-vous l'exemption? Quels seraient les critères pour avoir droit à une exemption?
C'est une question très intéressante. Il faudrait notamment examiner la superficie pour ne retenir que les circonscriptions vraiment très étendues. On pourrait s'en remettre à l'expertise des commissions de délimitation qui ont détecté des cas récurrents de surreprésentation. Mais...
[Français]
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
D'abord et avant tout, je vous prie de nous excuser de vous imposer des contraintes de temps aussi rigoureuses. Nous en avons d'ailleurs discuté entre nous. Nous n'avons pas eu gain de cause. J'espère toutefois pouvoir convaincre mes collègues conservateurs qu'il serait bon que la Loi sur la représentation équitable ne devienne pas la Loi augmentant le nombre de politiciens.
Je suis persuadé que nous pouvons trouver des solutions. Nous convenons tous que les proportions proposées sont adéquates. L'Ontario n'est pas laissée pour compte; le Québec non plus. Les proportions sont acceptables, mais nous ne nous entendons pas sur la taille de la Chambre des communes. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Vous êtes deux à avoir indiqué très clairement que vous préféreriez qu'on n'ajoute pas de sièges à la Chambre, et M. Wiseman a déclaré qu'il voudrait qu'on en diminue le nombre.
Que pensez-vous de la solution de rechange dont vous êtes sans doute au fait qui prévoit de remplacer le taux fédéral actuel par une variation de 15 p. 100, c'est-à-dire qu'aucune province ne pourrait perdre plus de 15 p. 100 de ses sièges à chaque révision? Nous pourrions ainsi demeurer à 308 sièges en assurant la même proportion à chaque province, ce qui nous procurerait une certaine équité sans gonfler la Chambre de 30 sièges supplémentaires.
Je demanderais à chacun de vous de répondre.
Monsieur Dion, je suis essentiellement en faveur de cette proposition. C'est d'ailleurs ressorti de l'exposé que je vous ai présenté.
Si vous aviez un tel coussin faisant en sorte qu'une province ne pourrait perdre plus de 15 p. 100 de ses sièges, cela aurait pour effet de restreindre la force relative des provinces dont la population croît rapidement. Mais je suis conscient des compromis pénibles auxquels il faut en arriver, et on nous a déjà parlé des répercussions pour la Saskatchewan. Compte tenu des circonstances difficiles de la sorte, je pense qu'il s'agirait d'un compromis juste et honorable. Je suis donc en faveur d'une formule semblable.
Est-ce que la formule de représentation idéale serait uniquement fondée sur la proportionnalité? Je pense que c'est sans doute le cas. Mais compte tenu des contraintes constitutionnelles avec lesquelles nous devons composer, comment pouvons-nous nous en tirer? Si l'on supprime la clause des droits acquis, vous nous dites donc que certaines provinces dont la croissance est plus lente vont perdre des sièges pendant que d'autres n'en perdront pas, ce qui fait que ces provinces ne seront pas traitées sur le même pied. Je vous soumets que les versions antérieures de ce projet de loi ne traitaient pas toutes les provinces à forte croissance sur le même pied — l'Ontario avait droit à un traitement différent de l'Alberta et de la Colombie-Britannique — de telle sorte qu'on imposerait la situation inverse aux provinces à faible croissance, ce qui est problématique.
Cela m'amène à poser une autre question. Une fois que l'on aura réparti certains des sièges découlant des droits acquis en 2011, qu'adviendra-t-il lors de la prochaine révision en 2021? Je ne suis pas certain qu'il y aura alors suffisamment de sièges supplémentaires à répartir, ce qui nous obligera à en ajouter de nouveaux. Comme vous le dites, on ne ferait que retarder l'ajout de sièges. Si votre but est d'éviter un tel ajout, vous ne faites que reporter l'échéance d'un exercice, car les chiffres ne me permettent pas de penser que l'on pourrait attendre davantage, si l'on veut s'en tenir à la représentation proportionnelle.
Eh bien, je préférerais qu'il y ait moins de sièges à la Chambre des communes. J'étais inquiet lorsque le nombre de sièges est passé à environ 295. Je préférerais donc qu'il y en ait 308 au lieu de 338. Je ne comprends pas tous les détails techniques du projet de loi. Mais, franchement, je ne comprends pas non plus les prévisions selon lesquelles ce projet de loi permettra de répondre à la croissance démographique des prochaines décennies. Le problème, ce n'est pas la population totale du Canada, mais les migrations interprovinciales. On pourrait enregistrer, comme par le passé, un exode de la Saskatchewan, d'importants mouvements de population en Alberta, ce qui entraînerait, si on ne peut jamais réduire le nombre de sièges, un accroissement continu de la Chambre.
Eh bien, je dirais que ce n'est pas seulement une question de coûts. J'ai été ministre des Affaires intergouvernementales assez longtemps pour savoir que lorsque vous avez beaucoup de députés, ils veulent être maires ou députés provinciaux. Pour assurer l'efficacité de notre fédération, il serait préférable de ne pas augmenter les sièges de la Chambre, de s'en tenir à 308.
Monsieur Pal, nous avons la même proportion que le gouvernement, avec 308 sièges. Si, comme vous le dites, nous aurons à augmenter le nombre de sièges pour des raisons démographiques —bien qu'il soit difficile de prévoir, comme vous le savez... En fait, Immigration Canada a publié de nouvelles données aujourd'hui, montrant que les immigrants s'installent davantage dans les Prairies qu'en Ontario. Si c'est le cas, ne croyez-vous pas que ce soit une raison de plus de conserver 308 sièges pour l'instant et qu'on puisse obtenir le même rapport que celui prévu dans le projet de loi?
Dans les années 1960, comme M. Wiseman l'a mentionné, nous avions une formule qui a fait perdre des sièges à certaines provinces. Dans les années 1970, nous avons adopté la formule de l'amalgame, dont M. Sancton a parlé, qui visait principalement à préserver le nombre de sièges de ces provinces. Le Parlement sait que la formule réduirait ultimement le nombre de sièges de certaines provinces. Il s'expose à des pressions politiques et c'est à lui de décider, mais je crois qu'il s'agit d'une proposition très difficile, monsieur.
Il faut se demander aussi s'il est juste de réduire la représentation de certaines provinces dont la croissance est plus lente, et pas celle des autres. Il faudrait vraiment, je crois, se demander si c'est une façon appropriée...
Merci.
Nous allons essayer d'entendre le plus grand nombre de questions possible. Nous allons entreprendre une série de questions de quatre minutes.
Monsieur Reid, je vous prie.
Pourquoi ne pas commencer la série de quatre minutes après mon intervention?
Tout d'abord, en ce qui a trait à la description du problème intraprovincial par rapport au problème interprovincial — parce que nous parlons de deux choses ici —, je ne suis pas d'accord pour dire que les régions rurales sont surreprésentées et que les régions urbaines sont sous-représentées. Toutefois, je dirais que les banlieues sont sous-représentées par rapport à tout le reste.
Cela veut dire que je suis d'accord avec vous, monsieur Pal.
J'en ai fait l'expérience après l'élection de 2000. Le plus grand nombre de votes exprimés au Canada a été enregistré dans la circonscription que je représentais alors, l'ancienne circonscription de Lanark—Carleton, formée de banlieues en croissance en périphérie d'Ottawa.
Monsieur Sancton, vous êtes le seul témoin à avoir fait partie d'une commission de délimitation des circonscriptions. Vous avez examiné des circonscriptions comme celle-là et bien d'autres semblables en périphérie de Toronto.
Pouvez-vous tenir compte des prévisions de croissance démographique pour éviter que cette situation ne se représente plus tard, ou est-ce qu'on vous interdit de le faire?
C'est une bonne question, monsieur Reid.
La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales comportait une disposition permettant aux commissions de tenir compte de la croissance prévue, mais le Parlement a abrogé cette disposition. Reste à savoir ce qui a motivé le Parlement à agir ainsi. Il semblerait qu'il ne tenait pas particulièrement à ce que les commissions se penchent sur cet aspect.
C'est intéressant. Savez-vous si les projections utilisées étaient fausses ou inexactes? Était-ce là la raison?
Selon moi, monsieur, les projections étaient utilisées pour ajouter des sièges ou des portions de siège dans certaines régions urbaines, et les députés des régions rurales considéraient que ce n'était pas une manière appropriée d'agir.
Je représente maintenant une circonscription entièrement rurale et je vais peut-être m'attirer plus de sympathie avec cet argument que j'en aurais eu en 2000. Qui sait? Quoi qu'il en soit, c'est un aspect très utile au débat.
J'aimerais revenir à une question qui a été soulevée. En 2021, nous serons probablement aux prises avec le même problème que nous avons maintenant — c'est ce que vous avez dit, je crois, monsieur Pal —, mais à un degré moindre que si nous n'avions rien fait. Si on maintient le statu quo, y aura-t-il une disproportion croissante entre, d'une part, l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique et, d'autre part, les provinces de l'Atlantique?
Si le projet de loi C-20 n'était pas adopté?
Si nous n'agissons pas avec une future version du projet de loi C-20 et n'ajustons pas encore la formule.
J'ai fait quelques calculs à ce sujet.
