FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 2 mai 2001
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): J'ouvre la séance et je souhaite la bienvenue à tout le monde.
Comme vous le savez, nous nous réunissons cet après-midi pour examiner le projet de loi C-22, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu, les Règles concernant l'application de l'impôt sur le revenu, certaines lois liées à la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada, la Loi sur les douanes, la Loi sur la taxe d'accise, la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations et une loi liée à la Loi sur la taxe d'accise.
Monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le président, avant de commencer...
[Traduction]
Une voix: C'est l'examen article par article?
[Français]
M. Yvan Loubier: Monsieur le président, avant de commencer j'aimerais vous exposer un problème. Je vais recommencer.
Monsieur Epp, ça va?
Demain matin, on doit procéder à la troisième lecture du projet de loi C-18. Au même moment, nous devons procéder à l'étude article par article du projet de loi C-22, en comité.
Il y a un problème. On ne peut pas intervenir à deux endroits à la fois. Nous n'avons pas encore le don d'ubiquité. Serait-il possible de reporter la réunion de comité prévue pour demain matin, de façon à nous permettre d'intervenir à la Chambre des communes à l'étape de la troisième lecture?
[Traduction]
Le président: Oui, absolument. C'est comme si c'était déjà fait. De temps en temps, il y a des conflits de ce genre, mais vous avez parfaitement raison de dire qu'on ne peut être à deux endroits en même temps. Vous proposez de reporter la réunion du Comité des finances, et en ce qui me concerne, votre proposition a bien du sens.
M. Ken Epp (Elk Island, AC): Je n'ai pas entendu la première partie.
Le président: Un projet de loi concernant les finances sera examiné à la Chambre en même temps que...
M. Ken Epp: De quel projet de loi s'agit-il?
M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances): Le projet de loi C-17.
Le président: Monsieur Cullen.
M. Roy Cullen: Monsieur le président, d'après ce que j'ai pu comprendre, des discussions sont d'ores et déjà en cours en vue d'éliminer ce conflit, afin qu'on règle d'abord le projet de loi C-17, et que le leader à la Chambre dépose un autre projet de loi et lance l'étude du projet de loi C-22 une fois que les audiences du comité concernant le projet de loi C-17 seront terminées.
Le président: Donc, d'ici la fin de la journée, nous devrions connaître le résultat de ces discussions.
M. Roy Cullen: Oui, tout à fait.
Le président: Mais l'argument de M. Loubier est très valable, puisqu'il est impossible d'être à deux endroits en même temps. Si vous comptez ouvrir le débat sur le projet de loi à la Chambre, nous allons effectivement reporter à plus tard la réunion du Comité des finances. Cela me semble tout à fait normal. Les membres sont-ils d'accord là-dessus?
M. Roy Cullen: Oui, bien sûr. Nous avons tous le même problème. Moi, aussi, étant donné que j'étais censé participer au débat à l'étape de la troisième lecture.
Le président: Donc, la réunion est prévue jusqu'à nouvel avis.
M. Ken Epp: Je me demande si on pourrait aller encore plus loin, étant donné—et c'est un problème très personnel qui ne concerne que moi-même—qu'un membre de mon personnel est absent pour subir une opération. L'autre membre de mon personnel le remplace. C'est celui qui s'occupe des questions économiques qui est absent en ce moment. Nous aurons donc du mal à nous préparer pour examiner ce projet de loi d'ici à demain. Si on pouvait reporter la réunion à la semaine prochaine, je serais tout à fait ravi.
Le président: Je comprends. Mais nous avons approuvé le calendrier hier.
M. Ken Epp: Oui, je sais.
Le président: Vous vous en souvenez certainement. Mais l'argument de M. Loubier est fort valable et nous devrons en tenir compte. M. Epp, je vais également tenir compte de votre problème de personnel. Mais nous avons prévu de recevoir certains témoins, et il faut bien que nous fassions notre travail.
Ça va, monsieur Gallaway?
M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Il a été question du projet de loi C-17. C'est quoi le projet de loi C-17? Ces chiffres ne me disent absolument rien.
Le président: Monsieur Cullen.
M. Roy Cullen: Le projet de loi C-17 crée la Fondation canadienne pour l'innovation et apporte certains changements à la Loi sur la gestion des finances publiques.
M. Roger Gallaway: Très bien.
Le président: Monsieur Cullen, vous connaissez bien la procédure suivie en comité. Prenez le temps qu'il vous faut, et ensuite nous ouvrirons la période des questions.
Monsieur Cullen, bienvenue.
M. Roy Cullen: Merci beaucoup, monsieur le président. Étant donné que ce projet de loi a 505 pages, avec votre permission, je vais passer rapidement en revue...
M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): À raison d'une minute de la page.
M. Roy Cullen: Vraiment? Ce n'est sûrement pas ce que vous souhaitez. Je vais être bref pour vous laisser le temps de poser des questions.
[Français]
Monsieur le président, ce projet de loi prévoit la mise en oeuvre d'éléments fondamentaux du plan quinquennal de réduction des impôts qui a été présenté dans le budget de 2000 et exposé de façon plus détaillée dans l'énoncé économique et mise à jour budgétaire de l'automne dernier.
[Traduction]
Il comprend également d'autres mesures touchant l'impôt sur le revenu, notamment des modifications techniques contenues dans le projet de loi C-43, qui est mort au Feuilleton durant la dernière législature.
Je voudrais tout d'abord traiter des mesures touchant l'impôt sur le revenu des particuliers, qui font partie du Plan quinquennal de réductions des impôts. Je vais commencer par les mesures prévoyant, à compter de janvier 2001, des réductions de taux d'imposition touchant toutes les tranches de revenu. En vertu du projet de loi C-22, les taux d'imposition inférieur et intermédiaire sont abaissés, pour s'établir respectivement à 16 et à 22 p. 100. Le taux d'imposition supérieur, de 29 p. 100, passe à 26 p. 100 pour les particuliers dont le revenu se situe approximativement entre 61 000 $ et 100 000 $, ce qui signifie que le taux de 29 p. 100 ne s'applique qu'aux revenus dépassant 100 000 $. En plus de la réduction des taux d'imposition, la surtaxe de 5 p. 100 pour la réduction du déficit est éliminée à compte de janvier 2001. Le projet de loi C-22 affirme également l'engagement pris dans le cadre du budget de 2000 de faire passer le montant personnel de base à 8 000 $ d'ici 2004 et d'augmenter les seuils des tranches d'imposition, pour les établir à au moins 35 000 $, 70 000 $ et 113 804 $ d'ici cette même année.
[Français]
Monsieur le président, je désire maintenant vous parler d'une mesure qui doit être instituée d'ici la fin juin. Je parle ici du soutien accru aux familles avec enfants, dans le cadre de la prestation fiscale canadienne pour enfants.
[Traduction]
Le projet de loi C-22 portera le montant maximal de la prestation fiscale pour enfants pour le premier enfant à 2 372 $ à compter de juillet 2001, ce qui nous approche beaucoup de l'objectif quinquennal fixé par le gouvernement, soit 2 500 $ pour le premier enfant d'ici 2004. Le projet de loi met aussi en application les bonifications à la prestation fiscale pour enfants annoncées dans l'Énoncé économique et mise à jour budgétaire. Conjuguée aux changements prévus dans le budget de 2000, cette mesure se traduira par une augmentation de 2,6 milliards de dollars d'ici 2004-2005 des prestations versées aux familles avec enfants.
Ces modifications doivent entrer en vigueur au 1er juillet, d'où la nécessité d'adopter le projet de loi d'ici cette date, afin de donner à l'Agence des douanes et du revenu du Canada l'autorisation législative dont elle a besoin pour verser les prestations accrues destinées aux enfants canadiens.
[Français]
Certains autres éléments du plan quinquennal de réduction des impôts compris dans ce projet de loi sont conçus spécialement pour venir en aide à ceux qui en ont le plus besoin. Les montants annuels maximaux des crédits d'impôt pour personnes handicapées, la réduction pour frais de garde d'enfants pour les enfants admissibles au crédit d'impôt pour personnes handicapées, le crédit pour aidants naturels et le crédit pour personnes déficientes à charge sont tous majorés en 2001.
[Traduction]
En outre, l'admissibilité au crédit d'impôt pour personnes handicapées est élargie pour englober les personnes qui doivent suivre une thérapie intensive afin de maintenir leurs fonctions vitales, et la liste des membres de la famille auxquels le crédit d'impôt pour personnes handicapées peut être transféré est allongée.
De plus, en vertu du projet de loi C-22, le montant pour études est doublé, passant ainsi de 200 $ à 400 $ à compter de cette année, et l'exonération au titre de certaines bourses d'études et bourses de recherche passe de 500 $ à 3 000 $.
Une autre mesure permettra aux travailleurs autonomes de déduire la part des cotisations au RPC/RRQ qui correspond aux cotisations de l'employeur.
• 1540
Monsieur le président, les autres mesures touchant l'impôt des
particuliers énoncées dans le projet de loi exigeraient une
discussion trop longue pour le peu de temps dont nous disposons
aujourd'hui. Ces mesures comprennent, par exemple, des précisions
sur les règles en vertu desquelles les membres d'un ordre religieux
peuvent demander une déduction pour leur résidence, des précisions
sur les circonstances dans lesquelles l'Agence des douanes et du
revenu du Canada peut divulguer des renseignements sur d'anciens
organismes de bienfaisance inscrits; et l'application du
remboursement des frais de déplacement des enseignants à temps
partiel aux enseignants qui n'ont pas d'autre emploi.
Moi-même et les hauts fonctionnaires qui m'accompagnent aujourd'hui nous ferons un plaisir de discuter des autres modifications techniques au cours de la période de questions qui suivra mes remarques liminaires.
[Français]
Passons, monsieur le président, aux modifications de l'impôt des sociétés prévues dans le projet de loi. Permettez-moi de préciser que le plan quinquennal de réduction des impôts renferme de nombreuses mesures pour rendre ce volet du régime canadien de l'impôt sur le revenu plus concurrentiel à l'échelle internationale.
[Traduction]
Le projet de loi C-22 propose d'importantes réductions des taux d'imposition des sociétés. Le taux passera de 28 à 21 p. 100 pour les entreprises des secteurs assujettis aux taux les plus élevés, comme les services de haute technologie, de manière à les rendre plus concurrentielles à l'échelle internationale. Ces réductions s'amorcent par une diminution d'un point à compter du 1er janvier 2001. D'ici 2005, monsieur le président, le taux d'imposition fédéral-provincial combiné, y compris l'impôt sur les bénéfices et sur le capital, passera de la moyenne actuelle de 47 à 35 p. 100, soit cinq points de pourcentage de moins que le taux américain. Ainsi, nos entreprises accroîtront leur compétitivité par rapport à celles des autres pays du G-7.
Monsieur le président, deux mesures énoncées dans le Plan sont conçues pour aider les entreprises canadiennes à avoir plus facilement accès aux capitaux. La première a pour effet d'abaisser le taux d'inclusion des gains en capital, qui passe des trois quarts à la moitié. En vertu de cette mesure, le taux fédéral-provincial supérieur de l'impôt sur les gains en capital sera inférieur au taux supérieur type fédéral-État combiné des États-Unis.
La deuxième mesure prévoit le report d'impôt sur les gains en capital réalisés sur des placements qui sont réinvestis dans des actions de certaines petites et moyennes entreprises. De concert avec le changement apporté au taux d'inclusion des gains en capital, la déduction pour options d'achat d'actions accordées à des employés est augmentée, passant du quart à la moitié. En conséquence, les avantages découlant d'options d'achat d'actions seront assujettis à un régime fiscal plus favorable au Canada qu'aux États-Unis.
[Français]
En outre, le projet de loi C-22 reporte l'imposition de certains avantages découlant d'options d'achat d'actions et autorise une déduction supplémentaire pour certaines actions léguées à des organismes de bienfaisance dans le cas d'options d'achat d'actions.
Monsieur le président, tout comme les mesures touchant l'impôt des particuliers, les modifications relatives à l'impôt des sociétés et les autres modifications fiscales sont trop nombreuses pour que nous puissions discuter de chacune d'elles. Cependant, permettez-moi de donner quelques exemples.
[Traduction]
Le projet de loi C-22 comprend de nouvelles règles concernant les succursales de banques étrangères exerçant leurs activités au Canada. Le régime fiscal des nouvelles succursales de banques étrangères sera comparable à celui des banques canadiennes. Le projet de loi C-22 raffermit en outre les dispositions relatives à la capitalisation restreinte; il modifie les règles de réorganisation d'entreprise par fractionnement; il instaure un crédit d'investissement temporaire de 15 p. 100 pour les frais fondamentaux d'exploration minière et prévoit l'élimination progressive du régime d'impôt spécial appliqué aux sociétés de placement appartenant à des non-résidents.
De plus, ce projet de loi apporte des précisions quant au traitement fiscal appliqué aux dépenses liées aux ressources et aux dons de terres écosensibles. Il prévoit l'application de l'impôt supplémentaire sur le capital à l'égard des sociétés d'assurance-vie jusqu'à la fin de 2000, et il fait en sorte qu'une société membre d'une chaîne soit considérée, aux fins de l'impôt, comme étant contrôlée par sa société mère immédiate.
Monsieur le président, j'aimerais mentionner trois autres mesures avant de passer à la période de questions. La première a trait aux fiducies. Le projet de loi C-22 traite de la fiscalité des biens distribués par une fiducie canadienne à un bénéficiaire non résident. Il instaure également des mesures et entrées au régime fiscal applicable à des fiducies simples, à des fiducies protectrices et à des fiducies semblables, de même qu'aux fiducies de fonds communs de placement, aux fiducies de santé et de bien-être et aux fiducies régies par des régimes enregistrés d'épargne-retraite et des fonds enregistrés d'épargne-retraite.
[Français]
En outre, ce projet de loi renferme plusieurs nouvelles mesures anti-évitement conçues pour que les transferts des fiducies ne puissent servir à réduire injustement l'impôt.
• 1545
La deuxième mesure porte sur les nouvelles règles
de migration des contribuables et
fait en sorte que le Canada conserve le droit d'imposer
les gains que les immigrants ont cumulés pendant leur
séjour au Canada.
[Traduction]
Le projet de loi C-22 précise l'effet des nouvelles règles sur divers types de droits à un revenu futur et autorise les anciens résidents, à leur retour au pays, à renverser les effets fiscaux de leur départ, quelle que soit la durée de leur séjour à l'étranger. De plus, les anciens résidents pourront réduire l'impôt canadien à payer sur les gains cumulés avant leur départ du montant de certains impôts étrangers payés sur ces mêmes gains.
Cette mesure fait partie de l'engagement du Canada à éviter la double imposition à l'échelle internationale, engagement pris en compte dans les conventions fiscales négociées depuis décembre 1999.
La dernière mesure, monsieur le président, a trait à l'entente du 3 juin 1999 entre le Canada et les États-Unis au sujet des périodiques étrangers. Par suite de cette entente, les règles actuelles concernant la propriété canadienne et le contenu canadien aux fins de la déduction des dépenses de publicité ne s'appliquent plus qu'à la publicité dans les périodiques. Dorénavant, les dépenses de publicité dans les périodiques au contenu rédactionnel original d'au moins 80 p. 100 seront entièrement déductibles, et les dépenses de publicité dans d'autres périodiques pourront être déduites au taux de 50 p. 100, sans égard à la propriété.
