PACP Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
CANADA
Comité permanent des comptes publics
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 22 juin 2006
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
Bienvenue à tous.
Je désire souhaiter la bienvenue, notamment, à M. Ned Frank, professeur émérite de sciences politiques à l'Université Queen's. M. Frank était le recherchiste en chef de la Commission Gomery. Nous accueillons aussi M. Jonathan Malloy, professeur de sciences politiques à l'Université Carleton. Il a travaillé comme recherchiste auprès de la Commission Gomery. Il est l'auteur d'un document d'étude intitulé « Le Comité permanent des comptes publics ». Enfin, nous recevons Geoff Dubrow, de la Fondation canadienne pour la vérification intégrée.
Geoff, voulez-vous vous lever et vous présenter? Voulez-vous vous asseoir avec nous à la table? Il n'a reçu l'invitation que ce matin, mais nous acceptons volontiers qu'il se joigne à nous.
Cette réunion a été convoquée par le comité de direction. Comme tout le monde le sait, le Comité des comptes publics a fait l'objet de nombreux échanges et de plusieurs recommandations à la Commission Gomery. En fait, il y a quatre recommandations dans le rapport Gomery qui visent le Comité des comptes publics. Il serait bon que je les passe en revue. Cela va nous permettre de mieux orienter nos discussions.
La première recommandation porte, de manière générale, sur le financement des comités.
La recommandation 3 se lit comme suit:
Afin de permettre au Comité des comptes publics de s'acquitter plus efficacement de ses responsabilités, le gouvernement devrait accroître sensiblement son budget, ce qui lui permettrait de recruter son propre personnel dans les domaines de la recherche, du conseil juridique et du soutien administratif, et d'avoir recours à des experts s'il y a lieu.
La recommandation 7 est la suivante:
Les membres nommés au Comité des comptes publics devraient s'attendre à être au service du comité pendant toute la durée de la législature.
Et enfin, la recommandation 8 propose ce qui suit:
Le Comité des comptes publics devrait s'assurer que ce sont les sous-ministres, les premiers dirigeants des organismes publics et les hauts fonctionnaires qui comparaissent devant lui. Le principe général devrait être que les ministres ne comparaissent pas devant le comité.
Ces recommandations s'adressent de manière précise au Comité des comptes publics. M. Malloy en a formulé d'autres dans son document d'étude. Il soutient que les membres du comité devraient s'intéresser davantage à la reddition de comptes. Ses recommandations se trouvent à la fin du document qui, bien sûr, a été reproduit dans le rapport Gomery.
Le comité de direction a jugé qu'il serait peut-être utile, cinq ou six mois après le fait, de convoquer M. Franks et M. Malloy afin de discuter de manière informelle des mesures qui, selon eux, permettraient d'accroître l'efficacité du comité.
Comme c'est la dernière réunion du Comité des comptes publics avant septembre, nous allons avoir le temps de réfléchir à cette question. Certains d'entre nous vont assister à l'assemblée annuelle du Conseil canadien des comités des comptes publics, qui doit avoir lieu à Charlottetown, à l'Île-du-Prince-Édouard.
Voilà pour ma déclaration liminaire.
Je crois comprendre que MM. Malloy et Franks ont des exposés à présenter. Nous allons d'abord entendre celui de M. Malloy.
Merci de m'avoir invité à comparaître devant vous. J'ai une brève déclaration à faire, après quoi je répondrai volontiers à vos questions.
Depuis quelques années, j'observe l'évolution du système des comités de la Chambre des communes et les tentatives de réformes dont il fait l'objet en vue de l'améliorer. De nombreux observateurs, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Parlement, soutiennent que c'est au sein des comités que les députés peuvent améliorer leur rôle. À mon avis, bon nombre de ces observateurs entretiennent des attentes exagérées et irréalistes à l'égard des comités de la Chambre et de ce qu'ils peuvent raisonnablement accomplir dans notre système de représentation.
Plus récemment, j'ai examiné de plus près le rôle de ce comité-ci, étant donné qu'on m'avait demandé de rédiger un rapport sur le CCP pour la Commission Gomery. Dans ce rapport, j'affirme que le Comité des comptes publics est assujetti aux mêmes contraintes que les autres comités permanents — des contraintes que vous connaissez tous très bien, j'en suis sûr. Parmi celles-ci figurent un taux de roulement élevé, surtout entre les législatures; l'affectation au hasard des députés à des comités qui ne les intéressent pas vraiment; des ressources et des effectifs hautement compétents, mais modestes.
J'ai souvent l'impression, lorsque nous parlons de responsabilisation, que nous ne tenons pas vraiment compte du fait que le CCP n'est qu'un comité permanent parmi de nombreux autres. Ses membres, comme ceux des autres comités, ont de multiples responsabilités et engagements à remplir. Les rôles confiés aux députés sont considérables; le travail en comité n'en est qu'un. Toutefois, le CCP est un cas particulier. Il se démarque des autres. Il a un mandat singulier, mais aussi des responsabilités uniques. Il a le pouvoir de faire enquête sur les questions touchant les finances et l'administration publiques, un pouvoir qui est profondément ancré dans cette tradition de longue date qu'est l'examen parlementaire.
Pour la plupart des députés, le CPP ne constitue pas toujours une affectation souhaitable. En effet, de nombreux députés préfèrent être affectés à des comités qui se penchent sur les orientations, domaine où ils estiment pouvoir apporter une contribution plus positive. Ces comités ont un mandat prospectif, axé sur les politiques à venir, et non rétrospectif, c'est-à-dire centré sur les politiques administratives. C'est compréhensible, mais regrettable.
Par ailleurs, le Comité des comptes publics n'a pas beaucoup de ressources de recherches spécialisées pour mener des enquêtes. Son travail — en fait, une bonne partie de son ordre du jour — , dépend largement des rapports du Bureau du vérificateur général. Je trouve cela inquiétant. Le comité semble entretenir de bonnes relations avec le VG, mais, à l'instar de nombreux autres observateurs, je crains que le Bureau du vérificateur général n'ait supplanté le Parlement dans son rôle traditionnel d'examen.
Je suis tout à fait disposé à discuter plus à fond de ces questions avec vous. Toutefois, en tant qu'observateur de l'extérieur, je ne veux pas passer mon temps à dire des choses que vous savez déjà. Je vais donc m'arrêter ici. Je répondrai volontiers à vos questions.
Merci.
Merci. C'est un honneur pour moi d'être ici.
J'ai préparé un exposé, mais par ma faute, il n'a pas été distribué aux membres du comité. Je l'ai donc remis au greffier.
Le Comité des comptes publics traverse une période plutôt excitante. Il est à la croisée des chemins. Aux termes de la Loi fédérale sur la responsabilité, les sous-ministres et les dirigeants des organismes vont agir à titre d'administrateurs des comptes et être comptables devant le Comité des comptes publics de la façon dont ils remplissent leurs tâches administratives. C'est ce que proposait notamment le comité dans son rapport de 2005 intitulé La gouvernance dans la fonction publique du Canada: obligations ministérielles et sous-ministérielles de rendre des comptes, rapport qui a reçu un large appui de la Commission Gomery dans ses recommandations.
Il est temps que le comité fasse exactement ce que l'on attend de lui. Il a l'occasion de jouer un rôle nouveau et plus fort, et aussi de confirmer la responsabilité du Parlement pour ce qui est du contrôle des deniers publics, question au coeur du débat.
J'insiste pour dire au gouvernement que le Parlement a le droit d'établir les règles de responsabilité, de déterminer qui doit lui rendre des comptes, pour quel programme et de quelle façon, tout comme le Parlement a le droit d'établir les conditions qui régissent l'octroi de fonds au gouvernement, y compris la structure des crédits. Cette décision relève du Parlement, non pas du gouvernement. J'ai parfois l'impression que le gouvernement considère la responsabilité ministérielle comme une doctrine gouvernementale. Il a tort. Cette responsabilité s'inscrit dans une doctrine parlementaire. L'obligation de rendre des comptes au Parlement est une doctrine parlementaire, non pas gouvernementale. Il en va de même pour le processus d'examen des prévisions budgétaires.
Je n'ai pas l'intention de vous parler du rôle du Comité des comptes publics. Toutefois, je tiens à préciser que la Loi fédérale sur la responsabilité confie toute une gamme de tâches administratives en matière de finances à des sous-ministres et à des dirigeants d'organismes. Il y a 20 sous-ministres et 78 dirigeants d'organismes, dont certains occupent un poste équivalent à celui de sous-ministre, qui sont énumérés dans la loi. Certains organismes sont plus autonomes que d'autres. La loi précise également que ces personnes ont l'obligation de rendre des comptes. Cette mesure, dans un sens, est très utile. Ainsi, le dirigeant du centre des armes à feu, par exemple, serait considéré comme un administrateur des comptes. Il aurait le pouvoir de signer les comptes de cet organisme, et serait responsable des transactions qui sont, ou non, inscrites dans ceux-ci. Il s'agit là d'un pas dans la bonne direction qui contribue à clarifier les notions de responsabilité et de reddition de comptes dans la loi.
Je n'en dirai pas plus à ce sujet. Toutefois, j'aimerais ajouter un dernier point. La plupart des dispositions que contient la Loi fédérale sur la responsabilité ne se seraient pas retrouvées pas dans celle-ci n'eut été du travail du comité. C'est là une de ses plus grandes réalisations. Il mérite notre reconnaissance et nos félicitations pour tout ce qu'il a accompli, et continue d'accomplir. Il s'agit là d'un exploit majeur, surtout qu'il a dû composer avec la résistance du gouvernement à toutes les étapes, résistance qu'il rencontre toujours dans certains domaines.
Par ailleurs, je pense que le Comité des comptes publics doit établir des liens plus étroits avec le Conseil du Trésor, organisme central du gouvernement chargé d'assurer la bonne gestion des finances. Brièvement, le Comité des comptes publics et le Conseil du Trésor doivent collaborer ensemble sur deux plans. Des changements vont devoir être apportés aux pratiques et procédures actuelles.
D'abord, les responsabilités des administrateurs des comptes doivent être définies par écrit. Elles doivent faire l'objet d'un protocole, préparé vraisemblablement par le Conseil du Trésor, mais approuvé par le comité. Ce protocole doit répondre aux besoins des comités, décrire les responsabilités des administrateurs des comptes à l'égard du comité, le processus de reddition de comptes et leurs obligations à l'égard du comité. Le comité et le Conseil du Trésor doivent, ensemble, s'entendre là-dessus.
Ensuite, et il n'en est pas question dans le rapport de la Commission Gomery ou ailleurs, c'est le Conseil du Trésor, et non le vérificateur général, qui devrait expliquer au comité les mesures prises par le gouvernement pour donner suite aux recommandations qu'il a formulées. Autrement dit, le comité devrait obliger le Conseil du Trésor à assurer la mise en oeuvre de ses recommandations ou à voir à ce que le gouvernement discute avec le comité des mesures à prendre pour régler les problèmes cernés.
Ce deuxième point est très important, car, en vertu du régime de responsabilisation, le vérificateur général devrait agir comme vérificateur, tandis que le Conseil du Trésor, lui, devrait plutôt assumer le rôle d'organisme central responsable qui entretient des liens très étroits avec le comité.
J'aimerais faire deux derniers brefs commentaires.
Dans son dixième rapport publié l'an dernier, le comité a formulé des recommandations, entre autres, sur la durée du mandat des sous-ministres. Il a proposé que ces derniers restent en poste plus longtemps.
