FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 17 avril 2002
¹ | 1535 |
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)) |
Maître Kathy Kendall (avocate générale, Nuance Group (Canada); représentante, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators) |
La présidente |
Mr. Jacques Dagenais (directeur général, AerRianta International; représentant, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators) |
¹ | 1540 |
La présidente |
Me Kathy Kendall |
¹ | 1545 |
La présidente |
M. Remo Mancini (vice-président directeur, Canadian Transit Company; représentant, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators) |
¹ | 1550 |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
La présidente |
M. Jean Messier (président-directeur général, Produits Ronald Inc.) |
La présidente |
º | 1605 |
M. Rob Cunningham (analyste principal de la politique, Société canadienne du cancer) |
La présidente |
M. Rob Cunningham |
La présidente |
M. Rob Cunningham |
º | 1610 |
La présidente |
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne) |
M. Remo Mancini |
Me Kathy Kendall |
M. Jason Kenney |
M. Remo Mancini |
M. Jason Kenney |
M. Remo Mancini |
º | 1615 |
M. Jason Kenney |
M. Remo Mancini |
M. Jason Kenney |
M. Remo Mancini |
M. Jason Kenney |
M. Remo Mancini |
M. Jason Kenney |
M. Rob Cunningham |
M. Jason Kenney |
M. Rob Cunningham |
M. Jason Kenney |
M. Rob Cunningham |
M. Jason Kenney |
M. Rob Cunningham |
M. Jason Kenney |
M. Rob Cunningham |
M. Jason Kenney |
La présidente |
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ) |
M. Jean Messier |
º | 1620 |
M. Yvan Loubier |
M. Jean Messier |
M. Yvan Loubier |
M. Jean Messier |
M. Yvan Loubier |
M. Jean Lalanne (consultant spécialiste en agroalimentaire, Produits Ronald Inc.) |
M. Yvan Loubier |
La présidente |
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.) |
º | 1625 |
M. Rob Cunningham |
M. Gary Pillitteri |
La présidente |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
º | 1630 |
M. Remo Mancini |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
M. Remo Mancini |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
º | 1635 |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
M. Bryon Wilfert |
M. Remo Mancini |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
M. Bryon Wilfert |
Me Kathy Kendall |
La présidente |
º | 1640 |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
Me Kathy Kendall |
M. Roy Cullen |
Me Kathy Kendall |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
Me Kathy Kendall |
M. Roy Cullen |
Me Kathy Kendall |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
M. Roy Cullen |
M. Remo Mancini |
M. Roy Cullen |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
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l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 17 avril 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1535)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Bienvenue à tous.
Le comité examine aujourd'hui le projet de loi C-47, Loi visant la taxation des spiritueux, du vin et du tabac et le traitement des provisions de bord.
Nos témoins cet après-midi sont Kathy Kendall, Jacques Dagenais et Remo Mancini de l'Association of Canadian Airport Duty-Free Operators ; Jean Messier et Jean Lalanne de Produits Ronald Inc., et Rob Cunningham de la Société canadienne du cancer.
Bienvenue. Je vais vous donner la parole dans l'ordre qui figure sur l'avis de convocation à moins qu'il n'y ait quelqu'objection à cela.
Kathy Kendall, qui va nous faire l'exposé?
Maître Kathy Kendall (avocate générale, Nuance Group (Canada); représentante, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators): M. Dagenais va faire l'exposé.
La présidente: Monsieur Dagenais, allez-y.
Mr. Jacques Dagenais (directeur général, AerRianta International; représentant, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators): Madame la présidente et membres du comité, je représente AerRianta International of North America. Nous exploitons des boutiques hors taxes à Halifax, Dorval, Mirabel, Ottawa, Winnipeg et Edmonton. Nous sommes heureux de comparaître devant votre comité au nom du secteur canadien des boutiques hors taxes et plus particulièrement celles qui se trouvent dans les aéroports canadiens de tout le pays.
Si nous sommes là aujourd'hui, c'est surtout pour vous expliquer que le projet de loi C-47 ébranle à nouveau les fondements traditionnels du secteur des achats hors taxes.
D'abord un instantané de notre secteur. Le Canada est bien placé pour saisir une part plus grande de cette industrie mondiale dont le chiffre d'affaires de 20 milliards de dollars est en pleine croissance. L'Association of Canadian Airport Duty-Free Operators représente les exploitants de boutiques hors taxes situées dans les aéroports. Ces boutiques hors taxes situées dans les aéroports canadiens offrent un emploi direct à 1 000 Canadiens au moins et créent de nombreux emplois indirects grâce à l'achat des biens et de services au niveau local et national. En l'an 2000, le chiffre d'affaires des boutiques hors taxes situées dans les aéroports canadiens dépassait tout juste 167 millions de dollars. En moyenne, 40 p. 100 des produits que nous vendons dans les boutiques hors taxes des aéroports canadiens sont d'origine canadienne. De fait, les exploitants de boutiques hors taxes dans les aéroports ont énormément contribué au succès du secteur vinicole canadien. Ces boutiques sont un des attraits du secteur touristique et sont le dernier souvenir que les voyageurs étrangers gardent du Canada.
Origine internationale du commerce hors taxes. Le commerce hors taxes a connu une expansion parallèle à celle des voyages internationaux et, depuis les premiers vols internationaux, les ventes en franchise de taxes et de droits de douane ont été étendues à ces nouveaux voyageurs. En 1944, la Convention de Chicago, signée par 54 pays, a ouvert la voie à l'implantation de zones hors taxes dans les aéroports. La première boutique hors taxes a ouvert ses portes en 1947 à Shannon en Irlande et pouvait renoncer à percevoir les taxes nationales sur les biens destinés à l'exportation. Le secteur du commerce hors taxes a continué de croître et représente aujourd'hui près de la moitié du commerce hors taxes au niveau mondial. Le taux de croissance enregistré depuis 50 ans n'a été possible qu'en maintenant un véritable régime d'achat hors taxes.
La politique et les programmes du Canada en matière d'achats hors taxes. Le secteur des achats hors taxes comporte de nombreux avantages à savoir qu'il est compétitif sur le marché international par les services qu'il offre au public voyageur, il accroît les dépenses des voyageurs internationaux qui viennent au Canada, il contribue de façon significative au revenu dont ont besoin les administrations aéroportuaires locales en aidant à réduire les coûts des voyageurs, il contribue de façon appréciable aux recettes versées au ministre des Finances par les administrations aéroportuaires locales qui signent des baux avec l'administration aéroportuaire, il accroît les attraits des destinations touristiques en offrant aux voyageurs étrangers l'accès à des points de vente au détail qu'ils attendent, il favorise la vente de biens fabriqués au Canada et crée des emplois directs et indirects.
Avant que cette industrie ne voit le jour au Canada, tous les voyageurs devaient s'arrêter dans des boutiques hors taxes aux États-Unis ou ailleurs à l'étranger pour faire leurs achats. Notre économie perdait en conséquence des millions de dollars de revenu provenant des voyages et du tourisme. Les gouvernements canadiens successifs ont soutenu et encouragé les entreprises hors taxes car le manque à gagner résultant de l'exonération des droits de douane et des taxes est compensé par les retombées économiques directes et indirectes provenant de la création d'emplois, des achats des fournisseurs et de l'attrait accru du tourisme au Canada. La stratégie du gouvernement a porté fruit et nos clients ont maintenant l'habitude de faire leurs achats dans les boutiques hors taxes de tout le Canada.
Les exploitants de boutiques hors taxes ont pris d'importants engagements à long terme et ont fait des investissements considérables depuis que le gouvernement a encouragé l'implantation de ces entreprises. Plus de 20 millions de dollars ont été investis dans les immeubles, l'équipement des boutiques, la technologie, les aménagements, la formation du personnel, etc. Les exploitants de boutiques dans les aéroports dépensent des millions de dollars pour la conception, la construction et l'ouverture de nouveaux points de vente. Par ailleurs, il convient de souligner que nous versons plus de 55 millions de dollars par an en loyer aux administrations aéroportuaires.
¹ (1540)
La présidente: Merci.
