FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des pêches et des océans
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TÉMOIGNAGES
Le lundi 26 septembre 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour à tous. Bienvenue à St. John's, Terre-Neuve-et-Labrador.
Il s'agit de la première sortie du Comité.
Mesdames et messieurs les membres du Comité, nous avons deux ou trois choses à régler avant de céder la parole à nos témoins. Avant de partir, nous nous étions entendus sur une liste de témoins, mais elle n'était pas exhaustive. Nous avons décidé que, si une personne voulait témoigner, nous allions l'inviter à prendre la parole devant nous, mais que nous le ferions sous réserve d'un consentement unanime, alors je chercherai à obtenir ce consentement pas plus tard que dans quelques instants.
Ce que nous allons faire, c'est ajouter une autre heure, étant donné que nous avons maintenant trois personnes qui veulent comparaître devant nous et qui ne figuraient pas sur notre liste auparavant. Selon l'horaire initial, nous devions terminer la séance à 16 h 15. Nous allons maintenant la terminer à 17 heures, et nous entendrons trois témoins.
Les trois témoins en question comparaissent tous à titre personnel. Je vais chercher à obtenir un consentement unanime à l'égard de chacun d'entre eux. Le premier que nous accueillerons est l'ancien député et ancien membre de notre comité, M. Ryan Cleary. Puis-je obtenir un consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Le président: Jason Sullivan sera le prochain témoin. Le témoin initial — M. Gillett, n'a pas été en mesure de se présenter, mais M. Sullivan a aussi demandé à comparaître. Il s'agit d'un ajout de dernière minute. Est-ce d'accord.
Des voix: D'accord.
Le président: Enfin, nous accueillerons un homme que les membres du Comité connaissent bien: M. Gus Etchegary. Est-ce que j'ai un consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Le président: Ces trois témoins comparaîtront de 16 h 15 à 17 heures.
Monsieur Doherty.
Monsieur le président, à titre d'information à l'intention du Comité, je demanderais s'il est possible d'obtenir la biographie des trois nouveaux témoins, s'il vous plaît, avant leur témoignage.
Je sais que Ryan est ici, et je pense que M. Etchegary l'est aussi.
Si vous voulez nous fournir une courte biographie de vous-même, ce serait excellent, et nous allons dire avant 16 heures ou dès que vous le pourrez.
C'est une bonne question, monsieur Doherty.
Merci, messieurs.
Commençons. Nous sommes un peu en retard, mais, comme vous pouvez le voir, quatre témoins distingués se tiennent devant nous pour commencer la séance.
Je veux commencer par dire que l'étude, en soi, prévue dans la motion présentée par M. McDonald est la suivante:
Que le Comité entreprenne une étude sur le stock de morue du Nord et sa pertinence pour les espèces associées. Cette étude évaluera la reconstitution du stock ainsi que les autres espèces touchées dans la région. Elle portera aussi sur les technologies de récolte durables pour l’avenir de la pêche à la morue; et que le comité présente ses conclusions à la Chambre.
Voilà pourquoi nous sommes là aujourd'hui.
Nous accueillons notre premier groupe de témoins. Tout d'abord, voici l'honorable David Wells, sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador.
Je suis heureux de vous revoir, monsieur le sénateur Wells.
Nous accueillons également l'ancien ministre provincial des Pêches et ministre fédéral des Ressources naturelles, l'honorable John Efford, et le ministre actuel des Pêches et de l'Aquaculture, Steve Crocker, du ministère des Pêches, des Forêts et de l'Agroalimentaire.
Vous semblez être assez occupé, ces temps-ci, monsieur Crocker.
Également en provenance du ministère des Pêches, des Forêts et de l'Agroalimentaire, nous accueillons le sous-ministre David Lewis.
Nous allons vous accorder 10 minutes chacun. Vous n'êtes pas tenu d'utiliser toute la période, bien entendu.
Nous allons commencer par vous, monsieur le sénateur Wells. Vous avez la parole.
Merci, monsieur le président, et je remercie les députés de la Chambre des communes de m'avoir invité et de m'accueillir ici, aujourd'hui.
Je ne sais pas quelles données contextuelles vous avez reçues à mon sujet, mais je vais vous présenter une courte biographie de mon expérience dans le domaine des pêches. J'ai commencé en 1979, dans le secteur de la pêche de Terre-Neuve-et-Labrador. Mon premier emploi consistait à conduire un chariot élévateur à fourche sur un quai. Dans les 36 années qui ont suivi, j'ai fait un certain nombre de choses. J'ai géré des usines de transformation. J'ai rédigé plus de 100 rapports, y compris des rapports sur les politiques et des rapports techniques pour des clients. J'ai été membre de l'équipe de l'OPANO du Canada — à l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest —; j'ai été délégué au sein de cette équipe pendant un certain nombre d'années. J'ai été conseiller stratégique supérieur du ministre fédéral des Pêches et chef du personnel d'un autre ministre fédéral des Pêches, et j'ai siégé pendant deux ou trois ans au Comité sénatorial des pêches. Mon expérience est variée et très complète dans le secteur des pêches de Terre-Neuve-et-Labrador, et, effectivement, dans le secteur des pêches canadien et international.
Je pourrais passer toute la journée à parler de la pêche, mais il y a deux ou trois éléments particuliers qui, selon moi, sont importants et que le Comité devrait prendre en considération dans ses délibérations. Le premier, ce sont les marchés du poisson de fond. S'il y a effectivement un retour du poisson de fond comme espèce primaire pour Terre-Neuve-et-Labrador, je pense qu'il importe que les membres du Comité reconnaissent qu'il ne s'agit pas de la bonne vieille pêche à la morue, où régnait la morue. Désormais, la morue est soumise à une forte concurrence — et, de fait, elle est perdante dans cette concurrence — avec d'autres espèces de poisson blanc, comme le tilapia, la goberge et l'aiglefin. Dans la plupart des cas, la morue n'a pas perdu sa place en tant que première espèce de poisson plat. Je pense qu'il importe de le reconnaître. Il y a un nouveau paradigme sur le marché.
Ensuite, il y a le modèle d'affaires différent qui est présenté. Dans le passé, nous avions plusieurs centaines d'usines de transformation du poisson de fond et plusieurs centaines de postes de débarquement. Ce n'est plus le cas depuis l'imposition du moratoire, au début des années 1990. Tout ce système s'est effondré et a été retiré et remplacé par un paradigme différent, celui des espèces primaires et des crustacés, principalement la crevette et le crabe. Je pense que cela doit aussi être pris en considération quand se posera la question de ce qui arrive au secteur émergent de la pêche au poisson de fond, la morue en particulier, mais aussi d'autres poissons de fond.
Une autre chose à laquelle, selon moi, vous devriez accorder une certaine attention, c'est la reconstitution du secteur de la pêche à la morue de Terre-Neuve-et-Labrador. Comme je l'ai dit dans mon argument initial, c'est un endroit différent. Nous avons moins de pêcheurs. Nos effectifs sont âgés dans le secteur de la transformation. Le chiffre qui a été utilisé il y a deux ou trois ans pour l'âge moyen d'un travailleur de la transformation du poisson était 56 ans. C'était il y a deux ou trois ans, et les jeunes n'arrivent plus dans le secteur de la transformation comme cela a déjà été le cas. Naturellement, cette situation entraînera une augmentation de la mécanisation, et cela change le paradigme du secteur de la transformation.
Il y a aussi des restrictions à l'entrée dans le secteur de la pêche, c'est-à-dire les permis de pêche, et, pour les personnes qui en détiennent un, des restrictions à l'accès à d'autres stocks. Il s'agit de quelque chose qui, selon moi, devrait être pris en considération. Bien sûr, j'ai mentionné le nombre de lieux de débarquement et d'usines de transformation et leur emplacement. La qualité se détériore de façon importante, plus le trajet en camion entre un lieu de débarquement et une usine de transformation est long. Je pense que la chose la plus importante à faire, c'est d'envoyer la matière brute vers l'usine de transformation, où qu'elle soit, le plus rapidement possible.
Le dernier élément que je veux mentionner, c'est la gestion de l'industrie. Actuellement, nous sommes dans une situation où le secteur de la pêche est géré par le gouvernement fédéral — relève de la compétence fédérale —, alors que le secteur de la transformation — ou dès que le produit débarque sur le quai — est géré par la province et relève de sa compétence. Je pense qu'un énorme mur se dresse entre les deux. Il est difficile et, en fait, presque impossible d'avoir une industrie intégrée lorsque deux administrations gèrent deux aspects cruciaux de la pêche. J'aurai peut-être certains commentaires à formuler à ce sujet par la suite, si les gens s'y intéressent.
Merci beaucoup.
Merci, monsieur le sénateur Wells.
Nous allons maintenant céder la parole à M. John Efford, pour 10 minutes.
Je vais essayer de m'en tenir à 10 minutes.
Tout d'abord, bienvenue dans la belle province de Terre-Neuve-et-Labrador. Je vais commencer de la façon suivante: vous allez m'entendre parler dans une autre langue — et je veux dire par là, sincèrement — avec passion.
Je suis né à Port de Grave, l'une des plus grandes collectivités de pêcheurs de l'île de Terre-Neuve-et-Labrador. J'ai grandi dans le milieu de la pêche avec mon propre père. En fait, mon fils travaille dans ce domaine aujourd'hui, alors je suis très proche de la pêche.
Ce qui m'étonne... je n'ai prévu aucun discours écrit, ce matin. Je voulais voir quelle serait l'ambiance à la table et discuter avec diverses personnes. Ken m'a donné une ouverture grâce à sa recommandation —sa proposition — de procéder à une étude sur les pêches pour voir de quoi ont l'air les stocks de morue et quelle devrait être la récolte dans l'avenir, ou je ne sais quoi.
Pouvez-vous imaginer? Nous avons fermé la pêche. Nous faisions partie de la fermeture de la pêche par les gouvernements fédéral et provincial, en 1992. La Norvège a procédé à une fermeture à la même époque, pour trois ans, et ses stocks sont revenus, et les Norvégiens ont recommencé à faire de la pêche commerciale, mais, en 1992, nous avons fermé la pêche, et, maintenant, nous allons recommander la tenue d'études.
Je ne condamne pas cette étude, Ken, parce qu'il s'agirait d'une bonne idée, si elle n'était pas déjà faite, mais la simple idée qu'elle n'ait pas été faite, à notre époque, me pose une question que je veux vous adresser à vous, en tant que représentants d'Ottawa. Quel est le rôle du MPO dans le secteur de la pêche si, 25 ans plus tard, nous n'avons encore aucune information scientifique solide sur les stocks de morue? Cette situation, en soi, laisse une question majeure sans réponse.
J'ai répété à maintes reprises que nous avions la chance de posséder une industrie pétrolière, mais cette industrie n'est pas comparable à celle de la pêche, si elle est bien gérée. Il s'agit d'une ressource renouvelable; elle sera là pour toujours si — encore une fois, le mot « si » — nous la gérons comme il faut.
Je regarde ce qui se passe, et je participe à des rencontres avec des ministres et avec des personnes, et j'en ressors en secouant la tête. Mon Dieu, dans quelle direction allons-nous? N'importe quel autre pays au monde ou n'importe quelle autre province du Canada qui disposerait des ressources que possède Terre-Neuve-et-Labrador dans son océan serait tout le temps sur un nuage, mais nous voilà, aujourd'hui, à débattre les uns avec les autres au sujet de la prochaine chose à faire. Nous formulons des recommandations, et nous ne savons pas quel est le résultat.
Il faut trouver la réponse à la question suivante: quel est le rôle du MPO?
Si vous vous rendez à l'édifice du MPO, actuellement, vous avez de la chance si vous arrivez à rencontrer quelqu'un avant une éternité. Il n'y a plus vraiment de personnel là-bas. À ce que je crois savoir, la majeure partie du travail qui est demandé ou effectué —qui n'est rien en comparaison avec ce qui doit être fait — l'est par l'intermédiaire du syndicat. La tâche du syndicat, ce n'est pas la recherche. C'est de protéger les pêcheurs, mais ce n'est pas ce qui arrive.
Nous avons actuellement deux frustrations dans un domaine: nous ne connaissons pas la science, et nous ne savons pas quel rôle joue le MPO.
Voici l'autre élément qui me préoccupe vraiment. J'ai toujours pensé que les gens qui vivaient sur une île dans l'Atlantique Nord, comme nous, qui sont entourés des ressources... Comment est-il possible que nous nous retrouvions dans cette position à poser cette question, aujourd'hui? Tout d'abord, qui est responsable de la pêche, mais, ensuite, qui obtient le droit d'attraper les poissons? N'oubliez pas que nous savons très bien qu'en 1992, avant le moratoire, les petits navires n'ont pas détruit la pêche à la morue. Ils n'ont pas causé la fermeture de la pêche à la morue, puisqu'ils ne peuvent pêcher que pendant un certain nombre de mois par année et que le type de bateau et le type d'engin qu'ils utilisent les limitent en les empêchant de causer des torts majeurs à une si grande ressource, alors qu'il y a 800 millions de tonnes de morues ou quels que soient les chiffres. Alors, on en revient à la question.
Maintenant, nous voulons nous remettre à la pêche, et les gens à bord de ces petits navires ne peuvent pas obtenir le droit de pêcher. Ils ne peuvent pas attraper de morue parce qu'ils ne savent pas s'il y a de la morue à attraper ou non. Nous ne pouvons pas pêcher dans notre propre secteur parce que nous n'avons d'antécédents dans aucun type de pêche particulier, mais je pensais que tout le monde comprenait que le principe de la contiguïté devrait fonctionner. Si ce principe fonctionne, les premières personnes à avoir la possibilité de retourner dans l'industrie de la pêche sont celles qui exploitent les petits navires.
Par exemple, je connais une flotte... De fait, quand vous irez à Port de Grave, demain — je crois savoir que vous avez prévu le faire —, vous allez voir des bateaux qui sont attachés au quai depuis la mi-juillet, sans aucun droit de pêche que ce soit. Ils sont dotés de tous les engins. Ils disposent de tous les chaluts. Ils ne cherchent pas à obtenir des fonds ou ne demandent pas d'argent. Ils veulent seulement un quota de poissons. Pourtant, les chalutiers-usines arrivent à toute vapeur dans la collectivité de Bay Roberts, transportant un million et demi de livres de turbot à bord, ou un million et demi de livres d'une autre espèce de poisson, et les petits navires de Port de Grave — les navires de 65 pieds, et ainsi de suite — sont attachés au quai et ne bougent pas du tout. Je me demande pourquoi, et je me demande ce qui va arriver.
Comment pourrons-nous faire les premiers pas vers l'avenir? Après 25 ans, comment pourrons-nous recommencer et entreprendre maintenant une étude scientifique complète seulement pour savoir ce qui est arrivé? Si nous ne le savons pas déjà, je ne voudrais pas être la personne qui va se rendre dans les rues pour dire aux gens que nous devons repartir à zéro. Grâce aux nouveaux engins, tout ce que nous avons à faire, c'est aller en Islande ou en Norvège. Nous savons quel type d'engin devrait être utilisé: les engins pourvus d'hameçons.
Nous avons ouvert la pêche, cette année — après toutes ces années —, et la première chose que nous avons mise à l'eau, ce sont des filets maillants. C'est la pire chose que nous pouvions faire. Nous devons obtenir des marchés, et la seule façon dont nous allons pouvoir en obtenir pour nos produits, c'est grâce à la qualité. On n'obtiendra jamais de produits de qualité dans des filets maillants. Compte tenu des engins pourvus d'hameçons, des chaluts pélagiques et des autres moyens d'attraper le poisson dont on dispose, pourquoi voudrait-on remettre des filets maillants à l'eau après toutes ces années? Toutes les semaines, quand nous allumons la radio ou la télévision, il est question d'un marché. Il n'y a aucun marché pour notre morue et aucun pour notre poisson de fond. Cela n'a rien d'étonnant, si nous allons traiter le poisson de cette manière et nous attendre à ce que les gens paient le gros prix.
On dit qu'il n'y a pas de prix pour la morue. Je vais en Floride, l'hiver. La morue la moins chère que je peux acheter, là-bas, coûte 11 $ la livre. Le plus qu'un pêcheur peut obtenir pour une livre de morue, ici, à Terre-Neuve, c'est 50 ou 60 ¢. Cette situation est absolument ridicule.
Je vous ai parlé de la passion pour une raison. Ce matin, je ne m'attendais pas à entendre cela. Je m'attendais à entendre de bonnes nouvelles selon lesquelles nous avions observé les signes —probablement pas assez — qui nous auraient rassurés dans une certaine mesure sur le fait que nous pouvions commencer à pêcher. Pas du tout. Je m'attendais à ce qu'un programme d'assurance de la qualité soit mis en place aux échelons fédéral et provincial. Cela n'a pas été fait. Si cela avait été le cas, nous ne permettrions pas que des filets maillants soient mis à l'eau. Si on attrape du poisson au moyen d'une ligne ouverte, on attrape un produit de qualité supérieure. Hier, je suis sorti avec mon fils. Il a pris un casier à morue. Dans le casier, les poissons avaient de la place pour nager. Voilà de la qualité. Voilà le type de choses qui doivent être faites, et nous n'avons pas besoin de faire le tour du monde et de mener à nouveau des études.
Ce n'est pas bon que de faire une demi-douzaine de demandes, ce matin. Je préfère demander une ou deux choses et obtenir des résultats. Quand vous allez retourner à Ottawa, vous devrez transmettre au ministre des Pêches le message selon lequel il doit prendre les commandes du navire. Il doit en être le capitaine. Il doit écouter les gens, et il doit prendre des décisions quant à ce qui doit exactement être fait, et ce n'est pas compliqué. Il n'est pas nécessaire d'être un génie pour trouver comment obtenir un produit de qualité ou combien de poissons contient l'océan. Comme nous le disions autrefois, on ne peut pas se mettre un sac sur la tête et descendre les compter. Il faut se fonder sur la science, et, si nous ne disposons pas déjà des données scientifiques, nous devrions avoir honte de nous-mêmes.
Monsieur le président, nous devons nous organiser pour qu'une attention soit prêtée à ces deux ou trois choses. En outre, nous n'avons pas besoin que les navires soient immobilisés. Il faut qu'ils soient au large en train de pêcher de petites quantités pour nous donner une idée de la quantité de poissons qui s'y trouvent. Nous le savons. Nous connaissons la quantité de stocks — la quantité, mais pas la qualité — de poissons de fond qui s'y trouvent. Il n'est pas seulement question de morue.
Je vous prie de communiquer le message à Ottawa. Nous devrions avoir honte de nous-mêmes si nous n'avons pas déjà effectué suffisamment de recherches scientifiques. Nous devrions avoir honte de nous-mêmes si, maintenant — aujourd'hui —, après tout ce temps, nous devons encore utiliser des filets maillants pour la pêche de l'avenir.
Merci, monsieur Efford.
Monsieur le ministre Crocker, vous avez la parole. Vous disposez de 10 minutes.
Monsieur le président, et vous, les membres du Comité, je vous remercie, de la possibilité de comparaître ce matin.
Je remercie le député McDonald d'avoir suggéré ce sujet d'étude pour votre comité. Il est très important pour l'avenir de notre province. Je vais faire de mon mieux pour ne pas aborder les éléments que le sénateur Wells et M. Efford ont soulevés plus tôt, afin que nous disposions de plus de temps pour les questions.
Comme nous le savons tous, le stock de morue du Nord s'étend au-delà de la côte nordique de Terre-Neuve-et-Labrador, des Grands Bancs jusqu'au sud du Labrador. L'effondrement du secteur de la morue du Nord a entraîné la plus grande mise à pied de l'histoire du Canada. Il est généralement reconnu qu'il y avait plusieurs raisons à cet effondrement. La surpêche, les changements environnementaux et la mauvaise gestion ont tous eu un rôle à jouer. Même s'il est important d'apprendre cette leçon d'histoire, nous ne sommes pas là pour nous attarder sur le passé, ce matin.
Aujourd'hui, comme les stocks sont reconstitués, nous avons l'occasion de renouveler la pêche aux poissons de fond, et de mettre à nouveau la morue du Nord à l'avant-plan. Il est extrêmement important que nous rétablissions cette pêche de manière durable pour nos pêcheurs, nos transformateurs, nos travailleurs et nos collectivités côtières. Au moment où nous travaillons à l'atteinte de la durabilité économique et environnementale, nous devons aussi chercher à atteindre la durabilité sociale.
À mesure que nos stocks lucratifs de crabe des neiges et de crevette diminuent, nous devons nous assurer que notre pêche à la morue ressort en tant que pêche économique et viable, et nous devons optimiser la valeur de la ressource auprès de tous les intervenants.
À mesure que nous progressons, nous devons le faire en fonction d'un plan de rétablissement de la morue du Nord qui permettra la croissance continue des stocks et le rétablissement de l'industrie de la morue. Aujourd'hui, les plans de gestion requièrent ces éléments pour que les pêches puissent obtenir la certification du marché, y compris la certification du Marine Stewardship Council, et j'en parlerai davantage un peu plus tard.
Je crois qu'il est aussi important que nous adoptions une approche axée sur l'amélioration de l'écosystème par rapport à la gestion de la morue du Nord.
Même si la gestion de l'écosystème maritime en entier est pratiquement impossible, nous pouvons mieux intégrer la gestion d'espèces améliorées de poisson-fourrage, comme le capelan, dans notre objectif de gestion de la morue. Nous pouvons également tenir compte de l'incidence de concurrents et de prédateurs, comme les phoques, dans la gestion de la morue à mesure que nous progressons.
Pour ce faire, nous devons être orientés par le milieu scientifique. Compte tenu de l'engagement renouvelé du gouvernement fédéral à l'égard d'un investissement dans la science, il importe que ce nouvel investissement se rende jusqu'à Terre-Neuve-et-Labrador par l'intermédiaire du MPO. Pour en revenir à l'argument formulé par M. Efford, la science fait partie intégrante de l'objectif que nous devons atteindre en ce qui a trait à la pêche dans l'avenir.
Notre gouvernement est déterminé à travailler avec l'industrie et à mettre en valeur des marchés pour une pêche de la morue revitalisée à Terre-Neuve-et-Labrador. Une approche clé consiste à promouvoir et à appuyer les occasions d'améliorer l'accès au marché et à continuer de concentrer sur le maintien d'une qualité supérieure, de la pêche initiale jusqu'à la préparation finale au marché.
La morue fait encore partie des espèces les plus importantes sur le marché mondial des fruits de mer. Toutefois, la dynamique du marché a changé considérablement depuis l'époque où Terre-Neuve-et-Labrador était un intervenant majeur dans l'industrie de la morue, dans les années 1970 et 1980. Aujourd'hui, les plus gros joueurs dans le secteur de la pêche à la morue de l'Atlantique sont la Norvège, la Russie et l'Islande, qui comptent pour plus de 80 % — plus de un million de tonnes — de l'approvisionnement mondial.
Il y aussi des millions de tonnes d'autres espèces substituts du poisson blanc, sauvage et d'élevage. Il importe de reconnaître que Terre-Neuve-et-Labrador possède une part extrêmement petite du marché mondial d'aujourd'hui. En 2015, notre province a exporté à peine plus de 1 100 tonnes de filets de morue, ou 0,0036 % du total mondial. Les volumes importants de morue étêtée et éviscérée sur le marché mondial depuis quelques années ont entraîné une énorme croissance dans le commerce des filets et des blocs congelés deux fois, principalement transformés en Chine, qui dominent les marchés mondiaux de la morue.
Les plus grands marchés de morue sont les filets frais et congelés, aux États-Unis, les filets congelés, au Royaume-Uni, et la morue salée, au Portugal. Actuellement, la pêche à la morue de Terre-Neuve-et-Labrador produit principalement des filets congelés à l'unité qui sont des portions sous la forme de queues et de longes.
Si notre industrie ne produit et ne vend pas un produit de morue de grande valeur, il sera difficile pour nous d'être concurrentiel par rapport aux pays qui produisent une qualité supérieure, comme l'Islande et la Norvège. Fait plus important: nous devons éviter le marché des denrées axées sur le volume qui est dominé par la Chine et par d'autres pays qui peuvent produire à faible coût.
Les défis auxquels fait face notre industrie sur le plan du marketing relativement à la transition et au retour vers la morue comprennent la logistique du transport du poisson hors de l'île, c.-à-d. des filets de morue frais. Aujourd'hui, à Terre-Neuve-et-Labrador, nous avons un problème lié au transport des produits, qu'il s'agisse du saumon frais, du lait ou du bétail — vers l'île ou à l'extérieur de l'île, simplement en raison de problèmes logistiques avec Marine Atlantique. Si nous voulons que notre pêche à la morue porte fruit dans l'avenir, l'un des éléments doit être pris en compte, s'il est question d'accéder aux marchés du poisson frais des États-Unis avec la morue, c'est Marine Atlantique. Il s'agit là d'un problème que nous allons devoir régler. Nos défis consistent également à nous positionner de manière à être concurrentiels à l'échelle mondiale, à mettre en marché et à produire un approvisionnement constant et à produire et à maintenir un produit de qualité uniforme tout le long de la chaîne d'approvisionnement.
La durabilité est la clé en ce qui a trait à l'accès aux marchés. Aujourd'hui, toutes les grandes industries de la pêche de morue, de goberge, d'aiglefin et de la plupart des poissons plats sont certifiées MSC et, encore une fois, il s'agira d'un facteur très important à mesure que nous faisons progresser la pêche à la morue à Terre-Neuve-et-Labrador.
Nous devons également reconnaître que notre industrie a besoin de temps pour effectuer la transition à partir des crustacés et pour retourner aux poissons de fond. Cette transition ne se produira pas du jour au lendemain, et elle exigera que les gouvernements des deux ordres — fédéral et provincial — travaillent avec les pêcheurs, les transformateurs et tous les intervenants de l'industrie pour s'assurer que l'attention et le financement nécessaires sont là afin que les pêcheurs aient la possibilité de reprendre la pêche que M. Efford a évoquée il y a quelques instants, si nous examinons les technologies.
Par exemple, aujourd'hui, l'adoption par un pêcheur d'un système pourvu d'hameçons pour un navire de 65 pieds exige un investissement d'environ 150 000 $. Cet investissement n'est pas facile à trouver lorsqu'on effectue la transition vers une activité de pêche, alors il importe que tous les ordres de gouvernement étudient les façons dont nous pourrions aider les pêcheurs dans l'avenir en ce qui concerne cette transition et la valeur financière importante qu'elle apportera.
Cet automne, notre gouvernement établira un conseil consultatif sur les pêches qui sera immédiatement chargé d'élaborer un plan d'action sur la revitalisation de la morue. Nous sommes heureux que le gouvernement fédéral participe à ce conseil une fois qu'il sera établi.
On ne saurait trop insister sur l'importance de la coordination entre les politiques fédérales et provinciales pour appuyer le secteur de la morue, plus particulièrement durant la transition de l'industrie. Il est impératif que nous collaborions afin d'optimiser la valeur des ressources limitées qui sont pêchées et transformées. Nous croyons fermement que les décisions relatives à la gestion des pêches, comme l'établissement de TAC, devraient être fondées sur des données probantes scientifiques afin de protéger les ressources contre la surexploitation et de permettre la durabilité à long terme dans l'industrie de la pêche.
En conclusion, je crois que la seule façon de vraiment atteindre notre objectif collectif concernant la pêche à la morue du Nord, c'est que toutes les parties travaillent ensemble. Encore une fois, les deux ordres de gouvernement ont un rôle important à jouer dans la gestion et la réglementation afin de s'assurer que notre industrie de la pêche est bien gérée et qu'elle fournit un produit de grande qualité au monde. Les gouvernements ne pourront réussir à mettre en œuvre ces mesures nécessaires que par la discussion et le dialogue avec l'industrie.
En outre, pour revenir sur les propos formulés par le sénateur Wells et par M. Efford ce matin, je pense qu'une autre chose, c'est de dialoguer. Nous devons poursuivre le dialogue. Il est vraiment bon de voir qu'il fait partie de ce processus, aujourd'hui, mais il doit se poursuivre, et pas seulement dans le cadre de séances comme celle-ci. Quand les séances comme celle-ci ou les rencontres avec les ministres et d'autres responsables se terminent, nous devons porter le message vers l'avant et continuer de travailler sur la question.
Le ministère des Pêches de notre province est certainement prêt à prendre part à cette discussion avec toutes les parties. Nous sommes tout à fait prêts à le faire. Pour être très honnêtes, dans la province, nous ne pouvons pas nous permettre de nous doter d'une industrie de la pêche de l'avenir qui n'est pas bien planifiée et bien gérée. J'estime qu'il s'agit vraiment de notre dernière chance d'obtenir une bonne industrie de la pêche à la morue du Nord dans la province et que nous devons nous assurer de bien faire les choses.
Merci.
Merci, monsieur le ministre Crocker.
Monsieur Lewis, voudriez-vous intervenir maintenant, ou bien durant les questions?
D'accord. L'une des choses que le ministre Crocker a mentionnées, c'est la certification MSC. Simplement pour clarifier, l'acronyme « MSC » désigne le Marine Stewardship Council, et vous pouvez vous informer à son sujet à l'adresse msc.org.
Merci infiniment, messieurs. Nous amorçons maintenant les séries de questions. Nous allons commencer par le côté du gouvernement et tenir des interventions de sept minutes. Je serai strict quant aux questions. Je serai souple quant aux réponses. Si vous dépassez sept minutes, vous disposez d'une certaine marge de manœuvre. Nous ne sommes pas là pour être rigoureux à ce point.
Maintenant, nous allons accorder sept minutes aux conservateurs.
Monsieur Doherty, avez-vous un commentaire à formuler?
Monsieur le président, avant de commencer les interventions, je me demande s'il est possible d'obtenir une copie des notes d'allocution de M. Crocker. Il a fourni d'excellents renseignements, mais il parlait un peu trop vite pour que je puisse inscrire certains des éléments. Je crois savoir que nous avons une copie en anglais. Je me demande si nous pourrions en obtenir un exemplaire afin que nous puissions poser des questions concernant son témoignage.
Oui, conformément au Règlement du Comité et aux règles, bien entendu, si nous distribuons toute publication, quelle qu'elle soit — n'importe quoi —, nous devons avoir une version dans les deux langues. Nous ne disposons pas d'un troisième service de traduction et...
Des voix: Oh, oh!
Le président: ... je m'excuse. Nous allons voir comment cela se passe. Pour que nous puissions distribuer ses commentaires — ils sont en anglais seulement —, nous avons besoin d'un consentement unanime, alors je vais le demander. En fait, j'ai deux éléments, alors je suis heureux que vous ayez soulevé la question. Nous avons les commentaires de M. Crocker, et nous avons un témoin potentiel qui vient tout juste de demander à prendre la parole, et je voudrais distribuer une courte biographie la concernant avant que nous votions sur le fait de lui permettre de comparaître aujourd'hui.
Cela dit, est-ce que j'ai un consentement unanime? Est-ce que tout le monde est en faveur de la distribution de cette copie?
Des voix: D'accord.
Le président: Nous pouvons y aller. Nous allons distribuer cette copie, en plus de la biographie que j'ai mentionnée. Nous reviendrons là-dessus après les questions.
Monsieur McDonald, je crois savoir que vous allez commencer. Vous disposez de sept minutes.
Merci, monsieur le président. Je suis heureux d'être là, ce matin.
Avant de commencer à poser la première question, je fournirai un peu d'information.
M. Efford a posé deux ou trois questions concernant la science et l'emplacement actuel de la biomasse, et pourquoi nous ne le savons pas. En fait, monsieur Efford, pour votre gouverne, les responsables et les scientifiques du MPO ont comparu devant le Comité la semaine dernière, à Ottawa, et on estime actuellement que la biomasse est d'environ 300 000, ce qui est encore bien inférieur à la quantité qu'on voudrait observer. Elle est encore considérée comme étant dans la zone critique, et je pense que ce sera probablement au cours de la prochaine année qu'on procédera de nouveau à une évaluation complète des stocks, qui fournira de nouveaux chiffres à cet égard. Je pense qu'actuellement on nous fournit probablement les chiffres de 2015.
Je vais commencer par une question qui s'adresse à vous, monsieur le ministre Crocker. Essentiellement, comment la province envisage-t-elle la pêche à la morue du Nord à l'avenir?
Merci, monsieur McDonald.
Tout d'abord, je m'excuse d'avoir parlé vite, mais John me dit qu'il a compris ma déclaration.
Des voix: Oh, oh!
M. Steve Crocker: C'est difficile, quand on dispose de 10 minutes et qu'on a vraiment beaucoup de choses à dire. On condense toute l'information.
L'industrie de la pêche que nous imaginons dans notre avenir n'a rien à voir avec celle que nous avons abandonnée en 1992. À cette époque, nous faisions principalement des blocs de morue et des produits de deuxième ordre, et nous devons devenir un chef de file en matière de qualité. La qualité commence aux côtés du navire.
Pour revenir sur les commentaires formulés par M. Efford plus tôt, la qualité commence par la méthode de pêche, et les filets maillants ne correspondent certainement pas à la méthode de pêche dont nous allons avoir besoin pour livrer concurrence aux Islande de ce monde. Si on regarde l'Islande, surtout actuellement, on constatera que son industrie de la pêche en est une de pêche aux lignes. Il existe d'autres méthodes, mais ce sont principalement des lignes. Quand on examine le modèle islandais, il est intéressant de constater qu'à mesure que l'utilisation des filets maillants diminue, le prix de la morue augmente. Cela saute aux yeux lorsqu'on regarde l'Islande en tant que pays et ce qu'il a fait de son industrie de la pêche. La technologie de pêche est extrêmement importante.
Ensuite, nous devons doter nos navires de l'équipement approprié, de sorte que les pêcheurs puissent saigner et entreposer le poisson dans le but de l'apporter sur le marché et sur la terre ferme. C'est là que la province et son rôle — je suppose — entrent vraiment en ligne de compte. Nous sommes responsables du secteur de la transformation. À l'avenir, nous devrons travailler en étroite collaboration avec le MPO en ce qui a trait à la pêche, jusqu'à ce que nous apportions le poisson à l'usine de transformation. Nous devrons également nous assurer que nos transformateurs font leur part pour veiller à ce que la qualité du produit soit maintenue.
Pour répondre à la question en général, dans notre province, nous considérons que la morue du Nord et les possibilités qu'elle offrira sont très prometteuses, mais les prochaines années vont être très difficiles, à mesure que nous effectuerons la transition d'une industrie principalement axée sur les crustacés à une industrie de la morue. Cette transition va vraiment nécessiter de la coopération dans les années à venir pour que nous puissions nous rendre jusqu'à la situation dans laquelle nous devrons nous trouver dans le secteur de la pêche à la morue du Nord.
Merci.
Ma prochaine question s'adresse à vous trois.
Monsieur Efford, vous avez soulevé la question suivante en tant qu'argument: qui peut attraper le poisson? Vous pouvez commencer, et les deux autres témoins pourrons répondre également.
Quelles sont vos réflexions sur l'engagement du premier ministre de faire attribuer les 115 000 premières tonnes aux pêcheurs côtiers, une fois que la pêche commerciale sera amorcée de nouveau de façon commercialement viable?
Ma première réflexion est très claire: qu'est-ce que la pêche côtière? Après toutes ces années, il s'agit de la question à laquelle nous n'avons pas encore trouvé de réponse à Terre-Neuve-et-Labrador. Si la pêche côtière, ce sont les bateaux de 65 pieds — actuellement, il y a le navire de 89 pieds, et il ne reste plus que le pêcheur exploitant un petit bateau et les baies —, je serais d'accord avec l'engagement.
Si ce n'est pas le cas, alors, je ne suis pas d'accord, car, maintenant que tout ce poisson est attribué à la flotte côtière, le navire de 42 pieds qui pêche au moyen de filets maillants doit changer de méthode. Cette pratique doit cesser. Ces navires sont limités du point de vue des endroits où ils peuvent se rendre en raison des conditions météorologiques. Quand on a un bateau de 42 pieds, on ne peut se rendre qu'à une courte distance de chez soi. Il est question d'environ 10 à 12 milles, vous savez. C'est habituellement de cela qu'il s'agit.
Les autres bateaux — ceux qui font 65 et 79 pieds, la flotte de navires côtiers — peuvent pêcher dans les Grands Bancs, et ils peuvent vous permettre un peu de comprendre la quantité réelle de morues qui s'y trouvent, car, maintenant, personne n'a la permission de mettre à l'eau un engin de pêche où que ce soit dans les Grands Bancs. Voilà la clé. Il s'agit d'un échec en soi, car nous avons de nombreux sites là-bas, et je suis certain qu'il y a des gens, ici, qui en savent plus à ce sujet que moi. Ils connaissent les rochers Vierges, le banc Hamilton et le banc de l'île Funk, et c'est là que se trouvent les stocks de morue côtière de l'Atlantique.
Il n'y a absolument aucune raison pour que nous ne puissions pas rétablir cette industrie de la pêche et la faire fonctionner comme elle le devrait, et nous n'avons pas besoin d'investir beaucoup d'argent dedans. Les navires sont dotés des engins nécessaires. Ils sont dotés de l'équipement. Ils ne demandent pas d'argent pour acheter des choses. Ils veulent obtenir le droit d'aller pêcher.
Merci d'avoir posé la question. C'est une bonne question.
Quand j'ai appris cela — et je parle non pas en tant que politicien, mais, en tant que personne qui compte plus de 35 ans d'expérience dans l'industrie —, j'ai été très surpris. Il s'agissait d'une décision sociale, d'une politique sociale établie par le premier ministre. Comme l'a mentionné M. Efford, ce qui va maintenant être forcé, c'est que des petits navires vont aller plus loin au large, là où ils ne devraient pas être, pour attraper le poisson.
La décision d'attribuer une quantité disproportionnée ou toute quantité proportionnée à un secteur de cette manière, je pense que c'est... Nous reprendrons cette discussion si un navire qui n'est pas conçu pour la haute mer coule parce qu'il est surchargé de poissons, parce qu'il a dû se rendre plus loin au large et parce que son quota lui donnait accès aux poissons.
Oui, il s'agissait d'une décision populaire chez les pêcheurs côtiers, bien sûr, mais je pense qu'il y a d'autres répercussions que nous devrons peut-être revoir à l'avenir.
Monsieur McDonald, merci beaucoup.
Je vous remercie, monsieur le sénateur Wells et les autres.
Monsieur Arnold, vous avez la parole, pour sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je veux remercier les témoins de leur présence ce matin.
Plus tôt, nous avons entendu dire que la Suède avait fermé sa pêche pour trois ans seulement. Au Canada, cela fait maintenant 25 ans, et nous sommes encore en train d'étudier la question. Pouvez-vous me dire quelle était la différence avec les stocks suédois? Était-ce la Suède, ou bien la Norvège, qui a fait cela? Ces stocks étaient-ils aussi épuisés que ceux qui sont au large de la côte du Canada? Qu'est-ce que les responsables de ces pays ont fait différemment pour rétablir cette pêche aussi rapidement?
Tout d'abord, je ne pense pas qu'il y avait une si grande différence entre les problèmes de Terre-Neuve et ceux de la Norvège. L'élément le plus important qui attire mon attention, c'est le fait que les Norvégiens avaient des signes solides depuis le premier jour. Ils étaient bien équipés pour reconnaître la présence d'un problème dans l'industrie de la pêche et avaient des renseignements scientifiques à l'appui. Ce qu'ils ont fait, c'est fermer la pêche totalement, comme nous l'avons fait ici, puis la rouvrir après trois ans.
Personne n'a jamais pu nous répondre ou nous dire si... Si Terre-Neuve avait fait la même chose, que se serait-il passé? Nous ne savons pas encore aujourd'hui combien de poissons se trouvent au large de nos côtes, après 25 ans, alors cela me cause une grande déception, aujourd'hui. Si nos scientifiques ne nous ont pas fourni ces renseignements... que Dieu nous vienne en aide pour l'avenir. Tout est fondé soit sur des données scientifiques solides, soit sur absolument aucune donnée scientifique.
Il s'agit d'un élément que je n'ai pas abordé dans la déclaration que j'ai faite plus tôt, mais il est lié à ce que M. Efford vient tout juste de mentionner. Il est certain que l'une des choses que nous allons devoir chercher à obtenir durant les années de transition — et au-delà — c'est un engagement du MPO à l'égard de la tenue annuelle d'une évaluation complète des stocks. Le MPO a fait l'objet d'un certain réinvestissement. Heureusement, le gouvernement fédéral a jugé bon d'embaucher — je pense — près de 20 nouveaux scientifiques, ici, dans la province, ce qui aurait dû être fait depuis longtemps et dont nous avions bien besoin.
Au cours des 10 à 12 dernières années, la province a dû effectuer son propre travail scientifique. Nous avons en fait créé le CFER — le Centre for Fischeries Ecosystems Research. Nous avons été forcés de le faire en raison du manque de recherche scientifique effectuée par le MPO. Il est très important que le ministère prenne son rôle scientifique au sérieux.
Pourrais-je soulever un élément très rapidement? Je ne veux pas gruger dans le temps alloué à d'autres personnes.
L'autre grande différence, au Canada — et, si vous retournez à la période où je faisais de la politique aux échelons fédéral et provincial, vous constaterez que j'en parlais chaque semaine —, c'est qu'il y a 10 ans, nous avions une estimation de 10,5 millions de phoques du Groenland, en plus des phoques gris, et en plus des phoques à capuchon. Les gens se moquent encore en disant: « Oh, M. Efford est encore en train de parler des phoques ». Mais, si 10 millions de phoques du Groenland ne mangeaient qu'une morue chacun par année, ce sont 10 millions de poissons qui sortent de l'océan.
Je suis convaincu au point de mettre ma réputation en jeu du fait que cela a eu une incidence sur le retour des stocks, car nous n'avions pas la permission de retirer le poisson de l'océan pour le manger. Pourquoi? C'était parce que nous voulions que les stocks reviennent, mais, si de 12 à 14 millions de phoques de diverses espèces s'y trouvent, alors, vous savez où se situe une grande partie du problème.
Merci. Je suis heureux que vous ayez soulevé cet élément.
Les témoignages que nous avons entendus plus tôt ont présenté des données probantes contradictoires concernant l'incidence des phoques sur les stocks de morue. J'aimerais que le Comité trouve un moyen de découvrir ce qui peut être fait pour déterminer le régime des phoques avant et après l'effondrement. A-t-il changé? Sont-ils passés à une autre espèce? Ont-ils commencé à être en concurrence pour une autre proie, pour la même proie que celle que chasse la morue? Il y a tant de données manquantes à cet égard. Nous devons trouver les réponses.
Je comprends la question au sujet de ce que mangent les phoques, mais il s'agit vraiment d'un élément sans intérêt ou non pertinent, puisque, au bout du compte, ils mangent des fruits de mer. Qu'il s'agisse de morues ou de poissons fourrages, nous savons tous ce qu'ils ne mangent pas. Je pense qu'à un moment donné, une personne a dit qu'ils ne mangent pas de navets. Nous savons que, s'ils ne mangent pas de morue, ils mangent la nourriture que la morue consommerait.
Je peux vous renvoyer à ce qui est arrivé en Colombie-Britannique — ma propre province — avec des espèces d'ongulés et les populations de loups, dont l'expansion hors de contrôle a été essentiellement permise, et, comme l'habitat a changé, les espèces de proie sont différentes. Nous sommes maintenant aux prises avec de graves problèmes d'espèces d'ongulés — le caribou de montagne en est un exemple —, où les loups ont cessé de se nourrir de cerfs de Virginie et d'orignaux pour se nourrir de caribous, car c'est tout ce qu'il reste.
La même chose est-elle en train de se produire dans le cas des phoques et de la morue? Vous dites absolument? D'accord. Merci.
Merci, monsieur le président.
Merci, monsieur Arnold.
Après la prochaine question, nous allons demander le consentement unanime à l'égard des témoins supplémentaires.
Monsieur Johns, allez-y, pour sept minutes; vous avez la parole.
Je vous remercie de votre passion et de votre détermination à bien faire les choses parce que, comme l'a dit le ministre, il s'agit probablement de notre dernière chance.
Monsieur le ministre Crocker, je viens de la Colombie-Britannique côtière. Vous avez évoqué le fait qu'une grande partie de la transformation va à l'étranger et en Chine. En Colombie-Britannique, nous voyons des conserveries fermer leurs portes. Nous expédions notre poisson vers la Chine pour qu'il y soit fileté, puis il revient sur les étagères de nos supermarchés. Voilà ce qui se passe chez moi. Cela fait très peur à voir.
Monsieur Efford, vous avez évoqué le principe de la contiguïté. Je suis tout à fait d'accord. Je pense que nous devons aller dans cette direction.
Voudriez-vous nous donner des détails et peut-être nommer certains modèles de contiguïté, nous expliquer comment nous pouvons y arriver et ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif?
Le principe de la contiguïté a été adapté par le Parti libéral fédéral lors de la dernière convention. Le terme « contiguïté » signifie que l'on fait participer les personnes qui sont adjacentes aux stocks ou les plus proches — si vous voulez utiliser le terme « proches » — des stocks. Les stocks de crevettes sont en difficulté dans certains secteurs, et des changements majeurs ont dû être apportés. Ces changements étaient fondés sur le principe de la contiguïté.
Ce principe donne aux gens de Terre-Neuve-et-Labrador le droit d'être les premiers à avoir la possibilité de pêcher le poisson. Les chalutiers-usines sont les derniers. Ils font partie des principales raisons pour lesquelles nous sommes là aujourd'hui. Si un bateau de 80 pieds arrive à Port de Grave ou n'importe où ailleurs à Terre-Neuve, il ne contient rien du tout dans sa cale, et il n'a pas la permission d'attraper le poisson, mais les chalutiers-usines arrivent à toute vapeur avec un million et demi de livres à bord.
Selon le principe de la contiguïté, la possibilité revient aux gens de la localité en premier; après cela, nous déciderons.
Monsieur le ministre Crocker, vous avez parlé des 20 nouveaux scientifiques qui ont été embauchés. De quoi avons-nous besoin? Manifestement, 20 n'est pas un nombre suffisant, et je ne peux imaginer qu'ils vous permettent d'obtenir ce dont vous avez besoin.
Vous avez évoqué un examen et une évaluation annuels des stocks. Pouvez-vous nous donner une idée du genre de personnel et de ressources qui sont nécessaires pour que nous fassions bien les choses?
Je crois que le personnel et les ressources sont déjà là; l'augmentation du personnel au bureau local du MPO a eu lieu au cours des trois à quatre derniers mois. Toutefois, nous avons besoin d'un engagement à l'égard de la science, d'un engagement à l'égard d'une pleine évaluation des stocks chaque année, du moins, jusqu'à ce que nous soyons dans une situation où nous savons où nous en sommes, car il y a en ce moment des indicateurs... je pense que notre taux de croissance se situe quelque part autour de 30 %, mais nous devons le surveiller.
Nous observons d'autres problèmes sur le plan scientifique. Il y en a un qui est lié au capelan. Il s'agit de l'un des principaux aliments de la morue. Il est très important que nous comprenions également cette pêche — ou cette espèce — au moment où nous irons de l'avant.
Parmi les difficultés majeures auxquelles nous faisons face dans l'industrie de la pêche, et ce déséquilibre en est un en ce qui concerne le retour de la morue... Cela a été prouvé de nombreuses fois par les pêcheurs de la province, quand la morue revient. Actuellement, la morue a un effet nuisible sur la crevette et le crabe. Il n'est pas inhabituel de voir un pêcheur afficher une photographie sur laquelle le ventre d'une morue est rempli de crevettes et —malheureusement — de petits crabes des neiges femelles. Nous devons nous assurer qu'il n'y a pas de déséquilibre dans l'écosystème. La science doit jouer un rôle majeur dans cette entreprise et pour ce qui est d'écouter les pêcheurs: ces personnes sont en première ligne. Dans bien des cas, nous n'amorçons pas de dialogue avec les pêcheurs, avec les gens qui sont aux premières lignes.
Je dois poser une question, et je pense qu'il s'agit de la clé de toute la séance de ce matin.
Selon les données scientifiques, 300 000 tonnes de poissons se trouvent dans l'eau. Vous venez tout juste de nous donner cette information. Je l'ai lue à de nombreuses reprises. La chose que je n'ai jamais vue — que je vous demanderai de chercher quand vous retournerez à Ottawa — est la suivante: avez-vous vu un rapport scientifique qui appuie l'affirmation selon laquelle il y a plus ou moins 300 000 morues? Existe-t-il un rapport scientifique accessible que vous avez vu?
J'ai un élément à ajouter aux commentaires du ministre sur la science. Dans sa déclaration préliminaire, il a mentionné le Centre for Fisheries Ecosystems Research, lequel compte un institut qui a été établi à l'institut maritime par le gouvernement provincial dans le but d'entreprendre des recherches scientifiques, et plus particulièrement des recherches sur la morue du Nord, à l'aide de chercheurs et de diplômés de deuxième cycle de l'université.
L'institut a établi des capacités importantes à l'université. Il utilisait des technologies qu'on n'utilise pas sur la côte, ici, à Terre-Neuve — par exemple, la diagraphie acoustique. Les Norvégiens et les Islandais effectuent plusieurs relevés par année et procèdent également à des diagraphies acoustiques. Cela n'a pas été fait ici, dans la province. Le relevé qu'effectue généralement le MPO est un relevé de chalut de poisson de fond qui a lieu chaque automne.
Les données scientifiques que le Centre for Firsheries Ecosystems Research a été en mesure d'apporter aux recherches scientifiques effectuées par le MPO — et c'était en collaboration, dans une grande mesure — ont certainement augmenté la base de connaissances collectives des scientifiques sur les stocks de morue du Nord. Ils ont effectué le suivi de la morue par satellite. C'était la première fois au monde que des morues étaient étiquetées à l'aide d'étiquettes pouvant être lues par satellite.
Cela nous a permis de mieux comprendre les profils migratoires du poisson. On a découvert que les gros poissons, que les relevés du MPO ne trouvaient pas, étaient en fait près des côtes pendant des périodes plus longues et différentes de l'année que c'était le cas avant le moratoire. Il y a beaucoup de données scientifiques supplémentaires.
Concernant le capelan — que le ministre et M. Efford ont tous deux mentionné —, nous faisons très peu de recherches scientifiques sur ce poisson. Le capelan est absolument essentiel à la viabilité de stocks de morue. En Norvège et en Islande, la quantité de recherches menées sur le capelan est formidable, y compris la diagraphie acoustique. La quantité de recherches scientifiques que nous consacrons au capelan est très limitée. Je crois qu'il est tout aussi important de savoir quelle est la situation en ce qui concerne les stocks de capelan que de savoir quelle est la situation au chapitre des stocks de morue.
Merci, monsieur Johns. Vos sept minutes sont écoulées.
Nous allons maintenant passer à la série d'interventions de cinq minutes. Non, mes excuses: nous reprenons pour des interventions de sept minutes. Nous allons procéder de cette manière, mais nous allons reparler du temps plus tard. Il nous reste à peine plus de 15 minutes, alors nous verrons jusqu'où nous pourrons nous rendre avec cette série.
Très rapidement, nous avons distribué la biographie et les renseignements au sujet d'une personne qui nous a demandé de le faire. Il s'agit de Kimberly Orren, qui veut témoigner. Est-ce que j'ai le consentement unanime des membres pour accepter Kimberly Orren en tant que témoin? Y a-t-il des objections?
Des voix: D'accord.
Le président: D'accord, madame Orren, voici ce que nous allons faire: nous avons un groupe spécial composé de nos invités excédentaires; je suis désolé, je ne voulais pas vous décrire comme étant de trop.
Quoi qu'il en soit, à 13 heures, nous accueillons un groupe comprenant seulement deux personnes, alors nous pourrons intégrer Mme Orren à ce groupe particulier qui comprendra trois personnes. Est-ce d'accord? Très bien.
Maintenant, nous reprenons les interventions de sept minutes. Nous passons au côté du gouvernement et cédons la parole à M. Finnigan.
Merci, monsieur le président.
Bienvenue aux témoins. Il s'agit de ma deuxième visite à Terre-Neuve, et, jusqu'ici, elle est tout aussi excellente que la première. J'ai hâte de passer les deux ou trois prochains jours avec vous.
Je viens de Miramichi, et, bien entendu, il n'y a pas de morue dans la Miramichi, mais il y a du saumon. À tout le moins, nous espérons qu'il y en aura. Nous faisons face à certains des mêmes problèmes que vous en ce qui a trait aux nombres peu élevés, aux prédateurs et tout le reste, alors cette question est intéressante pour moi.
Monsieur Wells, je pense que vous avez déclaré que la pêche doit être à proximité du volet transformation. Pourriez-vous nous donner des détails concernant ce que cela veut dire? Est-ce que cela signifie qu'on congèle le poisson à bord au moyen des installations de congélation qui sont à bord, ou voulez-vous dire que les collectivités devraient être situées à proximité de l'endroit d'où les navires arrivent? Pourriez-vous nous donner des détails et sur ce que vous entendez par là?
C'est une bonne question. Il s'agit d'une question importante parce que, dans le passé, avant les années 1970, une grande partie du poisson qui était débarqué sur les côtes de Terre-Neuve-et-Labrador était transformée dans une usine située à l'endroit du débarquement. À mesure qu'a augmenté la concurrence pour cette ressource débarquée, la concurrence était livrée par des transformateurs qui n'étaient pas nécessairement situés au quai communautaire en question. Ils transportaient le poisson par camion jusqu'à leurs usines de transformation du poisson. Plus on transporte par camion des matières brutes qui sont déjà mortes... deux choses se produisent. La première, c'est qu'il y a une plus grande détérioration de la ressource avant qu'elle arrive à l'exploitation de transformation, et la deuxième, c'est qu'il est nécessaire de disposer au quai en question d'une infrastructure qui peut atténuer certains des dommages causés à la ressource par son transport en camion.
La partie initiale de la transformation du poisson, c'est l'éviscération et la saignée, puis la congélation, et il faut disposer de boîtes isolées et de ce genre de choses sur place. Dans l'ancien temps, on n'en avait pas. On pêchait le poisson et on le débarquait directement à l'usine. Compte tenu de la plus grande concurrence pour la ressource, le produit pourrait être débarqué au port de St. John's et être transporté par camion à 12 ou 13 heures de route. Voilà l'un des éléments qui doit être pris en considération.
Je félicite M. Efford pour son travail lorsqu'il était ministre des Pêches, car il a chapeauté la concentration et l'accent accru mis sur le fait d'avoir un produit de qualité.
Cela a commencé par vous, John, et vous avez fait du bon travail à cet égard.
Il doit s'agir d'une considération, que le produit soit de la morue, du crabe, des crevettes, ou quoi que ce soit.
Merci beaucoup.
Monsieur Efford, je pense que c'est vous qui avez mentionné le fait que nous devrions nous réoutiller. Autrement dit, il y a 25 ans, les méthodes de pêche et de transformation étaient certainement différentes de celles d'aujourd'hui. Je pense que la raison, c'est la qualité. Advenant un retour des stocks, comment voyez-vous ce processus se dérouler? Aurions-nous autant d'usines partout sur l'île? Comment voyez-vous cela?
Tout d'abord, je crois fermement au sens des affaires. Je n'aime pas l'idée d'un soutien financier accordé à une industrie sous forme d'argent du gouvernement. J'ai moi-même été un homme d'affaires, et j'ai aussi été — comme vous le savez — un politicien. Je peux vous assurer d'une chose. Cela concerne tous les pêcheurs à qui je parle — et cela fait beaucoup de pêcheurs par année —: donnez-leur la possibilité de pêcher, et ils fourniront les outils dont ils ont besoin.
Nous nous sommes occupés des usines de transformation du crabe, à l'époque où j'étais ministre des Pêches, en 1996; nous établissions les usines à l'échelon régional partout dans la province. Elles n'étaient pas toutes situées dans une partie de l'île. Cette répartition a bien fonctionné pour l'industrie du crabe du point de vue de la qualité du produit. Nous avions des exemples de chargements de crabe transportés par camion semi-remorque vers ma région, vers la collectivité où je vis. Je l'ai vu de mes yeux. J'étais au gouvernement, à l'époque, et des périodes de deux et de trois jours s'écoulaient avant que les camions soient déchargés. Il est impossible d'obtenir un produit de qualité de cette manière.
Sérieusement, pour la majorité des pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador, donnez-leur le droit d'aller pêcher, et ils trouveront les outils nécessaires. Tout ce que vous avez à faire, c'est leur dire. La première chose que je ferais, c'est prendre tous les filets maillants de Terre-Neuve et faire un feu de camp.
Merci.
Nous avons accueilli des représentants du MPO en tant que témoins à deux ou trois occasions, et ils nous disent qu'ils surveillent les stocks depuis l'effondrement — et probablement avant — à l'aide des ressources dont ils disposent. Ils sont les premiers à admettre qu'il y a encore de nombreuses questions. Ils ne sont pas certains de la raison pour laquelle la Norvège a repris la pêche si rapidement. Une partie de la théorie est fondée sur la prédation par les phoques et par d'autres animaux ou oiseaux, mais aussi, les eaux plus chaudes auraient pu changer l'écosystème.
J'adresse la question suivante à tout le monde: comment devrions-nous gérer l'écosystème? Nous savons que le capelan fait partie des aliments préférés de la morue, mais elle mange d'autres choses. Comment devrions-nous gérer l'écosystème? Si nous passons à d'autres espèces en ce qui concerne la pêche, quelle importance ce changement aura-t-il sur la morue, selon vous? Comment devons-nous gérer tout cela pour nous assurer qu'un équilibre est établi afin que les stocks de morue reviennent?
Je pense qu'on en revient toujours à la question de la science, de savoir ce qui est là et quel effet une espèce a sur l'autre.
M. Efford vient tout juste de me montrer une photographie de ce en quoi consiste le souper d'une morue. C'était probablement 10 ou 12 crabes des neiges femelles.
Nous devons nous assurer que l'écosystème est équilibré. Je suppose que cela signifie un plus grand nombre de relevés et des données scientifiques plus solides. Nous ressortons tout juste d'un débat tenu ici, dans la province, au sujet de la crevette dans la ZPC 6 — cette zone —, et, l'un des éléments de ce débat, c'était que nous devions convaincre le gouvernement fédéral de s'engager à effectuer chaque année une évaluation complète des stocks.
Nous ne pourrons jamais avoir trop de données scientifiques. L'investissement dans la science va être crucial si nous souhaitons maintenir une industrie de la pêche solide et toutes ses composantes, qu'il s'agisse du crabe, de la crevette, de la morue, du capelan, du turbot ou d'autres espèces aquatiques. Nous avons besoin d'un engagement ferme à l'égard de la science.
Merci beaucoup.
Avant que nous ne passions aux questions de cinq minutes très rapidement, monsieur Efford, vous vouliez distribuer cette photographie.
Je vais proposer rapidement la production de copies. Est-ce que j'ai le consentement de tout le monde pour accepter la distribution de cette photographie?
Des voix: D'accord.
Le président: Nous allons faire des copies et les distribuer.
Pour cinq minutes, nous cédons maintenant la parole à M. Doherty.
Messieurs, je vais adresser mes remerciements à chacun d'entre vous pour votre témoignage.
Monsieur Efford, votre passion transparaît clairement. Elle ne nécessite aucune traduction.
Je vous suis reconnaissant à tous les quatre d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.
Ma première question s'adresse à vous, monsieur le sénateur Wells. Vous aviez commencé à nous expliquer la meilleure façon de gérer la pêche. Je me demande si vous pouvez poursuivre ces explications en nous faisant part de vos réflexions.
Merci d'avoir posé cette question.
Comme je l'ai dit plus tôt, l'un des plus gros problèmes que nous avons et avons toujours eus dans l'industrie, c'est ce grand fossé entre la pêche, qui est de ressort fédéral, et la transformation, qui est de ressort provincial.
Afin que notre industrie soit intégrée et qu'elle progresse en douceur, je pense qu'il y a un meilleur modèle à adopter, au lieu de ce fossé entre deux aspects cruciaux de l'industrie. Je vais parler brièvement de mes deux ou trois années à titre de PDG adjoint de l'office des hydrocarbures extracôtiers, ici, à Terre-Neuve-et-Labrador, qui est un organisme fédéral-provincial indépendant des gouvernements fédéral et provincial. Il a été enchâssé dans la loi dans les années 1980, et sa directive première était de s'occuper de quatre choses: la gestion des ressources relatives aux réserves de pétrole et de gaz, les aspects environnementaux, la santé et la sécurité et les retombées industrielles.
Je pense qu'un modèle semblable qui permettrait de s'occuper de la gestion des ressources et des retombées industrielles de la pêche de Terre-Neuve-et-Labrador, selon lequel la pêche et la transformation seraient intégrées, serait un bon modèle et certainement un meilleur modèle que celui que nous appliquons actuellement. Vous ne subiriez aucune influence ou entrave politique. Aucun groupe d'intérêt spécial n'aurait d'influence sur vous, qu'il s'agisse de transformateurs, de pêcheurs, de travailleurs d'usine ou de syndicats concurrents.
Monsieur le ministre Crocker, je suis certain que, tout comme M. Efford quand il était ministre, vous entendez parler tous les jours de groupes d'intérêts spéciaux qui cherchent à obtenir quelque chose: une faveur, un avantage ou l'accent sur leur aspect particulier du secteur.
Je sais que, quand j'étais conseiller principal en matière de politiques à l'échelon fédéral, au MPO, puis, après cela, chef de cabinet, tous les jours, je recevais des appels me demandant si des gens pourraient faire ceci ou faire cela. Ce qui est nécessaire, selon moi, c'est de fixer les règles, d'établir la structure pour les règles, puis de faire cesser cette influence des groupes d'intérêts spéciaux. Si on oblige ces groupes à respecter les règles, tout le monde connaîtra les règles, et aucun intérêt spécial n'aura d'influence supplémentaire ou indue. Je pense qu'il s'agit d'un modèle qui devrait être étudié de concert par les gouvernements provincial et fédéral.
Merci.
Monsieur Crocker, il y a une raison pour laquelle je voulais obtenir vos notes. Vous avez dit quelque chose au sujet de quoi je voulais vraiment obtenir un peu plus d'information. Votre gouvernement a déjà commencé à travailler sur l'établissement d'un programme d'innovation et de transition relatif aux fruits de mer. Je me demande si vous pourriez nous communiquer un peu plus d'information à ce sujet.
Il s'agit d'un programme que nous avons instauré dans le budget de l'année en cours. C'est un petit programme de 2 millions de dollars. L'objectif de ce programme était d'étudier les projets de financement ou d'aider les pêcheurs ou les transformateurs qui s'intéressent à l'amélioration de l'équipement. Par exemple, dans le cadre de ce programme, nous avons établi des partenariats avec certains pêcheurs relativement à des systèmes pourvus d'hameçons. Nous avons également contribué à une certaine technologie embarquée, des casiers à morue.
Oui, il s'agit d'une contribution à l'égard du coût en capital.
Je peux vous assurer une chose — et M. Efford va l'apprécier —, c'est qu'aucun financement n'est destiné aux filets maillants.
D'accord.
C'était plus un commentaire. Nous avons beaucoup parlé de la gestion de la pêche, pas nécessairement de la gestion des stocks de poisson. J'ai cru bon demander aux témoins s'ils avaient des réflexions à formuler sur la façon dont nous devons procéder à la gestion des stocks de poisson.
Je pense que cela nous ramène à l'un des arguments formulés par le sénateur Wells au sujet d'un système de gestion selon lequel nous rassemblerions la province, le gouvernement fédéral et tous les intervenants et veillerions à ce que, quand nous établirons les paramètres de cette nouvelle pêche — parce que, rappelez-vous qu'il ne s'agit pas de la pêche de 1992 —, ils seront acceptés et respectés par tous. Selon moi, pour faire allusion aux propos du sénateur Wells, l'un des problèmes auxquels nous avons récemment fait face dans l'industrie de la pêche a été une approche à la petite semaine de « faites ceci, faites ceci et faites cela », mais elle cause des problèmes.
Monsieur le président, ai-je le temps de poser une question de plus?
Monsieur Lewis, quand les représentants du ministère des Pêches ont comparu devant nous, ils ont mentionné le capelan. Je leur ai demandé quand la dernière étude portant sur ce poisson avait été menée, et ils ne nous ont pas vraiment donné une très bonne réponse à cette question.
On nous a présenté de l'information concernant la capture des relevés de recherche. Il s'agit d'un changement essentiel au chapitre des stocks de morue de la dernière décennie. Dans la division 3L, elle ne montre pas le retour aux quantités que nous observons du côté qui est situé plus au nord de cette division. Auriez-vous davantage d'information sur les quantités de capelan dans cette zone?
Comme je l'ai mentionné, l'information sur le capelan est relativement fragmentaire. Les travaux de relevé qui sont effectués le sont surtout près des côtes. Pour ce qui est de bien comprendre la situation des stocks de capelan extracôtiers, à ce que je sache, on dispose de très peu d'information à ce sujet. C'est là que la diagraphie acoustique — l'utilisation de navires qui pourraient effectuer des relevés dans les eaux distantes qui s'étendent à la limite des 200 milles — constituerait un grand avantage.
Merci, monsieur Lewis.
Il nous reste cinq minutes pour des questions posées par le côté du gouvernement.
Monsieur McDonald, vous avez la parole, pour cinq minutes.
Merci, monsieur le président.
Je voudrais revenir brièvement au sénateur Wells et à sa réponse à la question au sujet des 115 000 tonnes qui seraient plutôt une chose de type social à dire pour le premier ministre et à intégrer dans son programme en tant que promesse électorale ou à appuyer fermement. Cela ne me surprend pas en raison du fait que le gouvernement conservateur qui était au pouvoir — et même lorsque les conservateurs étaient dans l'opposition — estimait encore que la politique du dernier entré, premier sorti était la bonne pour notre pêche à la crevette. Nous savons où cette politique se situe aujourd'hui, et nous connaissons le volet de la contiguïté.
Vous parlez du gouvernement fédéral qui contrôle la pêche et de la province, qui contrôle la transformation, et vous avez mentionné l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers. Pourquoi pensez-vous que cela n'a pas eu lieu? Même sous le gouvernement précédent — pour une personne qui est si passionnée et, même si vous êtes au Sénat, encore liée à ce parti —, pourquoi pensez-vous que cela n'a pas eu lieu, qu'aucune approche de gestion conjointe de la pêche n'a été adoptée en ce qui a trait à Terre-Neuve-et-Labrador?
Encore une fois, il s'agit d'une bonne question. Je vais retirer l'aspect politique; je n'ai aucun commentaire à formuler au sujet de la politique du dernier entré, premier sorti.
Selon moi, ce qui arrive, en général, c'est que des groupes veulent maintenir et consolider leur autorité. Il est certain que, dans le domaine de la pêche, cette autorité, c'est la compétence. Le gouvernement fédéral veut maintenir et consolider ce qui est de sa compétence, et je pense que la province veut tout autant maintenir et consolider ce qui relève de sa compétence.
Dans le cas de l'Office-Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers et de la pêche extracôtière, les tribunaux ont tranché qu'il s'agissait d'une compétence fédérale. Une entente a été conclue — je pense que c'était tout à l'honneur du gouvernement de l'époque — selon laquelle cette activité serait considérée comme si elle était terrestre, comme en Alberta, ou comme c'est le cas d'autres ressources rurales en Saskatchewan ou de toute ressource terrestre. À son honneur, le gouvernement fédéral de l'époque a estimé que le fait de considérer la gestion et le traitement conjoints de la pêche extracôtière comme une activité terrestre présentait un avantage adéquat et constituait la bonne chose à faire.
Une partie de cette approche consiste simplement à unir nos efforts. Pourquoi cela n'a-t-il pas encore été fait? Nous avons tenu certaines discussions à ce sujet vers 2006 ou 2007, quand je travaillais pour le ministre Hearn, à cette époque, mais l'environnement politique n'y était pas, peu importe le parti, entre les gouvernements fédéral et provincial de l'époque.
Merci.
J'ai une autre question à poser.
Monsieur le ministre Crocker, vous n'avez pas encore eu la possibilité de commenter l'attribution des 115 000 premières tonnes aux pêcheurs côtiers.
En juin 2015, la Chambre des communes provinciale a adopté à l'unanimité notre soutien de l'attribution des 115 000 premières tonnes de poissons aux pêcheurs côtiers. Nous continuons d'appuyer ce principe. La pêche côtière procurera les avantages les plus directs à la province. Qu'il s'agisse de la pêche ou de la transformation terrestre, il s'agit d'une partie très importante pour les collectivités rurales de notre province, alors nous maintenons notre engagement à cet égard.
Laissez-moi ajouter quelque chose au sujet de l'élément de la gestion conjointe: ce serait intéressant si on regarde la morue du Nord. De nombreuses provinces sont adjacentes à beaucoup de nos pêcheries, et il y a des zones de pêche qui chevauchent plus d'une administration, mais un des éléments intéressants en ce qui concerne la morue du Nord, c'est qu'en réalité, seulement deux administrations sont concernées. Il s'agit de Terre-Neuve-et-Labrador et du Canada. La morue du Nord pourrait présenter une occasion unique pour un certain type de gestion conjointe de ce stock en particulier.
Je serai bref.
Monsieur Efford, nous avons évoqué la biomasse et tout, et vous avez été impliqué aux échelons provincial et fédéral en tant que ministre responsable des pêches. En tant qu'ancien ministre, selon vous, à quel taux la biomasse doit-elle être pour maintenir une industrie de la pêche commerciale?
Tout d'abord, je ne crois pas que les renseignements scientifiques nous disent que nous n'avons que 300 000 tonnes dans l'océan.
Je suis allé dans les Grands Bancs. Mon fils y est. On y pêche, quand il y a des poissons à attraper — il n'est pas question de morue — et les eaux sont pleines. J'y suis allé en excursion en fin de semaine, et, ce que j'ai vu juste au bout de la baie de la Conception était absolument époustouflant.
Si on veut nous dire que nous n'avons que cette quantité de morue, ce que je voudrais qu'on m'assure et que je voudrais voir — et cela répondrait à ma question —, ce sont les données scientifiques écrites, la façon dont elles ont été obtenues et qui les a, car on ne peut pas nous dire que nous n'avons que cette quantité de morue. Je crois que les stocks de morue sont bien plus importants que cela.
Je suis désolé. Nous avons terminé. Merci. Les cinq minutes sont écoulées.
Je veux remercier tous nos invités.
Tout d'abord, vous avez reçu la photographie qui provenait de M. Efford. Je veux remercier les responsables du Sheraton de nous l'avoir fournie en couleur, d'ailleurs. C'était très gentil de leur part. L'autre chose, simplement pour vous donner un avant-goût, monsieur Efford et les autres témoins, c'est que nous avons parlé de science et que, cet après-midi, à 14 h 30, nous accueillerons un chercheur scientifique principal du MPO, qui va témoigner. Si vous voulez rester pour l'entendre, peut-être que vous pourrez obtenir des réponses à vos questions durant cette série d'interventions.
L'autre chose, bien entendu, c'est que nous allons faire distribuer la biographie de nos invités cet après-midi.
Pour l'instant, avant que nous fassions une pause de quelques minutes avant l'arrivée de notre prochain groupe de témoins, je veux remercier nos témoins actuels de leur présence: le sous-ministre Lewis et le ministre Steve Crocker, qui est également député à la Chambre d'assemblée pour... aidez-moi, j'ai un trou de mémoire...
C'est fait.
En outre, l'ancien ministre Efford; c'est bien de vous revoir, monsieur.
Monsieur le sénateur Wells, j'ai négligé de mentionner que vous êtes actuellement membre du Comité sénatorial des pêches. Est-ce exact?
J'ai été membre du Comité sénatorial des pêches il y a deux ou trois ans, quand nous avons mené l'étude sur les phoques et celle qui portait sur l'aquaculture.
Alors, vous y êtes en pensée, je suppose. Nous allons en rester là.
Merci beaucoup.
Nous allons faire une pause de quelques minutes. Vers 10 h 30, nous accueillerons notre deuxième groupe de témoins.
Veuillez vous asseoir. Nous allons bientôt entendre des discours, et, encore une fois, nous devons demander la permission parce qu'ils sont rédigés en anglais seulement. Simplement pour clarifier les choses et pour le souligner à nos invités, nous devons distribuer les documents dans les deux langues, sauf si nous obtenons le consentement unanime nous permettant de procéder avec une seule langue.
Est-ce que j'ai le consentement unanime nécessaire pour distribuer les commentaires de nos témoins?
Des voix: D'accord.
Le président: Nous pouvons y aller. Commençons. Nous prenons un peu de retard.
Il s'agit du deuxième groupe de témoins. Nous accueillons M. Derek Butler, de l'Association of Seafood Producers.
Monsieur Butler, je suis ravi de vous revoir.
Nous accueillons Alberto Wareham, président et directeur général d'Icewater Seafoods Incorporated.
Nous accueillons une autre personne qui n'est pas étrangère au Comité: M. Keith Sullivan, président de Fish, Food and Allied Workers — FFAW.
Vous disposez de 10 minutes chacun. Si vous parlez pendant moins de 10 minutes, ce sera également apprécié, car nous voulons nous rendre aux questions et aux commentaires.
Monsieur Butler, je vais vous demander de commencer, s'il vous plaît. Vous avez 10 minutes.
Merci beaucoup. Je me suis organisé pour que mon discours dure un peu moins de neuf minutes, alors j'espère arriver à m'en tenir à cela.
Au nom de l'Association of Seafood Producers, je suis heureux de comparaître devant le Comité, et je vous remercie de l'invitation.
Je vais vous présenter un bref aperçu de l'ASP, notre rôle et notre travail et qui nous représentons, puis je formulerai de brefs commentaires sur notre point de vue concernant la morue du Nord dans l'avenir.
L'ASP est une association industrielle. Elle représente la majorité des producteurs de fruits de mer de la province, par volume et par valeur. Nous comptons parmi nos membres de petites et moyennes entreprises ainsi que de grandes entreprises. La plupart sont des entreprises familiales, et plusieurs appartiennent à des pêcheurs. Elles s'investissent toutes de façon unique dans les régions rurales de Terre-Neuve-et-Labrador; il n'y a pas trop d'usines de transformation du poisson, ici, dans le secteur riverain de la ville. Quelques-unes ont accès à leurs propres quotas pour certaines espèces, mais la plupart achètent le poisson auprès de la flotte côtière indépendante représentée par mon collègue, M. Keith Sullivan.
Les membres de l'ASP produisent un vaste éventail d'espèces accessibles aux fins de la pêche commerciale. Nos membres produisent la majorité du crabe des neiges et de la crevette côtière, à des taux s'approchant des 80 ou 90 % des deux, ce qui représente la majeure partie de la valeur de la pêche dans la province. Ils produisent également la grande majorité des espèces pélagiques auxquelles nous avons accès, comme le capelan, le hareng et le maquereau. Nous nous occupons d'une bonne partie du poisson de fond, y compris la morue.
Tout ce que nous produisons — ou la majeure partie — est exporté. Nos marchés sont partout dans le monde, y compris en Amérique du Nord, en Europe, en Afrique et — de plus en plus — en Asie, année après année. En tant qu'association, nous prenons part à l'éventail habituel d'activités qui conviennent à une association commerciale, notamment les politiques publiques, le gouvernement, les relations avec les médias et les services aux membres. Ces services comprennent le fait de servir en tant que client de la première écocertification du Marine Stewardship Council au Canada, pour la crevette nordique. À l'époque, il s'agissait du plus grand district de crevette ainsi certifié au monde et du premier sur le littoral est de l'Amérique du Nord.
Comme vous le savez, la certification MSC est une norme vérifiée par un tiers en matière de durabilité des pêches visant à assurer le monde — nos marchés — que nos produits proviennent de pêcheries durables du point de vue de ce que nous pêchons, de son habitat et de ses écosystèmes et du régime de gestion. Nous sommes maintenant le client de quatre certifications différentes englobant la crevette dans le golfe du Saint-Laurent, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve-et-Labrador, et le crabe des neiges, dans la province. Nos membres sont titulaires d'autres certificats également.
Dans le cadre de ce qui est en quelque sorte une anomalie dans l'industrie, nous négocions également le prix de 67 espèces de poisson par année, car notre industrie est assujettie aux lois sur la négociation collective. Cette activité compte pour une bonne partie de notre travail.
Je travaille pour l'ASP en tant que directeur général depuis 2004, et je siège au conseil d'administration en tant que président depuis 2006. J'ai également siégé au CCRH — le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques — et à un certain nombre d'autres organismes consultatifs relatifs à la pêche ou connexes.
La raison de votre présence ici, et la raison de notre présence ici, c'est la morue. De toute évidence, ce poisson est important. Comme je le dis souvent, il fait partie de l'histoire culturelle, sociale, politique et économique de la province. Nous n'étions qu'une île dans la mer et, essentiellement, une plateforme pour la poursuite saisonnière de la pêche par les Européens. Plus tard, nous avons été un lieu d'habitation, une colonie, puis un pays, et, maintenant, nous sommes une province du Canada. La morue, c'est notre raison d'être. Il s'agissait du marché boursier de l'Europe et du gagne-pain de notre peuple. C'est triste, mais nous connaissons tous l'histoire liée au terme « moratoire ». Le simple fait de le prononcer, cela dit tout.
Au cours des dernières années, le travail du MPO et du Centre for Fisheries Ecosystem Research — CFER — à l'institut maritime donne à penser que la biomasse de la morue du Nord a augmenté; pourtant — il s'agit de mon argument à retenir —, il faut souligner que la pêche n'est pas encore rétablie. L'ASP est d'avis qu'une stratégie générale de limitation est requise dans l'approche que nous adopterons par rapport à la morue du Nord.
Comme nous l'avons écrit au ministre des Pêches et des Océans, l'an dernier, « une stratégie générale de limitation fonde toute augmentation de la recherche scientifique, permet d'éviter que l'on refasse les erreurs du passé, accélère le rétablissement des stocks et protège les investissements importants qui seront requis pour la modernisation et pour la mise en valeur du marché ». Cette limitation comprend le respect du cadre d'approche de précaution à l'égard duquel le MPO s'est engagé. Le ministère a affirmé que son cadre d'approche de précaution orientera les décisions. L'Association of Seafood Producers appuie le respect de ce cadre.
À cet égard, il convient de souligner que le renforcement des stocks n'a pas encore eu lieu. La biomasse demeure dans la zone critique, à un peu plus du tiers de la Blim. Dans le cadre d'approche de précaution du MPO, cela signifie que les retraits doivent être maintenus au minimum. Dans l'article « Northern cod comeback », publié dans le Canadian Journal of Fisheries and Aquatic Sciences l'an dernier, les auteurs Rose et Rowe laissent entendre que, grâce à une gestion modeste des stocks et à un faible taux de mortalité du poisson, « ce stock pourrait se rétablir, peut-être en moins d'une décennie ».
Encore une fois, j'insiste, les stocks ne sont pas encore reconstitués.
Notre association a en outre officiellement soutenu la position du Secrétariat canadien de consultation scientifique du MPO qui disait l'an dernier, dans sa réponse des sciences, que « les prélèvements devaient rester faibles afin de favoriser la croissance du stock ».
Nous avions déjà signalé dans des lettres au ministre, parallèlement au rapport sur les poissons de fond que le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, le CCRH, avait présenté en 2011 au ministère des Pêches et Océans, intitulé Vers le rétablissement des poissons de fond et d'une pêche durable dans l'Est du Canada, dont j'ai ici une copie, qu'on a déjà vu qu'une croissance de la biomasse avait été annulée par une augmentation prématurée des quotas.
J'ai eu le plaisir de participer aux travaux du CCRH, au moment où ce rapport a été produit, et j'aimerais réitérer aujourd'hui ses conclusions. Lorsqu'il y a eu croissance, dans le passé, elle a été annulée. Nous voulons éviter cela, et je crois que tous les intervenants veulent la même chose. Il est donc impératif que nous suivions la science plutôt que de la précéder. Nous devons éviter de nous fier à notre impression de ce qu'il y a, là-bas, ou à ce qu'il se dit sur les tribunes téléphoniques.
Nos concitoyens canadiens et la communauté internationale suivent de près cette pêche, et ils ont raison. L'effondrement de ces stocks a eu tout un retentissement, et le monde a raison de surveiller ce que nous faisons. Nous préférons rester plus prudents, pas seulement en raison de l'attention que le monde entier porte à la morue du Nord, mais parce que cela s'impose, en réalité, comme le prévoit la Stratégie de pêche en conformité avec l'approche de précaution adoptée par le MPO. Il est nécessaire de garder les prélèvements à un niveau minimum, et, jusqu'ici, ces niveaux de prélèvement minimaux ont été la clé du rétablissement de ces stocks, nous le voyons aujourd'hui.
La morue du Nord, il faut le reconnaître, n'est pas seulement un poisson emblématique ou une étude de cas intéressante pour les observateurs internationaux ou pour les responsables de la gestion et de la science nationales des pêches. Au bout du compte, le rétablissement des stocks est important pour les représentants de l'industrie présents ici aujourd'hui. Je le répète, je cite encore une fois le rapport du CCRH de 2011: « Ce rétablissement exigera des pratiques de pêche durable, des entreprises économiquement viables et des produits de haute valeur et de grande qualité qui seront acceptés sur les marchés mondiaux. »
À une époque où l'approvisionnement en poisson blanc augmente, sur les marchés internationaux, des poissons sauvages ou de culture, la morue du Nord aura beaucoup de valeur, car elle soutiendra une industrie moderne, économiquement viable, et qu'il s'agit d'un poisson de qualité supérieure. Nous n'en sommes pas encore là, cependant. Certains se préoccupent, avec raison, que nous n'ayons pas la structure nécessaire pour y arriver, étant donné notre point de départ.
Nous sommes également au courant de l'engagement qu'a pris le ministre — et nous l'appuyons — quant à « la mise en oeuvre d'un régime de permis et d'étiquettes pour tous les participants à la pêche récréative [qui] sera mis en place avant la saison 2017 ». C'est un point important.
Permettez-moi de dire en terminant que, comme toujours, nous encourageons le MPO à poursuivre sa collaboration avec le secteur. Nous savons que le MPO soutient également notre projet d'amélioration de la pêche à la morue du Nord, que notre association est en train de mettre sur pied avec la collaboration du Conseil des allocations aux entreprises d'exploitation du poisson de fond. Ce projet, comme tous les projets visant l'amélioration de la pêche, a pour but de préparer la morue du Nord à une éventuelle certification MSC.
Le MSC, j'aime à le rappeler aux gens, assure la démocratie des marchés; il délivre des attestations indépendantes relatives à la durabilité des produits de la mer sur les marchés. Le fait que le MSC ait vu le jour dans le sillage du moratoire sur le poisson de fond, imposé ici au début des années 1990, en est un exemple éloquent.
Le monde a le regard tourné vers nous. Peu importe ce que nous faisons, dans le dossier du poisson de fond et de la morue en particulier, nous devons le faire comme il faut, si nous voulons que ça dure encore de nombreuses années. Nous pouvons être certains, puisque nous nous attendons à des changements de l'écosystème, que la diminution du volume des fruits de mer, plus précieux, et la résurgence du poisson de fond, dont la valeur unitaire est moindre, imposera des pressions jamais vues jusqu'ici sur les participants et les gestionnaires du secteur. Nous devons nous attendre à vivre des années de transition difficiles.
Encore une fois, merci du temps que vous m'avez accordé. Je suis prêt à répondre à toutes vos questions.
Merci.
Merci, monsieur Butler.
Vous avez tenu parole, vous avez parlé pendant environ neuf minutes.
Monsieur Wareham, s'il vous plaît, 10 minutes ou moins.
Merci, monsieur le président.
Merci au Comité de nous recevoir ce matin.
Icewater Seafoods est une entreprise familiale qui a une longue expérience de la pêche à la morue à Terre-Neuve. Il y a sept générations de cela, mes ancêtres sont partis de Dorset, en Angleterre, pour s'installer à Terre-Neuve. C'est mon père, Bruce Wareham, qui a fondé Icewater en 2004 dans les anciennes installations des Aliments High Liner de la province.
Aujourd'hui, Icewater est une entreprise à intégration verticale, qui se consacre à la pêche aux poissons de fond; elle arrive au deuxième rang au chapitre des allocations aux entreprises utilisant des navires de plus de 100 pieds pour la pêche à divers poissons de fond dans le Canada atlantique. Avec cet accès aux ressources, Icewater peut planifier et maintenir ses activités de son usine d'Arnold Cove. Cette installation à la fine pointe de la technologie est entièrement consacrée à la transformation de la morue de l'Atlantique Nord.
Notre équipe comprend 210 experts de la morue, et nous avons réussi à nous ménager un solide marché à créneau, et nous vendons, en Europe principalement, des portions individuelles de morue surgelée de qualité supérieure. Notre usine a pu se consacrer exclusivement à la morue, même après le moratoire sur la morue du Nord annoncé en 1992. Grâce à cela, ainsi qu'à l'aide et au soutien de notre collectivité, Icewater est désormais le principal acheteur et producteur de morue à Terre-Neuve, depuis l'instauration du moratoire.
Avant 1992, la morue de l'Atlantique Nord était la reine du monde pour ce qui est de la production de poissons blancs, et Terre-Neuve en tire avantage depuis que les Européens, dès 1497, ont commencé à sécher et saler le poisson de nos côtes. Toutefois, depuis le moratoire, la production et la consommation de poisson blanc ont beaucoup augmenté partout dans le monde. Bien que la morue de l'Atlantique Nord reste le poisson blanc de choix des consommateurs avisés, elle ne domine plus la production mondiale de poisson blanc, cette place étant principalement occupée par la goberge de l'Alaska et de la Russie. En 2016, les prises de morue de l'Atlantique Nord, qui atteindront 1,4 million de tonnes, ne représenteront que 18 % des prises mondiales de poisson blanc, qui s'élèveront à 8 millions de tonnes.
L'intérêt des marchés mondiaux pour la morue de l'Atlantique Nord a également beaucoup évolué depuis le moratoire. À partir de la fin des années 1950, lorsque la technologie de congélation a été inventée, jusqu'au moratoire, la plus grande partie de la morue pêchée à Terre-Neuve était transformée en blocs et vendue en Amérique du Nord. Ce marché a disparu. Aujourd'hui, l'Amérique du Nord représente environ 5 % du marché mondial de la morue de l'Atlantique Nord. Le principal marché de la morue de l'Atlantique Nord de qualité supérieure, fraîche ou congelée, c'est le Royaume-Uni et l'Europe de l'Ouest. Icewater vend 90 % de sa production sur le marché européen et est en concurrence avec les grands producteurs de l'Islande et de la Norvège, qui se préoccupent de la durabilité depuis de nombreuses années.
En fait, c'est l'annonce du moratoire, en 1992, qui a donné naissance au Marine Stewardship Council, et cet organisme est aujourd'hui le plus important organisme de certification des produits de la mer durables dans le monde entier. Franchement, les marchés mondiaux n'ont rien à faire des maigres 4 000 tonnes de morue du Nord prises en 2015. Mais, pour Icewater, cette ressource brute a complété notre offre existante en nous permettant d'étendre encore notre présence sur les marchés européens des produits de qualité.
Cela ne veut pas dire que la morue du Nord n'a pas d'avenir. En fait, c'est plutôt le contraire. Dans la mesure où nous faisons ce qu'il faut faire — c'est-à-dire viser la qualité et permettre la reconstitution des stocks —, la morue du Nord pourrait assurer l'avenir de l'industrie de la pêche de Terre-Neuve. C'est en gardant cette exigence à l'esprit que je vous rappelle les choses qui suivent.
La dernière évaluation des stocks de morue du Nord réalisée par le ministère des Pêches et des Océans, qui a publié son rapport en mai 2016, montrait que les stocks sont à 34 % seulement du point de référence limite inférieur, niveau sous lequel le stock risque réellement de ne plus être productif à long terme. Selon le cadre de précaution du MPO, les prélèvements devraient rester le plus bas possible, et le concept même de pêche commerciale ne tient pas compte de la réalité.
Il ne fait aucun doute que le stock a connu une forte croissance au cours des cinq dernières années. Il est également indiscutable qu'une bonne partie de cette croissance tient à un nombre limité de classes d'âge relativement fortes, qui se sont présentées comme une anomalie et qui n'ont pas été revues depuis.
Si nous ne permettons pas aux individus de ces classes d'âge de croître et de devenir des géniteurs afin de contribuer au recrutement futur, nous pourrions très facilement connaître de nouveau le même cycle d'effondrement que ces dernières années. Nous devons, comme l'exige la politique même du ministère, garder au niveau le plus bas possible le volume des prélèvements. Si nous augmentons trop rapidement les prises autorisées, nous allons annuler la croissance et, pour la troisième fois en 25 ans, nous perdrons une occasion de profiter pleinement des stocks de morue du Nord.
Dans le domaine des pêches, nous établissons souvent nos seuils de prélèvement en fonction de l'évaluation de l'incidence de nos prises d'aujourd'hui sur la population de l'année suivante, de l'année qui la suit, voire des 10 années qui suivent. Dans le cas de la morue du Nord, le modèle adopté par le MPO ne va pas plus loin que les trois années subséquentes, en raison d'une erreur stochastique de la formulation du modèle. En raison de cette limite, la direction est forcée de prendre des décisions sans avoir évalué les répercussions possibles à moyen et à long termes. C'est clairement un problème, surtout quand on sait que les stocks sont à 34 % seulement du niveau inférieur du point de référence limite.
Auparavant, avant le moratoire, l'industrie de la transformation de Terre-Neuve était axée sur la production, c'est-à-dire qu'elle proposait principalement des blocs de morue et des produits salés, qui n'exigeaient pas une matière première de qualité supérieure.
Toutefois, pour être concurrentiels, aujourd'hui, sur le marché de la morue de qualité supérieure, nous devons pour commencer nous assurer d'une source durable de matière première de qualité supérieure. Pour être présent sur ce nouveau marché, le secteur de la transformation de Terre-Neuve doit être axé sur le marché, c'est-à-dire qu'il doit produire ce que le marché demande et qu'il doit cibler les produits qui assurent la valeur la plus élevée à toutes les étapes de la chaîne de valeur. Une matière première de qualité supérieure suppose l'équilibre des prises extracôtières, l'automne et l'hiver, et les prises côtières, au printemps et au début de l'été. Il ne faut pas oublier que la morue du Nord est un poisson migrateur: il fraie en haute mer, au début du printemps, et migre vers la côte pour se nourrir, pendant les mois d'été; il retourne en haute mer à l'automne.
Nous croyons savoir que différents ministres et fonctionnaires des Pêches ont dit que, lorsque la pêche sera rétablie, la priorité sera l'accès aux prises côtières, jusqu'à concurrence de 115 000 tonnes de morue du Nord.
La priorité, toutefois, ce n'est pas la même chose que l'exclusivité. Historiquement, les navires de pêche de plus de 100 pieds de longueur sont un des éléments clés de l'exploitation tout au long de l'année des usines de Terre-Neuve. Dans une histoire récente de la pêche à la morue du Nord, préparée par un ancien directeur général régional de Terre-Neuve, on souligne que, de 1977 à 1992, le secteur des navires de plus de 100 pieds de longueur était responsable d'environ 40 % des prises totales de morue du Nord au Canada.
Le ministre a récemment affirmé que son gouvernement honorerait tout engagement précédent quant à l'accès aux poissons côtiers au moment de la reprise des pêches; certaines personnes ont interprété cela comme un engagement à l'égard d'un accès exclusif. Mais si nous n'intégrons pas aux pêches un volet extracôtier, nous ne pourrons pas maximiser la valeur de nos prises, lorsque la population de la morue du Nord se sera rétablie.
Il nous faut tirer une leçon du moratoire, et c'est que les gestionnaires des pêches doivent pouvoir compter sur les meilleures données scientifiques qui soient lorsqu'ils doivent prendre des décisions de gestion qui auront une incidence sur plusieurs années. La morue du Nord vit dans une très grande région, et comprend des stocks génétiquement distincts. Ce poisson a été assez bien étudié, mais il reste de grandes lacunes dans nos connaissances sur son milieu de vie, sur sa façon de se déplacer et ses saisons migratoires ou encore sa vulnérabilité à la pêche.
Pour cette raison, et aussi pour nous assurer des pêches durables et l'obtention un jour de la certification MSC, le Conseil des allocations aux entreprises d'exploitation du poisson de fond et l'Association of Seafood Producers ont mis en oeuvre, en 2015, un projet d'amélioration des pêches pour la morue du Nord. Le plan de travail sur cinq ans est assorti d'un budget de 11,7 millions de dollars et, grâce à la science moderne, nous permettra de mieux comprendre que jamais ce stock. Jusqu'ici, le projet d'amélioration des pêches a financé la mise au point de modèles d'évaluation et de simulation ainsi que l'identification génétique des composantes du stock, et il s'intéresse maintenant à l'élaboration d'un dispositif de suivi acoustique à grande échelle.
En fait, le gouvernement a annoncé récemment que l'Ocean Frontier Institute allait travailler en partenariat dans le cadre de notre projet d'amélioration des pêches, ce qui contribuera beaucoup à nos efforts visant une gestion durable du stock. C'est une chose dont mes partenaires et moi-même vous remercions.
Les travaux réalisés dans le cadre de notre projet d'amélioration des pêches ont mis en relief un grand risque: si la productivité du stock demeure faible, la population risque de décliner de nouveau. Chaque prise augmentera ce risque. Si nous voulons rester positifs, il se peut que le stock continue quand même à croître, si la production de capelan augmente et si nous veillons à ce que les seuils restent au niveau minimum. Si c'est ce qui se passe, nous allons pouvoir atteindre le point de référence limite d'ici 5 à 10 ans. À ce moment-là, le stock pourra soutenir une pêche commerciale, durable et certifiée, et nous pourrons livrer concurrence sur les marchés mondiaux.
Merci de votre attention et du temps que vous m'avez consacré.
Il sera certainement difficile de parler de la pêche à la morue du Nord en 10 minutes, alors je vais tout de suite commencer.
Bienvenue. Bonjour aux membres du Comité. Je m'appelle Keith Sullivan et je suis président du syndicat Fish, Food and Allied Workers Union, affilié à Unifor. Notre syndicat est le plus grand syndicat du secteur privé de la province; il représente plus de 12 000 membres, dont la majorité travaille dans le domaine de la pêche ou de la transformation du poisson.
Tout le monde sait que notre province est très profondément attachée à la pêche à la morue. Je vais vous parler de la valeur de la pêche à la morue pour nos membres et nos collectivités.
Notre syndicat a vu le jour en 1970, alors que le prix de la morue était de 2,5 ¢ la livre. À l'époque, on n'appelait pas ça de la « morue », on appelait ça tout simplement du poisson. La morue, c'était notre pêche, et c'était notre identité. Le moratoire sur la morue du Nord imposé en 1992 a mis au chômage des dizaines de milliers de membres de notre syndicat, y compris ma famille, en les rendant dépendants des programmes de subventions du gouvernement. Le moratoire sur la morue est une calamité qui a pour toujours changé les relations entre les pêcheurs et la pêche. Tous les aspects de la pêche ont été touchés par ce changement, des sciences à la mise en marché en passant par la gestion.
Dans le sillage du moratoire, il était essentiel que les pêcheurs et notre syndicat se donnent un rôle plus étendu dans le domaine de la science des pêches. C'est pourquoi notre syndicat s'est employé, ces 25 dernières années, à élaborer un programme de science des pêches complet portant sur diverses espèces. Le syndicat s'est également doté d'ichtyologistes à temps plein, de façon que, lorsque le MPO discute de questions scientifiques, nous pouvons participer aux discussions en mettant à contribution de vastes connaissances.
En ce qui concerne la morue, nos deux principaux programmes scientifiques sont les programmes des pêches sentinelles et du marquage de la morue. Le programme des pêches sentinelles a été créé après le moratoire, en réaction au grand fossé qui séparait les observations des pêcheurs eux-mêmes et les résultats des évaluations du stock effectuées par le MPO les années précédant le moratoire, qui nous avaient été remis. Avant le moratoire, les renseignements recueillis par les pêcheurs côtiers n'étaient pas systématiquement enregistrés et utilisés pour la gestion des stocks. Jusqu'au moratoire, les renseignements quant à l'abondance du poisson étaient fondés sur les prises des navires hauturiers, qui pêchaient lorsque les morues étaient regroupées et vulnérables. L'information sur les pêches côtières de morue était limitée.
Le programme sentinelle de la morue a été conçu dans le but de recueillir systématiquement de l'information sur les pêches côtières afin de s'en servir au moment d'évaluer et de gérer les stocks. Nous disposons aujourd'hui de renseignements sur les taux de prise, et de beaucoup d'information biologique.
L'information que notre syndicat recueille grâce à son programme de marquage est cruciale. Elle donne une estimation directe de la mortalité du poisson et nous permet d'estimer le volume de morues prélevées pendant une saison. Cette information permet même de rendre compte des prélèvements de la pêche récréative. Notre programme de marquage est réalisé en partenariat avec le MPO; il consiste à attacher des étiquettes « spaghetti » aux morues du Nord évoluant dans les eaux côtières. Cette semaine seulement, nos techniciens s'affairent sur la péninsule nord et dans le sud du Labrador.
Qu'est-ce que nos programmes scientifiques nous apprennent? Pour le programme sentinelle, les taux de prises ont beaucoup augmenté ces 5 à 10 dernières années. Nous avons d'abord observé cette observation dans la division 3K, où les filets expérimentaux qui prenaient 4 poissons autrefois en prennent aujourd'hui 15. Dans la division 2J, l'augmentation a été plus lente, mais, avec le temps, les prises à l'aide des filets expérimentaux sont passées de 1 ou 2 poissons à 30 poissons par filet. Ce que cela veut dire, c'est que les taux de prises sont beaucoup plus élevés que ce qu'ils étaient au début du moratoire, en particulier dans la division 2J.
Quant à la mortalité, le niveau est très faible pour le moment pour ce stock. La mortalité par pêche exprime la mortalité de l'espèce due aux pêches sur une année. Pour les trois dernières années, la mortalité par pêche, pour la morue du Nord, était d'environ 2 %. Historiquement, dans les années 1980, la mortalité par pêche était d'environ 20 %. Le niveau actuel est d'un dixième de ce taux; fait plus important encore, on s'attend à ce que la biomasse croisse considérablement au cours des trois prochaines années, selon les projections fondées sur notre dernière évaluation des stocks.
Tout cela témoigne du rétablissement tant attendu du stock de morue du Nord et du changement environnemental correspondant. Le secteur de la pêche et de la transformation s'est occupé principalement des crustacés, ces 20 dernières années. Aujourd'hui, il s'intéresse aux poissons de fond, non pas seulement la morue, mais également le turbot, le sébaste, et tous les autres. Nous espérons pouvoir revenir à la morue, mais nous n'avons pas perdu de vue l'importance de la conservation.
Pas un seul pêcheur dans notre province n'est prêt à vivre de nouveau les défis du moratoire sur la morue. Les nouvelles pêches à la morue vont être gérées correctement. À cette fin, les représentants du WWF, des usines de transformation et du syndicat participent aux réunions sur le projet d'amélioration des pêches à la morue du Nord. C'est un partenariat très important, dont l'objectif est de faire respecter les normes de durabilité des pêches à la morue du Nord; cela suppose par exemple la certification du Marine Stewardship Council.
Le retour à la pêche au poisson de fond est stimulant et exigeant. La pêche à la morue, ce n'est certainement pas la même chose que la pêche aux crustacés, toutes les provinces le savent très bien. Nous sommes d'importants fournisseurs de crevettes et de crabes des neiges, sur le marché. Quant à morue, nous ne représentons certainement qu'une fraction de l'offre globale.
Nous avons beaucoup discuté et débattu de la façon d'aborder la pêche à la morue du Nord, quand les stocks seront rétablis, et il y a une chose qui ressort constamment, c'est que nous allons adopter une approche très différente de l'approche précédente. Avant le moratoire, nous visions la quantité et le marché des bâtonnets de poisson. Lorsque la pêche à la morue sera rétablie, nous nous attacherons à la qualité, et c'est un changement de cap délibéré et nécessaire pour les pêcheurs de notre province.
C'est avec ce souci de la qualité que notre syndicat s'est joint au Groundfish Industry Development Council de Terre-Neuve-et-Labrador. Nous avons élaboré une approche « de la mer à la table ». Nous commençons par déterminer les besoins du marché pour savoir comment obtenir la valeur la plus élevée, et ensuite, nous gérons la pêche à la morue de façon à combler ces besoins. Par exemple, il y a une demande pour de la morue de qualité supérieure, fraîche ou congelée une fois, dans les restaurants « à nappe » et chez les consommateurs avertis. De tels marchés existent un peu partout. Icewater Seafoods, par exemple, a dit être présent sur ces marchés en Europe, par exemple. L'Islande a elle-même augmenté la valeur de ses pêches en fournissant de la morue fraîche dans l'est des États-Unis. Étant donné nos relations actuelles en Europe et notre proximité avec les États-Unis, le marché de la morue représente pour nous un bon débouché.
Même s'il est important de faire correspondre nos nouveaux modes de pêche de la morue aux besoins du marché, nous devons également mettre sur pied une pêche qui conviendra aux pêcheurs et aux travailleurs des usines de l'avenir. Les pêcheurs doivent pouvoir prendre une morue de qualité supérieure et ils doivent être payés en conséquence, pour la valeur qu'ils apportent à cette industrie.
La première chose à faire — et le gouvernement fédéral a le pouvoir de le faire —, ce serait de protéger le principe du propriétaire-exploitant. Ce principe est attaqué depuis 20 ans principalement, mais pas exclusivement, par les entreprises de transformation, et il a eu des conséquences terribles sur l'économie des pêches dans nos régions côtières. Ce qui nous préoccupe particulièrement, ce sont les répercussions des accords de fiducie, une façon de faire qui mine les politiques sur les propriétaires-exploitants et sur la séparation des flottilles et influe sur le coût des permis de pêche, ce qui a représenté pour la prochaine génération de pêcheurs des obstacles importants à l'entrée dans ce secteur.
Les entreprises de transformation qui disposent de ressources importantes ont contourné les politiques sur les propriétaires-exploitants et la séparation des flottilles, faisant monter le prix des permis de pêche au crabe et à la crevette au point où ce sont seulement les pêcheurs bien établis — ou, dans la plupart des cas, les transformateurs — qui peuvent se les payer. Les pêcheurs qui ont conclu des accords de fiducie sont souvent moins payés pour leurs prises. Heureusement, aujourd'hui, les effets des accords de fiducie sur la pêche à la morue sont un peu moins importants. Ce n'est pas la même chose pour toutes les pêches. Toutefois, cela pourrait changer, surtout en raison de l'augmentation de la valeur de la pêche à la morue. C'est pourquoi il faut protéger les politiques sur les propriétaires-exploitants.
Si l'on veut mettre l'accent sur la qualité, il faut également comprendre ce qu'est une morue de qualité et comment on pêche une morue de qualité. Comme on l'a déjà dit, avant le moratoire, la pêche était axée sur la quantité. Les pêcheurs n'ont pas pris de volumes importants de morue du Nord depuis 25 ans, et il reste encore du travail à faire.
Nous avons passé beaucoup de temps, avec les intervenants de tous les échelons du secteur, à chercher à comprendre ce qu'est exactement un poisson de qualité. Ces deux dernières années, nous avons participé à un projet sur la qualité de la morue, en partenariat avec l'APECA et le gouvernement provincial. Des équipes de pêcheurs ont contrôlé un vaste éventail de variables allant de la température du poisson à la manière dont il est manipulé lorsqu'on le sort du filet ou qu'on le décroche de l'hameçon. Lorsque ce projet sera terminé, nous devrions disposer d'un guide complet sur la manière de pêcher une morue de qualité supérieure, et nous pourrons communiquer cette information à l'ensemble du secteur, y compris les pêcheurs.
Les pêcheurs doivent en outre être rémunérés de manière appropriée pour les poissons de qualité qu'ils pêchent. À ce chapitre, nous avons fait des progrès importants. Au cours des trois dernières saisons, nous avons utilisé un système d'établissement des prix en fonction de la qualité, selon lequel une morue de catégorie A commande un prix plus élevé que la morue de catégorie B, et ainsi de suite. Ce système comporte évidemment ses défis, mais les pêcheurs reconnaissent qu'ils doivent être payés en fonction de la qualité, et ce sera la clé de l'augmentation de la valeur.
Le nouveau mode de pêche à la morue exigera des investissements importants, tant pour les pêcheurs que pour les transformateurs. Pour que ces investissements soient rentables, il faut que les prix accordés aux pêcheurs soient bons, et il faut que les pêches soient gérées et structurées de la bonne façon. Le mode de gestion a été modifié, cette année, la saison de pêche ayant été prolongée de façon que les pêcheurs puissent prendre davantage de morues et que nous puissions alimenter le marché de façon plus stable. La meilleure morue, la morue dont les pêcheurs et les transformateurs tirent le meilleur prix, c'est une morue qui a été prise et envoyée rapidement sur le marché. Nous devons laisser tomber les saisons de pêche concentrées et étaler plutôt les prises de manière à éviter des engorgements dans le secteur de la transformation
Ces dernières années, les pêcheurs étaient limités à des prises de 5 000 livres, ce qui représentait une semaine ou deux de travail. Cette année, les prises hebdomadaires sont limitées, mais la saison est considérablement plus longue et s'étend sur plusieurs mois. Cette année, de nombreux pêcheurs ont pris de 15 000 à 20 000 livres de morue. J'ai discuté avec un pêcheur d'expérience qui a pris avec sa fille 36 000 livres de morue, en pêchant uniquement à la ligne, tous les jours. Des prises de 36 000 livres de morue de qualité, voilà un changement positif, et ce n'est qu'une première étape dans l'économie de notre pêche à la morue.
Le gouvernement fédéral a lui aussi pris des mesures positives pour encourager les investissements dans la pêche côtière à la morue. L'an dernier, pendant la campagne électorale, le premier ministre Trudeau s'est engagé à ce que les 115 000 premières tonnes métriques de morue du Nord soient allouées aux navires côtiers. C'était à cette allocation qu'ils avaient droit avant le moratoire, et les pêcheurs côtiers se sont fait dire qu'ils pouvaient s'attendre à ce que ce niveau d'allocation soit rétabli une fois que recommencera la pêche à la morue commerciale normale.
À la fin du mois de juillet, le ministre LeBlanc a confirmé, devant moi et la haute direction de mon syndicat, que cet engagement tenait toujours. Les 115 000 premières tonnes métriques de morue du Nord seront allouées au secteur des pêches côtières. C'est un engagement d'une extrême importance. Nous remettons sur pied la pêche à la morue sur une base très réduite, actuellement. Si nous voulons changer la façon dont nous pêchons, transportons, transformons et vendons de grands volumes de morue, il faudra que les intervenants du secteur sachent que les allocations seront constantes, de façon qu'ils puissent investir sans trop de crainte.
Cet engagement à l'égard des 115 000 tonnes métriques, c'est le meilleur gage de sécurité que le secteur et notre pays peuvent avoir. Il nous donne le temps de nous rétablir à un rythme raisonnable, de rétablir les marchés, d'acquérir une certaine expertise dans le domaine des pêches et de la transformation d'une morue de qualité et de déterminer quel est le meilleur moyen de pêcher et de gérer cette nouvelle pêche à la morue du Nord.
Pour les pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador, la pêche à la morue, cela ne veut pas dire de revenir constamment sur le passé; cela veut dire de se dessiner un nouvel avenir. Nous espérons que, d'ici 30 ans, la pêche à la morue n'évoquera pas le redouté moratoire de 1992. Nous espérons plutôt que la pêche à la morue sera associée à des images de 2016, des images d'un homme et de sa fille qui prennent 36 000 livres de morue avec une canne à pêche et un hameçon, et que nous nous rappellerons que c'est à cette date, je vous le répète, que nous avons commencé à transformer une industrie de la pêche à la morue durable en un pilier de la prospérité des collectivités côtières de Terre-Neuve-et-Labrador.
Merci.
Merci. J'ai été généreux et je vous ai accordé quelques minutes de plus, mais vous devriez peut-être remercier les deux messieurs que voici, qui ont pris un peu moins de temps. C'est vous qui en avez profité.
Je dois faire un rappel avant que nous ne passions aux questions. Nous nous trouvons dans une salle assez grande dont le plafond est très haut; comme nous disons ici, à Terre-Neuve, si vous n'utilisez pas le micro, il ne se passera rien. Veuillez ne pas l'oublier.
Nous allons commencer par les questions du gouvernement.
Monsieur McDonald, s'il vous plaît, pour sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Je souhaite la bienvenue aux trois messieurs qui se sont présentés ici aujourd'hui et je les remercie de prendre le temps de comparaître devant notre comité.
Ma première question s'adresse au président du syndicat FFAW, M. Keith Sullivan.
Keith, vous avez parlé de l'importance de la morue, du rétablissement de la morue, et du fait que les 115 000 premières tonnes seraient allouées à la pêche côtière; mais j'aimerais savoir ce qui se passera lorsque nous en serons arrivés là et à ce qui se passera ensuite, lorsque nous aurons enfin constitué la biomasse qui nous permettra d'ouvrir la pêche commerciale.
Je crois que j'ai en fait deux questions à vous poser. Puisque vous représentez non seulement les pêcheurs, mais aussi les transformateurs de bon nombre de petites collectivités rurales de Terre-Neuve, lorsque la pêche à la morue sera relancée, à partir de quels niveaux de biomasse pourrons-nous à votre avis revenir à une pêche commerciale en bonne et due forme? Qu'est-ce que cela signifiera pour les collectivités rurales de Terre-Neuve lorsque nous en serons rendus là?
Merci de poser la question. Cela fait des années que nous en discutons.
Nous sommes heureux de voir que les scientifiques constatent la croissance du stock. Au cours des trois prochaines années, selon les observations des scientifiques, nous devrions nous attendre à ce qu'il double. Et cela correspond de fait à ce qu'observent les pêcheurs. La croissance se poursuit à une bonne cadence, et la mortalité de pêche est très faible. Nous sommes heureux de voir cette augmentation année après année. Je crois que l'aspect le plus important, pour ce type de poisson en particulier, c'est de nous assurer d'une pêche durable; puisque tous les yeux sont tournés vers nous, il sera important de faire valoir cet aspect sur les marchés.
Il ne faut pas perdre de vue de quels volumes de poisson il s'agit. Nous parlons d'environ 260 millions de livres de poisson, un volume considérable pour la mise en marché. Cela pourrait représenter 500 millions de dollars pour l'économie de notre province. Et c'est pourquoi je dis qu'il faut que cela revienne aux propriétaires-exploitants, que cela reste dans nos collectivités côtières.
Notre province a l'avantage de pouvoir livrer du poisson frais, en premier lieu aux importants marchés de l'est des États-Unis; c'est un très bon produit congelé une fois, certainement supérieur à la plupart des produits congelés deux fois auxquels le reste du monde a droit. Je crois qu'il est réellement important d'assurer notre présence sur ces marchés et de maintenir notre capacité, étant donné que si nous voulons passer des pêches modestes d'aujourd'hui — quelques milliers de tonnes — à des prises de 115 000 tonnes, il faudra que le secteur des pêches, notre infrastructure et nos marchés croissent au même rythme. Nous devons vraiment nous concentrer sur cet objectif, et les progrès réalisés cette année ne sont qu'un petit pas de plus vers notre objectif d'un approvisionnement plus important.
Je crois que nous avons beaucoup de potentiel. Nous devrons encore faire beaucoup, ensemble, pour réaliser la valeur de ce potentiel, qui se chiffre en centaines de millions de dollars pour tous les citoyens de la province.
Merci.
Ma prochaine question s'adresse à M. Butler et à M. Wareham.
De quel type d'investissement avons-nous besoin, dans le secteur de la transformation, si nous voulons être certains d'être prêts pour les pêches et si nous voulons être en mesure de fournir un produit qui façonnera la demande que nos pêches pourront combler à l'avenir?
Merci de poser la question.
Nous sommes chanceux, car les installations de Terre-Neuve, aujourd'hui, sont toutes à la fine pointe de la technologie; les investissements sont là. Évidemment, nous allons continuer à investir, mais, si vous deviez partir de rien, il faudrait investir de 25 à 30 millions de dollars pour une seule installation, et vous aurez probablement besoin de cinq ou six installations.
Nous ne pouvons pas revenir au secteur des pêches d'antan, lorsqu'il y avait une usine de transformation dans toutes les collectivités. Je ne dis pas que les petites installations n'ont pas leur place, mais si vous voulez faire concurrence aux meilleurs fournisseurs du monde, ceux d'Islande et de Norvège, je crois que cinq ou six installations de 25 à 30 millions de dollars chacune devraient faire l'affaire.
Je dirais la même chose, quant aux chiffres. Nous n'avons pas besoin d'autant d'installations qu'avant. À l'époque du poisson de fond, nous avons réduit de façon draconienne ce nombre, car nous en comptions plus de 200. Nous sommes passés aux crustacés, et nous ne comptons plus aujourd'hui à l'échelle de la province que 60 ou 70 installations. Je dis toujours pour rire qu'il fallait une usine de transformation par district électoral; nous serions satisfaits d'en avoir une quarantaine — je crois que ce serait une trentaine, aujourd'hui — dans toute la province.
Nous avons besoin de dizaines de millions de dollars, mais il y a un hic. À mesure que la biomasse augmente, si nous augmentons aussi les prises, les investissements ne seront plus suffisants. Il faut, pour que les investissements en vaillent la peine, avoir accès à une quantité significative de poisson. À l'heure actuelle, mes membres s'adonnent surtout à la pêche aux mollusques. Si nous voulons passer à la pêche au poisson de fond, nous avons besoin de beaucoup de capitaux, et nous avons besoin des poissons. Le défi consistera donc à trouver un juste équilibre: augmenter tout de suite les quotas de pêche et justifier l'investissement par des volumes suffisants.
Merci.
Monsieur Wareham, quels types de produits finis les marchés vont-ils demander? De quelle qualité parlons-nous? À quelle fourchette de prix pouvons-nous nous attendre si nous faisons cela?
Je crois qu'il me faudra répondre dans l'ordre où vous avez posé ces questions.
Je me rends en Islande une fois ou deux par année, et je me renseigne tous les ans sur la technologie pour m'assurer que nous avons ce qui se fait de mieux. Vous devez comprendre que Marks and Spencer est l'un de nos principaux clients, au Royaume-Uni. Lorsque les représentants de Marks and Spencer viennent visiter nos installations, ils arrivent des installations de l'Islande ou de la Norvège. Ils doivent voir la même chose, s'ils veulent être rassurés. Il n'y a que quatre installations de transformation dans le monde qui sont autorisées à fournir de la morue à Marks and Spencer, et nous en sommes une; nous devons donc avoir la meilleure des morues.
Quand je suis en Islande, je vois les prises. M. Sullivan a parlé du système de classement de Terre-Neuve. Nous avons travaillé pendant trois ans sur ce système, avec eux. Quatre-vingt-quinze pour cent des poissons pris en Islande sont de catégorie A. Nous n'en sommes pas encore là, à Terre-Neuve. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire. Il y a eu des améliorations, cette année. Fondamentalement, il faut presque pêcher un poisson parfait pour être concurrentiels sur ces marchés, le marché du poisson frais et celui du poisson congelé. Nous ne pouvons pas pour l'instant être concurrentiels sur le marché du poisson frais, car nous n'avons pas encore un approvisionnement constant en morues de qualité supérieure, qui nous permettrait d'être présent sur ce marché 12 mois par année. Voilà pourquoi nous nous attachons à la production de poisson congelé.
Merci.
J'ai encore le temps de poser une question, monsieur Wareham. Étant donné que vous dirigez une entreprise prospère, aujourd'hui, dans le domaine de la morue — je crois que vous avez dit que vous comptiez un peu plus de 200 spécialistes de la morue —, est-ce que vous êtes inquiet de la disponibilité d'une main-d'oeuvre spécialisée et compétente au moment où la pêche reviendra en force? Qu'allons-nous faire pour nous assurer d'avoir cette main-d'oeuvre?
Premièrement, si vous pouviez visiter nos installations, vous verriez qu'elles ne correspondent pas à l'idée que les gens se font d'une usine de transformation du poisson typique. Elles ont plutôt l'air d'une salle d'opération. Les gens qui travaillent comptent en moyenne 21 années de service, et ils sont âgés en moyenne de 50 ans. C'est extraordinaire, peu importe le secteur. Dans le secteur des produits de la mer, c'est exceptionnel.
La raison en est que nous n'avons jamais perdu de vue ce dans quoi nous sommes bons, c'est-à-dire la transformation de la morue. Nos employés travaillent des semaines complètes. Nous complétons l'approvisionnement local en achetant des matières premières congelées, de façon qu'ils puissent travailler de 25 à 30 semaines complètes. À mon sens, c'est quand vous offrez aux gens des semaines de travail complètes et un bon salaire que vous les attirez.
L'autre chose, c'est l'automatisation. Nous investissons le plus possible pour nous assurer d'avoir le meilleur équipement du monde, mais nous avons quand même besoin de 210 personnes pour faire fonctionner ces installations...
Merci, monsieur Wareham. Je suis désolé, mais je dois maintenant vous interrompre.
Monsieur Doherty, s'il vous plaît, pour sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Messieurs, je vous remercie de comparaître devant nous aujourd'hui.
J'ai quelques questions.
Je m'adresse d'abord aux témoins. Pour commencer, nous avons entendu le témoignage de représentants du MPO, la semaine passée, qui nous ont dit que, selon leurs études, les chiffres ne représentaient que le tiers de ce qu'ils auraient aimé voir. Toutefois, nous avons aussi entendu des témoins se dire sceptiques quant à ces nombres, dire que, dans les faits, les chiffres sont plus élevés que cela. Êtes-vous satisfaits des chiffres du MPO? Ou croyez-vous qu'ils sont plus élevés que ce que le MPO affirme?
Je peux commencer. Je crois que nous devons continuer à investir dans la science. Les investissements récents ont permis au MPO d'embaucher davantage de personnel scientifique, et c'est un bon départ. Cela dit, en ce qui concerne la morue, nous faisons un travail relativement correct.
J'en arrive aux chiffres, à ce que je voulais dire. Je serai bref.
Selon ce que les pêcheurs côtiers ont observé, il y a de manière générale plus de morues dans la région qu'il n'y en avait dans les années 1980. Le problème, c'est de savoir s'il ne s'agissait pas d'une surestimation, dans les années 1980, et s'il ne s'agit pas aujourd'hui d'une sous-estimation. Voilà un des problèmes. De manière générale, on accorde foi à ces observations. En résumé, nous devons nous assurer de toujours pouvoir compter sur les meilleures données scientifiques possible.
Je serais d'accord avec Keith. Nous apprécions toujours les données scientifiques; nous en voulons toujours plus, et nous en voulons de bonnes. J'ai souligné, dans ma déclaration préliminaire, et j'ai insisté sur ce point, que nous devons éviter de nous fonder uniquement sur des impressions. Ce ne sont pas les lignes ouvertes de la radio qui nous aideront à reconstituer le stock de morue.
À Clarenville, là d'où je viens, on dit toujours en blaguant que le seul endroit où il est impossible de pêcher de la morue, c'est au fond des bois; moi, je dis que nous n'avons d'autres choix que de nous fier à la science, au principe de précaution, tant que nous n'aurons pas davantage de certitude.
Je peux comprendre cela.
Monsieur Butler, vous avez dit que des limites — des limites constantes — étaient nécessaires. Êtes-vous en faveur de la décision du MPO de prolonger la saison de pêche récréative à Terre-Neuve-et-Labrador de 14 jours, cette année?
C'est une question très politique, à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous comprenons, le secteur comprend, que la pêche récréative aura un rôle à jouer.
Je vais m'en tenir à cela, si vous le permettez. Nous pensons que les prélèvements doivent faire l'objet d'un suivi. Nous sommes en faveur du projet de marquage du ministre. Je ne crois pas qu'une prolongation de la saison de pêche récréative, aujourd'hui, soit la meilleure des approches possibles étant donné que nous nous préoccupons du stock, étant donné que les stocks en sont à un niveau critique. J'en ai probablement dit plus que je n'aurais voulu. Nous aurions peut-être accepté de revenir aux pratiques passées, car nous comprenons que c'est nécessaire et nous comprenons les politiques qui l'exigent, mais nous ne comprenons pas cette augmentation.
Je serais d'accord.
Monsieur Wareham, c'était un excellent exposé. J'adorerais pouvoir visiter vos installations.
Le Comité aimerait poser une question. Nous avons imposé un moratoire en 1992 et il est toujours en vigueur. Le stock de la morue de la Norvège s'est rétabli en trois ans, tandis que nous sommes toujours 25 ans en arrière. Qu'est-ce que la Norvège a fait de différent?
Il y aurait deux ou trois choses à souligner. Le stock de la Norvège affiche un rendement élevé, ce qui n'est pas notre cas. Je crois que c'est la raison pour laquelle les scientifiques veulent voir une biomasse de poissons prêts à la reproduction d'environ 980 000 tonnes métriques. Notre morue arrive à maturité plus lentement. En Islande, le recrutement des poissons prend deux ou trois ans, avant qu'ils ne se reproduisent, et il dure de cinq à six ans, pour nos morues. Cela tient en somme à ses caractéristiques biologiques.
Des représentants du MPO qui sont venus témoigner la semaine dernière ont dit observer un changement de tendances, chez les poissons, selon lequel les faibles volumes arrivent à maturité plus rapidement. Seriez-vous d'accord sur cela?
Nous n'avons pas encore observé cela à Terre-Neuve. Nous produisons une morue selon la certification, depuis 2006, et nous n'avons pas encore vu de changement notable.
J'apprécie vraiment la pratique « de l'océan à la table ». Je viens de la Colombie-Britannique. Une bonne partie de ma région est consacrée à l'agriculture, et nous avons des pratiques similaires d'agriculture durable, « du pâturage à l'assiette ». Vous avez peut-être remarqué que je consultais mon téléphone, je cherchais l'expression exacte sur Google. C'est une pratique que je suis à même d'apprécier.
Vous avez dit quelque chose au sujet de la qualité du poisson, vous avez dit que nous n'en sommes pas encore arrivés à la qualité voulue. Est-ce en raison de la qualité du poisson ou de la qualité des pratiques de pêche?
Je vais vous donner deux réponses.
Comme je l'ai dit, l'un de nos principaux défis, à Terre-Neuve, c'est nos 500 ans d'histoire: « c'est du poisson, c'est bien assez bon. ». C'était bien assez bon jusqu'en 1992, mais ce n'est plus assez bon aujourd'hui. Nous travaillons avec quelques-uns des pêcheurs du syndicat FFAW. Cela fait 30 ans qu'ils pêchent du poisson. Ils ont appris de leurs pères, de leurs grands-pères, etc. Ils pourraient faire mieux qu'ils ne le croient.
C'est exactement à cela que je voulais en venir pour ma prochaine question. Il me semble qu'un changement est inévitable et que nous allons maintenant devoir changer nos façons de faire. Il y a beaucoup à faire au chapitre de l'éducation, il faut éduquer les familles de pêcheurs de longue date pour leur montrer une façon plus durable de faire les choses.
Ma question s'adresse aux témoins. Comment réagissent les pêcheurs récréatifs, et aussi les familles de pêcheurs de longue date à nos propositions sur les nouvelles façons et les meilleures façons de faire les choses?
Je crois que nous pouvons affirmer que l'argent est toujours un bon moyen de résoudre les problèmes et d'encourager les changements. C'est pour cette raison, entre autres, que l'entreprise Icewater et le syndicat FFAW ont travaillé de concert pour mettre au point un système de classement selon la qualité. En offrant des primes substantielles pour les poissons de catégorie A et un prix beaucoup moindre pour ceux de catégorie C, nous essayons de les obliger à...
Je tiens moi aussi à vous remercier d'être venus. C'est magnifique que vous puissiez nous faire profiter de vos précieuses connaissances. Je viens de la côte de la Colombie-Britannique, de l'île de Vancouver. Nous avons observé une diminution marquée de nos stocks de saumon, comme vous le savez. Nous espérons que cela ne se passera pas comme pour la morue en 1992. Nous pouvons apprendre et échanger beaucoup, et j'apprécie les renseignements que vous nous donnez aujourd'hui.
Monsieur Sullivan, vous avez parlé du principe du propriétaire-exploitant. Je vais vous donner une comparaison en prenant pour exemple le saumon et la Colombie-Britannique. Un des exploitants bénéficie de 39 % du quota total de nos stocks de saumon.
Pourriez-vous parler un peu du principe du propriétaire-exploitant, de tout ce que cela suppose, et de son importance?
À Terre-Neuve-et-Labrador, le principal moteur de l'économie des régions côtières, exception faite du nord-est d'Avalon, où nous nous trouvons maintenant, serait les pêches. Cela fait un certain nombre d'années qu'il en est ainsi. C'est pour cette raison que les gens se sont installés dans ces collectivités.
Nous observons ces dernières années que cela se passe davantage comme en Colombie-Britannique, c'est-à-dire que des entreprises contournent les politiques des accords de fiducie, et que les entreprises les mieux nanties, qui ne sont pas nécessairement des entreprises de la région, font de la surenchère et l'emportent sur les pêcheurs locaux, ceux qui partent eux-mêmes en bateau pour pêcher. Cela a nui aux gens de la relève, qui n'ont pas un accès équitable au secteur.
Nous avons beaucoup travaillé. Cette politique est populaire. Les gens savent qu'elle est précieuse, mais elle présente des lacunes, et ces lacunes ont été exploitées. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour les combler. Si nous tenons à la prospérité future de nos collectivités côtières, nous allons devoir rapidement y mettre un terme, car nous sacrifions la génération future. S'il y a des gens, ce serait peut-être des sociétés internationales, je ne sais pas, qui cherchent à mettre la main sur l'approvisionnement de produits alimentaires — je m'arrête ici, car nous n'avons pas beaucoup de temps, mais cela est crucial pour notre avenir.
Un témoin précédent a expliqué qu'à l'heure actuelle, les pêches étaient régies par le gouvernement fédéral, nous le savons, et que la transformation était régie par le gouvernement provincial. Ce témoin a dit qu'il nous était impossible de continuer ainsi sans intégrer les processus d'une manière ou d'une autre.
Monsieur Butler, et peut-être monsieur Wareham, pourriez-vous nous expliquer par quels moyens nous pourrions améliorer, intégrer davantage le modèle, pour qu'il soit plus efficient?
Je n'ai pas de commentaires supplémentaires à formuler, mais je suis d'accord avec cela.
Je crois qu'il y a un défi. L'article 7 de la loi fédérale sur les pêches accorde un pouvoir discrétionnaire absolu au ministre fédéral des Pêches et Océans. Nous aimerions que cela change, vu les changements qui seront apportés au secteur de la pêche. Au XXIe siècle, nous ne pensons pas que quiconque puisse disposer d'un pouvoir discrétionnaire absolu. C'est le ministre qui a le plus de pouvoir, par rapport à ses collègues du Cabinet, par rapport à son domaine de compétence ou à son intérêt pour la pêche. Le problème a trait à toute la pression que cela met sur les épaules du ministre. Pour la gestion des pêches, le ministre ne peut pas déléguer ce pouvoir, je ne le crois pas, sans que la loi ne soit modifiée. Je crois qu'il faudrait régler ce problème avant de commencer à parler de partage des responsabilités de gestion entre les deux ordres de gouvernement, le fédéral et le provincial.
L'autre aspect de la chose, et c'est très compliqué, c'est l'aspect qui concerne les provinces. Nous partageons des territoires de pêche dans le golfe, par exemple. Et il y a aussi la question de l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest. Il y a des pêcheurs d'autres pays qui viennent se frotter aux pêcheurs des provinces. Dans la zone 7, par exemple, l'OPANO avait établi des quotas pour la crevette. Ces quotas n'étaient pas fixés par les Canadiens, mais ils étaient gérés par les Canadiens. Une troisième chose — je veux montrer clairement à quel point cela est complexe — c'est la question de nos Premières Nations et des pouvoirs fédéraux qui s'appliquent aux Premières Nations en conséquence, je crois, de la décision Donald Marshall.
Tout cela fait que c'est une question très complexe. Je crois que tout le monde est parfaitement d'accord avec le principe selon lequel il faudrait que la gouvernance soit mieux partagée entre les deux ordres de gouvernement, mais c'est très complexe.
J'aimerais ajouter un commentaire. Peu importe à qui revient la responsabilité de la gestion, il faut se fonder sur les données scientifiques. Il faut laisser de côté les aspects politiques. Il faut que cela soit fondé sur des données scientifiques. C'est la seule façon d'assurer l'avenir des pêches.
Merci.
Cela m'amène à ma prochaine question, monsieur Wareham. Vous avez parlé d'un cycle de gestion de trois ans environ. Qu'est-ce que vous aimeriez? Vous pourriez peut-être en dire un peu plus à ce sujet?
Eh bien, j'imagine que le mot d'ordre, c'est « allez-y lentement ». Si vous décidiez d'augmenter, n'augmentez pas beaucoup à la fois. Nos installations fonctionnent aujourd'hui à 40 ou à 50 % de leur capacité. Ce serait à moi, ici, de me montrer gourmand et de dire que j'aimerais que mes installations fonctionnent à plein rendement, mais je représente la septième génération, et si je veux que la huitième, la neuvième et la dixième générations continuent de diriger notre entreprise familiale, j'aimerais que cela se fasse comme il faut. Je suis prêt à y aller lentement pour que cela dure longtemps.
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être venus parler des aspects liés à la transformation.
Ma première question s'adresse à M. Sullivan. Si jamais nous revenions à un volume durable pour la pêche, croyez-vous qu'il y a actuellement, dans les villages de pêcheurs, la main-d'oeuvre, les ressources humaines suffisantes? Diriez-vous qu'un réoutillage s'impose? Ou pensez-vous qu'au contraire, nous allons devoir aller chercher ailleurs la main-d'oeuvre nécessaire, si jamais les pêches revenaient à un niveau durable?
Il est clair que l'accessibilité de la main-d'oeuvre est une préoccupation dans bien des régions, actuellement, mais je crois que si nous mettons en place une pêche à valeur ajoutée, une pêche qui assure un bon salaire à tous les intervenants, nous serons capables d'attirer les travailleurs. Il y a toute une génération de citoyens de Terre-Neuve-et-Labrador qui adorent ce métier et qui apprécient beaucoup la vie dans les régions rurales. Par exemple, M. Wareham a mentionné que, dans ses installations, les travailleurs comptaient en moyenne plus de 20 années de service.
Il se peut que nous ayons des défis à relever, mais je crois que notre objectif principal, c'est de tirer la plus grande valeur possible de nos poissons. Si nous perçons les marchés haut de gamme et que nous pouvons payer les pêcheurs, afin qu'ils continuent à pêcher, je crois que nous nous préparons un avenir radieux. Nous pourrions choisir un autre modèle, ne pas viser une aussi grande valeur et ne pas être capables de payer autant, mais je crois que nous devrions nous efforcer de tirer la plus grande valeur possible de la pêche et de nous assurer de proposer des emplois bien rémunérés. Il est certain que cela est plus attirant pour la main-d'oeuvre.
Malgré l'évidente jeunesse des témoins ici présents...
Des voix: Oh, oh!
M. Derek Butler: ... notre taux de fécondité est le plus bas du pays, y compris les États-Unis, et notre population est la plus âgée du pays. C'est un changement frappant par rapport aux années 1970. Je suis un peu moins optimiste. Je crois que, en ce qui concerne notre main-d'oeuvre, nous allons faire face à des défis importants.
Le récent changement effectué par le gouvernement — je parle des travailleurs étrangers temporaires — a été utile pour le secteur de la transformation, en particulier dans les Maritimes, où la pénurie était encore plus marquée. Je crois que nous faisons face à un véritable défi. Le poisson de fond va exiger plus de main-d'oeuvre que les mollusques et crustacés. Il va donc falloir faire venir des travailleurs d'ailleurs, et cela ne risque pas de se produire, à mon avis, car c'est ce que font déjà les autres régions.
Je crois que le vieillissement de la main-d'oeuvre est déjà un vrai problème, étant donné la main-d'oeuvre qu'exige le poisson de fond, qui suppose plus de ressources humaines que de ressources financières. Si nous ne modifions pas la structure des pêches, afin de pouvoir pêcher toute l'année, comme nous l'avons tous mentionné, je crains que, comme cela s'est passé en Norvège et en Alaska, avec le sébaste — l'Alaska est, je crois, le plus important producteur de poissons à chair blanche du monde —, nous en soyons réduits à envoyer nos poissons en Chine, où ils seront transformés davantage. Nous avons besoin d'innovations majeures. Et cela prend beaucoup d'argent.
J'ajouterais une chose. Nous avons parlé de l'Islande. Je crois que Keith en avait parlé avant moi. J'aimerais dire au Comité qu'aucun déplacement parlementaire ne vaudrait davantage la peine qu'une visite de l'Islande, pour voir comment les choses se font là-bas. Il y a des poissons de fond et des ressources pélagiques. Il n'y a pas eu de mollusques et crustacés. Il y a eu des crevettes d'eau froide, mais pas de crabes des neiges. L'Islande a pris des mesures. Nous n'avons pas besoin de réinventer la roue. Nous n'avons pas non plus besoin de faire tout ce que l'Islande a fait, car sa situation est unique. Mais nous n'avons pas besoin de réinventer la roue.
Vous vous rappellerez peut-être que, dans ma déclaration préliminaire, j'ai souligné que, si nous avions cinq ou six installations, avec 250 personnes par installation... avec 1 250 ou 1 500 personnes nous avons une capacité suffisante pour produire de 250 à 300 millions de livres de morue. Il se développe beaucoup de nouvelles technologies pour le poisson blanc, dans le monde, ce qui fait qu'avec une combinaison de technologies et de 1 500 personnes, je crois que nous nous en tirerons bien.
J'ai une autre question. Cette fois-ci, nous parlons des filets maillants. Je ne sais pas vraiment ce que font les autres pays, et s'ils sont toujours utilisés. Pouvons-nous abandonner les filets maillants et, en conservant de petits bateaux, rester concurrentiels sur le marché mondial?
La plus grande partie des poissons, en Islande, sont capturés sans filet maillant. Je crois avoir vu les chiffres. Ce serait de 10 à 20 %, tandis que, dans certaines régions de Terre-Neuve, 80 ou 90 % des prises se font avec des filets maillants.
Avec les filets maillants, vous pouvez pêcher du poisson de qualité, mais vous devez le faire de la bonne façon, et il faut que le beau temps soit au rendez-vous. En moyenne, avec un filet maillant, vous ne pêchez pas du poisson d'aussi bonne qualité qu'avec une ligne à hameçons. Les lignes à hameçons sont aussi efficaces dans les petits bateaux que dans les gros. Les deux genres de bateaux peuvent les utiliser.
Et ça peut être concurrentiel.
Est-ce que le secteur et vous-même êtes satisfaits des relations entre votre secteur et le MPO? Que pourrait-on faire de plus? Vous avez de bonnes relations de travail avec le MPO. Pensez-vous que le ministère en fait assez et vous donne des données pertinentes pour l'évaluation des stocks? Voyez-vous quelque chose d'autre que nous pourrions faire pour améliorer cette relation et obtenir de meilleurs chiffres?
Je vais vous laisser répondre en premier, monsieur Sullivan, et vous pourriez commenter la dernière question.
Merci.
Rapidement, pour la dernière question, je crois que nous allons nous attacher à la valeur sur le marché des pêches et aux méthodes de pêche. Il est certain que certaines personnes pêchent du poisson de très bonne qualité avec des lignes à hameçons, et certains marchés paient moins pour d'autres types de poissons, en particulier lorsque la pêche se fait à l'aide de chaluts à panneaux ou à l'aide d'autres engins du même type. Je crois qu'il est important de cibler les marchés qui sont prêts à payer davantage pour un poisson de la meilleure qualité et de déterminer quelle méthode de pêche cela suppose. À coup sûr, on observe un intérêt renouvelé pour la pêche aux lignes à hameçons, peu importe la taille du navire.
En ce qui concerne la relation avec le MPO — j'y ai fait allusion un peu plus tôt —, je crois qu'il est important que nous investissions dans la science. Cela veut dire que nous devons examiner la relation prédateur-proie et assurer une gestion tenant compte de l'écosystème. Nous détenons déjà à coup sûr certaines pièces du puzzle, mais nous pourrions prendre des décisions avec une plus grande confiance, aujourd'hui.
Je crois que, dans certains secteurs, nous constatons que les coûts des activités scientifiques et de la gestion du secteur sont refilés au secteur de la pêche. Il est certain que cela met de la pression sur les gens qui doivent assumer une bonne partie de ces coûts. Je crois qu'il est bon que les pêcheurs soient engagés. Nous disposons de milliers d'experts qui parcourent l'océan, et nous pouvons en tirer davantage d'information, nous devrions aussi les écouter davantage. En même temps, il est certain que nous voulons que le MPO investisse dans de bonnes activités scientifiques, et je crois que nous avons laissé cela de côté ces dernières années et ces dernières décennies.
Merci, monsieur le président.
Merci aussi aux témoins d'être venus ici aujourd'hui.
Je ne sais pas si je fais bien de vous poser à vous trois ma première question, étant donné que vous représentez tous le secteur de la transformation commerciale. J'aurais aimé savoir si vous connaissez la valeur par livre du poisson pêché commercialement par opposition à ce que je déteste appeler la « pêche récréative », étant donné que nous avons eu ces mêmes problèmes sur la côte Ouest, qu'il s'agisse d'une pêche à des fins récréatives ou à des fins alimentaires.
Auriez-vous des données à ce sujet?
À ce que j'en sais, la pêche récréative vise une consommation personnelle, la seule valeur est celle du poisson que les gens consomment chez eux. C'est la meilleure réponse que je puisse vous donner.
C'est l'objectif « prétendu ». C'est le mot que j'ai utilisé dans ma déclaration préliminaire, mais...
Ma prochaine question concerne le recrutement.
Vous avez dit que le taux de maintien en poste, dans votre effectif, était élevé. Je crois que vous avez dit que la moyenne d'âge était de 50 ans environ.
Est-ce parce que le taux de recrutement de travailleurs plus jeunes est faible, dans les installations de transformation? Je crois que je m'appuie sur ce que j'ai vu dans le secteur laitier. J'ai grandi sur une ferme laitière. Mes deux frères plus âgés ne voulaient rien savoir de l'industrie laitière, étant donné que, avant que le système de gestion de l'offre — les quotas — ne soit adopté, cette industrie exigeait un travail 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Il n'y avait pas vraiment de sécurité ni de rendement du capital investi qui était assuré ou garanti par le système des quotas.
Est-ce que cela est un enjeu, quand on parle du recrutement de travailleurs plus jeunes, dans le secteur de la pêche ou dans celui de la transformation? Est-ce que le manque de sécurité pour l'avenir des jeunes représente un défi?
Je vais aborder deux ou trois aspects.
Soyons clairs: nous représentons les pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador. Cette année, nous avons fait un bon pas en avant en ce qui concerne la pêche à la morue. Évidemment, il y a eu des défis, des quotas très faibles et d'autres choses, mais la prolongation de la saison de pêche va offrir davantage de débouchés et une plus grande sécurité au secteur de la pêche. Nous avons fait un tout petit pas en avant, cette année, mais je crois que le fait de laisser les pêcheurs pêcher plus longtemps est un pas dans la bonne direction. Cela se traduit par une période d'emploi plus longue et des emplois plus sûrs dans le secteur de la transformation.
Pour certains types de poissons, pour différentes raisons, la saison est relativement courte. Et cela fait que les emplois ne sont pas nécessairement bons. Un emploi qui assure du travail de 16 à 18 semaines par année n'offre pas la sécurité à long terme que les gens recherchent et, évidemment, cela complique le recrutement. Je crois que nous devrons en tenir compte en remettant sur pied l'industrie de la pêche à la morue.
Une pêche qui serait fondée sur une durée et un tonnage, plutôt que sur une saison et des dates précises, offre certainement davantage de sécurité pour les pêcheurs comme pour les transformateurs.
Oui.
L'autre chose que j'ai mentionnée, c'est qu'il sera important, pour le marché également, que l'approvisionnement soit constant tout au long de l'année, surtout si nous cherchons aussi à maximiser la valeur du produit frais.
Sous l'angle de l'industrie de la transformation, comme je l'ai dit, si vous visitiez notre installation, vous vous retrouveriez un peu comme dans une salle d'opération: tout est technologique et très technologique. De manière générale, les jeunes sont plus à l'aise avec la technologie que leurs aînés. Plus vous investissez dans la technologie, plus il sera facile de recruter des jeunes.
Existe-t-il des programmes, pour la prochaine génération de pêcheurs, au niveau postsecondaire, voire au niveau secondaire, qui formeront cette prochaine génération? Je crois que ce que mon collègue voulait dire, c'est que l'industrie laitière n'a vraiment pas beaucoup d'attraits, pour les nouveaux travailleurs. J'aimerais savoir si des changements sont envisagés. Quand les stocks de morue seront constitués, est-ce que la prochaine génération va s'y intéresser? Est-ce qu'une formation est offerte?
Notre main-d'oeuvre possède elle aussi une expérience considérable, et de nombreux pêcheurs ont tous les papiers nécessaires et une formation considérable. Nous avons un régime de perfectionnement, qui nous assure que les pêcheurs suivent une formation appropriée, obtiennent des crédits et acquièrent les compétences dont ils ont besoin; il y a donc de nombreux pêcheurs compétents, et il est certain que la formation est continue. Cela ne veut pas dire que nous n'avons pas besoin de nous préoccuper davantage de la qualité et de choses comme ça, mais la province a mis l'accent sur cet aspect.
Je suis désolé, monsieur Doherty, mais vos cinq minutes sont écoulées.
Il nous reste quelques minutes. Nous avons le temps pour une autre question.
Monsieur Johns, s'il vous plaît, pour trois minutes.
Nous avons beaucoup parlé de l'importance des investissements en sciences. Je vais revenir encore une fois à ce que M. Wareham disait, au sujet du cycle de trois ans; qu'est-ce que le gouvernement fédéral pourrait faire de plus pour s'assurer que la pêche commerciale à la morue du Nord sera une industrie durable et économiquement viable, si elle était rouverte? Dans dix ans, si nous pensons aux investissements, à la mise en marché et à l'infrastructure possibles, quel autre type de soutien voudriez-vous que le gouvernement fédéral fournisse pour que nous puissions nous préparer?
Je vais répondre d'abord à la question qui concerne la science. Le gouvernement en place a annoncé 200 millions de dollars pour des activités scientifiques supplémentaires. Le gouvernement précédent avait réduit le budget et, fondamentalement, avait ramené les choses à des cycles de deux ou trois ans. Il y a une chose que j'aimerais encourager; étant donné la croissance récente et l'importance du stock de la morue du Nord, j'aimerais que l'on en revienne à un cycle d'un ou deux ans plutôt que de trois ans, de façon que nous soyons bien éclairés et que nous puissions voir régulièrement ce qui se passe. Si nous attendons trop longtemps...
Le secteur n'est pas prêt. Les pêcheurs ont besoin d'investissements, les transformateurs aussi, et nous ne pouvons pas du jour au lendemain passer de 10 000 à 115 000 tonnes. Nous ne sommes pas prêts. Nous devons envisager une augmentation graduelle, de façon que les pêcheurs aient de l'argent à investir et que les transformateurs aient de l'argent à investir. Nous ne pouvons pas passer tout de suite de 10 000 à 115 000 tonnes, nous ne sommes pas prêts.
Nous avons entendu les témoins précédents souligner à grands traits l'importance d'un échéancier annuel...
Aviez-vous quelque chose à ajouter, monsieur Butler ou monsieur Sullivan?
J'aimerais me faire l'écho de ce que vient de dire Alberto. Les investissements dans la science sont importants. Le passage à des cycles de deux et trois ans était probablement plus avisé ou mieux justifié pour les mollusques et les crustacés, en raison de la nature de ces espèces, et de ce que nous savions à ce sujet, grâce aux données scientifiques recueillies au fil des ans. Étant donné l'importance croissante du poisson de fond, et le déclin des mollusques et crustacés, je me ferai l'écho de ce qu'Alberto vient de dire. Nous allons probablement devoir revoir l'échéancier, lorsque nous ferons les évaluations.
Je serais d'accord. Nous serions avisés de procéder à un examen approfondi de la morue, maintenant, compte tenu de son importance pour les habitants de la province. J'avais également suggéré, plus tôt, d'investir davantage dans la science des écosystèmes.
Ce qui se passe depuis 25 ans, le lent rétablissement du stock de morue, est considéré par certaines personnes comme une conséquence des conditions de l'environnement. En réalité, ce que nous avons fait dans les années 1980 et 1990 explique en partie le recrutement des mollusques et crustacés, puisque nous avons observé une forte augmentation du volume de la crevette et du crabe ainsi qu'une diminution de bon nombre d'espèces de poisson de fond. Si nous nous étions intéressés davantage à cette question, nous aurions peut-être mieux géré les choses et nous aurions pu nous intéresser aux prédateurs et à leurs proies.
L'autre aspect de la question, j'en ai déjà parlé, mais je vais le répéter, c'est qu'il faut recueillir davantage d'information auprès des pêcheurs, qui sont sur place tous les jours et qui ont énormément de connaissances et d'expertise. Je ne crois pas que nous mettions pleinement à profit ces connaissances. L'évaluation des stocks est peut-être difficile à faire, mais nous devrions mieux le faire.
Merci, monsieur Johns.
J'aimerais éclaircir une question que M. Doherty a posée; je suis désolé, j'en ai raté un bout. Est-ce que cette question concernait le soutien offert par les gouvernements fédéral et provinciaux à un programme d'éducation à la pêche destiné aux jeunes? Est-ce que je me trompe? Est-ce qu'il en a été question? Est-ce que vous seriez d'accord avec cela?
Oui, de l'avis des experts, est-ce qu'il serait utile que les gouvernements fédéral et provinciaux offrent un programme d'éducation en partenariat?
Absolument, et je discuterai avec joie de la forme que cela pourrait prendre. Pour ce qui est des enfants d'âge scolaire, par exemple, nous croyons qu'il est important d'axer davantage les efforts sur les enfants plus jeunes. Pendant un grand nombre d'années, en particulier chez les gens qui ont grandi avec le moratoire, l'idée s'est en quelque sorte installée qu'il fallait éviter la pêche. La perception défavorable quant à la situation demeure aujourd'hui, mais je crois qu'il y a du potentiel, alors ce serait judicieux.
Merci de votre réponse. C'est apprécié.
Mesdames et messieurs, voilà qui conclut cette table ronde. Il est presque l'heure de la pause-dîner. Nous allons reprendre les travaux à 13 heures, avec le prochain groupe de témoins.
Je tiens à remercier nos trois témoins de l'industrie de la transformation: M. Wareham, M. Butler et, enfin, M. Sullivan, du syndicat FFAW. Merci beaucoup, messieurs, de vos témoignages.
Monsieur Doherty.
Monsieur le président, serait-il possible de déposer une motion en vue de faire photocopier, pour le reste de la journée, toutes les notes d'allocution qui sont en anglais?
Vous aimeriez que toutes les déclarations ou les exposés remis préalablement soient distribués, peu importe si...
Puis-je avoir le consentement unanime du Comité à ce sujet pour le reste des tables rondes? Êtes-vous d'accord, même si les documents sont dans une langue seulement?
Que tous ceux qui sont pour se manifestent.
Des voix: D'accord.
Le président: Tout le monde est d'accord.
Robert, notre agent de la logistique, fait la navette entre la salle et la photocopieuse depuis le début de la journée. On dirait qu'il n'est pas prêt de s'arrêter. D'ici ce soir, il aura probablement la même taille que moi, mais en tout cas...
Nous allons prendre une pause pour dîner maintenant, puis nous reprendrons les travaux à 13 heures. Merci beaucoup.
D'accord, mesdames et messieurs, reprenons. Notre étude porte toujours sur le stock de la morue du Nord et sur les faits connexes pertinents.
Nous accueillons le prochain groupe de témoins pour la troisième table ronde de la journée.
Je tiens à rappeler aux gens qui nous observent depuis la tribune que nous sommes ici aujourd'hui, que nous serons à Port de Grave demain et que nous nous rendrons à la magnifique île Fogo mercredi. Je dis « magnifique », mais je ne suis pas objectif, puisqu'elle fait partie de ma circonscription. Que voulez-vous? Malgré la présence de mes collègues de Colombie-Britannique dans la salle, je dis cela en toute confiance.
Avant de céder la parole aux témoins, j'aimerais rapidement aborder un point, publiquement bien sûr. Derek Butler, président de l'Association of Seafood Processors, nous a suggéré de visiter en l'Islande et la Norvège. Je doute que nous ayons le budget requis, mais nous sommes actuellement en train de vérifier s'il serait possible de demander à un témoin de l'Islande ou de la Norvège, ou les deux, de participer à notre étude et de témoigner à propos de la pêche dans leur pays.
Pourrais-je obtenir un consensus à ce sujet? Je sais que tous les membres du Comité ne sont pas présents, mais...
Monsieur Doherty?
Vous êtes d'accord? Parfait.
Quelqu'un aimerait-il dire quelque chose? Sommes-nous tous d'accord?
Monsieur Arnold.
Je voulais seulement savoir si nous allions discuter du genre de personne à inviter: des chercheurs qui travaillent pour le gouvernement, des pêcheurs ou des représentants de l'industrie de la transformation? Jusqu'où allons-nous pousser la chose? Est-ce qu'une seule personne peut représenter tous ces groupes? J'aimerais que nous en discutions un peu.
Toute une succession de témoins nous ont parlé de ce qui se passe en Islande et en Norvège. Je crois que si nous voulons vraiment faire oeuvre utile cette fois-ci et prendre des mesures appropriées, nous allons probablement devoir discuter davantage de la marche à suivre, à huis clos, avec tout le Comité.
En tant que président neutre, je devrais m'abstenir de tout commentaire. Malgré tout, je soutiens de tout coeur ce que vous venez de dire.
Monsieur Arnold.
Nous devrions peut-être, si nous allons en discuter, songer aussi à examiner ce qui a été fait dans d'autres régions d'Europe. On nous a parlé de la Norvège et de la Suède ainsi que des changements apportés là-bas, peu importe de quoi il s'agit, afin d'ouvrir leurs pêcheries plus tôt. Clairement, nous pourrions y trouver des modèles à suivre. Comme quelqu'un l'a affirmé plus tôt, nous n'avons pas à réinventer la roue.
Oui. D'ailleurs, Thai a déjà exploré quelques possibilités. Nous pourrons en discuter un autre jour, vu que nous avons des témoins avec nous.
Monsieur Johns.
Il ne s'agit pas d'une motion. Excusez-moi, je voulais seulement que nous nous entendions pour inviter des gens d'Islande et de Norvège à participer à notre étude.
Je crois qu'il serait aussi avantageux d'inviter des gens du Massachusetts et du Maine, car nous en entendons beaucoup parler. Je crois que M. Cobb va aborder brièvement le sujet de la proposition de valeur, parce qu'il l'a fait au caucus des océans à Ottawa. Je crois que c'est un point important.
Il parle du caucus des océans. M. Johns y était quand vous avez présenté votre exposé. Tout le monde, sachez que nous avons un caucus des océans à Ottawa, présidé par Fin Donnelly et moi-même. M. Cobb, qui prendra la parole sous peu, y était également. Donc, nous allons travailler là-dessus. Allons-nous inviter l'Islande et la Norvège ainsi que des gens du Massachusetts et du nord-est des États-Unis?
D'accord, parfait.
Thai, dans son infinie sagesse, vient de mentionner que ni le Maine ni le Massachusetts n'ont de stocks de morue du Nord. Il s'agit d'une tout autre espèce.
Je veux dire quelque chose à ce sujet. Je crois que c'est tout à fait pertinent, car notre objectif est de veiller à ce que le poisson se rende jusque dans l'assiette, là où il génère des retombées. Cela pourrait s'avérer important pour la morue du Nord. En effet, ce matin des témoins nous ont dit qu'il fallait obtenir la meilleure valeur possible pour chaque poisson, et ces régions des États-Unis ont mis en place un modèle durable qui pourrait s'appliquer ici à la morue du Nord. Je crois que c'est pertinent, dans une certaine mesure.
C'est noté. Merci, monsieur.
Passons à nos témoins.
Monsieur Doyle, vous nous avez fait parvenir votre déclaration pour qu'elle soit distribuée; je fais grâce à tout le monde du lourd processus relié aux documents présentés en anglais seulement, puisque nous avons adopté une motion à ce sujet plus tôt.
Monsieur Doyle, vous êtes pêcheur. Je vous remercie de votre présence.
Nous avons parmi nous Anthony Cobb de la Fondation Shorefast — il siège au conseil, mais est aussi président de Fogo Island Fish —, que nous appelons habituellement Tony Cobb.
Soit dit en passant, le poisson de Tony, ou plutôt le poisson de l'île Fogo — je ne devrais pas dire qu'il s'agit de vos poissons, Tony — est servi au restaurant du Parlement. Je me permets cette petite publicité à titre de député.
Nous accueillons également Kimberly Orren, de Petty Harbour, qui est chargée de projet pour Fishing for Success. Petty Harbour se trouve littéralement à un coin de rue d'ici.
Je tiens d'abord à souhaiter un bon après-midi aux membres du Comité et à les remercier de me donner l'occasion de venir témoigner ici aujourd'hui.
Comme l'a annoncé M. Simms, je m'appelle Tony Doyle. Je suis pêcheur côtier dans la région 3L. Actuellement, j'occupe aussi le poste de vice-président de la pêche côtière pour la FFAW. J'occupe ce poste depuis 2014.
Je suis né et j'ai grandi dans un petit village de pêcheurs à Bay de Verde, sur l'extrémité nord de la presqu'île Avalon. Présentement, il y a environ 400 personnes qui y vivent. Ma communauté est axée sur la pêche; la majeure partie des gens en âge de travailler sont soit pêcheurs, soit employés à l'usine de transformation Quinlan Brothers. Elle a brûlé au printemps, le 11 avril, et on est présentement en train de la reconstruire. On est en train d'ériger un nouveau bâtiment en acier de 640 pieds de long et de 85 pieds de large. L'avenir s'annonce donc radieux pour notre collectivité, grâce à la reconstruction de l'usine. Sans cette précieuse pêche — la pêche côtière —, mon village n'aurait aucun avenir. C'est pour cette raison que des gens sont venus à Bay de Verde dans les années 1600, et c'est pourquoi ils n'ont pas quitté les côtes depuis.
J'ai commencé à pêcher en 1970, pendant les vacances d'été. J'avais à peine 12 ans et j'étais encore à l'école. À cette époque, je pêchais sur un chalutier de 28 pieds, comme la plupart des gens. En 1975, j'ai quitté l'école, et j'ai commencé à pêcher à temps plein avec mon père et mon oncle. J'ai continué avec ce même bateau jusqu'à la fin des années 1990. L'année du moratoire, en 1992, je l'ai fait recouvrir de fibre de verre. Maintenant, je pêche principalement le crabe, sur un bateau de 34 pieds et11 pouces. Je fais aussi la pêche à morue avec ce bateau, et je pêche le homard et la morue avec un canot à moteur de 20 pieds.
Je ne prétends pas tout savoir à propos de la pêche à la morue, mais j'en connais pas mal. J'ai vécu toute ma vie près de l'eau, et j'ai une assez bonne compréhension des changements passés et présents. Vers la fin des années 1980, de 1988 à 1990, nous avons connu, avec nos trappes à morue et nos filets maillants, trois des meilleures années jamais enregistrées en ce qui concerne la pêche à la morue. Je n'avais jamais gagné autant d'argent.
Il y avait beaucoup de poissons dans les eaux, et ils étaient de bonne taille et de bonne qualité. Pendant une centaine d'années, je suppose que la pêche au capelan était ce qu'on pouvait appeler « normale ». Le capelan roulait sur les plages de notre région autour de la mi-juin. En temps normal, le capelan roulait un peu avant le 20 juin, entre le 10 et le 20 juin. On mettait les trappes à morue à l'eau quelques jours auparavant, lorsqu'on voyait les signes, puis la pêche à la morue durait six semaines, jusqu'à la fin juillet. Ensuite, on remontait les trappes. Après cela, nous utilisions des filets maillants pendant les quelques semaines suivantes, puis nous pêchions à la palangre de septembre à octobre.
En 1991, les choses ont commencé à changer. Il y a eu de la glace dans le port du village jusqu'à la fin juin, je crois. J'ai pris une photo, je l'ai chez moi quelque part. Je n'ai pas réussi à la trouver à temps pour aujourd'hui, mais il y a eu de la glace dans la baie jusqu'au 9 juin 1991. Surprise, la morue ne s'est pas pointée, et le capelan n'a roulé que tard dans le mois d'août. Je ne sais pas ce qui s'est passé avec l'environnement et avec la température des eaux, mais tout a été chamboulé pendant plusieurs années, n'est-ce pas?
À l'hiver 1992, nous étions prêts, mais la rumeur courait que la pêche allait peut-être fermer et qu'il n'y aurait pas de morue. Nous devions tout de même être prêts et aller pêcher. Nous avons mis deux trappes à morue à l'eau autour du 10 juin. Au moment où le moratoire a été annoncé, le 2 juillet, je n'avais pas encore attrapé une seule morue. Nous avons remonté notre équipement dans le délai accordé, soit quatre ou cinq jours. Cette année-là, le capelan a roulé vers la dernière semaine d'août, presque deux mois en retard. Les poissons étaient petits et ne sont pas restés longtemps avant de repartir.
Cette année a été difficile pour tous: nous étions sans emploi, en plus d'avoir d'autres problèmes familiaux et financiers, etc., qui pesaient sur nous. Certaines personnes ont vécu des heures sombres, et certains parmi nous ont réussi à s'en sortir.
Dans les années qui ont suivi le moratoire, j'ai fait la pêche au homard, au calmar et à la lompe, des pêches de faible valeur qui ne rapportent pas beaucoup d'argent, mais elles ont permis de complémenter le revenu que je touchais du PARPMN à cause de la fermeture de la pêche à la morue.
À cette époque, au début des années 1990, il n'y avait pratiquement aucune morue dans les pêcheries. On ne trouvait aucune morue dans les endroits où elles se trouvaient normalement, près des hauts-fonds. Les seules morues dans les environs se tenaient tout près du rivage, carrément dans les marais. De plus, elles étaient petites. Pendant trois ou quatre ans, je ne me rappelle pas avoir vu un poisson de plus de 20 pouces.
Puis, la situation a commencé à s'améliorer: le nombre de poissons s'est mis à augmenter. Ils étaient plus gros et plus nombreux. Évidemment, nous avons fait des démarches pour ouvrir une pêcherie. Nous étions impatients d'y retourner. Même nous pouvions pêcher le crabe, nous ne pouvions pas en pencher beaucoup parce que les quotas étaient peu élevés. Nous étions impatients de nous remettre à la pêche. Aujourd'hui, avec le recul, je crois que nous réalisons tous que c'était une erreur. Le stock ne s'était pas assez rétabli. Il était trop tôt pour recommencer à pêcher la morue, et après deux ou trois ans, il y a eu de nouveau une baisse, et la pêche a fermé.
Il faut aussi comprendre — et c'est un point important — le fait que le capelan n'a pas roulé durant cette période. Ce poisson ne venait pas au moment où il vient habituellement. Il y a six ou sept ans, je me rappelle que nous — un ami, nos équipages et moi-même — avions utilisé des trappes à capelan pour la pêche. Le 21 juillet, nous avions attrapé nos premiers capelans, soit quatre ou cinq semaines plus tard que la normale.
Depuis, la situation avec le capelan a commencé à revenir à la normale. Au cours des quatre dernières années, excluant l'année en cours, le capelan a roulé autour de la mi-juin. Cette année, il était encore un mois en retard. Je ne peux pas expliquer pourquoi c'est arrivé cette année, parce que la température des eaux a été bonne, même qu'elle était pas mal plus élevée qu'à l'ordinaire. Dans les années 1980, la température en surface variait entre cinq et sept degrés tout l'été. J'ai fait un peu de marquage pour le FFAW au cours des dernières années, et la température des eaux a atteint 15 degrés en surface, de la fin juillet jusqu'à aujourd'hui. Cette tendance au réchauffement n'est pas bonne pour les mollusques et les crustacés, mais l'est pour la morue.
Au cours des 10 dernières années, comme je l'ai dit, la situation a commencé à s'améliorer par rapport au moment où les poissons arrivent. Le capelan, et par conséquent la morue, commence à arriver plus tôt. Dans notre région, la morue a été abondante au cours des 10 dernières années. Nous avions un gars qui faisait de la pêche sentinelle à Bay de Verde. Pendant toutes les années 1980, quand nous pêchions avec des filets maillants, la prise moyenne allait de 50 à 100 livres lorsque nous laissions les filets à l'eau pendant 24 heures. Aujourd'hui, on peut remonter les filets, les remettre à l'eau, puis les remonter le lendemain, et c'est très bon si on obtient 100 livres en tout. Au cours des dernières années, les pêcheurs sentinelles à Bay de Verde attrapaient de 500 à 1 000 livres de poisson 24 heures après avoir mis leurs filets à l'eau.
De nos jours, nous avons des pêcheurs qui mettent leurs filets à l'eau pendant la soirée, vers 17 ou 18 heures, pour une période de 12 heures. J'ai parlé avec l'un d'eux la semaine dernière, et il a remonté 1 600 livres après avoir laissé ses deux filets à morue à l'eau pendant 12 heures. Cela n'arrivait jamais dans les années 1980, ou alors c'était rare, ça n'arrivait que de temps en temps.
Aussi, dans les années 1980, on ne pouvait pas attraper du poisson dans nos filets maillants le jour. Cette année, j'ai décidé pour la première fois d'utiliser des filets pour ce quota. Jusqu'ici, j'avais toujours pêché à la palangre, mais j'ai décidé d'essayer les filets cette année. Voyez-vous, j'ai toujours attrapé 100 % de poissons de la catégorie A en pêchant à la palangre. Je voulais voir ce que j'étais capable d'obtenir — si je pouvais avoir 100 % de poissons de catégorie A — avec des filets maillants. Je suis parti le matin, et j'ai remonté mes filets trois heures plus tard. En tout, pour la journée, j'ai pêché de 600 à 900 livres en trois heures : du jamais vu jusqu'ici, même au temps de mon père. On a vu les filets maillants pour la première fois à Terre-Neuve au cours des années 1960. Les deux ou trois premières années, les prises étaient très bonnes, mais après, on ne remontait que 100 livres à la fois.
Donc, je voulais vous faire savoir que la situation s'est améliorée par rapport aux pêches au cours des dernières années. Aujourd'hui, il y a beaucoup de grosses morues et une abondance de poissons en santé. Quand je faisais la pêche à la palangre, j'en attrapais facilement. Mon membre d'équipage et moi-même pouvons attraper 1 500 livres en trois heures avec un hameçon et un appât chacun.
Monsieur Doyle, je suis désolé, mais avant que vous n'alliez plus loin, je vais devoir vous demander de conclure bientôt. Vous avez déjà dépassé votre temps.
Je vais simplement vous faire part de deux ou trois choses importantes à propos des pêcheries d'aujourd'hui.
En tant que président du Conseil côtier, j'ai beaucoup discuté avec les pêcheurs dans ma région et aux quatre coins de la province. Le Conseil a beaucoup discuté de la marche à suivre pour la nouvelle pêcherie. Nous devons pêcher d'une façon durable. Nous devons faire en sorte de débarquer le meilleur produit et de le fournir aux usines; les travailleurs vont ainsi pouvoir se mettre au travail, et les usines vont pouvoir acheminer leurs produits aux marchés.
C'est ce qui se passe cette année. L'année dernière, la pêche a duré trois semaines. Cette année, elle s'est prolongée. Beaucoup de pêcheurs y participent et le font avec enthousiasme. Ils débarquent un produit de qualité, dont une proportion de 80 à 90 % de poisson de catégorie A.
Monsieur Doyle, vous allez devoir terminer très bientôt. Il vous reste assez de temps pour deux ou trois commentaires seulement.
Si vous me laissiez faire, je pourrais parler pendant une heure, mais je sais que ça ne fonctionne pas comme ça.
Il y a tout de même une chose que je veux mentionner: les accords de fiducie, les accords de contrôle et le principe du propriétaire-exploitant; ce dernier est très, très important pour moi et pour ma communauté, parce que je suis maître de ma situation. Je suis propriétaire-exploitant et je possède ma propre entreprise. Je décide ce que je peux faire, ce que je peux attraper et où je peux l'attraper, en conformité avec les règlements du MPO.
Durant la pêche à la morue que nous avons commencée cette année, nous avons pris 2 000 livres par semaine, et nous en prenons 3 000 depuis septembre. Il y a beaucoup de personnes qui voient cela d'un mauvais oeil, mais également beaucoup pour qui c'est le contraire. Nous arrivons ainsi à fournir du poisson aux usines...
Je vous suis reconnaissant de votre exposé. Voici ce que je vous suggère: consultez vos notes pendant les 20 prochaines minutes et gardez à l'esprit ce que vous avez oublié. Pendant la période de questions, vous pourrez y revenir. Est-ce que cela vous va?
Bonjour, monsieur le président. Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner ici cet après-midi et de vous faire part de mon expérience.
Comme vous l'avez mentionné plus tôt, je siège au conseil d'administration de la Fondation Shorefast, un organisme de bienfaisance enregistré au Canada. Nos activités sont menées presque exclusivement à l'île Fogo, pour ses habitants. Nous oeuvrons dans ce domaine depuis environ 15 ans maintenant. Il y a deux ans, nous avons mis sur pied un nouvel organisme appelé Fogo Island Fish. Il s'agit d'une entreprise à vocation sociale qui fait partie intégrante de nos activités caritatives. La totalité des produits et des retombées de Fogo Island Fish vont à l'île Fogo.
Fogo Island Fish est un très petit organisme qui se résume à mon épouse et moi-même. Nous l'exploitons comme bénévoles. J'aimerais que vous gardiez cela à l'esprit, avec le reste de mes commentaires de cet après-midi. Pour décrire rapidement notre communauté, je vais dire que 10 villages de pêcheurs se trouvent sur l'île Fogo. Nous avons environ 2 700 habitants, et à peu près 100 pêcheurs. À cet égard, les commentaires que Tony vient de faire sont intéressants pour nous. Cela fait 400 ans que nous pêchons sur l'île Fogo. Je suis un habitant de l'île Fogo de huitième génération, et je suis le premier à ne pas être pêcheur.
Fogo Island Fish vise essentiellement à réinventer l'industrie des pêches et à la mettre au service de la collectivité. Laissez-moi aborder très rapidement ce sujet. Je vous ai fourni ma documentation, et je vous invite à la suivre avec moi. Je sais que certains d'entre vous pourraient être tentés de lire plus loin, mais je crois qu'il pourrait être utile pour nous de le parcourir ensemble. L'important, c'est la viabilité des collectivités.
Notre île compte 10 villages. Cela fait quelque 300 ans que nous pêchons sur l'île Fogo, et je crois que nous avons bien appris les leçons que nous avions à apprendre. Vous comprendrez que, quand on fait quelque chose depuis 300 ans, il est normal d'apprendre une chose ou deux, et cela devrait compter pour beaucoup.
Je vais vous donner un petit aperçu historique: en 1968, la pêche sur nos îles est passée du poisson salé au poisson congelé ou au poisson frais. Les marchands de poisson de l'époque n'ont pas fait la transition avec les pêches.
L'île Fogo a eu la chance d'accueillir l'Office national du film, qui était venu tourner quelques films, qui sont collectivement connus aujourd'hui sous le nom de processus Fogo. Ces films nous ont menés à établir la Fogo Island Co-op, qui existe encore aujourd'hui. Elle assure la transformation, c'est une coopérative communautaire, car elle appartient aux pêcheurs et aux travailleurs d'usine. L'année prochaine, la coopérative célébrera son 50e anniversaire.
Nous devons garder un oeil sur la situation économique. Nous envisageons l'économie par rapport à la situation des villages. Comme je l'ai dit, nous sommes parvenus à pêcher de manière durable dans une petite partie de l'océan. En effet, on pouvait même voir nos maisons d'où nous pêchions. Nous continuons aujourd'hui à pêcher la morue dans les mêmes eaux, ces eaux peuplées de poissons aux alentours de notre île, qui sont toujours à portée de vue de la terre. Nous embarquons dans nos petits bateaux, habituellement pour trois ou quatre heures, et nous attrapons nos poissons d'un coup.
On parle énormément de la pêche durable dans le monde, mais c'est une expression qui compte beaucoup de définitions différentes. J'aimerais proposer aux membres du Comité et aux autres personnes ici présentes que nous commencions à déterminer qui ou quoi dépend du poisson et qui ou quoi doit prendre part à la discussion et au dialogue à propos de ce qui peut rendre la pêche durable. Bien entendu, nous devons nous appuyer sur des données scientifiques. Évidemment, nous devons prendre soin des stocks et nous devons déterminer de qui — que ce soient les collectivités sur les côtes ou les entreprises — seront les bénéficiaires de la pêche.
En passant, toutes les photos de l'île Fogo que vous voyez aujourd'hui ont été prises avec mon iPhone.
Maintenant, parlons du poisson lui-même. Les poissons issus de la pêche industrielle sont de qualité supérieure. Pour nous, il n'y a rien de plus simple. Après 300 ans de pêche, on finit par apprendre des choses. La qualité du poisson dépend du moment où vous pêchez et de la technique utilisée. Je vais vous en parler un peu plus.
L'image du côté gauche dans votre document est très importante, c'est peut-être même l'image la plus importante de toute la documentation. Le poisson dans l'image de gauche a été attrapé par des pêcheurs grâce à un filet maillant. Le poisson à droite a été attrapé dans les mêmes eaux, le même jour, avec une palangre. Ce poisson, pêché de manière traditionnelle à la palangre, a été saigné en mer...
Monsieur Cobb, excusez-moi. Puis-je vous interrompre un instant? Je déteste avoir à faire cela, vu que vous étiez sur votre lancée, mais comme vous pouvez le voir, notre comité doit compétitionner avec une foule beaucoup plus nombreuse et probablement beaucoup plus enthousiaste. Je n'en suis pas sûr. C'était une bonne chanson, mais malheureusement, le moment n'est pas vraiment opportun.
Pour tous ceux qui assistent à la séance, si vous n'arrivez pas à entendre les témoignages, nous avons des appareils munis de casques d'écoute à l'arrière, comme ceux que portent M. Doherty et M. Arnold. Vous pourrez entendre beaucoup plus facilement.
[Français]
Pour ceux qui veulent entendre le français, c'est le canal no 2.
[Traduction]
Et, bien sûr, la musique s'arrête dès que je finis ma phrase, mais je suis sûr que nous aurons droit à un autre morceau bientôt. Nous sommes à Terre-Neuve-et-Labrador, après tout.
Monsieur Cobb, toutes mes excuses. Pouvez-vous reprendre là où je vous ai interrompu, monsieur?
Merci.
J'étais en train de parler de cette diapositive, au cas où vous voudriez y passer. Je veux vous montrer cette image. C'est une image très importante dans la documentation, parce qu'elle illustre la différence. Il s'agit de poissons attrapés le même jour selon différentes méthodes. L'un a été attrapé avec un filet maillant. Le poisson a suffoqué dans le filet et a perdu beaucoup de ses couleurs. L'autre poisson a été attrapé à la palangre. Il a été remonté immédiatement, saigné tout de suite, éviscéré et lavé en mer. Il a été congelé, puis ramené à l'usine de transformation en moins de quatre heures. La différence est évidente.
La prochaine diapositive vient compléter la première: il s'agit de déterminer pour qui nous pêchons. Je crois qu'on a déjà abordé ce matin quels étaient les marchés et qui étaient nos clients. Si les poissons que nous pêchons sont destinés à devenir des bâtonnets, alors il n'y a aucun problème à utiliser un filet maillant. Toutefois, si nous pêchons des poissons de qualité élevée, destinés aux meilleurs marchés où ils seront vendus à un prix élevé, nous allons devoir faire attention aux poissons pendant que nous sommes encore en mer.
Comme vous pouvez le voir sur l'autre photo — que j'ai prise avec mon iPhone —, il s'agit de la seule photo qui n'a pas été prise sur l'île Fogo. Elle a été prise dans un restaurant de Toronto. Ce poisson de l'île Fogo a été servi au restaurant Luma. Il se trouve au TIFF Lightbox, pour ceux qui connaissent Toronto.
Revenons un peu en arrière. J'aimerais attirer votre attention sur la prochaine diapo. Notre premier ministre actuel, lorsqu'il a pris le pouvoir, a écrit une lettre de mandat à chacun de ses ministres. Dans celle qu'il a envoyée au ministre des Pêches et Océans, j'aimerais que vous regardiez la partie où il est écrit: « S'appuyer sur les preuves scientifiques et le principe de la prudence et tenir compte des changements climatiques dans la prise de décisions ayant des répercussions sur les stocks halieutiques et la gestion des écosystèmes. » Il y est également écrit: « Travailler de concert avec les provinces, les territoires, les nations autochtones et d'autres intervenants pour assurer une meilleure gestion commune de nos trois océans. »
À ce chapitre, je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Vous remplissez cette partie du mandat.
Parlons maintenant de l'aspect scientifique. Plus tôt, j'ai mentionné le moment où les pêches ont lieu et la question de savoir si cela a un impact. J'ai joint une copie du rapport scientifique à la fin de ma documentation, alors vous disposez d'une copie complète. J'aimerais en faire la lecture à haute voix afin que tout le monde ici présent puisse en prendre connaissance:
Dans le passé, la pêche à la morue avait lieu toutes les saisons, mais les simulations menées de 1997 à 1999 ont montré que la pêche automnale (période à laquelle le poisson avait une meilleure forme physique) réduisait de 8 à 17 % le nombre de morues retirées du stock tout en permettant, d'une part, d'atteindre les mêmes quotas axés sur le poids et, d'autre part, d'obtenir un rendement maximal ainsi qu'un produit de meilleure qualité. Toujours en fonction du poids des poissons, les pêches printanières et estivales ont accusé un rendement et une qualité inférieurs (6 % et de 5 à 26 % respectivement). Les cycles biologiques saisonniers peuvent servir de modèles pour élaborer des stratégies de gestion visant à promouvoir la conservation des pêches et augmenter les retombées économiques; la pêche doit avoir lieu dans les périodes où les impacts biologiques seront minimes, et le rendement économique, maximal.
Je vais vous expliquer cet énoncé scientifique en d'autres mots. Pour peut-être la première fois depuis le début de l'histoire de l'humanité, la bonne chose à faire pour les stocks de morue est également ce qu'il faut faire pour accroître vos bénéfices nets.
Il semble que la science a prouvé ce que nos ancêtres savaient déjà. La personne à ma gauche l'a également mentionné plus tôt. En automne, la morue est plus lourde, plus consistante et plus ferme. C'est un meilleur poisson. Quand nous pêchons à l'automne, nous prenons moins de poissons du stock pour atteindre les mêmes quotas, le poisson est de meilleure qualité, et il nous rapporte plus d'argent. Aujourd'hui, nous pouvons affirmer cela en nous appuyant sur des données scientifiques.
Parlons maintenant de la façon dont la pêche est faite. Ce que je dis s'applique à l'île Fogo, bien sûr. Principalement, nous utilisons deux méthodes de pêche. Fogo Island Fish a mis l'accent exclusivement sur la morue pêchée à la palangre. Cela fait environ 300 ans que nous pêchons à la palangre. Il s'agit d'une méthode incroyable, et il s'avère que c'est ce que les marchés veulent. Voilà donc un autre aspect clé. Nous employons aussi une autre méthode avec des casiers à morue, mais j'en reparlerai plus tard.
À propos de la pêche à la palangre, nous découvrons de nouvelles façons d'appliquer cette vieille technique. J'ai fourni une image à l'intention des membres. Je ne sais pas si vous êtes toujours capable de me suivre. Voici deux de nos pêcheurs, Boyce Reid et Austin Reid, pour les appeler par leur nom. L'Office national du film a tourné un court métrage cette année qui a été présenté en première au Festival international du film de Toronto, intitulé Hand.Line.Cod. On y montre Austin et Boyce qui pêchent à la palangre.
Nous mettons également à l'essai de nouveaux moyens et de nouveaux engins avec des casiers à morue. Au cours des huit dernières années, nous avons mené des recherches scientifiques avec le Marine Institute. L'effort était dirigé par M. Gordon Slade, en notre nom. Il est même ici avec nous aujourd'hui, et je tiens à remercier Gordon de tous ses efforts. Nous avons prouvé que les casiers à morue fonctionnent. On les utilise de la même façon que les casiers à crabe. On y dépose un appât, on le met à l'eau et on l'installe. Il peut survivre au mauvais temps. Si vous revenez trois jours plus tard, les morues sont encore en train de nager dedans et semblent relativement heureuses. À dire vrai, elles sont peut-être un peu énervées, mais elles sont en bon état. Cette nouvelle technique est maintenant prête pour l'industrialisation, le déploiement à grande échelle. Nous croyons fermement, et cela a été démontré, que nous pouvons attraper autant de morues que nous en avons besoin grâce à ces casiers.
Il est absolument essentiel pour nous de parler du capelan. Le capelan est une espèce clé pour la morue du Nord. Si nous parlons de la morue du Nord, nous devons parler du capelan, peu importe le contexte ou la situation. Je vous demanderais de consulter le deuxième rapport scientifique, à la fin de la documentation, intitulé Northern cod comeback, le retour de la morue du Nord. George Rose et Sherrylynn Rowe ont mené cette étude en 2015. Je vais citer une partie du rapport: « La baisse et l'augmentation du stock de morue a presque toujours été en corrélation avec la biomasse des stocks de capelan... »
Je n'ai jamais rencontré Tony avant aujourd'hui, et je ne crois pas que nous ayons officiellement été présentés. Malgré tout, par coïncidence, il semble que nos expériences sur l'eau nous ont appris les mêmes choses.
Donc, qu'attendons-nous? Allons-nous faire ce qu'il y a de mieux pour les communautés côtières ou allons-nous favoriser les entreprises?
Fogo Island Fish pêche dans des bateaux de jour. Nous attrapons les poissons en vie, nous les saignons en mer et nous les congelons pour le court trajet de retour. Nous les découpons dans nos propres usines, nous les parons, nous les emballons et nous les congelons rapidement. Tout cela nous permet d'avoir un produit de très haute qualité. En même temps, nous préservons les emplois locaux dans les usines de transformation de l'île Fogo, et je tiens aussi à rajouter que Fogo Island Fish paie ses pêcheurs plus que le double des prix en vigueur négociés dans la province pour les poissons. En 2015, nous avons payé nos pêcheurs 1,25 $ la livre pour des poissons éviscérés et non étêtés. Cette année, vu les prix forts du marché, nous avons augmenté les nôtres. Cette année, nous avons été en mesure de payer nos pêcheurs 1,40 $ pour des poissons éviscérés non étêtés.
Merci, monsieur le président.
Il y a une autre chose sur laquelle nous devons nous pencher. Ce matin, nous avons parlé des nouvelles recrues dans l'industrie. Nous avons perdu environ 60 % de nos pêcheurs au cours des 10 dernières années. Je serais ravi de discuter plus en détail des conditions qui expliquent cela. C'est un problème que nous devons vraiment régler.
Notre but est de préserver nos stocks et nos économies côtières. Il est important de prendre en considération quand, comment et pour qui nous pêchons; cela a un effet profond sur les résultats sociaux, écologiques et économiques. Lorsque nous pêchons les espèces clés, nous nuisons à l'écosystème en entier, et la pêche pendant la période de ponte revient à détruire complètement nos stocks et nous devrions éviter cela. J'appuie ce que je dis sur des données scientifiques.
Merci, monsieur Cobb.
Je suis désolé, mais je dois vous demander d'arrêter ici. Je vais vous dire ce que j'ai dit à M. Doyle, vous pourrez terminer votre exposé pendant la période de questions, puisque nous faisons compétition avec la musique.
Je sais. Le problème, c'est que je n'ai pas de solution à court terme, monsieur Doherty. Cela me frustre aussi, et je vais en prendre note.
Madame Orren, s'il vous plaît, vous avez 10 minutes.
Bon après-midi, et merci beaucoup de me donner l'occasion de m'adresser à vous ici aujourd'hui. Je ne m'y attendais pas, alors c'est une très bonne surprise.
Fishing for Success est ici pour vous demander respectueusement d'adopter des politiques fédérales et de fournir un soutien réglementaire en vue de permettre à notre organisation d'accéder aux poissons. Notre but est de mettre au point un programme complet de pêche à la morue pour les jeunes. Je ne suis pas venue ici pour vous parler du dénombrement des poissons, du dénombrement des bateaux, de syndicats ou de ce genre de choses. Je suis ici pour vous parler de nos jeunes — et nos jeunes sont importants —, parce qu'il ne sert à rien d'essayer de régler les problèmes relatifs aux pêches si les jeunes ne sont pas là pour prendre la relève. Voilà ce qui nous préoccupe.
J'ai eu la chance de grandir à Terre-Neuve-et-Labrador avant qu'on nous impose le moratoire sur la morue. C'était formidable, et c'est quelque chose que je garde avec moi. Ça m'a marquée. Je veux donc recréer cela pour les jeunes d'aujourd'hui à Terre-Neuve-et-Labrador. J'ai quitté mon emploi d'enseignante en sciences dans une école secondaire en Floride où j'enseignais la stœchiométrie et la configuration électronique. C'est un endroit magnifique, et j'étais heureuse comme un poisson dans l'eau. Dès que je pouvais, j'emmenais les enfants dehors pour leur montrer la nature, et j'ai remarqué que les enfants, de plus en plus, semblent déconnectés de la nature: ils ne pouvaient même pas nommer les plantes et les animaux que l'on trouve dans leur propre cour, et c'est pourtant quelque chose qu'ils devraient connaître.
Je suis retournée chez moi à Terre-Neuve pour rendre visite à des parents, et j'ai remarqué qu'il n'y avait plus personne près des quais communautaires. J'ai grandi à Terre-Neuve. Quand j'étais enfant, on pouvait aller sur les quais et aider à transporter les viscères ou à couper les langues, et ensuite on pouvait ramener un sac de poisson à sa mère pour souper. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il n'y a plus d'enfants sur les quais parce que la pêche a changé. L'époque de la morue est révolue. Le poisson qui vaut de l'or, c'est le crabe des neiges, et les bateaux doivent être plus gros pour accommoder de l'équipement plus imposant. Les quais sont aujourd'hui en béton. Des blocs d'appâts congelés se balancent dans les airs, et des chariots élévateurs y circulent; ce n'est pas un endroit pour les jeunes et leur famille.
Comme il se doit, nous avons des politiques et des règlements visant à protéger nos pêcheurs au travail, mais qu'en est-il de nos jeunes et de leur famille qui sont aujourd'hui déconnectés de leur patrimoine de pêcheur? Si on remonte moins de 100 ans en arrière, presque tous les habitants de Terre-Neuve-et-Labrador étaient des familles de pêcheur. Prenez par exemple l'agriculture familiale dont vous avez discuté. Puis, en 1992, juste avant le moratoire sur la morue, il ne restait plus qu'environ 30 % des habitants de Terre-Neuve-et-Labrador qui participaient à l'industrie de la pêche. Quand j'étais petite, je voulais aller sur les quais pour y participer; c'était là qu'on apprenait de nos mentors. Votre grand-père ou votre oncle vous apprenait comment faire. Votre grand-mère vous montrait comment transformer le poisson. Aujourd'hui, moins de 2 % des habitants de Terre-Neuve participent à l'industrie de la pêche commerciale.
Très bientôt, les histoires de pêche, de pêcheur ou de pêcherie n'auront plus leur place dans nos familles. Il y a des enfants à St. John's qui n'ont jamais mis les pieds sur un bateau. Il y a des enfants à St. John's qui ne sont jamais allés pêcher. Churchill a dit un jour que les habitants de Terre-Neuve-et-Labrador n'ont pas leur pareil sur les petits bateaux; aujourd'hui, il ne dirait probablement pas cela.
J'ai décidé d'arrêter d'enseigner aux élèves au secondaire en Floride, et je suis retournée chez moi à Terre-Neuve. Avant, j'ai tout de même fait des études supérieures à l'Université de Floride en sciences aquatiques et en science halieutique. Mon choix s'est arrêté délibérément sur cet établissement à cause de son programme d'apprentissage de la pêche. Je voulais pouvoir étudier dans ce programme avant d'en monter un ici, à Terre-Neuve. Ensuite, j'ai décidé d'axer mes efforts sur un endroit en particulier. Je me suis demandé où j'allais pouvoir enseigner aux jeunes.
St. John's est un excellent endroit, puisque c'est là que se trouvent les jeunes les plus urbanisés. C'est exactement ce que je voulais, c'est mon public cible. St. John's a aussi l'avantage d'être l'endroit où les touristes se rendent d'abord lorsqu'ils vont à Terre-Neuve; une autre source de revenus potentielle pour moi. L'établissement de programmes touristiques — comme activité secondaire — semblait nécessaire pour aider à financer mes programmes pour les jeunes, parce qu'il est difficile d'obtenir un financement pour ce genre de programme. J'avais donc deux problèmes sur les bras.
Aujourd'hui, je suis de retour à St. John's. Il fallait alors que je trouve une communauté de pêcheurs active à St. John's. Eh bien, saviez-vous que Petty Harbour compte une zone de pêche protégée où on pratique la pêche à la palangre depuis 1895? Lorsque la nouvelle technologie des filets maillants est arrivée, on a voté pour interdire cette méthode de pêche. En fait, en 1964, il a été ajouté dans la Loi sur les pêches, par décret en conseil, que les filets maillants seraient interdits à Petty Harbour, et aujourd'hui la pêche commerciale à la morue s'y fait à la palangre, avec un seul hameçon.
J'ai aussi une copie du livre aujourd'hui. Si j'en avais les moyens — ce qui n'est pas le cas vu que mon organisme est sans but lucratif —, j'en aurais apporté une copie pour tout le monde ici. Ça m'a beaucoup aidé à enseigner aux jeunes. Vous pouvez aller sur le site www.islandrooms.org et télécharger une version numérique du livre; il raconte toute l'histoire. Il est important d'éduquer les jeunes sur l'état actuel de nos océans. Je parle des déchets de monofilaments en plastique, de la pêche durable, etc. Petty Harbour était l'endroit idéal.
Après, je devais me procurer des articles de pêche historiques. En général, ce genre de choses est transmis de génération en génération. Donc, je reviens de Floride; je suis pratiquement une étrangère. Je finis par me procurer une propriété. Je dépense mon propre argent. D'autres personnes finissent par se joindre à moi, et nous formons un organisme sans but lucratif.
Par nous-mêmes, nous avons monté une liste de programmes, que je vous ai fournie. L'organisme est opérationnel. Nous avons mené cet été un projet pilote de pêche à la morue pour les jeunes avec un petit groupe de jeunes de Thrive City. On a choisi des jeunes à risque. Une fois par semaine pendant l'été, ils venaient participer au programme. Ils vont le terminer le 27 septembre. Nous avons préparé un certificat à leur intention.
Ils ont peint des doris, ont bouché les trous, et ont utilisé l'embarcation pour faire un tour. Ils ont écorcé des bâtons, une chose qu'il faut traditionnellement savoir faire afin de construire un chafaud. Nous les avons emmenés à la pêche. Ils ont paré leurs poissons, et ils ont pu les ramener à leur famille.
Gardez à l'esprit le fait qu'il s'agit de jeunes à risque; les gens avec qui ils vivent dépendent probablement des banques alimentaires. Là, ils ont pu ramener à la maison du poisson frais, chose qu'on ne trouve pas dans une banque alimentaire. Le fait qu'ils puissent amener du poisson frais chez eux donne à ces jeunes de la confiance et de la fierté. Voilà la moitié des jeunes qui vont terminer notre premier programme de pêche à la morue pour les jeunes.
J'ai besoin de financement de la part du gouvernement fédéral afin de m'aider à avoir accès aux poissons, parce que nous n'avons eu que trois semaines pour faire tout cela. Le prolongement d'un week-end pour la pêche récréative ne nous a pas aidés, vu que les travailleurs sociaux ne peuvent pas communiquer avec ces jeunes la fin de semaine.
Je crois que cela résume bien la situation. Je pourrais continuer pendant des heures; ça fait 11 ans maintenant que je travaille sur ce programme.
Merci beaucoup.
Merci, madame Orren. Nous vous sommes reconnaissants de votre témoignage.
Nous allons passer à la période de questions de sept minutes.
Monsieur McDonald, vous êtes le premier. Vous avez sept minutes, monsieur.
Merci, monsieur le président. Je voudrais remercier nos trois témoins de cet après-midi d'avoir pris le temps de venir ici pour témoigner devant le Comité.
Ma première question s'adresse à Tony Doyle et à M. Cobb. Vous avez tous les deux parlé de la pêche au capelan et de son importance pour la survie de la morue et du stock de morue en général. Des scientifiques nous ont dit la même chose à Ottawa la semaine dernière, dans leurs témoignages au Comité. Lorsqu'il y a des hauts et des bas dans le stock des capelans, on voit les mêmes tendances dans les stocks de morue.
Tony, vous avez mentionné, à propos de la pêche au capelan de cette année et dans les années passées, que le poisson arrivait en retard, et tout le reste. Selon vous, que devons-nous faire, comme gouvernement, à propos du stock de capelan? Comme vous l'avez dit, tout le monde met l'accent sur le stock de morue — ce qu'il fait, s'il augmente ou s'il diminue, sa biomasse —, mais tous ceux qui ont témoigné nous ont dit qu'il faut accorder une aussi grande importance à la pêche au capelan.
Je sais qu'il y a eu une pêche cette année. Je suis passé devant des usines de transformation du poisson, et les employés étaient en train de charger des camions de transport avec des conteneurs de poisson et d'autres choses pour les amener à un endroit où ils allaient être transformés ou peu importe ce qu'on allait leur faire.
Devons-nous continuer ainsi? Où devrions-nous installer les pêches au capelan si nous voulons maintenir et — espérons-le — rétablir la pêche à la morue?
Je crois qu'on devrait mener davantage d'études scientifiques sur le capelan, parce que je crois savoir que rien n'est fait actuellement au large des côtes. Les scientifiques se rendent à deux ou trois plages couramment utilisées, où beaucoup de capelans se trouvaient sur la grève — disons entre Holyrood et Bellevue, des endroits de ce genre — et ils y vérifient la ponte. C'est pathétique. Le Comité devrait recommander, entre autres, de mener davantage d'études scientifiques sur le capelan pour voir ce qui se passe réellement avec le stock.
Personnellement, je ne suis sûr de rien. Je me suis demandé si le stock de capelan qui a débarqué à baie de la Conception est inférieur à celui des endroits plus au nord, comme à la baie de Bonavista. Il me semble qu'il y a beaucoup plus de capelans dans les régions au nord, mais à la baie St. Mary's, à Southern Shore et à la baie de la Conception, le stock a débarqué de façon sporadique. On connaît de bonnes années, puis d'autres années, comme celle-ci, où il y a peu de poissons.
Je crois qu'il faut avoir une vue d'ensemble de la situation, parce que ce n'est pas seulement la morue qui dépend du capelan; il y a aussi les oiseaux de mer et les baleines, ainsi que les oiseaux marins de l'île Baccalieu. Au cours des deux ou trois dernières années, les oiseaux plongeurs se sont très bien portés. Les guillemots et les fous de Bassan, les goélands et les mouettes ne se portent pas aussi bien. Ils sont incapables d'élever beaucoup d'oisillons parce qu'ils ne peuvent pêcher qu'en surface de l'eau, dans les douze premiers pouces, et ils ne peuvent pas attraper le capelan s'il est plus bas. Je sors souvent l'été pour voir ce qui se passe.
Monsieur McDonald, je dirais, vu l'absence de données scientifiques, que si nous voulons gérer les pêcheries — toutes ou même une seule — en suivant le principe de précaution et élaborer des politiques fondées sur des données scientifiques, nous devrions conclure aujourd'hui qu'il doit y avoir un moratoire complet sur le capelan. Aujourd'hui. Aucune recherche scientifique n'a été faite sur le capelan depuis 2012, à ma connaissance, et malgré tout, nous avons des pêcheries commerciales de capelan.
Cela ne semble certainement pas se conformer au principe que j'ai présenté plus tôt dans mon document. En l'absence de conformité avec ce principe, il faut imposer un moratoire complet. Je crois qu'il faut regarder les avantages économiques liés au capelan et les conséquences de sa pêche. Les conséquences de la pêche au capelan sont très néfastes pour la morue, et nous avons un tas de données scientifiques pour appuyer ce que nous disons.
Merci.
De nouveau, monsieur Cobb, j'aimerais vous poser une question sur votre exposé, à propos de ce qui a été fait à l'île Fogo par rapport à la durabilité de la collectivité, à la simple survie des collectivités qui s'y trouvent, et à la façon dont tout le monde semble s'être uni pour que le processus fonctionne.
Croyez-vous que le même type d'approche pourrait être utilisé pour assurer la survie et la durabilité d'un grand nombre d'autres petits villages qui se trouvent dans la province aujourd'hui, où il y a de moins en moins de personnes qui restent dans ces collectivités d'un bout à l'autre de l'île?
Nous sommes très confiants, à vrai dire. J'ai bon espoir que ce que nous faisons — en particulier ce que nous faisons avec Fogo Island Fish — peut être adopté et adapté par d'autres collectivités.
Je crois qu'il est plus facile aujourd'hui pour les collectivités de participer aux marchés et d'y vendre leurs produits directement. Par l'intermédiaire de Fogo Island Fish, mon épouse et moi avons été en mesure de travailler directement avec nos pêcheurs. Nous avons acheté des poissons de 33 pêcheurs l'année dernière, et cette année, ce sera 75 pêcheurs, et il y en a 100 en tout. À nous deux seulement, nous avons été capables de trouver des marchés pour ce poisson, principalement en Ontario.
Je crois qu'il s'agit, pour les autres collectivités, d'une approche et d'une réflexion à petite échelle, mais je crois que cela peut avoir un impact profond, particulièrement lorsque cela vous permet de doubler le poids économique de votre communauté de cette façon. Il y a des leçons à retenir dans ce que nous avons fait pour d'autres collectivités, absolument, pas seulement pour Terre-Neuve-et-Labrador. Selon moi, cela touche tout le pays. Il y a des villages de pêcheurs dans tout le pays qui doivent affronter les mêmes problèmes que nous. Pour bon nombre de ceux-ci, je crois que la réponse serait d'interagir directement avec les marchés, de vendre du produit de qualité élevée sur les meilleurs marchés.
Merci, monsieur McDonald. Je vous remercie de ne pas avoir dépassé vos sept minutes.
Allez-y, monsieur Doherty.
Je remercie nos invités d'aujourd'hui.
Chaque série s'est révélée très informative, et la dernière vient ajouter une autre perspective. Je vous suis reconnaissant de vos témoignages.
Monsieur Doyle, corrigez-moi si je me trompe, mais avez-vous dit que vous pêchiez dans la division 3L?
Votre témoignage semble, à mon avis, contredire ce que le ministère des Pêches et des Océans nous a dit la semaine dernière, à propos de la faible quantité. Mais il ressort de votre témoignage — à ce qu'il me semble, du moins, et c'est vous qui êtes sur l'eau — que la quantité est assez élevée.
Oui. J'ai participé à l'évaluation par les pairs des processus de consultation régionaux sur la morue. Nous sommes dans la division 3L, à la limite nord de la zone sud. Si on va à Southern Shore, dans la région de Trepassey ou de St. Shotts ou à la baie St. Mary's, il n'y a pas autant de poisson, mais c'est parce qu'on est sur la frontière nord. La baie Trinity se trouve de ce côté. La situation est très bonne là-bas, tout comme dans le passage Baccalieu, près de l'île Baccalieu et dans la région de Bay de Verde. Cette année, les poissons se sont rendus jusque dans la baie, aussi loin que Port de Grave, où il y a des pêches récréatives et des pêches d'intendance de la morue.
Monsieur Cobb, vous avez mentionné qu'il y a de moins en moins de pêcheurs. Je crois que vous avez dit 60 % moins. Vous n'avez pas approfondi le sujet, et j'aimerais savoir si vous pouvez nous donner un peu plus d'information à cet égard.
Bien évidemment, cette question comprend son lot d'éléments compliqués. Aujourd'hui, le coût que doivent assumer les nouveaux arrivants dans le secteur de la pêche se chiffre autour d'un million de dollars. Je crois qu'il y a eu quelques commentaires ce matin à propos des causes connexes, mais voilà la situation dans laquelle nous nous trouvons. Si un jeune d'aujourd'hui veut se lancer dans la pêche — et nous avons des jeunes sur l'île Fogo qui sont intéressés à être pêcheurs — il aura besoin d'un million de dollars ou plus pour y arriver. Il n'y a aucun financement dans la province, et je ne parle pas des prêts garantis: ce sont les banques qui les autorisent, et les banques ont le non facile. Nous sommes au courant de tout cela. Ce n'est pas une option viable. Cela ne fonctionne pas.
Sur le plan législatif, nous vivons aujourd'hui dans un monde où vous devez vous conformer à un tas de règlements démesurés qui font en sorte qu'il vous faut de six à huit ans de formation officielle — c'est-à-dire pêcher à bord d'un bateau pour accumuler des heures de formation sur un bateau — afin de devenir pêcheur. Tout ça, sans garantie qu'après six ou huit ans, vous pourrez toucher un bon revenu. Dans ce cas, pourquoi un jeune voudrait-il investir un million de dollars et six à huit ans de sa vie alors qu'il n'y a aucune garantie qu'il pourra gagner sa vie ainsi? Ça n'a aucun sens.
Je crois que ce dont on a besoin, pour la morue en particulier, ce sont des pêcheries semi-hauturières, et nous devons faire en sorte qu'elles soient accessibles aux jeunes. Dans un très grand nombre de cas, les pères de ces jeunes ont abandonné la pêche. Pour diverses raisons, ces jeunes n'ont pas pu investir le million ou le million et demi de dollars nécessaire. Malgré tout, ils adoreraient pouvoir revenir à la pêche à la morue. Si nous pouvions établir une pêcherie semi-hauturière adaptée aux petits bateaux, principalement pour les jeunes, avec un niveau approprié de formation pour cette pêcherie ainsi qu'un niveau approprié d'investissement, je crois que cela pourrait attirer beaucoup de nouveaux jeunes dans la pêche.
Parfait.
Madame Orren, vous avez dit que la remise des diplômes pour votre premier groupe se fera le 27 septembre?
Il serait peut-être bon que cinq ou six députés y assistent. Je sais que notre horaire est passablement chargé, mais cela pourrait être intéressant d'aller encourager les nouveaux diplômés de votre programme. Selon moi, c'est un bon programme. Est-il lié à un programme scolaire, ou est-ce seulement vous?
C'est un programme communautaire et bénévole sans but lucratif.
Pour répondre à certains des commentaires que M. Cobb vient de faire, il est vrai qu'il est difficile de devenir pêcheur. Le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral — Transports Canada et Industrie Canada — ainsi que la FFAW et le PFHCB régissent ce que vous devez faire pour pêcher.
Les jeunes devront débourser au moins — un million, c'est vraiment élevé — 250 000 $ pour commencer, et, comme on l'a déjà dit, passer de six à huit ans en formation, en plus du temps en mer. Voilà ce qui les attend; c'est le prix de toute une maison . Pour eux, six à huit ans, c'est une maîtrise ou un doctorat. Comme on l'a dit, ce sont des exigences très lourdes. Un petit bateau pour que les jeunes puissent pêcher sur le littoral, pour commencer... À l'époque, un bateau de 22 pieds et une palangre suffisaient pour pêcher.
Il faut également qu'ils puissent accéder au marché comme n'importe quel entrepreneur. Cela suppose de demander à la province d'assouplir certaines des politiques relatives à la vente du poisson sur le marché. Il faut aussi qu'ils puissent vendre à l'extérieur de Terre-Neuve, et ça, c'est un une autre question qui revient à la compétence provinciale.
Monsieur le président, j'ai un commentaire à adresser au Comité.
Je ne veux pas nous faire dévier du sujet et alourdir le problème, mais nous avons entendu à plusieurs reprises que la pêche au capelan est un élément important du problème. Il pourrait s'agir de quelque chose d'intimement lié à notre étude sur la morue. Il faudrait envisager de mener une sous-étude sur la pêche au capelan qui s'accorde avec celle-ci.
Nous pourrions en discuter plus tard, mais j'aimerais que cela figure dans le compte rendu afin de pouvoir reprendre le sujet une fois que nous serons de retour à Ottawa. C'est très important. Un certain nombre de témoins nous en ont parlé. Je crois qu'il est assez clair pour nous tous ici présents que si nous voulons prendre des mesures qui donnent des résultats... nous allons devoir peut-être comprendre ce qui se passe à ce sujet.
Merci, monsieur Doherty. J'en prends bonne note.
Nous venons tout juste de demander pour la deuxième fois à la pièce d'à-côté de réduire le bruit. Je m'excuse encore une fois. Le Delta ne semble plus si mal, finalement, n'est-ce pas? Néanmoins, nous allons passer à M. Johns pour les sept prochaines minutes.
Il y a une chose que j'aimerais mentionner. Nous allons accueillir un nouveau témoin au prochain tour. Malheureusement, M. Blackwood ne pourra pas être parmi nous. Il a eu un empêchement. Le témoin sera M. Merv Wiseman.
Est-ce que cela est accepté à l'unanimité? M. Wiseman est lié à l'industrie, à la recherche et sauvetage ainsi qu'à l'agriculture, mais il avait des commentaires à formuler ici. Êtes-vous d'accord?
Des voix: Oui.
Le président: D'accord.
Monsieur Johns, vous avez sept minutes.
Merci.
Je vous remercie de votre témoignage.
Je crois qu'il est fondamental de comprendre ce qui se passe à l'échelle locale si nous voulons étudier les pêches ainsi que l'écart qui existe à ce chapitre.
Je tiens à vous féliciter, d'abord, de votre leadership. Vous avez contribué énormément à votre collectivité, et votre altruisme et votre engagement afin de trouver de nouvelles façons de renforcer les stocks dans votre collectivité pour les rendre plus fortes et plus saines vous honorent.
Monsieur Cobb, vous avez investi beaucoup de votre propre argent dans votre coopérative. Comment pourrions-nous reproduire le modèle de coopérative de l'île Fogo, ou alors créer, en quelque sorte, des carrefours ou des incubateurs à Terre-Neuve? Comment pouvons-nous appliquer cela sur les trois côtes? Pouvez-vous vous exprimer un peu à ce sujet?
Oui, bien sûr.
Je crois qu'il serait négligent de ma part de ne pas vous dire que — après 50 ans d'activité dans la coopérative — le modèle de coopérative n'est certainement pas une solution miracle. Il y a des jours où il me semble que ce n'est qu'une façon organisée de se battre entre nous, et il y a des jours où c'est cela qui arrive.
En vérité, ce modèle a permis à la pêche de survivre dans notre communauté, et il nous a permis de garder nos emplois dans la transformation du poisson. Il nous a permis de combattre et de discuter afin de trouver des solutions. Je crois que tout change lorsque nous pouvons avoir dans notre collectivité des emplois dans le secteur de la transformation. Lorsque la transformation se passe dans les collectivités, alors nous pouvons avoir des pêcheries.
Je me pose beaucoup de questions à propos de la taille. À l'île Fogo, comme je l'ai dit, nous avons 10 villages de pêcheurs qui comptent 2 700 personnes. Nous avons la chance d'avoir assez de personnes et d'avoir la masse critique pour que le modèle réussisse. Je crois vraiment, maintenant plus que jamais, et il y a certainement d'autres personnes ici qui partagent mon avis, qu'à petite échelle... E. F. Schumacher a écrit un livre vers 1974 appelé Small is Beautiful, un livre sur l'économie. Je crois qu'il est plus pertinent aujourd'hui qu'il ne l'était en 1974. Le livre se penche sur les questions d'échelle. Je crois que lorsque nous trouvons l'échelle appropriée et que l'économie est axée sur la collectivité, nous pouvons faire de grandes choses.
Je vais parler de la Colombie-Britannique. Il y a des pêcheurs en Colombie-Britannique qui pêchent le saumon. Ils pêchent à la ligne. Ils sont sur Instagram. Les poissons qu'ils pêchent sont éviscérés et envoyés non étêtés à certains des meilleurs restaurants au monde. Nous voyons ces poissons dans les mêmes menus que notre morue, et je veux féliciter ces gens de cela.
Je ne crois pas qu'il s'agisse vraiment d'un modèle de coopérative, mais il s'agit indubitablement d'un modèle axé sur la collectivité. Il s'agit d'un produit de qualité élevée qui va directement au marché. Nous ne sommes certainement pas les seules personnes au pays qui font cela. Nous sommes peut-être les premiers à Terre-Neuve-et-Labrador, mais il y a d'autres collectivités au pays qui font cela, et j'encourage toutes les collectivités à envisager d'adopter cette approche.
Oui, il s'agit d'une excellente approche. Je crois que c'est Ecotrust Canada qui l'a introduite dans le cadre d'un partenariat à Ucluelet. On peut associer le poisson à un pêcheur en particulier. Ça crée de la valeur. À Ottawa, je crois que vous avez parlé des pêcheries du Maine et du Massachusetts de l'importance de mettre le poisson dans l'assiette.
Madame Orren, vous avez parlé d'un soutien réglementaire. De quels autres types de soutien avez-vous besoin pour votre programme? Je vois un lien très fort, à dire vrai, entre le modèle de coopérative et le programme que vous offrez. On pourrait faire en sorte que toutes les collectivités aient accès à ce programme d'éducation. Je crois que c'est la clé. C'est une base importante. Qu'est-ce que vous en pensez?
Oui, absolument.
La chose la plus importante, bien évidemment, c'est d'avoir accès aux ressources, parce qu'il est plutôt difficile d'enseigner la pêche sans avoir accès aux poissons. Une fois que nous avons accès aux poissons, cela contribue à beaucoup d'autres programmes que nous voulons mettre en oeuvre. Par exemple, hier, à Quidi Vidi, nous avons travaillé en partenariat avec le Mallard Cottage et le Wandering Pavilion et nous avons donné des séances d'information gratuites au sujet de la mise en filet et de la cuisson du poisson. Nous offrons également d'autres types de programmes de sensibilisation du genre, parce que, outre le fait d'être un produit, le poisson est un aliment propre à notre culture, et cela se rapporte à la sécurité alimentaire. À notre avis, les gens de Terre-Neuve-et-Labrador ne savent plus comment apprêter un poisson complet ni même comment le faire cuire.
Lorsqu'il est question de programmes du genre « la mer à votre assiette », il existe des programmes visant à servir du poisson dans les écoles, par exemple, auxquels nous aimerions prendre part d'une certaine façon, mais, encore une fois, nous n'avons pas le poisson. Le poisson n'est pas servi dans les écoles de Terre-Neuve, alors que pouvons-nous faire pour amener les jeunes de Terre-Neuve-et-Labrador à en manger? Comme vous pouvez le voir, si vous vous êtes déjà promené dans le coin, Terre-Neuve ne fera probablement pas beaucoup d'élevage de vaches, donc nous n'allons probablement pas devenir de gros mangeurs de boeuf. Les protéines sur lesquelles nous allons devoir compter à l'avenir sont celles des fruits de mer.
La sécurité alimentaire est un problème. Quatre-vingt-dix pour cent de nos aliments arrivent par traversier, et, après trois jours, nous devons nous rabattre sur les « croustilles tempête », et ce n'est vraiment pas une bonne chose à faire. Amener les gens à « manger local » et à manger des fruits de mer locaux est très important. C'est pour faire adopter cette pratique par les jeunes que nous organisons des événements comme celui qui a eu lieu hier. Les membres de notre personnel circulaient et donnaient des leçons de mise en filet. Nous amenons les jeunes à y participer, puis nous faisons équipe pour montrer de quelle manière il faut faire cuire le poisson. Il est important de servir du poisson dans les écoles, il faut donc trouver une manière d'y arriver, mais pour cela il nous faut du poisson. Il pourrait même être question de conclure un partenariat avec des écoles de Toronto et de faire en sorte que les jeunes attrapent leur poisson ici et l'apportent à l'école, à Toronto, pour qu'il soit apprêté, et il y aurait ainsi tout un échange culturel. Il y a plein de choses que nous pourrions faire, mais tant que nous n'avons pas de poisson, nous ne pouvons pas nous y mettre.
De plus, j'ai remarqué une chose lorsque nous parlions de la formation sur la pêche. J'ai reçu une formation pour apprendre à pêcher, alors je peux maintenant le faire. En plus d'être représentante, rédactrice de demandes de subventions, commis comptable et tout cela, je suis aussi capitaine de bateau et je fréquente l'école de pêche. Je fréquente le Marine Institute, et je suis souvent la seule femme en classe. C'est un problème. Un certain nombre des personnes que nous avons embauchées dans le cadre du programme Emploi d'été Canada étaient de jeunes femmes, et elles s'intéressent à la pêche. Nous avons pensé lancer un programme pour les filles qui aiment pêcher. Ce programme s'adresse aux jeunes femmes âgées de 8 à 80 ans.
Je tiens à m'excuser auprès des hommes blancs âgés autour de la table, mais notre patrimoine n'appartient pas qu'à vous: il appartient aux jeunes et aux femmes également, parce que c'est aussi important. Lorsque nous faisons participer tout le monde à un débat, nous commençons à trouver de nouvelles façons de résoudre ces problèmes très compliqués.
C'est vrai. Nous parlons du « sentiment d'appartenance » des touristes tout le temps, et nous oublions le sentiment d'appartenance de nos jeunes gens.
Terre-Neuve-et-Labrador continue de perdre des jeunes aussitôt que ces derniers obtiennent leurs diplômes. L'Université Memorial offre d'excellents programmes qui sont très peu dispendieux, mais les jeunes terminent leur scolarité, puis s'en vont. Nos jeunes présentent un taux élevé de criminalité et un taux élevé d'itinérance. Un récent rapport de Choices for Youth montre que des liens avec la communauté et le patrimoine aident à prévenir l'itinérance. L'une des choses que nous tentons de faire, c'est de travailler aussi avec Choices for Youth à l'élaboration de programmes relatifs au patrimoine pour eux également. Tous...
Merci, madame Orren. Je dois vous interrompre tout de suite parce que je dois passer à la prochaine question.
Allez-y, monsieur Finnigan.
Je ne sais pas à qui je devrais poser la question — probablement à M. Doyle —, mais n'importe qui peut répondre.
Nous avons entendu beaucoup parler des filets maillants et de leurs prises accidentelles... J'imagine qu'ils attrapent n'importe quoi, et nous entendons parler d'autres espèces qui sont importantes et qui contribuent à l'équilibre de l'environnement, pour l'écosystème. Serait-ce bien de dire qu'ils devraient être interdits? Je vais poser la question sans détour.
Beaucoup de pêcheurs utilisent des filets maillants et le font de manière responsable. Vous pouvez pêcher la morue à l'aide de filets maillants et faire de la pêche propre. La morue se tient dans des zones de pêche où la plie et les autres espèces ne vont pas.
En ce qui concerne la capture de poissons de qualité à l'aide de filets maillants, je l'ai fait cette année pour me prouver qu'il était possible de le faire, et il n'y a eu qu'une seule fois où mes prises étaient composées à 20 % de poissons de qualité B et à 80 % de poissons de qualité A. Pour tous mes autres voyages de pêche, les poissons que j'ai pris à l'aide de filets maillants étaient tous de qualité A. Je n'ai installé le filet que pour trois heures, puis je l'ai retiré et j'ai pris les poissons sans les endommager, j'ai retiré les branchies, je les ai mis dans un bac de lavage et je les ai laissés saigner. Une fois les poissons éviscérés, je les ai mis dans de la purée de glace, comme M. Cobb l'a dit, et les poissons étaient à l'usine trois ou quatre heures après.
Cela peut se faire; vous devez seulement être consciencieux dans ce que vous faites. Ces filets sont utilisés partout à Terre-Neuve.
En ce qui concerne l'interdiction de ces filets, cela s'est déjà fait sur la côte Ouest il y a quelques années. Une grande quantité de pêcheurs ont voté pour pêcher à la ligne à hameçons seulement, et beaucoup n'ont pas aimé cette décision et souhaitaient utiliser des filets, et ils ont fait renverser la décision. Il y a toujours un désaccord en ce qui concerne la pêche au filet et la pêche à la ligne.
Merci de la question. Je crois que c'est une autre question complexe. Je pense que cela revient aux marchés. Cela dépend vraiment de ce que veulent les marchés. Chose certaine, dans notre cas, nous avons des pêcheurs de l'île Fogo qui utilisent maintenant les trois méthodes pour pêcher la morue, soit la pêche à la palangre, la pêche à l'aide de casiers à morue et la pêche à l'aide de filets maillants. Nous voyons assurément une grande différence entre les trois produits en ce qui concerne le produit final qui est déversé et transformé.
Là où nous voyons la plus grande différence, c'est sur le marché de la pêche à la palangre, de la morue pêchée à la palangre. Qu'il s'agisse d'un saumon pêché à l'aide d'une palangre ou d'un saumon pêché à la ligne en Colombie-Britannique, d'une morue pêchée à la palangre à Terre-Neuve-et-Labrador ou d'un omble chevalier du Nord, ces méthodes de pêche donnent des poissons de très haute qualité, en vérité le meilleur poisson au monde, et les marchés vont nous récompenser pour cela avec des primes considérables.
Je pense qu'il nous faut simplement écouter les marchés à cet égard.
Madame Orren, certains se demanderaient s'il est réaliste — et je ne suis pas sarcastique — de penser que nous pouvons revenir à l'époque où il était possible de simplement sortir et d'attraper quelques poissons à l'aide de méthodes utilisées ici depuis longtemps. Je comprends ce que vous dites, parce que c'est la même chose pour l'exploitation agricole. Nous possédons des technologies de pointe, et les rendements que nous pouvons obtenir sont du jamais-vu, mais dans ma petite province, nous avons commencé à revenir à la ferme et à approvisionner la cafétéria locale en aliments locaux. Il est question non seulement de l'aspect économique, mais également de l'aspect social lié au fait de manger sainement, des avantages pour la santé et tout cela. Est-ce là que vous voulez en venir? Vous ne pouvez pas revenir 100 ans en arrière et dire voilà comment nous avons procédé.
Pouvez-vous donner plus de détails au sujet du principal objectif que vous tentez d'atteindre en enseignant aux jeunes comment pêcher selon les méthodes traditionnelles?
Pourquoi est-ce important d'enseigner aux jeunes de pêcher à l'aide des anciennes méthodes traditionnelles? Si vous êtes à bord d'un grand bateau moderne et que votre système électrique fait défaut, que votre batterie de secours fait défaut, que votre GPS ne fonctionne pas et que vous n'arrivez pas à obtenir un signal satellite parce qu'il y a une tempête, savez-vous vous servir d'une boussole? Savez-vous comment sortir ces cartes et vous en servir?
Si nous parlons du fait d'amener les gens à pêcher, à partir en mer et à naviguer, à vivre au milieu de l'Atlantique-Nord, peuvent-ils sortir une carte et utiliser une boussole pour trouver leur chemin et revenir à la maison? C'est ce dont je parle.
Je ne pense pas que les compétences soient anciennes; elles sont fondamentales. Mettez un enfant à bord d'un bateau avec des rames, apprenez-lui à ramer, qu'il découvre la sensation et qu'il développe le pied marin. Puis, il peut passer à un bateau doté d'un plus gros moteur et ensuite monter à bord de ce grand bateau moderne. Je ne les vois pas comme d'anciennes compétences. Ce sont des compétences de base; lorsque les jeunes montent à bord de cet énorme bateau, ils savent quoi faire.
Merci de m'avoir donné la possibilité de clarifier cet aspect.
D'accord. Je comprends.
Monsieur Doherty, lorsque nous regardons le portrait dans son ensemble, bien sûr, il est question non seulement de la disparition de la morue, mais également de la raison derrière cela. C'est un aliment. La semaine dernière, nous avons entendu le MPO dire que, en raison du réchauffement des eaux, différentes espèces allaient remonter vers le nord, donc selon vous, à quel point est-il important que nous nous penchions sur cette question? Que mange le capelan? C'est le maillon suivant de la chaîne alimentaire. Selon vous, à quel point est-il important d'étudier l'ensemble de l'écosystème et non seulement le nombre de morues qui s'y trouvent?
Quelqu'un peut-il donner des détails à cet égard?
Je crois qu'il y a quelques exemples dans les documents que j'ai fournis cet après-midi. Je pense qu'il y a certaines réponses dans ces deux études particulières. J'aimerais encourager les témoins à consulter les nombreuses recherches qui ont été effectuées au sujet de notre écosystème, particulièrement celles qui concernent la présence de morues dans cet écosystème, depuis 1992. Une quantité massive de recherches scientifiques indépendantes ont été menées au fil des ans. Je pense que les réponses s'y trouvent.
Merci, monsieur le président.
Je remercie encore une fois tous les témoins d'être venus.
Jusqu'à présent, nous avons beaucoup entendu parler de la gestion de la pêche, de la gestion des pêcheurs, et ainsi de suite. J'espère que, dans le cadre de cette étude, nous parlerons davantage de la gestion de stocks de poisson, parce que tout dépend de cela. Bien sûr, la gestion des pêcheurs en fait partie, mais sans poisson, vous ne pouvez que limiter les possibilités qui s'offrent.
J'ai vu un tel phénomène se produire au chapitre de la gestion de la faune dans ma province. Au lieu d'avoir recours aux données scientifiques et de mettre en place des programmes pour accroître les stocks fauniques, nous avons simplement restreint les possibilités. Il en va de même avec les stocks de saumon. Si nous ne savons pas comment faire pour assurer la santé de ces stocks, nous limitons simplement les possibilités. J'espère que l'étude du Comité mènera à quelque chose du genre, donc, si, à tout moment, quiconque a quoi que ce soit à proposer qui nous orienterait dans cette direction, j'espère vraiment que cette personne se manifestera.
Monsieur Doyle, j'aimerais vous remercier d'être ici en tant que pêcheur. Vous semblez avoir beaucoup d'expérience et une vaste connaissance pratique des stocks de morue. Je me demande simplement si vous avez fait d'autres constatations relativement à d'autres espèces, qu'il s'agisse de prédateurs ou de proies. Ils font manifestement partie de tout cela. Nous parlions justement de l'écosystème. Avez-vous autre chose à ajouter?
Merci de me poser la question et de me donner l'occasion de répondre.
Je pêche depuis longtemps, comme je l'ai dit, et je me rappelle que, vers la fin des années 1970 et au début des années 1980, je rentrais à la maison en après-midi et tard le soir après être allé à Baccalieu, et nous regardions dans la baie, nous regardions de ce côté vers St.John's, et à maintes occasions nous avons vu des gros thons sauter hors de l'eau. Ensuite, ils sont partis pendant 30 ans. Je n'en ai pas vu un pendant 30 ans et je n'ai jamais entendu quelqu'un dire qu'il en avait vu un jusqu'à il y a trois ans. Ils sont maintenant de retour, et ils sont très présents. Ils sont très nombreux. Il y a beaucoup de thons. J'ai parlé avec un pêcheur d'Old Perlican l'autre jour, et lui et son partenaire étaient à bord d'un canot à moteur. Ils éviscéraient les poissons et lançaient les viscères par-dessus bord. Les mouettes mangeaient le foie, et comme ce que les mouettes n'avaient pas mangé coulait, un banc d'une dizaine de thons, de plus petits thons, tournaient autour du bateau et mangeaient les restants.
Vendredi, au nord de Baccalieu, où je pêche, un thon a sauté hors de l'eau à moins de 50 pieds du bateau. Nous étions en train de tirer le filet, un poisson est sorti du filet et flottait, il essayait de descendre, et, en quelques secondes, ce thon a surgi d'en dessous du bateau et l'a attrapé. C'était le plus gros thon que j'avais jamais vu, et j'en ai vu qui pesaient 1 000 livres.
Ils les attrapaient dans la baie ici il y a des années. Il y en avait un de 800 livres qui a été capturé par le gars qui utilisait une canne à pêche avec moulinet à Portugal Cove. Il l'avait pris dans la Bay de Verde un vendredi soir, mais celui qui a attrapé la morue était beaucoup plus gros que celui-là. Il y a beaucoup de thons qui reviennent dans la région, et c'est un poisson prédateur également, mais c'est aussi malheureux qu'aucun de nos pêcheurs n'ait la possibilité de le pêcher, parce que nous n'avons pas le permis pour le faire. Actuellement, la plupart des permis sont délivrés dans les régions de l'Î.-P.-É. et de la Nouvelle-Écosse.
Il y a beaucoup d'espèces de requins: le requin-taupe, le mako et le requin bleu. J'ai surtout vu des requins-taupes et des requins bleus. Il nous est déjà arrivé au cours des dernières années de pêcher à la palangre et de devoir remonter la ligne et quitter le lieu de pêche parce que les requins ne nous laissaient pas tranquilles; ils déchiquetaient les poissons et les arrachaient de l'hameçon. Si vous restez au même endroit, vous finissez par attirer les requins, donc nous avons remonté la ligne et sommes allés ailleurs pour nous en débarrasser.
En ce qui concerne les requins, mon explication est la suivante: nous n'en avons vu aucun dans les filets maillants et dans les palangres durant les années 1980, mais, depuis 1992, il n'y a eu aucun engin de pêche dans les Grands Bancs Nord. Il n'y a eu aucun filet maillant. Personne ne se sert de filets trainants. Il n'y a pas eu de pêche au chalut ni de pêche à la palangre, donc je présume que tout cela a contribué à la reconstitution du stock, même si, du point de vue scientifique, on dit que les stocks de requins sont plus bas qu'ils l'étaient il y a dix ans par exemple, mais nous en voyons davantage. Les poissons prédateurs font leur apparition.
Encore une fois, comme je l'ai dit plus tôt, le capelan, qui est un poisson fourrage, est une espèce sporadique. Nous devons vraiment obtenir plus de renseignements au sujet du harang et du maquereau et voir ce qui se passe du côté ...
Je suis désolé, monsieur Arnold. Je dois vous interrompre ici. Nous allons devoir nous arrêter ici. Je suis désolé, monsieur Johns. Vous n'avez pas eu votre tour, mais le temps est écoulé.
De toute évidence, nous avons pris beaucoup de temps au début, mais vos pensées sont avec nous, et vos déclarations étaient excellentes. Je vous en remercie.
Je cherche toujours à obtenir des éclaircissements, et parfois, dans cette province, nous employons certaines expressions que je tiens pour acquis. Peut-être que d'autres membres ici présents, comme M. McDonald, et moi-même savons de quoi il retourne, mais, monsieur Cobb, pourriez-vous expliquer brièvement ce qu'est un poisson éviscéré avec la tête?
Désolé, monsieur Cobb, mais apparemment le concept est compris. Je ne voulais pas insulter votre intelligence. Toutes mes excuses.
Lorsqu'on dit avec la tête, c'est en fait l'état du poisson que nous vendons une fois qu'il a été éviscéré. Vous voyez l'idée?
Cela dit, nous allons devoir prendre une pause. À notre retour, nous allons nous entretenir avec nos prochains témoins.
Y a-t-il des commentaires ou des questions jusqu'à présent? Nous reprenons nos travaux à 14 h 30. La séance est levée.
Bon retour à tous. Nous allons maintenant reprendre avec les audiences. Nous avons avec nous le groupe quatre.
Il y avait beaucoup à dire ce matin au sujet des données scientifiques. Nous avons fait un tour d'horizon et nous y voilà. Nous sommes rendus là.
Nous avons avec nous M. Pierre Pepin, chercheur scientifique principal du ministère des Pêches et des Océans, installé ici même à St. John's, ou, comme nous disons normalement, White Hills.
Nous avons également avec nous Sigrid Kuehnemund et Bettina Saier du Fonds national pour la nature, comme cela a été mentionné ce matin. C'est un plaisir de vous voir Bettina. Vous n'êtes pas sans connaître le présent Comité ou le caucus responsable des océans.
Bien sûr, comme nous l'avons mentionné, Merv Wiseman se joint à nous pour un témoignage.
Monsieur Wiseman, je vais commencer par vous. Prenez la parole.
Merci, monsieur le président et membres du Comité.
J'ai été informé de tout cela à la dernière minute. En fait, j'ai entendu parler des travaux du Comité permanent samedi, lors de rencontres à Moncton, donc je n'ai pas d'exposé formel. Ce matin encore je ne savais pas que j'allais comparaître. Veuillez m'en excuser. J'espère que j'arriverai à m'exprimer de façon cohérente lorsque viendra le moment d'assembler deux ou trois éléments. J'essaierai de le faire le plus rapidement possible sans parler trop vite.
La journée a été très intéressante. Je croyais que le sujet serait un peu plus limité, mais je vois qu'il est plutôt généralisé et qu'il y a de nombreux liens. Nous sommes ici pour discuter du stock de morue dans le Nord. Ce faisant, nous parlons d'éducation, de qualité, d'innovation, de données scientifiques et de toutes sortes de choses, il suffit d'établir des liens.
Ce dont je veux parler précisément aujourd'hui est la sécurité des navires de pêche. Avant d'y arriver, j'aimerais souligner certains éléments en ce qui concerne le principe de la contiguïté et la mise en place d'une structure-cadre permettant de travailler dans un environnement où les sphères de compétence se recoupent, comme nous en avons parlé.
En ce qui a trait au principe de la contiguïté, je sais que ce sujet a été abordé ce matin, mais je crois qu'il vaut la peine d'en reparler. Par souci de divulgation complète de mes mandants, mis à part ce qui figure dans la notice biographique que je vous ai remise, je suis président chargé des politiques pour un parti au pays. Cette année, à l'occasion d'une des conventions nationales, j'ai coordonné la question de la contiguïté, et une résolution a été adoptée à une convention nationale au sujet de la déclaration de la contiguïté et de ce que tout cela signifiait. Je soulève la question, parce que pour y arriver, il a fallu beaucoup de collaboration et de consultation pour y arriver.
Pour que ce soit accepté par une assemblée d'environ 3 000 personnes... je me suis dit que c'était une idée fantastique venant d'une province et d'une région particulières. Pour m'y retrouver, j'ai dû parler aux Autochtones de la Colombie-Britannique. Je devais parler aux Autochtones du Nord et d'autres régions des Maritimes, et ainsi de suite. Je croyais que ce serait une tâche ardue, mais en fait, les gens ont saisi très rapidement. C'était quelque chose qui a été bien accueilli à l'échelle du pays, particulièrement auprès des Autochtones, qui ont parlé de leurs collectivités et des attaches sociales et économiques pour la collectivité que la disponibilité des ressources devrait leur apporter.
Quand la question a été mise aux voix, elle a fait l'objet d'un consentement unanime. Je voulais en parler en raison de sa portée nationale et de la façon dont elle est acceptée à l'échelle nationale. Cela ne concerne pas seulement la région de Terre-Neuve-et-Labrador. Cette déclaration de contiguïté a été reconnue. De plus, cela a permis de souligner le fait qu'il n'en avait pas été question pendant longtemps et que nous devrions peut-être nous attacher à des choses qui se sont produites au cours des dernières années afin d'apporter quelques rajustements dans ce contexte.
Je parle de structure dans un domaine où les sphères de compétence se recoupent, peut-être devrions-nous parler de relations conjointes. Ce matin, il a été question de l'Office Canada -Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers. Comme nous commençons à emprunter la voie de la responsabilité partagée, qu'il s'agisse de pêche ou de transformation, nous devons mettre en place une certaine structure.
J'ai également une expérience en milieu agricole. J'ai été président de la Fédération de l'agriculture ici dans la province pendant environ 6 ans. Mon bon ami Patrice en sait quelque chose; nous avons travaillé en collaboration sur certains projets par le passé. En ce qui concerne l'agriculture, il s'agissait d'abord de mettre en place un accord de mise en oeuvre du Cadre stratégique pour l'agriculture. Cet accord tenait compte de la question d'un mandat partagé, y compris les questions concernant la qualité, la salubrité alimentaire, la sécurité alimentaire, l'innovation et les données scientifiques et la gestion des risques opérationnels. En fait, c'était plus qu'un accord fédéral-provincial-territorial ou qu'un accord bilatéral. Il s'agissait d'un accord tripartite où les producteurs eux-mêmes faisaient partie d'une approche complète et structurée échelonnée sur cinq ans, avec un financement suffisant et des structures bilatérales adéquates. Je pense que c'est un excellent modèle à examiner — les représentants FPT en collaboration avec tous les intervenants — pour un accord-cadre sur les pêches.
Enfin, je suis ici aujourd'hui principalement pour vous parler, entre autres, de la question de la sécurité des navires de pêche. J'ai travaillé pendant 35 ans pour la Garde côtière canadienne, notamment dans le secteur de la recherche et du sauvetage. Nous avons connu de graves mésaventures, des accidents mortels, des incidents, et ainsi de suite, dans le secteur de la pêche. En fait, plus de 70 % des interventions maritimes de recherche et de sauvetage sont liées à la pêche. On m'a confié le dossier de la sécurité des navires de pêche dans le cadre de mes fonctions de coordination des opérations de sauvetage, et je m'en suis occupé pendant environ 10 ans, à l'échelle tant régionale que nationale.
Bon nombre des problèmes liés à la sécurité des bateaux de pêche résultent de la gestion du MPO, particulièrement en ce qui concerne la restriction de la taille des bateaux. Il existe un outil de gestion fortement utilisé — probablement plus que tout autre outil de gestion que je connais — dans le cadre de la gestion des pêches, et il concerne la restriction de la taille des bateaux.
Il y a eu un grave accident mortel l'année dernière dans la baie Placentia. Le Bureau de la sécurité des transports vient tout juste de terminer son rapport il y a un mois et demi. Il établit un lien entre les activités des trois pêcheurs décédés et le fait qu'ils étaient à bord d'un petit navire. Alors qu'ils pêchaient à bord d'un canot à moteur de 22 pieds, un palangrier de 45 pieds qu'ils n'avaient pas le droit d'utiliser était attaché à leur quai. On a eu recours à toute sorte de contorsions pour éliminer cette restriction. En fait, l'ancienne méthode qui consiste à utiliser la restriction de la taille des bateaux comme outil de gestion des pêches est totalement contraire aux règles et règlements sur la sécurité de Transports Canada.
Il y a eu un autre accident mortel il y a presque trois semaines, et, encore une fois, il était question de la restriction de la taille des bateaux. En ce qui concerne la modification des navires, les consignes exigent parfois d'enlever jusqu'à deux pouces à l'avant et à l'arrière du navire. La flottabilité du navire est touchée, et tout le processus coûte littéralement des centaines de milliers de dollars. L'ampleur du problème est tel que je ne peux en parler en 10 minutes.
Je vais m'arrêter ici et vous laisser réfléchir à la question.
Merci.
Merci, monsieur le Président.
Je suis Bettina Saier, vice-présidente responsable du programme Océans du WWF-Canada. Je suis accompagnée de Sigrid Kuehnemund, spécialiste en chef. J’aimerais remercier le Comité de nous avoir offert la possibilité d’apporter notre contribution à l’étude sur le stock de morue du Nord.
Depuis un demi-siècle, le WWF travaille à protéger la nature. Le Fonds mondial pour la nature est le plus important organisme de conservation international au Canada. Il est soutenu activement par plus de 150 000 Canadiens. Nous allions la puissance du solide réseau mondial du WWF à des efforts de conservation sur le terrain. Notre ONG possède des bureaux à Vancouver, à Toronto, à Ottawa, à Montréal, à Halifax, à St. John’s, à Iqaluit et à Inuvik. Le WWF-Canada crée des solutions pour relever les défis environnementaux dont les Canadiens se préoccupent le plus. Nous travaillons dans des régions uniques et importantes du point de vue écologique, dans l’optique de permettre à la nature, à la faune et aux humains de prospérer ensemble. En travaillant de concert avec nos partenaires et en misant sur la science et l’innovation, nous axons nos efforts sur l’accroissement de la protection des milieux marins, la recherche de solutions en matière d’énergies renouvelables qui sont respectueuses de l’environnement, la protection de la faune et la pêche durable.
C’est en gardant cette mission à l’esprit que nous souhaitons vous expliquer le lien entre votre étude sur la morue du Nord et les mesures que nous prenons pour rétablir les pêcheries tout en tissant de solides liens communautaires et économiques.
Le WWF-Canada travaille depuis plus de 15 ans avec des intervenants de l’industrie de la pêche pour reconstituer le stock de morue de Terre-Neuve-et-Labrador. Nous avons mené avec succès un projet de modernisation des pêches pour la pêche de la morue dans le sud de Terre-Neuve en partenariat avec Icewater. Un projet de modernisation des pêches est un outil collaboratif utilisé pour améliorer une pêcherie en faisant en sorte qu’elle respecte des normes de durabilité reconnues à l’échelle mondiale. Il s’agit fondamentalement de mesurer le rendement d’une pêcherie par rapport à un ensemble de critères et d’indicateurs indépendants. En mars dernier, la pêche à la morue de l’Atlantique est devenue la première au Canada à obtenir une certification écologique.
S’appuyant sur le succès de la pêche à la morue dans le sud de Terre-Neuve, le WWF-Canada a lancé un nouveau projet de modernisation des pêches pour la morue du Nord en collaboration avec le FFAW en avril 2015. Ce projet vise à reconstituer le stock historique de morue au large de la côte Nord-Est de Terre-Neuve-et-Labrador à des niveaux durables pour en assurer éventuellement la viabilité commerciale dans l’intérêt socioéconomique des communautés.
Maintenant que le stock de morue du Nord montre les premiers signes de rétablissement, le WWF-Canada travaille avec des pêcheurs, des responsables d'usines de transformation, des scientifiques ainsi que des détaillants dans l’optique de développer une pêche durable sur les plans environnemental et économique. En particulier, au cours des cinq prochaines années, nous travaillerons de concert avec les pêcheurs membres du FFAW, les producteurs de fruits de mer de Terre-Neuve-et-Labrador, la Fogo Island Coop de même que le nouveau Groundfish Industry Development Council de Terre-Neuve-et-Labrador. En effet, ici à St. John’s aujourd’hui, le FFAW et le WWF réunissent des intervenants de l’industrie, des gestionnaires et des scientifiques pour dresser un plan d’action sur la pêche de la morue du Nord qui a l’appui des intervenants concernés.
C’est le moment opportun de le faire, car la ressource s’accroît — rapidement par endroits — et les décisions sur la gestion des pêches que nous prenons aujourd’hui auront une incidence sur l’avenir de cette pêche. Le plan d’action du projet de modernisation des pêches sera un document public énumérant les activités, budgets et rôles stratégiques nécessaires pour affronter les problèmes affligeant cette pêche, dont la nécessité d’une stratégie de rétablissement robuste. Nous espérons avoir terminé l’élaboration du plan d’action d’ici octobre 2016.
En nous appuyant sur le travail de terrain du WWF-Canada pour conserver la morue du Nord, nous aimerions aussi vous faire part de quatre recommandations générales visant à garantir le rétablissement des stocks au bénéfice des générations futures de Terre-Neuviens et de Labradoriens: 1. Adopter une approche modérée et lente fondée sur la science; 2. Mettre en œuvre une approche moderne à la gestion des pêches fondée sur les écosystèmes; 3. Gérer de manière durable le capelan, principale source de nourriture de la morue; 4. Tenir compte des indicateurs sociaux et culturels durant le processus décisionnel.
En ce qui concerne la première recommandation, soit l’adoption d’une approche modérée et lente fondée sur la science, le maintien de faibles quotas de pêche de la morue du Nord au cours des dernières décennies s’est révélé capital au rétablissement que nous observons aujourd’hui. Par conséquent, une approche modérée et lente devrait être maintenue pour guider les décisions en matière de gestion. Une approche progressive — ou prudente — finira par s'avérer la plus bénéfique à long terme pour cette pêche emblématique et les populations dont la survie en dépend. Le WWF participe au groupe de travail dirigé par le MPO et ayant pour mandat d’élaborer un plan de conservation et de protection de la morue du Nord. Nous connaissons très bien la complexité de la stratégie de rétablissement et les obstacles ayant dû être surmontés pour l'élaborer.
Nous demeurons engagés à promouvoir une approche modérée et lente par la mise en œuvre de règles de contrôle de l’exploitation rigoureuses dans l’optique d’autoriser une reprise progressive de la pêche à mesure que les stocks se rétablissent et de ralentir la pêche dès qu’une baisse des stocks est observée.
Nous félicitons le MPO pour son récent travail visant à améliorer la méthode d’évaluation des stocks de morue du Nord. C’est sur ce travail que nous appuyons l'élaboration de données scientifiques plus précises concernant la morue du Nord, particulièrement l'établissement de points de référence à caractère biologique qui permettront de suivre avec précision l’accroissement de ce stock.
Cependant, les données scientifiques tiennent à la qualité des données brutes sur lesquelles elles reposent. Il est primordial que le gouvernement investisse dans des programmes de collecte de données et de surveillance afin de protéger la santé des stocks de morue du Nord. Il faut améliorer la collecte de données en mer, comptabiliser les retraits de toutes les sources — y compris la pêche récréative — et avoir recours aux meilleures méthodologies scientifiques disponibles au moment de prendre des décisions touchant la gestion du rétablissement de la morue du Nord.
La deuxième recommandation concerne le projet pilote d’une approche moderne à la gestion des pêches fondée sur les écosystèmes au large du nord deTerre-Neuve et du sud du Labrador. À l’heure actuelle, la plupart des pêcheries au Canada, dont les pêcheries de morue de Terre-Neuve, sont gérées dans une perspective axée sur l’espèce ciblée.
Il existe des plans de gestion intégrée des pêches distincts pour la morue du Nord, le crabe, la crevette, le capelan, et ainsi de suite. Par contre, ces espèces coexistent dans l’écosystème. Le ministère des Pêches et des Océans devrait s’engager dans l’élaboration d’une approche moderne à la gestion des pêches fondée sur les écosystèmes qui tient compte de l’écosystème plus vaste et des liens entre différentes espèces qui partagent l’aire de répartition de la morue du Nord. Des scientifiques canadiens, dont ceux du MPO, ont élaboré une feuille de route pour une approche fondée sur les écosystèmes à la gestion des pêches dans l’Atlantique Nord-Ouest et l’OPANO. Grâce à ces travaux, le Canada est prêt à accélérer ses efforts de développement et de mise en œuvre de la gestion des pêches fondée sur les écosystèmes dans l’Atlantique Nord-Ouest.
Le WWF-Canada recommande que le MPO utilise l’expertise canadienne et concentre ses investissements pour intensifier l’étude scientifique de la morue du Nord, du capelan et de l’écosystème qui les soutient.
Plus précisément, nous recommandons que le MPO lance un projet pilote pour opérationnaliser une approche moderne et fondée sur les écosystèmes à la gestion des pêches au large du nord de Terre-Neuve et du sud du Labrador. Cela pourrait être fait en mettant sur pied un groupe de travail composé de scientifiques et de gestionnaires.
Aussi, nous fondons de grands espoirs que les efforts actuellement déployés par le Canada dans le cadre de l’examen de la Loi sur les pêches visent l’intégration de mesures de protection modernes comme une approche fondée sur les écosystèmes.
La troisième recommandation consiste à gérer de manière durable le capelan, la principale source de nourriture de la morue.
Vous avez déjà entendu MM. John Brattey, Tony Doyle et Tony Cobb expliquer l’importance du capelan comme principale source de nourriture dans le rétablissement des stocks de morue du Nord et exposer les préoccupations de pêcheurs ayant été présentées au MPO concernant le piètre état de la morue au large du Labrador, où l’espèce meurt littéralement de faim.
C’est également une préoccupation pour le WWF-Canada. Cet été, nous avons mené une nouvelle évaluation des poissons fourrages au Canada. Ce sont de petits poissons comme le capelan qui ont toutefois de grands impacts. Cette évaluation démontre que nous n’en savons tout simplement pas assez sur les poissons fourrages, dont le capelan. Le MPO doit faire de la surveillance du capelan une priorité. Des relevés acoustiques doivent être pris chaque année dans l’optique de recueillir suffisamment de données pour assurer une pêche durable du capelan, car ce petit poisson joue un rôle capital dans l’alimentation de plus grands prédateurs comme la morue, les baleines et les oiseaux marins. Pour aider à trouver des moyens d’améliorer les activités de surveillance à Terre-Neuve-et-Labrador ainsi qu’au Québec, le WWF-Canada est en train de mettre sur pied un comité directeur qui réunira des gestionnaires, des scientifiques et des pêcheurs de capelan.
Les stocks de capelan et leur accroissement sont liés aux changements environnementaux; la gestion future des stocks de morue du Nord doit donc tenir compte des impacts des changements climatiques sur les populations de capelan et de morue. L’élargissement de la base de connaissances sur les impacts qu’ont les changements climatiques sur les pêcheries canadiennes représente donc un investissement judicieux et plus que nécessaire.
La quatrième recommandation consiste à intégrer des indicateurs sociaux et culturels dans la gestion du rétablissement de la morue du Nord.
À Terre-Neuve-et-Labrador, l’industrie de la pêche n’est pas homogène. Les opinions sur les meilleures façons de gérer le rétablissement des stocks varient grandement entre les pêcheurs hauturiers et les pêcheurs côtiers. Pour nombre de pêcheurs côtiers, la pêche représente beaucoup plus qu’un moyen de gagner sa vie. La pêche fait partie de leur identité et leur donne un sens d’appartenance à la communauté. Souvent, ils sont issus de familles qui pratiquent la pêche depuis des générations. Cependant, les politiques sur les pêches n’ont pas toujours été transparentes quant à la place accordée dans les processus décisionnels à ces importantes valeurs sociales et culturelles. Il est souvent difficile de définir et de quantifier ces valeurs, mais nous devons néanmoins en tenir compte dans la prise de décisions si l’objectif est d’assurer une gestion durable des pêches pour l’avenir.
J’aimerais conclure en mentionnant que le WWF-Canada tiendra un symposium sur la morue à St. John’s le 22 juin 2017. Notre objectif est de promouvoir une nouvelle discussion sur l’avenir de la pêche de la morue en remontée à Terre-Neuve 25 ans après l’imposition du moratoire sur les poissons de fond. À l’instar du Sommet sur les océans tenu par le WWF lors de la Journée mondiale des océans à Ottawa, l’objectif est de convoquer des leaders gouvernementaux, communautaires et industriels ainsi que des leaders de la communauté scientifique et de la société civile à un dialogue constructif et résolument axé sur la recherche de solutions.
Encore une fois, je tiens à remercier le Comité d'avoir permis au WWF-Canada de présenter son exposé. Maintenant, c’est avec plaisir que je répondrai à toute question que vous avez sur les points que je viens de soulever.
Merci, madame Saier. Nous l'apprécions beaucoup.
[Français]
Monsieur Pepin, vous avez la parole pour 10 minutes. J'espère que ce sera suffisant.
Je vais faire mon possible pour faire ma présentation en 10 minutes.
[Traduction]
Je remercie le Comité de m'avoir invité.
Je tiens à m'excuser pour la version française du document dont vous devriez avoir une copie. La traduction n'est que partielle. Les étiquettes dans les graphiques n'ont pas été traduites. Nous pourrons vous les fournir au cours de la semaine. Il n'a pas été facile de faire tout cela durant la semaine, mais tout le reste est traduit.
Aujourd'hui, je vais vous parler des changements qui se sont produits dans l'environnement et dans la structure de l'écosystème de la plate-forme de Terre-Neuve au cours des trois, quatre ou cinq dernières décennies.
Si on regarde la diapositive 2, elle montre les grandes lignes de ce dont je veux vous parler aujourd'hui. Ce n'est pas une liste exhaustive, mais on y trouve les principaux éléments qu'il faut considérer comme étant des facteurs des réponses aux changements qui ont eu lieu au fil du temps.
Si on regarde la diapositive 3, c'est en quelque sorte un cours de biologie de base qui donne une idée de ce à quoi ressemble la structure de l'écosystème dans la région.
La période de glace, son étendue et les conditions météorologiques, de même les fluctuations de ces caractéristiques d'une année à l'autre, sont les facteurs qui déterminent la production des niveaux trophiques inférieurs. Ils ont une incidence sur la période de prolifération et ils touchent l'ampleur de la production globale de phytoplancton, qui est une plante microscopique dont dépend la chaîne alimentaire, et cela a une incidence sur la production de zooplancton.
Ces deux groupes contribuent à la croissance et à la production des espèces fourragères, lesquelles comprennent les jeunes poissons, les capelans et les crevettes, et ces trois composants constituent d'importantes proies pour les prédateurs dominants dans le système, dont une variété de poissons de fond. Le nom des espèces dominantes est indiqué ici, mais il y a une multitude d'autres espèces, en plus des oiseaux de mer, des baleines et des phoques.
Lorsqu'on observe un écosystème, il ne faut jamais oublier qu'il dépend de son stock actuel, mais, surtout, qu'il dépend encore plus de sa production. Le stock actuel des zones 2J3KL de Terre-Neuve est d'environ 1,5 million de tonnes si on tient compte de tous les éléments, et la consommation totale dans ce système dépasse les 15 millions de tonnes métriques par année; la production est donc beaucoup plus importante que ce qu'on voit en regardant les stocks actuels.
Regardons maintenant la diapositive numéro 4. Nous passons beaucoup de temps ici à essayer de comprendre le fonctionnement de l'environnement. Pour ce faire, nous calculons un indice d'état de l'océan, lequel est un indice composite dérivé de 28 séries chronologiques qui incluent des renseignements sur les conditions météorologiques; la période de glace, son étendue et d'autres caractéristiques de la glace; la température de l'océan; l'étendue de la couche intermédiaire froide, une caractéristique océanographique majeure par ici; et la salinité de l'eau, qui reflète l'équilibre en ce qui a trait à l'apport d'eau douce au système.
La caractéristique la plus importante de ce graphique est le changement que nous avons observé du début des années 1990 jusqu'aux alentours de 2010, où nous sommes passés de la valeur de température la plus basse jamais enregistrée à la valeur la plus haute jamais enregistrée. C'est un changement spectaculaire sur le plan des conditions générales de cet environnement, et, même s'il y avait eu des périodes chaudes et des périodes froides avant cela, le changement a été passablement marqué.
Au cours des dernières années, nous avons vu un certain refroidissement, et cela aura des conséquences sur la dynamique des espèces que nous observons, mais, néanmoins, il s'agit là d'une importante caractéristique à garder en tête. Cependant, cela contraste avec ce qui se passe dans le golfe du Saint-Laurent, sur la plate-forme Néo-Écossaise et dans d'autres parties de l'Atlantique Nord-Ouest, où, en fait, la température semble rester chaude et continuer de se réchauffer en raison des changements touchant le forçage atmosphérique.
Passons à la prochaine diapositive, qui est un peu plus compliquée. Si on regarde le graphique du côté gauche, il montre les changements liés à l'abondance de différents groupes alimentaires fonctionnels. Par groupes alimentaires fonctionnels, j'entends les groupes d'organismes qui se nourrissent des mêmes genres de choses. Par exemple, les piscivores se nourrissent tous d'autres poissons, et la morue est un piscivore dominant dans le système, donc les changements que vous voyez dans la portion bleue du graphique représentent en fait en majeure partie des changements qui ont touché dans la biomasse de la morue. Ce qu'il faut retenir de tout cela, en fait, c'est que de 1980 à environ 1994, tous les groupes se sont effondrés, pas seulement celui de la morue. Toute la communauté de poissons dans ce système s'est effondrée. Tout a disparu.
En 1995, nous avons changé d'engins, donc nous avons dû rajuster un peu les estimations. À ce moment-là, nous avons commencé à capturer des invertébrés dans nos filets, et c'est pourquoi il y a une section en rouge ici, mais, ce que vous pouvez voir, c'est qu'à partir de 1995 environ, jusqu'au milieu des années 2000 environ, les invertébrés sont devenus plus abondants, alors que les autres groupes n'étaient pas très nombreux. À partir du milieu des années 2000 environ, le nombre d'invertébrés a commencé à diminuer, et le nombre de poissons de fond a commencé à augmenter. C'est une chose importante qu'il faut se rappeler.
Le graphique de droite montre les estimations par relevé acoustique de l'abondance des capelans. Avant l'effondrement de 1991, il y avait environ 4 millions de tonnes de capelans dans la zone 3L, qui correspond uniquement à la partie au nord des Grands Bancs, et non à la zone au complet. En 1991, le fond s'est vidé. Il n'y avait plus de capelans. Ils avaient disparu. Soit ils sont morts, soit ils sont allés ailleurs. C'était un changement très marqué dans l'écosystème. La base alimentaire de nombreux prédateurs est disparue de la surface de la terre — littéralement — et, jusqu'au milieu des années 2000, nous n'avons observé pratiquement aucun changement. Il y a eu une légère augmentation, mais nous n'en sommes qu'au quart de ce que nous avions comme stock avant l'effondrement.
Sur la diapositive suivante, le graphique supérieur montre, à l'aide d'un indice d'abondance légèrement différent — la biomasse moyenne par trait —, la tendance en matière d'abondance de quatre espèces de poissons de fond dominantes: la morue, le flétan du Groenland — qu'on appelle souvent le turbot — la plie et le sébaste. On peut voir que le changement le plus important a touché la morue. On peut constater un déclin très marqué, mais toutes les autres espèces ont connu une baisse.
Après la période où les choses se sont stabilisées, aux alentours de 1994, l'abondance des autres espèces est demeurée relativement constante. Il y a eu une légère augmentation de l'abondance du flétan du Groenland, mais aucune autre espèce n'a pris le dessus. Voilà ce qui importe: le créneau qui avait été occupé par la morue n'a pas été comblé.
À partir de ces données, nous avons été en mesure de cibler des zones qui étaient dominées par la morue; c'est en rouge dans le graphique central du côté gauche. Le sébaste est représenté en violet, le flétan du Groenland en bleu, et la plie en vert. Lorsqu'on regarde la distribution géographique sur le graphique inférieur comportant six cartes représentant chacune une période quinquennale, on voit que, avant l'effondrement, la majeure partie de la plate-forme de Terre-Neuve était dominée par la morue.
Durant l'effondrement, il y a eu une fragmentation de l'environnement. La répartition des communautés est devenue très fragmentée. Les zones de pêche où il y avait la morue ont disparu et ont été littéralement vidées de leurs poissons. Après cela, il a fallu plusieurs années avant de pouvoir observer une certaine forme de reconstitution du stock de morue. Ce qui d'est produit, c'est que les zones ont été dominées essentiellement par le flétan du Groenland et le sébaste, de même que par d'autres espèces côtières, qui ont pris de l'expansion, lesquelles sont moins abondantes dans l'ensemble de la biomasse.
Ce que nous avons observé au milieu des années 2000 jusqu'à environ 2013, c'est que certaines zones ont recommencé à être dominées par la morue, mais dans la portion sud de la région où nous observions normalement la morue. Même si le point n'a pas été fait à ce sujet en 2015, ce qui s'est produit, c'est que les zones de la partie nord, qui étaient habituellement dominées par la morue, ne se sont toujours pas rétablies.
La prochaine diapositive, vous l'avez vue la semaine passée durant un exposé de M. Brattey. Il s'agit d'une estimation de l'abondance de la morue. On peut voir que, même s'il y a eu une réapparition au cours des dix dernières années environ, nous sommes loin des stocks antérieurs.
La prochaine diapositive montre un autre aspect qui a changé durant l'effondrement de la communauté de morues, c'est-à-dire le changement de régime. Dans ce graphique, ce sont les sections en rouge et en jaune qui importent vraiment. La section en jaune représente la proportion relative de capelan dans le régime des morues.
On peut voir que, avant l'effondrement, le régime des morues était principalement constitué de capelan. Durant l'effondrement, les morues se sont tournées vers les crevettes, parce qu'il n'y avait pratiquement pas de capelan. Vers le milieu des années 2000, nous avons constaté que la majeure partie du régime était constituée de crevettes, puisque c'était pratiquement la seule proie disponible.
Depuis ce temps, nous avons observé une réapparition du capelan et une diminution de l'abondance générale de crevettes dans le régime des morues, et pas seulement pour la morue, mais également pour d'autres espèces de prédateurs majeurs dans l'écosystème. D'autres espèces ont également commencé à être davantage consommées, ce que nous ne comprenons pas vraiment encore.
La diapositive 9 montre que nous avons examiné la dynamique de la morue durant les périodes précédant et suivant l'effondrement. La dynamique a été modélisée selon trois facteurs principaux: l'abondance du capelan, les prises des pêches et la prédation exercée par les phoques. Ce sont des estimations fondées sur des renseignements, et non des conjectures. Finalement, l'abondance du capelan et les pêches étaient toutes les deux des facteurs statistiquement importants des changements survenus dans la biomasse de la morue dans la région, mais la prédation des phoques n'en était pas un, peu importe la combinaison des variables que nous avons incluses dans le modèle.
Si on regarde le graphique du côté gauche, les points bleus représentent l'abondance de la morue selon les estimations du relevé de navire de recherche, et les points jaunes représentent l'abondance du capelan. Vous pouvez voir que les deux se suivent plutôt bien.
Si on retourne à la diapositive numéro 10, on peut voir la dynamique des crevettes. Nous n'avions pas de bonnes estimations fiables sur les crevettes avant 1995. Vous pouvez voir que l'abondance des crevettes a augmenté considérablement; il s'agit de la ZPC 4, donc ce sont essentiellement les zones 2J et 3K. L'abondance des crevettes a augmenté jusqu'au milieu des années 2000 environ. Elle est en déclin depuis ce temps.
Si on regarde les graphiques du centre et de gauche juste ici, ils sont un peu complexes. Je vais essayer de vous guider.
La ligne rouge montre la production annuelle. Les données ont été normalisée afin que nous puissions tout mettre à la même échelle. La ligne rouge représente la production de crevettes, et on peut voir qu'elle fluctue un peu d'années en années, mais, de façon générale, qu'elle a été en baisse de 1995 à 2015. Lorsque nous avons commencé, nous avions une production élevée dans ce système, et on parle ici d'une augmentation de la biomasse de même que des prises des pêches par rapport à l'année précédente. De façon générale, il y a eu une baisse.
Sur le graphique central, on peut voir l'indice composite des conditions environnementales, qui ont été inversées afin que l'image soit un peu plus aérée. La zone chaude est en bas du graphique et la zone froide est en haut du graphique. On peut voir qu'elles suivent assez bien les changements de production d'année en année. Le graphique reflète également la période de prolifération printanière du phytoplancton. La dynamique de l'écosystème dans son ensemble, des niveaux trophiques inférieurs aux niveaux trophiques supérieurs, est reflétée dans le graphique.
Toutefois, parallèlement, si on observe le graphique de droite, la ligne bleue ou noire montre l'abondance de prédateurs, et la ligne verte montre la consommation estimative. Encore une fois, on a normalisé les données afin de pouvoir les présenter dans le même graphique. On voit que, durant la période où il y avait un déclin de la production de crevettes, il y avait une augmentation du nombre de prédateurs et de la consommation globale par les prédateurs. La plus récente baisse que nous voyons dans le graphique — la ligne verte du côté droit — est essentiellement attribuable au fait que la proportion de crevettes dans le régime alimentaire des principaux prédateurs a diminué en raison d'une plus grande consommation de capelans.
La diapositive suivante montre les séries chronologiques concernant le capelan, comme nous en avons parlé plus tôt. Je vais vous présenter le graphique du bas. Il montre essentiellement la relation entre la production du stock de capelan et la période de recul de la glace au printemps, juste pour vous montrer à quel point l'environnement est important pour la dynamique de ce stock. Il y a deux lignes dans le graphique: l'une montre le lien avec la période du recul de la glace avant l'effondrement et l'autre, après effondrement. Le graphique montre essentiellement qu'il y a eu un changement de régime dans le système que nous ne comprenons toujours pas vraiment.
Le dernier graphique ici montre les séries chronologiques concernant les captures par unité d'effort pour le crabe par rapport à la présence d'eaux froides durant la première année de vie. On constate que, dans toutes les situations, les conditions froides et la production du stock de crabe se suivent assez bien.
Sur la dernière diapositive, pour résumer, la biomasse de la morue de l'Atlantique et d'autres espèces de poisson de fond ainsi que du capelan ont augmenté depuis le milieu des années 2000. La quantité de crevettes nordiques et de crabes a chuté en raison du réchauffement des conditions océaniques. La tendance récente au refroidissement pourrait être bénéfique pour les stocks de crevette et de crabe des neiges, mais l'incidence de ce refroidissement sur le poisson de fond et le capelan est incertaine.
Nous devons continuer de surveiller les conditions environnementales et de mener des recherches au sujet de l'interaction entre les espèces. Nous menons actuellement des recherches afin de mieux comprendre et prévoir les effets sur ces espèces clés des changements qui se produisent dans les écosystèmes.
Merci.
Merci, monsieur Pepin. Je vous en suis reconnaissant. C'est très bien fait, et il y a beaucoup de diapositives. Vous les avez passées en revue de façon claire et concise.
J'aimerais cependant obtenir une précision. Il y a toujours une certaine confusion. La pêche au turbot est très importante ici, à Terre-Neuve-et-Labrador. Le vert, sur la diapositive 6, est associé au « flétan ». Voulez-vous parler du flétan du Groenland, soit du turbot?
Je suis désolé, dans toutes les diapositives, il était toujours question du flétan du Groenland, qu'on appelle aussi turbot dans le coin.
Oui, le flétan du Groenland est appelé couramment turbot, et il ne faut pas le confondre avec le flétan en tant que tel, que nous pêchons aussi. Vous voyez, j'ai réussi à me mêler moi-même. Ça alors! Il n'y a pas de quoi.
Durant la première série de questions, les interventions durent sept minutes chacune. Comme l'arbitre le dirait, qui est le prochain à s'élancer?
Monsieur McDonald, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Encore une fois, merci à nos témoins d'être là aujourd'hui pour s'adresser au Comité
Ma première question est destinée à Pierre. J'ai passé en revue les documents fournis par des témoins qui ont comparu plus tôt aujourd'hui et même la semaine dernière, et il a été beaucoup question du capelan, ses hauts et ses bas, et des liens avec les fluctuations des stocks de morue.
Que faisons-nous, en tant que ministère et scientifiques du ministère, pour surveiller la situation du capelan? Ce poisson semble jouer un rôle crucial dans ce qui se passe avec la biomasse de la morue. Je ne sais pas si j'irais jusqu'à dire que nous sommes négligents, mais on peut difficilement savoir ce qui se passe réellement avec le capelan, qui ne se présente pas une année et qui est pourtant là la suivante. Que devrions-nous faire à l'avenir pour vraiment lier les deux? Plus tôt, des gens ont mentionné qu'il fallait obtenir des renseignements scientifiques toutes les années plutôt qu'aux deux ou trois ans.
C'est une bonne question.
Habituellement, nous réalisons des inventaires acoustiques annuels du capelan dans la zone 3L. Parfois, on empiète même un peu sur la zone 3K.
Essentiellement, plutôt que d'utiliser des chaluts pour estimer l'abondance du capelan, nous utilisons un sondeur par ultrasons qui est calibré de façon à nous donner une estimation de la biomasse. C'est une méthode couramment utilisée, principalement pour les espèces pélagiques parce qu'elles ont une vessie gazeuse, ce qui permet d'obtenir un écho lorsqu'on utilise le sondeur. Si on peut faire un lien entre la taille du poisson et la force de l'écho, alors on peut estimer l'abondance.
C'est donc une enquête qui est en cours. Elle n'est pas aussi complète qu'elle l'était durant les années 1980 lorsque toute la zone 2J3KL était très largement échantillonnée, puisque nous comptons sur moins de navires et moins de personnel, mais c'est tout de même un bon indice de la biomasse générale du capelan dans le système. Le processus a été calibré en fonction des estimations précédentes pour déterminer si la situation dans la zone 3L reflète ce qui se passe plus au nord. On peut passer à côté dans certains cas, mais nous utilisons aussi les prises accessoires dans les sondages du navire de recherche sur le capelan qui sont réalisés à l'automne pour nous donner une idée de la distribution générale ou non du capelan. On ne détecte pas les poissons qui sont au fond lorsqu'on procède ainsi, mais on obtient tout de même un indice.
Nous avons récemment embauché deux nouveaux chercheurs scientifiques, qui travailleront sur le capelan. Un des deux s'occupera principalement d'échantillonnage côtier, et l'autre s'occupera principalement de l'échantillonnage au large. Il y a eu une résurgence dans cette zone. On pourrait dire qu'il serait possible d'affecter plus de personnes sur ce dossier, mais les scientifiques disent toujours que, avec plus de ressources, on pourrait obtenir plus de données.
Merci.
Mes prochaines questions sont destinées à Bettina, du WWF.
Premièrement, en tant que groupe et personnes qui s'intéressent à ce que devraient être les niveaux des stocks et les quotas de pêche, selon votre groupe, à quel niveau devrait se situer la biomasse de la morue pour maintenir une pêche commerciale?
Deuxièmement, selon vous, quel est le rôle de votre groupe dans l'avenir de la pêche commerciale?
Le début des activités de pêche commerciale est établi en fonction d'un point de référence limite défini par le MPO, et nous respectons tout à fait la recommandation du ministère sur le moment où il faut ouvrir une pêche commerciale. On a noté une modeste augmentation des prises dans le cadre de la pêche d'intendance, ce qui, selon nous, est aussi compatible avec l'approche à laquelle nous croyons.
La deuxième question concernait notre rôle. Nous ne sommes pas officiellement une organisation scientifique. Selon nous, notre rôle consiste à promouvoir une approche durable en partenariat avec le MPO, le DFA, le FFAW, les pêcheurs et les autres intervenants. Ce qu'on a de mieux à offrir, c'est une certaine expérience internationale en tant qu'organisation mondiale de conservation. Nous réalisons des projets d'amélioration des pêcheries dans le monde entier. Ce que nous pouvons fournir, c'est des expériences d'autres régions du globe quant à ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. C'est probablement là notre rôle principal.
Nous dirigeons aussi des projets d'amélioration des pêcheries en collaboration avec le FFAW. C'est une organisation qui a une approche tout à fait pratique. Comme je l'ai mentionné dans mon témoignage, nous avons eu une réunion aujourd'hui, et nous avons pour objectif ambitieux de créer en collaboration d'ici quelques mois un plan d'action pour la pêche d'intendance dans les zones 2J3K3L.
Nous voulons générer des changements positifs.
Merci.
Pierre, en feuilletant les diapositives et lorsque vous avez parlé de la pression de prédation sur les morues, j'ai remarqué qu'une mention précise: il a été déterminé que les phoques n'étaient pas une des causes du déclin des stocks. Je vois — et j'ai entendu un témoin le dire plus tôt aujourd'hui — que la taille du troupeau de phoques — que ce soit les phoques gris ou les phoques du Groenland — s'élève à plus de 10 millions de têtes. Quelqu'un a dit ce matin que, si chaque phoque mange une seule morue chaque jour, la biomasse que nous tentons de faire augmenter perdrait des millions de morues. S'ils n'ont pas un si grand impact que ça sur la morue, qu'est-ce qu'ils mangent exactement? On croyait qu'ils mangeaient de la morue et qu'ils s'en nourrissaient, mais chaque fois que nous disons aux représentants que la taille du troupeau est problématique, puisque les stocks de morues n'arrivent pas à se rétablir assez rapidement ou qu'on compare les données de 1992 à maintenant pour trouver des fluctuations des stocks, ils sont en désaccord. Qu'est-ce qui les retient?
Si les morues ne sont pas au rendez-vous, est-ce que les phoques ont décidé tout d'un coup de manger autre chose?
Pour commencer, il y a quelques choses qu'il faut préciser.
Le troupeau de phoques du Groenland s'élève à environ 6 ou 7 millions de têtes, alors il n'y en a pas vraiment 10 millions. Depuis l'effondrement des stocks de morues, l'abondance de la population générale a doublé, alors c'est une augmentation importante. Nous sommes passés d'environ 3,5 millions à environ 7 millions d'animaux.
Les principales proies des phoques sont les espèces fourragères, le capelan, les crevettes et d'autres espèces. Même s'ils mangent un peu de morues en zone côtière, lorsqu'on tient compte de l'endroit où ils passent une partie de l'année et tout le temps qu'ils passent en zone côtière — et j'avoue, c'est difficile d'obtenir de bonnes données pour ce qui est des zones extracôtières, surtout au fil du temps —, actuellement, si on regarde ce qu'ils consomment principalement, c'est surtout du capelan, du lançon et la morue polaire, qui sont des espèces pélagiques, pas des espèces de fond comme les nôtres. C'est leur source principale de nourriture.
Si on examine la pression de prédation générale qu'ils exercent sur le stock de morues, ce ne semble pas être un facteur majeur. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'impact, mais ce n'est pas un facteur majeur. Les facteurs majeurs sont la disponibilité du capelan, la bonne espèce fourragère pour la morue — et la prédation. Même si c'est une réalité, ce n'est pas un facteur majeur.
Dans une certaine mesure, je suis statisticien, alors je vous parle du rapport signal/bruit. Si certaines choses vous donnent un très gros signal, un très gros changement, on peut souvent détecter l'impact. Pour ce qui est des choses qui ne changent pas beaucoup, c'est en fait très difficile de voir leur incidence dans les données...
Merci, monsieur Pepin. Nous allons nous arrêter ici, mais j'ai deux ou trois choses à dire. Qu'avez-vous dit au sujet des espèces pélagiques que vous avez mentionnées? Je n'ai pas bien compris.
La morue polaire, d'accord, oui.
Une simple précision. Évidemment, nous savons tous ce que MPO signifie, mais nous utilisons aussi l'acronyme MPA dans la province. Le MPA est le ministère provincial des pêches, anciennement appelé ministère des Pêches et de l'Aquaculture. Le ministre nous a dit ce matin que le nom a changé, mais dans le cadre des témoignages que vous êtes susceptibles d'entendre à Port de Grave et à l'Île Fogo, il sera question du MPO et du MPA. Le MPA concerne les pêches provinciales.
Cela dit, est-ce que vous partagez votre temps? Vous allez avoir chacun trois minutes et demie?
Allez-y, monsieur Doherty.
Tous les invités ont présenté d'excellents exposés. Je vous remercie de comparaître devant nous aujourd'hui.
Mes questions seront principalement destinées à M. Pepin et porteront sur le capelan.
Monsieur Pepin, en 1990, nous avons vu l'effondrement — pour reprendre exactement votre expression — des stocks de capelan. Y a-t-il eu un événement précis ou quelque chose qui correspondait? Je consulte aussi la page 4. La chute correspond aussi au refroidissement, la chute de la température de l'eau. Avez-vous réalisé des études sur ce qui a contribué à la situation?
En 1990-1991, toutes les planètes étaient alignées. Il y a eu beaucoup de pression de la pêche, l'hiver le plus froid et l'été le plus froid. Je me souviens quand j'étais dans la baie de la Conception, il y avait des icebergs en août. La situation était très mauvaise. Le refroidissement de l'eau était très répandu. La plupart des espèces du coin tentent d'éviter les eaux dont la température est inférieure à 1 oC, et l'eau froide couvrait tout le plateau continental. Nous avons vu du capelan se pointer dans d'autres parties des Maritimes où nous n'en avions jamais vu, donnant à penser qu'une partie des stocks s'était dispersée, mais ce genre de pressions sélectives, ces types d'événements atmosphériques et environnementaux en ont probablement aussi tué beaucoup.
Vous savez, même s'il y avait peut-être deux ou trois millions de tonnes de poissons dans l'eau à ce moment-là, l'océan est très vaste dans la région, et nous n'avons peut-être pas vu ce qui s'est produit. C'était peut-être plus graduel que quoi que ce soit d'autre. Il y a eu un effondrement complet. Il y a eu un peu de redistribution, mais il y a probablement aussi eu un problème de mortalité quelconque.
Dans son témoignage de la semaine dernière, M. Brattey a dit que l'étude sur le capelan est réalisée tous les deux ans. C'est exact?
Les évaluations sont réalisées tous les deux ans. Les sondages sont menés chaque année, lorsque nous n'avons pas de problèmes avec le bateau.
Merci, monsieur le président.
Encore une fois, monsieur Pepin, j'ai une question qui va dans le même sens. Nous avons affiché les températures les plus froides ici. Les pêcheries européennes et du Nord de l'Europe ont été fermées, mais il a été possible de les rouvrir trois ans plus tard. Les conditions océaniques étaient-elles différentes là-bas? L'eau ne se réchauffe pas plus rapidement là-bas qu'ici.
C'est une très bonne question.
Je participe déjà depuis un certain temps à un programme dans le cadre duquel on compare la mer de Barents et le plateau de Terre-Neuve pour examiner les différences de réaction. L'une des choses qui se sont produites au large de la Norvège, c'est que l'effondrement des stocks — ou ce qu'ils ont appelé l'effondrement — n'en était pas un comparativement au nôtre. De leur côté, les stocks ont diminué de 20 à 30 % en dessous de la pointe. Il restait une très grande quantité de biomasse par la suite pour reconstituer les stocks.
L'autre chose qui s'est produite dans la mer de Barents, c'est que l'eau est beaucoup plus chaude que chez nous. Le système est influencé par le Gulf Stream, alors les températures de l'eau sont de quatre à six degrés supérieurs aux nôtres, même au fond. Il y a une réelle différence quant au potentiel de production, parce qu'on parle d'animaux à sang froid, et leur taux métabolique est lié à la température et à l'environnement. Il est tout à fait typique de voir les taux métaboliques doubler lorsque la température monte de 10 degrés.
Je connais ce genre de situation.
Vous avez dit que leur effondrement était loin d'être aussi grave que sur notre cote. Est-ce possible que nous ayons dépassé le seuil et qu'il ait fallu beaucoup plus de temps pour que les stocks se rétablissent, mais qu'ils sont maintenant arrivés à un niveau où le rétablissement sera plus rapide puisqu'ils ont dépassé le seuil?
C'est un très bon point.
En guise de comparaison de l'ampleur de l'effondrement constaté à Terre-Neuve, la seule autre pêcherie que je connais dans le monde entier qui a affiché un effondrement aussi marqué que le nôtre est le hareng de Hokkaido, et il a fallu 60 ans pour retrouver un niveau de biomasse raisonnable. Nous devons composer avec le fait que le dommage qui a été causé à l'écosystème en raison d'un ensemble de facteurs était incroyable.
D'accord, parfait.
On a vu ce genre de chose arriver à d'autres espèces sauvages, à d'autres espèces de poissons. L'espèce atteint un niveau où elle ne peut tout simplement pas se rétablir d'elle-même. Que peut-on faire sur le plan de la gestion des prédateurs ou de la concurrence pour la nourriture pour aider l'espèce lorsqu'elle atteint un niveau tellement bas qu'elle ne peut pas vraiment s'en remettre seule?
C'est une très bonne question. Il n'y a pas une bonne réponse, parce que dans toutes les situations où les humains ont tenté de gérer un écosystème plutôt que de gérer les activités humaines, on a essentiellement échoué.
Le principal problème, c'est que nous croyons pouvoir gérer des écosystèmes, mais, en réalité, nous gérons les activités humaines autour d'eux. On peut s'intéresser à l'équilibre dans les relations prédateur-proie, mais il faut très bien comprendre ces relations avant de faire quoi que ce soit. Dans les situations où les gens ont réalisé ce genre d'exercice de gestion des prédateurs, ils ont souvent quasiment éliminé le prédateur, et ce, sans constater nécessairement la réaction attendue des autres espèces, parce qu'elles sont à la merci de l'environnement. La productivité de l'environnement est probablement le plus important paramètre inconnu avec lequel il faut composer.
Je connais ce genre de situation. Nous avons réalisé un exercice de gestion des prédateurs en Colombie-Britannique qui visait les loups. Les gens pensaient pouvoir réduire la population de loups en permettant aux chasseurs de réduire la population d'orignaux. Ça n'a pas fonctionné.
Une voix: Ça n'a pas fonctionné.
M. Mel Arnold: Les loups ont simplement changé de proies et se sont concentrés davantage sur les caribous ou le bétail.
J'ai une question à l'intention des représentants du WWF: pouvez-vous nous en dire un peu plus long sur ce que vous faites sur le terrain dans le cadre de vos projets d'amélioration des pêcheries?
Oui, bien sûr.
Comme je l'ai déjà mentionné, nous avons terminé un projet d'amélioration des activités de pêche lié à la pêche à la morue dans le sud, et nous venons tout juste de commencer un projet avec le FFAW relativement à la pêche à la morue dans le Nord.
C'est un projet pluriannuel. Le projet d'amélioration des activités de pêche à la morue dans le Nord durera cinq ans. Nous nous sommes appuyés sur une évaluation indépendante, essentiellement, pour évaluer le rendement de la pêche grâce à trois critères: la santé des stocks, les répercussions de l'écosystème sur la pêche et la structure de gouvernance d'une pêcherie précise.
Nous avons cerné les problèmes en évaluant la pêcherie en fonction de ces critères, puis, dans un deuxième temps, nous avons mis au point des stratégies pour régler ces problèmes. Au bout du compte, on obtient un plan d'action assorti de directives très claires sur ce qu'il faut faire. Le plan définit aussi les coûts, qui sont les responsables, etc. Ensuite, on applique le plan d'action, et, bien sûr, la phase de mise en oeuvre est la plus importante, parce que c'est là qu'on prend les mesures d'amélioration sur le terrain, et c'est le fruit de la collaboration entre les pêcheurs, le MPO, le gouvernement provincial et de nombreux autres intervenants.
Merci, madame Saier et monsieur Arnold.
Allez-y, monsieur Johns, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
J'ai aussi une deuxième question pour Mme Saier.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus long sur les espoirs que vous avez relativement aux efforts actuels liés à la Loi sur les pêches et l'objectif d'y intégrer des mesures de protection modernes, comme une approche fondée sur l'écosystème? Voulez-vous nous en parler plus longuement?
Oui, bien sûr.
Le MPO possède un certain nombre de politiques modernes qui ont été élaborées assez récemment. Cependant, afin de solidifier l'approche écosystémique en matière de gestion des pêches, nous estimons que des modifications liées à l'examen de la Loi sur les pêches actuelle seraient un outil utile pour renforcer l'approche écosystémique. Nous allons présenter nos commentaires précis à ce sujet. Nous ne les avons pas encore formulés, mais il y aura une série de 5 à 10 recommandations liées précisément à la Loi sur les pêches. Essentiellement, nous voulons améliorer l'adhésion et renforcer l'application de l'approche préventive dans la Loi sur les pêches.
D'accord. Merci.
Monsieur Pepin, nous n'avons pas beaucoup parlé des changements climatiques et de l'impact des changements climatiques. Pouvez-vous formuler quelques commentaires sur ce qui nous attend à ce sujet?
Certainement.
Nous avons réalisé une évaluation de l'impact des changements climatiques dans tout l'Atlantique il y a plusieurs années. L'attente, c'est que, de façon générale, la productivité du système augmentera très probablement. La production devrait s'accroître durant l'été et le printemps. On bénéficiera aussi d'une période de croissance un peu plus longue durant l'année. Il ne faut pas oublier qu'on parle de Terre-Neuve, alors ce peut être plus court ou plus long, selon la direction qu'on emprunte.
Selon toute attente, la plupart des espèces que nous avons dans la région bénéficieront d'un environnement thermique approprié. Cela signifie que, essentiellement, elles ne se retrouveront pas à l'extérieur de la fourchette environnementale qu'elles apprécient. Cependant, on ne peut pas dire la même chose des invertébrés, les crevettes et les crabes, qui, de façon générale, sont des espèces propres aux eaux froides. Ils seront peut-être remplacés par d'autres invertébrés, mais nous n'avons pas des connaissances solides à ce sujet.
On peut s'attendre à voir — comme on l'a déjà vu — certaines espèces inhabituelles qui apparaissent dans certaines régions. M. Doyle vous a dit ce matin qu'on voit davantage de requins. C'est peut-être en partie parce que l'eau est un peu plus chaude au fond. Nous avons vu des choses comme le merlu argenté se pointer dans le sud de Grand Banks aussi, et en assez grand nombre. C'est un prédateur agressif qui peut compétitionner avec la morue.
Oui. Merci.
Monsieur Wiseman, en ce qui concerne la contiguïté, quel genre de recommandations devons-nous formuler relativement à un cadre ou une marche à suivre pour concrétiser et adopter un genre de politique à ce sujet?
Je crois que l'idée maîtresse de la déclaration de contiguïté consiste à reconnaître le principe et à en faire le fondement de la façon dont on définit un arrangement de partage approprié. Le principe était l'objectif principal. Les renseignements détaillés quant à la façon dont il faut procéder n'est pas une question dont je m'occupe précisément, mais je crois que c'est une approche fondée sur le bon sens.
Si on regarde certains des exemples, je crois que c'est assez peu de temps après l'adoption à l'unanimité du principe qu'une décision a été prise relativement à la méthode du DEPS. Je crois qu'il faudra envisager certains arrangements créant un précédent du genre pour dire que c'est ici qu'on peut venir à bout de l'enjeu de la contiguïté.
Oui.
Madame Saier, vous avez parlé d'un plan d'action et ajouté que vous ne l'aviez pas encore totalement mis au point. Y a-t-il des éléments que vous êtes prête à nous communiquer?
Absolument. Nous serons heureux de vous fournir deux documents.
Le premier est une évaluation préalable qui cerne les problèmes liés à la pêche d'intendance de la morue du Nord. C'est un document d'environ 100 pages que votre ancien directeur général régional, Jim Baird, a préparé pour nous.
Ensuite, nous avons un document d'orientation que nous pouvons vous fournir — il est aussi disponible publiquement — dans lequel nous mettons au point des stratégies en consultation avec les pêcheurs pour régler ces problèmes.
Bien sûr, je serai aussi heureuse de vous transmettre le plan d'action lorsqu'il sera terminé. Nous prévoyons qu'il sera prêt d'ici peut-être octobre ou novembre.
Une simple précision: quelqu'un a utilisé le terme « DEPS ». Savons-nous ce que signifie DEPS, « dernier entré, premier sorti »? C'est une politique selon laquelle, si on baisse les quotas, alors les intervenants qui sont arrivés le plus récemment dans l'industrie seront les premiers à subir les coupures, et non ceux qui sont là depuis plus longtemps.
J'aimerais obtenir une mise au point de M. Wiseman. Vous avez dit que la méthode du DEPS fonctionne ou fonctionnait?
Oui, exactement. En guise d'illustration, le principe de contiguïté est enchâssé dans le processus d'affectation des quotas. Je crois que c'est directement pertinent à la façon dont nous procédons pour attribuer les quotas de morue dans le Nord. On constate des exemples à Terre-Neuve-et-Labrador et sur la côte Ouest et dans le golfe où les affectations de flétan des pêcheurs le long des côtes ont été réduites. Je crois que leurs parts s'élevaient à environ 38 % des quotas et que leur part actuelle est d'environ 22 ou 23 %. Il y a une incidence directe sur la contiguïté, mais la corrélation est l'inverse de ce qu'elle devrait être.
Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être là aujourd'hui.
Ma première question est destinée à Mme Saier.
On entend parler actuellement d'importantes activités de commercialisation dans les grandes chaînes de magasins, et beaucoup d'entre elles vendent seulement des fruits de mer de marques durables. Nous constatons aussi que certains transformateurs affirment que leurs produits sont pêchés de façon durable. Selon vous, est-ce que cette définition respecterait la norme de votre organisation en tant que produit durable vendu aux consommateurs?
À titre de précision, nous ne sommes pas un organisme qui définit des normes, et nous ne possédons pas nos propres normes de durabilité, mais nous faisons plus particulièrement la promotion des normes de durabilité du Marine Stewardship Council. C'est une organisation mondiale reconnue qui adhère aussi à un code de conduite défini par la FAO et d'autres organisations. Nous n'établissons pas ces normes, c'est le Marine Stewarship Council qui le fait.
Il y a beaucoup de fraudes dans le domaine des fruits de mer. Vous avez probablement entendu dans les actualités que, tout particulièrement dans les restaurants de sushi, environ 90 % de l'étiquetage est trompeur. Il y a une chaîne de possession associée au Marine Stewardship Council. Il y a une garantie selon laquelle, une fois qu'une pêcherie est certifiée — et il y a une certification à chaque maillon de la chaîne de possession jusqu'à ce que le produit arrive en supermarché —, elle fait l'objet d'un contrôle et d'observations. Il y a un haut niveau de conformité dans le cadre du programme du Marine Stewardship Council.
Croyez-vous qu'ils vont assez loin, ou croyez-vous que nous sommes rendus là? Est-ce que nous devons...
Ce n'est jamais assez. Les pêcheries sont compliquées, et le rôle important de gérer les pêcheries revient à notre ministère des Pêches et des Océans. La certification écologique peut aider et donner l'impulsion initiale et a l'avantage d'être axée sur le marché. Beaucoup de détaillants que nous approvisionnons — par exemple, Marks and Spencer, au Royaume-Uni, et Edeka, en Allemagne, et j'en passe — se sont tous engagés à obtenir des fruits de mer durables pendant un certain temps. C'est ce qui a favorisé la collaboration avec Icewater dans la pêcherie de morue 3Ps au sud. La pression est venue des détaillants du Royaume-Uni, qui disaient: « Si vous n'offrez pas des produits qui font l'objet d'une gestion durable jusqu'en 2015, vous ne serez plus l'une de nos sources d'approvisionnement. »
Je crois que ce sont des facteurs déterminants du marché qui peuvent venir compléter les efforts déployés par le ministère des Pêches et des Océans pour gérer les pêches aussi.
D'accord.
Si quelqu'un d'autre veut ajouter quelque chose à ce sujet, qu'il n'hésite pas.
À ce sujet, vu les pratiques que les importantes entreprises de pêche commerciale utilisent pour livrer concurrence au sein du marché international, comme celles de la Chine, pays qui ne possède peut-être pas les mêmes normes en matière de travail et d'environnement, poursuivons-nous des objectifs qui ne sont pas durables, lorsque nous tentons de faire concurrence à de tels intervenants et lorsqu'il est question de la pêche au filet et l'utilisation de méthodes plus traditionnelles? Je pose la question à tous les témoins. Quels commentaires formuleriez-vous à cet égard?
Je crois qu'il est actuellement essentiel de prendre ces mesures visant à assurer la durabilité. Les produits de la morue de Terre-Neuve, comme on l'a entendu à de nombreuses reprises aujourd'hui et durant notre réunion sur le plan d'action ce matin, est un produit prisé dans le monde. C'est un produit haut de gamme. Il est essentiel d'assurer la transition dès maintenant. Le processus prendra probablement un peu de temps, mais j'espère vraiment que nous en arriverons à un point où l'industrie sera moins polarisée et qu'elle réussira à définir une seule vision.
Tout dépend aussi de ce que veut le marché. Dans une certaine mesure, le marché dictera les mesures de durabilité que nous mettrons en place. J'ai de l'espoir et je crois que les cinq prochaines années sont essentielles pour concrétiser le tout.
Merci.
Abordons maintenant le thème de la recherche. Nous réalisons beaucoup de recherche au sein du MPO. Vous avez investi beaucoup de ressources, et nous allons en investir encore plus. De quelle façon communiquons-nous cette information ou recueillons-nous les renseignements des autres pays similaires au nôtre, comme la Norvège, l'Islande et même la Russie? Mettons-nous en commun ces renseignements? Ont-ils des techniques que nous pourrions utiliser? Pourriez-vous formuler des commentaires à ce sujet s'il vous plaît?
Des scientifiques regardent constamment ce que les autres font. Cela fait partie de notre formation et de notre travail. L'innovation est un élément important dans toutes les régions, parce que même si notre zone maritime est différente de celle de notre voisin, nous réalisons tout de même un certain nombre de projets de collaboration. Dans deux ou trois semaines, je m'envole pour la Norvège pour participer à une étude comparative. Un certain nombre de scientifiques de cette région fourniront en fait des renseignements, et nous en recevrons aussi en retour. L'idée, c'est de réaliser de tels projets conjoints, qui s'appuient sur ce que font les autres. Un des problèmes, c'est qu'on ne peut pas tout faire. C'est la seule façon que nous pouvons avancer sans avoir à constamment réinventer la roue.
Nous devons aussi garder à l'esprit les différences entre les systèmes, tâche à laquelle nous consacrons beaucoup de temps. Il y a certains pays où la mise en commun de l'information est plus facile. Les Norvégiens le font très bien, ce n'est pas aussi vrai pour les Russes. C'est plus une question culturelle que quoi que ce soit d'autre. Nous travaillons aussi en collaboration avec les Espagnols et les Portugais. J'ai très souvent participé à des groupes de travail de l'OPANO.
Le milieu des sciences océaniques est petit. Nous aimons travailler ensemble, parce que nous n'avons pas d'autre choix. C'est la seule façon de bâtir. C'est ainsi que nous pouvons favoriser le renforcement des connaissances. J'ai participé à un certain nombre de groupes internationaux, qui ont été créés justement pour tirer parti des renseignements des autres. C'est une pratique traditionnelle en sciences, et elle est particulièrement importante dans le domaine des sciences océaniques, parce que nous sommes si peu nombreux.
Je vais poursuivre sur cette lancée. Avez-vous l'impression que les autres pays... Les poissons ne savent pas qu'il y a une frontière ou une limite de 200 milles. D'après vous, les autres pays misent-ils sur une gestion appropriée dans le cadre de leurs activités de pêche, vous savez, le long de...?
Les migrations à grande échelle dont nous entendons parler sont surtout l'apanage des très grandes espèces qui migrent sur de très longues distances. Le thon, qui est l'un de ces poissons, traverse l'Atlantique régulièrement, deux ou trois fois par année. La plupart des stocks pêchés dans la région, la morue, le poisson plat et le capelan, entreprennent des migrations pouvant atteindre plusieurs milliers de kilomètres, mais ils ne traversent pas nécessairement l'océan en tant que tel.
Par exemple, nous avons vu très peu de données probantes selon lesquelles les stocks de morue dans notre région ont vraiment une incidence sur la situation au Groenland. Le long de notre plateau, du Labrador à ici, nous constatons ces genres d'interactions. Nous constatons ce genre de migrations. Cependant, pour la plupart des espèces, les migrations sont un peu plus limitées, et les dispersions à grande échelle d'un pays à l'autre ont tendance à rester très près des frontières la plupart du temps.
Merci, monsieur Pepin.
Cette discussion me rappelle mon prédécesseur au Parlement, qui avait déjà déclaré que les poissons seraient beaucoup plus faciles à gérer s'ils arrêtaient seulement de nager.
Monsieur Arnold, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
Merci, je vais peut-être moi aussi séparer mon temps avec M. Doherty.
Monsieur Wiseman, vous avez dû conclure rapidement votre exposé lorsque vous avez abordé la question des restrictions relatives à la taille des bateaux. C'est un dossier que je connais un peu. J'ai été constructeur d'embarcations pendant des années. Une proposition a été formulée durant notre congrès cette année, mais je ne suis pas sûr que vous parliez de la même.
Est-ce que les limites quant à la taille des bateaux visent à limiter les capacités de pêche? Visent-elles plutôt à limiter la distance que peuvent parcourir les embarcations? Pourquoi y a-t-il des limites? Pouvez-vous nous l'expliquer en plus grand détail?
Je m'intéresse à cette question depuis 30 ans, et je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre la réponse à cette question. C'est presque une question rhétorique. La justification que j'ai entendue à ce sujet, c'est que c'est un outil de gestion puisque ces restrictions permettent de limiter la capacité, ce qui limite par le fait même la pression exercée sur une ressource.
L'ironie, c'est qu'en raison de l'innovation, de la créativité — appelez ça comme vous voulez —, rien n'a été fait pour limiter la taille des cales. Il y a maintenant des bateaux de 45 pieds dont la capacité de charge est beaucoup, beaucoup plus grande que celle de navires de 65 et 95 pieds. C'est une situation très bizarre que je n'ai jamais vraiment réussi à comprendre.
Il faudrait probablement s'intéresser davantage à la capacité de la cale plutôt qu'à la taille des bateaux en tant que facteur limitatif.
Oui, absolument. Lorsqu'on parle de limiter la taille pour des raisons de sécurité, on mine aussi beaucoup la qualité, l'ergonomie, le confort de l'équipage et ainsi de suite.
C'est une façon contournée de limiter la capacité, la capacité de prise. Ce faisant, je suis très surpris du manque de connaissance que nous constatons jusqu'à présent, du manque de témoignages, au sujet des relations prédateur-proie de la morue et de sa relation avec ses proies. Je ne sais pas si on nous fournira de plus amples renseignements à ce sujet ou si M. Pepin peut nous en parler plus longuement. Après un moratoire de 25 ans, je suis très surpris qu'il n'y ait pas plus de données à ce sujet. Quelles espèces livrent concurrence à la morue pour les proies, quelles sont les proies de la morue et ainsi de suite?
Je peux vous fournir une réponse partielle. Nous examinons le régime alimentaire de compétiteurs potentiels, comme le turbot et la plie canadienne et essayons de faire un suivi des modifications de leur régime au fil du temps. Un des problèmes, c'est qu'il est très difficile de reconstruire le passé sans données. Nous possédons des données sur quelques années, des données que nous avons obtenues dans le cadre d'une initiative de recherche sur l'écosystème que nous avons commencée il y a plusieurs années et dans le cadre de laquelle nous avons commencé à recueillir des données sur le contenu de l'estomac des principaux poissons, y compris le capelan et le lançon, dans le système. Nous avons acquis certaines connaissances, mais il doit y avoir un changement suffisant au sein du système pour que l'on puisse comprendre ces types d'interactions.
Je participe actuellement à un projet dans le cadre duquel nous examinons les changements effectifs liés à la disponibilité du zooplancton en tant que proie, ces petits crustacés qui vivent dans les colonnes d'eau et leur impact sur la situation du capelan dans la région. À la lumière des données que nous avons, nous pouvons remonter jusqu'aux années 1990 pour obtenir ce genre d'informations. C'est prometteur, parce que nous avons cerné certains signaux. Cependant, le problème, c'est qu'il y a de nombreuses questions auxquelles il faut répondre, et il a été difficile au cours des dernières années de répondre à toutes ces questions dans la mesure nécessaire, mais il y a certaines données accessibles pour ce faire.
Je ne veux pas me répéter, mais lorsque les stocks européens ne se sont pas effondrés autant que les nôtres, y avait-il des éléments de comparaison?
En fait, c'est l'un des sujets que nous allons aborder dans deux ou trois semaines lorsque nous nous rendrons en Norvège. C'est très étrange. Les Européens recueillent beaucoup de données, mais ils n'en recueillent pas sur certains aspects. Certaines des données qui manquent souvent concernent la taille en fonction de l'âge et le poids en fonction de l'âge. Au cours des dernières années, ils ont commencé à recueillir plus d'informations à ce sujet, alors on pourra faire plus de comparaisons entre les données que nous avons dans notre région et les données recueillies au large de la Norvège.
Durant le moratoire, quelle était la prévalence des incursions des pêcheurs étrangers qui venaient braconner dans nos eaux?
Je ne suis pas un responsable de la gestion des pêcheries, mais je peux vous dire que ce n'était probablement pas tant que cela.
Il nous reste quelques minutes.
Nous allons passer à M. Johns, pendant trois minutes, s'il vous plaît.
Madame Saier, votre document précise que la pêche est plus qu'un simple gagne-pain: c'est une activité qui a un sens beaucoup plus profond. Je veux que vous nous en disiez un peu plus long sur les indicateurs sociaux et culturels pouvant nous aider à gérer le rétablissement de la morue. Mme Orren nous a parlé un peu plus tôt de l'éducation et des liens. Il y a aussi eu M. Cobb, qui nous a parlé du modèle coopératif et de l'intégration de la collectivité dans l'ensemble du secteur de la pêche. Pouvez-vous aborder ces questions avec nous?
Oui, c'est une question à laquelle nous réfléchissons. Je crois qu'il y a de bons exemples dans d'autres administrations, comme les États-Unis, qui justifient une meilleure inclusion d'indicateurs sociaux dans les politiques sur les pêches. C'est un peu une pente glissante, ou ça peut le devenir, parce que les décisions en matière de gestion devraient en réalité être surtout guidées par la science, mais les composantes sociales jouent actuellement, bien sûr, un rôle majeur dans les processus décisionnels, et c'est normal qu'il en soit ainsi.
Nous ne savons pas à quoi cela doit ressembler exactement, mais nous parlons vraiment d'une inclusion plus marquée des sciences sociales de façon à ce que les décisions prises soient fondées sur la science et puissent aussi aider les collectivités à prospérer.
Voilà qui conclut cette portion de la séance.
Je tiens à remercier les témoins d'être venus nous présenter leur exposé. Nous vous sommes très reconnaissants des efforts que vous y avez mis. Il ne fait aucun doute que l'information que vous nous avez fournie nous aidera beaucoup au moment de la rédaction de notre rapport.
Nous allons maintenant prendre une pause d'environ 10 minutes. À 16 heures pile, nous accueillerons les témoins sur lesquels nous nous sommes entendus ce matin. La séance est suspendue jusqu'à 16 heures.
D'accord, tout le monde. Nous voici rendus au dernier groupe de la journée. C'est ce que j'appelle — et je le dis de la façon la plus affectueuse possible — le groupe excédentaire.
Une voix: On est en heures supplémentaires.
Le président: Oui, on est heures supplémentaires.
Je tiens à remercier nos invités d'être arrivés.
Chers membres, j'imagine que vous avez tous reçu les biographies, comme l'avait demandé M. Doherty. Nous avons les biographies des trois témoins qui sont devant nous: Jason Sullivan, un pêcheur âgé de 33 ans de Bay Bulls, un capitaine de bâtiment de pêche, première classe, qui possède un baccalauréat en études maritimes, Gus Etchegary, qui possède une vaste expérience dans le domaine de la gestion des pêches ou de la gestion des affaires et qui était et reste le président de la Fischeries Community Alliance, et, bien sûr, un habitué de ces réunions, l'ancien député et membre du Comité, Ryan Cleary.
Monsieur Cleary, je suis heureux de vous rencontrer moi aussi.
Nous allons vous accorder 10 minutes chacun en tentant d'être le plus disciplinés possible. Je suis sûr que nous voulons tous partir à temps pour ne pas manquer The Fisheries Broadcast de 18 heures. En tout cas, c'est le cas de certains d'entre nous.
Monsieur Cleary, voulez-vous passer en premier? Allez-y, s'il vous plaît, vous avez 10 minutes.
Bonjour, monsieur le président et bonjour aux députés. Bienvenue à St. John's.
Comme le président l'a souligné, je m'appelle Ryan Cleary, je suis l'ancien député de St. John's South—Mount Pearl. J'ai siégé durant la dernière législature, de 2011 à 2015, et j'ai passé la majeure partie de ce temps en tant que membre du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes.
Nous avons réalisé un assez grand nombre d'études, mais le Comité s'est seulement déplacé une fois, et ce n'était pas dans une province canadienne; il est allé à Washington, D.C. dans le cadre d'une étude sur l'aquaculture en parc clos. Vous pouvez étudier sans fin un problème dans une salle de conférence d'Ottawa, mais on ne saurait sous-estimer l'impact d'être sur le terrain, et je crois que tous les députés et le président sont d'accord avec moi. Lorsque je dis « bienvenue », je le pense sincèrement, et j'espère vous voir souvent ici, à Terre-Neuve-et-Labrador, monsieur Sims.
Je vous parle aujourd'hui premièrement en tant qu'ancien journaliste. J'ai couvert le Moratoire de la pêche à la morue du Nord le 2 juillet 1992, quand John Crosbie a fermé la pêche. Je travaillais pour le quotidien local, The Telegram. La une du journal, le lendemain, je l'ai retrouvée hier soir; j'en avais conservé un exemplaire — était: « Pas de pêche: 19 000 personnes sans travail à la suite de l'interdiction de pêche à la morue du Nord ». On parlait de 19 000 emplois directs sur l'eau et dans les usines de transformation du poisson. Ce chiffre n'incluait pas les emplois indirects. Le nombre total de pertes d'emploi découlant du moratoire de la pêche à la morue du Nord a été estimé à près de 30 000 emplois, et la situation a été comparée à la tempête de poussière qui a emporté avec elle des milliers d'agriculteurs des Prairies durant les années 1930. Au départ, le moratoire devait durer deux ans, et, comme vous le savez, ça fait maintenant 24 ans. On estime que, durant ces 24 ans, Terre-Neuve-et-Labrador a perdu 80 000 personnes.
L'une des principales préoccupations à l'époque était la notion de « transfert des efforts ». On craignait que les efforts intenses déployés pour la pêche à la morue du Nord ne soient transférés sur d'autres espèces, puis d'autres espèces, puis encore d'autres espèces, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien à pêcher dans l'Atlantique Nord. Heureusement, ça ne s'est pas produit, comme vous le savez, même si la santé d'autres stocks comme les crevettes, le crabe et le capelan a beaucoup fluctué.
Je vous parle aussi aujourd'hui en tant que dirigeant de la Federation on Independent Sea Harvesters, ou FISH-NL. FISH-NL a été décrit comme un syndicat dérivé. La plupart des travailleurs du secteur des pêches de Terre-Neuve-et-Labrador, y compris les pêcheurs, les travailleurs des usines de traitement du poisson, les pêcheurs au chalut en zone extracôtière sont actuellement représentés par le FFAW, dont vous avez reçu le président en tant que témoin plus tôt aujourd'hui. Selon nous, il s'agit d'un conflit d'intérêts. Plus précisément, les pêcheurs veulent se séparer du syndicat et créer leur propre syndicat indépendant, FISH-NL, et c'est ce qui nous attend au cours des prochains mois.
Une des raisons pour lesquelles les pêcheurs sont prêts à se révolter au sein de notre province, c'est les consultations, et le fait qu'il n'y en a pas. La situation de la pêche d'intendance à la morue du Nord cette année en est un excellent exemple. L'absence de consultation a donné lieu à une industrie de la pêche à la morue du Nord qui expose les pêcheurs à un plus grand risque et a mené à la remise à l'eau de milliers de livres de morues du Nord.
FISH-NL a participé à des réunions un peu partout à Terre-Neuve au cours des dernières semaines. Ces réunions ont attiré des centaines de pêcheurs, et je n'en ai encore rencontré aucun qui affirme avoir été consulté au sujet de la pêche à la morue du Nord cette année. Les pêcheurs affirment que le plan de gestion d'une durée de un an a fait en sorte que des milliers de livres de morues du Nord mortes ont été remises à l'eau. Durant la saison de pêche de cette année, on a éliminé les quotas individuels — le système de quotas individuels — au profit d'une prolongation de la saison assortie de limites hebdomadaires de débarquement. Les pêcheurs pouvaient débarquer 2 000 livres de morues de la mi-août au début septembre, et 3 000 livres de morues par semaine du début septembre jusqu'à la fin de la saison.
Trop souvent, les pêcheurs atteignent leur quota hebdomadaire alors que leurs filets sont encore à l'eau. Par conséquent, lorsque tous les filets sont levés, des milliers de livres de morues mortes sont laissées dans l'océan. Les pêcheurs ne dépassent pas leur quota, alors on ne les accuse pas de surpêche. Une des théories avancées par les pêcheurs, c'est que la pêche à la morue était répartie sur plus de semaines afin que le FFAW puisse recueillir plus de cotisations syndicales. Les pêcheurs ne voient aucune autre explication logique.
La sécurité est aussi problématique parce qu'avec seulement 2 000 ou 3 000 livres de prises par semaine, ce n'est pas logique sur le plan économique de partir en mer avec un palangrier ou un gros bateau pour pêcher la morue puisqu'il faudra payer l'équipage et toutes les dépenses.
Les pêcheurs affirment qu'ils sont forcés d'utiliser de plus petits bateaux, qui, évidemment, ne sont pas aussi sécuritaires. Plus tôt ce mois-ci, quatre pêcheurs de Shea Heights — c'est un quartier ici, à St. John's — ont disparu en mer dans une embarcation non pontée de 22 pieds pas très loin du port de St. John's.
J'avais hâte de comparaître devant le Comité pour alerter les politiciens fédéraux, comme vous, et le gouvernement du Canada au sujet de la crise de confiance qui croît dans le secteur des pêches de Terre-Neuve-et-Labrador et mettant en cause le FFAW, le syndicat des pêcheurs. D'un côté, le FFAW est responsable de demander des comptes au gouvernement du Canada sur ses décisions quotidiennes en matière de gestion et sur les politiques générales sur les pêches. De l'autre, le FFAW reçoit on ne sait combien de millions de dollars par année de divers ministères et organismes du gouvernement fédéral pour administrer divers programmes de pêche, alors il y a un conflit d'intérêts d'entrée de jeu en raison du fait que le FFAW représente les ouvriers d'usines de traitement de poisson et les pêcheurs. Cependant, l'élément supplémentaire de conflit d'intérêts et les fonds gouvernementaux reçus minent la confiance de l'industrie. Les freins et contrepoids habituels associés à une dynamique syndicale-patronale régulière peuvent être compromis lorsque des fonds passent d'un intervenant à l'autre, ce qui a un impact négatif sur toute l'industrie de la pêche.
J'ai écrit au vérificateur général du Canada plus tôt cet été et je lui ai demandé d'enquêter sur les fonds fédéraux destinés au FFAW, mais son bureau a refusé, transférant les préoccupations aux vérificateurs du MPO, ce qui crée un autre conflit.
Plus tôt aujourd'hui, j'ai entendu les exposés présentés par le président du FFAW et le ministre provincial des Pêches. Le syndicat et le ministère provincial des Pêches ont tous deux décrit les rôles scientifiques qu'ils assument et ils assument ces rôles scientifiques parce que le gouvernement fédéral ne fait pas son travail. Il n'a pas fait ce qu'il faut. Cependant, comme cela a été dit clairement aujourd'hui, c'est le gouvernement du Canada qui est responsable du secteur de la capture, de la bonne gestion. Les lignes de démarcation entre les fonctions du syndicat des pêcheurs, du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial ont toutes été brouillées. Il faut redéfinir clairement ces rôles. Je vais citer un pêcheur dans un article paru dans les nouvelles locales tout juste aujourd'hui: « Le syndicat est maintenant comme le MPO pour nous... » On ne sait pas exactement qui est le gestionnaire.
Il faut exiger du gouvernement qu'il assume ses responsabilités de gérer les stocks de poissons. Cela signifie de bonnes activités scientifiques, de bonnes mesures d'application de la loi et une saine structure de gestion. Cependant, 24 ans après le début du moratoire sur la pêche à la morue du Nord, c'est seulement maintenant, tandis qu'il y a un signe que la morue revient, que nous réfléchissons vraiment à la mise en place d'un plan de gestion. De mon point de vue, en tant qu'ancien député et en tant que citoyen de Terre-Neuve-et-Labrador, nous devrions avoir honte.
C'est tout?
M. Ryan Cleary: Bien sûr.
Le président: D'accord, il vous restait du temps.
Merci, monsieur Cleary. Nous vous en sommes reconnaissants.
Monsieur Sullivan, vous avez jusqu'à 10 minutes.
Je n'ai rien préparé, alors j'imagine que je vais simplement parler avec le coeur.
Je suis l'éléphant blanc dans la pièce. Nous ne sommes plus nombreux. J'ai moins de 35 ans et je suis pêcheur. J'ai 33 ans. Après avoir dépensé environ 2 millions de dollars pour entrer dans le secteur des pêches, mon frère et moi réussissons assez bien. Nous travaillons dur, et nous faisons ce que nous avons à faire.
Nos stocks de crustacés sont en déclin actuellement — dans mon cas, c'est principalement le crabe — alors le retour de la morue du Nord est très important pour moi. C'est mon avenir et celui de beaucoup de personnes comme moi. Le problème, c'est lorsque vous prenez des décisions à Ottawa sans avoir obtenu d'information. C'est aberrant, ce qui s'est produit cette année lorsque le FFAW n'a pas consulté ses membres. Je me suis déplacé partout dans la province et j'ai demandé à tout le monde, à des milliers de pêcheurs s'ils avaient vu cette proposition, et ils ne l'avaient pas vue. Nous ne l'avons toujours pas vue.
Nous ne savons pas si cette pêche... On nous dit que c'est pour 15 semaines ou tant de semaines. Nous ne savons pas. Et maintenant, il y a des rumeurs sur la jetée selon lesquelles la pêche fermera dans deux semaines et que le total autorisé des captures est quasiment atteint. Nous ne savons pas. Nous n'avons encore rien vu, et ce n'est pas bien. Nous voulons que le problème soit réglé.
Je pourrais vous parler aujourd'hui de beaucoup de choses différentes, comme le prix du poisson et ce genre de choses. Mais, au bout du compte, le prix du poisson n'est pas de votre ressort. Le gouvernement provincial nous a imposé des règlements qui font en sorte que nous n'obtenons qu'une infime partie de ce que nous devrions obtenir, alors vous n'avez pas à vous en faire. C'est une lutte que nous devons mener contre le gouvernement provincial. Il doit nous permettre de miser sur des marchés libres afin que ce soit le marché qui dicte les prix, pas une demi-douzaine de commerçants qui nous payent comme bon leur semble.
Je vais vous parler aujourd'hui, entre autres, de ce que nous faisons et de ce que vous pouvez contrôler. Nous allons créer un nouveau syndicat. Vraiment. Après les Fêtes, nous allons être organisés, alors je vous encourage à ne pas prendre des décisions majeures à long terme avant ce moment-là. Nous ne voulons pas que des accords de trois ou quatre ans soient signés avant d'avoir notre mot à dire sur le contenu de tels accords. Nous devons faire partie du processus. On ne peut pas nous laisser sur la touche encore une fois. C'est ce qui est arrivé cette année, et une telle situation ne doit pas se reproduire. Cette situation nous force à ressortir nos petits bateaux pour remplir nos quotas individuels, quotas pour lesquels nos pères et nos grands-pères avant nous se sont battus. C'était un affront monumental.
Si nous avions droit à 30 000 livres de poissons, ça équivaut environ à 18 000 $ dans le marché actuel de Terre-Neuve. Si nous pêchons tout en une semaine, nous obtiendrons 18 000 $, mais, même si vous étirez le processus sur plus de 20 semaines, ça reste 18 000 $. Nous tentons de gagner notre vie. Nous ne voulons pas un genre de programme social. Pour moi, une pêcherie est une entreprise. Nous aimons pouvoir planifier d'avance. Nous pouvons peut-être faire certaines choses différemment, mais vous ne pouvez pas tout faire d'un coup. Nous voulons le rétablissement de nos quotas individuels. C'est une des luttes que nous mènerons.
J'ai beaucoup entendu parler d'Islande aujourd'hui et de tout ce que les Islandais font là-bas avec les filets maillants et ainsi de suite. Je vous encourage à étudier cette situation de plus près avant de prendre des décisions dans ce dossier. J'ai participé à des conférences et des séminaires avec des Islandais, et la pêche au filet maillant reste le type de pêche prédominant en Islande. Cette méthode continue de produire du poisson de bonne qualité. C'est simplement que la pêche à la ligne reste de toute évidence meilleure. Cela ne fait aucun doute.
En Islande, la raison pour laquelle les pêcheurs obtiennent de bons prix pour leurs poissons, c'est qu'ils ont accès à un libre marché. Ils peuvent vendre leurs poissons eux-mêmes. Si je voulais vendre moi-même mon poisson, par exemple grâce à une publicité à la télévision ou je ne sais quoi, en Islande, je pourrais le faire. Mais ici, à Terre-Neuve, nous ne pouvons pas procéder ainsi, parce que nous sommes réglementés par une législation provinciale archaïque. Nous allons aussi régler ce problème.
La seule raison pour laquelle l'Islande connaît du succès, c'est que personne d'autre ne pêche le poisson des Islandais. J'ai des documents ici. Je crois que vous les avez aussi. C'est un tableau de la gestion des pêches de l'OPANO pour 2016. Lorsque vous aurez l'occasion, jetez-y un coup d'oeil. On y retrouve les différentes espèces, comme la morue, le sébaste et le flétan du Groenland, c'est-à-dire le turbot.
Vous pouvez voir les pourcentages que nous obtenons comparativement à tous les autres pays de l'OPANO. Le pourcentage de la morue dans la zone 3M, c'est-à-dire le Bonnet flamand, est risible. Le Canada obtient 0,8 % des poissons qui jouxtent notre territoire. Allons donc, messieurs, est-ce sérieux?
Passons au turbot, le flétan du Groenland. C'est probablement le poisson le plus lucratif que nous avons, et, ici, nous obtenons 15 % des quotas. Tous les autres pays peuvent venir ici. L'UE a 6 400 tonnes. Ce n'est pas suffisant.
Le syndicat dit souvent qu'on ne peut pas inventer des quotas ni faire apparaître du poisson que les gens peuvent pêcher, mais le poisson est là, c'est simplement que toutes les autres personnes le pêchent.
Ce que j'ai remarqué la semaine dernière sur le Banc Georges, où le quota de morues est partagé par le Canada et les États-Unis, c'est que le Canada obtient la part du lion du quota et que nous partageons le banc. Nous ne partageons les Grands Bancs avec personne, et nous n'obtenons rien.
L'heure est venue pour des personnes de se pencher sur cette question. Je ne sais pas ce qui se passe, si c'est une question de commerce extérieur ni pourquoi nous sommes trahis, mais Terre-Neuve est trahie. Les pêcheurs ont été trahis.
Monsieur Simms, vous étiez dans l'opposition, et vous avez maintenant la possibilité de faire quelque chose parce que vous êtes au pouvoir.
Monsieur McDonald, c'est votre premier mandat. Pourquoi ne pas laisser un héritage? Pourquoi ne vous battez-vous pas pour nous en vous assurant de régler le problème? Cette situation est inacceptable. Ce qui s'est produit est inacceptable. Je sais que vous êtes de bonnes personnes et que vous allez essayer. C'est tout ce que j'ai à dire.
À ce sujet, je ne vais pas soumettre au vote la question de savoir si je suis une bonne personne, alors laissons ça ainsi.
Merci, monsieur Sullivan. Merci beaucoup. J'apprécie vos commentaires.
Monsieur Etchegary, vous avez 10 minutes, s'il vous plaît.
Merci, monsieur.
Pour commencer, merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité. Comme vous le savez, nous sommes venus à la dernière minute.
Nous avons préparé des notes avant d'arriver à la réunion ce matin, mais je vous avoue que je les ai jetées pendant que les trois groupes de témoins précédents comparaissaient, parce qu'une bonne partie des déclarations formulées sont extrêmement importantes, et je suis sûr que vous comprenez, à la lumière des déclarations pas seulement de ces messieurs, mais d'autres personnes aussi, que, actuellement, l'industrie de la pêche à Terre-Neuve est un horrible gâchis, et ce, à un moment où la pêche, qui est importante pour l'économie, n'affiche aucun signe réel de rétablissement, malgré ce que certains disent. Oui, il y a des indices ici et là, mais, de façon générale, il ne faut pas s'attendre à grand-chose à l'avenir, sauf si quelques miracles se produisent.
La présente discussion et votre mandat concernent les stocks de morue du Nord. Ces stocks sont une ressource très importante. Nous en pêchons depuis de nombreuses années. Nous connaissons les habitudes migratoires de cette espèce: les morues se reproduisent sur la côte de l'estuaire de Hamilton, au large du Labrador — dans une grande mesure —, pour ensuite trouver leur chemin le long du trajet de migration qui longe les Grands Bancs jusqu'au nez, à 200 milles des terres.
En passant, au fil des ans, j'ai entendu d'excellents plaidoyers à ce sujet, de la part d'un scientifique canadien et d'un étranger au sein de la CIPANO et de l'OPANO. Dans le cas du scientifique canadien, il affirme que seulement 5 % des morues du Nord dépassent les 200 milles, tandis que le scientifique étranger déclare que c'est jusqu'à 25 et 30 % C'est une donnée importante. J'y reviendrai.
Dans les faits, j'ai comparu souvent devant le Comité dans le passé. Évidemment, je vois la plupart d'entre vous pour la première fois. J'imagine que, dans de nombreux cas, cette industrie et ce que vous avez entendu aujourd'hui causent beaucoup de confusion, mais je suis sûr que, en cours de route, vous vous êtes dit: « Qu'est-ce qui a bien pu arriver pour que cette industrie, qui a déjà été extrêmement florissante, devienne un tel gâchis aujourd'hui? Comment cela a-t-il pu arriver? »
Je participe à cette pêche depuis 1947, soit deux ans avant la Confédération. À ce moment-là, il se passait trois choses dans le monde: la fin de la guerre et les dégâts considérables en Europe, la transition entre l'industrie traditionnelle du poisson salé et la nouvelle industrie du poisson frais et l'entrée dans la Confédération. La journée où nous nous sommes joints à la Confédération, le Canada est passé du 14e au 6e rang mondial des pays exportateurs de poisson.
C'est la valeur en fait de pêcheries que Terre-Neuve — pas l'est du Canada, mais Terre-Neuve-et-Labrador — a apporté à la Confédération, qui est passée du 14e au 6e rang mondial. Il s'agissait d'une des pêcheries les plus importantes et les plus diversifiées de la planète: il y avait le poisson de fond, comme la morue, la plie, le turbot et d'autres espèces, les espèces pélagiques, comme le maquereau, le hareng et le capelan pour ne nommer que ceux-là et les crustacés. C'est énorme.
La transition qui a marqué l'abandon de l'industrie du poisson salé a commencé, et j'ai eu la chance, à un très jeune âge, d'être gestionnaire d'une des quatre premières usines de poisson congelé de Terre-Neuve, sur la côte Sud libre de glace, ce qui était très important, particulièrement à cette époque. Au bout du compte, au fil des ans, nous avons bâti une entreprise qui employait 5 500 personnes, des hommes et des femmes, dans des usines et sur les bateaux. Environ 4 000 de ces emplois étaient des emplois sur 50 semaines, et les autres étaient des emplois saisonniers, parce qu'il y avait des régions où la glace était un facteur majeur.
Pour les 20 premières années, à partir de 1950 jusqu'à, disons, 1968-1969, nous avons mis sur pied une pêcherie et notre propre entreprise. Nous avons créé la première organisation de commercialisation aux États-Unis et avions des bureaux à Trondheim, en Norvège, à Cuxhaven et à Londres pour servir les marchés européens. Nous nous sommes associés à une très grande entreprise japonaise pour avoir accès au marché japonais. Pendant 20 ans et très... C'était agaçant pour moi aujourd'hui d'entendre des gens dire que les pêcheries avant 1992 produisaient des blocs de morues. C'est une illustration... Eh bien, une génération a passé depuis le moratoire, et un si grand nombre des personnes qui contribuent à la discussion aujourd'hui... En passant, une grande partie des discussions étaient très bonnes. Des suggestions et des commentaires très intelligents ont été formulés, et je tiens à féliciter tous les témoins, mais il n'en reste pas moins que nous avons fait profiter ce pays de certaines des pêcheries les plus diversifiées et les plus solides; on pourrait même qualifier certaines d'entre elles de « pêcheries vierges ».
Qu'est-ce qui s'est produit? Eh bien, je vais vous le dire. Soit dit en passant, je pourrais vous dire qu'un des principaux facteurs de ce que j'ai appelé le déclin — quasiment — des pêcheries, c'est le fait que, à la fin de la guerre en Europe, des millions de personnes qui crevaient de faim devaient être nourries et que le secteur agricole venait d'être à peu près tout détruit. À la même époque, dans la plupart de ces nations, il y a eu d'immenses chantiers navals, alors ces pays se sont tournés vers les protéines de poissons pour nourrir les populations d'Europe au cours des années suivantes.
Le plan Marshall des États-Unis a assuré la reprise et le rétablissement industriel, mais les gens avaient faim. Qu'est-ce qui est arrivé? Eh bien, au cours des 20 années suivantes, 1 400 navires-congélateurs et navires-usines-congélateurs ont fait main basse sur les ressources adjacentes à Terre-Neuve-et-Labrador, forts de 60 000 pêcheurs, et pendant les 30 années suivantes, jusqu'en 1978, ils ont mené des activités de pêche sans aucun contrôle et aucune limite tout juste en face d'un pays, le Canada, auquel nous avions transféré l'une des plus importantes zones halieutiques du monde en ne lui demandant qu'une chose: en assurer une gestion durable. N'oubliez pas, c'est une ressource de propriété commune qui n'appartient pas à un syndicat ni au Conseil canadien des pêches ni à un gouvernement du Canada ou de Terre-Neuve. C'est une ressource de propriété commune qui appartient au peuple.
Ce qui est arrivé est une catastrophe. J'étais commissaire de la CIPANO et de l'OPANO, et on m'envoyait pendant un mois chaque année, en juin, écouter des représentants de 20 États se réunir pour décider ce qu'ils allaient pêcher, quand ils allaient le faire et combien de temps cela allait prendre. Laissez-moi vous dire qu'un conseil scientifique composé de scientifiques de tous ces États, y compris le Canada — soit dit en passant, nous comptions certains des meilleurs scientifiques du monde au sein de ce groupe — s'est réuni durant l'année, a réalisé des évaluations sur les divers stocks de morues et a présenté un exposé dans le cadre d'une assemblée plénière de la CIPANO, durant la première semaine de ces réunions. Je vous parle des années 1968, 1969, 1970, 1971 et ainsi de suite. Ça a été le cas pendant 20 ans. Dans chaque cas, des recommandations étaient formulées.
Par ailleurs, j'étais l'un des 50 commissaires qui ont accepté les recommandations du conseil scientifique en ce qui concerne les quotas et ce genre de choses. Les activités de pêche devaient être réalisées conformément à ce qu'ils appelaient le niveau FO.1, qui s'élève à environ 18 % de la biomasse. En d'autres mots, on pouvait pêcher 18 % de la biomasse et se retrouver avec une pêche durable.
Chaque année, contrairement à ce que la plupart des gens disent, les scientifiques ont averti les pays participants qu'ils ne pêchaient pas de 18 à 20 % de la biomasse, mais plus près de 30 à 35 %: « Au taux où vous pêchez, les ressources vont disparaître ». C'était la situation en 1965, 1966 et 1967. Je vous le garantis: j'ai des transcriptions officielles de procédures officielles en raison de ma présence au sein de l'organisation.
Même le M. Templeton, de Terre-Neuve, à ma connaissance un des meilleurs scientifiques halieutistes, soutenait un exposé que nous avons présenté en raison de notre expérience au sein de la CIPANO et des activités de pêche sans contrôle et sans limites. Il a passé beaucoup de temps sur des bateaux de recherche sur la côte de Terre-Neuve-et-Labrador, alors nous avons présenté l'exposé avec son appui. Nous avons rencontré Mitchell Sharp, Don Jamieson et Jack Davis, qui a été ministre des Pêches, pendant deux jours et demi. Vingt-cinq d'entre nous, d'ici même, ont présenté un exposé en octobre 1971 et présenté des données probantes documentaires et des preuves scientifiques selon lesquelles la poursuite de la pêche au niveau de l'époque mènerait à l'épuisement des ressources et qu'il fallait s'attendre à ce que le secteur devienne quasiment une industrie artisanale.
Je dois le reconnaître, ces trois ministres étaient choqués. Durant l'exposé que nous avons présenté, puisque j'étais président du groupe, ils m'ont demandé si je pouvais résumer la présentation à l'intention du premier ministre. Le matin suivant, nous rencontrions Pierre Trudeau et huit ministres importants du Cabinet. Durant l'exposé, certains participants étaient émus, particulièrement ceux de la côte Est. Ils ne savaient absolument pas que la situation en était rendue là. C'était en 1971, pas en 2002.
À la fin de notre exposé devant le premier ministre, les personnes présentes étaient ébranlées par la situation. C'est à ce moment-là, bien sûr, que tout le monde a parlé de la prorogation de juridiction pour obtenir une certaine protection. C'est ce que nous voulions, un genre de protection des ressources. Dans les 24 heures suivant notre exposé, le premier ministre J.R. Smallwood a reçu un télex, dont j'ai une copie ici, lui disant que le Canada était choqué, que le gouvernement canadien était choqué et qu'il allait prendre des mesures de prorogation de juridiction pour l'étendre à tout le plateau canadien. En d'autres mots, le gouvernement allait porter attention aux activités de pêche sur le plateau continental de la côte Ouest et nous protéger pleinement contre les pirates de l'étranger.
Sept ans plus tard, la limite territoriale a été élargie à 200 milles, laissant deux des zones de pêche les plus productives, le nez et la queue du Grand Banc et le Bonnet flamand à la merci des étrangers. J'ai été abasourdi aujourd'hui d'entendre la réponse du représentant du MPO à votre question: « Est-ce que les étrangers ont eu un impact durant le moratoire? » Il a répondu qu'ils n'en avaient pas eu.
Laissez-moi vous parler de l'Espagne. Je ne sais pas si vous connaissez une organisation appelée le Consortium international des journalistes d'enquête. Cette organisation a réalisé des études sur ces pêcheries et sur les subventions reçues par les États qui participent à l'OPANO. À elle seule, l'Espagne a reçu 8 milliards de dollars américains en subventions pour mener des activités de pêche étrangères au large.
Le fait qu'il soit ici et qu'il formule une telle déclaration est typique de l'attitude adoptée par le MPO à l'égard des pêches terre-neuviennes depuis 1970.
Je sais que mon temps est presque écoulé, mais je présente un exposé au pied levé, et ce n'est pas exactement ce que j'avais en tête. Malgré tout, je jugeais nécessaire de vous informer du fait que l'effondrement de cette pêche découle d'une seule chose, soit le fait que le gouvernement du Canada n'a pas fait son travail lorsque les pêches ont été transférées au Canada, c'est-à-dire d'assurer une gestion durable des ressources.
Merci, monsieur Etchegary. Je vous remercie de votre intervention.
Monsieur McDonald, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci, Jason, Gus et Ryan, d'être là aujourd'hui et de nous avoir présenté vos exposés. De toute évidence, j'ai constaté la passion avec laquelle vous avez parlé des divers aspects du problème, pas seulement pour la pêche à la morue, mais l'ensemble du secteur des pêches.
C'est un peu hors sujet, mais, pour revenir sur le FISH-NL et la formation d'un nouveau syndicat, je sais que nous n'allons pas régler ces problèmes ici, aujourd'hui, et ce n'est probablement pas nous qui allons trancher dans ce dossier, mais, comme on le dit à Terre-Neuve, avant que tout soit fini, quelqu'un aura à porter le chapeau et ce sera probablement mérité. Mais, tout de même, bonne chance à vous tous qui essayez d'agir dans l'intérêt des pêcheries et des pêcheurs.
Ma première question s'adresse à M. Etchegary. Je vous ai entendu aborder ce sujet à plusieurs reprises dans différents médias; quels sont vos sentiments et vos points de vue sur la création d'un cadre conjoint de gestion des pêches réunissant le Canada et Terre-Neuve?
Bien sûr, c'est à l'ordre du jour depuis assez longtemps, et beaucoup de personnes ont eu l'impression qu'il fallait procéder ainsi.
N'oubliez pas que les ressources halieutiques que nous avons données au Canada sont uniques lorsqu'on les compare aux autres pêcheries de la côte Est. Par exemple, lorsque le moratoire a été imposé, nous avons perdu 20 000 emplois, et 80 000 personnes ont déménagé à l'extérieur de la province, en Alberta, où ils ont eu la chance de trouver un emploi.
Dans le cas des Maritimes, la Nouvelle-Écosse, si on examine la valeur de ses exportations avant et après le moratoire, c'est exactement la même chose. C'est parce que les pêcheurs étaient composés de 85 à 95 % de pêcheurs de crustacés. Dans notre cas, il était essentiellement question de pêche de fond. Il est vrai que c'est l'une des pêches précieuses, mais elle est unique dans la mesure où non seulement nous avons été touchés par cette situation, mais nous sommes la seule province sur la côte Est dont les pêcheries doivent composer avec des considérations internationales. Les étrangers sont à nos portes. Ils le sont encore aujourd'hui. Ils exploitent des stocks en migration qui vont au-delà de la limite imaginaire de 200 milles sur la queue du Grand Banc, le nez du Grand Banc et le Bonnet flamand. Laissez-moi vous dire que, dans les secteurs de pêche à la morue du Sud, il y a cinq stocks de morues principaux. Ils sont tous précieux, mais celui au sud des Grands Bancs a été exposé à la pêche étrangère depuis 1978 et à la prorogation de juridiction.
Soit dit en passant, une des déclarations faites par le représentant du MPO était exacte: soit la mer de Barents est grandement touchée par le courant du Gulf Stream. Ce qu'il n'a pas dit, c'est qu'il en va de même des ressources au sud des Grands Bancs. À cet endroit, on pêchait de 100 000 à 110 000 tonnes de morues chaque année avant la surpêche. Aujourd'hui, la zone est aussi stérile que cette table, en raison de la surpêche continue de flottes étrangères, surtout les Espagnols et les Portugais ainsi que les Russes dans une certaine mesure.
Vous vous demandez peut-être comment diable l'Espagne et le Portugal d'aujourd'hui, vu leurs grandes difficultés financières, peuvent envoyer un bâtiment de 20 millions de dollars à plus de 5 500 milles pour pêcher dans les Grands Bancs avec 60 hommes sur chaque bâtiment? Ils le font parce que l'Union européenne les subventionne au maximum.
L'autre chose que je voulais souligner avant d'oublier, c'est que le représentant du MPO a dit — et il a raison — que la capacité scientifique de l'organisation de White Hills d'aujourd'hui est réduite. Il a dit que nous comptons sur moins de navires et moins de personnes. Il a aussi dit que, lorsqu'on pose des questions au sujet du capelan — qui, en passant, n'a pas fait l'objet d'évaluations, non pas depuis deux ou trois ans, mais depuis neuf ans, et c'est la pêcherie la plus précieuse ici, parce qu'il s'agit de la principale source de nourriture de beaucoup de poissons de fond —, que les problèmes liés aux bateaux étaient l'une des raisons pour lesquelles les évaluations n'avaient pas été menées.
Laissez-moi vous dire que, au cours des 20 dernières années, les capacités du MPO ont énormément diminué. Tout a commencé en 1995, quand Paul Martin a réduit le budget destiné aux capacités scientifiques de White Hills de 50 %. Nous avons des données probantes documentées qui révèlent que, progressivement, depuis, le financement a tellement été réduit que, actuellement, le WWF a quasiment pris le relais du MPO. Nous commençons à nous demander qui mène la parade. Le MPO a perdu le contrôle.
Comment le ministère a-t-il perdu le contrôle? Laissez-moi vous dire que tout a commencé — pas nécessairement la perte de contrôle, mais l'attitude dictatoriale du MPO — en 1974, lorsque le ministre de l'époque a dissous l'Office fédéral des recherches sur les pêcheries. N'oubliez pas ce nom: l'Office fédéral des recherches sur les pêcheries. Il s'agissait d'une organisation composée de membres de tous les secteurs de l'industrie de la pêche.
L'organisation était responsable d'élaborer — en collaboration avec des scientifiques qui en étaient membres — des programmes et des projets scientifiques pour le plateau continental, dont la superficie est de près de un million de kilomètres carrés et de préparer un budget et de livrer le tout au ministre. Jamais durant tout le temps dont je me suis occupé de ce dossier le ministre n'a changé quoi que ce soit en raison du calibre des intervenants qui participaient aux activités de l'Office.
Puis, le ministre a dissous l'organisation en 1974 et a accaparé cette responsabilité et est par conséquent devenu le dictateur des pêches dans l'Est canadien. Depuis ce jour, vous pouvez constater, sans grande difficulté, la déchéance, l'absence de contrôle et la réduction des capacités du MPO, et la situation est allée en empirant.
Monsieur Etchegary, je suis désolé, mais je dois vous interrompre ici. Les sept minutes de M. McDonald sont terminées, et votre intervention aussi par le fait même. Vous pourrez peut-être aller au bout de votre pensée en répondant à une autre question ou par la suite.
Monsieur Doherty, vous allez séparer votre temps avec M. Arnold, qui va commencer. Allez-y, vous avez trois minutes et demie.
Merci, monsieur le président.
Encore une fois, merci aux témoins qui sont venus cet après-midi dans un délai relativement court, je crois. Je suis vraiment reconnaissant de l'honnêteté qui transparaît ici.
Je veux préciser rapidement quelque chose. Monsieur Etchegary, vous avez parlé des stocks de morue aux pointes sud des Grands Bancs. Pour que le groupe ici comprenne bien, est-ce qu'on parle bien encore de la morue du Nord?
Non, la morue du Nord se trouve dans une zone allant de l'estuaire de Hamilton jusqu'au nez du Banc, mais, dans la partie sud de la queue des Grands Bancs, c'est un stock différent.
Je sais qu'il y a certaines interactions, mais je voulais simplement confirmer ce dont on s'occupe ici.
Monsieur Etchegary, vous vous intéressez à ce dossier depuis très longtemps. J'ai déclaré plus tôt que j'étais surpris par certains des mystères qui persistent en ce qui concerne la relation prédateur-proie, l'interaction avec la morue et ainsi de suite. D'après vous, croyez-vous que nous disposions de certaines données scientifiques, mais qu'elles ont été perdues entre l'eau et les décideurs?
Laissez-moi vous donner un exemple: depuis que j'ai pris ma retraite, d'autres scientifiques à la retraite et moi avons été invités par le directeur général, ici, à Terre-Neuve, pour participer à une séance réunissant 25 scientifiques, qui réalisaient une évaluation du Banc de Saint-Pierre, il y a tout juste environ 10 ans. Nous les avons rencontrés pendant sept ou huit jours, et durant cette période, ces scientifiques ont présenté des renseignements obtenus grâce à des efforts de recherche en mer, entre autres. Ils ont débattu, se sont disputés et ainsi de suite, mais ils ont fini par trouver un consensus. Trois hommes dans le groupe ont été choisis pour définir le consensus afin de le présenter à la direction.
On a demandé à mon ami scientifique et moi d'assister aux délibérations pendant que ces personnes tranchaient... Nous étions là, et avions l'impression qu'ils avaient fait de l'excellent travail. Ce qu'ils avaient préparé reflétait vraiment ce qui c'était produit au cours des 10 jours précédents. Il y avait donc un certain message.
Environ une semaine plus tard, le tout a été renvoyé au même groupe pour qu'il y apporte des changements. On lui a renvoyé trois fois le document avant l'acceptation aux fins de présentation aux bureaucrates et au ministre. Rendu là, le message avait été pas mal dilué.
Ça, je ne le sais pas, mais ça venait d'en haut, alors ce devait être... Les scientifiques présentent l'exposé aux gestionnaires, puis le système bureaucratique se met en branle, j'imagine, et ça arrive ensuite au ministre. Quelque part en cours de route, ces recommandations...
Ce que j'essaie de dire, c'est qu'une bonne partie des politiques qui ont été appliquées dans le cadre des pêcheries, particulièrement au cours des 25 dernières années, étaient motivées politiquement. On ne peut pas le dire autrement; c'est vrai.
Je voulais ajouter mon grain de sel en affirmant qu'on pourrait croire que, depuis 1992, depuis le moratoire et l'effondrement des stocks de morues du Nord, on aurait accru les activités scientifiques afin de comprendre exactement ce qui s'est produit et s'assurer que ça ne se reproduise pas, mais c'est exactement l'opposé qui est arrivé: les activités scientifiques ont diminué. M. Etchegary a avancé un chiffre tantôt, 50 % ou plus. En outre, lorsque les scientifiques âgés partaient à la retraite, ils n'étaient pas remplacés. Un scientifique était justement ici il y a quelques minutes pour nous parler des sondages qu'il réalisait lorsque le bateau n'était pas en panne, et ce n'était pas une blague. La plupart des bâtiments de la Garde côtière canadienne, par exemple, qui permettent d'effectuer des recherches ont en moyenne environ 30 ans. Je crois qu'un rapport a été réalisé récemment selon lequel nos bâtiments n'avaient en fait aucune valeur comptable. Ils ne valent plus rien.
Vous avez entendu aujourd'hui des témoins du FFAW, le syndicat des pêcheries, et des pêcheries provinciales. Ils vous ont tous dit qu'ils réalisaient des activités scientifiques qui relevaient du MPO parce que personne ne le faisait. Une des principales raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd'hui, c'est que, plutôt que de laisser le FFAW ou les pêcheries provinciales faire le travail du MPO, nous devons nous-mêmes faire mieux pour demander des comptes au gouvernement du Canada, au MPO, afin qu'il s'acquitte de ses responsabilités en vertu des conditions de l'union.
D'accord.
Jason, vous n'avez pas eu assez de temps pour présenter votre exposé. Je me demande si vous avez quoi que ce soit à ajouter en tant que pêcheur. J'imagine que vous avez investi votre vie et votre avenir dans cette entreprise. Selon vous, qu'est-ce qui serait important à l'avenir afin que vous ayez une certaine certitude et, j'imagine, que vous puissiez léguer votre entreprise à vos enfants un jour?
Je suis fier de ce que je fais, alors je veux à coup sûr passer le flambeau un jour.
Je crains vraiment, vu la façon dont les choses se passent, qu'il n'y ait plus rien à transmettre. Vous avez parlé tantôt des quotas sur le lait et la stabilité qui découle des quotas et ce genre de choses. Lorsqu'on nous les a enlevés, je ne peux même pas vous décrire comment je me suis senti. De la colère mur à mur.
Un article a paru dans le Telegram aujourd'hui au sujet des gars de Port de Grave, qui donnent vraiment l'impression que cette révolte était liée au fait de ne pas avoir été consultés et tout le reste. C'est vrai, mais ce n'est pas tout. Il y a la poursuite: les pêcheurs ont dû poursuivre le syndicat au sujet des bancs de pétoncles et de ce genre de choses.
Le fait d'être consulté est vraiment très important, et nous avions des gars qui participaient au programme de surveillance par sentinelle dont le syndicat a parlé. Ces personnes participent à ce programme depuis environ 20 ans. Ils sont sur l'eau, alors on aurait pu croire que c'est ces personnes qu'ils auraient fait participer.
J'ai demandé ce qui se passait et ce que, selon vous, nous devrions faire à l'avenir, mais, encore une fois, il n'y a pas eu de consultation. Le seul pêcheur dont j'ai entendu dire qu'il avait vu la proposition est Tony Doyle, et une seule personne ne devrait pas prendre les décisions pour toute une industrie, surtout une personne en fin de carrière. Il faut voir les choses du point de vue du nouveau à qui il reste 30 ans dans le domaine. Il faut obtenir son point de vue.
Merci, monsieur Sullivan. Le temps pour répondre à cette question est écoulé.
Monsieur Johns, allez-y, vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
Merci.
Messieurs, vous n'avez aucun problème à nous garder éveillés. Votre passion est incroyable, et je veux vous remercier aussi de nous transmettre toutes vos connaissances locales.
Monsieur Etchegary, j'ai vraiment aimé que vous nous racontiez ce qui est arrivé et la façon dont le Canada a laissé les gens de Terre-Neuve tomber. Je veux en apprendre davantage de vous, parce que sans l'histoire, sans ces connaissances que vous nous transmettez, nous allons faire les mêmes erreurs à nouveau. J'aimerais que vous nous parliez maintenant de ce que vous aimeriez voir se produire à l'avenir et de la façon dont vous aimeriez que nous allions de l'avant.
Ce qui est malheureux, c'est que le moratoire est en place depuis 25 ans. On a remarqué une certaine reprise au banc de Saint-Pierre au large de la côte Sud-Est de Terre-Neuve, un banc très important, où la pêche était très importante, en fait, de 80 000 à 90 000 tonnes par année.
Il y a eu un léger rétablissement il y a peut-être 10 ans, et le MPO a fait la grave erreur de rouvrir la pêche alors que les stocks de base — je parle ici de la classe d'âge: un, deux, trois, quatre, cinq et six ans — n'étaient pas encore là. Les responsables ont ouvert la pêche en imposant un quota de 20 000 tonnes, et un an et demi plus tard seulement ils ont dû réduire les quotas à 8 000 tonnes parce que les scientifiques qui ont fait quelques calculs ont vu que les stocks diminuaient à nouveau.
Et maintenant, ces bancs, qui produisaient historiquement de 75 000 à 80 000 tonnes de poissons... Certains scientifiques, dans les universités, en particulier, affirment que l'espèce devrait être sur la liste des espèces en péril. C'est l'un des principaux stocks de morues que nous possédons. Nous n'avons rien appris. Cette situation se perpétue depuis longtemps. Si vous regardez n'importe lequel des graphiques que les scientifiques ont produits, vous verrez l'impact de la surpêche et la réduction... Par exemple, certaines personnes disent qu'il y a environ 300 000 tonnes de morues du Nord actuellement.
En 1962, les stocks reproducteurs de cette morue s'élevaient à 2 millions de tonnes. Le stock reproducteur était âgé de moins de sept ans. En plus des 2 millions de tonnes, il y avait une population qui avait plus de sept ans, et elle était estimée à environ 1 million de tonnes. Actuellement, on parle de 300 000 tonnes; c'est ce qu'on dit. Encore une fois, certains pêcheurs remettent en question ce chiffre, et je ne les blâme pas.
Nous ne menons pas d'activités scientifiques. Nous ne faisons pas le travail nécessaire. Il n'y a pas de données scientifiques. Par conséquent, à long terme... L'économie de la province sera fondée sur la réussite ou l'échec du secteur de la pêche dans la province au cours des prochaines années.
Le pétrole n'est pas renouvelable. Les minerais... Je viens d'une ville minière, alors j'en sais quelque chose. L'exploitation minière n'est pas renouvelable, mais les pêches le sont. Nous avons ainsi potentiellement une des principales zones de pêche du monde. La population de la planète passera de 6 ou 7 milliards à 10 milliards d'habitants. La demande pour le poisson croît. J'ai des contacts aux États-Unis et en Europe dans le domaine de la commercialisation. On vend plus de 2 millions de tonnes de filets de morue seulement aux États-Unis chaque année. Cet ami à moi est responsable de la mise en marché de la morue de la mer de Béring, et il vend 35 millions de livres de morue par année.
Alors tous ceux qui parlent de la prospection pour des marchés... Ce n'est pas une question de trouver des marchés, les marchés sont là. L'important, c'est une saine et solide gestion des pêches de façon à produire de bons poissons de taille acceptable pour le marché, de bonne qualité et à chair ferme, qui peuvent être transformés en bouchées de poisson panées, en longe de poisson, en queue de poisson et présentés dans une diversité d'emballages que l'industrie de l'alimentation, soit l'industrie du détail ou de la restauration, nous achète depuis des années et des années.
À une époque, nous étions le principal compétiteur de l'Islande et de la Norvège. En tant qu'intervenant dans le domaine de la commercialisation, laissez-moi vous dire que, parfois, nous nous réunissions et nous remportions des contrats avec des universités, devançant les Islandais et les Norvégiens. Je me souviens d'un contrat précis avec l'UCLA, en Californie, où il y a 80 000 étudiants sur le campus. Ils voulaient un produit précis. Ils nous ont tous donné la possibilité de leur fournir. Nous y avons consacré un an. Nous avons bâti des machines, produit des lignes de production de morues, et nous avons obtenu le contrat, à 20 sous au-dessus du prix courant en plus.
Mais c'est de l'histoire ancienne, parce qu'au cours de cette dégringolade, de 1965 à 1971, la taille de la morue documentée par les représentants du ministère des Pêches dans les usines de transformation a diminué, passant d'une moyenne de 4 livres à 2,2 livres. Les prises en mer pour un chalutier de 100 pieds, c'était un chalutier à pêche latérale dans ce temps-là, sont passées de 2 000 livres par heure de pêche à 880 livres. C'est l'histoire des pêches à Terre-Neuve.
Il faut du changement, et ce changement doit venir de la remise sur pied de nos capacités scientifiques. Il faut commencer maintenant. Un grand nombre de pêches visant diverses espèces et tout le reste doivent être bien évaluées afin que les gens n'y aillent pas au jugé, argumentant quant à savoir s'il y a 300 ou 500 tonnes ou je ne sais quoi. C'est le travail du MPO, pas du WWF. C'est un travail qui revient au MPO. Ce sont eux — les représentants du gouvernement — qui sont responsables en Norvège et en Islande. Ils ont refusé d'entrer sur le marché commun. Pourquoi? Pour protéger leurs pêcheries.
On m'a invité, avant le dernier vote en Norvège, à présenter quatre ou cinq discours à Hammerfest, dans le Nord et à Oslo, dans le Sud, pour leur faire part de notre expérience à Terre-Neuve. Je ne dis pas que mon exposé a eu un impact si important, mais c'est la dernière fois que la Norvège a voté pour ne pas se joindre au marché. Pourquoi? Parce que l'Espagne, le Portugal, la Russie et 20 autres pays convergeraient vers leurs zones de pêche et les mettraient à mal.
Merci, monsieur Johns.
Nous allons devoir nous arrêter ici. Vos sept minutes sont écoulées.
Monsieur Finnigan.
Merci, monsieur le président.
Je tiens aussi à remercier les témoins de la passion qu'ils ont insufflée à ce dernier groupe. Je vais commencer par M. Sullivan. J'arriverai ensuite à M. Etchegary.
Monsieur Sullivan, avez-vous dit que vous aimeriez avoir plus de quotas? Nous parlons des stocks qui diminuent et, aussi, comme le MPO l'a dit — mais M. Etchegary s'est inscrit en faux —, du fait que les poissons ne migrent pas très loin. Apparemment, nous sommes comme dans un bocal que nous contrôlons, mais, selon le MPO, les poissons ne migrent pas vers l'extérieur. Comment pouvez-vous expliquer que vous voulez un quota plus élevé alors qu'on constate une telle réduction des prises?
Les règles actuelles font en sorte que nous obtenons la permission de pêcher une certaine quantité de poissons par semaine. Nous ne le savons pas parce que nous n'avons pas encore vu la proposition, mais assumons que la pêche durera 20 semaines. On me permet donc de pêcher 3 000 livres de poissons par semaine, pour un total de 60 000 livres, mais je dois en pêcher un certain nombre par semaine. Vous comprenez?
Avant, nous avions nos quotas individuels, ce qui signifiait que j'avais droit à 60 000 livres et que je pouvais les pêcher en une semaine si je réussissais ensuite à les vendre à un marchand ou je ne sais quel autre acheteur. Ce devrait être mon droit. Si je veux m'arranger avec vous afin de pouvoir débarquer mon poisson sur deux semaines ou une semaine, cette décision ne devrait pas être imposée par les conditions de mon permis ou la politique du syndicat. J'ai la liberté d'essayer de négocier et de faire de l'argent.
Je ne demande pas plus de poissons. Le problème, c'est la façon dont le tout est attribué. Ils m'ont imposé une réglementation et ont dit que ce n'était pas différent des autres industries, comme l'industrie du lait ou je ne sais quoi. S'il y a autant d'argent là, qu'on pêche tout en une semaine ou en 20 semaines... C'est là où nous trouvons la situation problématique, le fait de ne pas avoir participé au processus et de ne pas avoir été consultés. Vous n'imaginez pas à quel point nous avons ressenti ça comme une gifle en pleine figure.
Je peux vous dire tout ce que vous avez besoin de savoir au sujet de la situation actuelle à Terre-Neuve. Je suis modérateur d'un groupe Facebook qui compte plus de 1 300 personnes. Honnêtement, c'est de là qu'une bonne partie des réactions négatives viennent. Si vous voulez savoir quelque chose au sujet des pêches à Terre-Neuve, je ne connais personne qui en sache autant que moi actuellement en ce qui a trait aux différentes zones et à tout le reste. Si vous voulez savoir ce qui est arrivé et de quelle façon nous nous sommes retrouvés dans un tel pétrin, cet homme ici vous le dira. Il n'est pas jeune, il a plus de 90 ans, et peut-être que Dieu le garde ici pour une raison, pour qu'il vous dise ce qui se passe ici et pourquoi c'est ainsi. Mais je vous garantis une chose: il sait de quoi il parle. Il sait pourquoi nous nous retrouvons ici et ce qu'il faut changer pour ne pas que l'histoire se répète.
Vous savez, lorsque vous négociez dans le cadre de l'AECG au sujet du RPM — l'élimination du RPM — c'est une blague. Le RPM est une blague, et il y a des lois provinciales et tout le reste. Ça n'a rien à voir avec vous. Nous lutterons contre le gouvernement provincial à ce sujet, mais nous aurions dû quitter l'OPANO. C'est là que nous perdons notre poisson. Nous n'avons pas le droit de le pêcher. Vous pouvez lire les graphiques et faire je ne sais quoi.
Vous avez peut-être une question pour Gus, alors je vais m'arrêter ici.
Monsieur Cleary, vous avez dit que le MPO a manqué... dans le domaine de la science et de la gestion. Avez-vous la même vision de l'histoire et du passé que celle que nous a racontée M. Etchegary ou avez-vous une opinion différente quant à la raison pour laquelle le ministère a manqué le bateau à ce sujet?
Non, je n'ai pas un avis différent. J'ai le même. M. Etchegary a écrit un livre il y a deux ou trois ans intitulé Empty Nets: How Greed and Politics Wiped Out The World's Greatest Fishery. Je l'ai aidé à écrire ce livre. C'est son livre, mais, non, c'est pas mal...
Pour ce qui est de ce qui s'est produit, l'histoire de la morue du Nord et là où nous en sommes aujourd'hui, je crois que ce livre devrait être considéré comme la bible de ce qui est arrivé aux pêcheries de Terre-Neuve-et-Labrador.
Merci.
Monsieur Etchegary, j'ai une dernière question pour vous.
Où nous en sommes aujourd'hui — à court terme, à long terme — , devons-nous faire une démonstration de force à la communauté internationale? Quels sont les leviers à notre disposition? C'est ce que je vous demanderais.
C'est très difficile. Le fait est qu'on pratique une pêche internationale à nos portes; or, et tant et aussi longtemps que... De deux choses l'une... Le gouvernement était réticent — pour des raisons liées au commerce et à d'autres pressions, je suppose — à exercer sa compétence là où il aurait dû le faire. Nous avons fait un compromis, ce que nous n'aurions probablement pas dû faire, et avons parlé de « gestion axée sur la conservation »: en d'autres mots, faire du Canada le gestionnaire de la pêcherie à l'extérieur de la zone, accordant des quotas à des étrangers fondés sur leurs rendements antérieurs.
Nous avons tout tenté avec le dernier premier ministre. Voilà qu'au lieu de nous donner satisfaction à cet égard, on tient une réunion de l'OPANO en Espagne, et une délégation formée de représentants du gouvernement et de l'industrie s'y rend et souscrit à des modifications de l'accord de l'OPANO qui fournirait aux pêcheurs étrangers la possibilité de revenir dans la zone de 200 milles. Il y avait aussi une autre condition dans l'article de l'accord de l'OPANO, appelée la « procédure d'opposition ». En d'autres mots, tout pays étranger pourrait pratiquer la surpêche comme bon lui semble. Le gouvernement et l'industrie avaient environ 50 ou 60 jours pour s'opposer à cette modification ou signaler une infraction ou quelque chose du genre. On a balayé cela du revers de la main, car, selon l'accord de l'OPANO, le gouvernement canadien peut inspecter les navires qui pêchent à l'extérieur de la zone ou, s'ils pêchent effectivement à l'intérieur de la zone, enregistrer des infractions au règlement en raison de surpêche ou d'autres raisons, mais c'est l'État du pavillon et uniquement celui-ci qui peut prendre des mesures punitives contre eux. Au cours des 30 dernières années, à ma connaissance, aucune mesure punitive n'a été prise contre la violente surpêche pratiquée.
Mais, je vais vous dire... Excusez-moi, juste une minute, c'est ma dernière déclaration...
C'est probablement la dernière fois que je comparais devant votre comité, mais laissez-moi vous dire une chose. La dernière fois que j'étais ici, il y avait des gens de Terre-Neuve qui s'opposaient au fait que le gouvernement introduise dans l'accord de l'OPANO une échappatoire qui permettrait aux pêcheurs étrangers de revenir dans la zone de 200 milles. Nous sommes allés au comité des pêches de la Chambre des communes ainsi qu'à celui du Sénat, et nous leur avons présenté notre exposé. Je dois dire que vos prédécesseurs étaient alarmés. Nous avions des experts du sujet. Incidemment, un de nos conseillers était négociateur en matière de pêcherie canadienne à l'ONU. Il a été prouvé à l'ONU qu'il s'agissait d'une affaire très grave. C'était le comité de la Chambre. Nous avons rencontré plus tard le comité du Sénat, et les deux comités ont convenu que l'affaire était grave.
Savez-vous ce qui s'est passé? Ils ont tous deux fait pression sur la Chambre pour qu'on tienne un débat de quatre heures, lequel a eu lieu, et amené à un vote sur ces modifications, à savoir si on devrait les accepter ou non. La Chambre a rejeté les modifications à 147 voix contre 142 . Vingt-quatre heures plus tard, le premier ministre et le ministre des Pêches ont communiqué avec l'OPANO et ratifié les modifications, alors je vous souhaite la meilleure des chances.
Je veux le dire encore une fois, monsieur Sullivan: je vais m'exprimer du fond du coeur. Je dois vous dire que, bien souvent c'est mieux que d'entendre des universitaires ou d'écouter des gens qui ont d'autres intérêts à cet égard. Je crois qu'il est préférable d'entendre directement les personnes qui sont sur le terrain. De toute façon, je suis un gars ordinaire. Je viens d'une famille vivant des industries forestière et agricole. Je ne sais pas exactement, il y a peut-être quelque personnes, — ou je suis peut-être le seul — dans le caucus actuellement qui savent ce que c'est de se lever à 2 heures, de démarrer une débusqueuse et de savoir aussi comment manipuler une tronçonneuse. Je suis de la classe ouvrière. Je comprends votre frustration et j'apprécie effectivement votre témoignage.
Je vais revenir sur ce que nous avons entendu à maintes reprises au cours des témoignages sur la valeur du capelan dans l'ensemble de cette pêcherie. Monsieur Etchegary, j'apprécie votre honnêteté et votre passion, mais c'est pour la table ronde. Si des recommandations concernant le capelan découlent de l'étude, est-ce qu'un moratoire sur le capelan serait soutenu ici afin que nous puissions rétablir ces stocks?
Chaque fois qu'on entend le mot « moratoire », on fait marche arrière. S'il y avait des signes appropriés et qu'il était démontré que la pêche devait cesser, il n'y aurait pas d'opposition de la part de pêcheurs. C'est notre gagne-pain. Nous ne voulons pas le détruire. Dans l'ensemble... On a quelques personnes blasées qui n'ont plus que deux ou trois ans d'activité avant de vendre leur bateau et qui ne se soucient pas de ce qui va se produire, mais la plupart des gens sont fiers de ce qu'ils ont accompli et veulent que la pêche continue. Si c'est le cas... Et je ne crois pas que le stock de capelan est dans une situation si désastreuse, parce que, bien souvent, le capelan ne vient pas près des côtes. Il peut demeurer au large, et le fait est que personne ne l'a étudié. S'il y avait une recommandation et que c'était le cas, alors il est difficile de ne pas tenir compte de données scientifiques fiables.
D'accord, c'est probablement plus que suffisant. Selon nos trois témoins, la gestion des stocks de capelan permettrait-elle d'amener ces stocks à un niveau stable, ou s'agit-il simplement d'une question de conditions environnementales?
De mon point de vue, la leçon la plus importante que les membres du Comité peuvent retenir — lorsqu'ils quitteront Terre-Neuve, St-Jonh's, l'île Fogo et Port de Grave —, c'est que le MPO ne fait pas son travail. Le gouvernement du Canada ne fait pas son travail relativement à la gestion et à la science. Les scientifiques sont absents. Le travail scientifique n' est pas accompli. Les navires ne sont pas disponibles à des fins scientifiques. Le travail n'est pas fait.
On dit que le plus important changement apporté à la gestion des pêches au cours des 24 dernières années — depuis le moratoire sur la morue du Nord — a été l'élimination de la turlutte à deux hameçons.
D'accord, je veux revenir à ma question, si c'est possible. Sommes-nous en mesure de gérer le capelan ou est-ce que, sur le plan environnemental...
Je réponds à votre question en disant que nous ne possédons pas tout simplement pas le savoir scientifique requis pour répondre à votre question concernant le capelan.
Selon toutes les données probantes, le stock de capelan est surpêché, mais ce n'est pas suffisant. On devrait affecter des ressources scientifiques à l'étude de cette question. Ensuite, si c'est démontré, comme le dit monsieur, alors on le fait. Pourquoi satisfaire quelques Japonais avec les oeufs de capelan et tuer des milliers de capelan mâles qui sont inutiles au processus? C'est une question à laquelle on n'a jamais répondu.
Monsieur le président, si vous me le permettez... Je crois que nous en sommes à la fin, n'est-ce pas?
Il nous reste une question et quelques minutes, alors si vous nous le permettez, nous allons passer à M. Johns.
Vouliez-vous dire quelque chose?
Oui, je n'ai qu'une phrase à ajouter, et c'est la suivante.
Tant et aussi longtemps que la gestion des pêches ne s'améliore pas et que le MPO ne remplit pas son mandat de rebâtir la capacité scientifique et de gérer les pêches jusqu'à ce qu'elles soient en santé, je crois que nous avons de graves problèmes; or, je ne crois pas que cela se produira avec la structure actuelle.
Le ministre des Pêches... Je vais vous donner un exemple...
Après toutes les années où nous avons souffert de la surpêche pratiquée par des étrangers, enfin, on a repoussé les limites territoriales — 200 milles —, et nous nous sommes débarrassés des pêcheurs étrangers. Dieu merci. La morue du Nord et les autres poissons auraient maintenant une chance de se rétablir.
Six mois plus tard, après avoir repoussé les limites territoriales, notre ministre des Pêches a offert une subvention de 23 800 $ par voyage de chalutier pour les chalutiers canadiens afin qu'ils recommencent à pêcher au large des côtes du Labrador. Cela vous donne une idée de certaine des décisions qui ont été prises.
Je comprends certainement le fait de ne pas avoir de gens sur le terrain. On peut parler des compressions au MPO. M. Etchegary nous a présenté un portrait assez détaillé de la situation, et c'est certainement la même chose sur l'île de Vancouver pour ce qui est de la façon dont cela nous touche.
Monsieur Cleary, vous avez parlé un peu d'application de la loi et expliqué comment la situation touche celle-ci. Voulez-vous parler de cela et de la façon dont les stocks sont touchés?
Je peux développer le point de M. Etchegary au sujet du fait que l'imposition de pénalités ou de mesures disciplinaires à un navire étranger qui se fait prendre à pêcher illégalement à l'extérieur de la limite de 200 miles relève du pays d'origine du navire. Lorsque les gens de Terre-Neuve-et-Labrador, déposent une demande d'accès à l'information pour découvrir quelles sont exactement les pénalités écopées par les Espagnols, les Portugais ou quiconque est accusé de pêche illégale, la réponse du gouvernement du Canada est qu'il ne divulguera pas l'information. La raison pour laquelle il refuse de la divulguer, c'est que cela pourrait mettre à mal les relations internationales.
Ma réponse à cela? Eh bien, j'aimerais savoir à quel moment les relations avec Terre-Neuve-et-Labrador l'emportent sur toutes les autres?
Pour ce qui est de l'application de la loi à l'extérieur de la limite de 200 miles, M. Etchegary a mentionné la procédure d'opposition. Si un pays membre de l'OPANO n'est pas d'accord avec un quota, il peut s'y opposer et fixer son quota unilatéralement. La morue du Nord est un poisson migrateur, on le trouve à l'intérieur de la limite de 200 miles de même qu'à l'extérieur de celle-ci. Les poissons ne reconnaissent pas les lignes imaginaires dans la mer, et l'OPANO — Jason l'a mentionné plus tôt — est totalement inutile. Elle n'a pas de pouvoir. Elle n'a pas la capacité de gérer les quotas qu'elle établit.
Oui, je suis d'accord avec lui. Notre chef syndical a siégé à l'OPANO. Il est commissaire depuis 19 ans, et c'est ce que nous avons obtenu de mieux de la part de celle-ci. Nous avons 15 % de notre turbot, vous savez. C'est un poisson payant. Si nous avions les 100 millions de livres que les pêcheurs étrangers pêchent, imaginez l'ampleur de l'injection d'argent que cela représenterait dans les régions rurales de Terre-Neuve. De voir quelqu'un voyager 3 500 miles pour pêcher le turbot, alors que les gars de l'île Fogo n'ont qu'à faire 30 miles pour l'attraper, c'est difficile à avaler.
Lorsque M. Etchegary parle — c'est la première fois que je le rencontre —, on commence à en avoir assez — c'est mon cas — du moins parce que cela ne se produirait pas ailleurs. Cela n'arriverait pas au Québec ou ailleurs où vous avez beaucoup de sièges. Il y a sept sièges à Terre-Neuve, alors essentiellement... Je sais comment la politique fonctionne. Je me trouve à l'échelon municipal, et c'est la même chose. Vous devez aller où vous aurez tous les votes et faire ce qu'on attend de vous et toutes ces choses, mais parfois, vous savez quoi? On doit se lever et défendre ses principes.
Merci. C'est bien de vous voir défendre vos principes. Vous le faites. Nous sommes avec vous, monsieur Sullivan.
Messieurs, merci beaucoup.
Monsieur Sullivan, merci de nous avoir fait bénéficier de vos commentaires sincères.
Monsieur Cleary, merci de votre expérience.
Bien sûr, monsieur Etchegary, merci pour votre expérience et votre contribution ici aujourd'hui dans le cadre de votre témoignage. Nous l'apprécions vraiment. Merci encore une fois.
La séance est levée.
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