En 2021 avant la nouvelle répartition, selon les projections de Statistique Canada, qui ne sont évidemment que des projections, l'Ontario compterait environ 123 000 personnes par circonscription; il y en aurait un peu moins de 123 000 en Alberta, et 134 000 en Colombie-Britannique, contre à peine un peu plus de 81 000 ou 82 000 dans les autres provinces. Après la répartition, la situation s'améliore avec le projet de loi C-20. On obtient une moyenne d'environ 120 000 ou 122 000 dans les trois provinces à plus forte croissance. Si vous gardez le quotient de 111 000, la population moyenne par circonscription sera d'environ 110 000 ou 111 000 dans ces trois provinces. L'écart est encore important, mais il est moins grand selon la formule que propose le Mowat Centre qu'il ne le serait autrement. Si nous gardons la formule de 279, le projet de loi C-20 constitue une énorme amélioration. Nous proposons d'apporter d'autres ajustements à cette formule si nous voulons une meilleure représentation selon la population.
Je crois que ce serait 30 sièges de plus dans un premier temps, et on en ajouterait une vingtaine la fois suivante. Ce serait donc...
Notre formule ne vous permet pas d'ajouter une minute de plus à votre intervention. Je vais donner le même temps de parole à Mme Charlton, qui dispose de quatre minutes et vingt-deux secondes.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais amener la discussion dans une autre direction. Je comprends les arguments que vous avez avancés. Je regarde la proposition des libéraux pour l'Ontario, par exemple, qui donnerait une circonscription moyenne de 121 573 personnes, alors qu'elle est de 110 000 selon le projet de loi du gouvernement.
Monsieur Wiseman, vous avez dit qu'on pourrait très bien avoir 260 députés puisque, avec la clôture, le débat ne se prolonge pas de toute façon. C'est une observation très pertinente, mais ce que nous faisons à la Chambre n'est qu'une partie de notre travail. Nous avons d'importantes responsabilités dans nos circonscriptions. Nous devons notamment nous porter à la défense d'un certain nombre de personnes. Dans une circonscription où l'on trouve un très grand nombre de nouveaux immigrants, qui n'entrent pas dans ces chiffres puisqu'ils n'ont pas le droit de vote, je dois vous dire que c'est difficile de répondre à toutes les demandes au niveau local. J'ai souvent souhaité être députée de l'Île-du-Prince-Édouard, où la taille des circonscriptions est de 36 000 personnes.
Dans vos remarques, vous parlez seulement de la taille de la Chambre, en vous fondant sur les responsabilités que nous avons ici en tant que parlementaires et participants aux débats. Pourriez-vous nous parler des incidences sur la représentation des circonscriptions?
C'est une excellente remarque. Je sympathise avec les députés qui représentent beaucoup plus d'électeurs. Je pense que, sans ajouter de députés, nous pourrions fournir un meilleur soutien administratif et plus de fonds pour embaucher du personnel. Cela aiderait les députés qui ont davantage d'électeurs à s'acquitter de leurs responsabilités. Voilà comment nous pourrions y arriver, selon moi.
D'autres pays imposent un plafond, comme les États-Unis. Il y a un meilleur soutien pour les sénateurs et les membres du Congrès.
Mais nous examinons ce projet de loi à un moment où les pressions sur les bureaux de circonscription augmentent, à cause des compressions dans la fonction publique fédérale et les services gouvernementaux. Le gouvernement ne voudra donc pas hausser nos budgets en fonction des variations régionales. Nous examinons ce projet de loi à un moment particulier. Notre capacité de représenter nos électeurs non seulement ici, mais dans nos circonscriptions, me préoccupe beaucoup.
Monsieur Sancton, je ne sais pas si vous avez fait les calculs, mais savez-vous combien de sièges perdraient le Manitoba et la Saskatchewan?
Il reste à savoir si une mesure d'atténuation est appliquée. Mais, en effet, si la Chambre comptait toujours 308 sièges et que la disposition des droits acquis était supprimée, ces deux provinces tomberaient à 10 sièges. Je crois cependant que, si elles ne pouvaient pas perdre plus de 15 p. 100 de leurs sièges actuels, elles auraient environ 12 sièges.
Merci.
Ma dernière question s'adresse aussi à M. Wiseman. Je comprends que le président vous a interrompu, parce qu'il fallait accorder plus de temps à M. Reid. Je me demande si vous pouvez terminer votre exposé, surtout concernant le Québec.
Le NPD a parlé du Québec. En fait, le Québec a déjà perdu des sièges par le passé. Je ne suis pas aussi chaud à l'idée et je crois que les Québécois acceptent le principe de proportionnalité. Ils l'ont accepté dans la Loi constitutionnelle de 1867, ce qui n'était pas le cas avant, quand nous appliquions le principe du double veto dans l'ancienne province du Canada.
J'ai aussi remarqué qu'on a fait à maintes reprises référence à la motion sur le Québec en tant que nation. Mais une motion n'est qu'une motion, comme on trinque à la santé de la reine pour son anniversaire. Cette motion n'a aucun statut juridique, pas plus que la motion que le Parlement a adoptée, peu après le référendum en 1995, pour considérer le Québec comme une société distincte dans l'examen des projets de loi.
Pour revenir au fait, il convient de savoir de quoi nous discutons: le Québec doit avoir 23 ou 24 p. 100 des sièges. Ce qui m'importe, c'est le vote partisan des députés. Certains prétendent qu'ils siègent ici à titre de représentants provinciaux... ce n'est tout simplement pas le cas.
Merci, monsieur le président. Bienvenue aux témoins d'aujourd'hui.
Je veux revenir aux propos de Mme Charlton. Une des principales idées fausses, au moins pour certains d'entre nous qui sont élus depuis longtemps et qui ont peut-être occupé des fonctions dans différents ordres de gouvernement, c'est que notre travail de parlementaires ne concerne strictement que ce qui se passe à Ottawa. On l'entend beaucoup dans les médias et les établissements d'enseignement. En réalité, nous sommes élus par les gens que nous représentons et à qui nous devons rendre des comptes. Nous constatons souvent que, même si notre lieu de travail est situé à Ottawa, la grande majorité de nos tâches se font ailleurs.
Je veux obtenir un commentaire bref sur la perte de sièges. C'est différent si on est dans une province qui va obtenir des sièges supplémentaires, par rapport à une qui va en perdre. Je pense que la réaction est très différente.
Mais je vais parler de l'écart entre la campagne et la ville, parce que vous en avez parlé à deux ou trois reprises durant les discussions. Bon nombre de mes collègues des villes m'ont dit qu'il y avait bel et bien un écart. De cinq à dix députés des villes peuvent s'occuper des mêmes questions, tandis que dans bien des circonscriptions rurales, les questions diffèrent, même d'une circonscription ou d'une région à l'autre.
Je ne pense pas que nous ayons l'intention de nous laisser influencer par les gouvernements provinciaux, mais nous sommes très influencés par les électeurs dans la région que nous représentons. Je me demande donc comment vous envisagez l'écart complexe entre la ville et la campagne. Les exigences et la charge de travail ne vont pas diminuer dans les circonscriptions rurales, selon moi. Comment la représentation des gens de la campagne ne peut-elle pas diminuer, si nous réduisons le nombre de députés? Je pose la question, parce que la représentation va baisser à la campagne, selon vos dires.
C'est une question générale qui ne s'adresse pas à quelqu'un en particulier, mais j'aimerais obtenir vos commentaires là-dessus.
Le problème a été soulevé à plusieurs reprises dans les commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Le principe fondamental, c'est la représentation selon la population. Un vote en banlieue de Toronto doit égaler un vote dans une autre région du Canada. Malheureusement, la question n'est pas encore réglée.
Je trouve très difficile d'accepter qu'à l'heure actuelle, un vote dans la campagne ontarienne... Dans nombre de cas, un député rural de l'Ontario représente 30 p. 100 plus d'électeurs, et sa circonscription est bien plus grande par rapport aux autres provinces. Je comprends qu'il faut servir les électeurs, mais à mon avis, il faut d'abord résoudre la question de la représentation selon la population.
Il y a un certain nombre de variables. Il faut prendre des décisions et établir les priorités. Nous voulons prendre en compte les pressions bien réelles subies par les députés, les différences entre la campagne et la ville ainsi que la différence entre Brampton-Ouest et Davenport, dont la population ne représente que la moitié de celle de Brampton-Ouest, si je ne m'abuse. C'est donc différent; il faut un juste milieu.
Mais il me semble que le principe qui a orienté le travail du comité, c'est la proportionnalité entre les provinces. Ce n'est pas le dédommagement des députés ruraux en raison des différences d'une circonscription à l'autre, notamment. J'imagine que vous pouvez ajouter la question au projet de loi d'une façon ou d'une autre, si c'est ce que vous voulez. Sinon, vous pouvez prendre des mesures administratives pour accorder plus de ressources, comme je l'ai proposé.
Il faut se demander si tous les bureaux de circonscription doivent avoir le même nombre d'employés. À la campagne, dans le Nord et dans les banlieues, les députés ont peut-être besoin de deux ou de trois bureaux dans une même circonscription et de plus de ressources.
Merci, monsieur.
Il nous reste deux ou trois minutes.
Messieurs Albrecht et Toone, une question et une réponse brèves chacun.
