:
Merci, monsieur le président.
Je commence par préciser que ce que j'ai à dire n'est pas tiré d'un discours écrit, monsieur le président.
Je trouve que c'est particulièrement spécial d'être ici, dans cette salle, où j'étais avec mes collègues, le 22 octobre. Nous y avons passé des heures. Vous y étiez aussi, monsieur le président. Nous nous souviendrons de ces heures pendant longtemps, tout comme nos collègues de l'opposition, qui étaient juste de l'autre côté de la salle. Nous avons tous d'une certaine manière été touchés, contre notre volonté, par l'attaque terroriste qui a eu lieu.
Quelques semaines avant l'attaque, j'étais ici avec M. Coulombe, M. Guimont ainsi que notre commissaire de la GRC pour déclarer que nous — c'était le cas à ce moment-là, et ce l'est toujours — prenions la menace terroriste très au sérieux et que la menace est réelle.
Malheureusement, nous avons été exposés à la haine de ces personnes qui ont commis les deux attaques terroristes à la mi-octobre. Ces événements rendent la séance d'aujourd'hui encore plus importante.
Sur ce, j'aimerais commencer par vous parler du projet de loi , pour lequel je souhaite obtenir votre appui.
[Français]
J'aborderai surtout les dispositions qui modifient la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, qui n'a pas été modifiée en profondeur depuis les 30 dernières années.
Je tiens à souligner que Mme Girard traitera de la Loi renforçant la loi sur la citoyenneté canadienne, qui a reçu la sanction royale plus tôt cette année. Le volet sur la citoyenneté canadienne ne constitue pas un nouvel élément législatif; il ne fait que favoriser une mise en oeuvre plus rapide.
Je suis ici aujourd'hui à titre de parce que le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, fait partie des agences dont mon ministère est responsable. Ce service doit disposer d'outils efficaces pour lutter contre la menace terroriste.
Le SCRS recueille et analyse des renseignements provenant de partout au pays et de l'étranger et informe le gouvernement du Canada des menaces à la sécurité nationale, notamment le terrorisme et l'extrémisme violent.
[Traduction]
Manifestement, la menace directe et persistante que posent le terrorisme et l'extrémisme violent pour notre sécurité ne devrait faire aucun doute. On ne saurait affirmer que les événements qui ont lieu au Parlement et à Saint-Jean-sur-Richelieu ne sont pas des attaques terroristes. C'est pourquoi, chers collègues, nous devons rapidement adopter ce projet de loi. La capacité du SCRS d'enquêter sur les menaces à la sécurité du Canada, où qu'elles soient, est essentielle à la sûreté et à la sécurité des Canadiens et même à notre capacité de réagir à la menace terroriste.
Notre gouvernement assure la sécurité des Canadiens. Voilà l'objectif du projet de loi. Abordons directement la raison d'être du projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui — qui est, par conséquent, si crucial, compte tenu de son importance pour ce qui est d'assurer la sécurité des Canadiens —, afin que nous puissions l'utiliser comme un bouclier. La Loi sur la protection du Canada contre les terroristes fait suite à deux arrêts de base clés qui ont des répercussions importantes sur le mandat et le fonctionnement du SCRS. Ceux d'entre vous qui avez saisi l'occasion de recevoir le compte rendu technique fourni par mon ministère l'ont bien compris. J'ai pu voir que c'était le cas lorsque nous avons eu des échanges à la Chambre au sujet du projet de loi.
