SECU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent de la sécurité publique et nationale
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mardi 25 février 2014
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Chers collègues, je déclare ouverte cette 12e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
Merci, monsieur le président.
Au moment de convoquer les témoins devant le comité, nous avons transmis une invitation à la Commission nationale des libérations conditionnelles; aucun de ses représentants ne figure à la liste des témoins. D’après ce que je comprends, elle aurait refusé notre invitation, ce qui m’inquiète en tant que parlementaire, peu importe ce qu'elle avait l'intention de dire sur le projet de loi. Je demande donc que la correspondance avec la commission soit déposée auprès du comité.
Avez-vous autre chose à dire sur ce sujet? Êtes-vous tous d’accord?
Des voix: D’accord.
Le président: Il en est ainsi ordonné, monsieur Garrison.
Vous saurez que j’ai écrit une lettre au greffier pour demander que la séance soit télévisée. Je crois qu’elle le sera en partie, pour acquiescer à la demande du témoin qui en a fait la proposition. Il faudrait que toute la séance soit télévisée.
Depuis ma lettre, j’ai discuté avec le secrétaire parlementaire, et je sais qu’au moins un des témoins s’inquiète de la télédiffusion de la séance. Je suis prêt à accepter cela, mais si la réunion n'est pas télévisée parce qu'un témoin exprime des inquiétudes, il vaudrait alors peut-être mieux siéger à huis clos durant cette partie de la séance, au lieu de tenir une séance régulière.
La « télédiffusion » est un enregistrement physique de la séance, mais toutes les séances sont enregistrées et sont transmises sur les ondes.
Je me demande ce que nous devrions faire à cet égard, monsieur le président. Je crois que la séance doit être télédiffusée, mais si un témoin s’en inquiète, il vaudrait peut-être mieux siéger à huis clos.
Y a-t-il d’autres commentaires à ce sujet?
Des voix: D’accord.
Le président: Eh bien, nous poursuivons nos travaux à huis clos pour discuter de la motion présentée par M. Easter.
[La séance se poursuit à huis clos.]
[La séance publique reprend.]
Merci beaucoup. Nous présentons nos excuses aux témoins pour ce léger retard.
La séance est maintenant publique et télévisée.
Nous devons régler une question de régie interne avant de commencer. Je suis prêt à recevoir la motion relative aux dépenses, qu'on vous a distribuée. La motion a été présentée par M. Payne et appuyée par M. Garrison.
Êtes-vous en faveur de la motion?
(La motion est adoptée.)
Le président: Merci beaucoup.
D’accord. Nous entendrons trois témoins. Vous disposerez de 10 minutes chacun pour vos observations. Une courte période de questions et réponses suivra. Vous êtes avec nous pour la première heure; nous vous remercions beaucoup de votre patience.
Au nom de tous les membres du comité, je vous remercie de votre présence aujourd’hui.
Nous entendrons d’abord Mona Lee, puis Arlène Gaudreault et enfin, M. McCormack.
Madame Lee, vous avez 10 minutes.
Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.
Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de témoigner devant vous pour donner une voix aux victimes et à leur famille, qui appuient le projet de loi C-479, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (équité à l'égard des victimes).
Je tiens d'abord à remercier M. Sweet et son personnel pour leur travail acharné en vue de faire avancer le projet de loi et pour leur soutien à l'égard des victimes d'actes criminels au Canada.
J'aimerais aussi remercier Sue O'Sullivan, l'ombudsman fédérale des victimes d'actes criminels, pour son exposé; j'appuie pleinement les modifications mineures qu'elle propose pour améliorer le projet de loi.
En guise de contexte, je suis malheureusement devenue une spécialiste de bon nombre des sujets abordés dans le projet de loi, en raison de mon expérience personnelle. Ma soeur a été sauvagement assassinée en octobre 1997. Son meurtrier a plaidé coupable à une accusation de meurtre au deuxième degré, puisqu'il s'est réfugié derrière la thèse du vol, et a été condamné à une peine d'emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 12 ans.
On nous a épargné l'agonie d'un procès interminable, mais ce n'est que six ans plus tard, soit en 2003, que j'ai eu le courage de demander où il se trouvait. Je me suis ensuite inscrite à titre de victime dans le système, avec tous les droits connexes.
En 2004, soit sept ans après la déclaration de culpabilité, ma famille et moi avons connu les difficultés des victimes dans le système de libération conditionnelle du Canada. Entre juin 2007, moment où sa première demande de semi-liberté a été refusée et aujourd'hui, il y a eu six audiences de libération conditionnelle; nous avons dû produire six déclarations des victimes et endurer les souffrances connexes. Ces audiences ne sont pas tenues tous les deux ans, mesdames et messieurs. Certaines étaient tenues à six mois — oui, à six mois — d'intervalle.
Si vous le permettez, j'aimerais profiter de l'occasion pour lire quelques extraits de ma déclaration de la victime pour vous montrer la nature dévastatrice de ces audiences et ce que doivent endurer les familles des victimes d'actes criminels. La première a été écrite en septembre 2008, seulement un an après le refus de sa première demande de semi-liberté.
« Aux membres de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, je vous demande d'imaginer ma répugnance devant une autre de vos lettres m'avisant qu'il avait fait une nouvelle demande de semi-liberté. En juillet dernier, vous m'aviez dit qu'il devrait attendre deux ans, soit jusqu'en 2009 lorsque la peine minimale de 12 ans serait terminée, avant de pouvoir faire une nouvelle demande. Or, on me dit maintenant qu'il s'agit d'un dossier particulier et qu'une décision rapide est demandée. »
Je poursuis en disant: « Vous trouverez ci-joint une pétition présentée au gouvernement fédéral pour demander que les audiences de libération conditionnelle soient tenues tous les cinq ans et non tous les deux ans. Elle énonce notamment, et j'insiste, que les familles des victimes d'un homicide ne connaissent pas de répit et que les audiences de libération conditionnelle répétées peuvent avoir de très lourdes conséquences pour elles. »
On a tenu une autre audience un an plus tard, en septembre 2009; sa demande de libération conditionnelle totale a été refusée. Moins d'un an plus tard, en avril 2010, il a malheureusement obtenu une libération conditionnelle totale.
Mais l'histoire ne se termine pas là, mesdames et messieurs. En juillet dernier, on m'a appelée en plein milieu de la nuit pour me dire qu'il avait été arrêté et que sa liberté conditionnelle avait été suspendue. Elle a depuis été révoquée et il est maintenant de retour en prison, heureusement; hélas, je me retrouve à nouveau prise dans le système.
L'été dernier, on m'a demandé de rédiger une autre déclaration de la victime. J'y disais notamment que « nous savons tous à quel point il est déconcertant de recevoir un appel en pleine nuit; vous pouvez donc vous imaginer à quel point j'étais contrariée d'apprendre par téléphone, à 3 h 30 du matin, qu'un autre mandat d'arrestation avait été émis contre lui. Le lendemain, j'ai appris qu'il avait été arrêté et emprisonné. »
Malgré tous mes efforts et toutes les pistes explorées, je n'ai pas réussi à savoir ce qui a mené à son arrestation. Tout le monde me disait qu'on devait protéger son droit à la vie privée et qu'on ne pouvait me dire ce qu'il avait fait. Trouvez-vous cela juste? Je répète la question que j'ai déjà posée: où sont mes droits, et ceux de ma famille? Ce n'est pas pour rien que les parlementaires ont présenté le projet de loi C-479, qui vise entre autres à faire passer de deux à cinq ans la période minimale entre chaque audience de libération conditionnelle. Nous sommes victimisés à nouveau à chacune de ces audiences, parce que nous devons revivre les événements qui ont entraîné la mort d'un être cher.
Cela m'amène à parler des audiences mêmes. Comme elles se tenaient dans une autre ville, et puisque je n'avais jamais vu le tueur de ma soeur en personne, j'avais choisi de faire mes déclarations sur bande audio au départ, puis sur vidéo. À plusieurs reprises, la communication de mes déclarations ne s'est pas faite correctement. J'ai été très frustrée dans un cas en particulier: comme j'avais oublié par inadvertance la dernière partie de la transcription écrite, on avait coupé l'enregistrement avant la fin, au milieu d'une phrase. Personne ne m'a appelée pour me demander de transmettre le reste de ma déclaration par télécopieur. On se concentrait sur le droit du tueur de voir la déclaration au préalable, alors que moi, je n'ai pas pu me faire entendre.
À certaines occasions, on n'avait même pas le bon équipement pour montrer la vidéo. Je ne pouvais pas montrer de photo de ma soeur dans ma vidéo; d'ailleurs, je me suis fait dire que l'audience portait sur son sort, à lui, et non sur celui de ma soeur. C'est incroyable.
Comme je l'ai dit, j'ai pu connaître la vraie teneur de l'audience parce qu'une personne du groupe de victimes a eu la gentillesse d'y assister en mon nom. Le registre des décisions qu'on nous remet est tellement épuré, pour protéger le tueur; les faits pertinents sont masqués pour protéger son droit à la vie privée. Voilà pourquoi je vous demande expressément de prévoir des dispositions permettant le recours à la téléconférence ou à la transmission vidéo en circuit fermé pour que nous puissions lire notre déclaration de la victime pendant ces audiences. Nous devons nous faire entendre et être en mesure d'écouter l'audience.
Je vous demande donc d'étudier la possibilité d'amender le projet de loi puisque la version actuelle prévoit la possibilité de faire une déclaration par téléconférence uniquement si la commission interdit à la victime de se présenter en personne. Je vous demande d'envisager la possibilité d'appliquer cette disposition à toutes les audiences. Une telle possibilité m'aurait été très utile.
Comme je n'avais pas vu le délinquant en personne, sauf sur une photo vieille de 15 ans, j'ai demandé à la commission et au Service correctionnel du Canada de me transmettre une photo plus récente de lui. On m'a une fois de plus parlé de son droit à la vie privée. Cet homme aurait pu sonner à ma porte, et je n'aurais pas su qui il était. Ce n'est qu'en m'adressant à la police que j'ai pu obtenir une photo de lui. Il s'agit d'une question de sécurité, pour ma famille et moi, et on m'a refusé ce droit. Je vous demande d'étudier la possibilité d'ajouter cette disposition aux renseignements transmis aux victimes. Ces renseignements nous aident à nous préparer à naviguer dans le système. J'aimerais également qu'on puisse recevoir un plan de réadaptation plus concluant.
En conclusion, je vous remercie de votre attention, et je dirais que le projet de loi constitue un bon point de départ pour aider les victimes de crimes violents. Je demande à tous les partis de poursuivre leur collaboration afin que nous puissions nous faire entendre.
Merci beaucoup, madame Lee. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir témoigné devant nous aujourd'hui.
Madame Gaudreault, vous avez 10 minutes. Allez-y.
[Français]
Monsieur le président, je voudrais d'abord remercier le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de nous permettre de participer à la consultation sur ce projet de loi et de contribuer à ses travaux. Je voudrais remercier particulièrement le député, M. David Sweet, de son engagement envers ce projet de loi et de l'intérêt qu'il porte aux droits des victimes d'actes criminels.
L'Association québécoise Plaidoyer-Victimes est un organisme qui existe depuis 30 ans. L'association a pour mission la défense des droits et des intérêts des victimes d'actes criminels et regroupe plus de 200 organismes qui offrent aux victimes du soutien psychosocial et de l'accompagnement au sein du système de justice.
D'emblée, nous appuyons bon nombre de propositions du projet de loi C-479. Nos interventions visent à faire part de nos questionnements et à proposer certaines modifications qui seraient susceptibles d'améliorer les droits des victimes dans le cadre de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
Permettez-moi de faire nos propositions par bloc. Je vais d'abord parler des modifications concernant la présence et la participation des victimes aux audiences. Mon premier commentaire porte sur le droit présomptif d'assister aux audiences. Cette recommandation a été faite depuis plusieurs années par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Le Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels l'a aussi formulée au cours des dernières années. Nous appuyons donc cette proposition.
Nous avons un seul commentaire à formuler. Dans la loi actuelle, il est question de permettre la présence des victimes alors que dans les propositions qui sont sur la table il s'agit de l'autoriser. En français, « permettre » et « autoriser » ont le même sens. Ce serait donc une chose à vérifier. C'est une suggestion et non pas une question de fond. C'est une question de sémantique.
