FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
Comité permanent des pêches et des océans
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 12 juin 2019
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous recevons ici aujourd'hui plusieurs témoins concernant notre étude sur la mise en œuvre au Canada d'un cadre sur les réserves d'habitats créées par des tiers. Nous recevons deux personnes par vidéoconférence, et une en personne.
Par vidéoconférence, nous accueillons Marian Weber, professeure, Département de l'économie des ressources et de la sociologie de l'environnement, Université de l'Alberta. Bienvenue.
Nous recevons également M. David Poulton, directeur principal de Poulton Environmental Strategies Inc. Il est aussi avec nous par vidéoconférence.
En personne, nous accueillons un témoin qui est bien connu de nous tous, les Terre-Neuviens — ainsi que des gens du continent, comme nous le disons —, l'honorable sénateur David Wells.
Je vous remercie tous les trois d'être ici, par vidéoconférence et en personne.
Nous allons commencer par les exposés de nos témoins. J'aimerais que l'on commence par la vidéoconférence, au cas où il y aurait un problème de connexion.
Madame Weber, quand vous êtes prête, s'il vous plaît, vous avez sept minutes ou moins.
Merci de m'avoir invitée à témoigner sur la faisabilité de réserves d'habitats créées par des tiers au Canada. Je suis chercheure à Alberta Innovates et professeure adjointe à l'Université de l'Alberta, et je m'exprime à titre personnel.
Aujourd'hui, j'aimerais décrire les composantes clés d'un cadre sur les réserves d'habitats créées par des tiers, d'abord en fournissant un résumé de haut niveau de l'historique et des avantages de telles réserves; ensuite, en illustrant les éléments souhaitables d'un cadre au moyen de deux études de cas; enfin, en résumant les leçons tirées de ces études de cas et les répercussions pour les réserves d'habitats par des tiers dans le cadre du projet de loi C-68.
Pour commencer, voici un bref historique de la mise en place de réserves, qui a découlé de l'Endangered Species Act et de la Clean Water Act des États-Unis, il y a 40 ans.
En vertu de la Clean Water Act, la mise en réserve de terres humides prévoit trois mécanismes de compensation: l'atténuation dont est responsable le titulaire, la mise en réserve par des tiers et les mesures d'atténuation sous forme de frais tenant lieu de compensation. Depuis 2008, on a accordé la priorité à ces options, et les réserves créées par des tiers ont été l'option privilégiée, suivie par les mesures d'atténuation sous forme de frais tenant lieu de compensation. Les mesures d'atténuation prises par des tiers est l'option privilégiée étant donné l'amélioration de la surveillance et des résultats écologiques.
Les frais tenant lieu de compensation et les réserves sont des mécanismes relevant des tiers. La différence, c'est que pour les frais tenant lieu de compensation, les promoteurs versent des droits à un agent, et le développement a lieu avant la restauration. La mise en réserve est associée à une restauration initiale, et les crédits sont vendus à des entreprises avant le développement. On peut privilégier les frais tenant lieu de compensation quand il y a peu d'acheteurs possibles, mais ils ont aussi été l'objet de critiques en raison d'une lacune sur le plan redditionnel.
Le programme de compensation des milieux humides de l'Alberta, avant 2013, était un exemple de programme de frais tenant lieu de compensation mal administré, où les frais liés à la compensation des milieux humides étaient versés à Canards Illimités, et la reddition de comptes pour ce qui est d'associer les paiements aux pertes et aux gains en terres humides était limitée. Le programme a été critiqué par le vérificateur général de l'Alberta et il a évolué depuis ce moment pour devenir plus transparent.
La première étude de cas que j'aimerais mettre en lumière est le Biodiversity Offsets Scheme de la Nouvelle-Galles du Sud. Dans le cadre de ce système, les atteintes à la biodiversité attribuables au développement sont compensées au moyen d'ententes territoriales privées permanentes. Avant 2016, le système de compensation était connu sous l'appellation BioBanking. Il s'agissait d'un programme volontaire exécuté parallèlement à des compensations réglementées. Le Biodiversity Offsets Scheme s'est associé aux programmes réglementés et volontaires pour stimuler les investissements et assurer la normalisation et la responsabilisation.
Les éléments cruciaux du Biodiversity Offsets Scheme sont le Biodiversity Conservation Trust et le système de gestion et de compensation des atteintes à la biodiversité. Le premier, la fiducie pour la conservation, est un organisme sans but lucratif créé par une loi qui administre le programme de frais tenant lieu de compensation. Son rôle est de fournir les compensations au moyen d'accords avec les propriétaires fonciers. Le système de gestion et de compensation des atteintes à la biodiversité établit des rôles normalisés pour l'enregistrement et l'échange de crédits et comprend un outil d'évaluation en ligne fondé sur des données scientifiques qui est utilisé par les propriétaires fonciers et les promoteurs afin qu'ils évaluent les obligations de crédit avant la conclusion d'accords.
Un aspect unique des compensations touchant les pêches, c'est que bon nombre des activités qui causent des dommages au poisson ont lieu sur des terres publiques et sont de nature temporaire. Les compensations versées par des tiers exigeraient un certain type de perturbation des terres publiques et des cours d'eau.
Ces questions sont examinées dans le deuxième exemple, le programme de compensation des tétras pâles des États-Unis, un programme multi-États qui vise à améliorer l'habitat grâce à une combinaison d'accords compensatoires permanents et temporaires. Leur durée varie de 5 à 10 ans.
L'accent qui est mis sur les sites mobiles reconnaît explicitement la nature temporaire de nombreux projets de développement dans les activités d'amélioration de l'habitat. Les crédits sont regroupés sous un plan de conservation à grande échelle, qui tient explicitement compte de la dynamique des activités temporaires et permanentes au cours des 50 prochaines années.
Pour résumer, j'aimerais mettre en évidence deux leçons tirées de ces études de cas.
La première, c'est la nécessité d'établir un organisme chargé de la surveillance et de la reddition de comptes appropriées concernant l'administration du système de compensation. Cet organisme devrait rendre des comptes aux organismes de réglementation, mais de manière indépendante afin que l'on s'assure qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts.
Ensuite, les deux programmes illustrent l'importance de mesures et de systèmes normalisés qui s'appliquent à toutes les compensations, qu'elles soient dirigées par des promoteurs ou concernent des réserves de tiers ou des frais tenant lieu de compensation.
En conclusion, les cadres d'habitats de tiers ont été mis en place dans d'autres administrations et sont faisables au Canada.
Une de mes préoccupations relativement aux compensations prévues par le projet de loi C-68, c'est qu'elles sont évaluées au cas par cas, et les promoteurs utilisent des méthodes différentes. J'inviterais le Comité à évaluer la nécessité de mettre en place des systèmes administratifs et des protocoles d'évaluation normalisés encadrés par un plan de conservation des pêches.
La mise en place des compensations par des tiers est un élément crucial d'un programme de compensation réussi. Le fait de n'en pas tenir compte dans le projet de loi C-68 pourrait nuire au développement des infrastructures administratives nécessaires pour un programme de compensation crédible et efficace pendant plusieurs années.
Merci.
Merci, madame Weber.
Nous allons maintenant passer à M. Poulton, pour sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président, et mesdames et messieurs.
Je m'appelle David Poulton et je suis directeur principal de Poulton Environmental Strategies Inc., une petite société d'experts-conseils ici, à Calgary. Je suis aussi directeur de l'Alberta Land Institute, un institut de recherche sur les politiques d'aménagement du territoire à l'Université de l'Alberta, et je suis directeur exécutif de l'Alberta Association for Conservation Offsets, un forum multilatéral qui vise à faire avancer la réflexion sur les compensations en Alberta. Toutefois, j'aimerais dire clairement que tous mes commentaires sont les miens propres et ne représentent pas nécessairement ceux des membres des groupes auxquels je suis affilié ou des groupes eux-mêmes.
Sous sa forme originale, le projet de loi C-68 comprenait des dispositions sur des arrangements concernant des réserves, où le promoteur de projet de développement pouvait s'attacher à prendre des mesures de conservation afin de produire des crédits d'habitat, puis mettre en réserve ces crédits en vue de les échanger contre des obligations de compensation futures dans des projets de développement futurs. C'est abordé dans l'article 42.01 proposé, et je suis sûr que les membres du Comité en sont bien au courant.
C'est ce qu'on connaît sous le nom mise en réserve de la première partie, parce que la partie qui crée et met en réserve les crédits est la même que celle qui finit par les utiliser. C'est aussi ce que l'on désigne comme la mise en réserve personnelle ou, dans certains des documents, la mise en réserve des promoteurs.
La mise en réserve de la première partie se produit de manière sélective depuis plusieurs années au titre de la Loi sur les pêches existante. En grande partie, elle s'est limitée à quelques promoteurs ayant des projets répétitifs ou continus qui ont besoin d'un échange de mesures de compensation. Je présume que les membres du Comité ont eu vent du rapport de SENES Consultants, paru il y a quelques années, qui examinait ces arrangements.
J'ai des commentaires sur la mise en réserve de façon générale puis sur la mise en réserve de tiers, et certaines suggestions quant à la façon dont nous pourrions nous lancer dans ces activités. Dans mes commentaires, je devrais préciser que je souscris entièrement à tout ce que Mme Weber a dit relativement à l'administration des réserves, et je ne voudrais pas que mes commentaires soient perçus comme discréditant ses propos.
Pour ce qui est de la mise en réserve de façon générale, il est généralement reconnu qu'elle offre trois avantages par rapport aux compensations dirigées par des promoteurs et aussi aux frais tenant lieu de compensation.
D'abord, ce qui la distingue vraiment, c'est qu'elle permet l'élaboration et l'arrivée à maturité de mesures de compensation avant le projet de développement correspondant.
Un problème courant dans les accords compensatoires, c'est qu'il y a un décalage entre les répercussions négatives du développement et les répercussions positives des compensations. Par rapport aux mises en réserve, les compensations précèdent le développement, et par conséquent, les aspects négatifs peuvent être réduits au minimum ou même renversés. Parce que c'est fait à l'avance, cela permet de s'assurer que les mesures de conservation réussissent réellement à atteindre leurs objectifs, atténuant ainsi le risque d'un certain échec de la mesure de compensation, quand il est trop tard pour rendre des comptes à cet égard dans le processus de développement.
Enfin, puisque la mise en réserve des crédits de compensation accumulés se fait de manière proactive, elle offre une occasion de faire correspondre ces mesures avec une planification d'aménagement du territoire et des espèces afin de rechercher des priorités stratégiques, quelque chose qui pourrait ne pas se produire si les mesures de compensation sont prises de manière ponctuelle, où les promoteurs conçoivent chacun leurs propres mesures particulières.
Je vais maintenant passer aux réserves créées par des tiers.
Les amendements qui sont actuellement à l'étude élargiraient les réserves d'habitats pour inclure les tiers créateurs, ceux qui n'ont pas l'intention d'utiliser des crédits pour des projets de développement en soi. Cela ouvre la perspective d'une communauté de promoteurs de réserves d'habitats du poisson professionnels dont le modèle d'entreprise repose sur la création d'habitats du poisson aux fins de la génération de crédits d'habitats pour la vente commerciale. Par conséquent, une communauté détenant l'expertise et l'efficacité nécessaires pourrait procéder aux activités de restauration, d'amélioration et de création d'habitats.
De plus, je crois que l'objectif, c'est que plusieurs réserves de crédits soient offertes à tout moment dans une région, ce qui ferait pression sur la compétition et le marché pour ces créateurs d'habitats afin qu'ils soient rentables et produisent du travail de qualité.
Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, je suis certainement en faveur des amendements concernant la création de réserves par des tiers. Toutefois, je comprends que le ministère est préoccupé par l'ampleur de l'infrastructure stratégique et administrative que les réserves de tiers pourraient exiger. J'aimerais offrir quelques suggestions à cet égard.
Encore une fois, j'appuie la suggestion de Mme Weber selon laquelle un organisme devrait être responsable de cela, posséder des mesures normalisées et ainsi de suite, et je crois que nous pourrions adopter quelques mesures provisoires à court terme pendant la création de cette infrastructure.
Cependant, même si la mise en œuvre intégrale est retardée, l'adoption des modifications constituerait un signal important pour le ministère et le gouvernement du Canada dans son ensemble: la création de réserves d'habitats est une voie à suivre, et des ressources devraient être consacrées à leur mise en œuvre.
Ma première suggestion est que nous nous tournions vers les États-Unis pour savoir comment un régime pourrait être mis au point. Les États-Unis ont mis en place un régime de réserves de zones humides depuis plus de 30 ans, mais il est important de noter que, pendant une grande partie de cette période, il était mis en œuvre ponctuellement et de façon relativement informelle. En fait, il n'a été officialisé dans un ensemble de règlements fédéraux qu'en 2008. Auparavant, le régime était mis en œuvre en grande partie en fonction de pratiques acceptées de manière informelle dans les bureaux régionaux de l'Army Corps of Engineers des États-Unis. À mesure que ces pratiques se sont multipliées, avec une dépendance accrue envers les arrangements concernant la mise en réserve, les autorités fédérales ont jugé important de fournir des directives uniformes dans le but d'assurer la cohérence au sein du régime.