En mai 2014, la Cour suprême du Canada a rendu sa décision dans l'affaire Harkat. Dans cet arrêt, la Cour suprême a déclaré que les sources humaines du SCRS ne bénéficiaient pas d'un privilège générique en common law semblable au privilège relatif aux indicateurs applicable aux indicateurs de police. Les sources humaines sont une source d'information essentielle pour le SCRS. Elles sont la base même du SCRS; pourtant, monsieur le président, la cour est d'avis qu'elles ne bénéficient pas d'une protection. Ainsi, cela nuit grandement à notre capacité de collecte de renseignements et, par conséquent, met les Canadiens à risque. Ce projet de loi ne vise pas, pour le moment, la création de nouveaux pouvoirs. Il ne vise qu'à clarifier les pouvoirs actuels qui permettent au SCRS de nous protéger de façon efficace. C'est pourquoi la Loi sur la protection du Canada contre les terroristes comble cette lacune.
[Français]
Ces modifications entraînent une protection automatique de l'identité des sources humaines du SCRS.
[Traduction]
Ce projet de loi est équilibré. Il est raisonnable, et c'est pourquoi je demande votre appui. C'est pourquoi vous vous êtes montrés favorables à la Chambre jusqu'ici. Pourquoi? Parce qu'il respecte pleinement l'esprit de notre Constitution.
[Français]
Les parties pourront obtenir une ordonnance d'un juge afin de déclarer que la personne en question n'est pas une source humaine ou que les renseignements en question ne révéleront pas l'identité de ladite personne.
[Traduction]
Dans les procédures pénales, les défendeurs auront la capacité de demander une ordonnance d'un juge déclarant que la divulgation de l'identité d'une source humaine est essentielle à l'établissement de leur innocence. Le droit fondamental à un procès équitable est préservé et renforcé.
Passons à la deuxième décision de la cour ayant une incidence sur le mandat du SCRS; la Cour d'appel fédérale a récemment descellé sa décision de juillet 2014 concernant l'appel interjeté par le gouvernement contre la décision rendue par le jugement Mosley, qui avait été publiée par la Cour fédérale l'an dernier. La Loi sur la protection du Canada contre les terroristes confirme le pouvoir du SCRS de mener des enquêtes à l'extérieur du Canada relativement aux menaces pour la sécurité du Canada et d'effectuer des évaluations de sécurité. Ce n'est pas grand-chose. Le SCRS peut fonctionner à l'intérieur et à l'extérieur du Canada. C'est plutôt simple.
[Français]
Le SCRS a toujours eu le pouvoir d'entreprendre des activités d'enquête à l'étranger. La Cour d'appel fédérale a reconnu ce fait lorsqu'elle a conclu que l'article 12 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité ne suggère en rien des limites géographiques à la sphère des activités du SCRS.
Toutefois, le pouvoir du SCRS de mener des activités à l'étranger afin de faire enquête sur des menaces à la sécurité du Canada n'est pas indiqué aussi clairement qu'il devrait l'être dans la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Il est donc important que le Parlement et que les élus du peuple clarifient cette question.
[Traduction]
En même temps, le projet de loi confirme également le pouvoir de la Cour fédérale de délivrer des mandats autorisant le SCRS à entreprendre certaines activités à l'extérieur du Canada, et il lui donne aussi le pouvoir de ne tenir compte que des lois canadiennes pertinentes au moment de délivrer ces mandats.
Ces modifications sont importantes. Nous croyons que la Constitution canadienne, plus particulièrement la Charte des droits et libertés, est de loin supérieure aux décrets d'un dictateur dans un pays lointain. Le droit canadien et, chose encore plus importante, les valeurs canadiennes sont ce qui devrait ancrer solidement nos délibérations juridiques concernant la sécurité nationale, et c'est exactement ce qu'accomplit le projet de loi.
[Français]
Monsieur le président, les modifications proposées dans le projet de loi sont raisonnables et nécessaires pour garantir que le Service canadien du renseignement de sécurité peut s'acquitter adéquatement de son mandat. Elles sont également conformes à l'esprit de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité et aux recommandations de la Commission McDonald de 1981.