Bien entendu, on appuie la proposition sur la compréhension du besoin de la victime d'acte criminel d’être présente aux audiences. Cependant, on a quelques préoccupations relativement à sa mise en application. On aura peut-être l'occasion d'en discuter au cours de la période de questions.
Mon troisième point touche les options qui sont offertes aux victimes qui ne peuvent pas assister aux audiences. Dans les cas de refus, on propose de leur permettre d'observer le déroulement de l'audience par téléconférence ou par transmission vidéo unidirectionnelle. On trouve que cette avenue devrait être privilégiée. Généralement, les victimes sont acceptées aux audiences. Il peut arriver quand même des cas exceptionnels où la sécurité de l'établissement ou des personnes pourrait être en cause. On propose d'ajouter à la fin de l'article les mots suivants: « sauf dans les cas où cela risque de menacer la sécurité d'un établissement, d'un délinquant ou d'une autre personne ».
Nous avons une proposition qui va dans le même sens que celui de Mme Lee et dans le même sens que celui du Bureau national pour les victimes d'actes criminels. Quand les personnes victimes sont autorisées à assister aux audiences et quand elles font la demande d'en observer le déroulement par téléconférence ou par transmission vidéo unidirectionnelle, nous proposons qu'on accepte cette demande et donc qu'on modifie la loi. Ce serait une très bonne solution. Je pense que cela répond à une demande qui a été exprimée depuis très longtemps par les groupes qui représentent les droits des victimes.
La deuxième section porte sur les modifications à la déclaration de la victime lors des audiences de libération conditionnelle. L'article 101 de la loi actuelle indique que la commission doit tenir compte des renseignements obtenus de la part des victimes. On introduit explicitement la déclaration de la victime et nous trouvons que cela vient renforcer l'importance de sa déclaration. Nous appuyons cette proposition.
Les propositions qui sont sur la table clarifient la forme en vertu de laquelle sont présentées les déclarations. Actuellement, le manuel des politiques définit comment sont présentées les déclarations. On dit ce qui est acceptable. En fait, les enregistrements audio et vidéo constituent généralement ce qui est acceptable à l'heure actuelle, mais on voit aussi dans le rapport de rendement de la commission qu'il y a des déclarations qui sont présentées par vidéoconférence ou même par DVD.
Nous appuyons cette proposition, mais nous souhaiterions obtenir une clarification. En effet, cet article se lit comme suit:
La déclaration de la victime ou de la personne visée au paragraphe 142(3), même si celle-ci n’assiste pas à l’audience, peut y être présentée sous la forme d’une déclaration écrite pouvant être accompagnée d’un enregistrement audio ou vidéo, ou sous toute autre forme réglementaire.
Selon les pratiques actuelles, quand il y a une vidéo ou un enregistrement, on doit reproduire la déclaration. Accepterait-on qu'il y ait une déclaration écrite et qu'en plus il y ait une vidéo, par exemple, où un parent pourrait montrer des scènes de famille ou des photos de son enfant? Je pense qu'il serait important de clarifier cela parce qu'il y a des attentes de la part des victimes à cet égard.
Comme beaucoup d'autres groupes, notre association propose que les victimes soient autorisées à lire leur déclaration dans le cadre d'une vidéoconférence. Nous appuyons cette proposition.
Nous voulons soumettre d'autres propositions concernant la déclaration de la victime. Nous souhaiterions que le droit de lire sa déclaration soit explicitement inscrit dans la loi. L'article 722 du Code criminel traite de la déclaration de la victime avant le prononcé de la sentence. Nous souhaiterions que ce droit soit mentionné dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.
Nous souhaiterions qu'un autre ajout soit fait à cette loi. Au paragraphe 12 de l'article 9.7 et à l'article 9.8 du Manuel des politiques de la Commission des libérations conditionnelles, on donne aux victimes la possibilité de présenter une déclaration à l'audience dans le cas d'une renonciation de rapport, lorsque le détenu n'assiste pas à l'audience et que la commission procède à l'examen. Nous recommandons que cette pratique, ou politique, soit inscrite dans la loi.
J'ai une dernière recommandation d'ajout. Concernant la politique de la commission, le paragraphe 6 de l'article 10.3 permet d'autoriser une personne chargée de soutenir la victime à lire sa déclaration au moment de l'audience. À notre avis, c'est une excellente pratique. Elle humanise le processus et facilite le témoignage des victimes. Là encore, cela devrait être non pas une politique, mais un droit qu'on accorde aux victimes.
Je vais maintenant parler des modifications concernant la transmission des renseignements discrétionnaires qui touchent la permission de sortir, les conditions dont est assortie la permission de sortir et la destination de la mise en liberté. Nous appuyons ces propositions. Il y a aussi des propositions sur la transmission du plan correctionnel. C'est une question au sujet de laquelle nous éprouvons des préoccupations. Je veux simplement en témoigner ici.
Les victimes demandent depuis longtemps d'avoir accès à beaucoup plus d'informations, notamment sur les risques que représente la personne détenue et les programmes qu'elle suit à l'intérieur de l'établissement en vue de se réadapter. Or le plan correctionnel contient des renseignements qui touchent, par exemple, les suivis médicaux, psychologiques et psychiatriques. Ceux-ci sont protégés par la loi portant sur les renseignements personnels.
Je tiens également à rappeler que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, qui était présidé par M. DeVillers en 2000, avait à l'époque attiré l'attention sur l'importance de continuer à appliquer le test soupesant les droits des deux parties. Je vais citer M. DeVillers de façon à ce que ce soit plus clair:
[...] certains de ces renseignements pouvant être détaillés et complexes, ils devraient être communiqués aux victimes ou à leurs familles sous une forme susceptible de les aider tout en portant atteinte le moins possible aux droits du délinquant à la vie privée.
Ce sont des questions compliquées et délicates. Nous recommandons donc qu'à ce sujet, le comité fasse appel à l'expertise de la commission ou du Service correctionnel afin qu'un éclairage très nuancé y soit apporté et que les questions de vie privée ainsi que de sécurité soient examinées. Notre proposition va dans ce sens.
Le dernier élément portant sur la transcription des renseignements discrétionnaires touche la transcription des audiences de libération conditionnelle. Cette question avait été examinée en 2000 par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne. À l'époque, celui-ci avait conclu qu'il n'y avait pas de transcriptions des audiences de libération conditionnelle et qu'il serait donc préférable et souhaitable que les victimes puissent écouter les enregistrements sonores des audiences de libération conditionnelle. L'ombudsman a lui aussi fait cette proposition. Nous l'avons faite également au cours des dernières années. Elle revient souvent sur la table. C'est pourquoi nous réitérons cette proposition, à savoir que la loi soit modifiée afin de permettre aux victimes d'écouter ultérieurement, sans les conserver, les enregistrements sonores des audiences de libération conditionnelle.
Le dernier point porte sur les modifications concernant le délai des peines d'emprisonnement à perpétuité. En 2010, l'ombudsman a soumis des propositions à cet égard. Celle qui est sur la table vise à restreindre le nombre de réexamens automatiques dans le cas des délinquants ayant commis un délit violent, et ce, en allongeant le délai entre chacun de ces réexamens. Je crois que Mme Lee a très bien expliqué les difficultés que cela causait aux familles des victimes, particulièrement dans le cas des condamnations à perpétuité ou des très longues sentences. Je pourrai peut-être vous donner plus d'explications à ce sujet.
Je dirai simplement que nous savons que les victimes doivent avoir beaucoup de courage pour venir à des audiences de libération conditionnelle de façon répétitive. Il est certain que cela fait peser sur elles un lourd fardeau.
Nous croyons que ce que propose le projet de loi C-479 permettrait de prendre en compte les besoins de ces victimes. Cependant, de telles mesures ne devraient pas être appliquées de façon arbitraire et sans qu'on puisse tenir compte des changements ou des progrès justifiant le droit des délinquants à un nouvel examen.
[Traduction]
[Français]
Pouvez-vous m'accorder deux minutes pour que j'aborde le dernier point ou est-ce que je pourrai l'expliquer plus tard?
[Traduction]
[Français]
[Traduction]
[Français]
Quant au délai devant s'écouler avant la présentation d'une nouvelle demande de libération conditionnelle dans le cas des infractions prévues à l'annexe I, nous croyons que cela pourrait être préjudiciable à la société et aux victimes.
Il est préférable que les victimes soient encadrées dans le cas d'une libération progressive et qu'il y ait un suivi. Il est risqué de libérer des personnes sans qu'elles aient bénéficié d'une libération conditionnelle, ni fait l'objet d'une surveillance dans la communauté. Nous ne croyons pas que cela assure la protection de la société, ni celle des victimes. Par conséquent, nous ne soutenons pas les principes qui sous-tendent cette proposition.
Je vous remercie.
[Traduction]
Merci, madame Gaudreault.
La parole est maintenant à Mike McCormack, président de la Toronto Police Association. Vous avez 10 minutes, monsieur.
Bonjour, et merci de m’avoir invité à vous faire part de mes observations au sujet de ce très important projet de loi.
Je suis ici au nom des 8 000 membres de la Toronto Police Association, ainsi qu'au nom de Karen Fraser. Elle voulait venir avec moi à Ottawa mais, malheureusement, il ne lui a pas été possible de se déplacer puisqu’elle s’est brisé le cou en faisant une chute pendant son séjour en Floride il y a quelques mois et qu’elle est maintenant confinée à un fauteuil roulant.
Je sais que je ne dispose pas de beaucoup de temps, alors je vais vous donner des renseignements contextuels importants pour expliquer pourquoi nous, les policiers de Toronto, appuyons ce projet de loi.
L’un des nôtres, l'agent de police Michael Sweet, a été assassiné le 14 mars 1980 par Craig Munro. Michael Sweet n’avait que 30 ans. Il a laissé derrière lui sa femme de 29 ans et trois enfants âgés respectivement d’un, quatre et six ans.
Bien sûr, tous les meurtres sont atroces, mais celui de Michael Sweet était particulièrement brutal et cruel. Au moment d'implorer la clémence de son agresseur, Michael Sweet a indiqué qu'il avait des enfants et a supplié Craig Munro de penser à leur sort. Mais Munro s'en fichait et il a continué de brutaliser le constable Sweet avant de le laisser mourir au bout de son sang.
Ce jour-là, Craig Munro a fait un choix. Le temps qui passe n'efface pas cette décision. La douleur et la détresse de la veuve de Michael et celles de ses enfants, de ses parents, de ses frères et de ses soeurs sont encore présentes aujourd'hui. Il n'y a pas de libération conditionnelle pour leur souffrance.
Munro avait déjà un casier judiciaire chargé. C'était un homme très dangereux et très violent. Il a été inculpé et reconnu coupable de meurtre au premier degré, et condamné à une peine d'emprisonnement à perpétuité. Et perpétuité signifie pour toujours.
Après 25 ans en prison, Munro était admissible à la libération conditionnelle, mais une libération conditionnelle ne modifie pas une peine à perpétuité. Ce qu'une libération conditionnelle fait, c'est qu'elle peut libérer le délinquant des pleines conséquences de sa peine d'emprisonnement et de son geste meurtrier.
Nous souscrivons tous au principe d’audience publique, selon lequel non seulement il doit y avoir justice, mais il doit aussi y avoir apparence de justice si l'on veut que notre système de justice pénale commande le respect du public. Le régime de libération conditionnelle est une partie intégrante de notre système de justice pénale. C'est la dernière étape du processus de la détermination de la peine. La libération conditionnelle n'est pas un recours de nature privée, mais bien une réparation publique. Voilà pourquoi chaque aspect du régime de libération conditionnelle doit être aussi transparent que tout le reste du système de justice pénale.
Pour des meurtriers comme Craig Munro, les droits à la vie privée lors des audiences de libération conditionnelle ne peuvent être plus importants que ceux qu'ils avaient durant leur procès et leur audience de détermination de la peine. Bien au contraire, ces droits devraient être moindres, puisqu'au moment de leur procès, des gens comme M. Munro jouissaient de la présomption d'innocence. Or, cette présomption n'existe pas lors d'une audience de libération conditionnelle. La situation est en fait bien différente — et c'est une différence de taille —, puisque l'on a affaire à des personnes dont la culpabilité a déjà été établie.