Je veux simplement revenir à la question soulevée par Mme Charlton. Nous avons brièvement parlé des députés. Toutefois, non seulement le nombre de votes a une influence sur notre élection, mais nous devons représenter les électeurs. C'est bien de dire qu'il faut simplement ajouter des services administratifs, mais par expérience — et je suis certain que mes collègues m'appuient —, les électeurs veulent parler à leurs députés. Ils veulent parler à ceux qu'ils ont élus, pas au personnel. Nous savons que c'est difficile en réalité, et la plupart des gens le comprennent.
D'accord. Compte tenu de la grande différence entre, par exemple, Brampton-Ouest, qui compte 170 000 personnes, et les circonscriptions de 40 000 personnes de l'Île-du-Prince-Édouard, comment pouvons-nous continuer à donner les mêmes services aux électeurs? Quelle que soit la province, nous devons donner les services que les électeurs nous demandent.
Je dois brièvement défendre ma position, en tant que commissaire de délimitation des circonscriptions électorales pour l'Ontario. Concernant Brampton-Ouest ou ce genre de circonscription, j'aimerais que les gens examinent le nombre d'habitants en 2001, pas en 2006 ou en 2011. Les délimitations ont été établies de manière égale en fonction de la population à l'époque. C'est pourquoi nous avons entrepris une réforme. Nous le ferions même s'il n'était pas question du projet de loi C-20.
C'est vrai que nous avons des dispositions spéciales pour le nord de l'Ontario et que les circonscriptions de l'Île-du-Prince-Édouard sont plus petites. Nous n'y pouvons rien; c'est inscrit dans la Constitution, qui ne peut pas être modifiée, sauf avec le consentement unanime des gouvernements provinciaux. Vous devez vous occuper des choses qui peuvent être modifiées. La représentation peut être plus égale. Les commissions de délimitation des circonscriptions électorales vont permettre d'avoir des circonscriptions plus égales à l'avenir.
Monsieur Pal, nous allons permettre à M. Toone de poser une question. Nous espérons que vous pourrez y répondre.
La question et la réponse doivent être les plus brèves possible, s'il vous plaît. L'heure est terminée, et nous devons accueillir notre prochain groupe.
Merci. Je serai donc le plus bref possible.
Les discussions d'aujourd'hui se fondent strictement sur les chiffres et le nombre d'habitants des différentes circonscriptions. Nous avons aussi parlé des discussions qui se tiennent dans les provinces, par rapport aux discussions à l'échelle pancanadienne. Voilà ce sur quoi je veux me pencher.
Les tribunaux de la Saskatchewan ont rendu une décision en 1991 qui, selon moi, montrait clairement que le problème de représentation au Canada n'était pas simplement une question de chiffres, comme aux États-Unis, mais une question de représentation des collectivités. Nous n'en avons pas beaucoup parlé aujourd'hui, et j'en suis un peu déçu. Je veux en savoir plus sur la façon dont les élus peuvent représenter les collectivités partout au pays et la façon dont la réforme électorale peut mettre ces collectivités de l'avant. Notre système a ceci d'intéressant: il est vraiment non partisan. Nous devons nous concentrer là-dessus. D'après moi, il faut éviter de penser qu'il s'agit d'un système partisan et songer à la manière dont nous pouvons mieux représenter les Canadiens, qui sont si nombreux.
Pour être très bref, qu'est-ce qu'une communauté d'intérêts?
Croyez-moi, je ne pense pas que l'arrêt Carter, en Saskatchewan, nous a vraiment aidés à définir ce qu'était une communauté d'intérêt. En ma qualité de commissaire à la délimitation des circonscriptions électorales, il ne m'a pas aidé du tout. Et je crois vraiment qu'il revient au Parlement de décider quelles circonscriptions devraient obtenir un traitement spécial, si toutefois on accorde un tel traitement.
Je n'ai jamais été élu à quoi que ce soit; tout ce que j'étais supposé faire, c'était de travailler avec les données et d'essayer de tenir compte d'une certaine idée qu'on se faisait des communautés d'intérêt. Si les Canadiens souhaitent que certaines régions de l'Ontario ou de Terre-Neuve-et-Labrador fassent l'objet d'un traitement spécial, le choix de ces régions ne devrait pas revenir à un juge et à deux commissaires à la délimitation des circonscriptions électorales, mais au gouvernement.
Peu importe la définition de communauté d'intérêt, il faut l'appliquer uniformément. Traditionnellement, les Commissions de la carte électorale l'ont appliquée en fonction des petites collectivités les moins peuplées. Pourquoi les minorités visibles ou les électeurs des banlieues ne représentent-ils pas aussi des communautés d'intérêt? On devrait tenir compte de leurs intérêts; cela se produit-il lorsqu'ils sont sous-représentés? Je ne le crois pas.
Peu importe la définition utilisée, il faut l'appliquer uniformément non seulement à tous les groupes géographiques, mais aussi aux autres groupes.
Merci beaucoup. Nous allons nous arrêter pendant une minute, afin d'accueillir nos nouveaux témoins.
J'aimerais remercier nos témoins. Merci beaucoup d'être venus et de nous avoir aidés dans notre étude.
Monsieur Carty, merci de vous joindre à nous de la Colombie-Britannique. Nous sommes heureux de vous avoir avec nous.
M.M. Franks et Massicotte font aussi partie des témoins.
Monsieur Carty, d'après ce que je comprends, vous êtes également un ancien commissaire à la délimitation des circonscriptions électorales.
Très bien. Certains députés pourraient vous poser des questions à ce sujet aujourd'hui. Vous pourrez chacun livrer un exposé. Veuillez être aussi brefs que possible, afin que les députés aient suffisamment de temps pour poser leurs questions.
Monsieur Carty, veuillez commencer.
Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis désolé de ne pas pouvoir être avec vous en personne, mais en raison du temps et de la distance, c'est impossible.
Permettez-moi de vous expliquer quels sont mes titres de compétence dans le domaine. Tout d'abord, je suis un professeur de sciences politiques à l'Université de la Colombie-Britannique depuis les années 1970; j'ai donc une grande expérience pratique au sujet des questions soulevées par le projet de loi C-20.
J'ai commencé par travailler pour l'ombudsman de la Colombie-Britannique sur les questions d'ordre juridique, et ensuite pour la Commission Fisher, qui est à l'origine des premières causes judiciaires sur la constitutionnalité des modifications des limites. Ensuite, j'ai été un membre principal de l'équipe de recherche de la Commission Lortie, c'est-à-dire la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis. J'ai ensuite été nommé par le président de la Chambre des communes au poste de commissaire à la délimitation des circonscriptions électorales pour la Colombie-Britannique durant la dernière élection. Depuis, j'ai travaillé pour les assemblées de citoyens en Colombie-Britannique, en Ontario, aux Pays-Bas et au Nouveau-Brunswick.
Je comprends les objectifs du projet de loi C-20 et son intention d'assurer une représentation proportionnelle à la Chambre des communes. Je pense qu'il s'agit d'un but admirable que tout démocrate raisonnable devrait appuyer. Après tout, il me semble qu'il n'existe pas de justification raisonnable ou valide pour que plusieurs des provinces du pays soient continuellement sous-représentées et pour que leurs votes comptent moins que d'autres lorsqu'il s'agit de choisir notre gouvernement.
En ma qualité de commissaire à la délimitation des circonscriptions électorales, j'ai certainement entendu un grand nombre de citoyens ordinaires dire, aux audiences, à quel point ils pensaient que le système était injuste et qu'on entretenait un préjugé contre leur province et leur collectivité. Toutefois, je dois dire, malgré mon admiration envers le gouvernement et la Chambre pour leur détermination à rétablir l'équilibre dans les modes de représentation, que j'ai de grandes réserves sur la façon dont vous envisagez de procéder et sur les dispositions du projet de loi pour corriger la situation.
Laissez-moi vous expliquer. Lorsque j'ai commencé à enseigner la politique canadienne à l'Université de la Colombie-Britannique en 1974, il y avait 264 députés à la Chambre. Ensuite, en 1979, leur nombre a augmenté à 282. Lors de la révision de 1988, leur nombre a encore augmenté, cette fois à 295. Dans les années 1990, un autre remaniement a mené à 301 députés et après le remaniement de 2004, leur nombre a atteint 308. Au cours des trois décennies pendant lesquelles j'ai donné des cours au sujet de la Chambre des communes, elle a accueilli 44 députés supplémentaires, ce qui représente une augmentation de presque 20 p. 100. Maintenant, alors que ma carrière d'enseignant tire à sa fin, on propose d'ajouter 30 autres députés, pour un total de 338 députés. Il s'agit d'une augmentation de 74 députés, c'est-à-dire presque 30 p. 100, depuis que j'enseigne à l'Université de la Colombie-Britannique.
Le projet de loi promet aussi que ce nombre augmentera encore après le prochain recensement, et continuera d'augmenter avec le recensement suivant. La croissance se poursuivra ainsi lors de chaque recensement.
J'aimerais vous faire remarquer que le temps est peut-être venu de freiner cette croissance continue. Notre Chambre des communes est maintenant deux fois plus grande que celle des Australiens, et je pense qu'il est difficile de justifier cette croissance continuelle.
