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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 24 avril 2001

• 1535

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. Soyez tous les bienvenus.

À l'ordre du jour, nous retrouvons, comme vous le savez, le projet de loi C-18, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces.

Nous avons le plaisir d'accueillir cet après-midi, du ministère des Finances, Susan Peterson, sous-ministre adjointe; Dominique La Salle, chef, Planification stratégique, Relations fédérales-provinciales; Sean Keenan, analyste principal de programme; et, enfin, Frank Vermaeten.

Madame Peterson, vous avez la parole.

Mme Susan Peterson (sous-ministre adjointe, Relations fédérales-provinciales et politique sociale, ministère des Finances): Je vous remercie, monsieur le président.

Je suis heureuse de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de prendre la parole au sujet du projet de loi C-18. Je ne parlerai pas longtemps de manière qu'il y ait du temps pour des questions à la fin.

Comme vous le savez, ce projet de loi modifie la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, de façon à éliminer le plafond du Programme de péréquation pour l'exercice 1999-2000, respectant ainsi l'engagement pris par le premier ministre à la réunion des premiers ministres tenue le 11 septembre 2000. Des ententes ont été conclues à cette réunion en ce qui a trait à un plan visant à renouveler les soins de santé et à accroître le soutien du développement de la petite enfance.

[Français]

Le soutien financier du gouvernement du Canada relatif à ces ententes totalise 23,4 milliards de dollars échelonnés sur les cinq prochaines années. De cette somme, 21,1 milliards de dollars sont fournis dans le cadre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, qui est l'un des trois principaux programmes de transfert par lesquels le gouvernement fédéral appuie les provinces et les territoires au titre de la santé et d'autres programmes sociaux.

Le TCSPS, un mécanisme de financement global, appuie les soins de santé, les études postsecondaires, le développement de la petite enfance et d'autres programmes sociaux sous la forme de transferts en espèces et de points d'impôt.

Le deuxième programme, la Formule de financement des territoires, tient compte du coût élevé de la prestation des services dans le Nord canadien.

[Traduction]

C'est la péréquation, le troisième programme de transfert, qui fait l'objet du projet de loi C-18. Elle fournit des fonds aux provinces moins bien nanties afin de leur permettre d'offrir à leurs résidents des programmes et des services sensiblement comparables à ceux des provinces plus riches. Le gouvernement du Canada a montré l'importance qu'il accordait à ce programme, comme faisant partie de la trame essentielle du pays. Le programme de péréquation a été isolé—c'est l'un des quelques programmes qui n'ont pas été touchés—pendant la période au cours de laquelle le gouvernement s'appliquait à redresser les finances de l'État.

Les paiements de péréquation sont versés sans condition. Les provinces sont libres de dépenser ces fonds comme elles l'entendent. Les sept provinces admissibles à la péréquation—Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle- Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec, le Manitoba et la Saskatchewan—devraient recevoir des paiements totalisant 10,8 milliards de dollars en 2000-2001.

Depuis 1993, la péréquation a augmenté de 33 p. 100, soit 2,7 milliards de dollars. Selon les estimations, qui sont mises à jour deux fois l'an, le programme atteint maintenant un sommet historique. Au cours de la même période, les dépenses de programme autres que de transfert ont augmenté de 2,6 p. 100.

Les estimations officielles les plus récentes, rendues publiques en février, indiquent que les paiements versés aux provinces bénéficiaires dépasseront d'environ 1,8 milliard de dollars les estimations établies en octobre dernier. Cette augmentation n'est pas attribuable à la faible performance économique des provinces bénéficiaires, monsieur le président. Elle résulte plutôt, en grande partie, de la croissance exceptionnelle observée en Ontario au cours des deux dernières années.

Les paiements augmentent immédiatement d'environ 1 milliard de dollars. De cette somme, 52 millions sont affectés à 1999-2000 et 955 millions, à 2000-2001. Le sort des 800 millions qui restent dépend de l'adoption de ce projet de loi.

[Français]

Le Programme de péréquation est examiné de façon continue par des fonctionnaires fédéraux et provinciaux de sorte que les écarts observés au chapitre de la capacité qu'ont les provinces de produire des recettes soient mesurés aussi précisément que possible.

• 1540

Le programme fait également l'objet d'une prorogation tous les cinq ans, la plus récente ayant eu lieu en 1999. Des travaux sont déjà en cours en ce qui a trait à la prorogation de 2004. Les paiements sont fondés sur une formule qui mesure la performance relative des économies provinciales.

La capacité d'une province à fournir des services publics dépend bien sûr de la performance de son économie. La formule, monsieur le président, est appliquée de la même façon à toutes les provinces et elle est automatiquement adaptée à la conjoncture économique des provinces.

[Traduction]

Quand l'économie d'une province est vigoureuse comparativement aux autres provinces, les paiements de péréquation qui lui sont versés baissent automatiquement en application de la formule. Quand l'économie d'une province, et donc sa capacité fiscale, diminue par rapport aux autres provinces, les paiements de péréquation qui lui sont versés augmentent automatiquement. De cette façon, le programme stabilise automatiquement les recettes des administrations provinciales.

En outre, les paiements de péréquation sont assujettis à des dispositions de plafonnement et de seuil. Le plafond permet au programme de croître d'une année à l'autre, mais il impose une limite à cette croissance. Le programme demeure ainsi dans les limites de la viabilité pour le gouvernement fédéral. Le plafond empêche une croissance anormalement rapide de la péréquation. Ainsi, quand l'économie de l'Ontario a connu une croissance rapide à la fin des années 80, les droits à péréquation ont dépassé la croissance de l'économie nationale. Le plafond ne s'est avéré nécessaire qu'au cours de 5 des 20 dernières années.

Le plancher protège les gouvernements provinciaux contre d'importantes et soudaines diminutions des paiements de péréquation, qui autrement seraient acceptables en vertu d'une simple application de la formule. Cette situation pourrait ainsi se produire dans le cas d'un recul important de l'économie de l'Ontario ou d'une augmentation marquée de la capacité fiscale d'une province bénéficiaire; par exemple, l'augmentation du prix du pétrole en Saskatchewan. Le plancher a protégé le Nouveau-Brunswick à une occasion et la Saskatchewan, à quatre reprises.

Le plafond pour 1999-2000 a été fixé à 10 milliards de dollars et—en excluant les dispositions de ce projet de loi—il augmentera au rythme de la croissance du produit intérieur brut (PIB) au cours des prochaines années. Selon les prévisions de la croissance du PIB signalées dans l'Énoncé économique d'octobre, le plafond atteindra 12,5 milliards de dollars en 2003-2004, la dernière année d'application de la présente loi.

Le projet de loi C-18 élimine le plafond du programme de péréquation pour l'exercice 1999-2000—et pour cet exercice seulement. Le coût final de l'abolition du plafond ne sera pas connu avant l'automne 2002 quand les données définitives pour 1999- 2000 seront rendues publiques. Toutefois, on l'estime actuellement à 792 millions de dollars.

Conformément aux modalités du programme de péréquation, ce montant sera réparti entre les sept provinces bénéficiaires, selon le nombre d'habitants. Chaque province bénéficiaire recevra 67 $ de plus par personne. Les montants par habitant sont multipliés par le total de la population de chaque province bénéficiaire pour en arriver au paiement de chacune d'entre elles. Terre-Neuve recevra une somme estimée à 36 millions de dollars; l'Île-du-Prince- Édouard, à 10 millions; la Nouvelle-Écosse, à 62 millions; et le Nouveau-Brunswick, à 50 millions. Le Québec aura droit à une somme estimée à 489 millions; le Manitoba, à 76 millions; et la Saskatchewan, à 69 millions.

Je serai heureuse, de même que mes collègues ici présents, de répondre à vos questions.

Le président: Je vous remercie infiniment, madame Peterson.

Nous allons passer maintenant aux questions et réponses, avec un tour de table de 10 minutes pour chacun. Nous commencerons par M. Harris.

M. Richard Harris (Prince George—Bulkley Valley, AC): Je vous remercie, monsieur le président.

Je vous remercie de votre exposé. J'ai ici des questions déjà préparées.

En premier lieu, certains prétendent que l'abolition du plafond est une mesure improvisée qui ne fait rien pour résoudre les problèmes plus vastes à long terme. La présence même de ce projet de loi pourrait suffire à nous convaincre qu'il faut un dialogue plus franc au Parlement afin de revoir le programme de péréquation dans tous ses détails.

• 1545

On s'inquiète de l'effet préjudiciable de tout cela, par exemple pour les trois provinces nanties, la Colombie-Britannique, l'Alberta et l'Ontario. Aux termes de ce nouveau projet de loi et des nouvelles politiques qu'il comporte, est-il possible qu'il en résulte pour ces provinces une diminution du financement de choses telles que les soins de santé?