M. Munro a eu trois audiences de libération conditionnelle, soit le 26 février 2009, le 16 mars 2010 et le 30 mars 2011. Une quatrième audience était prévue pour le mois d'août 2012, mais les privilèges de Munro ont été révoqués le 28 août 2012 parce qu'il n'avait pas respecté les conditions de ses permissions de sortir sans escorte, permissions qui, selon nous, n'auraient de toute façon jamais dû lui être accordées par la Commission des libérations conditionnelles.
Pour ce qui est du projet de loi C-479 proprement dit, je commencerai par l'article 144.1 proposé, qui stipule:
Lorsque la transcription d’une audience a été effectuée, la Commission fournit gratuitement une copie de celle-ci à la victime, à un membre de sa famille ou au délinquant qui en fait la demande écrite.
Le temps ne nous permet pas d'entrer dans les détails, mais sachez que nous sommes restés abasourdis — comme l'ont été la veuve et les enfants de Michael Sweet — par les témoignages changeants que Craig Munro a présentés lors de ses différentes audiences de libération conditionnelle. Ces témoignages se sont soldés par des conclusions incohérentes et contradictoires de la part de la commission, ce qui a permis de mettre Craig Munro sur la voie rapide d'une libération. Sans ses propres manquements prévisibles aux conditions qui lui étaient imposées, il aurait déjà obtenu sa libération conditionnelle.
La détresse et le désespoir que cette situation suscite chez les proches des victimes de Craig Munro sont énormes. Ils voient et entendent eux-mêmes les mensonges et la tromperie brodés dans les différentes versions que Munro a racontées aux différents comités de la Commission des libérations conditionnelles; pourtant, la commission ne les voit pas.
Nous n'avons jamais vu la transcription d'une audience de la Commission des libérations conditionnelles. Nous savons que les audiences sont enregistrées. Toutes les demandes, tant les nôtres que celles des proches de la victime, pour obtenir copie des enregistrements audio des audiences de libération conditionnelle de M. Munro devant la commission — ce qui nous aurait permis de préparer une transcription à nos frais — ont été refusées sous prétexte que cela violerait le droit à la vie privée de Munro.
Or, il est ici question d'audiences publiques. Des représentants des médias ont assisté à certaines de ces audiences: il n'y a, et ne devrait y avoir, rien de privé à cela.
Nous appuyons la modification proposée mais, à notre humble avis, l'article 144.1 proposé pourrait être amélioré par un amendement pour faire en sorte qu'il soit possible d'obtenir une copie de l'enregistrement audio de l'audience lorsqu'une transcription n'est pas disponible.
Les examens annuels des délinquants reconnus coupables de meurtre au premier degré sont extrêmement pénibles pour les proches des victimes. Comme l'a rapporté l'autre témoin, aussitôt qu'une audience de libération conditionnelle est terminée, les victimes doivent préparer une nouvelle déclaration de la victime et s'apprêter à affronter la personne responsable de la mort de l'être cher. Pour nombre de proches des victimes, il est impensable de ne pas assister à une audience de libération conditionnelle. La chose serait en effet perçue comme un abandon des leurs, une possibilité que nul ne saurait évoquer. À moins d'un changement important de situation, les délinquants violents ou les meurtriers condamnés à perpétuité ne devraient pas avoir droit à une nouvelle audience dans les cinq ans suivant la première audience de libération conditionnelle, laquelle arrive après 25 ans d'emprisonnement. À tout le moins, cette période d'attente ne devrait pas être de moins de trois ans.
Sans passer en revue chaque article du projet de loi, je peux vous dire que nous appuyons la prolongation de la période d'attente entre les audiences. Nous n'avons pas eu l'occasion d'examiner la centaine d'infractions énumérées à l'annexe I pour aider à définir ce qu'est « une infraction accompagnée de violence », mais en principe, nous estimons que cette modification législative est nécessaire.
Pour ce qui est du paragraphe 130(3) et du paragraphe 131(1.1) proposé en ce qui concerne les cas de blocage — c'est-à-dire, lorsque l'on veille à garder le délinquant derrière les barreaux pendant plus des deux tiers de la période délimitée par la date de libération d’office —, nous demandons qui vous teniez compte, aux fins de contexte seulement, du cas de Karla Homolka. Mme Homolka s'est vu condamner à une peine d'emprisonnement de 12 ans. Elle est par conséquent arrivée à sa date de libération conditionnelle après 8 ans. Sa sortie a cependant été bloquée, et elle a dû purger sa peine de 12 ans au complet, soit jusqu'à la date d'expiration du mandat. Il est impératif de faire passer la période d'examen d'un à deux ans au minimum, mais une fois que vous arrivez à satisfaire les critères pour bloquer la sortie d'un délinquant alors qu'il a déjà passé tant de temps en prison, pourquoi faudrait-il que nous, les contribuables canadiens, payions un seul sou pour une nouvelle audience si la situation n'a pas changé?
Nous appuyons sans réserve les paragraphes 140(5.1), 140(5.2) et 140(10.1). En ce qui concerne le paragraphe 140(5.1) qui est proposé, vous auriez sans doute intérêt à retravailler l'agencement des phrases. La deuxième phrase complète se lit comme suit: « La Commission ou la personne qu’elle désigne autorise cette présence... » — et il est ici question de la présence d'une victime ou d'un membre de sa famille. Voilà ce qui est important, et nous appuyons cela entièrement.
Nous craignons cependant que la première phrase de l'article proposé vienne contredire le sens souhaité, puisqu'il y est question pour la commission de déterminer « si une victime ou une membre de sa famille peut être présent, à titre d'observateur ». La chose est obligatoire ou elle ne l'est pas. Étant donné l'ingéniosité que les avocats déploient pour tirer avantage des ambiguïtés discutables, vous auriez intérêt à clarifier cette formulation. Ce n'est rien de personnel.
Comme je l'ai dit, le principe général veut que, dans la mesure du possible, les audiences de libération conditionnelle soient ouvertes et transparentes. Lorsqu'un délinquant cherche réparation publique par l'intermédiaire de la Commission des libérations conditionnelles — c'est-à-dire qu'il cherche à être relâché dans la collectivité —, on ne lui permet pas de cacher ses antécédents pour protéger sa vie privée. Si M. Munro avait voulu rester en prison, il aurait pu conserver sa vie privée. Mais dès que les délinquants cherchent à obtenir leur libération conditionnelle pour échapper aux conséquences de leur geste très public — le meurtre d'un policier ou un crime violent — et être remis en liberté, leurs droits à la vie privée n'existent plus. Nous appuyons sans réserve la communication aux victimes, comme le prévoient les sous-alinéas 142(1)a)(v), (vi) et (vii) proposés.
Nous appuyons aussi le paragraphe 140(11), mais nous avons tout de même une observation à faire. Si la victime ne peut pas se présenter à une audience, elle « peut » présenter une déclaration écrite ou un enregistrement vidéo ou les deux à la commission. Or, vous devriez peut-être envisager d'ajouter que la commission recevra la déclaration comme preuve, ce qui laissera le choix à la victime de soumettre ou non une telle déclaration. Si la victime choisit de présenter une déclaration, la commission sera tenue de la recevoir comme preuve, ce qui aura l'avantage d'en souligner l'importance.
En dernier lieu, il y a l'article 140.1 proposé au sujet du délinquant qui refuse de se présenter à une audience. Dans cette optique, permettez-moi de vous présenter un scénario factuel, et je termine là-dessus. Michael Sweet était un policier de la ville de Toronto qui a été tué en devoir. Craig Munro était de Toronto, et son procès a eu lieu dans cette ville, mais il a été emprisonné en Colombie-Britannique. La famille de Michael Sweet doit faire le trajet Toronto-Vancouver par avion, puis se rendre à l'intérieur de la Colombie-Britannique pour assister aux audiences de libération conditionnelle de M. Munro. Il s'agit d'un exercice très coûteux qui demande beaucoup de temps et qui est émotionnellement très épuisant. Il est arrivé, à une occasion, que nous apprenions à la dernière minute que M. Munro allait peut-être demander un ajournement, alors que tous les préparatifs de voyage, les vols et l'hébergement avaient été fixés.
En conséquence, vous devriez peut-être envisager la possibilité d'ajouter une disposition distincte pour les cas où une grande distance sépare le lieu de résidence des victimes du lieu d'emprisonnement choisi par le gouvernement. Les victimes n'attendent pas à la dernière minute pour réserver des vols et des chambres d'hôtel ou pour prendre des arrangements auprès de leur employeur.
Comme vous le savez, le gouvernement a un programme pour assumer les dépenses des victimes. Les contribuables canadiens ont dès lors le droit de savoir que leurs impôts ne seront pas gaspillés. Les délinquants reconnus coupables d'infractions criminelles graves et qui ne montrent ni empathie ni sentiments n'ont pas le droit d'annuler leurs audiences de libération conditionnelle à la dernière minute sans en subir quelques conséquences. Les victimes devraient être consultées lorsque la date d'une audience de libération conditionnelle est fixée, et l'on devrait veiller, dans la mesure du possible, à ce que cette date soit compatible avec leur emploi du temps. Alors, supposons qu'il y ait une ouverture...
... entre avril et mai, et que cela convienne au délinquant. Pourquoi ne consulterait-on pas les victimes afin de savoir si certaines dates à l'intérieur de cette période sont à éviter?
Je vous remercie de votre temps.
Merci beaucoup. Notre temps est écourté. Nous ne pourrons avoir qu'une série d'interventions de cinq minutes chacune.
Merci, monsieur le président, et merci à nos trois témoins d'être venus témoigner aujourd'hui, surtout Mme Lee, que je salue pour son courage d'avoir comparu devant le comité et pour le récit qu'elle nous a livré. C'est très important qu'une histoire comme celle-là soit racontée. Merci aussi à vous trois d'avoir formulé certaines suggestions d'amendements, suggestions que nous ne manquerons pas d'examiner.
Madame Lee, j'ai effectivement une question pour vous. J'ai pris en note certains de vos propos. Vous avez dit que vous étiez maintenant une victime inscrite, avec tous les droits que cela suppose. Vous avez aussi dit que vous devez revivre les événements chaque fois que vous assistez à une audience de libération conditionnelle. Je sais que c'est un sujet très difficile et que les audiences de libération conditionnelle sont de durs moments à passer, mais permettez-moi de vous poser cette question: pourquoi assistez-vous à ces audiences, vous et tant d'autres membres des familles de victimes?
C'est une question que nous devons poser, parce que c'est un exercice tellement éprouvant pour tous ceux qui doivent préparer une déclaration et se présenter à des audiences. Et pourtant, tout le monde le fait. Pourquoi?
Comme je l'ai dit, ce n'est pas un sujet dont j'aurais pu un jour souhaiter devenir spécialiste, mais c'est malheureusement ce que je suis. Je le fais en mémoire de ma soeur. Comme quelqu'un me l'a dit, ma soeur n'est pas décédée d'une mort naturelle; sa vie lui a été prise, et personne n'est là, dans ces audiences de libération conditionnelle, pour la représenter. Je le répète: je ne pouvais même pas montrer une photo d'elle. L'accent devrait être mis sur elle, parce que c'est elle qui est morte. Mais ces audiences ne portent que sur les délinquants et leur bonne conduite. Comme les autres témoins l'ont dit, ils modifient constamment leur témoignage.
Le choix nous appartient; nous pouvons aussi nous abstenir. Mais si nous ne le faisons pas en tant que membres de la famille, il n'y aura personne là pour le faire à notre place.
Merci.
Vous avez aussi dit — je ne sais pas si je l'ai bien noté — que vous aviez dû assister à six audiences de libération correctionnelle depuis 2007, année où l'auteur de ce crime est devenu admissible à une semi-liberté sans toutefois l'obtenir. C'est beaucoup d'audiences en très peu de temps. Voici ma question: si le projet de loi avait déjà été adopté et qu'il avait déjà eu force de loi, et que la Commission des libérations conditionnelles du Canada avait pu prolonger l'intervalle entre les audiences, qui est actuellement de deux ans — vous avez effectivement indiqué que l'intervalle avait parfois été de moins de deux ans...
S'il avait été possible de fixer l'intervalle à cinq ans au lieu des deux ans actuels — ou des six mois, comme vous l'avez dit —, comment cela aurait-il modifié votre vie ces dernières années?