[Traduction]
Malheureusement, durant le débat sur ce projet de loi, à la deuxième lecture, j'ai entendu certaines allégations selon lesquelles le SCRS fonctionnerait en marge du droit. C'est ce que le projet de loi empêcherait de se produire parce qu'il établirait clairement que le SCRS fonctionne dans le respect du droit. Laissez-moi le dire clairement. Le SCRS continuera d'être tenu, comme il l'a toujours été, d'obtenir une autorisation judiciaire afin d'entreprendre certaines activités intrusives.
Je crois que cela établit clairement les aspects techniques du projet de loi, et personne ne peut contester son motif.
[Français]
Encore aujourd'hui, monsieur le président, on a appris que le groupe armé État islamique enrôlait des enfants de huit ans, comme si toutes les images et les atrocités auxquelles nous avons été exposés n'étaient pas suffisantes. On pense à une vidéo qui a été diffusée et qui montre plus d'une douzaine d'hommes se faire décapiter.
On y trouvait notamment le travailleur humanitaire Peter Kassig. Ses parents ont écrit sur Twitter qu'ils avaient le coeur brisé d'apprendre que leur fils avait perdu la vie en raison de son amour pour le peuple syrien et de son désir d'apaiser les souffrances de ce dernier. Notre gouvernement condamne résolument les actes de violence commis par le groupe armé État islamique dans les termes les plus fermes qui soient. C'est la raison pour laquelle nous apportons une aide humanitaire au peuple perturbé par ces barbares et que nous appuyons les efforts de la coalition visant à neutraliser et à diminuer leurs capacités à mener des opération d'envergure.
En plus de ces rapports consternants en provenance d'Irak et de Syrie, des attaques terroristes récemment survenues ici nous rappellent que cette organisation constitue aussi une menace à l'intérieur de notre pays. C'est également la raison pour laquelle nous travaillons avec détermination à améliorer les outils dont disposent les forces policières et le milieu du renseignement. La Loi sur la protection du Canada contre les terroristes n'est qu'une première étape en vue d'atteindre cet objectif. Notre gouvernement conservateur a pris des mesures énergiques pour protéger notre sécurité nationale.
Comme vous le savez, monsieur le président, nous avons adopté la loi pour combattre le terrorisme il y a déjà de cela plus d'un an. Cette loi donne aux autorités des outils qui leur permettent de révoquer la citoyenneté des personnes qui prennent part à ces activités. Comme je l'ai mentionné, la composante du projet de loi qui est devant vous aujourd'hui consiste essentiellement à accélérer les mesures qui ont déjà été adoptées et qui ont reçu la sanction royale.
Nous avons augmenté du tiers le financement accordé à la Gendarmerie royale du Canada et au SCRS. Nous avons mis en place de nouvelles mesures. Malheureusement, pour la révocation des passeports et l'enlèvement de la double citoyenneté des individus reconnus coupables d'actes de terrorisme, nous n'avons pu compter sur l'appui de l'opposition, tant des néo-démocrates que des libéraux. Cependant, j'ai remarqué pendant les débats une certaine réceptivité à l'égard du projet de loi qui est présenté aujourd'hui.
[Traduction]
Je me rends compte que personne ne s'est officiellement opposé au projet de loi durant le débat, à la deuxième lecture, et j'ai hâte de répondre à vos questions aujourd'hui. Enfin, et je dirais que c'est un fait beaucoup plus important, j'ai hâte que ce projet de loi soit renvoyé à la Chambre après une étude approfondie afin que nous puissions aller de l'avant et l'adopter, de sorte que nous, en tant que parlementaires, représentants élus, puissions mieux faire notre part pour assurer la sécurité de notre pays. Merci.
:
Je remercie la secrétaire parlementaire James de sa question, monsieur le président.
La définition d'un acte terroriste est largement acceptée partout dans le monde, et elle comporte trois éléments. Le premier, c'est qu'une personne ou un groupe attaque un symbole d'une nation. En l'occurrence, il s'agit de l'uniforme militaire et de notre Monument commémoratif de guerre du Canada, qui reflète une de nos valeurs fondamentales. En outre, l'attaque commise est fondée sur une idéologie. Or, nous avons clairement pu constater que ces deux personnes avaient épousé des points de vue extrémistes, fondamentalistes et radicaux concernant l'islam. Elles contrevenaient au Code criminel en commettant des actes de violence contre des personnes innocentes.