Mme Susan Peterson: Le Parlement a l'occasion d'examiner ce programme à la loupe tous les cinq ans, car c'est là la durée de la loi en question. Un projet de loi est donc déposé régulièrement pour permettre l'examen en profondeur que vous mentionnez. Comme nous l'avons fait la dernière fois, nous serons heureux de vous aider par tous les moyens à notre disposition lorsque viendra le temps de renouveler la loi dans le contexte plus large dont il est question ici.

En ce qui concerne votre dernière question, l'entente intervenue entre tous les premiers ministres en septembre dernier prévoit l'appui du gouvernement fédéral sous la forme d'augmentions considérables du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux au profit de toutes les provinces et l'abolition du plafond pour un an. Manifestement, les premiers ministres étaient d'accord qu'il s'agissait là d'une mesure de compromis raisonnable.

M. Richard Harris: Le système de péréquation devrait servir essentiellement à égaliser les chances économiques en respectant l'autonomie de toutes les régions. On craint également que ce système n'entraîne des politiques économiques pernicieuses de la part des gouvernements provinciaux. Comment pouvons-nous empêcher par exemple une province admissible d'adopter des politiques économiques qui pourraient lui permettre de remporter une élection, sachant que le bilan sera moins reluisant l'année suivante et qu'elle aura droit à de plus importants fonds de péréquation?

Mme Susan Peterson: Bien sûr, on peut lire dans les documents théoriques que le programme de péréquation devrait inviter à la prudence, pour qu'il ne devienne pas sur le plan provincial l'équivalent du piège de l'aide sociale sur le plan des particuliers. Cependant, il faut certainement reconnaître les limites considérables de l'analogie entre un piège d'aide sociale au niveau des particuliers et au niveau des provinces.

En premier lieu, les gouvernements provinciaux ne sont pas les seuls déterminants de l'activité économique qui a lieu dans la province et sont en fait très empressés à favoriser l'activité économique, du fait des résultats évidents de cette activité pour leurs citoyens. On peut douter que la péréquation ait jamais été un déterminant important ou un obstacle à des décisions économiques éclairées au sein d'une province.

M. Richard Harris: Je viens de la Colombie-Britannique et, étant donné le rendement économique déplorable de notre province depuis quelques années, comment peut-on encore penser, bonté divine, qu'il s'agit d'une province «nantie» au sens du programme de péréquation? Serait-ce que la formule donne les résultats voulus pour les autres, sauf la Colombie-Britannique?

Mme Susan Peterson: Je vous l'assure, les modalités sont exactement les mêmes pour chaque province. Nous mesurons la capacité de chaque province de percevoir des recettes; à partir d'une imposition moyenne par province, nous calculons ce que la province serait en mesure de percevoir par habitat. Si la capacité d'une province de percevoir des recettes est inférieure à la norme de péréquation, cette province a droit au paiement de péréquation, et la Colombie-Britannique n'est pas encore dans une telle situation.

M. Richard Harris: Je suis persuadé que le gouvernement tiendra à résoudre le conflit du bois d'oeuvre, pour que nous ne nous retrouvions pas dans cette situation.

Je vous remercie beaucoup.

• 1550

[Français]

Le président: Madame Picard, vous avez 10 minutes.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je n'ai pas de questions, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur McCallum, à vous.

M. John McCallum (Markham, Lib.): Pour la gouverne de M. Harris, j'aimerais dire que j'ai lu quelque part dans des coupures de presse, datées d'aujourd'hui je crois, que la Colombie- Britannique n'est pas loin de devenir une province moins bien nantie au sens du programme de péréquation.

Avez-vous une idée du montant qui sépare la Colombie- Britannique des provinces ayant droit aux paiements de péréquation? Je pense que ce montant n'est pas très élevé, selon ce que dit l'article.

Mme Susan Peterson: Oui, des documents ont été publiés aujourd'hui en réponse à des demandes d'accès à l'information.

Savez-vous exactement quel montant sépare la Colombie- Britannique de...?

M. Sean Keenan (analyste principal de programme, Division des relations fédérales-provinciales, ministère des Finances): Au début, la Colombie-Britannique faisait bonne figure sur le plan du montant par habitant. Ce montant était beaucoup plus considérable à l'époque et correspondait à environ 1 000 $.

Au fil des ans, pendant les années 90, qui ont vu une amélioration des économies des autres provinces, la Colombie- Britannique s'est moins bien tirée d'affaire. Aujourd'hui, le montant est inférieur à 100 $ par habitant, si bien que cette province n'est pas loin de la situation d'une province moins bien nantie.

M. Richard Harris: Les coffres de la province seront vides dans deux semaines.

Le président: Il y a ici un petit tableau que nous devrions sans doute distribuer aux membres.

Allez-y, monsieur McCallum.

M. John McCallum: Je voulais simplement mentionner cela, et j'ai une question. Elle ne porte pas précisément sur le projet de loi et je ne suis pas certain que vous tiendrez à y répondre, mais l'une des choses que Brian Tobin me faisait valoir dans mon ancien poste, à l'époque où il occupait lui aussi son ancien poste, était—et plusieurs en ont déjà parlé—le taux de réimposition qui est appliqué lorsqu'une province reçoit des recettes supplémentaires, provenant par exemple du pétrole à Terre-Neuve ou du gaz en Nouvelle-Écosse. Pour chaque dollar de recettes supplémentaires que ces provinces touchent, elles perdent environ 90c., je crois, de leur montant de péréquation. Cela correspond en quelque sorte à un taux marginal d'imposition de 90 p. 100 dans le cas d'un particulier, et on pourrait faire valoir qu'une telle situation nuit à l'esprit d'entreprise des gouvernements provinciaux, parce qu'ils reçoivent si peu en contrepartie de l'activité supplémentaire qu'ils suscitent.

Bien sûr, toute province qui touche des versements de péréquation préférerait que cette réimposition soit éliminée, mais ce n'est là qu'une autre façon d'augmenter le coût de la péréquation, en théorie. Ne serait-il pas possible cependant de modifier la structure de façon à ce que le coût total ne change pas énormément, tout en permettant d'éliminer ce taux de réimposition de 90 p. 100, qui est manifestement un facteur de dissuasion?

En Europe, des sommes importantes ont été versées à l'Irlande. À ma connaissance, de telles dispositions de réimposition n'existent pas en Europe. N'y aurait-il pas pour nous des leçons à tirer du régime européen? Là-bas, dans l'ensemble, on verse beaucoup moins d'argent que nous, mais ce taux de réimposition négatif de 90 p. 100 et plus ne semble pas exister.

Mme Susan Peterson: Ma réponse à votre question se situe sur deux plans. Selon le premier, plus il y a d'activité économique dans une province et plus le gouvernement touche de recettes, moins grand bien sûr sera l'écart entre ce que le gouvernement peut percevoir lui-même et ce que représente la norme de péréquation. Toutefois, l'augmentation de l'activité économique ne profite pas uniquement au trésor provincial; elle profite manifestement aux habitants de la province de nombreuses façons, par le biais d'emplois, du revenu familial et ainsi de suite.

Donc lorsque l'on parle de mesures incitatives ou de mesures dissuasives, on ne doit pas penser uniquement à leur influence sur le trésor provincial; on doit penser à l'influence qu'elles ont également sur les citoyens de la province, ce qui me ramène à ma réponse à votre question. C'est l'un des deux plans dont je parlais.

Bien sûr, les coûts constituent un aspect important, et le programme connaît une croissance considérable, mais cette situation mise à part, je crois que la dimension centrale ici est l'équité. Les modalités du programme de péréquation sont conçues ouvertement, à la vue de toutes les provinces. Mais si vous parvenez à faire augmenter les recettes jusqu'à un certain niveau par habitant et que l'on établit une norme indiquant que chaque province au Canada devrait disposer d'un certain montant, a-t-on le droit de dire, une fois que tout le monde a atteint ce niveau, que si vos ressources s'adonnent à venir de redevances plutôt que d'autres sources, on vous laissera garder les paiements de péréquation, de façon à ce que vous dépassiez ce niveau? C'est une situation qui soulève une véritable question d'équité.

• 1555

En réalité, ce que l'on appelle le taux de réimposition dans le fonctionnement normal du programme ne correspond pas à 90 p. 100 mais plutôt à 100 p. 100.

M. John McCallum: Voilà ce qui vient renforcer mon argument.

Mme Susan Peterson: Non. Ce qu'il faut retenir, c'est que si la Colombie-Britannique, par exemple, était à un niveau où la perception de ses propres recettes la plaçait juste à la norme de péréquation, que penserait cette province—ou n'importe quelle autre province qui ne toucherait pas de péréquation mais qui se situerait précisément au niveau fixé—si le gouvernement fédéral donnait de l'argent à une autre province, de manière à la ramener au-dessus de cette norme, mais ne verserait rien à la Colombie- Britannique? C'est cette question d'équité fondamentale qui intervient ici.