Elle aurait été tellement meilleure. C'est très difficile de décrire ce qui nous arrive lorsque nous recevons ces lettres. Quand une personne s'inscrit comme victime, les gens de la commission lui envoient un tas d'informations. J'ai même parfois eu à leur dire d'arrêter. Je ne veux pas être mise au courant chaque fois qu'il sort, car c'est le genre de nouvelles qui vous met en colère. Savoir qu'il a obtenu une permission de sortir sans escorte, c'est trop d'information. Tout ce que je voulais savoir c'est... Ma vie aurait été tellement meilleure si je n'avais pas eu à faire cela chaque fois, tous les six mois. Vous devez repasser tous vos dossiers, vivre toutes ces émotions de nouveau.
Ce n'est pas quelque chose que je peux endurer jour après jour. Si je commence à y penser quotidiennement, je ne serai plus en mesure de fonctionner. Mais une fois que vous acceptez de le faire et que vous y revenez, l'effet ne tarde pas à se faire sentir.
Merci.
Je pense que M. McCormack l'a bien expliqué en affirmant que, dans le système actuel, il faut préparer la prochaine audience de libération conditionnelle aussitôt que la dernière est passée. Je vous remercie d'avoir fait, vous aussi, ces observations.
Le projet de loi compte deux ou trois dispositions qui traitent de la communication obligatoire aux victimes, notamment la communication de la date, de l'heure, des conditions et de l'emplacement de la libération conditionnelle du délinquant. Appuyez-vous ces mesures?
Oui.
Même si je ne vis pas dans la même ville que le délinquant, il était toujours important pour moi de savoir où il se trouvait et ce qu'il faisait à ce moment-là parce que d'autres membres de ma famille résident dans cette ville.
De plus, le présent projet de loi prévoit la divulgation discrétionnaire aux victimes de données concernant le plan correctionnel du délinquant. Je sais qu'un autre témoin a effleuré la question et parlé du progrès accompli par rapport au plan. Considérez-vous qu'il soit important d'obtenir cette information quand c'est possible? En parlant des victimes et non de l'agresseur, pensez-vous que la famille des victimes devrait avoir ce droit. Croyez-vous important d'avoir accès à ces renseignements?
Oui, je crois que c'est important, parce que dans le système actuel, je reçois de temps en temps des documents m'indiquant qu'il a fait ceci ou qu'il n'a pas terminé son programme, mais nous avons besoin d'en savoir davantage. Personne ne nous a dit en quoi consistait son plan, qui n'a de toute évidence pas donné les résultats escomptés puisqu'il est de retour en prison. Je pense donc que plus nous en savons, mieux nous sommes préparés à formuler des observations dans notre déclaration.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais commencer par vous remercier, madame Lee, monsieur McCormack et madame Gaudreault, d'être présents parmi nous aujourd'hui pour discuter de ce projet de loi. C'est extrêmement important qu'on se penche sur les droits des victimes. Je crois que vos témoignages ont été très éclairants.
J'aimerais surtout adresser mes questions à vous, madame Gaudreault. Vous n'avez pas eu le temps de terminer votre présentation. Je crois que vous étiez rendue au passage sur les modifications qui concernaient les audiences pour la libération conditionnelle.
Y a-t-il des choses que vous aimeriez ajouter d'emblée?
Je pense qu'il est important de mentionner une chose sur les préoccupations des victimes qu'on rencontre ainsi que sur les organismes qui travaillent auprès d'elles.
Après sa sentence et son emprisonnement, il est important qu'un délinquant bénéficie d'une libération progressive, qu'il y ait un suivi dans la collectivité et qu'il soit encadré. C'est une meilleure garantie pour la sécurité des victimes et de la société en général. Une préoccupation très importante est que le délinquant ne sorte pas sans aucun encadrement. C'est le risque que présente cette modification qui est proposée.
Je voudrais aussi ajouter que cette modification n'émane pas des groupes de défense des droits des victimes. J'ai aussi relu attentivement ce qu'a dit l'ombudsman la semaine dernière. C'est un changement majeur qui est proposé et cette modification n'est pas proposée par les groupes.
Ce que les victimes souhaitent, c'est qu'un individu sortant de prison fasse la preuve qu'il a suivi des programmes et qu'il en a résulté quelque chose. Nous voulons qu'il suive son plan et qu'il y ait quelqu'un, soit un agent de surveillance, qui l'encadre. S'il y a des bris de conditions de la part de la personne libérée, il y aura des conséquences. Il pourrait y avoir une sortie progressive. Pourtant, cette modification de l'annexe touchant l'ensemble des crimes violents ne donne pas ces garanties.
Il peut aussi y avoir des impacts importants pour le délinquant. Cela risque d'avoir un impact sur sa motivation à changer. Il peut y avoir des impacts financiers sur le système. Je ne sais pas si les coûts ont été évalués. Bref, cette modification nous inquiète beaucoup et elle ne provient pas d'une demande des organismes. Au contraire, les victimes souhaitent que la personne soit encadrée, qu'elle ait une libération progressive et qu'elle soit surveillée, c'est-à-dire qu'il y ait un chien de garde à l'extérieur quand la personne est en situation de libération conditionnelle.
Je pense que c'est quelque chose d'important qu'on entend souvent. La sécurité des victimes est une chose importante quand quelqu'un écope d'une sentence d'emprisonnement pour entre autres des crimes violents.
Excellent, merci.
Je sais qu'à l'Association québécoise Plaidoyer-Victimes, vous êtes la voix de nombreuses victimes d'actes criminels au Québec. Je suis heureuse d'entendre que vous parlez de libération progressive et que vous êtes rassurée par l'encadrement qui accompagne actuellement les libérations progressives.
Je voudrais juste savoir une chose. Les victimes que vous représentez pourraient-elles se sentir inquiètes sachant que, maintenant, on passerait à des demandes de libération conditionnelle tous les cinq ans, ce qui ferait en sorte que les délinquants n'auraient peut-être parfois même plus la chance d'avoir accès à une libération conditionnelle?
De quelle manière cela affecte-t-il le plan correctionnel? Quel impact y voyez-vous concrètement?
On dit qu'il faut qu'il y ait une mesure discrétionnaire. On a compris, avec les propos de M. Sweet quand il a présenté son projet de loi, que cette préoccupation était présente dans celui-ci.
Par exemple, il faut que quelqu'un qui a changé, qui a bien suivi son plan correctionnel et où il s'est produit des événements dans sa vie qui ferait en sorte qu'il serait apte à profiter d'une libération conditionnelle avec encadrement puisse en bénéficier.
Je pense qu'on n'a pas intérêt à garder quelqu'un en prison alors qu'il pourrait être libéré. De toute façon, la plupart des délinquants vont se retrouver un jour ou l'autre dans la communauté. Alors, il vaut mieux qu'ils sortent encadrés. C'est un principe qu'on reconnaît depuis longtemps.
Je vous remercie. J'ai énormément apprécié votre point de vue.
Considérez-vous que la libération conditionnelle est un élément essentiel de la réinsertion sociale et d'un encadrement pour une meilleure sécurité publique?
Absolument. Cette opinion, qui est partagée par de nombreux groupes, a été exprimée dans le cadre de l'examen du projet de loi C-10.
De nombreux groupes qui travaillent auprès des victimes de violence conjugale et d'agression sexuelle ont réitéré l'importance de la libération conditionnelle. Ce régime doit évidemment faire l'objet d'un soutien rigoureux. On s'attend également à ce que le système correctionnel fasse bien son travail, qu'il traite bien les victimes et qu'il les protège.
Je pense que le système de libération conditionnelle est avantageux parce qu'il assure un suivi et qu'il fait fonction de chien de garde.
[Traduction]
Merci beaucoup. Nous avons dépassé le temps prévu. Merci, madame Gaudreault.
[Français]
Monsieur Payne, vous avez la parole. Vous disposez de cinq minutes.
[Traduction]
Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins de comparaître.
Par votre entremise, monsieur le président, je poserai des questions aux témoins.
Je commencerai par vous, monsieur McCormack. Vous avez indiqué que les victimes n'avaient pas accès aux transcriptions, ce qui m'a immédiatement fait penser à quelque chose. Vous avez également indiqué que ce sont de nouveaux commissaires qui président les diverses audiences.
Sauriez-vous, ou existe-t-il en fait un moyen de dire, si ces nouveaux commissaires ont lu les déclarations faites lors des précédentes demandes de libération conditionnelle du délinquant?
Ici encore, le système actuel manque fondamentalement de transparence, particulièrement pour les victimes qui doivent se soumettre à ce processus. On leur divulgue très peu d'information, que les nouveaux commissaires... Mais selon nos renseignements, la...
Chaque fois que nous avons repris ce processus dans le cas de M. Munro, nous ne savions même pas quels renseignements étaient communiqués. Mais selon nos renseignements, les commissaires ne connaissaient pas les conclusions des commissaires précédents. Ce qui rendait la situation encore pire pour nous, c'est que Karen et sa famille avaient l'impression que M. Munro ou quelqu'un d'autre pouvait modifier son discours pour les nouveaux commissaires en fonction de ce qui avait achoppé la fois précédente, et ce, parce qu'il s'agissait d'un groupe entièrement nouveau. Voilà où survient le problème de manque de transparence. Si au moins nous avions les transcriptions, comme nous l'avons demandé.
Nous avons réclamé la transparence à l'égard non seulement de son témoignage, mais également de ce qui se passe pendant son incarcération. Par exemple, l'alcool et la drogue avaient sur M. Munro l'effet de déclencheurs. Quand nous avons demandé s'il avait eu accès à de la drogue ou à de l'alcool pendant son incarcération, nous n'avons pu obtenir la moindre information. Il tente de nouveau de se faire libérer, alors qu'on sait que ces substances agissent comme déclencheur. Nous avons par la suite appris qu'il avait échoué le test de dépistage des drogues. Comment cette façon de faire aide-t-elle les victimes? Comment peut-elle contribuer à protéger la société? Cela me dépasse.
Dans le cas de ce criminel, il est absolument incroyable que les commissaires n'aient pas lu les déclarations précédentes pour détecter les contradictions. Ils vont même jusqu'à accorder des libérations conditionnelles sans escorte. Selon moi, c'est complètement aberrant.
Je sais qu'à titre d'agent de police, vous avez probablement été confronté à de telles situations. Je me demande si vous pourriez nous parler de certains autres incidents attribuables à cette situation que vous avez rencontrés dans le cadre de vos fonctions d'agent de police et, bien entendu, de président de l'association.
À titre d'agent de police, je répète que nous sommes fondamentalement en faveur de la réinsertion. Nous comprenons la libération conditionnelle, car il faut donner espoir aux personnes incarcérées. Il faut les former afin de leur permettre de réintégrer la société.
Mais quand on a affaire aux délinquants les plus dangereux, je dois m'assurer que quand je sors pour assumer mes fonctions d'agent de police... J'ai travaillé pendant 20 ans dans Regent Park, un des quartiers les plus difficiles de Toronto où on côtoie des gens en liberté conditionnelle.
Je comprends qu'on veuille surveiller les gens une fois qu'ils sont libérés sous condition. Mais cette surveillance a un coût. Une fois encore, quand il est question des frais des services de police, qui assumera ce coût et qui fera quoi?
Il existe plusieurs maisons de transition dans ce qui est la partie la plus densément peuplée de Toronto. Il est très difficile de surveiller 24 heures sur 24 ces gens, qui ont des problèmes de consommation de substances qui agissent comme déclencheurs. Quand on libère les gens dans la communauté, il faut être vraiment certain qu'ils s'y réintégreront. Il faut qu'il existe une structure de soutien, dont les coûts seront une fois de plus très difficiles à assumer.
Oui, je suis entièrement d'accord avec vous.
Je crois qu'en Saskatchewan, un homme qui avait été libéré a fait l'objet de surveillance. On a trouvé son dispositif de surveillance sur un toit quelque part. L'homme en question a été retrouvé aux États-Unis. Tout ne convient pas nécessairement avec la surveillance, parce que cet homme voulait retourner aux États-Unis, étant donné qu'il était citoyen américain. Je considère donc qu'il faut continuer de travailler à cet égard afin de resserrer les règles.
Quoi qu'il en soit, je tiens à vous remercier de témoigner aujourd'hui et de nous fournir de précieux renseignements.
Merci, monsieur le président.
Je veux remercier les trois témoins de comparaître et de formuler des observations que je considère très sincères.
Avant de soulever une question, j'aimerais savoir quand nous effectuerons l'examen article par article de ce projet de loi, monsieur le président.