Nous savons pourquoi le nombre des députés ne cesse d'augmenter. C'est parce que cela semble le moyen le plus facile d'éviter les controverses liées au redécoupage et les inévitables revendications en matière de représentation soulevées par cet important exercice de rééquilibrage auquel vous avez décidé de vous livrer. Après tout, nous prétendons qu'aucune province n'a vraiment perdu quoi que ce soit, même si la proportion de ses sièges à la Chambre des communes ne cesse de diminuer. Les 10 sièges que possédera le Nouveau-Brunswick dans la proposition d'une Chambre des communes à 338 députés ne reviendront pas au même que les 10 sièges que la province possédait lorsque la Chambre comptait 264 députés, à l'époque où j'étais un étudiant de premier cycle à l'Université du Nouveau-Brunswick. En fait, son rôle a diminué — mais en ne touchant pas au nombre de sièges, nous prétendons qu'il n'en est rien.
Ce qui est vraiment important, bien sûr, ce n'est pas le nombre absolu, mais le principe démocratique de la représentation proportionnelle. Je pense qu'il est temps que les députés prennent le taureau par les cornes et s'engagent à prendre quelques décisions difficiles.
Il y a 17 ans, le député de Calgary-Ouest s'est adressé à la Chambre, en disant qu'on n'avait pas besoin d'augmenter le nombre de députés, et je pense qu'il avait raison. Cette année-là, il y avait seulement 295 députés. Je ne peux pas imaginer ce que ce député, Stephen Harper, qui est maintenant, bien sûr, le premier ministre du pays, pense du projet de loi C-20. Le projet de loi propose, en effet, une Chambre des communes qui compterait 43 députés de plus qu'il le jugeait nécessaire en 1994.
Je crois qu'il est important que vous demandiez à savoir à quel moment cette croissance s'arrêtera. Bien sûr, en évitant de poser la question, vous faites en sorte que la Chambre continuera de s'agrandir tous les 10 ans.
Bien sûr, pour assurer une représentation proportionnelle, nous allons devoir accepter que les très petites provinces comme l'Île-du-Prince-Édouard et les territoires aient un seuil sénatorial. Mais cela ne représente qu'un très petit nombre de sièges; le reste de la Chambre peut être organisée proportionnellement sans l'agrandir.
Mais — et bien sûr, il y a un mais, et il est important —, nous allons devoir accepter que le problème, c'est la soi-disant clause des droits acquis. C'est la raison derrière la croissance continuelle de la Chambre. Si nous éliminons la clause des droits acquis, nous pouvons arriver à un résultat proportionnel qui ressemble beaucoup à celui prévu par le projet de loi C-20, et ainsi veiller à ne pas répéter le processus tous les dix ans et à éviter que la Chambre s'agrandisse sans arrêt.
Je vous recommanderais donc de déclarer que la Chambre doit garder sa taille actuelle et qu'on ne doit pas l'agrandir encore une fois. C'est un arrangement qui fera perdre des sièges à certaines provinces, mais vous avez fait les calculs nécessaires. De toute façon, en vertu du projet de loi, sept provinces ou territoires verront la proportion relative de leurs sièges diminuer à la Chambre des communes. En effet, toutes les provinces sauf l'Alberta, la Colombie-Britannique et l'Ontario se retrouveront avec moins de sièges; seules les provinces que j'ai nommées en gagneront.
Je vous prie donc de devenir les députés qui s'attaqueront à ce qui, à mon avis, représente la bêtise de la clause des droits acquis, qui nous condamne à fonctionner avec une Chambre qui n'en finit plus de s'agrandir. Il s'agit, après tout, d'un règlement inventé par les députés des années 1980, et je pense qu'il vous revient de décider qu'il ne nous a pas été très utile et qu'il est temps de créer votre propre règlement.
Il ne fait aucun doute qu'un tollé s'élèvera contre une décision aussi résolue et raisonnable, mais il ne viendra pas des électeurs ordinaires. Je prévois plutôt qu'ils féliciteront les députés de la Chambre qui mettront fin à cette croissance continuelle.
Merci, monsieur le président, et merci aux membres du comité.
Comme cela arrive souvent dans le corps professoral, je ne serai pas d'accord avec tout ce que mon collègue, Ken Carty, vient de dire.
D'entrée de jeu, je dois dire que je ne suis pas trop enthousiaste à l'idée de la croissance de la Chambre des communes. Je pense qu'elle doit s'arrêter, à un certain point.
Je suis désolé de ne pas avoir eu le temps de vous envoyer mon exposé à temps pour qu'il soit traduit et distribué, mais permettez-moi de vous lire quelques données. La Nouvelle-Zélande a une population de plus de quatre millions d'habitants, et compte 122 députés et environ 36 000 citoyens par député. Le Royaume-Uni a 62 millions d'habitants et 650 députés, ce qui fait environ 96 000 citoyens par circonscription. Le Canada a une population d'environ 33,5 millions d'habitants, et compte 308 députés et près de 109 000 citoyens par député. L'Australie a une population de 22,8 millions d'habitants et 150 députés, et chacun d'eux se voit donc confier 151 000 citoyens. L'Inde, avec une population de 1,210 milliard d'habitants, a 552 députés, soit 2,2 millions de citoyens par député. Le Canada, en vertu du projet de loi C-20, aurait 338 députés, ce qui produirait un ratio de 99 075 citoyens par député.
Je n'examine pas la question sous l'angle de ce qu'il en coûtera pour trouver des bureaux aux nouveaux députés; je suis sûr qu'ils peuvent travailler à partir de leur chambre d'hôtel, comme nous, les professeurs, le faisons. Toutefois, j'aimerais vous faire remarquer, qu'il s'agisse de la proposition du projet de loi C-20 ou de la situation actuelle, le Canada se situe dans une zone — environ 10 p. 100 — plus grande que les Britanniques. Pour répondre à la question qui a été soulevée plus tôt au sujet des activités des circonscriptions, à mon avis, il s'agit du nombre le plus élevé de citoyens auxquels devrait se consacrer chaque député.
Les circonscriptions varient énormément dans le nombre de leurs activités; tout dépend si elles sont urbaines ou rurales, si elles sont au centre-ville ou en banlieue, si elles comptent des immigrants ou non, et du nombre de personnes âgées qui s'y trouvent — et, pour Kingston, du nombre de pénitenciers qu'elles renferment. C'est bien, mais je serais inquiet si le Canada comptait, comme l'Australie, 150 000 citoyens par député, car je pense qu'on finirait par négliger les activités liées aux constitutions ou qu'elles deviendraient trop difficiles à gérer.
Je n'ai pas de problème avec les 308 sièges que nous avons maintenant. Je n'aurais rien contre 338 ou 350 sièges, même si l'idée ne m'enthousiasme pas beaucoup. À l'époque de la Confédération, en 1867, on comptait moins de 20 000 citoyens par député, et seulement quelques milliers d'entre eux avaient le droit de vote. Nous avons parcouru beaucoup de chemin depuis ce temps. Heureusement, nous ne sommes pas dans la même situation que l'Inde; si nous respections ses proportions au Canada, il y aurait 15 députés à la Chambre. Mais il s'agit d'un système complètement différent. J'ai travaillé en Inde, et j'ai été stupéfait par la façon dont fonctionne la Lok Sabha, là-bas.
Comme nous le savons très bien, la répartition des sièges entre les provinces et les territoires ne se fonde pas sur la représentation selon la population. En effet, nous avons ce que j'appelle des « sièges acquis » dans les provinces de la côte Est, comme Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse, l'Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick. À mon avis, elles sont surreprésentées, et elles continueront de l'être à moins que toutes les provinces du Canada soient d'accord pour modifier la Constitution.
Je veux souligner certaines irrégularités. Si nous avions, au Canada, une représentation fondée sur celle de l'Île-du-Prince-Édouard, nous aurions plus de 900 députés au Parlement. Si nous avions une représentation fondée sur celle du Nouveau-Brunswick, nous en aurions près de 450. Je ne suis pas pour la représentation égale fondée sur la taille des provinces Maritimes. Je pense donc que nous devons vivre avec les irrégularités. J'accepte encore les territoires du Nord.
Je demande dans mon document si d’autres facteurs devraient être pris en considération comme les coûts, la taille de la Chambre, la taille des circonscriptions, etc. Je ne m'emballe pas à l'idée d'une croissance au Canada. J’ai la terrible impression que nous croyons tous qu’à une époque — normalement dans le passé —, nous vivions dans un âge d’or et que les choses se dégradent depuis, mais je ne crois pas que ce soit le cas pour le Parlement. À bien des égards, l’institution fonctionne beaucoup mieux qu’à l’époque où j’ai commencé à l’étudier dans les années 1950, surtout en ce qui concerne le travail dans les circonscriptions et en comité. Je ne crois pas que les coûts devraient influer grandement sur la décision concernant le nombre de députés à la Chambre des communes. Les coûts liés au Parlement sont minimes par rapport aux dépenses globales de l’État, et il faut déterminer quel prix nous sommes prêts à payer pour la démocratie.
