SECU Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la sécurité publique et nationale
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 26 novembre 2014
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je souhaite la bienvenue aux témoins et à mes collègues à la 41e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
Il y aura aujourd'hui, bien sûr, deux heures de témoignages, de déclarations et de questions. Au cours de la première heure, nous recevrons trois témoins. Au cours de la deuxième heure, nous entendrons trois témoins également, dont deux qui comparaîtront par vidéoconférence.
J'aimerais attirer l'attention du comité sur le fait que, bien que nous ayons assurément toujours des déclarations préliminaires pouvant durer jusqu'à 10 minutes et que, généralement, nous imposons cette limite de façon à avoir le temps de poser des questions, un de mes témoins m'a signalé que sa déclaration préliminaire serait beaucoup plus longue. Il a accepté de l'abréger, mais il aimerait que le texte complet de la déclaration figure au compte rendu, de façon que les membres du comité puissent le consulter et l'évaluer. Vous n'entendrez pas sa déclaration complète. Vous entendrez sa version abrégée, et par la suite vous pourrez évidemment l'interroger sur n'importe quel sujet. Le comité pourra consulter le texte complet de sa déclaration.
[Voir l'annexe.]
Monsieur Scott.
Monsieur le président, le texte complet, dont son exposé n'est qu'un extrait, sera traduit avant d'être versé au compte rendu.
Oui, tout à fait. La seule autre solution aurait été de lui permettre de prolonger sa déclaration, mais, bien sûr, cela voudrait dire que le comité aurait moins de temps pour discuter avec les témoins. Le président a pensé que ce serait la meilleure approche à adopter, et je vous remercie de votre coopération.
Alors, nous recevons Craig Forcese, professeur agrégé, Faculté de droit, Université d'Ottawa. Nous accueillons également Wesley Wark, professeur, École supérieure d'affaires publiques et internationales, Université d'Ottawa; et Tom Stamatakis, président, Association canadienne des policiers.
Messieurs, nous commençons tout de suite les déclarations préliminaires de la première heure.
Nous commencerons par M. Forcese, s'il vous plaît.
Merci beaucoup, et merci au comité de m'avoir demandé de présenter un exposé ici aujourd'hui.
Je vais parler exclusivement des aspects du projet de loi soumis au comité qui concernent la surveillance à l'étranger. Plus tard, aujourd'hui, M. Kent Roach vous parlera, dans son témoignage, de l'aspect qui touche l'immunité des indicateurs.
Voici mes opinions en bref. Je suis en faveur des modifications proposées des articles 12 et 21 de la Loi sur le SCRS. Cela dit, je crois que le projet de loi omet trois choses et que le comité devrait corriger le tir. Je crois que ces correctifs sont nécessaires si on veut prévenir encore cinq ans de litiges, de controverses et d'incertitudes.
L'article 8 du projet de loi porte sur la confusion fondamentale découlant de trois décisions de la Cour fédérale. Si vous adoptez ces modifications, vous demandez haut et fort à un tribunal d'approuver des activités de surveillance secrètes menées par le SCRS qui pourraient contrevenir au droit international ou à des lois étrangères. Dans notre système, le Parlement a l'autorité d'accorder expressément des pouvoirs qui violent le droit international, dans la mesure où ces pouvoirs ne violent pas également, en même temps, la Constitution. Je ne vois pas de possibilité de contestation fondée sur la Constitution, dans la mesure où nous parlons uniquement des questions de surveillance, et pas, par exemple, des interrogatoires ou d'autres types d'enquête plus agressive.
Comme je l'ai indiqué, toutefois, le projet de loi comporte plusieurs omissions critiques, à mon avis.
Pour commencer, on ne sait pas clairement dans quels cas le service sera tenu d'obtenir un mandat pour effectuer des activités de surveillance à l'étranger. La loi existante prévoit qu'il faut qu'il y ait des motifs raisonnables de croire qu'un mandat est nécessaire. Dans le cadre d'activités de surveillance sur le territoire national, ces motifs peuvent être invoqués lorsque le défaut d'obtenir un mandat contreviendrait à l'article 8 de la Charte, qui porte sur les fouilles, perquisitions et saisies, ou à la Partie VI du Code criminel. Mais on ne peut pas dire avec certitude que ces deux lois — et surtout la Charte — s'appliquent aux activités de surveillance à l'étranger. En conséquence, le critère actuel des motifs raisonnables est inutilement ambigu quand il est question des nouveaux pouvoirs relatifs aux mandats prévus dans le projet de loi.
Je crois qu'en dernière analyse, un mandat sera requis chaque fois que des activités de surveillance menées à l'étranger supposent l'interception clandestine de télécommunications. Je crois également qu'on pourrait interpréter les modifications comme prévoyant qu'un mandat serait exigé chaque fois que des opérations risqueraient de contrevenir au droit international ou à des lois étrangères. Ces normes seraient sensées, mais, étant donné que le projet de loi n'est pas catégorique, l'établissement de ces normes pourrait nous coûter encore quelques années de litiges. C'est pourquoi je demande instamment au comité de nous éviter encore une demi-décennie d'incertitude en exposant en langage clair les cas exigeant l'obtention d'un mandat pour mener des activités de surveillance à l'étranger. J'ai proposé un libellé, dans une annexe à mon mémoire, que j'ai remis au greffier, et que vous pourrez obtenir une fois qu'il sera traduit.
Deuxièmement, depuis le dépôt du projet de loi, la Cour suprême a rendu son arrêt dans Wakeling. Cette affaire concernait la GRC, mais, en pratique, la décision s'applique également au SCRS. Dans une décision majoritaire, la cour a conclu que l'article 8 de la Charte s'applique au cas du partage de communications interceptées entre des autorités du Canada et leurs homologues de l'étranger. Pour être constitutionnelle, une loi raisonnable doit autoriser le partage des communications interceptées. Une loi raisonnable, c'est une loi qui prévoit suffisamment de mesures redditionnelles et de mécanismes de protection, selon les tribunaux. À l'heure actuelle, il n'existe aucune disposition claire sur le partage des communications internationales interceptées par le SCRS. Au mieux, il existe dans la Loi sur la protection des renseignements personnels une permission générique, plus ouverte, qui ne survivrait probablement pas à une contestation fondée sur la Constitution.
Je prie instamment le comité, encore une fois, d'éviter des années de litiges en codifiant une autorisation obligatoire expresse sur le partage des communications interceptées qui comprendraient les mesures de protection requises. J'ai proposé un libellé dans l'annexe qui concerne cette question.
Pour terminer nous soulignons le 10e anniversaire de la Commission Arar. Je remarque avec une grande inquiétude que le Parlement n'a intégré à ses lois aucune des recommandations essentielles de la commission qui portaient sur la collaboration entre les organes d'examen du SCRS, du CSTC et de la GRC. Or, la collaboration entre les services de sécurité est plus étroite et plus profonde, mais l'examen de chacun demeure résolument cloisonné; d'ailleurs, on nous a même signalé des cas où les services de sécurité remettaient en question, voire minaient la capacité des organes d'examen à coordonner leurs fonctions en matière d'examen.
Le projet de loi donne davantage les coudées franches au SCRS et resserrera inévitablement ses liens avec le CSTC et les organismes de l'étranger. Le projet de loi devrait également comprendre des dispositions qui donneraient aux organes d'examen plus de pouvoirs de surveillance.
Encore une fois, je propose dans mon annexe une façon de formuler la disposition qui dissiperait cette préoccupation.
Permettez-moi de terminer en présentant une demande. L'organe d'examen du SCRS, le CSARS, est victime des effets de la négligence. Il est en sous-effectif depuis un bon bout de temps. Il a été ébranlé par le scandale qui a frappé la direction, et ses ressources n'ont pas augmenté au même rythme que le budget opérationnel du SCRS. Pour toutes ces raisons, je demanderais à votre comité de faire avancer le dossier de la responsabilisation.
Permettez-moi de conclure ici.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup, monsieur Forcese.
Nous passons maintenant la parole à M. Wark.
Vous avez la parole, monsieur.
Mesdames et messieurs, c'est un privilège de comparaître devant vous. Je vous remercie de m'en donner l'occasion. Je suis un témoin bavard, alors je vais lire une version courte de ma déclaration.
Depuis les attaques du 11 septembre, le rôle du renseignement dans les politiques de sécurité nationale du Canada a connu une révolution. Les services de renseignement canadiens sont devenus plus importants et plus puissants, ils ont davantage de ressources, ils sont alignés plus étroitement sur leurs partenaires alliés, et leurs activités et leurs capacités ont une portée mondiale. Le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, un élément important de ce qu'on appelle le milieu canadien de la sécurité et du renseignement, a connu sa part de changements radicaux depuis 2011. Le SCRS est devenu, de fait, un service hybride, tenu de contrer un éventail toujours croissant de menaces à la sécurité nationale et de mener des activités tant au pays qu'à l'étranger.
Les enjeux soulevés à propos du projet de loi C-44 reflètent le fait que les fonctions du SCRS ont énormément changé depuis les attaques du 11 septembre, mais aussi, c'est clair, depuis l'entrée en vigueur de la première Loi sur le SCRS, et qu'elles ont changé sur le plan tant du type de menaces auquel le SCRS doit maintenant faire face que de la portée géopolitique de ses activités.
En ce qui concerne spécifiquement le projet de loi C-44, je vais m'attacher aux dispositions qui sont à mon avis les dispositions clés touchant les activités menées à l'étranger par le SCRS, y compris les activités ciblant des Canadiens. Le projet de loi C-44 ajouterait des clarifications dans le libellé de l'article 12 de la loi pour indiquer que, pour ses fonctions relatives au renseignement de sécurité, le service peut mener des activités au Canada et à l'extérieur du pays. Il ajoute en outre que les juges de la Cour fédérale peuvent décerner des mandats pour permettre au SCRS de recueillir des renseignements liés à des menaces qui concernent des Canadiens se trouvant à l'étranger, en vertu des pouvoirs que lui confère l'article 12. Le projet de loi C-44 précise également, dans la modification proposée de l'article 21 de la Loi sur le SCRS, que le service peut demander un mandat pour exercer les fonctions qui lui sont conférées en vertu de l'article 16, c'est-à-dire la collecte autorisée de renseignements de l'étranger à partir du Canada.
Pour comprendre les éléments clés du projet de loi C-44, nous devons les placer dans le contexte d'une série de décisions de la Cour fédérale qui ont trait aux demandes de mandat présentées par le SCRS pour des activités menées à l'extérieur du pays. L'histoire commence en 2005 et prend de nombreux détours jusqu'à aujourd'hui. Nous n'avons pas le temps, pendant la séance, d'offrir un résumé adéquat de cette histoire, mais permettez-moi de souligner que la situation actuelle est le résultat d'une décision que la Cour d'appel fédérale a rendue l'été dernier; le procureur général a interjeté appel devant la Cour suprême, et l'appel est toujours en instance.
Dans sa demande d'autorisation d'appel, déposée officiellement le 29 septembre 2014 et rendue publique en novembre, le procureur général résume l'enjeu en disant qu'il a trait à la possibilité pour le Service canadien du renseignement de sécurité de recourir légalement à l'aide des agences de sécurité étrangères pour surveiller les activités d'un petit nombre de Canadiens qui ont quitté le pays pour mener des activités représentant une menace pour la sécurité nationale.
Peu importe ce que les tribunaux décideront au bout du compte, à propos de la légitimité du recours par le SCRS à des agences de sécurité de l'étranger, il y a d'autres aspects liés aux principes et à la pratique qui sont en jeu. Le problème le plus important à ce titre concerne le contrôle souverain. C'est une chose que de demander l'aide de partenaires étrangers en matière de sécurité, par exemple les pays du Groupe des cinq, aux fins de l'échange d'information. C'en est une autre que de confier à un partenaire de l'étranger les activités de collecte de renseignements, peu importe à quel point ce partenaire nous est proche et est un allié sûr. Confier ses activités à des intérêts extérieurs, cela entraîne une perte potentielle de contrôle d'une opération, une perte de contrôle du renseignement canadien et une perte de contrôle sur les résultats. Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité a commenté la question en ces termes:
Le risque auquel le SCRS fait donc face est la capacité d'un partenaire de la communauté du Groupe des cinq d'agir indépendamment sur la base des informations provenant du Service. Cela pourrait conduire à la détention d'une cible, ou à un préjudice envers celle-ci, et ce, toujours sur la base d'informations provenant du service. Le CSARS a conclu que même si miser sur des partenaires
— c'est-à-dire les pays qui forment le Groupe des cinq —
dans le cadre de l'exécution de ce nouveau pouvoir octroyé au moyen de mandat
— les fameux mandats 30-08 du SCRS —
(et le recours à la communauté est essentiel pour que le processus soit efficace), des risques clairs se posaient également, notamment le manque de contrôle sur l'information une fois partagée.
Le projet de loi C-44 confirme que le SCRS est maintenant devenu une agence hybride qui mène des activités de collecte de renseignements de sécurité tant au Canada qu'à l'étranger. En clarifiant le fait que le SCRS peut légalement exercer ses deux fonctions, on risque de tuer dans l'oeuf toute discussion éventuelle sur le besoin de mettre sur pied un service distinct à l'égard du renseignement étranger, qui pourrait peut-être mieux répondre au besoin en renseignement du Canada, et qui constitue une solution beaucoup plus respectueuse des pratiques de nos proches partenaires du Groupe de cinq.
Mais ce que fait le projet de loi C-44 n'est pas aussi important que ce qu'il ne fait pas. Ce qu'il ne fait pas, c'est qu'il ne fournit aucune définition sous-jacente sensée du type d'organisme hybride que le SCRS est maintenant devenu, et il ne prévoit pas non plus de mesure supplémentaire de contrôle ou de responsabilisation, aucun cadre de collaboration ni mesure pour assurer la transparence des activités que le SCRS mène à l'étranger, lesquelles sont en croissance.
J'aimerais pour conclure parler de certains problèmes qui, je crois, découleront du projet de loi C-44.
Le projet de loi C-44 apporte des solutions bricolées relativement aux activités menées en vertu des articles 12 et 16 pour la seule raison que nous continuons, de façon tout à fait artificielle, à établir une distinction entre le renseignement de sécurité et le renseignement étranger. La direction du SCRS faisait autrefois la distinction entre le renseignement de sécurité et le renseignement étranger en disant que le renseignement de sécurité est quelque chose que le Canada doit avoir tandis que le renseignement étranger constitue un type de connaissance que le Canada aime avoir.