Tout cet aspect des mesures dissuasives, selon moi, est compensé par le fait que ce ne sont pas simplement les trésors provinciaux et l'effet sur les trésors provinciaux qui établissent si oui ou non il y a un incitatif à faire augmenter l'activité économique. Nous avons affaire ici à l'équation beaucoup plus vaste permettant d'établir ce que l'activité économique représente pour les habitants de la province.

M. John McCallum: Je veux bien, mais du point de vue du gouvernement... je ne parle pas de l'activité économique suscitée par le secteur privé. Si vous êtes un gouvernement et si vous vous rendez compte que lorsque vous faites tel ou tel investissement, par exemple dans le pétrole, pour chaque dollar que vous touchez en recette, un dollar est repris par Ottawa, vous pourriez vous demander «À quoi bon?».

Je comprends ce que vous dites à propos de l'équité, mais la stabilité pendant, disons, cinq ans est un facteur important, vous permettant de mieux planifier et d'éviter cet effet de dissuasion.

Je me demandais si vous avez examiné les formules européennes. Je crois qu'aujourd'hui, l'Irlande n'a droit à rien parce qu'elle a fait tellement de progrès. Elle est plus riche que le Royaume- Uni, mais je crois—et ce sont vous les experts—qu'ils ont joui d'une certaine stabilité dans leur financement pendant plusieurs années. Même s'ils se tiraient très bien d'affaire, ils n'ont pas eu à subir tout de suite une réimposition.

Mme Susan Peterson: Je ne connais pas les modalités du programme irlandais dans le contexte des sommes qu'ils touchent de l'Union européenne.

Quelqu'un ici les connaît-il?

Frank.

M. Frank Vermaeten (chef, Élaboration des politiques et recherches, Division des relations fédérales-provinciales, ministère des Finances): Je ne sais pas exactement comment fonctionne ce programme mais nous avons certes considéré des modèles semblables. Nous avons examiné toutes les possibilités de diverses sortes.

Les provinces ne cessent de nous dire qu'elles sont en faveur d'un système qui mesure leur capacité fiscale véritable et on leur verse un supplément pour qu'elles atteignent la norme. Donc, nous avons certes envisagé toutes les modalités d'application. Lorsque notre groupe technique s'est penché sur la question, les incitatifs ne semblent guère poser des difficultés. Les provinces font tout en leur pouvoir pour essayer de stimuler l'emploi et l'investissement. En notre qualité de techniciens et bureaucrates, nous n'y voyons pas là une entrave au développement.

M. John McCallum: Merci.

Mme Susan Peterson: Pourrais-je ajouter une chose? Je ne voudrais pas vous donner une impression erronée. J'ai fait valoir que normalement la réimposition est de 100 p. 100. Il existe toutefois des exceptions pour tenir compte de situations spéciales lorsqu'il est difficile de calculer la moyenne du taux d'imposition à travers le pays. Étant donné qu'une assiette fiscale est propre en grande partie à une seule province, son taux d'imposition devient alors le taux d'imposition moyen par définition.

Pour faire face à de telles situations, notamment l'exploration pétrolière et gazière au large des côtes, l'extraction de la potasse en Saskatchewan et de l'amiante au Québec, on a prévu des dispositions spéciales pour que le taux de réimposition ne soit pas de 100 p. 100. Donc, à l'heure actuelle, en ce qui concerne l'exploration pétrolière et gazière au large des côtes, la Nouvelle-Écosse ainsi que Terre-Neuve ont toutes les deux conclu des accords pour l'exploitation en mer ont adopté ce qu'on appelle une «solution générique» pour atténuer les effets de la réimposition à 100 p. 100.

Le président: Merci.

Monsieur Pillitteri.

• 1600

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci.

Je voudrais enchaîner dans le même ordre d'idées. Avons-nous retiré à une province la possibilité d'obtenir des taxes au lieu simplement de se demander comment cette situation avait évolué, et a-t-on observé comment la province en question s'en est tiré? Pourquoi ne pas envisager les possibilités de richesse d'une province, qu'il s'agisse de ses ressources naturelles et autres, ou de leur mise en valeur? Les transferts fiscaux pénalisaient-ils d'une façon quelconque ces provinces?

Mme Susan Peterson: Permettez-moi de vous répondre de cette façon, et vous me direz alors si j'ai fait mouche. Le programme de péréquation est intéressant en ce sens qu'il n'évalue pas les taxes qu'une province décide en réalité d'imposer parce qu'évidemment chaque province peut décider d'avoir des impôts sur le revenu des particuliers plus ou moins élevés, des taxes foncières plus ou moins élevées ainsi que des taxes sur les sociétés et le reste.

Ce que le programme de péréquation mesure c'est la capacité d'une province de produire des recettes. Il y parvient en demandant si une province levait des taux d'imposition moyens sur toutes ces assiettes fiscales, combien pourrait-elle produire de recettes. Si une province opte pour ce que nous appelons une faible charge fiscale—autrement dit si elle décide, pour quelque raison que ce soit, de lever moins d'impôts que la moyenne—alors le programme de péréquation ne joue pas et on la dédommage en lui donnant des fonds encourageant ainsi une faible fiscalité.

Il y a le revers de la médaille. Si une province qui reçoit des paiements de péréquation décide qu'elle veut lever des impôts plus élevés que la moyenne, et elle est libre de le faire, et nous ne diminuons pas ses versements de péréquation pour autant, et nous ne la pénalisons pas parce qu'elle a décidé d'avoir des taux d'imposition plus élevés.

Donc, le programme est minutieusement conçu pour rester neutre en ce qui concerne les décisions en matière d'imposition qu'une province prend en fait.

M. Gary Pillitteri: Je vais alors vous présenter la chose différemment. Comme on peut le voir sur le tableau, dans l'accord antérieur, les recettes provenant de l'exploration pétrolière et gazière émanaient de la Nouvelle-Écosse et aussi de Terre-Neuve. Bien entendu, cela a entraîné une baisse des versements à Terre- Neuve—pour l'année 2001, je crois—et comme vous le savez le dernier accord a été modifié.

Maintenant, si, au lieu d'avoir décidé de ne pas mettre en valeur les gisements de Voisey's Bay, le gouvernement avait décidé de mettre en valeur cette richesse, cela aurait pu faire une différence dans les versements de péréquation. Si cette exploitation avait eu lieu, Terre-Neuve aurait obtenu plus de recettes. Cela aurait-il modifié le montant des versements de transfert? Voilà ce à quoi je veux en venir. Le potentiel de cette mise en valeur existe ainsi que le potentiel pour le gouvernement de cette province de toucher beaucoup plus d'argent. Le gouvernement provincial est-il pénalisé pour n'avoir pas mis en oeuvre cette richesse potentielle?

M. Frank Vermaeten:, Je dirais que la réponse est non en ce sens que pour que le programme reste objectif et très concret, nous mesurons simplement l'activité économique réelle—la quantité de pétrole retirée du sol et vendue. Tandis qu'en théorie on pourrait dire «Voilà les recettes que vous auriez pu en retirer» et ensuite ajuster les versements de péréquation en conséquence, cela donnerait lieu à une suite interminable de suppositions: «Si vous aviez fait cela en 1957, voilà ce qui ce serait produit.»

Chaque année, on devrait faire toutes sortes d'estimations spéculatives pas seulement dans le cas de Voisey's Bay mais avec tous les efforts déployés pour encourager l'emploi de cette façon, peu importe la province dont on parle.

Donc, au bout du compte, nous ne faisons rien du genre. Tout ce que nous faisons c'est mesurer l'activité économique réelle—le montant total des ventes pour mesurer la capacité de taxe de vente, le revenu réel pour l'impôt sur le revenu et les ressources qui sont en réalité extraites du sol. C'est ainsi que nous mesurons leur capacité. Donc, si une province en fin de compte a pris des décisions sages ou non, ce n'est pas à nous d'en juger.

M. Gary Pillitteri: Autrement dit, nous n'encourageons pas la médiocrité mais, dans un sens, nous l'approuvons si certains gouvernements décident de ne pas explorer à fond le potentiel de la province.

• 1605

Mme Susan Peterson: Je vais vous donner une réponse non technique à cette question. Le programme de péréquation est conçu dans un sens pour incarner une fédération évoluée. Le programme est conçu pour rester neutre en ce qui concerne les choix que font les provinces en matière de taux d'imposition pour lesquels elles optent.

