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Merci, monsieur le président.
Bonjour et merci de me permettre de me présenter devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
J'aimerais aujourd'hui vous donner une vue d'ensemble du mandat de l'Agence canadienne d'inspection des aliments en ce qui concerne les technologies de restriction de l'utilisation des ressources génétiques, ou TRURG. Vous avez également mentionné la technologie « Terminator ». Mon collègue, Glyn Chancey, et moi ferons de notre mieux pour répondre ensuite à vos questions.
L'ACIA, qui est l'organe de réglementation canadien à vocation scientifique le plus important, est chargée de la mise sur pied de politiques de réglementation et de la réalisation de tous les programmes fédéraux relatifs à la salubrité des aliments, la protection des végétaux et la santé des animaux. Dans le cadre de son mandat, l'ACIA réglemente la dissémination dans l'environnement des végétaux issus de la biotechnologie. Ceux-ci font partie de la vaste catégorie dénommée végétaux à caractères nouveaux, à laquelle appartiennent également les végétaux à caractères issus de TRURG.
Les TRURG sont un type de technologie du génie génétique. En théorie, les TRURG permettent de restreindre soit l'utilisation d'une variété végétale soit l'expression d'un caractère particulier d'une variété végétale, comme si l'on activait ou désactivait un interrupteur génétique.
D'après ce que nous savons, il existe pour l'instant deux types de TRURG. L'un, celui qui est peut-être le plus controversé, contrôlerait la germination des semences. On parle alors parfois de la technologie « Terminator », que vous avez mentionnée. L'autre type, que l'on ignore en fait souvent, permettrait à un végétal d'exprimer des caractères particuliers — par exemple la résistance à la sécheresse ou de meilleures qualités nutritionnelles — seulement après un traitement particulier, comme une pulvérisation spéciale ou autre chose du genre. Ce type de TRURG n'aurait aucune incidence sur la capacité de reproduction des végétaux, en tout cas d'après ce que nous en savons.
Monsieur le président, ce n'est pas le rôle de l'ACIA de promouvoir cette technologie ou de s'y opposer. L'ACIA est, toutefois, chargée de faire en sorte que le Canada possède un régime de réglementation solide et efficace, nous permettant de gérer les risques liés aux végétaux à caractères nouveaux dans leur ensemble, y compris ceux possédant des caractères de type TRURG.
L'élaboration des politiques, ainsi que la conception et la réalisation des programmes de l'Agence sont fondées sur les connaissances scientifiques. Ces dernières jouent aussi un rôle essentiel dans la prise de décisions en matière de réglementation et dans les activités de vérification et d'exécution de la loi de l'agence. Parmi les outils que cette dernière utilise tous les jours pour protéger les Canadiennes et les Canadiens, citons la recherche scientifique en laboratoire, l'évaluation des risques, la surveillance, la recherche et le développement technologique.
Avant d'approuver tout végétal à caractères nouveaux au Canada, l'ACIA, conjointement avec nos collègues à Santé Canada, effectue des évaluations rigoureuses des risques pour notre environnement, notre bétail et nos aliments. Notre objet est de veiller à ce que les produits de la biotechnologie mis à la disposition des exploitants agricoles soient conformes aux approches en matière d'agriculture durable.
Il importe de souligner, monsieur le président, que les TRURG en sont toujours au stade de la recherche. À notre connaissance, il n'y a eu, à ce jour, au Canada, aucune application commerciale des TRURG, ni même d'essais expérimentaux au champ. Cependant, étant donné la complexité de ces technologies et le temps que peut prendre un produit pour répondre aux exigences réglementaires, l'ACIA ne s'attend pas à recevoir, dans un proche avenir, de demande d'autorisation pour des végétaux à caractères nouveaux issus de TRURG. Cependant, si l'agence devait recevoir de telles demandes, elle les traiterait de la même manière que dans le cas de tout autre végétal à caractères nouveaux.
En outre, comme vous le savez peut-être, mais peut-être pas, la question des TRURG a été soulevée à la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique des Nations Unies, au cours de laquelle des recommandations ont été faites relativement à l'utilisation de technologies de type TRURG. Le Canada appuie ces recommandations, du fait, surtout, d'être partie à cette Convention. Ces recommandations devront être appliquées avec prudence, au cas par cas, et toutes nos décisions devront être fondées sur la science.
En conclusion, je tiens à assurer le comité que les TRURG ne seront pas utilisées au Canada tant qu'il n'aura pas été démontré qu'elles ne nuisent pas aux humains, aux animaux et à l'environnement.
Merci beaucoup, monsieur le président.
J'ai une formation de chercheure en génétique, et à la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique, qui vient tout juste d'être mentionnée par mon collègue ici présent, je représente la Federation of German Scientists. C'est ainsi que je représente une petit peu l'Allemagne et le Royaume-Uni, du fait de ma nationalité.
Je m'intéresse également au Protocole de Cartagena sur la prévention des risques biotechnologiques, et c'est ainsi que je me suis rendue plusieurs fois à Montréal pour des négociations. J'apporte donc également à la présente réunion mon expertise en matière de biosécurité et de régulation des gènes.
En bref, en ce qui concerne les TRURG, comme nous les appelons à la Conférence des Parties à la CDB, il s'agit de technologies de restriction de l'utilisation de ressources génétiques, que l'on appelle parfois technologies « Terminator », produisant des semences qui sont stériles. Comme nous l'avons entendu dire, il existe également l'autre variété, soit les graines qui n'exprimeront pas certains caractères végétaux à moins d'être traitées par vaporisation. Je vais, dans le cadre de mon exposé, aborder cette question sous quatre rubriques : l'objet des TRURG; la conception des TRURG; leurs particularités comparativement, par exemple, à d'autres OGM ou à des raisins sans pépins ou des semences hybrides; et les problèmes posés par les TRURG, les scénarios de risque et les conséquences possibles pour les agriculteurs.
L'objet de ces technologies est, selon moi, double, d'après la conception originale — je parle maintenant de la technologie « Terminator » ou des V-TRURG. D'après sa conception originale, cette technologie devait servir de mécanisme de protection de PI — protection de propriété intellectuelle — ou, pour reprendre le terme utilisé par ses auteurs, Delta and Pine Land, de système de protection technologique, ou SPT. L'idée est de protéger la technologie pour ses auteurs, ce qui veut dire que les agriculteurs ne peuvent pas réutiliser des graines qu'ils auraient conservées.
Le deuxième but est de protéger l'environnement contre toute contamination. Si j'ai des graines stériles, alors tout ce qui pourra s'échapper ne pourra pas se multiplier dans l'environnement. C'est principalement sous cette rubrique que les organes de réglementation en discutent, et je vais revenir là-dessus dans un instant.
Quelques mots maintenant au sujet de la conception. Il intervient ici trois éléments. Le premier élément est un gène toxique, c'est-à-dire un gène qui produit une toxine qui est létale pour la cellule, pour la plante. Ce gène n'est pas toxique lorsqu'il est consommé; son seul but est de tuer la cellule. Ce gène toxique, placé dans la plante, est censé s'exprimer, être activé, à la toute fin du stade embryonnaire — c'est-à-dire lorsque la graine est déjà développée. C'est alors que sera activé le gène permettant à la graine de germer, et l'embryon ne sera plus.
Le problème, bien sûr, est que si je suis le multiplicateur des semences, comment vais-je les multiplier si ma plante ne produit pas de graines fertiles? Il me faut empêcher ce gène d'être actif aux fins de multiplication; en conséquence, je vais bloquer ce gène, je vais l'empêcher d'être actif en installant, littéralement, un blocage. Mais il me faudra pouvoir l'activer plus tard, alors que dois-je faire?
Je dois maintenant prendre un autre groupe de gènes qui agiront à la manière d'une paire de ciseaux moléculaires. Il s'agira d'une enzyme qui reconnaîtra ce blocage que j'ai installé et qui le découpera pour que le gène puisse alors devenir actif.
Mais vous pouvez voir que j'ai maintenant un problème. J'ai installé une paire de ciseaux moléculaires. Il me faut la réglementer car je voudrai à un moment donné livrer la semence à l'agriculteur et je souhaiterai que tout le mécanisme soit activé. Il me faut un troisième jeu de gènes renfermant un répresseur, qui empêchera d'intervenir les ciseaux moléculaires.
C'est ce que nous appelons souvent l'interrupteur génique ou la technologie d'interrupteur génique. C'est ainsi que nous avons un élément qui est souvent d'origine bactérienne, vu que cela a fait l'objet d'abondantes recherches, qui réagira alors à différents produits chimiques.
Dans le concept original, par exemple, c'était la tétracycline qui était le déclencheur de tout le mécanisme. L'on ne s'en sert plus dans aucun modèle, et l'on privilégie aujourd'hui des mécanismes déclenchés par l'alcool. Les plantes sont traitées, ou alors on ajoute quelque chose à l'enrobage des semences, et c'est alors que le mécanisme est déclenché.
D'un point de vue scientifique, et selon mon analyse et celle de nombre de mes collègues, le problème est que nous ne pouvons pas déterminer si la totalité de la plante fonctionne ou ne fonctionne pas. Je ne peux pas vous fournir cette analyse. Comme l'a déjà expliqué Stephen Yarrow, les TRURG n'existent pas encore. Il n'existe aucune donnée en provenance d'essais en serre qui auraient été effectués au Canada ou ailleurs. Cela n'existe tout simplement pas, et c'est pourquoi il nous est difficile de vous fournir tout le détail d'une analyse.
Nous pouvons vous entretenir d'éléments spécifiques, de la façon dont ils fonctionnent lorsque vous les insérez dans une plante, et vous dire s'ils fonctionnent avec une fiabilité de 100 p. 100 ou non. Je ne vais pas entrer dans les détails ici, mais si vous parcourez la documentation ou les rapports d'essais effectués par mes collègues, vous verrez que ces éléments ne fonctionnent pas dans 100 p. 100 des cas.
Par exemple, nous avons un problème avec le silençage des gènes, qui est un phénomène que l'on constate surtout chez des végétaux qui ont été génétiquement modifiés, la plante débranchant un gène qui a été introduit. C'est ainsi que vous pouvez voir qu'il s'agit d'un système fort complexe. Une plante peut par exemple faire obstacle en inactivant un gène. C'est un problème.
Un autre problème est l'inducteur. Si le produit chimique que j'applique n'atteint pas toutes les plantes ou toutes les cellules au bon moment et dans la bonne quantité, alors le déclenchement voulu n'aura pas lieu. Là encore, le système ne fonctionnera pas.
Une autre possibilité est qu'il intervienne des mutations. Bien sûr, l'on parle d'un système biologique. Les plantes sont des organismes vivants. Elles changent, comme tout le reste, sans quoi il n'y aurait pas d'évolution. Mais il nous faut également être en mesure, nous aussi, de nous adapter à d'autres situations.
Les mutations et le silençage génique font partie de la capacité de survie des plantes. Bien sûr, des gènes peuvent se séparer pendant le processus de multiplication. Si les gènes ne restent pas ensemble, là encore le mécanisme ne fonctionnera pas.
Pour résumer, nous avons devant nous une technologie qui, de par sa conception même, est très vulnérable et sera vraisemblablement incapable d'être efficace à 100 p. 100. Ses composantes ne l'étant pas, il n'y a aucune raison de croire que ce serait le cas de l'ensemble. C'est pourquoi il nous faut établir des règlements et effectuer des évaluations de risque pour les deux scénarios, soit les cas où la technologie « Terminator » fonctionne, et les cas où elle ne fonctionne pas. Il nous faut nous pencher sur les deux cas de figure.
Le phénomène qui sera commun aux deux situations est le fait qu'il y aura production de pollen et possibilité de pollinisation croisée. L'idée d'assurer une protection contre la contamination ne vise que la possibilité de pousse de la semence de la deuxième génération. Le pollen pourra donner lieu à des pollinisations croisées dans les champs d'agriculteurs voisins ou alors dans des plantes apparentées, ce qui produira des graines susceptibles de contenir tous les transgènes des composants produits par ces gènes.
Troisièmement, une proportion élevée de ces graines seront stériles. Si donc un cultivateur en conserve, il ne pourra pas les réutiliser de la même façon qu'auparavant, car le rendement sera plus faible, certaines des graines ne germant pas. C'est ainsi que les producteurs ne pourront plus compter sur leurs propres semences. Cela minera donc en un sens la capacité des agriculteurs de produire leurs propres semences.
Un autre problème se pose pour l'agriculteur désireux de vendre le fruit de la sa récolte. Disons qu'une technologie « Terminator » a été utilisée pour produire des cultures renfermant des composés pharmaceutiques, ce que vous ne voudrez définitivement pas retrouver dans une culture destinée à l'alimentation — si le produit est contaminé, alors vous ne pouvez pas le vendre. La technologie « Terminator », les V-TRURG, ne fonctionnent donc pas aux fins du bioconfinement, car les gènes peuvent se propager, et dans certains cas ils sont héritables.
Brièvement, maintenant, quelle est la différence entre ces technologies et les autres dont nous disposons? Premièrement, il y a d'autres idées en matière d'outils de confinement faisant appel à d'autres méthodes, par exemple l'insertion de gènes dans les chloroplastes. Je ne vais pas entrer dans le détail de cela. Mais selon les analyses qui ont été effectuées par différents groupes de chercheurs, dont la National Academy of Sciences aux États-Unis, aucune des méthodes dont nous disposons jusqu'ici, y compris les TRURG, n'offre la fiabilité voulue. Nous ne disposons donc en réalité pas d'outil.
L'autre aspect dont j'ai dit que je traiterais est le suivant: en quoi cela diffère-t-il d'autres organismes génétiquement modifiés ou de graines hybrides, par exemple. La différence, comme je l'ai mentionné plus tôt, est qu'il s'agit d'une technologie d'interrupteur génique — cela a été conçu de façon à être contrôlable depuis l'extérieur — , de telle sorte que, par application de produits chimiques, certains caractères ou la fertilité ne seront possibles que si le végétal est traité, et c'est pourquoi cela relève d'une catégorie tout à fait différente.
Cela relève également d'une catégorie tout à fait différente du fait que la technologie « Terminator » comporte des risques tout à fait différents. Du point de vue scientifique, compte parmi les risques un faux sentiment de sécurité. Si vous pensez que cela fonctionne, mais que cela ne fonctionne pas, alors que se passe-t-il?
Par exemple, si vous avez du raison ou des melons sans pépins, oui, vous ne pouvez pas les utiliser pour produire davantage de fruits, mais vous ne produisez pas ces melons dans le but d'en garder les graines aux fins d'une nouvelle production. Vous produisez ces melons dans le but de les vendre sur le marché, et le consommateur appréciera alors le fait de ne pas avoir à s'occuper d'enlever toutes les graines. Cela est donc tout à fait différent. Dans un tel cas, s'il arrivait quelque chose, alors il n'y aurait pas de véritables conséquences. Oui, vous trouveriez certains pépins dans votre raisin, mais cela ne poserait pas de problème sur le plan de la biosécurité.
Cependant, si la technologie « Terminator » dérape, elle dérapera dans quantité de cas, et il y aura alors un grave problème. Il importe donc de ne pas comparer cela au cas des fruits sans pépins, ni de mettre les deux choses sur un même pied. Peut-on comparer cela à des graines hybrides? En fait, non, car vous pouvez toujours replanter non pas les graines hybrides, mais les graines issues de la récolte. Ces graines ne se reproduiront pas en lignée pure, de telle sorte que vous n'aurez pas une récolte uniforme, mais les graines seront toujours fertiles et les agriculteurs pourraient donc les utiliser pour de nouvelles productions, tandis que les graines « Terminator », les graines issues de V-TRURG, ne pousseront en fait pas du tout.
Si donc vous voulez faire des comparaisons, nous n'avons en fait rien qui puisse se comparer aux TRURG. Les TRURG constituent une catégorie à part, et c'est pourquoi elles doivent être réglementées à part. C'est précisément ce qu'a fait la Conférence des Parties à la CDB dans sa décision, suite au moratoire sur les diffusions dans le champ entérinée dans le cadre d'une entente de tous les pays signataires, en attendant que l'on dispose de plus de données scientifiques. Il y a d'autre part une entente de non-commercialisation en attendant des évaluations des risques socio-économiques, des études d'impact, des analyses de l'innocuité des TRURG, et ainsi de suite.
Sachez en tout cas que la Conférence des Parties à la Convention sur la diversité biologique se penche sur les TRURG et les considère comme une catégorie à part.
Merci.
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Bonjour. Je m'appelle Denise Dewar et je suis vice-présidente et directrice exécutive de la biotechnologie végétale chez CropLife Canada.
CropLife Canada représente les fabricants, les concepteurs et les distributeurs de solutions phytoscientifiques, de produits antiparasitaires et de biotechnologie végétale pour l'agriculture, le milieu urbain et la santé publique. La mission de CropLife Canada est d'appuyer une agriculture novatrice et durable au Canada, en collaboration avec d'autres, en nourrissant la confiance des gens à l'égard des innovations phytoscientifiques et leur appréciation de ce travail. Nous soutenons la sécurité et l'innovation.
La sécurité est assurée à l'ensemble des Canadiens en protégeant la santé humaine et l'environnement au moyen d'initiatives de gestion responsables émanant de l'industrie et d'un régime de réglementation rigoureux axé sur la science. CropLife Canada est un pionnier en matière de programmes propres à l'industrie grâce à son engagement, tout d'abord, à gérer de façon responsable le cycle de vie de tous nos produits, qu'il s'agisse de pesticides ou de biotechnologie végétale, depuis l'étape de la découverte jusqu'à leur livraison aux consommateurs. Nos programmes sont reconnus au Canada et dans le monde pour les résultats qu'ils livrent.
Les membres de CropLife Canada tiennent à jouer un rôle important en valorisant la production agricole canadienne grâce à l'introduction dans le secteur agricole de solutions novatrices. Nous reconnaissons que les producteurs canadiens subissent d'énormes pressions, du fait des fermetures de frontières résultant de l'ESB, des prix des produits historiquement bas, et de la concurrence livrée par des pays comme le Brésil, dont la production agricole croît à un rythme extraordinaire.
Nos membres ont travaillé et continuent d'oeuvrer en vue d'offrir des produits novateurs à l'agriculture canadienne, d'offrir aux agriculteurs de nouvelles semences et de nouvelles technologies commerciales ainsi que les dernières découvertes en matière de lutte antiparasitaire en vue de protéger les récoltes. Ces nouveaux outils offrent aux agriculteurs des rendements améliorés, un meilleur contrôle des pesticides, des récoltes à plus grande valeur ajoutée et des coûts de production inférieurs. D'autre part, les technologies qui sont présentement dans le pipeline de recherche des entreprises axées sur les sciences de la vie offrent le potentiel de révolutionner l'agriculture telle que nous la connaissons aujourd'hui. Les plantes cultivées seront la plateforme de la nouvelle bio-économie, dont on pense qu'elle représentera d'ici 2015 une valeur d'environ 500 milliards de dollars.
L'on entend souvent dire que le pétrole est l'or noir. Eh bien, la vision pour l'agriculture des sociétés membres de CropLife Canada est que l'agriculture sera le nouvel or vert. L'on utilisera des végétaux pour produire des énergies renouvelables, des plastiques, des fibres, de nouveaux matériaux, des aliments à valeur nutritive accrue et ils seront une source fiable de médicaments de plus en plus sûrs. Nous pensons que la nouvelle technologie fait partie de la solution aux défis auxquels se trouve à l'heure actuelle confrontée l'agriculture. Nous souhaitons que les agriculteurs canadiens puissent profiter des occasions énormes qui s'annoncent en saisissant leur part de la bio-économie croissante.
Vous vous penchez aujourd'hui sur un type de technologie auquel travaillent toujours les laboratoires, et qui n'en est pas encore au stade d'essais au champ ni de mise en marché. D'aucuns parlent de gènes « Terminator », ce qui est une expression accrocheuse, mais en même temps erronée et trompeuse. J'aimerais prendre quelques instants pour vous donner notre perspective sur cette technologie, sur la façon dont elle fonctionne et sur ce qu'elle pourrait offrir aux agriculteurs canadiens.
L'objet de notre industrie est de livrer aux agriculteurs des caractères intéressants et porteurs par le biais de semences et de variétés végétales. Depuis les obtentions végétales traditionnelles jusqu'à la génétique récente plus avancée, l'objet est le même: offrir des améliorations et une valeur ajoutée aux cultures que nous produisons grâce à des rendements supérieurs, à une résistance aux parasites et aux maladies, à une valeur nutritive améliorée et, à l'avenir, à la capacité de cultiver des produits industriels comme par exemple des plastiques, des produits pharmaceutiques, des combustibles et d'autres matières à partir d'une ressource renouvelable.
En explorant de nouvelles utilisations pouvant être faites des végétaux, nous avons fait de nouvelles découvertes, et découvert de nouvelles façons d'apporter des améliorations, sur la base de résultats connus. Nous appelons un domaine de découverte les TRURG, qui sont des technologies de restriction de l'utilisation des ressources génétiques. Ce n'est pas un nom très accrocheur, mais il est fidèle à la science. Un type de TRURG peut rendre stérile la semence. L'on parle alors de TRURG affectant les variétés ou de V-TRURG. Le travail des phytogénéticiens nous a donné des raisins et des pastèques sans pépins, ainsi que la stérilité de la semence, soit l'incapacité de la semence de se reproduire. Cette technologie n'est pas différente.
Cette technologie présente selon nous des avantages très réels dans certaines situations. Par exemple, la technologie de stérilité de la semence empêche le transfert non désiré de propriétés génétiques à d'autres végétaux. Pour dire les choses simplement, cette technologie bloque la possibilité des gènes génétiquement manipulés de se retrouver ailleurs. Cela représente tout un avantage si vous produisez des récoltes destinées à la fabrication de produits industriels ou pharmaceutiques dans une zone où il se fait également de la production alimentaire. Cela représente également un avantage pour les exploitations voisines productrices de cultures organiques. Il n'y a alors plus lieu de se préoccuper du risque pouvant être posé par des pollens aéroportés. En plus des règles déjà très strictes régissant la fabrication de produits industriels, y compris produits pharmaceutiques et plantes, cette technologie sera un outil de plus pouvant offrir des avantages.
Les opposants à cette technologie disent qu'elle menace les agriculteurs du monde en développement en empêchant la conservation des graines de la récolte de cette année en prévision des semailles de l'an prochain, mais ces semences n'ont pas été conçues pour les agriculteurs du monde en développement. Elles ont été conçues, en partie, pour les agriculteurs qui achètent déjà chaque année de nouvelles semences. Ces types de semences coûtent plus cher mais donnent des rendements bien supérieurs, protègent l'environnement ou coûtent moins cher à la production, de telle sorte que l'agriculteur en sort gagnant. Les agriculteurs canadiens ont voté en faveur de ces semences en les adoptant très rapidement.
Un autre type de TRURG intervient à la manière d'un interrupteur, comme ceux que vous avez dans vos maisons, et ne se déclenche que lorsqu'on en a besoin. Ce sont ce que l'on appelle les TRURG affectant les caractères ou T-TRURG. Il existe, par exemple, une technologie de ce genre qui permet à un végétal d'enclencher sa capacité de résister à la sécheresse uniquement lorsque survient une sécheresse. En l'absence de conditions de sécheresse, la plante n'exprimerait pas ce gène, et elle serait ainsi libre de consacrer toute son énergie à la croissance.
Bien que nous soyons les auteurs d'innovations pour l'agriculture, nous appuyons le choix de l'agriculteur en matière de système de production, qu'il s'agisse d'agriculture conventionnelle, organique ou axée sur la biotechnologie. Nous appuyons également le choix de l'agriculteur en matière de variétés de semences, et souhaitons qu'il soit libre de décider quelles variétés lui fourniront les meilleurs rendements et profits. Comme dans le cas de tous les intrants agricoles, si les variétés mises au point grâce à cette technologie ne livrent pas des avantages financiers significatifs, les agriculteurs demeureront libres de recourir aux variétés ne contenant pas de TRURG et d'utiliser les semences qu'ils auront conservées, en se conformant aux règlements et aux usages appropriés et en vigueur dans leur région.
Nous vous demandons, en votre qualité de parlementaires, d'appuyer l'évaluation des TRURG et d'autres technologies grâce à un système de réglementation axé sur la science et selon une étude au cas par cas, afin que les avantages et les possibilités offerts par l'innovation puissent être livrés aux agriculteurs canadiens.
Nous vous remercions de l'intérêt que vous portez à cette question. J'envisage avec plaisir de répondre à toutes les questions que vous voudrez poser.
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Je tiens à ce que les gens sachent ce qui s'est passé et comment les dissidents ont été réduits au silence dans le passé, surtout lorsqu'on a entendu le chef libéral déclarer hier que, peu importe la question posée ou peu importe la décision des agriculteurs, il allait rétablir l'ancien système.
Si vous lisez l'éditorial dans le numéro d'aujourd'hui du Winnipeg Free Press, vous verrez que le journal qualifie cela de pure démagogie. Nous pourrions en discuter, mais l'éditorial est intitulé « À la pêche aux voix ». Je ne vais pas en faire lecture, monsieur le président, afin de ne pas prendre trop de temps.
Cela n'intéresse guère certains dans cette salle, mais lorsque nous, les agriculteurs de l'Ouest, entendons les Libéraux dire qu'ils vont prendre des mesures, que cela nous plaise ou non, cela sème la terreur dans le coeur des agriculteurs de l'Ouest. Il est peut-être bon de retourner en arrière, mais avant de le faire, nous devrions écouter une personne qui sait ce qu'il en est.
Le véritable noeud de cette affaire tient en une question que quelqu'un m'a posée : comment peut-on mettre des agriculteurs en prison dans une région du pays et non dans le reste du pays où ils font exactement la même chose? J'aimerais que M. Easter m'écoute lorsque je dis cela, car c'est important. Comment peut-on emprisonner des agriculteurs dans une partie du pays et pas ceux du reste du pays qui font exactement la même chose?
M. Chatenay pourrait contribuer à la discussion d'aujourd'hui. Il est là, et cela fait deux jours qu'il attend dans l'espoir de pouvoir témoigner. Il est resté, vu qu'il était prévu qu'il témoigne.
Je pourrais passer encore une heure à parler de M. Chatenay et de son histoire. Je ne vais pas le faire. Je vais plutôt essayer d'être constructif.
Fidèle à son style rhétorique coutumier, M. Easter a usé de grands mots dans ce débat au cours des derniers mois. J'aimerais pouvoir citer quelques-uns de ses propos. Il a clamé que les principes mêmes d'un pays démocratique sont en jeu. Il a parlé de procédés antidémocratiques et il a parlé d'intimidation et de suppression d'information.
La formule que j'ai le mieux aimée, c'est lorsqu'il a dit que dans la Russie communiste, lorsque les gens n'étaient pas d'accord, on les faisait disparaître. J'ai trouvé cela intéressant car mardi, M. Chatenay, parce qu'il n'était pas d'accord avec certains membres du comité directeur, je présume, a simplement disparu de la liste des témoins.
Je demande au comité de faire ce qui s'impose. Je sais que nul d'entre nous ne souhaite que les adjectifs de M. Easter décrivent ce comité et ses activités, et c'est pourquoi je vais demander aux membres d'approuver une motion.
La motion est que M. Jim Chatenay, membre du conseil d'administration de la Commission canadienne du blé, soit autorisé à s'asseoir à la table comme témoin.
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Je vais commencer, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur Ritter.
M. Ken Ritter: Monsieur le président, membres du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes, je tiens à vous remercier d'avoir invité la CCB à comparaître devant vous aujourd'hui. Je suis accompagné d'Adrian Measner, notre président-directeur général. Après moi, Adrian prendra également la parole.
Comme vous le savez, nous devions initialement comparaître mardi. Les mémoires qu'Adrian et moi-même avions l'intention de présenter ce jour-là vous seront remis. En outre, nous avons fait parvenir au président notre réponse écrite à certaines des remarques erronées faites par des témoins ayant comparu précédemment au comité.
Je tiens à faire savoir au comité que, suite à l'annulation de notre comparution mardi, nous avons eu l'occasion de rencontrer l'honorable Chuck Strahl, ainsi que les chefs du Parti libéral, du Bloc et du NPD.
Nous savons depuis un an, depuis l'annonce qui en a été faite lors de la dernière campagne électorale, que le Parti conservateur du Canada a pour politique, concernant la commercialisation du blé et de l'orge de l'Ouest du Canada, de supprimer le comptoir unique de la CCB et de mettre en oeuvre le choix de la mise en marché. Le désaccord entre le conseil et le gouvernement sur un enjeu aussi fondamental ne pouvait qu'engendrer une certaine tension.
Il existe une bonne façon et une mauvaise façon de surmonter des difficultés majeures de cette nature. La bonne façon est de parvenir à une entente fondamentale sur les intérêts sous-jacents. En l'occurrence, l'intérêt sous-jacent ne peut être que le bien être économique des producteurs céréaliers de l'Ouest du Canada. Tout changement, surtout dans le contexte de la crise financière dont les producteurs commencent seulement à émerger, doit favoriser la cause de la viabilité et de la profitabilité à long terme des producteurs.
L'étape suivante, c'est un dialogue respectueux. Ce dialogue doit prendre en considération toutes les possibilités et toutes les options, afin que les deux partis puissent pleinement faire valoir leurs positions. Il faut un accord sur la manière dont la question sera tranchée en fin de compte et sur qui aura le dernier mot.
Lorsqu'il s'agit d'un sujet aussi controversé que le sort du système de commercialisation du grain, il ne fait aucun doute dans mon esprit que les décideurs ultimes doivent être les premiers intéressés par le résultat, à savoir les producteurs céréaliers de l'Ouest du Canada. C'est pourquoi la loi en vertu de laquelle nous sommes constitués prévoit l'élection des administrateurs et un mécanisme de plébiscite.
Enfin, il faut l'engagement d'accepter la décision des agriculteurs et d'avancer dans un esprit de coopération. Malheureusement, il n'y a pas grand-chose de positif à dire sur la méthode suivie jusqu'à présent pour combler le fossé entre la politique gouvernementale actuelle et la volonté des agriculteurs de l'Ouest, tels que représentés par leurs administrateurs élus.
Nous recherchons une discussion sur les intérêts sous-jacents, en vue d'ouvrir un dialogue réel, en vue d'une entente sur la façon de régler nos différends, et nous sommes prêts à nous engager à coopérer. Mais surtout, nous recherchons un engagement réciproque du gouvernement. À défaut de ce dernier, nous continuerons de nous enfoncer dans des impasses, comme l'actuelle où le gouvernement n'hésite pas à prendre la mesure extraordinaire consistant à démettre de ses fonctions le dirigeant d'une société réalisant plusieurs milliards de chiffres d'affaires, soit notre président-directeur général qui jouit du soutien du conseil d'administration.
Il est temps de faire les choses différemment et de s'engager dans une meilleure voie. Pour cela, j'aimerais soumettre au comité et au gouvernement du Canada le plan en cinq points suivants.
Premièrement, la CCB appelle le gouvernement à respecter l'élection des administrateurs comme un exercice légitime de la démocratie et l'expression légitime de l'opinion des agriculteurs concernant leur système de mise en marché. Nous connaîtrons cette fin de semaine les résultats des élections des administrateurs de cinq des dix circonscriptions de l'Ouest du Canada. Au lendemain de ces élections, nous appelons le ministre à s'asseoir avec quatre représentants élus de la CCB, comprenant des administrateurs favorables et opposés au comptoir unique, afin de dialoguer librement et respectueusement sur les sujets de litige entre la CCB et le gouvernement.
Deuxièmement, la CCB appelle le gouvernement à une concertation avec le conseil d'administration en vue de l'adoption de règles claires pour la tenue du prochain plébiscite sur l'orge que le ministre a promis pour le début de l'année prochaine. Les membres du conseil d'administration de la CCB, à titre de représentants élus des agriculteurs de l'Ouest du Canada, doivent avoir leur mot à dire sur des aspects tels que le texte de la question, l'admissibilité à voter et les limites de dépenses des parties tierces.
Troisièmement, nous devons rechercher un mécanisme plus clair et mieux défini pour le blé. Le ministre a déclaré que le blé ne sera pas soustrait au comptoir unique avant août 2008. Mais la capacité des agriculteurs de fonctionner dans un marché du blé hautement concurrentiel dépend de notre réputation de fournisseur fiable à long terme du meilleur grain du monde. L'incertitude qui plane actuellement sur la CCB fait beaucoup de tort à notre réputation. Nous commençons à en subir les conséquences.
Parmi les options permettant de réduire l'incertitude planant sur la commercialisation du blé figure un plébiscite contraignant, sur une question claire, avant toute modification. En outre, une analyse économique approfondie des conséquences d'un marché libre du blé s'impose.
Quatrièmement, le décret ministériel restreignant les activités de communication de la CCB doit être abrogé. Si le ministre s'inquiète de la façon dont le conseil d'administration dépense l'argent des agriculteurs, nous sommes disposés à en discuter avec lui, mais l'imposition d'une directive n'est pas la bonne façon de procéder et de nouer le dialogue dont nous avons besoin.
Cinquièmement, la procédure de destitution d'Adrian de son poste de président-directeur général doit être stoppée. Une bonne gouvernance de société exige que le PDG rende compte et soit responsable envers le conseil d'administration. Ce dernier ne peut pas et ne doit pas être contourné. Le conseil donne son appui au président-directeur général actuel, Adrian Measner.
Ce plan en cinq points est réaliste et peut être mis en oeuvre immédiatement. Il est fondé sur le respect mutuel et la reconnaissance de la notion fondamentale que la CCB n'est pas un organisme gouvernemental. Elle est en réalité une société à gouvernance mixte dans laquelle les agriculteurs, par l'intermédiaire de leurs représentants élus au conseil d'administration et de par leur intérêt économique dans les activités de la CCB, doivent jouer le rôle dominant.
Indépendamment du passé, nous devons saisir aujourd'hui cette occasion pour nous engager, et avec nous l'industrie céréalière de l'Ouest canadien, dans la bonne voie, en reconnaissant le rôle primordial que doivent jouer les agriculteurs et la légitimité de leurs représentants démocratiquement élus.
Merci.
Je cède maintenant la parole à Adrian.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue à M. Measner et M. Ritter. Je suis heureux que nous ayons eu la possibilité d'entendre votre témoignage aujourd'hui.
Permettez-moi de dire que, fidèle à votre habitude, monsieur Ritter, vous avez cherché à surmonter les divergences, à trouver un terrain commun et une issue à ce qui est manifestement une situation très difficile qui pourrait avoir des conséquences profondément négatives pour les cultivateurs canadiens, surtout ceux de l'Ouest. J'apprécie donc votre approche constructive.
Certaines de mes questions ont déjà trouvé en partie réponse dans votre exposé, et je vais peut-être les poser tout en bloc et vous pourrez décider entre vous comment y répondre.
Lorsque j'étais ministre responsable de la Commission du blé il y a quelques années, j'ai constaté deux choses lors de mes contacts avec les acheteurs du monde entier, contacts que j'avais très régulièrement. Premièrement, ces acheteurs, typiquement, n'aimaient pas les prix que la Commission canadienne du blé demandait et ne cessaient de dire que vous étiez trop exigeants, et je suppose que c'est typique pour un acheteur. En revanche, ils appréciaient la cohérence de la Commission, sur le plan de son comportement, des relations durables qu'elle savait nouer, le fait qu'ils pouvaient traiter régulièrement avec les mêmes personnes de l'équipe de vente, ainsi que les très bons services avant-vente et après-vente de la commission. Aussi, cette relation était marquée par une grande confiance, non seulement dans le produit, mais aussi dans le personnel.
Pourriez-vous nous dire, et c'est ma première question, si ces facteurs restent cruciaux pour la réussite internationale de la Commission et si la controverse actuelle et la possibilité annoncée publiquement que la Commission soit amputée ou disparaisse a un effet sur les acheteurs au niveau international.
Deuxièmement, sur le plan intérieur, du point de vue de ce problème de la confusion ou de la confusion future potentielle quant au mandat de la Commission, les entreprises du secteur de la meunerie et du maltage, etc., qu'elles soient canadiennes ou américaines, diront toujours qu'elles pourraient s'adapter à l'un ou l'autre système, selon leur perspective d'acheteur d'un certain produit. Mais ce qui les inquiète, c'est d'avoir un peu des deux, de ne jamais savoir exactement à quoi s'en tenir. J'aimerais que vous parliez de cette situation.
Troisièmement, l'accusation a été portée que le conseil n'a effectué aucune planification pour différentes éventualités, et plus particulièrement l'éventualité d'un vote positif dans un plébiscite qui déclencherait le processus et la loi, etc. Quelqu'un a parlé de la planification pour les éventualités.
Monsieur Measner, je pense important que vous nous donniez l'assurance, avec autant de détails que possible, en tant que directeur général de la Commission, que cette planification pour éventualité a bel et bien eu lieu et que la Commission est en mesure de faire face aux circonstances imprévues qui pourraient se présenter.
Enfin — et je crois que cette question s'adresse plus particulièrement à M. Ritter, à titre de président du conseil — j'aimerais que vous expliquiez la démarche suivie concrètement pour choisir le directeur général de la Commission canadienne du blé. Quelle est la procédure suivie — et plus particulièrement celle par laquelle M. Measner a été choisie? Pouvez-vous parler plus spécifiquement du rendement du directeur général actuel? Je sais que vous avez fait quelques remarques générales à cet égard, mais je pense qu'il est important que les députés entendent votre point de vue, à titre de président du conseil. Que pensent les membres du conseil d'administration du travail accompli par M. Measner?
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Je vais commencer et peut-être juste répondre aux premières questions.
Il est sûr que l'image de marque, ce que les acheteurs attendent de la Commission canadienne du blé, des céréaliculteurs de l'Ouest canadien, lorsqu'ils achètent leurs produits, c'est la régularité. Ils recherchent la fiabilité à long terme. Cela ne fait aucun doute.
Je parle régulièrement à des acheteurs qui disent ne pas vouloir acheter du grain américain. Ils ne savent pas ce qu'on va leur livrer avant que ce grain n'arrive à la minoterie et ils n'aiment pas toutes les contrariétés à subir lorsque la qualité laisse à désirer.
Il ne fait donc aucun doute que c'est cela qui fait notre réputation; 80 à 85 p. 100 des acheteurs, dans notre dernier sondage, ont indiqué que notre service est aussi bon ou meilleur que celui de nos concurrents, et 90 à 95 p. 100 ont dit que nos produits sont aussi bons ou meilleurs que ceux des concurrents. Nous avons donc une très bonne image de marque, une réputation que nos clients apprécient. Ils trouvent cette période très difficile car ils cherchent à comprendre pourquoi nous apportons ces changements, ce qui va en résulter pour eux, et se demandent s'ils vont avoir un partenaire avec lequel traiter dans un ou deux ans ou s'il leur faut commencer à envisager des mesures de remplacement, chercher d'autres fournisseurs. C'est une période très difficile pour eux, tout comme pour notre organisation, et plus rapidement nous lèverons cette incertitude et mieux le Canada se portera et mieux se porteront les cultivateurs de l'Ouest canadien.
Au niveau intérieur, je suis d'accord avec ce que vous avez dit. Les meuniers et les malteurs nous disent qu'ils apprécient la garantie d'approvisionnement. Les marchés sont très tendus chaque année et la dynamique change et nous avons toujours garanti aux meuneries et malteries canadiennes leur approvisionnement et qu'elles pourront répondre à la demande intérieure ainsi qu'à la demande à l'exportation de leurs produits.
Ils ont dit qu'ils pourraient se débrouiller avec l'un ou l'autre système. Ils apprécient le système actuel et les assurances et la garantie qu'il leur donne, tant sur le plan du prix que de l'approvisionnement. Ils ont indiqué qu'ils pourraient fonctionner avec l'un ou l'autre système, si nous devions en changer, mais pas avec un système intermédiaire. Ils ne veulent rien qui soit intermédiaire entre les deux. Et ayant lu le rapport du groupe de travail constitué par le gouvernement, celui-ci est arrivé à la même conclusion. Il n'y a pas d'entre-deux, c'est soit un marché libre soit le comptoir unique.
Je peux vous assurer, à titre de PDG, que nous avons pris très au sérieux la planification pour les éventualités. Nous nous penchons de très près sur la question de l'orge et nous serons prêts à faire face à tous les changements qui seront apportés. Je veux savoir quels seront ces changements. S'il va y avoir des changements, je veux savoir s'il y aura des garanties. Si nous allons encore vendre de l'orge, je veux savoir si nous pourrons utiliser le fonds de prévoyance comme filet de sécurité pour cela.
Il existe toutes sortes d'interrogations et c'est pourquoi j'ai demandé au ministre d'apporter un peu de clarté, afin que nous puissions planifier de façon productive.
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Merci, monsieur le président, et merci à vous, messieurs, de comparaître aujourd'hui.
Je dois réfuter ce que j'appelle l'argument creux voulant que le monde se soucierait tellement du monopole dans ce pays. Très franchement, peu leur importe que nous ayons un monopole ou un marché ouvert. Ce qui les intéresse, c'est le prix et la qualité, et la Commission canadienne du blé ne contrôle ni l'un ni l'autre.
La qualité est fournie par le cultivateurs qui produisent le grain. C'est la Commission canadienne du grain qui classe ces céréales pour assurer que la qualité du produit exporté réponde aux spécifications du contrat de vente particulier.
J'ajouterais qu'aujourd'hui plus de 60 p. 100 du grain — blé et orge destinés à la consommation humaine — exporté par le Canada est vendu par des négociants privés. Aussi, les prophéties de malheur que vous lancez, en disant que le ciel va nous tomber sur la tête, sont loin de la vérité.
L'autre aspect qui vous échappe, contrairement à vos affirmations, c'est le prix. Le prix est fixé par la Bourse de commerce de Chicago et la Bourse des céréales de Minneapolis.
Un autre argument que j'ai souvent entendu ces derniers temps, c'est que le port de Churchill va s'effondrer, que la ville de Churchill va s'effondrer si nous perdons le monopole. Si c'est vrai, je dois demander combien on prélève sur mes chèques pour subventionner la ville et le port de Churchill? C'est un argument plutôt creux. Si c'est vrai, alors c'est tout le Canada qui devrait subventionner le port de Churchill. Si c'est un port viable pour expédier le grain, ce qui est le cas à mon avis, alors il devrait pouvoir livrer concurrence sur un pied d'égalité pour l'exportation du grain.
Par conséquent, cet argument ne sonne pas très vrai à mes oreilles.
J'ai une autre question. Lorsque les membres du conseil d'administration agissent à titre de représentants de la Commission, est-ce que le code de conduite les empêche de se livrer à des activités politiques partisanes et, si oui, qui contrôle? Sinon, quelles sont les conséquences si un administrateur outrepasse ses attributions?
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Je m'inscris en faux contre ces propos, respectueusement, et j'aimerais pouvoir réfuter chacun d'eux.
Nous ne faisons pas les choses comme nos concurrents. Nous offrons un meilleur service et un meilleur soutien technique. Nous clients nous le disent régulièrement. Je n'invente pas, c'est ce que nos clients nous disent. Ils aiment ce qu'ils achètent au Canada. Ils aiment les produits de nos agriculteurs.
Je conviens avec vous que les cultivateurs ont fait preuve de beaucoup de discipline pour produire ce que les clients veulent. Mais c'est un élément de notre rôle de répercuter cette information auprès des agriculteurs et d'assurer qu'ils comprennent bien quels produits sont demandés.
Nous offrons un soutien technique tant avant qu'après la vente. Ils ne trouvent pas cela auprès d'autres fournisseurs et ils l'apprécient.
Nous leur montrons comment utiliser ces produits sur leur marché. Nous leur montrons comment en retirer la plus grande valeur. Ils apprécient cela.
Je ne conviens donc pas que les autres systèmes pourraient apporter cela ou que tout cela existera avec le nouveau système, car ce n'est pas ce que les autres systèmes offrent aujourd'hui.
Vous dites que nous ne pouvons pas contrôler le prix. J'admets que nous ne pouvons pas contrôler le cours global international ou le marché à terme. Les États-Unis sont le plus gros exportateur de blé. Mais nous parvenons à arracher des prix supérieurs sur un certain nombre de marchés. Nous pouvons offrir notre blé à un prix supérieur à celui du blé américain et la différence va intégralement aux agriculteurs. C'est très important. C'est ce que le comptoir unique vous permet de faire. Vous ne vendez pas à tout le monde au même prix. Nous différencions les prix. Nous différencions en fonction de la qualité, en fonction du client et en fonction de la situation sur un marché donné afin de maximiser la valeur pour les producteurs.
C'est donc différent et nous exerçons un certain contrôle sur ce différentiel de prix. Simplement, nous ne contrôlons pas le cours international global du blé.
C'est différent dans le cas de l'orge de brasserie et du blé dur. Nous sommes un très gros acteur sur le marché de ces deux denrées. Si nous nous montrons agressifs sur ce marché international, cela pourrait avoir un gros effet sur le prix. Je pense que si vous ouvrez les vannes et déversez quatre millions de tonnes de blé canadien sur ce marché international, cela aurait un effet très sérieux sur ces prix.
Nous avons choisi de recourir à des exportateurs accrédités pour écouler une partie du volume. Vous avez dit que c'était environ 50 p. 100. Cela varie chaque année, mais c'est un chiffre raisonnable. Nous vendons à peu près la moitié en direct. L'autre moitié environ est écoulée par le biais d'exportateurs accrédités. Dans tous les cas, nous contrôlons le prix du produit. Nous veillons à ce que les agriculteurs récupèrent la valeur maximale de cette transaction de vente.
Il est très difficile — et c'est un facteur très important lorsqu'on parle de marché ouvert — d'avoir des bureaux dans le monde entier. Il nous en coûte entre 600 000 $ et 900 000 $ pour avoir un bureau à Tokyo et un bureau à Beijing. Si nous avions des bureaux dans tous les pays du monde comme c'est le cas de certaines grosses compagnies multinationales qui vendent beaucoup de produits différents dans beaucoup de régions différentes, ce serait très coûteux. C'est pourquoi nous avons choisi d'écouler une partie du grain par l'entremise d'exportateurs accrédités et une partie directement. Nous pensons que c'est une façon très rentable de le faire.
Cela nous aide à gérer le risque. Certains marchés sont soumis à des influences politiques énormes — l'Irak en est certainement un — où nous devons faire attention à la façon de l'aborder, en tant que Canadiens. Nous avons recours à des exportateurs accrédités dans un tel cas parce que nous nous voulons pas assumer les risques correspondants.
Pour ce qui est de Churchill, j'ai dit — et je maintiens — que l'avenir de Churchill sera très difficile sans la Commission canadienne du blé. Je le dis parce que nous sommes obligés de faire transiter le grain par Churchill. Les compagnies privées ne veulent pas envoyer de grain à Churchill. Les plus grosses compagnies possèdent des terminaux à Thunder Bay, à Vancouver et sur le Saint-Laurent et préfèrent que le grain passe par leurs terminaux. Vous ne subventionnez rien de ce qui va à Churchill. Nous le faisons parce que le transit par Churchill offre le meilleur rendement pour les agriculteurs. Mais si nous ne contrôlons pas le mouvement et ne pouvons expédier ce grain par Churchill, la priorité de ces compagnies sera de le faire passer par leurs propres terminaux, comme on le voit avec les denrées hors-CCB. Nous représentons 80 p. 100 du volume de fret de Churchill.