Me Kathy Kendall: Je m'appelle Kathy Kendall et en plus de représenter l'Association of Canadian Airport Duty-Free Operators, je suis avocate générale pour The Nuance Group qui exploite 25 boutiques hors taxes dans les aéroports de Toronto, Vancouver et Calgary. Nous sommes le plus important locataire titulaire d'une franchise à Calgary et à Toronto. Nous exploitons aussi quelques centres de commande préalables, y compris un magasin de 26 000 pieds carrés à Vancouver. Nous sommes très heureux d'être parmi vous aujourd'hui pour vous parler de ce projet de loi qui a eu un effet très préjudiciable sur nos activités.
Alors que la conjoncture était très prometteuse, comme vient de l'expliquer M. Dagenais, le gouvernement fédéral a annoncé, le 5 avril que le Canada imposerait une taxe sur les achats hors taxes et, encore une fois, les taxes ont été augmentées en novembre de 1,50 $ la cartouche de cigarettes. Cette taxe a immédiatement suscité une grande inquiétude chez les exploitants de boutiques hors taxes au Canada et à l'étranger, et cette inquiétude serait la même indépendamment de la nature du produit, qu'il s'agisse de tabac, de parfum, de boissons alcoolisées ou de produits alimentaires.
Ce qui est important, c'est que le gouvernement a mis au rancart le principe des achats hors taxes du jour au lendemain sans tambour ni trompette, sans analyse préalable pour déterminer si les achats hors taxes contribuaient en réalité aux problèmes liés aux ventes de tabac. Dès l'annonce de l'imposition de ces taxes, les consommateurs ici et à l'étranger en sont venus presque immédiatement à la conclusion qu'au Canada les boutiques hors taxes ne sont plus réellement hors taxes. Cette annonce a rendu l'avenir de notre industrie très incertain non seulement pour les exploitants mais aussi pour les consommateurs, les fournisseurs et les employés.
Les transactions hors taxes sont peu fréquentes et les clients doivent par la suite quitter le pays pour au moins 48 heures. Par conséquent, les consommateurs font leurs achats pendant quelques visites seulement. Quand les clients découvrent qu'ils ne sont pas assurés d'obtenir des prix hors taxes et hors droits de douanes, l'un des principaux attraits des boutiques disparaît et les voyageurs cessent tout simplement de les fréquenter, ce qui entraîne une baisse du chiffre d'affaires. Cela se répercute sur nos fournisseurs, nos employés et les loyers que nous versons aux administrations aéroportuaires qui les reversent ensuite au gouvernement.
Ce n'est pas la première fois qu'on tente au Canada de taxer les achats hors taxes. En 1992-1993, on a tenté d'imposer une taxe à l'exportation sur les ventes hors taxes de produits du tabac, mais le gouvernement fédéral a ensuite fait marche arrière, ayant compris que la mesure ne favoriserait pas la lutte contre la contrebande mais porterait un coup dur au secteur des achats hors taxes.
En 1996, dans le cadre de son plan de lutte contre le tabagisme destiné à protéger la santé des Canadiens, le ministre de la Santé a exempté le secteur des achats hors taxes des restrictions additionnelles imposées sur la vente de cigarettes et d'autres produits du tabac, ayant compris que ce secteur ne fait pas la promotion des ventes de cigarettes aux jeunes et n'encourage pas le tabagisme.
Si nous réagissons si vigoureusement aux mesures annoncées, c'est que, même si l'on avait discuté avec le gouvernement de l'imposition de taxes sur le tabac avant que celle-ci ne soit annoncée en avril dernier, nous avons été totalement abasourdis quand nous avons pris connaissance des détails. De fait, nous irions même jusqu'à dire que le gouvernement n'a pas été franc avec nous lors de ces consultations.
Nous tenons à répéter que le secteur des achats hors taxes n'a aucune objection aux efforts du gouvernement fédéral pour réduire le tabagisme. Notre secteur ne s'est jamais opposé à cette politique et, en fait, nous respectons des codes très stricts pour ce qui est de la vente de produits du tabac. Dans ce contexte, il importe de noter quelques arguments.
D'abord, le gouvernement impose déjà à l'achat de produits du tabac dans les boutiques hors taxes des restrictions très lourdes qui ne s'appliquent pas aux autres détaillants de produits hors taxes—par exemple, l'obligation d'acheter un billet d'avion et de quitter le pays pour au moins 48 heures après l'achat.
Ensuite, il y a une limite d'une cartouche pour usage personnel par personne. Il est peu probable que cela encourage le tabagisme, et ceux qui achètent plus d'une cartouche doivent payer les droits de douane sur les autres.
Troisièmement, le gouvernement souhaite surtout réduire le tabagisme chez les jeunes. Les boutiques hors taxes ne vendent pas de produits du tabac aux mineurs et, d'ailleurs, seuls 3 p. 100 environ des acheteurs des boutiques hors taxes sont des mineurs.
Enfin, le prix d'achat d'un billet pour un vol international et l'obligation de quitter le pays montre bien qu'il est ridicule de croire qu'une personne quitterait le pays dans le seul but d'acheter une cartouche de cigarettes hors taxes.
¹ (1545)
Pour conclure, ou presque, j'ajouterai que nous encourageons le gouvernement à retirer cette taxe parce qu'elle va à l'encontre de la politique qui a donné naissance au secteur hors taxe. C'est une politique qui est censée résoudre un problème en ciblant une industrie qui n'est pas la cause des effets secondaires délétères du tabagisme. C'est une politique qui s'attaque à la clientèle du secteur hors taxe. Les boutiques aéroportuaires hors taxe ne font pas partie des réseaux de contrebande. Ce secteur hors taxe n'encourage pas les Canadiens à fumer, encore moins les jeunes Canadiens. Il est rigoureusement réglementé et représente moins de 1 p. 100 de la consommation nationale de tabac.
Je le répète, nous ne mettons pas en doute les objectifs du gouvernement en matière de santé. Mais les mesures ne doivent pas être prises arbitrairement, et elles doivent contribuer à atteindre l'objectif. Le prélèvement d'une telle taxe dans un secteur qui représente entre 1 et 2 p. 100 des ventes du tabac au Canada, dont les ventes aux mineurs sont négligeables, qui ne contribue pas à la contrebande et qui a été fondé sur le principe de l'exemption de taxe ne peut qu'être considéré comme arbitraire.
Nous recommandons vivement au gouvernement d'amender le projet de loi C-47 en éliminant les dispositions imposant de nouvelles taxes dans le secteur hors taxe. Dans sa forme actuelle, la loi ouvre la voie à l'imposition de nouvelles taxes et à l'augmentation des droits, ce qui saperait progressivement la caractéristique même du secteur hors taxe créé par le gouvernement il y a des décennies.
En conclusion, en prélevant des taxes sur ces boutiques, le gouvernement menace le principe sur lequel se fonde l'industrie hors taxe; il a commencé à grignoter l'achalandage et le chiffre d'affaires pour tous les produits et services dans les commerces hors taxe, pas seulement le tabac; il met en péril les emplois de centaines de Canadiens et affecte négativement le tourisme et le service important qu'assurent aux voyageurs les boutiques hors taxe.
Nous avons bon espoir que, avec les amendements que nous proposons, la possibilité d'imposer de nouvelles taxes ou de nouveaux droits dans le secteur hors taxe sera éliminée. Je vous remercie.
La présidente: Merci.
Monsieur Mancini, je vous en prie.
M. Remo Mancini (vice-président directeur, Canadian Transit Company; représentant, Association of Canadian Airport Duty-Free Operators): Madame la présidente, membres du comité, je m'appelle Remo Mancini et je représente la Canadian Transit Company en qualité de vice-président directeur. Cette entreprise a son siège social à Windsor en Ontario.
Je suis reconnaissant de cette occasion qui m'est donnée de comparaître devant votre comité aujourd'hui pour vous faire part de nos vives préoccupations entourant le projet de loi C-47. Tout d'abord, je vous parlerai brièvement de la Canadian Transit Company, j'aborderai ensuite nos objections au projet de loi, et je conclurai avec quelques recommandations.
La Canadian Transit Company, entreprise privée imposable, exploite la moitié canadienne du pont Ambassador reliant Windsor à Detroit. La société a été constituée en 1921 par une loi du Parlement. Le pont Ambassador a été inauguré en 1929 et constitue un lien direct entre Windsor, en Ontario, et Detroit, au Michigan.
Depuis, le pont Ambassador est devenu le plus important point de passage frontalier en Amérique du Nord. En 1992, nous avons devancé le Peace Bridge pour devenir la frontière commerciale la plus achalandée d'Amérique du Nord. Pendant l'année civile 2000, quelque 160 milliards de dollars d'échanges commerciaux ont transité par le pont Ambassador. Cette même année, nous sommes devenus le poste frontalier canado-américain le plus fréquenté par les voitures, surpassant le tunnel Windsor-Detroit.
Dans le cadre d'une initiative conjointe du secteur public et privé regroupant une de nos filiales et l'Université de Windsor, nous exploitons une boutique hors taxe qui compte 70 employés réguliers, dont 75 p. 100 sont des étudiants de l'Université de Windsor. C'est une entreprise assez importante qui contribue directement et indirectement à l'économie locale et nationale en créant des emplois et en accordant sa clientèle aux fournisseurs locaux comme les courtiers d'assurances, les services de nettoyage et les fournisseurs d'articles de papeterie, et par ses achats auprès des fabricants canadiens. Nous sommes ici aujourd'hui parce que nous nous intéressons au premier chef à l'avenir du secteur canadien hors taxe qui, à notre avis, est désormais menacé.
Quelles sont nos objections au C-47? D'abord, je dois dire que je suis d'accord avec l'essentiel des arguments présentés par mes collègues de l'Association of Canadian Airport Duty-Free Operators. Par ailleurs, je considère que la menace qui pèse sur notre secteur est immédiate et très grave.
La solution que je propose est l'élimination de cette menace qui pèse sur notre secteur et le retour aux conditions qui existaient avant l'introduction du projet de loi C-47 et de son prédécesseur, le C-26 qui, pour la première fois, imposait ces taxes aux boutiques exemptes de taxes et de droits. Plus simplement, je demande respectueusement au comité des finances de prendre toutes les mesures nécessaires pour que le secteur hors taxe redevienne exempt de taxes et de droits. J'ose dire que si vous sondiez l'opinion du public voyageur, celui-ci vous demanderait d'en faire autant.
Comprenez d'emblée que notre entreprise ne trouve rien à redire à l'initiative générale du gouvernement visant à réduire le tabagisme. En effet, nous prenons très au sérieux nos responsabilités à ce sujet, ce que vous pourrez constater si vous visitez notre boutique et d'autres magasins hors taxe canadiens.
La politique gouvernementale de lutte contre le tabagisme n'est pas en cause ici. Toutefois, le gouvernement semble mettre en oeuvre cette politique sans comprendre ses effets sur le secteur hors taxe, ou sans s'inquiéter de ses effets, et avec peu de respect pour la procédure établie.
Voyons comment la politique antitabagisme est mise en oeuvre dans les boutiques hors taxe. D'abord, le gouvernement a imposé une taxe de 10 $ la cartouche sur les cigarettes vendues dans les boutiques hors taxe. Le projet de loi C-47 majore cette taxe de 1,50 $ environ.
Cette empiétement fiscal d'une industrie de détail qui était auparavant exempte de taxe s'effectue présumément pour réduire la consommation du tabac au Canada, surtout chez les jeunes.
¹ (1550)
Que faut-il reprocher à cette mesure? Beaucoup. Elle ne réduira en rien la consommation de tabac, surtout pas chez les jeunes. Elle n'y changera rien mais aura en revanche des effets secondaires très négatifs sur notre secteur, elle en modifiera le fondement ainsi que les principes à l'origine de la politique gouvernementale qui l'ont créée.
Pourquoi ne diminuera-t-elle pas la consommation de tabac au Canada? Pour commencer, les ventes de tabac dans les magasins hors taxe et hors droits ne représentent que 1,4 p. 100 des ventes de tabac au pays, ce qui n'est donc qu'une part de marché minuscule. Une grande partie de notre clientèle est constituée par des non-résidents de passage. Cette nouvelle taxe ne fera que les encourager à acheter leurs cigarettes aux boutiques hors taxe américaines. Je vous le demande: en quoi cela va-t-il améliorer la santé des Canadiens?
Ce prélèvement supplémentaire n'aura aucun effet sur la consommation du tabac par les jeunes. Très peu de voyageurs sont des mineurs non accompagnés, auxquels, du reste, nous ne vendons pas de tabac. C'est illégal. Notre autodiscipline passée en est garante.
Cette taxe supplémentaire n'aura aucun effet notable sur la consommation de tabac. Elle sera toutefois lourde de conséquences pour les établissements qui vendent en franchise de droits et de taxes ainsi que leurs fournisseurs et les localités où ils sont situés.
Voici comment. Les produits du tabac sont un des principaux articles de vente du secteur hors taxe. Ceux qui viennent acheter du tabac choisissent également d'autres articles comme des parfums, de l'alcool et des aliments, tous en franchise de droits et de taxes. La nouvelle taxe sur le tabac ne fera que réduire la fréquence des visites dans nos magasins.
Elle compromettra donc la viabilité de nos boutiques et, parallèlement, l'emploi, les recettes fiscales locales et fédérales, ainsi que les loyers tirés de ces recettes, qui contribuent au financement des postes frontaliers et, comme mes collègues l'ont dit, des aéroports.
Autre secteur touché: le tourisme. Nous avons dans nos magasins de grands panneaux qui affichent «hors taxe», mais ils sont aujourd'hui absurdes puisque ce n'est plus le cas. Dans un marché mondial du tourisme où la concurrence est vive, le Canada deviendra moins attirant. Les membres du comité n'ignorent sûrement pas les effets néfastes de la diminution du nombre de visiteurs étrangers.
Il faut aussi savoir qu'en Ontario les magasins hors taxe doivent obtenir l'autorisation de la régie des alcools pour pouvoir vendre vins, bières et spiritueux. Si elle le souhaitait, la régie de l'Ontario pourrait elle aussi invoquer la santé, imiter le gouvernement fédéral et imposer de nouvelles taxes de vente sur l'alcool.
Qui sera pénalisé par ce changement de cap? D'abord les vignerons ontariens. Par exemple, au magasin hors taxe du pont Ambassador à Windsor, nous sommes fiers de notre vaste choix de vins ontariens comme Pelee Island, Inniskillin, Hillebrand, Henry of Pelham, Reif, Point Northern, Pillitteri et Kittling Ridge. Une taxe sur ces produits du terroir dissuadera les acheteurs et ébranlera leur confiance et leurs attentes à l'endroit des magasins hors taxe.
En ce qui concerne la contrebande, lors des audiences du 6 juin 2001 du comité sénatorial des banques, M. Brian Willis, le chef principal de la division de la taxe de vente de la direction de la politique de l'impôt a été prié par le sénateur Banks d'expliquer la situation actuelle, c'est-à-dire la contrebande. M. Willis a répondu, et je cite: «Le secteur canadien des magasins hors taxe n'a pas été la source de contrebande. Il est rigoureusement contrôlé.» Fin de citation. Point à la ligne.
On ne peut donc pas invoquer la contrebande pour justifier l'imposition de taxes dans les magasins qui vendent en franchise de droits et de taxes.
¹ (1555)
J'ajouterai par ailleurs que cette décision a été prise sans respect pour la procédure établie. Il n'y a pas eu de débat de fond public sur les conséquences de l'imposition de cette taxe supplémentaire sur notre secteur et sur d'autres. Ce n'est pas ainsi qu'est censé fonctionner notre régime parlementaire. Ne doit-on pas évaluer toutes les conséquences d'une mesure avant de l'adopter? On a omis de le faire ici.
Le gouvernement fédéral met en péril tout un secteur sans qu'il y ait eu de moindre débat public. C'est une erreur que le comité devrait juger inacceptable.
Que faut-il faire? Nous aimerions qu'on supprime les passages du projet de loi qui incorporent les magasins en franchise de droits et de taxes au nouveau régime fiscal. Il faut amender le projet de loi. Il ne s'agit pas pour le comité de contester la politique gouvernementale de lutte contre le tabagisme et la contrebande mais plutôt de défendre le principe de la procédure établie et de conserver les magasins hors taxe si importants pour le tourisme canadien.
L'amendement du texte attirera l'attention des députés sur un projet de loi qui n'atteint pas son but—la réduction de la consommation du tabac et de la contrebande—mais qui par ricochet nuit à un secteur important, légitime, qui existe de longue date et qui a toujours observé intégralement les objectifs de la politique officielle.
Il y a des méthodes moins dommageables pour l'économie, pour lutter contre le tabagisme et la contrebande. Même si nous ne sommes pas un élément du problème, nous sommes prêts à être un élément de la solution. Par exemple, nous pourrions collaborer avec les autorités à la préparation d'une campagne d'information destinée à soutenir les grands objectifs du gouvernement.
La Canadian Transit Company est convaincue que nous pouvons ensemble trouver des moyens de lutter contre le tabagisme sans mettre notre secteur en péril ou supprimer les achats hors taxe.
En résumé, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité, cette taxe sur les boutiques hors taxe n'a au mieux qu'une valeur symbolique et ne vaut pas les nombreuses conséquences négatives qui n'ont pas été envisagées faute de débat public. La Canadian Transit Company et le magasin hors taxe du pont Ambassador recommandent l' élimination de cette taxe, ce qui, à notre avis, n'aura pas de conséquences néfastes sur les politiques ou l'image du gouvernement.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions et que je collaborerai avec les membres du comité.
º (1600)
La présidente: Merci.
Monsieur Messier, s'il vous plaît.
[Français]
M. Jean Messier (président-directeur général, Produits Ronald Inc.): Merci. Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de m'entendre aujourd'hui.
Je m'appelle Jean Messier et je suis président-directeur général d'une société qui s'appelle Produits Ronald Inc., qui est une filiale de Industries Lassonde, compagnie qui est principalement impliquée dans les jus de fruits. La compagnie Produits Ronald fabrique des produits alimentaires de spécialité. On est en affaires depuis 35 ans. Historiquement, notre secteur d'affaires était celui des légumes en conserve. On a conservé un peu de ce secteur d'affaires, qui était mou, et au début des années 1980, on s'est diversifiés dans la fabrication de bouillons et de sauces, principalement pour la fondue à l'époque, mais aussi d'autres sauces.
La liste des ingrédients de plusieurs de nos sauces et bouillons inclut du vin. On utilise le vin principalement pour ses propriétés reliées à sa saveur et à son arôme, mais pas pour l'alcool. Malheureusement pour nous, l'alcool vient avec le vin. Le procédé de transformation qui a lieu lorsque le vin ou les spiritueux sont intégrés à nos produits alimentaires élimine l'alcool, soit par dilution parce que le vin ou les alcools sont dilués avec beaucoup d'autres éléments, soit par la chaleur parce qu'il y a des traitements de chaleur qui font s'évaporer l'alcool. À la fin, nous avons un produit alimentaire qui contient un niveau d'alcool inférieur à 0,5 p. 100. C'est donc un produit alimentaire qui peut contenir des résidus d'alcool, mais à un niveau très bas.
La présente Loi sur l'accise nous impose une taxe qui s'applique principalement au vin chez nous et qui représente le tiers de notre coût. Donc, le tiers du coût du vin qu'on achète présentement est le montant de la taxe d'accise. Dans notre cas à nous, cela représente quelques dizaines de milliers de dollars de taxe d'accise qui sont versés chaque année pour ces produits au vin.
D'autre part, on fait face à la concurrence de produits alimentaires importés principalement de France, qui contiennent aussi du vin et qui ne sont pas frappés ou touchés par la taxe d'accise canadienne. On sait que ces produits ne sont pas non plus touchés par une taxe d'accise en Europe. Donc, pour nous, c'est en quelque sorte une concurrence déloyale à laquelle on ne peut rien faire.
La plupart des marchés où nous exportons présentement ou anticipons d'exporter ne prélèvent pas une telle taxe, et ceci rend difficile l'introduction de nos produits sur les marchés hors Canada.
La taxe que nous payons présentement diminue notre compétitivité ainsi que le développement potentiel de produits qui contiennent du vin et qui sont à forte valeur ajoutée, dans des créneaux qui sont présentement en pleine croissance.
Finalement, le but de mon intervention d'aujourd'hui est de nous assurer que la nouvelle loi C-47, à laquelle vous travaillez présentement, nous exemptera de la taxe d'accise sur les vins et spiritueux que nous utilisons dans l'élaboration de nos produits alimentaires. Nous vous demandons d'y ajouter une nouvelle dimension en disant que tous les produits alimentaires qui ont un résidu d'alcool en deçà du niveau qu'on pourrait appeler légal de 0,5 p. 100 sont automatiquement exemptés de la taxe d'accise. Cela nous permettra de poursuivre notre développement dans ce secteur de produits et de devenir plus compétitifs sur les marchés extérieurs.
Madame la présidente, je vous remercie de l'attention que vous portez à nos revendications. Merci.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Messier.
Monsieur Cunningham, vous avez la parole.
º (1605)
[Français]
M. Rob Cunningham (analyste principal de la politique, Société canadienne du cancer): Merci, madame la présidente. Au nom de la Société canadienne du cancer, merci de me donner aujourd'hui l'occasion de témoigner sur le projet de loi C-47.
C'est clair que la Société canadienne du cancer appuie les augmentations de taxes sur les produits de tabac qui sont incluses dans le projet de loi.
[Traduction]
Pourquoi? Parce que plus les taxes sur le tabac sont élevées plus la consommation du tabac baisse. Les effets nocifs pour la santé s'en trouvent réduits d'autant.
Nous avons préparé à l'intention du comité un rapport en sept volumes—303 onglets—intitulé en anglais «Compilation of Selected Evidence Regarding the Impact of Higher Tobacco Prices on Tobacco Use; A Submission Prepared for the House of Commons Standing Committee on Finance».
Je sais que pendant le débat en deuxième lecture on a discuté des effets de l'augmentation des prix, et cette compilation mondiale de faits a pour but dans notre esprit d'aider le comité dans l'examen du projet de loi, et pour l'avenir.
Comme il s'agit d'un examen rétrospectif des lois sur l'accise, je me demandais si le comité accepterait d'en faire une des pièces de ses délibérations.
La présidente: Volontiers. Vous pouvez le remettre à la greffière et ce sera considéré comme une pièce du dossier. Vous ne demandez pas que ce soit versé au compte rendu, n'est-ce pas?
M. Rob Cunningham: C'est juste.
La présidente: Très bien, c'est possible. Je pense que tout le monde a poussé un soupir de soulagement.
M. Rob Cunningham: Nous avons remis aux membres du comité une carte qui illustre les prix et les taxes dans les provinces et territoires du Canada ainsi que dans les États frontaliers américains. On constate qu'il y a eu des progrès et nous félicitons le gouvernement ainsi que tous ceux—ils sont nombreux—qui ont appuyé au Parlement l'augmentation des taxes sur le tabac ces dernières années.
C'est en Ontario et au Québec que le prix des cigarettes est le plus bas en Amérique du Nord: environ 42 ou 43 $ la cartouche. C'est moins que le prix le plus bas aux États-Unis, au Kentucky, l'Etat du tabac. Il sera possible de faire encore des progrès dans ce domaine et déjà en 2002 les taxes sur le tabac ont augmenté en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan, à Terre-Neuve, en Nouvelle-Écosse et dans l'Île-du-Prince-Édouard. Une augmentation semblable a aussi été annoncée dans le budget du Yukon pour le 1er juin.
Nous sommes en faveur de l'augmentation de la taxe sur le tabac à rouler. Il y a toutefois une échappatoire puisque le consommateur peut se procurer du tabac à rouler pour la moitié du prix d'une cartouche de cigarettes. Cela s'explique par les stratégies toujours novatrices des compagnies de tabac. En effet, elles donnent plus de volume au tabac à rouler, de sorte qu'il en faut moins par cigarette, ce qui réduit la taxe à acquitter. Même si nous sommes en faveur de cette augmentation, il reste des mesures à prendre. Certaines provinces en ont pris pour combler cette lacune, contrairement au gouvernement fédéral.
Nous voulons aussi que soient réduites ou éliminées les lacunes concernant les bâtonnets de tabac.
Nous appuyons la taxe à l'exportation que prévoit le projet de loi et qui a été majorée le 1er novembre 2001.
J'aimerais aussi apporter quelques précisions au sujet des boutiques hors taxe, dont il a été question aujourd'hui.
La Société canadienne du cancer et les professionnels de la santé du pays souhaitent depuis longtemps que l'on cesse de vendre en franchise de droits des produits du tabac dans les magasins hors taxe. Des prix plus élevés font diminuer la consommation. Peut-être le volume de ventes des produits du tabac est-il faible dans les boutiques hors taxe; il reste néanmoins que 45 000 Canadiens meurent chaque année du tabagisme. Une petite réduction de la consommation a un effet disproportionnément grand.
Chose plus importante encore, la taxe à l'exportation ajoutée à la taxe imposée aux magasins hors taxe est une mesure très importante de lutte contre la contrebande. Au début des années 90, lorsque celle-ci était particulièrement virulente, des milliards de cigarettes censément destinées aux boutiques hors taxe des États-Unis et du Canada ne sont jamais arrivées à destination. Elles ont abouti entre les mains de contrebandiers et sur le marché américain.
En s'assurant que l'on ne prête pas le flanc...même avec les meilleures intentions du monde et même si les commerçants respectent scrupuleusement la loi, il y a un risque de contrebande massive et c'est exactement ce qui s'est produit au début des années 90. C'est pourquoi il est question aujourd'hui d'un traité international, la Convention-cadre de lutte contre le tabagisme, qui interdirait partout dans le monde la vente du tabac dans les boutiques hors taxe. Il faudra attendre des années pour que ces négociations aboutissent.
Mais déjà dans la Communauté européenne, sur un vol Paris-Londres, par exemple, on ne peut plus acheter de produits du tabac en franchise de droits. Cela n'existe plus mais les magasins existent toujours.
On nous a dit que 1,4 p. 100 des produits du tabac au Canada sont vendus dans des boutiques hors taxe. Si la totalité des taxes étaient perçues, cela représente plus de 80 millions de dollars par an. Cela fait beaucoup d'argent qui pourrait servir à autre chose, que ce soit pour alléger les impôts, réduire la dette ou financer des programmes. Pourquoi une catégorie particulière de magasins devrait-elle jouir d'un traitement de faveur—une subvention en quelque sorte—par rapport aux dépanneurs et autres détaillants qui vendent des produits du tabac? Pour beaucoup de gens, c'est injuste.
º (1610)
Étant donné que l'augmentation du prix du tabac a des objectifs liés à la santé, je réitère aujourd'hui notre appui sans réserve pour ce projet de loi qui permettra de réduire l'écart encore important constaté dans l'imposition des produits vendus dans les boutiques hors taxe par rapport aux autres.
Je remercie encore une fois le comité de nous avoir permis de présenter nos vues aujourd'hui. Je répondrai très volontiers à vos questions.
La présidente: Merci.
Nous commençons la première série de questions avec M. Kenney. Chacun disposera de huit minutes.
M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente, et merci aux témoins d'être venus aujourd'hui.
Mes premières questions s'adressent à Mme Kendall et à M. Mancini qui représentent les exploitants de boutiques hors taxe. Je dois avouer mon ignorance: vous avez tous les deux parlé de «cette taxe», et je ne sais trop de quoi il s'agissait. Le projet de loi C-47 prévoit-il une nouvelle taxe sur les produits du tabac et les autres produits vendus dans les boutiques hors taxe?
M. Remo Mancini: Oui.
Me Kathy Kendall: Oui, une taxe de 1,50 $ s'ajoutera à la taxe de 10 $ la cartouche de cigarettes.
M. Jason Kenney: J'essaie de bien saisir la chronologie des événements. Ce projet de loi a bien été présenté le 5 avril 2001, n'est-ce pas?
M. Remo Mancini: Je veux aussi m'assurer que nos informations sont justes. La taxe est passée de zéro à 10 $; à cela, s'ajoutera 1,50 $.
M. Jason Kenney: Je comprends. Autrement dit, la cartouche coûtera 1,50 $ de plus que si elle était achetée chez le dépanneur?
M. Remo Mancini: Non. Notre secteur, qui est sous strict contrôle, a été créé par une politique gouvernementale pour permettre aux touristes qui quittent le pays d'acheter des produits en franchise de droits et de taxes. C'est de ce principe dont il s'agit ici.
Nous sommes en fait très étonnés que cette politique, qui, à mon sens, dessert bien notre pays, soit modifiée. Qu'il s'agisse de tabac, d'alcool, de parfum—l'un ou l'autre des milliers de produits vendus dans les boutiques hors taxe—quel que soit le produit, nous vous demandons de préserver notre secteur car il fait bien son travail.
Le gouvernement a déclaré ouvertement que le tabac n'est que le premier d'une série de produits dont il veut réduire la consommation et la contrebande. Cela laisse le champ libre aux autres gouvernements qui voudraient adopter des politiques semblables. J'ai fait mention de la Régie des alcools de l' Ontario; elle pourrait faire valoir le même argument, même s'il était sans fondement. Ensuite, les personnes allergiques au parfum ou à d'autres produits pourraient emboîter le pas.
Nous ne sommes donc pas ici au sujet du tabac; nous sommes ici pour défendre un principe.
º (1615)
M. Jason Kenney: Y a-t-il des produits autre que le tabac qui seront touchés par cette mesure?
M. Remo Mancini: Non, monsieur.
M. Jason Kenney: M. Cunningham a posé une question de pure forme, celle de savoir pourquoi une catégorie de magasin devrait être exemptée d'une taxe qui est appliquée universellement. Que répondez-vous à cela, brièvement?
M. Remo Mancini: C'est une politique gouvernementale. Le gouvernement du Canada, sous différentes administrations, sous différents partis politiques, a fait sien le principe des boutiques hors taxe pour la vente de produits destinés à l'exportation.
M. Jason Kenney: Mais quel est le principe qui a inspiré cette politique? Ainsi, vous avez dit qu'en Europe, au sein de l'Union européenne, les produits du tabac sont exempts de taxes. N'y a-t-il plus de boutiques hors taxe en Europe?
M. Remo Mancini: Il n'y a pas de boutiques hors taxe entre l'Ontario et le Québec ou entre le Québec et les autres provinces. L'Union européenne est dirigée par le Parlement européen; le Canada, qui a pour voisin les États-Unis, est un pays indépendant et souverain. On ne peut comparer la situation européenne à celle de l' Amérique du Nord.
M. Jason Kenney: J'ai deux ou trois questions pour M. Cunningham, de la Société du cancer. Que nous prouvent les données sur le rapport qui existe entre les prix du tabac et la contrebande? D'après les données, à quel niveau de prix commencerait-on à connaître de sérieux problèmes de contrebande au Canada?
M. Rob Cunningham: Je crois que si, en Ontario et au Québec, les prix étaient les mêmes que dans l'Ouest, il n'y aurait pas d'augmentation importante de la contrebande, en raison des mesures anti-contrebande qui existent. En l'absence de ces mesures, ce serait toute autre chose si les fabricants pouvaient faire ce qu'ils faisaient au début des années 90, soit exporter des quantités considérables dans le nord de l'Etat de New York sachant que ces produits rentreraient en contrebande au Canada. Mais grâce à ces mesures anti-contrebande, qui ont été adoptées dans un projet de loi précédent et dont nous reconnaissons les effets, une autre augmentation serait possible.
M. Jason Kenney: Ma dernière question est en deux volets. Premièrement, quel est le taux de tabagisme chez les jeunes au Canada actuellement en comparaison à ce qu'il était il y a deux ou trois décennies?
M. Rob Cunningham: Je vous ferai parvenir les statistiques complètes.
M. Jason Kenney: Le taux a-t-il baissé ou augmenté?
M. Rob Cunningham: Pendant la première moitié de 2001, 23 p. 100 des adolescents de 15 à 19 ans fumaient. En 1994-1995, après la baisse des taxes sur le tabac, plusieurs études...
M. Jason Kenney: Ce n'était pas ma question. Je voulais savoir...
M. Rob Cunningham: Si on compare le taux actuel à celui d'il y a 20 ou 30 ans, il a beaucoup baissé. Je ne connais pas le chiffre exact, mais il est de l'ordre de 45 p. 100, je crois. Je peux vous faire parvenir ces chiffres.
M. Jason Kenney: Affirmeriez-vous qu'il y a une corrélation évidente entre l'augmentation des prix du tabac et la baisse du tabagisme chez les jeunes?
M. Rob Cunningham: Oui.
M. Jason Kenney: Certains diront que ma question est ridicule, mais c'est une corrélation qui est remise en question par l'industrie du tabac qui, elle, laisse entendre que c'est plutôt le contraire.
M. Rob Cunningham: Oui, en effet. Mais l'industrie du tabac met en doute beaucoup de choses, y compris le fait que le tabac entraîne des problèmes de santé. Les preuves sont nombreuses et sont incluses dans le mémoire que j'ai déposé aujourd'hui.
M. Jason Kenney: Merci.
La présidente: Monsieur Loubier, vous avez dix minutes.
[Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe--Bagot, BQ): Merci. Je n'ai qu'une question à poser, madame la présidente. J'aimerais que M. Messier précise le problème qu'a à vivre son entreprise et comment on pourrait corriger la situation à partir du projet de loi C-47.
M. Jean Messier: Dans le projet de loi C-47, on mentionne déjà que les produits alimentaires, sur approbation du ministre, pourraient être exemptés de la taxe d'accise sur les alcools qui sont inclus dans les produits alimentaires. Comme je vous le dis, cela fait 15 ans qu'on paie de la taxe d'accise sur nos produits et ça fait plusieurs fois qu'on est déboutés après avoir fait appel au ministère.
Pour nous, c'est inacceptable parce que les produits alimentaires ne sont pas normalement touchés par la taxe d'accise. On vous suggère donc d'ajouter un premier élément qui exempterait de la taxe d'accise tous les produits alimentaires contenant moins de 0,5 p. 100 d'alcool résiduel. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de produits alimentaires qui contiennent plus de 0,5 p. 100 d'alcool. Cela existe déjà et c'est prévu dans la loi. Par exemple, il y a le chocolat. Chacun connaît les chocolats contenant des liqueurs. Ces chocolats contiennent beaucoup plus que 0,5 p. 100 d'alcool, mais il est inscrit dans la loi que ces produits ne sont pas des produits alcoolisés et ne sont donc pas assujettis à la taxe d'accise. Donc, il y a deux éléments.
On travaille présentement avec des produits qui contiennent tous moins de 0,5 p. 100 d'alcool, mais on pourrait éventuellement produire une sauce de type madère qui pourrait contenir 2 p. 100 d'alcool. Je ne pense pas qu'une telle sauce devrait être un produit alcoolisé assujetti à la taxe d'accise. Selon ma compréhension du texte de loi, cela devrait être dans la partie où on dit que le ministre devrait approuver un procédé. Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
º (1620)
M. Yvan Loubier: Est-ce que vous ou votre compagnie avez déjà fait des recommandations auprès du gouvernement ou du ministre des Finances dans ce dossier, ou si c'est la première fois que vous le faites?
M. Jean Messier: C'est la première fois. On a peut-être été un peu lents à le faire, mais on s'est adressés plus tôt au niveau du ministère. On pensait que notre cas était légitime, mais finalement, après analyse, on a eu des interprétations négatives du ministère en ce sens que, selon la loi actuelle, il ne semble pas possible qu'on nous exempte de la taxe d'accise.
M. Yvan Loubier: Vous n'êtes probablement pas les seuls dans cette situation.
M. Jean Messier: À ma connaissance, il y a très, très peu d'entreprises canadiennes comme la nôtre qui utilisent du vin dans les produits alimentaires surtout pour sa saveur, ses arômes, etc. Lorsqu'il y en a, comme dans le cas du chocolat, c'est prévu. On peut même penser au vinaigre, parce que le vinaigre est un produit alcoolisé. Par contre, le vinaigre est présentement dans la loi.
Donc, il y a une faille. Il semble qu'on n'ait pas pensé que les produits alimentaires puissent contenir de l'alcool. Vu que ce n'est pas prévu dans la loi, lorsqu'on achète cet alcool, on est taxés.
M. Yvan Loubier: Merci.
M. Jean Lalanne (consultant spécialiste en agroalimentaire, Produits Ronald Inc.): Si vous me le permettez, monsieur Loubier, j'aimerais ajouter que dans cette démarche, nous avons demandé leur avis à différents intervenants. Nous avons des lettres d'appui de la Société des alcools du Québec, de fabricants de vins québécois qui sont des fournisseurs des Produits Ronald Inc., ainsi que d'associations de producteurs alimentaires canadiennes et québécoises qui appuient la demande des Produits Ronald Inc. d'éliminer cette taxe d'accise sur les vins qu'on utilise à des fins de transformation.
M. Yvan Loubier: Je vous remercie.
[Traduction]
La présidente: Je cède la parole à M. Pillitteri qui sera suivi de M. Wilfert.
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
Soyez les bienvenus et merci de nous avoir présenté vos remarques.
Je suis probablement le député le plus vieux jeu au sein de ce comité. La taxe d'accise sur le tabac ne m'a pas empêché de commencer à fumer à l'âge de10 ans et de continuer jusqu'à 50 ans. J'imagine que je me suis alors assagi. J'aurais les moyens de fumer aujourd'hui, ce n'est donc pas le prix qui m'en empêche. Par conséquent, j'estime que nous devrions consacrer plus de fonds à sensibiliser la population aux méfaits du tabac plutôt que de discuter de l'effet sur le prix de la taxe d'accise.
Pour ma part, madame la présidente, j'estime que le ministère des Finances aurait pu faire mieux dans son imposition des taxes d'accise sur le tabac et les spiritueux, car toutes les boutiques hors taxes du pays servent de point d'exportation des produits canadiens. On ne devrait donc pas les traiter différemment des autres entreprises qui exportent du Canada des spiritueux, de la bière ou même du tabac.
Nous devrions sensibiliser le monde entier, car les boutiques hors taxes se trouvent aux points de sortie, là où les gens s'apprêtent à quitter le pays. D'ailleurs, on a souvent dit que c'était des boutiques de dernier recours pour ceux qui ont trop d'argent canadien qui sont alors heureux de pouvoir le dépenser dans une boutique hors taxes.
Ce n'est donc pas une mauvaise chose. On pourrait même dire que le tourisme est un secteur d'exportation, et le traiter comme tel.
Je comprends qu'il nous ait fallu adopter des lois pour lutter contre la contrebande, mais on devrait peut-être faire davantage en matière d'application de la loi.
Lorsque j'étais dans l'agriculture, il y a des années, il y avait des encans de tabac où des pays étrangers venaient acheter du tabac en franchise de taxes. Je crois qu'il en est encore ainsi. Si on vend du tabac à un encan et que des pays étrangers l'achètent, je ne crois pas que ce tabac soit imposé. Si nous voulons être réalistes, nous devons reconnaître qu'il n'y a pas de différence. Je comprends qu'on veuille conscientiser la population canadienne, mais c'est une question de consommation intérieure.
J'aimerais vous poser deux ou trois questions.
º (1625)
Monsieur Cunningham, croyez-vous que nous devrions sensibiliser les gens aux méfaits du tabac à l'extérieur du pays ou seulement au Canada?
Pourquoi tenez-vous tant à imposer cette taxe...est-ce qu'il y a cette différence entre le Canada et les États-Unis?
M. Rob Cunningham: S'agissant d'une stratégie de réduction du tabagisme, nous appuyons une stratégie exhaustive comprenant des volets législatif, fiscal et d'éducation du public.
La sensibilisation aux méfaits du tabac sur la santé pourrait comprendre, et comprend d'ailleurs, les avertissements qui figurent sur les paquets de cigarettes. Pour ce qui est de ce que nous faisons à l'étranger, le gouvernement canadien a été le chef de file dans les négociations qui ont mené au traité international et dans la promotion d'une norme minimale mondiale quant à la taille des avertissements et l'utilisation de photos. Nous appuyons aussi les programmes de conscientisation dans les écoles.
Nous sommes aussi en faveur de taxes plus élevées sur les produits du tabac, car c'est clair, sans équivoque, sans aucun doute: c'est un élément extrêmement important de toute stratégie visant à réduire le tabagisme, surtout chez les jeunes pour qui le prix compte, car ils ont moins d'argent.
M. Gary Pillitteri: Je vois.
À une certaine époque, notre secteur du tabac était prospère; de nos jours, avec toutes ces taxes, le secteur a du mal même à se diversifier. Je ne crois pas...il faut essayer d'influer sur la consommation au pays. Oui, faisons l'impossible pour amener les Canadiens à cesser de fumer. Après tout, nous en faisons tous les frais quand vient le temps de payer les soins de santé. Mais à l'étranger, c'est une autre paire de manches.
S'il y a 1,2 million de Chinois ou de Japonais qui ne sont pas prêts à cesser de fumer, nous n'allons pas nous immiscer dans leurs affaires. Cela relève de leur propre gouvernement, de leurs propres politiques. Il ne nous incombe pas à nous de les sensibiliser aux méfaits du tabac.
Moi, voyez-vous, je préconise la libre entreprise et j'estime que nous devrions considérer les boutiques hors taxes comme des points d'exportation de nos produits. Elles ne devraient pas être traitées différemment des autres entreprises et je crois que nous compromettons leur capacité de survie. Souvent, ces boutiques sont situées dans des endroits où elles rapportent des sommes considérables en impôt sur le loyer.
C'était là mes remarques.
La présidente: Merci.
Monsieur Wilfert, allez-y. Vous avez huit minutes.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Madame la présidente, je remercie les témoins d'être venus nous rencontrer. J'avoue que je ne fume pas, bien qu'à l'occasion je m'accorde un cigare, je le reconnais. On ne parle pas des cigares dans le projet de loi, mais je voulais simplement vous le dire...
Je dois dire que je suis un peu étonné par la réponse. En fait, je suis plus qu'étonné. La première lecture du projet de loi remonte à décembre. La deuxième lecture a eu lieu avant la fin de mars. D'après ce que j'entends, il y a une énorme contradiction entre le fait que le projet de loi est à l'étude depuis plusieurs mois et le fait que c'est aujourd'hui que vous venez nous dire que vous êtes très déçus, ce que je trouve difficile à comprendre.
Enfin, indépendamment de cette procédure, vous vous préoccupez de ces 10 $. Je sais qu'en avril 2001 le gouvernement a annoncé une stratégie globale incluant une augmentation des taxes sur le tabac. Ensuite, le 1er novembre, nous avons annoncé de nouvelles hausses généralisées avec plusieurs provinces. Et bien que l'avantage fiscal des boutiques hors taxes par rapport aux magasins de détail n'ait diminué dans aucune province ou territoire, il a manifestement augmenté dans plusieurs provinces. Mais si vous êtes un voyageur étranger que vous faites vos courses dans une boutique hors taxes, vous obtenez un remboursement, non? Si une boutique hors taxes vend des marchandises à un voyageur étranger, ne se fait-elle pas rembourser les droits qu'elle a payés?
º (1630)
M. Remo Mancini: Par pour les cigarettes canadiennes.
Me Kathy Kendall: Or, c'est la grande majorité du marché.
Si vous me permettez de répondre à votre remarque quand vous dites que nous donnons l'impression d'être très déçus, nous avons en fait comparu devant un comité sénatorial en juin dernier...
M. Remo Mancini: Il y a un an.
Me Kathy Kendall:Oui, au début de... Donc ce n'est pas la première fois que nous essayons de soulever cette question.
M. Bryon Wilfert: Bon, mais même si vous avez déja comparu devant un comité sénatorial, il reste que vous êtes au courant de cette situation depuis longtemps. Or, d'après ce que vous avez l'air de dire, vous avez l'impression que le gouvernement vient de vous imposer cela soudainement, alors que ce n'est pas du tout mon impression. J'ai l'impression que vous en avez discuté avec le ministère des Finances. Vous n'avez peut-être pas été satisfaits des réponses que vous avez obtenues...
Me Kathy Kendall: Avant la mise en oeuvre du projet de loi? Non. Non, monsieur.
M. Bryon Wilfert: Moi non plus, je n'aime pas toujours les réponses que me donne le ministère des Finances, mais il y a tout de même eu toute une procédure.
Me Kathy Kendall: Nous avons été invités à discuter avec le ministère des Finances avant l'adoption du projet de loi en avril. Lors de ces discussions, on ne nous a absolument pas laissé entendre qu'on imposerait des droits sur les produits du tabac canadiens ou d'autres produits du tabac hors taxes. Ces entretiens se déroulaient dans le contexte des initiatives de l'Organisation mondiale de la santé en vue d'abolir la vente de tabac hors taxes dans un certain nombre d'années.
M. Bryon Wilfert: Bon, je ne vais pas discuter de cela. Je voudrais en revenir à ma question de tout à l'heure, par l'intermédiaire de la présidente. Si je suis un voyageur étranger et que j'achète des cigarettes canadiennes dans une boutique hors taxes canadienne, vous me dites qu'il n'y a pas de remboursement?
M. Remo Mancini: Non. C'est exact.
Me Kathy Kendall: C'est exact, car la taxe est imposée au niveau du fabricant. Ce n'est pas une taxe que perçoivent les boutiques hors taxes.
M. Bryon Wilfert: Sur le tabac étranger.
Me Kathy Kendall: À part le tabac étranger.
M. Bryon Wilfert: Vous avez un remboursement pour le tabac étranger. Et si vous avez une boutique hors taxes, vous avez aussi un remboursement si vous vendez du tabac étranger.
Me Kathy Kendall: Nous avons un remboursement pour le tabac étranger si nous pouvons prouver qu'il a été vendu à quelqu'un qui ne réside pas au Canada. Il est difficile de savoir comment on peut le prouver étant donné que les permis de conduire et les passeports ne sont pas nécessairement une preuve de résidence. Franchement, je ne connais pas une seule boutique hors taxes d'aéroport qui s'estime en mesure de s'imposer toute la paperasserie exigée par le gouvernement pour obtenir ce remboursement.
M. Remo Mancini: Les boutiques des frontières terrestres ont la solution. Nous récupérons notre argent...
Me Kathy Kendall: Parce qu'il y a les automobiles.
M. Bryon Wilfert: C'est bien ce qu'il me semblait.
M. Remo Mancini: Nous pouvons obtenir les numéros de plaque d'immatriculation et d'autres preuves d'identité. Je vous remercie de cette question.
Le problème, c'est que notre industrie a été créée dans un but bien précis: servir une frange très étroite du marché qu'on appelle le public voyageur. Le principe fondamental de notre activité consistait à attirer les voyageurs qui quittaient le pays pour les inciter à faire des achats en vue de l'exportation uniquement.
Imaginez un peu la situation. En général, plusieurs personnes voyagent ensemble. Souvent, vous avez un groupe ou une famille ou même un autocar. Ce sont des gens qui repartent chez eux. Ils s'arrêtent à une boutique hors taxes. Ils peuvent profiter de toutes sortes de services mis à leur disposition. Ils peuvent utiliser les locaux. Ils peuvent changer de l'argent. Ils peuvent se servir de machines bancaires. Dans certains cas, il y a même des télécopieurs à leur disposition, etc. Il y a tout cela.
On met en place tout cet environnement pour inciter ces personnes qui ont visité notre pays à faire une dernière contribution à notre économie. Et c'est cela qu'on nous a demandé de faire. Je crois que nous l'avons bien fait. Je crois que nous l'avons remarquablement bien fait. Nos boutiques hors taxes aux frontières terrestres sont du plus haut calibre. J'en ai visité dans de nombreux pays, et nous avons de quoi être très fiers.
º (1635)
M. Bryon Wilfert: Sauf votre respect, là n'est pas la question.
M. Remo Mancini: Mais si. C'est bien cela la question.
M. Bryon Wilfert: Sauf votre respect, ce n'est pas la question à mon avis car personne ne conteste la qualité remarquable de votre activité. J'ai pu la constater moi-même.
M. Remo Mancini: Enfin, j'arrivais au point suivant. Non seulement nous avons des installations d'une qualité remarquable, mais nous appliquons les normes les plus rigoureuses possibles pour lutter contre la contrebande, comme l'ont dit vos propres fonctionnaires. Nous avons réussi notre mission.
Nous avons fait tout ce que le gouvernement nous avait demandé. Nous avons exploité ce créneau et créé une industrie à partir de rien, et c'était une bonne idée. Ce qui nous inquiète, c'est qu'on nous amalgame à certains de vos autres objectifs auxquels nous n'avons pas d'objections.
En imposant la taxe sur le tabac, on a largement ouvert la porte. Voici ce qu'on a dit pour la Régie des alcools de l'Ontario et je vais parler de l'Ontario par égard à toutes les autres personnes dans cette salle car ce sont les règlements de l'Ontario que je connais le mieux. Que quelqu'un vienne soutenir que l'alcool est nuisible à la santé. Que quelqu'un vienne affirmer qu'il y a de la contrebande d'alcool parce qu'on a besoin d'une taxe de 10 $ sur toutes les bouteilles de vin et d'alcool produites au Canada.
J'ai peur que ce soit dans cette direction-là que nous nous engagions. C'est vraiment là-dessus que porte notre objection.
M. Bryon Wilfert: Franchement, je n'ai pas l'impression que l'on s'engage dans cette direction.
Mais ma dernière question...
M. Remo Mancini: Mais, très respectueusement, vous ne pouvez pas empêcher le gouvernement de l'Ontario de...
M. Bryon Wilfert: Non, nous ne le pouvons pas.
M. Remo Mancini: Mais vous lui avez montré la voie.
M. Bryon Wilfert: Pourriez-vous fournir à notre comité des données détaillées démontrant les effets nuisibles selon vous, pour les magasins hors taxes, malgré que vous ayez déjà un avantage fiscal par rapport aux autres magasins normaux?
M. Remo Mancini: Pourrai-je dire un mot sur cette question avant de passer la parole à Kathy?
J'ai du mal à comprendre quand j'entends dire que nous bénéficions d'un avantage. Notre industrie ne bénéficie pas d'avantages. Ces règles ont été imposées à l'ensemble du secteur hors taxes—les magasins hors taxes dans les aéroports et les magasins hors taxes aux postes frontières. Je ne bénéficie d'aucun avantage par rapport à l'exploitant d'un magasin hors taxes à Sarnia ou aux exploitants de magasins hors taxes à la frontière du Québec avec les États-Unis. Nous n'avons pas d'avantage. Nous sommes un secteur par nous-mêmes et nous faisons ce que vous demandez de faire. Donc, en continuant à dire que nous sommes avantagés, en fait vous critiquez votre propre politique.
Si c'est l'objectif recherché, il faudrait alors le dire, dire que nous avions un secteur hors taxes dont nous étions fiers, mais que nous n'en voulons plus—merci beaucoup et au revoir. Mais de la manière dont se passent les choses actuellement, c'est comme si vous nous laissiez flotter dans le vide.
M. Bryon Wilfert: Quel avantage ai-je à acheter des cigarettes, du vin ou quoi que ce soit d'autre à un magasin hors taxes par rapport à un simple magasin?
Me Kathy Kendall: J'aimerais vous donner des chiffres précis, du moins pour The Nuance Group, sur les dégâts provoqués par cette taxe.
M. Bryon Wilfert: Et vous avez communiqué ces chiffres au ministère des Finances?
Me Kathy Kendall: Oui.
M. Bryon Wilfert: Quand les leur avez-vous communiqués?
Une voix: Le 9 décembre, je crois.
Me Kathy Kendall: Ce sont les chiffres pour The Nuance Group. Avant de vous donner ces chiffres, je tiens à dire qu'il faut bien comprendre une distinction importante à faire à propos de la contrebande, car je comprends très bien les inquiétudes. Il y a une différence entre les fabricants de tabac et les exploitants de magasins hors taxes. S'il y a des problèmes de contrebande au niveau des fabricants de tabac, ne vous gênez surtout pas pour essayer de trouver une solution, mais on doit sûrement pouvoir en trouver une qui n'entraînera pas de conséquence dommageable pour les exploitants de magasins hors taxes et leurs employés.
Nous employons plus de 700 personnes. Nos ventes de tabac ont chuté de 41 p. 100. Nos ventes d'alcool, qui représentent 30 p. 100 de notre chiffre d'affaires, soit dit en passant, ont diminué de plus de 10 p. 100. Ce sont des catégories très importantes pour nous. Il n'y a pas que le tabac, il y a les autres marchandises que nous vendons en même temps.
Comme je viens de vous le dire, The Nuance Group emploie 700 personnes. Les conséquences vont se faire sentir et se font sentir à ce niveau. Si le problème c'est la contrebande, attaquez-vous à ce problème, s'il vous plaît au niveau des fabricants et non pas aux dépens des exploitants, de leurs employés et de leurs familles. On doit sûrement pouvoir trouver un autre moyen.
La présidente: Merci.
Monsieur Cullen, huit minutes, s'il vous plaît.
º (1640)
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, madame la présidente.
Mesdames et messieurs nos témoins, merci. J'avais une ou deux petites questions à vous poser mais j'aimerais commencer par vous en poser une qui fait suite à celle de M. Wilfert. Si vous avez des données qui montrent que vos ventes ont chuté, pouvez-vous démontrer que cette chute est due à ces mesures plutôt qu'à une diminution du nombre de voyageurs?
Me Kathy Kendall: Les chiffres que j'ai cités, monsieur, correspondent à ceux de janvier à la fin mars, d'une année sur l'autre. Ils ne prennent donc pas en compte les effets du 11 septembre. En janvier, à quelque pour cent près nous étions revenus à notre nombre habituel de voyageurs. Les chiffres que je vous ai donnés ne couvrent pas les 12 mois de l'année.
M. Roy Cullen: Ce n'est pas ce que j'ai cru comprendre. J'ai cru comprendre que le volume de passagers a bien repris, mais qu'il n'est pas encore ce qu'il était, n'est-ce pas?
Me Kathy Kendall: Pas encore, mais dans une proportion de 10 p. 100 à peine.
M. Roy Cullen: C'est moins que ce que m'ont dit les responsables de l'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto.
Pour revenir à l'argument de M. Wilfert, vous avez très bien démontré, M. Mancini, l'importance des magasins hors taxes et leur raison d'être. Mais n'est-il pas vrai que si je suis un visiteur qui rentre à Détroit et que je veux acheter une cartouche de du Maurier, cela me coûte toujours moins cher de l'acheter chez vous que de l'acheter au A&P local, toutes choses étant égales?
M. Remo Mancini: Je ne suis pas sûr de comprendre...
M. Roy Cullen: Pourriez-vous répondre à ma question?
M. Remo Mancini: Oui, monsieur, c'est exact.
Me Kathy Kendall: Pas tellement. Je veux dire que nous n'avons pas le pouvoir d'achat d'un magasin Costco, donc il y a une différence dans le prix des marchandises qu'on achète aux fabricants. Il est moins élevé mais pas tellement que les gens sont.... Il y a une limite que l'on ne va pas dépasser pour économiser 2 $.
M. Roy Cullen: Oui, mais si je quitte le pays, si je suis à un aéroport, plutôt que de transporter une cartouche, c'est quand même plus facile de l'acheter à l'aéroport. N'est-ce pas vrai dans certains cas?
Me Kathy Kendall: Je dirais qu'il est plus pratique de l'acheter avant pour pouvoir la mettre dans ses bagages, pour les deux 2 $ de plus que cela coûte, au lieu d'avoir à la transporter dans l'aéroport.
M. Roy Cullen: D'accord.
J'aimerais passer maintenant à une ou deux autres questions. Est-ce que ces mesures ont touché différemment les magasins hors taxes aux postes frontières et les magasins hors taxes dans les aéroports? Est-ce que vous les représentez tous?
M. Remo Mancini: Non, je représente la Canadian Transit Company et le magasin hors taxes Ambassador du poste frontière de Windsor. Je me suis joint à mes collègues qui représentent le secteur hors taxes dans les aéroports.
M. Roy Cullen: Oh, ils représentent les magasins dans les aéroports et vous ceux aux postes frontières.
M. Remo Mancini: Oui.
M. Roy Cullen: Comment devient-on exploitant d'un magasin hors taxes? Est-ce qu'il faut un permis du gouvernement, comment cela marche-t-il?
M. Remo Mancini: Je vous parlerai de l'Ontario parce que je connais les règles de cette province. Il faut deux permis. Il faut un permis du ministère du Revenu national, et une lettre d'autorisation de la Régie des alcools de l'Ontario. Il faut donc deux autorisations pour ouvrir un magasin hors taxes.
M. Roy Cullen: Donc, que vous faut-il du gouvernement fédéral?
M. Remo Mancini: Un permis.
M. Roy Cullen: Ce permis est valable pour combien de temps?
M. Remo Mancini: Généralement cinq ans.
M. Roy Cullen: Et généralement il est renouvelé, ou...
M. Remo Mancini: Généralement il est renouvelé à moins qu'il y ait un problème quelconque. Mais le bilan de notre industrie est excellent. Nous sommes très fiers du comportement, de l'histoire et de ce que nous avons pu réaliser dans le cadre des directives et des paramètres qui nous sont imposés et qui, j'ajouterais, sont très stricts.
M. Roy Cullen: Merci.
C'est tout pour moi.
La présidente: Quelqu'un à d'autres questions?
Au nom du comité, j'aimerais remercier tous nos témoins d'aujourd'hui. Nous vous savons gré du temps que vous nous avez consacré. Nous réexaminerons vos observations en juin.
Merci beaucoup. La séance est levée. Nous nous retrouverons ici même demain à 11 h 30.