Le comité a adopté une motion à cet égard pendant que j'étais en voyage en service commandé. L'examen article par article aura lieu le 27 février.
Je ferais une proposition, monsieur le président.
Je dirais d'abord aux témoins que M. Sullivan a formulé un certain nombre de propositions fort judicieuses, et je pense que les amendements que le comité examinera en tenant compte du témoignage de Mme Lee permettront de régler les points qui préoccupent cette dernière au sujet des enregistrements et des vidéos. Je crois cependant, monsieur le président, que les témoins ont proposé aujourd'hui quelques excellents nouveaux amendements.
Nous devons voir la transcription des propos des témoins et avoir le temps de préparer les amendements. Nous ne pouvons le faire d'ici jeudi. C'est tout simplement impossible. Je propose donc que le comité — vous et peut-être le secrétaire parlementaire — reconsidériez la question parce que nous voulons faire le meilleur travail possible et que nous avons recueilli quelques bonnes suggestions.
Quoi qu'il advienne, je vous dirais, madame Lee, que plusieurs témoins — ainsi que M. Sweet, je crois — nous ont indiqué à maintes reprises que les victimes n'avaient aucun moyen d'être informées des résultats obtenus — ou pas — par le délinquant dans le cadre de son plan de réinsertion. La question de la protection de la vie privée se pose toujours, mais je suis convaincu qu'il y a moyen de régler ce point.
Je demanderais à quiconque souhaite répondre de me dire à quel point cet aspect est important pour les victimes.
Comme je l'ai indiqué plus tôt, je reçois de l'information actuellement, ou plutôt avant qu'il ne soit libéré, sur les divers programmes qu'il suivait ou non. J'ai trouvé que les activités qu'il n'avait pas faites étaient très intéressantes et j'aurais aimé obtenir davantage de renseignements à ce sujet. L'information était très sommaire, ne portant que sur la nature du programme et indiquant s'il l'avait réussi ou s'il ne l'avait pas suivi. Mais moi et ma famille n'avons jamais été informés de son plan, de ce qu'on prévoyait pour sa libération afin de lui permettre d'être un membre fonctionnel de la société. Nous n'avons reçu que de l'information sur les programmes qu'il avait suivi.
Il me semble donc qu'il faudrait nous fournir plus de renseignements pour nous aider à comprendre le raisonnement, le pourquoi. Aucune victime ne veut que son agresseur sorte de prison, mais s'il faut en passer par là, nous voulons nous assurer que tout le monde est aussi en sécurité que possible quand il est libéré. Dans mon cas, le meurtrier avait un coefficient de deux sur trois et ne devait pas récidiver. On l'a libéré quand même et c'est ainsi que les choses se sont passées.
Monsieur McCormack, voulez-vous répondre à la question? Pouvez-vous nous dire — comme plusieurs témoins — ce que vous pensez de la période, qui est de cinq ans dans le projet de loi de M. Sweet?
Mais en vous écoutant ce matin, madame Lee, il m'a semblé que les fréquences des audiences étaient encore plus courtes que celles prévues dans le projet de loi. Si c'est le cas, pourquoi donc? Que pouvons-nous faire pour que vous soyez certaine du moment où la prochaine audience aura lieu plutôt que de mettre votre vie en danger et de changer les périodes?
Je pense qu'il y a deux éléments qui entrent en compte ici. Il faut qu'on prouve qu'un changement notable s'est produit. On ne peut se fier uniquement au système actuel, lequel permet à M. Munro, par exemple, de fixer la date de sa prochaine audience dès que sa libération conditionnelle a été refusée. Où est le changement notable? De quoi découle-il? Il faut que ce soit substantiel.
Comment peut-on démontrer un changement notable quand on n'a pas de renseignements parce qu'ils sont tous tenus secrets afin de respecter le droit à la vie privée?
Vous avez posé une excellente question à Mme Lee parce que dans le cas de M. Munro, par exemple, j'ai déjà souligné que son comportement meurtrier et antisocial était notamment provoqué par les drogues et l'alcool. Il a connu des problèmes en prison et cela n'a pas été divulgué. Il a fallu qu'on le découvre. Il n'y a aucune transparence à cet égard.
S'il s'agit d'un meurtrier violent dont le sadisme est déclenché par la consommation de drogue, il est certain qu'on accordera une sortie d'une journée avec escorte. On a révoqué cette permission escortée pour lui accorder une sortie non escortée. Sa libération conditionnelle a été révoquée, et nous cherchons à savoir pourquoi. Les victimes sont gardées dans l'ignorance, à l'écart du système.
Merci beaucoup, monsieur McCormack. Merci, monsieur Easter.
Nous avons maintenant terminé notre première heure et l'avons même dépassée. Au nom du comité, le président voudrait remercier les témoins de comparaître et d'avoir pris le temps de nous raconter leur histoire afin de nous aider dans le cadre de l'examen de ce projet de loi qui, nous l'espérons, sera particulièrement utile à tous.
Nous suspendons la séance un instant pendant que nous changeons de témoins.
Le comité reprend maintenant ses travaux pour une deuxième heure, même s'il pourrait être interrompu par la sonnerie d'appel. Nous devons attendre de voir comment les choses se passent, mais il est certain que le comité veut souhaiter la bienvenue à ses invités.
Merci, monsieur Steve Sullivan. Merci également à Catherine Latimer et à Terry Prioriello Armour de témoigner devant le comité afin de traiter du projet de loi de M. Sweet.
Nous commencerons par des interventions de 10 minutes. Si vous parlez moins longtemps, nous aurons davantage l'occasion d'échanger. Monsieur Sullivan, c'est vous que nous entendrons en premier.
Merci, monsieur le président, de cette invitation. Je voudrais féliciter M. Sweet des efforts qu'il déploie pour résoudre certaines des préoccupations exprimées par les victimes de crime. J'essaierai de rester bref pour que nous puissions avoir plus de questions. J'aborderai brièvement quelques aspects du projet de loi que nous appuyons ou qui nous préoccupent.
Le premier aspect concerne la prolongation de la période entre les audiences de libération conditionnelle. Je vous encouragerais tous à comprendre que la libération conditionnelle fait partie intégrante de la sécurité publique, comme vous le savez certainement. On considère souvent la libération conditionnelle comme une manière de sortir rapidement de prison. Bien franchement, je pense que nous voulons que les gens soient libérés rapidement. Si nous attendons que les détenus aient fini de purger leur peine, nous n'aurons aucun contrôle sur eux. Il est préférable de les libérer plus tôt et d'exercer sur eux un certain contrôle en les obligeant à se présenter devant un agent de libération conditionnelle et en les incarcérant de nouveau s'ils enfreignent les règles au lieu d'attendre, de les détenir ou de recourir au blocage, comme M. McCormack l'a dit.
Je pense qu'il importe de mettre les choses en contexte et d'indiquer que la libération conditionnelle constitue un élément important de la sécurité publique. Quand j'étais ombudsman, j'ai notamment recommandé de prolonger la période entre les audiences de libération conditionnelle ou d'instaurer un système permettant de faire passer de deux à cinq ans l'intervalle entre les audiences de libération conditionnelle des condamnés à perpétuité. Je considère que ces derniers sont légèrement différents, car ils ne peuvent être libérés en vertu de la loi. Ils peuvent toutefois l'être s'ils respectent les conditions et ont un bon profil de risque. Cependant, contrairement à un prisonnier condamné à six ans d'emprisonnement qui est libéré après six ans, qu'on le considère dangereux ou pas, nous pouvons garder les condamnés à perpétuité en prison plus longtemps.
Comme Mme Lee l'a indiqué et comme Terri le fera sûrement, j'ai assisté à bien des audiences de libération conditionnelle avec un grand nombre de familles. Il m'est arrivé de le faire plusieurs fois pour le même délinquant. C'est un processus très difficile, auquel bien des gens ont l'impression de devoir participer. Je pense donc qu'on pourrait prolonger jusqu'à cinq ans l'intervalle entre les audiences de libération conditionnelle des condamnés à perpétuité sans nuire à la sécurité publique. Par contre, si nous faisions de même pour ceux qui purgent une sentence d'une durée déterminée, la sécurité publique pourrait en pâtir.
Je passerai maintenant à d'autres parties du projet de loi. J'appuie certainement la proposition visant à régir certaines pratiques et dispositions actuellement en place à l'intention des victimes de crimes qui assistent aux audiences de libération conditionnelle, par exemple. J'ai rarement été témoin de situations où les victimes se sont vu refuser ce droit, mais je crois qu'il est important de légiférer à cet égard. Si nous considérons que les victimes ont le droit d'assister aux audiences de libération conditionnelle, alors nous avons l'obligation de réglementer ce droit. J'ai trouvé que le libellé de la disposition est peu maladroit. Je ne suis pas rédacteur de lois, mais il me semble que cette disposition pourrait être un peu plus claire. Ce droit n'est évidemment pas illimité. Si quelqu'un présente un risque ou si une raison le justifie, il faut imposer une limite qui devrait figurer dans la disposition.
Je me souviens d'avoir travaillé avec quelqu'un dont la mère avait été assassinée; après qu'il eut tenu des propos inappropriés, on a décidé qu'il ne pourrait assister à l'audience de libération conditionnelle. Grâce à nos efforts, toutefois, il a pu y assister par l'entremise d'une vidéoconférence, ce qui constituait un bon compromis.
Voilà qui m'amène à la prochaine disposition. Je crois que d'autres l'ont répété, mais je ne limiterais pas le droit de participer à une audience de libération conditionnelle par vidéoconférence à ceux à qui on a refusé une telle audience. Je considère que c'est un droit important pour ceux qui ne peuvent se déplacer. Quand j'étais ombudsman, j'ai travaillé avec la famille d'une victime qui, en raison des graves blessures physiques subies lors de l'agression, ne pouvait voyager ou éprouvait de grandes difficultés à voyager sur de longues distances. Nous avons donc collaboré avec la Commission des libérations conditionnelles pour permettre à sa famille de participer à l'audience de libération conditionnelle par l'entremise d'une vidéoconférence. C'était la première fois qu'on agissait ainsi pour une victime. On le fait toutefois pour les commissaires. En fait, je vais assister dans quelques mois à une audience de libération conditionnelle à laquelle les commissaires ne peuvent assister en prison; l'audience se fera donc par conférence téléphonique. Je serai avec la famille, à un autre endroit que la commission et le délinquant.
C'est donc possible d'agir ainsi, et on le fait au besoin pour les commissaires. Je le ferais également pour les victimes. Il se peut qu'on ne dispose pas du matériel nécessaire dans certaines situations, mais je pense qu'il faudrait alors le fournir.
J'appuierais l'exigence voulant que la Commission des libérations conditionnelles examine les déclarations de la victime. Cela cadrerait avec les dispositions du Code criminel exigeant que les juges examinent ces déclarations. La commission n'est pas pour autant obligée de suivre les recommandations ou les propositions de la victime; je considère cependant important que la loi exige que ces déclarations soient examinées.
J'appuie l'élargissement, au sujet duquel j'ai formulé une recommandation quand j'étais ombudsman. Les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition exigent actuellement que certains renseignements soient communiqués aux victimes. Ce sont des renseignements de base. L'article 142 stipule quant à lui que la victime peut obtenir des renseignements supplémentaires si cela n'entraîne pas de violation — les mots m'échappent — de la vie privée du délinquant.
Nous avons recommandé, du moins j'ai fait la recommandation lorsque j'étais ombudsman, que toutes ces dispositions deviennent obligatoires avec la condition suivante, à savoir que s'il y avait des cas dans lesquels la Commission nationale des libérations conditionnelles ou le Service correctionnel était d'avis que ce serait risqué de divulguer cette information, elle pouvait rester confidentielle. Ce serait certes des cas très rares, mais si les victimes ont proféré des menaces ou s'il y a un lien avec le crime organisé ou les gangs, on aurait le pouvoir discrétionnaire de ne pas divulguer certains renseignements. Dans l'ensemble, cependant, il faudrait les divulguer.
J'ajouterais toutes ces dispositions à l'article 142. Je sais que le projet de loi comporte certaines d'entre elles, et je crois que si l'on va modifier l'article 142, il faut ensuite modifier l'article 26, car la loi a deux volets. Il y a les dispositions qui visent la Commission nationale des libérations conditionnelles et celles qui visent le Service correctionnel. Les deux organisations divulguent de l'information aux victimes. Je ne crois pas qu'il serait très sensé de permettre à la Commission nationale des libérations conditionnelles de divulguer plus de renseignements que ne le ferait le Service correctionnel.