La dernière question que je pose dans mon document est de savoir si le processus derrière l’élaboration du projet de loi a été juste, transparent et rigoureux. Voici ma réponse, et sentez-vous libres, messieurs les députés ministériels, d’être en désaccord avec moi à ce sujet. Le processus s’est déroulé en trois étapes. D’abord, nous avons mis l’accent sur l’Alberta et la Colombie-Britannique; ensuite, nous avons fait des ajouts en Ontario; enfin, nous avons ajouté des sièges au Québec. En consultant la documentation sur le Web qui explique le tout, je suis tombé sur une formule extrêmement complexe que je n’ai même pas envie de comprendre et qui explique comment nous en sommes arrivés là. J’ai des réserves sur ce qui s’est vraiment passé; selon moi, le gouvernement a fait une proposition, ce qui a fait réagir la population. Donc, le gouvernement en a fait une autre. Nous avons trouvé un bon compromis. Cependant, j’ai commencé ma carrière en tant qu’ingénieur et je peux vous dire que normalement, en sciences, la formule arrive en premier et elle nous permet de trouver les réponses. Dans le cas présent, nous avons d’abord trouvé les réponses, puis nous avons ensuite créé la formule. Je n’y fais donc pas vraiment confiance, et je me moque que ce soit bon ou mauvais, mais c’est sans importance dans le cadre de nos discussions.
Merci.
J’ai un dernier commentaire. Je trouve quelque peu troublant que le projet de loi ait été déposé à la va-vite en Chambre sans tenir au préalable de consultations publiques sur le sujet et qu’on accorde un temps assez limité pour en discuter. Je tenais à le mentionner, parce que les processus démocratiques sont le fondement de notre pays.
Merci.
Merci, monsieur Franks. Je suis d’accord pour dire que nous sommes également dans l’âge d’or de la présidence des comités.
Des voix: Oh, oh!
Le président: Monsieur Massicotte, allez-y.
Merci, monsieur le président.
[Français]
C'est pour moi un plaisir de participer à vos travaux, qui portent sur un enjeu qui m'intéresse depuis longtemps. J'ai suivi de loin la réforme de 1974, qui nous a donné l'horrible méthode de l'amalgame. J'étais un étudiant de premier cycle à cette époque. J'ai suivi de beaucoup plus près la réforme de 1985. J'étais alors attaché de recherche à la Bibliothèque du Parlement, et j'ai été affecté aux deux comités parlementaires qui ont examiné cette méthode. J'ai également comparu devant votre comité en 1994 lorsque le Parlement, dans sa sagesse, a tenté d'interrompre le processus de redistribution en cours. Enfin, j'ai écrit plus récemment une étude qui porte sur la redistribution électorale et le Québec, pour le compte d'un groupe de réflexion sur le fédéralisme.
[Traduction]
Mes opinions ne seront pas nécessairement partagées par tout le monde. À ma décharge, comme le regretté sénateur Forsey l’aurait dit, lorsqu’on me fait l’honneur de me demander mon opinion, on risque fort probablement de l’avoir.
[Français]
Personnellement, j'aurais préféré que la formule actuelle de répartition des sièges soit conservée, au moins pour la redistribution consécutive au recensement de 2011. Je lui trouve deux avantages. Premièrement, elle prévoit une augmentation modérée du nombre total de sièges, ce qui est un gros avantage par rapport à la situation qui prévalait antérieurement. Deuxièmement, cette formule ne traitait pas trop mal le Québec, sans le singulariser au seul titre de sa différence culturelle.
Je constate cependant, comme tout le monde, que cette formule entraîne pour les trois provinces en croissance une pénalisation importante destinée à croître. Cette pénalisation est maintenant jugée inacceptable par elles. Elle est d'ailleurs assez élevée par rapport à ce que l'on observe dans les autres fédérations. Les sept provinces en décroissance par ailleurs n'ont pas pu faire bloc pour défendre l'avantage que leur procure cette formule.
Le projet de loi C-20 propose un nouvel équilibre interprovincial de la représentation. Il y parvient, comme cela a été noté, au prix d'une augmentation substantielle du nombre total de sièges, soit 30 députés. Je vais traiter de ces deux dimensions consécutivement.
En ce qui concerne d'abord la répartition proposée entre les provinces, le projet de loi C-20 me paraît supérieur aux deux projets de loi antérieurement déposés par le gouvernement sur le sujet.
Désormais, il y aura trois classes de provinces. Les trois provinces en croissance vont rester sous-représentées, mais dans une moindre mesure. Les six provinces en décroissance autres que le Québec continueront d'être surreprésentées, mais à un moindre degré. Quant au Québec, il va être représenté proportionnellement à sa population, ce qui lui évite de devenir la seule province en décroissance à être sous-représentée. Toute province qui se retrouverait dans la même situation sera par ailleurs traitée de la même façon.
Donc, au total, il y a une progression dans la direction de l'égalité de représentation des Canadiens, mais elle ne se réalisera pas sur le dos du Québec. Ce dernier n'est d'ailleurs pas responsable pour l'essentiel des inégalités actuelles.
D'autres réclament que le gel de la représentation du Québec soit à 25 p. 100 du total, soit à son niveau actuel. Cette demande est motivée par le fait que les Québécois ont été reconnus comme nation par une motion de la Chambre des communes, en 2006, et qu'une nation a droit à un traitement privilégié parce que c'est une nation.
Personnellement, je ne suis pas à l'aise avec ce type d'approche. Dans mes recherches, je me suis rendu compte que je n'étais pas le seul, puisque je n'ai pas trouvé de parallèle à un tel privilège dans les autres fédérations démocratiques, même celles qui sont plurilingues ou qui ont un certain caractère plurinational.
J'en viens maintenant à la deuxième dimension, soit l'ajout proposé de 30 sièges aux 308 actuels. C'est une augmentation importante. Vérification faite, ce serait la plus considérable, en chiffres absolus, de toute l'histoire de la Chambre des communes. Vous vous souviendrez peut-être que c'est justement parce qu'elle impliquait de fortes augmentations que la formule de 1974, dite de l'amalgame, a été mise de côté après n'avoir servi qu'une seule fois.
Selon une proposition rendue publique vendredi dernier, que j'appellerai la formule 308 pour ne pas la personnaliser ou lui attribuer des relents de partisanerie, il serait possible d'obtenir à très peu de choses près le même équilibre interprovincial que celui proposé dans le projet de loi C-20, mais en faisant l'économie d'une augmentation de 30 sièges.
Dans mon texte, j'avais moi-même exploré cette piste sans arriver à des résultats qui me paraissaient convaincants. C'est donc avec beaucoup de scepticisme et d'esprit critique que j'ai examiné la proposition connue sous le nom de formule 308.
À la réflexion, je dois reconnaître que cette proposition mérite de votre part de sérieuses considérations. Je crois que c'est une piste valable. J'avais des inquiétudes, notamment sur le sort qui échoirait au Québec dans cette formule. Je constate qu'on y a pensé et qu'en fait, on a emprunté un aspect positif que comporte le projet de loi C-20. Je m'inquiétais aussi pour le Manitoba et la Saskatchewan. Or, je vois que leur cas est prévu par la clause des 15 p. 100. À mon avis, c'est une piste à explorer.
En terminant, j'ai une remarque sur le choix des chiffres de population qui serviront de base à la redistribution. C'est une question qui n'a pas été touchée par les intervenants précédents.
Le projet de loi C-20 rompt avec la tradition politique canadienne en la matière — tradition suivie d'ailleurs dans les deux précédents projets de loi du gouvernement —, en utilisant pour la première fois, pour le rajustement de la représentation des provinces, non plus les chiffres du recensement, mais les estimations de population ou les projections de population effectuées par Statistique Canada.
Je vous signale que, si l'on se fie aux données de 2001 et de 2006, les projections auront pour effet de diminuer un peu la part du Québec et d'augmenter celle de l'Ontario à l'intérieur du total. Ce choix, fait par le gouvernement, semble suggérer que les chiffres du recensement ne sont pas fiables pour déterminer la représentation de chaque province, mais que ces chiffres non fiables seront utilisés pour tracer les limites des circonscriptions. Je ne suis pas hostile à cette innovation, mais je pense qu'elle devrait être davantage justifiée.
Je vous remercie de votre attention.
[Traduction]
Je suis prêt à répondre à vos questions dans les deux langues.
Merci beaucoup.
Passons aux séries de questions et voyons combien nous serons capables d’en faire.
Monsieur Reid, vous avez cinq minutes.
Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à nos témoins qui nous ont transmis beaucoup de renseignements.
Monsieur Franks, j’ai une question pour vous, mais avant j’aimerais vous faire part d’une observation. Peu importe l’endroit et peu importe le sujet, vous êtes toujours l’un des témoins. Vous connaissez évidemment beaucoup de dossiers. J’ai trouvé très utile le témoignage que vous avez fait devant le comité au printemps dernier sur un tout autre sujet, et je vous en remercie beaucoup. J’ai fait un suivi à cet égard.
Je suis d’accord avec votre évaluation, à savoir que nous ne devrions pas nous inquiéter du nombre total de sièges. Je vous remercie d’avoir mentionné le nombre de sièges au Royaume-Uni où, contrairement au Canada, la superficie des circonscriptions n’influe jamais, je présume, sur l’efficacité des députés.