[Français]
Les mesures proposées dans ce projet de loi prévoient un allègement fiscal pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes, particulièrement ceux qui ont le plus besoin d'aide. Elles favorisent, en outre, l'entrepreneurship, la croissance économique et la création d'emploi de façon à donner aux Canadiens une longueur d'avance dans la nouvelle économie.
[Traduction]
Le Plan quinquennal de réduction des impôts se traduira par un allégement fiscal de 100 milliards de dollars d'ici 2004-2005; il réduira ainsi de 21 p. 100 en moyenne l'impôt fédéral sur le revenu des particuliers que paient les contribuables canadiens. Les familles avec enfants bénéficieront d'une réduction d'impôt encore plus élevée, soit environ 27 p. 100 en moyenne. En outre, le Plan permettra de rehausser la compétitivité du régime de l'impôt des sociétés à l'échelle internationale.
[Français]
Tous les contribuables canadiens profiteront de ces modifications. Toutefois, dans le cadre de l'examen de ce projet de loi, je demande aux députés d'avoir une pensée particulière pour les enfants qui ont besoin de la hausse de la prestation fiscale canadienne pour les enfants d'ici le premier juillet.
[Traduction]
Monsieur le président, je tiens à vous remercier d'avoir mis ce plan à ma disposition aujourd'hui pour rencontrer les membres du comité. Les fonctionnaires qui m'accompagnent et moi-même sont maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions. Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen.
Comme d'habitude, je remercie tous les fonctionnaires du ministère pour leur présence aujourd'hui. Nous avons toujours besoin de vos conseils sur des questions clés liées à ces projets de loi.
Monsieur Peschisolido, vous avez cinq minutes.
M. Joe Peschisolido (Richmond, AC): Merci, monsieur le président.
Je voudrais remercier mon collègue, M. Cullen, pour son exposé. On plaisantait au début de la réunion au sujet du nombre de pages qu'il faudrait revoir si nous en étions à l'examen article par article. Pour moi, c'est une indication de la complexité de ce projet de loi.
Monsieur Cullen, comme ce projet de loi, tout en représentant un progrès, ne constitue qu'une mesure d'administration interne pour permettre au gouvernement de mettre à exécution les propositions qu'il a faites en octobre, ne pensez-vous pas qu'il y aurait eu un moyen plus efficace—peut-être dans le cadre d'un régime fiscal plus simple, plus horizontal et à plus large assiette d'imposition—de donner suite à vos propositions, ou d'autres, que de déposer un projet de loi contenant 500 pages de modifications?
M. Roy Cullen: Permettez-moi de vous corriger, monsieur Peschisolido: ce projet de loi comporte exactement 511 pages.
M. Joe Peschisolido: Vous ne faites qu'apporter de l'eau à mon moulin.
M. Roy Cullen: Je ne suis pas d'accord avec vous quand vous dites qu'il s'agit d'une mesure d'administration interne. En fait, ce projet de loi met en application les plus importantes réductions d'impôt jamais vues dans toute l'histoire du Canada, réductions d'une valeur de 100 milliards de dollars, et règle en même temps un certain nombre d'autres questions techniques au sujet desquelles nous avons reçu des recommandations dans le cadre de nos consultations avec les Canadiens et divers groupes professionnels. Nous avons beaucoup consulté le clergé, les acteurs étrangers, les banques, etc., et bon nombre de ces changements revêtent une grande importance pour ces différents groupes d'intervenants et même pour l'ensemble des Canadiens.
• 1550
Pour ce qui est de la complexité de notre régime fiscal, je
pense que nous serions sans doute tous d'accord pour reconnaître
que notre régime devient de plus en plus complexe. Malheureusement,
nous en sommes tous un peu responsables, en ce sens que nous
demandons un petit changement ici, une petite mesure spéciale là et
cela finit par créer un régime fort substantiel et complexe.
Vous savez, la proposition de l'Alliance canadienne concernant un taux d'imposition uniforme...
M. Ken Epp: C'est-à-dire, un seul taux d'imposition.
M. Roy Cullen: Oui, un seul taux d'imposition.
J'ai posé une question à ce sujet à la Chambre des communes. Bon nombre de Canadiens pourraient croire qu'il suffirait de multiplier son revenu par 17 p. 100 pour calculer le montant d'impôt à payer. Mais à mon avis, votre parti comprend très bien que la Loi de l'impôt sur le revenu comporte de nombreuses mesures—la possibilité de déduire les cotisations à un régime de pension, les REER, les dépenses médicales qui dépassent un certain montant, les dons de bienfaisance dans certains cas, etc.—qui seraient comprises dans votre proposition.
Quelle que soit la nature de notre Loi de l'impôt sur le revenu, nous devrions toujours chercher à simplifier autant que possible la Loi, mais cette dernière est forcément complexe, et il faut donc essayer de trouver les meilleures solutions possibles lorsque des problèmes se présentent.
M. Joe Peschisolido: Pour ce qui est du chiffre que vous avez cité tout à l'heure, monsieur Cullen, vous prétendez que ce train de mesures fiscales correspond à une diminution globale des impôts de plus de 100 milliards de dollars. Est-ce que vous incluez là-dedans l'augmentation de 20,7 milliards de dollars au titre des primes versées au RPC? Avez-vous tenu compte de l'élimination de l'indexation? Est-ce que ces 40 milliards de dollars sont compris dans votre déduction de 100 milliards de dollars?
M. Roy Cullen: Le RPC ne correspond pas à un impôt, bien entendu. Le Régime de pensions du Canada est un régime de retraite auquel cotisent les employeurs et les employés. Ces cotisations sont versées à une caisse de retraite en fiducie. Ainsi les cotisations des participants ne sont jamais versées au Trésor, comme vous le savez sans doute. Par conséquent, il ne s'agit pas de recettes fiscales. C'est sûr que les cotisations payées par les participants influent sur leur salaire net, mais...
M. Joe Peschisolido: En réalité, ce que vous venez de nous dire, c'est que les réductions d'impôt, ou la réduction des sommes qui seraient payées par l'ensemble des Canadiens, ne se montent pas à 100 milliards de dollars, comme vous l'avez affirmé, mais plus près de 50 milliards de dollars, lorsqu'on tient compte de l'augmentation des primes versées au RPC...
M. Roy Cullen: Non.
M. Joe Peschisolido: ... en plus de ce que vous n'avez pas pris, en raison de l'indexation.
M. Roy Cullen: Monsieur Peschisolido, peut-être pourriez-vous me laisser finir ma réponse. Vous avez parlé de plusieurs éléments, y compris la réindexation du régime fiscal. Tout cela est compris dans les 100 milliards de dollars dont il est question, à juste titre, d'ailleurs.
Sans vouloir faire preuve de partisannerie dans le cadre d'une discussion comme celle-ci, j'ai observé néanmoins à maintes reprises à la Chambre des communes, avant que nous ne réindexions le régime fiscal, que les députés de l'opposition avaient tendance à dire que le ministre des Finances avait augmenté les impôts. Il n'avait pas fait cela, bien entendu, mais c'est ce qu'on laissait entendre, étant donné que le régime fiscal ne prévoyait aucune indexation. Maintenant que le régime fiscal a fait l'objet de réindexation, les membres des partis de l'opposition nous disent: «Ce que vous proposez ne correspond pas vraiment à des réductions d'impôt». À mon sens, les 100 milliards de dollars constituent bien une réduction des impôts que les Canadiens auraient payés normalement si ces mesures n'avaient pas été mises en oeuvre.
En ce qui concerne le RPC, encore une fois, nous avons déjà tenu ce même débat avec les membres de l'Alliance canadienne à de nombreuses reprises. Le Régime de pensions du Canada représente un investissement pour l'avenir. Le gouvernement a pris les mesures qui s'imposaient pour lui donner de solides assises financières. Cela n'a rien à voir avec les impôts. C'est un investissement pour l'avenir.
Puisque vous parlez du RPC, qu'en est-il de l'assurance-emploi? Le fait est que les cotisations d'assurance-emploi ne cessent de baisser. Nous permettons en réalité aux employeurs et employés canadiens de faire une économie d'environ 6,9 milliards de dollars par année.
En ce qui concerne le salaire net des employés, c'est sûr que cela fait une différence. Si vous voulez parler du RPC, vous devez également parler de l'assurance-emploi et adopter une vue d'ensemble par rapport à tous ces éléments et les réductions d'impôt aussi.
Le fait est que pour la grande majorité des analystes, ces réductions d'impôt d'une valeur de 100 milliards de dollars représentent une mesure très énergique de stimulation de l'économie. La Chambre de commerce du Canada a déclaré que cette mesure de stimulation tombe à point nommé. D'ailleurs, en ce qui concerne le Régime de pensions du Canada, vous n'êtes probablement pas sans savoir que les contribuables atteignent généralement leur limite vers le mois de juin, comme c'est le cas pour l'assurance-emploi. Ainsi l'effet de cette stimulation additionnelle, et des réductions d'impôt, commence à peine à se faire sentir. Mais il s'agit effectivement de la mesure la plus énergique de stimulation de l'économie que nous ayons connue au Canada ces derniers temps.
M. Joe Peschisolido: J'ai une dernière question, monsieur le président, si vous me permettez.
• 1555
Hier, nous avons eu l'honneur de recevoir le gouverneur de la
Banque du Canada, David Dodge. Il a admis qu'il se servait du seul
outil à sa disposition, soit la masse monétaire, et affirmait qu'il
incombe à un gouvernement—il parlait d'une situation théorique,
mais cela s'applique au gouvernement du Canada—d'opérer des
changements structurels s'il souhaite relever la valeur du dollar
canadien et régler les problèmes de productivité.
Vu les déclarations du gouverneur de la Banque du Canada, pensez-vous qu'il aurait été plus prudent de prévoir des réductions d'impôt plus importantes, de même qu'une plus forte réduction de la dette du gouvernement, afin que le gouverneur de la Banque du Canada ait une plus grande marge de manoeuvre et que la valeur du dollar canadien, au lieu d'être de 66 ¢US, soit plus près de 80 ¢US?
M. Roy Cullen: Monsieur Peschisolido, de toute évidence, nous n'avons pas assisté à la même réunion.
M. Joe Peschisolido: Si, si. Nous étions à la même réunion, dans cette même pièce.
M. Roy Cullen: À mon avis, le gouverneur de la Banque du Canada a reconnu que sur le plan structurel—c'est-à-dire du point de vue de sa politique budgétaire et de ses mesures de redressement fiscales, le Canada—c'est d'ailleurs bien connu—est considéré comme un succès sur la scène internationale. Nous avons éliminé notre déficit. Nous remboursons la dette—d'ailleurs, d'ici la fin de la présente année financière, un minimum de 30 milliards de dollars aura servi à rembourser la dette. Notre taux d'inflation est faible, le taux de chômage est relativement faible—enfin, la liste est longue. Donc du point de vue de sa politique budgétaire et de sa structure économique, le Canada est en très bonne posture.
Je pense que vous avez peut-être mal interprété ce qu'il disait concernant l'Europe. D'après ce que j'ai compris de ses propos, les gouverneurs de la Banque centrale européenne auraient indiqué qu'ils ne sont pas tout à fait convaincus qu'il faille baisser les taux d'intérêt, et ce pour plusieurs raisons. De plus, ils disaient qu'un travail structurel et budgétaire s'impose en Europe. Mais en ce qui concerne le Canada, nous avons une dette que nous continuons à rembourser, et nous comptons également continuer à baisser les impôts. Mais à mon avis, nos politiques monétaire et budgétaire au Canada ont été bien harmonisées jusqu'à présent. Nous avons encore du travail à faire, mais je suis convaincu que nous y arriverons.
Le président: Très bien.
Monsieur Loubier, vous avez la parole.
[Français]
M. Yvan Loubier: Monsieur le président, je ne voulais par intervenir, mais, finalement, les propos de M. Cullen m'ont fait sursauter comme souvent ses propos peuvent me faire sursauter.
Lorsqu'il parle du fardeau fiscal des contribuables, il a tendance à mélanger des pommes, des oranges, des noix, des bananes, et mettez-en. Il est un peu mélangé.
Il y a des choses, comme la taxation directe et indirecte, qui entrent dans le fardeau fiscal des contribuables. La prestation fiscale n'entre pas dans une contribution à l'impôt, par exemple, à l'impôt négatif. C'est une dépense du gouvernement.
Quand on parle d'assurance-emploi, monsieur le président, je trouve qu'il exagère. Il est tout fier d'annoncer que les baisses de cotisations à la caisse de l'assurance-emploi sont apparentées à des baisses d'impôt. Je le trouve pas mal grossier de dire des choses comme ça parce que les employeurs et les employés contribuent à la caisse. Le gouvernement fédéral ne met plus un sous dans cette caisse-là depuis des années. La seule chose qu'il a, c'est le contrôle sur le cash, comme on dit.
Tous les ans, il en profite pour dérober des milliards de dollars aux employeurs et aux employés en plus de mettre de côté la majorité des chômeurs et chômeuses qui devraient normalement profiter du régime d'assurance-emploi. On sait que seulement 43 p. 100 des chômeurs et chômeuses bénéficient du régime. En plus de cela, le gouvernement fédéral récolte la cagnotte: cinq milliards de dollars de surplus par année encore, malgré les baisses du taux des cotisations des employeurs et des employés.
Je trouve qu'il exagère un peu, monsieur le président. Me faire dire n'importe quoi, comme ça, au cours de la présentation d'un projet de loi, me porte à me poser des questions. Je trouve que cela induit la population en erreur lorsqu'il parle de mesures apparentées à des baisses d'impôt alors que ce n'en sont pas du tout. On passe sous silence tout ce grand scandale du vol de la caisse d'assurance-emploi. Il ne faut pas prendre les gens pour des imbéciles. S'il veut répondre, qu'il réponde correctement quant au fardeau fiscal.
Il y a d'autres arguments qui peuvent être faits sur le taux unique de taxation. Cette politique-là, par exemple, il faudrait la regarder, l'examiner. À première vue, ça devient une mesure régressive, c'est-à-dire que ça pourrait aller à l'encontre des principes qu'on a défendus depuis longtemps, qui font en sorte que plus le revenu est élevé, plus il faut payer de taxes. Qu'on ne nous serve pas de tels arguments. C'est ridicule. Cela n'alimente pas le débat et ne l'enrichit pas non plus.
• 1600
Il ne s'agissait pas d'une question, mais
d'une remarque, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Loubier.
Monsieur Gallaway, suivi de M. Pillitteri.
M. Roger Gallaway: Il y a une question en particulier que je voudrais explorer avec vous—en fait, il y en a plus d'une. Le sommaire présenté au début du projet de loi annonce une mesure un peu inhabituelle au point 9. Il s'agit de la déduction pour résidence des membres du clergé.