Cet exemple indique que ce type d'activité peut avoir lieu à petite échelle et de façon relativement informelle, à condition qu'on accepte l'idée qu'un crédit d'habitat est un élément d'actif transférable et non quelque chose qui est lié à un promoteur ou un projet en particulier.
Ma deuxième suggestion est que nous pourrions, avant de nous jeter à l'eau — sans mauvais jeu de mots —, permettre aux premières parties qui créent des réserves — celles qui existent actuellement ou qui sont envisagées dans la nouvelle législation — de transférer leurs crédits à des tiers. Il s'agirait d'autres promoteurs de la région où les premières parties exercent leurs activités, et ces tiers auraient besoin de crédits pour atténuer et compenser leur propre impact.
Pourquoi est-ce que je formule cette suggestion? Les premières parties qui créent des réserves que nous avons ou que nous envisageons sont probablement des entités bien établies et complexes qui sont bien connues dans leurs régions et qui entretiennent des relations suivies avec le ministère des Pêches et des Océans. À ce titre, elles sont susceptibles de constituer une source d'information pour les autres acteurs de la région qui cherchent peut-être à résoudre leurs problèmes de pêche. Nous avons déjà un processus pour certifier que les crédits des premières parties sont valables et négociables. Ce processus existe et peut encore évoluer. Il suffit alors de leur permettre de transférer des crédits et, inversement, d'accepter les crédits transférés comme valides lorsque les tiers bénéficiaires présentent les crédits en vue de les utiliser.
Ce processus relativement informel nous permettrait d'avoir une première idée de l'origine de la demande de crédits, de la manière dont les acheteurs et les vendeurs peuvent établir efficacement des liens, du mode de transfert éventuel et des problèmes susceptibles de survenir lors du transfert des crédits. Au fur et à mesure que ces problèmes se posent, nous pouvons effectivement les traiter grâce à un cadre réglementaire.
Je crois comprendre que Port Metro Vancouver est actuellement la seule première partie qui crée des réserves à être autorisée à transférer ses crédits. Je ne sais pas si cela a déjà été fait, mais cela indique que le modèle a été envisagé et qu'il existe peut-être une expérience à cet égard dont je ne suis pas personnellement au courant.
Je veux simplement souligner quelques points supplémentaires. D'abord, en autorisant la création de réserves d'habitats par des tiers, les dispositions législatives créeraient effectivement des crédits d'habitats transférables en tant que nouvelle forme d'élément d'actif échangeable, dont la valeur réside dans le respect des exigences réglementaires en matière de compensation.
Ensuite, comme l'a indiqué Mme Weber, cela s'accompagne de certaines attentes: le crédit doit être garanti par un régime assurant son rendement sur le plan environnemental et établissant une certaine responsabilité visant à garantir la concrétisation du rendement.
De plus, nous avons besoin d'un régime clair pour établir à quel moment un crédit existe réellement et à quel moment il est utilisé et s'éteint afin qu'il n'y ait pas d'ambiguïté au sujet de ce qui constitue ou non un crédit valide.
Le meilleur moyen d'y parvenir consiste peut-être à utiliser un registre, une approche souvent utilisée pour les formes immatérielles de biens. En effet, la loi prévoit un registre des projets en vertu de la Loi sur les pêches. Elle ne précise pas qu'il contiendrait des renseignements concernant la création de réserves et les crédits, mais je pense que si c'était le cas, ce serait un outil très précieux pour valider le processus.
Sur ce, je pense que je vais conclure mes commentaires. J'ai hâte d'entendre les membres du Comité en temps voulu.
Merci, monsieur Poulton.
Nous allons maintenant passer au sénateur Wells pour sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Bon après-midi, chers collègues.
Je tiens tout d'abord à remercier le président et les membres du Comité de m'avoir invité à parler aujourd'hui de la mise en place de réserves d'habitats créées par des tiers dans le contexte canadien.
Cela ne faisait pas partie de mes notes d'allocution, mais je pense qu'il est important que je sois ici, et pas seulement en tant que sénateur qui a proposé des amendements sur la mise en place de réserves d'habitats créées par des tiers et les a fait accepter au Sénat. J'ai également comparu devant le comité des pêches de la Chambre auparavant à titre d'expert en la matière, et je compte 35 années d'expérience dans le domaine des pêches, dans le cadre de la gestion des usines de transformation du poisson. J'ai été chef de cabinet et directeur des politiques au MPO et j'ai rédigé plus de 100 rapports techniques sur la pêche. J'ai une expérience directe des réserves d'habitats et je suis également membre de l'équipe du Canada au sein de la délégation auprès de l'OPANO.
Vous le savez sûrement, le Sénat a récemment adopté le projet de loi C-68, avec des modifications visant à étendre les réserves d'habitats à des tiers, à mettre en place un système de paiement compensatoire et à garantir que les avantages des réserves d'habitats demeurent à l'échelle locale par rapport à un ouvrage, une entreprise ou une activité.
J'aimerais saisir l'occasion aujourd'hui pour exhorter le Comité à recommander l'adoption de ces modifications.
Je sais que le Comité étudie simplement la possibilité de mettre en œuvre des réserves d'habitats créées par des tiers à l'avenir, mais je tiens à préciser que le projet de loi C-68 pourrait être la seule occasion permettant que cela soit fait correctement et dans un délai raisonnable.
La Loi sur les pêches est l'une des plus anciennes lois du Canada, entrée en vigueur juste après la Confédération. Lorsque cette loi est modifiée, le processus est assez long, comme le montrent actuellement le projet de loi C-68 et toutes les autres tentatives visant à faire adopter des mesures législatives concernant la Loi sur les pêches.
Je pense que nous reconnaissons et comprenons tous les complexités inhérentes à l'instauration d'un régime efficace de réserves d'habitats créées par des tiers au Canada. Toutefois, chers collègues, ces complexités sont non pas législatives, mais réglementaires. Les amendements apportés au projet de loi C-68 n'entrent en vigueur qu'après la proclamation du Cabinet et non avec la sanction royale, comme c'est le cas habituellement. Ainsi, le MPO et les organismes fédéraux compétents auraient le temps de bien faire les choses afin que rien ne soit imposé au public canadien sans que tout soit prêt, et je pense que c'est un point important à souligner.
Ce que le Sénat recommande en ce qui concerne les amendements touchant les réserves d'habitats, c'est le travail préliminaire visant à préparer le terrain afin que le MPO puisse mener de vastes consultations et adopter des règlements appropriés. Cela pourrait prendre plus de un an, deux ou cinq ans, quel que soit le temps requis pour mettre en place un régime fondé sur les meilleures pratiques internationales et générant les meilleurs résultats écologiques et économiques possible.
Les réserves d'habitats créées par des tiers n'ont rien de nouveau. D'autres pays, dont les États-Unis, ont déjà mis en place de tels régimes, qui fonctionnent très bien.
Le débat international sur le sujet ne concerne pas la question de savoir si les réserves d'habitats créées par des tiers devraient être autorisées au sein d'une administration; il s'agit de la façon dont les règlements devraient être conçus et administrés.
L'inclusion de groupes tiers dans un régime de réserves d'habitats présente des avantages substantiels, tout comme le coût lié à l'exclusion de ces groupes.
L'élargissement du régime de réserves d'habitats donnerait lieu à une toute nouvelle économie liée à ce régime qui créerait des emplois, favoriserait l'innovation et encouragerait une protection de l'environnement accrue et de meilleure qualité.
Les promoteurs — et actuellement dans la législation, ce ne sont que des promoteurs — n'ont pas tous les ressources ou les connaissances nécessaires pour créer une compensation physique. Selon un régime de réserves d'habitats créées par des tiers, comme les témoins vous l'ont dit, les promoteurs seraient en mesure d'acheter un crédit d'habitat au lieu de concevoir et de construire leur propre compensation physique. La compensation doit toujours être créée, mais sous le régime de réserves d'habitats créées par des tiers, elle pourrait l'être par un groupe possédant une expertise spécifique en matière de conservation. Dans ces cas, le promoteur financerait essentiellement la construction d'une compensation physique améliorée. Cela ne remplacerait pas les mesures d'atténuation requises au titre de la protection de l'environnement d'un projet donné.
Les réserves d'habitats créées par des tiers constituent un gain pour l'industrie et pour l'environnement. Les entreprises n'auront pas à détourner leur attention des aspects fondamentaux de leur activité et des emplois qui en découlent. Tout ce qu'elles ont à faire, c'est d'acheter le crédit pour la réserve d'habitat établi par un groupe tiers et, bien sûr, les mesures d'atténuation requises.
Avec un nouveau marché pour les crédits, les tiers sont incités à se joindre au programme de réserves d'habitats, ce qui donne lieu à une protection supplémentaire du milieu.
Qui sont ces groupes tiers? Ces tiers comprennent, mais sans s'y limiter, des groupes autochtones, des groupes de spécialistes de la conservation comme Canards Illimités, des défenseurs des zones humides, des entreprises du secteur privé et des municipalités. Toutes ces parties, chers collègues, n'ont actuellement pas droit à la protection du promoteur qui découle d'une autorisation. Lorsque nous disons que seul un promoteur peut créer une réserve d'habitat, comme le projet de loi C-68 l'a fait avant qu'il soit modifié au Sénat, nous excluons délibérément des groupes qui ont une expérience directe de la protection de notre environnement.
Ces intervenants veulent tous être sur les lignes de front de la restauration et de l'amélioration de l'habitat, et ils devraient l'être. C'est pourquoi les amendements que j'ai proposés au Comité visant à étendre les réserves d'habitats à des tiers, qui bénéficiaient d'un large soutien de la part de tous les groupes et caucus du Sénat, jouissaient également du soutien d'un éventail d'intervenants. Des ONG à vocation environnementale et des groupes de l'industrie comme l'Ontario Waterpower Association et l'Association canadienne des traversiers, par exemple, ainsi que des Premières Nations, des municipalités, des offices de protection de la nature et des organismes des gouvernements provinciaux souhaitent que l'extension du régime de réserves d'habitats à des tiers devienne loi. Les amendements du Sénat dans le projet de loi C-68 concernant les réserves d'habitats créées par des tiers sont des amendements intersectoriels et raisonnables du point de vue de la mise en œuvre, étant donné que le MPO aura amplement le temps de mener de vastes consultations et d'appliquer le régime.
Je veux aussi clarifier quelque chose aux fins du compte rendu. Comme beaucoup d'entre vous le savent, j'ai voté contre le projet de loi C-68 à l'étape de la troisième lecture au Sénat. J'ai voté ainsi, car d'autres aspects du projet de loi n'avaient absolument aucun lien avec les réserves d'habitats, et je ne pouvais pas les appuyer. Le projet de loi C-68 est un projet de loi omnibus sur les pêches et, comme je l'ai dit lors de mon discours à l'étape de la troisième lecture au Sénat, il aurait dû être divisé en différents projets de loi traitant d'aspects substantiellement différents de la Loi sur les pêches.
Chers collègues, je suis ravi que nous ayons l'occasion de discuter des changements positifs apportés au projet de loi et de la manière dont ils peuvent être mis en œuvre au Canada. Le régime de réserves d'habitats créées par des tiers est un parfait exemple d'une solution du secteur privé à des défis environnementaux. Le régime est financé par le secteur privé et est appliqué par des groupes de spécialistes dans le domaine de la préservation de l'environnement et du milieu.
J'espère que le Comité et même l'ensemble de la Chambre des communes profiteront de cette occasion pour permettre aux travaux entourant le règlement de concrétiser le régime de réserves d'habitats créées par des tiers le plus tôt possible.
Je vous remercie.
Merci, sénateur Wells.
Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par les représentants du gouvernement. Je crois comprendre que M. Morrissey allait commencer; nous allons donc passer au deuxième représentant. Monsieur Rogers, vous avez sept minutes ou moins, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Poulton, j'ai quelques questions concernant votre exposé. Pouvez-vous nous parler des autres administrations desquelles nous pouvons tirer des leçons en ce qui a trait aux réserves d'habitats?
J'ai aussi deux questions complémentaires. Depuis combien de temps le régime de réserves d'habitats est-il en place dans ces administrations? Pouvez-vous aussi nous parler de certaines des complexités législatives liées aux régimes de réserves d'habitats?
Assurément, plusieurs États australiens en ont fait l'expérience. Je connais également les systèmes en place en Europe. Toutefois, je dois reconnaître que je n'ai pas étudié en détail les mesures législatives qui ont permis la mise en place des réserves d'habitats.
L'État que je connais le plus, Victoria, en Australie, a mis en place un régime de réserves d'habitats pour la végétation indigène. Il y a eu plusieurs versions. Sur le plan législatif, le régime était assez simple. Il était fondé sur une politique selon laquelle un permis était nécessaire pour détruire toute végétation indigène, et la politique relative au permis prévoyait un engagement à ne causer aucune perte nette, un peu comme le prévoit notre politique depuis plusieurs années en ce qui a trait aux pêcheries. L'État a ensuite présenté un système pour la classification des différents types de végétation dans les diverses régions de Victoria, ainsi que pour l'établissement de crédits destinés aux tiers et le commerce entre les parties.