À titre informatif, j’ai eu l’occasion, avec le comité, de visiter l’Australie il y a environ six ans. Les gens de la commission électorale australienne m’ont remis une carte. En Australie, on permet seulement une différence de 5 p. 100. Les Australiens sont de fervents partisans de la représentation selon la population. J’ai eu la chance de voir son application associée à une forte population par circonscription. La taille de la circonscription de Kalgoorlie, ou la division électorale de Kalgoorlie, comme ils l’appellent, équivaut à environ la superficie combinée du Québec et de la moitié de l’Ontario. Voilà ce qui arrive lorsqu’on applique ces règles à grande échelle. Selon moi, nous avons des problèmes inhérents de cette nature dans de grands pays, comme le Canada ou l’Australie, qui ont une très faible population par siège.
J’aimerais ajouter un dernier commentaire avant de vous céder la parole. Nous exprimons constamment nos inquiétudes concernant les coûts associés aux députés. Si nous voulions nous attaquer à ces coûts, nous pourrions toujours modifier nos salaires ou les geler, au lieu d’opter pour l’une ou l’autre des possibilités envisagées, comme celle de refuser le droit aux Canadiens d’être représentés. Nous gagnons environ 150 000 $ par année; notre salaire est supérieur à celui de 98,4 p. 100 des Canadiens. Nous pourrions toujours décider de réduire nos salaires et d’avoir seulement un salaire supérieur à celui de 95 p. 100 de la population. De plus, nous pourrions ainsi économiser un peu d’argent, ce qui nous permettrait d’ajouter des sièges sans augmenter les coûts globaux. C’était tout simplement une réflexion.
Bref, j’aimerais que vous nous disiez si c’est raisonnable d’avoir une représentation moyenne similaire à celle du Royaume-Uni.
Je vous dirais que oui, en me fondant sur le nombre de députés et d’électeurs, et c’est le même enjeu que nous avons dans le Nord canadien, où il y a peu d’électeurs éparpillés dans de vastes circonscriptions. C’est aussi le cas dans le nord des provinces. Je crois que c’est tout à fait justifié d’avoir moins d’électeurs par député dans le Nord canadien.
En ce qui concerne le Sud canadien, je n’ai pas encore eu l’occasion de voir une étude détaillée sur le travail des députés dans leur circonscription. Pour ma part, j’en ai réalisé, et j’ai constaté que parmi les députés des grands centres urbains — et cela varie d’une circonscription à l’autre —, certains ont une énorme charge de travail, tandis que d’autres n’en ont pas.
Des voix: Oh, oh!
M. Ned Franks: Tout dépend des députés. Je me souviens d’avoir eu une conversation avec un député albertain à qui j’avais demandé au cours de la période des Fêtes: « À combien d’activités avez-vous assisté dans votre circonscription? » Certains d’entre vous peuvent deviner de qui il s’agit. Il m’a répondu: « Aucune. » Je l’ai regardé et je lui ai demandé de répéter. Il m’a de nouveau répondu: « Aucune. » Il en était très fier, mais je ne suis pas certain qu’il disait la vérité.
Bref, j’évalue le travail des députés dans leur circonscription. En toute honnêteté, en faisant abstraction des partis, ce que je ne devrais pas faire, ces activités représentent des moyens de communication entre le député et ses électeurs. Je n’ai jamais rencontré un député depuis ma première présence au Parlement en 1957, ce qui remonte bien au-delà de votre arrivée sur la Colline, qui n’était pas intéressé par ses électeurs. Jamais. Selon moi, ce sont eux qui passent en premier; ensuite vient votre parti. Essayez de transmettre le message à vos patrons.
Des voix: Oh, oh!
Monsieur Carty, si vous voulez intervenir, faites-nous signe pour nous le faire savoir.
Aimeriez-vous répondre à la question de M. Reid?
Eh bien, M. Reid aborde la question de la taille de la Chambre, et je dirais que c’est une importante question. À mon avis, le projet de loi vise à augmenter considérablement le nombre de députés sans expliquer pourquoi. C’est ce que les chiffres nous disent. Le projet de loi fera en sorte que la Chambre grossira année après année, décennie après décennie, parce que c’est ce que les dispositions que vous inscrirez dans la loi garantiront. La mesure législative ne rend pas la Chambre proportionnelle. C’est un compromis improvisé. C’est correct, mais il me semble que nous avons là une occasion, qui ne se présente qu’une fois par décennie, de réfléchir sur la taille maximale que devrait avoir la Chambre. Faut-il en limiter le nombre de députés? Comment devrions-nous nous y prendre? Quelle est l’importance de la proportionnalité?
Je crois que le projet de loi élude toutes ces questions. Il n’y répond en fait aucunement et garantit que nous ferons exactement la même chose que nous avons faite dans les années 1970, 1980, 1990 et 2000. C’est peut-être ainsi que les choses se dérouleront, mais je crois que nous ratons ici une belle occasion.
Monsieur Reid, votre temps est écoulé. Je m’excuse d’avoir pris du temps pour demander à M. Carty de faire un commentaire, mais je tenais à ce qu’il participe à la discussion.
Donc, faites-nous signe à l'avenir, lorsque vous voulez intervenir.
Monsieur Comartin.
J’ai d’abord un commentaire à faire. Il est question non seulement de la charge de travail associée à nos électeurs, mais aussi de l’accessibilité des députés.
Ma circonscription est quatrième au pays, ou peut-être cinquième maintenant, en ce qui concerne la diversité de sa composition. Je reste chaque fois surpris de constater à quel point mes électeurs qui ne sont pas nés au Canada ou ceux qui ont grandi ailleurs sont impressionnés par la facilité avec laquelle ils ont accès à leur député.
Si nous étendons tellement les circonscriptions que cette facilité d’accès diminue considérablement... J’ai environ 120 000 électeurs à ma charge, mais si ce nombre passait à 160 000, 170 000 ou 180 000, je serais beaucoup moins accessible. C’est tout simplement inévitable. Je me souviens d’avoir essayé d’assister à cinq différentes activités organisées au cours de la même soirée. C’est impossible, et nous serons encore plus en demande si nous augmentons le nombre d’électeurs par député.
Voilà pour mon commentaire. Voici maintenant ma question...
Monsieur Carty, je vais débuter par vous. Si je vous comprends bien, vous abandonneriez complètement le projet de loi et fixeriez un plafond. Réduiriez-vous le nombre de sièges? Voilà ma première question.
Quelle formule utiliseriez-vous pour les circonscriptions territoriales où l’on retrouve une faible population éparpillée sur un vaste territoire? Si vous permettez certaines exceptions, quelle formule utiliseriez-vous dans ces cas précis?
L’établissement d’un plafond est une décision plutôt arbitraire. Le Parlement fonctionnait bien lorsqu’il comptait 265 députés, tout comme c’était le cas, lorsqu’il y en avait 295. À mon avis, il suffit de s’entendre sur un nombre. En fait, la majorité des Chambres auxquelles M. Franks a fait allusion ont un tel plafond. Contrairement à nous, ces gouvernements ne se soumettent pas à un exercice perpétuel sur l’augmentation du nombre de députés.
En ce qui concerne les exceptions, je crois que c’est tout à fait raisonnable de dire que chaque territoire mérite un siège. La Constitution garantit bien entendu que les très petites provinces maritimes sont protégées en vertu du Règlement du Sénat. C’est notre réalité. Selon moi, il faut partir de ces valeurs connues, pour ainsi dire, en les déduisant du nombre de députés qui a été décidé. Ensuite, il suffit de répartir le reste des sièges de manière proportionnelle. Cette mesure fonctionne que la Chambre compte 200, 300 ou 400 députés. La Chambre en compte actuellement environ 300. C’est peut-être le temps d’y mettre un frein.
Je mets le comité au défi d’examiner cette possibilité, au lieu d’ajouter 30 sièges, ce qui porterait à 75 le nombre de sièges ajoutés depuis mes débuts dans l’enseignement il y a trois décennies. Voulons-nous vraiment que le nombre de sièges augmente encore autant dans 20 ou 30 ans? Eh bien, le nombre de députés connaîtra une augmentation semblable à moins de nous arrêter un instant et de réfléchir à ce que nous faisons.
Il y en aura donc 75 de plus au cours des 40 ou 50 prochaines années…
Quel en est le désavantage? Où le voyez-vous?
Je n'en comprends pas le bien-fondé. Si la Chambre ne cesse de grandir, je ne suis pas sûr qu'elle pourra accomplir ce qu'aujourd'hui elle ne peut pas faire. Inversement, je ne suis pas sûr qu'elle accomplisse ce qu'elle faisait lorsqu'elle comptait 265 sièges.
Nous l'agrandissons, non pas parce que nous avons une bonne raison pour le faire, mais parce que c'est le moyen facile de régler le problème de la redistribution. S'il y avait une raison justifiant une Chambre plus grande, nous en discuterions. Parlons donc de la Chambre dont nous avons besoin; mais nous ne le faisons pas. Nous l'agrandissons pour ne pas avoir à affronter le problème de certaines provinces perdant des sièges à cause d'une redistribution des sièges en fonction de la population.
Vous avez entendu les déclarations qu'ont faites un certain nombre d'entre nous à propos de l'accès à nos électeurs et de la charge de travail que nous avons en leur nom. Vous n'y voyez pas des raisons valables d'accroître le nombre de sièges?