Il y a environ un an, on lisait dans le Globe and Mail que cette mesure allait être introduite. En réalité, le ministère des Finances lançait un ballon d'essai. D'abord, j'aimerais que vous m'indiquiez où se trouve cette mesure dans le projet de loi C-22. Deuxièmement, le sommaire au point 9 indique que cette mesure prévoit des règles plus claires sur le calcul du montant déductible au titre de la résidence d'un membre du clergé, et je sais que plusieurs associations avaient de sérieuses réserves concernant les changements proposés.
M. Roy Cullen: Merci, monsieur Gallaway. Pendant que les fonctionnaires qui m'accompagnent cherchent l'article pertinent, je voudrais réagir aux remarques de M. Loubier.
Sans vouloir vous contredire, monsieur Loubier, j'ai l'impression que c'est plutôt vous et M. Peschisolido qui avaient les idées un peu embrouillées. Quand je vous entends affirmer que les cotisations au Régime de pensions du Canada constituent un impôt, pour moi, il est clair que certaines notions de base vous échappent. Des crédits qui ne sont pas versés au Trésor peuvent être considérés comme un impôt ou une recette fiscale. Je voulais simplement apporter cette petite mise au point.
En ce qui concerne l'assurance-emploi, c'est le comité lui-même, à la suite de ses travaux, qui a proposé, entre autres choses, que le gouvernement examine la procédure de fixation des taux relatifs à l'assurance-emploi, et cet examen est déjà en cours.
Monsieur Lalonde, avez-vous trouvé...?
M. Gérard Lalonde (chef principal, Division de la législation de l'impôt, Direction de la politique de l'impôt, ministère des Finances): Oui, la règle pertinente se trouve à l'alinéa 8(1)c) de la Loi, que vous trouverez près du début. Il faut regarder le paragraphe 3(2).
M. Roger Gallaway: Monsieur Lalonde, pourriez-vous m'expliquer la nature du changement proposé par rapport à l'ancien régime ou en quoi cet article clarifie la situation?
M. Gérard Lalonde: L'ancien régime permettait aux membres du clergé de faire deux choses: d'abord, se prévaloir d'une déduction de leur revenu égale à la valeur de l'avantage qui avait été inclus dans leur revenu par les responsables de la confession religieuse qui fournissait le logement. Ainsi si un membre du clergé recevait un avantage lié à son emploi de x dollars, il avait la possibilité de déduire ce montant de son revenu.
Si un membre du clergé avait sa propre maison, à ce moment-là, le loyer payé pour cette maison pouvait être déduit, ou si l'intéressé avait acheté sa propre maison, il avait le droit de déduire un montant correspondant du loyer qu'il aurait raisonnablement été tenu de payer pour sa maison.
Le problème qui se posait concernait moins une situation où la résidence était fournie par la confession religieuse que celle où le membre du clergé fournissait sa propre résidence, car là aucune restriction ne visait le type de résidence qui pouvait être fourni. Ainsi un membre du clergé pouvait acheter une maison d'une valeur de 500 000 $ et déduire un montant correspondant à un loyer raisonnable pour cette même maison, ce qui semblait un peu excessif. Par conséquent, cette proposition vise à modifier la loi afin qu'un membre du clergé qui fournit sa propre résidence puisse désormais déduire un montant calculé selon une formule axée sur ses revenus du...
M. Roger Gallaway: Est-ce que cela change quoi que ce soit à la situation des membres du clergé qui ont leur propre résidence?
M. Gérard Lalonde: Non, rien du tout.
M. Roger Gallaway: Très bien. C'est tout ce que je voulais... Je n'ai pas l'habitude de poser des questions. M. Lalonde le sait certainement, et je vous remercie donc pour cette explication.
Le président: C'est très gentil à vous, monsieur Gallaway.
Monsieur Pillitteri.
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci, monsieur le président.
Certaines des remarques faites par les députés d'en face laissaient entendre que s'il s'agissait de véritables réductions d'impôt ou de véritables cotisations... Vous savez, moi je suis homme d'affaires et je comprends très bien tout cela. Certains y voient peut-être que des chiffres, mais étant moi-même homme d'affaires, ce que j'y vois, c'est que les cotisations versées pour l'assurance-emploi passe de 3,05 $ à 2,55 $ pour chaque tranche de 100 $; pour l'employé, cela représente peut-être une baisse de 50 cents pour chaque tranche de 100 $, mais pour moi, c'est une réduction de 70 cents, étant donné que pour chaque dollar versé par l'employé, l'employeur verse 1,40 $, encore une fois pour chaque tranche de 100 $. Donc, à la fin de l'année, cela représente une différence considérable. Si vous avez plusieurs employés—20 ou 30—à la fin de l'année, cela représente une réduction importante pour le propriétaire d'une petite entreprise. Pour moi, ces réductions sont les bienvenues.
• 1605
Évidemment, pour quelqu'un qui n'a pas une paie quotidienne à
administrer, cela ne fait pas une grande différence. Mais pour ceux
qui veulent rester concurrentiels, c'est certainement un stimulant
très encourageant.
Mais pour revenir sur la question de l'impôt sur les sociétés, monsieur Cullen, comment se fait-il...? C'est sur une période de cinq ans... Avez-vous envisagé de faire baisser les taux plus rapidement—c'est-à-dire la baisse de 5 p. 100 qui ramène le taux à 21 p. 100?
M. Roy Cullen: Oui. Dans le budget de 2000, il était prévu que cette réduction entre en vigueur sur une plus longue période. Dans l'Énoncé économique, cependant, il a été annoncé que ces réductions seraient accélérées et, bien sûr, elles ont déjà force de loi maintenant.
Monsieur Lalonde, pourriez-vous parler de la progression des réductions? Cela concerne en partie l'aspect capacité financière et la nécessité d'appliquer ces réductions aussi rapidement que possible.
M. Gérard Lalonde: Oui, bien sûr.
Le budget prévoyait que les taux d'imposition des sociétés baisseraient de 1 p. 100 cette année, et de 7 p. 100 en tout au cours des cinq prochaines années, mais aucun calendrier n'y était rattaché. Dans l'Énoncé économique, le calendrier proposé était le suivant: une réduction de 1 p. 100 la première année, et de 2 p. 100 dans chacune des trois années suivantes pour réduire les taux d'imposition encore plus rapidement.
M. Roy Cullen: En réponse à la question de M. Pillitteri, je devrais peut-être mentionner que lorsque nous examinons les taux d'imposition des sociétés, nous tenons compte du fait que s'il était possible de ramener les taux d'imposition des sociétés à un niveau qui serait inférieur de 4 ou 5 p. 100, par exemple, aux taux qu'appliquent les États américains situés près de la frontière, l'effet serait très positif puisque cela encouragerait l'investissement et la création d'emplois.
Nous savons que les taux d'imposition du revenu des particuliers sont anormalement élevés, et nous essayons de les réduire le plus rapidement possible. Mais le gouvernement estimait qu'il fallait du même coup réduire les taux d'imposition des sociétés, car c'est ce genre de mesure qui va permettre en fin de compte de stimuler la création d'emplois et les investissements au Canada.
M. Gary Pillitteri: Je ne sais pas si ma question est appropriée dans ce contexte, monsieur le président, mais il me semble qu'on a toujours tendance à croire que les taux d'imposition sont moins élevés aux États-Unis. Pour la gouverne des membres de l'opposition, pourriez-vous nous dire à combien se montent les cotisations des employeurs pour l'assurance-emploi et ce genre de déductions? Sont-elles plus élevées aux États-Unis qu'au Canada? Pour leur gouverne, pourriez-vous nous donner des détails à ce sujet?
Je sais qu'elles sont pas mal plus élevées aux États-Unis. Je voudrais simplement...
M. Roy Cullen: Vous avez parfaitement raison. Au Canada, nous avons un système public de soins de santé et certains autres programmes sociaux qu'exigent les Canadiens, et qui font partie intégrante de notre culture. Est-ce que cela suppose certains coûts? Oui, sans doute.
Arriverons-nous un jour à ramener nos taux d'imposition du revenu des particuliers à ceux qu'appliquent les États-Unis? On peut toujours essayer, mais il faut en réalité tenir compte de l'ensemble des impôts, et c'est justement cela qu'on a tendance à oublier. Au Canada, il est vrai que les taux d'imposition du revenu des particuliers sont plus élevés qu'ailleurs, mais en ce qui concerne ce qu'on appelle les charges sociales—c'est-à-dire, la sécurité sociale, l'assurance-emploi, etc.—le Canada est classé dans le quartile le plus faible.
Si vous tenez compte de ce qu'on appelle les taxes de consommation—la TPS, les taxes à la valeur ajoutée, etc.—le Canada se trouve aussi dans le quartile le plus faible. C'est vrai que l'impôt sur le revenu des particuliers est peut-être un peu trop élevé par rapport à d'autres pays, mais nous prenons des mesures énergiques pour corriger ce problème. Il faut vraiment tenir compte de tous les éléments du fardeau fiscal et, sur le plan de la sécurité sociale et des charges sociales, le fait est que nos charges sont plus faibles au Canada qu'ailleurs.
Le président: Merci.
Madame Barnes.
Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Merci.
Les étudiants et les parents d'étudiants qui vivent dans ma circonscription seront certainement très heureux de voir certains de ces articles, surtout ceux qui touchent les bourses d'études et de perfectionnement, puisque la valeur de l'exemption passe de 500 $ à 3 000 $. De plus, le montant mensuel prévu pour les étudiants à plein temps et à temps partiel passe de 120 $ à 400 $. Dans une ville comme London, en Ontario, où nous avons des collègues, universités et certains établissements privés, cette mesure se fait attendre depuis longtemps et sera certainement jugée bien utile.
• 1610
Ce projet de loi comporte aussi des modifications mineures
d'ordre technique qui visent simplement à clarifier le texte. C'est
d'ailleurs le cas de l'article 37, qui modifie la définition de
«résidence principale». Je n'ai pas réussi à trouver l'article en
question, et j'aimerais donc qu'on m'explique la nature du
changement.
M. Roy Cullen: Oui. M. Lalonde va chercher l'article en question.
Entre-temps, je peux certainement vous dire qu'en ce qui concerne les étudiants, vous avez parfaitement raison. En ce qui concerne l'allocation pour frais plus importante et la non-imposition des bourses d'études et de perfectionnement, nous avons découvert l'existence d'une véritable anomalie car, ayant créé les bourses d'études du millénaire, nous nous sommes rendu compte que les étudiants qui en avaient bénéficié auraient à payer de l'impôt sur ces bourses. C'était donc en partie en réponse à ce problème, mais aussi pour rectifier la situation pour l'ensemble des étudiants.
Certains se demandent peut-être pourquoi nous n'avons pas fixé un sommet encore plus élevé. Mais c'est un calcul qui est difficile à faire du moment que vous augmentez le seuil, puisqu'au niveau universitaire ou collégial, vous avez intérêt à tenir compte d'autres sources de revenu, telles que les bourses d'études et de perfectionnement, etc. À notre avis, nous avons considérablement amélioré la situation en faisant passer l'exemption à 3 000 $. Il ne sera pas nécessaire à notre avis d'examiner de très près la question de savoir si l'exemption pourrait être plus élevée.
Monsieur Lalonde.
Mme Sue Barnes: Vous êtes à quelle page?
M. Gérard Lalonde: Je suis à la page 160 des notes explicatives.
M. Roy Cullen: Peut-être que vous examinez le projet de loi proprement dit, Sue. Avez-vous les notes explicatives?
Mme Sue Barnes: Oui.
M. Roy Cullen: Très bien.
M. Gérard Lalonde: Cet article concerne la situation qui existait avant 1982—c'est de l'histoire ancienne—où l'on avait interprété la loi qui existait à l'époque de manière à permettre à chacun des deux conjoints d'un ménage de désigner une résidence principale distincte pour les fins des gains en capital. La Loi a été modifiée en 1982 pour prévoir qu'une seule résidence principale pourrait désormais être désignée pour chaque famille ou couple, mais pendant de nombreuses années avant 1982, il était possible de désigner deux résidences principales distinctes.
Au cours de cette période, toutefois, certaines modifications ont été apportées à la définition de «résidence principale», et lorsque ces modifications sont entrées en vigueur, elles n'ont pas accordé de droits acquis relativement aux anciennes désignations. La mesure proposée ici corrige ce problème, si bien que pour les années précédant 1982, il sera possible de conserver une désignation pour chaque conjoint, comme le prévoyait le budget de 1982.
Mme Sue Barnes: Donc, chaque conjoint ne peut plus désigner une résidence principale dans un lieu différent.
M. Gérard Lalonde: Ce n'est plus possible depuis 1982.
Mme Sue Barnes: Très bien, c'est justement cela que je cherchais à clarifier. C'est tout pour moi. Merci beaucoup.
M. Gérard Lalonde: Très bien.
Le président: Merci, madame Barnes.
Monsieur Nystrom, êtes-vous prêt?
M. Lorne Nystrom: Mon conseiller du Sénat me fait un briefing.
En tout cas, merci beaucoup.
J'ai plusieurs questions à poser à M. Cullen. D'abord, je tiens à préciser qu'il y a une chose qui me plaît et que j'appuie dans ce projet de loi, ce sont les mesures visant à rehausser l'aspect progressif de notre régime fiscal relativement à l'impôt sur le revenu des particuliers. Il va y avoir plus de tranches d'imposition, puisqu'on passe de trois taux marginaux à quatre, qui seront de 29 p. 100, 27 p. 100, 22 p. 100 et de 16 p. 100, si je ne m'abuse. Il y a quelques années, nous avions sept ou huit différents taux marginaux d'imposition au Canada, et à l'époque de Mulroney, nous sommes passés de sept ou huit taux à environ trois, si bien que notre système d'impôt était moins progressif. Évidemment, l'Alliance voudrait qu'il soit encore moins progressif...
M. Ken Epp: Nous voulons qu'il soit plus progressif.
M. Lorne Nystrom: ... et qu'on introduise un taux d'imposition uniforme, de sorte que le taux soit le même pour un enseignant d'école primaire et un viticulteur très riche, par exemple...
M. Ken Epp: Non.
M. Lorne Nystrom: ... dont les revenus pourraient se monter à plusieurs millions de dollars par année.
M. Ken Epp: Ne mentez pas.
M. Lorne Nystrom: Ce ne serait pas une mesure très progressiste.
M. Ken Epp: Ne mentez pas. C'est faux, ça.
M. Lorne Nystrom: Voilà donc un aspect de ce projet de loi que j'appuie. Bien sûr, les Américains ont un régime fiscal encore plus progressif que le nôtre. C'est ironique, mais ce bastion du capitalisme a un système d'impôt plus progressif que nous.
J'ai une question très rapide: Pourquoi ont-ils opté pour quatre taux plutôt que cinq ou six? Quand je dis que j'appuie cette mesure, c'est évident que c'est cette orientation là que je recommande.
M. Roy Cullen: Merci, monsieur Nystrom. Je vais commencer, et M. Lalonde ou Mme Potvin pourront enchaîner s'il le faut.
• 1615
Ce que vous dites au sujet d'un taux d'imposition uniforme ou
unique est tout à fait vrai. Un tel régime n'offre forcément aucune
progressivité.