Il est clair ce qui a eu lieu au Canada le 20 octobre, à Saint-Jean-sur-Richelieu
[Français]
et qui visait l'adjudant Patrice Vincent, et à Ottawa, Nathan Cirillo, sont deux actes terroristes.
C'est ce qu'a reconnu le président Hollande quand il est venu au Parlement. Le secrétaire d'État américain, John Kerry, l'a aussi reconnu, tout comme le commissaire de la GRC. Selon le Code criminel, c'était du terrorisme.
Il est important d'agir de façon mesurée face à la menace terroriste et de ne pas réagir de manière excessive, mais il ne faut pas rester les bras croisés devant l'évolution constante de la menace terroriste.
Madame James, je crois que vous savez que le projet de loi en question devait être déposé le 22 octobre, le jour même où nous avons subi cette attaque. Peu de temps après l'attaque, nous ne savions pas que nous allions être confinés ici toute la journée. Nous vivions des moments d'incertitude, mais j'avais encore espoir de pouvoir le déposer cette journée-là.
Des consultations ont eu lieu avant le dépôt de ce projet de loi qui, comme je l'ai expliqué, fait suite à une invitation des tribunaux de clarifier les dispositions législatives afin que le SCRS puisse exercer adéquatement son mandat.
Si j'insiste tant sur l'importance d'adopter ce projet de loi, c'est parce qu'en ce moment, la capacité du SCRS à exercer pleinement sa fonction est limitée par les décisions des tribunaux. Comme parlementaires, nous sommes invités à faire cheminer ce projet de loi jusqu'à la sanction royale en vue de redonner au SCRS des pouvoirs déjà existants, à un moment critique où nous faisons face à une menace terroriste réelle.
Pour répondre à votre question, je vous dirais que ce projet de loi était en préparation bien avant les deux attaques terroristes qui sont survenues à la mi-octobre au Canada, mais que ces attaques rendent son adoption d'autant plus importante et urgente.
:
Je vous remercie pour votre question.
Le SCRS mène ses opérations sous le régime du droit canadien. C'est pourquoi nous avons élaboré un projet de loi qui, au moment où il s'applique, est conforme au droit. Bien sûr, je peux participer à ces autorisations, mais, plus important encore, les juges donnent leur aval lorsque les mesures que nous proposerons doivent être validées par l'appareil judiciaire. De plus, un mécanisme de surveillance est en place pour l'ensemble du service, et cette surveillance est effectuée par le Comité de surveillance des activités de renseignement. J'ai ici une copie de ce rapport, dans les deux langues officielles. Nous surveillons étroitement une organisation qui doit respecter le droit canadien. Or c'est exactement ce que ferait ce projet de loi. Au cours du dernier mois, la cour nous a donné l'occasion d'établir clairement que le SCRS a le mandat de mener ses activités au Canada et à l'extérieur du Canada. C'est la première partie importante du projet de loi. La deuxième partie du projet de loi, qui est vraiment importante, est la protection des sources. Voici la définition de « source » qui apparaît dans ce projet de loi:
« source humaine » Personne physique qui a reçu une promesse d'anonymat et qui, par la suite, a fourni, fournit ou pourrait vraisemblablement fournir des informations au Service.
Lorsque le service conclut un marché — si je peux le dire ainsi — avec une source humaine, il y a cette promesse d'anonymat. Les sources mettent parfois leur vie en danger pour communiquer des informations. C'est pourquoi il est important que ce marché soit clairement défini par la loi, et, dans certaines circonstances, cette protection peut être invoquée dans le cadre d'un procès, ou devant un tribunal, si les renseignements fournis par une source sont utilisés contre une personne accusée.