Le rendement a varié avec les différentes modifications du système. D'une certaine façon, il était trop complexe au départ; la distinction était très subtile entre les différentes communautés végétales, ce qui a mené à un certain nombre de marchés très restreints. Puis, un changement de la situation politique a mené à une grande expansion du régime de classification. Je ne sais pas exactement ce qu'il est devenu, mais d'après les premières critiques que j'ai entendues, il était peut-être trop vaste; il était conçu pour encourager de grands marchés, mais était inapproprié sur le plan écologique.
Je pense que cela fait ressortir un enjeu majeur en ce qui a trait au projet: il faut mettre en place un système géré de manière efficience qui encourage la participation du secteur privé tout en respectant les normes environnementales. C'est un équilibre difficile à établir. Il se peut qu'on ne réussisse pas immédiatement à trouver un équilibre au moment de concevoir un système, mais cela met en relief la nécessité d'examiner et d'améliorer le système en permanence. Cela ne devrait pas nous dissuader d'explorer les façons d'y parvenir dans la mesure du possible en temps donné.
Aux États-Unis, le processus semble assez complexe. Les dispositions législatives sur les réserves d'habitats font plus de 100 pages. À quel point le système américain est-il complexe par rapport à celui de Victoria dont vous parlez?
Avec tout mon respect, monsieur, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une comparaison juste. Les dispositions législatives américaines sont un ensemble de règlements qui couvrent toute une série d'outils et de principes de compensation. Elles englobent l'administration des frais tenant lieu de compensation, les réserves d'habitats mises en place par des promoteurs de projet et ainsi de suite, et bon nombre de ces 100 pages comportent des commentaires venant du corps des ingénieurs et de l'agence de protection de l'environnement au sujet de la mise en œuvre.
Le système américain en lui-même est — et je dis cela avec une certaine prudence — raisonnablement simplifié, en ce sens qu'une partie qui souhaite faire la promotion d'une réserve d'habitats présente une proposition initiale aux corps des ingénieurs énonçant son idée et son intention, y compris un budget et un plan d'activités. La proposition est examinée par un comité multipartite. Le comité — j'ai oublié le sigle — réunit différents organismes qui peuvent être touchés par le projet.
C'est à cette tape que l'approbation de principe est essentiellement donnée. On demande un plan plus détaillé, puis la mise en œuvre de ce plan est surveillée, et les approbations et les accréditations sont données à mesure que les différents seuils sont atteints et les différentes étapes, terminées.
C'est un système qui semble fonctionner. Il y a littéralement des centaines et des centaines de réserves d'habitats sous le régime du système de pêche américain, et des crédits sont vendus régulièrement. Cela semble fonctionner.
Je vous remercie de cette comparaison et de ces précisions.
Des préoccupations ont également été soulevées à propos de questions de compétence. Quels groupes et quelles collectivités autochtones est-il important d'inclure à la conversation, selon vous?
Je pense que ce sont des préoccupations essentielles au sein des collectivités en ce qui a trait au développement dans ce domaine. Je pense que le sénateur Wells a parlé des possibilités que la création de réserves d'habitats par des tiers pourrait entraîner pour des municipalités et des groupes autochtones. Pour tout système de compensation, il est important que ces collectivités, qui sont les intervenants du milieu, soient longuement consultées en ce qui a trait à tout changement touchant l'utilisation des terres, que ce soit pour les retombées économiques ou à des fins environnementales, et qu'on leur donne la possibilité de participer et de bénéficier des avantages.
Merci, monsieur Rogers.
Nous allons passer du côté des conservateurs. Monsieur Doherty, vous avez la parole pour sept minutes ou moins.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos invités.
Monsieur Wells, mes questions s'adresseront à vous.
Monsieur le sénateur, sachant où nous en sommes avec le projet de loi et sachant que, même avant que le Sénat ait terminé avec les amendements, le ministre a écrit au Comité et nous a demandé d'étudier les réserves d'habitats établies par des tiers, ne trouvez-vous pas ironique le fait que nous soyons assis ici aujourd'hui à mener une étude sur ce sujet alors que nous savons que du temps sera attribué au projet de loi demain?
Nous savons que les libéraux ont maintenant éliminé vos amendements relatifs aux réserves d'habitats. De l'excellent travail a été fait par tous les partis au sujet des réserves d'habitats. Ne trouvez-vous pas ironique le fait que nous soyons assis ici aujourd'hui?
Je suis ici à titre de témoin, donc je ne veux pas me lancer dans un débat politique, mais même si la situation est ironique, elle est aussi décevante, car l'idée des réserves d'habitats établies par des tiers est bonne. Vous en avez entendu parler par...
... nos autres témoins ainsi que par des groupes d'intervenants.
J'ignore pourquoi. Je prends part au processus législatif depuis très longtemps, à titre non seulement de sénateur, mais aussi de haut fonctionnaire du MPO qui connaît bien l'industrie. Je sais qu'il faut beaucoup de temps pour faire adopter des mesures législatives par les deux chambres. Il faut tenir des consultations, entre autres, et procéder à un examen juridique, bien évidemment.
C'est peut-être ironique, mais c'est encore plus décevant. Une occasion se présentait pour les Premières Nations, les collectivités, les groupes de conservation écologique et les groupes environnementaux qui se soucient de l'environnement et qui veulent le protéger, même grâce à des moyens simples, comme les échelles à saumons, mais en raison du rejet apparemment délibéré de ces amendements, particulièrement en ce qui a trait aux réserves d'habitats établies par des tiers, nous n'avons pas tenu compte de ces groupes. Nous voulons tous contribuer à protéger l'environnement, particulièrement au sein des industries d'exploitation des ressources naturelles.
Au sujet des amendements relatifs aux réserves d'habitats présentés par le Sénat, on nous a dit qu'ils sortaient du champ d'application du projet de loi.
Non. En fait, les réserves d'habitats sont communes au Canada. Nos amendements concernaient les réserves d'habitats établies par des tiers — des Premières Nations, des groupes de conservation —, que l'on ne peut décrire que comme une avancée positive.
Les autres parties des amendements portaient sur la compensation, ce qui a été abordé, et, sur la zone de service, qui est une région définie où les mécanismes de compensation pourraient être utilisés.
Par exemple, un projet minier sur la presqu'île Avalon à Terre-Neuve-et-Labrador ne serait pas compensé par des activités d'assainissement écologique en Saskatchewan. Idéalement, ces activités seraient menées aussi près que possible de la zone, et dans la même province. À l'heure actuelle, la zone de service correspond à tout le Canada, et je pense qu'il faut qu'on y réfléchisse.
Monsieur le sénateur, lorsqu'on a demandé pourquoi les amendements avaient été éliminés, le ministre nous a répondu qu'il pourrait y avoir des contestations fondées sur la compétence en ce qui a trait aux réserves d'habitats. Qu'avez-vous à répondre à cela?
Il peut y avoir des contestations fondées sur la compétence si une administration impose quelque chose à une autre administration.
Je pense que pour toute activité de mise en valeur qui présente un avantage pour l'environnement, qui crée des emplois et qui suppose la mise en œuvre d'un projet auquel prend part une entreprise minière, ou bien de tout projet agricole ou forestier, personne ne serait forcé d'accepter l'assainissement écologique. Si j'étais maire d'une ville, j'en serais heureux. Je me réjouirais grandement des emplois et du développement de zones humides ou de l'établissement d'une échelle de poissons dans un réseau hydrographique.
Monsieur Poulton, vous avez parlé de l'établissement de réserves d'habitats par une première partie et de certains groupes dans votre exposé. Pourrait-il s'agir de Canards Illimités? Qui pourrait être une première partie?
D'après ce que je comprends, il s'agit généralement d'organismes gouvernementaux, comme des organismes de transport ou autres.
Celui que je connais le mieux est Port Metro Vancouver, qui mène des activités à l'heure actuelle. L'organisme sait qu'il va perturber l'habitat des poissons de manière occasionnelle ou permanente, et a donc un besoin continu de crédits compensatoires.
Il s'agit généralement de groupes d'exploitation, car ce sont eux qui utiliseront les crédits en définitive.
Anciennement, j'étais dans l'industrie du transport. Y a-t-il un risque, un peu comme dans le cas des crédits de carbone, que les crédits pour les réserves d'habitats deviennent du jour au lendemain un produit qui peut être échangé entre les groupes et les organisations?
Ces termes ont parfois été utilisés. C'est ce qu'on a décrit comme étant la marchandisation des valeurs naturelles.
Sauf votre respect, je suis moins préoccupé par l'aspect sémantique de la chose que par sa productivité écologique. Si les crédits génèrent des avantages du point de vue de l'environnement et mettent à profit l'expertise des gens d'une manière efficiente, je ne pense pas que l'appellation entre en jeu.
Si je soulève ce point, c'est que, dans ma circonscription, nous avons vu des organisations internationales acheter de grandes étendues de terre agricole, les labourer et planter des arbres afin que les crédits de carbone soient appliqués à l'étranger. Je me demande si ce problème pourrait être réglé par le projet de loi C-68, y compris en ce qui a trait aux réserves d'habitats établies par des tiers, d'après le libellé utilisé par le Sénat.
Je pense que je vais devoir réfléchir davantage à la question avant de répondre, mais d'après ma première impression, c'est un aspect qui pourrait être géré au cas par cas et qui n'aurait pas nécessairement à être abordé par des mesures législatives ou même par la réglementation.
Merci, monsieur Doherty.
Nous allons passer du côté du NPD. Monsieur Johns, vous avez la parole pour sept minutes ou moins.
Je vais commencer par le sénateur Wells.
Merci, monsieur Wells, de votre présence et de tout le travail que vous faites au Sénat sur cette question.
J'ai une question concernant les Premières Nations. Pouvez-vous nous parler de la consultation qui a été menée auprès des Premières Nations au sujet des réserves d'habitats établies par des tiers, et peut-être nous dire ce que vous avez appris?
Bien sûr. Je vais donner un exemple concret.
C'était le sénateur Dan Christmas de la Première Nation de Membertou en Nouvelle-Écosse. Nous avons travaillé ensemble sur ces amendements. Il a voté pour leur adoption. Il fait partie du Groupe des sénateurs indépendants. La consultation des Premières Nations était son initiative.
D'accord. Voilà qui me préoccupe. Il est crucial que l'on s'assure de les consulter adéquatement. Dans le passé, nous avons entendu les préoccupations de collectivités autochtones à l'égard de la mauvaise exécution du régime de réserve d'habitats sur leur territoire. Nous voudrions certainement entendre davantage les commentaires des collectivités autochtones sur cette question.
Si cet élément était inscrit dans la loi, je pense qu'il ferait partie de l'élaboration du cadre réglementaire par le MPO. Les responsables auraient des années pour mettre en place les éléments requis aux fins de la tenue de consultations. Les groupes autochtones seraient évidemment inclus. Certains de ces groupes voudraient participer aux projets de conservation menés dans leur région.
S'ils ne l'approuvent pas, personne ne les forcera à participer. Si vous devez appuyer la mise en place d'un système de compensation ou d'une aide dans un autre domaine à l'intérieur d'un système de compensation, du régime de réserves d'habitats établies par des tiers, vous ne forcerez pas un groupe qui ne veut pas participer à la conservation des zones humides à le faire. Je pense que c'est clair. J'imagine que la plupart des groupes voudraient participer, mais ce serait dans le cadre de l'élaboration de la réglementation par le MPO. Le ministère serait tenu de les consulter.
La loi prévoit la possibilité de compensation. Les détails figureraient dans le règlement et, bien entendu, les parlementaires n'entrent pas dans les détails de la réglementation; nous ne faisons que les lois.
Nous avons des préoccupations. Nous voulons simplement nous assurer — que ce soit dit officiellement — que les Autochtones n'ont pas été consultés adéquatement avant que cette initiative soit soumise à notre étude.
Ils ne se sont pas présentés devant le comité pour en discuter, mais ils ont peut-être été consultés par d'autres intervenants.
Je serais surpris que le sénateur Christmas n'en ait pas discuté avec la Première Nation de Membertou, par exemple.
D'accord.
Pourriez-vous approfondir un peu la question de l'engagement à ne causer aucune perte nette et à engendrer un gain net pour les habitats de poisson?
Bien sûr. Je vais donner un exemple direct.
Pendant que je participais à un projet dans le cadre des activités de mon entreprise privée, avant ma venue au Sénat, une société minière voulait utiliser un étang ou un lac, alors elle a dû prendre des mesures d'atténuation à l'égard du lac. Elle en a retiré le poisson pour le mettre dans un autre plan d'eau. Je pense que c'était dans le même bassin hydrographique. C'était la mesure d'atténuation, mais la société était également tenue de fournir... C'était une nouvelle manière de procéder à l'établissement d'une réserve d'habitats par des tiers, sous un autre régime, car aucun système n'était en place, mais je crois qu'on avait financé une échelle à saumon deux ou trois centaines de kilomètres plus loin. Ce n'étaient pas les mêmes réseau et bassin hydrographiques. C'est le genre de choses qui...
