:
Je déclare la séance ouverte.
Nous avons un petit problème ce matin. Les représentants de l'Ontario Apple Growers sont coincés à Hamilton. Il y a du brouillard et ils seront sans doute en retard.
Nous avons une motion par laquelle nous pourrions commencer. Nous faisons également passer une carte pour Jean-François, notre greffier habituel, puisqu'il a perdu son père cette fin de semaine. Il est donc en congé pour des raisons personnelles et pour assister aux funérailles. Il faut d'abord signer cette carte.
Nous allons passer un peu de temps sur la motion de M. Bezan et sur les autres éléments à l'ordre du jour et dès que les représentants de l'Ontario Apple Growers arriveront, nous leur donnerons la parole. J'ai pensé à faire passer les représentants du tabac avant, mais ils ne sont pas encore arrivés non plus. Malheureusement, nous sommes obligés d'avoir un temps mort.
Commençons par la motion. Monsieur Bezan, voulez-vous nous présenter votre motion?
En tant que producteur bovin qui a beaucoup souffert de la crise de l'ESB, en consultation avec certains de mes collègues, je souhaite présenter une motion sur toute la question des contingents tarifaires.
Comme vous le savez sans doute, vendredi, le département de l'Agriculture des États-Unis a fait parvenir la règle à l'Office of Management and Budget. L'OMB est donc contraint d'examiner cette règle et d'entamer le processus qui permettra d'ouvrir la frontière aux bouvillons de plus de 30 mois.
Le problème, pour moi et bien d'autres personnes du secteur, c'est que, traditionnellement, nous avons toujours appliqué un contingent tarifaire pour les pays non membres de l'ALENA. Cette règle s'applique rigoureusement depuis 2003, depuis la crise de l'ESB. Nous demandons que les contingents tarifaires soient respectés et que les entreprises au Canada qui utilisent du boeuf transformé pour leurs produits de charcuterie ou autres puissent obtenir la majorité de leurs produits à l'étranger, par le biais des contingents tarifaires, ou d'autres partenaires de l'ALENA, comme le Mexique et les États-Unis. Donc, ce que l'on dit, c'est que l'on est d'accord pour que les contingents tarifaires restent la pratique courante et nous demandons, s'il faut augmenter les importations, que le ministre des Affaires étrangères, qui est responsable des contingents tarifaires, explique à la Chambre pourquoi il souhaite augmenter les contingents.
Messieurs, nous n'arrivons pas tout à fait à 1,5 million de kilogrammes, parce que 1 kilo fait 2,2 livres et non pas 2 livres. Alors, nous allons garder les 76 405 tonnes. On peut écrire tonnes métriques pour être plus précis. C'est donc 76 405 tonnes métriques. Ça va?
D'accord, nous allons garder ce libellé.
Y a-t-il d'autres interventions sur cette motion?
Souhaitez-vous adopter cette motion telle qu'amendée, les « 1,5 million de kilogrammes » étant remplacés par « 76 405 tonnes métriques »?
(La motion est adoptée [voir leProcès-verbal].)
Le président: Voulez-vous que la motion soit renvoyée à la Chambre, James?
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Nous reprenons nos travaux. Nous allons à présent entendre les producteurs de tabac nous parler de la situation en Ontario. J'espère que les producteurs du Québec se joindront à nous sous peu.
Du Ontario Tobacco Board, nous accueillons Fred Neukamm, président, et Richard Van Maele, vice-président.
De Tobacco Farmers in Crisis, M. Brian Edwards, président, et Mark Bannister, vice-président, sont avec nous.
Messieurs, soyez les bienvenus.
Vous disposez chacun de 10 minutes par exposé, après quoi nous souhaiterions vous poser des questions.
Brian, voulez-vous commencer? Ou Mark, avez-vous décidé de partager votre temps?
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Pourquoi les producteurs canadiens de tabac sont-ils en situation de crise?
Les producteurs de tabac sont aujourd'hui fortement endettés et proches de la faillite en raison de politiques gouvernementales contradictoires et trop laxistes à l'endroit du tabac. Depuis 2002, la baisse de l'état des récoltes a nécessité d'investir dans des infrastructures coûteuses, l'augmentation de la contrebande et de la concurrence des produits importés de l'étranger mettant en précarité la situation des cultivateurs de tabac et de leur famille.
En dépit d'un marché toujours existant et licite, ils sont incapables de rembourser leurs dettes et risquent de perdre leur exploitation et leur habitation.
Avec un âge moyen de 58 ans, une dette moyenne de 400 000 $, une dévaluation importante de leur capital agricole et peu ou pas de possibilités de se replacer dans une nouvel emploi, bon nombre de producteurs canadiens de tabac risquent de perdre tous les biens accumulés grâce au dur travail des quatre ou cinq générations précédentes.
[Traduction]
Quelles sont les causes de l'endettement des producteurs?
En 2002, les cigarettiers ont demandé aux producteurs de convertir leurs brûleurs pour éliminer la nitrosamine. C'est ce qu'on nous a demandé de faire. Les cigarettiers ont dit qu'ils n'achèteraient pas de tabac canadien si nous ne convertissions pas nos brûleurs. Nous avons donc investi plus de 65 millions de dollars dans cet équipement.
Il a fallu faire un choix: soit nous restions dans le tabac, soit nous passions à autre chose parce que la conversion des brûleurs coûtait trop cher. Tobacco Farmers in Crisis a utilisé l'année 2002 comme année de référence. Le Comité consultatif du tabac a indiqué que sans une telle conversion de nos brûleurs, le tabac canadien serait séparé des autres et ne serait pas assujetti aux accords du CCT.
À ce moment-là, nous avons pris une décision. Oui, nous avions un avenir stable, selon l'entente signée en 2002. Sur les documents que nous vous avons fournis figurent des exemples des accords du CCT de 2002, 2003, 2004 et 2005. Nous avions une entente de trois ans avec deux exercices ultérieurs de récoltes stables.
Dans ce contexte, les agriculteurs ont cru à un avenir stable. Nous pensions pouvoir planifier nos dettes et le remboursement de celles-ci. Aujourd'hui, notre production a diminué de 50 p. 100. Il est impossible de survivre. Nous ne pouvons plus rembourser nos dettes et notre production représente seulement 20,4 p. 100 de nos contingents. Cette année, lors des négociations du Comité consultatif du tabac, les cigarettiers ont dit qu'il n'y avait plus d'avenir. Nous voulons que les choses changent.
Actuellement, les cigarettiers ne nous soutiennent plus. Les gouvernements nous abandonnent. Pourtant, nous sommes ici aujourd'hui, au Comité de l'agriculture. Malheureusement, il ne lui reste qu'à constater les dégâts.
Il y a cinq ans, le gouvernement fédéral a amorcé une stratégie de lutte contre le tabagisme sur 10 ans. Il y a investi 450 millions de dollars. Santé Canada a dit que le tabac serait débanalisé, ce qui veut dire que nous allions taxer ce produit pour décourager les adultes et les jeunes de fumer. En tant qu'agriculteurs, nous sommes favorables à cela. La politique sur la santé est bonne. Si vous consommez du tabac, vous allez sans doute tomber malades. La politique de taxation du tabac va rester. Elle ne sera pas éliminée. Tous les parties s'entendent sur cette politique, qui consiste à augmenter le prix du tabac pour décourager les jeunes et les adultes de fumer.
Il existe des précédents dans le monde. Nos voisins, par exemple, ont éliminé les contingents sur le tabac. Ils ont fixé les prix à 10 $ pour tous. Ce paiement est divisé entre le propriétaire du contingent et les producteurs du tabac.
Dans un autre pays du Commonwealth, l'Australie, les producteurs de tabac ont été rachetés, si l'on veut. Plus personne ne produira de tabac en Australie. Tobacco Farmers in Crisis et les producteurs de tabac demandent un programme qui leur permette de changer de secteur d'activité. C'était un métier légitime, et il l'est encore.
Le gouvernement du Canada empoche 9 milliards de dollars en taxes sur le tabac. Les cigarettiers font plus d'un milliard de dollars en profits. Il existe une économie souterraine évaluée à près d'un milliard à un milliard et demi de dollars par les cigarettiers eux-mêmes, d'après des enquêtes, et auprès de nos amis propriétaires de dépanneurs. Ce sont eux qui ont colligé ces données. On leur a demandé « Comment avez-vous obtenu ces chiffres? Sur quelle étude vous êtes-vous fondés? » C'était très simple: vous marchiez sur le trottoir, ramassiez les mégots de cigarette qui restaient et vous pouviez déterminer l'importance du marché noir.
Notre conseil d'administration demande depuis 2001 un programme de rachat soit mis en place. Quand Bob Speller était ministre, on nous a promis un programme d'aide à l'adaptation. Malheureusement, en raison des élections, le programme n'a vu le jour qu'un an et demi plus tard, ce qui a causé des problèmes économiques parce que les transactions qui auraient dû être conclues ont été reportées. Le gouvernement fédéral a dépensé 67 millions en un an et pour ce qui est de l'objectif visé, nous en sommes maintenant à 20 p. 100 alors que nous en étions à 31 p. 100 après le programme. Cette année, les producteurs de tabac accuseront un manque à gagner de 69 millions de dollars.
Les cigarettiers déclarent que les choses doivent changer. L'infrastructure est trop lourde. Le nombre de producteurs est trop important par rapport aux récoltes qu'on anticipe dans l'avenir. À l'heure actuelle, nous sommes pris au piège; il n'y a pas de voie de sortie. On attend l'inéluctable. En effet, les revenus tirés des récoltes diminuées ne nous permettent pas de maintenir nos activités, d'acheter les quotas et de financer l'infrastructure.
Nos actifs ont été détruits. Voilà pourquoi nous demandons au gouvernement fédéral de respecter la Convention-cadre pour la lutte antitabac, notamment les articles selon lesquels les producteurs de tabac qui désirent abandonner le secteur devraient pouvoir se recycler. À l'heure actuelle, nous ne voyons aucune porte de sortie.
Les représentants de la commission du tabac demandent la même chose, à savoir un programme de sortie pour les producteurs. Des évaluations ont déjà été effectuées. En fait, il y a un examen qui a été effectué en 2004 par Médecins pour un Canada sans fumée afin d'indemniser les producteurs de tabac pour leurs investissements dans le secteur, on parle de leur donner 3 $ la livre pour racheter les quotas. Notre association a effectué une évaluation elle aussi fondée sur le modèle américain.
Combien faut-il payer pour continuer à vendre? Pour le cigarettier canadien qui vend ses produits aux États-Unis, il faut débourser 10 $ la livre pour les producteurs américains. Comment cela fonctionne-t-il? Il y a une taxe sur le produit qui est prélevée par le département de l'Agriculture, qui touche l'argent déboursé par les consommateurs. Nous demandons qu'un programme soit mis en place immédiatement pour venir en aide aux producteurs de tabac. Il faut agir immédiatement.
Merci beaucoup.
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Merci, monsieur le président, et bonjour.
Tout d'abord, j'aimerais vous remercier de nous avoir invités à comparaître ce matin. Je m'appelle Fred Neukamm et suis président de l'Ontario Flue-Cured Tobacco Growers' Marketing Board. Notre vice-président, M. Richard Van Maele, m'accompagne.
Ce matin, j'aimerais vous faire comprendre autre chose: premièrement, qui nous sommes; deuxièmement, la gravité de la situation et l'aide dont nous avons besoin; troisièmement, les politiques gouvernementales des dernières années sont responsables de notre situation actuelle; et quatrièmement, il existe une solution.
Comme je vous sais très occupés, je tenterai d'être bref.
Notre conseil représente l'ensemble des producteurs de tabac jaune de la province de l'Ontario, à savoir environ 1 000 familles agricoles. C'est en 1957 que la province a établi notre conseil de commercialisation et depuis nous nous occupons de la production, de la commercialisation et de la défense des droits des producteurs. Notre conseil comprend 11 producteurs dûment élus. Tous les administrateurs, y compris Richard et moi-même, sont agriculteurs dans le sud-ouest de l'Ontario, du comté de Brant jusqu'à la région de Chatham.
Nous sommes également responsables de l'application d'un cadre réglementaire strict relativement à la production de tabac qui nous permet de nous assurer que l'ensemble du tabac produit est vendu légalement dans la province par le biais de notre système d'encans.
Voilà pour ce qui est de notre association.
Comme l'a dit Brian de façon si éloquente, nous sommes pris au piège. Les agriculteurs ont investi les fruits de toute une vie de travail dans les équipements propres à la culture du tabac, leurs exploitations et par conséquent, sont fortement endettés. Dans bien des cas, nous sommes des cultivateurs de tabac de deuxième ou troisième génération et n'avons aucune porte de sortie.
Le gouvernement du Canada, à titre de signataire de la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l'Organisation mondiale de la santé et par le biais de ses propres politiques ciblées, accorde une grande importance à la lutte au tabagisme. L'effondrement de la production de tabac au Canada est l'une des conséquences de cet engagement politique. En effet, notre production est passée de 150 millions de tonnes en 1998 à 55 millions de tonnes en 2006. Cela représente un manque à gagner de plus de 200 millions de dollars chaque année.
Nos revendications s'inscrivent dans la logique de ces politiques gouvernementales qui ont pour objet de réduire de façon significative le tabagisme et qui ont porté fruit. C'est pour cela que les producteurs de tabac se retrouvent dans cette situation dramatique. Nous sommes d'avis que les politiques gouvernementales devraient comprendre un volet qui permettrait aux producteurs d'abandonner la production de tabac.
L'heure est venue de mettre un plan en place qui permettra d'éradiquer la production de tabac au Canada au moment opportun. Nous voulons régler ce problème une fois pour toutes. Au printemps dernier, nous avons proposé un plan au gouvernement qui permettrait d'éliminer la culture du tabac sur une période précise. Divers principes sous-tendent notre proposition: la possibilité pour l'ensemble des producteurs de tabac jaune d'avoir accès au plan, une aide suffisante pour qu'ils puissent cesser de cultiver le tabac et une indemnisation pour la perte de leur gagne-pain.
Les collectivités dont l'économie est tributaire de la production du tabac doivent également se voir attribuer une certaine aide pour assurer la transition vers une nouvelle base économique. Ainsi, les investissements devront se faire dans le secteur agricole et dans le secteur non agricole pour que la transition puisse se faire.
Nos propositions et nos idées ont été soutenues par des députés de tous les partis et nous travaillons en étroite collaboration avec tous les paliers de gouvernement sur ce dossier. Nous sommes heureux de voir que notre proposition a été prise au sérieux. Par contre, l'heure de vérité approche à grands pas. L'an dernier, notre production est passée de 85 millions de livres à 55 millions de livres, ce qui représente une diminution de 35 p. 100 en un an. Cela s'est traduit par un manque à gagner de 60 millions de dollars dans notre région en un an à peine.
C'est la première fois que nos producteurs se retrouvent dans une situation financière aussi précaire. Beaucoup d'entre eux ne pourront pas attendre plus longtemps et les populations de nos collectivités n'ont jamais été aussi anxieuses. L'heure est venue d'aborder la question de la production de tabac de façon honnête et adulte et de mettre en place un plan qui nous permettra de gérer la disparition progressive du tabac jaune au Canada. Nous demandons au gouvernement de régler le problème une fois pour toutes.
Merci, monsieur le président.
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Permettez-moi de vous donner un autre exemple, la collectivité de Tillsonburg. Cette ville devrait être relativement prospère, étant donné que sa base économique est légèrement plus diversifiée, mais les détaillants locaux, que je connais personnellement, se plaignent du fait qu'il n'y a pas d'achalandage, que plus personne n'entre dans leurs magasins.
C'étaient les producteurs de tabac qui faisaient vivre nos entreprises. Ils allaient au centre-ville pour y dépenser les fruits de leur dur labeur. Je connais des détaillants dont le chiffre d'affaires pour le mois de décembre uniquement il y a 10 ans, à l'époque où le secteur du tabac était florissant, était plus important que ce qu'ils peuvent gagner aujourd'hui en 12 mois. Dans les rues de Tillsonburg aujourd'hui, les portes des commerces sont fermées. Et pourtant Tillsonburg était l'une de ces collectivités dont le centre-ville était toujours florissant; la ville servait de modèle à beaucoup de petites régions rurales.
C'est le tabac qui était le moteur économique des collectivités locales et les producteurs qui faisaient vivre ces communautés. Ce qui est triste, c'est qu'à l'heure actuelle, le producteur est incapable de faire vivre sa collectivité. En effet, les cultivateurs sont en mode survie, si vous me permettez l'expression, c'est-à-dire qu'ils font de leur mieux pour survivre. Malheureusement, ce sont les collectivités locales qui en payent le prix, au bout du compte, qu'il s'agisse de commerces ou d'organisations caritatives, même. Les agriculteurs sont tout simplement incapables de soutenir financièrement leurs collectivités locales.
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Bonjour et merci de nous recevoir et de nous permettre de présenter le point de vue des producteurs de tabac du Québec. Nous sommes trois délégués de l'Office des producteurs de tabac jaune du Québec: moi-même, Christian Boisjoly, directeur régional du district de Lanoraie et conseiller linguistique, Nicolas Asselin, secrétaire trésorier, qui devrait se joindre à nous sous peu, et Luc Hervieux, vice-président.
Nous aimerions présenter un bref historique de la crise du tabac. Cette culture, qui a permis à trois générations d'agriculteurs de la région de Lanaudière, de la Mauricie et même de l'Outaouais de vivre de leurs efforts et de créer une richesse individuelle, familiale et régionale, a subi un coup dramatique en mars 2003, lorsqu'une des grandes compagnies, RBH, c'est-à-dire Rothmans, Benson & Hedges, a subitement décidé d'interrompre ses achats au Québec. Une onde de choc a frappé l'ensemble des producteurs, car deux ans auparavant, RBH, de même que Imperial Tobacco et JTI-MacDonald, avaient tous exigé la reconversion totale des unités de séchage de tabac, soit 725 unités au Québec, à grands frais pour les producteurs, mais qui laissait présager un marché à long terme. Malgré les demandes de contacts, de représentations et de discussion, l'attitude cavalière de RBH ne changea pas. Les autres compagnies importantes nous ont fait connaître, au cours des mois suivants, leurs offres et leurs plans pour le futur, soit une réduction énorme en 2003 et des achats minimes et finaux en 2004, mettant pour ainsi dire fin à plus d'un demi-siècle de production de tabac au Québec.
En réponse à cette crise, notre office a rapidement entamé des contacts avec les médias, les élus, les responsables municipaux, provinciaux et fédéraux dans le but de trouver collectivement des solutions à court, moyen et long terme. La réaction régionale en a été une de stupeur, car l'apport économique de cette culture était importante en termes d'emplois directs et indirects, de même qu'en termes de répartition des richesses. On n'a qu'à penser aux nombreux fournisseurs liés à la culture, soit les fournisseurs d'engrais, d'équipement agricole, le milieu de l'énergie, les assurances, etc. Le soutien s'est donc organisé, et la réponse du gouvernement provincial et de ses fonctionnaires a été plutôt rapide, même si elle était parfois lourde — beaucoup de paperasse en tout genre — et incomplète. J'invite les membres du comité à consulter, si ce n'est déjà fait, les différents dossiers en annexe que nous avons fait parvenir au comité la semaine dernière.
Au niveau fédéral, différentes tables rondes ont eu lieu dès décembre 2003 auxquelles notre office, l'OPTJQ, par l'entremise de Gaétan Beaulieu, son président, a été convié pour discuter de la problématique de la production du tabac au Canada. Car si le Québec se faisait montrer la porte, l'Ontario voyait sa production graduellement diminuer. Les échanges ont mené à l'introduction du programme TAAP, le Tobacco Adjustment Assistance Program. L'annonce en a été faite le 4 mai 2004. En gros, l'idée était d'offrir un montant global, 67 millions de dollars, d'abord aux producteurs ontariens qui voulaient se retirer de la culture du tabac. Le gouvernement fédéral achetait leurs quotas lors d'une enchère inversée, au printemps 2005. Le but du programme était surtout de rationaliser l'offre pour les producteurs ontariens.
Deux problèmes majeurs se posaient pour les agriculteurs québécois, le premier étant que nous n'avions pas voix au chapitre, c'est-à-dire que nous subissions une décision antidémocratique et injuste, et le deuxième étant que, dans notre cas, il ne s'agissait pas de rationaliser la culture, mais bien d'y mettre fin. Selon le représentant du précédent gouvernement, le programme TAAP était une étape en vue d'un programme plus complet, à long terme, et les sommes finales fixées par l'enchère inversée, qui ont été finalement de 1,05 $ par livre de quota, seraient également versées aux producteurs du Québec, de façon équitable.
M. Beaulieu, après avoir tenté d'expliquer la différence des systèmes de quotas entre l'Ontario et le Québec — ici, il faut se référer à l'annexe 1 où on parle assez clairement du facteur équilibrant de 1,6 — a accepté les sommes du fédéral, au nom de l'OPTJQ, mais en stipulant qu'elles étaient insuffisantes. Il s'appuyait sur une étude de AGÉCO, une firme indépendante qui a produit un rapport en 2004 et qui a été payée par le fédéral pour évaluer les fermes de tabac au Québec. Chacun des producteurs a été visité à la ferme et a dû présenter tous les dossiers nécessaires à l'étude.
Puis, il y a eu un changement de gouvernement. Les représentants de l'OPTJQ ont à nouveau été invités le 6 juin à rencontrer Mme Christine Bakke et M. Donald Boucher à l'édifice d'Agriculture Canada, où ils ont de nouveau présenté leurs demandes qui, soit dit en passant, ressemblent étrangement aux requêtes de l'Ontario, mais en convertissant les chiffres à la réalité québécoise: le fameux 1,6. Ils ont aussi expliqué de nouveau la problématique avec des ajouts nouveaux, notamment la difficulté de se reconvertir en termes de financement, de marché et de relève agricole. La réaction à cette rencontre du ministre Chuck Strahl a été de nous faire parvenir une lettre, le 26 septembre 2006, nous invitant à participer à une table ronde de l'industrie du tabac, à une date ultérieure.
Nous voici donc ici aujourd'hui représentant l'ensemble des producteurs du Québec pour vous dire qu'après trois ans d'incertitude, de stress, d'essais de cultures de remplacement multiples, parfois fructueuses mais fragiles, souvent infructueuses, notamment en raison de marchés saturés ou contrôlés, la situation pour la majorité des anciens producteurs est difficile et, dans certains cas, précaire. Seulement 25 p. 100 de ceux-ci ont arrêté leur choix sur une nouvelle culture.
En conclusion, nous vous disons que les pertes occasionnées par la fermeture des marchés au Québec fragilisent la situation économique des entreprises et limite leur capacité à se diversifier vers d'autres marchés exigeant des investissements et des apprentissages de taille. Et si les chiffres présentés à l'annexe 2, auxquels il manque 1,82 $ la livre de quota, se retrouvaient dans les mains de nos agriculteurs fiers et travaillants du Québec, il y aurait à tout le moins de la justice, voire de l'espoir.
Nous tenons à rappeler aux membres du comité que nous félicitons l'OFCTGMB, l'office ontarien, de ses efforts afin de trouver des solutions à la crise canadienne du tabac, de même que le TFIC, duquel la majorité des producteurs québécois sont aussi membres, pour les pistes de solution qu'il propose en vue d'une solution pancanadienne qui respecte le Québec.
Nous vous remercions et nous restons disponibles pour répondre à vos questions.
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On parle évidemment de gros sous, et la réalité de la gestion de ces quotas donne une toute autre image. La réalité, c'est que historiquement, au Québec, les gens produisaient encore 60 p. 100 de leurs quotas de base, grosso modo, surtout vers la fin. En Ontario, cela faisait quand même un bon bout de temps que les gens étaient rendus à 40 p. 100. Par contre, l'argent qui est demandé se rapporte toujours aux quotas de base, et c'est là qu'il y a une sérieuse différence entre les deux chiffres.
En ce qui concerne l'autre réalité, vous m'avez demandez d'expliquer la différence la plus importante entre les quotas du Québec et ceux de l'Ontario. On revient encore au Programme d'aide à l'adaptation des producteurs de tabac, le PAAPT, qui visait à rationaliser l'offre, tandis que c'était terminé pour le Québec, c'était final. Aucun programme n'était prévu pour faire face à la réalité du Québec qui, lui, n'est plus du tout dans le marché. En Ontario, au fond, c'était pour ceux qui étaient encore dans le marché, pour leur permettre de subsister un bon bout de temps. On va rationaliser, on va permettre à ceux qui ont des quotas d'en vivre et on va permettre à ceux qui veulent se retirer, justement, d'enlever leur offre du marché. Dans le cas du Québec, il n'y avait plus d'offre. Alors, c'est une aide, mais ce n'est certainement pas l'aide à laquelle on s'attendait.
D'ailleurs, on le voit aujourd'hui, car les gens de l'Ontario, je pense — je n'ai pas écouté les discours précédents, mais on a de bonnes communications entre nous —, ont aussi un programme assez complet pour que les gens se retirent, mais environ deux ou trois ans après que nous ayons vécu cette réalité.
On constate donc qu'il y a un manque à gagner pour eux aussi. Je pense qu'on parle de 3,30 $, dans le cas de l'office ontarien, pour les gens qui veulent se retirer. Alors, c'est la preuve que la somme de 1,05 $ que nous avons eue n'est vraiment pas suffisante. C'est pourquoi on tient à s'ajuster. D'ailleurs, on s'appuie sur leurs chiffres pour défendre notre point de vue, sans toutefois oublier le facteur de conversion, parce que la réalité du Québec est très différente, surtout en ce qui concerne les quotas.
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Ils font toujours de la recherche et des tests. Il y a plusieurs exemples. Dans mon cas, j'ai essayé de cultiver le haricot, entre autres. La première année, le rendement était très bon. C'était intéressant et formidable, sauf que lorsque le temps est venu de livrer la marchandise, l'acheteur n'était pas solvable. J'ai dû engager un avocat pour me défendre et, heureusement, récupérer mes biens.
Mais prenons le cas de Nicolas, qui n'est pas présent. C'est un des membres de notre organisme; il est secrétaire-trésorier. Même s'il s'agissait de plus petits montants d'argent, il a dû faire face à rien, finalement, et les autorités ont dû s'impliquer. Moi, j'ai passé, mais pas lui.
Parfois, ce sont ceux qui cultivent des jardins, des fruits et légumes, qui déclarent faillite. Certains producteurs avaient investi jusqu'à 75 000 $ et attendaient des rentrées d'argent, mais il n'en ont pas eu. Évidemment, l'année suivante, ils ont essayé de s'organiser en cultivant un autre fruit ou un autre légume, quelque chose d'autre. Ce n'est vraiment pas évident, quand on recherche des marchés. Les gens ont encore de l'énergie pour continuer, mais ces tentatives de développer des marchés ont grignoté beaucoup de sous. Et maintenant, nous faisons face au nouveau problème de la relève. Quand des enfants qui ont l'âge de reprendre une entreprise familiale voient leurs parents vider graduellement le bas de laine, cela ne les incite pas nécessairement à se diriger dans le domaine de l'agriculture. Mais si on pouvait avoir de l'argent et un nouveau financement afin de cultiver un produit pour lequel il y a un certain marché, alors il y aurait un espoir.
C'est un peu ce à quoi on fait face, comme beaucoup de gens en Ontario, j'imagine.
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Merci, monsieur le président.
Je voudrais remercier tous les témoins qui, en dépit de leur horaire chargé, ont accepté de comparaître devant le comité.
Je sais que M. Finlay, qui prône un plan de retrait pour le secteur, tente de faire valoir sa cause auprès du conseil des ministres, du premier ministre et du caucus. Je suis un de ces agriculteurs qui a été touché par la crise de l'ESB et suis également membre du caucus, mais je vous avoue que je ne comprends pas pleinement les ramifications. Je sais que dans vos exploitations agricoles, vous avez des investissements en capital importants, qu'il faut prendre en compte l'aspect réglementaire et que vous faites face à une concurrence venant d'ailleurs.
J'aimerais que vous éclairiez ma lanterne. Vous avez parlé de transition, mais y a-t-il des cultures de remplacement? J'espère que vous n'allez pas tout simplement abandonner vos fermes et arrêter de cultiver vos terres. J'espère qu'il existe des cultures de remplacement, mais quelles sont-elles? Comment vos communautés vont-elles évoluer?
Que voulez-vous au juste qu'on propose au gouvernement? Quel est ce programme de rachat et de transition auquel vous faites allusion?
:
Non. Il y a quelques années, notre superficie était d'environ 50 000 acres. Nous alternons. Nous ne faisons pas de récoltes successives du tabac. La production de cette année couvre environ 25 000 acres, donc une bonne partie de la superficie est déjà occupée par des cultures couvre-sol et d'autres cultures.
On a déjà fait énormément de recherches sur les cultures de remplacement. Dans certaines provinces, il y a des ministères qui y travaillent depuis plus de 25 ans. Certains de nos agriculteurs continueront à exercer leur métier si une stratégie de sortie leur permet de passer à une autre culture. À notre avis, d'autres feraient mieux de rembourser leur dette et de changer de métier complètement — soit en se recyclant, en se lançant en affaires ou en cherchant un emploi non agricole.
Nous pensons également que les terres les plus fragiles devraient être reboisées.
Nous espérons que certaines des idées novatrices actuelles, comme la production de biomasse pour les matières premières de l'éthanol, par exemple, pourront se concrétiser.
Je pense qu'il y a toutes sortes de solutions possibles. Il n'existe pas une solution miracle.
Je suis désolé, j'ai oublié la deuxième partie de votre question.
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J'aimerais continuer dans la même veine, au sujet de ce qui a été dit plus tôt.
J'espère que vous n'êtes pas des précurseurs pour toutes les petites collectivités agricoles. Si nous continuons dans cette voie, je crois que votre situation s'appliquera à tout le Canada rural. Il est évident qu'il faut réagir.
Je n'ai pas pu m'empêcher de faire cette observation.
Par ailleurs, et James en a parlé tout à l'heure, c'est vrai qu'il existe encore des fumeurs. Rothmans et les autres sont loin de fermer leurs portes. Le fait qu'ils aient arrêté d'acheter leur tabac aux producteurs québécois ne veut pas dire qu'ils se sont retirés du secteur du tabac.
Je parlais à une personne qui travaille dans le domaine hors taxes dans ma circonscription et qui me disait que si les cigarettiers quittent le Canada, il faudra acheter les cigarettes au Mexique et cela lui coûtera plus cher.
Pensez-vous que les grands cigarettiers sont en train de se détourner du Canada? C'est ma première question. Par ailleurs, qu'est-ce qui explique cette tendance, le cas échéant? Est-ce l'économie souterraine qui n'est pas surveillée, ou des pressions de...? Je m'arrêterai là pour l'instant.
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Monsieur le président, c'est une excellente question et j'aimerais y répondre.
À notre avis, le problème a commencé lorsque le gouvernement, voulant réduire le nombre de fumeurs, a lourdement taxé le produit. Cela a donné naissance à cette vaste économie clandestine de cigarettes dont la plus grande partie vient d'autres pays, les États-Unis ou les pays d'Extrême-Orient.
Pour protéger leur rentabilité et leur part de marché, les principaux fabricants de cigarettes ont décidé de lancer des marques de cigarettes à prix réduit. Pour le faire, ils ont augmenté sensiblement les quantités de tabac importé entrant dans la fabrication de ces produits.
Il n'y a pas si longtemps, les cigarettes licites produites au Canada contenaient environ 90 p. 100 de tabac canadien. Les cigarettiers importaient une très petite quantité de tabac, surtout certains grades ou styles qu'ils ne pouvaient pas obtenir des producteurs ontariens ou québécois. Mais pour protéger la rentabilité de leur entreprise, ils ont accru considérablement leurs importations, si bien que les cigarettes canadiennes illicites contiennent désormais probablement 50 ou 60 p. 100 de tabac canadien. Cela a entraîné une diminution rapide de nos récoltes et nous a plongés dans la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant.
Tant que cela leur sera rentable, ils continueront à vendre des cigarettes au Canada. Imperial Tobacco Canada Limitée, qui est une filiale de British American Tobacco, est la plus grosse compagnie de tabac. Elle a décidé de fermer toutes ses usines au Canada et de transférer toutes ses activités de fabrication au Mexique. Elle a l'intention de continuer à vendre ses cigarettes au Canada, mais toutes les usines de Montréal, et d'Aylmer, où j'habite, ont été fermées au profit du Mexique. Nous nous attendons à ce que les autres importants cigarettiers fassent de même, pour se tirer d'affaires si nécessaire.
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Dans nos négociations, notre Comité consultatif du tabac se servait d'un système à deux prix. Un prix plus élevé s'appliquait au tabac produit et consommé au Canada et un autre prix, au tabac canadien exporté vers d'autres pays.
La politique de lutte contre le tabagisme a coûté cher au consommateur canadien. À une vingtaine de milles d'où j'habite, on peut obtenir une cartouche de cigarettes, dans un sac en plastique transparent pour sept dollars; il y a des points de vente partout dans les réserves autochtones. Dans ces conditions, comment pouvons-nous aider les fabricants et nous aider nous-mêmes, les producteurs? De toute évidence, tout ce tabac échappe aux taxes. Par ailleurs, après les attentats du 11 septembre, personne ne me fera croire qu'il est impossible de savoir si ces cigarettes viennent des États-Unis. Il faudra évidemment changer le lieu d'imposition pour régler le problème.
Les producteurs autochtones ont des droits légitimes garantis par les traités, droits que je reconnais et que nous appuyons. Mais peut-on trouver d'autres moyens pour mettre fin à l'anarchie qui règne dans le domaine du tabac?
Une cigarette se compose de trois éléments: le papier, le filtre et le tabac. Ce n'est pas très compliqué. Nous devons prendre les moyens nécessaires pour savoir ce que l'on produit et ce que l'on consomme.
À l'heure actuelle, nous perdons 1,5 milliard de dollars et cela nous cause un énorme problème à nous les producteurs, car si les cigarettiers jugent qu'on leur permet d'opérer de cette façon, nous devrons prendre part à une guerre des prix.
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C'est à peu près la réalité. On a eu des invitations de la part du nouveau ministre, en effet, mais ça s'arrête à peu près là. Dans le cas du Québec, je vous l'ai mentionné, ça fait déjà trois ans, et les gens sont vraiment étouffés. Évidemment, on a parlé de la situation des producteurs de l'Ontario, qui n'est certainement pas drôle. Leur avenir n'est pas drôle non plus, si on se fie aux nouvelles que l'on entend à l'effet qu'Imperial Tobacco voudrait quitter le marché.
Nous vivons avec cette réalité depuis 2003. Il y a des tables rondes au programme; c'est tout ce qu'il y a. On n'a pas eu de promesses de budget ou même de budget compensatoire urgent, rien de cela. Dans bien des cas, on ne sait pas avec quel argent on passera l'année 2007. Des expériences qui ont marché et qui sont génératrices de revenus importants, comme les cultures de remplacement très semblables à celles que l'on trouve au Québec et dont nous a parlé M. Bannister, il n'y en a pas beaucoup. Même les 25 p. 100 de producteurs qui ont changé de culture ont des revenus de subsistance très moyens. C'est difficile, même pour eux, de continuer à prendre de l'expansion. Les autres font toujours de la recherche et du développement. J'ai mentionné mon cas, mais il y en a bien d'autres qui, comme moi, ont frappé des murs.
En revanche, on parlait d'espoir. Il y a de l'espoir. Entre autres, je reviens d'un voyage à Winnipeg où j'ai assisté à la 4e conférence canadienne des gens intéressés au marché du chanvre. Je parle du marché du chanvre, qui est en expansion au Canada; au Manitoba, on en cultive tout près de 50 000 acres. On a fait des expériences au Québec qui semblent prometteuses. On a des contacts avec plusieurs fabricants et transformateurs. Encore là, on veut mettre sur pied une coopérative. Nous sommes rendus à mi-chemin, mais c'est difficile d'aller plus loin, d'intéresser les producteurs qui se sont déjà fait avoir un peu. Alors, il faut s'assurer d'avoir un appui et une volonté politique.
Dans notre région, nos représentants politiques et les membres de tous les partis politiques provinciaux manifestent beaucoup d'intérêt. Par contre, au fédéral, comme je vous le disais, on en est encore à l'étape des tables rondes. On n'est pas encore rendus à l'étape des solutions.
C'est pour cette raison que nous voulions vous faire part de notre opinion, qui est quand même un petit peu différente de la réalité de l'Ontario. Mais je pense que les producteurs de l'Ontario vont vivre le même scénario sous peu, où plus de gens seront touchés, évidemment.
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La solution appliquée aux États-Unis repose sur la récupération du pouvoir d'achat du quota. C'est-à-dire la base, de même que le pouvoir économique correspondant au quota proprement dit.
En Australie, les producteurs s'étaient associés pour former une coopérative. Ceux qui restaient étaient donc une coopérative et transformaient le tabac pour les fabricants de cigarettes. Ils ont reçu une indemnisation correspondant au montant de leurs parts dans cette coopérative. Il s'agissait de petits producteurs qui avaient mis leurs ressources en commun pour constituer une ferme rentable.
Au Canada, la situation est assez semblable. En Ontario, les quotas s'élèvent à un peu moins de 272 millions de tonnes au total, partagés entre quelque 1 080 producteurs. En 2002, nous utilisions 400 000 livres de nos quotas pour constituer une exploitation agricole rentable. Cette année, les quotas s'élèvent à 544 000 livres, ce qui fait que beaucoup de familles regroupent leurs quotas pour essayer de maintenir leur exploitation agricole.
Nous n'espérons pas, loin de là, faire de chaque agriculteur un millionnaire. Ce sont des familles — mères, pères, filles, et fils. À l'heure actuelle, plusieurs générations travaillent sur la même ferme, avec de plus petits quotas. Nous essayons de trouver le moyen qui permettra à ces générations d'agriculteurs de cesser de cultiver du tabac.
En Australie, on a accordé une exemption fiscale à ceux qui ont quitté l'agriculture complètement lors de rachats antérieurs. Si vous abandonnez l'agriculture, vos actifs ne sont jamais imposés et, sauf erreur, ils demandent que cette exemption d'impôt s'applique aussi à la culture du tabac. Il faut dire cependant qu'en Australie, les agriculteurs ne cultivaient jamais que le tabac; c'était une culture parmi d'autres.
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Merci, monsieur le président, et bienvenue à nos témoins.
J'aimerais faire trois commentaires et poser des questions.
Premièrement, il est parfaitement clair que vous, les producteurs de tabac, éprouvez beaucoup de difficultés dans vos collectivités.
Deuxièmement, ce marché se trouve dans une situation anormale. C'est en fait une politique gouvernementale — la lutte contre le tabagisme — qui vous accule à la faillite. De plus, elle entraîne la consommation d'un tabac plus dangereux au Canada car il est incontestable que le tabac utilisé par les fumeurs aujourd'hui est plus nocif que ne l'était le tabac canadien. Le tabac importé peut contenir beaucoup d'impuretés.
Troisièmement, si vous faites faillite, cela aura forcément un effet sur d'autres produits agricoles et sur les acteurs de ce secteur. Cela ne fait aucun doute.
Voici donc mes questions. Premièrement et surtout, je pense que le ministre de l'Agriculture est un peu mal pris — je suis prêt à le reconnaître — puisque la situation résulte d'une politique gouvernementale et qu'on considère qu'il s'agit d'un problème agricole alors qu'en fait on devrait le percevoir comme un problème général du gouvernement. Le ministre des Finances devrait agir pour corriger la situation, pas seulement Chuck Strahl.
En ce qui concerne vos propositions pour l'avenir, a-t-on convenu d'un plan pour la grande majorité des tabaculteurs, y compris ceux du Québec, y compris ceux de l'organisme Farmers in Crisis et la commission du tabac? Les intéressés se sont-ils entendus sur un plan qui pourrait prévoir l'abandon de la tabaculture, la poursuite de cette activité ou l'abandon graduel? Par ailleurs, ce plan comporte-t-il des mesures de recherche et développement nécessaires pour se tourner vers d'autres secteurs, par exemple l'industrie forestière? Ce plan est-il appuyé par le milieu ou peut-on savoir s'il a la faveur du milieu?
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Monsieur le président, je veux bien répondre à cette question.
Notre proposition est pratiquement identique à celle que l'organisme Tobacco Farmers in Crisis a également présentée au gouvernement. La grande majorité des tabaculteurs appuie notre stratégie. Le journal The Expositor de Brantford a tout récemment fait un sondage en posant la question: « Les derniers producteurs de tabac devraient-ils voir leur entreprise rachetée par le gouvernement? », et je pense que 89 p. 100 des répondants ont répondu oui. Nous avons donc l'appui de la collectivité.
Je ne peux pas répondre précisément pour le Québec, mais nous proposons aussi de relever le montant versé, dans le cadre du Programme temporaire d'assistance au recyclage, aux tabaculteurs qui ont abandonné le secteur en 2005. Je pense que les producteurs québécois seraient d'accord avec notre position car ils ont fait savoir que, bien qu'utile, ce programme était insuffisant pour répondre à leurs besoins. Beaucoup de gens dans notre collectivité, et nous en tant que commission, sont du même avis. L'aide versée était bienvenue et nécessaire, mais ce programme avait quand même certaines lacunes, comme on l'a indiqué clairement.
Le mécanisme choisi pour fixer le prix, l'enchère inversée, mettait en concurrence un agriculteur prêt à tout pour obtenir un peu d'aide contre un autre, ce qui a abouti à l'établissement d'un prix artificiellement bas. Par ailleurs, tous n'avaient pas droit à une indemnité mais nous reconnaissons tous que c'était une solution partielle. Un des buts explicites du plan était de permettre à certains tabaculteurs de cesser leurs activités, dans l'espoir de créer un milieu plus stable pour les autres. Cet objectif a été atteint pendant une brève période, mais notre situation s'est très rapidement détériorée depuis. Je réitère donc que ce programme était utile mais qu'il n'allait pas assez loin.
Excusez-moi, j'ai peut-être oublié un autre élément de votre question.
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Merci beaucoup, mesdames et messieurs, d'avoir réorganisé votre programme pour nous permettre de comparaître devant le comité.
Nous prenons la parole aujourd'hui au nom des pomiculteurs de l'Ontario. Les horticulteurs ont particulièrement souffert financièrement, mais nous savons pertinemment qu'ils ne sont pas seuls. Pour les pomiculteurs, l'effet a été dévastateur. Les pomiculteurs ont vécu deux des pires saisons de mise en marché de mémoire récente, provoquées par des taux de change en baisse, par la surproduction au niveau mondial et par le dumping de pommes sur le marché canadien.
Nos pomiculteurs se sont tournés vers les différents paliers de gouvernement pour que leur soit octroyée de l'aide par le biais de programmes de gestion des risques d'exploitation. Malheureusement, ces programmes n'ont pas permis d'atteindre les objectifs visés et seul un petit pourcentage des producteurs toucheront une aide modeste. Le PCSRA a eu pour résultat une distribution inégale des fonds, de sorte que les pomiculteurs ont reçu beaucoup moins que leurs collègues d'autres secteurs de l'agriculture.
Nous n'avons pas de surproduction de notre fruit national, la pomme, au Canada. Au contraire, les Canadiens sont des importateurs nets. Je ne pourrais pas vous dire quel est le pourcentage a l'échelle nationale, mais sachez que plus de 60 p. 100 des pommes fraîches consommées en Ontario sont cultivées hors du pays. Comme le démontrent les politiques gouvernementales visant à arrêter la transformation de terres agricoles en zones constructibles, comme en Ontario et en Colombie-Britannique, où des lois protégeant les ceintures vertes ont été adoptées, il apparaît que la sauvegarde des terres agricoles est une bonne chose, socialement parlant.
Les pomiculteurs ainsi que les producteurs de fruits de verger ont besoin d'aide pour renforcer leur économie rurale. Au cours des six dernières années, la superficie totale des vergers ontariens est passée de 10 100 à 6 900 hectares. Or, on sait que pour avoir une économie rurale forte, il faut avoir un secteur agricole fort. Les agriculteurs moyens sont partis depuis longtemps, de façon générale, et il ne reste que les meilleurs agriculteurs professionnels.
Nous sommes ici pour demander au gouvernement fédéral d'investir dans l'avenir de notre industrie au moyen de la stratégie nationale de replantation et de continuer ses investissements dans le programme d'auto-gestion du risque pour l'horticulture de l'Ontario.
Nous recommandons aussi qu'une politique privilégiant l'achat de produits canadiens dans toutes les institutions qui reçoivent des fonds gouvernementaux soit mise en oeuvre. Ceci coûterait très peu mais accomplirait beaucoup.
Le mémoire que vous avez entre les mains comprend un aperçu de la stratégie nationale des arbres fruitiers. C'est un sujet que nous avons abordé avec des représentants du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, et nous avons récemment reçu une réponse du ministre nous indiquant que le projet nécessitait encore du travail .
Nous avons demandé qu'un plan d'affaires soit élaboré relatif au réinvestissement dans les vergers ontariens. Malheureusement, le document n'a pas été traduit en français, mais je serais heureux de vous en laisser des exemplaires ou de faire un liste de ceux qui en voudraient pour leur faire parvenir plus tard. En deux mots, il s'agit d'un partenariat établi entre les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que les producteurs visant à augmenter de 25 p. 100 les terres agricoles réservées aux pommes et aux fruits tendres au Canada. On dit que grâce à cette proposition la pomiculture serait grandement renforcée au Canada.
Par ailleurs, quand on a signé le Cadre stratégique pour l'agriculture, l'ancien ministre de l'Agriculture, l'hon. Lyle Vanclief, a promis que l'assurance-production serait disponible à tous les producteurs partout au Canada. Comme cette promesse n'a pas été tenue, les horticulteurs ont adopté un programme d'auto-gestion du risque, et ce, il y a quelque temps déjà.
En Ontario, en vertu du nouveau Cadre stratégique pour l'agriculture, l'assurance-récolte est moins avantageuse et coûte plus cher que par le passé. En effet, 40 p. 100 des pomiculteurs ontariens se sont inscrits au régime d'assurance-récolte. Nombreux sont ceux qui privilégient le programme d'auto-gestion du risque.
Bien que beaucoup pomiculteurs aient profité du régime ontarien, certains ont été mis à l'écart. Ceux-ci se sont rabattus sur le programme d'auto-gestion du risque. Je répète qu'il s'agit d'un partenariat établi entre deux paliers de gouvernement, à savoir le fédéral et le provincial, et les producteurs. Nous estimons qu'il s'agit du meilleur mécanisme pour protéger les producteurs contre les catastrophes climatiques ou financières.
Passons maintenant aux recommandations à l'intention du gouvernement fédéral. Premièrement, appuyer la proposition nationale de replantation des arbres de fruits et des vignes. Deuxièmement, continuer de financer, à hauteur de 60 p. 100, le programme d'auto-gestion du risque jusqu'à ce qu'on puisse mettre au point des outils d'assurance-production plus significatifs. Assurer cet appui au moins pour les années 2006 et 2007, à l'instar de l'accord avec le gouvernement de l'Ontario. Troisièmement, mettre sur pied une politique privilégiant les produits canadiens pour tous les programmes et institutions qui reçoivent de l'argent du gouvernement fédéral.
Nous sommes heureux de vous présenter ce rapport au nom des pomiculteurs ontariens.
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Quoi qu'il en soit, vous voyez ce que je veux dire. Je suis dans ce domaine depuis très longtemps.
Au moment où j'ai repris l'exploitation familiale en 1965, les pommes étaient si peu chères que j'ai arraché tous mes pommiers et j'ai mis de la pelouse. Maintenant, je dois tondre la pelouse, mais c'est toujours mieux que de cultiver des pommes.
Je comprends ce que vous voulez faire avec vos recommandations. La culture des variétés de pommes que les consommateurs veulent acheter n'a rien à voir avec le fait d'acheter canadien ou américain. Le prix n'a pas d'importance. C'est une question de choix. Ce qu'il faut faire au Canada, à mon avis, c'est... J'imagine que votre troisième recommandation — Achetez canadien d'abord — ne s'appliquerait pas uniquement aux pommes mais aussi à de nombreux fruits et légumes frais. Qu'il s'agisse des épinards, ou quoi que ce soit d'autre, je pense qu'il faudrait déployer plus d'efforts pour que les consommateurs achètent des produits canadiens. Si l'on pouvait créer une certaine fierté à acheter nos produits... Parce qu'une pomme de Californie ne sera jamais meilleure que celle-ci.
Alors, que faire? Notre publicité « Achetez canadien d'abord » n'a pas été efficace? Faut-il une politique gouvernementale? Je ne pense pas que le gouvernement doive intervenir dans tous les aspects de notre vie.
Ça m'inquiète, parce que je sais ce qui se produit dans le secteur de la pomiculture. En ce qui concerne les programmes d'aide, il y a un programme de gestion du risque, qui existe mais qui n'a pas encore été adopté par le gouvernement. Si les fruiticulteurs l'adoptait, ce programme s'appliquerait-il à vous comme il s'applique aux producteurs de céréales et aux autres? Pourquoi pas?
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Si vous me le permettez, je vais prendre la parole pendant que Jim retrouve le fil de sa pensée.
Quatre-vingt pour cent des pommes importées au Canada viennent de l'État de Washington, qui produit presque autant de pommes que tout le reste de l'Amérique du Nord réuni. C'est une industrie de pomiculture énorme. Lorsqu'ils augmentent les prix ou vendent leur production aux trois plus grands détaillants d'épicerie de l'est du Canada en leur donnant d'énormes incitatifs pour promouvoir les fruits de l'État de Washington, il est très difficile pour nous de leur faire concurrence.
Au sujet de l'industrie tertiaire — les fournisseurs de restaurants, d'épiceries de quartier — presque toutes les pommes viennent de l'État de Washington. Pourquoi? Parce que, pour une raison quelconque, ils arrivent à expédier d'énormes volumes de fruits à des prix réduits. Leurs pomiculteurs vivent la même situation que nous. L'État de Washington n'agit pas de la même façon avec les États du nord-est des États-Unis, qui produisent également des pommes. Ils n'ont pas le droit de toucher à cette région, mais les exportations sont très importantes pour l'État de Washington.
Il y a deux ans, il y a eu du dumping de la culture de 2004 et les prix ont diminué au Canada, ce qui nous a beaucoup affectés.
Je pense qu'il serait utile d'avoir une forte recommandation pour que la personne responsable des approvisionnements en alimentation au gouvernement, pour l'armée, les prisons, les hôpitaux, etc., essaie, dans la mesure du possible, d'acheter des produits canadiens. Je pense que cela nous aiderait grandement, parce que ces secteurs des services n'achètent pas des produits canadiens et américains. Quatre-vingt dix pour cent du temps, ils achètent des produits américains.
L'industrie tertiaire a énormément grossi ces dix dernières années. Les gens sont trop occupés pour faire leur épicerie et acheter leurs aliments. Ils dépendent de plus en plus de l'industrie tertiaire.
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Il faut ajouter que la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse ont déjà mis sur pied un programme important de replantation. Le programme de la Colombie-Britannique existe depuis 15 ans et celui de la Nouvelle-Écosse depuis quatre ou cinq ans. Il était propre à certaines variétés.
Je m'assurerai de trouver ces statistiques sur les coûts généraux de ce programme et de vous les envoyer. Il s'agit de planter des variétés qui sont plus rentables. L'objectif de cet exercice est d'augmenter la rentabilité.
Les pomiculteurs ont eu beaucoup de mal à couvrir leur charge décaissée avec leur production. Il faut déduire la charge décaissée du coût de la production et enregistrer un profit si vous voulez garder la tête hors de l'eau.
Comme je l'ai dit, le nombre de cultivateurs diminue. C'est le cas également de la superficie cultivée et du capital dont disposent les pomiculteurs pour exploiter leur terre. C'est une des raisons principales pour lesquelles nous nous adressons aux deux paliers de gouvernement dans le cadre de cette approche à trois étapes.
En Colombie-Britannique, plus de 50 p. 100 des terres ont été replantées. Ils ont un défi supplémentaire à relever: ils frôlent la surproduction, dans cette province. Ils produisent presque autant qu'ils consomment. Ils dépendent largement d'un marché exportateur en Extrême-Orient. Compte tenu de la conjoncture politique dans cette région, ils ont beaucoup souffert également.
En 1999, la récolte de pommes a été très importante. Les pomiculteurs, en moyenne, ont perdu 6 ¢ par livre de pommes cultivées.
En moyenne, je cultive un million de livres de pommes. Mon entreprise est une PME, mais cela a été un coup dur pour moi. Je me suis retrouvé au pied du mur. En 2004, il y a eu du dumping. Nous avons fait des recherches pour déterminer s'il fallait prendre des actions pour lutter contre ce dumping de l'État de Washington. La décision des tribunaux dans le cas du maïs nous a fait changer d'avis. Ils avaient de meilleures statistiques que nous et ils ont quand même perdu.
Amy m'a fourni d'autres renseignements. L'investissement, pour le programme échelonné sur sept ans, était de 300 millions de dollars au total: 100 millions du fédéral, 100 millions de la province et 100 millions des cultivateurs.
Les statistiques que je vous ai données plus tôt étaient inexactes.
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M. Steckle a demandé tout à l'heure ce que nous faisions en ce moment et ce que nous pouvions faire.
Nous avons développé des liens avec les spécialistes en commercialisation. Nous les rencontrons tous les trimestres ou deux fois par an. Ce sont ceux qui mettent les pommes en sac. Nous travaillons ensemble à promouvoir les produits, à accéder à du financement et nous pourrions trouver du financement pour ce type d'initiative.
Nous sommes en train d'établir des liens avec les détaillants également, comme Sobeys, A&P, Loblaws, etc. À l'automne dernier, nous avons acheté des pages de brochures promotionnelles pour promouvoir les pommes, et c'est important, parce qu'actuellement, les clémentines sont en vedette.
Nous établissons un contact avec les consommateurs à la Royal Agricultural Winter Fair. Nous faisons partie de l'initiative « Terre nourricière ».
Ce serait formidable d'avoir une politique pour encourager les consommateurs à « acheter ontarien » ou acheter « canadien », car nous parlons des deux paliers de gouvernement. Ce serait encore mieux de faire de la promotion. À mon avis, la plupart des Canadiens, quand ils font leur épicerie, sont d'accord pour acheter canadien jusqu'à ce qu'ils arrivent à l'épicerie et qu'ils voient les promotions ou les prix, qui leur font changer d'avis. Je pense qu'il faudra que nos prix soient compétitifs.
Pour la pomme Honey Crisp — vous avez entendu le profit des pomiculteurs, c'est parce que les prix à l'épicerie étaient à la hausse. Peu importe qu'il s'agisse de pommes ontariennes, néo-écossaises ou américaines. Si nous pouvons produire cette pomme ici, pourquoi l'importer? Vous entrez dans votre magasin et vous voyez que le produit est étiqueté comme produit canadien. « Ontario, terre nourricière », c'est un bon logo.
Il y a cinq éléments: les détaillants, les spécialistes en commercialisation, les consommateurs, une politique pour acheter des produits canadiens, et la promotion. Ce que l'on dit n'a pas forcément d'importance, mais si on le répète assez souvent, les gens vont commencer à nous croire. C'est ce que dit le conseil de commercialisation: achetez les aliments cultivés par vos voisins.
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Merci d'être des nôtres aujourd'hui.
Vous avez fait valoir l'importance d'une replantation nationale. J'imagine que vous pensez à la replantation d'autres cultures de pommes?
M. Brian Gilroy Effectivement.
Vous avez mentionné la Colombie-Britannique, mais dans cette province, le ministre provincial de l'Agriculture conseille à nos agriculteurs de cultiver des raisins.
Il y a quelques semaines, j'ai assisté au congrès des fruiticulteurs de la Colombie-Britannique et j'ai parlé avec le président de cette association, un dénommé Joe. Nous communiquons beaucoup et nous parlions de cette idée. Nous avons signé le Traité du fleuve Columbia avec l'État de Washington. Nous leur avons donné accès à notre eau, ils ont irrigué leurs terres et maintenant ils inondent le Canada de pommes.
Dans le passé, en Colombie-Britannique et j'imagine partout au Canada avant l'ALENA, les produits agricoles de saison... quand nous cultivions des oignons, un tarif était appliqué à la frontière de manière à ce que les cultivateurs puissent continuer à produire des oignons. Il y avait plus de 2 000 fermes où l'on cultivait des oignons et maintenant il en reste une demi-douzaine, à cause de l'ALENA.
Les Américains sont devenus très habiles pour ce qui est de protéger leurs produits, qu'il s'agisse de bois d'oeuvre ou de denrées agricoles et ce, malgré l'ALENA. Quand ils ont fait du dumping il y a quelques années, nous avons intenté des poursuites devant les tribunaux, mais quand on finit par avoir l'avis juridique, les prix ont monté et il est trop tard. On a perdu beaucoup de temps et les producteurs ont souffert.
J'en parlais l'autre jour donc avec Joe et je suis sûr que d'autres ont également réfléchi à la question. Quand nous sommes victimes de dumping, il devrait y avoir un mécanisme d'intervention rapide qui nous permettrait d'imposer immédiatement des quotas ou des tarifs au nom du gouvernement tant que ce dumping ne cesse pas. Autrement, si nous suivons la filière actuelle, cela devient très compliqué — vous l'avez du reste indiqué dans votre exposé.
L'ensemble des horticulteurs pourraient-ils prendre position et s'unir pour faire pression auprès du gouvernement afin qu'il mette en place des mesures de ce genre? Comme je disais, les Américains ne se gênent pas eux, pour le faire, eux.
Vous avez dit que nos pomiculteurs répondent à 40 p. 100 de vos besoins et que vous devez importer 60 p. 100 de plus, probablement de l'État de Washington. La distance entre la Colombie-Britannique et l'Ontario est la même qu'entre l'État de Washington et l'Ontario. Pourquoi alors n'y a-t-il pas d'entente pour que nous envoyions notre surcroît de pommes en Ontario, ou vice versa? Nous importons des pommes de l'État de Washington et souvent elles nous sont vendues en-deçà de leur coût de production.
Voilà le scénario auquel nous réfléchissons. Joe doit venir à Ottawa la semaine prochaine et nous continuerons à en parler. Je pense qu'il doit rencontrer le ministre à ce sujet.
Vous avez votre plan en trois volets, mais avez-vous prévu de faire front commun pour qu'on mette en place des mesures qui permettront vraiment de protéger les producteurs et de gérer les risques avant que la situation ne devienne catastrophique?
Voilà ma question.
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Il s'agit là d'un scénario intéressant. Du début jusqu'au milieu des années 90, il y avait un accord antidumping pour les pommes. Il y avait un prix minimum. Je crois que c'était 12,50 $ le carton pour 10 mois de l'année. Je pense que c'est en juillet et en août qu'aucun droit n'était exigé.
Périodiquement, il y avait un examen de ces droits, et ils ont été annulés en 1995-1996. On a donné comme raison qu'il n'y avait aucune preuve à l'effet qu'il y avait du dumping lorsque ces droits étaient exigés. C'est ce que les droits visaient à empêcher. C'était donc une logique horizontale, mais de toute façon, c'est la raison qui a été invoquée.
En 1992, l'industrie pomicole canadienne a eu l'occasion de créer une agence nationale de commercialisation de la pomme qui aurait eu des pouvoirs semblables à ceux de la Commission canadienne du lait, de la volaille, etc. Ne me demandez pas pourquoi ni comment, mais les producteurs ont rejeté l'idée et ne l'ont pas mise en place. Cela aurait permis de maintenir les niveaux d'importation à une moyenne historique mobile de cinq ans. J'ai demandé aux politiciens si on pouvait espérer qu'il y ait à nouveau un tel vote, car je serais prêt à participer à une campagne nationale afin de m'assurer qu'un tel système sera mis en place.
Ces derniers temps, le gouvernement n'a pas été très enclin à s'occuper du dumping de produits agricoles. Pour l'histoire du maïs, il était clair pour la plupart des gens qu'il y avait dumping. Si on regardait les statistiques pour huit ou neuf mois... Eh bien, pour toute l'année 2004, le volume de ventes de pommes de l'État de Washington a augmenté de façon considérable tandis que la valeur des ventes a chuté considérablement. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie qu'il y avait du dumping. Est-il possible de le prouver devant un tribunal? Eh bien, nous avons dépensé 30 000 $ pour retenir les services d'un avocat afin d'examiner la question et décider s'il valait la peine d'entamer des poursuites. Après l'arrêt sur le maïs, il nous a tout simplement dit que cela ne valait pas la peine.
L'État de Washington s'est ravisé et n'a pas fait de dumping l'an dernier. Pour une raison ou pour une autre cependant, nos rendements n'ont pas augmenté dans l'est du Canada. Ils ont augmenté dans l'Ouest, mais dans l'est du Canada, la valeur que les producteurs ont reçue pour leurs pommes de la récolte 2005 a été peu élevée, voire moins élevée que lorsqu'ils devaient faire concurrence à la récolte faisant l'objet d'un dumping l'année précédente.
Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question. Nous n'évitons pas des mesures antidumping, mais c'est aux responsables des politiques de décider s'ils sont prêts à nous appuyer à cet égard.
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Je pense que M. Atamanenko voulait parler d'un mécanisme de règlement des différends qui aurait de meilleurs éléments déclencheurs. À l'heure actuelle, c'est la majorité des producteurs au pays qui doivent proposer quelque chose avant que le gouvernement ne donne son accord. Tant que vous n'avez pas pris de mesure, nous ne pouvons en prendre — ce genre de chose.
Une autre chose que je voulais dire, c'est que l'ARLA — et je sais que vous n'êtes pas toujours satisfaits de cette agence, comme nous certains jours — comparaîtra devant notre comité. Pourriez-vous présenter un genre de mémoire que nous pourrions utiliser lorsque nous préparerons ce rapport?
Je sais que vous n'avez pas accès de la même façon et aux mêmes coûts à certains insecticides, pesticides et fongicides de première ligne auxquels l'État de Washington a accès. Si vous vouliez nous présenter un mémoire ou de l'information à cet égard, nous pourrions certainement l'utiliser lors de cette séance.
Je pense que la séance se tiendra le 12 décembre. Il y a eu un petit changement car ils sont à une réunion à Québec. Ils devaient comparaître le 7 décembre, mais cela a été changé pour le 12 décembre.
Si vous pouviez nous faire parvenir quelque chose que nous pourrions utiliser lors de cette séance, si vous le voulez bien, cela nous serait très utile.