Ce projet de loi a été conçu à la lumière de notre Constitution, de nos lois et du principe, comme je l'ai dit, selon lequel le droit fondamental à un procès équitable est non seulement préservé, mais renforcé. C'est pourquoi je vous demande d'approuver ce projet de loi qui nous permettra d'accomplir des choses importantes au chapitre de la protection des sources humaines sous le régime de notre Constitution, de la confirmation du pouvoir du SCRS de mener ses activités à l'étranger et, comme nous l'avons indiqué, de l'accélération du processus de retrait de la double citoyenneté, et ce, sans ajouter d'autres dispositions au projet de loi déjà adopté.
:
Oui, mais, monsieur le ministre, vous avez affirmé que ces personnes ont violé la loi canadienne.
La deuxième question à ce sujet est la suivante: si le seuil est trop exigeant et qu'il est donc impossible d'accuser les individus soupçonnés, y a-t-il une disposition dans le projet de loi qui règle ce problème, ou cela se fera-t-il dans le cadre d'une nouvelle loi? Vous pouvez répondre à cette question ainsi qu'à mon autre question.
Si vous lisez le projet de loi, il précise « au Canada ou à l'extérieur du Canada » pour les fonctions du SCRS liées à la collecte de renseignements dans le nouveau paragraphe 12(1) proposé et à ses fonctions d'enquête dans le nouveau paragraphe 15(1) proposé. Ce projet de loi prévoit l'ajout d'un élément extraterritorial aux freins et contrepoids prévus à l'article 16, qui concerne les renseignements étrangers et l'obligation de consulter le ministre des Affaires étrangères.
Selon ce libellé compliqué, au sujet des affaires étrangères, si le Canada demande à certaines personnes de faire quelque chose, il faut demander l'approbation du ministre des Affaires étrangères, puisque tout ce que nous faisons dans un pays étranger peut avoir un impact sur d'autres dimensions de notre relation avec ce pays.
Selon ce que je constate, en vertu de ce projet de loi, il n'y a pas de freins ni de contrepoids lorsque le SCRS prévoit prendre une mesure qui viole les lois d'un autre pays, mais il est en droit de le faire parce que les mandats ont été délivrés au Canada. Des freins et contrepoids ne semblent pas nécessaires à la protection de nos intérêts en matière d'affaires étrangères, à l'égard du commerce ou d'autre chose.
Est-ce que vous — ou quelqu'un d'autre — pourriez clarifier cet aspect? Où sont les freins et contrepoids visant à protéger les intérêts du Canada lorsque nous prenons des mesures en vertu de cet article?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais souligner encore une fois, monsieur le ministre, que, quand vous avez parlé de ce projet de loi, au début, nous espérions qu'il puisse être adopté et que tous les partis l'appuient. L'attitude du gouvernement m'en fait maintenant douter beaucoup.
Nous avons tout autant que vous intérêt à nous assurer que les agences de sécurité du Canada maintiennent leur niveau de qualité et la réputation de leurs services, et nous croyons que la responsabilisation est un aspect assez important à cet égard. Or, il n'y a rien à ce sujet dans le projet de loi.
Vous avez expliqué qu'il était difficile de transformer le renseignement en élément de preuve. Je crois que c'est ainsi que vous l'avez formulé. Nous nous préoccupons nous aussi de la possibilité d'utiliser le renseignement et de s'assurer de pouvoir l'utiliser dans le cadre de poursuites. Je me demande si le projet de loi, de la façon dont il est formulé, ne rendra pas encore plus difficile l'utilisation du renseignement dans le cadre des poursuites. Vous avez parlé de la protection de l'identité des témoins; les tribunaux peuvent protéger l'identité des sources du SCRS, ils le font au cas par cas aujourd'hui. Personne n'a dit que ce n'était pas possible.