Tout le monde était satisfait de cette mesure. La société minière l'était non seulement parce qu'elle devait prendre la mesure d'atténuation — ce que la loi l'obligeait à faire —, mais aussi parce qu'elle pouvait également appuyer un autre projet réalisé dans une autre région. Comme je l'ai mentionné plus tôt, l'un de mes amendements concernait la zone de service. J'espère que ce serait dans le même bassin hydrographique, dans le même réseau hydrographique, mais, parfois, il n'y a pas de promoteur dans le même réseau hydrographique. Il est parfois impossible de procéder à la mise à niveau des zones humides dans le même réseau hydrographique, alors c'est pourquoi j'ai dit dans la même province.
L'autre élément à ce sujet, monsieur Johns, c'est que le ministre aurait encore le pouvoir discrétionnaire d'envoyer le poisson dans une zone de service située n'importe où au Canada, mais l'intention était que ce soit le plus local possible.
Nous avons obtenu votre témoignage à tous les trois, mais je n'ai entendu parler d'aucune des préoccupations que vous aviez entendues quand vous examiniez la mise en place de réserves d'habitats. Quelles sont les préoccupations que vous avez entendues?
L'un de mes collègues au comité sénatorial des pêches a posé la question aux représentants du MPO qui étaient sur place. L'un des problèmes tenait au fait que — et cela m'a étonné — nous ne l'avons jamais fait auparavant. Nous n'avons mis en place aucun régime adapté à ce système.
S'il s'agit du problème, ils auront le temps de le faire. L'entrée en vigueur n'aurait pas lieu au moment de la sanction royale; ce serait à la discrétion du Cabinet, c'est-à-dire le prochain Cabinet ou le suivant, ou bien celui qui sera là quand le système sera prêt. Leur crainte tenait au fait qu'ils ne l'avaient jamais fait auparavant.
Bien entendu, nous avons entendu d'autres témoins et de nombreux autres intervenants affirmer qu'on le fait dans d'autres administrations, avec succès.
Le promoteur du projet pourrait-il retenir les services d'un tiers, comme un groupe sans but lucratif, afin qu'il établisse une réserve d'habitats en son nom?
Cela dépend de la façon dont le système est conçu. Normalement, dans le cas d'un régime de réserves d'habitats établies par des tiers, ces crédits se trouveraient à un endroit accessible pour que l'on puisse puiser dedans. Actuellement, les exigences réglementaires permettent à un promoteur de confier cette tâche à un groupe sous-traitant qui assure la conservation de zones humides, par exemple. Ce n'est pas interdit actuellement.
Je vous remercie, monsieur Johns. Votre temps de parole est écoulé pour l'instant.
Nous allons passer au côté du gouvernement.
Monsieur Morrissey, vous disposez d'une période ne dépassant pas sept minutes; allez-y.
Sénateur Wells, votre examen établissait-il des paramètres relativement à la façon dont les réserves d'habitats pourraient être mises en œuvre?
Non. Nous laisserions le MPO et les organismes gouvernementaux pertinents s'en occuper. En tant que parlementaires, nous établissons la loi, et ils établissent le système adapté à ces paramètres. Nous n'avons intégré aucune restriction. Dans le cadre de beaucoup de nos discussions, il a été question d'accorder une marge de manœuvre aux entreprises qui sont actuellement des promoteurs.
Vous devez comprendre qu'une société minière ou forestière...
Dans ce cas, vous conviendriez du fait que c'est le MPO qui devrait avoir le pouvoir final de décision à l'égard de la mise en œuvre appropriée d'un habitat de substitution.
Ce serait le ministre, oui, ainsi que les organismes compétents, et peut-être le ministère de l'Environnement ou...
Dans ce cas, vous convenez du fait qu'ils devraient avoir le pouvoir final de prendre les décisions et d'établir les critères quant à ce qui serait acceptable. Les cas changeraient radicalement, selon la situation qu'on tenterait de régler.
L'affaire ferait l'objet de consultations, alors j'imagine que le pouvoir final de décision serait toujours conféré au ministre, qui posséderait un pouvoir discrétionnaire absolu, de toute manière. Si le règlement est établi après la tenue de consultations auprès de Premières Nations, de groupes environnementaux, de collectivités et d'autres intervenants, on s'attendra à ce qu'il tienne compte des opinions exprimées lors des consultations, mais, oui, c'est le ministre qui aura le pouvoir final de décision.
Quand vous meniez des études, avez-vous procédé à une analyse d'une situation qui existe actuelle où un habitat a été reproduit?
Cette question comporte deux aspects. L'un est la mesure d'atténuation prise sur les lieux, comme lorsqu'une société minière a besoin d'un lac ou d'un étang. Une mesure d'atténuation serait prise à ce moment-là, comme le retrait du poisson ou la protection contre les débordements ou contre tout effet délétère découlant de l'activité dans la région en question. L'autre aspect concerne les réserves d'habitats et la zone de service.
Nous connaissons bien la façon de faire des Américains et des Australiens, et, bien entendu, nous connaissons bien la notion d'habitats équivalents.
Il y a une autre chose, monsieur le président, si je peux me permettre. Les promoteurs possèdent leur expertise dans leur propre industrie, comme l'exploitation minière ou la foresterie, et, dans la situation actuelle, ils sont tenus de prendre les mesures d'atténuation et de fournir de l'aide dans des zones humides, des échelles ou des choses de ce genre. Il ne s'agit pas de leur activité de base, mais il existe des organisations qui se consacrent aux zones humides et des groupes de conservation qui s'occupent entre autres de ces milieux, qui sont prêts et disposés à obtenir un financement du secteur privé pour protéger l'environnement et qui sont capables de le faire. Il s'agit en partie de ce qui nous a motivés.
Je suis désolé de gruger votre temps de parole, monsieur Morrissey.
C'est beaucoup.
Sénateur Wells, ce qui pourrait être un point de friction dans tout cela, c'est la notion selon laquelle une entreprise ayant des poches particulièrement profondes pourrait simplement arriver en disant qu'elle ne peut pas ou ne souhaite pas prendre des mesures de remédiation, de récupération, de restauration ou autres, et offrir un tas d'argent. À une époque où, selon moi, il y a une sensibilité fortement accrue à l'égard de la perte d'habitats, pensez-vous que nous devrions permettre ce genre de réaction et donner le droit à ces entreprises essentiellement de s'acheter une échappatoire pour qu'un projet puisse aller de l'avant?
Ma réponse courte est non, mais les paramètres seront intégrés dans le règlement.
L'élément que vous ne devez pas oublier, c'est que des mesures d'atténuation sont prises immédiatement sur les lieux. C'est une exigence, quoi qu'il en soit. L'aspect lié à l'établissement d'une réserve d'habitats est seulement utile à d'autres égards.
Si je puis me permettre, nous pouvons fixer un prix ou un coût relativement à tout effet délétère sur une partie de l'environnement et, bien entendu, prendre des mesures d'atténuation pour respecter l'exigence par défaut qui les empêche de s'en tirer comme cela. Elles doivent le faire, mais cette exigence procurerait un avantage supplémentaire à un autre groupe dans un autre domaine.
La façon dont elle est intégrée et dont les paramètres sont élaborés figurerait dans le règlement. Se dire qu'une société pourrait simplement arriver en disant: « regardez, nous avons 1 million de dollars, alors laissez-nous commencer à creuser notre mine » est une façon simpliste de voir la situation. Je ne pense pas que cela ferait partie de la réalité.
Comment feriez-vous face à une situation où les conséquences seraient ressenties dans une région où les gens de la localité ne sont pas très favorables à la mise en œuvre du projet, mais où les mesures compensatoires seraient prises ailleurs, de sorte qu'elles ne profiteraient pas aux gens de la localité? Je croirais comprendre ou supposerais qu'il s'agirait d'une situation épineuse, ou du moins je le suppose.
Absolument. Il y a deux éléments à ce sujet.
L'un est l'existence d'un processus d'évaluation environnementale qui permet aux personnes touchées dans une région d'intervenir en exprimant leurs préoccupations et d'influer sur une décision concernant l'approbation ou le refus du projet du promoteur. Il s'agit là d'un élément.
C'est exactement pourquoi j'ai présenté l'amendement concernant la zone de service. Ainsi, il faudrait que l'activité d'établissement de la réserve d'habitats ait lieu le plus près possible de l'endroit où l'effet délétère se fait sentir, si possible dans le même bassin hydrographique. Dans le pire des cas, j'espérerais que ce serait dans la même province.
Encore une fois, c'est sous l'autorité directe du ministre. Il aurait le droit absolu de choisir où cette activité aurait lieu, mais des lignes directrices s'y rattacheraient. C'était l'essence de mon amendement sur la zone de service. C'est une bonne question.
Je vous remercie, monsieur Hardie.
Nous allons maintenant passer au côté des conservateurs, avec M. Arnold, pour une période ne dépassant pas cinq minutes; allez-y.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
Sénateur Wells, j'aimerais obtenir quelques précisions.
Notre comité a examiné en 2016 des modifications qu'on proposait d'apporter à la Loi sur les pêches. Le ministre avait déclaré qu'on menait des consultations en personne auprès des Premières Nations et qu'on nous transmettrait des renseignements issus de ces consultations afin que nous puissions achever notre étude. Des demandes de prolongation de la période d'étude du comité ont été présentées à plusieurs reprises. Le gouvernement a tout simplement voté contre ces demandes de façon répétée quand les Premières Nations et les députés de notre parti ont demandé de prolonger la période allouée afin qu'on puisse effectuer adéquatement l'étude.
Nous avons reçu des témoignages et des mémoires. Dans l'ensemble, le ministère des Pêches et des Océans a dépensé plus de 900 000 $ pour ces mémoires, et le comité les a reçus après avoir rédigé l'ébauche du rapport d'étude. Certains des enjeux évoqués auraient-ils pu être examinés si une période d'étude plus longue avait été accordée il y a un peu plus de deux ans, en 2016?
J'en suis convaincu, monsieur Arnold. Nous avons examiné tout ce que nous pouvions dans les limites des capacités de notre comité sénatorial. Nous avons discuté avec des experts et avec des personnes possédant de l'expérience dans ce domaine, et nous avons effectué notre propre examen en fonction de l'expérience des membres du Comité, et je dois dire que je possède une expérience considérable.
À première vue, la proposition est sensée. On a réussi à le faire dans d'autres domaines. Elle permet non seulement de créer un système qui donne le droit à un promoteur de faire ce qu'il souhaite faire dans le respect de la loi — avec les évaluations environnementales et d'autres processus du genre —, mais aussi d'améliorer des milieux qui sont visés par des groupes des Premières Nations, des groupes de conservation des milieux humides et des groupes de protection de l'environnement. Il y en a beaucoup, et c'est une bonne chose. Cela ne fait que faciliter davantage la mise en œuvre. Actuellement, ce ne sont que les promoteurs qui sont visés.
Merci.
Je connais très bien les groupes de conservation qui pourraient faire ce genre de travail et créer des réserves d'habitats dans des milieux existants; des organismes comme Canards Illimités et les fédérations provinciales de la faune, qui existent dans tout le pays, ont des programmes d'amélioration des milieux humides et des programmes de conservation.
Ces réserves d'habitats créées par des tiers pourraient-elles concrètement permettre d'obtenir un gain net durable sur le plan des habitats de poisson si on incluait cette disposition?
C'est le but. Il s'agit non pas de maintenir les acquis, mais de les améliorer. Il faut augmenter la superficie des terres humides afin que ces milieux puissent soutenir le système écologique et la conservation des milieux naturels ainsi que la croissance du développement environnemental favorable.
À part les fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans, nous n'avons entendu personne dire que c'était une mauvaise idée. Seuls les fonctionnaires du MPO sont de cet avis. J'ai été un peu surpris, parce que c'est tout simplement sensé. Ce concept obtient un vaste appui.
À mon avis, c'était le premier signe que ces amendements seraient vraisemblablement rejetés par la Chambre. J'ai discuté et échangé par écrit avec des responsables de la Fédération canadienne de la faune, et le directeur général m'a dit que, selon les discussions, le ministère des Pêches et des Océans ou le ministre ou le gouvernement préfèrent que la création de réserves d'habitats par des tiers ne soit pas incluse dans ce projet de loi.
Je ne sais pas pourquoi, parce que, encore une fois, c'est une bonne idée à tout point de vue, aux dires des experts, d'autres témoins, des promoteurs, des groupes de conservation et des Premières Nations.
Merci, monsieur Arnold. Votre temps est écoulé.
Je tiens à remercier les témoins d'avoir comparu par vidéoconférence et en personne.
Je vais suspendre la séance pendant quelques minutes pour accueillir le groupe de témoins prévu pour la prochaine heure. Certaines personnes témoigneront par vidéoconférence, et nous voulons nous assurer que la communication est établie et que tout est prêt.
Encore une fois, merci à tous les témoins de leur participation aujourd'hui.
Nous allons maintenant entamer la prochaine heure de témoignage.
Nous accueillons par vidéoconférence M. Paul Norris, président de l'Ontario Waterpower Association. Bienvenue, monsieur.
Nous recevons aussi en personne M. Daniel Gibson, spécialiste principal de l'environnement et président du groupe de travail sur les pêches, production d'énergie renouvelable et environnement, Hydroélectricité Canada, de la société Ontario Power Generation Incorporated. Bienvenue, monsieur.