La Commission Gomery a formulé la même recommandation. Or, il n'en est aucunement question dans la Loi fédérale sur la responsabilité.
Il arrive souvent qu'un comité, y compris celui-ci, se retrouve devant un sous-ministre qui n'était pas en poste à l'époque. Quelqu'un d'autre a peut-être agi comme sous-ministre entre le moment où le problème est survenu et le moment où il a été décelé. Le comité s'est rendu compte, dans le dossier des Affaires indiennes par exemple, que les sous-ministres ont été remplacés assez rapidement. Il a constaté la même chose quand il s'est penché sur la demande de financement supplémentaire pour le programme des armes à feu. Il y a un problème de ce côté-là.
J'ai mené une étude approfondie, il y a plusieurs années de cela, sur les services de sécurité et l'obligation de rendre compte qui leur est imposée. Il y a une expression qu'on utilise dans le milieu : la mission-goéland. Cette opération consiste à envoyer, par avion, un espion ou un agent dans une région. Il y sème le désordre et ensuite repart. J'ai l'impression que, souvent, les sous-ministres mènent des missions-goélands dans les ministères. Ils arrivent, sèment le désordre et repartent au bout d'un an.
Ce n'est pas une façon très efficace d'appliquer le principe de responsabilité. La responsabilité veut dire assumer les conséquences de ses décisions et de ses actions. Je ne pense pas que le fait de désigner les sous-ministres et les chefs d'organismes à titre d'administrateurs des comptes soit la solution idéale.
Enfin, j'ai lu les comptes rendus des réunions qui ont porté sur la Loi sur les armes à feu. J'ai été fort impressionné par l'esprit de collégialité dont a fait montre le comité. Les membres ont collaboré ensemble et concentré leur attention sur l'étude.
Le comité a fait de l'excellent travail. Cela prouve qu'il va être en mesure, à l'avenir, de travailler dans ce même esprit de collégialité, au nom du Parlement et des Canadiens, quand va venir le temps d'examiner, de manière objective, la façon dont le gouvernement, et notamment la fonction publique, utilisent les deniers publics. Il devra veiller à ce que ces fonds fassent l'objet d'une utilisation régulière, correcte et économique. Cette question n'est ni politique, ni partisane. Si on la considère comme telle, alors il y a un problème en quelque part. Le Parlement devrait pouvoir s'exprimer dans ce dossier au nom de tous les Canadiens, d'une manière jugée satisfaisante par ces derniers.
J'insiste sur ce point. Par ailleurs, le travail que vous avez accompli récemment montre clairement que vous êtes sur la bonne voie.
Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup, monsieur Franks. Vos exposés sont toujours intéressants.
Merci à vous aussi, monsieur Malloy.
M. Williams souhaite invoquer le Règlement.
Compte tenu de la nature de la réunion d'aujourd'hui, je propose qu'au lieu d'avoir des tours de huit et de quatre minutes, on tienne une table-ronde. De cette façon, le comité pourra avoir de véritables échanges et bien approfondir le sujet.
Comme je suis nouvelle, je vais commencer. Vous pourrez ensuite enchaîner.
Une voix: [Note de la rédaction: Inaudible]
Mme Yasmin Ratansi: Si je l'ai pointé du doigt, c'est parce qu'il a l'habitude de faire des commentaires déplaisants.
Si je puis me permettre, je vais devoir exercer un contrôle informel sur la discussion. M. Williams a raison, et je suis d'accord avec lui, mais je vais être obligé de surveiller votre temps de parole.
Avant de passer aux questions, je vais demander à M. Dubrow s'il a des commentaires à faire.
Je sais que vous n'avez reçu l'invitation aujourd'hui. J'ai pensé qu'il serait bon que vous assistiez à la réunion. Nous savons que votre fondation fait de l'excellent travail. Nous espérons collaborer de près avec vous et votre fondation dans les mois et années à venir.
Désirez-vous ajouter quelque chose?
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je pourrais peut-être dire quelques mots au sujet de la fondation. En tout cas, nous accepterons volontiers de revenir à l'automne, si vous nous invitez à le faire. Pour l'instant, je pense qu'il serait inapproprié de ma part de faire des commentaires. Il vaut mieux se concentrer sur les exposés présentés par nos deux témoins d'aujourd'hui.
Je voudrais aborder un dernier point : cela concerne la revue que la fondation a fait paraître récemment. Nous avons adopté une motion qui nous autorise à acheter une copie de la revue pour chacun des membres du comité. La commande a déjà été passée. Merci beaucoup.
Monsieur Williams.
Nous avons adopté la motion, que nous puissions ou non nous permettre cette dépense. Nous sommes peut-être en situation de déficit.
Une voix: Ils nous la laissent à un prix de faveur de 40 $.
Le président: C'est le prix que nous avons négocié.
Madame Ratansi.
Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Malloy.
J'aimerais avoir des précisions. Je fais partie depuis peu du comité des comptes publics. Je vais donc nuancer mes propos. Vous avez dit que vous êtes déçu de voir que le comité s'en remet largement au vérificateur général. Ai-je bien compris?
Oui. J'ai eu l'occasion de comparaître devant ce comité dans le passé, et j'ai toujours été étonné de voir à quel point les membres étaient satisfaits des relations qu'ils entretennaient avec le vérificateur général.
J'ai une autre question à poser.
Nous sommes un comité, non pas un organe d'exécution. À défaut de s'en remettre au vérificateur général, qui a le mandat, en tant que vérificateur externe, d'élaborer un plan, de le présenter, de dire voici quels sont les résultats de ma vérification cyclique, quelles sont mes priorités, quels sont les risques, que doit faire le comité?
Il faudrait que le comité ait davantage de ressources, qu'il puisse, à l'occasion, s'attaquer à des dossiers autres que les rapports du vérificateur général, ce que font certains comités des comptes publics à l'échelle provinciale. Cela dit, bon nombre de mes préoccupations sont avant tout théoriques; les membres du comité ne les partagent pas nécessairement.
On se demande, en fait, qui est aux commandes. Est-ce le vérificateur général ou le comité de la Chambre des communes? Le vérificateur général doit lui-même rendre des comptes au comité au sujet du fonctionnement de son bureau. En théorie, les liens qui existent entre les deux pourraient donner lieu à un conflit d'intérêts.
Il est vrai que les membres pensent que ces préoccupations théoriques surgissent peu souvent, mais je pense qu'il est important de les garder à l'esprit.
Sur le plan pratique, si le comité reçoit une enveloppe brune et pense qu'un programme spécial doit faire l'objet d'une vérification — quelqu'un au sein du comité peut peut-être m'aider —, peut-on demander au vérificateur général d'effectuer la vérification?
Oui, nous pouvons le faire.
Si je puis me permettre, j'aimerais répondre à cette question.
Monsieur le président, le comité doit présenter une motion que le vérificateur général va examiner avec sérieux. Cette motion ne constitue pas une directive.
Monsieur Malloy, si c'était le cas, serait-il alors nécessaire que le comité ait ses propres ressources, sa propre équipe de vérification? Est-ce là votre suggestion? J'essaie de comprendre.
Il faudrait que ce soit une situation très particulière. Je ne sais pas ce que je recommanderais dans ce cas-là.
Si je puis me permettre, Jonathan, j'aimerais ajouter quelque chose.
En Grande-Bretagne, le vérificateur général fait presque partie du comité. Il serait assis là-bas. Le bureau du vérificateur général dresse une liste de questions à l'intention du comité, et prépare aussi les rapports de ce dernier.
Les choses se passent différemment au Canada, et c'est bien comme cela. C'est le personnel du comité qui prépare les questions, rédige les rapports.
Il faudrait faire plus à ce chapitre. Le vérificateur général publie de nombreux rapports qui n'intéressent pas directement le comité, et qui ne font l'objet d'aucune étude. Par ailleurs, si le comité veut examiner plus à fond le rôle des sous-ministres et les missions goélands, il peut commander un rapport là-dessus.
C'est à ce chapitre-là qu'il pourrait y avoir divergences de vues entre le comité et le vérificateur général.
Je sais que le comité effectue une vérification du Bureau du vérificateur général. Comment pouvons-nous réduire au minimum les risques de conflits? Nous entretenons pour l'instant de très bonnes relations avec le vérificateur général. La situation pourrait être différente dans cinq ans, je ne le sais pas.
Comment pouvons-nous, d'un point de vue théorique, faire en sorte que...? Il ne peut pas y avoir de risques zéros. Toutefois, on peut minimiser les risques.
Concrètement, si l'on veut maintenir de bonnes relations professionnelles, et je crois comprendre que c'est ce qui se passe à l'heure actuelle, on peut fort bien s'en remettre au vérificateur général, comme je l'ai mentionné. Par ailleurs, le vérificateur général doit rendre des comptes au comité. Il est tout à fait possible de maintenir ces deux types de relations en même temps.
Il est vrai que cette préoccupation est avant tout théorique, mais le fait est que ce comité-ci est un comité de la Chambre des communes. C'est le comité, et non le vérificateur général du Canada, qui devrait être aux commandes. Le comité devrait déterminer son ordre du jour et utiliser ses ressources comme il l'entend.
[Français]
Messieurs, merci. J'ai quelques questions à vous poser.
Je siège à ce comité depuis quelques années. À certaines occasions, j'ai vécu des frustrations. Je demande que l'on puisse inscrire vos commentaires à ce sujet dans nos témoignages. Ils seront interprétés d'une façon ou d'une autre par le comité, ce qui ne constituera pas une nouvelle façon de procéder.
J'ai lu, dans les documents qu'on remettait aux nouveaux députés, qu'un des mandats des comités en général était d'enquêter. Il y a le mot « enquête » dans le livre que la Chambre des communes remet aux nouveaux députés. Dans son commentaire préliminaire, M. Malloy, a prononcé les mots « inquire and investigate », ce qui veut dire que les comités peuvent faire des enquêtes et des investigations.
Selon moi, le présent comité s'est trop souvent restreint à faire le suivi des rapports de la vérificatrice générale.
Selon vous, est-ce que le rôle principal du comité est de faire le suivi des rapports de la vérificatrice générale, ou est-ce que le comité peut également être à l'origine de l'étude de dossiers, de façon autonome?
Je vous donnerai des exemples par la suite.
[Traduction]
Le comité est libre de faire toutes ces choses. Il n'a jamais mené des enquêtes de grande envergure. S'il le faisait, il répéterait le travail déjà effectué par le vérificateur général.
Le rôle du comité, qui est distinct de celui du vérificateur général, est de faire office de tribune où l'on discute des observations du vérificateur général. Les différentes parties, qu'elles viennent de la fonction publique ou d'ailleurs, ont l'occasion de donner leur version des faits, d'exposer leurs vues. Discuter dans un cadre parlementaire comme celui-ci, dans une tribune publique — c'est quelque chose que le vérificateur général ne peut faire.
Donc, le comité est libre de mener ses propres enquêtes. Toutefois, cela l'amènerait souvent à refaire le travail déjà accompli par le vérificateur général.
Monsieur Sauvageau, si vous êtes d'accord, nous pourrions peut-être demander à M. Williams de nous dire ce qu'il en pense, en tant qu'ancien président du comité.
[Français]
Si vous me le permettez, je vais d'abord préciser ma question. M. Williams pourra ensuite y répondre.
[Traduction]
D'accord. Nous entendrons ensuite ce qu'ont à dire M. Franks et M. Williams. Vous avez soulevé un point très important.
[Français]
Je vais vous donner deux exemples. Je pense que le rôle principal du comité est de faire le suivi des rapports de la vérificatrice générale, mais si son rôle n'était que celui-là, nous serions réactifs, jamais proactifs. Si le comité pouvait, à l'occasion et non pas la plupart du temps...
Je vous donne un premier exemple. Lors de la tenue des Championnats du monde aquatique de Montréal, le gouvernement fédéral a versé 16 millions de dollars. La vérificatrice générale n'a pas encore pu faire enquête sur cette somme. Le conseil d'administration a été démis de ses fonctions dans son entièreté. Il y a eu mort d'homme, un suicide, dans le cadre de ce dossier, en rapport avec la façon dont on a dépensé ces 16 millions de dollars.
J'ai demandé au comité que l'on fasse le début d'un commencement d'une vérification, que l'on obtienne les documents internes du ministère du Patrimoine canadien, et on m'a répondu que ce n'était pas... Peut-être le comité pourrait-il simplement faire un travail de débroussaillage qui inciterait la vérificatrice générale à faire son travail. Je ne veux pas me substituer à elle.
Je vous donne un deuxième exemple. On a appris, par l'entremise du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, qu'il y avait 450 000 pieds carrés d'espace locatif loués en trop. Si on fait une règle de trois, ce sont 210 millions de dollars qui sont gaspillés ou dépensés annuellement pour louer des espaces non nécessaires au gouvernement fédéral. La vérificatrice générale n'a pas fait enquête là-dessus. Dans l'éventualité où elle ferait enquête dans trois ans et qu'elle déposerait son rapport six mois plus tard, le comité devrait-il attendre quatre ans, soit 840 millions de dollars plus tard, avant de se poser des questions? Ne pourrait-il pas être proactif?
C'est sur ce sujet que je veux que porte la discussion et qu'il me fera plaisir d'entendre aussi M. Williams.
[Traduction]
Vous avez été très proactifs. L'étude sur la responsabilité ministérielle que vous avez effectuée l'an dernier n'avait essentiellement rien à voir avec le rapport du vérificateur général. Elle a été réalisée parce que le comité n'était pas satisfait des résultats de l'enquête sur le programme des commandites. Donc, rien n'empêche le comité de faire ce genre de chose.
Concernant le centre aquatique, je ne suis pas tellement au courant de ce dossier. Mais pour ce qui est des locaux, la question a fait l'objet d'un rapport du vérificateur général. Vous avez eu l'occasion d'y jeter un coup d'oeil. Vous devriez préparer un rapport, dire que vous n'êtes pas satisfait de la façon dont le gouvernement gère les coûts de location des locaux, et demander ensuite au Conseil du Trésor et au ministère des Travaux publics, ou peu importe, d'y répondre.
Vous pourrez effectuer un suivi dans les années à venir. Si vous n'êtes pas satisfait de la réponse du gouvernement, vous pouvez produire un autre rapport, et je crois comprendre que c'est ce qu'a fait le comité dans le cas du rapport sur la responsabilité ministérielle. Vous êtes déjà sur la bonne voie.
Merci, monsieur le président.
D'abord, je tiens à remercier les témoins d'être venus nous rencontrer ce matin. Bien entendu, nous connaissons M. Frank depuis longtemps. Nous sommes également heureux de recevoir M. Malloy et M. Dubrow.
Pour ce qui est du comité des comptes publics, son rôle consiste à mettre l'accent sur la responsabilité politique. Il y a essentiellement trois types de responsabilité. Il y a la responsabilité administrative, où les employés sont tenus, par leur employeur ou un autre cadre supérieur, de rendre des comptes au sujet leur rendement. Il y a la responsabilité juridique, où les gens peuvent finir par faire l'objet d'accusations et être obligés de se défendre devant un tribunal, et bien entendu, dans le cadre du scandale des commandites, M. Guité, ainsi que d'autres, ont dû rendre des comptes sur le plan juridique à cet égard. Enfin, il y a la responsabilité politique, sauf que vous ne pouvez pas jeter le gouvernement en prison. Par conséquent, le comité agit comme mécanisme de responsabilité politique pour le gouvernement, qui doit répondre de ses actes devant l'opinion publique. Je pense que la population a fait entendre sa voix au cours des dernières élections. Nous en voyons les résultats aujourd'hui.
Pour ce qui est de faire enquête sur des affaires comme le centre aquatique de Montréal, ce sont là des questions — et je ne connais pas tous les détails — qui peuvent être hautement controversées. Selon moi, elles impliquent une responsabilité juridique, administrative et politique. Toutefois, il ne faut pas confondre notre rôle en matière de responsabilité politique avec les deux autres, et je fais allusion ici à la responsabilité juridique et administrative.
Nous devons tenir compte de l'opinion publique. Nous ne connaissons pas toujours les faits, comme nous le savons tous. La politique est un milieu difficile où la pression est très forte. C'est celui qui crie le plus fort qui gagne. Le processus n'est pas équilibré, comme c'est le cas avec les tribunaux. Ce n'est pas un processus juste et raisonnable sur le plan administratif.
Donc, pour répondre à la question de M. Sauvageau, si un comité juge que des actes répréhensibles ont été commis et que l'argent des contribuables a été gaspillé, par exemple, il doit adopter une motion demandant au vérificateur général de mener une enquête.
Le Bureau du vérificateur général constitue les yeux et les oreilles du comité. Il compte 600 employés et dispose d'un budget de quelque 65 millions de dollars. Nous ne pourrions jamais avoir de telles ressources, et travailler dans un esprit non partisan et professionnel comme il le fait.
Si le comité choisissait d'agir seul, de ne pas retenir les services du vérificateur général, il serait obligé d'embaucher quelqu'un d'autre. Par conséquent, si le comité voulait mener des enquêtes, il faudrait qu'il les confie à des professionnels.
Nous essayons d'être objectifs, mais la politique est une activité partisane, et le Parlement est lieu où prime l'esprit partisan. À mon avis, il est préférable, quand il est question de responsabilité administrative, que le vérificateur général fasse la lumière sur les pratiques de gestion des cadres supérieurs qui, eux, devraient justifier leurs décisions administratives. Je dis « devraient » parce que, dans le cas du registre des armes à feu et des fonds non déclarés, il n'a pas été question de responsabilité administrative. Toutefois, lorsque le comité est saisi d'un dossier, la situation est tout autre. Nous constituons une tribune différente, un mécanisme de responsabilité différent, puisque nous faisons essentiellement affaire avec l'opinion publique, dans un but bien précis.
Donc, il est vrai, comme le dit M. Frank, que nous pouvons utiliser nos ressources pour enquêter sur des domaines où il existe peut-être un lien entre responsabilité administrative et politique, des domaines auxquels le vérificateur général ne veut pas toucher, puisqu'ils se rapprochent trop de la politique.
Par ailleurs, il serait également dangereux pour nous d'entreprendre une telle enquête en tant que comité, parce que personne autour de cette table n'est objectif. C'est toujours le plus fort qui finit par l'emporter. Par conséquent, j'hésiterais beaucoup à emprunter cette voie sans y avoir réfléchi de façon approfondie, car il ne faut pas que le comité des comptes publics s'écarte de son rôle, perde sa crédibilité, détruise l'efficacité dont il a su faire preuve jusqu'ici.
Nous devons, dans un contexte de gouvernement majoritaire, garder la confiance du gouvernement. J'estime que le gouvernement doit rendre des comptes au Parlement. Nous sommes suprêmes, nous occupons dans le hiérarchie un rang plus élevé que le gouvernement. Malheureusement, comme nous le savons tous, quand le gouvernement parle, le Parlement, très souvent, finit par écouter, alors que ce devrait être l'inverse.
Il s'agit là d'un problème plus philosophique et profond que nous n'arriverons pas à régler ici, monsieur le président.
[Français]
J'ai un immense respect pour M. Williams; il a été longtemps président de ce comité. Toutefois, j'ai une petite chose à mentionner. Lorsqu'il dit « le comité doit », j'aimerais lui dire respectueusement que c'est son interprétation. Il n'a pas écrit le livre des règlements du comité. Je pense qu'on devrait dire « le comité devrait » ou « selon moi, le comité doit ». Je vous dis cela en tout respect, monsieur Williams, et il m'a fallu tout mon « petit change » pour vous le dire.
Cela étant dit, on fait une vérification politique, j'en conviens. On n' a pas les pouvoirs, on n'a pas les ressources, on n'a pas tout ce qu'a la vérificatrice générale, j'en conviens. Je n'ai pas l'expérience de M. Williams ni celle des deux autres personnes qui sont venues au comité aujourd'hui afin d'éclairer nos lanternes, j'en conviens aussi.
Prioritairement, selon moi, le comité doit faire le suivi des rapports de la vérificatrice générale. Néanmoins, je demeure convaincu — et je suis ouvert à ce que l'on me convainque du contraire, même si cela sera difficile; j'ose espérer que j'ai l'esprit ouvert — qu'à l'occasion, de façon exceptionnelle, le comité peut et doit entendre des témoins, ne serait-ce qu'une fois ou deux, avant de référer un cas à la vérificatrice générale.
Par exemple, le ministère du Patrimoine canadien a octroyé 16 millions de dollars à un organisme. Il y a des rapports de vérification interne, de vérification externe et de vérification juridique qui ne sont pas disponibles ou difficilement accessibles. On doit demander à les voir par l'entremise de la Loi sur l'accès à l'information.
Selon moi, on devrait avoir une ou deux réunions ici afin de voir s'il y a effectivement un problème ou si ce sont les médias qui causent le problème. Si on réalisait qu'il y a effectivement un problème et qu'on n'a ni les ressources ni le mandat pour le régler, le comité ferait un rapport afin de recommander à la vérificatrice générale de faire enquête.
Doit-on se contenter uniquement de dire que l'on a entendu dire qu'il y avait un problème et, donc, de demander à la vérificatrice générale de le régler? Je ne blâme pas la vérificatrice générale de mettre un an ou deux pour faire une telle étude; c'est un délai tout à fait normal. Dans deux ans, le comité pourrait se pencher sur ce sujet à nouveau.
Je vous demande tout simplement si, de façon exceptionnelle, le comité peut et doit faire ce genre d'étude.
[Traduction]
Nous allons demander à M. Franks et à M. Malloy de commenter. Je pense que vous avez compris ce qu'a voulu dire M. Sauvageau. En gros, si nous constatons que l'argent des contribuables est utilisé à mauvais escient... Encore une fois, il est question ici de ressources. Nous ne pouvons pas envoyer Brian à Montréal pour qu'il fasse enquête sur les 16 millions de dollars. Il nous faudrait beaucoup plus de ressources pour pouvoir le faire, un cadre différent.
Concernant ce qu'a dit M. Williams, vous...
Je vais essayer de poser ma question en anglais. Je m'excuse, monsieur le président. Je n'ai jamais dit cela. Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.
Il y a des rapports internes-externes sur Patrimoine Canada qui sont maintenant disponibles — non pas à Montréal, non pas en Saskatchewan, mais à Ottawa. Nous pouvons prendre le rapport du ministre du Patrimoine et en faire le suivi, en comité.
Ce n'est là qu'un exemple parmi d'autres.
M. Franks ou M. Malloy pourraient peut-être nous dire ce qu'ils pensent.
Avez-vous quelque chose à ajouter?
Je vais essayer de répondre. « Objectif » n'est peut-être pas le mot juste pour décrire le comité. Contrairement aux professeurs, les députés sont tous animés d'un esprit partisan — et c'est très important. C'est comme cela que les gens votent, c'est comme cela que les gens comprennent le Parlement.
Si le comité est présidé par un député de l'opposition, c'est parce que ce député, et M. Williams a déjà occupé ce poste, va être davantage incité à mener une enquête, à faire preuve de scepticisme à l'égard du gouvernement, qu'un député du parti ministériel. Si le nombre de membres au sein du comité est proportionnel à celui de la Chambre des communes, c'est parce qu'on veut établir un juste équilibre au sein du comité entre le parti ministériel et les autres. Il y a donc une motivation partisane.
À mon avis, le comité devrait concentrer son attention — je dis bien devrait — sur les questions administratives, et non pas les décisions stratégiques du gouvernement, les décisions prises par les ministres, parce qu'elles font déjà l'objet d'un examen lors de la période de questions et par d'autres comités.
Votre rôle consiste, entre autres, à préserver l'autonomie de la fonction publique pour qu'elle puisse se conformer aux règles, aux règlements et aux lois qui la régissent, ce qui, à mon avis, n'a pas toujours été le cas.
Le comité doit travailler en collégialité. Ce qu'il y a de particulier au sujet du travail que le comité a accompli l'an dernier, c'est que son rapport sur la responsabilité était unanime. Il avait reçu l'appui des députés du parti ministériel, des secrétaires parlementaires et de l'opposition. C'était là toute une réalisation, tout un exploit.
J'espère — et je pense que c'est possible — que le comité va tenter, à l'avenir, d'instaurer le même degré de collégialité entre les députés des différents partis pour ce qui est de ses activités, de ses travaux. Cela ne veut pas dire que les désirs des députés et des partis vont devenir réalité. Le gouvernement , à mon avis, va constater qu'il n'aime pas ce que fait le comité. Toutefois, il revient au comité de s'organiser, de s'entendre. C'est en adoptant une telle approche que le comité va réussir à appliquer, avec efficacité, le principe de responsabilité.
Merci.
À ce sujet, particulièrement dans la situation que vous exposez qui exige d'enquêter rapidement sur les faits et de s'en remettre à nouveau au Bureau du vérificateur général, cela pourrait théoriquement fonctionner. Comme je l'ai déjà dit, j'ai l'impression que ce genre d'enquête fait souvent double emploi avec le travail de la vérificatrice générale.
Comme le faisait valoir M. Williams, la contribution indépendante que votre comité peut apporter réside particulièrement dans l'examen politique des choses sur une tribune publique. Vous allez poser des questions que la vérificatrice générale ne pourrait pas poser. Dans une telle situation d'enquête, le comité ne peut pas nécessairement jouer son rôle de tribune publique tant qu'il ne connaît pas les faits, qui doivent être préférablement mis au jour par une instance compétente non partisane comme le Bureau du vérificateur général.
En général, lorsque les comités politiques — pas seulement celui-ci, mais tous les comités parlementaires — se mettent à enquêter sur les faits, les échanges deviennent rapidement acerbes, simplement autour des éléments de base, et il est rare que beaucoup de travail puisse être accompli. Il est habituellement préférable d'attendre que la vérificatrice générale ait rassemblé toute l'information détaillée qui peut alors être examinée sur une tribune davantage partisane comme celle-ci.
Je répète que le comité pourrait selon moi utiliser davantage de ressources, notamment peut-être pour assimiler les rapports de la vérificatrice générale et mieux préparer les députés pour leurs questions — et je ne veux pas dire par là que le personnel ne fait pas bien son travail. Comme je le disais, les enquêtes sur les faits n'auraient lieu que dans des cas beaucoup plus exceptionnels. Bien souvent, on ne ferait que reprendre le travail déjà effectué par la vérificatrice générale sans rien apporter de vraiment concret au chapitre de la reddition de comptes.
Dans le dossier des armes à feu, je me préoccupe surtout de la manière dont la question a été traitée par le Conseil du Trésor. Je considère que la vérificatrice générale doit intervenir lorsque le train déraille, mais j'estime que le Conseil du Trésor a pour rôle de s'assurer que le train reste sur la bonne voie et de veiller à l'application de la Loi sur la gestion des finances publiques et de ses propres règles et lignes directrices, notamment.
Si le Conseil du Trésor s'acquitte bien de cette tâche, la vérificatrice générale va simplement indiquer dans ses rapports que les choses sont bien gérées. Lorsque ses rapports sont très critiques, c'est parce que quelque chose dans le système a flanché. En ce sens, je vois donc le Conseil du Trésor comme l'agent proactif dans ce processus alors que la vérificatrice générale serait plutôt l'agent réactif.
J'ai bien aimé les suggestions de M. Franks concernant l'établissement de liens plus étroits avec le Conseil du Trésor en lui demandant notamment de rendre davantage de comptes à notre comité relativement aux choses qui se produisent.
Je ne suis vraiment pas impressionné, car il me semble que le Conseil du Trésor aide les hauts fonctionnaires du gouvernement à trouver des manières de contourner ses propres politiques par des voies indirectes et des moyens extraordinaires. Je trouve cela simplement ahurissant. Ce n'est certes pas le mode de fonctionnement approprié pour le Conseil du Trésor.
Je voulais seulement faire ce commentaire. Je pense qu'il s'agit de deux excellents points. J'espère que notre comité pourra suivre ces recommandations et travailler en ce sens, car j'estime cela très important. Si le Bureau du vérificateur général est traité isolément du Conseil du Trésor et s'il n'y a aucun lien entre ces deux instances, je ne sais vraiment pas vers quoi nous nous dirigeons.
Je voulais demander à M. Franks son avis sur les fonctions et les responsabilités que nous devrions envisager pour ce qui est des agents comptables en relation avec le Conseil du trésor. Avez-vous des suggestions à nous faire à ce sujet?
Permettez-moi d'abord une observation générale au sujet du Conseil du Trésor et du comité.
Selon moi, le comité et le Conseil du Trésor ont un intérêt commun : ils veulent tous deux veiller à la saine gestion des finances publiques.
Il y a bien des théories au sujet du gouvernement dans un régime parlementaire qui ne tiennent pas la route dans la réalité des choses, mais nous croyons toujours en ces théories, comme celle de la responsabilité ministérielle, celle de la primauté du droit, ou les deux à la fois.
C'est l'idéal visé, n'est-ce pas?
Je m'apprêtais à dire — et je reviendrai à la question des responsabilités dans un instant parce que tout est relié — que la commission Lambert avait constaté en 1979 que le Conseil du Trésor constituait le maillon faible dans la chaîne du contrôle financier. On avait rien à redire du travail du Bureau du vérificateur général. On n'était pas vraiment impressionné par la performance des sous-ministres, mais on a bel et bien constaté que le Conseil du Trésor ne remplissait pas son rôle. La Commission Gomery l'a réitéré dans ses deux rapports; on avait l'impression que le Conseil du Trésor ne considérait pas la surveillance de l'administration financière des ministères comme une activité importante et il ne s'acquittait pas très bien de cette tâche.
Je suggère donc que le Conseil du Trésor remplisse mieux ses fonctions et que le Comité des comptes publics s'assure que c'est effectivement le cas. Cela n'exige pas nécessairement une confrontation parce que, toujours en théorie, monsieur Williams, vous partagez les mêmes intérêts, à savoir la saine gestion des finances publiques et du gouvernement — ou vous devriez en tout cas. Me voilà encore retourné au conditionnel.
Quant aux responsabilités des sous-ministres et à la reddition de comptes de leur part, la liste prévue dans la Loi fédérale sur la responsabilité n'est pas mauvaise en soi. On y prévoit les mesures à prendre pour structurer les ressources du ministère de manière à exécuter ses programmes, conformément aux politiques et aux règles du gouvernement — c'est-à-dire conformément dans un sens large, aux lois, aux règlements et aux autres instruments applicables.
On cite également les mesures prises pour que le ministère soit doté de mécanismes de contrôle interne efficaces. C'est là un élément clé.
On parle aussi de la signature des comptes qui doivent être tenus pour l'établissement des comptes publics. En signant les comptes, l'agent comptable se déclare personnellement responsable des actions qui y sont enregistrées, et comme je l'indiquais précédemment, des autres actions également, ce qui nous ramène aux problèmes que nous avons connus dans le dossier des armes à feu.
Il y a également, entre autres, l'exercice des autres attributions spécifiques.
Si on veut résumer le tout, on peut s'en tenir à deux éléments principaux. Le premier est ce que j'appellerais la conformité. Il consiste en l'observation des règles, des règlements et des lois. Le deuxième aspect est la légitimité, c'est-à-dire la nécessité de faire les choses comme il se doit. Plutôt que de proposer des règles et des règlements, la Commission Gomery — et j'appuie totalement les recommandations du juge Gomery en ce sens — a indiqué que la légitimité absolue se résume en deux questions que doit se poser l'agent comptable lorsqu'il est confronté à une décision difficile. Il doit d'abord se demander s'il serait capable de justifier cette décision devant le Comité des comptes publics. Deuxièmement, étant donné que le Comité des comptes publics représente les intérêts du Parlement et de la population canadienne, il doit se demander s'il pourrait défendre sa décision sur une tribune publique.
Je dois préciser que le juge Gomery faisait ici un emprunt à un document du Trésor britannique qui donnait une définition de « légitimité » à ses agents comptables.
En définitive, le comité et le Conseil du Trésor devraient conjuguer leurs efforts pour insuffler aux sous-ministres et aux agents comptables un sens des responsabilités et de la reddition de comptes, de telle sorte que cette mentalité se transmette jusqu'aux échelons les plus bas du ministère d'une manière qui, à mon avis — et c'est ce qui est très inquiétant — ne s'est pas vraiment concrétisée récemment; trop souvent, l'administration n'était pas à la hauteur.
Il y a un dernier point dont j'aimerais traiter avant de laisser la chance à d'autres.
Il s'agit de la durée du mandat des sous-ministres. Nous avons reçu le dernier sous-ministre des Affaires indiennes et nous lui avons posé la question. Ce n'est pas vraiment à lui qu'il revient de déterminer la durée de son maintien en fonction au sein du ministère. Ce sont d'autres personnes qui sont maîtres de son destin, mais je pense que tous ceux qui ont eu affaire avec ce ministère conviendront avec moi qu'il serait bon d'assurer une certaine continuité au niveau de sa gestion.
Est-ce que l'un d'entre vous aurait des suggestions sur les mesures que nous pourrions prendre pour mettre en place un tel mécanisme systématique de telle sorte que le pouvoir exécutif ne puisse pas simplement déplacer les sous-ministres d'un ministère à un autre?
Je pourrais faire une suggestion à cet égard.
Je crois qu'il y a effectivement un problème au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, mais il faut aussi dire que le secrétaire du Conseil du Trésor est demeuré en poste en moyenne deux ans et demi au cours des 30 dernières années, et que c'est la même chose pour le greffier du Conseil privé. Je pense que nous avons de véritables problèmes à ce niveau et c'est pourquoi j'ai qualifié de manière pas trop élogieuse les sous-ministres de goélands en mission.
La situation est différente dans d'autres pays du Commonwealth. En Australie, la norme est de cinq ans pour la durée de service attendue. Si mon souvenir est exact, il y a certaines restrictions quant à la façon dont une personne peut être démise de ses fonctions au cours de cette période. Même pour passer d'un ministère à un autre, l'approbation de la législature est requise, mais il faudrait que je vérifie exactement dans quelle mesure. En Grande-Bretagne, les postes correspondant à ceux des sous-ministres sont généralement les derniers occupés par les fonctionnaires. Ils sont habituellement en fonction cinq ou six ans.
J'estime que si le Parlement pouvait s'assurer — et vous pourriez le faire au moyen d'une motion dont vous feriez le suivi en Chambre — en vertu d'une exigence officielle que les sous-ministres sont en poste pendant cinq ans et que le Parlement doit être avisé et informé des raisons justifiant un mandat plus court, vous seriez sur la bonne voie.
Je crois que vous avez tout à fait raison. Je ne pense pas que nous puissions envisager sérieusement la mise en place d'un mécanisme de responsabilisation et de reddition de comptes si les cadres supérieurs — les agents comptables, comme on les appelle — ne restent pas assez longtemps en poste pour assumer les conséquences de leurs décisions. Je partage vos inquiétudes à cet égard.
L'un des principaux problèmes de notre système de reddition de comptes dans son ensemble est la courte durée de maintien en fonction des gens occupant différents postes: les sous-ministres, les ministres eux-mêmes et, en toute honnêteté, les membres des comités, y compris celui-ci. J'ai d'ailleurs parlé de cette question-là.
Je suis d'accord avec M. Franks. La solution évidente consiste à établir des mandats prévus de quatre ou cinq ans en laissant, bien sûr, une marge de manoeuvre suffisante pour apporter les changements requis; il ne s'agit pas nécessairement de mandats fermes.
À l'heure actuelle, on ne sait pas à quoi s'attendre quant à la durée du mandat d'un sous-ministre. On présume presque qu'il sera déplacé d'ici deux ou trois ans. Si on passait à une attente plus normale de quatre ou cinq ans, on obtiendrait une meilleure prévisibilité. Bien évidemment, cela peut également s'appliquer à d'autres postes.
J'aimerais aborder trois sujets. Ils découlent tous du rôle spécial que nous devons jouer en tant que membres du Comité des comptes publics. Je vais donc répéter certains éléments que nous connaissons tous.
Le Comité des comptes publics diffère des autres comités en ce sens que nous n'élaborons pas de politiques; nous sommes là pour demander des comptes au gouvernement. Je pense que le choix d'un président au sein de l'opposition traduit bien cette réalité. J'ai toujours pensé qu'étant donné que leur travail s'évalue en termes d'idées et de concepts, les comités permanents traitant de questions liées aux politiques devraient disposer des ressources nécessaires pour se déplacer au Canada et effectuer des recherches, notamment.
Comme c'est tout à fait son droit, l'électorat fait son choix et la composition des comités devrait être le reflet proportionnel de ce choix. Comme ses objectifs sont très différents, j'ai toujours cru que le Comité des comptes publics devrait présenter une image inversée de la proportion des sièges au Parlement. Ainsi, si nous avons un gouvernement majoritaire, ce sont les partis de l'opposition qui devraient avoir la majorité au sein du comité. Plus la majorité est forte, plus il devra y avoir de députés de l'opposition dans le comité. En effet, plus vous avez une majorité marquée au gouvernement et plus vous restez longtemps au pouvoir, plus grands sont les risques d'une reddition de comptes insuffisante. Lorsqu'on examine la structure du comité, mise à part sa présidence, j'estime qu'il serait intéressant de discuter de cette possibilité.
Pour ce qui est des ressources, j'ai toujours trouvé inquiétant d'entendre le Bureau du vérificateur général dire qu'on se sert d'un seuil de référence d'un milliard de dollars; qu'on ne s'intéresse qu'aux dossiers impliquant des sommes supérieures à ce seuil. On ne va pas nécessairement produire des rapports sur les autres problèmes qui sont soulevés de quelque manière que ce soit. Cela m'a toujours un peu troublé. Supposons un problème entraînant des coûts de 100 millions de dollars. Si on ne fait rien pour le régler, on en sera rendu à 1 milliard de dollars en 10 ans. Si nous n'intervenons pas rapidement en pareil cas, aussi bien dire que nous ne faisons pas vraiment notre travail.
Toujours en tenant compte du fait que nous sommes un comité très différent, notre base de ressources devrait également être totalement différente et nous permettre de compter sur le travail d'agents de recherche qui pourraient...
Je crois que nous sommes le véhicule utilisé pour rendre des comptes au Parlement. Nous ne souhaitons pas formuler ce genre d'hypothèses, mais supposons, théoriquement, qu'il y ait un cas de malversation ou de non-respect des règles au sein du Bureau du vérificateur général, il est bien évident que nous ne disposons pas des ressources suffisantes pour faire le nécessaire.
À qui devrions-nous alors nous adresser? Je suppose que la GRC aurait les ressources pour ce faire. Mais la GRC semble croire que si un problème de ce genre survient, c'est la vérificatrice générale elle-même qui devrait les appeler. Il me semble y avoir conflit d'intérêts.
Voilà donc les trois questions que je souhaitais soulever.
Vous touchez à plusieurs éléments.
Quant à votre première question concernant la composition du Comité des comptes publics, bien des gens font valoir que, heureusement ou malheureusement, ce n'est pas un comité très attrayant. Je crois que c'est généralement ce qu'on dit. Quand je parlais tout à l'heure des rôles des membres des différents comités, il est difficile pour eux de retourner voir leurs commettants — et je ne vous apprends rien — et de leur parler de quelques-unes de leurs réalisations les moins concrètes, plutôt que de leur exposer une politique qu'on a proposée ou de leur apprendre qu'on a mis au jour cet incroyable scandale de menu gaspillage. C'est le genre de réalisations que l'on peut faire connaître aisément à ses commettants et je crois que cela est plus facile pour les membres de certains autres comités.
Votre suggestion quant à l'inversion proportionnelle du nombre de sièges est assez intéressante. Bien évidemment, l'hypothèse sous-jacente est que la responsabilisation est toujours une affaire partisane. En soutenant que plus la majorité du gouvernement en Chambre est forte, plus le comité devrait compter de membres de l'opposition, on présume en effet que la reddition de comptes doit toujours être assortie de considérations partisanes. Il va de soi, comme nous pouvons le constater ici même, que les comités sont constitués de membres de différents partis et qu'il va toujours y avoir des désaccords entre eux.
Ce genre d'arrangement contribuerait à alimenter la perception voulant que c'est à l'opposition qu'il incombe de surveiller le travail du gouvernement, et que les députés du parti au pouvoir sont là pour défendre le gouvernement, ce qui n'est pas toujours approprié à mon avis. Il est normal qu'ils soient portés à le faire, mais j'estime qu'un tel système ferait en sorte d'inciter les membres du parti au pouvoir à se cramponner en se contentant de défendre toutes les actions du gouvernement, sans vraiment jouer leur rôle de surveillance et de responsabilisation.
Pour ce qui est des dossiers qu'on peut qualifier de moins importants, ceux dont la valeur est inférieure à un milliard de dollars notamment, je pense qu'il faut absolument souligner que votre comité n'est pas nécessairement là pour retrouver les sommes perdues dans les différents scandales et dossiers, ou lorsqu'ils constatent des problèmes qui n'en sont peut-être pas du point de vue d'autres personnes. Votre rôle consiste davantage à examiner la situation dans son ensemble, à vous pencher sur les procédures, les méthodes comptables et les autres grands principes, plutôt qu'à vous intéresser aux cas individuels. Cela fait bien évidemment aussi partie de votre travail, mais j'estime que votre comité devrait surtout concentrer ses efforts sur l'analyse du portrait global et des grands dossiers.
Il est sans doute préférable de laisser les dossiers particuliers à la vérificatrice générale, à la GRC ou à toute autre instance compétente; cela dépend de la situation dans chaque cas. Votre comité ne peut pas tout faire. Je répète que sa contribution principale se situe davantage au niveau de l'analyse générale des dossiers, des procédures et des structures en place.
Monsieur Franks.
J'ai quelques observations à ce sujet.
Depuis ses tout débuts en 1867, le comité a toujours dû éviter le piège de se livrer à la chasse aux scandales, plutôt que de s'intéresser au système et à la façon de l'améliorer.
J'aime l'équilibre obtenu avec la présence d'un président de l'opposition à la tête d'un comité dont la composition est proportionnelle à la représentation en Chambre. Ainsi, le président, en sa qualité de député de l'opposition, est incité à vouloir faire la lumière sur les dossiers; les députés du gouvernement contrebalancent ses visées en ce sens.
C'est la raison pour laquelle j'ai insisté sur l'importance de l'unanimité pour ce qui est des rapports du comité. Chacun n'obtient pas nécessairement ce qu'il souhaite, mais un rapport qui bénéficie de l'assentiment de tous les membres du comité de quelque parti qu'ils soient a énormément plus de poids qu'un rapport qui est adopté grâce à une majorité. Je considère d'ailleurs que le rapport sur les responsabilités et la reddition de comptes des ministres et des sous-ministres au Canada a été une réalisation extraordinaire pour votre comité. C'était vraiment un très bon rapport qui a produit d'excellents résultats.
J'aimerais faire valoir un autre point. Pour ce qui est de la surveillance du Bureau du vérificateur général, le programme des commandites était en deçà du seuil d'importance relative — je crois que c'est l'expression qui a été utilisée —, ce qui signifie que les sommes en cause n'étaient pas suffisamment élevées pour que cela constitue un problème majeur du point de vue financier.
Par contre, pour ce qui est de l'importance politique et des indications que cela fournissait sur les finances gouvernementales, c'était suffisamment grave.
Il en va de même du dossier des armes à feu, sur lequel le comité s'est penché, si on pense aux sommes que la vérificatrice générale a relevées — 25 millions de dollars ou environ dans les budgets supplémentaires des dépenses. C'était inférieur au seuil d'importance relative, mais pour ce qui est du contrôle parlementaire sur les fonds publics, c'était tout à fait primordial.
Selon moi, c'est un aspect auquel le comité pourrait s'intéresser de manière à soumettre des suggestions à la vérificatrice générale et/ou au gouvernement quant à savoir quels sont les dossiers vraiment importants. Il arrive que certaines questions qui apparaissent secondaires soient en fait cruciales; elles sont les symptômes de problèmes plus vastes ou les symboles d'une situation à corriger.
Je vais en rester là pour l'instant.
Monsieur le président, j'aimerais faire quelques commentaires concernant des questions soulevées précédemment, et particulièrement au sujet du Conseil du Trésor.
Je remonte à la période qui a précédé le passage à l'an 2000 alors que nous pensions tous que nos ordinateurs allaient flancher. Notre comité a dit au Conseil du Trésor de prendre le dossier en charge et de demander aux ministères de rendre des comptes à l'égard des progrès réalisés ou non en prévision de la catastrophe appréhendée.
Il ne s'est rien passé, Dieu merci, car le Conseil du Trésor a répondu que ce n'est pas à lui qu'il incombait de faire appliquer ses propres règles. Son rôle consisterait à énoncer des règles, à dire aux gens de faire ceci et cela et de prendre les mesures nécessaires, mais il ne dispose d'aucun pouvoir pour s'assurer que l'on donne suite à ses indications. Dans les différents ministères, les sous-ministres étaient à la tête de petits domaines jouissant de pouvoirs indus. Le Conseil du Trésor s'en est sorti avec une apparence de rappel à l'ordre qui n'a pas donné beaucoup de résultats.
Dans ce contexte, lorsque vous parlez du Conseil du Trésor qui répondrait aux rapports, de préférence à la vérificatrice générale, j'ai un peu peur qu'il soit davantage enclin à dire que tout va bien. Son implication complice dans le dossier des armes à feu — Jim Judd était secrétaire du Conseil du Trésor à l'époque — nous montre bien que ces gens ne sont pas là pour défendre les valeurs fondamentales d'une saine administration; ils sont là pour faire seulement leur travail, monsieur le président.
Je suis favorable à l'idée que les représentants du Conseil du Trésor comparaissent devant ce comité pour exposer leur point de vue sur la responsabilisation des sous-ministres. Mais j'aimerais que cette décision soit entérinée par une recommandation approuvée par notre comité. Étant donné que la nouvelle Loi fédérale sur la responsabilité prévoit que les sous-ministres doivent rendre des comptes au Parlement, c'est assurément une décision qui nous revient, plutôt qu'au Conseil du Trésor. Je me souviens des observations de M. Franks concernant les publications déposées par le Conseil du Trésor devant notre comité l'automne dernier qui étaient loin d'être favorables, si vous vous rappelez bien, monsieur le président. Cela portait sur la doctrine de la reddition de comptes et de la responsabilité ministérielle notamment. Je ne voudrais donc pas déléguer ce pouvoir au Conseil du Trésor.
Je pense, monsieur le président, que nous devrions envisager la rédaction d'un rapport sur les questions dont nous discutons aujourd'hui.
Je souhaiterais aussi apporter une autre précision. Je ne voudrais pas que M. Sauvageau croit que j'écarte la préoccupation qu'il a soulevée, parce qu'elle est tout à fait valable, mais je n'ai pas vraiment de réponse à lui proposer, étant donné que le Parlement n'est pas une institution de gestion. Le Parlement est une institution de reddition de comptes. Et il faut que cela soit bien clair dans nos esprits. Nous ne faisons pas partie de la structure de gestion du gouvernement. Ainsi, si quelque chose vient à dérailler, nous intervenons pour rectifier la situation.
Comme la rapidité d'intervention est importante pour assurer la crédibilité au cas où ce dossier deviendrait public — le dossier dont il parlait, celui du centre aquatique de Montréal — je pense que la vérificatrice générale devrait écrire au contrôleur général pour s'assurer que tout est en ordre. Le contrôleur général, le comptable en chef pour le gouvernement du Canada, devra ainsi garantir à la vérificatrice générale qu'il possède les outils et les mécanismes nécessaires pour intervenir rapidement et s'assurer que ce dossier est géré de façon appropriée. Et il pourra déposer son rapport devant notre comité.
Est-ce que notre comité pourrait écrire au contrôleur général pour lui demander si tout est en ordre?
Nous pouvons en discuter, monsieur le président. Je n'ai pas eu le temps de réfléchir vraiment à la question, mais nous pourrions effectivement songer à obtenir une telle assurance du contrôleur général qui a la capacité d'agir rapidement et les pouvoir requis pour faire le nécessaire en sa qualité de comptable en chef.
J'aimerais parler, monsieur le président, des recommandations issues de la Commission Gomery. J'ai l'impression qu'on se contente de faire du rafistolage dans les structures du Parlement. On ne s'attaque pas suffisamment au fond. C'est comme si on ne tenait pas compte du fait que le Parlement est notre plus grande institution démocratique et que le gouvernement rend des comptes au Parlement. On recommande notamment un financement accru pour le Comité des comptes publics et un maintien en poste prolongé pour les sous-ministres, mais on n'insiste pas sur la nécessité pour le Parlement de redevenir une institution démocratique forte. Nous avons permis à nos pouvoirs — et ce, je ne sais depuis combien d'années, peut-être parle-t-on même de générations — de s'éroder et de s'effriter, morceau par morceau, pour en arriver à la situation actuelle où nous sommes asservis au gouvernement, alors que cela devrait être le contraire.
J'espérais que la Commission Gomery serait l'occasion de réaffirmer le grand concept voulant que le Parlement soit l'instance supérieure qu'il demande des comptes au gouvernement. Monsieur le président, comme nous le savons tous, la Loi fédérale sur la responsabilité a adopté bon nombre des recommandations du rapport Gomery et se retrouve par le fait même à faire elle aussi du rafistolage, plutôt que de consolider l'institution dans son ensemble et d'essayer de lui redonner son rang de force démocratique de premier plan.
Ce sont des éléments qui me préoccupent; toute cette question de la responsabilité institutionnelle. On ne retrouve certes pas ce concept dans la Loi fédérale sur la responsabilité; en tout cas, je ne le vois pas. Si le juge Gomery l'a abordée d'une manière ou d'une autre, ce n'est certes pas évident.
Des observations, monsieur Franks ou M. Malloy?
Je vais y aller d'abord. Jonathan pourra poursuivre s'il le souhaite.
Dans le rapport de la Commission Gomery, mais pas dans ses recommandations, on peut lire qu'il y a trois principes fondamentaux qui régissent notre démocratie parlementaire: la suprématie du Parlement, la responsabilité ministérielle et la primauté du droit.
Le rapport indique par la suite que l'interprétation que fait le gouvernement de la doctrine de responsabilité ministérielle et de l'impression qu'il est maître de son application fait en sorte que cette responsabilité a préséance sur la suprématie du Parlement et que le gouvernement n'écoute plus ce que le Parlement — c'est-à-dire ce comité — a à lui dire concernant les mesures de responsabilisation qu'il compte prendre, notamment pour faire en sorte que la fonction publique et les autres agences rendent des comptes au Parlement.
On peut donc dire que si les recommandations ne traitent pas de cet aspect, il en est bel et bien question dans le rapport. L'objectif visé était très clair. On voulait consolider le Parlement. Mais si on veut vraiment consolider une institution comme le Parlement — et notamment le Comité des comptes publics — il faut prévoir des mesures progressives. Il ne suffit pas de dire « Changeons le système » pour que les changements s'opèrent instantanément. Il convient de préciser les différentes actions qui doivent être entreprises.
À ce moment-ci, je dirais que le point que j'ai soulevé tout à l'heure, et que l'on ne retrouve pas vraiment de façon marquée dans le rapport Gomery, au sujet de la nécessité d'un protocole sur les responsabilités et la reddition de comptes des agents comptables devant ce comité, est un élément essentiel et doit, à ce titre, être soumis à l'assentiment de votre comité.
Autrement dit, quelle que soit la façon dont ce protocole est établi, il doit pouvoir compter sur l'aval du comité, ainsi que du Conseil du Trésor. Je crois que c'est seulement à partir de là que le comité et le Conseil du Trésor pourront conjuguer leurs efforts pour renforcer le Conseil du Trésor en même temps que le contrôle du Parlement sur les dépenses publiques par l'entremise du processus de reddition de comptes.
Mais j'insiste sur le fait que c'est au comité et au Parlement de déterminer les modalités en vertu desquelles les agents comptables vont comparaître devant vous.
J'aimerais ajouter seulement quelques précisions, surtout au sujet des changements progressifs.
Il est possible que les recommandations du rapport Gomery apparaissent plus timides et moins ciblées qu'elles auraient pu l'être.
Les efforts d'amélioration ou de réforme du Parlement ne doivent pas être fondés sur la notion voulant qu'il ait déjà connu un âge d'or et qu'il s'agit simplement de lui redonner son lustre d'antan. Si on remonte dans l'histoire, il ne fait aucun doute que le Parlement vit certains problèmes depuis bien des années. Je ne suis pas certain qu'on puisse vraiment parler d'un âge d'or pour le Parlement.
En fait, les efforts de transformation doivent viser bien évidemment davantage les attitudes et notre système politique en général. Le fonctionnement du Parlement est vraiment influencé par certains des facteurs les plus généraux liés au mode de fonctionnement des partis politiques, à la façon dont les députés sont élus, au taux de roulement des députés à la Chambre des communes — un élément qui relève bien évidemment du contrôle des électeurs. Sous bien des aspects, il s'agit de changements qui sont hors du contrôle de tout comité ou même du Parlement lui-même. Il est question ici de notre système politique dans son ensemble.
Les changements qui marquent la plus grande progression sont peut-être selon moi les plus importants. Si on remonte 20 ans en arrière aux recommandations du rapport McGrath, il s'agissait de mesures assez importantes, tout au moins au titre de leur ambition de réformer le Parlement — en quelque sorte, de lui redonner le prestige perdu par rapport à un supposé âge d'or. Ces réformes du rapport McGrath n'ont pas transformé le Parlement en profondeur, mais ont certainement permis quelques changements importants, surtout pour ce qui est du travail des comités. Il s'agit des modifications les plus progressives et ciblées qui aient été apportées et je crois qu'elles ont donné de très bons résultats, particulièrement pour la Chambre des communes.
J'en reviens à mon point de départ. Je pense que les changements progressifs sont ceux qui sont les plus efficaces. Plus vous essayez de réformer le Parlement ou de le transformer en profondeur, plus vous risquez, d'une certaine manière, de manquer votre coup, parce que vous vous attaquez alors à des facteurs et à des variables beaucoup plus vastes qui échappent, bien honnêtement, au contrôle de cette Chambre; ces facteurs trouvent racine dans notre société.
[Français]
Monsieur le président, je voudrais tout simplement faire un commentaire, et il est flatteur. Je ne sais pas si vous connaissez le personnage d'Obélix, mais quand j'entends M. Williams, cela me fait penser à la bande dessinée où ce Gaulois est tombé dans la potion magique tellement M. Williams connaît très bien les rudiments de ce comité.
Je m'abreuve de vos savantes paroles, monsieur Williams, pour comprendre toujours davantage mon rôle au sein de ce comité. Je vous en remercie.
Deuxièmement, à la lumière de ce que j'ai appris depuis trois mois, certaines données sont apparues. Le gouvernement canadien a un budget annuel d'environ 200 milliards de dollars. C'est une somme colossale. Si on fait la comparaison, 1 ¢ dans ma poche représente probablement un million de dollars. Donc, c'est une somme assez importante. Il faut prendre en considération le fait que les contribuables canadiens et québécois, tous les gens qui envoient de l'argent à Ottawa en retour de services, ont le droit de connaître de quelle façon leur argent est utilisé. C'est là le grand portrait de la situation.
Lorsqu'on m'a demandé de siéger ici, j'ai accepté avec grand plaisir. Je voyais un peu le travail que j'aurais à accomplir comme étant comparable à celui qu'accomplissent des moines — je ne sais si ce sont des Franciscains ou des Bénédictins — dans le livre de l'Italien Umberto Eco intitulé Le nom de la rose. Enfin, je me voyais dans une tour en train de scruter chacun des livres comptables de ce glorieux pays afin d'essayer de comprendre exactement de quelle façon les cents sont distribués, surtout dans la foulée du récent scandale qu'on appelle le scandale des commandites, où on a fait la lumière sur la raison de l'intervention politique et sur la façon, assez scabreuse, merci, dont on a géré le programme.
Cela dit, il y a une autre science, que j'appellerai une science maudite, mais que je vis et que nous vivons parce que nous sommes en politique et que le système l'exige: l'électoralisme. C'est pour nous un passage obligé. Donc, la partisanerie prend une certaine forme, grande ou petite. Chaque commentaire est soupesé à sa lumière.
Il n'en demeure pas moins que le travail que je veux et que nous voulons accomplir ici — c'est dans cet esprit que je le vois — vise à nous assurer que la reddition de comptes puisse avoir un sens pour nos commettants et qu'elle nous permette d'améliorer la situation. Qu'il s'agisse du gouvernement canadien, du gouvernement québécois ou d'un autre, la mécanique est semblable, on doit avoir une responsabilité à cet égard.
J'aurais plusieurs anecdotes ou images à donner, mais je crois que j'en ai donné un certain nombre. Le but, c'est la reddition de comptes au niveau politique. On reçoit des personnes qui sont ou ont été de haut fonctionnaires qui ont été impliqués d'une certaine façon dans l'étude que nous faisons et qui sont invités pour répondre à nos questions et nous éclairer davantage dans notre recherche d'une solution ou de réponses à des interrogations qui nous tracassent ou qui même, à la rigueur, nous interpellent.
Il y a l'aspect très mécanique des tours de table de huit minutes plus cinq minutes. En 13 minutes, peut-on vraiment scruter les moindres détails d'une question? On s'entend pour dire que si on connaît bien un dossier, cela nous aide. Cependant, lorsqu'on connaît à peine un dossier, c'est notre devoir d'apprendre à le connaître, mais c'est un aspect que je trouve un peu fastidieux. Cependant, c'est un défi et je l'accepte.
Ce qui suit est une perception; vous me le direz si je fais erreur. J'ai eu l'impression, en posant certaines questions, que les personnes qui étaient ici pour y répondre étaient davantage intéressées à cacher des choses qu'à répondre de manière à faire la lumière sur le sujet. Je suis peut-être trop sévère, mais il m'a semblé qu'on essayait de mettre en arrière-plan la réponse à une question en y consacrant 30 secondes après m'avoir servi un développement de quatre minutes et demie. Dans pareil cas, j'ai l'impression de m'en « faire passer une vite », non pas pour m'aider, mais pour m'orienter dans une autre direction.
Je ne sais pas s'il y a une réponse simple à la question à savoir que faire pour revoir ce genre de choses. Bien sûr, j'ai vu certains petits trucs dans le fonctionnement de ce comité et de celui des opérations gouvernementales et des opérations budgétaires. Par exemple, mieux vaut poser quatre question tout de suite en commençant, sachant que l'on ne dispose que de cinq minutes. Ainsi, nos quatre questions ont bien été posées. Par la suite, si on trouve que la personne qui y répond patine trop, on peut l'interrompre et essayer de passer à une autre question. C'est vraiment de la mécanique. Donc, j'ai eu le sentiment qu'on nous envoie parfois paître plutôt que de nous donner des pistes.
À la lumière de votre étude du fonctionnement de ce comité, comment croyez-vous que nous pourrions améliorer cette situation? Ou est-ce que je fais erreur et que je mérite qu'on me ramène à l'ordre?
[Traduction]
Vous abordez de nombreuses questions. Vous dites que quelques-unes d'entre elles sont davantage d'ordre mécanique — le mode d'interrogation, le système de rotation et des choses du genre. Je crois que vous avez tout à fait raison; la plupart des gens sont d'avis que ce n'est pas le système le plus efficace pour aller au coeur des problèmes sur lesquels le comité veut se pencher.
Cependant, cette question ne se limite pas à l'aspect mécanique. Il doit certainement exister des moyens pour que chaque parti et chaque membre du comité ait son mot à dire et je crois que les comités ont dû constater qu'ils ne pouvaient malheureusement trouver mieux que le système actuel et qu'il n'existait pas nécessairement de procédure pour améliorer la situation, étant donné que nous parlons ici, comme nous l'avons déjà dit, d'un comité de nature politique. Les membres représentent différents points de vue, différentes idéologies, différents partis, et il faut malheureusement en pareil cas se contenter parfois de mécanismes de ce genre qui ne sont pas l'idéal, mais qui sont préférables.
Vous avez aussi parlé de ces questions qui pouvaient parfois devenir encore plus obscures, plutôt que de s'éclairer, et particulièrement de la manière dont certains dossiers pouvaient s'embrouiller davantage.
Je suppose que ce qui est nébuleux pour une personne peut être pour quelqu'un d'autre une tentative d'apporter des éclaircissements, de divulguer tous les faits et de présenter le contexte. Encore là, c'est souvent une question de désaccord politique. Ce qui représente un problème pour un parti peut être une solution ou un éclaircissement ou quelque chose du genre pour le parti opposé. J'estime que c'est au comité qu'il incombe de trouver la manière dont il entend composer avec cette situation et dont tous ses membres peuvent convenir de ce qui est un problème, de ce qui offre une solution et de ce qui apporte des éclaircissements. Je pense que pour chaque membre qui a l'impression que les choses s'obscurcissent, il y en a un autre qui essaie simplement de donner tous les faits et tous les aspects de la question, au risque de compliquer le tout, ce qui ne veut pas nécessairement dire que c'est nébuleux.
Je vais répondre brièvement.
Il existe deux options. Je pense même qu'il y en a une troisième que vous rejetteriez probablement; elle consiste à désigner des interrogateurs principaux de chaque côté qui vont poser des questions pendant, disons, 30 minutes chacun; et vous poursuivez à partir de là.
Parmi les deux options, il y a celle de la rencontre à huis clos, parce que vous pouvez poser vos questions dans un cadre plus décontracté, en l'absence de la presse et du public. C'est pourquoi vous tenez généralement à huis clos vos séances d'organisation ainsi que vos discussions sur les rapports et des sujets semblables. Il y a toutefois un inconvénient. On a constaté, en Grande-Bretagne par exemple, que lorsque le comité des comptes publics se réunissait à huis clos, il y avait peut-être quatre ou cinq membres, au maximum, qui posaient des questions, et entre 30 p. 100 et 50 p. 100 venaient de la même personne. Lorsque le comité a commencé à tenir des séances publiques, il a adopté le même mode de fonctionnement que le vôtre : 10 minutes pour chacun des membres et c'est tout.
L'autre possibilité est d'adopter le modèle du Québec.
[Français]
L'Assemblée nationale du Québec met un certain temps à la disposition de chaque parti politique, et non d'un député.
[Traduction]
Chaque parti a droit à un certain temps de parole et c'est au parti qu'il incombe de déterminer ce qu'il en fait. C'est une option à considérer. J'aurais une petite réserve dans le cas de votre comité parce qu'une telle méthode met en lumière les divergences entre les partis, plutôt que le rôle important joué par chacun des membres.
Voilà donc différentes possibilités pouvant être envisagées.
Monsieur Franks, notre comité a mis à l'essai, à titre expérimental, une formule semblable à celle que vous préconisez en tenant une séance d'information à huis clos le lundi pour prendre connaissance des différents dossiers, avec l'idée que les membres seraient ainsi mieux informés et que le personnel serait présent dès le départ le mardi et le jeudi. Cela n'a pas vraiment bien fonctionné. L'échec est attribuable autant aux membres qu'aux témoins. Les membres ont agi comme s'il s'agissait d'une simple réunion et sont passés directement à l'aspect politique des choses. Les témoins, plutôt que de considérer qu'ils participaient à une séance d'information, se sont présentés accompagnés d'une dizaine de fonctionnaires et semblaient parfois être ici pour brouiller les cartes, comme l'indiquait M. Nadeau.
Nous avons renoncé à cette formule après deux ou trois semaines. L'objectif visé au départ n'était pas atteint, mais nous l'avons effectivement essayé. Nous pourrions tester une formule différente à l'automne; c'est ce que nous voulions faire à ce moment-là et nous en avons fait l'essai. Mais de l'avis général, cela n'a pas fonctionné.
Il y aurait peut-être un autre moyen de le faire, soit que le comité de direction siège après que le personnel a effectué certains travaux pour décider du champ des questions que pourraient poser les membres du comité. Ensuite, le comité de direction pourrait décider de la façon dont ces questions seront partagées entre les membres du comité et essayer d'encourager les membres de leur parti à s'en tenir à ces questions.
J'aurais un commentaire à faire en réponse à ce qu'a dit M. Nadeau, soit que les eaux sont parfois troubles. Stephen Leacock, un grand politicologue canadien, avait affirmé au sujet d'un de ses collègues que, chaque fois qu'il allumait la lampe du savoir, il enfumait la pièce.
Des voix : Oh, oh!
M. Franks : Nous avons tous ce problème.
En droit, nous avions l'habitude de dire que les conneries déroutent l'intelligence, et je crois que c'est bien souvent ce qui se passe au sein de ces comités.
J'en ai omis un mot. Je ne voudrais pas provoquer un tollé le dernier jour de séance du Parlement.
Je souhaitais aussi mentionner que, durant la toute première réunion que nous avons eue, je crois que les députés se sont vraiment efforcés de comprendre les faits et les emjeux. C'est la façon dont nous avons tenté d'aborder la question. C'était un peu comme un interrogatoire préalable, s'il y a des avocats parmi vous. J'ai constaté que les bureaucrates que nous tentions d'obliger de rendre des comptes avaient utilisé le processus à leurs propres fins et que, lorsqu'ils se sont présentés aux audiences publiques, ils avaient déjà tout planifié et ont vraiment « troublé » les eaux. C'est ainsi que je l'ai compris. L'exercice n'a pas été très utile parce qu'ils ont exploité la situation.
Si je pouvais soulever une question de plus avant de partir, ce serait ceci. Au sujet du registre des armes à feu — je vais être plus précis. J'ai parlé du Conseil du Trésor tout à l'heure, mais je songeais en réalité au contrôleur général. Je vois des sous-ministres défiler chez le contrôleur général pour demander s'ils peuvent faire ceci ou cela. Le contrôleur général leur répond qu'ils n'ont que deux options, qu'il n'y a pas d'autre choix: soit qu'ils dépassent leur budget ou qu'ils demandent des crédits supplémentaires. Même le contrôleur général obtient un avis juridique, à un moment donné, pour confirmer les options.
Et voilà que les sous-ministres se mettent à agir de leur propre initiative, qu'ils écartent le contrôleur général, obtiennent leurs propres avis juridiques, affirment qu'il existe une troisième option et qu'ils peuvent simplement ignorer le contrôleur général.
Je trouve cela aberrant. Le contrôleur général a en réalité démissionné à cause de cette situation. On a nommé un autre contrôleur général qui aurait dit que cette façon de faire était correcte.
À mon avis, le contrôleur général est là pour prodiguer des conseils et de l'orientation aux sous-ministres. Ceux-ci suivent ces conseils; ils ne devraient pas pouvoir agir de leur propre chef et trouver de nouveaux moyens de contourner les règles. Le contrôleur général, en tant que professionnel, leur rappelle les règles et leur dit ce qu'ils ont à faire. Je suis abasourdi de constater qu'ils agissent de leur propre chef et font le contraire.
Pour être encore plus précis, je commence vraiment à croire qu'il faudrait que le contrôleur général ait lui aussi des comptes à rendre au comité, de sorte qu'on puisse faire du ménage et savoir qui au juste décide des règles de gestion des finances publiques. Est-ce le contrôleur général ou le sous-ministre?
Puis-je répondre?
Monsieur Fitzpatrick, pour en revenir à l'euphémisme que vous avez employé, vous pourriez sans crainte prononcer au Parlement la formule latine « stercus taurinus mentem confundet », si cela peut vous être utile la prochaine fois que vous voudrez exprimer vos sentiments. Toutefois, mettons cela de côté. J'ai le sentiment que le contrôleur général est le fonctionnaire, au Conseil du Trésor, avec lequel votre comité devrait entretenir ses principaux rapports.
La Loi fédérale sur la responsabilité confère au secrétaire du Conseil du Trésor le pouvoir d'émettre ce qu'on pourrait appeler des décisions — ce qu'elles ne sont pas tout à fait — au sous-ministre quand survient un différend dans un dossier. Il est injuste d'affirmer que l'actuel contrôleur général a accepté le contournement des règles. Je ne crois même pas qu'il était là lorsque cela s'est produit. Par contre, j'estime qu'il faut que le comité fasse en sorte que le Conseil du Trésor assume bien ses fonctions.
En ce qui concerne la question que vous examinez en matière d'armes à feu, vous avez parfaitement le droit de demander à connaître la raison pour laquelle on n'a pas tenu compte de l'opinion du Conseil du Trésor. Il est possible que ce soit parce qu'un seul haut fonctionnaire du Conseil du Trésor avait une opinion ferme à ce sujet. Je n'en suis pas sûr, mais je crois que votre comité a le droit de demander qu'il y ait au Conseil du Trésor un haut fonctionnaire chargé de la fonction de surveillance des agents comptables. La personne tout indiquée, selon moi, est le contrôleur général du Canada. C'est à lui que vous pourriez ensuite adresser vos questions. Il est simplement à espérer que le contrôleur général ne se lancera pas dans des missions-goélands.
Oui. Tout à l'heure, quand j'ai soulevé trois points, le troisième n'a pas reçu de réponse. Il s'agissait d'obliger le vérificateur général à rendre des comptes. Il s'agit d'une situation où le processus a fait défaut. Un rapport du vérificateur général a fait l'objet d'une fuite dans les médias et une enquête de la GRC a été réclamée. La GRC a répondu que, pour enquêter sur le vérificateur général, il faut que la demande vienne du Bureau du vérificateur général. Il m'a semblé qu'il y avait là une situation de conflit d'intérêts, et le fait que la GRC puisse prendre ce genre de décision me laisse très perplexe.
Il est très clair que c'est à nous que devrait revenir cette décision, si nous constations ce genre d'éventuel problème au Bureau du vérificateur général, ou plutôt, dans le cadre de ce processus, nous serions l'organe qui, non pas enquête peut-être parce que nous n'en avons pas les ressources et qu'il pourrait y avoir apparence de conflit, mais qui pourrait demander à un organe comme la GRC de le faire. Qu'en pensez-vous?
J'ai plusieurs remarques à faire. Tout d'abord, chaque rapport produit par le vérificateur général est transmis avant son dépôt au gouvernement, qui l'épluche. Ainsi, par le temps que le rapport du vérificateur général est public, il ne contient aucun fait erroné. Toutefois, ce que cela signifie, c'est que des personnes au sein du gouvernement ont lu le rapport avant sa publication. Il ne faut pas supposer au départ que la fuite est venue du Bureau du vérificateur général. Elle aurait pu venir du gouvernement même. Il existe un vieil adage selon lequel trois personnes peuvent garder le secret à condition que deux d'entre elles soient mortes. J'ai l'impression qu'au moins trois ministres avaient vu ce rapport, de même que leurs sous-ministres, plus le personnel de leurs cabinets. Il ne faut pas présumer que la fuite est venue du vérificateur général. C'est là mon premier point.
Ensuite, si ma mémoire est bonne et je ne crois pas me tromper, le vérificateur général est un agent comptable au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques et il a donc des comptes à rendre au Parlement comme tout autre agent parlementaire. Par conséquent, le comité dispose de toute la marge de manoeuvre voulue pour examiner le Bureau du vérificateur général du point de vue de son rôle d'agent comptable.
Mises à part ces considérations, à mon avis, le comité devrait se tenir loin de toute cette question parce qu'elle pourrait comporter un conflit d'intérêts — un conflit d'intérêts informel. Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un conflit juridique comme tel, mais il vaudrait mieux laisser un autre comité se charger de cette fonction.
Messieurs, il ne nous reste plus que quelques minutes. Donc, si quelqu'un a de courtes remarques à faire...
Monsieur Williams.
Merci, monsieur le président.
Nous avons brièvement parlé d'une augmentation des ressources recommandée par la commission Gomery pour le comité. Je ne suis pas sûr que nous ayons une opinion à cet égard, mais il en a été question.
Voyons ce qu'en pensent les témoins.
Si nous obtenions plus de ressources, quelle forme pourraient-elles prendre?
Est-ce bien ce que vous voulez savoir, monsieur Williams?
J'ignore comment nous pourrions nous substituer à la vérificatrice générale dans son travail, étant donné son budget, son personnel, son professionnalisme, son impartialité et tout le reste. Je ne vois pas comment nous pourrions faire mieux, sauf s'il existait ce lien serré avec la politique dont j'ai parlé tout à l'heure.
J'ai parlé de la notion de longévité des sous-ministres. Je ne crois pas que le vérificateur général se mêlerait de cela, parce qu'on est à la toute limite des prérogatives du premier ministre quant à qui fait quoi et pendant combien de temps.
Il se peut que nous voulions étudier cette question, parce que...
Toutefois, elle est allée à la toute limite dans le dernier rapport sur les Affaires indiennes. Elle a parlé de « d'une attention soutenue de la part de la direction ».
Oui, mais je ne suis pas sûr qu'elle consacrerait tout un chapitre ou une enquête à cette question.
Donc, en ce qui concerne les questions qui sont peut-être, si vous me passez l'expression, trop délicates pour la vérificatrice générale parce qu'elles se rapprochent trop de la politique, nous avons peut-être un rôle à jouer. Je serais donc reconnaissant aux témoins de me faire connaître leurs réactions.
Tous conviennent, je crois, que nous devrions éviter de faire comparaître des ministres. Durant mon mandat à la présidence, le comité a accueilli trois fois des ministres et, les trois fois, les membres du comité ont immédiatement sombré dans le sectarisme.
La quatrième fois, en réalité, le comité a su se tenir. Ce fut lorsque nous avons fait comparaître le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, parce que tout le comité avait été indigné par le rapport de la vérificatrice générale et le manque d'engagement de la part du ministère en vue de régler la question de l'éducation. Les membres du comité ont vraiment fait front commun la quatrième fois, mais les trois fois précédentes, c'était le chacun pour soi. Je crois donc que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il faut éviter d'inviter à comparaître des ministres.
Je vais peut-être demander aux témoins de commenter ce que vous venez de dire, mais à nouveau également — si vous ne voyez pas d'inconvénient à répondre à cette question — le juge Gomery a recommandé dans son rapport que notre comité reçoive plus de ressources. Avez-vous une idée de la forme qu'elles pourraient prendre?
Comme je l'ai dit tout à l'heure, il ne serait pas très avantageux pour votre comité d'avoir sa propre équipe d'enquête, comme une équipe de juricomptables, qui se trouverait à dédoubler le travail fait par le vérificateur général strictement en termes de recherche des faits.
Par contre, il serait utile que votre comité de même que d'autres comités permanents disposent de plus de ressources pour assimiler l'information, particulièrement celle qui se trouve dans les rapports du vérificateur général, et, à dire vrai, pour documenter les membres pour la tenue des audiences.
Comme je passe mon temps à le dire, vous êtes très bien servis par le personnel que vous avez déjà et, en règle générale, en fait, lorsque je me suis entretenu avec des membres de votre comité prédécesseur, ils ne m'ont pas vraiment fait sentir qu'ils avaient besoin de beaucoup plus de personnel. Donc, la demande ne semble pas être grande. Par contre, j'estime que votre comité et d'autres comités seront beaucoup mieux servis s'ils disposent de personnel qui peut aider, non pas forcément sur le plan de la comptabilité et d'autres questions dites techniques ou professionnelles, mais pour certaines autres choses dont a parlé M. Williams, soit de préparer le comité à naviguer dans les eaux politiques. Il est fort possible d'avoir un personnel très compétent et impartial qui peut épauler le comité à cet égard.
Voilà le genre de choses que j'ai recommandées dans mon rapport à la commission Gomery. Je crois que c'est à quoi songeait le juge Gomery lorsqu'il a fait ses recommandations, plutôt qu'à simplement dédoubler le travail des enquêteurs professionnels qu'a déjà à sa disposition la vérificatrice générale. Je ne crois pas qu'il appartient au comité de faire cela. C'est dans le lien de son travail avec les questions de nature plus politique que le comité et ses membres seraient peut-être mieux servis.
Il faut interpréter la recommandation faite dans le rapport de la commission Gomery en tenant compte de sa recommandation générale selon laquelle tous les comités devraient disposer de plus de ressources.
Simplement pour faire valoir un point à cet égard, la commission Gomery n'a pas recommandé la nomination d'un agent du budget parlementaire ou la création d'un bureau de budget parlementaire. Une proposition en ce sens avait été faite dans un des rapports de recherche soumis au comité par le Centre parlementaire, mais le juge Gomery estimait qu'une autre forme d'appui plus général pour tous les comités avait plus d'importance.
Le véritable défi à relever n'est pas simplement d'inonder les comités de ressources, mais que les comités souhaitent obtenir ces ressources et sachent ce qu'ils veulent en faire. Il me semble que votre comité devra travailler à cette question, parce que j'ai l'impression que le gouvernement, tout comme le Parlement, serait très sympathique à ce genre de proposition, mais qu'il faudrait que vous justifiiez la raison pour laquelle vous demandez ces ressources.
[Note de la rédaction: Inaudible]... la question des témoins, comme nous en étions essentiellement convenus. Quelqu'un a-t-il une remarque à faire dans le sens contraire, monsieur le président?
À mon avis, à moins qu'il existe une preuve nette et forte que le ministre a participé à un détournement de fonds ou à leur mauvaise administration, nous ne l'invitons pas à comparaître. Le sous-ministre ou le haut fonctionnaire est essentiellement la personne que nous souhaitons rencontrer. C'est ainsi que j'ai toujours abordé la question.
Je conviens que, chaque fois qu'un ministre comparaît, nous voyons défiler toute une brochette de fonctionnaires.On se contente de nous donner la réponse classique, ce qui n'est pas utile pour les études du comité — ou du moins, ne l'a pas été jusqu'ici.
Monsieur Franks, monsieur Malloy, au nom du comité, je tiens à vous remercier sincèrement de vos exposés. Nos rapports avec vous deux ont toujours été plaisants, et vos conseils et votre lucidité nous ont toujours été extrêmement utiles. Vous nous fournissez une vue d'ensemble venue de l'extérieur. Je crois qu'il est utile de le faire périodiquement et d'entendre ces commentaires et ces vues.
Geoff, je tiens à vous remercier également d'avoir été des nôtres. Nous attendons avec impatience que s'établissent des rapports avec votre fondation.
Avant de déclarer la séance levée, y a-t-il un dernier commentaire que vous aimeriez faire, monsieur Franks?
Étant donné ce que j'ai dit tout à l'heure, j'espère que votre vue d'ensemble ne sera pas la vue en plongée du goéland.