Quand vous dites qu'ils vous ont invités à faire cela, je crois que, si vous lisez les décisions, on y dit que le Parlement pouvait faire cela. Ils n'ont pas dit que c'était nécessaire et ils n'ont pas dit non plus que le Parlement devrait fournir cette protection de manière générale; ils ont dit que c'était possible.
Pourquoi prendre le risque d'apporter un changement qui limitera le droit du défendeur de remettre en question l'utilisation du renseignement dans le cadre de poursuites? Pourquoi prendre le risque d'apporter un changement qui pourrait, soit compliquer les poursuites, soit faire en sorte qu'on déclare cette disposition inconstitutionnelle?
:
Je vous remercie de vos nombreuses questions.
Je répondrais pour commencer que certaines de ces questions dépassent le cadre de la loi, et j'ai clairement dit que le projet de loi avait été rédigé de manière à bien répondre aux recommandations des tribunaux.
Tous les pays occidentaux font face au problème du terrorisme. J'ai ici un communiqué de presse de mon homologue du Royaume-Uni, Theresa May, qui va proposer plus de huit mesures de lutte contre le terrorisme et qui affirme qu'il faut du temps pour les nouvelles politiques, et savez-vous pourquoi? Parce que nous devons nous adapter à cette menace, c'est clair.
J'ai clairement démontré, cet après-midi, que c'est ce que nous faisons, tout en respectant la Constitution, puisque l'amicus curiae permet d'assurer la protection des témoins en cas d'accusations.
On a posé une question sur la supervision. Il est clair que cette question dépasse la portée du présent projet de loi, mais nous disposons d'un mécanisme clair, qui fonctionne, et qui permet de s'assurer que, pendant que le SCRS protège les Canadiens, une surveillance robuste est exercée.
J'aimerais ajouter, monsieur le président, qu'il est clair à mes yeux que la liberté ne peut pas exister sans sécurité.
:
Merci beaucoup de poser cette question.
J'aimerais pour commencer souligner que, comme on l'a déjà dit, les dispositions du projet de loi sont des modifications techniques qui ne modifient aucunement les dispositions de la , qui a reçu la sanction royale en juin de cette année. Ces dispositions permettraient au gouvernement de mettre en oeuvre plus rapidement les modifications des dispositions de la Loi sur la citoyenneté qui concernent la révocation.
Quoi qu'il en soit, pour en revenir à votre question, je crois que la première et la plus importante chose à souligner, c'est que le Canada est le seul, parmi des pays semblables, des pays démocratiques, à ne pas avoir déjà la capacité de révoquer la citoyenneté des gens qui commettent des actes extrêmes contre des intérêts nationaux, ce qui fait que les modifications récentes que le Parlement a apportées, en juin, pour ajouter des motifs de révocation de la citoyenneté, qui avaient trait à des actes précis — en l'occurrence, les personnes trouvées coupables de terrorisme, de haute trahison, de trahison ou d'espionnage ou les personnes qui sont membres d'une force armée ou d'une organisation armée engagée dans un conflit armé contre le Canada — sont tout à fait en phase avec ce que font déjà des pays qui nous ressemblent.
J'aimerais aussi ajouter, au sujet du caractère équitable, que la loi prévoit de nombreuses mesures de protection qui s'appliquent également au processus de révocation proprement dit. Il s'agit entre autres des mesures suivantes: un avis, la capacité de la personne visée de connaître les motifs invoqués; la possibilité de connaître la preuve; la possibilité de présenter des observations; la transmission par écrit de la décision; la possibilité de tenir une audience avec le décideur; et, bien sûr, la possibilité de demander un contrôle judiciaire si la décision finale n'est pas en leur faveur et que leur citoyenneté est révoquée.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Le ministre a déclaré que nous exercions une robuste surveillance des agences de sécurité. J'aimerais souligner, pour le compte rendu, monsieur le président, que je suis fermement en désaccord. En réalité, nous sommes le seul pays, parmi les pays de ce qu'on appelle le Groupe des cinq, dont le Parlement ne surveille pas les agences de sécurité. Je crois que le gouvernement, s'il voulait rétablir l'équilibre, mettrait sur pied un organe qui en serait chargé. Dans un rapport de 2005, toutes les parties concernées s'entendaient sur la nécessité de créer un tel organe. Je tenais à le souligner. Comme Mme Girard le disait au sujet de la révocation de la citoyenneté, le Canada est le seul pays, parmi les pays démocratiques, à agir comme il le fait. Nous sommes aussi le seul pays, parmi les pays du Groupe des cinq, à ne pas exercer de surveillance parlementaire.