En ce qui concerne le plan correctionnel, pour être franc, je n'en ai jamais vu. Je ne sais pas ce que c'est, donc j'aurais du mal à me prononcer en faveur. Je suis sûr que l'on pourrait fournir des renseignements ou peut-être des sommaires. Mais pour ce qui est du contenu d'un plan, il y a peut-être de nombreux renseignements que les victimes... Vous savez, des renseignements de nature privée sur les membres de la famille... Je le répète, je ne sais pas ce que c'est un plan, je vous encourage donc à déterminer exactement le contenu d'un plan avant que vous ne terminiez votre étude du projet de loi. Catherine a peut-être des renseignements à ce sujet.
Je peux cependant vous dire que j'ai apporté... Nous avons entrepris les démarches nécessaires afin de recevoir des renseignements au nom de certaines victimes. J'ai enlevé tous les renseignements qui pourraient identifier quelqu'un. C'est ce qu'une victime recevrait actuellement sur un délinquant. En fait, il s'agit d'une liste de tous les programmes auxquels le délinquant a participé ou qu'il a accepté de suivre, qu'il ait terminé ou non. Le nom du programme est indiqué comme, par exemple, la sensibilisation à la gestion de la colère. Le plan indique si le délinquant a terminé le programme ou non et les dates. Ce sont le genre de renseignements auxquels les victimes ont droit actuellement. Comme je ne connais pas grand-chose sur ces plans, j'ignore s'il y a d'autres renseignements qui pourraient être intéressants.
D'après ce que j'ai compris, la Commission nationale des libérations conditionnelles ne prépare pas les transcriptions des séances, mais moi-même, ayant assisté à de nombreuses audiences concernant la libération conditionnelle d'un délinquant, je peux vous dire que lorsqu'il y a de nouveaux membres qui participent à l'audience, ils savent exactement ce qui s'est produit lors de la dernière audience. D'après mon expérience, ce n'est pas vrai que les nouveaux membres ne savent pas ce qui a été dit ou fait lors de la dernière séance. Les membres de la Commission nationale des libérations conditionnelles, surtout dans le cas des délinquants condamnés à perpétuité, ont accès à des dossiers détaillés sur l'historique de l'incarcération du délinquant, et ils savent bien ce que ce délinquant a fait ou n'a pas fait. Ces membres savent également ce qu'il a dit ou non pendant les audiences précédentes. Je tenais à le souligner.
Je crois qu'il coûterait plutôt cher d'exiger des transcriptions de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Franchement, je ne sais pas si... Nous avons fait des recommandations lorsque je travaillais au bureau de l'ombudsman. C'était en 2005, sous le gouvernement précédent. Nous voulions que les victimes aient le droit d'écouter un enregistrement audio de l'audience. Je crois que ce serait une solution plus pratique et utile, plutôt que de permettre aux victimes de se rendre sur place et assister aux audiences.
Je vais m'arrêter là. Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions plus tard.
Je représente la Société John Howard du Canada, un organisme caritatif communautaire dont la mission est de promouvoir des réponses efficaces, équitables et humaines en ce qui concerne les causes et les conséquences de la criminalité. Notre société a plus de 60 agents de première ligne qui travaillent à l'échelle du pays en offrant de nombreux programmes pour appuyer la réinsertion des délinquants et prévenir la criminalité. Notre travail a comme objectif de rendre les collectivités plus sûres.
Je vous remercie de m'avoir invitée aujourd'hui à vous parler du projet de loi C-479, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, qui aurait une incidence sur le rôle des victimes lors des audiences de libération conditionnelle et, dans certains cas, le prolongement de la période entre les audiences de libération conditionnelle. Le projet de loi vise l'équité à l'égard des victimes de délinquants violents.
Je crois que nous souhaitons tous appuyer les victimes au moyen de programmes et services adaptés et de renseignements sur le régime de justice pénale. Je suis sûre qu'il y aurait moyen d'améliorer les renseignements liés au système de libération conditionnelle. Il serait plus difficile de trouver un terrain d'entente en ce qui concerne le rôle de la victime au sein du système de justice pénale afin de s'assurer que les principes fondamentaux de justice sont défendus et qu'il y ait de l'équité à l'égard de tous.
La Société John Howard du Canada attend le projet de loi sur les droits de la victime du gouvernement, qui, nous l'espérons, apportera des éclaircissements sur certaines de ces questions importantes. Le projet de loi C-479 est à l'étude avant que le gouvernement ne dévoile sa stratégie compréhensive à l'égard des victimes au sein du régime de justice pénale. Si la version actuelle du projet de loi est adoptée, il y aura des préoccupations d'ordre pratique d'abord, concernant l'efficacité de la mise en liberté sûre et progressive générale et de la protection des victimes, ainsi que des préoccupations d'ordre théorique liées aux fondements du droit pénal et des services correctionnels, notamment en ce qui concerne le rôle proposé de la victime dans le cadre des audiences de libération conditionnelle.
Je vais d'abord parler des questions d'ordre pratique.
La recherche l'indique clairement, et en passant je suis d'accord avec Steve à ce sujet, c'est-à-dire que la mise en liberté supervisée, accompagnée et progressive des détenus contribue à la sécurité de la collectivité, car elle réduit le taux de récidive. Si les détenus ne souhaitent pas participer aux programmes de réhabilitation et sont ensuite mis en liberté après avoir purgé leur peine, il se peut fort bien que ces détenus retournent dans nos quartiers sans disposer des compétences et de l'encadrement nécessaires pour les empêcher de retomber dans la criminalité. L'amenuisement de la mise en liberté supervisée, accompagnée et progressive met en péril la sécurité de la collectivité et accroît le nombre de victimes dans notre société.
La portée de ce projet de loi est vaste. Il vise à prolonger la période entre les audiences de libération conditionnelle dans le cas des détenus ayant commis des infractions prévues à l'annexe 1 de la loi, à savoir 76 infractions à l'origine de la peine en cours et 18 infractions antérieures, dont certaines qui ne sont pas violentes ou n'ont pas entraîné de lésions corporelles graves.
À l'heure actuelle, on recense 11 286 délinquants dans les établissements fédéraux qui sont visés par l'annexe 1. Il ne s'agit pas d'une poignée de meurtriers ou même de meurtriers violents. Il s'agit d'un groupe énorme de détenus des pénitenciers fédéraux qui sont visés par ces dispositions.
Si l'on refuse la libération conditionnelle à ces détenus lors d'une audience, les détenus n'auraient droit à une autre audience que dans cinq ans. Mais puisque la plupart des détenus des établissements fédéraux purgent des peines de moins de cinq ans, cela vaudrait dire qu'ils n'auraient qu'une seule occasion de demander la libération conditionnelle. La majorité des détenus ne seraient pas libérés en bénéficiant d'un cadre progressif, supervisé et accompagné, mais seraient plutôt parachutés dans la collectivité à la date de leur libération d'office ou d'expiration du mandat.
Il est peut-être réconfortant de penser que plus les détenus passent du temps en prison, plus les collectivités sont sûres, mais ce n'est tout simplement pas le cas. Les détenus libérés à la fin de leur peine n'ont pas les compétences nécessaires et ne bénéficient pas du soutien et de la supervision offerts par les services correctionnels communautaires. Le projet de loi C-479 imposerait un système dans lequel plus de détenus se verraient refuser les avantages d'une mise en liberté progressive, ce qui augmenterait le risque de récidive. Cela ne ferait qu'aggraver un problème grandissant au sein du système correctionnel. Sachez que plus de la moitié des détenus sont maintenant libérés à la date de libération d'office ou d'expiration du mandat, et ne bénéficient donc pas des avantages du système de libération conditionnelle.
La deuxième catégorie de préoccupations liées au projet de loi C-479 porte sur le rôle approprié de la victime dans le cadre des audiences de libération conditionnelle, conformément aux principes fondamentaux de justice. Essentiellement, l'audience de libération conditionnelle sert à déterminer les progrès réalisés par le détenu en ce qui concerne son plan correctionnel, le niveau de risque si le reste de la peine était purgé au sein de la collectivité, et s'il serait possible d'imposer des conditions qui rendraient ce risque gérable au sein de la communauté. L'audience ne sert pas à revoir la peine imposée, laquelle a été décidée par un tribunal lors du délibéré au cours duquel les victimes ont déjà eu l'occasion de faire une déclaration.
La participation de la victime à une audience de libération conditionnelle devrait être en lien avec la décision prise par la formation quasi judiciaire. Mais puisque l'audience de libération conditionnelle sert à évaluer les progrès réalisés par le détenu dans son plan correctionnel et à évaluer les questions liées à la gestion des risques dans la collectivité, la déclaration de la victime, qui ne connaît peut-être pas les progrès réalisés par le détenu dans son plan correctionnel et ne s'y connaît pas tellement dans la gestion des risques communautaires, ne semble pas du tout indiquée à ce stage.
Les déclarations de victime peuvent bien sûr occuper un rôle légitime en ce qui concerne les éventuelles conditions associées à la mise en liberté conditionnelle, mais il faudrait l'indiquer de façon claire et détaillée dans le projet de loi. Si la victime a fait l'objet de menaces directes ou indirectes de la part du détenu ou si le détenu réintégrera la même famille ou la même collectivité que la victime, il serait tout à fait justifié d'imposer des conditions à la libération conditionnelle, telles que les ordonnances de non-communication.
Il est cependant plus préoccupant de proposer la réduction de la fréquence des audiences une fois que le détenu est admissible à la libération conditionnelle afin d'offrir une certaine équité à la victime. Les intérêts de la victime qui consistent à ne pas avoir à se présenter aux audiences de libération conditionnelle régulières compromettent le droit du détenu à faire réexaminer la privation de sa liberté dans le cadre de la gestion de sa peine, ce qui est conforme aux principes fondamentaux de justice.
Il y aura sans doute une discussion plus approfondie sur la légitimité de troquer les droits à la liberté et à la protection qui sont associés aux principes fondamentaux de la justice contre les intérêts de la victime lorsque le gouvernement présentera la charte des droits de la victime.
Le fait de présenter la criminalité, le cautionnement, la peine et la libération conditionnelle en opposant les droits des criminels à ceux de la victime fait partie de l'évolution de la doctrine des droits au Canada, laquelle est considérée par certains d'entre nous comme étant mal indiquée.
Alors qu'autrefois les droits étaient perçus comme la garantie d'une dignité individuelle pour tous les êtres humains, même ceux ayant commis des crimes contre les États, ces droits sont maintenant de plus en plus présentés comme des armes utilisées par un groupe contre un autre, et c'est l'État qui choisit le vainqueur. Nous devons nous assurer que même selon cette nouvelle idéologie des droits, les personnes ayant été trouvées coupables d'un crime bénéficient néanmoins du respect humain, tel que l'exige la longue tradition de la common law.
Pour terminer, la Société John Howard du Canada vous encourage à reporter votre étude du projet de loi d'initiative parlementaire C-479 jusqu'au dépôt du projet de loi du gouvernement, qui est censé porter de façon plus approfondie sur les droits des victimes dans le système de justice pénale. Il est fort probable qu'il y ait des recoupements et des incohérences si vous procédez d'abord à l'étude du projet de loi dont vous êtes saisi.
La Société John Howard du Canada vous encourage également à effectuer un examen en profondeur de l'efficacité actuelle du régime de libération conditionnelle du Canada. Le recours à la réhabilitation et à la réinsertion réussie dans le cadre d'un régime efficace de libération progressive est une bonne façon de réduire le nombre de victimes dans l'avenir.
L'adoption de ce projet de loi, qui vise à refuser à de nombreux détenus le droit à une deuxième audience de libération conditionnelle avant la date de libération d'office et d'expiration du mandat, démolira le régime de libération conditionnelle actuel. Le fait de n'offrir qu'une seule possibilité d'obtenir la libération conditionnelle à la majorité des détenus des pénitenciers fédéraux ne permettra pas de réaliser les objectifs de mise en liberté progressive prévus par la loi.
Nous appuyons les programmes, les services, les renseignements connexes et la participation des victimes aux systèmes de justice pénale et correctionnelle, mais le projet de loi C-479 minera le système de mise en libération progressive qui vise à accroître la sécurité des collectivités et à réduire le nombre de victimes en général. Le projet de loi n'est certainement pas juste à l'égard des futures victimes.
