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Je déclare ouverte cette séance du Comité permanent des comptes publics. Conformément à l’alinéa 108(3) du Règlement, le comité entreprend l’étude du chapitre 2, Défense nationale — Le recrutement et le maintien en poste du personnel militaire, du rapport de mai 2006 de la vérificatrice générale du Canada.
Nous accueillons aujourd’hui Mme Sheila Fraser, vérificatrice générale, qui est accompagnée de Hugh McRoberts, vérificateur général adjoint, et de Wendy Loschiuk, directrice principale.
Du ministère de la Défense nationale, nous avons le contre-amiral Tyrone Pile, chef du Personnel militaire, le brigadier-général Linda Colwell, directrice générale, Politique de production de personnel, et le commodore Roger MacIsaac, directeur général du Recrutement.
Madame Fraser, je vous souhaite la bienvenue, ainsi qu’à vos collaborateurs.
Monsieur Pile, madame Colwell, monsieur MacIsaac, je vous souhaite aussi la bienvenue au comité.
Avant de passer à votre exposé préliminaire, madame Fraser, je voudrais prendre quelques minutes pour permettre au comité d’examiner, d’approuver ou de modifier le procès-verbal de la réunion tenue hier par le Sous-comité du programme et de la procédure. Nous avons fait circuler le procès-verbal.
Le premier paragraphe précise que nous avons discuté des travaux du comité et avons proposé un calendrier. Au troisième paragraphe, intitulé Agenda proposé, je voudrais proposer d’ajouter après 2006, « ou pour un temps plus court, tel que déterminé par le Comité ». C’est ce que nous avons clairement décidé au cours de la réunion.
Y a-t-il des observations sur le procès-verbal de la réunion du Sous-comité du programme et de la procédure?
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Merci, monsieur le président.
Nous sommes heureux d’être ici aujourd’hui pour discuter de mon rapport Le Point sur les efforts du ministère de la Défense nationale en vue de recruter hommes et femmes dans la force régulière et de les maintenir en poste. Comme vous l’avez mentionné, je suis accompagnée aujourd’hui de Hugh McRoberts, vérificateur général adjoint, et de Wendy Loschiuk, directrice principale chargée de nos vérifications en matière de défense.
Nous avons terminé en janvier 2006 les travaux de vérification pour notre rapport. Dans le cadre de cette vérification, nous avons examiné les progrès réalisés par la Défense nationale depuis notre vérification de 2002, pour régler les problèmes liés au recrutement et au maintien en poste du personnel militaire. Nous étions préoccupés alors par la baisse des effectifs entraînés de la force régulière, qui constituent le nombre de militaires prêts à servir. Cette baisse était attribuable au fait que le nombre de recrues diminuait au moment même où le nombre de militaires quittant les forces armées augmentait.
Comme vous le savez, il est essentiel que la Défense nationale et les Forces canadiennes disposent d’effectifs militaires qualifiés et compétents pour pouvoir s’acquitter des tâches qui leur sont confiées. En fait, les pressions dues à la pénurie de personnel sont devenues manifestes lorsque le ministère, dans son rapport sur le rendement de 2004-2005, a signalé qu’il lui avait fallu décréter une pause opérationnelle pour reconstituer ses forces.
Je suis heureuse de signaler que la Défense nationale a fait des progrès satisfaisants pour ce qui est de répondre aux préoccupations que nous avions soulevées en 2002. En 2005, le ministère avait réussi à endiguer la baisse des effectifs qualifiés et compétents; ceux-ci commençaient même à augmenter quelque peu. Nous avons examiné la planification réalisée par le ministère afin d’établir ses objectifs quantitatifs annuels pour le recrutement et l’entraînement. Nous avons constaté qu’elle était valable.
Depuis 2002, le ministère a presque atteint ses objectifs de recrutement chaque année. Au moment où notre rapport Le Point a été publié, le ministère s’employait à élaborer une stratégie nationale de recrutement afin de cibler ses efforts en ce sens et de leur assurer une plus grande cohésion. De plus, il travaillait à établir pour 2007 des mesures du rendement qui l’aideraient à évaluer l’efficacité des mesures prises à cet égard.