Depuis les événements du 11 septembre, j'avance que la distinction entre le renseignement étranger et le renseignement de sécurité ne signifie rien, pour le Canada, et que cette absence de signification met en relief le besoin de revoir de fond en comble la Loi sur le SCRS.
Étant donné que la décision de la Cour d'appel fédérale dans Mosley, qui concerne le recours par le SCRS à des mandats pour des activités menées à l'extérieur du territoire, a été portée en appel devant la Cour suprême, il est possible que les dispositions législatives du projet de loi C-44 soient frappées de nullité ou doivent être modifiées davantage, selon que la Cour suprême accepte d'entendre l'appel ou non et selon la nature de ses conclusions.
Le gouvernement a pris connaissance de la décision de la Cour d'appel fédérale bien avant que le projet de loi C-44 soit déposé. Le gouvernement fédéral a décidé d'emprunter les deux voies à la fourche, en modifiant partiellement la Loi sur le SCRS et en interjetant appel devant la Cour suprême, alors que ces deux voies pourraient très bien mener à une collision; la raison pour laquelle il a agi ainsi reste pour moi un mystère.
Le projet de loi C-44 ne prévoit pas de nouvelle disposition de la Loi sur le SCRS qui assurerait une consultation appropriée entre le service et son ministre — le ministre de la Sécurité publique — et les deux ministères les plus susceptibles d'être touchés par les activités plus étendues que le SCRS mènera à l'étranger, à savoir le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement et le ministère de la Défense nationale. Ces deux ministères recueillent déjà eux-mêmes des renseignements et des informations à l'étranger, par le truchement de directions générales consacrées à ces activités.
Le projet de loi C-44 ne prévoit aucune autre exigence obligatoire pour faire en sorte que le directeur du SCRS doive informer le ministre de toute activité de collecte de renseignements de nature délicate menée à l'étranger. Dans son dernier rapport annuel, le CSARS indiquait que le SCRS devait tenir le ministre mieux informé au sujet des activités menées à l'étranger et des enquêtes menées en vertu de l'article 16. Dans une étude spéciale sur ce qu'il nomme les « activités délicates du SCRS », le SCARS insistait aussi sur le fait que les rapports au ministre devaient être « officiels et systématiques ».
Certains signes permettent de croire que les relations entre le service et le ministre pourraient être meilleures et que la responsabilité du ministre à l'égard du SCRS pourrait être exercée de manière plus rigoureuse.
Le projet de loi C-44 ne rétablit pas les fonctions du bureau de l'inspecteur général, créées à l'origine sous le régime de la Loi sur le SCRS, en 1984, et éliminées par le gouvernement à l'aide d'un projet de loi omnibus de mise en oeuvre du budget en 2012. Le rôle de l'inspecteur général, qui devait être « les yeux et les oreilles du ministre », pourrait être considéré comme étant d'autant plus crucial à une époque où le SCRS étend ses activités à l'étranger. Mme Eva Plunkett, qui a longtemps été inspectrice générale du SCRS, a déclaré que l'abolition de cette fonction était une « lourde perte » au regard de la responsabilisation ministérielle.
Le projet de loi C-44 est muet en ce qui concerne un nouveau mandat ou de nouvelles ressources pour le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, ce qui serait compatible avec les dispositions obligatoires qui autorisent le SCRS à recueillir des renseignements à l'étranger en vertu de l'article 12.
Dernier point mais non le moindre, le projet de loi C-44 est muet sur la question de la nécessité de créer un comité parlementaire, dont les membres posséderaient toutes les autorisations de sécurité requises, et qui serait chargé de s'assurer que le Parlement a la capacité d'examiner de manière minutieuse et appropriée les activités du SCRS et des agences de renseignement canadiennes connexes à une époque où les activités se déroulent sur la scène mondiale et où les menaces à la sécurité nationale sont diverses. La création d'un tel comité parlementaire a récemment été proposée par Joyce Murray, dans son projet de loi d'initiative parlementaire C-622, et également par les sénateurs Hugh Segal et Roméo Dallaire, maintenant à la retraite, dans le projet de loi S-220 du Sénat. Wayne Easter, membre de votre comité, en a récemment proposé à la Chambre une version similaire, le projet de loi C-551. Le gouvernement continue à nier le fait qu'une nouvelle structure de ce type est nécessaire, malgré le fait qu'en 2005, tous les partis étaient en faveur de cette structure.
En conclusion, le projet de loi C-44 n'est à mon avis qu'une solution bricolée. Il se pourrait également qu'il s'agisse d'un projet de loi bien temporaire, puisqu'il dépend d'un arrêt que la Cour suprême va bientôt prononcer. C'est un projet de loi qui manque d'imagination et qui ne s'attaque pas aux principaux problèmes de longue date qui ont trait à la Loi sur le SCRS, qui est maintenant vieille de 30 ans et qui avait été créée dans un environnement où les menaces étaient différentes, dans un environnement technologique différent et dans un climat où la légitimité démocratique était différente.
Le projet de loi maintient une distinction artificielle entre le renseignement de sécurité et le renseignement étranger, ne clarifie pas de façon suffisante les pouvoirs du SCRS et ne prévoit aucune nouvelle mesure de transparence et de responsabilisation par rapport au rôle accru et aux nouveaux rôles que joue le SCRS.
Merci.
Merci, monsieur le président.
Bonjour à tous les membres du comité.
Je suis heureux d'avoir l'occasion de discuter avec vous tous aujourd'hui — en personne, pour une fois — au sujet de votre étude du projet de loi C-44. Je comparais aujourd'hui au nom de l'Association canadienne des policiers, organisme qui représente plus de 54 000 civils de première ligne et agents de police assermentés qui servent les collectivités du Canada, du nord au sud et d'est en ouest.
Ma déclaration préliminaire sera assez brève, cet après-midi, car j'espère avoir suffisamment de temps pour répondre à vos questions éventuelles. Je vais m'attacher en particulier à la question de la protection des sources humaines de renseignements par les membres des forces de l'ordre dans l'exercice de leurs fonctions. Cela dit, c'est la première fois que j'ai l'occasion de comparaître ici, à Ottawa, depuis les tragiques événements qui ont eu lieu le 22 octobre, dans lesquels le caporal Nathan Cirillo a perdu la vie, à quelques rues seulement de l'endroit où nous sommes réunis aujourd'hui. Il a été abattu par un terroriste qui aurait fait davantage de victimes encore, n'eût été des actes de courage de ceux qui ont fait le serment de protéger les Canadiens. J'aimerais remercier personnellement les membres du Service de police d'Ottawa, de la Gendarmerie royale du Canada et du Service de sécurité de la Chambre des communes pour tout ce qu'ils ont fait ce jour-là.
Si j'en parle, dans le contexte particulier de ma comparution, aujourd'hui, c'est pour mettre en relief la nécessité d'adapter les lois du pays de façon à fournir aux forces de l'ordre les outils dont elles ont besoin pour combattre ces menaces qui évoluent rapidement et qui, c'est très clair, peuvent constituer un véritable danger ici même, au pays. C'est pour cette raison que je suis heureux de pouvoir appuyer le projet de loi C-44 ici, aujourd'hui.
Un des aspects les plus importants du travail confié à nos services de sécurité nationaux, ce qui comprend certainement les services de police municipaux et provinciaux, consiste à recueillir les renseignements nécessaires pour aider leurs membres à empêcher que nos collectivités soient attaquées. Il devient toutefois de plus en plus difficile de recueillir ces renseignements. La technologie a procuré aux criminels et aux terroristes des outils qui évoluent rapidement et qui, souvent, semblent leur donner plusieurs longueurs d'avance sur les gens dont le travail consiste à protéger les Canadiens. Qu'il s'agisse d'assurer la sécurité nationale ou de lutter contre le crime de rue, les services de police doivent trouver des indicateurs et les protéger, car ils constituent souvent un outil précieux qui leur permet de jouer à armes égales et d'obtenir les renseignements recherchés; je crois sincèrement que le projet de loi C-44 et les dispositions qu'il renferme sont un pas dans la bonne direction parce qu'ils permettent de protéger les sources et, par le fait même, les Canadiens.
Je devrais également souligner, en ce qui a trait aux indicateurs en particulier, que leurs services s'étendent souvent au-delà d'une première affaire; ce fait confirme leur importance continue et justifie qu'on prenne tous ces moyens pour protéger leur identité. Si leur anonymat est brisé, leur sécurité personnelle est menacée, mais en plus, des mois et parfois des années d'enquête et de travail des policiers peuvent être compromis.
En outre, les indicateurs seraient souvent réticents à fournir des renseignements précieux aux forces de l'ordre s'il n'existait pas de nombreuses garanties touchant leur sécurité et leur anonymat, puisqu'ils sont souvent appelés à témoigner contre des personnes qui les connaissent bien, c'est-à-dire leurs anciens collègues, voire leurs collègues actuels, des membres de la famille ou d'autres personnes avec qui ils ont noué des relations.
Comme je l'ai indiqué, je voulais que ma déclaration préliminaire soit brève, car, si j'ai bien compris, les membres du comité ont des questions à me poser au sujet des pratiques actuelles des forces de l'ordre du Canada, et je vais faire de mon mieux pour leur donner les renseignements qu'ils cherchent.
Encore une fois, je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à comparaître ici aujourd'hui. J'attends vos questions.
Merci beaucoup.
Merci, messieurs, de donner au comité le temps de poser des questions.
Nous commençons notre première série de questions, de sept minutes.
Madame James.
Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aussi aux témoins d'être venus ici aujourd'hui.
Je remercie en particulier M. Stamatakis de la déclaration qu'il vient de faire, car ma question concerne la protection des ressources humaines dans le cadre des enquêtes criminelles et, en l'occurrence, la protection des Canadiens grâce aux sources de renseignements. L'un des éléments clés de ce projet de loi, qui en compte essentiellement trois seulement, est lié à la protection des sources humaines.
Je vais discuter de deux ou trois choses. On entend des gens se plaindre entre autres du fait que vous pourriez arrêter certaines des personnes impliquées, étant donné que vous les connaissez. Seriez-vous d'accord pour dire que, parfois, dans le cadre d'une enquête, vous devez laisser partir le menu fretin parce que vous êtes en réalité à la recherche d'une plus grosse prise, celle qui vous permettrait de régler de plus belle façon le problème auquel vous faites face?
Vous avez peut-être en main suffisamment d'éléments de preuve pour accuser une personne d'avoir commis une infraction quelconque, mais il s'agit probablement d'une infraction mineure par rapport à l'individu que vous recherchez vraiment, le gros bonnet, disons, ou la personne sur laquelle porte l'enquête.
Il s'agit souvent d'une personne impliquée au niveau supérieur, quand on parle en particulier du crime organisé ou du genre d'activités que nous avons connues récemment, au Canada, qui touchent les incidents récents dont je viens de donner un exemple. Nous cherchons toujours à tirer les meilleurs résultats possibles des ressources que nous avons à notre disposition afin de prévenir, d'être proactifs et de protéger les Canadiens.
Je pourrais tirer des conclusions similaires, car ces deux aspects sont presque un seul et même aspect... Disons que vous menez une enquête, au Canada, sur un type de crime donné — il n'est pas nécessaire de le préciser — et que, par vos sources humaines, vous apprenez que certains individus qui pourraient vous fournir des renseignements se trouvent à l'extérieur de nos frontières. Autrement dit, ces individus se trouvent dans un autre pays, et ce sont des personnes à qui vous devez parler, car elles pourraient vous fournir des informations qui vous mèneraient à votre objectif ultime.
Vous semble-t-il — et, à mon avis, votre déclaration préliminaire semble clairement le dire — que ce projet de loi donnerait au SCRS le pouvoir — qu'il n'a pas à l'heure actuelle, mais que les services de police ont — de protéger ses sources humaines d'information?
Cela me semble tout à fait sensé, du point de vue des activités de première ligne effectuées par les forces de l'ordre, tout à fait.
Ai-je raison de dire que c'est ce que vous avez observé, personnellement, quand vous avez pris connaissance de ce projet de loi?
Oui. En fait, je dirais qu'il ne va probablement pas aussi loin que ce dont disposent les services de police à l'échelon local. Je crois que c'est tout à fait un pas dans la bonne direction, c'est certain, en ce qui a trait à la protection des sources humaines.
Nous avons entendu des représentants du SCRS. Ils nous ont dit, lundi, que s'ils étaient obligés de laisser tomber leurs sources, ils allaient peut-être devoir abandonner un certain nombre de dossiers, car les sources servent souvent dans plusieurs enquêtes à la fois.
Pensez-vous qu'il serait souhaitable que le SCRS ne puisse fournir son aide pour faire aboutir les enquêtes criminelles et les poursuites? Ou pensez-vous qu'il serait souhaitable de protéger les sources qui serviraient à de multiples poursuites ultérieures?
Oui, merci. J'aimerais avoir la réponse à deux ou trois questions, parce que nous entendons des commentaires variés, de différentes personnes, qui se demandent s'il est nécessaire de faire ces choses.
Si nous envisageons la protection des sources humaines d'information, locales ou internationales, par rapport aux procédures d'enquête actuellement acceptées, au Canada, je crois que cela aiderait le citoyen ordinaire. Parce que j'essaie, à tout le moins, de façonner mes messages — en tant que député — en pensant pas tellement aux gens qui sont ici, mais aux gens qui sont à la maison, de façon qu'ils puissent comprendre ce que nous faisons et savoir ce que nous faisons pour les protéger, quand surviennent des événements, vous avez eu raison de le mentionner, comme ceux qui ont eu lieu le 20 et le 22 octobre.
J'aimerais en particulier vous remercier d'avoir mentionné les hommes et les femmes formidables qui assurent la protection de la Cité parlementaire et qui ont assuré notre protection, et je pense que le sergent d'armes — qui est, à parler franchement, je crois, notre héros à tous, je veux dire pour tous les membres du Parlement —, est particulièrement digne de mention.
J'ai remarqué que vous avez trouvé, dans ce projet de loi, certaines choses que, selon vous, nous devrions continuer à faire. Je vous en remercie.
Je me demandais si vous aviez réfléchi à... je suppose que l'une des protections offertes aux gens par la Charte fait que le SCRS devra quand même demander un mandat s'il veut obtenir des informations de certaines sources. Je vais revenir à mes notes. Vous pensiez que cela était approprié, mais je crois que vous avez formulé deux ou trois autres suggestions au sujet de ces mandats.
Oui, sous sa forme actuelle, la Loi sur le SCRS prévoit que le gouvernement ou le SCRS doit obtenir un mandat lorsqu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'un tel mandat est nécessaire, ce qui veut dire, dans le fond, en langage codé, dans les cas où l'article 8 de la Charte entre en jeu ou lorsqu'il s'agit d'immunité ou d'interception à l'égard d'activités qui constitueraient autrement un crime au terme de la partie VI du Code criminel.
Le problème, c'est que ce critère implicite et son application à l'extérieur du pays manquent de clarté; en effet, nous ne savons pas si la Charte s'applique à l'extérieur du pays. De fait, dans R. c. Hape, la Cour suprême laisse entendre que de nombreux types d'enquêtes policières — et, présumément, d'enquêtes du SCRS — ne soulèvent pas les mêmes questions quant à l'application de la Charte lorsqu'elles se déroulent à l'extérieur du pays.
Si je devais réfléchir à cette disposition pour savoir si je dois demander un mandat à la Cour fédérale, ce serait pour moi un casse-tête. Ce ne serait pas vraiment très évident.
Comme je l'ai souligné — et j'ai proposé un libellé, un exemple —, j'ai proposé qu'on intègre au projet de loi une instruction très claire sur les cas où un mandat serait exigé lorsqu'il s'agit d'exercer une surveillance à l'étranger. Dans quels cas le SCRS doit-il s'adresser à la cour pour obtenir ce mandat?
Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins.
Il est important de savoir — et M. Garrison l'a expliqué clairement, lundi — que nous ne disposons vraiment que de très peu de temps pour nos travaux, alors qu'il s'agit d'une étude qui, aux dires de tous les témoins, est beaucoup plus compliquée et exige beaucoup plus d'attention que ce que nous pouvons lui accorder.
En tant qu'opposition officielle, nous n'avons pu recevoir qu'aujourd'hui seulement les deux témoins que nous voulions spécifiquement entendre, et ils ont été convoqués pour une séance de deux heures dans laquelle on ne leur accordera que la moitié de ce temps. C'est vraiment un processus inadéquat.
Je suis très reconnaissant aux témoins de s'être assurés que toute la question de la surveillance et de l'examen n'a pas été laissée de côté. L'élimination du poste d'inspecteur général, ainsi que le fait que, depuis la Commission Arar, nous savons que nous avons besoin de bien meilleurs mécanismes de surveillance et d'examen, y compris pour l'examen parlementaire, et de mécanismes de surveillance bien mieux coordonnés dans le cas des agences de renseignement... Il s'agit du b-a-ba de la surveillance des agences de renseignement, et pourtant, 10 ans plus tard, nous n'en sommes toujours pas là.
Il est important de souligner que le commissaire à la protection de la vie privée a tout à fait la même opinion que vous. Dans une lettre qu'il a envoyée aujourd'hui, M. Therrien dit ceci:
Des règles législatives claires s'imposent pour empêcher que la communication d'information par le SCRS puisse entraîner une violation des obligations internationales du Canada.
Voilà pour la question de la clarté. Cela aura aussi au bout du compte des répercussions sur l'affaire Wakeling. Le commissaire ajoute ceci:
À mon avis, une approche législative équilibrée comprendrait également des dispositions dans le projet de loi C-44 prévoyant une surveillance indépendante des activités de tous les ministères et organismes fédéraux oeuvrant dans le domaine de la sécurité nationale.
Il poursuit en fournissant quelques éclaircissements.
Des gens qui ont réfléchi aux répercussions du fait de clarifier et d'étendre les pouvoirs du SCRS disent également que nous ne devrions pas faire cela sans avoir une compréhension plus globale du rattrapage nécessaire sur les plans de la surveillance et de l'examen, non seulement par rapport aux problèmes que nous avons connus dans le passé, mais par rapport à ce que prévoit maintenant ce projet de loi.
Monsieur Forcese, j'aimerais, si vous le voulez bien, m'attarder sur deux ou trois des points que vous avez soulevés. Sur la question des mandats, l'article 8 prévoit en somme que le nouveau paragraphe 21(3.1) serait formulé ainsi:
Sans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger, le juge peut autoriser l'exercice à l'extérieur du Canada des activités autorisées par le mandat décerné...
Les activités que le ou la juge autorise, ce sont des activités dans le cadre d'une enquête. Cela nous ramène à une disposition antérieure.
Vous avez dit qu'à votre avis, cet article ne s'appliquerait qu'aux activités de surveillance, non pas aux interrogatoires. Y a-t-il dans ce libellé quoi que ce soit qui donne à penser que c'est bien le cas?
Non. Il faut tenir compte du contexte historique, c'est-à-dire que les arrêts de la Cour fédérale qui sont le point de départ de ce projet de loi traitaient d'activités de surveillance menées à l'extérieur de nos frontières. Mais, bien sûr, le mandat du SCRS, à l'article 12, ne se résume pas aux activités de surveillance, secrètes ou autres.
Bien sûr, il arrive que des membres du SCRS se rendent à l'étranger pour mener un interrogatoire. L'exemple le plus connu est celui de Guantanamo, à savoir l'interrogatoire d'Omar Khadr. On peut présumer que cet interrogatoire s'est déroulé conformément au mandat qui est le sien en vertu de l'article 12.
Le problème, à mon avis, est de savoir quelle sorte de surveillance du service peut être exercée dans un contexte allant au-delà de ses activités de surveillance menées à l'étranger. Je crois que, quand il s'agit d'interrogatoires menés par des membres du SCRS à l'étranger, les enjeux constitutionnels peuvent être spectaculairement différents, puisqu'il ne s'agit plus du respect de l'article 8 de la Charte; il s'agit maintenant du respect de l'article 7, la disposition qui était en jeu, justement, dans l'affaire Khadr.
C'est — si on revient sur les commentaires touchant une formulation plus claire — une des raisons qui — je l'espère — pourraient amener le comité à envisager d'intégrer un libellé très précis pour indiquer que, chaque fois que les activités du SCRS « pourraient » contrevenir au droit international ou aux lois d'un autre pays, il aura l'obligation d'obtenir d'abord et avant tout ce mandat. Cette disposition ne concernerait donc pas uniquement la surveillance à l'étranger, elle toucherait à toutes les activités du SCRS. On peut supposer qu'à partir de là, il ferait l'objet d'une surveillance directe par un tribunal, qui pourrait sans doute alors imposer des conditions en fonction de la nature des activités menées à l'étranger, y compris, on peut le présumer, des interrogatoires.
Je vais y revenir, parce que je ne suis pas certain de ce qui se passerait si nos tribunaux étaient appelés à... Quand les représentants du SCRS disent qu'ils vont mener certaines activités qui, à leur avis, pourraient probablement ou vont assurément violer le droit international ou des lois étrangères ou locales et qu'ils veulent qu'un juge du Canada nous dise que nous pouvons le faire, je ne suis pas certain de savoir quels critères les juges utiliseraient pour décerner le mandat en question. Nous n'avons pas démêlé cela, je crois.
De plus, quand il est dit « sans égard à toute autre règle de droit », est-ce que cela s'applique à tout autre système juridique ou est-ce que cela signifie toute autre règle de droit au Canada?
Eh bien, cette expression n'est pas catégorique au point de représenter une application de l'article 33 de la Charte des droits. Elle ne permet pas de passer outre à la Charte. Je présume que l'expression « toute autre règle de droit » pourrait inclure la Déclaration des droits, mais là encore, je ne suis pas certain qu'elle soit suffisamment catégorique.
Ce que j'en comprends, ce que je suppose, c'est que l'expression « toute autre règle de droit » est liée au droit international. En excluant les lois étrangères, nous savons que, par exemple, la loi d'une administration étrangère ne s'applique pas... Ses règles en matière de vie privée, disons, mais également des principes du droit international qui pourraient avoir trait à la souveraineté; ces principes, sans doute, ne seraient pas applicables.
Ce manque de clarté me préoccupe.
Qu'en est-il des lois étrangères, quand le problème, c'est que le SCRS va faire des choses interdites par ces lois étrangères? Le ministre nous a dit que cela ne posait pas de problème, car nos lois sont meilleures que celles des dictateurs. Eh bien, le SCRS peut mener ses activités dans bien d'autres États dont le système fonctionne parfaitement et dont les autorités compétentes peuvent exiger l'obtention d'un mandat. Nous avons déjà entendu dire que le CSTC — le Centre de la sécurité des télécommunications Canada — a à l'occasion fait des choses à la demande organismes étrangers, si vous croyez ce qu'on raconte dans le livre célèbre intitulé Moi, Mike Frost, espion canadien. Nous avons peut-être même été impliqués dans des activités d'espionnage de ministres du Royaume-Uni à la demande des organismes de renseignement du Royaume-Uni, parce qu'elles n'avaient pas le droit de mener ce type d'activité. Que ce soit vrai ou pas, c'est une possibilité.
J'aimerais savoir ce que vous diriez à un juge à qui le SCRS explique sans détour ce qu'il veut faire, en précisant qu'il s'agit de quelque chose que l'organisme de renseignement d'un autre pays n'est pas autorisé à faire selon les lois de ce pays.
Vous pouvez vous imaginer que, si un juge de la Cour fédérale était confronté à cette situation, et à la perspective d'être enrôlé dans une opération menée par le SCRS, et que cela devait être mis au jour, une véritable tempête diplomatique serait déclenchée. Ce juge de la Cour fédérale, je crois, voudrait absolument s'assurer que le SCRS a mis les choses au clair.
En définitive, selon moi, le fait qu'un juge de la Cour fédérale participe à la supervision de ce genre d'activités constitue un gain au chapitre de la responsabilisation à cause du degré élevé de stress que produirait sans doute le fait d'être mis dans cette position. Ce qu'un juge de la Cour fédérale pourrait faire concrètement, et c'est difficile d'en discuter sans contexte concret, mais j'imagine qu'il s'empresserait d'imposer toutes sortes de conditions sur la façon de mener les opérations, ce qui réduirait au minimum le degré de violation du droit étranger et les risques d'effets d'entraînement qui mettraient le SCRS ainsi que le gouvernement du Canada dans l'embarras.
Parfait, merci beaucoup.
Merci, monsieur Scott, et merci, monsieur Forcese.
Nous passons maintenant à Mme Ablonczy, s'il vous plaît, pour sept minutes.
Je souhaite remercier les témoins pour leurs analyses et leurs commentaires judicieux. Ils sont très utiles.
Comme vous le savez, la Loi sur le SCRS a environ 30 ans, et, malheureusement, elle n'a certainement pas évolué au même rythme que les menaces auxquelles fait face notre pays.
L'objectif du projet de loi est assez simple; en fait, je crois que quelqu'un l'a appelé la « Loi qui comble les failles cernées lors des procédures judiciaires récentes ». Le tribunal a soulevé plusieurs questions auxquelles le projet de loi tente de répondre en donnant le pouvoir au SCRS d'effectuer des enquêtes à l'extérieur du Canada, en confirmant le fait que la Cour fédérale peut délivrer des mandats pour de telles enquêtes, en donnant à la Cour fédérale le pouvoir de ne tenir compte que des lois canadiennes pertinentes et en protégeant l'identité des sources et des employés du SCRS. Il est possible qu'il y ait d'autres problèmes qui doivent être réglés, mais il s'agit de l'objectif du projet de loi.
Je me demande si l'un des témoins peut nous dire quels genres d'exigences doivent respecter les collectivités du renseignement de nos alliés: le Groupe des cinq ou les pays avec lesquels nous coopérons. L'un de ces pays doit-il obtenir une ordonnance de la cour avant d'entreprendre des activités dans d'autres pays? De quelle façon notre système se compare-t-il à celui de nos alliés?
Il y a un peu de tout. Sans prétendre avoir examiné en détail les lois de centaines de pays étrangers, je dirais que ce projet de loi est unique en raison de la mesure dans laquelle il autorise clairement un fonctionnaire judiciaire de permettre à une agence d'exécution canadienne de violer le droit étranger.
Les lois des autres administrations sur lesquelles je me suis penché et qui effectuent des opérations de renseignement à l'étranger ont été créées pour être ambiguës à ce sujet. La réalité, comme nous le savons tous, est que les espions font leur travail et que, dans le cadre de leurs activités d'espionnage, il est possible qu'ils violent les lois des pays où ils se trouvent ainsi que le droit international au chapitre de la souveraineté étatique.
Une fois encore, n'ayant pas examiné de façon exhaustive toutes les lois comparables, je ne connais pas de loi qui indique de façon aussi claire qu'un tribunal peut autoriser des activités d'espionnage qui violent le droit international et étranger.
Je crois aussi que, dans le texte du document auquel vous avez fait référence plus tôt, j'ai qualifié de courageux d'une certaine façon le fait que le Parlement du Canada soit prêt à donner son aval à une loi qui affirme clairement que nous sommes prêts à violer les lois des pays étrangers, y compris potentiellement celles de nos alliés, dans le cadre de nos activités de surveillance étrangère.
Cela pourrait avoir des impacts politiques, et j'imagine qu'il y a des gens au ministère des Affaires étrangères qui sont assez préoccupés ou potentiellement assez préoccupés au sujet des retombées possibles que ce projet de loi pourrait avoir.
Mais, pour répondre à votre question, bien que mon expérience soit limitée, je dirais que ce projet de loi est assez unique.
Si je peux me permettre, j'ajouterais que nous pouvons observer nos partenaires du Groupe des cinq, en particulier, et je crois que nous découvririons qu'ils ont tous différentes formes d'autorisation judiciaire ou exécutive au chapitre de la surveillance étrangère, et, aussi, au chapitre de la surveillance intérieure. Il s'agit probablement davantage de variations sur un même thème.
Je crois que ce qui rend la législation canadienne unique découle du fait que nous tentons de mettre sur pied une structure législative pour une organisation qui est, comme je l'ai déjà dit, hybride. Au départ, le SCRS était un service national de renseignement de sécurité, et nous avons créé des lois pour lui permettre de faire ce travail et de contrôler les abus possibles. Maintenant, il est aussi un service de renseignement étranger, et il n'y a aucun service équivalent parmi nos partenaires du Groupe des cinq.
Tous nos partenaires du Groupe des cinq possèdent un service de renseignement étranger indépendant de leur service national du renseignement de sécurité. Ils ont séparé ces services au fil du temps pour des raisons qui, selon eux, sont très bonnes, et, selon moi, ce sont des raisons qui, en effet, sont excellentes selon une perspective internationale.
Ces services requièrent des compétences, des programmes de formation, des ressources, des modèles de responsabilisation internes et d'examen externes très différents, puisque les deux types d'opération sont très différents, selon que l'on mène ses activités à l'étranger ou au pays.
Nous tentons de trouver un arrangement législatif pour une organisation que nous avons laissé évoluer et devenir ce modèle hybride sans nous y attacher sérieusement. C'est ce qui, selon moi, devrait préoccuper le Parlement ainsi que toutes les personnes intéressées par le fonctionnement de la collectivité du renseignement au Canada.
D'accord. Eh bien, c'est toujours un débat intéressant. C'est pourquoi les universitaires aiment ce genre de choses. Mais il y a des conséquences, et j'apprécie le fait que vous les ayez soulignées.
Monsieur Stamatakis, vous avez mentionné les événements du 22 octobre et, bien sûr, l'inquiétude de savoir que le Canada est vulnérable à ce genre d'activités qui menacent la sûreté de petits ou de grands groupes dans notre pays.
Je veux simplement vous demander: quels seront, selon vous, les outils dont nos services de sécurité auront besoin à l'avenir? Comme je l'ai dit, le projet de loi a une portée assez limitée, mais nous savons qu'il doit y avoir d'autres outils à la disposition de nos services de sécurité. Pouvez-vous commenter la forme que pourraient prendre ces outils, selon votre point de vue?
Je ne sais pas si je suis qualifié pour faire des suggestions détaillées. Mon expérience se limite à l'application nationale de la loi canadienne, et, de notre point de vue, la façon de recourir à des sources humaines est un pas dans la bonne direction en ce qui a trait à la capacité de recueillir des renseignements.
Je peux vous dire que les services de police municipaux et provinciaux, ainsi que la GRC, qui participent aux activités municipales et provinciales de maintien de l'ordre dans notre pays, recueillent activement ce genre de renseignements de citoyens qui obtiennent des renseignements de personnes qu'ils connaissent et avec qui ils entretiennent des liens. Il s'agit d'un outil important.
Je crois sans aucun doute qu'il est approprié que nos services de sécurité qui participent à ces activités à l'intérieur ou à l'extérieur du Canada disposent des mêmes types d'outils que nos services locaux de maintien de l'ordre au moment de recourir à des activités et à des pratiques qui leur permettent de recueillir les renseignements les plus exacts le plus rapidement possible dans le but de prévenir de façon proactive les incidents ou les activités qui posent un risque pour les Canadiens.
Je crois qu'il s'agit du genre de discussions que nous devons avoir et avec lesquelles nous devons aller de l'avant. Mais je ne suis pas en mesure ici de faire beaucoup de recommandations à ce chapitre.
Merci beaucoup, monsieur Stamatakis.
Nous passerons maintenant à M. Casey, s'il vous plaît. Vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Messieurs les témoins, vous vous attendiez probablement à voir M. Easter dans le siège dans lequel je suis assis. Contrairement à lui, je ne suis pas un ancien solliciteur général. Je siège habituellement au Comité de la justice, donc je ne suis pas aussi bien préparé. Si ma question paraît être moins éloquente et plus maladroite, il y a une bonne raison à cela. Toutefois, je vous dirais que nous avons examiné, hier, article par article, la Charte canadienne des droits des victimes, et l'une des décisions qui ont été prises au sujet de ce projet de loi a été de ne pas inclure les victimes d'actes terroristes à l'étranger, comme les victimes du 11 septembre. Donc, il y a un lien accessoire.
J'aimerais commencer avec vous, monsieur Forcese. Vers la fin de votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de la responsabilisation ainsi que des postes vacants au sein du CSARS. Pourriez-vous donner plus de détails à ce sujet? Comme vous le savez, M. Easter et Joyce Murray, comme l'a dit M. Wark, ont défendu la surveillance parlementaire, et M. Wark est allé dans les détails à ce sujet. Toutefois, pourrais-je vous demander de parler un peu plus de ce qui doit être fait, selon vous, pour atteindre le degré de responsabilisation dont vous avez parlé afin qu'il soit à la hauteur des normes internationales de nos alliés?
En ce qui a trait à la structure du CSARS, le nombre de membres idéal est de cinq. Même lorsqu'ils sont cinq, ils siègent à temps partiel, et c'est une charge énorme que d'effectuer un examen du SCRS pour un employé à temps plein, sans parler d'un employé à temps partiel. Ils ont longtemps été trois. Comme vous le savez, deux présidents ont démissionné dans la controverse, et, cela a fait en sorte que la continuité du leadership a été inégale au CSARS.
Au chapitre des ressources, il est possible d'illustrer la croissance du SCRS en capitaux d'exploitation. Les capitaux d'exploitation du CSARS ont aussi augmenté, mais pas de façon proportionnelle. Ainsi donc, ce qui a toujours été un mécanisme de vérification... le CSARS, lorsqu'il évalue le SCRS, ne tient pas compte de tout ce que le SCRS a fait, il y va petit à petit. Et on peut présumer que, étant donné que son échelle a maintenant diminué par rapport à l'échelle des opérations du SCRS, il travaille encore plus au coup par coup que par le passé.
Il s'agit de mettre en marche un processus de dotation sérieux et intensif, de nommer les membres à temps plein et de mettre les ressources appropriées à leur disposition. Au chapitre législatif, il s'agit de réagir aux très importantes recommandations de l'enquête Arar selon lesquelles les trois organismes d'examen que nous avons devraient pouvoir être en mesure de coordonner leurs fonctions d'examen, afin qu'ils puissent vraiment suivre des enquêtes qui sont menées au-delà des frontières institutionnelles.
Plus tôt cette année, un article paru dans le Globe and Mail laissait entendre qu'un effort informel avait été déployé par le commissaire du CST dans le cadre de l'une de ses évaluations afin de coordonner ses activités avec celles du CSARS, et le gouvernement a réagi en remettant en question la compétence juridique du commissaire à travailler en ce sens. En fait, selon ce que je comprends, il y a eu des menaces selon lesquelles le commissaire violait ses obligations ainsi que les obligations de son personnel en matière de secret et de sécurité. Cette situation exige une modification législative qui tarde à venir.
Selon vous, la surveillance parlementaire est-elle nécessaire, et quel serait le modèle optimal? Si vous êtes d'avis qu'elle est nécessaire, à quoi devrait-elle ressembler?
Je crois qu'elle est nécessaire. Je ne crois pas que les arguments selon lesquels cette surveillance est redondante ont une quelconque valeur. Je crois que plus on surveille les espions, mieux c'est.
Je crois aussi qu'il est important d'améliorer votre compréhension, en tant que parlementaires, du fonctionnement interne des services de sécurité afin qu'il existe une connaissance institutionnelle au sein du Parlement lui-même.
Le modèle idéal, selon moi, en est un où le comité parlementaire possède une solide capacité d'accéder aux renseignements dont il a besoin.
Si vous observez les modèles qui sont utilisés par nos alliés, le Royaume-Uni et l'Australie étant des exemples importants, il y a une certaine variabilité au chapitre de la qualité des renseignements que le comité peut réellement obtenir des services de sécurité. Le modèle australien présente une meilleure structure, mais sa capacité de contraindre les services à fournir des renseignements n'est pas aussi robuste. Je crois que l'ingrédient principal de tout modèle de comité parlementaire est la capacité des parlementaires d'accéder aux renseignements en question, lesquels sont assujettis, bien sûr, à des obligations en matière de confidentialité qui sont ensuite imposés aux membres du Parlement.
Monsieur Wark, M. Forcese a parlé du fait que la réponse que nous obtenons lorsque nous demandons une surveillance parlementaire est qu'elle est redondante. Vous avez parlé, dans vos observations préliminaires, assez en détail du déclin de la responsabilisation ministérielle et des mesures qu'on a prises pour tenter de mettre en place une surveillance parlementaire. J'imagine que vous avez aussi étudié ou, du moins, lu les débats et les opinions des différents partis sur la question.
Je vous inviterais à critiquer les réponses que nous obtenons lorsque nous demandons une surveillance parlementaire. Cette surveillance serait redondante. Nous avons déjà une surveillance adéquate en place. Que répondez-vous à ces affirmations?
Monsieur Casey, je crois qu'il s'agit d'une excellente question.
Premièrement, laissez-moi vous donner mon opinion sur la nature des critiques, et elles sont très près de ce que vous présentez. L'une des réponses à toute forme de mesure visant à réformer la nature de l'examen parlementaire de la sécurité et du renseignement au Canada est l'argument selon lequel des comités parlementaires propres à chaque ministère, si vous voulez, peuvent effectuer ce travail de façon adéquate. Le comité ici présent peut examiner de façon adéquate les pratiques liées à la sécurité et au renseignement de la collectivité canadienne.
Il me semble que cet argument soulève deux problèmes, peut-être plus, mais il y en a deux qui me viennent immédiatement à l'esprit.
Premièrement, au chapitre des comités parlementaires axés sur les activités de chaque ministère du gouvernement, ce n'est pas la façon dont la collectivité du renseignement et de la sécurité canadienne est réellement organisée dans son ensemble. Il s'agit d'un ensemble intégré ou semi-intégré de différentes organisations qui mènent des activités conformément à leur mandat et sous la surveillance de différents ministères. L'enquête Arar a signalé, entre autres, le fait que nous n'avons pas la capacité, en tant qu'organisme d'examen indépendant, de tenir compte de l'ensemble du travail de la collectivité de la sécurité et du renseignement, et le Parlement n'a pas la capacité, en ce moment, d'effectuer ce genre d'examen intégré. Comme mon collègue Craig l'a aussi laissé entendre, il y a un problème important au chapitre de l'accès aux renseignements dont un comité parlementaire ou un comité de membres du Parlement pourrait vraiment avoir besoin afin d'évaluer de manière adéquate les activités d'une collectivité impénétrable de la sécurité et du renseignement.
Il y a des modèles qui fonctionnent depuis longtemps chez nos partenaires du Groupe des cinq. Le modèle que nous avons habituellement pris comme exemple à la suite du 11 septembre au Canada a été le modèle britannique, le modèle du comité du renseignement et de la sécurité, qui est un modèle assez inhabituel, je l'admets. C'est un comité de parlementaires, et non un comité parlementaire classique. Il a été mis sur pied ainsi selon l'hypothèse qu'il fournirait un meilleur accès à des informations confidentielles conformément aux dispositions fournies aux parlementaires, et que le comité serait la source de discussions soutenues, sérieuses et non partisanes à propos de ces enjeux s'il était constitué d'une certaine manière.
J'ai aidé Joyce Murray à élaborer son projet de loi d'initiative parlementaire, et nous avons observé différents modèles très sérieusement, mais je crois que l'essence de ce dont a besoin le Parlement est un comité qui se consacrerait à la surveillance d'un large éventail d'activités du renseignement de sécurité et dont les membres pourraient provenir de la Chambre et du Sénat. Le comité aurait sans aucun doute besoin de plus de ressources qu'un comité parlementaire ordinaire au chapitre du personnel de recherche et il aurait besoin...
D'accord, et merci pour votre conclusion rapide. Je crois que vous pouvez comprendre.
Nous allons maintenant passer à M. Scott.
Merci, monsieur le président.
Je crois que j'ai cinq minutes, donc, je vais essayer d'être bref et je demanderais aussi aux témoins de répondre aussi rapidement que possible.
Il y a deux choses sur lesquelles je désire me pencher. L'une est l'absence de dispositions dans ce projet de loi concernant les types de consultations que vous avez tous les deux soulevés, particulièrement M. Wark. Je crois que j'ai raison de dire qu'il n'y a aucune disposition dans le projet de loi qui oblige le SCRS à consulter le ministère des Affaires étrangères avant de se présenter devant le tribunal, et le juge n'est pas obligé d'exiger cette consultation avant de délivrer le mandat. Il dépendrait de la bonne grâce des juges de dire: « hé, c'est le genre de choses sur lesquelles je crois que nous devrions en savoir un peu plus, quelles sont les conséquences, et suis-je la bonne personne pour prendre une décision? Demandez au ministre des Affaires étrangères de donner son opinion. »
Ce que je dis est-il exact, qu'il n'y a rien dans le projet de loi qui obligerait le SCRS, maintenant qu'il effectue officiellement des activités partout sur la planète, à consulter le ministère des Affaires étrangères ou, par exemple, le ministère de la Défense nationale, ou à coordonner ses activités avec eux?
C'est tout à fait exact. Il n'y a rien du tout dans le projet de loi qui l'oblige de façon explicite, et la pratique informelle qui existe à ce chapitre relève des secrets officiels.
M. Forcese a aussi abordé ce thème, et je ne suis pas certain s'il en a dit un peu plus que ce qu'il voulait, mais selon ce qu'il a indiqué, j'ai presque cru entendre qu'il y avait, du moins, des rumeurs provenant de l'autre côté d'Ottawa, du moins au sein du ministère des Affaires étrangères, selon lesquelles les gens ne sont pas nécessairement satisfaits du fait que le SCRS obtienne maintenant ce mandat officiel en étant converti en un organisme dont il avait peut-être déjà, en pratique, certains éléments, mais de façon non officielle.
Ai-je raison de dire que les Affaires étrangères voudraient entretenir un lien plus étroit avec le SCRS lorsqu'il commencera à effectuer des opérations à l'étranger, ou ce ministère est-il heureux de laisser le SCRS faire ce qu'il veut?
Ce n'était que des conjectures de ma part. Je ne prétends pas savoir tout ce qui se passe à l'intérieur du ministère des Affaires étrangères.
Elles étaient fondées sur... c'était des conclusions fondées sur le contexte. C'est-à-dire, si le SCRS mène des opérations extraterritoriales, il est possible qu'il viole des lois étrangères, puis que cela soit mis au jour et, soudainement, ça fait la première page du Washington Post. Ensuite, c'est tout un casse-tête pour le corps diplomatique.
Donc, je reviendrais à la question que j'avais dit vouloir laisser de côté la dernière fois: que voudriez-vous qu'un juge fasse? Il convient de se rappeler que différentes facettes de la dignité des tribunaux entrent en cause dans la grande comédie des nations où les tribunaux existent presque uniquement pour dire aux autres tribunaux: « Notre but n'est pas de contribuer à la violation de vos lois ». Toutefois, une bonne proportion de l'espionnage international est illégal à l'échelle internationale, et la possibilité d'impliquer nos tribunaux là-dedans, surtout lorsque vous avez dit que le simple fait que le SCRS croie qu'il est peut-être en train d'agir à l'encontre du droit international ou étranger déclencherait le processus, pourriez-vous seulement m'indiquer ce qu'un juge ferait, face à une situation semblable? Comment le juge pourrait-il dire: « d'accord, allez-y et faites-le, même si c'est la raison pour laquelle vous venez me voir; vous allez enfreindre la loi étrangère et maintenant je vous dis officiellement que vous avez le droit de le faire ».
Eh bien, pour être honnête, je ne suis pas en mesure d'imaginer ce qu'un juge ferait dans chaque cas particulier. Je remarque, toutefois, que les dispositions relatives aux mandats qui s'appliqueraient aux mandats nationaux et étrangers obligeraient le SCRS à démontrer que l'opération est absolument nécessaire, qu'aucun autre moyen ne permettrait de recueillir les renseignements nécessaires à l'enquête.
Voici la meilleure réponse que je peux vous donner, monsieur Scott: j'imagine qu'un tribunal qui devrait faire appliquer ces dispositions relatives aux mandats serait très exigeant envers le SCRS et, selon ce que je comprends — si vous parlez aux gens du SCRS, ils vous le diront —, le processus de demande de mandat est déjà assez ardu, et les tribunaux sont assez exigeants.
Bien sûr, il s'agit d'audiences à huis clos et ex parte.
J'imagine qu'une Cour fédérale qui prendrait le risque d'être entraînée dans un scandale international serait encore plus catégorique au sujet de la nécessité d'effectuer cette enquête et imposerait toutes sortes de conditions.
Merci, c'est formidable.
Je voulais revenir à l'arrêt Wakeling qui nous a été rendu par la Cour suprême il y a environ une semaine. Vous avez indiqué que, selon la majorité des juges, ce projet de loi va déjà devoir être amendé au moins une fois afin que les dispositions concernant certains aspects de ce qu'un mandat peut autoriser soient éclaircies, y compris celles qui traitent de l'échange d'information qui peut découler des activités autorisées par un mandat. Cela est clair si on se fie au raisonnement de la majorité. Donc, à la suite de la décision de la Cour suprême, ce projet de loi doit déjà être amendé.
Les juges dissidents étaient d'accord, mais ils sont allés un peu plus loin. J'aimerais vous lire un passage et vous demander si, selon vous, il s'agit d'une question de politique que nous, en tant que législateurs, devrions prendre au sérieux:
Toutefois, lorsque des renseignements sont communiqués au-delà des frontières, les garanties qui s'appliquent lors d'enquêtes menées au Canada cessent d'avoir effet...
... L'obligation d'obtenir au préalable l'autorisation du tribunal n'offre pas de protection suffisante contre la divulgation ultérieure abusive.
C'est-à-dire, aux partenaires, aux partenaires dans le domaine du renseignement.
De plus, « l'omission de requérir une mise en garde » dans la loi elle-même « concernant l'utilisation des renseignements divulgués est déraisonnable. »
Désolé, monsieur Scott. Votre temps est largement dépassé, et nous n'avons pas le temps d'entendre la réponse. Merci beaucoup.
Il nous reste environ deux minutes pour M. Carmichael.
Merci. C'est généreux.
Eh bien, laissez-moi souhaiter la bienvenue à nos témoins aujourd'hui. Merci d'être ici.
Monsieur Forcese, j'aimerais commencer par vous, si vous me le permettez. Peut-être ne pourrons-nous pas aller plus loin.
Clairement, nous reconnaissons tous que le terrorisme constitue une menace mondiale aujourd'hui et que le Canada, à la suite des attentats du mois passé, n'est pas immunisé. Dans un article paru dans le National Post en octobre, je crois que c'était vous ou votre collègue qui a été cité, l'article disait:
Le nouveau projet de loi donne un fondement juridique clair à la surveillance à l'extérieur du Canada. Il s'agit d'une mesure raisonnable dans un environnement de sécurité mondialisé. En effet, le projet de loi est courageux sur le plan diplomatique...
... comme vous l'avez déjà dit; vous dites ensuite:
Il reste, toutefois, des questions laissées en suspens: lorsque le SCRS mène des enquêtes à l'étranger, les risques de mauvaise conduite, y compris la participation à des violations des droits de la personne, augmente. Ce type de comportement soulèverait des enjeux juridiques.
Donc, je suis inquiet ou, probablement, plutôt confus. Nous sommes tous d'accord pour dire que ce projet de loi constitue un pas dans la bonne direction. Nous avons parlé de nos alliés et de certains modèles. L'un d'entre vous a parlé de la version canadienne comme étant, je crois, une version hybride de ces modèles. Je me demande quelle serait la mesure appropriée. Je vous entends parler de la façon dont le projet de loi vise les mandats et la Cour fédérale. Nous avons ajouté des garanties qui nous permettront de nous assurer que le travail est effectué de façon idéale. Qu'est-ce que je ne comprends pas?
Je crois que je vais me limiter aux solutions qui pourraient régler certaines des omissions dont j'ai parlé dans mon exposé. En d'autres termes, certaines clarifications au chapitre du libellé pourraient régler quelques préoccupations que j'ai soulevées et dont vous parlez. Une fois encore, il s'agit d'indiquer le seuil à partir duquel il faut obtenir un mandat et de faire participer un juge de la Cour fédérale à la supervision des activités à l'étranger qui pourraient être problématiques...
Et, en fin de compte, je vais simplement revenir au rapport Arar selon lequel il y a des situations où nous ne pouvons pas vraiment agir ainsi. Dans le contexte de l'échange d'information, il y a des circonstances où nous ne pouvons simplement pas échanger des renseignements et où les conséquences pour les droits de la personne pourraient être désastreuses. Il y a des dispositions juridiques, mais il y faut aussi utiliser son jugement.
Merci beaucoup. Je sais que vous aimeriez continuer, monsieur Carmichael, mais nous avons maintenant dépassé notre première heure.
Au nom du comité, le président aimerait remercier les témoins de leur expérience et de leurs observations judicieuses qu'ils ont partagées avec nous aujourd'hui. Une fois encore, il s'agit d'un enjeu très sérieux. La sécurité publique, la protection du public, c'est ce qu'il y a de plus important pour les parlementaires. Nous vous remercions donc de votre contribution aujourd'hui.
Nous allons maintenant suspendre les travaux avant de passer à la deuxième heure.
Nous reprenons les travaux. Nous allons maintenant procéder à la présentation des témoins.
Nous avons avec nous Kent Roach, professeur à la Faculté de droit de l'Université de Toronto; bienvenue, monsieur; et, par vidéoconférence, de Burnaby en Colombie-Britannique, et à titre personnel, nous accueillons Garth Davies, professeur agrégé de la Simon Fraser University; bienvenue, monsieur. Dans 15 ou 20 minutes, Christian Leuprecht, doyen associé de la Faculté des arts et professeur agrégé du Département des sciences politiques et économiques du Collège militaire royal du Canada à Kingston se joindra à nous.
Mesdames et messieurs, nous allons commencer avec les déclarations préliminaires.
Nous allons commencer avec vous, monsieur Roach.
Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais remercier le comité de m'avoir invité à comparaître ici aujourd'hui.
Les terribles attaques terroristes du mois dernier ont confirmé que le Parlement a eu raison, en 2013, d'édicter quatre nouvelles infractions de terrorisme qui peuvent s'appliquer à des terroristes étrangers. Malheureusement, le projet de loi C-44 pourrait faire en sorte, de façon involontaire, qu'il soit plus difficile de faire appliquer ces nouvelles infractions importantes à des terroristes étrangers potentiels. Il s'agira du thème principal de mon mémoire.
Ensuite, j'expliquerai que l'exception relative à la démonstration de l'innocence de l'accusé qui s'applique à la nouvelle immunité dont jouiraient les sources humaines du SCRS est exigée par la Charte, mais est inconstitutionnelle et trop limitative si elle s'applique à des procédures non criminelles dans lesquelles l'article 7 de la Charte des droits entre en jeu.
Finalement, même s'il est juste de dire que le projet de loi C-44 confère au SCRS de nouveaux pouvoirs en lui permettant d'effectuer des enquêtes à l'extérieur du Canada, et que cette capacité répond au contexte de menaces dans lequel nous vivons, je crois que notre besoin de nouveaux mécanismes intégrés d'examen et d'une meilleure surveillance ministérielle et parlementaire des activités du SCRS à l'étranger constitue une préoccupation.
Pour ce qui est de mon premier point, le projet de loi C-44 renverserait la décision récente qu'a prise la Cour suprême dans l'affaire Harkat et rejetterait les recommandations de la commission d'enquête sur l'attentat d'Air India selon laquelle les informateurs du SCRS ne devraient pas jouir de la même immunité que les informateurs de police. La Cour suprême et la Commission d'enquête sur l'attentat d'Air India ont signalé le risque que le SCRS promette l'anonymat à des informateurs de façon prématurée à cause de son mandat de collecte de renseignements, ce qui pourrait rendre difficiles ou même contrecarrer des poursuites ultérieures.
L'article 2 du projet de loi C-44 donnerait aux sources humaines du SCRS un droit de veto concernant la divulgation de tout renseignement permettant leur identification une fois qu'elles ont reçu une « promesse d'anonymat » du SCRS. Tout récemment, en 2013, les tribunaux ont dit, au sujet de l'immunité dont jouissent les informateurs de police, que ces promesses d'anonymat pourraient même être implicites. Le fait de savoir que pratiquement toutes les sources humaines du SCRS pourraient, en vertu du projet de loi proposé, profiter d'une telle immunité et d'un droit de veto quant à la divulgation de tout renseignement pouvant permettre leur identification, que ce soit pour défendre un mandat de perquisition dans le cadre d'une enquête sur le terrorisme ou pour témoigner dans un procès en matière de terrorisme, m'inquiète.
Il ne s'agit pas d'inquiétudes hypothétiques, et je dois mentionner que j'ai étudié la question pendant quatre ans tandis que j'étais le directeur des recherches et des questions de droit de la Commission d'enquête sur l'attentat d'Air India. En 1987, la poursuite de Talwinder Singh Parmar, le présumé cerveau derrière l'attentat d'Air India, s'est effondrée lorsqu'un informateur a refusé que son nom soit divulgué. J'admets que l'informateur était dans une position très délicate, et l'avocat de la Couronne, à l'époque, a avoué en audience publique qu'il aurait pris la même décision par crainte pour sa vie, comme l'ont dit des témoins précédents. Mais, en fait, la poursuite s'est effondrée à cause du privilège conféré à l'informateur et de la capacité de l'informateur de faire valoir son droit de veto concernant la divulgation de tout renseignement pouvant mener à son identification.
Ce projet de loi aurait donné aux deux informateurs de la poursuite en matière de terrorisme, qui avait lieu à Toronto, un droit de veto au sujet de la possibilité d'être appelés comme témoins ou de la divulgation de tout renseignement pouvant mener à leur identification. Comme vous l'avez entendu hier, l'objectif du SCRS n'est pas de recueillir des éléments de preuve, et c'est pour cette raison que la Commission sur le vol d'Air India nous a prévenus que cette immunité inciterait le SCRS à faire de nombreuses promesses d'anonymat et de confidentialité afin de pouvoir remplir son mandat en matière de renseignement.
Ce n'est pas que le SCRS abuse délibérément du privilège, mais, à cause de son mandat, il aura un incitatif pour promettre l'anonymat. Et puis, plus tard, peut-être des mois ou même des années plus tard, la police et les procureurs pourraient avoir de la difficulté à gérer les conséquences de cette immunité quasi absolue qui serait accordée à toutes les sources humaines du SCRS en vertu du projet de loi C-44.
La Commission sur le vol d'Air India était pleinement consciente de l'existence du dilemme. Parfois, il est plus important d'avoir des renseignements que de pouvoir effectuer une poursuite, et la solution que la commission a proposée était de ne pas permettre au SCRS, ou, en fait, à la GRC, de régler le dilemme de façon unilatérale, mais de demander au conseiller à la sécurité nationale du premier ministre de prendre la décision dans l'intérêt public en tenant compte de toutes les informations à sa disposition.
Ensuite, l'exception relative à la démonstration de l'innocence décrite à l'alinéa 18.1(4)b), telle que requise par la Charte, s'appliquerait aux poursuites criminelles. Toutefois, la Cour suprême, dans l'affaire Charkaoui, a établi clairement que l'article 7 s'applique aussi dans un contexte non criminel, particulièrement dans le contexte d'un certificat de sécurité. Selon moi, vous devriez envisager d'élargir la portée de l'exception relative à la démonstration de l'innocence afin de permettre aux juges d'ordonner, au besoin, en vertu de l'article 7 de la Charte, une divulgation minant l'immunité de la source.
De même, je réalise que la décision d'ordre politique d'offrir l'immunité a été prise, mais je proposerais aussi que vous vous penchiez sur la formulation de l'article 2 relative à la promesse d'anonymat lorsque vous procéderez à l'examen article par article. Le libellé devrait au moins établir que seule une promesse d'anonymat explicite faite par le SCRS pourrait faire en sorte que la personne soit protégée par cet important privilège qui, comme je l'ai laissé entendre, pourrait entraver des enquêtes de police et des poursuites ultérieures.
Finalement, vu le contexte de menaces, je suis d'accord: le SCRS doit être en mesure de mener des enquêtes à l'extérieur du Canada. Mais j'ai certaines préoccupations concernant la formulation « Sans égard à toute autre règle de droit, notamment le droit de tout État étranger ». La possibilité que cet article puisse l'emporter sur les restrictions que la Loi sur la défense nationale impose au CSTC ou à l'organisme responsable du renseignement d'origine électromagnétique m'inquiète. Je crois aussi qu'un examen intégré est nécessaire, ou, du moins, des passerelles législatives, comme le recommande la commission sur l'affaire Arar, et comme M. Forcese l'a défendu dans son mémoire, en plus de proposer certaines formulations à cet effet.
J'ajouterais aussi qu'il faut s'assurer qu'il y a une surveillance ministérielle et parlementaire lorsque le SCRS utilise ses nouveaux pouvoirs à l'étranger.
Merci beaucoup.
Merci beaucoup, monsieur.
Nous allons maintenant passer à la déclaration préliminaire de M. Davies, s'il vous plaît.
Merci beaucoup de m'avoir invité aujourd'hui. Je vais tenter de vous faire part de mes observations de façon brève.
Je répéterais à peu près tout ce qui a été dit jusqu'à maintenant au sujet du besoin d'une surveillance ministérielle. Je crois que nous sommes tous d'accord. Nous nous entendrions tous pour dire que le contexte dont nous parlons, l'évolution de la nature du terrorisme, est tel que nous devons permettre au SCRS d'avoir les outils appropriés pour mener des activités dans un environnement qui change rapidement et qui est, de biens des façons, différent de ce que nous avons connu au chapitre des menaces provenant de terroristes étrangers et d'organisations comme l'État islamique, et nous devons tenter de trouver le juste équilibre entre cela et les droits et libertés que nous chérissons tant.
Je voulais vraiment venir ici aujourd'hui afin de répondre aux questions que les gens pourraient poser. Je voulais que ma déclaration soit la plus brève possible afin de permettre à ceux qui ont autre chose à dire de le faire.
Merci.
Parfait, et merci beaucoup.
Nous allons donner un moment à M. Leuprecht pour qu'il puisse s'installer et se préparer. Il est avec nous un peu plus tôt que prévu, donc nous lui donnerons un moment et prendrons une pause d'une minute ou deux.
Monsieur Leuprecht, vous avez 10 minutes pour faire votre déclaration préliminaire, si vous le souhaitez.
[Français]
Mesdames et messieurs, je vais faire ma présentation en anglais, mais je peux répondre à n'importe quelle question dans les deux langues officielles.
Monsieur le président, membres distingués du comité,
[Traduction]
J'ai intitulé mon intervention « La paix, l'ordre et le bon gouvernement: la suprématie parlementaire en tant que responsabilité constitutionnelle ultime au chapitre de la souveraineté ».
On entend souvent dire que le Canada ne possède pas de service de renseignement extérieur. La collectivité canadienne du renseignement de sécurité est mal connue étant donné les limites législatives imposées aux secteurs canadiens d'opération du renseignement de sécurité et à sa zone de responsabilité à l'extérieur du Canada, les secteurs d'opération du SCRS à l'extérieur du Canada. Ainsi, on pourrait croire que le Canada ne possède pas de service du renseignement de sécurité, du moins pas un service à la hauteur des services humains que possèdent certains de nos alliés clés, particulièrement dans le Groupe des cinq — la CIA, le MI5 et l'ASIS, l'Australian Secret Intelligence Service.
Le Canada a un service du renseignement électromagnétique étranger, le Centre de la sécurité des télécommunications, qui fait du très bon travail, en passant. Le Canada a compensé les limites touchant la zone d'opérations du SCRS de plusieurs façons importantes.
Deux des principaux mécanismes sont assujettis à des conditions précises. Premièrement, l'échange de certains renseignements humains sur certains citoyens et résidents canadiens — et sur certaines autres personnes directement liées au Canada ou à l'intérêt canadien — avec les services étrangers alliés de renseignements humains, en général, et avec les trois partenaires du Groupe des cinq que nous avons déjà mentionnés, en particulier. Le service du renseignement de sécurité de la Nouvelle-Zélande, comme le SCRS, n'a pas un mandat général en matière de renseignements humains étrangers, comparativement aux services des États-Unis, du Royaume-Uni et de l'Australie.
Deuxièmement, conformément à des conditions précises, l'échange de renseignements électromagnétiques sur certains citoyens et résidents canadiens — et sur certaines autres personnes directement liées au Canada ou à l'intérêt canadien — avec le CST, le Centre de la sécurité des télécommunications.
Comme on en a beaucoup parlé dans les médias, y compris dans le Globe and Mail, en novembre 2014, le juge Richard Mosley de la Cour supérieure du Canada a déterminé que le SCRS n'avait pas fait preuve de suffisamment d'ouverture au sujet de toutes les alliances de surveillance qu'il envisageait de créer. Il y a cinq ans, le SCRS l'avait convaincu d'approuver un mandat d'écoute électronique de base pour en élargir la portée à l'extérieur du Canada. Le juge Mosley a pris connaissance de la pleine mesure des renseignements mis en commun entre les services d'espionnage canadiens et ses alliés étrangers après avoir lu les rapports publics des organismes de surveillance.
Dans sa décision, il a indiqué qu'il n'en avait jamais été informé par les organismes de renseignement canadien durant les cinq ans qu'a duré l'écoute secrète. Il a pris une mesure extraordinaire: il a rouvert le dossier qu'il avait réglé en 2009. Dans sa décision de novembre 2013, il a réprimandé le SCRS et le Centre de la sécurité des télécommunications pour avoir manqué à leur devoir d'honnêteté à l'égard de son tribunal. Une déclaration produite par la cour a ajouté que, malgré l'apparence du contraire, la cour jugeait qu'il était nécessaire d'affirmer que l'utilisation des actifs de la communauté du Groupe des cinq n'était autorisée aux termes d'aucun mandat délivré.
Le dossier semble lié à des préoccupations au sujet d'une situation précise où le SCRS n'a pas communiqué à la cour un élément précis de renseignements au sujet d'un individu. Le résultat de la décision du juge Mosley est que le SCRS perd toute trace des Canadiens ou des non-Canadiens faisant l'objet d'une surveillance autorisée par un juge une fois qu'ils quittent le pays.
Le fond de la décision du juge Mosley, si l'on met de côté ce cas précis de non-divulgation à la cour, soulève au moins deux questions fondamentales. Premièrement, comme au moins 130 voyageurs canadiens extrémistes ont quitté le pays, comme l'a dit le directeur du SCRS ici même, et que 80, au moins, sont revenus, la situation est problématique. Le SCRS a de la difficulté à suivre les voyageurs extrémistes et à surveiller leurs activités à l'extérieur du pays. Cela a des répercussions subséquentes quant à sa capacité de prodiguer en temps opportun des conseils exacts à l'organe administratif du gouvernement et à l'exécutif politique à qui il doit rendre des comptes. Cela mine aussi sa capacité de liaison tactique avec les agences du renseignement criminel et d'application de la loi, notamment la GRC et l'ASFC.
Deuxièmement, quelle est et quelle devrait être l'emprise de l'appareil judiciaire lorsqu'il est question de sécurité nationale? Vous avez déjà entendu beaucoup de témoins en ce qui concerne le premier point. Je ne vais pas revenir sur les répercussions immédiates de cette situation, sinon pour réitérer l'argument et des préoccupations soulevés par d'autres au sujet des conséquences néfastes sur le plan tactique, opérationnel et stratégique de cette décision pour le SCRS, les politiques en matière de sécurité nationale et leur application et la capacité de l'exécutif politique du Canada de prendre des décisions éclairées en ce qui concerne la sécurité publique et l'intérêt national.
Le deuxième élément, au contraire, a des répercussions de plus grande portée. Le Canada est une démocratie. Ses fondements idéologiques s'appuient sur ceux du libéralisme avec un petit « L », c'est-à-dire une intervention limitée de l'État dans la vie des gens assortie de la valeur fondamentale de liberté et des valeurs connexes d'égalité et de justice. L'une des marques distinctives de ce type de démocratie, c'est la primauté du droit et une structure judiciaire indépendante et impartiale. Le simple fait que nous soyons ici même, dans cette salle, signifie que nous acceptons tous ces principes fondamentaux sous-jacents du système de monarchie constitutionnelle de Westminster en vigueur au Canada.
Sur le plan constitutionnel, le Canada trouve le juste équilibre entre la prémisse d'une intervention étatique limitée et une prémisse idéologique conservatrice avec un petit « C » au sujet du rôle de l'État, en général, et au sujet du rôle du gouvernement fédéral, en particulier. Je cite le préambule de l'article 91 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique:
Il sera loisible à la Reine, de l’avis et du consentement du Sénat et de la Chambre des Communes, de faire des lois pour la paix, l’ordre et le bon gouvernement du Canada, relativement à toutes les matières ne tombant pas dans les catégories de sujets par la présente loi exclusivement assignés aux législatures des provinces.
Pour les buts de notre analyse, au moins deux observations s'imposent.
Dans la mesure où la sécurité est sans contredit une préoccupation nationale, elle relève du gouvernement fédéral. C'est le cas du renseignement de sécurité nationale et des interactions entre les responsables du renseignement de sécurité du Canada et de l'étranger.
De plus, le gouvernement fédéral a l'obligation générale d'assurer la paix, l'ordre et le bon gouvernement du Canada. En d'autres mots, le gouvernement fédéral possède des obligations inhérentes relativement à la sécurité collective de la société canadienne.
La signification exacte du principe de paix, d'ordre et de bon gouvernement a été définie et circonscrite par le Comité judiciaire du conseil privé et la Cour suprême du Canada, et nous ne nous y arrêterons pas. Je dirai simplement que la Constitution du Canada impose des limites à la primauté judiciaire.
Contrairement aux Américains, les Canadiens ne sont pas fondamentalement sceptiques et méfiants à l'égard de leur gouvernement. On le constate de façon empirique au moment des sondages.
Je vais sauter cette section. Elle pourra être lue pour le compte rendu plus tard.
[Voir l'annexe]
Ce que j'essaie de dire ici, c'est que les gens peuvent être préoccupés par des questions précises, mais, de façon générale, nous avons une très grande confiance à l'égard de nos institutions responsables de la sécurité et de la façon dont le gouvernement fédéral gère la sécurité nationale.
Bien sûr, la gestion du secteur de la sécurité est une forme d'intervention gouvernementale. On pourrait faire valoir qu'il s'agit en fait de la forme ultime d'intervention gouvernementale précisément parce qu'elle permet au gouvernement de limiter nos libertés de façon assez importante. Les critiques aiment citer le cas de Mahar Arar. Si tragique que ce dossier puisse être, un seul cas ne constitue pas une tendance. Au contraire, il reflète l'incidence de l'apprentissage au sein de notre secteur de la sécurité en raison du fait qu'un cas comme celui de M. Arar est très peu susceptible de se reproduire compte tenu des modifications qui ont depuis été apportées aux politiques. De plus, il est bien connu que les renseignements utilisés dans le dossier Arar avaient été fournis par la GRC, et non le SCRS. Bien sûr, il y a d'autres dossiers dans lesquels les juges ont remis en question la preuve du SCRS, mais ils ne remettaient pas en question le professionnalisme ni la conduite respectueuse des lois de l'organisation. Dans un même ordre d'idées, le chien de garde du CST a affirmé à de nombreuses reprises le comportement légitime et professionnel du centre dans le cadre de ses activités.
Alors d'où vient le scepticisme?
Il semble fondé sur une interprétation curieusement dénaturée de la Constitution canadienne depuis l'introduction de la Charte canadienne des droits et libertés et selon laquelle le principal et unique objectif de la Constitution est de limiter l'intervention gouvernementale dans la vie des citoyens. Le résultat de cette interprétation serait que la vie privée, les libertés civiles et l'application régulière de la loi, ainsi que la suprématie judiciaire, doivent l'emporter sur toutes les autres considérations. J'ai déjà publié des articles sur les politiques constitutionnelles du Canada, et je dirais que le point de vue conventionnel est celui d'une Constitution qui en fait permet au gouvernement de faire le bien dans la vie des gens, du moins lorsqu'il est question de ses obligations fondamentales comme la paix, l'ordre et le bon gouvernement.
Parfois, cela signifie qu'il faut trouver un juste équilibre entre des questions liées à l'application régulière de la loi et celles liées à la sécurité publique et à l'intérêt national. Les informateurs confidentiels sont peut-être une aberration pour les avocats, mais certaines dimensions du renseignement de sécurité seraient difficiles à réaliser sans le recours à une telle confidentialité et sans la confiance que nous témoignent nos alliés.
Encore une fois, la section qui suit pourra être lue pour le compte rendu.
[Voir l'annexe]
Nos alliés comme le Royaume-Uni, la France, l'Allemagne et l'Espagne ont appris à vivre avec le terrorisme depuis des décennies. Par conséquent, leurs tribunaux et leur société ont acquis une plus grande ouverture à l'égard de la protection de la sécurité publique. Benjamin Franklin a dit que celui qui sacrifie la liberté pour la sécurité ne mérite ni l'un ni l'autre. Mais qu'en est-il de celui qui sacrifie la sécurité pour la liberté? La liberté et la sécurité n'ont rien d'un jeu à somme nulle. Au contraire, ils sont complémentaires. On ne peut pas apprécier l'un sans l'autre. Cependant, vous ne pouvez pas profiter de vos libertés si vous êtes mort.
Le SCRS est le pivot de la sécurité publique. Les critiques qui sont préoccupés par les modifications apportées au projet de loi C-44 sont aussi ceux qui sont les premiers à se plaindre en demandant pourquoi le SCRS n'en a pas fait plus, lorsqu'un voyageur extrémiste revient au Canada et commet un méfait au pays. En général, ils ne tiennent pas compte de la possibilité d'assurer la sécurité des gens, malgré eux, ni du fait que la mise en commun de renseignements peut permettre une intervention à l'étranger afin d'empêcher certaines personnes de se faire du tort à elles-mêmes, au Canada, aux Canadiens ou aux intérêts du Canada. J'apprécie ma liberté, mais j'apprécie davantage ma vie et la vie de mes compatriotes.
De même, en ce qui concerne les modifications proposées à la Loi renforçant la citoyenneté canadienne, je crois que la possible révocation de la citoyenneté est un important élément dissuasif au moment d'empêcher diverses personnes de jeter le discrédit sur leur citoyenneté. Après tout, ceux qui détiennent la double citoyenneté ont choisi consciemment de diviser leur loyauté. En tant que citoyen à double nationalité naturalisé, je le sais bien. Ceux qui veulent se prémunir contre la possibilité rendue possible par cette modification ont l'option de renoncer à leur deuxième citoyenneté. Certains pays ne permettent pas la renonciation à la citoyenneté, alors il reviendra aux citoyens touchés de se comporter d'une façon à ne pas enfreindre l'amendement proposé. Les systèmes administratifs et judiciaires canadiens feraient nécessairement très attention au cas où la révocation de la citoyenneté canadienne exposerait la personne visée à un risque démontrable pour sa vie. C'est donc dire que la révocation a une composante judiciaire et que le processus est assorti d'un mécanisme d'examen intégré.
Il faut rétablir l'équilibre actuel. Le juge Mosley a estimé que c'était à lui de limiter certains types d'activités de mise en commun de renseignement, mais il l'a fait d'une façon un peu inhabituelle. Souvent, les juges donnent au Parlement le temps de remédier à ces types de problème. Le juge Mosley n'a donné aucune occasion de ce genre au Parlement. Selon moi, c'est une situation assez déconcertante. Même si le juge Mosley avait peut-être le droit de rendre la décision qu'il a rendue, compte tenu des importantes répercussions de sa décision, il aurait dû respecter la pratique en place et accorder une certaine période afin qu'une solution législative puisse être appliquée.
Essentiellement, j'appuie les modifications actuelles. Cependant, le projet de loi C-44 commet un péché d'omission, selon moi. Une bonne partie des importants pouvoirs liés au renseignement de sécurité devrait être compensée par une solide responsabilité parlementaire, à ne pas confondre avec de la surveillance. Mon modèle préféré est celui de la Belgique, où deux organismes permanents dirigés par des juges ont le pouvoir de vérifier non seulement des enquêtes passées, mais des enquêtes en cours en temps réel. Les organismes fournissent leurs constatations directement à un groupe sélectionné de parlementaires bénéficiant des autorisations de sécurité appropriées.
Parfait.
Merci beaucoup. Nous vous remercions de votre exposé et du fait d'avoir conclu rapidement. Nous allons passer à la série de questions.
Nous allons commencer par M. Carmichael, qui a vraiment été lésé la dernière fois. Vous avez sept minutes, monsieur, alors c'est vous qui obtenez le boni.
Bienvenue aux témoins.
Monsieur Davies, j'aimerais commencer par vous si vous me le permettez.
Aujourd'hui, je crois que tout le monde s'entend pour dire que le terrorisme est une menace mondiale. Et les événements tragiques du mois dernier nous ont très certainement montré que le Canada n'est pas à l'abri de cette menace, que les actes tirent leur origine de l'étranger ou du pays.
Pouvez-vous nous dire pourquoi il est important que le SCRS ait le mandat clair de réaliser des enquêtes à l'étranger?
Je crois que, de nos jours, il faut reconnaître que nous parlons de plus en plus de la question des combattants étrangers. Je crois que nous savons tous qu'ils représentent une menace croissante pour notre pays. Il y a des éléments de preuve selon lesquels, même s'ils ne posent pas un grand nombre d'actes lorsqu'ils reviennent dans leur pays d'origine, ceux qu'ils posent sont de plus en plus problématiques et de plus en plus graves.
Je crois qu'une des choses qu'on a oubliées dans notre discussion sur les combattants étrangers, c'est que, en permettant à ces combattants étrangers d'aller à l'étranger, nous continuons d'alimenter des groupes comme l'État islamique. Au moins dans certaines situations, il semble de plus en plus avoir recours à des combattants étrangers pour poursuivre ses opérations et appliquer ses tactiques. Je parle d'un enjeu précis, mais je crois qu'il faut reconnaître la capacité du SCRS des deux points de vue. Ce n'est pas simplement qu'ils reviennent ici qui est problématique, c'est aussi que nous fournissons un approvisionnement à ces groupes, et je crois que nous devrions probablement envisager sérieusement de leur couper cet approvisionnement.
Permettez-moi de lire un paragraphe que j'ai sauté et qui, selon moi, répond à votre question.
J'approuve une intervention étatique limitée, mais je crois aussi à la paix, à l'ordre et au bon gouvernement. Alors lorsque je suis confronté au choix rare et difficile entre les libertés individuelles, les libertés civiques et la vie privée d'un côté, et la sécurité publique et la sécurité collective, de l'autre, le gouvernement fédéral a selon moi le mandat et l'obligation constitutionnels de pencher du côté de la sécurité publique et collective, y compris dans le cadre des activités liées au renseignement étranger. Le public canadien donne le bénéfice du doute au Parlement et aux organismes de sécurité qui relèvent de l'exécutif politique canadien.
Je dirais même que, compte tenu de la situation mondiale actuelle en matière de sécurité, y compris le défi lié aux voyageurs extrémistes, le gouvernement fédéral a une obligation à l'égard des Canadiens, soit d'adopter précisément le genre d'amendement que le projet de loi C-44 propose. Ces amendements sont vraiment dans l'intérêt du Canada et des Canadiens. Sur le plan tactique, opérationnel, stratégique et budgétaire, c'est la façon de compenser les limites auxquelles est confronté le SCRS lorsque vient le temps de recueillir des renseignements humains à l'étranger.
Compte tenu de la situation mondiale actuelle touchant la sécurité, il est crucial de permettre au SCRS de procéder à la mise en commun de renseignements de sécurité et de renseignements humains étrangers et d'avoir les capacités de le faire de façon à ce que le gouvernement du Canada puisse assumer ses responsabilités.
Merci beaucoup.
Bienvenue, monsieur Roach.
J'aimerais revenir sur quelque chose. Il est important d'apporter des précisions à la Loi sur le SCRS concernant le pouvoir explicite du service de réaliser des activités à l'étranger et à l'extérieur du Canada. Comment ces modifications se comparent-elles aux lois régissant les organismes de sécurité des nations alliées? C'est ma première question.
De plus, des mandats judiciaires sont-ils requis dans les autres États occidentaux? C'est un sujet dont on a parlé rapidement aujourd'hui. De plus, sont-ils assujettis à une autorisation judiciaire d'un niveau aussi élevé?
En tout cas, ce n'est pas le cas au Royaume-Uni, où il y a une autorisation ministérielle, ce qui est très semblable à la situation du SCTS. Aux États-Unis, la Foreign Intelligence Surveillance Court octroie des mandats. Je crois qu'il y a certains exemples de mandat judiciaire, et certains autres, de mandat ministériel.
Dans le projet de loi C-44, on a décidé d'opter pour le modèle judiciaire. C'est probablement un choix judicieux.
Certaines des préoccupations dont on nous a fait part concernent les capacités de la Cour fédérale d'octroyer des mandats dans le champ d'application des lois canadiennes pertinentes, au moment d'octroyer un mandat autorisant le SCRS à réaliser certaines activités d'enquête relativement à la menace à la sécurité du Canada à l'extérieur du pays. Certains se demandent pourquoi il ne serait pas plus approprié d'obtenir un mandat de l'État où l'activité a lieu, et on en a eu certains bons exemples aujourd'hui.
Pouvez-vous nous dire pourquoi c'est important? Certains de ces pays n'ont peut-être pas un système judiciaire vers lequel on peut se tourner pour obtenir un mandat. De plus, il y a la nature transnationale de ces enquêtes.
Comme M. Forcese l'a dit, et comme nous l'avons fait valoir dans notre article conjoint dans le National Post, le Parlement admet volontiers que certains de ces mandats peuvent violer le droit étranger. Selon moi, l'une des solutions doit, en fait, être plus politique et ministérielle que judiciaire. Évidemment, les tribunaux devront s'attaquer à ce problème, mais je suis d'accord avec M. Forcese, au sens où, selon moi aussi, nous avons besoin d'une certaine surveillance ministérielle.
Bien sûr, dans notre milieu de la sécurité — et cela fait partie du problème général en matière de responsabilisation — il est tout à fait sensé d'opter pour une approche pangouvernementale pour gérer les menaces à notre sécurité. Le problème, c'est que, trop souvent, nous travaillons en milieu cloisonné. L'une de mes préoccupations, c'est qu'on pourra accorder aux termes du projet de loi C-44 un mandat dont devraient être informés non seulement le ministre de la Sécurité publique, mais aussi ses collègues du Cabinet qui représentent les Affaires étrangères et la Défense. Je ne crois pas qu'il est nécessaire pour le SCRS de pouvoir agir à l'extérieur du Canada, mais je crois que les risques politiques connexes sont importants, et c'est pourquoi je crois que le projet de loi C-44 devrait être amélioré par l'ajout d'une forme ou une autre d'avis ministériel.
Il convient de souligner que le CSARS, dans son dernier rapport, pour la période 2013-2014, a soulevé des préoccupations selon lesquelles le SCRS n'informe pas toujours le ministre. Je conviens que, dans un régime parlementaire, le ministre responsable doit être informé, mais je crois que, depuis le 11 septembre, nous avons adopté une approche pangouvernementale en matière de sécurité et, au bout du compte, la responsabilité doit revenir au premier ministre.
C'est l'une des raisons pour lesquelles, après beaucoup de réflexions et de délibérations, la Commission sur le vol d'Air India n'a pas recommandé ce qui est prévu dans le projet de loi C-44, soit un privilège pour le SCRS, mais plutôt un privilège pour le conseiller national pour la sécurité du premier ministre, qui, selon la commission, était le mieux placé pour trancher entre les deux options, celle de promettre la confidentialité pour obtenir le renseignement immédiatement — et ce sera parfois la bonne décision à prendre — ou de ne pas promettre la confidentialité parce que nous voulons pouvoir intenter des poursuites par la suite. Ce sont des décisions très difficiles à prendre. Il n'y a pas de solution universelle.
Ce qui me préoccupe au sujet du projet de loi C-44, c'est que cela pourrait permettre au SCRS de prendre des décisions tout à fait raisonnables à la première étape d'une enquête de contre-terrorisme, qui pourraient en fait avoir des répercussions par la suite et nous empêcher d'intenter des poursuites efficacement contre des combattants terroristes étrangers extrémistes plus tard.
Merci, monsieur Roach. Votre temps est écoulé, monsieur Carmichael.
Monsieur Scott, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Roach, d'être là.
J'aimerais poursuivre la conversation que vous venez d'avoir avec M. Carmichael, afin que tous ceux qui nous écoutent comprennent bien la situation. L'enjeu, si j'ai bien compris, c'est que, dans le milieu du renseignement, on ne retrouve pas les mêmes considérations générales ni les incitatifs qui pousseraient les intervenants à faire preuve de prudence lorsqu'ils font des promesses à leurs sources et à réfléchir aux conséquences de celles-ci sur les poursuites ultérieures.
Elle est là, la vraie différence, n'est-ce pas?
C'est exact, et c'est un peu ce qu'on a vu dans le cas d'Air India. Cependant, la Commission sur le vol d'Air India a aussi examiné la relation actuelle entre la GRC et le SCRS et constaté qu'il y avait encore des problèmes.
Encore une fois, je ne dis pas que c'est directement la faute à l'une de ces deux organisations, mais ce sont deux organisations qui ont des mandats très différents, des mandats qui sont parfois contradictoires.
Y a-t-il une façon de dissiper cette préoccupation?
C'est vrai, la cour a dit qu'il n'existe pas, actuellement, dans la common law, une immunité générique comme on en retrouve une maintenant dans le projet de loi C-44.
Avez-vous l'impression que, peut-être, les tribunaux appréciaient plus ou moins l'immunité relative qui était déterminée au cas par cas? Selon vous, devrait-on garder une telle immunité?
Oui. C'est tout à fait logique d'accorder une immunité au cas par cas, c'est sûr, et le SCRS vous dira que cette mesure nous permet de garantir de façon absolue à toutes nos sources humaines que nous ne fournirons jamais de renseignements pouvant les identifier. Je dois cependant dire que ce n'est pas exact en droit, parce que l'exception relative à la démonstration de l'innocence de l'accusé s'applique aussi aux personnes qui deviennent des témoins principaux ou des agents durant une enquête de contre-terrorisme.
Compte tenu de l'étendue des infractions de terrorisme, il se peut très bien que les sources du SCRS finissent par perdre cette immunité. Selon moi, au bout du compte, c'est une question épineuse. Les absolus ne sont pas de mise. C'est pourquoi je préfère une décision judiciaire au cas par cas, que l'on peut ensuite adapter.
Est-il vrai que, actuellement, aux termes de l'immunité générique, l'exception relative à la démonstration d'innocence s'appliquerait de toute façon? Qu'il s'agisse d'une immunité accordée au cas par cas ou d'une immunité plus générale?
Pour être juste à l'égard de la façon dont le gouvernement voit cette situation, je présume que ce n'est pas seulement... Il est parfois plus important d'obtenir un renseignement que d'intenter des poursuites. Et, bien sûr, je parle d'un point de vue très opérationnel. D'un point de vue plus général, je suppose que nous pourrions dire que la décision qui est prise dans le projet de loi et dont nous devons avoir conscience, c'est qu'il est peut-être plus important de prévenir un mal que d'intenter des poursuites.
Si le gouvernement présentait les choses ainsi, au moins, nous serions conscients du compromis. Êtes-vous d'accord?
Oui, mais je dois revenir à ce que j'ai dit au début. Je le pense vraiment, et je l'ai écrit, et pas seulement pour un auditoire au pays, mais à l'échelle internationale: le Parlement avait une longueur d'avance relativement à toute la question des combattants terroristes étrangers lorsqu'il a adopté les quatre nouvelles infractions sur le terrorisme en 2013.
J'appuie ces infractions, et la meilleure façon de régler le problème du terrorisme étranger... Bien sûr, la prévention, c'est bien, mais il faut aussi miser sur la dénonciation et la neutralisation.
Je sais que ce n'est pas l'intention du gouvernement, mais je me demande si l'une des conséquences imprévues du projet de loi pourrait être de faire en sorte qu'il sera plus difficile plutôt que plus facile d'intenter des poursuites liées à ces très récentes et très utiles infractions.
Évidemment, nous n'avons pas encore obtenu toute l'information au sujet du drame de Saint-Jean-sur-Richelieu, mais nous devons nous poser la question suivante: pourquoi y avait-il suffisamment de renseignements pour retirer le passeport de cette personne, mais pas assez pour l'accuser aux termes de l'une des nombreuses infractions de terrorisme prévues dans notre Code criminel?
J'aimerais passer au thème de la constitutionnalité. Vous avez mentionné le caractère inconstitutionnel de ce qui a été exclu à tort, parce que les dispositions en question limitent le droit d'exiger la divulgation de l'identité d'une source humaine, au moyen d'une décision judiciaire, en cas de poursuites ou dans tout autre contexte dans lequel cette source pourrait mettre en danger l'intérêt des citoyens, qu'il s'agisse d'un ordre d'expulsion ou d'un certificat de sécurité, etc.
Je sais très bien que vous nous avez dit qu'il s'agit d'un problème constitutionnel, malgré le fait, je dois le dire, que le ministre nous ait dit il y a deux jours qu'il s'agissait de la loi la plus constitutionnelle jamais présentée par le gouvernement. Alors je comprends.
Mais il y a autre chose. En ce qui concerne les demandes de divulgation de l'identité d'une source lorsque l'information est nécessaire pour que la personne accusée puisse se défendre, ou, ce qui est un peu plus nébuleux, lorsqu'on dépose une ordonnance selon laquelle une personne n'est pas une source humaine ou que l'identité de... eh bien, en tout cas, l'autre disposition. Dans chaque cas, on tient une audience à huis clos, et le demandeur et son avocat n'y participent pas, sauf si le juge en ordonne autrement.
Je suis très préoccupé par cette situation, tout comme la Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada d'ailleurs. Je me demande si cette situation figure parmi vos inquiétudes touchant la constitutionnalité du projet de loi. Êtes-vous d'accord avec tout ça?
En fait, j'ai étudié la jurisprudence à ce sujet, et je dois dire que je suis un peu moins préoccupé que la Fédération des ordres professionnels de juristes. J'espère qu'ils ne me retireront pas mon permis de pratique du droit.
En fait, la jurisprudence de la Cour suprême à ce sujet laisse entendre que, au premier palier, l'audience est tenue à huis clos, ce qui signifie que le public et l'autre partie n'y assistent pas. On procède ainsi parce que l'immunité est considérée comme étant un privilège absolu ou quasi absolu.
À bien y penser, je crois que le paragraphe 18.1(7) proposé auquel vous faites référence serait problématique s'il ne comportait pas l'expression « sauf si le juge en ordonne autrement ». Je crois que cela donne une marge de manoeuvre suffisante au juge pour qu'il respecte les directives de la Cour suprême, selon lesquelles des audiences à huis clos en l'absence du demandeur sont parfois nécessaires afin de préserver l'immunité.
Une fois que l'identité de la personne est connue, l'identité de cette personne est...
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence aujourd'hui et de leurs interventions.
Monsieur Roach, je vais commencer par vous. Une des premières choses que vous avez dites, c'est que le projet de loi proposé accorde de nouveaux pouvoirs. Cependant, le ministre et d'autres témoins nous ont dit qu'il ne contient aucune nouvelle disposition. Pouvez-vous nous expliquer davantage cette apparente contradiction?
La question de savoir si le SCRS a des pouvoirs extraterritoriaux est une question qui a déjà fait l'objet d'une procédure judiciaire avant le projet de loi C-44. Dans une de ses décisions, le juge Blanchard a dit que le service n'avait pas de pouvoirs extraterritoriaux. Le juge Mosley — et, ici, mon interprétation est un peu différente de celle de M. Leuprecht — a dit que, en fait, le service avait de tels pouvoirs. Il a seulement retiré ses propos lorsqu'il a découvert que le service utilisait le Groupe des cinq pour mener des enquêtes extraterritoriales qu'il l'avait autorisé à mener.
Lorsque je parle de « nouveaux pouvoirs », je veux dire qu'il y a là un litige juridique. Je crois savoir qu'on a déposé une requête d'autorisation d'appel devant la Cour suprême du Canada relativement à la décision du juge Mosley. C'est possible que la Cour suprême du Canada instruira l'affaire, mais nous ne le savons pas actuellement.
Lorsque je parle de « nouveaux pouvoirs », je parle de règles de droit immuables, de nouveaux pouvoirs explicites.
Mais, vous avez raison, le procureur général du Canada a fait valoir que, dans la Loi sur le SCRS actuelle, il y a des pouvoirs permettant au service de réaliser des enquêtes à l'extérieur du Canada.
Exactement, et le projet de loi actuel ne fait que préciser cette question. En général, êtes-vous d'accord avec cette décision?
Vous avez aussi mentionné qu'il pourrait y avoir une confidentialité implicite. Est-ce quelque chose que nous pourrions accorder à quelqu'un par inadvertance ou de façon involontaire?
Pouvez-vous nous expliquer de quelle façon nous pourrions régler ce problème ou nous dire pourquoi vous croyez que c'est le cas?
Bien sûr.
En ce qui concerne l'article 2 du projet de loi, je peux comprendre pourquoi on a parlé de « promesse d'anonymat ». On utilise cette notion dans la jurisprudence. Cependant, dans l'arrêt R. c. Named Person B de 2013, la Cour suprême du Canada a dit qu'il peut aussi s'agir d'une promesse d'anonymat implicite. Mon inquiétude, c'est que, si vous allez de l'avant et accordez une immunité au SCRS, il faudrait peut-être revoir ce libellé et parler d'une promesse d'anonymat explicite.
Mon souci, c'est que lorsque les agents du SCRS parlent à quelqu'un, ils le font presque toujours de façon confidentielle. Je crains que cette immunité s'appliquera à quasiment toutes les sources humaines du SCRS. Je crois qu'il faut offrir une orientation législative pour la préciser, en raison des conséquences possibles en aval de cette immunité sur les procédures pénales.
J'ajouterai qu'il serait probablement sage, si le projet de loi est adopté, d'exiger un genre d'examen ou de prévoir une surveillance ministérielle relativement à la façon dont cette immunité est utilisée. Parce que, comme je l'ai dit, à tort ou à raison, après quatre ans de délibérations, la Commission sur le vol d'Air India, qui a très certainement examiné cette proposition, l'a rejetée après mûre réflexion parce qu'elle craignait que cela puisse nuire aux poursuites contre les terroristes.
C'est bien. Merci.
Monsieur Davies, j'ai une question pour vous. Pourquoi croyez-vous qu'il est important d'apporter des précisions à la Loi sur le SCRS pour donner explicitement au service le pouvoir d'enquêter à l'extérieur du Canada?
Selon moi, la zone grise dans laquelle il se trouve actuellement empêche le service de faire le genre de choses qu'il devrait faire pour nous en ce qui concerne la collecte d'information. Je crois que cette situation limite ce qu'il estime pouvoir faire. Il travaille avec une main derrière le dos. Je crois que la précision est requise afin qu'il sache qu'il peut recueillir de l'information en toute sécurité.
Bien. Merci.
Monsieur Leuprecht, vous avez dit dans vos interventions que, selon vous, les droits et libertés personnels doivent céder le pas aux questions de sécurité nationale. Pouvez-vous nous dire rapidement dans quelle mesure vous en êtes convaincu?
Ce que j'essayais de dire précisément, c'est que je suis préoccupé par le fait que, dans des situations difficiles, nous avons tendance, au Canada, à donner préséance aux libertés individuelles, aux libertés civiques et à la protection des renseignements personnels plutôt qu'à la sécurité publique ou à la sécurité de la société canadienne dans son ensemble.
À mon avis, certains de nos alliés ont trouvé ce que j'appellerais un équilibre un peu plus mature, parce qu'ils sont aux prises avec le phénomène du terrorisme depuis beaucoup plus longtemps que nous. Il faut reconnaître que le gouvernement a certaines obligations collectives. En outre, compte tenu de la nature de l'environnement de sécurité actuel, lorsque nous sommes forcés de choisir entre les deux, je préfère pencher du côté de la paix, de l'ordre et du bon gouvernement, plutôt que de choisir nécessairement de protéger les droits et privilèges civiques individuels, si cela a pour effet de mettre en danger la vie, la liberté, l'égalité et la justice de tous les Canadiens et de la société canadienne dans son ensemble.
Le projet de loi précise que, lorsque le SCRS ou ses agents travaillent à l'étranger, ils doivent le faire en respectant le droit canadien. Croyez-vous qu'il s'agit d'un équilibre approprié?
Oui, en effet. J'enseigne au Collège militaire royal, et c'est dans cette optique que les Forces canadiennes sont déployées. Je crois que nous avons de nombreux exemples, pas seulement au sein des Forces canadiennes, mais, au sein d'autres ministères du gouvernement, qui réalisent des opérations à l'étranger, et qui le font en respectant le cadre juridique et constitutionnel que le Canada a donné à ces organisations et qu'il attend d'eux.
Merci, monsieur le président.
J'aimerais commencer par vous, monsieur Leuprecht. À la fin de votre déclaration, vous avez indiqué que — et je vous cite librement — la principale faiblesse ou la plus grande erreur touchant la responsabilisation en est une d'omission — mais pas du point de vue de la surveillance —, et vous avez dit que le modèle belge était la norme de référence. Pouvez-vous nous parler un peu plus du modèle belge et nous souligner les différences avec notre modèle et ce qu'il faudrait faire pour mettre en place le modèle qui, selon vous, est optimal?
Le modèle belge a été mis en place à la suite de l'échec catastrophique dans le dossier Dutroux. Je dirais que l'une des raisons pour lesquelles il faut tenir compte de la responsabilité, c'est précisément dans le but d'éviter tout risque d'échec catastrophique de notre système de sécurité. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais je serais heureux de fournir les coordonnées du juge principal qui dirige l'organisation en Belgique et que je connais très bien. L'élément clé au sujet de l'organisation belge, c'est qu'on assure la responsabilité grâce à un mécanisme payé par le Parlement, qui prévoit une reddition de comptes directe au Parlement et non à l'exécutif politique. L'organisation emploie environ 100 personnes. L'élément principal de ce cadre de responsabilisation, c'est qu'il englobe non seulement les dossiers clos, mais aussi les dossiers des enquêtes actives réalisées dans le cadre de sécurité belge. Il s'agit donc non pas uniquement d'une responsabilisation après coup, mais d'une responsabilisation durant le processus d'enquête lui-même.
Le défi, actuellement, au Canada, selon moi, c'est qu'on procède à des examens annuels et on applique une responsabilité après coup. Cependant, il n'y a pas de mécanisme de responsabilisation continu aussi efficace qu'il pourrait l'être. Notre mécanisme prévoit la reddition de comptes à l'exécutif politique plutôt qu'au Parlement. Le changement principal qui serait requis serait d'accorder des autorisations de sécurité à des parlementaires afin qu'ils puissent avoir accès à l'information fournie, et il s'agirait d'une mesure importante pour le Parlement du Canada.
Je crois que le modèle belge est peut-être le modèle le plus efficace en ce qui a trait à la responsabilité, du point de vue tant de la responsabilité opérationnelle que doivent assumer les organisations en question que de la façon dont elles relèvent du pouvoir législatif.
Merci.
Monsieur Davies — et je demanderais peut-être aussi à M. Roach de mettre son grain de sel — hier, le comité a reçu une lettre du commissaire à la protection de la vie privée, qui se disait préoccupé par certains enjeux liés à la protection des renseignements personnels et par les moyens utilisés pour recueillir des renseignements liés aux dispositions sur l'extraterritorialité du projet de loi. Il a aussi parlé précisément du caractère adéquat des mesures de protection actuelles pour prévenir de telles violations, y compris le risque de torture.
M. Davies et M. Roach peuvent-ils formuler des commentaires sur les préoccupations que le commissaire à la protection de la vie privée a formulées devant nous hier?
J'invoque le Règlement. Durant notre dernière réunion, nous avons discuté du fait que le commissaire à la protection de la vie privée nous a fait part de certains points de vue, mais qu'il a refusé de comparaître pour répondre à des questions connexes. Je ne sais pas si nous avons déterminé si nous pouvons parler de ses points de vue malgré le fait qu'il n'a pas comparu. Pouvez-vous préciser ce qu'il en est?
Je me rappelle que le commissaire à la protection de la vie privée n'a pas comparu.
Monsieur le greffier, a-t-il été invité?
Le commissaire à la protection de la vie privée n'a pas été invité à comparaître devant le comité dans le cadre de son étude du projet de loi C-44.
Par conséquent, je dirais qu'il est évident que le commissaire à la protection de la vie privée n'a pas été invité à comparaître à titre de témoin avant de... Cependant, il nous a fait parvenir une lettre, et nous l'avons reçue, mais nous n'avons pas été autorisés à l'accepter à titre de témoignage. La lettre a seulement été reçue par le comité. Il faut que le comité propose une motion pour recevoir la lettre en tant que témoignage. Sinon, elle sera uniquement utilisée à l'interne par le comité.
Une objection a été soulevée. C'est maintenant au comité de décider s'il veut... La question est recevable sauf si une objection est soulevée. S'il y a une objection, elle peut être maintenue selon la recevabilité de la question.
Nous sommes toujours heureux de recevoir des renseignements, mais cela signifie-t-il que quiconque peut écrire une lettre au comité et que nous devons ensuite absolument en tenir compte? Selon moi, cela pourrait nous causer des problèmes.
Je vais lire un paragraphe qui s'applique à cette question, parce que la question reste ouverte. Voici ce qui est dit:
Il n'existe pas de règles précises régissant la nature des questions qui peuvent être posées à un témoin, en dehors des exigences générales en matière de pertinence à l'égard de l'objet de l'étude.
La question est pertinente, parce que la lettre a été adressée au comité et qu'elle porte sur le projet de loi C-44. C'est pertinent à notre étude, alors, pour cette raison précise, la question est admissible et acceptée si l'on s'en tient au paragraphe que je viens de citer.
Alors oui, votre question est appropriée.
Monsieur Roach, monsieur Davies, acceptez-vous de répondre à la question? Voulez-vous que je la répète? Êtes-vous prêt à répondre?
Rapidement, cela concerne le besoin de supervision parlementaire et d'accès parlementaire aux renseignements secrets. Évidemment, le résultat dans le cas du détenu afghan révèle qu'il y a là certains problèmes.
Bien. Merci beaucoup.
Le temps est maintenant écoulé.
J'ai une petite question d'ordre budgétaire dont j'aimerais saisir le comité. Cependant, je tiens à remercier chaleureusement les témoins au nom du comité et de ses membres et je leur demanderai de quitter la salle.
Chers collègues, j'ai une demande de budget qui vous a été envoyée.
[Protestation dans l'assistance]
J'invoque le Règlement, monsieur le président. Il s'agit d'une ingérence dans le processus parlementaire.
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