Nous allons commencer par M. Norris. Vous disposez d'au plus sept minutes. Allez-y quand vous êtes prêt.
Je vous remercie, monsieur le président, mesdames et messieurs, de me donner l'occasion de vous faire part de nos réflexions et de notre perspective, dans le cadre de votre étude, sur la mise en place d'un régime d'établissement de réserves d'habitats par des tiers comme élément du projet de loi C-68.
Je m'appelle Paul Norris. Je suis le président de l'Ontario Waterpower Association. Je souhaite mentionner tout de suite que notre organisme appuie fortement l'ajout dans le projet de loi de dispositions relatives à la création de réserves d'habitats par des tiers. Un tel outil peut non seulement contribuer à l'atteinte de nos objectifs collectifs à l'égard de la pêche durable, mais aussi favoriser la création de partenariats favorables et productifs ainsi que l'innovation dans ce domaine.
En guise d'introduction, l'Ontario Waterpower Association représente les intérêts communs et collectifs des propriétaires et exploitants des 224 installations hydroélectriques en Ontario. Ces installations sont situées partout dans la province, de Cornwall à Kenora, offrent une capacité de production allant de moins de 20 kilowatts à plus de 2 000 megawatts et ont été construites entre 1898 et 2018.
Notre organisme compte plus de 140 membres, notamment des sociétés dans les domaines de l'environnement, du génie, des finances, de la construction et du droit; des fabricants et des fournisseurs d'équipement; des municipalités; et des collectivités autochtones. Sur le plan de la production d'électricité, l'hydroélectricité est le moteur à l'origine de la prospérité économique de la province de l'Ontario et elle demeure le fondement d'un système énergétique abordable, fiable et durable.
En ce qui concerne la question ici à l'étude, iI est particulièrement pertinent de souligner que la responsabilité réglementaire à l'égard du processus d'évaluation environnementale pour presque tous les projets hydroélectriques en Ontario incombe à notre association au titre des dispositions d'une entente sur l'évaluation environnementale de portée générale pour les projets d'aménagement hydroélectrique, dont l'Ontario Waterpower Association est le promoteur. Approuvée par le ministre de l'Environnement en 2008, cette entente a pour objectif d'aider à faire en sorte que les projets soient planifiés de manière responsable sur le plan de l'environnement. Un des autres objectifs de l'évaluation environnementale de portée générale tient à la coordination et à l'intégration des multiples autorisations sur le plan environnemental et des différents processus de participation du public qui sont pertinents dans le cadre de la planification d'un projet d'aménagement hydroélectrique.
En ce qui concerne le mandat du ministère des Pêches et des Océans, il est mentionné ce qui suit dans le document relatif à l'évaluation environnementale de portée générale pour les projets d'aménagement hydroélectrique:
[...] un projet d'aménagement hydroélectrique comprend presque toujours un examen et l'obtention d'une autorisation sous le régime fédéral de la Loi sur les pêches, et les études menées dans le cadre de l'évaluation environnementale de portée générale doivent comprendre la collecte de renseignements appropriés sur les poissons et sur l'habitat. La réalisation de travaux dans le cadre de l'évaluation environnementale de portée générale pour les projets d'aménagement hydroélectrique n'est pas soustraite à l'autorité décisionnelle du ministère des Pêches et des Océans du Canada conférée sous le régime de la Loi sur les pêches, mais il est attendu qu'un promoteur qui utilise cette évaluation environnementale de portée générale satisfasse aux importantes exigences en matière de planification relatives à l'obtention d'une autorisation au titre de la Loi sur les pêches.
C'est précisément l'approche « un projet, un processus » sur laquelle repose l'évaluation environnementale de portée générale qui permet de prendre en considération et d'appliquer une variété de moyens, comme la création de réserves d'habitats, pour atteindre les objectifs imposés par la myriade d'exigences législatives auxquelles sont assujettis les projets d'aménagement hydroélectrique.
L'évaluation environnementale de portée générale vise aussi le mécanisme d'atténuation utilisé dans le cadre duquel le concept de création de réserves d'habitats par des tiers serait utilisé. En résumé, l'évaluation environnementale de portée générale s'appuie sur la hiérarchie conceptuelle de l'évitement, de la prévention et de l'atténuation.
Quand il n'est pas possible d'éviter ou de prévenir des impacts environnementaux, on examine le recours à des mesures d'atténuation, y compris la compensation. La création de réserves d'habitats, de façon générale, et la mise en place de réserves d'habitats par des tiers, en particulier, constituent des mesures proactives d'atténuation pouvant être appliquées sur le terrain pour atteindre les résultats souhaités, y compris la durabilité des pêches.
Je suis d'avis qu'il est aussi important de reconnaître que le fait de permettre l'innovation au moyen d'un régime de création de réserves d'habitats par des tiers sous le régime de la Loi sur les pêches pourrait aider à obtenir ce qu'on appelle de façon générale des « avantages cumulables ». Il est facile de concevoir qu'un projet de réserve d'habitats du poisson puisse créer des biens et des services écologiques pour les milieux humides, pour les espèces menacées ainsi que pour la compensation du carbone; en résumé, il s'agirait d'un projet dont le tout est plus grand que la somme de ses parties.
Cela m'amène à la mise en application de la création de réserves d'habitats par des tiers.
En appui au projet d'évaluation environnementale de portée générale pour les projets d'aménagement hydroélectrique de l'Ontario Waterpower Association, nous avons diffusé plus de 40 pratiques exemplaires en gestion environnementale relativement à la construction d'installations hydroélectriques. Trois de ces pratiques exemplaires visent de façon spécifique les espèces de poissons menacées qui sont ciblées par des activités de pêche, et nous avons élaboré ces pratiques en collaboration avec le ministère des Pêches et des Océans et s'appuyant sur ses conseils. J'aimerais mettre l'accent, toutefois, sur le partenariat entre notre association et l'organisme Canards Illimités Canada relativement à la préparation et à la diffusion des pratiques exemplaires relativement aux milieux humides et à la construction d'installations hydroélectriques. On peut lire le conseil suivant dans le document:
La restauration ou la création d'habitats en milieu humide nécessite la collaboration d'une équipe multidisciplinaire [...] pour élaborer une stratégie d'adaptation fondée sur une analyse critique des caractéristiques abiotiques du milieu. Le fait de retenir les services d'organismes possédant de l'expérience en matière de restauration ou de création de milieux humides et de leur gestion, comme l'organisme Canards Illimités Canada — ou la mobilisation de tels organismes —, permettra aux intervenants d'être mieux renseignés et de mieux concevoir les projets relatifs aux milieux humides.
En bref, même si dans certains cas un promoteur peut avoir la capacité d'appliquer des stratégies d'atténuation, y compris la mise en place d'une réserve d'habitats, dans d'autres cas, il est clair et reconnu qu'il faut faire appel à des experts en la matière, en particulier à ceux qui mènent des activités d'intendance sur le terrain, comme des organismes comme Canards Illimités Canada, Conservation de la nature Canada, Truite Illimitée Canada et d'autres.
Pour ce qui est des projets hydroélectriques, dont l'achèvement peut prendre jusqu'à huit ans en Ontario, de l'évaluation environnementale à la mise en service, peu importe la taille du projet, il est particulièrement pertinent de tirer avantage de l'occasion de mettre en place de façon proactive une réserve d'habitats comme possible mesure d'atténuation, qu'elle soit mise en place par le promoteur du projet ou en partenariat avec un organisme tiers, en particulier à l'échelle d'un milieu. Il ne fait aucun doute que la mise en œuvre de cette mesure au moyen de la Loi sur les pêches aura pour effet de stimuler l'art et la science des possibles.
L'Ontario Waterpower Association reconnaît et mesure pleinement l'importance des travaux en matière de réglementation et de politique qui doivent être réalisés pour la mise en œuvre du concept de la création de réserves d'habitats par des tiers. Nous sommes d'avis qu'il vaut vraiment la peine de consentir des efforts en ce sens. Selon mon expérience à titre de membre du comité consultatif du programme de protection des espèces en péril de l'Ontario et du groupe consultatif sur la stratégie de conservation des terres humides, je suis en mesure d'assurer aux membres du Comité que d'importantes réflexions collaboratives ont été consacrées à la conception et à l'application du régime de création de réserves d'habitats par des tiers, dont le ministère des Pêches et des Océans peut tirer parti. Je peux aussi vous assurer que notre organisation est prête à participer à ces efforts.
Je vous remercie de nouveau de cette occasion de m'exprimer devant vous aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Merci, monsieur Norris.
Nous allons maintenant donner la parole à M. Gibson.
Monsieur, vous disposez d'au plus sept minutes.
Merci. Bonjour, monsieur le président et bonjour aux membres du Comité.
Ontario Power Generation apprécie l'occasion qui lui est donnée de comparaître aujourd'hui devant le comité permanent. Je suis également venu aujourd'hui à titre de président du groupe de travail sur les pêches d'Hydroélectricité Canada.
OPG, le plus grand producteur d'énergie verte de l'Ontario, oriente ses activités vers une production d'électricité sûre, fiable et durable. Le portefeuille de production d'électricité de l'entreprise a une capacité en service de plus de 17 000 mégawatts. L'entreprise exploite deux centrales nucléaires, une centrale thermique alimentée à la biomasse, une centrale thermique alimentée au pétrole et au gaz, une installation solaire et 66 centrales hydroélectriques. En tant que plus grand fournisseur d'énergie propre de l'Ontario, nous jouons un rôle essentiel dans l'atteinte de l'objectif de réduction des émissions des gaz à effet de serre du Canada.
Depuis 2016, OPG participe activement à tous les aspects de l'examen par le gouvernement fédéral de la Loi sur les pêches et du projet de loi C-68. Nous nous réjouissons d'avoir l'occasion de nous exprimer aujourd'hui sur la faisabilité de la mise en œuvre d'un cadre sur les réserves d'habitats créées par des tiers au Canada.
De manière similaire, WaterPower Canada, anciennement connu sous le nom d'Association canadienne de l'hydroélectricité, représente autant les producteurs d'hydroélectricité que les entreprises de services et de fournitures qui soutiennent l'industrie. Comme vous l'avez déjà entendu dire par les témoins précédents, et il est important de le répéter, l'hydroélectricité fournit plus de 60 % de l'électricité du Canada et elle est de loin notre plus grande source de production d'énergie. Le résultat est que nous avons le système électrique le plus propre, le plus renouvelable et le plus fiable au monde. La production d'hydroélectricité n'émet pour ainsi dire aucun gaz à effet de serre. Elle doit jouer un rôle central dans l'atteinte des objectifs du Canada en matière de changements climatiques.
D'entrée de jeu, OPG tient à souligner son appui aux mémoires présentés par WaterPower Canada, l'Association canadienne de l'électricité, l'Association nucléaire canadienne et l'Ontario WaterPower Association.
OPG continue à appuyer les efforts déployés par le gouvernement actuel pour intégrer des mesures de protection modernes dans la loi. Aujourd'hui, nous sommes ici précisément pour en parler dans le contexte des réserves d'habitats.
Dans nos précédents mémoires présentés à votre comité et suite aux discussions que nous avons eues avec les représentants du MPO, nous avions recommandé d'inclure dans le projet de loi C-68 des dispositions prévoyant un régime de réserves d'habitats qui favoriserait une gestion efficace et efficiente des pêches canadiennes. Nous avons préconisé une plus grande souplesse et demandé la création de crédits que les promoteurs de projet et les groupes tiers pourraient utiliser pour réaliser les objectifs en matière de conservation de l'habitat du poisson et les objectifs économiques. Nous nous réjouissons de constater que votre comité est résolu à étudier plus en détail la question des réserves d'habitats créées par des tiers et à faire intégrer des modifications habilitantes dans le projet de loi C-68, pendant l'étude du projet de loi par le Sénat.
Nous comprenons que les dispositions proposées dans le projet de loi C-68 donneraient au gouverneur en conseil le pouvoir d'adopter des règlements visant non seulement la création, l'attribution et la gestion des crédits et des crédits compensatoires, mais également, peut-être, l'échange et la vente de ces crédits. Ces dispositions habilitantes sont une excellente occasion de créer un outil qui procurera des avantages nets pour le poisson et pour la conservation de l'habitat du poisson au Canada.
Un régime de réserves d'habitats bien conçu permettrait de regrouper les projets de façon avantageuse et de lancer de grandes initiatives dirigées par des promoteurs et des initiatives dirigées par des tiers que les promoteurs pourraient appuyer et adopter. Il ouvrirait des possibilités d'avantages cumulatifs bien définis pour plusieurs espèces, notamment les espèces en péril, comme l'a mentionné M. Norris. La possibilité d'une plus grande participation des intervenants dans les réserves d'habitats permet de soutenir les entreprises et également de créer des débouchés économiques et en matière de renforcement des connaissances.