[Français]
Le ministère s'efforce aussi de limiter les départs. Il a effectué un sondage pour comprendre les raisons qui poussaient les militaires à quitter le service et a modifié les conditions de service afin de mieux répondre à ses besoins. Je suis encouragée par les efforts que le ministère déploie pour comprendre ce problème, même si les résultats qui en découlent sont moins tangibles.
La Défense nationale prend également des mesures pour améliorer la façon dont elle gère les ressources humaines militaires. Cependant, le ministère pourrait faire davantage pour améliorer l'information sur les ressources humaines.
Comme vous le savez, j'ai fait part de certaines préoccupations au sujet du processus de recrutement des Forces canadiennes, car des problèmes récurrents pourraient compromettre les plans d'expansion des forces armées. Bien que le ministère ait réussi à recruter plus d'effectifs, les membres continuent de quitter les Forces canadiennes en grand nombre; le résultat est que, si les effectifs qualifiés n'ont pas diminué, ils n'ont cependant pas beaucoup augmenté. Compte tenu du taux d'attrition, le nombre net de militaires qualifiés et compétents à s'être joints aux effectifs des Forces canadiennes depuis 2002 n'est que d'environ 700, malgré l'arrivée de 20 000 nouveaux membres. Il s'agit là d'une situation inquiétante si les forces armées doivent augmenter leurs effectifs de façon importante au cours des prochaines années. Lorsque nous avons entrepris les travaux dont les résultats ont été publiés dans notre rapport Le Point, nous nous attendions à une hausse du nombre de militaires compétents et prêts à servir, de sorte que les pénuries dans les groupes professionnels clés puissent diminuer. Nous avons constaté, au contraire, que les pénuries observées dans plusieurs groupes professionnels clés en 2002 continuaient en 2005.
[Traduction]
La Défense nationale doit déterminer ce qu’elle devrait faire pour retenir ses membres. Environ 80 p. 100 des militaires font partie d’un groupe au taux d’attrition élevé, soit parce qu’ils en sont à leurs premières années de service dans les Forces, soit parce qu’ils pourraient bientôt être admissibles à la retraite.
Le processus même de recrutement a des lacunes, dont certaines étaient prévisibles, et d’autres, évitables. Le système doit permettre d’identifier et de recruter les candidats adéquats en temps voulu et de manière efficace, car environ 28 p. 100 des postulants se désistent en raison de la lenteur du processus. Il faut également trouver des moyens de rendre la carrière militaire plus attirante pour les groupes sous-représentés, c’est-à-dire les femmes, les Autochtones et les membres des minorités visibles.
Le système devrait permettre la croissance des forces armées, mais au moment de notre vérification, le recrutement était bien en deçà du niveau requis pour que les Forces canadiennes s’accroissent.
[Français]
La Défense nationale doit aussi pouvoir s'assurer qu'elle recrute les bons candidats. Toutefois, les indicateurs visant à prédire les aptitudes militaires n'ont pas été validés. De plus, le ministère n'a pu prouver que ces indicateurs sont utilisés de la même manière par tous les recruteurs. Je suis heureuse de voir que le ministère convient de la nécessité de valider ces outils, tâche qu'il compte terminer d'ici la fin de 2008. Dans sa réponse, il a annoncé l'établissement d'un centre permanent de formation au recrutement en 2007, ce qui est une mesure positive.
La Défense nationale a également besoin d'un système de formation qui puisse prendre en charge un plus grand nombre de recrues. Alors qu'il y a eu expansion des centres d'instruction élémentaire, des difficultés demeurent à l'étape suivante de la formation des groupes professionnels. La capacité limitée du système de formation à ce niveau crée des situations d'engorgement et constitue un obstacle du fait qu'elle empêche l'affectation de personnel compétent aux opérations au moment et à l'endroit où leur présence serait nécessaire.
[Traduction]
Monsieur le président, la Défense nationale a subi des transformations depuis notre vérification. Elle prévoit maintenant accroître la force régulière de 13 000 membres. Le comité voudra peut-être en apprendre davantage sur ce que fait le ministère pour s’assurer de recruter les bons candidats, dotés des compétences et du profil requis par les forces armées, sur ce que fait le ministère pour garantir que les efforts investis dans le recrutement, la formation et le maintien en poste contribuent à la durabilité des effectifs militaires et sur le moment où le ministère se dotera d’un plan d’action pour apporter les améliorations nécessaires.
Monsieur le président, cela met fin à mes observations sur le recrutement et le maintien en poste des militaires.
Nous nous ferons un plaisir de répondre à toutes les questions du comité.
Je vous remercie.
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J’ai procédé à une vérification rapide, monsieur le président. Je me limiterai à environ cinq minutes.
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs. C’est avec plaisir que je me présente devant vous aujourd’hui pour formuler quelques observations concernant le rapport de la vérificatrice générale sur le recrutement et le maintien de l’effectif, pour décrire certaines des activités que nous entreprenons et pour faire connaître certains des progrès réalisés dans le cadre de l’expansion des Forces canadiennes.
J’insisterai sur les succès que nous avons connus en donnant suite aux recommandations de la vérificatrice générale, mais je soulignerai aussi certains enjeux qui restent. Pour ce qui est du rapport de la vérificatrice générale, je dois d’abord souligner qu’il dresse un tableau exact de la situation telle qu’elle se présentait pendant la période couverte, soit de 2002 à 2005.
L’équipe de la vérificatrice générale a souligné les progrès considérables que nous avons réalisés depuis le dernier rapport remontant à 2002, et a signalé à juste titre certains secteurs dans lesquels nous n’avons pas évolué aussi bien ou aussi rapidement que prévu.
Le rapport proprement dit est axé sur quatre points clés : le recrutement, le maintien de l’effectif, les stratégies de maintien de l’effectif et le besoin de clarifier les responsabilités et les pouvoirs en matière de gestion du personnel et de ce que nous appelons la « production de personnel ». Permettez-moi de formuler quelques commentaires sur chacun de ces points, en commençant par le recrutement.
Il est important de souligner que les années couvertes par le rapport le plus récent étaient antérieures à l’expansion des Forces. De fait, la période de 2003 à 2005 a été une étape de stabilisation des Forces canadiennes, après des années de réduction suivies par une reprise marquée du recrutement et une période d’augmentation lente et planifiée visant à atteindre un effectif qualifié en activité plus raisonnable. L’effectif qualifié en activité constitue essentiellement la mesure permettant de déterminer les membres des FC qui sont entraînés au niveau du déploiement et ceux qui sont prêts à être déployés.
Au cours de l’exercice 2005-2006, nous avons entrepris ce qui est devenu la première tranche de l’expansion des Forces. La première exigence de cette expansion — celle sur laquelle se fonde le plan de recrutement stratégique de 2005-2006 — prévoit une augmentation sur cinq ans de 5 000 militaires au sein de la Force régulière. L’an dernier, nous avons atteint 106 p. 100 de l’objectif de notre plan de recrutement stratégique, puisque l’effectif des FC s’est accru de plus de 1 000 militaires. Au cours de l’exercice 2005-2006, on a annoncé une plus grande expansion des Forces. Le nouveau plan prévoit que l’effectif rémunéré total s’élèvera à quelque 75 000 membres dans la Force régulière. Cette stratégie permettra aux Forces canadiennes de croître par étapes, la première consistant à atteindre un effectif rémunéré total de 70 000 membres dans la Force régulière d’ici l’exercice 2010-2011.
J’ai récemment donné des instructions afin qu’on commence à traiter les demandes des candidats au moyen de nouveaux protocoles conçus pour accroître l’efficacité de notre système de recrutement tout en maintenant les normes des Forces canadiennes. Ces nouveaux protocoles visent à permettre de passer du système séquentiel de traitement des demandes utilisé antérieurement, au cours des années de croissance nulle ou de réduction des effectifs, à un système d’étapes simultanées. Par exemple, la vérification du casier judiciaire et de la solvabilité sont maintenant exécutées en même temps que l’on procède à la vérification des renseignements fournis par les nouveaux candidats ou à la vérification électronique des états de service des candidats ayant déjà effectué du service militaire.
La publicité joue un énorme rôle dans le processus d’attraction. Après tout, si les gens ne savent pas que nous embauchons, ils sont moins susceptibles de présenter une demande d’enrôlement. Au sujet de la publicité, je dois admettre que nous ne disposons pas de mesures scientifiques qui rendent compte du rendement de nos investissements. Toutefois, je peux dire que les campagnes publicitaires permettent effectivement de nous faire connaître car, lorsque des campagnes sont en cours, il y a davantage de personnes qui manifestent de l’intérêt pour les Forces et plus de candidats. En outre, l’expérience montre qu’à peu près un mois après la fin d’une campagne, l’intérêt et le nombre de demandes d’enrôlement diminuent.
Mes collègues aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Australie et en Nouvelle-Zélande signalent des résultats similaires. Le budget de publicité des FC est récemment passé de 5 à 15,6 millions de dollars, montant qui est semblable à celui d’une nation alliée de taille comparable comme l’Australie.
Pour ce qui est du maintien de l’effectif, nous continuons à élaborer une stratégie visant à favoriser une culture de maintien de l’effectif dans les Forces canadiennes. Les mesures du rendement de cette stratégie demeurent vagues en raison du large éventail d’activités qui s’inscrivent dans le cadre du maintien de l’effectif. Nous savons que de nombreuses initiatives, allant de l’amélioration de la qualité de vie à une rémunération équitable et des possibilités d’accès à l’éducation et à l’instruction à l’appui aux familles et aux militaires, engendrent l’engagement bilatéral nécessaire pour créer et maintenir une culture de maintien de l’effectif.
Au fil des ans, nous avons maintenu un taux d’attrition global d’environ 6,5 p. 100, qui fait l’envie de nos alliés. En fait, ce taux correspond à la limite inférieure d’une saine attrition nécessaire pour assurer le renouvellement des effectifs.
Afin d’établir des conditions gagnantes, l’ancien groupe des ressources humaines militaires a subi une réorganisation interne conforme aux principes établis par le chef d’état-major de la Défense, c’est-à-dire que nous avons créé une entité centrée sur le commandement et axée sur les opérations, connue aujourd’hui sous le nom de Commandement du personnel militaire et dirigée par le chef du Personnel militaire, poste que j’occupe. À l’interne, nous avons effectué une réorganisation pour concentrer nos efforts sur des lignes d’opération particulières et séparer l’élaboration de la politique de la prestation des services. Cette nouvelle structure est mieux adaptée à la fonction de production du personnel militaire et assure la vision centrée sur le commandement indispensable à la transmission de directives claires.
Monsieur Pile.
[Français]
Bonjour.
Selon vos statistiques sur le recrutement, voyez-vous souvent le problème de recrues qui ne sont pas embauchées, qui ne sont pas retenues à cause de la langue, c'est-à-dire parce que ce sont des gens qui parlent français et qui ont de la difficulté à parler anglais? Avez-vous des statistiques à cet effet? Selon vous, est-ce que c'est un problème?
Je dois vous avouer que je suis originaire d'un comté tout à fait local, celui de Hull—Aylmer, où il y a probablement 75 p. 100 de francophones. Souvent des gens viennent dans mon bureau de comté me dire qu'ils ont rêvé toute leur vie de faire carrière dans les forces armées, mais qu'ils ont eu de la difficulté lors des examens et lors des entrevues, parce qu'on exigeait d'eux qu'ils s'expriment surtout en anglais. Ils ont donc éprouvé beaucoup de difficulté. J'entends cette version. Je ne vous dis pas que c'est la vérité, je vous dis que c'est la version que j'entends. J'aimerais entendre votre version au sujet du recrutement.
Est-ce un problème, pour un unilingue francophone canadien ou pour quelqu'un qui ne maîtrise pas bien l'anglais, que de se faire embaucher dans les Forces armées canadiennes?
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Bonjour, madame Fraser et monsieur Pile.
Madame Fraser, en lisant votre rapport, on constate que vous avez porté une certaine attention au fait qu'il y a eu une amélioration par rapport au constat que vous aviez fait en 2002. Pourtant, en lisant attentivement plusieurs paragraphes, je constate qu'il y a quand même de nombreuses difficultés quant au recrutement de personnel spécialisé, et ce, à cause de différents facteurs.
Vous mentionnez entre autres, au paragraphe 2.17 de votre rapport, qu'il y a des groupes qui manquent d'effectifs. On parle de techniciens en munitions, d'officiers de logistique, de médecins. Quand on sait qu'il y a actuellement des opérations ou des manoeuvres militaires en Afghanistan, je me questionne beaucoup sur le manque d'effectifs possédant des compétences dans ces domaines.
Vous dites aussi qu'il y a un effort de recrutement aujourd'hui. On prévoit accroître la force régulière de 13 000 membres. Quand on lit votre rapport, on constate qu'il y a eu une augmentation de 700 membres en quatre ans. Selon la même logique, si on veut l'augmenter de 13 000, ça prendra 75 ans. Je me trompe peut-être dans ma lecture des chiffres, mais si on parle des augmentations nettes, il y a quelque chose qui cloche beaucoup si on veut atteindre ces objectifs.
Dans un autre paragraphe de votre rapport, vous soulignez, entre autres, la nomination d'un sous-ministre adjoint aux ressources humaines militaires. Or, au paragraphe 2.67 de votre rapport, vous dites que son autorité n'est pas respectée.
Constatez-vous que des mesures qui ont été proposées et que vous aviez soulignées en 2002 ont été effectivement mises de l'avant par les Forces canadiennes, mais que, en fin de compte, on ne s'en occupe pas? Par exemple, on a nommé un sous-ministre adjoint, mais on continue d'agir comme avant sur le plan du recrutement. Il me semble qu'il y a là un problème. Je vous demande votre opinion sur ce point.
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Nous avons fait le suivi des recommandations. La situation que nous avions constatée en 2002 est très différent de la situation d'aujourd'hui. En 2002, on notait un déclin de l'effectif dans les forces armées. Il ne semblait pas y avoir de plan pour au moins stabiliser l'attrition.
Quand on évalue la situation par rapport aux recommandations que nous avions faites en 2002, il y a eu un progrès satisfaisant parce qu'on note que le déclin a été arrêté et qu'on a même pu stabiliser les chiffres. Évidemment, la situation a changé, car on parle d'augmenter le nombre de soldats de façon importante.
Je pense que notre message est essentiellement qu'on ne peut plus continuer de faire le recrutement de la façon dont il était fait auparavant. Il faut changer les manières de faire si on veut avoir une augmentation de l'effectif et du nombre de personnes. On voit que les forces armées se sont dites d'accord et ont commencé à prendre des mesures à cet effet. D'ailleurs, sur la question de la responsabilité, l'amiral Pile a déjà commencé à aborder ces questions. Comme vérificateur, on réserve évidemment son jugement tant qu'on n'est pas retourné trois ou quatre ans plus tard pour voir si effectivement le plan d'action qui a été mis en marche a vraiment donné les résultats attendus. Je soulignerais aussi qu'il ne faut pas non plus minimiser le fait qu'il y a des défis très importants.
Comme vous l'avez mentionné, en 2002, on avait noté qu'il y avait une pénurie de personnel dans certains services plutôt spécialisés. On note la même situation encore en 2005. On note un taux de roulement très élevé dans certains postes; il peut atteindre jusqu'à 30 p. 100. Il existe des points très spécifiques pour lesquels les forces armées doivent avoir un plan d'action. Il faut évidemment se rendre compte que le nombre de personnes à la retraite va augmenter et que le nombre de personnes qui sont au début de leur carrière augmente également. Le taux d'attrition est plus élevé dans ces deux groupes. Je ne veux pas dire que tout est parfait et que tout est réglé. Il va falloir avoir un plan d'action. C'est une question à laquelle le comité pourrait peut-être s'intéresser. Il pourrait demander un plan d'action pour aborder certaines questions plus spécifiques. L'amiral pourrait peut-être en discuter davantage.
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Je crois que c’est moi qui ai la parole, monsieur Williams.
Je pense donc qu’il est un peu déplacé de dire que l’adjectif « privé » implique en quelque sorte une efficacité particulière.
Je voudrais tout d’abord féliciter... Eh bien, je voudrais me joindre à M. Williams, parce que c’est un bon point de départ, pour dire que nous appuyons aussi les forces armées. Par contre, certains d’entre nous croient qu’il est possible de soutenir énergiquement nos militaires, et tout particulièrement les soldats en première ligne, tout en participant à un débat politique sur la nature de leur mission. Nous croyons que cette distinction est justifiée et nous permet d’appuyer à l’unanimité nos troupes, tout en nous opposant à la tâche qui leur a été confiée.
J’ai été heureux de constater, dans votre troisième point, que vous avez réalisé des progrès très satisfaisants. Cela est important pour nous, compte tenu de votre situation antérieure et de la façon dont vous avez réagi aux préoccupations exprimées. Je suis très heureux de ces progrès, qui en disent beaucoup sur le travail accompli. Plus je m’occupe de cette question — je vais peut-être empiéter sur le domaine de mon collègue du comité de la défense —, plus j’apprécie et comprends le professionnalisme de nos services, ce qui confirme les progrès réalisés.
Cela étant dit, j’ai quelques questions à poser. J’en ai quelques-unes qui sont assez difficiles, sans pour autant être tendancieuses.
Compte tenu du fait que nous sommes en plein milieu d’une guerre, je suis curieux de savoir s’il y a une augmentation des absences sans permission, en supposant que vous utilisez encore cette expression. Si c’est le cas, avez-vous un problème croissant de soldats qui quittent le service actif?
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Je dois vous dire que, dans l’ensemble, tout se passe vraiment très bien pour les Forces canadiennes. Depuis le début des années 1960, c’est-à-dire après la guerre de Corée, l’effectif des forces diminuait. Ce n’est qu’en 2005 que la situation a changé du tout au tout. Nous avons commencé à augmenter, et cela continue.
Je dois admettre que le recrutement ne faisait pas l’objet de beaucoup d’investissements et d’attention. Les Forces canadiennes se contentaient de faire appel à certaines régions du pays pour recruter les gens dont elles avaient besoin à un moment donné. Des régions particulières du pays, comme le Canada atlantique et, dans une certaine mesure, les Prairies, l’Ontario et le Québec, à cause de leur taille, ainsi que certains coins de la Colombie-Britannique, nous fournissaient essentiellement un certain nombre d’hommes blancs. Aujourd’hui, nous devons accorder une attention particulière aux prévisions selon lesquelles les Blancs seront en minorité au Canada d’ici 2046. Il est donc extrêmement important pour nous de développer notre bassin de recrutement pour tenir compte de la diversité démographique du pays.
Par conséquent, les facteurs régionaux sont extrêmement importants pour nous, et je ne voulais pas que cela...
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Je vous remercie, amiral, j’en prends bonne note.
Il en est de même pour la police et les pompiers. Si nous voulons que les gens se sentent Canadiens de plein droit, nous devons nous assurer que cela se reflète dans la façon dont nous menons le pays.
Je suis donc très heureux de ce que vous venez de dire.
Mes collègues ont posé des questions au sujet des considérations linguistiques. J’aimerais, de mon côté, aborder la question de la répartition selon le sexe. En mai dernier, la revue Maclean’s a publié un article assez troublant et nous avons vu d’autres rapports parlant de harcèlement des recrues féminines et signalant que le taux des femmes qui s’en vont est très supérieur à celui des hommes. En fait, entre 1989 et 1996, 32 p. 100 des femmes ont quitté l’armée, volontairement ou non, par rapport à 11,9 p. 100 des hommes. En 1996 — je suppose que ce sont les statistiques les plus récentes utilisées dans cet article —, les chiffres étaient de 15 p. 100 pour les femmes et de 8 p. 100 pour les hommes. Je ne tiens pas à aller dans les détails. Vous savez où je veux en venir.
Pouvez-vous me rassurer? J’aimerais avoir la confirmation que vous vous occupez de ce problème et que vous prenez les mesures nécessaires pour que nos forces armées soient aussi accueillantes pour les femmes que pour les hommes.
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Je vous souhaite la bienvenue. C’est toujours un plaisir de vous voir, madame Fraser.
Amiral Pile, je voudrais commencer par la page 63 du rapport de la vérificatrice générale, aux paragraphes 2.30 et 2.31. Le paragraphe 2.30 commence par ce qui suit : « Nous nous attendions à ce que la Défense nationale possède une politique pour attirer les groupes visés. » À la fin du paragraphe 2.31, on peut lire ce qui suit : «La Défense nationale doit se doter d’un plan exhaustif pour orienter et coordonner les activités nationales, régionales et locales visant à attirer et à recruter des candidats. »
Je vous avoue que je ne suis pas sûr de comprendre. Le paragraphe 2.33 parle d’un objectif de 5 000. Ensuite, d’une façon ou d’une autre, nous avons entendu le chiffre de 13 000 qui a été lancés après l’exposé présenté aujourd’hui par la vérificatrice générale. Vous nous dites maintenant que l’effectif est de 64 000 et qu’il atteindra 70 000 en 2010. Pouvez-vous me dire, s’il vous plaît, si vous avez actuellement un plan d’ensemble? Pour écarter tout doute au sujet des chiffres, pouvez-vous affirmer que l’objectif est d’augmenter l’effectif de 6 000 d’ici 2010?
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Je ne sais pas si j’ai ces statistiques ici, mais le commodore MacIsaac a déjà été directeur général pour la réserve et les cadets. Avec la permission du président, je lui passerai le micro dans un instant.
Je sais par ailleurs que nous suscitons beaucoup d’intérêt parmi les jeunes hommes et femmes qui ont servi dans les corps de cadets de l’armée, de la marine et de l’aviation. Si vous posez la question à l’un d’entre nous, je suis sûr que vous trouverez un pourcentage représentatif de l’intérêt suscité parmi les gens qui se sont enrôlés dans les Forces canadiennes.
J’ai été cadet de l’Air, il y a bien longtemps de cela. Je crois que vous avez également été cadet, commodore MacIsaac, n’est-ce pas?
Je sais en tout cas que beaucoup de mes collègues sont passés par l’une des organisations de cadets des Forces canadiennes, où ils ont pris goût à la vie militaire et à certaines choses qu’ils ont peut-être faites plus tard. C’est une excellente organisation de jeunes. Je suis très heureux de l’appui dont elle bénéficie partout dans le pays.
Voulez-vous donner quelques chiffres?
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Je voudrais simplement noter qu’il y avait un certain nombre d’habitants de Cumberland House, aujourd’hui décédés, qui avaient récolté un grand nombre de médailles dans les Forces canadiennes. Ils étaient probablement loin d’avoir une 10e année, mais il faudrait que je vérifie. Quoi qu’il en soit, c’étaient de vrais héros de la Seconde Guerre mondiale.
Je voudrais aborder la question du recrutement des Autochtones parce que beaucoup de membres des Premières nations vivent dans ma circonscription. J’ai assisté il y a quelques années à un pow-wow au cours duquel quatre militaires autochtones étaient à l’honneur. Trois d’entre eux servaient dans l’armée américaine. J’avais cru comprendre qu’ils voulaient y faire carrière. L’un d’entre eux avait même des galons. Ils pouvaient donc monter en grade.
J’ai eu l’occasion de bavarder avec eux en présence de leurs parents, après la cérémonie. J’ai entendu quelques observations intéressantes. L’un des parents a mentionné par exemple — je regrette que M. Proulx ne soit plus là — que les exigences linguistiques pouvaient compromettre leurs chances dans les Forces canadiennes. C’est l’une des raisons pour lesquelles ils s’étaient engagés dans l’armée américaine. Ils étaient bilingues, possédant le cri et l’anglais, mais ils ne connaissaient pas le français.
Je ne suis pas sûr de la situation qui existe dans les Forces canadiennes en ce qui concerne la langue. Pour devenir officier, faut-il être fonctionnellement bilingue? Est-ce une exigence des Forces?
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S’il est possible d’établir qu’il y a un grand nombre d’Autochtones canadiens dans les forces armées américaines, nos forces devraient peut-être chercher des moyens de prendre contact avec eux pour essayer de les récupérer. Ce n’est qu’une suggestion de ma part.
Je connais quelques membres des professions médicales, comme des dentistes, qui se sont inscrits à ces programmes. Dans un cas particulier, je sais que les forces armées ont payé toutes les études d’art dentaire d’une personne. Je croyais que c’était un peu comme les contrats irrévocables à long terme du monde des sports parce que la personne bénéficiait d’un grand nombre d’avantages pendant qu’elle était inscrite au programme. Je crois cependant qu'elle a trouvé un moyen de rompre son contrat quelques années après avoir obtenu son diplôme. J’avais alors pensé qu’elle n’avait pas eu à payer très cher pour s’en aller.
Je suppose que nous vivons dans un pays libre, mais si des gens se font payer leurs études et obtiennent toutes sortes d’avantages, je crois que nous devrions les obliger à rester pendant une assez longue période.
Que font les forces armées dans des cas de ce genre?
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Général Pile, je suis très heureux que vous ayez pu venir aujourd’hui.
Je remercie tous les témoins présents.
Vous avez dit que le marché du travail est très concurrentiel. Venant de l’Alberta et faisant aussi partie du comité des ressources humaines, je peux certainement me rendre compte des difficultés que vous pouvez avoir.
Regardons maintenant la pièce 2.4 à la page 61 du rapport de la vérificatrice générale. Si on trace une courbe de tendance partant des années 0 à 3 et allant vers les années 15 à 20, on remarque un important espace au-dessous de la courbe entre les années 4 et 13 et particulièrement entre les années 9 et 13. S’il fallait augmenter les nombres des années 9 à 13 pour rejoindre la courbe de tendance, on aurait environ 13 000 membres de plus dans la force régulière. C’est précisément le chiffre de l’augmentation que vous envisagez, d’après la vérificatrice générale.
Qu’avez-vous à dire de la baisse qui s’est produite entre 1993 et 1997? Il me semble que les problèmes urgents que vous connaissez découlent non de ce que vous faites aujourd’hui, mais de ce qui s’est passé pendant cette période.
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C’est un phénomène très intéressant que nous constatons parmi les jeunes d’aujourd’hui. Nous avons effectivement eu des taux d’échec supérieurs à la normale au test d’aptitude physique. Comme vous le savez, il faut être en forme pour devenir membre des Forces canadiennes.
Au lieu de faire passer ce test à l’étape du recrutement, nous l’administrons maintenant — c’est d’ailleurs un autre moyen d’accélérer le processus — juste avant l’instruction de base, dans le cas des officiers et des sous-officiers. Après avoir subi le test à leur arrivée au centre d’instruction, les candidats peuvent emprunter l’une de deux voies. S’ils réussissent, ils passent à l’instruction de base. S’ils échouent et qu’il est évident qu’ils ont besoin d’un entraînement physique pour se remettre en forme, nous avons adopté une approche de mentorat dans le cadre de laquelle nous leur accordons un délai maximal de 90 jours pour se reprendre, avec notre aide et notre encouragement. Ils peuvent aussi, pendant ce temps, suivre d’autres cours de formation.
Avant la mise en place de ce système, nous avions découvert un phénomène très intéressant. Après quatre à six semaines d’instruction de base, l’appareil cardio-vasculaire de nos recrues se renforçait sensiblement. Toutefois, entre la 9e et la 11e semaine, l’ossature, c’est-à-dire le squelette et les tendons, commençait à lâcher par suite du mode de vie très sédentaire que beaucoup de nos jeunes ont adopté. Nous avions alors un nombre extraordinaire de blessures, dont certaines n’étaient pas déclarées parce que les recrues étaient tellement près de la fin de leur instruction. Lorsque ces gens parlaient finalement de leurs blessures, après avoir fini l’instruction de base, nous étions obligés soit de leur faire suivre un important traitement de réadaptation soit de les libérer parce qu’ils ne répondaient plus aux normes du service dans les Forces canadiennes.
C’est une réponse longue et sinueuse, mais, oui, nous sommes bien conscients du problème de la forme physique dans les Forces canadiennes. Nous travaillons en vue d’amener nos membres à s’engager d’une manière permanente à maintenir leur forme physique et leur santé.
Je n’ai pas de questions à poser.
Je voudrais tout d’abord vous remercier, madame Fraser, ainsi que vos collaborateurs d’être venus aujourd’hui.
Amiral Pile, je voudrais aussi vous remercier ainsi que vos collègues de votre présence. C’est un honneur de vous accueillir ici. Nous tenons certainement à vous exprimer notre appui, nos encouragements et, au nom de tous les Canadiens, nos remerciements.
Madame Fraser, avez-vous un dernier mot à dire avant que je lève la séance?