Merci beaucoup.
Bonjour. J'ai l'honneur de vous parler aujourd'hui du projet de loi C-479, Loi modifiant la loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (équité à l'égard des victimes).
J'aimerais d'abord remercier M. Sweet qui m'a invitée à vous parler ici aujourd'hui du projet de loi C-479 et d'avoir déposé ce projet de loi important sur l'équité à l'égard des victimes.
Ma soeur, Darlene Prioriello, a été la victime d'un assassin. Depuis le meurtre de Darlene, notre famille s'est retrouvée à bien des reprises dans le rôle de victime. À titre d'exemple, nous avons entendu le meurtrier se vanter de sa chambre à coucher qui a une poignée de porte et qui peut être verrouillée de l'intérieur. Ou bien lorsque nous avons regardé une vidéo de M. Dobson qui comparaît devant la Commission nationale des libérations conditionnelles et qui dit: « Il est facile de purger une peine. » Nous avons eu l'impression que notre système de justice loge les détenus plutôt que de les punir. C'est comme si on envoyait un enfant à sa chambre tout en leur disant à quel point ils sont choyés.
Lorsque David Dobson a eu droit à sa première audience de libération conditionnelle en avril 2007, je me souviens de la douleur que j'ai ressentie pendant que je rédigeais ma déclaration. Parfois, j'arrivais à écrire un seul paragraphe avant d'arrêter. Parfois, je pouvais écrire pendant des heures, mais je devais ensuite attendre des semaines avant de revenir à mon texte. Lorsque j'ai fini ma déclaration, j'ai téléphoné à ma mère pour lui demander si elle avait terminé la sienne. Elle m'a avoué qu'elle n'a même pas pu commencer. Elle m'a demandé de lui dire la mienne, et comme je suis sa fille, je me suis sentie obligée de l'aider, j'ai donc acquiescé. Elle a pleuré tout au long de ma lecture. Je lui ai ensuite envoyé ma déclaration en lui disant qu'elle devait l'adapter pour en faire son texte. Je me sentais obligée de l'aider. Je devais la soutenir d'une façon.
Je croyais avoir perdu une soeur. Mais j'ai des enfants, et on ne peut comparer le fait de perdre sa soeur et le fait de perdre sa fille ou son fils. C'est impossible. J'ai dû recommencer ma déclaration.
Quelques semaines plus tard, ma mère a appelé pour me dire qu'elle avait terminé sa déclaration. Elle me l'a envoyée en me demandant de la lire et de lui donner mon avis. L'essentiel de ma déclaration originale avait été conservé, mais le texte était beaucoup plus long que ma déclaration de deux pages. Je n'arrivais pas à croire qu'elle avait pu survivre au stress, à la douleur. Ma mère a été hospitalisée plusieurs fois pendant la rédaction de sa déclaration parce qu'elle a dû revivre le crime de nouveau et revivre le décès de sa fille.
Toute la famille se sentait impuissante. Nous ne lui avons pas dit que sa santé était plus importante qu'une déclaration ou une audience de libération conditionnelle. Elle ne voyait pas les choses ainsi. Elle pensait qu'elle devait faire quelque chose pour son bébé, pour Darlene.
Nous devions ensuite envoyer nos déclarations à la Commission nationale des libérations conditionnelles à des fins d'examen, et ensuite les déclarations ont été envoyées à David Dobson, l'assassin de ma soeur, pour son approbation. On nous a ensuite demandé d'apporter quelques changements à nos déclarations puisque Dobson n'aimait pas certaines des choses que nous avons dites. On nous a également rappelé que nous devions faire preuve de respect à l'égard du meurtrier en tout temps.
La déclaration devrait exprimer nos sentiments. Elle devrait décrire ce qui nous a été enlevé. Nous ne devrions pas avoir à nous soucier de ses sentiments ni de ses états d'âme. C'est notre déclaration, pas la sienne. Lorsqu'on parle de respect, eh bien, le respect se mérite. On ne peut l'exiger. Il ne se donne pas, il se mérite.
À quel respect ma soeur a-t-elle eu droit quand il l'a violemment agressée sexuellement avant de lui écraser la tête avec un bloc de béton?
Nous avons également trouvé très injuste que David Dobson ait pu lire nos déclarations, alors que nous avons dû assister à son audience de libération conditionnelle sans avoir la moindre idée de ce qu'il allait dire, puisque nous n'avons pas eu la chance de lire sa déclaration à lui. Nous n'avons eu aucun avertissement. Nous ne pouvions aucunement nous préparer émotionnellement à ce qu'il allait peut-être se dire lors de cette audience. Dites-moi, pourquoi l'agresseur qui a tué de manière brutale un être qui nous est cher est aussi bien traité par notre système? Souvenez-vous: « Du temps, c'est facile à faire », comme il l'a dit lui-même.
Avant l'audience, on nous avait mentionné que David Dobson savait qu'il n'obtiendrait pas de libération conditionnelle, mais qu'il voulait savoir comment le système fonctionne. S'il avait été libéré, il n'aurait eu ni logement ni travail, aucun moyen de s'abriter, de se nourrir et de prendre soin de lui-même. Nous avons vécu l'enfer pour son bon plaisir, parce qu'il voulait voir comment fonctionne le système.
Pourquoi la loi permet-elle ce genre de chose? Ne devrait-on pas la revoir?
À l'audience, ma mère, mon mari, ma fille, mon oncle et moi étions assis ensemble. David Dobson est entré dans la pièce. Il a regardé ma mère droit dans les yeux, puis il a fait la même chose avec moi. Je ne peux vous expliquer comment je me suis sentie. J'en avais le souffle coupé. Je voyais les yeux de la dernière personne à avoir vu ma soeur vivante. Je voyais le dernier visage que ma soeur a vu de son vivant, alors qu'elle pleurait et le suppliait de lui laisser la vie sauve.
Ses yeux étaient si froids et vides d'émotion. Il s'est assis sur sa chaise, et peu de temps après, il s'est mis à pleurer et a continué de pleurer tout au long de l'audience. Nous avons senti que c'était pour étouffer nos paroles lorsque nous lisions nos déclarations.
À un moment donné, David Dobson a regardé ma mère et lui a dit qu'il était désolé. Elle lui a répondu qu'elle ne le croyait pas et qu'elle ne croyait pas du tout à ses larmes non plus. Un des membres de la commission des libérations conditionnelles lui a rappelé qu'elle ne devait pas s'adresser aux détenus. Cependant, aucune directive n'a été donnée à David Dobson pour qu'il s'adresse à ma mère à cette audience.
J'aimerais croire que la commission des libérations conditionnelles comprend à quel point c'est difficile pour la famille, et j'aimerais qu'elle exige que le tueur nous montre le même respect que nous sommes tenus de lui montrer. Encore une fois, a-t-il respecté ma soeur quand il l'a tuée? Avant de mourir, elle n'a eu droit à aucune forme de respect de sa part. Le dernier geste qu'il a posé envers elle a été d'uriner sur son corps. Il a dit qu'il n'avait jamais éprouvé autant de plaisir en urinant de sa vie.
Dobson a pris soin de nous dire pendant l'audience qu'il avait accroché un crucifix dans la chapelle en mémoire de Darlene. Lorsque nous avons appelé sur place, on nous a répondu que c'était totalement faux. Nous pensons que c'était une façon pour lui d'avoir des sensations fortes, de revivre le crime qu'il a commis. C'est typique du comportement d'un tueur de vouloir revivre le meurtre de toutes les façons possibles. L'audience lui a donné cette chance.
Nous lui avons donné cette chance. C'est peut-être l'audience du détenu, mais c'est nous qui avons perdu un être cher.
Pendant l'audience, ma mère a eu un malaise. On l'a escortée en dehors de la pièce et elle est revenue un peu plus tard. C'était tout simplement insoutenable pour elle.
Peu de temps avant l'audience, j'avais rencontré deux des soeurs de David Dobson. L'une d'elles m'a dit que lorsqu'elle est allée le voir en prison, David Dobson lui avait dit qu'à sa libération il voulait rendre visite à Terri Prioriello et que cela ne serait pas joli.
Sur notre site Web, www.nofreedomdobson.com, vous trouverez sa lettre intitulée « Catch me if you can » (attrapez-moi si vous pouvez), dans laquelle il promet de commettre d'autres meurtres chaque année qu'il le pourra à l'anniversaire de la mort de ma soeur. Gardez à l'esprit qu'il ne la connaissait pas et qu'il ne l'avait jamais vue avant cette rencontre fatidique. Mais c'est leur anniversaire.
Vu sa promesse de tuer de nouveau et les menaces qu'il m'a faites par l'entremise de sa soeur, il n'est pas étonnant que je me sois sentie en danger, peu importe le nombre de gardiens présents dans la salle. Pourtant, je n'étais pas autorisée à le dire à la commission des libérations conditionnelles dans ma déclaration, parce que ce n'était pas mon audience et que je n'avais pas le droit d'influencer la décision de la commission.
Je pense qu'un délinquant sérieux dans sa démarche devrait avoir droit à une audience. Notre famille demande que la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition soit amendée pour que les délinquants aient droit à une audience tous les cinq ans, et non tous les deux ans comme c'est le cas en ce moment, sans disposition d'antériorité. Appliquez l'amendement de façon rétroactive à tous les délinquants. Je vois que le système, ce même système qui est censé nous protéger, est défaillant.
Je sais qu'on permet aux délinquants sérieux de suivre des cours pour les aider à réintégrer la société. Je crois que ces cours devraient être obligatoires, pas optionnels. Je pense que plus de cours devraient être offerts en vue de la réintégration sociale...
Je suis désolé; il faut conclure ici pour qu'il nous reste un peu de temps pour les questions. Merci.
Voulez-vous invoquer le Règlement?
J'hésite à le faire, mais comme cela a dû être extrêmement difficile pour elle d'être ici aujourd'hui, je demanderais le consentement unanime du comité pour lui permettre de terminer sa déclaration, si c'est possible pour elle.
Si le comité y consent, je n'y vois pas du tout d'inconvénient.
Des voix: D'accord.
Le président: Le comité est d'accord. Merci de votre intervention.
Poursuivez, je vous prie.
Merci beaucoup.
La libération d'un détenu ne devrait pas dépendre des considérations économiques ni du manque d'espace. On dirait parfois que les détenus sont mieux traités que certains de nos aînés.
En terminant, je demanderais que le projet de loi C-479, la loi pour l'équité à l'égard des victimes, porte le nom de deux personnes.
La première est ma soeur, Darlene Prioriello. Son meurtre était d'une grande brutalité. Je me bats pour défendre les droits des victimes depuis longtemps, et Steve Sullivan peut en témoigner. Ce serait un honneur que le nom de Darlene soit associé à autre chose que celui d'une victime. Faire en sorte que son nom évoque l'équité serait faire revivre la personne qu'elle était véritablement. Sa pierre tombale porte d'ailleurs cette inscription: « Elle donnait tant et demandait si peu ».
La deuxième personne est l'agent Michael Sweet, qui était à l'emploi du service de police de Toronto depuis six ans et qui a été assassiné par les criminels endurcis Craig et Jamie Munro. Craig Munro a fait feu sur l'agent Sweet, qui a été tenu en otage par les voleurs. L'agent Sweet a imploré les voleurs de lui laisser la vie sauve, mais ils lui ont même refusé de recevoir des soins médicaux.
Ce serait un honneur si le projet de loi pouvait porter le nom de ces deux personnes fortes et remarquables.
Merci de m'avoir écoutée et d'avoir pensé à l'équité à l'égard des victimes dans le titre du projet de loi.
Pour ceux qui s'aiment, le temps est éternel.
Merci.
Je me joins aux membres du comité pour vous remercier sincèrement de vos témoignages poignants. À vous entendre parler et à voir l'expression sur vos visages, il est évident que nous sommes tous profondément préoccupés par la situation et confrontés à de grands défis, nous, les législateurs, mais vous aussi, les familles, évidemment.
Il nous reste très peu de temps, tout dépendant du moment où la sonnerie d'appel va se faire entendre.
Monsieur Easter, vous êtes notre premier intervenant. Vous avez cinq minutes.
Eh bien, je vais me contenter de trois.
Le président: Merci.
L'hon. Wayne Easter: Vous pourrez m'interrompre au bout de trois minutes, monsieur le président.