Les coûts de mise en œuvre des réserves d'habitats pourraient être réduits pour les promoteurs qui ne considèrent pas que c'est leur activité principale, tandis que les attentes touchant les incitatifs financiers pourraient élargir les débouchés économiques et les occasions d'affaires pour que des tiers qualifiés gèrent et surveillent convenablement les compensations pour la perte d'habitat. Ces tiers pourraient être mieux équipés pour regrouper les mesures compensatoires régionales à une plus grande échelle que ce qui pourrait être fait pour les promoteurs particuliers.
Parce qu'elles visent le long terme, les réserves d'habitats peuvent également encourager la création de partenariats plus larges et d'occasions de renforcement des connaissances. L'exemple d'OPG à cet égard est celui des réserves d'habitats créées grâce à un partenariat conclu entre Quinte Conservation, des consultants et des entrepreneurs locaux pour dessiner et aménager la zone de terres humides de Big Island, près de Belleville, en Ontario. L'investissement dans cette réserve d'habitats a été fait à titre de mesure compensatoire dans le cadre de l'évaluation environnementale du nouveau projet nucléaire de Darlington d'OPG, bien avant que le projet soit approuvé.
Le projet de Big Island est un parfait exemple de projet de compensation qui est allé au-delà du modèle de compensation classique; il a d'abord tenu compte des objectifs de gestion des pêches pour les plans d'eau où nous travaillions. Il a été déterminé que le facteur limitant pour la productivité des pêches dans le lac Ontario n'était pas nécessairement la disparition du gaspareau, l'espèce de poisson le plus souvent touchée par nos centrales nucléaires, mais plutôt la perte de zones humides côtières sur la rive nord du lac Ontario.
Grâce à ces connaissances, OPG et les partenaires du projet ont été en mesure d'élaborer un projet fondé sur des crédits d'habitats permanents visant à compenser la perte annuelle potentielle de poissons, qui servirait de mesure de la productivité de la future centrale nucléaire de Darlington.
Quand la nouvelle construction de la centrale de Darlington a été temporairement suspendue, OPG a eu la chance de pouvoir utiliser une partie des réserves de la zone humide de Big Island pour compenser les mesures prises pour nos centrales nucléaires de Darlington et de Pickering conformément aux autorisations prévues dans la Loi sur les pêches. Cela étant dit, si nous n'avions pas eu cette possibilité de réinvestir ces crédits au titre des autorisations de la Loi sur les pêches, nos précédents investissements dans la zone humide de Big Island auraient été menacés.
Même si l'expansion de la zone humide aurait été un bon résultat, sur le plan de la durabilité et des compensations pour la perte d'habitat, peu d'organismes ont les moyens de dépenser de l'argent pour un projet de compensation avant de savoir si leur projet sera approuvé. De ce point de vue, la mise en place d'un régime de réserves d'habitats créées par des tiers est l'occasion de réunir les praticiens au sein d'une collectivité pour qu'ils puissent discuter de leurs expériences, des efforts de recherche et des connaissances sur ce qui fonctionne. OPG et les autres partenaires de l'industrie ont étudié les réserves d'habitats et commandé des recherches sur ces dernières avant de se lancer dans le projet de la zone humide de Big Island. Nous nous ferons un plaisir de faire parvenir ces travaux au Comité sous forme de mémoire, si le Comité le souhaite.
Dans l'ensemble, OPG croit que la création des réserves d'habitats par des tiers permettrait non seulement d'accroître la collaboration et les possibilités d'harmoniser les mesures de compensation prises pour protéger la biodiversité pour les pêches, mais également de renforcer les objectifs fonctionnels et de remise en état de l'écosystème au sens large, comme la création de zones humides, la protection des espèces en péril et la conservation des terres. Je ne suis pas le premier à mentionner cet aspect dans nos témoignages.
En conclusion, j'aimerais remercier le Comité de nous avoir donné l'occasion de présenter notre point de vue sur les réserves d'habitats prévues dans la Loi sur les pêches. OPG ainsi que WaterPower Canada aimeraient pouvoir travailler avec le MPO pour aider à mettre en place un régime de réserves d'habitats qui fonctionne dans le contexte canadien, où la gestion des ressources est une responsabilité partagée.
OPG espère continuer à participer, par le truchement de ses associations, pour soutenir les efforts du Comité. Nous nous ferons un plaisir de vous rencontrer pour examiner nos commentaires, et nous allons maintenant répondre à vos questions.
Merci.
Merci, monsieur Gibson.
Nous allons maintenant passer aux représentants du gouvernement. M. Finnigan a la parole pour sept minutes ou moins.
Merci, monsieur le président. Je partagerai mon temps avec M. Bobby Morrissey.
J'aimerais souhaiter la bienvenue aux deux organisations que représentent les témoins d'aujourd'hui.
J'ai une seule question. Elle pourrait être plus en lien avec les expériences de l'autre groupe de témoins, mais j'espère que vous pourrez m'aider. Qui détermine quel habitat ou quelle espèce il faut rétablir au moment de recréer un habitat pour remplacer celui qui sera... non pas détruit, mais modifié? Qui détermine cela? Faut-il privilégier les espèces commerciales ou celles qui se trouvent à la fin de la chaîne? Comment pouvons-nous déterminer ce qui doit être inclus dans l'habitat recréé?
C'est une question que je pose à tout le monde.
Je serais ravi d'essayer d'y répondre.
Je pense qu'il existe une approche hiérarchique en matière de compensations. D'abord on essaie d'éviter, puis on compense et on atténue. Quand vous en êtes rendus à établir des mesures compensatoires — nous avons bien réfléchi aux questions de gestion des réserves d'habitats —, vous allez accorder la priorité aux objectifs de gestion des pêches dans un bassin versant en particulier. Indépendamment des répercussions qu'il pourrait y avoir, je pense que, quand vous choisissez des compensations ou des mesures compensatoires, vous cherchez à établir les priorités conformément aux objectifs de gestion des pêches. Cela se ferait au moyen de consultations avec l'organisme de réglementation, le MPO.
Comme nous l'avons vu dans l'exemple de la zone humide de Big Island, le gaspareau est l'espèce qui aurait été menacée par nos activités à Darlington, mais elle n'était pas nécessairement considérée comme une espèce importante à protéger, dans le lac Ontario. Elle a toutefois été associée à une perte de productivité et, par conséquent, nous devions compenser cette perte de productivité conformément aux objectifs de gestion pour le lac Ontario. C'est ce qui nous a menés à prendre cette décision. Il s'agit de la perte des zones humides côtières, des facteurs de productivité importants pour les Grands Lacs. C'est ce qui nous a menés dans cette direction.
Oui. Ces discussions ont lieu maintenant. M. Gibson a raison. Une fois que le processus d'évitement, de prévention et d'atténuation est enclenché et que vous en êtes aux mesures d'atténuation, ces discussions ont lieu, maintenant, avec l'organisme de réglementation et dans le cadre d'un projet. L'innovation dont nous parlons ici, ou l'outil que nous ajoutons à la trousse d'outils, c'est la possibilité de tirer profit du programme de compensation et d'atténuation par l'entremise d'un partenariat avec un tiers.
La réponse à la question sera la même, que vous ayez ou non discuté d'un site spécifique avec le MPO. L'innovation dont nous parlons ici... Après cette discussion, nous aurons accès à un nouvel outil qui pourrait se révéler plus avantageux.
Mon autre question concerne ce qui se passera une fois que ces projets seront créés. Je sais qu'au Nouveau-Brunswick, et partout au pays, nous avons Canards Illimités. Je crois qu'au Nouveau-Brunswick, nous avons une politique selon laquelle aucune zone humide ne peut être détruite, et si vous voulez construire une route passant par une zone humide, vous vous adressez à Canards Illimités. Pour 200 000 ou 300 000 $, l'organisation s'occupera de la nouvelle zone humide. C'est une organisation qui a une assez bonne réputation.
Si, par exemple, une nouvelle zone humide ou une nouvelle zone inondée a parfois besoin d'entretien, ou si quelque chose arrive et qu'elle sèche ou soit inondée, qui est chargé de veiller à ce que cet habitat continue d'exister? C'est la question que je voudrais vous poser.
Je pense qu'il y a plusieurs approches. Je pense qu'aujourd'hui ce serait le promoteur, une entreprise comme OPG, qui serait responsable de la compensation pour la perte d'habitat pour toute la durée de vie de son projet, par exemple toute la durée de vie de sa centrale nucléaire.
Dans le cas des réserves d'habitats créées par des tiers, on transférerait parfois cet entretien aux tiers. Dans le cas de Quinte Conservation, les tiers s'occupent de la surveillance de la zone humide de Big Island en notre nom. Nous nous sommes entendus avec eux pour faire cela, et ils en surveillent l'efficacité à long terme.
En ce qui concerne l'entretien, je pense qu'il faudrait le préciser dans un accord avec les tiers.
J'approuve ce qui vient d'être dit. Ce sont là des discussions stratégiques très intéressantes et fascinantes sur la partie habilitante du projet de loi. Vous avez absolument raison de souligner qu'il s'agit d'un élément clé.
Monsieur Gibson a raison. Il y a plusieurs façons d'aborder cette occasion. Cela exige des efforts stratégiques, qui devraient être déployés en collaboration avec le MPO et avec les autres intervenants que vous avez mentionnés comme Canards Illimités, Truites Illimitées, Conservation de la nature Canada et d'autres personnes dont c'est le gagne-pain.
Merci.
Monsieur Gibson, vous avez dit que peu d'organismes ont les moyens d'assumer le coût. Pourriez-vous fournir un peu plus de détails?
Bien sûr. Les investissements dans un projet de centrale nucléaire ou de centrales hydroélectriques s'échelonnent sur une dizaine d'années, mais il y a beaucoup de projets de moindre envergure. Beaucoup de projets, qui ne sont tout simplement pas aussi importants, ne peuvent pas compter sur ce genre de grands investissements provinciaux. On peut difficilement demander à un promoteur immobilier ou à un promoteur quelconque d'assumer de tels coûts initiaux cinq, six ou sept ans avant le début du projet, pour la simple raison que le régime de réserves d'habitats prévoit actuellement que l'investissement doit être fait en premier lieu, avant l'établissement d'un système de crédits.
En pratique, cela veut dire que vous surveillez l'habitat pendant quelques années, au préalable, afin de vous assurer que les crédits sont rentables et que les gains de productivité sont réels. C'est ensuite que la transaction est effectuée. Beaucoup de promoteurs de projets n'ont tout bonnement pas ce genre de délai préparatoire, dans leurs projets.
Puisque vous me le demandez, vu la nature un peu plus transactionnelle de l'établissement de réserves d'habitats par des tiers, par exemple des organismes comme Conservation de la nature Canada, les délais peuvent être plus courts.
Disons qu'un promoteur a un projet et que son partenaire, par exemple, Conservation de la nature Canada, CNC, a déjà lancé un projet et souhaite échanger les crédits. Il serait possible d'accroître la certitude pour ce qui est de la compensation...
Merci, monsieur Morrissey.
Malheureusement, monsieur Finnigan vous a cédé seulement une partie de son temps, et non pas la moitié.
La parole va maintenant à M. Calkins, du Parti conservateur. Vous avez sept minutes au maximum. Allez-y.
Je tiens avant tout à remercier chaleureusement les témoins qui sont avec nous de leurs commentaires.
Ce qui me préoccupe, j'imagine, c'est qu'on limite présentement la portée de cette initiative à la Loi sur les pêches. Je vais vous donner un exemple.
Certains projets de remise en état et d'assainissement, liés par exemple à un projet d'exploitation des sables bitumineux, peuvent toucher une rivière ou un lac. Je vais prendre l'exemple du projet Kearl dans le Nord de l'Alberta. Il y avait un petit bassin peu profond avec du bitume d'origine naturelle au fond, et même si un certain nombre d'espèces aquatiques y vivaient, il n'y avait peut-être rien de plus gros qu'une épinoche, disons.
Au lieu d'appliquer le régime de réserves d'habitats et restaurer l'endroit dans un lieu où il n'y a pas énormément d'activités humaines — ce qui a été fait —, on aurait pu le remettre dans son état naturel, comme l'exigent toutes les lois environnementales fédérales et provinciales qui nous auraient permis d'accroître les résultats de compensation en valorisant la pêche ou, peut-être, en achetant des terres pour les tétras des armoises, loin du projet.
Je suis perplexe. A-t-on raison de vouloir intégrer cette proposition à la Loi sur les pêches? Ne serait-il pas plus pertinent de l'intégrer à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale?
Vous pouvez répondre, monsieur Gibson.
Je crois que je pencherais pour la Loi sur les pêches, puisque je la connais très bien, mais je n'écarte pas votre question pour autant. Comme M. Norris l'a mentionné, je crois que nous aurons l'occasion de cumuler les avantages. Si la Loi sur les pêches est la loi habilitante, l'établissement d'une zone humide sera plus qu'un simple projet lié aux pêches et pourra ouvrir d'autres possibilités, par exemple en ce qui a trait au gibier d'eau.
J'ai noté quelques statistiques. La zone humide de Big Island comprend 16 hectares d'étangs et de chenaux interreliés dont l'importance est loin de se limiter aux pêches. Les peuplements de quenouilles ont diminué dans les zones humides, et 29 nouvelles espèces y sont apparues, y compris, en 2018, une espèce figurant sur la liste des espèces en péril. L'établissement d'habitats offre des avantages cumulables pour les environnements terrestres, non pas seulement pour les environnements aquatiques. C'est un fait.
Ma prochaine question s'adresse à vous, monsieur Norris. Jusqu'ici, vous êtes le seul à avoir proposé que les biens et les services écologiques ou les services de diversification des modes d'occupation des sols fassent aussi partie de la solution. C'est un point de vue différent sur l'amélioration. D'après mon expérience, cela supposerait de prendre une terre cultivable marginale, d'arrêter de la cultiver et de la remettre dans son état naturel. Ce n'est peut-être pas une véritable amélioration, puisqu'on ne fait que de la laisser retourner à son état naturel.
Croyez-vous que cela devrait réellement jouer un rôle dans le régime de réserves d'habitats? D'après ce que je comprends, ce n'est pas la même chose. Comment percevez-vous la relation entre le régime de réserves d'habitats et les services de diversification des modes d'occupation des sols?
Je crois que ce que je proposais, c'était d'adopter une approche paysagère pour le régime de réserves d'habitats. Dans notre province, par exemple, la gestion des installations hydroélectriques se fait en fonction des bassins hydrographiques. Dans cette optique, les demandes de réserves d'habitats viseraient un bassin hydrographique dans son ensemble plutôt qu'un lieu précis, et les décisions d'investissement seraient prises en fonction des avantages globaux ou du plus grand nombre d'avantages, plutôt que les seuls avantages d'un lieu précis.
Vous avez également posé une bonne question par rapport à l'évaluation environnementale. Le processus d'évaluation environnementale est un processus de planification. Comme je l'ai dit dans mon exposé, c'est dans ce processus que le promoteur du projet prend en considération, selon un ordre hiérarchique, les mesures visant à éviter, à atténuer ou à compenser les effets. La Loi sur les pêches et la Loi sur les espèces en péril, lorsqu'il est question de pêches et d'espèces en péril respectivement, prévoient que les résultats de ce processus seront intégrés au mécanisme d'autorisation. Donc, même si la Loi sur les pêches encadre le processus d'autorisation, le processus de planification a commencé beaucoup plus tôt, dès le processus d'évaluation environnementale. Cependant, ce mécanisme ne sert pas vraiment à mettre en œuvre des mesures de compensation, ni dans la Loi sur les pêches, ni dans la Loi sur les espèces en péril, ni dans d'autres lois.
Eh bien, nous n'avions pas discuté précisément de la Loi sur les espèces en péril jusqu'ici, mais c'est une idée intéressante d'utiliser le régime de réserves d'habitats pour trouver du financement ou des ressources pour que les espèces figurant sur la liste des espèces en voie de disparition ou la liste des espèces menacées puissent être retirées de ces listes. Je suis convaincu qu'il vaudrait la peine d'explorer cette idée.
Un autre sujet que je voulais aborder avec l'un de vous deux concerne la conscience sociale des entreprises. Toutes les activités d'une entreprise ne sont pas... Prenons l'exemple du projet Buffalo Hills, en Alberta. C'est un projet de terres humides dans le Sud de l'Alberta. Shell Canada a investi 6 millions de dollars, non pas parce qu'elle était obligée de transformer cet habitat en réserve, comme mesure de compensation, mais parce qu'elle est une bonne entreprise socialement responsable.
Si nous commençons à imposer des mesures de compensation comme la remise en état, l'assainissement ou la mise en réserve de l'habitat, peut-être que les entreprises seront moins motivées à le faire de leur plein gré, parce qu'elles ont une conscience sociale. Croyez-vous que cela aurait une incidence, et si oui, de quelle façon?
Je crois que cela ne fait qu'élargir les possibilités, pour être honnête. Pour bon nombre d'entreprises au pays, la conscience sociale, que cela concerne l'environnement, l'égalité sociale ou la diversité de genre, est un phénomène culturel.
J'estime donc que cela élargit les possibilités. Cela permet à davantage d'acteurs de tirer parti des partenariats pour la mise en réserve d'habitats et la prise de mesures de compensation. Je doute que cela aille diminuer l'intérêt des entreprises canadiennes à l'égard du bien environnemental. Cela fait partie de leur culture.
Je crois que je suis d'accord. Le programme de biodiversité d'Ontario Power Generation (OPG) est souvent perçu comme dépassant ou surpassant les attentes en matière de conformité. Nous soutenons, entre autres choses, le programme Bring Back the Salmon — ce qui veut dire Ramenons le saumon —, qui est exécuté par l'association des pêcheurs et des chasseurs de l'Ontario.
Oui, l'O.F.A.H. Nous sommes la plus importante société commanditaire. Cela tient surtout au fait que nous vivons dans ces collectivités et que bon nombre de nos employés et de nos travailleurs sont membres de ces organisations. Nous faisons ces investissements même si nous ne sommes pas tenus de les faire pour être en conformité. Pour cette raison, je ne crois pas qu'il y aurait des répercussions.
Pour terminer, croyez-vous que les mesures de compensation, dans le cadre de grands projets et de projets moyens, auront des effets durables comparables? Par exemple, je ne sais pas s'il est exigé qu'un barrage hydroélectrique soit démoli lorsqu'il arrive à la fin de sa vie utile. Cependant, je sais que, pour un projet d'exploitation des sables bitumineux qui arrive à terme, le site du projet doit être remis en état intégralement, de sorte que l'on ne puisse même pas dire, quelques années après la remise en état ou l'assainissement, qu'un projet s'y est déroulé. Selon vous, le régime de réserves d'habitats s'appliquerait-il différemment dans l'une ou l'autre de ces situations?
À dire vrai, je ne crois pas que le problème s'est posé jusqu'ici, étant donné la durée de vie très longue de la génération actuelle. Nous en sommes encore à la première génération de...
Mais êtes-vous obligé de démolir complètement un barrage hydroélectrique? Quelles exigences êtes-vous tenu de respecter actuellement, et quelles seront les nouvelles exigences? Je sais que les exigences qui s'appliquent aux barrages qui sont construits aujourd'hui ne sont pas les mêmes qu'il y a 40, 50 ou 60 ans, en ce qui vous concerne. Donc, quel est votre plan? Y a-t-il une différence, selon vous, entre ce type de projet et les projets d'exploitation des sables bitumineux, d'exploitation minière ou tout autre projet où, une fois que les travaux sont faits, que la ressource est exploitée et qu'il n'y a plus rien à signaler, le promoteur — espérons-le — remet tout en état pour que personne ne sache qu'il y a déjà eu là un projet, en premier lieu? Ce ne sont pas les mêmes genres de projets, alors je voulais savoir si, de votre point de vue, cela devrait être reflété dans le régime de réserves d'habitats, pour la suite des choses.
Merci, monsieur Calkins. Nous devrons sans doute attendre qu'un autre intervenant pose la question pour obtenir une réponse, parce que vous avez largement dépassé votre temps.
Monsieur Johns, allez-y. Vous avez sept minutes au maximum.
Merci.
Merci à vous deux de témoigner aujourd'hui. Je vais m'adresser à M. Gibson en premier.
Croyez-vous que les réserves d'habitats encouragent les intéressés à prendre des mesures pour compenser les effets d'un projet au lieu de chercher à les éviter ou à les atténuer?
C'est une excellente question. Je crois que cela dépend de l'approche qu'adoptera l'organisme de réglementation. Les mesures étant hiérarchisées, je comprends la critique. Je travaille dans l'industrie depuis plus de 20 ans et j'ai participé à de nombreux projets, mais ce n'est pas ce que j'ai constaté jusqu'ici. Les consultations préalables avec l'organisme de réglementation portent particulièrement sur les mesures d'évitement ou d'atténuation. Les mesures de compensation sont une solution de dernier recours. Donc, ce n'est pas ce que j'ai constaté.
Oui. Nous sommes responsables du processus d'évaluation environnementale, en Ontario, et la hiérarchie des mesures est très claire dans ce processus. Avant de pouvoir prendre des mesures d'atténuation, vous devez avoir examiné les mesures d'évitement et de prévention. J'ai déjà entendu cette critique — que tout le monde va passer tout de suite aux mesures de compensation —, mais le processus ne fonctionne pas de cette façon.
Certaines personnes ont exprimé des préoccupations à propos de la possibilité que l'on puisse manipuler les réserves d'habitats créées par des tiers et du fait qu'il est difficile de comparer un habitat mis en réserve et un habitat endommagé. Peut-être pourriez-vous nous dire quelque chose à ce sujet, monsieur Gibson?
Certainement. Je peux seulement parler du projet dans le marécage de Big Island. Nous avons une équipe consultative qui compte un chercheur scientifique du ministère des Pêches et des Océans (MPO) et divers universitaires. Ils examinent la gestion de nos crédits. Ils mesurent en réalité la productivité de notre réserve et s'assurent que son rendement est comme il devrait l'être. Il ne revient pas à l'industrie de montrer que son rendement est adéquat. Habituellement, comme dans le cas du projet de Big Island, c'est un groupe consultatif qui détermine si la productivité respecte l'engagement que nous avons pris.
Je dirais qu'il y a des garanties dans les grands projets, mais, encore une fois, elles découlent de la réglementation.
Je soulignerais que, lorsqu'on discute de la possibilité de prendre des mesures de compensation, qu'il s'agisse de réserves d'habitats ou de mesures de compensation, cela se fait à l'extérieur des réserves. Les mêmes observations peuvent être faites à propos d'un projet autorisé par Pêches et Océans Canada pour lequel des mesures de compensation sont exigées par le ministère. Tout ce que nous disons ici, c'est qu'il faut être plus proactif, faire avancer la discussion et prendre ces mesures dans la réserve, pour ainsi dire, afin que, au moment de leur mise en œuvre, nous ayons déjà fait quelque chose.
Les Premières Nations nous ont dit qu'elles n'avaient pas été assez consultées relativement aux réserves d'habitats établies par des tiers. Pourriez-vous nous parler un peu plus de votre relation avec les Premières Nations en ce qui concerne la gouvernance et le processus décisionnel, la façon dont vous déterminez les crédits d'habitat acceptables ainsi que la portée et l'endroit des projets et des priorités en matière de mesures de compensation?
Je peux essayer. Cependant, je devrai peut-être vous revenir là-dessus. C'est une bonne question; notre équipe organisationnelle à OPG pourra voir ce qui a fait l'objet de consultations dans le cadre de l'évaluation environnementale. Je ne veux pas parler en son nom, mais je peux absolument vous trouver cette information.
Je peux seulement supposer que, dans le cadre du processus d'évaluation environnementale, il y a eu des consultations avec les communautés autochtones autour de Big Island et de la nouvelle centrale nucléaire de Darlington, mais, pour ce qui est des rôles précis, je vais devoir vous revenir avec l'information.
Oui. Encore une fois, je ne vais pas parler au nom des Premières Nations, mais la réalité en Ontario, du moins au cours des 10 dernières années, particulièrement dans le cadre de nouveaux projets hydroélectriques dans le Nord de l'Ontario, c'est que les Premières Nations sont des promoteurs et des partenaires dans ces projets. Elles sont des partenaires qui mènent le processus d'évaluation environnementale.
Il y a encore l'obligation de la Couronne de consulter les voisins et d'autres intervenants, mais la réalité dans notre entreprise, en tout cas dans la province à l'heure actuelle, c'est que les projets sont menés par les Premières Nations ou en partenariat avec elles, ce qui fait en sorte que les évaluations environnementales sont des possibilités d'intégrer le savoir écologique traditionnel. La dynamique est différente de ce qu'elle était il y a même 10 ans.
Absolument. L'utilisation du savoir autochtone est un élément essentiel.
Pourriez-vous nous parler de certaines de vos préoccupations et de certains défis auxquels vous faites face concernant les réserves d'habitats? Vous avez tous deux beaucoup parlé des avantages. Monsieur Gibson, voulez-vous parler de certains des défis auxquels vous vous êtes heurté par le passé?
Oui, absolument.
Avec un grand projet comme une nouvelle centrale nucléaire, on cherche à quantifier à l'avance les incidences potentielles de l'installation; il faut donc beaucoup de travail d'équipe et de collaboration dans l'évaluation de l'impact d'une nouvelle installation.
Après avoir évalué cette question et conçu un projet, il faut vraiment quantifier les pertes et les gains de productivité et en rendre compte. Ce processus, à mon avis, a pris beaucoup de temps à OPG. Nous n'avons pas tenté d'y échapper, mais c'était un processus détaillé.
Encore une fois, je ne peux pas vous en expliquer tous les aspects économiques aujourd'hui, mais nous examinons annuellement la productivité du marécage de Big Island afin de nous assurer qu'elle compense les effets potentiels de l'installation.
Excellent.
Monsieur Norris, je reviens à vous. Avez-vous des commentaires sur les défis auxquels vous faites face?
Oui. Je crois que j'ai dit dans ma déclaration liminaire que j'ai eu le plaisir de siéger au Groupe consultatif sur la stratégie de conservation des zones humides du ministère des Richesses naturelles et des Forêts de l'Ontario. Le gouvernement précédent nous avait demandé, au cours d'une période d'environ six mois, de lui fournir des conseils sur une politique de compensation, ce qui est vraiment ce dont nous parlons ici. Nous avons discuté de réserves d'habitats, comme nous le faisons en ce moment, et de réserves d'habitats établies par des tiers.