Je pense que j'ai entendu suffisamment de commentaires de la part de citoyens aux audiences de la Commission sur les limites des circonscriptions qui se sont tenues il y a 10 ans dans toute la Colombie-Britannique.
Nous avons des circonscriptions fédérales qui ont pratiquement la taille de l'Angleterre et d'autres, celle de quelques pâtés de maisons. En écoutant les citoyens, nous nous sommes rendu compte que chaque district a ses propres difficultés — et chaque député, ses moyens propres de les surmonter. Certains députés ont trois employés qui ne font rien d'autre que de la traduction; d'autres, des chauffeurs qui les emmènent dans tout le district; d'autres encore, ont plusieurs bureaux. Ce sont donc des enjeux que chaque député doit traiter par rapport à ce qui distingue la collectivité qu'il sert.
Je vais vous arrêter là. C'est un petit peu moins de temps que celui qui a été accordé à M. Reid, mais j'ai pris un peu de son temps.
Monsieur Dion.
[Français]
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
J'aimerais commencer par vous donner deux citations.
La première:
Or, les progrès techniques réalisés dans les communications ont permis de réduire les dépenses et d'améliorer l'efficacité dans le secteur privé: il doit en être de même au gouvernement.
Et la seconde:
Les gouvernements provinciaux ayant compétence dans de nombreux domaines qui relèvent du gouvernement central dans les autres pays, il n'y a pas de raison que nos circonscriptions ne contiennent qu'une fraction seulement de la population des circonscriptions électorales des autres démocraties.
Ce sont des déclarations faites par un jeune député en 1994 et je crois qu'il avait raison. Après cela, j'ai eu une carrière très fructueuse.
Je veux parler des comparaisons qui ont été faites avec l'Angleterre.
Monsieur Franks, si l'on met à part l'Écosse et le pays de Galles, l'Angleterre est un gouvernement centralisateur; les députés y ont les responsabilités combinées d'un député d'une assemblée législative et d'un député du Parlement. Et malgré cela, ils ont récemment décidé — du moins ils en discutent — d'éliminer 50 sièges.
J'aimerais attirer l'attention de mes collègues sur une étude publiée en octobre par les professeurs Thomas, Loewen et MacKenzie comparant la qualité de la représentation au Canada et au Royaume-Uni. Par rapport au fonctionnement de la démocratie, le public n'est pas plus satisfait par le fait d'avoir un plus grand nombre de députés.
Je sais que nous sommes surchargés, mais si vous ajoutez 30 sièges vous serez quand même surchargés. Cela fait partie de la vie politique. Les professeurs aussi sont surchargés; j'en ai été un moi-même.
[Français]
Vous êtes quand même très occupé.
Je voudrais demander au professeur Massicotte de nous dire comment, à son avis, le Canada se compare au reste du monde à cet égard et en quoi cette comparaison peut nous éclairer dans le cadre de ce débat.
Plusieurs aspects sont en cause. On constate notamment qu'à l'échelle internationale, le Canada est moins égalitaire que la plupart des fédérations pour ce qui est de sa distribution. Je crois que seuls le Brésil, l'Argentine et l'Espagne le sont encore moins que nous. À mon avis, ça justifie qu'on se rapproche davantage de la représentation selon la population. J'ai aussi noté, dans le cadre de comparaisons avec le reste du monde, que l'idée selon laquelle on a droit à une meilleure représentation parce qu'on est reconnu en tant que nation n'était guère soutenue.
En ce qui a trait à l'augmentation du nombre de députés, les comparaisons à l'échelle internationale indiquent que, plus il y a de députés, plus ça dévalorise la fonction parlementaire, d'une certaine façon. Un exemple très précis me vient à l'esprit, et c'est celui de la Chambre des représentants de l'État du New Hampshire, aux États-Unis. Le New Hampshire, qui compte plus d'un million d'habitants, est représenté par 400 députés. En revanche, la Californie, dont la population dépasse celle du Canada, compte environ 80 députés. Le fait est que les 400 députés du New Hampshire sont à temps plus que partiel et disposent de ressources extrêmement modestes. Évidemment, lorsqu'on a 400 parlementaires, il est très difficile de mettre beaucoup de ressources à leur disposition. D'un autre côté, il n'y a que 80 députés en Californie, mais comme tout le monde vous le dira, ce sont des législateurs très professionnels parce qu'en raison de leur petit nombre, on peut leur octroyer beaucoup plus de ressources, ce qui les aide à faire leur travail.
Voilà, c'est ce que j'avais à dire.
[Traduction]
La formule 308 est le projet que le troisième parti à la Chambre a présenté. Je pense que vous le connaissez. Il s'agit de changer la clause des droits acquis par la règle des 15 p. 100 par laquelle on ferait en sorte qu'aucune province ne perde un grand nombre de sièges au cours d'une seule réattribution. La diminution de sièges serait toujours modeste. Ainsi, le Manitoba et la Saskatchewan conserveraient 12 sièges, au lieu d'en perdre.
Comme je l'ai indiqué dans mes commentaires, je pense que la clause des droits acquis est la source du vrai problème. Mais précédemment, il y avait la règle des 15 p. 100 par laquelle on évitait aussi de se poser la dure question de ce que devraient être les chiffres réels. Et si je devais pousser ma position principale à l'extrême, je dirais que nous devrions aussi nous débarrasser de cette règle.
Si nous avons en fait le sentiment que, après avoir fixé le nombre, nous devrions progressivement y tendre, quelque chose comme la règle du 15 p. 100 pourrait alors se justifier. Mais il me semble que ces règles sont des moyens différents d'éviter les questions réelles sur le nombre de sièges qu'il devrait y avoir à la Chambre, sur la fonction de la Chambre et sur ce que devrait être une représentation proportionnelle équitable.
En principe donc, je m'oppose à ces deux règles, mais je comprends que si vous vouliez établir un nombre précis, vous voudriez vous servir de quelque chose comme la vieille règle des 15 p. 100 à titre de mesure de transition.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais, monsieur Carty, me pencher sur certains de vos commentaires. Je comprends ce que vous voulez dire à propos d'un nombre établi et des étapes à suivre pour l'atteindre. Mais là encore, par rapport au bourbier ou au problème associé à la représentation minimale, que pensez-vous de l'effet que cela pourrait avoir dans les provinces des Prairies, si un jour le Manitoba ou la Saskatchewan avaient moins de sièges que le Nouveau-Brunswick ou que la Nouvelle-Écosse, en raison de la représentation au Sénat — ou le même nombre de sièges?
Je peux poser ces questions parce que je viens du Nouveau-Brunswick. Nous sommes coincés avec 10 sénateurs, 10 sièges. Nous n'allons rien perdre. Mais je me demande ce qui se passerait si certaines de ces provinces, par exemple une province de 1,2 million d'habitants et une province de 750 000, avaient le même nombre de sièges à la Chambre des communes — ou peut-être un peu moins.
Voilà. J'aimerais bien avoir une réponse.
Je pense que nous touchons là au coeur du problème. Si on en arrivait au point où trois ou quatre provinces importantes — et vous prenez le cas des provinces des Prairies, si elles avaient moins de sièges que le Nouveau-Brunswick —, je pense qu'on ne serait pas loin d'avoir de graves problèmes constitutionnels.
Le Nouveau-Brunswick et peut-être Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse, mais certainement aujourd'hui l'Île-du-Prince-Édouard, ont toutes ces garanties constitutionnelles. Mais si vous avez un système dans lequel près de la moitié des provinces — ou en fait plus, si vous comptez les provinces des Prairies — sont constitutionnellement protégées des principes d'équité et de proportionnalité, vous aurez à un moment donné un problème de démocratie. Vous aurez une crise de la démocratie.
En adoptant ce projet de loi, nous essayons essentiellement d'éviter cette situation et c'est ce que nous faisons depuis 40 ans maintenant. Chaque fois que nous procédons à cette nouvelle répartition, nous nous disons que nous allons reporter la question et laisser les députés s'en occuper dans 10 ans et nous ne changerons pas les chiffres.
La réalité est qu'en vertu du présent projet de loi, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard vont toutes avoir une plus petite part de la Chambre des communes. Nous ne changeons pas cette réalité. Nous réduisons leur part. Nous prétendons que non en ne modifiant pas leur nombre, pour ne pas avoir à faire face à la réalité.
Je ne suis pas d'accord. Il s'agit d'une simple mathématique à la portée de tous. En fait, nous haussons le nombre des sièges dans les grandes provinces tout en maintenant un certain équilibre parmi celui des plus petites.
Ce qui m'inquiète dans certains des témoignages que j'ai entendus aujourd'hui — en tout cas dans la première partie —, c'est qu'on semble penser que notre pays est composé tout d'abord de l'Ontario et du Québec. Cela semble satisfaire certains députés quand on songe à la redistribution des sièges. On ajoute ensuite la Colombie-Britannique et l'Alberta, et l'on pense à tout le reste comme des morceaux de la fédération qui ne méritent pas de faire partie de la discussion. Cela me trouble — surtout quand je vois les sièges du Sénat pour l'Ouest, les six sièges qui lui sont consacrés — car je me demande comment une fédération peut marcher lorsque les grandes provinces adoptent la représentation en fonction de la population alors qu'on laisse les plus petites de côté et qu'on leur dit qu'elles sont toutes pareilles même si en réalité elles sont toutes un petit peu différentes.
Je ne sais pas si on peut faire un commentaire à ce sujet.
Le problème de la Chambre des communes, c'est qu'on en parle par rapport aux provinces alors qu'il faudrait en parler par rapport aux électeurs s'il s'agit d'un système démocratique. À quel moment voulons-nous sacrifier le principe selon lequel tous les électeurs comptent de façon égale? Le choix que tous les Canadiens font de leur premier ministre, de leur gouvernement et de leur député devrait compter de la même façon. Or, ce n'est pas le cas et c'est même loin de l'être. Le projet de loi va un peu changer les choses, mais il ne touche pas au problème fondamental parce que nous ne nous soucions pas vraiment du principe. Je pense que c'est cela le message que nous transmettons.
Je mets les députés au défi de s'en occuper.
Merci.
J'ai deux questions, dont l'une découle d'un commentaire.
Monsieur Carty, vous avez dit au début de votre exposé que la Chambre ne fonctionne pas mieux aujourd'hui que lorsqu'elle avait 265 sièges. Je dirais que cela s'explique probablement par diverses raisons, mais cela vient surtout du problème que nombre de vos collègues ont étudié, à savoir la centralisation du pouvoir au sein du Cabinet du premier ministre, tendance qui remonte à Trudeau et à Mulroney, et qui se poursuit aujourd'hui. Je ne suis pas sûre que ce soit la taille de la Chambre qui détermine le plus son bon fonctionnement par rapport au pouvoir exécutif.
Lorsque vous dites que le nombre de députés est plus ou moins arbitraire, ce n'est pas purement un problème statistique. Chaque intervenant l'a en effet reconnu aujourd'hui: oui, les territoires devraient chacun avoir un siège, quelle que soit leur population. Personne ne propose de rouvrir la Constitution pour s'occuper des quatre sièges qu'occupe l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple. Et pourquoi cela? Laissez-vous entendre que nous devrions le faire?
La réalité est qu'il s'agit d'une combinaison de deux problèmes. Le problème statistique de savoir comment avoir une représentation en fonction de la population la plus juste possible et le problème politique. Il s'agit en partie de l'exercice d'édification de la nation, encore et toujours, et il s'agit de trouver des communautés d'intérêt.
J'aimerais vous entendre à propos de ce paradoxe.
Tant que des garanties constitutionnelles empêchent essentiellement une représentation égale — et c'est ce que font les quatre sièges du Sénat pour l'Île-du-Prince-Édouard —, on ne pourra pas le résoudre. Mais nous approcherions d'une solution par l'abolition de la clause des droits acquis en redistribuant les sièges de toutes les autres provinces — ou la grande majorité d'entre elles — en fonction de la population.
En tant que commissaire à la délimitation des circonscriptions, j'entends à presque toutes les audiences le commentaire suivant: « Vous savez, ce n'est pas juste. Vous nous donnez ces immenses circonscriptions du Nord, mais regardez l'Île-du-Prince-Édouard, elle a ces toutes petites choses. En tant que Canadiens, nous ne sommes pas justement représentés. » Cela m'a réellement frappé, parce que je m'attendais à entendre: « Eh bien, Vancouver prend tout, ce n'est pas juste. » On exprimait ainsi dans toutes ces audiences le sentiment profond que la répartition des sièges dans le pays n'était pas réellement juste, ni réellement égale. Les gens venaient y assister parce qu'elles leur offraient une rare occasion de faire valoir leur point.
Plus nous nous rapprocherons d'un genre d'attribution proportionnelle, plus les Canadiens auront le sentiment que leur voix est entendue de façon plus ou moins égale. J'accepte le fait que nous ne puissions pas faire grand-chose à propos de l'Île-du-Prince-Édouard, à moins de rouvrir la Constitution, mais je ne suis pas là pour faire un plaidoyer en ce sens.
Pourriez-vous toutefois élaborer sur votre commentaire précédent à propos de la Chambre qui ne fonctionne pas mieux aujourd'hui que lorsqu'elle avait 265 sièges? Pourriez-vous nous en donner d'autres raisons? Car je ne crois pas que votre commentaire concernait uniquement la taille de la Chambre. Il y a d'autres facteurs externes qui ont eu une profonde portée sur son fonctionnement. Je ne veux pas qu'on s'imagine que la loi sera la solution au problème ou qu'elle empirera les choses.
Je crains que vous n'ayez demandé la conférence numéro quatre du cours de sciences politiques de base, qui dure 50 minutes.
Je pense que la Chambre des communes fonctionnait au mieux de ses capacités dans le contexte de l'époque, des années 1970, 1980 et 1990. L'accroissement du nombre de ses sièges ne l'a pas changée de façon fondamentale ou rendue meilleure. Je ne pense pas que cela ait donné aux députés la capacité de représenter leurs électeurs de façon fondamentalement différente. Au fil des ans, j'ai observé les députés et en ai connu un grand nombre et je ne crois pas que chaque fois que nous augmentons la portée de leur travail, ils deviennent meilleurs ou que les citoyens du centre-ville de Vancouver ou des quartiers ruraux de Kingston soient mieux servis.
Merci, monsieur le président.
Ce que je comprends des témoignages des professeurs, à l'exception de MM. Pal et Franks, est que, d'une façon ou d'une autre, nous fixons un nombre arbitraire de députés pour la Chambre des communes. Faire cela serait, à mon avis, tout aussi erroné que de fixer un nombre arbitraire de professeurs dans un établissement d'enseignement postsecondaire.
Le fait que la population de notre pays va continuer de grandir est incontournable. Je suis sûr qu'en tant que professeurs, vous vous souciez tous du ratio étudiant-professeur et vous voulez pouvoir donner le même niveau de service à vos étudiants. Si la population étudiante devait augmenter de façon significative, je suis sûr qu'en tant qu'institution, l'université chercherait à accroître le nombre de professeurs pour continuer de donner le même niveau de service.
Il n'y a rien de différent dans ce que nous faisons ici. En fait, je suppose qu'à l'exception de M. Franks, je mettrais les autres au défi de déclarer avoir mené des études approfondies sur le type de travail que les députés font dans leur circonscription. Je suis tout à fait d'accord avec les déclarations de Mme Charlton et de M. Comartin selon lesquelles les exigences auxquelles les députés sont soumis sont considérables et n'augmenteront que si le nombre des électeurs augmente lui aussi.
Je suis tout à fait à l'aise de dire à tous les professeurs que c'est avec fierté que j'offre, comme d'ailleurs tous les autres députés, le plus d'attention et d'appui possible aux électeurs qui viennent me rendre visite dans ma circonscription. Pour moi, la possibilité d'engager d'autres employés et de leur confier des dossiers n'est pas une solution convenable et ne correspondrait d'ailleurs pas au niveau de service exigé par les électeurs.
Pour résumer, laissez-moi vous dire que je suis pleinement d'accord avec M. Franks. Dans une perspective plus large, les coûts liés à l'accroissement du nombre de députés sont relativement insignifiants par rapport à ceux qui sont associés à la prestation des services qu'exigent et que méritent les électeurs.
J'ai probablement dépassé mes quatre minutes, monsieur le président, mais…
Je veux dire que si l'un des professeurs ici présents a un commentaire à faire sur toute étude qu'il aurait menée sur le travail que les députés effectuent dans leur circonscription, je serais heureux de l'entendre.
Je peux en assurer le membre du comité: si le nombre de professeurs avait augmenté en proportion du nombre d'étudiants, nous serions bien plus nombreux qu'en ce moment. Quand j'ai commencé à enseigner, en 1992, il y avait environ 20 étudiants par classe, au premier cycle. Il y en a maintenant plus de 100 dans les classes de première année. Nous avons été en mesure de nous organiser, monsieur, et je crois que nous l'avons fait de manière très satisfaisante.
L'augmentation de la population justifie-t-elle l'augmentation à l'infini du nombre de députés? Je n'en suis pas si sûr. Nos voisins du sud semblent voir les choses différemment. La taille de la Chambre des représentants augmentait à chaque recensement, mais à un moment donné, il y a exactement 100 ans, en 1910, ils ont décidé de plafonner le nombre à 435, et il n'a pas changé depuis.
Bien entendu, à ma connaissance, le niveau des services qu'ils dispensent n'a pas diminué à l'excès. On leur a tout simplement accordé le personnel qu'il leur faut. Ils ont la capacité de déléguer le travail, de donner des directives, tout comme nous professeurs devons le faire. Nous faisions nous-mêmes certaines choses que nous pouvons maintenant confier à d'autres personnes, étant donné que nous avons davantage de ressources. Je ne suis pas à votre place, alors je ne sais trop, mais je pense cela signifierait un maximum de 308 députés. Il est vrai que cela s'accompagnera de certains inconvénients pour les députés.
Permettez-moi de signaler, avant de terminer, que le nombre de 308 députés n'a rien d'arbitraire. C'est exactement le nombre actuel de députés à la Chambre.
J'imagine que la réponse est non; vous n'avez pas réalisé d'étude approfondie sur le travail qu'accomplissent les députés pour leurs électeurs.
Nous le faisions.
Sachez que je reçois des députés chaque année à mon séminaire, précisément dans le but de surmonter la pauvreté de la littérature didactique à ce sujet.
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