Pour la deuxième heure avec les témoins, les intervenants doivent prendre la parole dans cet ordre: conservateurs, NPD, conservateurs et libéraux.
Ce n'est rien. Merci, monsieur le président. Par votre entremise, je remercie les témoins de leur présence.
À la victime de M. Dobson, je dois dire que les législateurs doivent se détacher un peu pour faire leur travail, mais c'est parfois difficile, surtout quand on entend des histoires comme celle-là.
Je reconnais d'abord que l'exercice d'aujourd'hui ressemble un peu à une audience de libération conditionnelle, en ce sens que cela vous pousse à revivre ce drame encore une fois. Mais, et je crois que les députés de tous les partis seront d'accord avec moi, je vous assure que ce ne sera pas en vain. Nous vous remercions de l'avoir fait, vous et les autres témoins qui sont ici.
J'ai consulté votre site Web « No Freedom Dobson » et j'ai pris connaissance récemment des mésaventures de votre famille avec les audiences. J'ai lu que vous aviez déchiré votre déclaration dans un moment d'exaspération durant l'examen, parce que vous ne pouviez pas dire ce que vous vouliez.
Je cite librement:
Ils ont dit: « Vous ne pouvez pas le traiter de monstre ni d'être diabolique — ce n'est pas respectueux »...
Ce à quoi vous avez répondu:
A-t-il été respectueux envers ma soeur quand il l'a assassinée?
Je crois que vous avez tout à fait raison.
Il y a un déséquilibre dans notre système. Nous essayons donc de retrouver l'équilibre. L'objectif du projet de loi est de faire en sorte que les droits des victimes pèsent plus lourd dans la balance.
Je me demandais si vous pouviez nous dire de quelle façon vos droits ont été lésés durant ce processus et comment les dispositions de ce projet de loi pourraient vous aider dans le cadre de ces audiences.
Le système pourrait être équilibré si... Comme je le disais, il faut commencer à voir les audiences comme un processus qui appartient aussi aux victimes, pas seulement au délinquant. Heureusement, il n'a pas obtenu de libération conditionnelle. Mais si la commission envisageait honnêtement de lui accorder une libération à ce moment-là, j'avais des arguments béton pour l'en dissuader. Quand on fait des menaces par l'entremise de sa soeur... il a clairement demandé à sa soeur de me transmettre le message que lorsqu'il allait sortir de prison, il voulait venir me voir, et que ce ne serait pas joli. Et dans sa lettre, « Catch me if you can », comme on l'appelle et comme vous l'avez peut-être vu sur le site Web, il promet de tuer de nouveau chaque année où il en aura l'occasion.
Pensez-vous vraiment que la famille de la victime ne devrait pas avoir le droit de communiquer ce genre d'information lors d'une audience de libération conditionnelle? Je pense que c'est pertinent de le savoir. La commission de libération conditionnelle devrait entendre ce genre de choses. S'il a passé une vingtaine d'années derrière les barreaux — je crois qu'il en est à 22 aujourd'hui — et qu'il peut encore me menacer moi, de menacer de venir me chercher chez moi, est-il vraiment prêt pour une libération conditionnelle? De son propre aveu, il a promis de tuer encore chaque année. Est-ce un bon argument en sa faveur?
La commission ne voulait pas entendre ce que j'avais à dire. Pour retrouver l'équilibre, il faut que les audiences appartiennent aussi aux victimes.
Merci pour votre réponse. J'ai une autre question à vous poser. Le temps file à vive allure.
Selon vous, pourquoi est-il important que le public, et surtout les victimes, soit mis au courant du plan correctionnel du délinquant et de ses évaluations en route vers sa réintégration dans la société?
Je pense qu'il est important pour nous, la famille, de savoir quels cours il a suivi. Nous avons cette information, mais il est aussi important de savoir que certains cours sont obligatoires. Cela ne suffit pas de donner le choix aux délinquants de profiter des occasions qu'on leur offre pour les aider à réintégrer la société.
Il faut se rappeler que pendant leur séjour en prison, ils ne peuvent plus utiliser d'argent, attendre l'autobus, ou simplement faire montre de courtoisie et de civilité au quotidien. Ils doivent savoir comment se comporter. Je n'ai rien contre le fait qu'un criminel qui a purgé sa peine retourne dans la société, mais quand il le fait, il faut s'assurer qu'il est prêt à affronter le monde. Il faut s'assurer qu'il sait à quoi s'en tenir, de façon à ce qu'il ne prenne pas panique et qu'il ne retombe pas dans ses habitudes criminelles pour retourner en prison.
Comme Dobson l'a dit à son audience — c'est sur notre site Web —, la prison est le seul chez-soi qu'il ait jamais connu. Si vous voulez revenir à la maison, vous sautez dans votre voiture pour aller voir votre ancien quartier. Pour lui, revenir à la maison, cela veut dire retourner en prison, et pour cela, il devra commettre un autre meurtre.
Il est donc important que nous sachions que les délinquants suivent ces cours, des cours obligatoires, et qu'ils sont entièrement prêts à affronter la société de nouveau, en toute sécurité.
Merci beaucoup.
Étant donné que la sonnerie peut retentir à tout moment, je vais me dépêcher, mais je tiens à remercier tous les témoins d'aujourd'hui. Vous nous avez certainement donné matière à réflexion concernant la fréquence des audiences pour les délinquants qui ont été condamnés pour meurtre. Je vous assure que nous prenons vos commentaires très au sérieux.
Après ce que j'ai entendu aujourd'hui, comme M. Easter, je ne suis pas certain que nous devrions procéder à l'étude article par article le 27. On nous a proposé des amendements tout à fait valables, et...
Merci, monsieur Garrison. La procédure au comité est de lever la séance lorsque la sonnerie se fait entendre. J'aurais besoin du consentement unanime du comité pour poursuivre la séance encore quelques minutes.
Puis-je demander le consentement unanime du comité? Il s'agit de la sonnerie de 30 minutes, et nous sommes à l'édifice du Centre.
Je le sais, mais c'est ce que fait habituellement le comité. Je n'ai pas changé la norme, alors je vais respecter la procédure habituelle. Toutefois, le comité peut consentir à ce que vous terminiez votre question. La décision lui revient.
Ai-je le consentement unanime du comité?
Des voix: Oui.
Le président: Allez-y, monsieur.
Merci beaucoup.
Je disais donc que je partage ces préoccupations. J'espère que les travaux du comité seront à l'ordre du jour jeudi prochain pour que nous puissions revoir la vitesse à laquelle nous procédons, surtout que, comme je l'ai dit, la commission des libérations conditionnelles aurait refusé de comparaître lorsqu'il est question de projets de loi qui risquent d'avoir une grande incidence sur ses activités. Nous devrons nous pencher sur cette correspondance pour voir si c'est bien vrai.
Monsieur Sullivan et madame Latimer, j'aimerais revenir à deux ou trois choses que vous avez soulevées. Plus tôt, nous avons entendu le témoignage de la représentante d'un groupe de victimes du Québec. Elle a fait une distinction entre ceux qui sont condamnés pour meurtre et ceux qui sont condamnés pour une infraction visée à l'annexe I. Je pense que vous avez tous deux fait référence à cela.
Quand Mme O'Sullivan a comparu en tant qu'ombudsman des victimes, elle a dit que cela ne faisait pas partie de sa recommandation initiale. Sa recommandation se limitait aux meurtres — pas aux infractions visées à l'annexe I.
Madame Latimer et monsieur Sullivan, je vous demanderais de parler un peu plus longuement de la distinction qui existe entre ceux qui sont condamnés pour meurtre et ceux qui sont condamnés pour une infraction visée à l'annexe I.
Merci de la question.
En fait, j'étais l'ombudsman quand nous avons fait cette recommandation initiale, qui visait seulement ceux qui purgeaient une peine d'emprisonnement à perpétuité — pas tous ceux qui avaient commis une infraction avec violence.
À mon avis, les dispositions proposées dans le projet de loi pourraient avoir des répercussions négatives sur la sécurité publique.
M. Randall Garrison: Merci.
Je suis d'accord avec vous.
En fait, je pense que vous pourriez même créer des catégories de meurtriers. Beaucoup d'entre eux — pas les tueurs en série psychosexuels, mais ceux qui ont commis un meurtre — présentent le plus faible risque de récidive au moment de leur libération conditionnelle. À mon avis, il faut faire une distinction entre les catégories de meurtriers — notamment les tueurs en série et les tueurs sado-sexuels —, et créer une catégorie très restreinte de meurtriers qui présentent le plus haut risque de récidive, comme les délinquants dangereux.
Merci.
Madame Latimer, vous avez dit que si nous mettions en place un système où le détenu n'aurait qu'une seule chance d'obtenir sa libération conditionnelle, les délinquants seraient moins incités à prendre part à des activités de réadaptation. Pourriez-vous en dire plus à ce sujet?
Compte tenu de la durée de la peine que purgent réellement la plupart des délinquants sous responsabilité fédérale, il serait extrêmement peu probable qu'un détenu obtienne une libération conditionnelle. La plupart des gens n'obtiennent pas leur libération conditionnelle lors de leur première audience. Et si un détenu doit attendre cinq ans pour sa prochaine audience, à quoi bon prendre part aux programmes visant à réaliser son plan correctionnel si, de toute façon, il devra attendre sa libération d'office?
Si un système de mise en liberté progressive n'est pas en place, les délinquants seront moins motivés à se préparer pour leur libération.
Il me reste probablement assez de temps pour poser une dernière question.
Nous avons entendu quelques personnes dire que le projet de loi devrait être modifié afin d'exiger que la commission des libérations conditionnelles prenne en considération les déclarations des victimes.
Ma question s'adresse encore à vous, monsieur Sullivan et madame Latimer. Seriez-vous en faveur d'inclure une disposition visant à obliger la commission à prendre en considération ces déclarations?
Je n'y vois aucune objection, mais je préférerais que ces déclarations soient pertinentes lors de la prise de décisions de la commission quasi judiciaire. Comme vous avez entendu beaucoup de victimes le dire, il est très difficile de ne pas faire allusion à l'infraction originale et de ne pas continuer d'en tenir les détenus responsables. Toutefois, il faudrait considérer recevables les déclarations qui fournissent des renseignements pertinents, comme ceux permettant d'établir que des détenus ont proféré des menaces.
Merci beaucoup.
Monsieur Richards, vous avez la parole pendant deux minutes, après quoi, c'est terminé.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous les témoins d'être ici aujourd'hui, tout particulièrement vous, madame Prioriello Armour.
Je ne peux qu'imaginer ce que vous et Mme Lee ressentez. Comme je l'ai dit à Mme Lee après son témoignage, en vous écoutant, j'avais envie de vous serrer dans mes bras — et je suis convaincu que vous avez eu besoin d'être beaucoup consolées et aidées pendant tout ce temps. Je ne peux qu'imaginer ce que vous avez pu ressentir en étant obligées de raconter votre histoire plusieurs fois et en ayant été de nouveau victimisées de la sorte.
J'aimerais vous poser quelques autres questions. Vous avez parlé de la lettre « Essayez toujours de m’attraper pour voir » que vous avez publiée sur votre site Web. Évidemment, ce projet de loi vise à éviter que les victimes se sentent victimisées toutes les fois qu'elles doivent comparaître devant la commission. Mme Lee a bien résumé la situation en disant que cela semblait revenir presque tous les six mois.
Pourriez-vous nous dire à quel point votre vie aurait été différente si cette mesure législative avait été en vigueur et vous aurait ainsi donné un répit de cinq ans? Est-ce que cela aurait beaucoup changé votre vie et celle de votre famille?
Cela aurait énormément changé notre vie. Nous avons comparu à une seule audience de libération conditionnelle, mais nous nous sommes préparés pour trois audiences. À deux reprises, il a dit vouloir la tenue d'une audience. Nous avons donc pris la peine de rédiger et d'envoyer nos déclarations de victimes. Puis, il a tout annulé. Il n'y tenait plus.
Par conséquent, trois fois en six ans, nous avons revécu ce que nous n'étions pas obligés de revivre.
Au nom de tous les membres du Comité de la sécurité publique et nationale, je remercie tous les témoins d'avoir participé à notre étude de cet important projet de loi en matière de sécurité publique. Merci d'avoir comparu. Chers collègues, je vous remercie aussi pour vos marques de courtoisie ici aujourd'hui.
La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication