FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des pêches et des océans
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TÉMOIGNAGES
Le mercredi 20 février 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions la réglementation des pêches sur la côte Ouest...
Monsieur Donnelly, avez-vous levé la main?
Oui. Merci, monsieur le président.
J'allais juste poser une question sur un rappel au Règlement concernant la répartition égale du temps pour les témoins. Cela a-t-il été déterminé? S'est-on penché là-dessus? La première heure semble chargée, et la deuxième, légère.
Je crois que cela tenait surtout à la disponibilité des gens. Habituellement, nous essayons de bien répartir le temps, mais si des personnes sont disponibles maintenant plutôt qu'à la dernière heure, on leur réservera la première période. Je crois que la greffière essaie généralement de bien répartir le temps, quand c'est possible.
D'accord.
Juste pour la gouverne des membres du Comité, je sais qu'une invitation a été envoyée au ministre afin de l'inviter à venir nous parler de l'étude sur la longueur des bateaux. Il avait l'intention de venir le 25 février, mais il n'est pas libre. Nous tenterons de prévoir une autre date dès que possible. J'aimerais rappeler aux membres qu'il comparaîtra relativement au budget des dépenses le 18 mars, je crois.
Très bien. Poursuivons notre étude.
Nous accueillons des témoins ici, en personne, ainsi que par vidéoconférence.
Par vidéoconférence, nous entendrons Jim McIsaac. De plus, nous écouterons Aaron Hill, directeur général, ainsi que Greg Taylor, conseiller principal des pêches, de la Watershed Watch Salmon Society.
En personne, nous accueillons Richard Williams, directeur de recherche, du Conseil canadien des pêcheurs professionnels. Nous recevons Tasha Sutcliffe, vice-présidente, Programmes, d'Ecotrust Canada. Nous accueillons aussi Cynthia Bendickson, directrice exécutive, de Greenways Land Trust. Analisa Blake, gestionnaire de projet, Santé publique, de la Vancouver Island Health Authority, est présente.
Commençons par les exposés de nos témoins.
Monsieur McIsaac, vous êtes le premier, pour sept minutes ou moins. Je devrai être très strict par rapport au temps.
Monsieur le président, et mesdames et messieurs, je suis honoré d'être invité à vous parler aujourd'hui.
Ce sujet est d'une importance capitale pour l'avenir des pêches de la Colombie-Britannique et de notre côte. Si le gouvernement veut s'assurer que les retombées de nos pêches et des permis de pêche profitent aux pêcheurs des collectivités côtières, vous devez définir ces objectifs et financer le ministère à cette fin.
J'ai joué un rôle dans les pêches commerciales pendant plus de 40 ans, dont 25 ans à titre de pêcheur. En ce moment, je suis directeur exécutif d'une fondation qui s'intéresse aux pêches. Je préside le BC Commercial Fishing Caucus et je siège au conseil de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada. Je joue un rôle dans les processus du PGIP lié au hareng et au poisson de fond et j'assure le suivi de quelques autres processus. Je participe à de nombreux processus de ZPM, ainsi qu'à plusieurs processus de planification marine intégrée le long de notre côte, lesquels sont dirigés par les Premières Nations de la Colombie-Britannique et les gouvernements régionaux.
Fait intéressant, tous les plans marins intégrés approuvés sur notre côte réclament des pêches communautaires. Le MPO a quasiment délaissé le domaine de la planification marine intégrée en Colombie-Britannique. Mais nous en reparlerons une autre fois.
Contrairement à certains de mes collègues de la côte Est, je peux parler de l'histoire des pêches de la côte de la Colombie-Britannique. J'ai eu le privilège de pêcher du canal Portland jusqu'au détroit de Juan de Fuca, et du passage Knight jusqu'à la baie Rennell. J'ai passé du temps dans presque chaque collectivité située le long de notre côte. Il me coûte de vous dire que les liens communautaires avec l'industrie de la pêche sont en train de s'effriter, tout comme ceux des pêcheurs avec les permis.
La plupart des collectivités rurales le long de notre côte connaissent un déclin. La santé, l'éducation, la population, les revenus, la rétention des jeunes, les infrastructures, le nombre de navires, les nouveaux navires et les liens avec les pêches sont tous en déclin. Pourtant, ces collectivités veulent toutes renforcer le lien avec l'industrie. Pourquoi? Nous avons étudié cette question exacte. Pour dire les choses simplement, en plus des valeurs économiques tangibles, les pêches commerciales apportent des valeurs intangibles à nos collectivités côtières. Celles-ci forment le tissu culturel qui relie les collectivités aux écosystèmes, en s'appuyant sur les valeurs économiques.
Il y a deux ans, le ministre des Pêches a demandé au ministère d'entreprendre une étude semblable à la vôtre. Le ministère a rédigé une approche en deux étapes et il a commencé la première étape, la recherche documentaire, en juin dernier. Lorsque le Comité a adopté la motion en vue d'entreprendre cette étude, le ministre a demandé au ministère de cesser le travail. Le ministère a indiqué qu'il terminerait le volet documentaire à temps pour votre étude. J'espère que vous l'avez vu.
Il existe quelque 65 organisations sur les engins de pêche et les espèces, organisations syndicales, organisations régionales et organisations de producteurs dans le secteur des pêches de la Colombie-Britannique. Aucune ne représente une majorité de pêcheurs. Bon nombre de ces organisations sont contrôlées par des détenteurs de permis et de quotas, y compris des transformateurs, et non pas par des pêcheurs actifs. Comme pour les associations de producteurs et de transformateurs sur le territoire, les intérêts varient grandement.
J'aimerais vous parler de deux initiatives de recherche qui sont pertinentes pour votre étude. La première compare la pêche au hareng dans le Nord de la Colombie-Britannique à celle du Sud-Est de l'Alaska. Il est très intéressant, étant donné les écosystèmes relativement semblables, d'observer les systèmes socioéconomiques fort différents que nous avons créés. Dans le Nord de la Colombie-Britannique, aucune collectivité n'a d'économie de pêche; pourtant, dans le Sud-Est de l'Alaska, de multiples collectivités ont des économies de pêche vigoureuses.
J'aimerais vous signaler trois différences qui sont pertinentes pour votre étude. Premièrement, dans le Sud-Est de l'Alaska, il existe des objectifs sociaux et globaux clairs à l'appui d'une économie de pêche côtière qui sont harmonisés avec les objectifs de conservation. Deuxièmement, le système de prise de décisions et de gouvernance agit en alternance et est lié aux collectivités côtières. Troisièmement, on applique rigoureusement le droit d'accès aux gens qui travaillent sur les bateaux: si vous détenez un permis, vous êtes mieux de pêcher du poisson.
La deuxième initiative de recherche dont je voulais parler est le Réseau canadien de recherche sur la pêche. Il est axé sur une industrie nationale et sur la collaboration des universitaires et du gouvernement afin d'élaborer un cadre global d'évaluation des pêches durables. L'an dernier, le réseau a présenté un document important. Nous l'avons comparé avec chaque cadre de durabilité d'importance du monde, y compris celui pour la pêche durable du MPO, et nous avons rédigé une version complète.
La plupart des cadres pour la durabilité conçus avant 2012 portent maintenant le nom de pêches durables 1.0. Ils sont presque exclusivement axés sur la durabilité écologique — le cercle jaune dans le graphique que j'ai distribué. Aucun ne tient compte des dimensions humaines de la durabilité. Ce cadre des pêches durables 1.0 a servi de fondement à la certification du Marine Stewardship Council. Il a été décrié en 2012 pour avoir servi à homologuer des pêches qui employaient des travailleurs esclaves. L'important, c'est que les dimensions écologiques et humaines sont nécessaires pour assurer des pêches durables.
Au milieu de mon graphique, vous verrez une entreprise de pêche. Une telle entreprise comprend trois composantes de base — la connaissance, la technologie et l'accès légal des pêcheurs. Pour l'essentiel, l'accès légal est ce sur quoi porte votre étude. Il s'agit du principal outil du gouvernement pour la gestion des pêcheurs. Les gouvernements créent et délivrent des permis et des quotas, définissent des mesures de contrôle des intrants et des extrants, déterminent qui peuvent les utiliser et si on peut les vendre, les transférer, les échanger ou les louer. En réalité, les politiques gouvernementales — ou leur absence — encadrent le marché pour ce qui est des permis.
Nous avons des exemples de politiques qui empêchent le transfert, ce qui a pour effet de fixer la valeur du marché à zéro. Bien sûr, il existe des moyens créatifs pour contourner les politiques, comme vous l'avez vu avec la PIFPCAC et les accords de contrôle dans le Canada atlantique.
Si les pêches sont une ressource publique que l'on doit gérer pour le bien public, y a-t-il une obligation pour les gouvernements de créer un marché qui permet aux investisseurs de tirer profit de l'échange de permis? Certains diraient que oui. Sous le couvert de la certitude et de la stabilité, il existe le droit de profiter de l'échange de permis. Toutefois, lors du Sommet mondial des océans de 2017, Rob Walton a dit que les sociétés n'ont pas le droit d'exister; elles doivent gagner ce droit. De même, le profit n'est pas un droit; il doit être gagné.
Comme un pêcheur l'a dit au Comité, il ne pouvait pas faire la grasse matinée et pêcher ses poissons. Pourquoi un détenteur de permis, sans bateau, engin, équipe, surveillance électronique ou connaissance au sujet des poissons ou des marées aurait-il le droit de réaliser des profits s'il ne pêche pas? Ni les investisseurs, ni les transformateurs, ni les pêcheurs ne devraient avoir le droit de tirer des profits d'une ressource publique. Ils devraient le gagner.
Ma deuxième diapositive montre l'augmentation de la valeur des permis et des quotas, fixée à 2,3 milliards de dollars au début de l'an dernier. Cette évaluation croissante tranche nettement avec la diminution des revenus des pêcheurs. Pourquoi? Pour le dire simplement, les retombées de l'industrie de la pêche ont été séparées des risques. On enlève la crème — plus d'un tiers de la valeur au débarquement, soit 130 millions de dollars l'an dernier — qui coiffe les droits de permis et de quotas. Plus de 1 milliard de dollars ont été perdus par les pêcheurs des collectivités côtières au cours des 10 dernières années.
C'est pourquoi les pêcheurs n'ont pas d'argent pour construire de nouveaux bateaux. C'est pourquoi nos collectivités accusent un déclin. Cette situation a aggravé le conflit du gouvernement avec les Premières Nations situées le long de notre côte. Si le gouvernement veut s'assurer que les retombées des permis de pêche sont versées aux pêcheurs et aux collectivités côtières, il est impératif que vous définissiez clairement ces objectifs, financiez le ministère pour ce faire et exigiez des rapports d'étape annuels sur ces objectifs. Entretemps, appuyez la demande d'une norme minimale: un accord retombées-risques partagés pour toutes les pêches où des permis et des quotas sont loués.
Pour terminer, les fournisseurs, les transformateurs et les distributeurs de poisson ont accès à des marchés nationaux qui sont avides de poissons. Les gouvernements ont ouvert des marchés internationaux qui sont tout aussi avides. Compte tenu de cet accès sans précédent, nul besoin de dépouiller les pêcheurs locaux et les collectivités côtières. Corrigeons la situation, de sorte que les générations futures puissent profiter de nos ressources abondantes.
Merci.
Merci, monsieur McIsaac.
Passons maintenant à la Watershed Watch Salmon Society, aussi par vidéoconférence. Je ne sais pas si vous partagez votre temps ou si une personne souhaite prendre la parole.
Un grand merci au Comité de nous donner l'occasion de vous présenter un compte rendu sur cette question très importante.
La Watershed Watch Salmon Society est un organisme de bienfaisance de la région de la Colombie-Britannique, qui a été fondé il y a 20 ans. Nous nous portons à la défense de la conservation du saumon sauvage du Pacifique et de ses habitats. Depuis nos débuts, nous avons joué un rôle actif dans de nombreux aspects de la gestion des pêches du saumon du Pacifique, qui vont des certifications du Marine Stewardship Council à la participation à des comités de gestion formés de multiples intervenants.
Je suis le directeur général et je détiens une maîtrise en écologie. J'ai travaillé pendant plusieurs années comme observateur des pêches de saumon commercial et récréatif et j'ai siégé à de nombreuses tables de consultation sur la gestion des pêches relevant du gouvernement fédéral.
Mon collègue, Greg Taylor, est notre conseiller principal des pêches. Il est titulaire d'une maîtrise en gestion des ressources. Il a été vice-président en gestion de la pêche à Ocean Fisheries et a dirigé plusieurs organisations de pêche commerciale. Il représente le Comité de conservation de la ressource maritime du Pacifique dans les comités chargés de la planification intégrée de la pêche au saumon du MPO. Il est président du Groupe d'experts sur la surveillance et la conformité des captures dans la région du Pacifique, lequel regroupe des intervenants multiples, en plus d'être PDG de Talok Fisheries, entreprise de pêche commerciale appartenant à des Premières Nations situées ici, en Colombie-Britannique.
Il est notre expert dans ce dossier et il présentera donc le reste de l'exposé.
Merci, Jim. Je crois que nous venons d'une époque semblable dans le secteur des pêches de la Colombie-Britannique.
La Watershed Watch Salmon Society a défendu fermement l'introduction des parts des prises et des quotas individuels transférables dans les pêches commerciales de la Colombie-Britannique, car ils permettent de corriger les difficultés suivantes en matière de conservation et de gouvernance auxquelles le secteur commercial faisait face avant l'introduction des quotas individuels transférables, QIT. À l'époque, les flottes n'arrivaient pas à pêcher dans les limites du total des prises admissibles pour l'ensemble de la flotte. On encourageait les fausses déclarations sur les registres et les transactions de vente, et il y avait des lacunes au chapitre de la surveillance et de la conformité des pêches. Les flottes étaient davantage motivées par la course au poisson que par l'établissement d'une pêche bien gérée et durable sur les plans économique et écologique. Les mesures d'évaluation et de surveillance des stocks sont inadéquates. Il n'y a pas de mécanisme permettant de transférer les parts des prises entre la flotte commerciale et les Premières Nations, et il est difficile de contrôler la puissance de pêche de la flotte dans des situations où les gestionnaires voient de plus faibles attributions ou totaux des prises admissibles.
Les programmes des quotas individuels transférables et des parts des prises ont réussi à régler bon nombre des problèmes déjà mentionnés dans de nombreuses pêches de la Colombie-Britannique, parce qu'ils règlent une bonne partie des problèmes bien connus associés à la pêche à accès libre. Ils appliquaient et attribuaient des droits aux pêches. Ils présentaient des incitatifs pour que les flottes investissent dans des solutions coopératives de façon à régler les difficultés liées à l'évaluation des stocks et à la surveillance des pêches. Ils exigent des mesures de surveillance et de contrôle rigoureuses payées par l'industrie, et celles-ci ont permis une gouvernance collaborative efficace à l'égard des pêches.
Les QIT présentent des lacunes. Il ne fait aucun doute qu'on les a bien cernées; les QIT ne sont donc assurément pas parfaits. Ils ne représentent pas l'unique solution aux problèmes définis précédemment. Les pêches autochtones et artisanales en Colombie-Britannique et dans le monde font souvent intervenir des stratégies efficaces pour le règlement de problèmes semblables. De plus, nous ne nions pas que les QIT créent des inégalités socioéconomiques. Nous croyons toutefois que les QIT et les parts des prises sont la meilleure option pour mettre sur pied une gouvernance efficace et encourager la gestion durable des pêches.
Le Département des pêches et de l'aquaculture des Nations unies, la FAO, soutient qu'une gouvernance efficace, assortie de fortes mesures de suivi, contrôle et surveillance, sont nécessaires pour faire en sorte que la demande de ressources ne surpasse pas la capacité biologique de cette ressource.
Il est essentiel d'encourager une gouvernance efficace et intégrée des pêches, tout comme des mesures de suivi, de contrôle et de surveillance au Canada, puisque le ministère des Pêches et des Océans n'a pas les ressources nécessaires pour gérer et surveiller efficacement les pêches de son propre chef. Peu importe les lacunes qui ont été découvertes dans l'évaluation des stocks, les mesures de gestion des pêches, de surveillance des stocks et de la conformité et d'application avant la mise en oeuvre des quotas individuels transférables et des parts des prises n'ont fait que s'aggraver. Pêches et Océans Canada a besoin de la coopération, des ressources et de la confiance que les Premières Nations, les pêcheurs commerciaux, les transformateurs et les pêcheurs à la ligne peuvent apporter pour régler ces problèmes.
Pour que cela soit efficace dans le contexte d'une ressource publique, la gouvernance doit être autoréglementée, avoir une capacité suffisante de tirer des rentes de ressources pour payer les activités d'évaluation des stocks et de surveillance et être transparente. Les QIT permettent de le faire.
L'histoire de la mise en oeuvre des QIT a été parsemée de controverse et de conflit. J'ai assisté aux premières réunions sur la création des QIT liés au flétan au début des années 1990 au nom du First Nations Fisheries Council de la Colombie-Britannique. Fait intéressant, le FCBC était opposé à l'introduction des QIT à l'époque. Au fil des consultations sur l'introduction des QIT liés au flétan, un modèle qui avait été observé dans le cadre de la mise en oeuvre de programmes semblables dans d'autres pêches s'est dessiné. Les gens étaient ou bien favorables ou bien défavorables. Suivant l'évolution des discussions, les positions se sont de plus en plus affermies, et les nuances se sont perdues. Les lacunes bien reconnues en matière de répartition des QIT n'ont pas été examinées dans un débat, qui est devenu de plus en plus amer.
Nous croyons qu'il est important de réagir à ces lacunes, mais pas au risque d'affaiblir les importants avantages liés à la conservation, à la gouvernance et aux mesures de suivi, de contrôle et de surveillance qui découlent de l'introduction des QIT et des parts des prises dans les pêches commerciales de la Colombie-Britannique.
Nous aimerions aussi avertir les législateurs que des intérêts puissants demeurent campés sur leurs positions de part et d'autre du débat. Il serait mal avisé de tomber dans le piège de croire que le débat ne concerne que les pêcheurs à petite échelle d'un côté et les intérêts de sociétés de l'autre. Le paysage politique est beaucoup plus fracturé et complexe.
Ce serait une grave erreur d'ouvrir le débat sans d'abord établir que les avantages de la conservation, de la gouvernance et de la surveillance que procure le régime actuel des QIT et des parts des prises doivent être inscrits dans tout changement futur, si le Canada veut rester fidèle à ses propres lignes directrices et aux lignes directrices internationales pour la gestion prudente des pêches.
En conclusion, Watershed Watch appuie tout dialogue qui peut déboucher sur l'augmentation de l'accès des jeunes pêcheurs, des retombées économiques et sociales pour les collectivités côtières et celles des Premières Nations et une meilleure possession et un plus grand contrôle de ressources communautaires ou coopératives. De fait, nous croyons que les changements démographiques et socioéconomiques actuels peuvent signifier que le moment est bien choisi pour encourager l'élargissement des possibilités de pêche commerciale et de transformation pour des petites collectivités côtières et collectivités des Premières Nations. Encore une fois — et c'est l'essentiel — nous ne pouvons le faire en sacrifiant les avantages de la conservation et de la gouvernance que les QIT et les parts des prises nous ont permis d'obtenir jusqu'à présent.
Merci.
Merci, monsieur Taylor et monsieur Hill.
Passons maintenant à M. Williams, pour sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Je comparais aujourd'hui à titre de directeur de recherche pour le Conseil canadien des pêcheurs professionnels, le conseil sectoriel national qui représente l'industrie de la pêche au Canada. Notre principal intérêt est le renouvellement de la main-d'oeuvre.
Nous avons soumis aux employés du Comité un rapport récent sur les graves difficultés démographiques auxquelles l'industrie est maintenant confrontée. Le rapport fournit des données probantes convaincantes à l'égard du dysfonctionnement de l'industrie et de l'échec des politiques dans la région du Pacifique: le manque de revenus des pêcheurs, de grandes difficultés au chapitre de l'offre de main-d'oeuvre et de faibles rendements économiques relativement à des pêches comparables dans le Canada atlantique et en Alaska.
Selon les témoignages présentés devant le Comité, il semble clair que l'on doit faire quelque chose pour compenser la répartition injuste des retombées économiques dans l'industrie de la pêche de la Colombie-Britannique et pour permettre à l'industrie de connaître une plus forte croissance. Des représentants du secteur des entreprises ont reconnu le besoin de modérer quelque peu les coûts de location de quotas, mais ils se sont fortement opposés à un changement plus important en Colombie-Britannique. Ils formulent trois affirmations de base: premièrement, outre la question du coût de la location, l'industrie de la Colombie-Britannique connaît un rendement optimal; autrement dit: le mieux est l'ennemi du bien; deuxièmement, l'intégration verticale et l'accès libre aux marchés des droits de pêche sont essentiels pour gérer la surcapacité et créer une industrie compétitive; et troisièmement, l'industrie de la pêche de la Colombie-Britannique est trop complexe pour soutenir un changement stratégique majeur sans que tout le monde soit exposé à des risques.
Le temps manque ici pour débattre du premier point, mais à l'aune de toute mesure normale de la réussite — l'emploi, les revenus, les recettes d'exportation — l'industrie de la Colombie-Britannique n'est pas sur la voie de la croissance que nous observons dans d'autres régions. Une partie des données probantes sont annexées au témoignage que j'ai fourni.
Par rapport au deuxième point, l'argument de l'intégration verticale est faible dans l'industrie de la pêche. En théorie, la possession de permis par les sociétés procure un accès sécuritaire à des matières brutes qui devraient stimuler les investissements dans la technologie de la pêche et de la transformation, la R-D et la création de marchés. Si la théorie fonctionnait en réalité, nous verrions des flottes d'entreprises dotées de nouveaux navires de pêche dotés de haute technologie, d'équipages bien rémunérés et bien formés, et beaucoup plus de transformation à valeur ajoutée en Colombie-Britannique. Plutôt, nous voyons des entreprises se décharger du risque financier sur des pêcheurs indépendants, déplacer les activités de transformation à l'étranger et louer leur permis plutôt que de pêcher. Ironiquement, nous voyons des tendances beaucoup plus positives en matière d'investissement et d'innovation dans l'Atlantique, où l'intégration verticale est limitée.
Enfin, l'argument selon lequel l'industrie de la Colombie-Britannique est trop complexe pour faire l'objet d'un changement stratégique majeur est, bien franchement, spécieux. Dans la région atlantique, la pêche comprend beaucoup plus de secteurs exploités par les flottilles, quatre régions du MPO et cinq administrations provinciales, et elle a surmonté de nombreuses transitions à grande échelle: l'effondrement des stocks de poisson de fond des années 1990, l'adoption de la gestion des quotas dans de nombreuses pêches, l'expansion rapide de l'accès des Autochtones et la réduction élargie des capacités — phénomène que nous avons constaté en Colombie-Britannique, mais à une échelle beaucoup plus grande. Pourtant, les résultats de la conservation des stocks et de la croissance de l'industrie se sont nettement améliorés depuis les années 1990 dans l'Atlantique. Nous croyons que c'est précisément parce que les politiques sur le propriétaire-exploitant et la séparation des flottilles ont donné à tout le monde — pêcheurs, transformateurs, collectivités et gouvernements — un incitatif pour faire avancer l'industrie. Nous avons présenté un document distinct juste sur ce sujet.
Pour dire les choses bien simplement, toutes les pêches sont complexes, mais ce n'est pas une raison pour éviter des changements si les politiques et les structures de l'industrie ne respectent pas les objectifs de croissance durable. Le succès relatif de la pêche dans l'Atlantique repose, à notre avis, sur trois fondements stratégiques: le propriétaire-exploitant, la séparation des flottilles et la contiguïté. De tels fondements pourraient-ils être créés en Colombie-Britannique? Ce sont des décisions que les intervenants de la Colombie-Britannique doivent prendre, mais l'expérience d'autres administrations offre des options et une certaine orientation au chapitre du processus.
Premièrement, l'expérience presque universelle a révélé que des changements à grande échelle des politiques du secteur des pêches exigent le leadership, la participation et l'acceptation des pêcheurs. En Colombie-Britannique, on devrait prendre des mesures pour renforcer les organisations qui représentent des pêcheurs actifs et pour élargir leur rôle dans les comités consultatifs.
Deuxièmement, comme première mesure importante, le ministre devrait établir une formule assez souple pour que les permis changent de main dans le cadre de processus et de transactions du marché plus ou moins normaux. Le meilleur exemple opérationnel, bien sûr, est la PIFPCAC, qui a établi une échéance ferme après sept ans; après ce délai, tous les permis devaient se retrouver entre les mains des propriétaires-exploitants actifs. Cela visait à fournir assez de temps à la plupart des détenteurs d'accords de fiducie pour qu'ils puissent s'en départir sans subir de grandes pertes financières.
Troisièmement, une commission d'échange de permis pourrait être établie pour permettre l'achat et la vente des permis à des prix réglementés en fonction d'une juste valeur du marché au sein d'un contexte de séparation des flottilles et de propriétaires-exploitants. Ce modèle existe en Europe. Il pourrait être établi en vertu de la législation fédérale ou provinciale, en tant que partenariat fédéral-provincial, société indépendante de la Couronne ou organisme à but non lucratif. Les vendeurs pourraient recevoir un paiement unique ou un revenu de pension assorti d'avantages fiscaux au moyen de rentes. Les nouveaux participants pourraient louer, louer en vue de posséder ou acheter un permis auprès de la commission, qui détient une hypothèque.
Quatrièmement, des processus d'enchères inversées ont été utilisés dans certaines administrations pour mettre sur pied des transferts de permis sans alimenter l'inflation des prix. Plus de 10 % des permis de pêche au homard dans la région du golfe du Nouveau-Brunswick ont été retirés sur une période de cinq ou six ans lorsque l'Union des pêcheurs des Maritimes a invité les propriétaires-exploitants à présenter des soumissions sur leurs prix de vente, pour ensuite accepter les soumissions les plus basses.
Cinquièmement, pour acheter les permis auprès d'entreprises et d'investisseurs, les nouveaux pêcheurs entrants devront avoir accès à des capitaux abordables. Les commissions des prêts aux pêcheurs, les programmes de garantie de prêts et d'autres services financiers fournissent un tel accès. Les commissions des prêts aux pêcheurs en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick ont récemment changé leurs politiques afin de fournir des prêts pour des permis et des quotas, ainsi que des bateaux, et ils offrent des programmes spéciaux aux nouveaux jeunes entrants. La Commission du prêt agricole canadienne fournit des subventions généreuses, du crédit abordable et une formation en gestion d'entreprise pour les jeunes afin qu'ils puissent acquérir des exploitations agricoles et de l'équipement. Des organisations gouvernementales locales et des organisations de l'industrie dans le Maine, en Alaska, en Islande et en Norvège rendent disponibles, sans frais, de petites attributions de quotas ou de casiers à homards afin de permettre à des jeunes de se lancer dans le secteur des pêches.
Sixièmement, un petit nombre de modèles d'entreprise sociale sont exploités dans des administrations différentes. Des banques de permis à but non lucratif, contrôlées par des pêcheurs ou des commissions communautaires, achètent des droits d'accès sur le marché libre et les offrent à des taux de location abordables aux pêcheurs actifs et aux nouveaux entrants. Des coopératives, appartenant à des pêcheurs actifs, pourraient acheter des quotas à partager entre les membres à des coûts abordables. Des collectivités des Premières Nations détiennent collectivement des permis et des quotas, et elles forment et équipent des pêcheurs individuels afin qu'ils deviennent des exploitants de navires.
Une stratégie de transition pour la Colombie-Britannique devrait être élaborée par les intervenants de l'industrie de la Colombie-Britannique. Le principal élément, c'est que l'on peut apprendre des choses à partir de beaucoup de modèles fonctionnels et s'y adapter. Le projet de loi C-68 fournira bientôt au ministre du MPO le cadre législatif nécessaire pour entreprendre un changement important des politiques dans la région du Pacifique.
Nous encourageons fermement le Comité à recommander au ministre l'élaboration de politiques sur les propriétaires-exploitants, la séparation des flottilles et la contiguïté pertinentes pour les flottes et les pêches de la Colombie-Britannique.
Merci.
Merci, monsieur Williams.
Nous allons maintenant passer à Mme Sutcliffe, pour sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Premièrement, je tiens à tous vous remercier de réaliser la présente étude. Beaucoup de personnes, dont moi, espérons que le processus aura pour résultat un changement positif pour les pêches de la Colombie-Britannique.
J'ai déjà comparu ici, mais pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis responsable du programme des pêches pour Ecotrust Canada. J'ai très à coeur les enjeux dont on parle ici, et pas seulement parce que c'est mon travail. J'ai oeuvré dans le domaine des pêches au cours des 30 dernières années, initialement en tant que matelot de pont sur le bateau de mon père.
Je veux commencer par répondre aux questions formulées dans le cadre de procédures précédentes au sujet du contrôle des entreprises et de la concentration de la propriété des permis.
D'abord et avant tout, c'est quelque chose qui est extrêmement difficile à contrôler — même pour le gouvernement — en raison du manque de transparence du système de permis. Cependant, grâce à une demande d'information concernant les données de 2017 du MPO, nous constatons que, des 345 détenteurs de permis ou de quotas dans les domaines des pêches au chalut du poisson de fond et des pêches au flétan et à la morue charbonnière, les 26 premiers, soit 7,4 %, détiennent 50 % de la valeur des quotas, et les quatre premiers, soit 1,2 %, accaparent 50 % des livres contingentées. On constate aussi que la majeure partie des volumes des quotas de poissons de fond sont pêchés non pas par des propriétaires-exploitants, mais par des transformateurs, des entreprises étrangères et même des entreprises familiales de pêche qui, de façon générale, n'utilisent plus la majeure partie de leurs quotas.
Pour ce qui est des investissements étrangers, à part quelques grandes entreprises, c'est quelque chose de très difficile à cerner, mais il y a des exemples. Ainsi, vous avez peut-être entendu parler du récent scandale lié au blanchiment d'argent dans le secteur du jeu et le secteur immobilier en Colombie-Britannique. Nous avons retracé une entreprise qui a investi dans la pêche au poisson de fond et qui possède maintenant pour 5,9 millions de livres de quotas. Le directeur de l'entreprise en question est l'investisseur étranger même qui est nommé dans les articles de journaux sur les activités de blanchiment d'argent dans les casinos et le secteur immobilier de Vancouver.
Le point principal, ici, c'est qu'il s'agit d'une ressource publique canadienne, et, malgré tout, il est extrêmement difficile de confirmer à qui appartiennent les permis et les quotas, et encore moins de connaître le niveau de contrôle et la part des retombées qui reviennent aux pêcheurs, aux Premières Nations et aux collectivités adjacentes.
Ce sont des choses que l'on constate au sein de nombreuses pêcheries, et nous savons qu'il s'agit là uniquement de la pointe de l'iceberg. Nous ne pouvons pas déterminer le réel niveau de concentration ni qui gagne l'argent, parce qu'il y a des ententes tacites reposant sur la confiance et d'autres mécanismes permettant de cacher la propriété effective réelle. De multiples filiales de sociétés cotées en bourse sont quasiment impossibles à retracer, tout comme il y a des pêcheurs qui possèdent des permis et des quotas sans vraiment en posséder la propriété effective et qui, assurément, ne tirent pas la réelle valeur de tels actifs. Puisque nous n'avons pas de politique sur les propriétaires exploitants ni de politique sur la séparation des flottilles, il n'y a aucune garantie que le propriétaire du bâtiment et le propriétaire du quota sont une seule et même personne, ni même qu'il s'agit d'un pêcheur.
En outre, durant une séance précédente, quelqu'un a demandé s'il fallait posséder un permis pour avoir des quotas. Il faut associer un quota à un permis pour diverses espèces — par exemple, un permis L pour le flétan —, mais il n'est pas nécessaire d'être un pêcheur enregistré et titulaire d'un permis pour acheter de tels permis. N'importe quel investisseur, d'où qu'il vient, peut créer une entreprise en Colombie-Britannique, acheter un permis et un quota de flétan et les appliquer au bâtiment de quelqu'un d'autre.
Une autre question soulevée consistait à savoir si l'intégration verticale a une incidence sur la valeur au débarquement. La valeur au débarquement était auparavant révélatrice des revenus qui reviennent aux pêcheurs. Maintenant, en raison du nombre accru de locations et du contrôle des acheteurs sur les prix en Colombie-Britannique, c'est loin d'être le cas. En Colombie-Britannique, de nombreux pêcheurs obtiennent moins qu'une juste part de la valeur de leur récolte. Ce sont des preneurs de prix. Dans certains cas, c'est parce qu'une bonne partie de la valeur au débarquement prévue paye les frais de location et, dans d'autres cas, c'est parce qu'on leur verse non pas la valeur au débarquement, mais un prix plus bas par livre ou, en fait, un salaire établi par les propriétaires des permis et des quotas.
Prenons l'exemple du concombre de mer pour voir dans quelle mesure la politique actuelle permet la manipulation de la valeur au débarquement. La valeur au débarquement du concombre de mer s'élève à 18 $ le kilogramme, et les concombres de mer sont ensuite séchés et vendus en gros à des prix pouvant aller jusqu'à 1 000 $ le kilogramme. Le bâtiment et l'équipage obtiennent 5 $ du montant une fois qu'on déduit les coûts de location et de contrôle, et il reste certaines dépenses à engager, comme le carburant. Même si on procède à la conversion de masse, on constate que seule une petite fraction de la valeur — on parle d'aussi peu que 1 ou 2 % —revient aux pêcheurs ou reste dans les collectivités adjacentes de la Colombie-Britannique.
Comprenez-moi bien, les transformateurs sont une composante cruciale des pêches. Ils ajoutent de la valeur aux poissons, ils s'assurent que la production se retrouve sur le marché et ils créent de bons emplois locaux, mais, comme on peut le voir dans le Canada atlantique, les transformateurs n'ont pas besoin d'être détenteurs de tous les permis et de tous les quotas pour réussir et permettre à l'industrie de prospérer. En fait, un certain nombre de transformateurs en Colombie-Britannique sont aussi touchés négativement par le système en place. Pour avoir accès à un approvisionnement, de nombreux transformateurs doivent acheter ou louer des quotas à des prix élevés et les offrir aux bâtiments qui les pêcheront. En outre, ils sont obligés de se livrer concurrence pour maintenir leur approvisionnement, ce qui peut accroître leurs coûts et contribuer à l'inflation des prix de location.
Je veux prendre un instant pour parler de la marche à suivre. Il doit y avoir un ensemble de principes directeurs concernant le processus et les objectifs en ce qui a trait aux résultats, comme ce que la PIFPCAC a instauré au Canada atlantique. Par exemple, les principes pourraient inclure le recours à un processus axé sur la collaboration transparent et, comme d'autres personnes l'ont dit, ne pas avoir d'incidence négative sur les objectifs de conservation.
Les outils et les pratiques du système actuel, comme la surveillance et la location concernant les espèces accessoires, restent possibles en vertu d'un cadre stratégique qui met les permis et les quotas entre les mains des pêcheurs et de leurs collectivités. On n'a pas à le faire aux dépens des résultats en matière de conservation. Il faut éviter de porter préjudice aux pêcheurs actifs et aux personnes prises dans le système actuel. Un pêcheur âgé de 70 ans qui pêche depuis 50 ans, mais ne peut pas se payer un bateau ou un permis avant sa retraite ne doit pas être expulsé du secteur des pêches. Il faut aussi prendre en considération ceux qui, afin de pouvoir gagner leur vie grâce à la pêche, deviennent surendettés au sein du système actuel. Il faut aussi soutenir les objectifs de réconciliation avec les Premières Nations dans le cadre des pêches.
Ecotrust présentera des recommandations plus détaillées en ce qui concerne des options liées aux politiques et aux programmes visant à améliorer les résultats, mais je vais dire ici que les principaux éléments dont il faut tenir compte incluent notamment des politiques créées en Colombie-Britannique sur les propriétaires exploitants et la séparation des flottilles qui, par définition et en raison des modalités, répondent aux besoins uniques de chaque pêcherie; une commission des prêts pour les pêcheurs visant à aider à fournir un accès abordable à des capitaux qui ne mine pas l'indépendance; des banques de permis conçues localement au niveau communautaire et/ou dirigées par des pêcheurs pouvant offrir un soutien à la transition, aider les nouveaux pêcheurs ou ceux qui n'ont pas l'argent pour entrer dans le secteur ou encore fournir des moyens de rechange en matière d'accès communautaire, au besoin; un échéancier défini assorti de résultats décrits clairement, un échéancier assez long pour permettre aux gens de quitter le secteur, mais pas trop long, de sorte qu'on perde encore davantage de capacité et d'actifs dans les collectivités; un registre public complet et facilement accessible de tous les détenteurs de permis et de quotas qui précise la réelle propriété effective et un environnement où les pêcheurs sont vraiment représentés, comme c'est le cas dans d'autres provinces, et où exiger des changements ne compromet pas la capacité de gagner sa vie.
Le système est complexe, et il faut apporter des changements bien réfléchis, mais ce n'est pas là une excuse pour ne pas relever le défi. La politique actuelle sur les permis ne fonctionne pas, et il faut agir rapidement. Il faut élaborer une politique qui veille à ce que les bénéfices découlant de nos ressources halieutiques restent dans nos collectivités. Les coûts du statu quo sont trop élevés.
Mon mémoire, que je soumettrai, contient d'autres données probantes qui soutiennent ce dont j'ai parlé ici, et j'espère qu'elles soutiennent aussi le changement grandement nécessaire sur la côte du Pacifique.
Merci de votre temps.
Merci, madame Sutcliffe.
Nous allons maintenant passer à Mme Bendickson, pour sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Bonjour à tous.
Je m'appelle Cynthia Bendickson. Je suis la directrice exécutive du Greenways Land Trust, à Campbell River, en Colombie-Britannique. Greenways est un petit organisme de bienfaisance environnemental qui soutient un réseau pour la sécurité alimentaire dans le District régional de Strathcona.
Merci beaucoup de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui dans le cadre de l'étude. C'est un dossier extrêmement fascinant, et je suis heureuse de voir que notre gouvernement s'y intéresse.
La gestion des pêches sur la côte Ouest est liée à une bonne partie du discours sur l'économie mondiale qui a cours depuis la crise financière de 2008 et qui concerne la mondialisation, le capitalisme et l'inégalité.
J'ai constaté les problèmes socioéconomiques liés à notre cadre local de gestion des pêches au moment d'organiser des réunions communautaires dans le but de réaliser une évaluation des besoins en matière de sécurité alimentaire pour Island Health. L'objectif de l'évaluation était de déterminer les actifs de chacune de nos collectivités en matière d'accès fiable à une alimentation suffisante, sécuritaire et nutritive pour leurs résidents.
La sécurité alimentaire possède de nombreuses définitions, mais la notion inclut souvent l'idée de systèmes alimentaires durables qui garantissent que les aliments que nous consommons sont produits ou récoltés de façon à rester accessibles pour toujours. Des pêches d'espèces sauvages bien gérées constituent une composante importante des systèmes alimentaires durables. Elles peuvent produire indéfiniment de très grandes quantités d'aliments nutritifs de haute qualité, tant que les poissons et leurs écosystèmes sont protégés et qu'ils font l'objet d'une intendance.
Le cadre actuel de gestion des pêches sur la côte Ouest a bénéficié aux grandes entreprises de pêche aux dépens des petits pêcheurs indépendants. Cette situation a eu une incidence importante sur la sécurité alimentaire dans les collectivités côtières.
En guise d'illustration, je veux vous parler de Tahsis, en Colombie-Britannique. Il s'agit d'une collectivité côtière éloignée sur la côte Ouest de l'Île de Vancouver. Elle est située à l'extrémité d'un bras de mer bordé de montagnes, et une fois qu'on en atteint l'embouchure, il n'y a plus que l'océan Pacifique entre nous et le Japon. C'est l'exemple même de la côte Ouest sauvage.
À son apogée, Tahsis comptait 2 500 personnes, une scierie, une école et deux églises. Comme dans beaucoup de nos collectivités côtières, au cours des dernières décennies, les changements économiques ont eu des conséquences néfastes. La scierie a fermé ses portes en 2001, et la plupart des gens sont déménagés. Quelques personnes sont restées, et de nouvelles personnes sont arrivées, certaines attirées par le bas prix des logements, et d'autres, par le caractère éloigné de l'endroit. Il y a des artistes, des aînés et quelques familles dont les parents travaillent. Tahsis compte maintenant environ 500 résidents à temps plein et 1 500 durant la saison de pêche estivale.
Certains membres de la nation Mowachaht/Muchalaht, située tout près, ont parlé de revenir vivre dans leur réserve près de la collectivité, mais c'est difficile pour quiconque de déménager à Tahsis en raison du manque d'emplois. Cependant, la pêche est excellente, et le village essaie de se réinventer en tant que destination d'écotourisme.
La sécurité alimentaire — particulièrement l'accès à la nourriture — est précaire à Tahsis. Depuis la fermeture de l'épicerie de Gold River, il y a trois ans, l'épicerie la plus proche est à Campbell River, soit à trois heures de route et à 150 kilomètres, dont la moitié du trajet se fait sur un chemin forestier en gravier et passe par des couloirs montagneux escarpés.
Au cours de la dernière décennie, la collectivité a déployé des efforts pour trouver des façons d'accroître sa sécurité alimentaire. Il y a maintenant là un jardin communautaire florissant, un système local d'échange d'aliments et un programme de petits-déjeuners et de dîners à l'école soutenu par des bénévoles communautaires. L'école participe au programme de la ferme à l'école de la Colombie-Britannique en utilisant des produits du jardin communautaire, puisqu'il n'y a pas d'exploitation agricole à Tahsis. Une nouveauté, cet hiver, c'est qu'un groupe dévoué de bénévoles de la collectivité ont mis sur pied un programme de boîtes d'aliments sains qui permet de fournir des légumes abordables une fois par mois à plus de 35 familles.
Lorsque j'ai organisé ma première réunion communautaire à Tahsis, plus de 20 personnes ont participé, et elles m'ont immédiatement dit à quel point la sécurité alimentaire était importante pour la collectivité. Nous avons discuté de nombreuses choses, mais le principal enjeu qui a piqué mon intérêt c'était l'affirmation selon laquelle les produits de la mer locaux brillaient par leur absence. Comment cela se peut-il? Durant l'été, il y a des dizaines de bateaux de pêche sportive à quai, et il y a même une petite installation de transformation du poisson dans le village, de façon à ce que les touristes américains et européens puissent parer leur poisson avant de l'expédier chez eux. Cette collectivité avait accès à d'abondants fruits de mer à deux pas — beaucoup plus près que l'épicerie — et il était évident qu'elle voulait subvenir à ses besoins.
Il est illégal de vendre ou d'échanger du poisson pêché au moyen d'un permis de pêche sportive. Si ces gens ne pouvaient pas se payer un guide de pêche comme les riches touristes, ils pouvaient obtenir leur propre permis pour moins de 30 $. Pourquoi n'allaient-ils pas tout simplement pêcher?
Même si le permis est abordable, il y a d'importants obstacles. La pêche est dispendieuse. Un ami m'a déjà dit qu'acheter un bateau, c'est un peu comme prendre une douche glaciale en déchirant des billets de 100 $. Après avoir été propriétaire d'un bateau pendant cinq ans, je dois avouer qu'il avait raison. De plus, il y a les cannes, le matériel de pêche, les cartes, les gilets de sauvetage et tout le reste. Une fois qu'on a investi dans l'équipement, il faut investir du temps, et il faut parfois en investir beaucoup, surtout si on ne possède pas de connaissances de la pêche locale ni les connaissances nécessaires pour transformer et préparer nos prises.
Lorsque j'ai compris ces obstacles, je me suis demandé pourquoi il n'y avait plus de pêcheurs commerciaux à Tahsis. Beaucoup de membres de la collectivité m'ont assuré qu'il y en avait avant. Pourquoi les gens ne pouvaient-ils pas tout simplement acheter leurs produits de la mer d'un pêcheur commercial local?
C'est à ce moment-là que je me suis vraiment aventurée en terrain inconnu — et je suis sûre que des gens plus qualifiés que moi vous ont déjà parlé de tout ça —, celui des quotas, de la location, de la consolidation, de l'intégration verticale, de l'augmentation des besoins en capitaux, des gains d'efficience, des pêcheurs de salon, tout ça menant à une réduction du nombre de pêcheurs indépendants, des pêcheurs qui font partie des collectivités où ils pêchent. Cette réduction du nombre de pêcheurs indépendants est le résultat de tout ça.
Même une petite entreprise de fruits de mer ne voudra pas vendre directement sa production à Tahsis. C'est une minuscule collectivité qui se trouve littéralement à la fin de la route. Cependant, il y a peut-être certaines familles de pêcheurs au sein de la nation Mowachaht/Muchalaht qui aimeraient voir plus de leurs fils et de leurs filles sur les eaux de leur territoire traditionnel, vendre leur production localement et gagner leur vie grâce à la pêche. Il y a peut-être un jeune couple là-bas qui veut acheter un bateau, vivre à Tahsis, fonder une famille et devenir des pêcheurs pour leur collectivité.
Beaucoup de petites collectivités au Canada comptent des agriculteurs qui gagnent leur vie en vendant leur production dans des marchés fermiers ou des étalages routiers, alors pourquoi est-ce que, à Tahsis — qui ne compte quasiment aucune terre agricole, mais est juste à côté d'un océan où les ressources abondent —, les pêcheurs ne peuvent pas gagner leur vie en vendant leur production dans leur collectivité locale?
Tahsis est seulement une des collectivités dont j'ai pu vous raconter l'histoire durant le très peu de temps qui m'est accordé ici. Mes collègues responsables de la sécurité alimentaire et moi pouvons tous vous raconter des histoires similaires au sujet de Zeballos, Port Hardy, Tofino, Ucluelet, Sayward et Alert Bay. La réduction du nombre de pêcheurs indépendants a eu une incidence réelle et importante sur la sécurité alimentaire dans ces collectivités. Certaines collectivités sont plus chanceuses. Cortes Island compte encore plusieurs pêcheurs qui vendent leur production localement, et Campbell River compte un magasin spécialisé en fruits de mer au Fisherman's Wharf. Cependant, vu les obstacles accrus que doivent surmonter les pêcheurs indépendants pour pêcher et le vieillissement de la flotte, ce n'est qu'une question de temps avant que les mêmes problèmes gagnent ces collectivités aussi.
Je vous demande instamment d'apporter des modifications au cadre de gestion des pêches sur la côte Ouest, de façon à ce que les pêcheurs indépendants puissent prospérer. Je vous le demande pour la santé de nos collectivités côtières et pour tous les Canadiens.
Merci
Merci de me donner l'occasion de participer à votre étude sur les pêcheries sur la côte Ouest. Je suis ici aujourd'hui pour représenter Island Health, l'autorité sanitaire responsable de la région de l'île, de Victoria, au sud, à Mount Waddington et Port Hardy, au nord. Cela inclut une importante portion de la côte éloignée de la Colombie-Britannique, accessible seulement par bateau ou avion.
Récemment, notre administrateur des soins de santé a recommandé à la Colombie-Britannique d'adopter une approche en vertu de laquelle il faut tenir compte de la santé dans toutes les politiques. J'espère que les renseignements que je fournis aujourd'hui aideront à garantir que la santé est prise en considération dans toutes les décisions stratégiques que prendra le Comité.
Island Health est un partenaire du regroupement des Island Food Security Hubs. Il s'agit d'un groupe d'organismes communautaires qui travaille en collaboration avec des partenaires à l'échelle de la région pour s'attaquer au problème de la sécurité alimentaire et, au bout du compte, améliorer la santé. La sécurité alimentaire est un enjeu systémique complexe. Un système alimentaire sain repose sur les idées et les gens de tous les secteurs. C'est grâce à une telle approche intersectorielle que, en 2014, le carrefour de sécurité alimentaire de Strathcona a déterminé que l'accès aux fruits de mer était une importante préoccupation dans le Nord de l'Île. Cette constatation a entraîné une série d'enquêtes et de mesures, qui ont mené à ma présence et à celle de ma collègue Cynthia parmi vous aujourd'hui.
Cynthia vous a parlé du défi incongru lié à l'accès déficient au poisson dans les communautés de pêche. Ma collègue Helen von Buchholz vous parlera plus tard des répercussions plus générales sur la santé découlant de l'érosion des économies de la pêche sur notre côte.
Le point de vue dont je vous ferai part aujourd'hui concerne la gravité de l'incidence de cette politique sur la sécurité alimentaire et la nutrition. La sécurité alimentaire signifie que des aliments sains sont facilement accessibles et que les gens possèdent tous les compétences, les ressources, le temps et les outils pour faire des choix alimentaires sains. Dans un système alimentaire sain, les gens qui fournissent la nourriture peuvent le faire d'une façon durable sur le plan environnemental et économique.
Nous vivons de l'insécurité alimentaire lorsque nous ne comptons pas sur un accès fiable aux aliments dont nous avons besoin pour mener une vie saine et active...
Les lumières clignotent, ce qui signifie qu'on nous appelle pour un vote à la Chambre. Je demande le consentement unanime des membres du Comité pour écouter le reste de l'exposé de la témoin. Nous aurons ainsi pu entendre tous les témoins de ce groupe précis.
Nous vivons de l'insécurité alimentaire lorsque nous ne bénéficions pas d'un accès fiable aux aliments dont nous avons besoin pour mener une vie saine et active. L'insécurité alimentaire varie selon le revenu et elle varie aussi du point de vue géographique. Au total, 13 % des personnes qui vivent dans la région de l'île sont confrontées à de l'insécurité alimentaire, ce qui signifie qu'elles ne sont pas toujours sûres qu'il y aura de la nourriture sur la table au prochain repas.
Le nouveau guide alimentaire canadien prodigue d'excellents conseils relativement à une alimentation saine, et le poisson occupe une place importante dans le guide. Le guide souligne aussi l'importance des compétences liées à l'alimentation, y compris les compétences nécessaires à la pêche. Cependant, la politique canadienne actuelle en matière de pêche sur la côte Ouest a par inadvertance créé une situation où l'accès aux fruits de mer riches en nutriments est extrêmement limité, une situation où on note une perte des compétences, des connaissances traditionnelles et de l'infrastructure qui soutenait la pêche au sein des populations d'Autochtones et de colons.
Dans les collectivités côtières éloignées, les épiceries se font rares, et des aliments frais et sains se font encore plus rares sur les étagères de ces épiceries. Sur l'eau, cependant, il y a une abondance de fruits de mer frais et riches en nutriments. Cependant, alors que, à une époque, les gens de la localité pouvaient se rendre au quai pour acheter du poisson pêché localement, de nos jours, en raison de la politique fédérale sur les pêches, ce n'est plus le cas. Dans les rares collectivités où la pêche commerciale reste une industrie viable, le poisson pêché localement est destiné presque exclusivement aux usines de transformation du poisson, puis au marché global, contournant entièrement la collectivité locale.
Le poisson est le carburant des gens sur notre côte. Les fruits de mer contiennent beaucoup de nutriments essentiels à la santé: des protéines, de la vitamine D, des acides gras oméga-3, du calcium, du fer et de la vitamine A. On sait que ces nutriments soutiennent la santé osseuse et musculaire, la santé oculaire et dermatologique, la fonction immunitaire, le développement du cerveau et la santé mentale. Ils jouent un rôle clé dans la prévention d'affections comme le cancer, les AVC, les maladies cardiaques, les infections, l'arthrite, la démence et les déficiences cognitives.
Pourquoi est-ce important pour les collectivités côtières? Je vais vous donner quelques exemples.
Pour commencer, les collectivités éloignées sur l'île affichent des niveaux accrus de vulnérabilité parmi les enfants. Un enfant de la maternelle sur trois en Colombie-Britannique commence l'école alors qu'il est aux prises avec des vulnérabilités qui inhibent son développement. La malnutrition au cours de la petite enfance peut avoir une incidence majeure et irréversible sur les fonctions cérébrales. C'est là où le poisson peut aider grâce aux nutriments qui soutiennent le développement du cerveau.
On peut aussi souligner les tendances en matière de santé mentale qui se détériorent en Colombie-Britannique. Un insulaire sur quatre est confronté à des défis liés à la santé mentale qui influent sur sa capacité de composer avec le stress, de travailler de façon productive et de participer à la vie communautaire. Là aussi, le poisson peut aider, grâce à ses nutriments qui soutiennent un bon fonctionnement cérébral.
Le fardeau de la maladie au sein de notre population vieillissante en Colombie-Britannique est un autre exemple, et de nombreux aînés des collectivités éloignées doivent quitter leur maison pour recevoir le niveau de soins dont ils ont besoin lorsqu'ils ont des affections chroniques complexes. La consommation de poisson peut prévenir ou retarder l'apparition de nombre de ces maladies, permettant à plus d'aînés de vieillir chez eux.
En plus des répercussions sur le plan nutritionnel, l'expérience d'un accès alimentaire précaire est, en tant que telle, extrêmement stressante, et peut avoir de graves répercussions sur la santé. Des taux plus élevés d'insécurité alimentaire sont liés à des taux plus faibles de niveau de santé et de santé mentale autodéclarés, des taux plus élevés d'obésité et des troubles de l'humeur et troubles anxieux. Pouvez-vous imaginer le cercle vicieux dans lequel sont enfermées des populations de moins en moins en santé découlant de ces problèmes? Les répercussions de tout ça entraînent des coûts immenses pour la société et le contribuable.
J'espère que, rendu ici, vous voyez bien que toute modification apportée aux politiques sur les pêches de la côte Ouest doivent contenir des mesures qui élimineront les obstacles pour les personnes voulant avoir accès à des fruits de mer pêchés localement. J'espère aussi que vous voyez bien que les personnes qui participent à l'industrie de la pêche commerciale doivent pouvoir en tirer des revenus durables adéquats pour assurer leur propre sécurité alimentaire.
Vous commencez peut-être maintenant à comprendre qu'un développement économique local grâce à une bonne politique sur les pêches pourrait avoir de nombreux avantages en matière de promotion de la santé, pas seulement pour les pêcheurs, mais pour les collectivités de pêche en tant que telles, et que, à l'inverse, une politique mal conçue est néfaste pour la santé et le bien-être communautaires. Une évaluation exhaustive de l'incidence sur la santé ajouterait une dimension importante à la présente étude et pourrait aider à mieux étayer les décisions difficiles qui vous attendent.
Merci.
Merci.
Il nous reste environ neuf minutes, alors nous pouvons probablement les séparer en trois. Nous pourrions poser les questions pendant neuf minutes, trois minutes chacun.
Monsieur le président, je propose que nous suspendions la séance immédiatement, que nous allions voter, puis que nous entendions les autres témoins. Nous ne savons pas s'il y aura d'autres interruptions, alors il serait selon moi sage de s'assurer de commencer par entendre tout le monde.
Le vote n'aura pas lieu plus rapidement. Nous avons convenu de poursuivre pendant 15 minutes, et il nous reste neuf de ces 15 minutes.
Nous avons choisi à l'unanimité de rester pendant 15 minutes. Nous avons neuf minutes pour poser les questions.
Monsieur Hardie, vous avez trois minutes.
Merci beaucoup.
Pour ce qui est des gens qui participent par vidéoconférence, si vous pouvez répondre à la question, veuillez répondre brièvement.
Y a-t-il des quotas disponibles pour tous les permis disponibles ou y a-t-il plus de permis qu'il n'y a de quotas à remplir, du moins pour générer, pour ainsi dire, un revenu viable?
Qui veut répondre en premier?
Je vais commencer, si vous me le permettez. L'année dernière, 45 000 tonnes de quotas n'ont pas été pêchées. C'est en plus de ce que nous avons pêché l'année dernière relativement à ce qui avait été affecté ou cerné comme étant la quantité totale de prises admissibles pour la Colombie-Britannique.
Et pourquoi en est-il ainsi? Si tout le monde cherche des quotas pour aller pêcher, pourquoi y en a-t-il tant qui ne sont pas réclamés?
Parce que les quotas sont entre les mains d'une poignée d'intervenants, parce que c'est plus difficile de trouver — il n'y a pas de banque ou de répertoire vers lequel on peut se tourner ou qu'on peut consulter pour le déterminer — et parce que les gens veulent de l'argent en échange.
Madame Sutcliffe, je veux vous parler de la PIFPCAC. Nous avons entendu que, essentiellement, certaines bandes vendent leurs quotas ou les louent sur le marché libre. Ça semble aller à l'encontre de l'objectif de la PIFPCAC, qui était de remettre du poisson entre les mains des collectivités des Premières Nations.
Il n'y a pas de problème. Ce sont des acronymes très similaires.
Ça dépend de l'entreprise de pêche communautaire. Il y a différents modèles. Certaines louent leur droit au plus offrant, et d'autres ont des règles très strictes en vertu desquelles elles donnent la priorité aux membres de leur propre nation. Ça dépend vraiment des règles adoptées d'un endroit à l'autre. De nombreux pêcheurs locaux des Premières Nations que je connais sont très critiques et ils disent qu'ils ne peuvent pas avoir accès à des permis et des quotas locaux parce que ceux-ci sont loués au plus offrant.
J'hésite à parler de tout ça plus en détail puisque je ne travaille pas avec toutes les nations. Je le sais principalement de façon anecdotique.
Pour répondre à votre première question, oui, il y a des flottilles ou des pêches dans lesquelles il peut y avoir plus de permis que de poissons, ou bien il n'y a pas suffisamment de poissons pour ces capacités. C'est possible, mais on retrouve cette situation sur la côte Est également. L'argument selon lequel nous devons avoir un accès ouvert à la propriété en raison de la surcapacité est un argument fallacieux. Le même problème existait dans les pêches de l'Atlantique, dans le poisson de fond, etc. et a été résolu.
Merci, monsieur Williams.
Votre temps est écoulé.
La parole est à M. Arnold, pour trois minutes ou moins, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps de parole avec M. Calkins.
C'est court, alors je vais demander une réponse très courte.
Monsieur Williams, vous avez parlé d'un rapport que le MPO est en train de préparer. Pouvons-nous préciser à la greffière si ce rapport est terminé et s'il a été remis au Comité? Je n'ai pas obtenu la citation exacte, mais je crois que vous avez déclaré que la pêche sur la côte Ouest est trop fragile pour un changement radical. Qui a dit cela?
J'ai écouté le témoignage de Canfisco et de la BC Seafood Alliance. D'après leurs propos, leur pêche est très complexe du point de vue de la nature des stocks de saumon, du mélange de certaines espèces, etc.
Merci beaucoup, monsieur Arnold.
Cynthia, posséder un bateau est la façon la plus sûre de couler. Si vous avez un bateau, débarrassez-vous-en.
Monsieur Williams, avez-vous un avis juridique?
Je vais poser plusieurs questions, et vous pouvez y répondre à votre convenance. Si le gouvernement met effectivement en place une période de transition de sept ans avec un type de vente de quota obligatoire, avez-vous un avis juridique sur ce à quoi le ministère ferait face de la part des propriétaires?
Pour qui veut répondre à cette question, nous avons entendu parler de la propriété étrangère de certains des quotas et permis. Savez-vous si une ingérence étrangère ou des fonds étrangers ont une influence sur la politique de la pêche sur la côte Ouest?
Le ministre vient tout juste de sortir gagnant d'une série de contestations judiciaires liées à sa capacité en matière d'attribution de permis, de réattribution de permis ou de modifications à cet égard. Jusqu'à présent, les précédents juridiques sont tous...
C'est bien.
Quelqu'un souhaite-t-il commenter la propriété étrangère ou l'ingérence étrangère dans la gouvernance des pêches sur la côte Ouest?
Cela se produit.
L'année dernière, pour les achats de permis connus, il y avait 60 millions de dollars par l'intermédiaire des courtiers en bateau ici, dont la moitié était de propriété étrangère ou provenait d'acheteurs étrangers.
Monsieur McIsaac, si nous adoptions un modèle similaire à celui utilisé en Alaska, pensez-vous que les pêcheurs des collectivités côtières en Colombie-Britannique seraient mieux lotis?
Quelle est la nationalité de la personne en cause dans le blanchiment d'argent, qui possède également le quota, comme vous l'avez dit?
Merci, monsieur Arnold.
Maintenant, pour trois minutes ou moins, la parole est à M. Donnelly. Je vous en prie.
Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, je tiens à remercier tous nos témoins de leur exposé d'aujourd'hui. Je tiens également à m'excuser auprès de nos témoins. Nous avons une séance de 90 minutes avec six témoins, ce qui correspond à 42 minutes d'exposés. Maintenant, avec ce vote qui interrompt nos questions, nous ne disposons que de quelques minutes pour vous poser des questions.
J'avais des questions pour tous nos témoins. Je n'en ai plus que deux maintenant, et je commencerai par Mme Sutcliffe.
Vous avez parlé de surveiller le contrôle des entreprises et vous avez proposé un registre public, je pense. Je me demande si c'est l'une de vos recommandations pour une déclaration plus responsable de la propriété des quotas.
Absolument.
À l'heure actuelle, le MPO n'a fait rapport d'aucune propriété de quota en ligne. Nous avons dû obtenir le peu d'information que nous avons au moyen d'une demande d'AIPRP, une demande d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.
C'est ce que je veux dire à tous ceux qui ont comparu aujourd'hui. Je souligne cela à tous nos témoins. Si vous n'avez pas déjà soumis de recommandations au Comité, nous vous serions très reconnaissants de le faire. Vous pouvez également soumettre des rapports contextuels, qu'il est important que nos analystes examinent, mais les recommandations sont également essentielles.
Monsieur McIsaac, vous avez dit « cesser le travail », qui était un commentaire au sujet du gouvernement. Pourriez-vous en dire un peu plus sur le fait que le ministère attende, n'aille pas plus loin et examine le résultat de la présente étude?
Le ministre ne voulait pas que le ministère mène la même étude que le Comité permanent. Essentiellement, le ministre a dit au ministère de « cesser le travail ». Le ministère le faisait en deux étapes. L'une consistait en un volet documentaire, et l'autre, la deuxième étape, en des entrevues.
Les responsables ont cessé les entrevues et ont simplement poursuivi avec le volet documentaire. Celui-ci aurait dû vous être présenté. Il vous était destiné. C'est ce qu'on nous a dit.
D'accord. Je ne crois pas que le Comité ait entendu quoi que ce soit à ce sujet. Nous avions des fonctionnaires du ministère parmi nous, et ils n'en ont pas parlé. De toute évidence, je pense que nous devons faire revenir les fonctionnaires et leur demander pourquoi ils n'en ont pas parlé.
Pouvez-vous transmettre ce courriel au Comité?
Merci beaucoup.
Encore une fois, je suis désolé que notre temps soit écoulé. Je suis sûr que nous poserions tous plus de questions. J'apprécie vraiment le temps que vous nous avez accordé aujourd'hui.
Merci.
Merci à tous.
Merci à nos témoins. S'ils veulent rester, nous reviendrons après le vote. Lorsque nos prochains témoins comparaîtront, nous pourrons peut-être poser des questions à tout le monde.
Monsieur le président, si nous avons d'autres questions, pouvons-nous demander à nos témoins de répondre par écrit? Si nous les avons pour nos témoins, pourraient-ils le faire?
Est-ce que ça va?
J'aimerais savoir pourquoi le MPO manque à ce point de transparence quant à la répartition des quotas.
Madame Sutcliffe, si vous pouviez nous écrire ou nous donner une réponse, ce serait formidable.
Pouvons-nous simplement confirmer que ces questions et réponses feront partie des témoignages enregistrés?
Bienvenue à tous. Nous allons maintenant poursuivre notre réunion, que nous avons dû suspendre pendant le vote.
Je souhaite la bienvenue à nos témoins, qui comparaissent par vidéoconférence et en personne.
Pour la deuxième moitié de la séance, les personnes suivantes sont avec nous: Seth Macinko, professeur agrégé au Département des affaires maritimes de l'Université du Rhode Island, et Cailyn Siider, pêcheuse, à titre personnel.
Par vidéoconférence, nous entendrons Evelyn Pinkerton, professeure à l'École de gestion des ressources et de l'environnement de l'Université Simon Fraser.
Elle est là, et c'est Helen von Buchholz. J'ai peut-être déformé un peu le nom en le disant, et je m'en excuse. Helen von Buchholz est étudiante à l'École de santé publique et de politiques sociales de l'Université de Victoria.
Nous allons commencer, et lorsque la connexion sera rétablie, nous y reviendrons.
Nous allons commencer par Mme Pinkerton, pour une déclaration de sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
J'aimerais parler de deux choses. Premièrement, l'échec du système de marché libre de nos pêches. Le système de marché libre devait fonctionner sous certaines conditions, mais ces conditions sont inexistantes en ce qui concerne la plupart des pêches dans la région du Pacifique. Deuxièmement, j'aimerais parler des options permettant de passer d'une politique axée sur les propriétaires-exploitants à celle touchant la séparation des flottilles de la manière la moins perturbante possible, comme l'ont proposé des pêcheurs de la Colombie-Britannique et la littérature mondiale sur la pêche.
Le système de marché libre peut bien fonctionner en présence des conditions suivantes: premièrement, un accès égal aux capitaux; deuxièmement, l'égalité d'accès à l'information; troisièmement, un contexte assimilable à une vente aux enchères transparente. Or, en raison des conditions du système de QIT, les jeunes pêcheurs n'ont pas les moyens d'acheter un permis ou un quota, car ils n'ont pas suffisamment de capital pour l'un ou l'autre. Nous n'avons pas un accès égal à l'information, car les QIT ne sont pas mis aux enchères dans un système semblable à celui d'une vente aux enchères; ces quotas sont plutôt loués à titre privé et de plus en plus par l'intermédiaire de transformateurs, le bailleur ou le locataire ne connaissant pas le prix de location facturé.
Troisièmement et en dernier lieu, les QIT sont souvent détenus par des sociétés fictives et se retrouvent à l'étranger, car les pêcheurs ne sont pas tenus de révéler le bénéficiaire ultime dans leur demande de permis. Le contrôle des entreprises sur les permis a favorisé l'exportation du poisson à l'étranger pour la transformation, où la main-d'oeuvre est moins chère, entraînant ainsi la fermeture d'usines de transformation du poisson au Canada. La dernière grande conserverie de la Colombie-Britannique a fermé ses portes en 2016, et les poissons capturés dans les eaux de la Colombie-Britannique sont maintenant mis en conserve en Chine, au Vietnam, en Thaïlande et en Alaska.
Si la politique axée sur les propriétaires-exploitants et celle touchant la séparation des flottilles sont une solution de rechange viable, comment pouvons-nous y arriver avec le moins de perturbations possible? De nombreuses idées intéressantes ont été formulées par des pêcheurs actifs qui ont répondu à un sondage en ligne à l'intention des pêcheurs de la Colombie-Britannique, mené à l'été 2018 par la United Fishermen & Allied Workers' Union — UNIFOR.
Dans ce sondage, les répondants étaient largement d'accord en ce qui concerne les trois questions fondamentales. Quatre-vingt-onze pour cent ont répondu « oui, dans certaines pêches » aux questions suivantes: « Seriez-vous favorable à une politique axée sur les propriétaires-exploitants créée pour répondre aux besoins des pêcheurs de la Colombie-Britannique? » et « Seriez-vous favorable à une politique touchant la séparation de la flottille qui empêcherait les transformateurs et acheteurs de contrôler les permis et les quotas? » Leurs réponses sont intéressantes: « Dans certaines pêches »; donc, peut-être pas toutes les pêches. La troisième question était: « Le MPO devrait-il mener une enquête visant à modifier la politique de délivrance de permis sur la côte Ouest au profit des pêcheurs actifs et des collectivités côtières rurales? » Quatre-vingt-un pour cent des participants ont répondu « oui », mais ils ont déclaré que la participation de tiers serait cruciale. Ils hésitaient un peu à ce que tout soit contrôlé par le MPO.
Maintenant, quatre grandes idées sur la manière de procéder au changement souhaitable sont ressorties de ce sondage ainsi que de la littérature sur les pêches. Ces idées démontrent qu'il est possible de concevoir des mécanismes de transition vers un modèle axé sur les propriétaires-exploitants sans que cette transition ait des conséquences extrêmement perturbantes pour les propriétaires de QIT, qu'il s'agisse d'entreprises ou de pêcheurs.
J'aurai probablement le temps d'aborder seulement une idée, à savoir les banques de permis et de quotas. Dans les banques de permis et de quotas, des organisations de pêcheurs ou des collectivités ont acheté des QIT, les conservent dans une banque de quotas et les louent à des membres de la collectivité qualifiés à des prix abordables, bien inférieurs aux taux du marché appliqués par la plupart des propriétaires de quotas. Cela nous donne des options pour traiter à la fois avec les pêcheurs et les propriétaires collectifs de QIT, selon un scénario de propriétaire-exploitant.
Les pêcheurs ayant participé au sondage ont répondu: 76 % ont déclaré qu'ils pensaient que c'était une très bonne idée et qu'elle valait la peine d'être explorée. Ils connaissent la Northern Native Fishing Corporation, établie dans le nord de la Colombie-Britannique, à Prince Rupert, depuis 1982, dont le but est de donner aux pêcheurs un accès stable aux permis. Cette banque de quotas disposait d'environ 200 permis lorsque trois conseils tribaux ont acheté la flottille louée de B.C. Packers. Le but est de donner aux pêcheurs un accès stable aux permis moyennant un prix de location modéré, sans que les permis ne soient considérés comme une marchandise pouvant faire l'objet d'un commerce lucratif de la part de pêcheurs ou de transformateurs.
Ce modèle a été adopté dans le monde entier à plusieurs endroits. Je mentionnerai simplement le Cape Cod Fisheries Trust au Massachusetts, qui a recours à cette pratique. L'organisme parvient à louer des quotas à des pêches artisanales à 50 % du prix de location sur le marché. Une banque de quotas de pêche à quai en Colombie-Britannique fait quelque chose de similaire. Il en existe une merveilleuse, à une très petite échelle, dans une collectivité au Danemark, Thorupstrand, qui est devenue très célèbre.
J'en viens maintenant au plus intéressant: le programme de quota pour le développement communautaire en vigueur en Alaska. Il prévoit des mesures légèrement différentes par rapport à ce problème, mais je crois qu'on pourrait l'adapter facilement à une banque de quotas. Lorsque le régime des contingents individuels transférables a été mis en oeuvre dans les pêcheries de la mer de Béring et des îles Aléoutiennes en 1992, 10 % des quotas ont été réaffectés aux collectivités, dont la plupart étaient autochtones.
L'Alaska a choisi de ne pas utiliser de permis, mais cela lui aurait été possible. Ce que je veux dire, c'est que le Canada pourrait facilement faire quelque chose de la sorte pour rapatrier les pêcheries au Canada. Incidemment, c'est ce qui a été fait à Terre-Neuve-et-Labrador pour une pêche à la crevette au chalut. Lorsque d'autres pays ont commencé à pêcher dans cette pêcherie, qui était située à l'intérieur de la limite de 200 milles, le Canada a simplement redistribué les quotas de pêche à des coopératives côtières.
Nous pourrions utiliser ce genre de système pour redistribuer un certain pourcentage — un pourcentage considéré comme juste par les gens — des quotas de pêche aux banques de quota, qui pourraient ensuite redistribuer ce pourcentage de poissons aux propriétaires-exploitants. Ce serait un outil très pratique pour déterminer le volume — le pourcentage — des pêches que l'on veut redistribuer, et à quel rythme et à quel moment.
Il ne me reste plus suffisamment de temps pour exposer mes autres idées, alors je vais simplement les énumérer. Premièrement, il faudrait parler de la propriété autorisée des quotas, c'est-à-dire combien de quotas une personne peut posséder au maximum. Deuxièmement, il y a les frais sur les quotas autorisés. Si l'on veut graduellement éliminer les quotas...
D'accord.
Ma dernière idée était liée à la nouvelle pêche au flétan, à Terre-Neuve et dans le Sud du Labrador, dans la division 4R. Cette pêche est gérée d'une façon extrêmement avantageuse pour les pêcheurs, et il vaudrait la peine de l'examiner de plus près.
Merci.
Merci de nous avoir présenté votre exposé. Vous aurez peut-être l'occasion d'en dire pendant la période de questions.
C'est maintenant au tour de M. Macinko. Vous avez sept minutes au maximum. Allez-y.
Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. C'est un véritable privilège d'être ici.
Le président a déjà mentionné le poste que j'occupe à l'Université du Rhode Island. J'ai préparé une présentation PowerPoint, et je crois qu'on l'a déjà distribuée à certains d'entre vous. J'espère avoir le temps de vous expliquer le titre. Je me suis inspiré d'un article très célèbre d'un biologiste des pêches du Canada réputé. Je voulais commencer avec sept diapositives, mais les mathématiques ne sont pas mon point fort. J'ai écouté tous les témoignages précédents, et la plupart des gens essaient de parler très vite, alors je me suis dit que je devrais avoir le temps de tout dire en me tenant à sept diapositives.
Pour commencer, je vais vous parler de mon parcours. Il y a presque 40 ans maintenant, j'ai abandonné les études universitaires au profit de la ruée vers l'or moderne. La première photo est en haut à gauche. Je faisais partie de l'équipage des caseyeurs près d'Unalaska, ou Dutch Harbor, comme certaines personnes l'appellent. Vous pouvez me voir en haut à droite. Nous sommes en train de plaisanter; nous essayons de dire au capitaine que le temps est un peu trop mauvais pour la pêche. Nous ne portions pas vraiment de masque ou de tuba.
Nous avons épuisé la population de crabe, et la pêche au crabe a été fermée pendant deux ans dans la mer de Béring et dans le golfe d'Alaska. En bas à gauche, il y a une autre photo. Je suis devenu pêcheur de crevettes près de Kodiak. Nous avons également épuisé cette population. Cela faisait deux sur deux. J'ai décidé que je devais faire pénitence devant l'univers, alors je suis retourné à l'école. J'ai obtenu mon diplôme de premier cycle en Angleterre, puis mon doctorat à l'Université de Californie à Berkeley.
Je suis retourné en Alaska, car j'ai été embauché par le gouvernement de l'État. La quatrième photo montre l'hôtel Hilton d'Anchorage. J'aime beaucoup montrer cette photo à mes étudiants. La gestion des pêches se résume entièrement à la conservation et à l'attribution des quotas, et la plupart du temps, on fait croire que le premier est le second. C'est à cet endroit qu'on prend le plus de poissons aux États-Unis — à l'hôtel Hilton d'Anchorage —, parce que c'est là que les quotas sont attribués. J'ai siégé pendant plus de 20 ans au Scientific and Statistical Committee — le comité de la science et des statistiques —, l'organe consultatif obligatoire du North Pacific Fishery Management Council, le conseil de gestion des pêches du Pacifique Nord. Cela fait seulement un an que j'ai quitté mon siège.
La prochaine diapositive montre l'une des choses qui m'ont vraiment motivé pendant mes études universitaires et pendant tout le reste de ma carrière professionnelle. Le maire de l'époque de la ville de Kodiak, en Alaska, qui était aussi pêcheur, avait posé une question lorsqu'on avait proposé ce qui est le prototype de ce que nous appelons aujourd'hui le programme des contingents individuels transférables pour le flétan et la morue charbonnière. Peu de personnes le savent, mais on a soulevé cette idée très tôt, dès le début des années 1980. Ici, le maire demande quelles seront les répercussions sur les collectivités côtières. J'ai continué à réfléchir à sa question pendant le reste de ma carrière.
Réfléchissons à cela, l'effet sur les collectivités côtières... À la prochaine diapositive, en haut à gauche, on voit la petite ville de Craig, sur l'île Prince of Wales. Mme Pinkerton vient tout juste de mentionner le programme de quota pour le développement communautaire. Je faisais partie du comité qui a examiné ce programme, le National Research Council, ou le Conseil de recherche national. Il y a une petite carte des collectivités. En haut à droite, vous avez une vue aérienne de l'île Little Diomede, qui se trouve sur la ligne de changement de date. Vous atterrissez sur la glace de mer, et il y a des eaux libres au bout de la piste, qui est grattée à même la glace de mer. En plus de cette préoccupation intéressante pour les collectivités... La photo en bas à droite est celle qui va vraiment vous faire mal au coeur: la prochaine génération. Je vais vous en reparler dans un instant.
Ma carrière, toutes mes réflexions et toutes mes préoccupations tournent autour de l'idée dominante qui dirige les philosophies de gestion des quatre coins du monde, c'est-à-dire cet élan vers la privatisation. À la dernière diapositive, vous pouvez voir le manuel très connu d'un économiste des pêches de la Norvège, et à côté, le rapport de la Environmental Defense Fund, le fonds de défense de l'environnement, et des Oeuvres de bienfaisance du prince au Canada; il s'agit du prince Charles. Le titre est très intéressant, et je crois qu'il a une certaine pertinence pour le sujet d'aujourd'hui.
Je voulais seulement vous parler un peu de ma carrière. Revenons aux diapositives.
La deuxième diapositive que je voulais vous montrer résumait tout ce que j'ai entendu sur le sujet. J'ai visité votre merveilleux site Web, et j'ai écouté les témoignages ou lu les transcriptions. Je vais en faire un bref résumé: des bateaux bidons, des investisseurs étrangers, des taux de location de permis de 80 % et des coûts d'entrée prohibitifs pour les jeunes. Il y a une chose que je n'ai pas incluse sur la diapositive, mais que j'aurais dû inclure, et c'est que j'ai entendu au moins l'un d'entre vous demander: « Comment en sommes-nous arrivés là? » En outre, la différence marquée entre les résultats des politiques au Canada atlantique et en Colombie-Britannique est tout à fait surprenante.
Nous poursuivons avec la troisième diapositive. Vous n'apprenez rien de nouveau. L'un de vos témoins a déjà dit que c'est un problème mondial, et c'est effectivement le cas. Tout ce que vous avez entendu pendant vos séances se répète aux quatre coins du monde, où il y a aussi cet élan vers la privatisation.
Rapidement, il y a un sujet que je veux aborder. À propos des bateaux bidons... Au Danemark, il y a eu le cas très connu d'un canot pneumatique de huit pieds qui possédait pour plus d'un million d'euros en quota.
J'ai inclus la Tasmanie dans mes notes d'allocution. Je suis allé en Tasmanie il y a 10 ans. Là-bas, il y a un régime de contingents individuels transférables pour l'ormeau. À cette époque, une seule personne, un Américain, détenait environ 60 % des quotas. Il y a cinq ans, on m'a invité à nouveau. L'une de mes premières questions était: « Est-ce que l'Américain détient encore tous les quotas? » On m'a répondu en riant: « Non, il les a vendus à des Chinois. »
Vous voyez ce que je veux dire. Tout cela n'est pas un accident. C'est ce qui se passe dans le monde entier.
En quatrième, ma quatrième diapositive... J'en suis venu à la conclusion qu'on peut résumer la gestion moderne des pêches en une formule accrocheuse: « Redonner sa grandeur au système féodal. » C'est quelque chose que j'ai entendu dans un témoignage des témoins précédents. Ceux que nous appelions des pêcheurs se considèrent maintenant comme des métayers.
J'ai une autre formule accrocheuse pour résumer la situation actuelle: « Voler au futur ». Mon épouse m'a aidé avec la traduction française. Elle est française. Au départ, elle avait trouvé la traduction: « Voler le futur », mais je lui ai dit: « Non, c'est “voler au futur” », parce que c'est ce qui est en train d'arriver, selon moi.
Cinquièmement, cela n'est pas un accident. Ce n'est pas une conséquence involontaire, mais le résultat recherché. Dans les notes d'allocution que j'ai distribuées, il y a une référence au film d'un cinéaste danois intitulé The “T” in Fish: Reform of the EU CFP. Dans ce court métrage, on a interviewé le créateur du système danois de contingents individuels transférables. Il résume la situation actuelle — la concentration, les coûts élevés— et, en regardant fixement la caméra, il dit: « C'est le résultat de la réglementation. C'est le résultat escompté. » Dans la scène suivante, la ministre danoise des Pêches dit: « Nous ne voulons pas nous ingérer dans le marché libre. » J'appelle cela le fondamentalisme du marché, et cela rejoint ce que Mme Pinkerton disait. Ce que nous voyons, ce sont les résultats voulus. Je vous recommande vivement de regarder ce film.
Je vous ai montré la page couverture du rapport des Oeuvres du prince Charles et de l'Environmental Defense Fund. Le plus intéressant est le titre du premier chapitre du rapport, qui serait « Transformer les pêches en propositions d'investissement ». Voilà où nous nous dirigeons, voilà où le monde entier se dirige, à cause de cet esprit de privatisation. Faisons intervenir Wall Street. Voilà la teneur des témoignages que vous avez entendus.
À la sixième diapositive, je pose la question: « Comment en sommes-nous arrivés là? » Nous en sommes arrivés là parce que nous avons suivi une idéologie pseudoscientifique. Selon moi, nous avons confondu l'outil et l'idéologie. L'économie des pêches nous le montre. Beaucoup d'études de l'Université de la Colombie-Britannique nous le montrent. Cela fait 65 ans que nous nous sommes engagés dans cette voie, depuis l'article célèbre de Scott Gordon.
Pour mon titre, je me suis inspiré d'un article vieux de 42 ans de Peter Larkin, où il dit qu'il existe deux voies extrêmes que nous pourrions suivre pour les pêches, et les deux reposent sur une certaine philosophie politique. En ce qui nous concerne, nous nous sommes engagés sur la voie extrême de la privatisation. Nous ne sommes pas parvenus à isoler l'outil que sont les contingents. Ils ne sont qu'un outil. On pourrait aussi y arriver avec un modèle de location publique de permis. L'idéologie, c'est tout ce discours sur les systèmes d'allocation de droits de pêche et les droits de propriété.
Vous pourrez peut-être nous dire le reste pendant la période de questions, espérons-le.
Nous allons maintenant passer à Mme von Buchholz, qui communique avec nous par vidéoconférence.
Vous êtes la suivante. Vous avez sept minutes au maximum. Allez-y.
Merci, monsieur le président.
Je suis ici aujourd'hui à titre personnel, et mon point de vue est fondé sur mes expériences en qualité de gestionnaire de la santé publique à Island Health et d'étudiante au programme de maîtrise en santé publique et politiques sociales de l'Université de Victoria.
Mon exposé porte sur l'évaluation des incidences sur la santé réalisée dans le cadre d'un projet de cours dans le but de cerner les répercussions potentielles de la politique actuelle touchant les pêches de la côte Ouest sur la santé des gens et des collectivités. Les trois étapes que j'explorerai brièvement sont l'examen préalable, la détermination de la portée et l'évaluation.
Je vais aborder très rapidement l'examen préalable. J'ai l'impression qu'un certain nombre de discussions ont porté sur ce sujet. La manière dont le système de QIT a été mis en oeuvre en Colombie-Britannique dans les années 1990 a permis à un marché spéculatif de faire grimper le prix des permis, faisant en sorte qu'il est difficile pour la plupart des pêcheurs indépendants d'acheter des permis de pêche. De nos jours, comme l'a dit le dernier témoin, la plupart des pêcheurs louent leur permis, et le prix peut atteindre de 70 à 80 % de la prise. Une fois les coûts opérationnels assumés, il reste bien souvent peu d'argent au pêcheur local pour subsister. En plus de cela, sur notre côte Ouest, nous avons vu des fermetures d'entreprises, des salaires peu élevés et des emplois précaires, et nombre de jeunes pêcheurs ont quitté leur collectivité pour occuper un autre emploi. Parallèlement, les entreprises locales qui, autrefois, comptaient sur les revenus de l'industrie locale doivent souvent fermer leurs portes.
Je vais maintenant passer à la deuxième étape, soit la détermination de la portée. C'est à ce moment-ci que je vais m'appuyer un peu sur mon expérience en santé publique.
En ce qui concerne les répercussions sur la santé et les hypothèses, durant cette étape de l'évaluation des incidences sur la santé, j'ai procédé à une analyse documentaire et relevé que, comme nous le savons tous, les collectivités où il y a eu des fermetures d'entreprises, des pertes d'emplois et des emplois précaires affichent des niveaux de pauvreté plus importants. L'insécurité d'emploi perçue diminue la satisfaction au travail et a une incidence sur la santé physique et mentale des personnes, des familles et des collectivités. Il convient de souligner deux ou trois hypothèses qui ont été soulevées dans les données et la littérature.
La précarité d'emploi, la perte d'emploi et les longs déplacements pour se rendre au travail et à l'école mènent à des tensions professionnelles et personnelles, à une dynamique familiale tendue et à des liens sociaux et culturels moins importants avec la collectivité. Il s'avère que cela engendre certains problèmes. On constate notamment des facteurs de risque cardiaque accrus, comme la tension artérielle élevée et le cholestérol élevé et, en général, on constate une diminution de l'activité physique. Tout cela mène à des taux plus élevés de crises cardiaques mortelles et non mortelles, de dépression et d'anxiété et de blessures liées au travail, ainsi qu'à des taux de mortalité plus élevés dans l'ensemble. Dans une étude portant sur une petite ville de la Colombie-Britannique réalisée après la fermeture d'entreprises, Oncescu et ses collaborateurs ont constaté une dégradation du système communautaire de soutien social. J'aime beaucoup ce terme. Les aspects qui sont vitaux pour permettre à une collectivité rurale de survivre... Cela faisait en sorte qu'il était plus difficile de maintenir un mode de vie rural.
La pauvreté touche de manière disproportionnée certains groupes et mène à des écarts et à des iniquités. Les répercussions se font surtout sentir chez certaines de nos populations les plus vulnérables, comme nos enfants, nos aînés et les personnes ayant un faible revenu. Par exemple, je vais parler un peu de nos enfants, et j'espère en arriver à une conclusion logique. Nous savons que les enfants pauvres ont une moins bonne santé, et que, bien souvent, les enfants issus de foyers à faible revenu ont accès moins facilement à des services sociaux et sanitaires, vivent dans des logements insalubres et manquent de nourriture saine. Leurs parents sont souvent plus stressés, et les taux de placement dans des programmes de protection sont plus élevés. Tout cela peut mener à une diminution du lien avec la collectivité et à une faible estime de soi, ce qui engendre de mauvais résultats à l'école et une consommation précoce de substances et de tabac. Parmi les enfants issus de foyers à faible revenu, nous observons un nombre plus élevé de morts infantiles, de maladies chroniques, comme l'asthme, de suicides chez les adolescents et de maladies mentales, ainsi que des niveaux de scolarisation moins élevés, ce qui perpétue le cycle de la pauvreté. Je sais que nous avons tous entendu parler des déterminants sociaux de la santé.
Pour la troisième étape, la partie touchant l'évaluation, j'ai consulté les données locales du domaine de la santé et j'ai vérifié si ce que j'avais appris de la littérature et des données concordait avec la réalité dans nos collectivités locales de pêche sur la côte Ouest.
Avant de me lancer sur le sujet, je tiens à souligner que de multiples facteurs intersectionnels ont une incidence sur la santé. Je n'essaie pas de faire valoir des liens de causalité. Toutefois, les données locales concordent grandement avec les conclusions énoncées dans la littérature. Les résidants des collectivités de la Colombie-Britannique touchées par des fermetures dans l'industrie de la pêche et par la précarité d'emploi présentent des déterminants sociaux plus négatifs et ont une moins bonne santé, si on fait la comparaison avec les données d'Island Health et de la Colombie-Britannique.
Avant d'aller plus loin, je tiens à souligner que, même si j'aime les données, certaines statistiques locales peuvent être difficiles ou pénibles à entendre pour certaines personnes.
J'en arrive aux données. Lorsqu'on les compare aux résidants recevant des services d'Island Health et aux résidants de la Colombie-Britannique, les personnes vivant dans les collectivités locales de pêcheurs... Les collectivités que j'ai examinées le plus attentivement sont celles qui longent la côte Ouest de l'île de Vancouver, qu'on appelle aussi littoral du Pacifique, celles de la région du mont Waddington et de Port Hardy, ainsi que la Campbell River. Les personnes qui vivent dans ces collectivités et aux abords sont plus nombreuses à souffrir de maladies chroniques, y compris l'asthme, le diabète et la cardiopathie ischémique, ainsi que de troubles de l'humeur, de troubles anxieux et de dépression. Le taux de mortalité normalisé toutes causes confondues est plus élevé, et les décès par suicide, tout comme les décès liés à l'alcool et aux drogues illicites, sont plus répandus dans ces collectivités.
Nous avons aussi constaté — encore une fois, en comparaison des données d'Island Health et de la Colombie-Britannique — que le taux de chômage était plus élevé, que plus de familles vivaient dans la pauvreté, qu'il y avait plus d'enfants et de jeunes en famille d'accueil et qu'un nombre plus élevé de personnes vivaient dans des maisons ayant besoin de réparations majeures.
Le taux de mortalité infantile y était également plus élevé. Comme nous le savons, la mortalité infantile est un indicateur important du bien-être général d'une collectivité et a une forte corrélation positive avec l'invalidité et l'espérance de vie ajustée. C'est quelque chose qui me tient vraiment à coeur. À Campbell River, le taux de mortalité infantile était de 4,7 pour 1 000 naissances, ce qui est considérablement plus élevé que le taux de 3,8 dans la région où Island Health offre ses services et de 3 en Colombie-Britannique.
Il est important de souligner que, sur la côte Ouest, les taux sont maintenant assez faibles. Toutefois, cela découle d'un effort exhaustif visant à diminuer la mortalité infantile, notamment un programme de lits pour bébés, dont j'étais l'une des responsables. C'était en réaction à un taux de mortalité infantile de 5,7. Nombre de ces décès infantiles étaient en fait des décès liés au sommeil, lesquels surviennent chez des enfants autrement en bonne santé.
Je ne suis pas certaine du temps qu'il me reste.
Peut-être que les points que vous n'avez pas abordés seront soulevés durant la période de questions.
Nous allons maintenant écouter notre dernier témoin.
Madame Siider, vous avez sept minutes ou moins.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui.
Je vous prie de m'excuser de ne pas avoir été présente au début du mois lorsque les autres jeunes pêcheurs — et pêcheurs plus âgés — ont témoigné, mais je vous suis reconnaissante de me recevoir aujourd'hui.
Je remercie également les autres témoins qui ont partagé leur temps avec moi.
La plupart d'entre vous m'ont déjà entendue parler auparavant, même si c'était il y a longtemps, alors permettez-moi de me présenter de nouveau.
Je m'appelle Cailyn Siider, je suis une pêcheuse commerciale de cinquième génération de Sointula, en Colombie-Britannique. C'est une petite collectivité de pêcheurs située sur le territoire Kwakwaka'wakw entre la partie nord de l'île de Vancouver et le continent.
Depuis que j'ai pris la parole devant le Comité en avril dernier, j'ai pêché la crevette dans la zone A, ou le détroit d'Hécate, j'ai attrapé des crabes dormeurs, puis j'ai pêché le flétan à la palangre et le saumon à la traîne. J'ai fait tout cela pendant les quatre mois qui séparent ma session d'automne et ma session d'hiver à l'université, où je termine mes études sur la paix et les conflits avec concentration en transformation des conflits et justice transformationnelle.
En avril dernier, lorsque je me suis déplacée jusqu'ici pour témoigner, c'était en faveur du projet de loi C-68. Cette fois-ci, je suis là pour parler de l'étude de la réglementation des pêches sur la côte Ouest, bien que, comme lors de ma dernière visite, je sois venue ici pour parler de mon expérience et de mes réflexions au sujet de la politique qui régit les pêches de la côte Ouest.
À l'heure où on se parle, mon père, ma soeur et mes cousins fabriquent des filets et s'occupent de notre embarcation familiale en vue de la saison du hareng. Ma mère et son conjoint arrivent tout juste de deux voyages consécutifs de pêche à la morue vivante à la palangre. Mon demi-frère et mon conjoint se préparent tous les deux pour l'ouverture de la pêche au crabe dans la zone B le 1er mars, bien que ce soit dans des bateaux distincts.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que les membres de ma famille sont des pêcheurs actifs. Même si la pêche commerciale est notre moyen de subsistance, nos motifs ne sont pas purement économiques. Nous sommes des pêcheurs. C'est notre identité et notre culture, et c'est l'épine dorsale des collectivités auxquelles j'appartiens. De plus, je pense qu'il convient de souligner que les membres de ma famille ne sont pas que des pêcheurs actifs; ce sont aussi des titulaires indépendants de permis et de quotas de pêche au saumon, au flétan, au poisson destiné à être consommé cru, à la crevette, au crabe et au hareng. Comme ils sont à la fois des pêcheurs actifs et des titulaires de permis, ils reconnaissent les sentiments d'injustices fondamentaux inhérents au système actuel de délivrance de permis. C'est un privilège que de posséder un permis et un quota de pêche, et je pense qu'il nous incombe de reconnaître ce privilège et de réparer les injustices le cas échéant.
Mon expérience de pêche, et celle de ma famille, n'est pas théorique; elle est pratique. Je revois ma mère enseigner à ma soeur comment armer un filet, et mon père pêcher le saumon rouge dans le détroit comme le faisait mon arrière-grand-père. J'ai eu l'occasion de montrer à mes nièces comment décortiquer du crabe et ramasser des palourdes, et j'ai passé mon dernier été d'étudiante à pêcher à la traîne à Massett, à poser des engins de pêche dans les mêmes eaux profondes et sur les mêmes seuils que mon grand-père, à attendre qu'un poisson morde à la ligne. C'est sur ces connaissances intergénérationnelles et sur ce moyen de subsistance commun que s'appuient nos collectivités, et c'est ce que nous risquons de perdre.
Maintenant, vous connaissez tous l'ensemble de problèmes complexes auxquels nous faisons face dans les pêcheries de la côte Ouest. Je ne pense pas avoir grand-chose à ajouter qui n'a pas déjà été bien expliqué par de nombreux autres témoins; je vais donc tenter d'être brève quant à ma vision de ces problèmes.
Les problèmes que nombre d'entre nous ont portés à votre attention au cours de l'année dernière concernent la privatisation des ressources halieutiques de la côte Ouest. C'est le résultat de politiques publiques sur la pêche qui ont systématiquement privé les collectivités autochtones et côtières de l'accès à l'économie de la pêche et aux avantages connexes et qui les ont remis entre les mains de quelques personnes.
Les problèmes qui ont été constamment présentés au Comité n'existent pas indépendamment les uns des autres. Les prix de location inabordables, la question des permis de pêche en mer, les restrictions concernant la longueur des bateaux, les processus de consultation problématiques, l'absence de cadre pour les plans de relève, la réduction de l'accès des collectivités à la pêche, les pertes socioéconomiques et culturelles attribuables à cet accès restreint, tous ces aspects sont des effets voulus ou non voulus de problèmes systémiques plus importants en jeu. Un système fondé sur la privatisation institutionnalisée n'est pas conçu pour profiter à la majorité de pêcheurs indépendants ou à leurs collectivités. Cette façon de faire cible nos collectivités, non seulement en éliminant l'accès à notre moyen de subsistance, mais aussi en déchirant notre tissu social. Notre vie et notre moyen de subsistance sont devenus des éléments externes au système.
Je serai la première à admettre que les pêcheurs ne s'entendent parfois pas. Un pêcheur pourrait affirmer que la marée a commencé à descendre, et l'autre pourrait le contredire en disant qu'elle monte encore. Les divergences d'opinions sont dans notre nature. C'est cette indépendance et ce penchant pour la dissidence qui fait de nous des pêcheurs, même si c'est parfois frustrant. Nous sommes tellement pris dans le système actuel que tout espoir de consensus est actuellement hors de portée. On nous a forcés à jouer à ce jeu et à exister à l'intérieur de ce système où l'accès à notre gagne-pain est de plus en plus limité.
Les pêcheurs ont dû s'adapter pour maintenir le peu de souveraineté dont ils jouissent sur leur gagne-pain, et des gens craignent de perdre le peu qu'ils ont. Les pêcheurs de nos collectivités regardent le passé et ont de bonnes raisons d'être sceptiques à l'égard des changements de politiques au Canada. Trop souvent, ces processus ont été réalisés selon des approches descendantes qui se sont avérées désastreuses pour les collectivités côtières et qui ont eu pour effet de nous marginaliser et de nous effacer davantage.
Certaines personnes et entités se sont bien adaptées au système actuel, mais, même si elles reconnaissent leur succès comme une indication d'un système méritocratique qui fonctionne, bien d'autres ont travaillé toute leur vie pour se disputer les miettes qui restent. Cela dit, il ne s'agit aucunement d'une situation où nous nous opposons à des adversaires, ce que j'espère montrer en expliquant la participation des membres de ma famille comme pêcheurs et titulaires de permis et de quotas. Tout changement potentiel doit se produire de façon responsable et entraîner des préjudices limités ou peu importants pour les personnes qui sont prises dans le système actuel.
Le bien-être de nos collectivités côtières est indissociable de l'accès à l'océan et de la proximité des ressources. La privatisation de la pêche au profit de sociétés privées constitue un acte de dépossession et de déplacement et perturbe fondamentalement ce lien.
Si le Comité a reconnu des thèmes constants en ce qui concerne la politique relative aux pêcheries de la côte Ouest, c'est probablement qu'il s'agit d'un enjeu complexe. Au lieu de se concentrer uniquement sur ces questions complexes, qui peuvent être accablantes, il pourrait être utile que l'on travaille à l'envers et que l'on comprenne les ensembles de tendances et de dynamiques de base qui renforcent cette complexité.
Pour remonter à la source de cet enjeu complexe, il faut comprendre qu'il s'agit d'un problème systémique qui requiert un changement systémique et institutionnel. Ce changement doit être véritablement constructif, c'est-à-dire que nous devons modifier les relations, que ce soit à l'échelon fédéral, au sein de la région du Pacifique du MPO ou simplement sur le quai, pour qu'elles cessent d'être destructives et fondées sur la peur et qu'elles deviennent axées sur le respect mutuel et la mobilisation proactive. Il s'agit non pas d'une recommandation précise à l'intention du Comité, mais plutôt d'une piste de réflexion pour quiconque est en train d'écouter.
Pour ce qui est des recommandations concrètes sur lesquelles le Comité devrait se pencher, la modification des politiques et le changement institutionnel qu'elle entraînera sont essentiels à l'augmentation et à la protection du bien-être des pêcheurs actifs au sein des collectivités auxquelles ils appartiennent. La politique relative aux pêcheries doit garantir que les avantages des ressources halieutiques restent dans les collectivités et entre les mains des pêcheurs qui travaillent et qui dépendent de l'eau. Les politiques sur le propriétaire-exploitant et la séparation des flottilles sont un moyen direct et éprouvé d'arriver à cette fin.
Toute modification des politiques doit être axée sur les pêcheurs actifs au sein de leurs pêcheries respectives. Toutes les pêcheries sont différentes et, même si cela ajoute à la complexité, il est essentiel que tous les processus de changement soient fondés sur des approches ascendantes conçues par des pêcheurs actifs à l'intérieur de ces pêcheries.
Madame Siider, nous allons devoir nous arrêter là. Nous avons dépassé le temps qui nous était alloué.
J'espère — comme je l'ai mentionné à d'autres témoins — que tout ce que vous n'avez pas eu l'occasion de nous présenter pourra être soulevé dans le cadre des questions. Sinon, nous disposons de votre mémoire, ou bien, si ce n'est pas le cas, veuillez nous le faire parvenir.
Merci.
Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par notre série de questions de sept minutes.
Du côté du gouvernement, la parole est à M. Hardie, pour une période maximale de sept minutes; allez-y. Je serai très strict à l'égard du temps.
J'en suis certain.
Lorsque nous nous penchons sur la question à l'étude... Si, par exemple, nous procédions à une transition vers la politique sur le propriétaire-exploitant et celle sur la séparation des flottilles, il y a deux options. La première est d'anéantir tout ce que nous avons actuellement, et je n'ai pas l'impression que les gens sont très favorables à cela. Je ne pense pas que nous voulions causer de préjudice grave aux personnes qui ont adhéré au système en toute bonne conscience. Nous pouvons certainement parler de transition, et c'est ce qu'ont mentionné Mme Pinkerton et M. Macinko, ou bien nous pouvons rétablir les conditions du libre marché dans le régime actuel.
Madame Pinkerton, je me demande ce que vous pensez de l'option de rétablir essentiellement les conditions du libre marché dans la répartition actuelle des activités et de la richesse.
Le système du libre marché est si éloigné du régime actuel que je n'espérerais pas que nous réussissions à le faire, même si nous le tentions. Je ne suis pas enthousiaste à l'idée qu'une ressource publique précieuse comme la pêche soit gérée par le marché.
Le système d'octroi de permis établi pour la pêche au homard dans le Maine me plaît bien; là-bas, un permis de pêche au homard n'est pas considéré comme un produit. Il est loué par l'État du Maine aux pêcheurs. Lorsqu'un pêcheur prend sa retraite, le permis retourne à l'État. Ensuite, l'État l'élimine, s'il pense qu'un trop grand nombre de permis ont été délivrés, ou bien il l'attribue à une autre personne en attente d'un permis. Je pense qu'il s'agit d'une bien meilleure façon de traiter les permis.
Ce que vous affirmez, c'est qu'au Maine, l'État continue de posséder le quota et n'est essentiellement que le courtier. Est-ce exact?
D'accord.
Nous avons également entendu parler d'une autre façon d'aborder cette question. Encore une fois, elle repose sur le système actuel, mais on applique ce qu'on appelle la « juste part ». Autrement dit, on s'entend à l'avance sur la part que reçoit le propriétaire du quota, sur celle qu'obtient le transformateur et sur la part du pêcheur. S'agit-il d'une option viable? Je lance cette question à quiconque voudra bien y répondre.
En guise de question supplémentaire, cette part devrait-elle être fondée sur le prix à quai qu'obtient le pêcheur, ou bien sur le prix qu'obtient le transformateur quand le poisson est expédié à sa sortie de l'usine? Je me demande si quelqu'un a des réflexions à communiquer sur cette question.
Seth ou Cailyn, vouliez-vous tenter une intervention à ce sujet?
Je ne pense pas que je formulerai un commentaire sur le prix. Je pense que les ententes sur la juste part sont appropriées, surtout dans le cadre d'un plan de transition, vers, disons, une politique sur le propriétaire-exploitant et la séparation des flottilles.
Très bien.
Je ne poserai qu'une dernière question dans le but de laisser du temps à d'autres intervenants. Elle concerne la politique selon laquelle, si on n'utilise pas son permis ou son quota, on le perd. Nous avons entendu les témoins précédents affirmer que près de 45 000 livres de quotas n'ont pas été utilisées dans une pêcherie, l'an dernier. Si ce quota n'est pas mis sur le marché et utilisé, devrait-il simplement disparaître? Afin d'encourager en quelque sorte les gens... je suis titulaire d'un permis; assurez-vous que quelqu'un l'utilise. Je suis titulaire d'un quota; assurez-vous que quelqu'un le pêche.
Qui veut intervenir en nous faisant part de réflexions sur l'établissement d'une telle politique? Levez la main, sur les écrans.
D'accord, Seth, allez-y.
On pourrait certainement faire cela. On l'a fait à certains endroits. Ce principe envoie votre politique, je suppose, dans la bonne direction. Je ne pense pas que cela permette de remonter à la source d'un grand nombre des autres questions que vous soulevez ou des problèmes dont les gens vous font part.
Je me suis retenu de commenter vos deux ou trois premières questions...
... mais, avec tout le respect que je vous dois, je pense que vous proposez l'application d'un pansement sur un système défaillant. Selon moi, vous devez traiter la source du problème.
Les Européens ont commencé à emprunter cette voie. Ce que vous faites avec ces systèmes, c'est ce que j'appelle l'abandon obligatoire de la richesse. Ce sont des ressources publiques. Je pense que vous faites du rafistolage. Cela ne règle pas le problème fondamental.
Merci, monsieur Hardie.
J'ai oublié, par inadvertance, de mentionner qu'il reste des témoins du groupe précédent. S'ils veulent s'asseoir à la table, au cas où des questions leur seraient adressées, ils sont plus que les bienvenus.
Nous allons maintenant passer au côté du gouvernement... ou plutôt au côté conservateur.
Un député: Le côté du futur gouvernement.
Le président: Oh, peut-être dans six ou huit ans... peut-être.
Quoi qu'il en soit, monsieur Arnold, vous disposez d'une période maximale de sept minutes; allez-y.
Je vous remercie, monsieur le président. Il se pourrait que je partage mon temps de parole. Je n'ai pas beaucoup de questions à poser pour l'instant.
Madame Siider, vous travaillez dans le nord de la région de l'île de Vancouver. Jusqu'à quelle distance au nord pêchez-vous?
Seulement à la frontière de l'Alaska. À quelle distance de notre frontière les Alaskiens pêchent-ils?
Habituellement, en ce qui concerne les stocks en migration, qui a la possibilité de les pêcher en premier?
Je ne sais pas si je peux parler adéquatement de cela. C'est prévu dans ces traités bilatéraux, ceux de la Commission du saumon du Pacifique.
D'accord.
Y a-t-il un autre membre du groupe qui voudrait pouvoir dire qui sont les premiers à obtenir l'accès à ces stocks en migration?
Si le stock de saumon en migration passe par les eaux de la Colombie-Britannique d'abord, nous sommes les premiers à pouvoir le pêcher. Toutefois, ce n'est pas nécessairement lié à la part du poisson ou à la répartition.
La sonnerie retentit. Les lumières clignotent encore.
Puis-je demander la permission de poursuivre, comme nous l'avons fait lors de la dernière séance, pour 15 minutes, jusqu'à 18 h 20?
Je ne le pensais pas, monsieur.
Est-ce que tout le monde s'entend là-dessus?
Des députés: D'accord.
Le président: Très bien, nous allons continuer.
Allez-y dès que vous serez prêt, monsieur Arnold.
Bien sûr, je vais me lancer. Je vous remercie, monsieur Arnold.
Simplement en guise d'exemple, en Alberta, si un accord est signé par une entreprise forestière et la province relativement à la gestion d'une forêt, il existe un droit de coupe qui requiert qu'une redevance soit versée par l'entreprise forestière à tous les Albertains, parce que la ressource leur appartient. Je suis certain que la situation est la même en Colombie-Britannique.
Nous avons le même problème avec toutes les autres ressources naturelles de l'ensemble du pays. Je pose cette question en tant que personne qui vient de l'Alberta. Est-ce que les pêcheurs — ou tout autre intervenant de ce milieu — payent des droits parce que la ressource dans l'océan appartient à tous les Canadiens? Est-ce que des droits sont perçus par le peuple canadien, à part les droits de permis pour pêcher la ressource? Perçoit-on une redevance pour la ressource, pour le saumon, le flétan de l'Atlantique et d'autres poissons qui appartiennent aux Canadiens?
Est-ce une question piège? Non, n'est-ce pas? Ai-je raison?
Je n'en sais rien. Je crois qu'il y a certains frais liés au saumon qui sont versés à différentes organisations. Je crois qu'ils sont distribués entre [Inaudible] et la Fondation du saumon du Pacifique, mais...
Est-ce une cotisation aux programmes de mise en valeur des salmonidés ou quelque chose du genre? Est-ce de cela qu'il s'agit?
Je sais que je dois le faire, pour la pêche récréative. Je fais partie de ces Albertains un peu fous qui se rendent sur la côte pêcher le flétan et le saumon, et je passe vraiment d'excellents moments. La pêche sportive est totalement différente de la pêche commerciale.
Je pose simplement la question. À mes yeux, la ressource est publique, et je crois que bon nombre de personnes partagent ce point de vue. Je crois que ce comité doit se pencher maintenant sur des questions plutôt difficiles concernant le fait de savoir si la ressource est utilisée de façon appropriée, de manière à servir les intérêts des Canadiens plutôt que d'autres intérêts. Je crois que c'est la question à laquelle nous devons trouver réponse.
Je suis très préoccupé par l'état de cette ressource. Je m'inquiète, comme Albertain, pour plusieurs raisons. D'abord, il semble que l'on n'arrive pas à réaliser la construction d'un pipeline à cause des stocks de saumon chinook et des épaulards résidents du Sud. Cela me préoccupe parce que, s'il y avait davantage de saumons, la population d'épaulards se porterait mieux, et la question de la construction du pipeline ne serait probablement pas aussi importante qu'elle ne l'est en ce moment. Comme Albertain, j'ai besoin de vider cette question. Cela touche tous les Canadiens, peu importe le milieu. Voilà ce qui lie toutes ces choses.
Parmi le premier groupe de témoins qui a comparu plus tôt aujourd'hui, certains ont parlé d'un programme sur sept ans, par exemple, dans le cadre duquel on remettrait les quotas et les permis entre les mains des pêcheurs canadiens, c'est-à-dire que les propriétaires-exploitants d'une flotte de pêche seraient dans les faits les propriétaires du contingent, au lieu de le louer.
Je souhaite poser la question suivante aux témoins de ce groupe, qu'ils soient de l'État du Maine, du Canada ou d'ailleurs: devrions-nous suivre cette voie? Est-ce une solution que vous appuyez? Seth, Cailyn, Helen et vous tous...
Est-ce le modèle à appliquer? D'après ce que je sais, le modèle utilisé dans l'État du Maine est très différent. Les quotas appartiennent à l'État. Je serais curieux de savoir si l'État du Maine reçoit une redevance sur les quotas, ou s'ils sont tout simplement transférés aux pêcheurs.
Je vais commencer.
D'après mon expérience, les pêcheries sont une exception dans le milieu des ressources naturelles. D'une certaine façon, votre question concerne ce que nous appelons les redevances sur les ressources. On m'a invité à prononcer une allocution devant l'association australienne des économistes des ressources il y a quelques années, et on m'a fait venir tôt. Le premier jour de la réunion, les participants ont consacré toute la journée à discuter non pas de la question de savoir si on devait exiger des redevances, mais de celle de savoir comment s'y prendre pour le faire dans l'industrie minière. C'est la même chose quand vous parlez des droits de coupe sur les terres de la Couronne ou des droits de pâturage. Les participants ont passé une journée complète à discuter en détail de la façon de s'y prendre, et non pas de la question de savoir s'ils devaient appliquer cette mesure.
Le thème du lendemain portait sur les pêcheries. Je faisais partie du groupe d'experts. Deux économistes nord-américains des pêcheries avaient été invités. La discussion a tout de suite dévié sur la façon dont on pourrait donner la ressource au bénéficiaire initial pour le laisser ensuite recueillir les redevances. C'est ce qui a été fait partout dans le monde.
Je ne préconise pas... Il a été question de transition. Ce sera difficile. C'est une partie du problème. Vous l'avez déjà fait, donc comment pouvez-vous faire marche arrière? Les gens essaient de le faire partout dans le monde, ou se demandent comment le faire.
Vous avez entendu répéter que la plupart des personnes qui sortent en mer de nos jours, les personnes que nous appelions auparavant des pêcheurs, louent les droits de pêche. À qui louent-ils ces droits? Des personnes auxquelles nous — j'utilise ce terme de façon collective — avons donné la ressource gratuitement. On ne ferait pas cela avec le bois d'oeuvre, le pétrole ni les grands pâturages libres.
Ensuite, vous vous demandez s'il serait possible d'instaurer un système selon lequel, au lieu de la façon de procéder actuelle, vous permettriez de louer des droits auprès des propriétaires publics actuels. Mme Pinkerton a parlé du programme de quotas pour le développement communautaire. On entend dire: « Oh, vous voulez faire payer les pêcheurs. » Ils payent déjà maintenant. Ils payent seulement les quelques personnes que nous avons décidé de favoriser, pour une raison quelconque. Un des problèmes, c'est que les économistes des pêches professionnels, qui offrent des conseils stratégiques depuis 65 ans, ont appuyé cette privatisation.
Merci, monsieur Macinko.
Nous cédons maintenant la parole à M. Donnelly, du NPD, pendant au plus sept minutes.
Merci, monsieur le président.
De toute évidence, nous menons une étude du système régissant les permis de pêche sur la côte Ouest. Nous avons entendu de nombreux témoins parler de la tendance à l'augmentation de la privatisation des pêches et des inéquités qui découlent du système actuel et de la tendance du moment. On nous a fait part de propositions et d'idées sur la façon d'effectuer une transition vers une nouvelle gestion des pêches plus équitable.
Je dispose de peu de temps, il y a beaucoup de témoins et j'ai beaucoup de questions. Donc, ma question s'adresse à Mme Pinkerton.
Dans votre exposé, vous avez parlé de coopérative côtière, et je me demande si vous pourriez nous parler un peu plus des succès obtenus. Voilà ce qui attire mon attention. Nous avons entendu des responsables de River Select parler de leur coopérative installée dans le bas Fraser. S'agit-il d'un moyen efficace de gérer les pêches que ce comité et le gouvernement devraient examiner? Pourriez-vous nous fournir un peu plus d'explications en quelques minutes?
Nous avons une feuille de route bien établie à Terre-Neuve-et-Labrador. Il y a une très vieille coopérative à l'île Fogo. Il y a la coopérative située dans la baie à St. Anthony, je crois, sur la péninsule Northern à Terre-Neuve-et-Labrador.
Il y en a une dans le Sud du Labrador dont le nom m'échappe en ce moment. Ces organisations ont différentes formes. Celle-ci en particulier est une coopérative qui possède des installations de transformation du poisson et qui crée des emplois dans la collectivité. C'est l'objectif. Le modèle de programme de quotas pour le développement communautaire utilisé en Alaska vise plutôt à offrir aux personnes la liberté de créer différents types d'activités liées à la pêche à l'échelle locale, y compris la possibilité pour la collectivité de détenir des permis et de posséder des installations de transformation du poisson, ainsi que de participer au développement de leur collectivité.
Le modèle dont j'ai parlé en particulier, et que je crois être très intéressant, est celui de la banque de quotas, qui ressemble à une coopérative. Je crois que le terme coopérative est très approprié, parce qu'il renvoie à une organisation ou une entité locale qui est en mesure de détenir des permis et de les louer. C'est le cas de la Northern Native Fishing Corporation, fondée en 1982, où trois conseils tribaux le font.
Je crois que cette idée offre beaucoup de souplesse, parce que de nombreuses organisations différentes pourraient détenir ces permis ou quotas et ensuite les louer à des prix équitables. Cela se fait partout dans le monde. J'ai mentionné une organisation au Danemark et une autre au Massachusetts. Il y en a une petite en Colombie-Britannique qui se spécialise dans la pêche du chien de mer. À mon avis, il s'agit d'un modèle très utile et flexible qui peut être d'un grand intérêt pour réaliser le type de transition dont nous discutons.
Je mentionne le programme de quotas pour le développement communautaire parce qu'il s'agit aussi d'un modèle très souple quant à la façon de réallouer les permis et les quotas, en particulier ceux détenus par l'importante flotte de chalutiers utilisée pour la pêche de poissons de fond, dont certains n'appartiennent pas à une entreprise canadienne. Il serait possible de réallouer les quotas détenus par cette flotte soit à des banques de quotas — qui pourraient ensuite louer les quotas ou les permis —, soit à des installations côtières de transformation du poisson.
Il s'agit d'une organisation très souple et très utile dont il faut tenir compte, et je crois que les membres de ce comité seraient d'avis que cette option mérite d'être examinée. On trouve beaucoup d'études et d'articles à ce sujet. Je serais heureuse de vous fournir tout renseignement que vous souhaitez obtenir à cet égard. Je suis certaine que M. Macinko et d'autres témoins présents pourraient aussi vous fournir des informations.
Merci beaucoup.
Madame Siider, si vous deviez donner à ce comité une recommandation principale, celle que vous jugez être la plus importante, que lui diriez-vous d'inclure dans son rapport?
Je dirais de recommander une politique axée sur les propriétaires-exploitants et la séparation des flottilles.
Excellent. Merci.
Monsieur le président, je souhaite utiliser quelques minutes pour soulever un point. Je sais que nous allons manquer de temps.
Il a été mentionné que le Comité se pencherait sur le projet de loi S-203 au début de février. Cela n'a pas été le cas, pour une raison quelconque. Nous nous sommes rendus dans nos circonscriptions pendant les semaines de pause, et nous voilà maintenant rendus au 20 février. En raison des votes qui seront tenus ce soir, il semble que nous ne pourrons discuter du projet de loi S-203 dans le cadre des travaux du Comité — si cela était prévu —, ce qui signifie que, encore une fois, nous ne pourrons aborder ce sujet cette semaine. Au plus tôt, nous pourrons en discuter à la fin de février.
Chers collègues, nous allons manquer de temps pour examiner ce projet de loi. Il émane du Sénat. Je vous rappelle que la première lecture a eu lieu le 8 décembre 2015. La deuxième lecture et le renvoi au comité sénatorial des pêches ont eu lieu le 23 novembre 2016. Ce comité a tenu 17 réunions et entendu 40 témoins. Le rapport du comité a été adopté le 26 avril 2018. La troisième lecture a eu lieu le 23 octobre 2018. Nous voilà donc en 2019, et il semble que nous ne pourrons en discuter avant le mois de mars.
Comme vous le savez, nous allons manquer de temps pour le soumettre au Parlement afin de pouvoir tenir un vote sur ce projet avant l'ajournement en juin. J'implore donc que nous examinions ce projet de loi et que nous prévoyions du temps — pas cette semaine — pour le faire la semaine prochaine. Nous avons beaucoup d'excellents témoins à entendre, et il s'agit d'un sujet très important, mais nous devons aussi décider de la façon dont nous allons traiter ce projet de loi.
Je viens peut-être d'utiliser les cinq dernières secondes qu'il me restait pour inciter mes collègues à tenir compte de ce projet de loi dans l'établissement de l'horaire de la semaine prochaine.
Assurément, nous allons voir si nous pouvons insérer cela dans l'horaire et trouver un moment approprié pour examiner ce projet.
Avant que nous ayons totalement épuisé le temps prévu aujourd'hui, je tiens à remercier les témoins qui ont comparu, en personne et par vidéoconférence. Au nom du Comité, permettez-moi de vous présenter nos excuses pour les interruptions causées par la tenue de votes, mais il s'agit de quelque chose qui est indépendant de notre volonté, et, habituellement, nous n'en sommes pas informés à l'avance. Malheureusement, il nous est impossible de prévoir l'horaire en conséquence au moment d'inviter des témoins.
Je vous remercie de vos exposés. S'il y a des documents que vous n'avez pas transmis, comme vos notes d'allocution, ou quelque chose d'autre, veuillez le faire, parce que cela nous permet d'inclure ces renseignements dans l'étude.
La séance est levée.
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