M. Ken Epp: C'est faux, Roy Cullen.
M. Roy Cullen: Si vous parlez d'un taux d'imposition unique, on peut supposer que les revenus ne dépassant pas un certain seuil seront exonérés d'impôt, mais au-delà de ce seuil, il ne peut y avoir progressivité. En fait, nous avons établi qu'un régime de ce genre aurait pour résultat d'imposer une charge fiscale plus lourde aux Canadiens à revenu moyen tout en allégeant le fardeau des Canadiens à revenu élevé; les faits à cet égard sont très clairs.
En ce qui concerne les différentes tranches d'imposition, jusqu'à un certain point, il faut choisir entre l'équité et un système moins complexe, mais vous avez raison de dire que comme les tableaux existent, il suffit de multiplier par tel et tel chiffre, et donc, ce n'est pas si compliqué que ça.
M. Lorne Nystrom: Oui, cela n'ajoute pas à la complexité du régime.
M. Roy Cullen: Non, pas vraiment. C'est toujours une question de jugement que de déterminer le nombre de taux qu'il faut prévoir. Comme Canadiens, peut-être préférons-nous opter pour un moyen terme entre un taux d'imposition uniforme sans progressivité aucune et un régime qui prévoit autant de tranches d'imposition qu'aux États-Unis.
Monsieur Lalonde, peut-être pourriez-vous apporter certaines précisions concernant des considérations techniques et de principe dont il faut tenir compte par rapport à ces quatre tranches d'imposition.
M. Gérard Lalonde: C'est une question davantage économique, qui n'est pas vraiment liée à l'aspect rédaction législative. Je vous signale, cependant, qu'on pourrait dire en réalité qu'il existe cinq tranches d'imposition, vu l'effet du crédit personnel de base. Le taux est de 0 pour la première tranche, et ensuite, il y a quatre autres taux qui peuvent s'appliquer.
Pour ce qui est du nombre de tranches et des différents taux... Lise, voudriez-vous répondre au sujet de la sélection des divers taux d'imposition et expliquer les raisons pour lesquelles nous n'en avons que quatre ou cinq, selon son point de vue, au lieu d'en avoir plus?
Mme Lise Potvin (chef principale, Investissement et emploi, ministère des Finances): Ce qu'on voulait faire dans le contexte de l'Énoncé économique, c'était de réduire le taux d'imposition touchant les Canadiens à revenu moyen qui étaient visés par un taux d'imposition de 29 p. 100; ainsi nous avons considérablement réduit ce taux d'imposition...
M. Lorne Nystrom: À 26 p. 100.
Mme Lise Potvin: ... à 26 p. 100. Évidemment, nous avons déjà un système d'impôt très progressif. Je n'ai pas amené les chiffres avec moi, mais le fait est qu'une forte proportion du fardeau fiscal est supportée par les contribuables à revenu plus élevé. Combien de tranches d'imposition faut-il? À mon avis, il n'y a pas de formule magique. Il s'agit de décider de la répartition du fardeau fiscal qui vous semble la plus appropriée et de déterminer ensuite à partir de quel revenu les différents taux s'appliqueront.
M. Lorne Nystrom: Mon autre question, monsieur le président, pose des problèmes pour le Parti libéral, vu sa promesse en 1993 concernant la TPS. Pourquoi n'y a-t-il pas eu de changement sur ce plan-là? Nous avons maintenant une grande latitude budgétaire. Vous avez mis en vigueur des réductions d'impôt d'une valeur de 100 milliards de dollars. Pourquoi n'avez-vous pas pris des mesures pour baisser de quelques points le taux de la TPS? Ça, c'est quelque chose qui était tout à fait possible vu votre grande marge de manoeuvre à l'heure actuelle. Le gouvernement a agi en fonction de ses priorités.
Un engagement a été pris vis-à-vis de la population canadienne. Sheila Copps a même donné sa démission pour cette raison-là et a laissé à ses électeurs le choix de la réélire ou non dans le cadre d'élection partielle. M. Pillitteri a dû passer d'une maison à l'autre en disant aux gens: «Élisez-moi; je finirai bien par vous débarrasser de la TPS.» Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas agi? Je remarque que vous avez inclus une mesure qui concerne la TPS; c'est-à-dire que vous n'allez pas donner de crédit d'impôt aux criminels pendant quelques années. Mais c'est à peu près le seul changement qu'on retrouve dans ce projet de loi qui touche la TPS.
Encore une fois, la question essentielle est de savoir pourquoi vous avez trahi votre promesse. Pourquoi n'avez-vous rien fait sur ce plan-là?
M. Roy Cullen: Eh bien, monsieur Nystrom...
M. Lorne Nystrom: C'est une question de priorité. Il y a des choix à faire. À un moment donné, vous nous avez dit que vous ne disposiez pas des ressources nécessaires, étant donné que nous avions un déficit au Canada. C'est peut-être une bonne raison de ne pas l'éliminer, mais cela n'excuse aucunement le fait que vous avez fait une promesse que vous n'avez pas tenue. Vous aviez de bonnes raisons de ne pas la tenir. Mais maintenant vous avez toute la latitude budgétaire nécessaire, et vous ne tenez toujours pas votre promesse. Des gens comme M. Pillitteri sont de plus en plus embarrassés par votre manque d'action.
M. Gary Pillitteri: Non, non.
M. Roy Cullen: Monsieur le président, chaque fois qu'on soulève cette question, je me sens obligé de remettre les pendules de l'heure. En 1993, le gouvernement s'est engagé dans son Livre rouge à «remplacer» la TPS. Quiconque examinerait la question de plus près comprendrait que le gouvernement ne pouvait absolument pas se permettre d'abandonner cette source de revenus.
Nous avons essayé de la remplacer. En fait, au Canada atlantique, nous avons pu harmoniser la TPS avec la taxe de vente provinciale et créer une taxe de vente harmonisée. Les autres provinces ne souhaitaient pas vraiment harmoniser leurs taxes. En fait, c'est triste. Une TPS et taxe de vente provinciale harmonisées en Ontario, par exemple, auraient généré des économies administratives suffisamment importantes pour nous permettre de réduire sans difficulté le taux global de 1 p. 100. Malheureusement, les entreprises en Ontario et dans d'autres provinces doivent toujours supporter la charge de ces deux taxes.
• 1620
Si vous examinez l'analyse dont j'ai parlé tout à l'heure,
c'est-à-dire l'ensemble des composantes du régime fiscal canadien,
lorsqu'on établit une comparaison entre le Canada et d'autres pays
et notre degré de compétitivité par rapport à d'autres régimes
fiscaux, il devient clair que nous avons encore du travail à faire
du côté de l'impôt sur le revenu des particuliers. À notre avis,
grâce à ces mesures touchant l'impôt des sociétés, nous devenons
très concurrentiels. Nous savons, par exemple, que dans les
comparaisons établies avec des pays de l'OCDE qui ont des taxes de
consommation—c'est-à-dire, la TPS, comparativement à une TVA ou à
un autre type de taxe de vente—le Canada est placé dans le dernier
quartile. Il en va de même pour ce qu'on appelle les charges
sociales—j'utilise ce terme en connaissance de cause, car je sais
que les gens savent ce que cela désigne—là aussi, nous nous
classons dans le dernier quartile.
Nous avons effectivement essayé de remplacer la TPS; nous y avons réussi au Canada atlantique. J'aimerais que nous puissions un jour harmoniser la TPS avec les taxes de vente provinciales dans tout le Canada—à mon avis, ce serait dans l'intérêt des Canadiens.
M. Lorne Nystrom: Ma dernière question à cet égard concerne la possibilité de la réduire de 7 à 5 p. 100. À propos, nous nous trouvons cet après-midi dans la même salle où s'est déroulé l'exercice d'obstruction systématique en 1990-1991, ou dans ces eaux-là, lorsque votre parti se trouvait de ce côté-ci de la table à côté de moi-même et d'un autre représentant du NPD. Je me souviens que nous avons passé toute la nuit ici—les gens sont venus avec leur sac de couchage. C'était une taxe horrible, une taxe atroce. Tout cela est consigné dans les comptes rendus—Albina était là à l'époque également. Le Parti libéral y était vivement opposé, d'où la promesse faite à la population canadienne. Alors qu'en est-il de la possibilité de la réduire au moins, maintenant que vous avez une bonne latitude budgétaire? Nous parlons en réalité d'une décision politique qui ne relève pas vraiment de la bureaucratie.
M. Roy Cullen: Oui, merci, monsieur Nystrom. Comme je viens de vous le dire, nous avons essayé de remplacer la TPS, et nous avons réussi à le faire au Canada atlantique. Nous aimerions que les taxes soient harmonisées pour tout le Canada. Une réduction de deux points de pourcentage de la TPS représenterait la somme d'environ 7 milliards de dollars; donc, si vous optez pour une réduction de la TPS, cela réduit considérablement la possibilité de réduction du côté de l'impôt sur le revenu des particuliers.
Si vous parlez aux Canadiens, malgré la campagne électorale de 1993, et que vous leur demandez s'ils préféreraient qu'on réduise l'impôt sur le revenu ou la TPS, ils vous diront qu'ils préfèrent payer moins d'impôt sur le revenu. Si on parle de considérations purement techniques ou du principe, bon nombre d'économistes diraient au ministère et au ministre des Finances que ce qu'ils devraient faire c'est plutôt augmenter le taux de la TPS, et se servir de ces recettes supplémentaires pour réduire l'impôt sur le revenu des particuliers. Je ne sais pas si le gouvernement voudrait accepter ce conseil, mais je pense que vous avez un bon argument. J'ai l'impression qu'il y avait une certaine confusion à l'époque, mais le fait est que si vous lisez le Livre rouge, vous verrez qu'il y est question de rembourser la TPS, mais lorsqu'on y pense, si on veut être réaliste, il est clair que le gouvernement ne pourrait certainement pas abandonner une source de revenu qui correspondait à l'époque à environ 12 milliards de dollars par année.
Donc, à court et à moyen termes, le gouvernement se concentrera sur l'impôt sur le revenu des particuliers, parce que c'est là que nos impôts sont disproportionnés par rapport à ceux de nos concurrents, et parce que c'est cela que souhaitent les Canadiens.
Le président: Monsieur Cullen, je voudrais vous poser une question avant de donner la parole à M. Epp et à M. Loubier. À mon sens, la plus grande difficulté à laquelle se trouve confronté le Canada actuellement est celle de la productivité, et le professeur Porter a justement publié hier un autre document sur la question qu'il a rédigé avec le professeur Martin. J'aimerais que vous nous indiquiez en quoi le projet de loi C-22 nous aide à relever le défi de la productivité.
M. Roy Cullen: Lorsque je travaillais dans le secteur privé, la société Foresterie Noranda m'avait prêté au gouvernement fédéral pour siéger au Conseil consultatif du secteur des forêts, afin d'aider à trouver des moyens de rehausser la compétitivité de l'industrie forestière canadienne. Il s'agissait de la fameuse Initiative de la prospérité lancée par le gouvernement précédent, mais l'objet était de trouver différents moyens de rehausser la compétitivité du Canada. Par suite de l'étude du professeur Porter, intitulée Canada at the Crossroads, des consultations ont été organisées. Malheureusement, le gouvernement a encouragé la préparation de toutes sortes de rapports, mais à l'époque—c'était au début des années 90—il n'a pas vraiment donné suite à tous ces rapports. Le professeur Porter vient de publier un autre document, étant donné que cela fait 10 ans depuis le dernier, et je l'ai lu, car j'ai pas mal participé au travail entourant ce rapport à l'époque. Il dit dans son nouveau rapport qu'au niveau macroéconomique, le Canada a réalisé de très grands progrès. Si vous tenez compte de notre situation d'ensemble—c'est-à-dire, déficit, impôts, taux d'inflation, etc.—les nouvelles sont très bonnes. Il dit que là où nous avons encore un certain retard c'est au niveau microéconomique—c'est-à-dire aux paliers provincial et local—et aussi au niveau des entreprises. Autrement dit, à son avis, on peut baisser les impôts—et en fait, c'est ce qu'il a dit plus récemment, c'est-à-dire au cours des deux ou trois derniers jours—les impôts font partie intégrante de la stratégie.
• 1625
Donc, en ce qui me concerne, ces réductions d'impôt auront un
impact très important. Mais le professeur Porter dit également, si
je ne m'abuse, que les entreprises doivent faire leur part et
assumer 50 p. 100 du fardeau. Il faut que nos entreprises
travaillent de façon plus intelligente et élaborent des stratégies
commerciales plus flexibles. Nous ne pouvons pas toujours nous
contenter de nous adapter à ce que d'autres nous imposent ou
d'adopter leurs méthodes. On doit chercher à surpasser les autres.
On doit être à la fine pointe du progrès. On doit être novateur et
manifester davantage d'esprit d'entreprise.
En fait, dans ce budget et dans la mise à jour économique, monsieur le président, il y a plusieurs mesures dont j'ai déjà brièvement parlé, entre autres, le transfert avec report d'impôt des gains en capital, car il nous faut investir davantage de capital de risque dans l'économie, ainsi que d'autres mesures, telles que les taux d'inclusion et celles qui visent l'impôt des sociétés. Plusieurs de ces mesures aideront le Canada à devenir plus concurrentiel et plus productif. Mais à mon avis, nous devons mettre les entreprises au défi de dynamiser leur stratégie commerciale et d'élargir leurs moyens pour rehausser leur compétitivité au cours du présent millénaire et au-delà.
Le président: Donc, en fin de compte, le gouvernement fédéral peut déterminer l'orientation macroéconomique, mais ce sont les gens et les entreprises qui doivent... On peut dire, je suppose qu'il faut changer les attitudes. Je suis d'accord avec vous. Au niveau macroéconomique, le Canada s'en tire très bien, mais on dirait que ce progrès n'atteint pas les entreprises, qui sont moins «novatrices», disons, que leurs homologues américains.
M. Roy Cullen: Oui. C'est intéressant, car je pense que le professeur Porter dit justement—du moins c'est ainsi qu'on a cité ses propos et ceux d'autres membres du groupe—que les entreprises canadiennes se cachent derrière la faible valeur du dollar. C'est une critique un peu injuste, à mon avis, car bien des entreprises ne prétendraient jamais qu'elles souhaitent que la valeur du dollar reste faible. Certaines sociétés exportatrices tirent avantage de cette situation-là, mais je sais que d'autres craignent de ne pas réaliser de gains de productivité en raison d'une situation artificiellement favorable, du moins dans l'immédiat. Donc, il me semble injuste de dire que les entreprises se cachent derrière la faible valeur du dollar. La plupart d'entre elles n'ont jamais demandé qu'il en soit ainsi—c'est ça la situation, et par conséquent elles essaient d'en tirer avantage. Mais vous constaterez également que bien des entreprises essaient de vraiment augmenter leur productivité—encore une fois, parce que leurs PDG sont assez intelligents pour se rendre compte que le dollar va finir par augmenter et qu'ils ont intérêt à être concurrentiels à ce moment-là, puisqu'il n'y aura pas d'autres options.
Le président: Pourquoi êtes-vous de cet avis-là? Dans les années 80, le Canada a été plutôt lent à s'adapter à la dynamique changeante du marché mondial. Êtes-vous d'avis qu'au-delà de l'an 2000 les entreprises canadiennes voudront faire les investissements qui s'imposent dans les biens d'équipement et des mesures d'amélioration de la productivité?
M. Roy Cullen: Pour moi, il y a actuellement beaucoup de signes très positifs. Par exemple, le gouvernement fédéral—vous avez déjà entendu la rengaine: il faut donner l'exemple—participe très activement aux activités entourant le commerce électronique. Certaines des données que j'ai examinées indiquent que nous avons à peine commencé à explorer les possibilités que présente le commerce électronique, surtout d'entreprise à entreprise. Si le Canada redouble d'effort et devient un véritable chef de file dans ce domaine du point de vue de l'innovation, les possibilités de gain de productivité seront illimitées. Être le pays le plus branché du monde et compte tenu du fait que... Là j'exprime une opinion personnelle, mais je pense que la valeur du dollar américain va baisser un de ces jours par rapport au dollar canadien. Donc, les entreprises canadiennes se demandent d'ores et déjà ce qu'elles peuvent faire pour être plus novatrices et concurrentielles.
Le président: Merci, monsieur Cullen.
Je vous rappelle simplement que nous avons un autre témoin à entendre après M. Cullen.
Monsieur Epp.
M. Ken Epp: Merci.
Avant de commencer, monsieur le président, je voudrais qu'on prenne note du fait que lorsque nous avons à examiner des projets de loi très volumineux comme celui-ci, ce serait bien utile que l'on indique au haut de chaque page l'article concerné, car un article peut comporter des renvois à d'autres articles d'autres lois, si bien qu'on finit par ne plus savoir où l'on en est.
Le président: Très bien.
M. Ken Epp: J'aimerais simplement qu'on en prenne bonne note.
M. Roy Cullen: Nous prenons justement des notes, monsieur le président.
M. Ken Epp: Il nous serait beaucoup plus facile de nous y retrouver.
J'ai plusieurs questions à poser. Je n'ai pas l'intention de lancer un débat politique; je ferai plutôt ça à la Chambre des communes sur la question du taux d'imposition uniforme.
En fait, j'aime autant vous dire tout de suite que je félicite les libéraux sur ce qu'ils ont fait, car en optant pour un taux de 16 p. 100, plutôt que de 17 p. 100, ils pourront convaincre les contribuables de voter pour eux, même s'ils auront à payer plus d'impôt en fin de compte que si l'on optait pour un taux de 17 p. 100, étant donné qu'une plus forte proportion des revenus des Canadiens ne seront pas du tout imposés, ce qui donne de plus faibles impôts dans l'ensemble. Mais vous avez réussi à faire accepter votre programme, et je dois donc vous féliciter pour votre stratégie de communication. Sur ce plan-là, nous avons perdu.
Mais j'ai une question à poser concernant ces seuils et les différents taux d'imposition. On indique ici qu'à la fin de la période de cinq ans, les seuils ne seront pas inférieurs à 35 000 $, 70 000 $, et 113 804 $. Est-ce parce que ces chiffres sont déjà inscrits dans la loi? J'essaie justement de les trouver, mais je n'y arrive pas. Cela se trouve dans quel article, ou à quelle page? Dites-moi plutôt à quelle page; ce serait mieux.
M. Gérard Lalonde: Oui, tout cela est précisé dans la Loi. Vous trouverez cette information dans l'article touchant l'entrée en vigueur des mesures.
M. Ken Epp: On dit ici que cela se trouve à l'article 92, mais je n'arrive pas à trouver l'article 92 dans ce projet de loi.
M. Gérard Lalonde: Si vous voulez bien patienter quelques secondes, nous allons trouver l'article en question. C'est vrai que ce serait utile que le numéro de l'article concerné soit indiqué au haut de chaque page.
M. Ken Epp: Non, il n'y a pas de numéro. Où est-ce que vous voyez des numéros?
M. Gérard Lalonde: Non, je vous dis que ce serait utile. Je suis d'accord avec vous.
M. Ken Epp: Ah, bon. Je pensais que vous me disiez qu'il y avait des numéros et que je ne les voyais pas.
M. Gérard Lalonde: Non, je dis que ce serait bien utile qu'on les indique sur chaque page.
M. Ken Epp: Quoi qu'il en soit, pendant que vous cherchez l'article, je voudrais poser une autre question, car je pense qu'il y a quand même de mieux utiliser mon temps de parole.
Ma prochaine question...
Le président: C'est à la page 290, monsieur Epp.
M. Ken Epp: Donc, on précise ici les chiffres correspondant à chaque seuil, malgré l'augmentation qui résultera de l'indexation?
M. Gérard Lalonde: Comme on vous l'a signalé, vous allez voir que ces dispositions commencent à la page 290 et continuent jusqu'au haut de la page 292, où vous verrez, au paragraphe 93(4): «l'article 188 de la même loi est modifié par adjonction» du nouveau paragraphe 118(3.1).
M. Ken Epp: Est-ce que ces chiffres vont y figurer automatiquement, que l'indexation finisse par les réviser à la hausse ou à la baisse?
M. Gérard Lalonde: Non. Si l'indexation a l'effet de réviser à la hausse ces chiffres, ce sont les chiffres plus élevés qui l'emporteront.
M. Ken Epp: Les chiffres les plus élevés l'emporteront?
M. Gérard Lalonde: C'est exact. Si l'indexation ne nous amène pas à ces seuils-là, les chiffres qui sont précisés ici sont garantis.
M. Ken Epp: Donc, en l'an 2004, il va y avoir une forte augmentation.
M. Gérard Lalonde: C'est exact.
M. Ken Epp: Donc, ces chiffres seront plus élevés que ce qu'ils auraient été après l'indexation.
M. Gérard Lalonde: C'est exact.
M. Ken Epp: Ce qui ne représente pas grand-chose, finalement, par rapport aux 10 années d'indexation que nous avons perdues, car si l'indexation avait été maintenue pendant toute cette période, nous nous serions retrouvés ici. Au point de vue déduction et structure de base, tout aurait été plus élevé.
J'ai une autre question à poser en ce qui concerne la déduction pour résidence des membres du clergé. Je sais que M. Gallaway vous a déjà posé une question à ce sujet. Si j'ai bien compris, il n'y a pas de changement sauf pour un membre du clergé qui fournit ou possède sa propre maison et demande une déduction à ce titre-là. La somme qu'il pourra déduire sera désormais limitée. C'est bien ça?
M. Gérard Lalonde: C'est exact. À l'avenir, il y aura une limite, selon la rémunération...
M. Ken Epp: Mais par rapport à la limite de 10 000 $ ou un tiers de la rémunération, laquelle des deux l'emporte? Est-ce que 10 000 $ constitue le maximum?
M. Gérard Lalonde: Non, 10 000 $ représente le minimum.
M. Ken Epp: D'accord.
M. Gérard Lalonde: Ce serait le cas pour tous les salaires inférieurs à 30 000 $. Au-delà de ce montant-là, la déduction peut correspondre au maximum à un tiers du salaire.
M. Ken Epp: Je me demande s'il n'y a pas une anomalie ici. Vous avez mentionné le cas hypothétique d'un charlatan qui se paie un salaire d'un million de dollars par année et possède une maison d'une valeur de 500 000 $ ou quelque chose comme ça. Aux termes de la législation fiscale au Canada, cette personne pourrait-elle vraiment se prévaloir d'une déduction...?
Supposons—je vais arrondir mes chiffres pour faciliter le calcul—qu'il prétend que son organisme lui verse un salaire de 300 000 $. A-t-il le droit de se prévaloir d'une déduction de 100 000 $?
M. Gérard Lalonde: Oui, ce serait possible à ce moment-là, mais même avant que nous n'introduisions cette mesure, il aurait pu en déduire beaucoup plus.
• 1635
D'abord, je tiens à préciser que je n'ai jamais parlé de
«charlatan»...
M. Ken Epp: Non, c'est moi qui ai utilisé ce terme.
M. Gérard Lalonde: ... mais dans la mesure où un membre du clergé... Par le passé, il pouvait essentiellement éliminer ses gains grâce à la déduction pour résidence. Désormais la somme déduite devra au moins être proportionnelle au revenu versé au membre du clergé par la confession religieuse concernée.
M. Ken Epp: Je m'excuse d'avoir employé le terme «charlatan», mais quand je pense aux membres d'un ordre religieux, je tiens pour acquis que ces derniers font des sacrifices pour le bien de l'humanité.
J'accepte donc mal que certains religieux habitent dans ces grandes résidences aux dépens de ceux et celles qui font des dons à leur organisation confessionnelle. Peut-être que nous devrions réexaminer cette mesure. Nous le ferons certainement quand nous serons au pouvoir, mais entre-temps, monsieur le secrétaire parlementaire, vous devriez peut-être envisager de le faire maintenant, durant votre mandat.
M. Roy Cullen: Nous allons communiquer ce message au ministre, monsieur le président.
M. Ken Epp: Oui.
J'ai une question au sujet des cotisations au RPC sur le revenu d'un travail indépendant. Cela se trouve à l'article 41—et à l'article 100, d'après ce qu'on dit ici.
L'information fournie par la Bibliothèque du Parlement indique que cette mesure prévoit la déduction, du revenu d'entreprise, de la moitié des cotisations payables sur le revenu d'un travail indépendant. Évidemment, l'autre moitié correspond à des revenus pour la personne concernée et donne donc droit au crédit d'impôt.
Quelle est la différence par rapport à la situation actuelle? N'a-t-il pas toujours été ainsi?
Le président: Madame Potvin.
Mme Lise Potvin: Pour les employés, les cotisations à l'assurance-emploi et au RPC donnent lieu à un crédit d'impôt.
La mesure proposée dans le cadre de l'Énoncé cherche à corriger un problème de traitement inéquitable des travailleurs indépendants qui se sont constitués en société, et qui pouvaient donc déduire les cotisations versées pour leur propre protection, et ceux qui ne sont pas constitués en société, et qui n'avaient droit qu'à un crédit d'impôt. Cette mesure fait donc en sorte que ces deux catégories de travailleurs indépendants seront sur un pied d'égalité.
M. Ken Epp: Donc, cette mesure vise à répondre aux besoins de ceux qui ne sont pas constitués en société.
Mme Lise Potvin: C'est exact.
M. Ken Epp: Très bien. Cela a du sens.
Le président: Merci, monsieur Epp.
M. Ken Epp: Pardon? J'ai encore des questions à poser.
Le président: Ah, bon. Allez-y.
M. Ken Epp: D'accord.
Pourrait-on m'expliquer le crédit d'impôt à l'investissement temporaire de 15 p. 100 pour certaines activités d'exploration minière de base dont il est question à l'article 118? S'agit-il d'une augmentation ou d'une diminution par rapport au crédit d'impôt à l'investissement dont peuvent actuellement se prévaloir les compagnies qui font de la prospection?
M. Gérard Lalonde: Il s'agit d'une augmentation, étant donné qu'il n'existe pas de crédit d'impôt à l'investissement pour ce genre de dépenses à l'heure actuelle. C'est une nouvelle mesure qui a été annoncée dans le cadre de l'Énoncé économique, si je ne m'abuse—ou c'était peut-être dans le budget. Mais je crois savoir qu'il s'agit d'une mesure nouvelle.
M. Ken Epp: Donc, c'est un nouvel article, une nouvelle mesure.
M. Gérard Lalonde: Oui, c'est une nouvelle mesure. Elle s'intègre dans une disposition actuelle de la Loi de l'impôt sur le revenu touchant différents types de crédits d'impôt à l'investissement qui sont toujours en vigueur—par exemple, le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental.
M. Ken Epp: Très bien. C'est ça que je cherchais à savoir.
Les dépôts en monnaie étrangère seront désormais permis à titre d'investissement dans un REER. Mais vous n'avez pas indiqué que la limite de 20 p. 100 pour les investissements étrangers a changé. Est-ce que j'ai mal compris?
M. Gérard Lalonde: La limite de 20 p. 100 touchant les investissements étrangers a déjà été modifiée en vue de la faire passer à 25 p. 100 en l'an 2000, et à 30 p. 100 cette année, mais en réalité, ces mesures sont entrées en vigueur dès l'adoption de la Loi budgétaire de 2000.
Mais pour ce qui est des types d'investissements jugés admissibles à titre d'investissement dans un REER, ça, c'est une question tout à fait à part. C'est-à-dire que même s'il s'agit de savoir dans quel type de biens étrangers vous pouvez investir et cette mesure prévoit que les dépôts en monnaie étrangère seront désormais considérés comme un investissement admissible au titre d'un REER.
M. Ken Epp: Très bien.
J'ai quelques autres questions, mais je vais essayer de finir rapidement, monsieur le président.
Le président: Allez-y.
M. Ken Epp: Je voudrais passer directement à l'article 182 où il est question d'observation. Encore une fois, le document de la Bibliothèque du Parlement indique que cet article élargit l'interdiction faite d'entraver, de rudoyer ou de contrecarrer un fonctionnaire qui exécute la Loi de l'impôt sur le revenu.
Dans quelle mesure cet article accorde-t-il le droit à un fonctionnaire de venir chez moi lorsque je ne suis pas à la maison et de dire à ma femme: Je vais monter tout de suite dans le bureau de Ken Epp pour examiner ses dossiers. A-t-il déjà le droit de faire cela?
On dit ici que cette mesure élargit leurs pouvoirs. Mais quels sont les droits des citoyens dans une situation de ce genre, et quel est l'effet concret de cet article?
M. Gérard Lalonde: Cet article concerne des situations où des gens harcellent activement des fonctionnaires de Revenu Canada ou de l'ADRC qui exercent leurs fonctions. Un exemple sera une situation où quelqu'un rassemble un groupe pour menacer physiquement un représentant de l'ADRC, sans nécessairement le toucher, pendant qu'il exerce ses fonctions. Vous savez, c'est drôlement intimidant d'être entouré de quatre malabars lorsqu'on essaie de faire son travail.
Donc, cette modification renforce une disposition actuelle de la Loi. Cette dernière prévoit, par exemple, qu'il est interdit de contrecarrer un fonctionnaire de l'ADRC dans l'exercice de ses fonctions.
Il peut arriver que le représentant de l'ADRC soit persévérant et réussisse à faire ce qu'il voulait faire. Strictement parlant, la règle ne s'appliquerait pas, étant donné qu'on n'a pas empêché le représentant de l'ADRC d'exercer ses fonctions. Cette disposition va donc plus loin et prévoit que quiconque essaie d'entraver le travail d'un représentant de l'ADRC sera désormais visé par l'interdiction.
Cette mesure vise à contrer toute résistance excessive dont peuvent faire l'objet les représentants de l'ADRC sur le terrain. Comme vous pouvez vous imaginer, la situation de ces personnes est particulièrement difficile. Elles ne sont pas toujours les bienvenues lorsqu'elles frappent à la porte d'un citoyen. Nous essayons donc d'établir un équilibre entre les droits du citoyen et ceux du représentant de l'ADRC d'exercer ses fonctions sans faire l'objet de harcèlement.
En ce qui concerne l'exemple que vous avez cité, c'est-à-dire que quelqu'un arrive à votre porte et exige de voir des documents chez vous, le fait est que cette personne aurait besoin d'une ordonnance du tribunal à ce moment-là. Ce n'est pas de ça qu'il s'agit ici. Cette disposition concerne une situation où un représentant de l'Agence, muni d'une ordonnance du tribunal, se présente aux locaux d'une entreprise, demande à faire des photocopies de certains documents mais ne peut pas le faire parce que le contribuable concerné l'empêche de le faire.
M. Ken Epp: Mais est-ce qu'on prévoit des mesures de protection pour les contribuables lorsqu'ils font l'objet de harcèlement de la part des représentants de l'ADRC? C'est surtout de ces cas-là que j'entends parler.
M. Gérard Lalonde: Je ne suis pas au courant de situations de ce genre. Je n'en ai pas entendu parler. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'incidents. C'est une grande organisation dont je ne fais pas partie. Je travaille pour le ministère des Finances.
Y a-t-il des mesures de protection? D'abord, je suppose que dans la mesure où les gens se plaignent à l'ADRC, c'est comme pour toute autre entreprise. Si un employé harcelle les clients—et l'ADRC considère les contribuables comme ses clients—c'est mauvais pour les affaires. L'employé en question pourrait se trouver sans travail, ou encore faire l'objet d'un blâme.
Le président: Monsieur Cullen.
M. Roy Cullen: Je voudrais ajouter quelque chose, monsieur le président.
Cette question relève en réalité de la responsabilité du ministre responsable du Revenu national, mais si ma mémoire est bonne, il existe une sorte de déclaration des droits des contribuables, et à mon avis, l'Agence des douanes et du revenu respecte les termes de cette déclaration. S'il y a des plaintes, ou si les gens font l'objet de harcèlement, ils peuvent exercer leurs droits.
Comme vous l'a dit M. Lalonde, cette disposition prévoit qu'un représentant de l'Agence des douanes et du revenu puisse accéder aux dossiers d'un contribuable sans être harcelé à un point tel qu'il ne puisse plus bien faire son travail. Quelqu'un y arriverait peut-être du fait d'être particulièrement persévérant, ou parce qu'il est assez fou pour supporter ce genre de chose. Mais cette disposition permet à l'agent de l'ADRC de faire le travail qu'il est censé faire.
M. Ken Epp: Merci.
Le président: Monsieur Loubier, je vous donne la parole pour faire vos dernières observations ou poser une dernière question.
[Français]
M. Yvan Loubier: Je vous remercie, monsieur le président.
En passant, ça fait presque huit ans que je suis député et j'ai eu des cas litigieux avec le ministère fédéral du Revenu. Chaque fois, les choses se sont arrangées à la satisfaction de tout le monde. Autrement dit, les expériences que j'ai vécues avec les fonctionnaires de Revenu Canada ont toujours été heureuses pour les gens de ma circonscription.
• 1645
Je pense que cette disposition-là
peut être très utile lorsqu'on examine
tous les procès qui sont intentés à l'heure
actuelle contre les
groupes de criminels, et peut-être aussi lorsqu'on
examine les démarches qui pourraient faire en sorte
qu'on enquête
sur la provenance des biens de ces gens-là. Ce ne sont
pas tous des anges, vous le savez. Comme vous le
mentionniez plus tôt, il y a des colosses qui vont
sûrement attendre les fonctionnaires à la porte des
résidences de ces criminels. Je trouve que c'est
une disposition qui a encore plus sa raison d'être.
Monsieur le président, plus tôt, vous avez initié un débat qui est fondamental. Je me rappelle que le Comité des finances, il y a deux ans et demi ou trois ans, avait publié un rapport qui sonnait l'alarme quant à la question de la productivité des entreprises.
Je m'inquiète, moi aussi, de voir qu'il n'y a pas de mesures qui encouragent l'augmentation de la productivité des entreprises. On avait dit—et vous l'avez mentionné de nouveau plus tôt—que le cadre macroéconomique était fort important et que le gouvernement fédéral devait faire en sorte que le cadre macroéconomique dans lequel évoluent ces entreprises puisse être propice à une amélioration de la productivité. Or, quand vous parlez de macroéconomie, vous parlez d'abord et avant tout d'environnements monétaires. Ce serait fort intéressant de poursuivre le débat que vous avez initié plus tôt avec des gens qui s'y connaissent afin que l'on soit tous au même diapason.
Il y a deux aspects à la valeur du dollar canadien. Ce n'est pas banal. Depuis 30 ans, le dollar canadien diminue d'année en année. Cette variation structurelle, cette baisse y est liée. C'est comme le reflet du manque de productivité des entreprises canadiennes. Les fluctuations qu'on a connues, ça, c'est conjoncturel. Ça, c'est lié à la demande et à l'offre journalières pour l'argent canadien.
Je trouve que ce qui se passe à l'heure actuelle est dramatique. Il y a des gens qui croient que la baisse du dollar canadien est favorable aux exportations. C'est certain, jusqu'à un certain point. Le problème qu'on a, à l'heure actuelle, c'est qu'il y a beaucoup d'entreprises qui achètent des biens d'équipements à l'étranger, en l'occurrence aux États-Unis. Avec un dollar qui se situe à 63 ¢, à 64 ¢, elles sont dans une situation où, justement, leur productivité est complètement mise en péril.
Les fluctuations du dollar canadien, c'est incroyable. De plus en plus, certaines entreprises signent des contrats à long terme, des contrats où le prix est fixé en dollars canadiens pour des entreprises ou des consommateurs américains, par exemple. On se retrouve dans une situation où, l'année suivante, les termes des échanges sont bousculés, bouleversés complètement.
Il faut donc sérieusement se pencher sur la question de la productivité. Vous l'avez soulevée, il y a deux ans et demi, dans votre rapport. Il faut aussi se pencher sur la question des fluctuations monétaires et sur le fait que les entrepreneurs qui sont aux prises avec ça ne peuvent arriver à planifier une amélioration au chapitre de la productivité.
Ma question pour les fonctionnaires ne porte pas sur ce cadre-là. Je cherche à savoir où nous en sommes rendus avec ce projet de loi-là en ce qui concerne le seuil d'imposition nulle, c'est-à-dire le seuil à partir duquel une famille—prenons, à titre d'exemple, une famille qui compte deux adultes et deux enfants—commence à payer de l'impôt fédéral. C'est une préoccupation que j'ai depuis toujours. Où en sommes-nous rendus, sans tenir compte de la prestation fiscale pour enfants, qui est un transfert direct, par rapport à l'impôt comme tel? À partir de quel niveau de revenu une famille de deux adultes et deux enfants commence-t-elle à payer de l'impôt fédéral?
M. Roy Cullen: Monsieur le président, je vais commencer et les fonctionnaires continueront.
J'ai l'impression que, de temps en temps, quand je parle, M. Loubier dort.
[Traduction]
Je me permets de répéter que ce budget...
[Français]
M. Yvan Loubier: Ce n'est pas un bon signe pour vous. Ça veut dire que vous êtes endormant.
[Traduction]
M. Roy Cullen: ... et l'Énoncé économique contiennent de nombreuses mesures qui vont aider les Canadiens et les entreprises canadiennes à devenir plus productifs. Ce que j'ai dit, c'est que le gouvernement peut prendre des initiatives et orienter l'environnement économique, mais que c'est aux entreprises et aux paliers de gouvernement d'agir également.
Pour les fins du compte rendu, j'aimerais énumérer les mesures qu'on retrouve dans ce budget et cet Énoncé économique qui vont rehausser la productivité du Canada.
Je vous ai déjà parlé du transfert avec report d'impôt des gains en capital, en vertu duquel les particuliers qui investissent dans de petites et moyennes entreprises pourront reporter l'impôt applicable aux gains en capital. Par ailleurs, les réductions d'impôt qui font partie de ce train de mesures correspondent aux plus importantes réductions d'impôt encore jamais vues, d'une valeur de 100 milliards de dollars, et d'après la grande majorité des analystes, elles arrivent à point nommé.
• 1650
De plus, nous avons inclus des mesures qui permettent de
différer l'imposition de certains avantages liés aux options
d'achat d'actions, mesures qui rehaussent notre compétitivité au
point de nous accorder un avantage concurrentiel par rapport à leur
traitement aux États-Unis. Il y a aussi la réduction du taux
d'inclusion des gains en capital. En outre, nos taux d'imposition
des sociétés seront désormais moins élevés de quatre à cinq points
de pourcentage par rapport à la plupart des États américains se
trouvant près de la frontière.
Donc, au niveau macroéconomique, il me semble que le gouvernement prend beaucoup de bonnes initiatives et je sais qu'il en prendra d'autres à l'avenir.
Puisque vous avez adressé certaines de vos questions aux représentants du ministère, je vais leur demander de vous répondre.
Madame Potvin.
[Français]
Mme Lise Potvin: On inclut la prestation fiscale pour enfants à titre de réduction d'impôt. C'est une mesure qui est livrée par le biais du système fiscal par l'Agence canadienne des douanes et du revenu, qui est incluse dans la Loi de l'impôt sur le revenu et qui remplace certaines anciennes exemptions et crédits d'impôt. C'est une mesure qui est, en fait, un impôt négatif. On la prend donc en considération dans nos chiffres.
En 2001, une famille de quatre enfants ayant un revenu familial d'environ 35 000 $ ou ayant deux revenus qui constituent un revenu familial d'environ 40 000 $ ne paiera pas d'impôt. Je n'ai pas les chiffres au dollar près, mais c'est à peu près cela.
M. Yvan Loubier: Si vous enlevez la prestation fiscale qui, selon moi, est un transfert, qui n'est pas dans le système d'impôt comme tel, qu'est-ce que ça donne comme seuil d'imposition nulle? Est-ce qu'on a déjà fait le calcul?
Mme Lise Potvin: Non. Nous ne faisons pas ce calcul. Nous le faisons toujours avec la prestation fiscale pour enfants parce que c'est quelque chose qui réduit le fardeau fiscal des familles.
M. Yvan Loubier: Est-ce que ce serait possible de vous demander, comme on le fait régulièrement, de nous fournir la réponse par écrit?
Mme Lise Potvin: Oui, c'est assez simple.
M. Yvan Loubier: Est-ce que ce serait facile de le faire, s'il vous plaît, pour une famille qui comprend deux adultes, deux enfants et deux revenus?
Mme Lise Potvin: Oui, c'est possible.
M. Yvan Loubier: J'apprécie vraiment cela. Je pourrai donc faire des comparaisons avec ce qui se passe ailleurs.
M. Roy Cullen: Nous remettrons ça au président pour votre considération.
[Traduction]
Le président: Vous pouvez aussi envoyer directement une copie à M. Loubier.
Je voudrais vous remercier, monsieur Cullen, madame Potvin, monsieur Lalonde, et tous les autres fonctionnaires qui sont vos collaborateurs. Je vais m'assurer de faire inscrire tous vos noms au compte rendu, ne serait-ce que pour des raisons historiques. Nous aimons bien savoir qui travaille dans les coulisses, et je vous assure qu'au Comité des finances, nous apprécions beaucoup le travail que vous faites.
Nous allons suspendre brièvement nos travaux avant de recevoir nos prochains témoins.
Le président: La séance est rouverte. Je souhaite la bienvenue aux témoins suivants: M. Dan MacIntosh, associé, et M. Norman Loveland, associé, du cabinet Osler, Hoskin & Harcourt; et M. Louis Chapdelaine, du cabinet Peter Kiewit Sons' Inc.
Vous savez sans doute déjà comment fonctionne le comité. Vous disposerez d'environ 10 minutes pour faire votre exposé, et ensuite nous ouvrirons la période des questions.
Je crois savoir que vous avez déjà déposé une lettre auprès du comité, dont nous avons tous un exemplaire sous les yeux. Nous allons évidemment écouter vos remarques liminaires, examiner votre document, et si jamais nous avons besoin d'éclaircissement par la suite, nous vous demanderons des précisions.
Qui va faire votre exposé? Monsieur Loveland.
M. Norman Loveland (associé, Osler, Hoskin & Harcourt): Oui. Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup d'avoir accepté de comparaître.
M. Norman Loveland: Membres du comité, permettez-moi tout d'abord de vous remercier de l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
Je suis un associé du cabinet Osler, Hoskin & Harcourt, nouvellement affecté à notre bureau de Montréal. Je suis accompagné de Louis Chapdelaine, directeur des opérations dans l'est du Canada pour notre client, Peter Kiewit Sons' Inc., et de Dan MacIntosh, associé du cabinet à notre bureau de Toronto. Dan est ex-directeur de la Division de la législation fiscale du ministère des Finances.
Monsieur le président, nous sommes très heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de comparaître devant le comité, car nous comprenons l'important rôle que joue ce dernier dans l'élaboration de saines politiques législatives, de politique fiscale, et du projet de loi proprement dit. Nous représentons aujourd'hui Peter Kiewit Sons' Inc., une grande société américaine oeuvrant dans le domaine de la construction, et notamment plus de 100 de ses employés actionnaires.
Nous souhaitons aborder la question du projet d'article 86.1 de la Loi de l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire la règle touchant les distributions d'actions de l'étranger. Cette disposition est souvent appelée la modification Ford. Pour la première fois, elle autorisera un report de l'impôt devant être payé par des Canadiens qui possèdent des actions dans une société étrangère qui distribue à ses actionnaires des actions d'une filiale.
Ce type de régime existe depuis un certain temps dans le contexte purement canadien pour des distributions d'actions dans le cadre de ce qu'on appelle des transactions «papillon»; cependant, cette mesure est tout à fait nouvelle pour ce qui est des actions de sociétés étrangères. En fait, la Loi de l'impôt sur le revenu prévoit le report de l'impôt à l'égard d'un grand nombre de situations différentes, notamment celles où les actionnaires participent à une opération sans numéraire, où il y a simple échange ou réagencement des valeurs, sans qu'il y ait de paiement en espèces, ce qui correspond tout à fait aux situations de transfert pour lesquelles on propose maintenant d'accorder un report de l'impôt.
En ce qui nous concerne, ces propositions viennent compléter un train important de dispositions touchant les transferts avec report d'impôt déjà en place. Nous appuyons vivement l'orientation du changement proposé. L'effet de la nouvelle règle, c'est que là où il y a distribution des actions d'une filiale par une société étrangère, les actionnaires canadiens détiendraient des actions à la fois dans la société mère et dans la filiale dont les actions ont été distribuées. Ainsi, à la suite de ce type de distribution, au lieu de détenir des actions dans une seule société—c'est-à-dire la société mère—et de posséder indirectement des actions dans une filiale, l'actionnaire détiendrait des actions à la fois dans la société mère et dans l'ex-filiale. Autrement dit, au lieu de posséder des actions dans une société mère qui crée une filiale, on peut dire que l'actionnaire détiendrait directement des actions dans deux sociétés soeurs.
Comme je vous l'ai déjà dit, nous appuyons vivement cette modification et elle fait partie intégrante d'une politique fiscale saine, à notre avis. Elle cadre tout à fait avec l'orientation générale de la Loi de l'impôt sur le revenu à bien des égards. Nous estimons qu'il s'agit là d'un changement important, puisque cette mesure élimine le traitement fort préjudiciable qu'auraient subi autrement les actionnaires canadiens dans ce genre de situation.
Le traitement que leur réserve la Loi actuelle est d'autant plus préjudiciable que les actionnaires américains de ces mêmes sociétés qui distribuent des actions d'une filiale bénéficient d'un report de l'impôt pour ce genre de transfert, alors que les actionnaires canadiens ne peuvent s'en prévaloir; en fait, ces derniers sont immédiatement assujettis à l'impôt, et ce aux taux d'imposition intégraux. On peut donc supposer, sans trop risquer de se tromper, que si tel n'était pas le cas—autrement dit, si les actionnaires américains étaient assujettis à l'impôt comme le sont les actionnaires canadiens pour ce genre d'opérations, de telles opérations seraient rarement menées par une société américaine.
• 1700
Donc, à notre avis, il s'agit d'une innovation à la fois saine
et positive.
Nous aimons beaucoup cette proposition, mais en même temps, nous y voyons une lacune importante qui a pour objet d'exclure notre client, Peter Kiewit, et plus précisément, ses plus de 100 employés-actionnaires canadiens. Voilà donc la question précise que nous aimerions aborder avec vous aujourd'hui.
Si une société comme Peter Kiewit Inc. n'est pas jugée admissible, c'est que cette disposition exige que les actions de la société soient inscrites et fassent l'objet d'opérations actives à la bourse. D'après l'explication des représentants du ministère des Finances que nous avons consultés à cet égard, l'objet de cette exigence est de s'assurer que les autorités canadiennes de l'Agence des douanes et du revenu auront accès, par l'entremise d'information mise à la disposition du public, aux renseignements qui leur permettront d'établir qu'un actionnaire canadien répond aux critères précis visant les transferts avec report de l'impôt au Canada.
Nous comprenons cet objectif et nous y sommes favorables. Cependant, même si Peter Kiewit Inc. est assujettie à la même obligation d'informer le public que n'importe quelle autre société ouverte américaine, qu'elle soit ou non cotée en bourse, étant donné que Peter Kiewit Inc. n'est pas inscrite et que ses actions ne sont pas cotées en bourse, ses actionnaires canadiens ne sont pas admissibles aux termes des nouvelles propositions.
Pour vous aider à comprendre la situation, nous aimerions vous parler brièvement de Kiewit. L'une des plus importantes sociétés de construction en Amérique du Nord, Kiewit a participé à de nombreux projets d'infrastructure dans les secteurs de l'énergie, du transport, des autoroutes, des ponts, des aéroports, des chemins de fer, des télécommunications, des barrages, et du pétrole et du gaz. Kiewit participe actuellement à de nombreux contrats de construction importants dans toutes les régions du Canada, représentant globalement près de 1 milliard de dollars. Donc, vous comprenez bien que cette société joue un rôle important sur le marché canadien. Plus de 2 000 Canadiens travaillent actuellement à ces divers projets.
Le domaine de la construction est un domaine extrêmement concurrentiel et à risque élevé. Ainsi, pour prospérer dans un tel environnement, Kiewit doit pouvoir attirer et conserver à son service des employés de premier ordre qui sont très motivés et très engagés. Afin d'atteindre cet objectif, Kiewit a décidé, dans le cadre de ses politiques commerciales, de mettre sur pied un système de participation dans la société en vertu duquel les employés ont un intérêt direct dans le bien-être de l'entreprise et vice-versa. De plus, l'une des plus importantes composantes de la structure salariale et d'avantages sociaux prévue pour les employés clés est ce programme de participation dans la société, par opposition à un régime de retraite, par exemple.
À l'heure actuelle, Kiewit compte plus de 1 400 actionnaires, dont plus de 100 actionnaires canadiens. Les statuts de Kievit limitent la participation en actions dans la société, si bien que seuls les employés peuvent détenir des actions dans la compagnie.
Le règlement de la Securities and Exchange Commission des États-Unis exige qu'une compagnie comptant plus de 500 actionnaires et un actif qui dépasse 10 millions de dollars doit être inscrite à titre de société ouverte assujettie à l'obligation d'informer le public de ses activités. Les exigences visant la communication de cette information au public par une compagnie comme Kiewit sont les mêmes que pour toute autre société ouverte cotée en bourse.
À l'heure actuelle, aucun employé n'est propriétaire de plus de 10 p. 100 des actions ordinaires de Kiewit, et plus de 60 p. 100 de ces actions ordinaires sont détenues par des employés dont la participation est inférieure à 1 p. 100.
Je vais maintenant céder la parole à mon associé, Dan MacIntosh, qui va vous parler brièvement d'une transaction à laquelle a participé Kiewit qui intéresse la modification proposée.
Le président: Merci, monsieur Loveland.
Monsieur MacIntosh.
M. Dan MacIntosh (associé, Osler, Hoskin & Harcourt): Merci, monsieur le président. La transaction qui a effectivement donné lieu à notre présence devant le comité aujourd'hui était une scission effectuée par Kiewit en septembre 2000. Les règles qui nous intéressent sont celles que prévoit le projet d'article 86.1 du projet de loi C-22. Il est prévu que ces modifications seront rétroactives au 1er janvier 1998. Ainsi la transaction dont nous parlons ici, qui s'est effectuée en septembre 2000, tomberait dans le délai d'application des modifications en question. Nous ne demandons pas de traitement préférentiel; nous demandons simplement d'être sur un pied d'égalité avec d'autres sociétés.
• 1705
La scission en question a été effectuée dans le cadre d'une
restructuration qui a permis à des employés clés d'une filiale de
Kiewit—à savoir Kiewit Materials Company—d'acquérir une
participation accrue dans l'entreprise Materials, l'objet de cette
opération étant de mieux motiver les employés de cette dernière.
Le Internal Revenue Service des États-Unis a émis une décision anticipée en matière d'impôt à l'égard de Kiewit, confirmant que la scission était une opération exonérée d'impôt pour ses employés-actionnaires américains, et que cette opération n'était pas motivée par des considérations fiscales. De fait, la scission de Materials remplit toutes les exigences des règles canadiennes en matière de distribution d'actions de l'étranger, comme vous l'a déjà fait remarquer mon collègue, M. Loveland. Il s'agit d'une distribution, par une société américaine, des actions d'une autre société américaine. C'est une distribution aux détenteurs d'actions ordinaires des actions ordinaires d'une filiale active. Aux États-Unis, cette opération est exonérée d'impôt. Il s'agit des exigences du projet d'article 86.1. Kiewit fournira à l'ADRC toutes les informations exigées par cette dernière. Les employés déposeront des formulaires d'option pour affirmer leur choix, à savoir le transfert avec report d'impôt s'applique à eux.
Le seul critère de la disposition auquel nous ne pouvons nous conformer concerne le fait que les actions de Kiewit ne sont pas cotées à une bourse américaine. Si elles ne sont pas cotées à une bourse américaine, c'est parce que Kiewit croit en son programme d'actionnariat des employés.
Par conséquent, les employés-actionnaires canadiens de Kiewit n'ont pas droit au traitement prévu pour un transfert avec report d'impôt prévu en vertu des règles canadiennes proposées pour les distributions d'actions de l'étranger. Ainsi, aux termes de la Loi actuelle de l'impôt sur le revenu, les employés actionnaires de Kiewit devront payer le montant intégral de l'impôt correspondant à la valeur de leurs actions dans Materials. La valeur de ces actions sera comptabilisée comme un revenu ordinaire faisant partie du revenu des actionnaires. Elle ne sera donc pas traitée comme un gain en capital.
Les conséquences de cette réalité pour les employés actionnaires canadiens de Kiewit sont à la fois très importantes et fort préjudiciables. La valeur des actions de Materials correspondait à 36 p. 100 de la valeur globale de Kiewit avant la scission. Par conséquent, les employés-actionnaires canadiens de Kiewit devront payer des impôts correspondant à environ 18 p. 100 de la valeur globale de leur investissement. De plus, cet impôt découle d'une opération dans le cadre de laquelle les employés actionnaires n'ont reçu aucune somme d'argent mais ont simplement échangé un certificat d'actions contre deux autres.
Je voudrais maintenant donner la parole à l'autre témoin représentant notre groupe, Louis Chapdelaine, qui va vous expliquer l'impact que cela a eu sur les employés canadiens de Kiewit.
M. Louis Chapdelaine (Peter Kiewit Sons' Inc.; Osler, Hoskin & Harcourt): Merci, Dan.
[Français]
Monsieur le président, je vais discuter un petit peu de l'effet de ce qui vient de se passer sur nos employés canadiens. On vient tout juste de payer nos impôts, il y a deux jours. C'était ce temps-là de l'année.
Dans notre compagnie, nous considérons finalement notre régime d'achat d'actions comme notre régime de retraite. C'est comme notre REER. Nous y investissons des dollars après impôt. Devoir payer des impôts à ce moment-ci crée donc, à cause du spin-off, une très mauvaise atmosphère de travail. Il y a une forte colère chez nos employés parce qu'ils sont traités tellement durement en comparaison de leurs confrères américains qu'ils côtoient de façon régulière. Notre compagnie est une compagnie nord-américaine. Certains de nos employés canadiens ont même demandé d'être transférés de façon permanente aux États-Unis.
[Traduction]
Il a été question tout à l'heure de productivité. Permettez-moi de vous dire que si nous voulons vraiment rehausser la productivité de l'économie canadienne, nous devrions tout d'abord faire le nécessaire pour éviter la fuite des cerveaux vers d'autres pays.
[Français]
Vous comprendrez qu'en travaillant côte à côte et de façon constante avec des Américains, certains de nos Canadiens se sentent un peu trahis.
Nous ne demandons qu'un traitement comparable à celui d'employés de grosses compagnies multinationales, voire à celui de simples investisseurs dans ces compagnies. C'est pourquoi nous vous demandons respectueusement de considérer le changement dont nous avons discuté avec vous.
Je vous remercie.
[Traduction]
M. Norman Loveland: Dans son Exposé économique du 18 octobre 2000, le ministre déclarait que l'objet de la politique canadienne de report d'impôt pour les scissions effectuées par des sociétés américaines est de faire disparaître l'écart entre le traitement des actionnaires américains, qui ne paient pas d'impôt, et le traitement des actionnaires canadiens, qui doivent acquitter tous les impôts requis. Toutefois, pour une société qui appartient à ces employés, comme Kiewit, la proposition actuelle aurait pour résultat d'accroître cette disparité de deux façons: premièrement, les employés-actionnaires canadiens continueront à faire l'objet d'un traitement fiscal beaucoup plus défavorable que leurs homologues américains, ce qui est d'autant plus injuste qu'ils sont des collègues, plutôt que simplement des actionnaires d'une même société.
• 1710
Deuxièmement, les employés-actionnaires canadiens seront
dorénavant assujettis à un traitement fiscal qui est beaucoup plus
défavorable que celui qui s'applique aux gestionnaires de
portefeuilles canadiens qui investissent dans des sociétés ouvertes
américaines, situation que les actionnaires canadiens de compagnies
comme Kiewit trouvent tout à fait inexplicable.
Je pense que Louis Chapdelaine vous a déjà communiqué ce que ressentent les employés-actionnaires canadiens. Évidemment, ils se sentent tout à fait abandonnés par leur gouvernement lorsqu'ils sont confrontés à une situation pareille.
C'est d'autant plus injuste que les employés actionnaires n'ont guère de possibilité de voter contre la proposition, puisqu'à titre d'employés, ils sont plus ou moins obligés d'accepter la volonté de l'employeur dans la plupart des cas.
Je tiens également à souligner que cette transaction n'était aucunement motivée par des considérations fiscales. La décision de l'entreprise à cet égard repose sur des motifs purement commerciaux, que nous vous avons brièvement décrits. D'ailleurs, il est important de mentionner qu'il n'était pas possible de structurer l'opération de façon à ce qu'elle ait des incidences fiscales moins défavorables pour les actionnaires canadiens.
Par contre, si la situation avait été inversée—c'est-à-dire si une entreprise canadienne ayant des actionnaires américains avait effectué cette opération—les actionnaires américains, de même que les actionnaires canadiens, auraient été visés par un autre régime fiscal.
Par ailleurs, nous avons eu l'occasion d'examiner l'incidence possible de l'adoption du changement que nous recommandons, du point de vue du nombre supplémentaire d'entreprises qui pourraient bénéficier de ce même traitement. D'après les résultats de notre recherche, il s'agirait d'un nombre fort modeste. La plupart des compagnies qui ont droit à ce traitement fiscal sont déjà admissibles en vertu du régime visant les sociétés ouvertes.
En conclusion, je vous fais simplement remarquer que Kiewit a présenté à plusieurs reprises ses doléances aux représentants du ministère des Finances. D'ailleurs, nous continuons à le faire. Nous proposons une modification fort simple—en fait, vous avez une copie de la version modifiée dans votre documentation—qui permettrait de corriger ce problème et de faire en sorte qu'on fasse une distinction dans la loi entre les sociétés ouvertes aux États-Unis et les sociétés non ouvertes aux États-Unis, plutôt qu'entre celles qui sont cotées en bourse et celles qui ne le sont pas.
Nous demeurons relativement optimistes, en ce sens que nous croyons qu'il sera peut-être encore possible de convaincre les représentants du ministère des Finances de soutenir notre proposition, mais nous n'avons pas encore réussi à le faire. Étant donné que le comité tenait des audiences, il nous semblait qu'il serait important de saisir l'occasion de présenter notre point de vue dans un contexte public et que ce serait peut-être même manquer de respect que de ne pas le faire.
Merci donc infiniment de nous avoir permis de présenter nos vues sur la question. Nous espérons que nos arguments auront été suffisamment solides pour vous amener à conclure au bien-fondé de notre position.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Loveland, monsieur MacIntosh et monsieur Chapdelaine.
Les arguments que vous avancez en faveur de cette modification sont effectivement très convaincants. Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir fait part de vos vues sur la question.
Nous allons maintenant ouvrir la période des questions.
Monsieur Epp. Ce sera un tour de cinq minutes pour tout le monde.
M. Ken Epp: Je n'aurai sans doute pas besoin de cinq minutes.
J'ai quelques petites questions rapides. D'abord, dans votre document, au bas de la page 2, vous dites que chaque année, les employés clés se voient offrir l'occasion d'acquérir des actions de Kiewit. S'agit-il d'une opération au comptant où les employés vous font un chèque? Ou est-ce qu'on leur donne plutôt une prime de fin d'année, sous forme d'actions?
M. Louis Chapdelaine: C'est une opération au comptant. Nous devons investir nos propres crédits, ou alors faire un emprunt, mais ce sont nos propres fonds que nous investissons dans notre compagnie.
M. Ken Epp: Donc, les employés paient leurs actions comptant.
M. Louis Chapdelaine: Oui.
M. Ken Epp: Monsieur le président, je pense que nous avons affaire ici à des experts fiscaux. N'est-il pas vrai que du moment qu'ils investissent de l'argent dans ces actions, ils ont droit à certains avantages fiscaux? N'ont-ils pas la possibilité de déduire le montant de leur investissement? Quand on fait un investissement, cela correspond à une perte pour cette année-là, non?
M. Louis Chapdelaine: Les frais d'intérêt peuvent évidemment être déduits, parce que... Mais je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question.
M. Ken Epp: Moi, non plus, étant donné que je n'ai pas beaucoup d'investissements.
M. Norman Loveland: Non. Pour répondre à votre question, il s'agit de l'acquisition d'actions, et comme ce serait le cas pour n'importe quelle acquisition d'actions, vous pourriez peut-être déduire les intérêts si vous avez emprunté l'argent. Mais aucun dégrèvement fiscal n'est rattaché au coût des actions au moment où vous les acquérez. Le coût des actions n'est pertinent dans ce contexte que lorsque vous les vendez plus tard, car là, le coût de ces actions est un facteur à prendre en compte en calculant les gains en capital.
M. Ken Epp: Vous parlez essentiellement de transferts, qui sont différents. Donc, vous ne demandez pas que ces employés puissent déduire de leurs revenus ce qu'ils utilisent chaque année, n'est-ce pas?
M. Norman Loveland: Non, pas du tout. Ce que nous vous disons—peut-être devrions-nous nous en tenir au cas précis; nous parlons d'employés-actionnaires de Kiewit qui détiennent des actions dans une société ouverte mère. Elle a une filiale et décide donc de distribuer les actions de cette filiale en versant des dividendes aux actionnaires. Ainsi les actionnaires, au lieu de détenir des actions seulement dans Peter Kiewit Inc., détiennent désormais des actions dans Peter Kiewit, qu'ils ont toujours détenues, mais comme la compagnie a été réduite, ils détiennent aussi des actions dans Materials, l'ancienne filiale. Donc, au lieu d'avoir un certificat, ils en ont deux.
Le problème, c'est qu'aux termes des dispositions actuelles de la loi canadienne, qui sont en vigueur depuis longtemps, la valeur des actions de la filiale est traitée comme dividende versée immédiatement aux actionnaires. Donc, non seulement la valeur de ces actions n'est pas considérée comme un gain en capital, mais les actionnaires doivent immédiatement acquitter tous les impôts exigibles en fonction de la valeur. Dans le cas de Kiewit, supposons qu'un employé-actionnaire détient 1 000 $ d'actions dans Kiewit avant l'opération, alors qu'après, ce même actionnaire détient 630 $ d'actions dans Kiewit et 370 $ d'actions dans Materials. Jusque-là, tout va bien. Cela ne pose aucun problème, sauf que les 310 $ sont inclus dans le revenu de l'employé, même si une forte proportion de cette somme représente de l'argent qu'il a déjà investi et qu'on lui rend tout simplement.
M. Ken Epp: C'était ma seule question, monsieur le président.
Le président: Monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier: Lorsque vous avez rencontré, à plusieurs reprises, les fonctionnaires du ministère, avez-vous mentionné quels étaient les arguments qui vous opposaient pour apporter des modifications telles que vous les présentez? On pourrait peut-être demander à M. Lalonde, qui est chef de l'impôt, de venir prendre place et de nous présenter lui-même ses arguments. Je suis intéressé de savoir ce qui bloque et pourquoi.
[Traduction]
M. Norman Loveland: La principale objection du ministère, d'après ce que nous avons pu comprendre, c'est que ce dernier ne veut pas agir de façon précipitée. Il s'agit d'une nouvelle disposition. Donc, le ministère veut d'abord tâter le terrain. Les représentants à qui nous avons parlé compatissent à notre situation. Je dirais même qu'ils sont assez d'accord avec ce que nous proposons. Mais en fin de compte, ils ne sont pas disposés à élargir cette disposition parce qu'ils ont décidé d'appliquer cette disposition uniquement aux sociétés ouvertes cotées en bourse, étant convaincus—je ne suis pas d'accord avec eux à cet égard—qu'une société ouverte cotée en bourse communiquera énormément d'information au public. Donc, quand l'ADRC examine les paiements de transfert des employés au moment où ils déposeront leurs déclarations, elle pourra vérifier, par l'entremise de l'information publique, que l'employé est effectivement admissible au transfert demandé—en fait, j'aurais dû dire l'actionnaire, et non pas l'employé.
Mais dans le cas de Kiewit, cette information est tout aussi disponible, étant donné qu'il s'agit d'une société ouverte américaine comptant plus de 500 actionnaires inscrite auprès de la SEC; donc, en ce qui nous concerne, ce critère-là est tout à fait rempli.
De plus, ils prétendent que puisqu'il faut s'arrêter quelque part en fixant les critères d'application de cette disposition, il y aura toujours un certain nombre de personnes qui ne sont pas visées. Je ne suis pas en désaccord avec le ministère à cet égard, mais il nous semble tout à fait logique d'établir la distinction entre les sociétés ouvertes et les sociétés non ouvertes. C'est une distinction qui nous semble très logique et tout à fait défendable, et à notre avis, cela n'élargira guère le nombre de personnes qui peuvent s'en prévaloir. Au contraire, cela permettra de mettre toutes les sociétés ouvertes sur un pied d'égalité, au lieu de conserver un régime qui impose un traitement défavorable aux entreprises qui appartiennent aux employés par rapport aux sociétés ouvertes cotées en bourse dans lesquelles des investisseurs, plutôt que des employés, investissent des fonds. J'espère avoir bien expliqué leur point de vue. Je sais qu'ils sont dans la salle, mais c'est du moins ce que j'ai retenu de leurs arguments.
Dan, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Dan MacIntosh: Non, ça va, Norman; je suis d'accord avec votre résumé.
[Français]
M. Yvan Loubier: À combien évaluez-vous les recettes fiscales qui seraient sacrifiées au gouvernement fédéral si on créait un précédent en acceptant votre modification?
M. Louis Chapdelaine: Qu'est-ce que vous voulez qu'on évalue?
M. Yvan Loubier: Il s'agit des recettes fiscales qui seront sacrifiées, parce qu'il y en aura. Quel serait l'impact de l'amendement que vous proposez? Vous avez dit plus tôt que cela ne toucherait pas beaucoup d'entreprises.
M. Louis Chapdelaine: Je ne peux pas répondre à cette question. Notre compagnie est assez unique parce qu'elle est connue comme étant publique, ou définie comme étant publique, mais elle n'est pas inscrite à un stock exchange quelconque. Je ne pourrais pas non plus vous dire combien il existe d'autres compagnies comme ça. comme ça. Personnellement, je n'en connais pas. Il y en a peut-être d'autres, mais je n'en connais pas.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Loubier.
[Français]
M. Yvan Loubier: Monsieur le président, est-ce que ce ne serait pas une bonne idée d'inviter un fonctionnaire à la table?
[Traduction]
Le président: M. Loubier propose que s'il y a des fonctionnaires dans la salle qui sont chargés de ce cas particulier, qu'ils viennent nous parler de la situation eux-mêmes, s'ils sont disposés à le faire.
Mais monsieur Cullen, voulez-vous...
M. Roy Cullen: J'aimerais poser quelques questions. Je dois bientôt partir pour la Chambre puisque ce sera bientôt l'heure consacrée aux initiatives parlementaires.
Merci infiniment pour votre présence...
Le président: Monsieur Cullen, je sais que vous avez quelque chose à faire, mais je voulais poser une question aux témoins.
M. Roy Cullen: Je vais donc partir et vous laisser continuer, car je dois me présenter à la Chambre pour discuter d'initiatives parlementaires.
Le président: Allez-y. Posez votre question.
M. Roy Cullen: Je voulais simplement remercier les témoins d'avoir comparu devant le comité, et leurs arguments tombent à point nommé, puisque le ministère est justement en train d'examiner la question.
D'abord, je vous félicite pour votre engagement à l'égard de votre programme d'actionnariat des employés chez Kiewit. Moi-même et de nombreux autres collègues avons vivement défendu ce genre d'initiative au sein du gouvernement et au caucus.
Nous avons brièvement discuté de la structure de ce type de programme. Dans votre cas, s'agit-il d'un régime d'acquisition d'actions pour les employés ou plutôt d'un régime d'actionnariat pour les employés en vertu duquel tous les employés peuvent acheter des actions? Comment votre régime est-il structuré? Vise-t-il tous les employés, ou plutôt les cadres moyens et supérieurs?
M. Louis Chapdelaine: Non, il vise l'ensemble des catégories d'employés, qu'ils travaillent du côté de l'administration, de la production, du génie—enfin, toutes les branches de l'entreprise. Évidemment, le nombre d'actions offertes à chaque employé sont fonction de son rendement, et on pourrait donc dire que le degré de participation est fonction du mérite.
Mais il y a tout de même une large participation... comme nous le disions tout à l'heure, il y a 1 400 actionnaires en Amérique du Nord, et d'après les chiffres les plus récents, le nombre d'actionnaires canadiens est de 127, si je ne m'abuse.
M. Roy Cullen: S'agit-il d'un régime d'achat d'actions ou d'un régime de primes offertes sous forme d'actions?
M. Louis Chapdelaine: C'est un régime d'achat d'actions.
M. Roy Cullen: Ah, bon.
M. Louis Chapdelaine: Oui, nous devons acheter les actions.
M. Roy Cullen: J'ai une autre question. Vous avez parlé du fait que l'administration fiscale américaine a tiré la conclusion que la distribution d'actions n'était pas motivée par des considérations fiscales. Vous ne connaissez pas nécessairement la nature des activités concernées, mais savez-vous en fonction de quoi elle a tiré cette conclusion-là? Dans votre cas, cela semble assez simple, mais je me demande comment réagirait l'administration fiscale canadienne, si une entreprise privée... Est-ce que l'administration fiscale canadienne se contenterait d'accepter l'avis des autorités américaines selon lesquelles la restructuration n'était pas motivée par des considérations fiscales, ou aurait-elle la possibilité, par l'entremise de l'Agence des douanes et du revenu, de se convaincre que cette opération n'était pas motivée par des considérations fiscales, étant donné qu'il s'agit d'une entreprise privée?
Êtes-vous d'avis que l'administration fiscale canadienne devrait simplement accepter la décision des autorités américaines?
M. Louis Chapdelaine: Étant donné que nous sommes une société ouverte, d'après leur définition, toute l'information nécessaire est du domaine public.
M. Norman Loveland: Nous ne cherchons pas à créer un régime qui serait différent de celui qui vise actuellement les sociétés ouvertes américaines qui sont cotées en bourse. Nous avons fait une recherche, et les résultats de cette recherche indiquent essentiellement que la très grande majorité des sociétés ouvertes sont déjà visées par les dispositions actuelles. Les sociétés ouvertes qui ne sont pas cotées en bourse sont généralement de plus petites entreprises, moins bien connues. En fait, dans bien des cas, la valeur de ces entreprises est à la baisse; donc, en incluant les sociétés ouvertes cotées en bourse, vous incluez automatiquement une proportion très considérable de la valeur globale des sociétés ouvertes américaines.
M. Roy Cullen: Vous parlez de sociétés ouvertes, mais nous avons ce que nous appelons des sociétés fermées, des sociétés ouvertes, des sociétés cotées en bourse—quelle définition utilisez-vous? La définition canadienne? La définition américaine?
M. Norman Loveland: La définition américaine.
M. Roy Cullen: Et comment définit-on aux États-Unis une société ouverte?
M. Norman Loveland: C'est une société qui est inscrite auprès de la Securities and Exchange Commission à titre de société ouverte assujettie à des obligations d'information exhaustive. En théorie, l'information est communiquée aux autorités volontairement. Mais dans la pratique, peu de sociétés le font à moins d'être tenues de le faire, et il y a justement deux cas où ce serait une obligation pour la société: d'une part, si la société est cotée en bourse, et d'autre part, si elle compte plus de 500 actionnaires et un actif supérieur à 10 millions de dollars. De toute évidence, Kiewit est dans la deuxième catégorie.
M. Dan MacIntosh: Peut-être pourrais-je ajouter quelque chose en réponse à votre question concernant le potentiel d'abus du régime fiscal. D'abord, selon les règles, il doit s'agir d'une opération de transfert conformément au code du Internal Revenue Service des États-Unis. Ce code autorise des opérations de transfert uniquement pour des raisons commerciales.
Le droit fiscal américain comporte de nombreuses dispositions anti-évitement, élaborées à la fois par les autorités législatives et judiciaires, qui aideraient à protéger le fisc canadien, mais en outre, le droit fiscal canadien s'appliquerait, en plus de la règle générale anti-évitement. Donc on pourrait se prévaloir des règles anti-évitement des deux régimes fiscaux.
M. Roy Cullen: Je me rends compte que les règles anti-évitement constituent une mesure un peu grossière, mais je comprends très bien ce que vous dites. Merci.
Je dois partir, monsieur le président. Merci.
Le président: Madame Barnes.
Mme Sue Barnes: Depuis combien de temps essayez-vous d'obtenir gain de cause auprès du ministère des Finances?
M. Norman Loveland: Je pense que nous nous sommes adressés au ministère pour la première fois il y a deux mois et demi pour discuter de la question. Mais je ne me rappelle pas très bien.
Mme Sue Barnes: Donc, on ne parle pas d'un délai très long.
Pour ce qui est des objectifs de la politique gouvernementale, je voudrais demander aux représentants du ministère des Finances de nous indiquer s'il s'agit pour l'instant de circonscrire l'application de ces dispositions? Est-ce exact ce qu'on nous a affirmé à cet égard?
M. Gérard Lalonde: Je voudrais répéter ce que vous ont dit Dan, M. Loveland et M. Chapdelaine tout à l'heure; c'est-à-dire qu'un peu comme le représentant persévérant de l'ADRC dont on a parlé précédemment, ils continuent à faire du lobbying auprès du ministère des Finances. Nous sommes plusieurs fonctionnaires aujourd'hui, mais ni le sous-ministre ni le ministre n'est présent, et par conséquent, je ne peux pas vous donner de réponse définitive pour l'instant. Je ne voudrais pas empêcher ces messieurs de continuer à nous faire valoir leurs arguments.
Donc, je préfère ne pas répondre à cette question pour l'instant.
Mme Sue Barnes: Je comprends. Cela me semble tout à fait normal. Peut-être plus tard, si...
Le président: Je suis d'accord, madame Barnes. Évidemment, les négociations sont toujours possibles. En fait, les membres du comité analyseront eux-mêmes cette modification pour voir ce qu'ils en pensent, car en fin de compte, nous devrons de toute façon adopter des amendements au projet de loi. En fait, ce sont les membres du comité qui vont proposer ces amendements.
J'irais même jusqu'à dire que nous devrions peut-être reporter à plus tard l'examen article par article du projet de loi, étant donné que cet examen est prévu pour très bientôt, afin d'avoir suffisamment de temps pour y réfléchir avant de faire rapport à la Chambre. Voilà donc ce que j'en pense, et j'espère que les membres du comité seront du même avis.
Monsieur Loubier, une dernière question.
[Français]
M. Yvan Loubier: Je suis d'accord. Je suis satisfait de la réponse de M. Lalonde. Je trouve que c'est une question qui est fort importante qu'il faudrait régler rapidement.
[Traduction]
Le président: Merci.
J'encourage nos témoins à poursuivre leurs efforts dans ce domaine. De notre côté, nous allons continuer notre travail. Nous espérons pouvoir répondre à vos besoins à cet égard.
Merci beaucoup. La séance est levée.