Je croirais que le coeur du problème, quand on parle de ce projet de loi, est lié aux changements importants relatifs aux activités extraterritoriales, si je peux parler ainsi, du SCRS. Le directeur adjoint ou le directeur du SCRS pourront me corriger si je me trompe, mais je crois qu'au départ, quand le SCRS a vu le jour, on prévoyait renforcer nos relations internationales ou nos liens avec d'autres pays afin que ces derniers nous fournissent de l'information, et que nous allions fonctionner ainsi, plutôt que d'envoyer des agents à l'étranger. Aujourd'hui, la réalité du monde a changé. Nous avons en quelque sorte affaire à un monde sans État.
Ce projet de loi, en ce qui concerne le SCRS, ne donne-t-il pas de vastes possibilités d'application à l'étranger des décisions prises par l'appareil judiciaire canadien relativement à nos activités à l'étranger?
Comprenez-vous ce que je demande?
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur Coulombe, en ce qui concerne les mandats, on nous a comparés, dans certaines discussions, à nos partenaires du Groupe des cinq en disant que cet énoncé explicite ne figurait certainement pas dans les textes de loi des autres pays. Je voulais qu'on me confirme qu'il a été possible d'émettre des mandats, depuis l'entrée en vigueur en 1984 de la Loi sur le SCRS, et que les pays qui ont des vues similaires aux nôtres ont eux aussi la même capacité, sans avoir nécessairement intégré cet énoncé dans leurs textes de loi.
Le problème que nous avons ici, au Canada, et les gens le reconnaissent, c'est que nous avons en outre un système judiciaire différent et que les intervenants du système judiciaire interprètent les lois de manières différentes. Nous avons également la Charte des droits et libertés, qui n'existe peut-être pas dans les autres pays sous la même forme.
Le problème que nous avons, ici, c'est que les tribunaux ont notamment remis en question la capacité du SCRS à mener des activités à l'étranger, au moment d'émettre ce type de mandats. La loi, les mots mêmes que nous inscrivons dans ce nouveau projet de loi, vont clarifier, vont énoncer clairement les capacités que le SCRS a toujours eues de façon à assurer que les tribunaux ne pourront plus les remettre en question. Est-ce bien cela?
J'aimerais, s'il vous plaît, que vous commentiez cette question.
:
Je ne veux pas vous dire mon âge, mais en 1984, je travaillais pour la GRC.
La menace a évolué de toutes sortes de façons. Vous venez de parler de la technologie. Internet a changé... Il n'est pas nécessaire de remonter jusqu'à 1984; c'était il y a 10 ans, alors l'évolution de la technologie, comme nous le savons tous, se fait à un rythme extrêmement rapide. Voilà une chose.
La nature de la menace a également évolué. En 1984, en réalité, la priorité, c'était l'espionnage et la guerre froide. Aujourd'hui, c'est le terrorisme. Les gens sont en outre beaucoup plus mobiles qu'autrefois, et ils peuvent voyager beaucoup plus facilement, et ce phénomène a changé non seulement la nature de la menace, mais la rapidité avec laquelle elle se propage. La communication a modifié la menace, et je reviens encore une fois à Internet, à la facilité avec laquelle on peut communiquer, à partir du Canada, avec des gens qui se trouvent au Yémen ou au Sahel, ou ailleurs dans le monde, le lieu importe peu.