De même, le programme est neutre en ce qui concerne les décisions que prennent les provinces, notamment dans votre exemple, de mettre en valeur ou non une ressource—parce qu'il ne porte pas de jugement sur les décisions des provinces. Évidemment, ces décisions sont jugées par les électeurs de la province et non par le gouvernement fédéral au moyen du programme de péréquation.

M. Gary Pillitteri: Merci.

À propos de ce dernier montant, est-ce presque 1 milliard de dollars qui a été réparti du fait de l'adoption de cette mesure législative? Quel est le montant total des cinq dernières années? Était-il de 10 milliards? Quel sera le prochain montant qu'on offrira pour les paiements de péréquation?

M. Frank Vermaeten: Les évaluations officielles pour l'exercice 2001-2002 sont de 10,585 milliards de dollars mais ce sont des évaluations estimatives. Dans le processus de péréquation, nous démarrons avec une estimation au printemps, soit le début de l'année financière. Nous continuons par la suite à ajuster ces évaluations pendant 30 mois après la fin d'un exercice fiscal.

Le montant que recevront en réalité les provinces pour l'exercice 2001-2002 ne sera présenté sous sa forme définitive qu'à l'automne de l'an 2004. Le montant de 10,585 milliards est un chiffre très préliminaire et sera modifié pas mal de fois avant de devenir final à l'automne 2004.

M. Gary Pillitteri: Merci.

Merci, monsieur le président.

Le président: Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Pourriez-vous m'expliquer un peu la formule territoriale de financement en me disant si elle s'applique uniquement par habitant?

Puis j'aurai une deuxième question.

M. Frank Vermaeten: La formule territoriale de financement ne s'applique pas en fonction du nombre d'habitants. C'est un programme en vertu duquel nous mesurons les besoins de dépenses de chacun des trois territoires. Puis, tout comme pour la péréquation, nous mesurons leur capacité à recueillir des recettes de leur propre chef, et nous comblons la différence. Le montant que les trois territoires reçoivent est très différent et il diffère aussi de ceux que reçoivent les provinces. Cela traduit les besoins spéciaux du Nord, les coûts plus élevés et les difficultés que rencontrent ces habitants.

Mme Carolyn Bennett: Lorsqu'on s'entretient avec les habitants de la région, on voit qu'ils sont évidemment très préoccupés du fait qu'ils n'ont toujours pas d'aéroports et de routes, peu importe le nombre de gens à desservir. Vous dites que la formule de financement territoriale doit en tenir compte. Est-ce bien cela?

M. Frank Vermaeten: Tout à fait. Elle doit en tenir compte. Il n'existe pas évidemment de formule magique pour savoir quel montant il faudrait leur donner pour un aéroport ou autre chose, mais il y a un moyen d'évaluer les besoins généraux. La formule tient compte du fait qu'ils perdent évidemment des économies d'échelle du fait de leur faible population de base. Leurs frais de transport sont plus élevés ainsi que leurs besoins de divers programmes. Il existe un moyen de mesurer les besoins généraux et d'en tenir compte.

Mme Carolyn Bennett: Par conséquent, y a-t-il des provinces qui estiment, étant donné que certaines de leurs collectivités sont éloignées, qu'elles ont aussi besoin de ce genre de formule. Toutes les provinces sont-elles satisfaites du système par habitant lorsqu'il s'agit de leurs dépenses principales, la santé, l'éducation et autres? Est-ce que le système de péréquation est tout à fait acceptable à toutes les provinces, ou est-ce que certaines ont des besoins spéciaux en raison de leur éloignement auxquels on ne répond peut-être pas?

Mme Susan Peterson: Je tiens à préciser une chose. Le montant que chaque province obtient par habitant du programme de péréquation n'est pas uniforme. Il varie beaucoup afin de permettre à toutes les provinces de toucher un montant plus élevé. Lorsqu'on ajoute les versements de péréquation aux recettes que tirent les provinces, elles atteignent toute une norme commune. Toutes les provinces qui touchent des versements de péréquation obtiennent en fin de compte des recettes égales par habitant lorsqu'on ajoute les versements de péréquation à leurs autres recettes.

Donc, ce n'est pas le programme de péréquation en soi qui produit des recettes égales par habitant. Comprenez-vous ce que je veux dire?

• 1610

Mme Carolyn Bennett: Oui, d'accord.

Mme Susan Peterson: Vous voulez savoir si les provinces acceptent que c'est une façon équitable d'appliquer le programme de péréquation, étant donné que certaines d'entre elles comptent peut-être des collectivités éloignées et le reste?

Je le répète, de temps à autre lorsque nous en avons discuté avec les provinces pour mettre à jour la législation en matière de péréquation, nous avons examiné la question. L'ennui est d'une part qu'il est très difficile de mesurer objectivement les besoins différents, et deuxièmement, que chaque province a ses propres besoins qui diffèrent. Dans le cas de l'une ce sont des collectivités éloignées, dans celui d'une autre ce sont peut-être des familles à faible revenu, et dans une autre encore c'est une population âgée plus importante qui a besoin de plus de soins de santé.

Lorsque l'Ontario participe à ces discussions, la province fait souvent remarquer qu'il ne convient pas de supposer que ce sont les provinces les moins bien nanties qui ont les plus grands besoins. À vrai dire, en Ontario par exemple, il en coûte beaucoup plus de fournir une foule de services à cause des salaires plus élevés qui doivent être versés pour la prestation d'un bon nombre de services publics. Les salaires que l'on paie pour la prestation de ces services en constituent l'essentiel. Nous qualifions tous ces domaines de «besoin de dépenses».

Il suffit de dire quÂaprès avoir examiné la question à plus d'une reprise, les gens sont en sorte atterrés par sa complexité. En dernière analyse, il n'y a pas de moyen objectif de mesurer la chose. En outre, si vous estimez que le programme de péréquation est actuellement complexe, imaginez ce dont il pourrait avoir l'air si l'on se met à tenir compte de ces divers aspects.

Donc, je crois que tout le monde se rend compte qu'en théorie la formule est attrayante mais qu'en pratique personne ne veut s'y risquer. Voilà je crois qui résume assez bien les choses.

Mme Carolyn Bennett: C'est la même chose lorsqu'il s'agit d'évaluer le nombre de contribuables éventuels qu'il s'agisse de personnes âgées ou d'une province dont la moitié de sa population a moins de 20 ans et ne paie pas d'impôt. Donc, tous ces facteurs entrent dans l'établissement d'une moyenne.

Mme Susan Peterson: Exactement, parce que lorsqu'on y songe, un versement égal par habitant est une façon rudimentaire de mesurer les besoins. On dit que si l'on compte 100 personnes, on va donner un certain montant par personne. S'il y a 200 personnes, on touchera deux fois plus. Par conséquent, le nombre d'habitants est l'équivalent du besoin.

Le président: Me diriez-vous, relativement à une déclaration dans vos remarques préliminaires, soit que les versements de péréquation se sont accrus de 33 p. 100 depuis 1993, quelle a été la cause de cet accroissement? C'est un gros montant. Je sais que le TCSPC avait baissé en quelque sorte mais le chiffre de 33 p. 100 est pas mal élevé, à mon avis. Je ne sais pas quel autre secteur s'est accru de 33 p. 100 depuis 1993.

Mme Susan Peterson: Aucun autre programme ne s'est accru de 33 p. 100 depuis 1993. Le programme est fonction de la croissance globale des économies des provinces et il peut en outre s'accroître énormément si l'économie de certaines provinces prend beaucoup plus d'expansion que celle d'autres, en particulier si l'économie de l'Ontario, du simple fait de la taille de sa population, s'accroît beaucoup plus rapidement que les autres. L'accélération récente de la hausse des versements de péréquation s'explique par la croissance exceptionnelle de l'économie ontarienne. Mais une croissance normale se produit. Elle a tendance à s'accroître avec l'essor de l'économie mais on peut constater certaines pointes.

Le président: Donc, c'est dire que tout au long du cycle, des fonds sont transférés des provinces nanties aux provinces démunies, que leur situation s'améliore ou pas. Ai-je raison, plus ou moins? Diriez-vous que c'est ce qui s'est passé depuis 1993?

Mme Susan Peterson: Sean, allez-y.

M. Sean Keenan: La norme de péréquation est mobile. Une année elle pourrait être de 5 000 $ par personne, mais comme il s'agit d'une norme représentative et parce qu'elle représente l'activité économique des cinq provinces moyennement riches, lorsque ces provinces s'enrichissent ou que leurs économies s'améliorent, la norme s'accroît. Donc, à mesure que l'économie s'améliore, le niveau de péréquation de toutes les provinces s'élève.

• 1615

Dans les années 90 on a aussi constaté un phénomène à savoir que les gouvernements provinciaux, comme le gouvernement fédéral, équilibraient leurs budgets. Leurs recettes s'accroissaient et ils empochaient donc les augmentations de recettes. Ils comptaient sur ces augmentations de recettes pour équilibrer leurs budgets, tandis qu'au début des années 80, les provinces avaient d'énormes déficits. À ce moment-là, l'accroissement des recettes était important. Voilà qui accroît aussi le coût du programme parce qu'il représente le taux d'imposition moyen de toutes les provinces.

Donc, si le taux d'imposition des provinces s'accroît, la taille du programme s'accroîtra également.

Le président: Je trouve ce chiffre pas mal élevé. Vous avez parlé des cinq provinces les plus riches n'est-ce pas?

M. Sean Keenan: Les cinq provinces moyennement riches.

Le président: S'agissait-il simplement d'une médiane? Pourquoi ne pas avoir utilisé les 10 provinces?

Mme Susan Peterson: La meilleure analogie que je puisse fournir comme explication est la suivante: lorsquÂon juge des patineurs, lors d'un concours de patinage, les juges ne tiennent pas compte des meilleurs et des plus mauvais mais des patineurs moyens. C'est la même chose.

L'Alberta est exclue de la norme parce que, de temps à autre c'est un cas particulier, en ce sens que ses recettes par habitant sont considérablement plus élevées que dans n'importe quelle autre province, et très volatiles. Historiquement, l'Alberta a connu des dents de scie.

Donc l'Alberta est exclue de la norme à la fois à cause de la volatilité de ses recettes et du fait que parfois elles sont tellement plus élevées que celles d'autres provinces. L'Alberta est donc exclue pour ces raisons. D'une part, nous voulons une certaine stabilité dans les versements de péréquation et rien d'imprévisible. Deuxièmement, il faut que ces versements soient à la portée de tous les contribuables du Canada.

Ayant exclu l'Alberta de la norme pour cette raison, il fallait en contrepartie exclure les quatre provinces de l'Atlantique à l'autre extrémité de l'échelle, pour arriver à un certain équilibre, et on se trouve donc avec cinq provinces au milieu.

Le président: Merci.

Madame Guarnieri.

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): On vient de nous dire que le gouvernement fédéral verse presque 11 milliards en versements de péréquation aux provinces. Ces fonds sont paraît-il affectés aux soins de santé, à l'éducation et à d'autres programmes qui sont également financés par le TCSPC. Cependant, il est devenu presque normal que les gouvernements bénéficiaires excluent toujours ces fonds de péréquation de leurs calculs de la contribution du gouvernement fédéral, mettons aux soins de santé.

Donc, comment envisageriez-vous un changement de politique en vertu duquel ces versements de péréquation devraient être réinvestis, mettons dans les soins de santé qui sont une priorité nationale?

Mme Susan Peterson: Je vais répondre à cette question sous l'angle des objectifs et des buts ainsi que des principes dont s'inspire le programme.

L'objectif consiste à garantir que chaque province dispose de recettes à peu près comparables pour fournir des services publics. Ce programme n'est pas conçu comme un moyen pour le gouvernement fédéral de dire à une province comment elle devrait dépenser ces recettes. Donc, qu'il s'agisse des trois provinces qui peuvent lever ces recettes de leur propre chef ou les autres qui sont moins bien nanties et qui ont besoin de versements de péréquation pour les porter à ces niveaux, le gouvernement fédéral ne dit pas aux autres provinces l'usage qu'elle doit de faire de ce montant d'argent, et il ne dit pas non plus à celles qui ont besoin de ces versements pour atteindre ce niveau ce qu'elles doivent faire de ce montant reçu.

Mme Albina Guarnieri: Je crois comprendre que les gouvernements provinciaux n'estimeraient certainement pas intéressant d'indiquer en bonne et due forme la contribution du gouvernement fédéral à leurs budgets de soins de santé, par exemple, mais ne diriez-vous pas comme moi que les Canadiens aimeraient savoir où va l'argent de leurs impôts? Cela ne créerait- il pas davantage d'harmonie entre les provinces?

Par exemple, il existe des situations où des provinces pauvres attirent chez elles les entreprises des provinces riches. Un contribuable peut certes éprouver un peu de ressentiment quand il constate que l'argent de ses impôts contribue à le mettre au chômage. Ne serait-il pas plus équitable si les contribuables pouvaient réellement voir où va leur argent plutôt que de simplement l'attribuer aux projets qu'affectionnent les provinces?

• 1620

Mme Susan Peterson: Encore une fois, il est vrai que le Canada a la fédération la plus développée au monde. Les provinces disposent pratiquement de la même assiette fiscale que le gouvernement fédéral et peuvent décider du montant d'impôt à percevoir. Ce n'est pas vrai de la plupart des fédérations. L'argent que le gouvernement fédéral transfère directement aux provinces n'est pas réservé à une fin précise. De toutes les fédérations, celle du Canada est pas mal développée à cet égard également.

Quant à savoir si les contribuables canadiens seraient mieux lotis si l'on rendait davantage compte de ce qui arrive avec l'argent transféré, je dirai la même chose que j'ai dite auparavant. L'argent est transféré aux provinces et les provinces rendent compte à leurs citoyens, par opposition au gouvernement fédéral, de l'usage qu'elles en font.

Mme Albina Guarnieri: Je veux dire simplement qu'il s'agit de savoir si l'argent est dépensé pour des soins de santé ou non. S'il l'est, il devrait être étiqueté comme tel. Voilà ce que je voulais dire. Je crois que les Canadiens seraient rassurés de savoir que l'argent est dépensé pour ce que j'estime être la priorité nationale à l'heure actuelle.

Mme Susan Peterson: Je crois que l'un des faits intéressants qui s'est produit lors de l'accord intervenu en septembre dernier entre les premiers ministres a été que les provinces ont accepté d'accroître la reddition de comptes devant leur population pour leurs dépenses pour les soins de santé, le développement de la petite enfance; en fait, elles rendront compte non seulement de leurs dépenses mais aussi des avantages qui en découlent.

Le ministère du Développement des ressources humaines, pour ce qui est de la petite enfance, et le ministère de la Santé, pour ce qui est de la santé, travaillent certes avec les provinces pour en arriver à une série commune d'indicateurs ou de mesures. La diffusion de cette information permettrait aux citoyens, non pas de savoir ce qui se passe dans leur propre province, mais de comparer leur situation avec celle des autres provinces.

Les premiers ministres ont accepté cette forme de reddition des comptes. Je crois qu'il existe de fortes chances que les citoyens en sachent beaucoup plus sur ce qu'on fait avec l'argent de leurs impôts et la façon dont il est dépensé.

Mme Albina Guarnieri: Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame Guarnieri.

J'ai de nouveau une question concernant votre déclaration préliminaire. Vous avez dit que le programme fait également l'objet d'une prorogation tous les cinq ans, la plus récente ayant eu lieu en 1999. Des travaux sont déjà en cours en ce qui a trait à la prorogation de 2004. Pourriez-vous nous en dire plus? Quel genre de travail faites-vous et quelles questions examinez-vous?

Mme Susan Peterson: M. Vermaeten s'occupe beaucoup de cet aspect.

M. Frank Vermaeten: Nous avons un groupe technique appelé le Sous-comité des transferts. Il examine tous les transferts, mais le gros du travail technique se fait sur la péréquation. Nous examinons vraiment tout ce qui concerne la péréquation.

Au niveau le plus technique, nous étudions comment mesurer la capacité fiscale d'une province. C'est très difficile à faire. Des représentants des provinces de même qu'une équipe fédérale s'occupent de cela. Quand nous essayons de mesurer la capacité, nous essayons de tenir compte de ce que font les provinces. Les régimes fiscaux évoluent et il en va de même du programme de péréquation.

Par exemple, quand certaines provinces ont adopté une taxe à la valeur ajoutée, nous nous sommes demandé comment, dans le système de péréquation, nous allions mesurer la capacité fiscale de manière à tenir compte du fait que les pratiques d'imposition avaient changé en raison de l'adoption d'une taxe à la valeur ajoutée, des revenus du jeu tirés par les provinces ou de l'imposition de frais d'utilisation.

Dans tous ces cas, nous devons régler les problèmes techniques pour déterminer la meilleure façon de mesurer la capacité fiscale.

Nous nous réunissons régulièrement à quelques mois d'intervalle et nous rédigeons des documents. Les provinces en rédigent de même que les fonctionnaires fédéraux. Nous leur disons la façon dont nous procédons. Nous en discutons et nous essayons d'en arriver à la meilleure approche technique. Nous examinons également des choses comme la récupération. Nous discutons ouvertement de ces questions, du plafond de péréquation et de tous ces aspects, y compris des critères.

C'est vraiment une tribune permanente où nous nous réunissons tous les trois à six mois. Nous allons continuer jusqu'en 2003- 2004, et nous proposerons le texte de loi probablement à l'automne 2003 pour les cinq années suivantes.

• 1625

Le président: En fin de compte, j'imagine que les ressources dont disposent les gouvernements doivent être investies de la meilleure façon possible pour engendrer la croissance économique, pour ceux qui croient en un programme favorisant la croissance. Quand on considère le chiffre de 10,8 milliards de dollars—et je me reporte aux remarques que vous avez faites—la péréquation est- elle le meilleur moyen de créer le genre de croissance économique dont nous parlons? D'autres options sont-elles envisagées?

Je parle ici en tant que nation. On dispose de 10,8 milliards de dollars. De l'argent est accordé au Québec, au Nouveau- Brunswick, etc. Du point de vue d'un forum des politiques publiques, de quelles autres options les gens parlent-ils? Que pense-t-on maintenant de la péréquation? Est-elle enracinée dans notre système à tout jamais?

M. Frank Vermaeten: La Constitution stipule que le gouvernement fédéral doit offrir la péréquation pour s'assurer que toutes les provinces puissent offrir des services comparables à des taux d'imposition comparables. Donc, à cet égard, je pense qu'elle existera encore pendant longtemps.

J'aimerais dire autre chose avant de céder la parole à Susan. Comme elle l'a dit, le programme vise principalement l'équité, pour s'assurer que les Canadiens, où qu'ils soient, aient accès aux services. Ce n'est pas un outil de développement économique. Ce n'est pas un outil ciblé pour essayer d'encourager l'emploi ou quoi que ce soit d'autre. Elle existe pour...

Le président: Permettez-moi de vous poser une question. Je veux faire suite à ce qu'a dit Mme Guarnieri. Elle a plaidé en faveur d'une plus grande reddition de comptes. Vous avez dit que la péréquation vise essentiellement à fournir des services comparables dans les provinces et les territoires. Mais si nous ne disposons pas de moyens clairs de rendre compte de l'argent, comment savons- nous qu'il est utilisé pour fournir ces services? Auparavant, il y avait le financement des programmes établis, et je me rappelle d'histoires racontées par des gens au sujet de routes pavées en Ontario avec l'argent destiné à l'éducation, ce genre de chose. Comment s'assurer que cela ne se produit pas?

Mme Susan Peterson: Si nous disons que les paiements de péréquation visent à s'assurer que les provinces puissent fournir des services de qualité raisonnablement comparables, cela n'exclut pas les services qui sont destinés à promouvoir le développement économique ou autre chose. Le terme est utilisé de façon plutôt globale. Il y a les services de transport, et il y a les routes. C'est un service. Je dirais que c'est vraiment conçu pour construire la base jusqu'à un certain niveau de façon que toutes les provinces puissent raisonnablement faire la même chose. C'est vraiment la province qui décide si l'argent va servir à promouvoir le développement économique ou à fournir des services sociaux de base.

Au bout du compte, bien entendu, l'argent est fongible. Cet argent va dans les coffres provinciaux, et la péréquation contribue à divers degrés aux recettes provinciales totales. C'est à Terre- Neuve que la péréquation est la plus élevée. Quelle proportion des recettes provinciales représente-t-elle?

Ce que je veux dire, c'est que l'argent est versé dans les coffres de la province et c'est elle qui rend compte à ses citoyens de la façon dont elle dépense tous ses revenus. On ne peut pas dire que tel argent provient de la péréquation et tel autre de l'impôt sur le revenu des particuliers. Les provinces sont jugées selon leurs priorités globales, y compris ce qu'elles font pour encourager le développement économique. Mais cela ne fait que veiller à ce que leurs ressources au total atteignent un certain niveau.

Au total, les transferts fédéraux à Terre-Neuve, comprenant le TCSPS, correspondent à environ 42 p. 100 des recettes de la province. Les transferts fédéraux aux autres provinces sont moindres. Ils sont beaucoup plus élevés pour les territoires, bien entendu. Ils correspondent à 90 p. 100 et quelque pour le Nunavut.

Le président: Monsieur McCallum.

M. John McCallum: Je tenais simplement à soulever à nouveau le sujet, parce que je n'ai pas compris votre réponse à la question de mon collègue au sujet de Voisey's Bay. Je ne pense pas qu'elle comporte quoi que ce soit d'hypothétique, pour ce qui est de deviner ce qu'une province pourrait avoir fait. Il s'agit de savoir si l'existence de la péréquation influe sur la motivation d'une province à entreprendre un projet comme Voisey's Bay.

• 1630

Je suis d'avis qu'elle est indéniablement un élément dissuasif. Avant de déterminer si elle va entreprendre ou non un projet comme Voisey's Bay, une province étudie le nombre d'emplois que cela va créer, les revenus qu'elle en tirera, l'impact environnemental, toutes sortes de choses.

La seule différence entre le fait d'avoir la péréquation ou non est que si vous en bénéficiez, Ottawa s'appropriera toutes les recettes additionnelles que vous obtiendrez avec ce taux de récupération de 100 p. 100. Vous pouvez malgré tout entreprendre le projet en raison des emplois créés et d'autre choses. Mais si vous êtes à la limite, il ne fait absolument aucun doute, à mes yeux, que l'existence de la péréquation décourage d'entreprendre de tels projets, toutes choses étant égales.

Je ne dis pas que c'est mal. Je suis en faveur de la péréquation. On pourrait discuter de l'importance de cet effet de dissuasion, mais je ne vois pas comment on pourrait nier qu'il existe.

Mme Susan Peterson: Je pense qu'on peut regarder la situation dans d'autres provinces et se demander: «Le Nouveau-Brunswick a-t- il découragé l'établissement de centres d'appel dans sa province parce que sa péréquation a baissé non pas de 70c. par dollar mais de 100c. par dollar?» La réponse est non. Le Nouveau-Brunswick est ravi des possibilités économiques qu'ils offrent. Il encourage ce genre de choses et serait, d'après ce que je comprends, heureux d'en avoir davantage.

De la même façon, quand on a commencé à exploiter la potasse, la Saskatchewan a été très désireuse d'obtenir tout ce qui pouvait lui procurer des revenus et n'a pas dit que cela allait réduire ses paiements de péréquation.

M. John McCallum: Ce que vous avez dit est vrai, et ce que j'ai dit l'est aussi. Il ne fait aucun doute que si un projet est à la limite, le fait que vous n'obtiendrez aucun revenu en raison de la récupération est un élément négatif quand vous décidez ou non de l'entreprendre. Ce peut être un élément négatif important ou un élément négatif non important. Nous pourrions en débattre. De toute évidence, dans le cas des centres d'appel, cet élément négatif a été compensé par d'autres choses, comme le désir d'obtenir des emplois. Mais il ne fait aucun doute que c'est un élément négatif.

Mme Susan Peterson: Si vous voulez dire, toutes choses ayant été prises en compte, que si le programme de péréquation fonctionnait de manière à vous permettre d'accroître vos propres recettes gouvernementales et de garder les recettes du gouvernement fédéral, bien entendu cela serait le meilleur des mondes possibles, mais ce serait terriblement injuste. À l'intérieur de certaines limites, le programme permet donc, comme je l'ai dit, dans des cas particuliers, à la province de conserver une partie de ses recettes de péréquation même si elle finit par avoir un niveau plus élevé que d'autres provinces. Mais la justice entre les provinces est un élément tellement important de la viabilité et de l'acceptabilité du programme, que cette considération l'emporte à la fin.

M. John McCallum: Je ne le nie pas. Je veux seulement faire valoir que, toutes choses étant égales, c'est un élément dissuasif. Et vous ne l'avez pas nié. Il se pourrait que l'élément de justice soit si important que nous acceptions cet élément dissuasif. J'accepte cela. Mais vous avez semblé avoir nié plus tôt qu'il n'y avait pas d'élément dissuasif. Je prétends que c'est faux. C'est tout ce que je dis. Je ne dis pas qu'il faudrait apporter des changements. Je tiens seulement à faire valoir qu'il est clair que cet élément dissuasif existe.

Mme Susan Peterson: Certes, les provinces tiennent compte de la réduction que subiront les paiements de péréquation au fur et à mesure que leurs revenus augmenteront.

M. John McCallum: D'accord. Je crois...

Le président: J'aurais pensé que le but ultime de tout dirigeant provincial aurait été de voir sa province devenir une province nantie plutôt qu'une province démunie.

M. John McCallum: Une dernière chose, et puis je me tiendrai tranquille. Je suis d'accord avec vous sur le fait que le gouvernement fédéral ne devrait pas demander aux provinces qui reçoivent des paiements de péréquation de lui rendre compte de la façon dont elles dépensent l'argent. Je crois que cette formule vise à égaliser la capacité d'exécuter des programmes, et elle ne donne pas au gouvernement fédéral la permission de régenter davantage les provinces pauvres que les provinces riches. Je crois qu'elles doivent rendre compte à leurs électeurs provinciaux.

Mme Susan Peterson: Oui.

Le président: J'aimerais tirer les choses au clair. Supposons que nous voulions augmenter les paiements de péréquation versés à la province de Terre-Neuve. Dites-vous qu'elle ferait probablement plus de travaux d'exploration?

• 1635

M. John McCallum: Je dis qu'à la limite—et je ne sais pas à quel point cet effet sera important, et il y aurait des préoccupations au sujet de la justice—si on ne récupérait pas à 100 p. 100 les recettes additionnelles tirées par Terre-Neuve de l'exploration ou si le taux de récupération était fixé à 50 p. 100 plutôt qu'à 100 p. 100, alors cela encouragerait Terre-Neuve à faire plus de travaux d'explorations qu'elle n'en fait en vertu du système actuel.

Le président: Oui. Et nous avons le même problème quand nous réformons l'assurance-emploi, où on versait des prestations supérieures au salaire industriel moyen, de sorte que certaines personnes qui recevaient des prestations devaient calculer s'il valait mieux travailler ou non. C'est le même genre de chose.

M. Frank Vermaeten: La seule chose qui pourrait être un peu différente dans ce cas-ci, c'est que dans la grande majorité des cas c'est le secteur privé qui procède à l'exploration. Sa décision d'explorer ou de ne pas le faire est déterminée par les prix du secteur privé, non pas par la question de savoir si la province se retrouvera avec plus ou moins de paiements de péréquation. Donc, pour ce qui est de savoir si la péréquation est un élément dissuasif pour le développement, nous constatons que dans la grande majorité des cas ces décisions d'explorer, d'ouvrir un centre d'appel ou de faire quoi que ce soit d'autre sont prises par le secteur privé. Il existe certes des cas où le gouvernement exerce une certaine influence, mais ils tendent à être l'exception plutôt que la règle.

M. John McCallum: Mais ils tendent à être des exceptions importantes. Les mégaprojets comme Voisey's Bay et le gaz de l'Île de Sable exigent nettement une participation et une approbation du gouvernement pour aller de l'avant.

Le président: On pourrait dire cela.

Merci, monsieur McCallum.

Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri: Merci beaucoup.

J'aimerais aborder de nouveau la question sous un angle un peu différent, ayant peut-être siégé trop longtemps à ce comité des finances. C'est la troisième fois que nous parlons de cette entente, l'ayant déjà fait en 1994 et 1999, et nous en sommes de nouveau à la prochaine étape.

Vous dites qu'aux négociations, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux sont représentés. Je pense que parfois selon la partie du pays d'où l'on vient on a tendance à se demander si le système est juste ou non. Je crois aux paiements de péréquation, et j'en appuie le concept. Mais nous avions une situation—en fait jusqu'à la dernière fois—où la péréquation était versée aux termes de paiements de transfert utilisant la formule de péréquation, que nous avons maintenant changée. Cela incitait également les provinces à ne pas se développer comme elles l'auraient fait parce qu'elles recevaient en fait beaucoup plus par habitant qu'elles n'en reçoivent maintenant dans les paiements de transfert.

Permettez-moi de présenter les choses ainsi. Est-il arrivé au cours des négociations que quelqu'un...? Parce que ce que vous faites maintenant c'est de la comptabilité, strictement de la comptabilité. Il n'y a aucune initiative. Imaginez qu'un entrepreneur comme moi dise: «Une minute, s'il ne va rien me rapporter, je pourrais tout aussi bien ne pas lancer ce projet». Je vais le faire échouer.

Voici où je veux en venir: est-il possible, dans le cadre de ces négociations, de la part du fédéral ou des provinces, de tenir compte du potentiel d'une province et de veiller à ce que ses richesses naturelles soient exploitées à fond? Je veux dire que peu importe le cas... À l'île de Sable, le gaz naturel est là depuis 20 ans, mais je ne crois pas que c'est pour cette raison qu'il n'a pas été exploité. Les ressources de Voisey's Bay existent depuis tellement longtemps, mais maintenant c'est...

Les provinces et le gouvernement fédéral sont-ils d'accord pour modifier légèrement la norme de façon à ce que nous profitions tous de cette mesure, pour qu'il n'y ait pas de rivalité entre nous et que tout le monde fasse sa part pour explorer son plein potentiel? Ou est-ce seulement un exercice comptable qui est effectué après coup, deux ans plus tard, de façon à établir le montant que chacun va recevoir?

Mme Susan Peterson: C'est un programme au budget énorme—11 milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent—et il est soumis à l'examen autant des provinces riches que des provinces moins bien nanties. C'est la raison pour laquelle nous consacrons beaucoup de temps à étudier autant les aspects techniques que les aspects théoriques du fonctionnement du programme de péréquation.

• 1640

Un programme ne peut pas tout faire. Ce programme vise entre autres à amener les provinces à atteindre un certain niveau et à s'assurer qu'elles ont les moyens de l'atteindre. Puis, elles doivent rendre compte à leurs citoyens de la façon dont elles ont dépensé l'argent.

J'ai l'impression que vous pensez que le programme devrait être évalué en fonction d'autres critères, et je me demande simplement si ce programme, qui doit...

M. Gary Pillitteri: Il y a beaucoup de programmes et de transferts destinés aux provinces. En fait, il y en a trois ici. Mais comme c'est le plus fondamental, les critères des paiements de péréquation... Ils sont plus fondamentaux que les deux autres programmes parce qu'ils devraient être la source de revenu d'un pays, d'une province, si le plein potentiel est exploité. C'est ce que je veux dire.

Je comprends que quelqu'un doit travailler et percevoir les impôts dont tous les Canadiens profitent, mais il est impérieux de donner aux provinces la possibilité de fournir les services. C'est ce à quoi servent surtout ces paiements, aux services de première ligne. J'estime que le programme de péréquation est le financement de première ligne qui permet d'assurer le niveau de vie des Canadiens.

M. Frank Vermaeten: Je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre exactement le genre de programme auquel vous pensez. Je crois que vous voulez qu'on négocie avec les provinces et qu'on dise: «Voici les paiements de péréquation que vous recevrez, même si vous avez exploité ces ressources.» On inciterait ainsi les provinces à exploiter leurs ressources. Est-ce ce que vous...?

M. Gary Pillitteri: C'est exactement ce que je dis. Au lieu d'avoir un taux de récupération de 100 p. 100, fixons-le à 60 p. 100, par exemple. Vous inciteriez ainsi la province à produire pour accroître ses recettes. Je répète que nous ne voulons pas encourager la médiocrité mais, si une ressource naturelle n'est pas exploitée—et je reviens à l'exemple de Voisey's Bay—au lieu de récupérer 100 p. 100, récupérons 60 ou 40 p. 100. Fixons un taux qui les encouragera à exploiter la ressource. C'est tout ce que je dis.

M. Frank Vermaeten: En théorie, cela a un certain sens, mais des difficultés surviennent dans la pratique. Par exemple, vous diriez à la Saskatchewan—et je ne sais pas combien de puits on y trouve, peut-être des milliers—que si elle avait 1 000 puits de plus, elle pourrait produire davantage et recevrait davantage en péréquation. La Saskatchewan pourrait trouver que ce n'est pas réaliste pour elle de le faire.

Il n'y a pas que les ressources naturelles. Vous diriez ensuite au Nouveau-Brunswick qu'il pourrait faire mieux s'il avait plus de centres d'appels. Il faudrait alors négocier la question de ces centres. Puis nous irions dire à une autre province de faire autre chose. Cela va bien au-delà des ressources naturelles.

Je pense qu'en bout de ligne ce serait très difficile, sur le plan pratique, de gérer ce programme parce qu'il y a tellement de sources de croissance économique dont chaque province dispose.

Mme Carolyn Bennett: On punirait les gens. On veut donner aux gens ce dont ils ont besoin, n'est-ce pas?

Je pense que votre intuition est bonne. Dans un sens, pour moi, c'est un paiement de base sans condition visant à assurer une certaine équité dans l'ensemble du pays. Si la péréquation décourageait grandement les provinces de faire ce qui vous semble être sage de faire sur le plan du développement économique, ce serait très inquiétant, mais...

M. Gary Pillitteri: Je pense que vous me comprenez mal. Je dis que certaines provinces ont la possibilité latente de recueillir des recettes fiscales et que, tant que ce potentiel n'est pas complètement exploré, le taux de récupération ne devrait pas être de 100 p. 100. Je dis également que si elles explorent à fond leur potentiel, elles pourraient toujours recevoir des paiements de transfert de façon à avoir plus de latitude pour exploiter leur plein potentiel, que ce soit des centres d'appels ou autre chose. Elles ne devraient pas être pénalisées par la récupération de recettes sur les paiements de péréquation. C'est ce que je dis. Vous m'avez mal compris.

Mme Susan Peterson: M. McCallum parlait de l'effet dissuasif.

M. Gary Pillitteri: Et c'est la première chose dont j'ai parlé.

• 1645

Mme Susan Peterson: Oui. Je pense qu'il y a deux questions. D'abord, le programme pourrait-il être conçu pour accomplir d'autres objectifs qui vous paraissent souhaitables? Mais, selon moi, il y a seulement une question de fait: le programme de péréquation s'est-il avéré avoir un effet dissuasif important sur le développement économique dans les provinces qui reçoivent des paiements de péréquation?

Nous n'en avons pas la preuve, et les représentants des provinces nous disent que leurs gouvernements ne prennent pas de décisions pareilles parce que leurs électeurs les écorcheraient vifs s'ils faisaient obstacle au développement économique de la province, qui est une source d'emplois pour eux, à cause du programme de péréquation. Il faut aussi tenir compte des faits.

M. Gary Pillitteri: Merci.

Le président: Merci, monsieur Pillitteri.

Monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-18. C'est un projet de loi très court. En fin de compte, il nous touche autant nous que les provinces.

Madame Peterson, vous l'avez sans doute distribué à vos homologues des provinces?

Mme Susan Peterson: Oui.

M. Roger Gallaway: A-t-il soulevé des objections? Y a-t-il quelqu'un qui est en désaccord avec le projet de loi tel qu'il est rédigé?

Mme Susan Peterson: Je pense que vous allez recevoir les ministres des Finances du Manitoba et des quatre provinces de l'Atlantique.

Est-ce le cas, monsieur le président?

Ils ne vont pas vous parler en bien du projet de loi.

M. Sean Keenan: Ils vont être d'accord avec l'idée de l'abolition du plafond. Ils n'approuvent pas le plafond. Ils vont essentiellement être d'avis que le programme de péréquation devrait être sans limite. S'il coûte 12 milliards de dollars...

M. Roger Gallaway: Je pense que notre comité a examiné le programme il y a deux ou trois ans. Mais disent-ils qu'ils sont en désaccord d'une certaine façon avec le fonctionnement de base, les principes, les calculs ou tout autre aspect du projet de loi, ou sont-ils en désaccord avec le programme?

Mme Susan Peterson: Ils ont indiqué clairement que, pour eux, le projet de loi C-18 ne va pas assez loin. Ils apprécient ce qu'il propose, mais ils estiment qu'il ne fait pas assez. Ils sont d'avis que l'engagement du premier ministre était plus généreux que ce qui est offert dans le projet de loi.

M. Roger Gallaway: J'ai une dernière question à poser. Le premier ministre s'est engagé à injecter des fonds dans certains programmes. Cela n'avait-il pas été clairement compris? Je parle maintenant du montant par opposition à...

Mme Susan Peterson: Le premier ministre a déclaré que le plafond du programme de péréquation pour l'année 1999-2000 serait éliminé; c'est l'objet de ce projet de loi.

M. Roger Gallaway: D'accord.

Mme Susan Peterson: Ils diront toutefois qu'ils peuvent interpréter l'engagement du premier ministre d'une autre façon qui leur donnerait plus que ce que prévoit ce projet de loi.

M. Roger Gallaway: Merci.

Le président: J'aimerais revenir au point soulevé par M. Pillitteri et par M. McCallum à propos des facteurs de dissuasion. Ce montant de 10,8 milliards de dollars que vous avez transféré à ces provinces ne sert-il pas, comme vous l'avez dit, à financer les provinces pour qu'elles puissent offrir des services, etc., quels que soient leurs besoins? Je ne comprends pas très bien l'argument avancé à ce sujet, soit que les provinces n'exploiteraient pas leur potentiel économique à cause d'une disposition de récupération fiscale. Serait-il sensé de dire: «Non, je ne vais pas développer ceci ou cela, car sinon je ne recevrai pas d'argent du gouvernement fédéral»?

Idéalement, les gens qui vivent dans ces provinces ne voudraient probablement pas recevoir des paiements de péréquation, mais plutôt générer leur propre richesse. D'après les conversations que vous avez eues avec vos homologues, quel est l'état d'esprit que l'on retrouve, par exemple, à Terre-Neuve et dans d'autres provinces?

Mme Susan Peterson: C'est intéressant, parce que les ministres provinciaux des Finances précisent habituellement que, bien entendu, ils préféreraient ne pas dépendre du programme de péréquation. Ils préféreraient que l'activité économique soit suffisante pour les amener à ce niveau sans avoir recours au programme de péréquation.

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Ceci étant dit, ils avancent l'argument suivant: «Nous arriverions plus rapidement à l'autosuffisance économique en attirant l'investissement et en créant des débouchés, etc., si seulement vous nous permettiez de continuer à bénéficier des paiements de péréquation comme s'il n'y avait pas eu accroissement de l'activité économique». Lorsqu'elles présentent cet argument, la plupart des provinces considèrent qu'il s'agit d'une période de transition—en d'autres termes: «Avant d'arriver à une autosuffisance complète, sans le programme de péréquation, ne soyez pas aussi sévères envers nous et abstenez-vous de nous imposer une récupération fiscale à 100 p. 100».

C'est en général la façon dont les provinces avancent cet argument.

Le président: Comment peut-on dire parler de sévérité, alors que l'on reçoit 10,8 milliards de dollars en paiements de transfert?

Mme Susan Peterson: Vous m'avez demandé de me mettre à leur place.

Le président: Non, non, poursuivez.

Mme Susan Peterson: Je peux vous donner les arguments des provinces, celles notamment qui reçoivent des paiements de péréquation. D'après elles, l'engagement constitutionnel est essentiel pour notre pays et, par conséquent, le programme de péréquation qui permet de respecter cet engagement ne devrait pas adopter une norme limitée à cinq provinces, mais intégrer l'Alberta dans la norme pour que le programme de péréquation soit encore plus riche.

Les ministres provinciaux vont dire qu'à leur avis, rien ne justifie que la norme n'englobe pas les 10 provinces; cela représenterait une moyenne générale que chaque province devrait atteindre. Ils prétendront, par ailleurs, que le plafond imposé actuellement n'est qu'une rupture artificielle du fonctionnement normal du programme et qu'il ne devrait pas exister.

Ils prétendront alors que pour ces deux raisons, le programme devrait être plus riche qu'il ne l'est afin d'atteindre cet objectif constitutionnel. Il faut ensuite parler des considérations—bien sûr, de l'autre côté—qui sont sous-jacentes au fonctionnement actuel du programme.

Le président: Je pense au contribuable moyen qui se lève tous les jours, qui fait de son mieux pour gagner sa vie et qui s'aperçoit que les transferts ont été relevés de 33 p. 100 au cours d'une période pendant laquelle son revenu n'a peut-être pas augmenté d'autant. Face à ces 33 p. 100, ces 10,8 milliards de dollars, qui, à mon avis, représentent un montant d'argent assez considérable, je me demande quand, en tant que législateurs, nous allons commencer à nous pencher véritablement sur ces questions.

À mon avis, la classe politique canadienne s'attarde sur les intrants, c'est-à-dire le montant que l'on transfère et celui que l'on injecte dans les programmes, alors qu'il faudrait, me semble- t-il, s'attarder davantage sur les extrants. Peut-être que le programme de péréquation n'est pas un bon point de départ. Il en existe beaucoup d'autres.

Il est important toutefois que les gens sachent que les paiements de péréquation versés à ces provinces ont augmenté de 33 p. 100 depuis 1993—c'est extrêmement important. Il est également important que les provinces qui reçoivent ces paiements de péréquation comprennent que les Canadiens dans d'autres provinces—et je reviens au point de Mme Guarnieri—veulent qu'on leur rende davantage de comptes à propos de leurs impôts. J'ai l'impression que c'est ce que souhaitent les contribuables, à l'échelle du pays.

C'est tout simplement une observation.

Mme Susan Peterson: Il ne fait aucun doute que, dans un certain sens, même si le programme de péréquation est très important, il s'agit toutefois de l'un des programmes les plus invisibles, à cause de sa nature, en partie.

Le président: Y a-t-il d'autres questions?

Merci beaucoup, madame Peterson, ainsi que tous ceux qui ont participé à la discussion. Comme toujours, vous avez grandement éclairé le Comité des finances et nous vous en remercions beaucoup.

Merci.

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