FOPO Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent des pêches et des océans
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 9 juin 2016
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bienvenue à la 18e séance du Comité permanent des pêches et des océans. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons poursuivre notre étude de la pertinence du principe de la contiguïté et des politiques de propriétaire-exploitant et de la séparation des flottilles dans la Région du Pacifique.
Nous recevons aujourd'hui plusieurs témoins. Chaque groupe aura droit à un maximum de 10 minutes. Je remercie chacun d'entre eux d'avoir accepté de se joindre à nous en personne, par vidéoconférence ou par téléconférence.
En guise d'introduction, je vous présente M. Jim McIsaac, directeur général de la T. Buck Suzuki Environmental Foundation. Il se joint à nous par téléphone de Haida Gwaii, en Colombie-Britannique.
Êtes-vous là, Jim?
Merci de vous joindre à nous. Nous n'avons pas encore réussi à prendre contact avec M. Nobels, votre directeur du Nord, mais nous essayons.
Nous accueillons aussi M. Marc Allain, secrétaire exécutif de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada.
Monsieur Allain, nous sommes ravis de vous recevoir en personne.
M. Bruce Turris, directeur adjoint de la Canadian Groundfish Research and Conservation Society, se joint également à nous.
Monsieur Turris, nous sommes heureux de vous voir.
Nous accueillons aussi, par vidéoconférence, Mme Christina Burridge, directrice exécutive de la BC Seafood Alliance.
Madame Burridge, nous sommes ravis de vous voir.
Merci. Vous nous entendez, c'est très bien.
M. Robert Morley, de la Canadian Fishing Company, se joint à nous par vidéoconférence.
Nous entendrons d'abord les exposés de 10 minutes, puis nous passerons aux questions. Commençons. Puisque nous n'avons pas encore joint M. Nobels...
Je constate que selon l'ordre du jour, M. McIsaac devait participer par vidéoconférence, et vous avez dit qu'il était au téléphone. Pouvez-vous faire le point?
Je présume que nous ne pouvions pas le joindre par vidéoconférence. Apparemment, nous ne pouvions pas trouver de studio; nous avons donc dû communiquer avec lui par téléphone. Je ne sais pas quoi vous dire de plus.
Puisque nous n'avons pas encore réussi à prendre contact avec M. Nobels, monsieur McIsaac, je vais reporter votre tour et commencer par les autres groupes. Peut-être que M. Nobels sera là plus tard. Est-ce que cela vous convient?
Merci de votre patience, monsieur McIsaac.
Monsieur Turris, pouvez-vous nous présenter votre exposé, s'il vous plaît?
Bonjour. Merci de me permettre de m'adresser à vous aujourd'hui pour discuter de cette question.
Je m'appelle Bruce Turris. Je suis directeur adjoint de la Canadian Groundfish Research and Conservation Society, un organisme de l'industrie de la pêche commerciale qui représente des acteurs de la pêche au chalut du poisson de fond en Colombie-Britannique. Nos membres comprennent des titulaires de permis, des propriétaires de bateaux, des détenteurs de quotas, des membres d'équipage et des entreprises de transformation.
Je suis économiste des pêches de formation et je participe à la gestion de la pêche commerciale depuis le début des années 1980. Mon premier projet a été l'instauration d'un programme d'observateurs en mer pour une coentreprise de pêche du poisson de fond au large de la côte Ouest. J'ai travaillé au ministère des Pêches et des Océans pendant 14 ans. J'ai quitté le ministère en 1998 pour fonder une entreprise nommée Pacific Fisheries Management, dont je suis le président. L'entreprise offre des services de consultation, notamment dans les domaines de la gestion des pêches, de la certification, des politiques et de la planification stratégique, et ce, non seulement à des organismes de pêche commerciale, mais aussi à des pêcheurs à la ligne, au MSC et à des organismes gouvernementaux.
Je suis ici aujourd'hui pour vous parler des politiques de contiguïté, de propriétaire-exploitant et de séparation des flottilles dans le contexte de la pêche commerciale au chalut du poisson de fond en Colombie-Britannique. Pour comprendre pourquoi il n'est pas possible d'appliquer ces politiques à la pêche au chalut du poisson de fond en Colombie-Britannique, il faut comprendre l'évolution de la pêche elle-même.
La pêche au chalut du poisson de fond est pratiquée au large de la côte Ouest de la Colombie-Britannique depuis les années 1940. Avant l'élargissement de la compétence, des chalutiers russes, polonais, japonais et canadiens pêchaient au large de la côte Ouest; il y avait très peu de réglementation, ou pas du tout. En 1976, simultanément à la création d'une ZEE, à l'élargissement de la compétence, à l'élimination progressive de la pêche étrangère et au redressement de préoccupations liées à la capacité d'exploitation excédentaire, le gouvernement a limité l'accès à la pêche au chalut du poisson de fond en Colombie-Britannique.
Un total de 142 permis de pêche à accès limité de catégorie T pour la pêche au chalut du poisson de fond ont été accordés, en fonction du rendement passé et des investissements dans la pêche. Entre autres, de nombreux permis ont été délivrés à des bateaux qui appartenaient entièrement ou partiellement à des entreprises de transformation comme J.S. McMillan, BC Packers, Ocean Fisheries et la Canadian Fishing Company.
La pêche au chalut du poisson de fond a toujours nécessité de gros bateaux. Il s'agit d'une pêche à volume élevé et à marge faible. Elle cible de nombreuses espèces de poisson de fond partout sur la côte, tout au long de l'année. La pêche doit se faire pendant toute l'année pour répondre aux demandes du marché.
Depuis les débuts de la pêche au chalut du poisson de fond, les coûts associés aux bateaux, à l'équipement, à l'entretien, à l'équipage et à la pêche elle-même sont extrêmement élevés, tout comme les coûts liés à la transformation du poisson de fond. C'est une des raisons qui expliquent la propriété conjointe et l'affiliation entre les capitaines de bateaux, les propriétaires de bateaux et les entreprises de transformation.
En outre, le marché le plus important de cette pêche est la côte Ouest des États-Unis, principalement la Californie. Il faut livrer des produits fraîchement transformés, des filets ou des poissons vidés et dépourvus de leur tête et de leur queue, chaque semaine, tout au long de l'année. Pour garantir l'approvisionnement et pour conserver des marchés importants, les entreprises de transformation investissent souvent dans des chalutiers.
Depuis la limitation de l'accès, les entreprises de transformation de la Colombie-Britannique sont propriétaires ou copropriétaires d'environ 25 % des permis, mais il s'agit souvent des plus grands navires, qui représentent plus de 50 % de la prise. Habituellement, ces bateaux sont les plus productifs de la flottille; ils ont généralement des copropriétaires et des capitaines indépendants.
Durant les années 1970, 1980 et au début des années 1990, les activités de pêche au chalut du poisson de fond ont continué à prendre de l'expansion dans le cadre d'un régime de gestion qui tentait de fournir un accès toute l'année en limitant de plus en plus l'accès, et ce, en réduisant les limites par sortie en fonction des espèces et sur toute la côte ou les limites du nombre de sorties et du temps de pêche. Les TAC étaient basés sur les meilleures données scientifiques existantes et ils touchaient souvent l'ensemble de la côte pour une espèce précise.
La pêche au chalut du poisson de fond cible des espèces multiples. Il n'est pas rare d'attraper plus d'une dizaine d'espèces d'un seul coup. Annuellement, la pêche prend plus de 60 TAC différents et 100 espèces différentes vendues dans le commerce.
Chaque limite par sortie touchait une espèce donnée. Quand les pêcheurs avaient atteint une limite et en ciblaient une autre, ils jetaient les espèces qu'ils n'avaient plus le droit de prendre. À mesure que les limites ont été réduites durant l'année et au cours des années suivantes, le montant de rejets a augmenté considérablement, au point où l'industrie rapportait au gouvernement que la quantité de poissons remis à l'eau excédait le nombre de poissons débarqués.
Au début des années 1990, les rejets de poisson avaient atteint un seuil critique. De plus, nous avions des problèmes de fausses déclarations de prises débarquées. On faisait de fausses déclarations pour éviter la réduction des limites par sortie et pour cacher l'espèce prise afin que personne ne découvre qu'on avait dépassé une limite donnée.
À cette époque, entre 25 et 45 % de la prise annuelle était débarquée dans des ports américains, généralement à Blaine, à Bellingham et à Anacortes. Prince Rupert recevait environ 20 % ou moins de la prise; la majorité des poissons étaient débarqués dans la région du Grand Vancouver et une partie à Ucluelet, sur la côte Ouest de l'île de Vancouver.
Même sans compter les rejets non rapportés et les fausses déclarations de prises, le peu d'information que nous avions sur les prises rapportées montrait que nous excédions les TAC. De fait, le nombre de TAC non respectés augmentait chaque année. La situation est devenue très grave en 1995, quand la pêche a été fermée pour la toute première fois depuis les années 1940. Elle a été fermée parce qu'on avait dépassé beaucoup trop de TAC et on avait contrevenu à des obligations internationales.
Pour des raisons de conservation, on a permis la réouverture de la pêche au chalut du poisson de fond sous réserve de conditions strictes: la présence d'observateurs en mer pour toutes les sorties de chalutage de fond, la vérification à quai de tous les poissons débarqués afin d'obtenir des données exactes sur les espèces, la gestion adaptée aux stocks et la responsabilisation de chaque bateau pour tout ce qu'il prend durant la pêche — non seulement les prises visées, mais aussi les prises accessoires.
En 1997, on a instauré le régime de quota individuel de bateau dans le but de satisfaire ces exigences. De plus, chaque bateau a reçu une part des quelque 60 TAC différents qui ont été établis. La surveillance en mer et les estimations de prises et de remises à l'eau par région et par espèce, suivies par la vérification exhaustive et complète au quai ont permis de rendre des comptes exacts. Tout ce travail était fait par des fournisseurs de services contractuels agréés par le gouvernement.
Les données recueillies en mer et au quai sont combinées pour calculer le poids total des prises rejetées et non rejetées par stock; ce total est ensuite déduit du QIB. Si la prise d'un bateau outrepasse son quota, il doit transférer une partie du poisson à un autre bateau, ou encore il doit rester à quai et ne pas pêcher pour le reste de l'année, jusqu'à ce que la prise soit déduite de son quota de l'année suivante.
C'est un système très complexe. Il faut du temps et de la souplesse pour procéder au déplacement des quotas. Chaque année, les bateaux font environ 4 000 transferts de quotas pour répartir les prises accessoires et pour éviter d'excéder les quotas. Les flottilles doivent collaborer avec leurs entreprises de transformation, en fonction des préoccupations du marché, et avec d'autres flottilles de bateaux indépendants et d'entreprises pour transférer efficacement les quotas afin que tout le monde puisse continuer à pêcher, et c'est ce qu'elles font.
Des 60 QIB ou TAC pour différentes espèces que j'ai mentionnés, 15 se rapportent à des stocks sur l'ensemble de la côte et seulement 13 concernent précisément la région de l'entrée Dixon et du détroit d'Hécate, près de Prince Rupert. Des 63 millions de livres de poisson qui ont été pris jusqu'à maintenant cette année, environ 2,5 millions de livres — ou juste un peu moins de 4 % — ont été attrapés dans le détroit d'Hécate ou l'entrée Dixon — je le répète, la région la plus près de Prince Rupert. Quelque 88 % de ce total, 2,2 millions de livres, a été débarqué dans la région de Prince Rupert, Port Edward et Port Simpson; 33 % de ces 2,2 millions de livres a été transformé à Port Simpson.
Je le répète, c'est une pêche à volume élevé et à marge faible. Pour cette raison, la majeure partie de la transformation est faite à Ucluelet et dans la région du Grand Vancouver, où les économies d'échelle permettent une transformation à valeur ajoutée productive. De plus, c'est près des marchés desservis sur la côte sud-ouest des États-Unis. Aujourd'hui, plus de 98 % du poisson de fond pris en Colombie-Britannique est débarqué et transformé en Colombie-Britannique. Moins de 2 % du total est envoyé de l'autre côté de la frontière.
Cette pêche répond maintenant à toutes les exigences en matière de conservation et de durabilité. Elle est reconnue par des organismes d'écocertification comme le MSC, le Monterey Bay Aquarium, SeaChoice et le programme Ocean Wise de l'Aquarium de Vancouver. De plus, cette pêche demeure rentable et viable parce qu'elle peut être faite sur toute la côte, à des volumes élevés et avec de bonnes économies d'échelle.
Dans cette pêche, les entreprises de transformation sont copropriétaires des navires. Le régime est conçu ainsi parce qu'on veut que le capitaine qui exploite le bateau ait investi dans ce bateau. La copropriété et l'intégration verticale de l'industrie sont essentielles à sa viabilité économique, non seulement pour les entreprises de transformation, mais aussi pour les bateaux et les exploitants de bateaux.
Parfait.
Nous n'arrivons toujours pas à joindre M. Nobels. Nous avons essayé plusieurs fois. La ligne est occupée, et il n'a pas encore répondu à notre courriel.
Monsieur McIsaac, si vous avez une façon de communiquer avec lui directement, ce serait très bien. Je vais revenir là-dessus tout à l'heure.
Je vais donner la parole à Mme Burridge, directrice exécutive de la BC Seafood Alliance.
Merci de vous joindre à nous, madame Burridge. Veuillez présenter votre exposé.
Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie.
La BC Seafood Alliance est un organisme-cadre dont les 17 membres comptent pour environ 90 % des pêches de produits de la mer sauvages de la côte Ouest du Canada, un secteur qui génère environ 850 millions de dollars par année. Nos membres sont principalement des associations qui représentent la totalité ou la majeure partie des titulaires de permis dans pratiquement tous les grands secteurs de pêche commerciale en Colombie-Britannique. Ces secteurs englobent la pêche au saumon et au hareng, autrefois la pierre angulaire de l'industrie qui est à présent éclipsée par la réussite de la pêche à la crevette, à la morue charbonnière, au flétan, à la panope, et d'autres pêches commerciales de poissons de fond et en plongée. Nous sommes, et de loin, l'alliance de pêche commerciale la plus représentative de la côte Ouest, et les pêcheurs indépendants constituent la base de nos membres.
Dans sa version mise à jour publiée en 2014, le rapport préparé par Gordon Gislason montre que le secteur des produits de la pêche sauvages contribue davantage à la valeur des ventes, aux salaires, aux avantages sociaux, à l'emploi et finalement au PIB que l'aquaculture ou la pêche récréative en eaux de marée en Colombie-Britannique. Comment en sommes-nous arrivés là?
Ces 25 dernières années, le ministère des Pêches et des Océans, ou MPO, a mis en place des mesures de gestion qui ont entraîné des changements progressifs visant, pour l'essentiel, à harmoniser les mesures de conservation et les marchés. Résultat: la relation entre l'industrie et le MPO est en général collaborative et pragmatique, et fondée sur l'intendance partagée des ressources halieutiques. Tout un éventail de PME tributaires du marché sont ainsi guidées par des politiques axées sur le marché, ce qui nous permet d'être concurrentiels sur les marchés mondiaux des produits de la mer et de fournir des produits alimentaires salubres et de grande qualité au Canada et dans le monde.
Le secteur des pêches d'espèces sauvages sur la côte du Pacifique mise principalement sur les exportations, et environ 80 % de sa production est vendue sur les marchés mondiaux. Notre secteur est principalement composé de PME indépendantes, dont un grand nombre sont des entreprises familiales, qui sont actives tout le long de la côte. Nous sommes un petit joueur à coût élevé voisin de l'Alaska, qui pêche les mêmes espèces que nous, produit les mêmes produits et les vend aux consommateurs des mêmes marchés que nous, mais à une échelle au moins dix fois supérieure. Comme un filet de saumon kéta pêché à Hokkaido au Japon et transformé en Chine se vend moins cher à Vancouver qu'un filet de saumon kéta pêché en Colombie-Britannique, nous devons faire en sorte que notre saumon local ait davantage de valeur en produisant un produit de qualité supérieure.
Pendant de nombreuses années, l'industrie a été l'un des plus importants employeurs d'Autochtones en Colombie-Britannique. Le nombre de pêcheurs autochtones participant à la pêche commerciale a diminué à la fin du siècle précédent et au début des années 2000, mais ce fut aussi le cas des pêcheurs non autochtones par suite de la mise en place d'un régime gestion des stocks faibles de saumon et des programmes volontaires de retrait de permis du MPO qui ont suivi. L'Initiative des pêches commerciales intégrées du Pacifique, ou IPCIP, a produit des résultats substantiels pour renverser cette tendance: 42 % des permis de pêche au saumon communautaires et admissibles à des réductions de droits sont maintenant détenus par des Autochtones et des Indiens inscrits, 37 % des permis de pêche au hareng rogue au filet maillant, 25 % des permis de pêche au hareng rogue à la senne, 22 % des permis de pêche à la crevette et 21 % des permis de pêche au flétan sont maintenant des permis de pêche commerciale communautaires. Dans l'ensemble, 29,8 % de tous les permis réguliers de pêche commerciale sont à présent entre les mains de pêcheurs autochtones.
Votre Comité s'est donné pour mandat d'étudier la « pertinence du principe de la contiguïté et des politiques de propriétaire-exploitant et de la séparation des flottilles dans la Région du Pacifique ». Permettez-moi d'être claire: ces politiques ne sont pas pertinentes ici. Elles vont à l'encontre de notre réussite tant sur le marché intérieur qu'à l'exportation, de notre capacité à fournir des produits alimentaires aux Canadiens et dans le monde, des exigences du MPO en matière de conservation et, de ce fait, elles minent l'avenir même des ressources qui appartiennent à tous les Canadiens. Ceux qui seraient le plus durement touchés par ces politiques sont les pêcheurs indépendants.
Permettez-moi de me présenter brièvement. J'ai travaillé auprès de diverses organisations de pêcheurs pendant près de 30 ans, en marketing et sur le plan des politiques. J'assume aussi la présidence de l'Association of Sustainable Fisheries, une association internationale qui offre des conseils quant aux normes internationales permettant de mesurer la durabilité des stocks de poissons et fruits de mer sauvages au Marine Stewardship Council, dont la certification est la norme d'excellence en matière de certification des pêches. La semaine prochaine, je suis la seule Canadienne à avoir été invitée, en ma qualité de spécialiste du domaine, à me joindre à Son Altesse Royale le prince Charles afin d'évaluer les progrès accomplis pour assurer la durabilité des produits de la mer.
Les mesures de conservation ont été l'élément moteur de notre secteur depuis les 20 dernières années. Elles ont forgé son développement et encouragé le recours à une approche pragmatique à l'égard de l'intendance. Plus de la moitié de nos pêches, par volume, font partie du programme de certification du Marine Stewardship Council, ou MSC; la plupart des autres sont reconnues par le programme Seafood Watch de l'aquarium de Monterey Bay ou le programme Ocean Wise de l'aquarium de Vancouver.
Comme M. Turris l'a dit, le plan de gestion intégrée des poissons de fond englobe la gestion de 30 espèces selon trois types de matériel de pêche. Chaque bateau est ainsi responsable de chacune de ses prises, qu’elles soient conservées ou non, par l'entremise d'un programme de surveillance des prises reconnu par le MSC comme « l'un des plus rigoureux au monde ». Ce programme prévoit la présence d'observateurs en mer ou la surveillance électronique en tout temps, et la vérification à quai de tous les débarquements.
Nous continuons à innover par l'adoption de nouvelles approches. Nous avons d'ailleurs instauré, avec la collaboration de groupes de conservation, le premier et le seul système de quotas individuels transférables, ou QIT, au monde pour les coraux et les éponges, réduisant ainsi considérablement les répercussions de la flottille de pêche au chalut sur l'habitat benthique. Rien de cela ne se serait produit avec les politiques que vous étudiez.
La décision de passer à un régime de gestion des stocks faibles de saumon dans les années 1990 a profondément changé l'industrie. Les impératifs de conservation ont poussé de nombreuses pêches vers le système des QIT.
En 1980, selon une pêche de type tournoi, il fallait 65 jours de pêche pour capturer tout juste en deçà de 6 millions de livres de flétan, et en 1990, il fallait six jours de pêche pour en capturer 8 millions de livres. Toujours en 1990, le secteur de la transformation du flétan était entièrement dominé par les grandes entreprises de transformation, les seules qui étaient en mesure de congeler de tels volumes en une semaine. Un an plus tard, la flottille de pêche du flétan est passée aux QIT. La pêche au flétan dure à présent 8 mois, et pratiquement chaque livre est vendue fraîche à la côte Ouest des États-Unis par l'entreprise de divers petits transformateurs en Colombie-Britannique, avec très peu de participations des grandes entreprises de transformation, à des prix au débarquement d'environ 8 $ la livre ou plus.
Cette tendance est commune dans la plupart des autres pêches de la Colombie-Britannique. Le changement structurel opéré pour répondre aux exigences en matière de conservation, que ce soit pour le saumon, les poissons de fond ou les produits spécialisés de pêche en plongée, cadre avec la demande croissante sur les marchés des pays de la côte du Pacifique pour des produits vivants et frais, lesquels offrent un rendement de loin supérieur à celui des produits surgelés ou en conserve d'il y a une vingtaine d'années.
Voici d'autres exemples. Prenons les trois dernières années de forte production pour le saumon sockeye, soit 2006, 2010 et 2014. En 2006, nous avons produit près de 200 000 caisses de saumon sockeye en conserve pour une valeur d'environ 40 millions de dollars; il s'agissait d'une forme dominante du produit, plus importante que les volumes combinés de sockeye frais et congelé. En 2014, la majorité du saumon sockeye était vendu frais, et les pêches ont généré 90 millions de dollars en exportations. Les nouvelles mesures de gestion font en sorte qu'il est possible de planifier la production pour répondre aux besoins du marché frais. Cette tendance, pour laquelle la Colombie-Britannique est en position idéale, est là pour rester. Elle correspond à ce que les consommateurs demandent et nous pouvons répondre à cette demande.
Pour la pêche à la panope, une pêche en plongée, la production avant les QIT se retrouvait dans la chaudrée de palourdes de BC Ferries ou était vendue surgelée au Japon à des prix dérisoires. À présent, pratiquement toute la panope, peu importe où elle est pêchée sur la côte, est livrée à des transformateurs de Vancouver qui l'expédient vivante 365 jours par an en Chine, à Hong Kong et sur d'autres marchés, pour une valeur annuelle de plus de 50 millions de dollars. Sous forme de produit vivant, la panope est hautement périssable et nécessite des échantillonnages exhaustifs pour la détection de la toxine paralysante des mollusques et d'autres toxines. Les seuls laboratoires permettant de procéder à cet échantillonnage se trouvent à Vancouver, tout comme le bureau de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, ou ACIA, qui délivre les certificats sanitaires. La demande des marchés, les laboratoires, la facilité du transport et le coût de la validation des prises procurent inévitablement à la vallée du bas Fraser un avantage concurrentiel par rapport au nord.
Deux autres points. Premièrement, le secteur des pêches d'espèces sauvages en Colombie-Britannique finance la recherche scientifique parce que le régime de gestion incite à une bonne intendance des ressources. Le secteur de la panope, par exemple, investit environ 1,4 million de dollars par an pour l'évaluation des stocks, la surveillance et d'autres activités de recherche. Le secteur du flétan investit quant à lui plus de 1 million de dollars pour ce genre d'activités, et le secteur des poissons de fond investit environ 3,5 millions de dollars. Deuxièmement, selon le régime de gestion, la pêche aux poissons de fond, par exemple, qui est active pratiquement toute l'année, fournit de l'investissement en capitaux et des infrastructures sur l’île de Vancouver et dans le nord pour les autres secteurs de pêche qui sont saisonniers.
Le principe de la contiguïté au Canada atlantique s'applique dans le contexte des quotas alloués par le MPO aux flottilles se trouvant le plus près des stocks de poissons, sans dicter où le poisson devrait être transformé dans une province donnée. Les exigences relatives à la transformation minimale à Terre-Neuve-et-Labrador vont disparaître sous le régime de l'accord économique et commercial global, ou AECG. Imposer des exigences pour la transformation des produits locaux en Colombie-Britannique irait à l'encontre des règles du commerce international. Les États-Unis ont en effet remporté toutes les contestations commerciales relatives à de telles exigences au titre du GATT et de l'ALENA.
Les dernières restrictions d'exportation sur la rogue de hareng ont été retirées en 2012. Par conséquent, nous avons été en mesure de développer un nouveau marché au Japon pour la rogue provenant de petits poissons qui auparavant auraient été laissés à l'eau. Ce nouveau marché a été profitable pour les pêcheurs indépendants et les entreprises qui ont été suffisamment habiles pour tirer parti des nouveaux débouchés et de la demande croissante pour des produits de la mer sauvages de qualité supérieure ici comme à l'étranger.
En résumé, la contiguïté, les politiques de propriétaire-exploitant et la séparation des flottilles ne sont pas pertinentes en Colombie-Britannique. Au cours des 20 dernières années, la conservation des ressources et les demandes des marchés ont entraîné la création d'une industrie souple et adaptée aux marchés qui a développé de nouveaux produits et de nouveaux marchés, en cherchant toujours à maximiser la valeur des ressources gérées de façon durable. Notre avantage concurrentiel réside dans notre proximité par rapport aux marchés de la côte du Pacifique aux États-Unis, au Japon, en Chine et d'autres marchés où nous pouvons vendre des produits vivants ou frais. Un bon réseau de transport se traduit par une durée de conservation plus longue des produits, des consommateurs satisfaits et des prix maximaux pour les produits.
La structure même de l'industrie, qui a évolué au cours des 20 dernières années par l'intermédiaire des QIT ou d'autres moyens, rend les pêcheurs responsables et redevables, faisant d'eux de bons gestionnaires des ressources à long terme. Cela se traduit par un secteur des pêches diversifié où les petits bateaux et les plus grands peuvent prospérer comme de petites entreprises, exerçant leurs activités de plus en plus sur une base annuelle plutôt que saisonnière et devenant ainsi moins dépendants de l'assurance-emploi. Cela signifie que nous investissons pour la recherche scientifique, la surveillance et la gestion parce que nous en voyons la nécessité et la valeur. Cela signifie que nous payons pour obtenir la certification du MSC et l'approbation d'autres tiers qui sont exigées sur les marchés canadiens et internationaux. Si on reprend les principes applicables à la flottille de pêche côtière du Canada atlantique dans la côte Ouest, cela détruira la valeur des pêches de cette région et toutes leurs réussites.
Merci, monsieur le président.
Merci, madame Burridge.
Nous allons maintenant écouter M. Robert Morley, qui représente la Canadian Fishing Company. Il nous parle lui aussi par vidéoconférence.
Monsieur Morley, je vous invite s'il vous plaît à prononcer votre exposé.
Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité.
Mon nom est Robert Morley, et je suis le vice-président de la production et du développement organisationnel de la Canadian Fishing Company.
Je suis un économiste de formation, et j'ai commencé ma carrière en 1974 au sein du ministère des Pêches et des Océans, ou MPO. J’ai quitté le gouvernement fédéral après 13 années, puis j'ai travaillé 10 années pour le Fisheries Council of British Columbia, une association commerciale qui représente toutes les grandes entreprises de transformation du poisson en Colombie-Britannique. Je suis à l'emploi de la Canadian Fishing Company depuis 20 ans.
Je joue un rôle actif au sein de divers conseils consultatifs et associations industrielles depuis de nombreuses années. Je suis le président sortant du Conseil canadien des Pêches, et je suis actuellement membre du Comité du fleuve Fraser de la Commission du saumon du Pacifique.
La Canadian Fishing Company, ou Canfisco, est la plus grande entreprise de pêche et de transformation du poisson de la côte Ouest. Nous possédons également des filiales aux États-Unis, à savoir Alaska General Seafoods et Leader Creek Fisheries. Nous achetons le poisson auprès d’une flotte de 860 navires, et nous avons 8 usines de transformation. Nous participons principalement à la pêche du saumon sauvage, du hareng, des poissons de fond, du merlu et du flétan.
Dans le cadre de nos activités de pêche et de transformation, nous employons quelque 5 500 personnes, de Seattle et de Washington jusqu'à l’ouest de l’Alaska, et en passant par la Colombie-Britannique. Nous vendons des produits de la mer frais, congelés, en conserve, fumés et à valeur ajoutée sur le marché intérieur et sur 25 marchés d’exportation. Canfisco est une entreprise entièrement canadienne, et 2016 était notre 110e année d'opération dans le secteur des produits de la mer de la côte pacifique.
L'étude de votre Comité fait suite à la motion suivante:
Que le Comité des pêches et des océans entende des témoins sur la question de la contiguïté et des politiques relatives au propriétaire-exploitant et à la séparation des flottilles, surtout en ce qui concerne les conséquences de la fermeture de l’usine de Canfisco à Prince-Rupert.
Vous avez peut-être lu des reportages médiatiques et entendu des témoignages au sujet de la taille de Canfisco, de ses permis, de sa part de marché et de ses opérations. Une bonne partie de ce que vous avez entendu est fondée sur des renseignements erronés, des ouï-dire ou des spéculations. Dans d’autres cas, il s'agit de pures inventions visant à soutenir un point de vue. Je suis ravi d'avoir la chance de vous présenter les faits sur la société et ses activités. Je vais également vous donner un nouvel éclairage sur les réalités économiques du milieu de la transformation du poisson en Colombie-Britannique. L'industrie doit activement livrer concurrence en Colombie-Britannique pour s'approvisionner en poissons auprès des pêcheurs, et pour attirer les consommateurs sur les marchés nationaux et internationaux, étant donné que la production du secteur de la pêche en Alaska est nettement plus importante que celle de la Colombie-Britannique.
Certains prétendent que Canfisco contrôle 80 % de la pêche au hareng et 70 % de la pêche au saumon en Colombie-Britannique. Mais voici la réalité.
Canfisco possède 32 % des 275 permis de pêche au saumon à la senne. Nous détenons 3 des 1 379 permis de pêche au saumon au filet maillant, soit 0,2 % d'entre eux. Nous ne possédons aucun des 440 permis de pêche au saumon à la traîne. Dans l’ensemble, Canfisco possède donc 4 % de l'ensemble des permis de pêche au saumon en Colombie-Britannique.
Au cours des six dernières années, Canfisco a acheté entre 29 et 48 % des prises totales de saumon de la Colombie-Britannique, ce qui représente en moyenne quelque 37 % de l’ensemble des débarquements. Pour ce qui est de la pêche au hareng en Colombie-Britannique, Canfisco détient 30 % des permis de pêche du hareng rogué à la senne et 12 % des permis de pêche du hareng rogué au filet maillant. Canfisco achète et transforme environ 30 % de l'ensemble des débarquements de hareng rogué en Colombie-Britannique.
Dans le cas des pêches qui sont gérées au moyen de parts individuelles ou de quotas individuels transférables, ou QIT, la participation de Canfisco est beaucoup plus petite. Nous possédons 21 % du quota de poissons de fond, 15 % du quota de merlu du Pacifique, 3 % du quota de flétan et 2 % du quota de morue charbonnière. Nous n'avons pratiquement rien dans les autres pêches.
Par conséquent, contrairement à ce que prétendent les rapports erronés, les politiques d’octroi de permis de la Colombie-Britannique n’ont pas donné lieu à une concentration ou à un contrôle accrus de Canfisco et des entreprises avec lesquelles nous avons fusionné.
Même si Canfisco peut être considérée comme une grande entreprise en Colombie-Britannique, il faut mettre les choses en perspective en tenant compte de notre compétiteur, à savoir l'Alaska. Au cours de la dernière décennie, les débarquements de saumon en Colombie-Britannique étaient en moyenne de quelque 48 millions de livres par année, alors qu'ils étaient de 150 millions de livres par année dans les années 1980 et 1990. En revanche, les débarquements de l’Alaska ont atteint 823 millions de livres par année dans la dernière décennie. Les prises totales de la Colombie-Britannique ne représentent que 5 % de l’approvisionnement en saumons sauvages de l'Amérique du Nord. L'Alaska offre des produits de la même qualité, qu'elle vend aux mêmes consommateurs au Canada, aux États-Unis et à l’étranger. Sur la scène mondiale dans laquelle nous livrons concurrence, Canfisco est donc un joueur très modeste.
Je vais maintenant parler de ce qui est à l'origine de la présente étude: la cessation de nos activités de mise en conserve à Prince Rupert. D'abord, j'aimerais préciser que nous n'avons fermé aucune de nos usines de Prince Rupert. Nous allons poursuivre nos activités et débarquer tout le poisson que notre flottille pourra pêcher cet été et par la suite. Nous avons simplement changé la forme de nos produits; du saumon en conserve, nous sommes passés aux produits de saumon frais et congelés. Plusieurs raisons ont motivé cette décision opérationnelle: l'évolution des marchés et des préférences des consommateurs, l'inconstance de l'approvisionnement en poisson et la hausse des coûts.
La conserverie de saumon de Prince Rupert a été construite et agrandie dans les années 1980 pour pouvoir produire 500 000 caisses de saumon par année. Le but était de transformer du saumon pêché au nord de la Colombie-Britannique et au sud-est de l'Alaska. La conserverie n'a atteint l'objectif des 500 000 caisses que trois fois dans toute son existence. La dernière fois, c'était en 1995. Dans les 10 dernières années, le déclin des débarquements de saumon en Colombie-Britannique, la baisse des importations de poisson d'Alaska et l'évolution des débouchés pour les produits du saumon ont fait en sorte que la conserverie n'a réussi à produire 200 000 caisses qu'une seule fois, la moyenne s'établissant à 116 000 caisses par année pendant cette période.
En 2015, nous n'avons produit que 42 000 caisses. Soixante-dix pour cent du saumon mis en conserve avait été pêché en Alaska, puis amené de notre conserverie de Ketchikan, en Alaska, dans le seul but de faire travailler les employés de l'usine de Prince Rupert — aussi bien oublier le principe de la contiguïté .
Il n'était pas viable de faire fonctionner une grosse usine équipée de plusieurs lignes pour le remplissage des boîtes. La consommation mondiale de saumon en conserve diminue d'environ 1 % chaque année depuis plusieurs décennies. Depuis 15 ans, huit autres grandes conserveries de la Colombie-Britannique ont cessé leurs activités. Les conserveries de l'Alaska — y compris la nôtre — suffisent à elles seules à combler la demande mondiale; elles sont plus productives, elles disposent d'un approvisionnement plus constant en saumon et bénéficient de coûts unitaires de main-d'oeuvre par caisse beaucoup plus bas que celles de Prince Rupert.
Bien que Canfisco obtienne environ la moitié de ses stocks de saumon de bateaux de pêche dont elle est en partie propriétaire, elle subit la concurrence d'autres acheteurs de la Colombie-Britannique dont aucun ne met le saumon en conserve. Ils le vendent plutôt sur les marchés à valeur élevée du frais et du congelé. Si nous voulons attirer les pêcheurs indépendants et leur acheter le poisson à un prix concurrentiel, nous devons faire la même chose.
Canfisco transforme 100 % du saumon et des autres espèces achetées en Colombie-Britannique dans des installations situées dans la province. Pour tout le saumon débarqué à Prince Rupert, nous faisons la transformation primaire et la transformation des oeufs dans l'une de nos deux usines qui y sont situées. Le poisson que nous ne pouvons vendre frais est congelé dans nos installations de la vallée du bas Fraser.
Quant à l'impact de cette décision opérationnelle sur l'emploi, divers chiffres allant de 300 à 500 pertes d'emploi ont été avancés par d'autres et rapportés par les médias. Mais voici les faits. En 2015, notre usine de Prince Rupert employait 411 travailleurs. En moyenne, pour toute l'année, chacun a travaillé 302 heures. C'est un travail saisonnier pour une grande partie de l'effectif, qui ne travaille que quelques semaines par année.
Le roulement habituel de la main-d'oeuvre est élevé. Nous embauchons normalement de 200 à 300 travailleurs chaque année. En fait, nous avons chaque fois du mal à trouver tous les travailleurs nécessaires pour faire fonctionner notre saumonerie de Prince Rupert à plein régime. Le nombre exact est difficile à prédire puisqu'il dépendra du facteur imprévisible que sont les débarquements de poisson, mais nous prévoyons d'embaucher bien au-delà de 200 travailleurs cet été. Outre la quinzaine de personnes de métier qui ont été mises à pied et indemnisées, nous prévoyons que tous les travailleurs ayant de l'ancienneté auront autant de travail que par les années passées.
Le syndicat s'est prononcé sur la transformation à valeur ajoutée d'une plus grande quantité de saumon à Prince Rupert. La première question qui se pose est celle de l'accès à des installations de congélation et de réfrigération. Depuis la fermeture de l'entrepôt réfrigéré J.S. McMillan, il n'y a nulle part à Prince Rupert où entreposer le saumon congelé en vue de sa transformation secondaire.
De plus, la majeure partie du saumon débarqué, environ 80 %, est du saumon rose. Pour produire des filets ou des portions de saumon rose qui soient commercialisables, il faut les désarêter. Or il n'existe aucune machine capable de le faire efficacement, et le désarêtage à la main n'est rentable que dans les pays où la main-d'oeuvre est très bon marché.
Il n'est pas très logique d'un point de vue économique d'investir dans de nouvelles installations de congélation et de réfrigération monovalentes à Prince Rupert alors que la capacité d'entreposage ailleurs en Colombie-Britannique est largement sous-utilisée.
Pour résumer, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, j'affirme que même sans le principe de la contiguïté, les politiques de propriétaire-exploitant et la séparation des flottilles, nous sommes une industrie productive et concurrentielle qui transformons les ressources halieutiques du Pacifique sur le territoire de la Colombie-Britannique, qui fabriquons des produits de qualité à valeur très élevée et qui payons adéquatement les pêcheurs.
Merci.
Merci, monsieur Morley.
Je voulais seulement dire que nous devrions avoir M. Nobels sur la ligne.
Monsieur Nobels, est-ce que vous nous entendez?
Excellent. Merci.
Pour notre dernière présentation, nous allons écouter MM. McIsaac et Nobels, tous deux de la T. Buck Suzuki Environmental Foundation.
Je comprends, monsieur McIsaac, que vous allez partager votre temps avec M. Marc Allain de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada.
Oui. Marc, M. Nobels et moi parlerons chacun pendant trois minutes.
La présentation que j'ai envoyée a-t-elle été distribuée aux membres du Comité?
Malheureusement, monsieur McIsaac, nous n'avons pas eu le temps de l'envoyer à la traduction. Le Règlement exige que tout ce qui est présenté à un comité doit l'être dans les deux langues officielles. Lorsqu'elle aura été traduite, nous pourrons la distribuer aux membres du Comité.
Merci.
Je remercie le Comité d'avoir entrepris l'étude de ces sérieuses questions. Elles sont importantes pour les pêcheurs, les collectivités côtières, les Premières Nations, les travailleurs à terre, les transformateurs et les autres travailleurs du secteur des pêches dans les régions côtières. Ils doivent être consultés et avoir voix au chapitre dans le cadre de la présente étude.
Le poisson est incontestablement la source de nourriture la plus viable sur notre planète. Il n'y a nul besoin de l'arroser ou de le nourrir. Il ne requiert ni désherbage ni labourage ni fertilisant ou pesticide. Les pêches sont importantes pour notre sécurité alimentaire, nos familles, nos collectivités et les générations futures.
Ma présentation d'aujourd'hui a deux objectifs. Le premier est de dresser le profil de nos pêcheurs et le second, de dresser le profil de nos collectivités côtières.
L'année dernière, un témoin expert interrogé dans le cadre du procès Ahousaht, le procès de justification, a indiqué qu'il y avait trois éléments essentiels à une entreprise de pêche: un bateau, un pêcheur et un accès légal à la ressource. C'est le trio essentiel, peu importe le type de pêche. Or sur nos côtes, le ministère a rompu le lien qui unissait le troisième élément, l'accès légal à la ressource, au pêcheur et au bateau.
J'affirme dans le document que les deux autres sont inutiles sans accès légal, mais en même temps, il est difficile d'imaginer qu'on puisse prendre du poisson en ayant l'accès légal, mais ni pêcheur ni équipement. Quoi qu'il en soit, une question cruciale se pose: les permis de pêche devraient-ils être détenus par d'autres que les pêcheurs? C'est ce qu'il importe de déterminer.
Une étude sur la concentration des privilèges aux mains des sociétés publiée en janvier dernier par Haas et coll. a révélé que, depuis 25 ans, le secteur des pêches devient de moins en moins équitable en Colombie-Britannique. L'étude fait également état d'une concentration accrue des privilèges aux mains de l'industrie dans cette province, en particulier dans le saumon et le hareng, et d'une baisse de la distribution des retombées. Des études montrent clairement que les privilèges sont de plus en plus concentrés.
Je voulais vous montrer une diapositive sur le flétan et sur la transition, au cours des 25 dernières années, d'une pêche à accès libre à une pêche visée par un quota individuel transférable, puis à une pêche visée par un quota individuel transférable où le quota et le permis ne sont plus rattachés au pêcheur et à la pêche. La valeur au débarquement obtenue par les pêcheurs qui n'ont pas de quota est jusqu'à 80 % inférieure.
C'est très difficile à décrire sans le graphique, mais, essentiellement, sur un bloc de flétan valant 400 000 $, 300 000 $ servent aux frais de location payés aux propriétaires-trafiquants de permis par le pêcheur qui n'a pas de quota. La rupture entre le permis et le pêcheur et son bateau se traduit par une perte de valeur, et le prix payé aux pêcheurs indépendants diminue... Une étude sur le marché du travail — celle dont a parlé Christina, je crois — publiée en 2013 indique que le revenu moyen de nos pêcheurs se situe autour de 19 000 $, très près du seuil de pauvreté. La pêche en Colombie-Britannique n'offre pas de bonnes perspectives. La plupart diraient qu'il n'y a pas d'avenir dans la pêche. Et c'est en partie parce que le ministère a rompu le lien entre les pêcheurs et l'accès à la ressource.
Dans une perspective plus vaste, Christina a bien décrit la valeur de la pêche sur la côte. La valeur moyenne au débarquement se situe autour de 300 millions de dollars par année. Je vous appelle aujourd'hui de Haida Gwaii. Dans les environs de Haida Gwaii, la valeur de la pêche au débarquement atteint chaque année autour de 80 millions de dollars. Moins de 5 % de cette somme se rattache aux collectivités environnant Haida Gwaii. J'entends par là que le propriétaire du permis ou les pêcheurs y vivent, ou que le poisson y est transformé.
Il n'existe pratiquement aucun lien entre la majorité du poisson pêché dans la région et les collectivités locales. C'est un problème de contiguïté, et cette rupture s' observe tout le long de la côte. L'une des études...
Pardon de vous interrompre, monsieur McIsaac, mais si vous voulez laisser du temps aux deux autres, il va falloir que je vous arrête ici. Très rapidement, voulez-vous maintenant céder la parole à M. Nobels?
[Français]
Merci, monsieur le président.
Le temps est élastique en Colombie-Britannique.
[Traduction]
Des voix: Oh, oh!
M. Marc Allain: Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de me recevoir au pied levé et de me permettre de livrer mon témoignage. Je vous en suis fort reconnaissant.
Comme vous le savez, je suis le secrétaire exécutif de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada, fédération nationale qui rassemble des organisations représentant les pêcheurs indépendants. Nous comptons 34 organisations membres dans cinq provinces, qui à leur tour représentent plus de 7 000 pêcheurs indépendants.
Nos membres en Colombie-Britannique sont la United Fishermen and Allied Workers' Union, dont vous avez entendu le témoignage mardi, et la BC Hook and Line Fishermen's Association, qui pêche essentiellement à plein temps. Ce sont des pêcheurs actifs qui louent des quotas.
J'aimerais d'abord présenter le point de vue de notre fédération sur la politique de délivrance des permis en général. Je vais ensuite aborder les trois questions dont est saisi le Comité: la séparation des flottilles, les politiques de propriétaire-exploitant et le principe de la contiguïté. Pour conclure, j'aimerais présenter notre point de vue sur la politique de délivrance des permis dans la région du Pacifique en particulier.
Comme ceux qui ont parlé avant moi, je vais simplement lire ce que j'ai préparé.
Notre fédération est d'avis que les permis et quotas de pêche canadiens devraient appartenir principalement aux pêcheurs actifs qui habitent les collectivités côtières. Autrement dit, les ressources halieutiques du Canada devraient profiter d'abord et avant tout à ceux qui pêchent et à leurs collectivités. Nous croyons que le modèle du propriétaire-exploitant indépendant pour la pêche garantit les meilleures retombées socioéconomiques et la meilleure conservation pour le Canada et, en particulier, pour les collectivités de pêcheurs.
Nous croyons que le gouvernement du Canada devrait, conformément à l'intérêt public, améliorer et consolider les politiques publiques en la matière. J'évoque I'intérêt public, car la Cour suprême du Canada a conclu qu'il était du devoir du ministre de conserver, de gérer et de développer les ressources halieutiques du Canada conformément à l'intérêt public, et c'est le critère qui devrait être appliqué. Peut-on dire des politiques actuelles sur les pêches qu'elles sont conformes à l'intérêt public?
Cela dit, notre fédération préconise l'adoption, à l'échelle nationale, de politiques uniformes sur la délivrance des permis pour la pêche commerciale au large des deux côtes. Nous croyons également que les pêcheurs et les collectivités de pêcheurs de la Colombie-Britannique qui le souhaitent devraient pouvoir bénéficier du même genre de protections que celles garanties par les politiques à leurs homologues de l'Atlantique.
Je vais maintenant aborder les trois questions qui intéressent votre comité.
La séparation des flottilles a été instaurée en 1979. Elle ne concerne que le Canada atlantique et les bateaux de pêche de moins de 65 pieds. Cette politique sépare la pêche de la transformation dans le secteur des flottilles de moins de 65 pieds en interdisant aux transformateurs de poisson et aux autres sociétés de détenir ou de contrôler les permis de pêche dans le secteur dit du « noyau indépendant ». J'y reviendrai de manière plus détaillée.
En 1977, l'honorable Roméo LeBlanc, alors ministre des Pêches, a expliqué l'objectif initial de cette politique.
Il a dit, et je cite: « Je propose qu'à l'avenir, nous séparions la flottille de pêche des compagnies de transformation au Canada atlantique. » Il a aussi dit: « Les pêcheurs devraient avoir leurs propres bateaux et être capables de vendre leur poisson où ils veulent. » Enfin, il a déclaré: « Une flottille véritablement indépendante devrait faire augmenter les prix du poisson et les revenus des pêcheurs, rehausser le pouvoir de négocier des pêcheurs, équilibrer davantage les forces dans l'industrie » et encourager les pêcheurs à élargir leur flottille. M. LeBlanc a tenu ces propos en 1977 et la séparation de la flottille a été instaurée deux ans plus tard, en 1979.
Quelle était son intention? Il voulait empêcher ou interdire le contrôle des pêches par des monopoles. Il voulait instaurer une saine concurrence dans les marchés des produits de la pêche, et il voulait plus que tout empêcher que le Canada atlantique revive l'époque sombre des magasins de compagnie et des puissants intérêts qui régnaient sur les pêcheurs et les collectivités de pêcheurs.
Je sais que certains d'entre vous sont originaires de collectivités de pêcheurs où c'était jadis la réalité. En 1977, les pêcheurs avaient connu cette réalité et M. LeBlanc voulait éviter qu'ils la revivent. Le plus incroyable, c'est qu'il a réussi.
La séparation des flottilles a été une réussite. Aujourd'hui, on observe une concurrence très dynamique sur le marché à quai entre les acheteurs qui se disputent les produits des pêcheurs indépendants au Canada atlantique, et c'est grâce à la séparation des flottilles.
J'ai des données intéressantes sur la part qui revient aux pêcheurs de homard, par exemple, et sur le prix du homard par rapport au prix de détail. Je n'ai pas eu le temps de les rassembler dans un document, mais je vais vous en dire l'essentiel.
En 2014 la valeur totale au débarquement de la pêche commerciale au Canada atlantique atteignait presque 2,4 milliards de dollar, contre 390 millions de dollars en Colombie-Britannique. La production des producteurs indépendants comptait pour 75 % des 2,4 milliards de dollars. Ce sont 1,8 milliard de dollars qui vont directement dans les collectivités côtières pour la plupart isolées, où la pêche est le seul employeur.
La séparation des flottilles est un succès. Elle a permis de créer une flottille de 10 000 entreprises, toutes indépendantes et exploitées par leur propriétaire, réparties dans cinq provinces et qui emploient 20 000 membres d'équipage. Mais surtout, ces entreprises sont presque toutes rurales. Elles sont implantées dans de petites localités isolées où la pêche est une activité importante et souvent l'unique activité.
Merci, monsieur Allain.
Pardon de vous interrompre. Je le fais seulement parce que M. Nobels n'a pas encore eu son tour.
Monsieur Nobels, êtes-vous là?
Très bien. Je vais me montrer généreux, de la part du Comité, et vous donner deux minutes. Nous n'avons techniquement plus de temps, mais il nous a fallu un moment pour vous joindre et nous nous en excusons. Dans cet esprit, je vais vous donner deux minutes pour résumer ce que vous avez entendu. Nous passerons ensuite aux questions.
Merci beaucoup, monsieur le président et merci aux membres du Comité de nous accueillir et d'étudier le problème très sérieux que connaît la côte du Pacifique.
Au cours des 30 dernières années, les politiques du ministère des Pêches et des Océans qui visent la région du Pacifique ont essentiellement éloigné les collectivités côtières de la Colombie-Britannique de leurs propres ressources. Elles ont transformé les pêcheurs en métayers et ont mis à la rue des centaines de travailleurs à terre, si ce n'est des milliers. Est-ce l'image que les Canadiens veulent avoir des ressources qui leur appartiennent?
Au cours des cinq dernières années, nous avons eu l'honneur et le privilège de travailler avec des pêcheurs commerciaux à réaliser des entrevues concernant plusieurs projets auxquels participent T. Buck Suzuki et Ecotrust Canada. J'aimerais attirer votre attention sur deux documents. Le premier rapport traite des pêches du Pacifique Nord et des valeurs tangibles et intangibles des pêches pour les collectivités de la région. Le deuxième document s'intitule: « Caught Up in Catch Shares ». Il contient une analyse assez détaillée de la structure des quotas individuels transférables, les QIT, et de ses effets sur la côte du Pacifique.
Les collectivités ont déployé des efforts immenses pour fournir une infrastructure à beaucoup de leurs usines et installations. C'est perdu. La pêche elle-même comporte son lot de valeurs intangibles, en plus de la simple structure économique de rentrées et de sorties d'argent. Ces valeurs créent le tissu de nos collectivités.
Ces politiques ont causé la détérioration du tissu de nos collectivités, lesquelles continuent de se vider et de pratiquement se paralyser à bien des égards. Dans certaines de nos collectivités, nous sommes passés d'un taux d'emploi de 85 % à un taux de chômage de 85 %.
Nous passons maintenant aux questions.
Chers collègues, je veux vous rappeler que Mme Burridge et M. Morley sont avec nous par vidéoconférence. Nous avons MM. Nobels et McIsaac au téléphone. MM. Allain et Turris sont ici. Veuillez vous adresser à un témoin à la fois, particulièrement ceux qui ne sont pas ici en personne.
Je veux également souhaiter la bienvenue à MM. Sweet et Zimmer, qui sont avec nous comme invités. Merci beaucoup.
M. Hardie va entamer le tour de sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci à tous de votre participation.
Un coup d'oeil rapide au portrait d'ensemble nous montre que d'un côté, nous voulons une industrie qui se porte bien. M. Morley et Mme Burridge en savent quelque chose. De l'autre, nous voulons des collectivités en santé. D'après ce que nous avons entendu jusqu'ici, ces deux enjeux sont presque incompatibles. C'est la vue d'ensemble que nous avons.
Je veux comprendre dans quelle mesure — et ce que je dis n'est pas péjoratif — la concentration d'entreprises contribue à une conservation plus efficace. Est-ce vrai que l'une ne va pas sans l'autre? La conservation pourrait-elle être efficace si on applique le principe de la contiguïté et si on donne aux pêcheurs des permis d'exploitation?
Je vais commencer avec M. Allain.
C'est une très bonne question. Je pense que l'industrie canadienne de la pêche connaît une profonde transformation, surtout depuis la baisse des stocks de morue. Je...
J'aimerais que vos réponses soient courtes, car j'ai beaucoup de questions à poser et je veux beaucoup de réponses.
D'accord. Je ne pense pas que les entreprises privées ou les flottilles indépendantes aient le monopole de la conservation. Les flottilles indépendantes ne cèdent leur place à personne en matière de conservation. L'industrie canadienne de la pêche a parcouru un long chemin, et il y a un engagement commun de part et d'autre en matière de conservation.
Merci.
Madame Burridge et monsieur Morley, vous êtes ensemble là-bas, alors vous pouvez vous lancer la balle, si vous voulez.
On dit que les ressources halieutiques disponibles en Alaska sont vraiment beaucoup plus importantes que les nôtres. Pourquoi est-ce ainsi?
Plusieurs raisons expliquent cela. D'abord, la masse des populations de saumon du Pacifique Nord est en fait plus au nord que la Colombie-Britannique. Elle se situe vraiment au large des côtes de l'Alaska et de la Russie. C'est là que se trouvent la grande masse et la plupart des populations. Cependant, Mme Burridge a mentionné que le gouvernement avait décidé de passer à un régime de gestion des stocks faibles. À la fin des années 1990 et au début des années 2000, le gouvernement du Canada a décidé que nous devions essayer de gérer les populations des moindres cours d'eau et rivières et de diminuer la capture de manière draconienne.
Comme je l'ai mentionné, pendant 50 ans probablement, on a pêché en Colombie-Britannique 150 millions de livres environ par année. Nous pêchons actuellement en moyenne 50 millions de livres. Ce n'est pas parce que les populations ne sont pas là, mais parce que nous mettons beaucoup plus de poissons dans les frayères de saumon sans pouvoir les pêcher.
En Alaska, par exemple, on pêche probablement 75 % du saumon sockeye qui revient, alors qu'on en laisse frayer 25 %. En Colombie-Britannique, nous sommes chanceux si nous en pêchons parfois 10 % ou 20 %. Le maximum que nous réussissons à pêcher est probablement de 50 % environ.
Êtes-vous en train de dire que l'Alaska a le droit de puiser nettement plus que nous dans ses stocks?
Oui. Le ministère des Pêches et des Océans est beaucoup trop prudent dans sa stratégie de laisser les poissons remonter les cours d'eau, pour différentes raisons. L'une d'elles est qu'il veut prendre en compte les intérêts des Premières Nations installées en amont. Il y a donc beaucoup plus de saumon que nécessaire dans les frayères, et cela n'a pas les effets escomptés.
Il semble que la conservation fonctionne en Colombie-Britannique. Cependant, pourquoi permet-on d'aussi grosses prises en Alaska? Pourquoi leurs stocks n'en ont-ils pas souffert comme les nôtres, apparemment, d'où les mesures proposées par le MPO pour limiter la pêche?
Il y a probablement 400 populations différentes de saumon en Colombie-Britannique et elles ne se portent pas toutes vraiment bien. Certaines ont des difficultés, d'autres sont moyennes ou fortes. Cela vaut aussi pour l'Alaska. Je pense que l'Alaska veille à gérer les groupes les plus populeux, profite des captures et laisse survivre les petites populations si elles peuvent. En fait, leur constat est qu'ils n'ont pas vraiment perdu un grand nombre de populations. Il en reste encore passablement.
Je pense qu'en Colombie-Britannique, nous avons probablement plus de problèmes liés à l'habitat. Nous avons fait beaucoup plus d'aménagements résidentiels et industriels que ce que l'on trouve près de certains cours d'eau en Alaska. Il est donc probablement plus difficile pour nos populations de survivre dans ces conditions. Je crois cependant aussi que nous pourrions pêcher de plus grandes quantités. Cela profiterait à tout le monde — aux pêcheurs, aux collectivités et à tous les autres.
Selon certains témoignages que nous avons entendus, la majorité des pêcheurs de la Colombie-Britannique ont été réduits à un rôle qui correspond essentiellement à celui de fermier non propriétaire. Leur bateau leur appartient peut-être, mais ils n'ont assurément pas accès à un permis, ce qui les oblige à pêcher pour quelqu'un d'autre. Un témoin nous a ainsi indiqué l'autre jour que la valeur au débarquement de ses prises de flétan s'établit à 9 $ la livre alors qu'il doit payer 7 $ la livre pour son bail de pêche.
Madame Burridge, vous avez parlé d'une valeur au débarquement de 850 millions de dollars. Est-il vrai qu'environ 5 % seulement de ce montant se retrouve dans les poches des pêcheurs qui vont en mer?
Je ne suis pas certaine de pouvoir vous répondre à ce sujet, mais je peux vous assurer que les pêcheurs indépendants occupent un rôle prépondérant dans l'industrie en Colombie-Britannique. Si l'on fait exception du saumon, je dirais que la plupart des activités de pêche sont rentables.
M. McIsaac a indiqué que le revenu moyen était de 19 000 $. C'est le cas pour certaines flottilles, notamment dans le secteur de la pêche au saumon, mais dans l'ensemble, les pêcheurs ont un revenu saisonnier de 40 000 $.
D'accord. D'après ce que je peux comprendre, un pêcheur du Canada atlantique a différentes options pour la vente de ses prises. Qu'en est-il...
J'aimerais que vous m'en parliez. Combien y a-t-il d'entreprises différentes qui font la transformation du poisson sur la côte de la Colombie-Britannique? Je pense tout particulièrement à Canfisco et je me demande quelle proportion des prises totales... Avant la réduction des activités à l'usine de Prince Rupert, quel pourcentage de la ressource contrôliez-vous?
Il y a sans doute entre 150 et 200 entreprises qui font de la transformation en Colombie-Britannique dans les différents secteurs des pêches dont Mme Burridge vous a parlé.
Je crois vous avoir déjà fourni les chiffres exacts quant à la proportion des prises que nous achetons. Pour le saumon, c'est environ 37 %. Dans le cas du hareng, c'est à peu près 30 %. Pour le poisson de fond, c'est autour de 20 %. Nous ne figurons pas parmi les principaux acheteurs dans les autres secteurs des pêches. Nous ne faisons pas de transformation pour le crabe ou la crevette. Nous n'achetons que de très faibles quantités de flétan. En réalité, nous ne sommes pas un joueur de premier plan dans la plupart des secteurs. Comme je l'ai déjà indiqué, à peu près la moitié du saumon que nous achetons provient de pêcheurs indépendants.
Merci, monsieur Morley.
Mme Christina Burridge: Je...
Le président: Désolé, madame Burridge. Je suis persuadé que vous pourrez glisser cette réponse à un autre moment si vous le désirez.
Merci beaucoup. Nous avons entendu aujourd'hui des témoignages fort intéressants.
Je pense notamment aux chiffres que vous nous avez donnés, madame Burridge, concernant les excellentes années que furent 2010 et 2014 pour le saumon sockeye. J'en déduis que le système est capable de produire de très grandes quantités de poisson. Nous devons simplement trouver les moyens d'y parvenir de manière plus efficiente.
J'ai une question pour vous, monsieur Morley. Est-ce que le système d'octroi de permis de la Colombie-Britannique prévoit des limites quant à la propriété corporative et aux fins de la séparation des flottilles?
Lorsque les premières restrictions ont été imposées dans le système d'octroi de permis pour la pêche du saumon en Colombie-Britannique en 1969, le ministre en poste a indiqué aux membres de l'association des pêcheries de la province, des entreprises de transformation, qu'ils allaient devoir s'en tenir au niveau atteint à ce moment-là, alors que 13,2 % des navires de pêche au saumon leur appartenaient. Il leur a aussi annoncé que la diminution de la flotte allait les obliger à se dessaisir d'une partie de leurs bateaux pour ne pas dépasser cette limite de 13,2 %.
À l'époque, un permis de catégorie A permettait de pêcher le saumon avec n'importe quel type d'engin. On pouvait utiliser aussi bien une senne qu'un filet maillant ou des lignes traînantes; il n'y avait aucune restriction. Un permis était un permis. C'était avant l'octroi de permis par secteur et par engin. Ces restrictions n'ont jamais été modifiées de manière à stipuler un engin ou un secteur en particulier.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure, Canfisco détient actuellement 4 % de l'ensemble des permis. Je ne suis pas au fait de la situation exacte des autres entreprises de transformation, mais je pense que cela demeure très faible et qu'on est loin de la limite de 13,2 %. Les proportions actuelles sont nettement inférieures à ce niveau.
Merci.
Monsieur Morley, est-ce que l'Alaska exige que la totalité du saumon et du hareng qui y est capturée soit traitée en Alaska, tout au moins lorsque la capacité locale de transformation le permet?
J'ai entendu l'autre jour un témoignage à l'effet que l'Alaska exige que tout le saumon soit transformé localement dans la mesure où les entreprises sont capables de le faire — en vertu de la Loi Magnuson-Stevens — avant que l'on en permette l'exportation. C'est inexact.
Pendant de nombreuses années, nous avons importé de grandes quantités de saumon alaskien pour le transformer en Colombie-Britannique alors même qu'il y avait bien souvent une capacité excédentaire de transformation disponible en Alaska. Il n'y a donc aucune restriction sur l'importation de poisson non transformé en provenance de l'Alaska pour en faire la transformation ici au Canada.
Merci.
Monsieur Allain, vous avez dit que les intervenants du secteur des pêches de la côte Est ont la conservation à coeur. Mme Burridge nous a donné des chiffres pour illustrer le soutien des différents secteurs en faveur de la recherche scientifique. Tout indique que l'industrie de la pêche commerciale en Colombie-Britannique a pris les moyens nécessaires pour pouvoir compter sur des données scientifiques valables aux fins de la conservation de la ressource.
Existe-t-il dans l'est du pays un système semblable en vertu duquel une redevance serait exigée des entreprises de pêche commerciale pour financer directement une gestion plus perfectionnée de leurs activités?
Je crois qu'une redevance sur le poisson de fond est exigée à Terre-Neuve pour financer la recherche scientifique. Comme je vous le disais, notre industrie des pêches est très complexe et très vaste, comme en témoigne les valeurs au débarquement. Elle est aussi très diversifiée. Nos flottilles ont vraiment à coeur la conservation de la ressource, et les recherches scientifiques sont nombreuses...
Désolé de vous interrompre, mais je dispose de très peu de temps.
Vous dites que le secteur des pêches est vaste et diversifié. À mon sens, ce n'est toutefois pas une excuse. À notre époque, il est plutôt facile de recueillir des fonds pour la recherche aux fins de la conservation.
Je vais maintenant m'adresser à Mme Burridge. Le secteur paraît plutôt bien organisé. Non seulement les entreprises semblent-elles disposées à faire leur part pour la conservation, mais vous avez également mis en place un système assez perfectionné pour recueillir ces fonds et les affecter à l'effort de conservation. Pouvez-vous nous en dire plus long à ce sujet?
D'une manière générale, c'est effectivement ce qui se passe. Dans les secteurs assujettis à des quotas individuels transférables, il est généralement plus facile de recueillir des fonds auprès des détenteurs de permis, qu'il s'agisse d'entreprises de transformation ou de pêcheurs indépendants, ces derniers comptant pour la plus grande partie des détenteurs, comme nous avons pu l'entendre.
Nous avons certes pu constater qu'il fallait absolument mettre en place un système efficace pour le suivi des prises à toutes les étapes de leur cheminement. Lorsqu'on y parvient, les gens semblent plus disposés à contribuer à la recherche scientifique, laquelle est plus ou moins avancée selon les secteurs. Parmi les secteurs où il est peut-être moins facile de recueillir des fonds pour la recherche scientifique, je pourrais peut-être vous citer celui du saumon.
J'ai seulement une observation à faire. J'ai travaillé un certain temps dans le secteur de la foresterie, et il était bien évident que les grandes entreprises forestières avaient la possibilité, contrairement aux très petites, d'embaucher des biologistes, des écologistes et d'autres spécialistes. Je vais vous épargner les blagues habituelles au sujet de la taille, mais il est bien clair que les grandes entreprises ont les ressources nécessaires pour faire ce genre de choses.
Madame Burridge, vous nous avez dit qu'un filet de saumon kéta pêché au Japon et transformé en Chine pouvait être vendu moins cher en Colombie-Britannique qu'un filet de saumon kéta pêché sur place. Comment est-ce que cela peut être possible?
C'est sans doute attribuable au montant que nous versons pour le poisson aux pêcheurs indépendants. Ce prix doit être supérieur à celui obtenu par le pêcheur japonais. Comme je l'indiquais, nous sommes également des producteurs à faible volume et coût élevé, ce qui nous oblige à rendre nos produits plus attrayants pour nos consommateurs en raison de leur qualité et de la proximité de la ressource.
Si vous me permettez de revenir un instant à la question de la recherche scientifique, j'aimerais insister sur le fait que les pêcheurs, comme M. Boyes vous l'a peut-être dit mardi, n'ont rien contre l'idée de payer des redevances pour appuyer la recherche. C'est dans notre intérêt de le faire. Ce n'est pas seulement l'affaire des grandes entreprises. Les pêcheurs comprennent bien — et M. Turris pourrait vous en dire davantage — que ce soutien est essentiel pour assurer la viabilité de notre industrie à long terme.
Madame Burridge, vous nous avez parlé du mode d'organisation du secteur des pêches. À votre point de vue et à la lumière de votre expérience, vous avez indiqué que le secteur est « moins dépendant de l'assurance-emploi ». À notre dernière réunion, nous avons entendu les représentants des travailleurs de l'usine de Canfisco. Ils semblaient surtout se demander s'ils allaient pouvoir établir leur admissibilité à des prestations d'assurance-emploi. Ce n'est pas exactement ce qu'ils ont dit, mais c'est l'impression que nous avons eue. Comment avez-vous réussi à surmonter cette tendance dans votre secteur de l'industrie des pêches?
Permettez-moi d'abord de vous rappeler que je parle au nom des pêcheurs et non des entreprises de transformation. D'une manière générale, notre objectif est de mener des activités de pêche rentables pendant toute l'année ou presque, ce qui nous permet de nous affranchir de l'assurance-emploi. Nous estimons qu'il est dans l'intérêt de tous les Canadiens que le secteur des pêches sur la côte Ouest soit rentable, plutôt que d'être simplement un moyen d'établir son admissibilité à l'assurance-emploi.
Merci, monsieur Sopuck.
Passons maintenant du côté du NPD. Monsieur Donnelly, vous avez sept minutes.
Merci, monsieur le président.
Merci à nos témoins d'être des nôtres en personne ou par le truchement de la technologie pour traiter de cet important sujet. Je vous en suis vraiment reconnaissant.
Monsieur Morley, j'aurais quelques précisions à vous demander avant d'en arriver à ma question principale.
Est-ce que la conserverie est ouverte ou fermée?
L'usine de transformation du poisson de Prince Rupert... Nous avons deux usines là-bas et elles sont toutes les deux ouvertes et en activité.
Ma question portait uniquement sur la conserverie.
Combien de travailleurs de la conserverie ont été mis à pied?
Nous avons un mode de fonctionnement particulier. Nous appelons des gens chaque matin en fonction du travail à faire. Il y a des postes plus spécialisés et notamment une équipe d'une vingtaine de personnes qui étaient responsables de l'entretien de l'équipement de mise en conserve. Nous avons négocié avec le syndicat un régime d'indemnisation pour la quinzaine d'employés dont les services ne seraient plus requis. Ce sont les seuls qui ont été mis à pied.
Sinon, nous appelons des gens chaque matin...
Est-ce que certains de ces employés mis à pied peuvent travailler à la conserverie de Prince Rupert?
Les gens de métier se sont vu offrir la possibilité de demeurer sur la liste d'ancienneté pour occuper d'autres fonctions à l'usine. Certains d'entre eux se sont prévalus de cette option et d'autres ont cherché du travail ailleurs.
Nous avons entendu des témoignages au sujet de la communauté et de toutes ces familles de pêcheurs qui travaillent depuis longtemps dans le secteur. On nous a indiqué que ce n'était plus le cas. Que pouvez-vous dire à ces familles? Pouvez-vous leur dire qu'il y a encore du travail et de l'espoir et qu'elles peuvent demeurer dans le secteur?
Il y a un fort taux de roulement du personnel à l'usine. Chaque année, nous devons embaucher des gens pour assurer la poursuite des activités. En moyenne, nous embauchons sans doute entre 200 et 300 nouveaux travailleurs annuellement. Pour ce qui est des employés de longue date à notre usine, les activités de débarquement, de déchargement, d'étêtage, d'éviscération et de traitement des oeufs offrent une quantité considérable de travail. Ainsi, les employés les plus anciens pourront sans doute continuer à travailler autant qu'auparavant.
Il y a un problème de concentration des entreprises qui pourrait s'aggraver selon certains, mais on peut aussi s'interroger sur l'équité pour les familles de pêcheurs des communautés côtières. Quel est votre point de vue à ce sujet? Quelqu'un a fait valoir que la concentration des entreprises avait augmenté au fil des ans, et je crois vous avoir vu acquiescer. Il semble pourtant y avoir de moins en moins de pêcheurs avec les décennies qui passent. Comment pourrions-nous régler ce problème d'équité pour les familles de pêcheurs? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral devrait faire à ce chapitre?
En fait, la concentration des entreprises n'a pas augmenté. Elle est plutôt en baisse. Je crois vous avoir présenté des chiffres qui montrent bien que cette perception des gens est attribuable à la désinformation. En effet, Canfisco est bien loin de contrôler la part de marché que certains lui attribuent.
D'ailleurs, le véritable problème avec lequel nous devons composer... Certains vont vous parler des années 1980 et 1990 comme de ce bon vieux temps où nous pouvions pêcher 150 millions de livres de saumon. La valeur au débarquement pouvait alors se situer entre 200 millions et 300 millions de dollars. Au cours de la dernière décennie, la valeur moyenne du saumon pêché n'a pas dépassé 50 millions de dollars, ce qui fait que les revenus sont insuffisants pour subvenir aux besoins d'autant de personnes qu'auparavant. Je vous expose simplement les faits.
Je serais ravi de revenir à un système où nous pourrions pêcher davantage de poisson. J'aimerais pouvoir m'asseoir avec les syndicats pour en discuter. Réclamons du gouvernement qu'il mette en place un meilleur système de gestion de la ressource qui nous permettrait d'augmenter nos prises de manière à ce que tous en bénéficient davantage. Nous avons...
Oui, et les pêcheurs y ont accès. Les flottilles de pêche qui nous appartiennent, à 100 % ou dans le cadre d'un arrangement en coentreprise, peuvent compter sur un équipage, y compris le capitaine, formé sans doute à 80 % de gens des Premières Nations qui résident le long de la côte dans des communautés comme Campbell River, Alert Bay et Bella Bella. Ce sont les lieux d'origine et de résidence des pêcheurs qui travaillent sur nos bateaux. Comme ces gens-là ramènent leurs revenus dans leurs communautés respectives, nous estimons que chaque flottille est déjà un important vecteur d'équité.
Je répète que le problème vient du fait que le volume et la valeur des prises ne sont plus suffisants pour subvenir aux besoins d'autant de gens qu'auparavant. Cette situation est attribuable à une gestion conservatrice de la ressource ainsi qu'à l'expansion planétaire de l'aquaculture du saumon qui fait chuter les prix.
Je m'adresse maintenant à M. Nobels ou à M. McIsaac. Dans les deux minutes qu'il me reste, pourriez-vous nous parler de ce problème d'équité et des mesures que le gouvernement fédéral pourrait prendre pour régler la situation, surtout pour les familles de communautés comme Haida Gwaii et Prince Rupert?
D'accord. Il s'agit de veiller à ce que les avantages découlant des pêches soient partagés équitablement entre les pêcheurs, les collectivités et la population canadienne en général. Les principaux bénéficiaires de cette activité devraient être ceux-là mêmes qui se mettent les mains dans l'eau.
Ce ne sont plus nécessairement les pêcheurs qui détiennent les permis. Je vous rappelle à ce sujet l'exemple de tout à l'heure au sujet du bail de pêche de 7 $ la livre qui doit être payé pour le flétan. C'est ce qui arrive dans tout le secteur du poisson de fond pour les pêcheurs qui ne détiennent pas les permis et les quotas. Il est essentiel de rétablir ce lien pour que les pêcheurs aient accès à la ressource. Le secteur doit absolument pouvoir compter sur cette composante de propriétaires-exploitants de telle sorte que l'équité puisse se manifester à tous les niveaux jusqu'à la communauté. C'est un autre élément primordial.
Bruce a parlé de la pêche au chalut, de la transformation qui se fait toujours en Colombie-Britannique et des débarquements qui y ont lieu. Cette situation est notamment liée à la mise en place au moment de l'établissement des quotas d'un office de développement du poisson de fond en Colombie-Britannique. C'est sans doute le point positif — si on veut en trouver un — dans le contexte de ce problème d'équité et vu la nécessité de maintenir le lien avec les communautés de la côte Ouest.
Ce sont donc les éléments clés. Par ailleurs, une étude dont les résultats ont été dévoilés ce printemps montrait clairement qu'il y a effectivement eu augmentation de la concentration des entreprises entre 1993 et 2013. Cette étude porte uniquement sur l'aspect propriété. Si l'on considérait à la fois la propriété et le contrôle, vous pourriez assurément constater un fossé encore plus large, ce qui créerait des iniquités plus grandes encore. Nous devons chercher à diminuer cette concentration des entreprises en misant sur la séparation des flottilles de manière à empêcher les entreprises de transformation de se livrer à des activités de pêche, ce qui permettra un accès plus libre aux ressources en évitant ce genre de contrôle monopolistique.
Rob a indiqué que son entreprise n'achetait que 35 % du saumon. C'est tout de même une quantité énorme. L'impact est considérable. La concurrence avec toutes les petites entreprises de transformation sur la côte... Si c'est leur but actuel, elles sont en sérieuse difficulté, et nous ne sommes pas sur la bonne voie.
Merci, monsieur McIsaac.
Nous passons à Mme Jordan du parti ministériel pour les sept prochaines minutes.
Merci, monsieur le président.
Je remercie tous les témoins de comparaître devant nous. J'ai été élevée dans une collectivité de pêcheurs sur la côte Est, et je trouve tout cela très intéressant.
Ma première question s'adresse à vous, monsieur Turris. Vous avez parlé de l'industrie et vous avez dit qu'en 1995, parce qu'on avait dépassé beaucoup de totaux admissibles de captures, la pêche a été fermée. Combien de temps a duré la fermeture
Durant cette période, des activités scientifiques ont-elles été menées sur la biomasse? Est-ce que tous les stocks du secteur ont diminué? Je m'interroge sur la reprise.
Non. Au cours de cette période, une structure a été mise en place pour la surveillance globale de la pêche lors de sa réouverture.
Merci.
Dans cette optique, je vais maintenant vous poser une question, monsieur Allain. Vous avez dit qu'en 2014, sur la côte Est, on a débarqué pour 2.4 milliards... S'agit-il de livres?
Il s'agit de dollars. D'accord. C'est ce dont je voulais m'assurer. Sur la côte de la Colombie-Britannique, c'était 390 millions de dollars. Vous attribuez cela aux politiques de séparation des flottilles et de propriétaire-exploitant, et je me demande seulement... Je crois comprendre que nous avons une pêche beaucoup plus importante.
Je me demande comment vous divisez cela. J'avais l'impression, d'après vos observations, que si vous aviez une politique de séparation des flottilles, comme la côte Est, vos prises débarquées seraient beaucoup plus importantes.
Oh non. Absolument pas.
Mme Bernadette Jordan: D'accord.
M. Marc Allain: J'utilisais ces données simplement pour montrer l'importance des pêches de l'Atlantique. Elles sont six fois plus importantes.
Ce que je voulais dire, c'est que sur le montant de 2,4 milliards de dollars, 1,8 milliard est généré par les flottilles de propriétaires-exploitants. On parle principalement de crabes et de homards, et environ 50 % des crevettes. De tout le crabe et le homard, 80 % sont exportés. Il s'agit d'une véritable réussite ces quatre dernières années.
Ceux d'entre vous qui étaient là sauront qu'en 2008-2009, la pêche au homard a connu une crise, mais la production a doublé au cours des 10 dernières années. Nous sommes passés de 45 000 à 94 000 tonnes métriques l'an dernier. En 2008, nous vendions tout cela sur le marché américain; 80 % étaient vendus sur le marché américain. Par la suite, l'économie a ralenti, de même que notre pêche au homard.
Que s'est-il passé? Les transformateurs, avec l'aide des gouvernements provinciaux et fédéral, ont commencé à commercialiser. Ils ont ouvert les marchés asiatiques. Nos pêches ont repris. Maintenant, nous pouvons vendre tout le homard que nous prenons, et nous obtenons d'excellents prix. Donc, le système fonctionne. Nous avons la séparation des flottilles. Les pêcheurs prennent le homard et les transformateurs le transforment, et ils font ce qu'il faut sur le plan de la commercialisation. Le système fonctionne.
Ce que je disais concernait la part qui revient aux propriétaires-exploitants. C'est la totalité de ce qu'ils prennent et ce qu'ils ont au quai. La location n'est pas permise.
Je vous remercie de cette précision, car en vous écoutant, j'avais l'impression que la différence quant à la quantité vendue s'expliquait par... J'aurais mis cela en doute.
C'est en fait une bonne transition vers ma prochaine question, qui s'adresse à Mme Burridge.
Vous avez dit que le filet de saumon kéta pêché en Colombie-Britannique se vend plus cher que celui pêché au Japon. Dans quelle mesure est-ce attribuable au coût de la main-d'oeuvre? À la question de M. Sopuck, vous avez répondu que c'était le coût du poisson. Croyez-vous que le coût de la main-d'oeuvre entre en ligne de compte également?
Le coût de la main-d'oeuvre joue certainement un rôle. Comme je l'ai dit, le saumon kéta qui est pêché à Hokkaido est transformé en Chine. Nous payons un prix très élevé dans le cas de nos pêcheurs, et ce sont surtout des pêcheurs indépendants.
Des pêcheurs indépendants. D'accord. Merci.
Je vais poser mes prochaines questions à M. Morley. Au cours des témoignages que nous avons entendus cette semaine, on nous a dit que Canfisco possède 40 % de l'ensemble des permis de la pêche au saumon, et vous dites que vous possédez 4 % de ces permis. Est-ce exact?
Pouvez-vous me dire ce qui explique cette divergence...? On ne parle pas de deux ou trois points de pourcentage, mais d'une différence énorme. Comment se fait-il que les gens ont l'impression que vous possédez 40 % des permis?
Eh bien, c'est parce que cela vient appuyer ce qu'ils disent.
Je vous donne les faits. Je connais les chiffres. Évidemment, nous possédons une proportion élevée des permis du secteur de la pêche à la senne, mais nous n'en détenons aucun du côté de la pêche à la traîne et nous en avons seulement quelques-uns dans le secteur de la pêche aux filets maillants. Il y a trois permis de pêche aux filets maillants, et donc en tout, c'est 4 %. La proportion est plus élevée pour la pêche à la senne, mais ce n'est tout de même pas 40 %, même dans le secteur de la pêche à la senne.
Pourquoi ces gens déclarent-ils de telles choses? Parce que cela vient appuyer ce qu'ils disent, l'argument politique qu'ils défendent au sujet de la séparation des flottilles et des propriétaires-exploitants.
L'autre chose que nous avons entendue pendant les témoignages, c'est que vous détenez les 40 % conjointement avec des pêcheurs et d'autres entreprises. Détenez-vous une partie des permis conjointement avec d'autres entreprises ou avec des pêcheurs indépendants? Quelle est la proportion?
Il y a une partie des permis de pêche à la senne que nous possédons... Ce sont des permis pour les navires. Certains navires ont plusieurs permis. Un senneur peut avoir deux permis, et nous pourrions les détenir conjointement avec un partenaire, à parts égales.
Par exemple, dans le secteur du saumon, nous avons une flotte de senneurs qui pêchent pour nous, soit environ 43 senneurs. Nous détenons 100 % des permis de 15 d'entre eux. Dans le cas de 13 autres senneurs, nous détenons les permis en partenariat avec des pêcheurs. Pour 15 autres navires qui pêchent pour nous, les permis sont détenus de façon complètement indépendante.
Je vais poser des questions sur les installations de Prince Rupert.
Vous avez dit que vous passiez des produits en conserve à des produits frais et congelés. Combien d'emplois changeront alors? Le nombre d'emplois restera-t-il le même? S'agit-il d'un ensemble différent de compétences? Je me demande seulement quel type de main-d'oeuvre travaillera dans les installations. Vous avez dit que 411 personnes travaillent moins de 302 heures par année environ. Est-ce que le même nombre de personnes seront employées pour le même nombre d'heures de travail? Les conditions changeront-elles?
Il est certain qu'il y aura moins d'embauches, car nous allons décharger, étêter et éviscérer le poisson, en retirer les oeufs, et les traiter pour les transformer en produits, à Prince Rupert, et nous livrerons les poissons éviscérés dans la vallée du bas Fraser par camion. Si nous ne pouvons pas les vendre frais, ce que nous essayerons de faire en premier, nous les ferons congeler et vendrons des produits congelés.
Nous embaucherons d'autres personnes à Vancouver, qui s'occuperont de la congélation, mais il est certain que dans l'usine de Prince Rupert — et je ne peux pas vous le dire avant que nous le sachions, car les débarquements varient d'une année à l'autre —, nous nous attendons à embaucher au moins 200 personnes cette année.
Comme je l'ai dit, nous avons normalement un fort taux de roulement chaque année. Nous ne nous attendrions pas à ce que ces 411 travailleurs puissent venir travailler cette année de toute façon, car souvent, nous embauchons entre 200 et 300 nouvelles personnes tous les ans.
Merci, madame Jordan.
Nous commençons notre second tour avec M. Sopuck, qui dispose de cinq minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
Merci, monsieur le président.
Quelles sont les tendances en matière d'emploi dans la pêche commerciale en Colombie-Britannique en général? Ma question s'adresse à M. Morley, peut-être, ou à Mme Burridge.
Je peux commencer. De façon générale, il y a certainement eu une baisse du nombre d'emplois dans les pêches parce que les activités sont menées maintenant sur une base annuelle. Le nombre d'emplois a baissé en raison de la technologie et parce qu'il y a moins d'activités saisonnières, mais en général, ce sont de meilleurs emplois.
D'accord, mais si nous examinons l'ensemble de l'industrie, la transformation, la pêche et la gestion de l'ensemble des activités, est-ce que le nombre d'emplois est toujours en baisse en quelque sorte? Est-ce plutôt qu'il y a des changements et que de nouveaux emplois sont créés tandis que d'autres sont éliminés?
À l'heure actuelle, on parle d'environ 2 500 emplois à temps plein — ETP —, pour ce qui est de la pêche, et d'environ 3 500 dans le secteur de la transformation. Le nombre d'emplois dans la transformation est généralement plus stable que celui dans le secteur de la pêche, qui a baissé, comme je le disais, en raison des changements dans la technologie, comme c'est le cas dans bon nombre d'autres industries. De plus, comme je l'ai expliqué, dans le cas du flétan, il y a 25 ans, la pêche durait six jours. Maintenant, c'est huit mois. Ce sont de meilleurs emplois, dont la période est plus longue qu'il y a 25 ans.
Monsieur Morley, vous avez parlé de l'Alaska. Je sais qu'il y a là-bas des programmes d'amélioration de la conservation et des pêches très efficaces. J'ai entendu parler entre autres de ce qu'on appelle le « pacage marin ». Connaissez-vous ce concept? Est-ce quelque chose qui pourrait être appliqué dans nos eaux, en Colombie-Britannique, pour accroître nos populations de saumon?
L'Alaska a un très vaste programme à cet égard. Certaines des installations sont gérées par des organismes communautaires à but non lucratif qui possèdent une série de stations d'alevinage du saumon rose et du saumon kéta. Ils augmentent très fortement la production de ces deux espèces, à un point tel que dans une bonne partie de leur pêche — dans le golfe du Prince William, par exemple, dans le Sud-Est de l'Alaska — plus de 50 % du saumon rose et le quart du saumon kéta proviendraient de ces installations. Ils réussissent très bien et leur production est très bonne.
Nous pourrions faire quelque chose de similaire en Colombie-Britannique. Le gouvernement ne permet à personne de s'engager dans ce secteur dans la province. On tient à ce que le programme de mise en valeur des salmonidés soit à 100 %... En fait, pendant cinq ans, j'ai été directeur de la planification du programme de mise en valeur des salmonidés au gouvernement, donc j'en sais beaucoup à ce sujet. De nombreux groupes voulaient mener ces activités, mais le gouvernement a refusé.
L'une des raisons évoquées, c'est qu'il était préoccupé par les répercussions qu'auraient les pêches de stocks mélangés sur les poissons mis en valeur et sauvages dans la province. De plus, le programme de la Colombie-Britannique est surtout un programme de remise en état et un programme supplémentaire principalement pour le saumon quinnat et le saumon coho. Nous n'avons pas vraiment pris les moyens d'accroître la production de saumon rose et de saumon kéta, qui sont là et qui pourraient nous aider à améliorer... Je crois qu'il y a des endroits où nous pourrions le faire et où il n'y aurait pas de répercussion sur les populations sauvages.
Je crois que c'est une possibilité dont on devrait discuter et qu'il faudrait examiner avec les collectivités des régions côtières.
Je crois que l'un d'entre vous a parlé de l'aquaculture. Je m'interroge sur les liens entre l'industrie de la pêche au saumon sauvage et celle de l'aquaculture en Colombie-Britannique. Je pense que l'un d'entre vous a dit que l'expansion planétaire de la production aquacole fait chuter les prix du saumon. Est-ce exact?
Oui, en général, c'est tout à fait vrai. M. Morley a expliqué que la Colombie-Britannique produit 5 % du saumon sauvage nord-américain, mais pour ce qui est de la production globale du saumon, elle n'en produit que 1 %. Nous sommes donc des preneurs de prix.
Cela dit, nous avons remarqué, ces dernières années en particulier, une augmentation de la demande de poissons sauvages, ce qui a eu tendance à faire augmenter les prix si l'on compare, disons, à la situation des années 1990, à l'époque où beaucoup de gens croyaient que le saumon d'élevage était supérieur en ce qui concerne les marchés mondiaux sur à peu près tous les plans.
Où les saumons produits par les activités aquacoles sont-ils transformés? Comment procède-t-on? Transforme-t-on les poissons sauvages et les poissons d'élevage au même endroit? Je sais qu'ils ne doivent pas être sur les mêmes chaînes, mais comment cela fonctionne-t-il?
Les poissons d'élevage sont transformés en bonne partie sur l'île de Vancouver. Il y a une ou deux petites usines qui font la transformation des deux, mais en général, parce que sa pêche est saisonnière, le saumon sauvage est transformé principalement dans des usines qui s'occupent surtout du saumon sauvage.
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins de comparaître et de nous donner tous ces renseignements aujourd'hui.
Je vais poser une question que j'ai posée à M. Boyes, de la Halibut Management Association of B.C. mardi dernier. Je la pose à M. Allain.
En 2004, Ecotrust Canada a publié une étude qui estimait qu'en 2003, la valeur sur le marché des permis et des quotas était six fois plus élevée que les capitaux investis pour les bateaux et l'équipement. La valeur des permis de pêche commerciale et des quotas est-elle accessible pour des jeunes nouveaux pêcheurs et des pêcheurs ruraux côtiers? J'aurai une autre question liée à celle-là.
Mon expertise est liée en grande partie au Canada atlantique, et toute la question du transfert intergénérationnel est importante, mais ce que nous observons — et c'est là que la séparation des flottilles entre en jeu —, c'est qu'en catimini, les transformateurs peuvent faire une offre plus généreuse que les pêcheurs. Lorsqu'un pêcheur prend sa retraite et que le permis devient disponible, il se peut qu'un jeune négocie un prix et que tout à coup, un transformateur vienne offrir un prix plus élevé. C'est fait sous la table. C'est un problème sérieux, mais nous essayons d'en discuter avec le ministère et de voir s'il est possible de corriger la situation en partie.
L'an dernier, j'ai participé à une réunion de la BC Hook and Line Fishermen's Association en Colombie-Britannique. Il y avait deux jeunes très instruits qui ont grandi dans le monde des pêches. Ils étaient des fils de pêcheurs, et ils ne pouvaient pas investir. Essentiellement, cela leur était inaccessible. Voilà ma perspective limitée. Mes collègues de la Colombie-Britannique pourraient vouloir ajouter quelque chose.
Merci, monsieur Allain.
Monsieur Morley, comment se fait-il, je suppose... Autrement dit, qui en a les moyens, mis à part peut-être des gens ou des sociétés qui sont déjà dans le secteur?
Votre question est intéressante, parce que j'ai dit que Canfisco possède 2 % du quota de flétan. Cela découle d'un droit acquis grâce aux bateaux que nous possédions au moment de la mise en vigueur du système. Depuis, nous n'avons pas acheté une seule livre de ce quota.
Si vous tenez tant à savoir qui sont les acheteurs, c'est en grande partie des particuliers, des pêcheurs qui pourraient investir leurs gains réalisés dans d'autres pêcheries, mais ils achètent des quotas de flétan. Le premier acheteur est l'État fédéral, par l'entremise de l'Initiative des pêches commerciales intégrées du Pacifique, qui veut réaffecter du poisson aux communautés autochtones. Si les prix réels et les opérations augmentent si rapidement, c'est à cause de l'injection d'argent fédéral pour céder gratuitement des quotas aux communautés autochtones, qui n'ont vraiment rien à investir pour les obtenir.
En Alaska, où existe aussi un système de quotas, les prix sont beaucoup plus faibles qu'en Colombie-Britannique. Les chiffres ne sont pas justifiés par les éventuels profits. Ils sont stimulés par l'injection de capitaux extérieurs par le gouvernement du Canada.
Je viens aussi de la côte est. Là aussi, depuis les arrêts Marshall et Sparrow, beaucoup de Premières Nations ont pu acheter des permis de pêche. Dans ma circonscription, plus particulièrement, elles ont acheté une usine de transformation pour employer leurs gens. Certaines nous ont fait savoir que, traditionnellement, elles ont travaillé dans des usines de transformation du poisson ou ont elles-mêmes pêché.
Croyez-vous que ce modèle pourrait fonctionner? Si oui, pourquoi? Ou pourquoi pas? Pourrait-il fonctionner en Colombie-Britannique? Les Premières Nations pourraient-elles exploiter une usine de transformation du poisson pour donner du travail aux habitants de leurs communautés? Monsieur Morley.
Nous pourrions revenir en arrière et décréter, en Colombie-Britannique, l'implantation d'une usine dans chaque communauté locale d'une Première Nation ou ailleurs. En 1919, la province comptait 97 conserveries, qui employaient 9 000 travailleurs, autochtones pour la plupart. Vous avez entendu une partie de cet historique, l'autre jour.
Je soutiendrais que si nous devions nous plier à un principe d'adjacence qui exigerait la livraison du poisson à ces usines, dans toutes ces communautés, pour leur transformation, il ne subsisterait aujourd'hui aucune pêcherie commerciale du saumon en Colombie-Britannique. Personne ne pourrait supporter les frais de la pêche et de la livraison du poisson à ces usines. Ces usines ne pourraient pas payer les coûts nécessaires pour répondre aux normes internationales rigoureuses d'inspection des acheteurs étrangers. Il n'est pas économique d'exploiter des usines saisonnières dans chaque petite communauté côtière.
On constate que, pour être concurrentielles sur les marchés mondiaux, les usines de transformation du poisson essaient de transformer un plus grand nombre d'espèces et de fonctionner toute l'année. Voyez le nombre d'usines exploitées dans certaines localités de l'île de Vancouver et du Lower Mainland. C'est ce qu'elles font. Dans les localités éloignées, où la pêche n'est que saisonnière et peu intensive, cela ne sera pas économique, à moins que le gouvernement ne veuille subventionner une usine dans chaque communauté. Il n'y aura pas d'autre façon.
Merci, monsieur le président et merci aussi pour le chaleureux accueil.
Je viens de la Colombie-Britannique, comme quelques-uns de mes collègues ici. J'ai une question pour Robert.
Nous entendons souvent des arguments comme... Dans ma circonscription, le gaz naturel liquéfié est le gros sujet de l'heure, etc., et nous entendons souvent que tel groupe veut appuyer 100 % de telle industrie et il se retrouve Gros-Jean comme devant parce que l'industrie n'est pas rentable. Si on effectue la séparation des flottilles en Colombie-Britannique, quelles en seront les retombées pour l'industrie de la pêche dans cette province?
Je vois mal comment on fera. Êtes-vous en train de dire que le gouvernement nous obligera à vendre nos permis? Vous allez nous forcer à nous en départir?
C'est difficile pour moi de répondre à cette question, vraiment, parce que je ne peux pas concevoir que le gouvernement exigerait d'entreprises qui ont fourni de bons emplois et de bons revenus aux pêcheurs et qui se sont conformées aux règlements... que vous nous annonceriez la confiscation d'une grande partie des actifs de mon entreprise, qui, au fond, cesserait d'exister. C'est inconcevable.
Je le répète: je fais partie de l'opposition. Je suis conservateur bon teint. Voilà pourquoi je vous pose la question.
Encore une fois, si cela arrive, et c'est peut-être le désir du gouvernement, je m'intéresse aux retombées. Votre industrie, établie depuis de nombreuses années, va bien.
Au fond, vous avez répondu à ma question sur les retombées. Je vois de bonnes entreprises qui emploient beaucoup de Canadiens, de Colombiens. Si, je ne sais comment, on proposait maintenant à l'industrie cette transformation spectaculaire, pourrait-elle survivre? D'après moi, 70 % de quelque chose, c'est beaucoup mieux que 100 % de rien.
J'ai une autre question pour vous. Quelle quantité de poisson capturé sur la côte ouest, et c'est une question très générale, peut-être, pour votre entreprise, est effectivement transformée en Colombie-Britannique?
Je dirais que c'est le cas de la plupart des entreprises de pêche de la Colombie-Britannique. Une très petite proportion est exportée en vue de la transformation.
Le sachant, Christine, je pense que vous avez parlé des coûts supérieurs du poisson, etc. En fin de compte, le client est celui qui paie et qui choisit la pièce. Chez le poissonnier, il choisira la moins chère. Il doit nourrir sa famille. Il choisira donc le filet à 5 plutôt qu'à 10 $. C'est la nécessité d'être concurrentielle, je suppose, qui guide l'industrie.
Robert, encore une fois, si, je suppose, c'est mis en oeuvre... Prenons votre entreprise. Avez-vous prévu un scénario pessimiste? Qu'arriverait-il si le gouvernement décidait de le faire demain? Qu'arriverait-il à l'entreprise?
Je ne peux vraiment pas répondre. Ça me semble impossible. Je n'en vois pas la nécessité. Je ne vois aucune preuve que le système actuel est boiteux.
Notre entreprise vise la rentabilité de l'investissement de notre investisseur. Nous ajusterions le tir, mais ça voudrait dire qu'il a vraiment moins d'affaires à brasser en Colombie-Britannique, d'après moi. C'est ma réponse.
Merci, monsieur Zimmer.
Nous revenons au parti ministériel, qui dispose de cinq minutes.
Monsieur Morrissey, vous avez la parole.
J'ai une question. Je crois que c'est pour M. Morley.
Vous avez parlé du coût en main-d'oeuvre par unité produite en Alaska par rapport à la Colombie-Britannique. Quelle est la différence entre les deux dans la transformation du saumon? Le savez-vous?
Oui. Par exemple, pour une caisse de saumon, la main-d'oeuvre en Alaska coûte le tiers de ce qu'elle coûte en Colombie-Britannique.
La vie est très chère en Colombie-Britannique. Nous versons de très bons salaires à nos travailleurs à terre, et nous en sommes heureux, mais la difficulté est que, en Alaska, nos concurrents peuvent embaucher là-bas, et nous le pouvons aussi, du personnel heureux de travailler à un salaire très inférieur, en partie parce la saison est très courte, mais en faisant beaucoup d'heures supplémentaires. C'est ainsi que l'industrie a évolué là-bas.
Cette question s'adresse à Mme Burridge.
Quelle a été l'évolution du revenu des pêcheurs au fil des ans? Je suppose, d'après le témoignage livré, que l'impact subi par l'usine provient en grande partie d'un marché changeant, qui exige un autre produit que le saumon en conserve. Quel a été l'impact sur le revenu des pêcheurs, ces dernières années?
Je ne suis pas certaine d'avoir immédiatement accès à ces chiffres. Je pense que les faits saillants sont ceux que vous avez mentionnés plus tôt.
La difficulté que présente le saumon, en Colombie-Britannique, réside dans le nombre très variable de prises. En 2006, en 2010 et en 2014, nous avons capturé des millions de saumons rouges dans le Fraser. Cette année, nous n'en capturerons peut-être aucun. En 2014, le revenu des pêcheurs de saumons aurait été assez convenable. En 2016, pour ceux du Fraser, il sera inexistant.
Le saumon n'est plus la pierre angulaire de cette industrie. C'était dans les années 1980, l'époque de référence pour tous, y compris moi. Le saumon, en raison de l'extrême variabilité du nombre de prises, qui se traduit par une bonne année sur quatre et peut-être deux années où on ne le pêche pas dans le Fraser, ne produira jamais plus les revenus qu'il a procurés dans le passé.
Cette pêcherie tire maintenant sa force d'autres produits. Il y a le saumon et, dans une certaine mesure, le hareng. Encore une fois, dans les années 1980, le hareng faisait l'objet d'une très forte demande au Japon. Les Japonais ont payé des prix faramineux pour ce poisson. Ils n'en mangeaient jamais. Ils s'en donnaient en cadeau les uns aux autres. Nous devons maintenant tirer notre épingle du jeu dans un marché où ce poisson est vendu comme aliment. Encore une fois, sa valeur a chuté de façon spectaculaire.
Les pêcheries comme celles de la pêche en plongée et de la palourde royale sont en bonne santé et profitables et elles attirent facilement la main-d'oeuvre ou de nouveaux pêcheurs.
Ma question s'adresse à M. Allain.
La séparation des flottilles sur la côte Est est un moyen très efficace de garantir que c'est le pêcheur qui exerce le contrôle, principalement pour le homard et le crabe, mais pouvez-vous nous parler de son incidence sur les collectivités côtières, concernant la transformation des produits de la mer? L'un des problèmes que nous avons et qui ont été soulevés, c'est la perte d'emplois à une conserverie de Prince Rupert causée par la politique de permis qui entraîne un manque de poisson.
Pouvez-vous nous parler de la situation sur la côte Est? Vous avez l'indépendance, et il n'y a pas de directive concernant les endroits où les pêcheurs vont — ils sont très indépendants —, et certaines collectivités côtières ont aussi perdu leurs installations de transformation.
En effet, on a rationalisé les activités. Il y a eu des changements là-bas. L'industrie de la pêche est très dynamique, parce que nous dépendons d'une ressource sauvage. Par exemple, comme je l'ai dit précédemment, nous avons vu la production de homard doubler au cours de la dernière décennie, dans le Canada atlantique.
Mais il y a une perte d'emplois dans le secteur de la transformation parce qu'une plus grande partie est vendue sur le marché frais.
Il y en a plus qui est vendu sur le marché frais, mais nous importons aussi davantage. En fait, il y en a plus qui est transformé en raison des changements climatiques. Dans le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse, où l'on a toujours produit du homard à carapace dure, on produit maintenant d'importantes quantités de homard à carapace molle parce que la mue a changé. C'était une pêche haut de gamme qui était destinée au marché du homard vivant, et maintenant, une partie importante de la production — j'ai entendu que c'était jusqu'à 40 % — va à la transformation.
Cela s'accompagne de difficultés, comme vous le savez dans votre circonscription. Il y a une pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur de la transformation. Il est difficile d'attirer des gens. Cependant, du côté de la pêche, des jeunes reviennent. Ils reviennent de l'Alberta, ils ont de l'argent et ils sont prêts à investir. Ils achètent des permis. Nous voyons des jeunes se lancer dans la pêche dans le Canada atlantique. Ils y voient un avenir...
Merci, monsieur Allain. Je suis désolé de vous interrompre.
Monsieur Donnelly, vous avez les cinq dernières minutes.
Je ne ferai pas de commentaire là-dessus.
Monsieur Nobels ou monsieur McIsaac, pour conclure avec le temps que j'ai, Mme Burridge a parlé de la transformation du poisson en Chine — elle a donné cet exemple — et de la nécessité pour la Colombie-Britannique d'avoir un produit concurrentiel. Je pense qu'elle parlait du coût de la pêche ou de la rétribution des pêcheurs, trop élevés en Colombie-Britannique. Je souligne également que M. McIsaac a dit au Comité que le revenu annuel moyen des pêcheurs en Colombie-Britannique se situe autour de 19 000 $.
Nous avons entendu les deux cas différents. Nous avons entendu que la séparation des flottilles sur la côte Est fonctionne bien, et nous avons entendu qu'il y a des problèmes. De toute évidence, nous entendons un plaidoyer pour les quotas individuels transférables, ou QIT, sur la côte Ouest, mais je crois que vous dites qu'il y a des problèmes.
Comment concilier cela? Comment en arriver à faire travailler plus de pêcheurs et plus de familles de pêcheurs tout en continuant de collaborer avec les entreprises sur place qui s'efforcent de manière légitime à veiller à la conservation, au contrôle et à l'amélioration de la situation?
Ce sont d'excellentes questions. Le système de la Colombie-Britannique n'est pas simple.
Quant au revenu moyen d'un pêcheur en Colombie-Britannique, il est très bas. Qu'en est-il de la valeur au débarquement? En Colombie-Britannique, vous verrez qu'elle se situe en moyenne autour de 300 millions de dollars par année. Près du tiers de cela va aux coûts de location des permis et de location des quotas. Ces coûts sont soustraits directement de l'argent qui irait au revenu des pêcheurs et au réinvestissement dans les navires, les engins, l'équipage et tout cela.
Cela produit un effet sur le recrutement dans l'ensemble des secteurs. Les membres de la nouvelle génération sont de moins en moins nombreux à choisir la pêche, en Colombie-Britannique, parce qu'il y a moins de possibilités. Devant un tel revenu, vous vous demandez pourquoi vous voudriez choisir cela et vivre d'un salaire aux environs du seuil de la pauvreté quand il y a tant d'autres possibilités. C'est le scénario.
Il y a quelques pêches qui permettent aux gens de gagner un salaire décent. Ils ont un permis hérité de leur famille ou en ont obtenu un avant la transition aux QIT. Regardez la différence entre l'Alaska et la Colombie-Britannique. En Alaska, ils ont opté pour les quotas peu après la Colombie-Britannique, mais ils l'ont fait tout en étant conscients de l'incidence de la transférabilité et du lien qu'il faut établir avec les pêcheurs et ont inclus cela dans les exigences. Nous n'avons pas fait la même chose chez nous.
Si nous voulons à long terme, sur notre côte, des entreprises de pêche viables, des entreprises utilisant de petits bateaux, nous devons faire ce lien. Pour ce qui est de l'échéancier, je n'oserais jamais suggérer qu'il faut le faire demain — personne ne dit cela. Il faut un processus pour faire avancer cela sur une période donnée. Ce n'est pas comme si les pêcheurs n'allaient pas produire de poisson pour les entreprises de transformation; ceux-ci auront toujours la possibilité d'acheter du poisson. En ce qui concerne Canfisco, je suis sûr qu'elle aura la possibilité d'acheter du poisson auprès de pêcheurs indépendants à l'avenir.
Merci.
Il n'y a jamais assez de temps, mais pour les 30 secondes qui restent, je vais vous demander, monsieur Turris, de me faire part de vos réflexions finales ou de vos recommandations, compte tenu de ce que vous avez entendu au sujet des deux côtes et des différentes structures.
Encore une fois, nous avons une compréhension un peu différente de la pêche. Ce que dit M. McIsaac à propos de la part de 80 % des 300 millions de dollars qui va à la location n'est tout simplement pas juste. Cela fait partie du problème: ce n'est pas juste. En fait, si c'était juste, aucune pêche ne serait viable...
Je crois que nous sommes en fait déjà en voie d'essayer de résoudre bon nombre des problèmes et que nos pêches pourront demeurer viables à long terme grâce à une meilleure gestion des ressources et à l'intervention des scientifiques et de l'industrie. Je pense que certaines des choses qui ont été dites à propos du saumon et les observations de Rob au sujet des possibilités s'offrant aux collectivités et des améliorations sont raisonnables.
La réalité c'est que l'industrie est intégrée et que tout fonctionne ensemble, alors le saumon... Il n'y a pas qu'une seule espèce, alors plus l'intégration de la pêche se fera au fil du temps, du pêcheur au transformateur, pour toutes les espèces dans tous les secteurs, plus l'industrie sera viable et prospère à long terme.
Je vous remercie de vos observations, monsieur Turris.
C'est ce qui nous amène à la fin de notre séance.
Je remercie MM. McIsaac et Nobels d'avoir été là par téléconférence.
Je remercie également M. Morley et Mme Burridge. Merci de nous avoir consacré du temps et d'avoir été là par vidéoconférence.
Bien entendu, merci à vous, messieurs Allain et Turris, d'être venus.
Cela met un point final à notre étude, et à la journée.
S'il n'y a plus rien d'autre, la séance est levée.
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