Les facteurs sont nombreux, et il ne s'agit pas uniquement de la menace, en soi, qui visait l'infrastructure essentielle et vise maintenant davantage les activités terroristes. Mais tout ce qu'il y a autour, qu'on parle de technologie ou de mobilité des personnes, comme je l'ai dit, a changé du tout au tout l'environnement dans lequel nous travaillons aujourd'hui.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci encore une fois aux témoins, merci de vous être présentés.
Je vais dire pour commencer que nous vivons dans un monde nouveau, et je ne veux pas qu'une organisation comme le SCRS ou toute autre organisation qui traite le reste du monde comme... Je ne veux pas appartenir à un pays qui est naïf ou qui est indûment optimiste et qui s'attend à ce que le monde entier agisse selon le principe selon lequel chacun respecte tout ce que nous faisons, et ne ferait rien qui pourrait... Nous savons que les autres pays recrutent des terroristes, des Canadiens naturalisés, des gens qui sont nés ici, ou encore des gens qui possèdent la double nationalité, qui sont maintenant installés dans notre pays et qui veulent causer un tort irréparable non seulement aux Canadiens, mais au fondement même de notre pays. L'immeuble dans lequel nous nous trouvons est justement le lieu où notre démocratie est mise en pratique.
Cela fait cinq ou six fois au moins que les questions, qu'on a formulées de toutes sortes de manières, se résument à ce que M. Guimont a dit. Il ne s'agit pas d'une nouvelle responsabilité extraordinaire, horrible ou énorme, pour le SCRS. Il s'agit d'une simple clarification des règles existantes, qu'un tribunal nous a demandé de clarifier.
Monsieur Guimont, si je simplifie cela le plus possible, pour mes électeurs, qui ne veulent pas appartenir à un pays qui fait preuve de naïveté et qui croit que, si nous sommes gentils avec les autres, ils seront gentils avec nous, vous pouvez me le dire. Ce projet de loi vise à donner au SCRS le même type de reconnaissance judiciaire ou de protection pour les ressources humaines, autrement dit les indicateurs, qui veulent pouvoir transmettre des informations sans que leur identité soit divulguée. Le projet de loi leur assure le même type de protection que celle que les policiers peuvent déjà donner à leurs indicateurs. Est-ce exact?
C'est aussi simple que ça.
J'aimerais faire une autre observation en disant que vous pouvez bien essayer de trouver des raisons de ne pas appuyer le projet de loi, des petites choses avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord, mais, au bout du compte — comme je l'ai dit, je crois que vous êtes resté simple — il s'agit tout simplement d'apporter des précisions en fonction des observations des juges. Nous essayons tout simplement de clarifier les choses.
Merci.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Girard. Vous avez dit, en répondant à une des questions, que dans les textes de loi qui renvoient à un autre texte de loi au sujet de la révocation de la citoyenneté, c'est conforme à ce qui se fait dans les pays aux vues similaires aux nôtres qui ont adopté le même type de loi. Ces lois disent que, ma foi, la citoyenneté canadienne est l'un des privilèges les plus extraordinaires que notre pays peut offrir. La citoyenneté est probablement la chose la plus importante, la plus précieuse, que l'on puisse recevoir. Si vous faites quelque chose qui met cela en péril, quelque chose qui est considéré comme une trahison, un des crimes les plus graves, qui, jusqu'à tout récemment, était passible de la peine de mort, si vous voulez faire quelque chose qui foule aux pieds le privilège d'être un Canadien, l'État devrait peut-être la révoquer.
Connaissez-vous d'autres pays qui disposent des droits et libertés que nous avons, qui partagent les mêmes valeurs? Vous pourriez peut-être nommer deux ou trois de ces pays, de façon que mes électeurs sachent qu'ils peuvent visiter d'autres pays où ce genre d'opinion est partagé.