Selon mon expérience, la mise en œuvre du concept n'est pas la partie difficile. Je crois que c'est ce que devrait faire la Loi sur les pêches. Là où le bât blesse, comme je l'ai dit plus tôt, c'est l'établissement du cadre réglementaire — la façon dont ce sera administré, ce qui va compter et ce dont aura l'air le cadre stratégique entourant la mise en œuvre. L'ensemble du travail est utile; il s'agit de réflexions et de travaux qui ont été réalisés auparavant.
Merci, monsieur Johns. Votre temps est écoulé.
Nous allons maintenant revenir du côté du gouvernement et à M. Hardie. Vous avez sept minutes ou moins.
Allez-y, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Merci à vous deux d'être ici.
Quand avez-vous travaillé sur les terres humides du projet Big Island, monsieur Gibson? Vous en souvenez-vous?
Je cherche dans mes notes. Nous rédigeons un rapport annuel, alors j'ai celui de 2018 devant moi. Je crois que ce projet a été lancé vers 2013.
D'accord.
Voici comment je comprends la notion de réserves d'habitats établies par des tiers. On a un projet, on fait un effort d'évitement et d'atténuation, mais on constate qu'il y a des effets néfastes nets. On va ensuite trouver quelqu'un qui a fait quelque chose de bien et on va essentiellement lui acheter des crédits.
Je suppose que la réglementation devrait plus ou moins prévoir que tout ce qu'on achète devrait être équivalent ou même un peu supérieur à ce qui a été perdu.
Cela donne à penser que, si une personne a travaillé de manière proactive sur une certaine restauration, ou peu importe, il faudrait un certain temps avant de constater exactement l'efficacité des travaux.
Quel délai une personne doit-elle prévoir si elle veut mettre en place une réserve d'habitats par des tiers? Comment pourrait-elle savoir, par exemple, qu'une entreprise de la taille de la vôtre prévoyait la prise de mesures qui lui permettrait peut-être de travailler avec vous?
Cela revient directement aux rouages du système. J'aimerais savoir comment cela fonctionnerait.
Absolument. Je pense qu'il y a beaucoup d'exemples aux États-Unis de la façon dont ces réserves sont établies et de ceux qui investissent initialement dans ces réserves pour les mettre en œuvre, mais la productivité change au fil du temps.
Dans le cas du projet d'OPG dans le marécage de Big Island, je crois qu'il s'agissait d'une hypothèse ou d'un crédit de productivité prévue. De quoi auraient l'air les crédits à la deuxième, à la troisième, à la quatrième et à la cinquième année? Les terres humides deviennent en réalité plus efficaces et plus productives au fil du temps. On doit s'appuyer sur l'expertise technique pour examiner ces aspects.
Dans le cas précis d'une personne qui réalise ce travail, souvent les organisations comme OPG ne possèdent pas nécessairement d'expertise technique à l'interne à cet égard. Des organisations se spécialisent dans ce domaine, alors, en établissant un partenariat, on peut presque garantir de meilleurs résultats après l'établissement d'une réserve, de crédits et d'une productivité. S'il faut que je vous achète 10 crédits, l'organisme de réglementation peut insister pour que j'en achète 12 et s'assurer qu'il y a un meilleur résultat pour éviter toute incertitude liée au projet.
On a mentionné à plus d'une reprise Canards Illimités. Bien sûr, l'organisme est bien connu pour restaurer des habitats, mais il me semble que, s'il fait du travail qu'il allait faire de toute façon, nous lui donnons soudainement la possibilité de monnayer ce qu'il fait.
On pourrait se retrouver quand même avec une perte nette d'habitats s'il accomplit le travail qu'il était censé faire. Ce n'est pas comme s'il allait entreprendre des travaux supplémentaires pour compenser les dommages causés par un projet. Me comprenez-vous?
Oui, à condition qu'il n'y ait aucune limite sur sa capacité d'accomplir ce travail aujourd'hui. S'il n'y a pas de problèmes de capacité ou de limites financières qui empêcheraient ces organisations d'en faire plus, alors je serais d'accord avec vous, mais s'il y a des organismes qui cherchent à profiter de ces occasions et de ces types de projets et qu'ils se heurtent à des limites d'ordre financier, alors des sociétés comme OPG auront la possibilité de jouer un rôle, à mon avis.
Je vais me tourner vers vous, monsieur Norris, et ensuite M. Gibson pourra intervenir.
Les témoins précédents nous ont dit que le projet de loi permettrait seulement la mise en place d'une réserve d'habitats par des tiers, mais que ce sont les éléments essentiels de la réglementation qui définiraient vraiment son fonctionnement. J'aimerais vous demander conseil. Selon vous, quels seraient les éléments essentiels de la réglementation qui feraient en sorte qu'une réserve d'habitats par des tiers fonctionnerait dans l'intérêt public?
Avez-vous des commentaires à ce sujet?
Oui. C'est une excellente question.
Je crois qu'il faudrait penser à définir dans la réglementation quelles organisations ou quels types d'organisation seraient admissibles à la vente de crédits de compensation. Il faudrait certainement qu'on précise la notion de crédits échangeables et ce qu'ils supposent. Tous ces éléments devraient assurément être décrits dans le cadre réglementaire.
J'allais justement ajouter quelque chose. Je prends des notes à mesure que j'écoute M. Norris.
D'abord, il faut des systèmes transparents de débit et de crédit dans lesquels les Canadiens auraient confiance. Ensuite, il faut une approche fondée sur la science et les données probantes, comme des comités consultatifs scientifiques ou un centre d'expertise au sein du MPO. À l'heure actuelle, le ministère possède un centre d'expertise pour l'hydroélectricité. Je crois que c'est au Manitoba. Il serait approprié de mettre en place un type similaire de centre d'expertise sur les réserves d'habitats.
En ce moment, nous avons des réserves d'habitats gérées par les promoteurs, ce qui est une bonne chose, mais pour le public ou les groupes en général à l'extérieur de grandes sociétés comme OPG ou, comme je l'ai mentionné plus tôt pendant mon témoignage, le port de Vancouver...
Oui, le Port Metro Vancouver. Merci.
Pour les petits joueurs, il serait bénéfique d'avoir ce genre de groupe consultatif scientifique au sein du MPO.
Pensez-vous qu'il y a des risques ou des dangers à changer quelque chose comme cela en marchandise? Il me semble, surtout avec tout ce qui se passe dans le monde de la haute finance — que je ne prétends pas comprendre —, qu'il y a effectivement une distorsion du marché. Toutes sortes de choses se produisent. Je ne veux pas dire que nous allons peut-être être témoins de blanchiment d'argent, mais que voulez-vous, c'est ce qui se passe partout. Allez-vous devoir vous assurer que les dispositions réglementaires couvrent ce genre de choses?
Je n'ai aucune attente quant au délai dans lequel la réglementation sera mise en place par le MPO. Je crois que ce que nous cherchons à avoir et ce que nous soutenons en quelque sorte, c'est une loi habilitante qui permette de commencer.
Je partage vos préoccupations. Je crois que c'est pour cela qu'il faut une réglementation intelligente. Je crois que tous les représentants des associations que vous avez entendus aujourd'hui seraient heureux de s'asseoir avec le MPO pour l'appuyer à cet égard.
Merci, monsieur Hardie.
Nous allons maintenant passer aux conservateurs pour cinq minutes ou moins.
Monsieur Arnold, vous pouvez y aller.
Merci, monsieur le président.
Je tiens à vous remercier tous les deux d'être ici aujourd'hui et d'avoir donné le témoignage intéressant que nous avons entendu par rapport aux réserves d'habitats, entre autres.
J'aimerais revenir sur un témoignage que nous avons entendu en décembre 2017. M. David Schindler a dit que le cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques du gouvernement libéral présente trois scénarios pour le remplacement de l'énergie produite à partir de combustibles fossiles par des centrales hydroélectriques de 100 000 mégawatts. Il a dit que cette nouvelle capacité en matière d'énergie hydroélectrique nécessiterait la construction de 100 installations de la taille de Muskrat Falls ou du site C d'ici 2050.
Combien de réserves d'habitats devront être créées afin de compenser la construction de 100 installations de la taille du site C ou de Muskrat Falls?
Vous avez posé une question très précise par rapport à l'hydroélectricité, et je vais tenter d'y répondre de mon mieux...
Je commencerai en disant que je ne peux pas le quantifier. Cependant, l'idée derrière le développement de l'hydroélectricité et des réservoirs dépend de la façon dont vous voyez la chose. Le paysage s'en trouve changé. Lorsque vous créez un réservoir, vous modifiez un environnement fluvial pour en faire un milieu lacustre, ce qui est différent.
Toutefois, regardons les choses sous un autre angle, le lac Seul est un énorme lac dans le nord de l'Ontario qui était jadis une rivière. Il a été transformé en lieu de pêche naturel de renommée mondiale en majeure partie en raison de la régulation de son débit d'eau et de l'hydroélectricité. Vous avez donc créé un réservoir très important, et on pourrait ajouter que cela a entraîné une augmentation de la productivité de la pêche. Toutefois, le projet a été mis sur pied à des fins d'hydroélectricité.
Je me suis entretenu à de nombreuses reprises avec le MPO à ce sujet, et il ne voit pas la Loi sur les pêches et les mesures de compensation de cette façon. Cependant, un habitat est créé lorsque vous créez de vastes environnements lacustres.
Cela nécessitera peut-être un changement du point de vue, mais pour permettre qu'autant de centrales hydroélectriques soient construites... je vais prendre un autre exemple. La rivière Lower Mattagami a déjà été une rivière, et nous avons maintenant un environnement lacustre à faible débit qui est sans doute plus productif qu'il ne l'était à l'origine. Une zone humide a été créée, et nous pouvons maintenant apercevoir des sauvagines sur les berges des zones humides. Nous ne voyons pas cela comme un avantage net issu du projet, mais plutôt comme un produit dérivé.
Merci.
J'aimerais vous demander à tous les deux de commenter là-dessus. Il a été affirmé que ce système de réserves d'habitats et de compensation est nouveau. J'aimerais répliquer à cela en disant que ce n'est pas le cas — ce système existe depuis environ 60 ans avec le fonds en fiducie du bassin du Columbia, grâce auquel de l'argent en provenance des États-Unis est donné au Canada pour financer des projets de pêche qui portent sur l'habitat du poisson, et ce, en raison des répercussions qu'a eues la construction du barrage sur le fleuve Columbia. À l'heure actuelle, il y a 12 ou 13 barrages situés à différents endroits — certains se trouvent en Colombie-Britannique et d'autres aux États-Unis —, et la compensation revient au Canada et sert directement à financer des projets qui portent sur l'habitat du poisson dans l'ensemble de la région.
Est-ce que l'un d'entre vous pourrait parler d'autres projets que vous connaissez dans le cadre desquels on a mis en place ce type de réserve d'habitats ou de compensation de l'habitat? Convenez-vous que ce concept n'est pas nouveau?
Je crois que vous voulez parler des pêches anadromes ou océaniques, où le saumon entre dans une rivière et en sort chaque année. Nous n'en avons pas nécessairement beaucoup en Ontario.
Les fonds de la fiducie du bassin du Columbia allaient en fait à des espèces non anadromes, donc des espèces résidentes.
Il s'agit d'un modèle différent, parce que ce dont vous êtes en train de parler, c'est de l'investissement de ressources financières directement dans un fonds en fiducie, qui administre ensuite les résultats souhaités. Il y a donc un intermédiaire.
Désolé, dans ce cas, ce n'est pas le promoteur qui fait le travail ou qui donne la compensation. Ce n'est pas quelque chose de nouveau qui... Ce qui est restreint, c'est la compensation qui provient uniquement du promoteur dans...
Merci.
Vous avez dit que vous aviez vu des gains nets en matière d'habitat dans le cadre de certains des projets que vous avez entrepris.
Je vais élaborer un peu par rapport à ce commentaire.
Ce que je voulais dire, c'est que vous pouvez avoir l'assurance qu'il y aura un effet positif net sur la productivité. Ce qui se passe en grande partie avec le régime de réglementation en place à l'heure actuelle, c'est qu'il y a une certaine incertitude par rapport au plan de compensation. Si vous autorisez un projet ou une activité, il y a une certaine incertitude quant à l'efficacité qu'aura la compensation. Avec la réserve d'habitats, vous pouvez obtenir plus de certitude parce que le projet est élaboré à l'avance.
Merci, monsieur Arnold.
J'aimerais prendre le temps de remercier nos deux témoins, M. Gibson et M. Norris, de leurs exposés ici aujourd'hui.
Pour être honnête, lorsque nous avons commencé l'examen de cette question, je pensais que la conversation serait quelque peu ennuyante, mais ça n'a certainement pas été le cas. Cela s'est avéré être très intéressant.
Merci à vous deux.
Je vais suspendre la séance pour une minute pour que nous discutions brièvement de ce qui se passera la semaine prochaine.
Merci.
[ La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication