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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 063 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 septembre 2007

[Enregistrement électronique]

(1005)

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, nous allons commencer notre réunion, alors je vais vous demander de ranger les caméras et de prendre vos places respectives.
    J'aimerais rappeler aux membres du comité que la réunion de ce matin se tient devant public et sera télévisée.
    Comme la plupart des députés l'auront remarqué, nous avons déménagé dans une plus grande salle, à la demande d'un certain nombre de personnes. J'espère que tout le monde qui devait se rendre ici aura trouvé l'endroit. Je crois que c'est le cas.
    Mesdames et messieurs, conformément à l'alinéa 108(3)a) du Règlement, la réunion d'aujourd'hui portera sur les questions concernant la décision d'Élections Canada de permettre aux gens voilés de voter.
    J'aimerais tout d'abord remercier M. Mayrand et son équipe de comparaître devant le comité malgré un si court préavis. Nous vous en savons gré. Nous savons que vous faites ce genre de choses pour nous depuis un certain temps. Nous vous en remercions sincèrement. Nous comprenons tous que M. Mayrand a eu une semaine très chargée, et nous sommes ravis qu'il puisse nous rencontrer ici aujourd'hui en dehors de ses nombreuses occupations.
    Chers collègues, j'aimerais aussi ajouter qu'au cours de notre dernière réunion, le manquement au décorum était inacceptable. Je ne permettrai pas aujourd'hui les attaques personnelles ni les commentaires déplacés. Nous sommes ici dans un but très précis et je demande aux membres du comité d'agir en conséquence.
    Pour nous situer en contexte et faire en sorte que cet aspect soit d'une limpidité absolue dans le compte rendu, je rappelle aux députés présents que le lundi 10 septembre, le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a adopté à l'unanimité une motion visant à demander à M. Mayrand, directeur général des élections, ainsi que son équipe de comparaître pour donner suite aux préoccupations exprimées par tous les membres du comité relativement à la décision récente de M. Mayrand de permettre à des gens voilés de voter, puisque c'est une affaire urgente, et de tenir compte également des délais que notre greffière et nos analystes auront besoin pour préparer certains documents, compte tenu des élections partielles qui auront lieu au Québec.
    Monsieur Mayrand, après votre déclaration préliminaire, les membres du comité vous poseront des questions à tour de rôle, suivant la façon habituelle de procéder du comité. Nous allons faire des tours de table, comme d'habitude
    Nous avons prévu que votre présence devant le comité durerait une heure. Compte tenu de ce peu de temps, je vous prierais, monsieur Mayrand, de limiter votre déclaration préliminaire à cinq ou six minutes tout au plus.
    Par ailleurs, je demanderais aux membres du comité de limiter leurs questions au sujet qui intéresse M. Mayrand ici, c'est-à-dire la question du vote à visage couvert.
    Je rappelle également aux membres du comité qu'il faudra donner la chance à M. Mayrand de répondre à vos questions et je vous demande de ne pas poser de questions répétitives et de limiter les préambules, pour que M. Mayrand ait le temps de répondre correctement.
    Avant de commencer notre premier tour de table, je tiens aussi à profiter de l'occasion pour souligner dès le départ que je n'accepterai pas les questions qui ne portent pas précisément sur la question du vote à visage couvert. Je préviens tout de suite tous les membres du comité que je demanderai aux témoins de ne pas répondre aux questions portant sur tout autre sujet. Notre mandat à l'égard du témoin est très clair et a été clairement compris lorsque le comité a adopté à l'unanimité la motion visant à convoquer M. Mayrand.
    Je regarde mes collègues dans la salle et j'espère que tous les députés comprennent et acceptent ces règles de base. Comprenez que je prends mes responsabilités de président très au sérieux et que j'applique les limites de temps le plus rigoureusement possible. J'ai bien l'intention de suivre les directives qu'a données le Président actuel de la Chambre, M. Milliken, quant au rôle des présidents et des membres de comité, et je cite :
Je suis convaincu que les présidents des comités continueront de s'acquitter consciencieusement de leurs responsabilités en rendant des décisions équitables et pondérées qui s'inspirent des traditions démocratiques de la Chambre. Les membres des comités doivent, pour leur part, chercher à résoudre les problèmes de procédure de façon que les règles soient respectées et que les délibérations en comité soient équilibrées et productives.
(1010)
    Tout cela étant dit, j'inviterais M. Mayrand à présenter sa déclaration préliminaire.

[Français]

    Monsieur le président, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous rencontrer ce matin pour faire le point sur le régime d'identification des électeurs et sur la question du vote des femmes voilées.

[Traduction]

    Comme vous le savez, depuis juin dernier, la Loi électorale du Canada offre trois options à l'électeur pour s'identifier aux bureaux de scrutin. Ces options sont énoncées à l'article 143 de la loi.
    Premièrement, l'électeur peut choisir de s'identifier au moyen d'une seule carte gouvernementale comportant trois éléments d'identification, soit sa photo, son nom et son adresse résidentielle. Seules certaines cartes délivrées par les autorités provinciales et locales peuvent répondre à ces exigences, principalement le permis de conduire.
    Comme je l'ai indiqué plus tôt cette semaine, il va de soi que le scrutateur dans cette situation doit pouvoir comparer la photo de l'électeur qui choisit cette méthode pour s'identifier avec son visage. Dans ce cas-là, l'électeur devra se découvrir.
    Pour les électeurs qui ne détiennent pas de carte gouvernementale comportant la photo, le nom et l'adresse résidentielle, un deuxième moyen s'offre à eux pour s'identifier, et c'est de présenter deux pièces d'identité autorisées par le directeur général des élections, toutes deux contenant le nom de l'électeur, dont l'une avec son adresse résidentielle. La loi n'exige pas que ces pièces autorisées comprennent la photo de l'électeur. Cette méthode n'offre donc pas la possibilité au personnel électoral de comparer le visage à une photo.
    De nos jours, surtout dans les villes, on ne peut présumer que le personnel électoral connaisse les électeurs qui se présentent devant lui. L'identification visuelle n'est donc pas requise.
    Par ailleurs, le Parlement a prévu que l'électeur sans pièce d'identité peut quand même être admis à voter s'il prête serment appuyé par un autre électeur inscrit qui possède les pièces d'identité requises et qui répondra sous serment de son identité. Encore ici, aucune comparaison visuelle n'est requise.
    La loi offre donc plusieurs options qui ne requièrent pas l'identification visuelle des électeurs. C'est l'électeur qui choisit le moyen d'identification.
    Permettez-moi à cet égard de reprendre les mots du ministre alors responsable de la Loi électorale du Canada, lors de son discours en deuxième lecture du projet de loi C-31. Voici ce qu'il a dit :
Le processus d'identification de l'électeur décrit dans notre projet de loi a été minutieusement conçu par le comité permanent pour apporter une solution qui convienne à notre système électoral et qui corresponde à nos valeurs. Elle concilie la sauvegarde de l'intégrité du processus électoral et la nécessité de faire en sorte que personne ne soit privé de son droit de vote parce qu'il ne peut prouver son identité.

[Français]

    Cet équilibre n'aurait pu être atteint si tous les électeurs avaient été obligés de s'identifier à l'aide d'une carte gouvernementale avec photo. La loi a donc prévu plusieurs moyens de s'identifier qui ne requièrent pas la reconnaissance visuelle. Le choix revient à l'électeur.
    Vous vous souviendrez qu'au moment des débats, il a été fait état des répercussions du nouveau régime d'identification sur différents segments de la population, qu'il s'agisse des jeunes, des Autochtones, des personnes âgées, des travailleurs itinérants ou des sans-abri, qui sont tous des groupes moins susceptibles de posséder une carte d'identification avec photo.
    Finalement, le vote par la poste s'ajoute aux trois choix mentionnés plus haut. Par définition, cette procédure spéciale suppose qu'il n'y a aucun contact visuel entre l'électeur et le personnel électoral. Comme je le soulignais lundi dernier, plus de 80 000 électeurs ont voté par la poste à l'élection générale de 2006. Permettez-moi de vous signaler que le régime fédéral d'identification de l'électeur est devenu le plus contraignant au Canada. À ma connaissance, aucune loi provinciale ne requiert l'identification visuelle de l'électeur.
    Reconnaissant que la loi n'oblige pas un électeur à se dévoiler pour s'identifier, certains ont suggéré que j'exerce le pouvoir qui m'est donné en période électorale de modifier ou d'adapter la loi. Comme je l'ai indiqué, ce pouvoir d'adaptation est un pouvoir exceptionnel qui doit s'exercer avec réserve et circonspection. Ce pouvoir d'adapter la loi de façon provisoire et ponctuelle suppose qu'il y a nécessité en raison d'une urgence, de circonstances exceptionnelles ou imprévues, ou d'une erreur. Je tiens à préciser que ce pouvoir est destiné à faciliter l'exercice et le déroulement du vote, et non à restreindre les droits fondamentaux des électeurs.
    La Cour suprême a eu l'occasion de se prononcer sur l'étendue du pouvoir d'adaptation du directeur général des élections dans l'arrêt Haig en 1993, à l'occasion du référendum sur l'Accord de Charlottetown. On se rappellera qu'il y avait eu alors deux processus référendaires : l'un pour l'ensemble du pays à l'exception du Québec, et l'autre pour le Québec, régi par la loi provinciale. M. Haig avait récemment déménagé de l'Ontario au Québec et ne pouvait pas voter au Québec parce qu'il ne résidait pas depuis plus de six mois dans la province. Il demandait au DGE d'adapter la loi fédérale pour lui permettre de voter en Ontario comme s'il y résidait encore. Voici ce que la Cour suprême, au sujet du pouvoir d'adaptation, énonçait :
Bien que Ie directeur général des élections se voie attribuer un pouvoir discrétionnaire d'adapter la loi, ce pouvoir ne va pas jusqu'à permettre qu'il s'éloigne fondamentalement du régime qu'établit la Loi [...] En exerçant son pouvoir discrétionnaire, il doit demeurer dans les limites de ce régime législatif.
    De même, dans la situation actuelle, la possibilité pour une personne de voter sans se dévoiler découle clairement du régime législatif qu'on retrouve à l'article 143 de la loi.
    Cela n'écarte pas la possibilité d'un recours au pouvoir d'adaptation s'il survenait des circonstances exceptionnelles. Cependant, j'estime qu'à ce moment-ci, je n'ai pas de raison d'exercer mon pouvoir d'adaptation de la loi.
    Je voudrais également vous rappeler que lundi dernier, j'ai demandé aux fonctionnaires électoraux d'inviter toute personne dont on ne peut voir le visage à se dévoiler, et ce, dans un cadre respectueux de ses croyances. Si l'une d'elles choisit de ne pas le faire, elle devra prêter serment quant à sa qualité d'électeur pour être admise à voter, et ce, selon les exigences de l'article 144 de la loi. Je n'ai cependant pas modifié la loi pour exiger qu'elle se dévoile. Encore une fois, le choix revient à la personne.
    En ce moment, je ne doute pas que le vote de lundi prochain se déroulera de manière paisible et ordonnée dans les trois circonscriptions d'Outremont, de Roberval—Lac-Saint-Jean et de Saint-Hyacinthe—Bagot.
    Merci.
(1015)

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Mayrand.
    Je me demande si nous pouvons prendre un instant pour présenter l'équipe qui vous accompagne, à l'intention des membres qui ne connaissent peut-être pas tous vos collaborateurs.

[Français]

    Je suis accompagné de Mme Diane Davidson, sous-directrice générale des élections et première conseillère juridique, de M. Rennie Molnar, directeur principal, Opérations, Registre et Géographie, et de Me Stéphane Perrault, avocat général principal et directeur principal, Direction des services juridiques.

[Traduction]

    Merci.
    Chers collègues, nous allons commencer notre premier tour de table avec des interventions de sept minutes, et nous donnerons la parole d'abord à M. Proulx.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Bonjour, monsieur Mayrand. Bienvenue à vous, madame Davidson, monsieur Molnar et monsieur Perrault.
    Vous êtes un homme très populaire depuis quelques jours. Je suis certain que lorsque vous avez accepté cette nomination, vous ne vous attendiez pas à faire la première page de tous les journaux au Canada. Bienvenue dans cette nouvelle arène.
    Monsieur Mayrand, j'ai quelques questions à vous poser. Dans le texte de votre conférence de presse du lundi 10 septembre, vous dites avoir avisé les partis ainsi que les organisations des élections complémentaires. Vous dites :
[...] j’ai également transmis la documentation préparée pour cette réunion au gouvernement et au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour les informer de la conférence téléphonique [...]
     À qui avez-vous transmis cette information, du côté du gouvernement?
    J'ai transmis l'information au président et au greffier du comité, au ministre responsable des affaires électorales ainsi qu'au Bureau du Conseil privé.
    Depuis quand le Bureau du Conseil privé et le ministre responsable au gouvernement étaient-ils au courant, monsieur Mayrand? D'après votre document, votre conférence téléphonique a eu lieu le 26 juillet.
(1020)
    Je parle de mémoire, mais la semaine suivante, il y avait des suivis à assurer, et à la suite de cette conférence téléphonique, j'ai transmis la documentation aux parties que je viens de nommer.
    Le gouvernement — vous parlez du Bureau du Conseil privé qui crie sur tous les toits que cela n'a aucun sens — le savait donc depuis la fin du mois de juillet.
    Il le sait depuis la première semaine mois du mois d'août. Si je me souviens bien, la conférence téléphonique a eu lieu un jeudi.
    Entendons-nous sur le fait qu'à la fin de juillet ou au début d'août, le gouvernement était au courant. Il ne vous a pas donné signe de vie? Il ne vous a pas répondu? Il ne vous a pas demandé si vous étiez tombé sur la tête ou en bas de l'escabeau? Rien de cela?
    Je n'ai reçu aucun commentaire, aucune demande de clarification, aucune question.
    Parlons maintenant du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Vous dites avoir transmis l'information au président du comité, monsieur Mayrand.
    M. Marc Mayrand: Et au greffier.
    M. Marcel Proulx: Et au greffier. Il y a eu un changement de greffier, mais nous avons le même président. Le président de notre comité vous a-t-il répondu? A-t-il accusé réception de l'information transmise? Vous a-t-il demandé si vous étiez tombé sur la tête, si vous étiez tombé en bas de l'escabeau? Est-il arrivé quelque chose? J'imagine qu'il y a eu un échange quelconque.
    Il n'y a pas eu d'échange par la suite.
    Quand vous dites « je », vous devez inclure vos fonctionnaires d'Élections Canada.
    Mon bureau n'a pas eu de suivi à la correspondance.
    Monsieur Mayrand, quand ce comité a fait l'étude du projet de loi C-31, vous êtes venu témoigner. Vous êtes venu nous aider à discuter de ce projet de loi. Vous souvenez-vous en avoir discuté avec nous et nous avoir avertis — je devrais peut-être utiliser le terme « avisés » — que si la loi était adoptée telle que projetée, vous auriez éventuellement l'intention de prendre et d'annoncer cette décision?
    Je voudrais préciser que je n'ai pas comparu devant ce comité au sujet du projet de loi C-31.
    Vous n'avez pas...?
    C'est mon prédécesseur qui a comparu, et si je me souviens bien — je vous dis cela sous toute réserve —, c'était plutôt en décembre ou en janvier.
    Je ne mets pas en doute votre parole, mais vous êtes venu souvent devant ce comité au printemps, à l'hiver et depuis votre nomination. Vous êtes venu souvent au comité.
    M. Marc Mayrand: Oui.
    M. Marcel Proulx: Avant votre nomination, Mme Davidson accompagnait toujours M. Kingsley. Les dossiers d'Élections Canada démontrent-ils que cela a été discuté, si ce n'est par vous, par M. Kingsley, un représentant ou une représentante d'Élections Canada à ce comité-ci?
    Pas lors de l'étude du projet de loi C-31.
    D'accord.
     Les médias ont rapporté que lors de votre comparution devant le comité du Sénat, il y avait eu une discussion sur cette décision, que vous n'aviez pas encore prise.
    C'est exact.
    Le contexte était le suivant: on vous demandait ce que vous alliez faire concernant la question du voile. Rappelez-nous, s'il vous plaît, la réponse que vous avez donnée à ce moment-là.
    D'accord. Je veux simplement préciser qu'au moment des comparutions devant la Chambre au sujet du projet de loi C-31, les événements survenus dans le cadre de l'élection provinciale québécoise n'avaient pas encore eu lieu. Cependant, au moment où le Sénat a étudié le projet de loi, j'ai été invité à comparaître avec mon homologue du Québec pour traiter spécifiquement de la question des voiles. Mon collègue, à cette occasion, a précisé qu'il fallait modifier la loi, et pour ma part, j'ai indiqué en réponse à une question que la loi telle que rédigée permettait aux personnes voilées de voter sans se dévoiler.
    Monsieur Mayrand, vous dites avoir donné comme instruction à votre personnel électoral — et je ne le mets pas en doute — de demander aux femmes voilées de se dévoiler pour s'identifier, la décision de respecter ou non la demande revenant à ces dernières.
    Est-ce qu'on va demander à celles-ci de se dévoiler uniquement devant des femmes ou devant n'importe quel scrutateur ou scrutatrice, donc devant des hommes ou des femmes membres du personnel électoral?
    Le rappel que j'ai fait au personnel électoral était en vertu de l'article 144, qui requiert de confirmer l'admissibilité des électeurs. Dans ce cadre, j'ai demandé au personnel électoral d'inviter toute personne à se dévoiler, et ce, d'une façon qui respecte les convictions de ces personnes. Nous allons faire les efforts nécessaires et nous employer de façon raisonnable à assurer que ce cadre soit respectueux des convictions des gens qui se présentent au bureau de vote.
(1025)
    Alors, si une femme accepte de se dévoiler, mais seulement devant des femmes, sa volonté va être respectée?
    Nous établirons, autant que faire se peut, une procédure pour que ça se fasse dans ce cadre-là.

[Traduction]

    Merci. Votre temps est écoulé. Nous avons dépassé un peu la limite, mais je crois que cela en valait la peine.
    Le prochain intervenant sera M. Lukiwski, pour sept minutes.
    Bonjour, monsieur Mayrand. Merci de comparaître devant nous.
    Il y a une prémisse fondamentale ici que nous devons établir. À mon avis — et corrigez-moi si je me trompe — vous semblez dire dans les nombreuses déclarations qui ont été rapportées au cours des dernières semaines que vous suivez simplement l'interprétation littérale de la loi qui, selon vous, vous empêche d'exiger que les femmes voilées se découvrent le visage lorsqu'elles se présentent à un bureau de vote.
    Afin d'établir un certain cadre de référence, ne convenez-vous pas que l'intention évidente que le comité a exprimée à l'unanimité était que les voiles devaient être retirés? Autrement dit, le but de l'étude du comité, ou du projet de loi C-31, était d'assurer l'intégrité de l'électeur, ce qui implique évidemment la possibilité d'identifier clairement le visage d'un électeur. N'avez-vous pas compris que c'était là l'intention et l'esprit des discussions qui ont eu lieu autour de cette table?
    Je dois me rapporter au texte de la loi. Il y a eu plusieurs discussions sur la question de l'identification des électeurs à la Chambre et au Sénat. Au cours des derniers jours, j'ai passé en revue tous ces débats pour voir si la Chambre ou le Sénat avait exprimé une intention concernant le vote à visage couvert. Je ne peux me référer qu'aux débats tenus au Sénat, où la question a été clairement abordée et où aucune suggestion ni aucune modification à la loi n'a été présentée.
    J'aimerais obtenir une réponse directe à ma question, si c'est possible. Êtes-vous en train de dire que vous n'avez pas compris l'intention qu'avait le comité lorsqu'il a discuté du projet de loi C-31, à savoir qu'il était essentiel que les électeurs s'identifient clairement?
    Il est possible de s'identifier de plusieurs façons, et c'est ce que prévoit la loi. On peut le faire en présentant une photographie, mais d'autres solutions sont prévues par la loi et n'exigent pas l'identification visuelle.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que vous aviez un pouvoir discrétionnaire — je crois qu'il est prévu à l'article 17 de la loi — et que vous pourriez l'utiliser pour demander aux femmes voilées de découvrir leur visage. Est-ce exact?
    La loi dit que ce pouvoir est exceptionnel.
    Mais vous avez ce pouvoir, monsieur, n'est-ce pas?
    Dans certaines circonstances bien précises, je peux adapter la loi pour faire en sorte que le vote se déroule de façon normale et ordonnée.
    Vous dites donc que vous avez ce pouvoir?
    J'ai le pouvoir d'adapter la loi.
    Mais vous dites maintenant que vous choisissez de ne pas exercer ce pouvoir dans ce cas particulier?
    Au moment où l'on parle, je ne vois aucune raison d'utiliser ce pouvoir.
    Pouvez-vous nous expliquer davantage pourquoi? Je reviens au fait que le comité a été unanime pour dire que l'intégrité de l'électeur devait être la première intention de cette loi. Vous avez le pouvoir d'assurer cela à ce moment précis, et pourtant vous choisissez de ne pas exercer ce pouvoir. Je me demande pourquoi.
    Excusez-moi, j'ai manqué une partie de votre question.
    En termes simples, monsieur, vous avez le pouvoir de faire en sorte que les femmes voilées découvrent leur visage, peut-être en présence d'une femme qui occuperait le poste de greffier ou de fonctionnaire électoral, mais vous dites que vous ne souhaitez pas exercer ce pouvoir, et je me demande pourquoi.
    Pas dans les circonstances actuelles.
    Pourquoi, monsieur?
    La raison fondamentale, c'est que ce pouvoir d'adapter la loi, prévu à l'article 17, vise davantage, je crois, à régler des questions opérationnelles, et non à traiter des droits fondamentaux protégés par la Charte, y compris le droit de voter et la liberté de religion. Je crois que ce n'est pas à un administrateur du système électoral de jongler avec ces droits et de déterminer comment ils doivent être pondérés.
(1030)
    D'accord. Si nous arrivons à la conclusion logique de vos propos, vous dites qu'un administrateur n'a pas vraiment le droit, le pouvoir ou le mandat de faire cela, mais vous laissez entendre que cette question devrait relever de la volonté du Parlement.
    C'est ce que je crois.
    Alors, si les membres du comité, à titre de représentants du Parlement, conviennent à l'unanimité de vous demander, dans l'exercice des pouvoirs que vous avez actuellement, de prier les femmes voilées de découvrir leur visage, que direz-vous? Agirez-vous selon la volonté du comité et, par extension, la volonté du Parlement?
    Avec tout le respect que je vous dois et sans vouloir vous offenser, je crois que je dois me rapporter à la volonté du Parlement exprimée par un Parlement.
    Ce que vous dites, monsieur, c'est que vous ne croyez pas que la volonté du comité soit la volonté du Parlement?
    Encore une fois, avec tout le respect que je vous dois, je ne peux accepter l'idée qu'un comité puisse adapter ou modifier une loi du Parlement.
    Vous ne croyez pas, monsieur, que les membres du comité ont consulté largement et amplement leur propre caucus et qu'ils font entendre les vues de leur propre parti au sein du comité?
    Je n'ai aucune raison d'en douter.
    Alors, monsieur, je vous dirais que pour cette même raison, je peux vous assurer qu'en ce qui concerne notre parti — et c'est vrai pour les partis de l'opposition aussi, j'en suis convaincu — les opinions exprimées par les membres du comité reflètent la volonté de leur parti et la volonté du Parlement. Et, monsieur, nous vous disons que, de l'avis unanime du comité, les femmes doivent retirer leur voile à des fins d'identification et peut-être en présence d'une femme qui occuperait le poste de fonctionnaire électoral.
    Alors, monsieur, je vous demande encore une fois si le comité vous prie, au nom du Parlement, d'exercer les pouvoirs dont vous disposez, le ferez-vous?
    Je ne le ferai pas dans les circonstances actuelles, parce que il me faudrait alors agir contrairement à la loi, telle qu'elle est écrite.
    Excusez-moi, le temps est écoulé pour cette intervention. On vient de toucher à la dernière seconde et au lieu de permettre une autre question et de dépasser le temps, je vais donner la parole au prochain intervenant.
    Monsieur Guimond, vous avez sept minutes.

[Français]

    Monsieur Mayrand, je reviens au pouvoir d'adaptation que vous donne la Loi électorale du Canada. Vous savez qu'en vertu du paragraphe 17(1), vous pouvez adapter les dispositions de la présente loi, n'est-ce pas?
    Dans votre texte, vous dites que : « Ce pouvoir d’adaptation est un pouvoir exceptionnel qui doit s’exercer avec réserve et circonspection. » « Réserve et circonspection », cela signifie pas souvent. Il ne faut pas l'utiliser souvent dans le cadre d'une élection générale, notamment.
    C'est à l'occasion de circonstances qui le justifient.
    Mais il est évident que vous ne voulez pas considérer la question dont on traite comme un sujet qui mérite l'utilisation, avec réserve et circonspection, de votre pouvoir exceptionnel.
    Je ne suis pas certain de bien saisir le sens de votre question.
    Vous jugez que la question du vote des femmes à visage découvert ne justifie pas que vous utilisiez votre pouvoir d'adaptation.
    En ce moment, non, compte tenu des droits fondamentaux que possèdent les électeurs.
(1035)
    D'accord. Vous me dites que par définition, ce pouvoir ne doit pas s'exercer souvent. Alors, pouvez-vous me dire comment il se fait que dans le Rapport du directeur général des élections du Canada sur la 39e élection générale du 23 janvier 2006, à l'Annexe VIII, on indique que le pouvoir d'adaptation du directeur général des élections a été utilisé à 17 reprises? Je ne fais pas de calculs, mais ça veut dire qu'il est possible d'utiliser ce pouvoir dans le cadre d'une élection générale.
    Tout à fait. Il est utilisé régulièrement pour faciliter le déroulement du vote, et non pas pour restreindre les droits des électeurs. Aucune des mesures prises à l'occasion de l'élection courante, de la dernière élection générale ou d'autres élections ne tendait à réduire ou restreindre les droits fondamentaux des électeurs.
    John Enright, dont on a publié les propos dans les médias la fin de semaine dernière, fait partie de votre équipe de communications, j'imagine.
    Oui, c'est le responsable des communications avec les médias.
    En fin de semaine, on lui a demandé ce qui se passerait si un homme se présentait masqué ou voilé. Il a répondu que le scrutateur lui demanderait d'enlever son voile ou son masque et que si l'homme refusait, le scrutateur devrait l'empêcher de voter.
    Êtes-vous d'accord avec cette approche?
    C'est une des possibilités, mais encore une fois, je vous rappelle les instructions que j'ai données plus tôt cette semaine au personnel : toute personne qui arrivera le visage couvert devra se découvrir pour établir son admissibilité avant de voter.
    Donc, les femmes qui vont arriver voilées devant la scrutatrice ou le scrutateur vont lever leur burqa?
    Elles seront invitées à se dévoiler dans un cadre respectueux de leurs convictions.
    Qu'en est-il de l'homme qui arrivera voilé? Vous voyez certainement le risque de dérapage que ça pourrait comporter. La preuve la plus évidente que vous voyez, monsieur Mayrand, est qu'à deux reprises pendant votre conférence de presse et encore aujourd'hui dans vos notes, vous faites appel au sens civique des citoyens. Vous avez terminé votre présentation d'aujourd'hui en disant :
Je demeure cependant persuadé que le vote de lundi prochain se déroulera de manière paisible dans les trois circonscriptions [...]
    Comment se fait-il que vous vous sentiez obligé de faire cette mise en garde? Je suis député depuis 1993. J'ai vécu des élections générales et partielles, mais jamais je n'ai vu le directeur des élections du Canada se sentir obligé de dire espérer que les élections générales vont se dérouler de façon paisible. Ça s'explique par le fait que vous voyez le risque de dérapage.
    Je ne le nie pas.
    Vous ne le niez pas?
    Je ne le nie pas, mais permettez-moi de préciser ce qui suit. Il y a eu un débat médiatique largement diffusé au cours des derniers jours sur cette question. Depuis, tous les leaders politiques ont exprimé leur opinion sur le sujet, certains suggérant des solutions d'une certaine nature et d'autres suggérant des solutions d'une autre nature. Je pense que l'opinion publique s'est bien fait entendre et que tous les citoyens sont informés de la situation. Je pense que votre présence ici montre que vous êtes très intéressés à ce que le tir soit corrigé lorsque le Parlement siégera et à ce que ce dernier apporte les modifications qu'il jugera utiles à ce moment-là. J'estime donc que dans ces circonstances, compte tenu des positions prises par les partis et de leur désir de modifier la loi en temps et lieu, les citoyens auront compris que cette question devra être traitée de façon prioritaire dès que le Parlement reprendra ses travaux.
    Pourquoi cette question fait-elle consensus au Québec? En quoi la Loi électorale du Québec est-elle si différente de la Loi électorale fédérale pour que M. Blanchet, à la veille des élections générales de mars 2007 au Québec, devant le risque de dérapage, se soit servi des pouvoirs d'adaptation — cela ne s'appelle peut-être pas « adaptation » dans la loi québécoise — pour dissiper toute ambiguïté et déclarer que toute personne devrait se présenter à visage découvert pour voter? Cela va être réitéré lors de l'élection partielle du 24 septembre prochain dans la circonscription québécoise de Charlevoix. Pourquoi, si cela fait consensus au Québec, vous entêtez-vous à continuer dans ce que j'appelle une erreur d'interprétation?
    Je le répète encore une fois, c'est parce que ni la loi fédérale ni la loi québécoise n'exige la levée du voile. M. Blanchet, dans un contexte, dans un environnement et un cadre juridiques qui lui sont propres, a pris une décision. Je dois prendre mes décisions dans le cadre qui m'a été donné par le Parlement, et c'est ce que j'entends faire.
(1040)

[Traduction]

    Merci.
    Votre temps est écoulé. Nous pourrons peut-être revenir aux autres questions au deuxième tour.
    Monsieur Dewar, vous n'êtes pas inscrit sur la liste, mais je vais vous offrir la possibilité de le faire. Voulez-vous être inscrit sur la liste?
    C'est donc un plaisir pour moi de vous offrir, comme il se doit à ce moment-ci —
    Je croyais que ce serait naturel. Veuillez m'excuser.
    Bien sûr. Ce n'est pas un problème.
    Monsieur Dewar, vous avez sept minutes.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur Mayrand, d'être ici aujourd'hui, de même que votre équipe. Quelques-uns de vos collaborateurs ont déjà comparu devant le comité. Merci de prendre le temps de vous entretenir avec nous aujourd'hui.
    J'aimerais parler tout d'abord de vos observations concernant les pouvoirs exceptionnels. Nonobstant ces observations, je suis d'avis qu'il s'agit d'une question d'interprétation. Avec tout le respect que je vous dois, je ne me rallie pas à une partie de cette interprétation, mais c'est une bonne chose qu'elle soit exposée ici.
    Je suis ravi que vous disiez au début de vos observations qu'il est très clair qu'un électeur doit découvrir son visage. C'est très explicite. Puis nous entrons dans les scénarios complexes où quelqu'un refuserait de le faire, et c'est là où apparaît le désaccord. Les gens acceptent le fait qu'il faut se dévoiler, mais reste à savoir ce qui arrive quand ils refusent de le faire.
    On peut aussi se demander si le comité n'a pas fait preuve de diligence raisonnable, de même que le Sénat, puisque il se trouve que je sais — Un article est paru en mai dernier dans le National Post sur la question, alors c'était un fait connu. On en avait parlé. Vous aviez exprimé votre opinion et aviez communiqué avec le gouvernement à ce sujet. C'est bizarre que le problème se pose seulement maintenant.
    Pour situer les choses dans leur contexte, je reviens du Maroc. Je faisais partie d'une équipe internationale d'observation des élections qui avait été invitée par le gouvernement du Maroc. Vous savez quoi? Les femmes portent le voile et elles votent, et ce n'est pas un problème. C'était très intéressant pour moi de vivre cette expérience. J'ai des documents ici sur les femmes qui participent au processus électoral à cet endroit. Il y a un consensus. Nous avons recommandé qu'il y ait plus de femmes dans les bureaux de scrutin. Je tiens à vous le dire, parce que je sais, pour avoir lu votre rapport de l'an dernier, qu'Élections Canada a fait un excellent travail à l'égard des électeurs issus des groupes ethnoculturels et pour encourager — et je tiens à souligner que nous sommes ici pour cela — pour encourager les gens à voter, et je tiens à le dire à mes collègues.
    Qu'il soit dit dans le compte rendu que nous nous sommes opposés à ce projet de loi. Le NPD avait des réticences puisque, comme vous le savez, des dates de naissance allaient être communiquées non seulement à tous les greffiers de scrutin, mais aussi à tous les partis politiques, si le projet de loi tel que modifié était adopté. Je crains, monsieur Mayrand, que mes collègues se préoccupaient davantage de mettre la main sur les dates de naissance que de savoir quelles seraient exactement les conséquences de ce projet de loi —
    Silence.
    Monsieur Dewar, pouvons-nous nous en tenir à la question du voile?
    C'est ce que je fais —
    Je ne veux pas rouvrir le débat sur les questions du passé. Restons-en à la question du voile.
    Je crois qu'il est important de parler du contenu du projet de loi. Une partie du projet de loi d'avant, lorsque nous l'avons examiné, portait sur la façon dont les dates de naissance —
    Très bien. Concentrons-nous sur la question du voile —
    La consultation, et j'arrive à la question, n'était pas... Nous n'avons pas consulté suffisamment. J'ai demandé qu'on entende plus de témoins. Vous avez parlé des membres des premières nations, des étudiants, des sans-abri. C'est nous qui avons demandé ces témoins, et ils nous ont donné de bons témoignages. Ceux-ci ont été complètement ignorés, parce que... Il va y avoir des problèmes. Ce projet de loi sera contesté devant les tribunaux. Nous le savons.
    Je vous demande si, jusqu'à présent, des gens ordinaires vous ont fait part de leurs préoccupations au sujet du vote à visage couvert. Avez-vous reçu des appels de citoyens canadiens à ce sujet?
    Nous avons reçu plusieurs demandes et appels téléphoniques ainsi que des courriels, et la plupart rejetaient l'idée de permettre à des électeurs de voter en étant voilés.
    D'accord. Et vous avez répondu « Nous allons leur demander de découvrir leur visage ».
    J'aimerais savoir également si, lorsque vous leur avez répondu, quelqu'un vous a demandé s'il y avait eu des cas de fraude électorale par le passé et s'il y avait déjà eu des cas de fraude électorale impliquant des électrices portant le voile.
    Je vais vous demander simplement ceci: y a-t-il déjà eu, par le passé, des cas de fraude électorale impliquant des électrices portant le voile?
    Encore une fois, je crois que nous avons été... Cette année, nous avons célébré le 140e anniversaire de la confédération canadienne, et nous n'avons jamais eu de problème impliquant des électeurs voilés ou des femmes voilées.
(1045)
    Merci.
    Je tiens à souligner cela, monsieur le président, parce que j'avais demandé au directeur général des élections, lorsque nous étudions ce projet de loi, qui est mal conçu à mon avis, combien de cas de fraude électorale il y avait eu au cours des élections passées. La situation ne lui paraissait pas problématique.
    En fait, je dirais que l'intégrité des candidats qui représentent un parti et qui changent d'allégeance par la suite est davantage problématique. Voilà ce qui me préoccupe vraiment et ce qui préoccupe les Canadiens lorsqu'ils apprennent la nouvelle du jour au lendemain.
    J'aimerais faire la lumière sur une autre question touchant le projet de loi. Certains ont laissé entendre que cette question était en quelque sorte liée à celle du financement électoral. J'aimerais savoir si vous pouvez faire des commentaires à ce sujet. Avez-vous établi un lien quelconque à cet égard?
    Silence.
    Monsieur Dewar, j'ai dit très clairement que nous allions nous limiter à la question du voile. Je vous ai donné beaucoup de latitude pour faire valoir votre point de vue encore une fois, que nous avons tous entendu au Parlement l'an dernier. Il nous reste moins d'une minute, alors nous allons poursuivre. Merci.
    Nous allons entreprendre notre deuxième tour de table, chers collègues. Nous allons accueillir un certain nombre de témoins à 11 heures, alors notre temps est limité. Nous allons passer à des interventions de cinq minutes.
    Madame Redman, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président, et bienvenue à M. Mayrand et à son équipe.
    Je crois qu'il convient tout à fait que nous ayons cette conversation et c'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai appuyé la motion visant à vous inviter à comparaître devant nous. Je tiens à souligner, pour les gens qui nous regardent à la télévision, que la loi a en effet été modifiée. Cette modification, de mon point de vue à titre de membre du comité, visait à assurer la clarté en matière de vote et à faire en sorte que tous les électeurs soient capables de voter.
    Vous avez décrit très brièvement les trois façons dont un électeur peut s'identifier. Il peut le faire notamment au moyen d'une carte d'identité comportant une photo.
    Je soulignerais que je ne crois pas que nous ayons prévu ce problème. Toutefois, vous avez dit très clairement que vous aviez fait ce genre d'intervention devant le comité du Sénat lorsqu'il s'est penché sur cette question et que vous avez aussi communiqué avec la greffière de notre comité ainsi qu'avec le Conseil privé.
    Ma première question — et j'aimerais partager mon temps avec M. McGuinty, alors je vais essayer d'être brève — est la suivante: est-il inusité de ne recevoir aucune réponse du BCP, compte tenu que cette correspondance a été envoyée au début d'août?
    L'une des raisons pour lesquelles nous nous penchons sur cette question maintenant est que, malgré le fait que le comité de la procédure et des affaires de la Chambre ait été convoqué pour traiter d'une question totalement différente, les membres du parti ministériel ont estimé que la question était si urgente, compte tenu des élections partielles qui auront lieu lundi prochain, qu'il fallait la régler tout de suite.
    J'ai vu un grand nombre de représentants du BCP dans la salle lorsque le comité a tenu ces réunions, alors cette question les intéresse certainement.
    Est-il inusité que le BCP ne vous dise rien alors que vous avez donné cette interprétation de la loi?
    Encore une fois, j'ai invité le comité, les partis et le gouvernement à me faire part de leur avis et de leurs commentaires sur la question. Malheureusement, pour toutes sortes de raisons j'imagine, je n'ai reçu aucun commentaire.
    Je vais céder le reste de mon temps à M. McGuinty, monsieur le président.
    Bien sûr.
    Combien de temps ai-je, monsieur le président? Trois minutes?
(1050)
    Deux minutes et demie.
    Monsieur Mayrand, j'aimerais reprendre l'essentiel des commentaires faits récemment par le premier ministre à Sydney.
    Je vais reprendre ses paroles. Il a dit que l'objet de cette loi était l'identification visuelle des électeurs. Il a dit également que la situation le préoccupait parce que le rôle d'Élections Canada n'était pas de faire ses propres lois, mais bien d'appliquer les lois adoptées par le Parlement. C'est exactement ce qu'il a dit.
    C'est intéressant parce que, pour bon nombre de Canadiens, M. Harper est devenu premier ministre en promettant de remettre à l'ordre les juges, les conseils, les organismes et les commissions qui ne se pliaient pas à la volonté du Parlement. Nous avons ici un exposé succinct qui montre clairement — contrairement à ce qu'a dit M. Lukiwski, à savoir qu'il s'agissait d'une interprétation littérale — que vous avez donné une interprétation juste de la loi qui régit vos activités. Et maintenant, le premier ministre vous réprimande publiquement — et je dirais qu'il est peut-être même en train de fabriquer une crise — parce qu'il n'est pas heureux que vous n'interprétiez pas la loi différemment.
    Il dit d'abord que nous ne devons pas avoir de conseils, d'organismes et de commissions qui ne sont pas réalistes, qui ne font qu'improviser ou qui font de nouvelles lois contraires à la volonté du Parlement. Vous nous dites que vous êtes en fait lié par la volonté du Parlement. Votre témoignage à cet effet, à titre d'agent du Parlement, a été très clair.
    Comment avez-vous réagi en entendant les commentaires du premier ministre? Premièrement, il n'a pas compris la loi. Deuxièmement, il vous dit qu'il n'accepte pas votre interprétation, parce qu'elle ne concorde pas avec ses propres fins.
    Que doivent penser les Canadiens de tout cela?
    Je ne suis pas en mesure de commenter les observations du premier ministre. Je ne peux que réitérer que la loi n'exige pas d'identification visuelle. C'est ainsi qu'est la loi.
    L'un des problèmes qui se posent pour moi, c'est qu'on me demande de changer la loi, laquelle vient d'être adoptée par le Parlement au bout, je pense, d'un long débat. C'est mon problème. On me demande de changer la loi et de forcer les électeurs à choisir entre deux droits fondamentaux.
    Je ne pense pas que ce soit le rôle d'un agent du Parlement que de faire ce type d'ajustement à un texte de loi — et c'est par respect pour le Parlement.
    Est-ce que quelque chose peut changer d'ici lundi, monsieur Mayrand?
    Le BCP a reçu de vous un document d'information, il y a cinq ou six semaines. Le BCP est le ministère du premier ministre. Il a été avisé par écrit que le problème persiste. Qui ne dit mot consent, à mon avis. Qui ne dit mot consent. Ils le savaient. Le premier ministre était au courant. Ce caucus était au courant. Le gouvernement aussi. Il a fixé les dates des élections partielles. Il est clair que le premier ministre et son personnel le savaient depuis des semaines.
    Comment se fait-il que dans des commentaires impromptus — qui sont clairement sans fondement et erronées — le premier ministre vous attaque, vous et votre organisation, lors d'une séance de photo avec le premier ministre de l'Australie?
    Qu'est-ce que les Canadiens doivent en penser?
    Je regrette, je n'ai aucun commentaire à faire là-dessus. Je pense que c'est au premier ministre qu'il faut poser la question.
    D'accord, merci.
    C'est la fin de ce tour-ci.
    La parole est maintenant à M. Poilievre, pour cinq minutes.

[Français]

    Monsieur le président, nos collègues libéraux essaient maintenant de dire qu'ils ne sont pas d'accord, que votre interprétation est mauvaise. Il y a trois jours, ils ont approuvé une lettre d'un autre comité qui indiquait que votre interprétation était erronée. Le présent comité vous a écrit une lettre, que vous avez reçue, indiquant que nous voulions que vous changiez votre position à l'égard des voiles. Vous avez dit plus tôt que vous vouliez une directive du Parlement. Nous vous avons donné cette directive. Pourquoi ne pas la respecter? Nous sommes des élus. Pourquoi ne pas respecter la décision que ce comité a prise avec le consentement de tous ses membres?
    C'est une question fondamentale. Comme je l'ai mentionné plus tôt cette semaine, je pense qu'au Canada, nous vivons toujours dans un régime de droit, the rule of law. Je pense également qu'aussi longtemps que la loi n'aura pas été modifiée selon les règles parlementaires habituelles, il ne m'appartient pas de la modifier. Au moment où on se parle, je n'ai vu aucune espèce d'opinion juridique pouvant suggérer une lecture différente de cette loi.
    Cependant, vous avez indiqué que vous vouliez avoir une directive de la part des élus. Nous vous avons donné cette directive dans une lettre très claire. Vous avez le pouvoir d'adapter la loi. Pourquoi ne pas l'utiliser? C'est inscrit dans la loi. Vous pourriez l'utiliser n'importe quand. Nous vous indiquons que c'est maintenant le meilleur temps de le faire, et vous nous ignorez. Pourquoi?
    J'ai bien considéré toutes les suggestions qui m'ont été faites jusqu'à maintenant. Ce pouvoir d'adaptation est exercé de façon absolument exceptionnelle. Il me permet de modifier une loi, bien que le Parlement l'ait adoptée d'une certaine façon. Si vous lisez le paragraphe 17(1), vous constaterez que ces circonstances doivent résulter de conditions extraordinaires. Vous constaterez également que généralement, le paragraphe 17(1) envisage que les mesures d'adaptation qui seront prises viseront à faciliter l'exercice du droit de vote.
    Dans ce cas présent, on me demande de restreindre ou de forcer des électeurs à choisir entre deux droits fondamentaux qui leur sont accordés par notre Constitution. J'estime que ce n'est pas le rôle d'un agent du Parlement de faire ce choix. J'invite le Parlement à revoir rapidement les dispositions de la loi, à l'étudier après avoir entendu le public et les parties intéressées, et à apporter les amendements qu'il jugera appropriés.
(1055)

[Traduction]

    Vous avez prévenu le Sénat libéral de l'existence possible de ce problème dans la loi. Le Sénat libéral n'a absolument rien fait pour modifier la loi.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Pierre Poilievre: J'entends des protestations de la part des libéraux, qui sont maintenant gênés par ce fait.
    Notre interprétation est restée la même depuis le tout début. Notre interprétation, du côté du gouvernement, c'est que la loi actuelle vous autorise à forcer les gens à montrer leur visage. Alors vos mises en garde n'ont aucune importance pour nous, parce que nous ne sommes pas d'accord avec votre interprétation.
    Vous avez dit que vous pourriez empêcher de voter quelqu'un qui porte un masque de hockey, ou toute autre article qui dissimule son visage. Donc vous avez ce pouvoir maintenant, vous avez admis avoir ce pouvoir. Vous avez reçu d'un groupe de membres de ce comité, qui ont été démocratiquement élus, la directive d'utiliser ce pouvoir. Alors pourquoi ne le faites-vous pas?
    Votre réponse devra être brève, parce que le temps nous manque.
    Si vous permettez, monsieur le président, j'aimerais parler d'une décision récente du Tribunal d'appel de l'Alberta qui, dans un cas, a décrété que la photo figurant sur le permis de conduire enfreignait les droits constitutionnels des citoyens. Le tribunal a donc enjoint le gouvernement d'établir un nouveau système d'identification qui équilibrerait le droit de l'État et les droits des particuliers qui, pour des motifs d'ordre religieux, refusent de faire prendre leur photo.
    Je dois dire que c'est aussi un aspect auquel il faut penser quand on me demande d'adapter la loi.
    Merci beaucoup.
    Le suivant sur la liste — et c'est encore pour cinq minutes — est M. Guimond.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Mayrand, en réponse à une question de M. Poilievre concernant votre interprétation du paragraphe 17(1), vous avez mentionné que ces adaptations devaient être faites dans des conditions extraordinaires et en vue de faciliter l'exercice du droit de vote. C'est bien ce que vous avez dit?
    M. Marc Mayrand: Oui.
    M. Michel Guimond: J'ai devant moi la liste des 17 cas où ce pouvoir a été utilisé. Parmi ceux-ci, il y a l'adaptation de l'article 64 de la loi, dont le but était de « Lever l'obligation d'indiquer l'adresse des candidats et des agents officiels dans l'avis de scrutin. »
    Considérez-vous que le fait de ne pas indiquer l'adresse des candidats et des agents officiels dans l'avis de scrutin soit une condition extraordinaire pour référer au paragraphe 17(1)?
    Je pense que des questions concernant la sécurité publique se posaient. Il s'agit de s'assurer que la sécurité des gens participant au processus est maintenue. Je pense que ce cas, précisément, justifiait l'adaptation de la loi.
    Vous savez que le Maroc a été en processus électoral entre le 25 août et le 7 ou le 9 septembre 2007, je crois. Vous savez aussi que 98 p. 100 de la population marocaine est musulmane. Comment les femmes se sont-elles comportées lors de l'élection au Maroc? Êtes-vous au courant?
    Je n'ai pas observé l'élection marocaine.
    Je vous conseillerais d'appeler le directeur des élections de ce pays. Je peux vous dire que les femmes ont voté à visage découvert, malgré que 98 p. 100 — ou 99 p. 100, étant donné que les bases de référence varient — de la population du Maroc soit musulmane.
    Dans le cas présent, la communauté musulmane ne vous a rien demandé. Vous en faites plus que ce que le client demande. La communauté musulmane du Québec et du Canada a-t-elle fait des représentations auprès de vous?
(1100)
    Je dois préciser deux choses. Selon ce que je comprends du système électoral marocain, il y a un processus distinct pour les hommes et les femmes, ce qui permet de respecter les convictions religieuses des citoyens de ce pays. Je pense que si je devais ouvrir la voie à une procédure semblable, on m'accuserait rapidement d'instaurer de nouveaux accommodements raisonnables. Je pense, ici encore, que ce n'est pas la tâche du directeur des élections de trancher cette question: elle incombe plutôt aux parlementaires.
    La question fait consensus au Québec. À votre connaissance, Marcel Blanchet, le directeur général des élections du Québec, a-t-il été accusé d'instaurer de nouveaux accommodements raisonnables?
    Encore une fois, il s'agit d'un système différent. Je vous signale cependant que la loi provinciale permet le vote à visage couvert. À mon avis, c'est au législateur de modifier sa loi.
    Je reviens sur la question du risque de dérapage, ce que, soit dit en passant, le Bloc québécois ne souhaite aucunement.
    Vous avez écouté les bulletins de nouvelles en fin de semaine et avez appris que samedi, dans la circonscription d'Outremont, cinq femmes s'étaient confectionnées une burqa, étaient allées voter sans la retirer et avaient ensuite donné un point de presse au cours duquel elles avaient encouragé toutes les femmes ou personnes à se comporter de cette façon.
    Vous reconnaissez que par votre décision, monsieur Mayrand, vous maintenez la possibilité de dérapage, ce qui contrevient au libre exercice du droit démocratique qu'est celui de voter?
    Encore ici, je dois vous dire que d'une part, les règles d'identification ont été suivies lors du déroulement du vote qui a débuté il y a maintenant une semaine et que d'autre part, les citoyens ont à mon avis manifesté clairement leur point de vue sur ce que devrait être leur régime électoral.
     Les autorités politiques ont bien indiqué qu'elles envisageaient de revoir les règles du régime électoral. Dans ce contexte, il n'y a pas lieu de faire ou de continuer des manifestations qui, à l'occasion, pourraient aller à l'encontre de la dignité et du respect qu'on se doit entre citoyens.
    Je vous pose une question dont je connais la réponse. Ma formation d'avocat m'incite en effet à toujours poser à un témoin une question dont on connaît la réponse plutôt qu'une question fondée sur des ouï-dire.
    Est-il exact que le représentant du Bloc québécois ayant participé à la conférence téléphonique du comité consultatif des partis tenue le 26 juillet 2007 a mentionné que la question concernant le vote à visage découvert faisait déjà consensus au Québec depuis les élections de mars 2007, à la suite de la décision de M. Marcel Blanchet, directeur général des élections du Québec? Le Bloc québécois a-t-il soulevé cette question?
    Nous avons pris des notes très détaillées dans le cadre de cette conférence téléphonique. Je réitère ce que j'ai déjà déclaré, à savoir qu'aucune objection, manifestation ou discussion n'avait eu lieu à l'égard du vote des femmes voilées.

[Traduction]

    Merci.
    Il ne reste plus de temps pour ce tour-ci. Je voulais permettre à M. Guimond de recevoir sa réponse.
    M. Dewar est le dernier de la liste, puis ce sera tout. Nous avons déjà débordé de notre horaire, et par respect pour nos témoins, ce sera le dernier tour.
    Monsieur Dewar, vous avez la parole.
    Ce sera bref, monsieur le président. Merci.
    J'aimerais donner une précision, puis j'ai une question à poser. Dans le système électoral du Maroc — et j'ai le rapport des observations et recommandations — précisons-le, ils ont une liste électorale distincte pour les femmes, mais ils n'ont pas de contexte électoral distinct pour les femmes. Tous les citoyens votent au même poste de scrutin. Nous pourrons en parler plus tard, mais disons-le clairement, elles dévoilent et montrent leur visage, ils ont un moyen de le faire, et c'est efficace. Il y a d'autres sujets de préoccupation à propos du Maroc, mais on en parlera un autre jour.
    J'aimerais poser une question à propos de la consultation. Je pense que c'est vraiment ce qui manque, ici. Des membres de la communauté nous ont dit qu'on ne les a jamais interrogés à ce sujet. Le gouvernement a récemment publié les résultats d'une consultation publique sur les institutions et pratiques démocratiques. Il dépensé environ un million de dollars là-dessus, et les résultats viennent à peine d'être publiés, hier. Il y a d'autres documents au sujet desquels ils affirment consulter les Canadiens. Est-ce que vous êtes au courant d'une consultation de la communauté musulmane, au sujet du vote et du voile? Avez-vous des documents là-dessus? Connaissez-vous un cas où le gouvernement, le comité ou votre bureau aurait véritablement consulté la communauté musulmane, ou qui que ce soit, avant que cela devienne un problème?
(1105)
    Avant la promulgation du projet de loi C-31, je ne suis au fait d'aucune consultation publique qui été faite. Peut-être y en a-t-il eu, mais je ne suis pas au courant.
    Moi non plus, et c'est pourquoi j'en ai parlé, parce que je crois qu'il est important que l'on sache que jusqu'à tout récemment, il n'y a pas eu de consultations, ce n'était pas une préoccupation. Je voulais seulement que ce soit au compte rendu.
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, ceci termine le second tour, en fait, il ne nous reste plus de temps.
    Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier, ainsi que votre équipe, monsieur Mayrand, de vous être présentés devant le comité avec un si court préavis pour répondre à nos questions —
    Je voudrais faire un rappel au Règlement, monsieur le président.
    Un rappel au Règlement?
    Oui. Je pense que le groupe de témoins est un peu confus quant à ce que veut ce comité. J'ai ici une motion de consentement unanime pour clarifier la volonté du comité.
    Des voix: Oh, oh!
    Excusez-moi. Silence, tout le monde. Merci, c'est moi qui suis le président.
    Je regrette, monsieur Poilievre, mais on ne peut présenter une motion dans le cadre d'un rappel au Règlement.
    Ce que nous pouvons faire maintenant, toutefois, c'est achever de présenter les remerciements du comité ici, aujourd'hui.
    Nous allons faire une pause de deux minutes, pour laisser sortir un groupe de témoins et laisser l'autre entrer.
    Je vous remercie.
(1115)
    Chers collègues, nous entamons la deuxième partie de notre réunion. Nous avons 15 minutes de retard, alors je vous avertis tout de suite que je mettrai fin à cette réunion à 12 h 15, afin que nous ayons en fait suffisamment de temps pour nous acquitter de notre tâche.
    Nous accueillons plusieurs témoins aujourd'hui, et je suis heureux, c'est certain, que tout le monde ait pu venir en dépit d'un si court préavis. L'ensemble du comité vous félicite d'être ici.
    Je limiterai les observations préliminaires à une minute. Vous pouvez donner votre nom, celui de l'organisation que vous représentez, et dire ce que vous avez à dire, en une minute. Quand vous me verrez lever la main, cela signifiera que votre minute sera écoulée, et ce sera tout. Je ne veux pas être impoli, mais nous avons beaucoup de pain sur la planche. Alors essayons cela. Ensuite, les membres du comité pourront vous poser des questions, et à ce moment-là, vous terminerez ce que vous n'avez pas eu la chance de dire avant.
    Cela étant dit, commençons notre réunion. Si vous le voulez bien, nous allons refaire un tour avant de poser nos questions.
    Je m'appelle Alia Hogben. Je suis directrice exécutive du Conseil canadien des femmes musulmanes.
    Il est très malheureux que la confusion apparente du directeur des élections, du Parlement et de ce comité — y compris au sujet du récent projet de loi de 2007 portant sur la photo d'identité et d'autres forme d'identification — ait été présentée comme un enjeu musulman.
    D'après ce que je comprends, M. Mayrand était rempli de bonne volonté et d'attentions, à l'égard des musulmanes. Malheureusement, cela n'a fait qu'exacerber le sentiment anti musulman et a fait de toute cette situation un autre mauvais exemple d'exigence d'accommodements de la part des musulmans alors qu'en fait, la confusion qui règne est la conséquence de directives floues, de la loi et des possibilités qu'elle offre.
    Cet enjeu devrait être traité comme un enjeu canadien d'encouragement au vote, et comme une affaire de sécurité par opposition aux enjeux relatifs aux droits de la personne. On peut justifier ces changements si on résout ces préoccupations pour tous les Canadiens.
    N'en faites pas, nous vous en prions, un enjeu qui ne concerne que les musulmans, parce que les musulmanes sont prêtes à montrer leur visage, elles connaissent l'importance du vote.
    Merci.
    Parfait. C'est très bien, merci.
    Je m'appelle Farzana Hassan. Je suis l'actuelle présidente du Muslim Canadian Congress.
    Le Muslim Canadian Congress s'oppose au port de la burka ou du niqab, ou au port du voile intégral dans les lieux publics.
    Nous suggérons le bannissement de la burka, particulièrement dans le cadre du processus électoral, où l'ouverture et la liberté doivent être garanties. Nous devons assurer l'intégrité du processus électoral.
    Il est impératif que quiconque assiste physiquement au processus électoral puisse s'identifier. Ce n'est pas l'islam qui exige que les musulmanes soient complètement couvertes. Elles seraient tout à fait prêtes à lever leur voile si c'était exigé.
    J'aimerais aussi parler un peu du contexte social qui permet le port du voile dans les lieux publics. Il est très difficile pour les musulmanes —
(1120)
    Je regrette. Vous aurez la chance de continuer tout à l'heure. Je vous remercie.
    Je vous fais encore mes excuses pour les restrictions de temps.
    Au suivant.
    Je m'appelle Sohail Raza. Je suis le directeur des communications du Muslim Canadian Congress.
    Monsieur le président, les analystes après les événements du 11 septembre s'entendent sur le fait que ce n'est qu'une mince minorité parmi les Musulmans qui défend des points de vue extrémistes. Cette mince minorité exerce des pressions sur la majorité silencieuse en ce qui concerne la pratique religieuse, et la tient en otage. Aujourd'hui, Élections Canada est tenu en otage par cette même petite minorité afin que le voile puisse servir d'outil de désinformation.
    Nous autres, du Muslim Canadian Congress, nous opposons à l'expression « musulmanes voilées ». Le voile ne fait pas partie de l'islam mais est un élément culturel de certains pays, pour des raisons diverses.
    Alors que nous luttons contre les talibans sur le terrain, pourquoi adhérez-vous à leur idéologie ici?
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Suivante.
    Bonjour, monsieur le président.
    Je suis Raheel Raza. Je suis présidente du Forum For Learning, auteure et journaliste.
    En venant ici aujourd'hui, j'ai découvert que depuis septembre 2007, l'identification avec photo est obligatoire à tous les aéroports, même pour les vols nationaux. Ici même, avant d'entrer dans cet immeuble, j'ai dû montrer une photo d'identité. C'est donc qu'il est très important pour l'identification de montrer son visage.
    Vous avez déjà entendu que la dissimulation du visage n'est pas imposée par l'islam; c'est purement culturel. Si c'est culturel, la question que j'ai à poser est la suivante : pour combien de cultures Élections Canada est-il disposé à faire des accommodements? Il y a plus de 50 cultures ici, au Canada. D'ici une dizaine d'années, ce sera devenu un véritable sac de noeuds.
    Deuxièmement, en utilisant les expressions « les musulmanes » et « le voile », Élections Canada sous-entend que les femmes qui portent le voile sont modestes et celles qui ne le font pas ne le sont pas. C'est pourquoi l'emploi des termes musulmanes et voile me pose problème.
    Ils peuvent décider qui peut et qui ne peut pas voter. Mais si Élections Canada décide que les personnes dont le visage est couvert peuvent voter, peut-être est-il temps de nous ouvrir les yeux, et de penser à modifier la loi pour la sécurité du pays, parce que dans le monde d'après les événement du 11 septembre, ce dont nous devions nous soucier le plus, c'est de la sécurité, et de la protection de tous les Canadiens.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Salim.
    Bon après-midi, monsieur le président et membres du comité.
    Je m'appelle Salim Mansur et je suis de l'University of Western Ontario. Je ne représente nul autre que moi-même. J'ai été invité tard hier après-midi, et je suis venu ici malgré ce très court préavis.
    Les réflexions et sentiments qu'ont exprimés les témoins qui m'ont précédé sont assez semblables aux miens. Je partage tout à fait leur avis sur cette question. J'espère que nous pourrons en discuter ouvertement.
    Je me soucie de la protection de l'intégrité de notre système électorale, le noyau de notre démocratie. Je dirais que toute ombre de doute, réel ou imaginé, créé dans l'esprit de l'électorat, selon lequel notre système pourrait être enfreint ou serait ouvert aux abus, nous rapproche d'une pente glissante.
    Toute exception faite dans ce cas-ci, ou tout motif d'accommodement, en tant que manifestation de tolérance ou de sensibilité aux exigences des pratiques religieuses, constituerait un précédent pour des exigences futures, et petit à petit, rendrait notre système électoral vulnérable aux abus.
    Les électeurs ont des conditions minimes à la remplir, et ces conditions sont assez clairement établies.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Salah.

[Français]

    Mon nom est Salah Basalamah et je suis de Présence musulmane.
    De manière générale, nous ne sommes pas en faveur du port du niqab, parce qu'il ne relève d'aucune prescription religieuse, mais bien plutôt d'une prescription culturelle. Cependant, et comme tout démocrate qui se respecte, nous défendons le respect du droit des femmes à le porter. Dans les faits, les musulmanes qui portent le niqab ne refusent jamais de se soumettre aux prescriptions de la loi, que ce soit dans les bureaux de vote ou au passage des frontières, parce qu'il s'agit de mesures d'exception et que si elles ne se soumettent pas à la loi, elles risquent d'être en état d'infraction.
    Cependant, nous sommes en faveur du maintien de cette loi, et ce, pour quatre raisons. D'abord, parce que la diversité des mesures d'identification démontre la détermination de l'État à faire participer aux élections le plus large éventail possible de personnes; ensuite, parce que l'application de la loi permet à des milliers de personnes de voter par la poste sans devoir s'identifier, un acquis qu'il serait dommageable de perdre; ensuite, parce qu'aucune musulmane et aucun musulman n'a demandé un tel accommodement; enfin, parce qu'on ne demande pas le changement de la loi pour les bonnes raisons. En effet, le contexte psychosocial autour du débat sur les accommodements raisonnables est trop sensible à la question de la femme musulmane et au voile d'une manière générale pour que sa forme la plus radicale, le niqab, puisse faire, aux yeux du public, l'objet d'une exception.
(1125)

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Côté.

[Français]

    Mon nom est Pierre F. Côté et je suis à la retraite. J'ai été directeur général des élections du Québec pendant 19 ans.
    L'idée de l'identification des électeurs est apparue au Québec il y a une dizaine d'années environ. À la suite d'une proposition que j'ai alors faite au législateur, les trois moyens de s'identifier avec photo sont le passeport, la carte d'assurance-maladie et le permis de conduire. Cela permet de bien identifier l'électeur ou l'électrice, principalement pour éviter qu'il y ait supposition de personne, ce qu'on appelait autrefois des télégraphes.
    Le directeur général des élections du Québec, aux dernières élections générales, en mars dernier, a utilisé l'article 490 de la Loi électorale du Québec — qui est l'équivalent de l'article 17 de la Loi électorale du Canada — pour interdire le vote avec le port du voile. Il a renouvelé cette décision à l'occasion de l'élection partielle dans Charlevoix.

[Traduction]

    Merci.
    Au suivant.
    Je m'appelle Davis Harris. Je suis agrégé supérieur de recherches en sécurité nationale.

[Français]

    J'aimerais vous remercier, au nom de la Coalition canadienne pour les démocraties, de nous donner l'occasion de nous présenter devant vous.

[Traduction]

    Bien des aspects de ce domaine important ont déjà fait l'objet d'un débat. Je vais limiter mes observations à un aspect très important qui, selon moi, découle du reste.
    Bien des opinions ont été exprimées sur le fait qu'il n'est peut-être pas approprié que des électrices se présentent aux postes de scrutin complètement voilées, etc. C'est en gros la position de la Canadian Coalition for Democracies. Cependant, les auteurs de ces opinions poursuivent en disant qu'il est approprié, d'une certaine façon, que seules des femmes auraient compétence, en qualité de représentantes du gouvernement, pour identifier les femmes qui portent le voile.
    Ceci, à notre avis, ferait participer la mécanique du gouvernement et son personnel à la légitimisation, l'avancement et l'application d'une sensibilité et d'une norme d'apartheid fondé sur le sexe semblable à la sharia. Ce serait enfreindre les principes d'égalité des sexes que prône notre Constitution. Cela interdirait aux agents électoraux masculins, rien qu'à cause de leur sexe, de s'acquitter des fonctions légitimes d'identification des électeurs, et il en découlerait toutes sortes de conséquences. Le gouvernement, sa mécanique et la population devraient, d'une certaine façon, s'adapter aux normes d'apartheid fondé sur le sexe de la sharia.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, nous allons entamer notre première série de questions. Ce sont encore des interventions de sept minutes. Il serait bon que nous nous en tenions au sujet à l'étude. Nous avons plusieurs témoins. Peut-être faudrait-il nous concentrer sur un ou deux témoins plutôt que sur les commentaires de l'ensemble, parce que cela prendrait du temps de chacun. Quoi qu'il en soit, je laisse les membres du comité faire leurs choix.
    Monsieur Proulx, vous êtes le premier, et vous avez sept minutes, puis ce sera à M. Reid, puis à Mme Faille.
    Merci.
    Si vous permettez, monsieur le président, je partagerai ces sept minutes avec deux de mes collègues.

[Français]

    Bonjour mesdames, bonjour messieurs.
    Monsieur Côté, ma question s'adresse plus particulièrement à vous. J'entends bien les recommandations que vous avez faites. Je comprends également que l'on retrouve une photo sur le passeport, la carte d'assurance-maladie et le permis de conduire.
    La Loi électorale du Québec est-elle aussi large que la Loi électorale du Canada? Par exemple, si quelqu'un se présente à un bureau de vote sans passeport, sans carte d'assurance-maladie ni permis de conduire avec photo, y a-t-il des dispositions lui permettant de s'identifier sans photo?
    Oui. En vertu de la Loi électorale du Québec, il y a, à l'entrée d'un bureau de vote, ce qu'on appelle une table de vérification de l’identité des électeurs, pour quelqu'un qui aurait oublié ou qui n'aurait pas les pièces d'identification dont on parle. Il doit être accompagné d'une autre personne qui atteste qu'il s'agit bien de l'électeur sur la liste électorale que la personne présente prétend être.
(1130)
    Je suppose que cette personne qui atteste l'identité de l'autre doit s'identifier avec des pièces avec photos?
    Je le crois, mais je vous le dis sous toute réserve.
    Monsieur Côté, je connais les décisions qui ont été prises au Québec, mais une femme voilée pourrait-elle faire attester par quelqu'un d'autre qu'elle est bien tel voteur sur la liste, et voter ainsi? Même si le directeur général des élections du Québec ne le permet pas, cela pourrait-il se faire en vertu de la loi?
    Je pense que cela pourrait se faire, mais le directeur général des élections du Québec a trouvé plus approprié, étant donné le débat qui entoure cette question, d'adopter une position très nette à cet égard.
    Merci, monsieur Côté. Bonne retraite.

[Traduction]

    Monsieur Patry.

[Français]

    Merci à tous nos invités. Vous êtes tous membres de la société civile. Votre présence ce matin est très importante. Le but à atteindre est vraiment l'intégrité du système des élections.
    Mon collègue a parlé de la photo sur les cartes d'assurance-maladie, le passeport et le permis de conduire. Je vais vous raconter une anecdote. Il y a un an, j'ai assisté à l'assermentation de certains nouveaux citoyens canadiens. Une dame portant un niqab s'y est présentée. Le juge, de façon très professionnelle, lui a tout simplement dit qu'il ne pouvait pas l'assermenter comme citoyenne canadienne, car il ne voyait pas son visage. Il lui a donc accordé 30 secondes pour prendre une décision : devenir ou non citoyenne canadienne. La dame s'est tournée vers son mari, celui-ci lui a fait un signe de la tête, et elle s'est dévoilée.
    Moi-même et tous les partis politiques ici présents ce matin convenons de l'importance de cette identification.
    Existe-t-il des groupes au pays — vous parlez d'une minorité qui fait pression — qui exercent des pressions? Qui sont-ils?
    Dans ma circonscription, il y a trois mosquées, et l'on n'y retrouve pas le niqab. Il semble qu'on n'en retrouve que de 10 à 18 dans la province de Québec.
    Des groupes font-ils vraiment pression pour que la loi actuelle ne soit pas modifiée ou pour que tous les gens qui vont voter dans un bureau de scrutin puissent le faire à visage découvert? Existe-t-il de ces groupes?

[Traduction]

    À ce que je sache, il y a au Canada environ 300 femmes qui voilent leur visage. Bien qu'elles n'insistent peut-être pas, j'aimerais préciser, en réponse à ce que vous avez dit, qu'on a parlé du Maroc, mais dans un pays islamique comme l'Iran, toutes les femmes doivent dévoiler leur visage pour pouvoir voter. Il serait bon de nous en souvenir.
    Les femmes elles-mêmes n'insistent peut-être pas pour voter avec le visage voilé, mais il est certain que d'autres organisations qui s'expriment en leur nom en font un enjeu. C'est pourquoi il faut parler des musulmanes et du voile. Si Élections Canada a pour mandat d'exiger que tous les Canadiens montrent leur visage pour voter, on pourrait le comprendre. Mais le fait que ce soit devenu un enjeu qui vise toutes les musulmanes et le voile me touche directement, et c'est pourquoi je suis venue ici présenter mon point de vue.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Godfrey, vous avez deux minutes.
    Je suppose que l'une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas adopté de loi insistant sur l'identification visuelle est que les pièces d'identité qu'accepte Élections Canada impliquent un certain type de discrimination. Il faut avoir soit un permis de conduire, alors que nous n'insistons pas pour que tout citoyen ait un permis de conduire avec photo; ou un passeport quand nous n'insistons pas pour que tout Canadien, pour être citoyen, se munisse d'un passeport avec photo.
    Puisque la loi ne fait aucune mention des femmes voilées et propose trois moyens différents de voter sans identification visuelle, si nous insistions — comme le premier ministre semble le dire — sur l'identification visuelle au moyen d'une pièce d'identité quelconque, ce qui est discriminatoire, parce que ce n'est pas tout le monde qui a un permis de conduire et un passeport, est-ce qu'il y aurait des citoyens, hommes ou femmes, dans certaines collectivités que vous représentez, qui seraient exclus du processus électoral? Oublions le voile; pensez à la photo.
(1135)
    Je ne peux imaginer de situation où quelqu'un qui veut participer à la vie publique en votant ne pourrait pas fournir une photo.
    Voulez-vous dire que la photo devrait provenir d'une source portant le timbre du gouvernement, quel que soit le niveau du gouvernement — un permis de conduire, un passeport, une carte de citoyenneté canadienne, etc.?
    Je demande seulement s'il est possible, étant donné la situation en matière d'identification avec photo dans notre pays, que certaines personnes, légitimement, n'en soient pas munies?
    Merci.
    Nous avons terminé le premier tour pour ce groupe.
    Monsieur Reid, vous êtes le suivant, et vous avez sept minutes.
    Je remercie tous nos témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je n'ai pu m'empêcher de remarquer que l'une des témoins a dit vivre sur une ferme en banlieue de Kingston, ce qui fait d'elle une électrice de ma circonscription, alors je dois me montrer particulièrement gentil avec elle.
    Quelqu'un a dit qu'il y a au Canada environ 300 femmes qui portent le voile. Ai-je bien entendu? Quel est le nombre total de musulmans au Canada, dont je suppose que la moitié seraient des femmes? Est-ce que je pourrais le savoir, pour commencer?
    Je pense que c'est Raheel qui a parlé de ces 300 musulmanes. Nous allons le confirmer, puis nous passerons au témoin suivant.
    Est-ce que c'est bien 300 femmes?
    Oui, c'est bien 300. J'ai tiré ce renseignement d'un communiqué publié dans un journal. Le nombre de musulmans, je crois, en ce moment, est 850 000 — non, on me dit que c'est 750 000.
    Pardonnez-moi, mais je ne suis pas d'accord. Je ne pense pas qu'il n'y ait que 300 femmes au Canada qui portent le voile intégral. Je crois qu'il y en a beaucoup plus.
    Vous vivez à Toronto.
    Je pense qu'il y en a de plus en plus. Je ne crois pas que nous puissions dire, comme quelqu'un l'a déjà dit, que c'est une minorité au sein d'une minorité. Je crois que le voilement du visage se répand parmi les musulmanes. C'est une première chose.
    Le nombre de musulmans vivant au Canada est censé être de l'ordre de 650 000 en ce moment. Nous serons environ un million dans une dizaine d'années.
    Merci.
    Évidemment, je ne faisais qu'essayer d'établir un pourcentage. D'après ce que vous avez dit, ce serait une estimation assez approximative. Ce n'est certainement pas, si je comprends bien, la majorité des musulmanes, actuellement, qui portent le voile.
    Ce qui me préoccupe, et je pense que c'est le souci qui ressort des propos de plusieurs membres de ce comité, ce n'est pas la crainte que les musulmanes exploitent le voile comme un moyen de voter de façon frauduleuse. C'est plutôt que compte tenu de la souplesse des paramètres que le directeur des élections a adoptés en ce qui regarde le type de pièce d'identité qu'il faut présenter pour pouvoir voter, la possibilité supplémentaire de pouvoir voter avec le visage voilé permettrait à d'autres personnes d'en tirer parti pour voter, en réalité, sans montrer leur visage et, de plus, avec de fausses pièces d'identité.
    Pour bien me faire comprendre, j'ai en main une liste des documents acceptables qu'a publiée le directeur des élections pour les élections partielles prochaines au Québec. Je n'ai qu'à penser aux documents adressés à des membres de ma propre famille, que je reçois à mon adresse même s'ils ne vivent plus à cette adresse. Il me suffi de prendre les pièces d'identité de femmes qui me sont associées.
    On peut utiliser un relevé de carte de crédit. Eh bien, ma mère et moi avons une carte de crédit en commun, et je reçois le relevé à mon adresse. Elle ne vit pas chez moi.
    On peut utiliser un relevé de services publics, y compris de téléphone résidentiel, de service de câblodistribution, de services publics, l'électricité, le gaz ou l'eau. Ma propriétaire reçoit une facture à la maison que j'ai à Ottawa. Il y a une propriétaire de ma maison dans la circonscription. Elle reçoit le relevé d'évaluation des taxes foncières, et une autre facture de service public.
    Nous en sommes donc à trois ou quatre documents. De plus, on peut utiliser des choses comme les relevés de notes de l'école, d'un collège ou de l'université et des bulletins scolaires. Aucune exigence relative à la date n'est liée à ces documents.
    Le directeur des élections a ajouté que des attestations de diverses autorités...
    Monsieur Reid, veuillez m'excuser. Peut-être pourrions-nous revenir à la question du voile. Merci.
    D'accord, j'y arrivais justement, monsieur le président.
    Les attestations — non pas fournies sur des formulaires prescrits, mais simplement une attestation que vous êtes un tel ou un tel, et vivez à telle adresse — constituent des pièces d'identité.
    Compte tenu de ce large éventail de possibilités, d'aucuns ont exprimé la préoccupation, notamment Sheila Copps, dans un article récent, que cela ouvre la porte à d'autres personnes qui ne sont pas nécessairement des membres de la communauté musulmane, mais simplement des gens qui peuvent affirmer « J'ai le droit de voter avec le visage couvert » pour tirer parti de règles généralement très souples pour voter de façon frauduleuse.
    Je me demande si les membres du groupe peuvent commenter cela.
(1140)
    Je vais demander à un monsieur, à la table, de se présenter et de faire un commentaire, parce qu'il n'a encore rien dit. Vous aurez la parole ensuite, madame.
    Je m'appelle Naresh Raghubeer. Je suis directeur exécutif de la Canadian Coalition for Democracies.
    Monsieur Reid, en réponse à votre question, d'abord, sur le nombre de femmes au Canada qui portent le voile, je pense qu'en tant que parlementaires, nous ne pouvons pas créer de précédent quand nous établissons nos lois, en nous fondant sur les chiffres actuels. Il nous faut analyser les données démographiques et la société changeante dans laquelle nous vivons, et établir des lois qui sont bénéfiques pour tous les Canadiens, surtout si on pense aux tendances démographiques changeantes.
    Au sujet de la deuxième question que vous avez posée, à propos de l'exigence et de la longue liste des pièces d'identité admissibles pour voter, je pense que c'est le Québec qui possède actuellement le meilleur système qu'il y ait au Canada. Au Québec, il faut être inscrit pour voter au moins cinq ou six jours avant le scrutin — et je suis sûr qu'on peut me corriger — et si notre nom ne figure pas dans le registre en tant qu'électeur inscrit, on ne peut être admis au scrutin le jour des élections, quelle que soit la pièce d'identité qu'on fournisse.
    On commence par insister pour que la liste des électeurs soit exacte et cohérente pour tous les électeurs, puis on s'assure d'avoir une pièce d'identité valide avec photographie.
    Je pense que nous avons certainement trop de choix ici, particulièrement pour le votes de dernière heure, qui pourrait faire fi de la loi ou de la volonté du Parlement.
    Je n'en dirai pas plus. Merci.
    Merci.
    Alia.
    Je voudrais insister encore sur le fait qu'on en traite toujours comme d'un enjeu musulman, tout d'abord, et tout le débat que j'ai entendu aujourd'hui semble focalisé sur nous et, deuxièmement, que vous suscitez des sentiments encore plus anti-musulmans. Cela n'a rien avoir avec nous.
    Le comité, le Parlement et le Directeur des élections ont manifestement besoin d'en débattre longuement entre eux. Faites-le dans l'optique de l'équité, de la sécurité, et de toutes ces choses qui nous touchent tous en tant que Canadiens, et non pas de notre croyance religieuse. J'aimerais bien que vous le compreniez, au lieu de n'en parler que comme d'un enjeu concernant les musulmanes et leur voile.
    Merci.
    Je vois une autre main levée, c'est M. Harris. Il reste une vingtaine de secondes, alors ce sera la conclusion de cette série d'interventions.
    Il est important de nous rappeler, quand nous observons les tendances, que d'après les imams réellement modérés comme l'imam Palazzi et l'imam Kabbani, du Islamic Supreme Council des États-Unis, tout deux disent qu'environ 80 p. 100 des mosquées canadiennes et américaines sont dominées par des radicaux, qui sont souvent d'allégeance saoudienne.
    C'est effectivement un problème, et cela donne à penser qu'il se pourrait qu'il y ait beaucoup plus de ce refus qui semble être implicite dans le voilement complet du visage, et je pense que nous devons nous préparer et nous gouverner en conséquence.

[Français]

     Je vais poser ma question en français. Vous allez donc devoir écouter l'interprétation. Je veux d'abord remercier la communauté d'être si largement représentée ici malgré un avis aussi court. Nous avons eu l'occasion de travailler ensemble dans le passé et ce fut grandement apprécié.
     Vous avez souligné que l'on ne devrait pas étudier cette question sur une base religieuse. Vous avez disposé de très peu de temps, tout comme le Conseil canadien des femmes musulmanes, pour parler de ce sujet. J'aimerais que vous approfondissiez votre point de vue. Vous disiez donc que nous ne devrions pas aborder ce problème sous un angle religieux.

[Traduction]

    Je trouve que ce n'est pas une question de religion. Quand les musulmans vont dans les lieux les plus sacrés, c'est-à-dire en pèlerinage à La Mecque et à Médina, les femmes doivent montrer leur visage. Par conséquent, la dissimulation du visage n'est vraiment que l'interprétation de certaines personnes, mais ce n'est pas une décision majoritaire, ni une exigence juridique ou religieuse de l'islam.
    J'aimerais ajouter quelque chose à cela.
    Même pour les femmes qui estiment que c'est une exigence religieuse, elles ne le pratiqueraient pas avec tant de rigueur, et si on leur demandait de respecter certains règlements, elles le feraient. Ce n'est pas un problème.
(1145)
    J'aimerais commencer par poser une autre question, et par dire que c'est un pays séculaire où il y a séparation de l'État avec la religion, alors pourquoi est-ce qu'Élections Canada emploie cette terminologie au sujet des musulmanes et du voile? C'est la question que je pose. Manifestement, ils ont mal compris tout ce concept. Pourquoi même en parler?
    Les élections sont pour tous les Canadiens, hommes et femmes de toutes les cultures et de toutes les nationalités. Quels que soient les règlements qui sont pris, ils devraient s'appliquer de manière démocratique à tout le monde, et non pas seulement à un petit groupe religieux.
    Je vois que plusieurs autres personnes souhaitent répondre. Est-ce que vous voulez bien le leur permettre?
    Oui.
    Je répondrais aux membres du comité que aucune de ces décision ne peut être prise à la légère. Nous vivons dans un monde où tout a de vastes répercussions, et j'espère que les membres du comité et les députés dans leur ensemble reconnaissent l'énorme effervescence, l'immense tumulte dans le monde musulman, et les musulmans canadiens n'en sont pas exclus.
    Ceux qui pratiquent la coutume du port du voile sont minoritaires, mais ce sont aussi des gens qui prêchent une version tout à fait extrême de l'islam, qui serait alors sanctionnée et avalisée, qui serait déclarée légitime par une loi du Parlement, ce qui aurait des répercussions dans d'autres sphères d'activité dans l'ensemble de notre société.
    Voulons-nous d'une société ségrégée?
    Il y a encore d'autres personnes. Est-ce que vous voulez passer à la question suivante?

[Français]

    Je vais poser une autre question.
    Je vous remercie d'avoir si fortement exprimé cette opinion. De mémoire, quelles consultations ont été entamées au cours des deux dernières années par le Bureau du directeur général des élections ou Élections Canada sur cette question? Avez-vous été consultés?

[Traduction]

    Raheel.
    Non, nous n'avons pas été consultés.
    À propos de cette consultation, il y a eu un article dans le Toronto Sun, qui affirmait qu'Élections Canada consultait par téléphone le groupe appelé le Canadian Council of American-Islamic Relations, CAIR-CAN. J'ai remis une copie de cet article à Mme Faille.
    Je vous remercie.
    Madame Faille, il vous reste deux minutes.

[Français]

    J'ai l'article devant moi. Le représentant de l'agence, M. John Enright, indique qu'ils ont consulté des gens du Conseil canadien sur les relations américaines-islamiques et qu'aucun autre groupe n'avait été contacté.
    Êtes-vous d'avis que la décision qui a été prise cette semaine par le directeur général des élections est déraisonnable? Est-ce que c'est ce que je peux comprendre? Croyez-vous que c'est une décision précipitée?

[Traduction]

    Tout d'abord, c'est un comité pour les relations américano-islamiques. Il n'a rien à voir avec le Canada, alors je préférerais que les organisations canado-islamiques soient consultées. Deuxièmement, il ne représente pas la majorité. Ce n'est qu'une minuscule minorité, dont j'ai parlé au début. Nous devons faire très attention à qui nous avons affaire, et voir d'où provient leur financement. S'il vient de pays douteux, le gouvernement du Canada devrait en prendre note.
    Est-ce que le comité a pensé à une carte d'inscription des électeurs, comme il y en a aux États-Unis? Cela résoudrait probablement plusieurs problèmes.
    N'hésitez pas à intervenir et à donner votre réponse.
    Je pense qu'en fait, toutes les organisations qui ont été consultées se sont rétractées. Elles ont publié des encarts dans les médias pour dire qu'il n'est pas obligatoire pour les femmes d'être voilées.
    La question que j'ai à poser, c'est comment on pourra s'assurer que la même personne voilée n'ira pas voter à maintes reprises avec diverses pièces d'identité? À moins que l'identification puisse être reliée à la personne qui vote, c'est inutile. Donc, il n'existe pas de loi, pour l'instant, pour que les électeurs puissent s'identifier visuellement, il devrait y en avoir et c'est ce que je propose ici.
(1150)
    Merci beaucoup.
    Comme il ne reste qu'une seconde à ce tour, nous allons le terminer ici.
    J'aimerais rappeler aux témoins que bien que nous appréciions vos commentaires, les questions sont pour les membres du comité. C'est là la nature de notre dilemme.
    Monsieur Dewar, allez-y, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais commencer par remercier nos invités d'être venus malgré ce préavis extrêmement court. Nous avons des gens qui viennent de l'extérieur, et j'apprécie que vous ayez pris le temps de venir et d'exprimer ce qui me paraît être un éventail très intéressant d'opinions. Il est dommage que nous n'ayons pas eu cette consultation plus tôt. Je dis cela en notre nom à tous. Je tenais à le dire pour commencer.
    J'ai demandé au témoin antérieur, le directeur des élections, s'il y avait eu des consultations de la communauté. J'aimerais aussi souligner — et je suis heureux que cela ait déjà été soulevé — que ce ne devrait pas être une question de religion. C'est la mauvaise voie à suivre. Le débat devrait porter sur ce qui est nécessaire quand on vote. J'ai simplement soulevé l'exemple du Maroc parce que j'en reviens à peine. Ce n'était pas une question de religion. Il se trouve que les femmes voilées se présentent, elles sont tenues de se dévoiler, mais cela s'applique de façon générale. Je l'ai vu de mes propres yeux.
    Alors la question que j'ai à poser, pour nous aider ici en tant que législateurs — et peut-être commencerais-je avec Mme Hogben — c'est comment voyez-vous la loi telle qu'elle devrait être?
    J'ai l'impression de me répéter, et même que cette discussion se répète. Il n'y a pas qu'une seule communauté musulmane; il y a des communautés musulmanes. Je pense que CAIR Canada a ses propres opinions, et peut les exprimer. Je ne dirais pas que c'est un groupe illégitime.
    Vous entendez aujourd'hui des avis différents, mais je pense qu'il faut retenir certains éléments fondamentaux. L'un d'eux est que nous ne sommes pas une communauté monolithique; les avis seront différents et variés. Deuxièmement, je pense être d'accord avec vous que ce ne devrait pas être fondé sur des motifs religieux. Et troisièmement, je n'arrête pas de dire que cette discussion ne devrait pas être centrée sur les musulmanes, voilées ou non.
    Pour répondre à votre question, si la Loi électorale elle-même a trois possibilités, alors en tant que comité du Parlement chargé d'un mandat, vous devez vous demander si vous souhaitez ces trois possibilités. S'il faut changer la loi pour que personne ne puisse voter par courrier, c'est votre responsabilité. Mais il faut que vous vous penchiez sur la question sous les angles de la sécurité, des droits de la personne, de l'encouragement au vote, et tout cela, rien qui ne nous concerne en tant que musulmans, de grâce.
    Merci.
    Monsieur Mansur, vous voulez en parler?
    Oui, très brièvement.
    Je suis d'accord avec Mme Hogben que ce n'est pas un enjeu musulman, mais cela le devient si des concessions sont faites pour des gens d'un groupe confessionnel particulier et qui pratique une coutume particulière. Alors cela ne peut être scindé, et c'est ainsi.
    Je dirais que nous sommes des Canadiens, et nous appliquons une norme canadienne. Quiconque participe à la démocratie canadienne doit respecter ces critères minimum, sans la moindre exception.
    Merci.
    M. Basalamah, puis M. Côté.

[Français]

    Il me semble que si la loi est changée, c'est justement là que la question concernera les musulmans. On ne changerait la loi que parce qu'on est sous la pression du hooliganisme — que l'on trouve d'ailleurs exprimé au Québec, comme on l'a rapporté —, hooliganisme qui déteste justement l'extrémisme musulman, ce que je comprends. Sauf que cette détestation englobe l'ensemble de la communauté, et le message qu'envoie un changement de la loi pour l'ensemble de la communauté, et pas seulement pour les femmes qui portent le niqab, est négatif. C'est un message qui n'est pas pédagogique et qui n'est pas sage à long terme.
    À mon avis, la Loi électorale du Canada devrait dire très clairement qu'il est nécessaire, en plus d'avoir son nom sur la liste électorale, de bien s'identifier pour pouvoir exercer son droit de vote. Le problème d'identification dont il est question présentement n'est évidemment pas une question religieuse, c'est bien certain. Je continue à croire que le directeur général des élections du Canada, dans la période actuelle, devrait utiliser l'article 17 de la Loi électorale du Canada qui lui permet, comme le directeur général des élections du Québec l'a fait, d'apporter une distinction en obligeant les femmes voilées à se dévoiler pour exercer leur droit de vote.
(1155)

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Dewar, il vous reste deux minutes si vous voulez les prendre.
    Non, je pense que nous avons atteint le coeur du sujet. Je crois qu'il est important de souligner que nous avons ici un consensus, et malheureusement, ça n'a pas été le cas lorsque nous avons étudié le projet de loi.
    Merci beaucoup.
    Le nom suivant sur ma liste est celui de Mme Redman. Nous entamons la deuxième série de questions, alors les interventions seront de cinq minutes.
    Madame Redman, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins qui sont ici aujourd'hui. Vous exprimez votre pensée on ne peut plus clairement, et je suis d'accord avec M. Dewar; j'aurais bien aimé avoir eu ces discussions, en comité, au printemps dernier. C'est un changement dans la loi, en un territoire quelque peu nouveau.
    Je vous dirais que M. Mayrand s'est aussi exprimé très clairement et de façon tout à fait explicite quand il a exposé ses intentions. Il me semble que nous sommes parvenus à une croisée des chemins, où il dit que la loi doit être changée. Et quoi qu'en disent certains de mes collègues conservateurs qui voudraient que nous soyons réellement le Parlement, nous ne le sommes pas; toute motion ou décision que prend le comité ne reçoit la sanction que de la Chambre du Parlement, et pour changer la loi, il faut aussi l'aval du Sénat. Alors je vous dirais qu'il est très naïf de nourrir le moindre espoir que ce qui se passe dans ce comité obligera M. Mayrand à quoi que ce soit, ou en fait changera la loi avant les élections partielles de lundi prochain.
    Cela étant dit, il me semble qu'en fin de compte, il y a une différence entre le fait de demander à une femme voilée d'exposer son visage et ce que j'entends de la grande majorité d'entre vous, sinon l'unanimité, c'est-à-dire que les musulmanes sont habituées à exposer leur visage et, par conséquent, se plieraient très probablement à cette exigence. Donc il y a une différence entre le fait de demander et celui d'obliger les gens à le faire. Je crois que nous avons amplement déterminé qu'il y a divers moyens de voter et que de fait, la pièce d'identité avec photo est quelque chose d'assez nouveau dans le système électoral canadien, et c'est probablement pourquoi nous traitons d'un problème que nous aurions dû voir venir, mais qu'en temps que comité, nous n'avons pas prévu.
    Quelqu'un a fait le commentaire que l'accommodement que M. Mayrand est prêt à offrir, soit d'employer plus de femmes aux postes de scrutin pour mettre plus à l'aise les femmes qui devront se plier à l'obligation d'être visuellement identifiées avec leur pièce d'identité avec photo, revenait en quelque sorte à céder à la sombre nature de certains éléments culturels qui sont souvent associés à la communauté musulmane. J'avais pensé que c'était un accommodement plutôt complaisant et raisonnable, et j'aimerais seulement savoir ce que vous tous en pensez, ou certains d'entre vous. Je pense que c'est M. Harris qui a fait ce commentaire. Il m'a quelque peu étonné. J'aimerais connaître votre réaction.
    Si vous permettez, je laisserai M. Harris répondre, puisque son nom a été mentionné, nous lui laisserons la parole en premier, puis ce sera à Mme Raza.
    Merci pour cette question.
    La Canadian Coalition for Democracies a travaillé avec plusieurs groupes de femmes et de musulmanes qui se sont lancées dans le courageux combat contre les fondamentalistes radicaux déterminés à leur imposer la charia, en Ontario. En fait, c'est dans cet esprit que je fais ces observations, et je trouve aberrant que l'on puisse envisager qu'un organe du gouvernement, quel qu'il soit, pourrait par inadvertance faciliter exactement ce genre de normes que certains tentent d'imposer à la communauté islamique du Canada.
    Merci.
    Madame Raza, c'est votre tour.
    Je suis d'accord avec M. Harris qu'il ne devrait pas y avoir la moindre exception, parce que de l'extérieur, on a l'impression que la ligne est très mince entre l'accommodement et l'atteinte aux droits. Ceux qui sont ici ne savent peut-être pas que cela suscite une espèce d'aigreur à l'égard de la communauté musulmane quand cela reste un enjeu musulman. Donc, l'accommodement n'est pas acceptable. Il faut une règle qui s'applique à tout le monde, parce que nous ne voulons pas que cela devienne une situation comme celle que connaissent certains pays de l'Europe où, en fin de compte le voile et la burka ont été interdits, alors qu'il y a des femmes qui voudraient continuer de le porter.
    Il est certain que selon nous, il ne devrait pas y avoir d'accommodement à cet égard.
    Merci.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Revenons à Mme Redman.
    Nous bifurquons peut-être vers un sujet qui vous est moins familier, mais je pense que vous étiez dans la pièce tout à l'heure quand mon collègue, M. McGuinty, a cité le premier ministre. Je me demande si, d'après vous, le fait de gonfler le problème, de susciter cette crise et de décréter la nécessité absolue, l'urgence de traiter de ce sujet à la veille d'élections partielles, a été utile ou a nui à l'ensemble de la situation, et à la communauté musulmane du Canada dans son ensemble.
(1200)
    Tout ce que nous disons depuis tout à l'heure, c'est qu'il n'est absolument pas nécessaire de faire ce genre d'accommodement. Ce n'est pas ce que souhaitent les musulmans.
    Ce que je crains, aussi, c'est que nous créions un précédent pour ces exceptions. Si nous créons un précédent ici, nous devrons faire des accommodements pour d'autres exceptions, et les exceptions ne seront plus des exceptions.
    Le temps est écoulé.
    À titre d'éclaircissement de la part de la présidence, l'accommodement dont parlait Mme Redman, je crois, concernait la capacité du directeur des élections d'accommoder. D'après vous ce n'est pas nécessaire, parce que toutes les femmes se dévoileraient, puisque ce n'est pas une exigence religieuse.
    Merci beaucoup.
    Nous en sommes encore au deuxième tour, et les interventions sont de cinq minutes.
    Monsieur Poilievre.
    Je pense que nos témoins ont fait d'excellentes présentations. Je les remercie de leur présence ici. Je crois que nous pouvons tous leur pardonner d'être quelque peu déconcertés par les interventions de l'opposition officielle, qui laisse entendre que les problèmes dont nous traitons aujourd'hui sont les conséquences de la loi qu'ils ont contribué à rédiger, en faveur de laquelle ils ont voté, et qui a reçu l'aval du Sénat.
    Mais pour clarifier la position du Parlement — et je pense qu'un éclaircissement s'impose, après que nous ayons entendu le témoignage du directeur des élections ce matin — et compte tenu du fait qu'il semble nettement y avoir un consensus parmi nos témoins et que tous les partis ont eu la possibilité de poser des questions, j'aimerais proposer une motion. Elle indiquerait clairement...
    Excusez-moi, monsieur Poilievre. Pouvez-vous confirmer que la motion a trait à ce sujet?
    Oui, absolument. Et comme elle a trait à ce sujet, les règles de préavis permettent que je la présente tout de suite.
    Absolument. Je suis d'accord.
    Je vous écoute.
    J'ai une motion devant moi. Elle vise à signaler, très clairement — et c'est la première fois que nous le signalons en ces termes — ce qui suit, que le comité demande au directeur des élections d'employer ses pouvoirs d'adaptation pour exiger des électeurs qu'ils montrent leur visage avant d'être autorisés à exprimer leur suffrage aux postes de scrutin du pays.
    Est-ce que vous avez cela par écrit?
    Oui. La motion porte une modification manuscrite —
    Peut-être pourrais-je prendre quelques minutes pour l'examiner afin de déterminer si elle est recevable ou non. Je regrette, mais les témoins ne sont pas autorisés à faire des commentaires. Si je déclare la motion admissible, nous allons avoir un débat à son sujet. Alors si vous le permettez, je vais prendre une minute du temps du comité pour voir si la motion est recevable.
(1205)
    Chers collègues, je vous remercie de votre patience.
    J'ai consulté notre greffier et nos analystes. La motion est recevable.
    M. Poilievre pourra certainement me corriger, et je relirai la motion, mais il me semble que nous demandons au directeur général des élections d'employer ses pouvoirs spéciaux d'adaptation, en vertu de l'article 17, pour être plus précis, pour demander que les femmes révèlent leurs visages, que les visages soient exposés, et que les électeurs montrent leur visage aux postes de scrutin de tout le pays.
    Je tiens à rappeler aux membres du comité que l'article 17 de la loi s'applique aux 30 jours qui précèdent des élections. Donc, puisqu'il y an nombre limité d'élections dans tout le pays, je tiens à préciser que cela n'aurait aucun effet sur les processus électoraux au-delà de ces 30 jours, en vertu de l'article 17.
    Maintenant, la motion est recevable, alors nous pouvons entamer le débat.
    Vous invoquez le Règlement, monsieur Proulx?
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, d'après notre discussion d'hier, cette réunion devait être ajournée à midi. Vous savez bien que certains d'entre nous avons pris des engagements pour la pause du midi, aujourd'hui.
    J'ai bien l'impression que le débat sur cette motion prendra plus de 30 secondes. Nous avons déjà six minutes de retard, alors je pense que nous devrions reporter nos discussions après la pause du midi.
    J'aimerais aussi vous rappeler, monsieur le président, que nous avons reçu de vous et d'autres membres du comité l'engagement que nous allions consacrer cet après-midi environ une demi-heure à la préparation d'une ébauche de rapport, et ensuite nous allions passer à l'objet original de notre réunion. Peut-être que pendant la pause, nous devrions envisager de reporter ce débat à une autre réunion du comité, qui pourrait commencer demain après-midi ou ce soir. Pour l'instant, quoi qu'il en soit, je propose que nous arrêtions tout de suite, parce qu'il est déjà 12 h 07.
    Au sujet du même rappel au Règlement —
    Permettez-moi de donner une précision. J'aime toujours discuter de ces choses-là.
    J'ai bien dit au début de l'audience de nos témoins que nous siégerions jusqu'à 12 h 15, par simple courtoisie pour les témoins, pour qu'ils aient une heure exactement. J'ai bien reçu l'accord du comité pour ce faire.
    Ces possibilités sont ouvertes au débat. Je vois des mains levées. Je soupçonne qu'il s'agit de rappels au Règlement, alors entendons-les d'abord, puis nous verrons ce que le comité veut faire.
    M. Guimond a la parole, puis ce sera à M. Lukiwski.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je considère que la motion de M. Poilievre comporte des avantages et un certain mérite. Par contre, comme je suis francophone, j'aimerais qu'elle soit écrite dans les deux langues officielles. Je demande le consentement unanime pour que si des témoins ont des choses à nous dire jusqu'à 12 h 15, nous reprenions à 13 h 15; que la motion dactylographiée et traduite soit alors disponible dans les deux langues officielles, et que nous procédions à peu près comme à la Chambre, sur pilote automatique, c'est-à-dire sans que la moindre mesure dilatoire ou motion soit présentée jusqu'à la fin de cette réunion, soit à 12 h 15. Je demande le consentement unanime.

[Traduction]

    D'accord, nous avons reçu une demande qu'il y ait consentement unanime pour laisser aux témoins ce qu'il reste de temps, soit environ huit minutes. Faisons-le donc.
    Est-ce que nous sommes tous d'accord pour continuer à entendre les témoins, ce qui en fin de compte reporterait la motion de quelques minutes? Ceci n'exige pas un consentement unanime, pas plus que l'ajournement de la séance.
    Est-ce que nous avons votre consentement unanime pour laisser les huit prochaines minutes aux témoins? Est-ce quelqu'un n'est pas d'accord?
    Vous invoquez le Règlement, monsieur Poilievre.
    Avant de donner notre consentement, est-ce que la demande de consentement unanime vise à faire reporter la motion à cet après-midi?
    Non, pas du tout. Je m'attends à ce que nous en parlions à la fin des huit minutes que nous accordons aux témoins. C'est ce à quoi je m'attends, alors nous allons...Non?
    Non.
    Non? D'accord, alors soyez clairs, je vous prie.
    Je vais vous le répéter dans votre langue.
    Donc nous continuons avec les témoins pendant les cinq dernières minutes — les cinq prochaines minutes, puis la discussion au sujet de la motion de M. Poilievre serait reportée à 13 h 15, pour me donner le temps de lire la motion dans les deux langues officielles du Canada.
    Dans les cinq prochaines minutes, puisque je vais partir tout de suite, il n'y aura pas d'autre motion, aucune autre mesure de genre pilote automatique si familier à la Chambre.
    Je demande l'accord unanime pour cette motion.
(1210)
    Je pense que c'est raisonnable. Bien que je ne tienne pas à influencer les membres, je pense que c'est raisonnable. Nous laissons ce qu'il reste de temps aujourd'hui aux témoins, puis nous y reviendrons à 13 h 15, quand la motion aura été traduite. C'est raisonnable.
    Puis-je accepter cela, monsieur Poilievre et tout le monde? C'est très raisonnable.
    Des voix: D'accord.
    Le président: Merci beaucoup, chers collègues.
    Il nous reste du temps pour les témoins, alors peut-être devrions-nous commencer en ordre inversé. Nous aurons une minute de commentaire. Ainsi nous pourrons probablement entendre tout le monde.
    C'est d'abord le tour de M. Harris. Veuillez écouter, chers collègues, et voyez si nous pouvons apprendre autre chose.
    Allez-y, monsieur Harris.
    Merci beaucoup pour cette invitation.
    La préoccupation reste que dans la motion que nous avons entendue, et dans les discussions que nous avons eues, il semble y avoir, comme l'ont souligné certains, une certaine unanimité en ce qui concerne le tableau d'ensemble de la situation.
    Le problème, c'est la question centrale de savoir qui serait chargé de vérifier l'identité de celles qui lèvent leur voile. Ce que dit la Canadian Coalition for Democracies, c'est que s'il faut une employée du gouvernement du Canada pour ce faire, nous bannissons les hommes et nous introduisons un apartheid basé sur le sexe semblable aux critères fondés sur la charia, qui n'a absolument pas sa place au Canada et, très franchement, c'est une insulte à notre Constitution et à nos traditions.
    Dans le même sens que ce que dit David, je pense que si nous n'insistons pas pour que ce soit les deux — les femmes autant que les hommes — qui puissent identifier tous les électeurs, sinon nous allons subjuguer les agents des bulletins de vote spéciaux, les agents de scrutin, les responsables des bureaux de scrutin et d'autres membres du public, les empêcher de vraiment valider l'identité des électeurs. Alors je pense qu'il faut être clair que nous ne légitimons pas à un système de scrutin semblable à la charia, ici au Canada.
    Merci.

[Français]

    Je me rends compte que la motion présentement proposée est conforme à la recommandation que j'ai faite. J'ajoute simplement qu'à mon avis, il faut être très prudent quand il s'agit d'accommodements raisonnables qui peuvent parfois être déraisonnables.
    J'ai trois points à soulever.
    D'abord, on refuse le niqab pour des considérations bien plus affectives que réglementaires puisque celles-ci sont faites de manière à identifier toute personne, même les femmes portant le niqab.
    Ensuite, on ne résiste pas à l'extrémisme musulman en s'opposant à la direction générale d'Élections Canada. Permettre aux musulmanes portant le niqab de participer aux élections dans les conditions de la loi actuelle est un signe de sagesse et de pédagogie à long terme pour l'intégration des musulmanes dans la sphère politique.
    Enfin, il s'agit d'une question rhétorique et non pas une question directe. Si le débat autour des modalités d'élection n'avait jamais fait état du niqab des femmes musulmanes, la demande serait-elle aussi forte pour changer la loi?

[Traduction]

    Monsieur le président, je tenais seulement à vous remercier de nous avoir accueillis ici. J'espère qu'au moins l'opinion majoritaire que vous avez entendue autour de cette table sera prise en compte et que vous tiendrez compte du fait que bien que ce ne soit pas une question de croyance religieuse, les religions s'entrecoupent et les décisions que vous prendrez ici pour l'ensemble de la société pourraient avoir de bien plus vastes conséquences.
    Merci.
    Merci beaucoup. J'aimerais aussi ajouter qu'en ma qualité de Canadienne qui se trouve à être musulmane, j'apprécierais que toutes les motions, les règles et règlements soient pris dans l'intérêt plus général de la démocratie et conformément à la Charte des droits et libertés du Canada, qui prône l'égalité pour tous et aucune ségrégation fondée sur le sexe.
    Merci.
    Au nom du Muslim Canadian Congress, je tiens à vous remercier de nous avoir invités. Il est vraiment très encourageant que les politiciens écoutent maintenant les organisations populaires plutôt que les mosquées et leurs dirigeants.
    Merci encore, et bonne chance avec la motion.
    J'aimerais ajouter quelque chose, merci beaucoup. Je demanderais aussi qu'on laisse plus de place aux musulmans modérés, libéraux et progressifs séculaires.
    Merci.
    Je n'aime pas m'inscrire en faux contre quelqu'un qui prône la démocratie, mais je souhaiterais que vos propos soient moins incendiaires quand vous parlez de « charia », « d'apartheid basé sur le sexe », etc. Nous sommes l'organisation qui a lutté contre le droit de la famille musulmane en Ontario et qui a remporté la lutte, mais elle a été chaude. Mais n'employez donc pas une terminologie qui ne fait qu'attiser les flammes.
    Merci.
    Merci.
    En ma qualité de président du comité, je tiens à vous remercier et je suis sûr de m'exprimer au nom de tous les membres du comité. Nous vous remercions d'être venus malgré un préavis tellement court. Nous vous remercions de vos réponses sincères et réfléchies, et nous pouvons vous assurer que le comité ne manquera pas de prendre ses décisions à la lumière de vos observations.
    Je libère maintenant les témoins.
    Chers collègues, nous allons lever la séance. Nous nous retrouvons dans cette pièce à 13 h 15.
    La séance est levée.