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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 100 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 novembre 2018

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

     Bonjour à tous. La séance est ouverte.
    C'est notre 100e séance. Le Comité permanent des anciens combattants reprend ses études sur les vétérans itinérants, ainsi que le cannabis utilisé à des fins médicales et le bien-être des vétérans.
    En ce qui concerne l'étude sur les vétérans itinérants, nous avons le plaisir d'accueillir Debbie Lowther, présidente et co-fondatrice de VETS Canada, de même que Ray McInnis, directeur des Services aux vétérans et Dave Gordon, représentant des vétérans sans abri, tous deux de la Direction nationale de la Légion royale canadienne.
    Malheureusement, Ken Hoffer, président de la Society of Atlantic Heroes Recovery, a dû se désister pour des raisons de santé. Nous essaierons de le recevoir lorsque cela lui conviendra.
    Mesdames et messieurs les témoins, vous avez 10 minutes pour votre déclaration préliminaire. Un tour de questions suivra.
    Je vais commencer par Mme Lowther.
    Vous avez la parole.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je m'appelle Debbie Lowther. Je suis présidente et co-fondatrice de VETS Canada. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui et d'avoir entrepris cette étude très importante sur les vétérans itinérants. C'est un privilège pour moi d'être ici pour vous faire part de notre point de vue sur ce sujet.
    VETS Canada est un organisme national sans but lucratif dont l'objectif est d'aider les vétérans des Forces armées canadiennes et de la GRC qui sont sans abri ou qui risquent de le devenir. Nous avons été fondés en 2010 et nous offrons des services partout au pays, grâce à des centaines de bénévoles dévoués qui aident directement les vétérans. À notre bureau central à Halifax et grâce à nos bénévoles partout au pays, nous avons répondu à plus de 6 000 demandes d'aide des vétérans et de leurs familles d'un bout à l'autre du pays, 24 heures par jour, sept jours par semaine, y compris les jours fériés. Nous recevons actuellement entre 200 et 300 demandes d'aide chaque mois.
    Ces demandes nous parviennent de diverses façons, par l'entremise de notre ligne téléphonique 1-888, de notre site Web ou de nos plateformes sur les médias sociaux, et, plus récemment, grâce à notre centre d'accueil et de soutien pour les vétérans, qui vient d'ouvrir ses portes, ici à Ottawa, et à notre centre de soutien aux vétérans, dont l'ouverture a été annoncée récemment à Edmonton. Certaines de ces demandes nous sont transmises par l'entremise d'autres organisations ou organismes. Environ la moitié des dossiers que nous recevons chaque mois proviennent de gestionnaires de cas d'Anciens Combattants Canada.
    Depuis 2010, nous avons beaucoup appris sur l'itinérance chez les vétérans. Nous avons constaté qu'il y a une particularité qui les distingue des itinérants civils. Pour comprendre l'itinérance chez les vétérans, il faut d'abord comprendre que le fait de servir dans l'armée n'est pas seulement un emploi ou une carrière; c'est une culture en soi. Lorsque vous êtes militaire, cela devient votre identité. Les militaires sont prêts à sacrifier leur vie au service de leur pays et, pour ce faire, ils tissent des liens incroyables avec leurs frères d'armes.
    Nous savons que de nombreuses voies mènent à l'itinérance, comme la pauvreté, le manque de logements abordables, la perte d'un emploi ou l'instabilité professionnelle, la maladie mentale et la toxicomanie, les problèmes de santé physique, la violence familiale ou conjugale et l'éclatement de la famille ou du mariage. Ce qui distingue les vétérans, c'est qu'ils sont aux prises non seulement avec tous ces problèmes, mais aussi avec leur transition de la vie militaire à la vie civile. J'ai dit que la culture militaire était unique, ce qui veut dire que le vétéran doit essayer de s'adapter à une nouvelle culture civile, tout en ayant l'impression d'avoir perdu son identité et de le faire sans le réseau de soutien social qui a toujours été si important.
    Notre organisme a mené un projet de recherche très informel. Nous avons sondé un petit échantillon de vétérans que nous avions aidés. Nous avons été surpris d'apprendre que la majorité des vétérans interrogés ont indiqué que le manque de soutien social était un problème plus important que les problèmes de santé ou les problèmes financiers.
    Ce sondage nous a également appris que le premier épisode d'itinérance se produit en moyenne onze ans après la libération. La durée moyenne du service des personnes sondées était inférieure à 10 ans, de sorte qu'elles n'avaient droit à aucune rente. Par ailleurs, ces personnes avaient le grade de sergent ou un grade inférieur.
    Étant donné que je m'adresse au Comité permanent des anciens combattants et que la moitié des personnes que nous aidons chaque mois nous sont recommandées par le ministère, je vais vous parler de notre expérience d'aide aux vétérans itinérants en collaboration avec ce dernier.
    En 2014, nous avons obtenu un contrat d'Anciens Combattants Canada, faisant de nous leur fournisseur de services aux vétérans sans abri et en situation de crise. Ce contrat a pris fin à la fin de septembre cette année et n'a pas été renouvelé ni prolongé. En juin, on nous a dit qu'il le serait, mais on nous a demandé de nous adresser aux responsables du nouveau Fonds pour le bien-être des vétérans et de leur famille. On nous a confirmé le 28 septembre que notre demande avait été approuvée.
     Je tiens à préciser que nous sommes reconnaissants au gouvernement pour ce nouveau financement, même si la somme que nous avons demandée auprès de cette nouvelle source, qui a été déterminée en fonction d'un besoin croissant dans ce domaine, n'a été approuvée que partiellement par le ministère. Nous n'avons reçu que la moitié de ce que nous avions demandé, la moitié de ce dont nous avons besoin pour aider les vétérans et leur famille. Comme je l'ai dit, nous sommes reconnaissants pour le financement reçu, mais nous sommes déçus que le ministère ait déterminé que le problème des vétérans itinérants ne justifie pas le recours à un fournisseur de services spécialisé.
    Le 7 juin dernier, Anciens Combattants Canada a tenu une table ronde sur l'itinérance chez les vétérans, à laquelle ont participé des représentants de plus de 60 organismes. Le groupe comprenait des chercheurs, du personnel d'organismes qui offrent des services aux vétérans, mais pas spécifiquement aux vétérans sans abri, ainsi que du personnel de divers refuges au pays. VETS Canada, la Légion royale canadienne et peut-être deux ou trois autres organisations étaient, honnêtement, les seuls groupes qui pouvaient dire qu'ils s'occupaient spécifiquement des vétérans sans abri. Bon nombre des personnes qui faisaient partie de mon groupe de discussion ont été très franches au sujet du fait qu'elles étaient là pour apprendre, parce que même si des vétérans utilisent leurs refuges ou leurs services, elles ne comprenaient pas le caractère unique de l'itinérance chez les vétérans.
(1535)
     L'un des résultats de cette table ronde a été une carte interactive, présentée sur le site Web d'Anciens Combattants Canada, avec des liens vers plus de 100 organismes partout au pays. La plupart d'entre eux sont des refuges. Je ne compte que huit organisations s'occupant spécifiquement des vétérans, et l'une d'entre elles est spécialisée dans le réseautage et la sensibilisation des divers intervenants. Elle n'offre pas de services aux vétérans. Deux sont des organisations qui sont en train de construire des logements pour les vétérans itinérants, mais pour l'instant, ces logements n'existent pas.
    La carte interactive montre la Légion royale canadienne est présente en Ontario seulement et VETS Canada, à Halifax seulement, alors que nous sommes tous deux des organismes nationaux.
     Mon intention ici n'est pas de paraître critique ou négative, mais cela fait beaucoup de monde, et ce que les vétérans sans abri souhaitent plus que toute autre chose, comme toutes les personnes en situation d'itinérance, c'est de recevoir de l'aide d'un organisme crédible qui joindra les actes à la parole. Ils ne sont pas intéressés à traiter avec une agence de liaison ou un intermédiaire qui va simplement les diriger vers quelqu'un d'autre.
    Nous ne pensons pas naïvement qu'une seule organisation peut résoudre ce problème. Nous savons qu'il faut un effort de collaboration, mais nous savons aussi qu'un vétéran est plus susceptible d'accepter l'aide d'une personne qui parle le même langage que lui, qui comprend sa culture et qui peut lui offrir un soutien immédiat.
    En terminant, VETS Canada continuera de faire son travail, quel que soit le soutien que nous recevons ou les défis auxquels nous faisons face. Nous demeurons déterminés à fournir une aide d'urgence aux vétérans et à leurs familles dans le besoin, 24 heures par jour, sept jours par semaine, partout au pays.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai hâte de répondre à vos questions.
    Merci. Nous allons maintenant donner la parole à la Légion royale canadienne.
    Monsieur McInnis.
     Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité permanent des anciens combattants, je vous remercie d'avoir invité la Légion royale canadienne à témoigner devant vous aujourd'hui, dans le cadre de votre étude. Notre intervention portera principalement sur les défis auxquels sont confrontés les vétérans sans abri, les causes de leur itinérance et les efforts déployés par Anciens Combattants Canada pour régler ce problème.
    Je comparais devant vous au nom de notre président national, le camarade Tom Irvine, et de nos membres, à titre de directeur des Services aux vétérans à la Direction nationale de la Légion, ici à Ottawa. Je suis accompagné aujourd'hui du camarade Dave Gordon, représentant des vétérans sans abri au Comité national des anciens combattants, service et aînés.
    J'aimerais commencer par vous présenter le contexte important qui, à mon avis, constitue la toile de fond essentielle aux solutions possibles. Les militaires sont embrigadés dans un système rigide et croient que ce système les protégera toujours. Ils acceptent la culture militaire du travail d'équipe et comptent beaucoup sur cette équipe pour obtenir du soutien. Cela devient leur étoffe. Pour certains, quitter ce mode de vie est un processus difficile. Beaucoup n'abandonnent jamais vraiment la culture militaire.
    De nombreux facteurs peuvent entraver une transition en douceur après une carrière militaire. Chaque personne en transition a des défis particuliers à relever. La vie militaire offre un environnement financier sûr et stable, même lorsque les déploiements opérationnels sont dangereux. Les militaires et leurs familles s'épanouissent dans la culture militaire et ont une vie relativement confortable. Essentiellement, l'armée fait partie de leur famille élargie. Les liens sont solides et il est difficile, voire impossible, pour certains de les rompre.
    L'éventail des problèmes actuels, de la santé mentale à l'invalidité grave, complique également le processus de transition. La santé mentale est souvent un handicap invisible. L'acceptation du problème, de même que des programmes conçus pour aider ceux qui souffrent, ne sont pas encore des réalités concrètes. La stigmatisation est un facteur important, bien que de grands progrès aient été réalisés pour en venir à bout. Souvent, le cumul des incapacités fait en sorte que les cas deviennent très complexes et combinent à la fois des problèmes physiques et des problèmes de santé mentale. Des traitements à long terme peuvent être nécessaires avant que quelqu'un puisse reprendre une nouvelle vie normale.
    La question que nous devons nous poser est la suivante: quelle est la meilleure façon de venir en aide à ces personnes qui peuvent finir par se retrouver sur cette pente glissante qui mène à l'itinérance? Où qu'ils en soient dans leur service — avant, pendant ou après —, il est important que tous les militaires comprennent les conséquences du service et fassent confiance au système. Franchement, cela commence ici, avec l'appui du gouvernement qui, au bout du compte, prend la décision d'exposer le personnel du service canadien à des dangers. Les militaires doivent comprendre et savoir vraiment que le système dans lequel ils ont été endoctrinés ne faillira pas à la tâche de les soutenir, eux et leur famille.
    J'aimerais vous donner un peu plus de perspective. Même dans des situations de transition normales et exemptes de traumatismes, j'ai vu des gens qui avaient de la difficulté à quitter le refuge de la vie militaire. Tout leur était fourni. Ils doivent maintenant composer avec ce qui leur semble un monde étranger, notamment lorsqu'il s'agit d'organiser les soins de santé et les autres services qui leur étaient autrefois fournis par les Forces armées. Pour ceux dont la transition comporte des problèmes plus complexes, une aide supplémentaire est nécessaire. Les connaissances et la communication sont primordiales tout au long d'une carrière militaire, afin que ceux qui ont besoin d'aide sachent comment y accéder. Je dois souligner encore une fois que, peu importe si les problèmes sont évidents ou non, les gens qui quittent le service doivent comprendre et avoir la certitude que le soutien sera là quand et si nécessaire.
    Les Forces armées canadiennes ont déclaré qu'elles réorganiseraient complètement le processus de transition et veilleraient à ce que seuls ceux qui sont aptes à faire la transition la fassent. Une coordination étroite entre le ministère de la Défense nationale et Anciens Combattants Canada est essentielle pour s'assurer que personne ne passe à travers les mailles du filet et qu'un soutien continu est assuré tout au long du processus. L'objectif ultime est qu'un militaire et sa famille puissent réintégrer la vie en douceur à l'extérieur des forces armées. Cela constituera une étape nécessaire et positive.
    Je mentionne tout cela parce qu'il est essentiel de connaître l'état d'un vétéran au moment de la transition pour comprendre les facteurs fondamentaux qui peuvent contribuer à l'itinérance.
    La Légion royale canadienne a beaucoup appris sur l'itinérance au fil des ans, et j'aimerais vous en donner un aperçu général. Nous aidons les vétérans et leurs familles à sortir de la rue et à se reprendre en main grâce à des programmes nationaux et provinciaux. Nous offrons de l'aide financière et d'autres soutiens aux vétérans sans abri et à ceux qui risquent de le devenir.
    En 2012, la Légion a mis sur pied un programme national pour les vétérans sans abri appelé Leave the Streets Behind, qui est fondé sur les travaux novateurs de la Direction provinciale de l'Ontario menés quelques années auparavant. La mission du programme est de venir en aide aux vétérans sans abri ou presque en situation d'itinérance en leur offrant une aide financière immédiate au moment et à l'endroit où ils en ont besoin. Il les met également en contact avec les services sociaux et communautaires appropriés, afin de trouver une solution à long terme pour répondre à leurs besoins.
(1540)
     Nous avons consacré 500 000 $ à la lutte contre l'itinérance en 2012. Nous continuons de faire en sorte que chaque direction provinciale de la Légion mette sur pied un programme pour les vétérans sans abri adapté aux besoins de chaque région et collectivité particulière.
    L'Ontario a été la première direction provinciale à élaborer et à offrir le programme Leave the Streets Behind, en novembre 2009. Grâce à ses efforts, la Légion a établi un réseau de soutien par l'entremise du ministère des Anciens Combattants et de divers refuges de la province, afin d'offrir une aide à la transition aux vétérans sans abri. Grâce à la générosité des filiales de la Direction provinciale de l'Ontario et à l'Auxiliaire féminine de la Légion dans la région, plus de 2 millions de dollars ont été déboursés. Un partenariat a été établi avec Mainstay Housing à Toronto pour soutenir trois emplacements à Toronto, sur les rues Parliament et Bathurst, de même que 10 appartements dans le village des athlètes des Jeux panaméricains. À ce jour, la Direction provinciale de l'Ontario a aidé 667 vétérans sans abri dans 139 collectivités en Ontario, y compris 62 femmes.
    La Direction provinciale de la Colombie-Britannique et du Yukon fournit un soutien financier au Veterans Manor dans l'est de Vancouver et à la maison Cockrell à Victoria, une maison de transition qui est actuellement remplie. Il y a neuf chambres, et elles sont toujours pleines.
    La Direction provinciale de l'Alberta et des Territoires du Nord-Ouest exploite une banque alimentaire depuis plus de 20 ans et travaille aujourd'hui directement avec la banque alimentaire de Calgary pour aider de nombreux vétérans de la collectivité. Elle collabore également avec des premiers intervenants, les services sociaux et Anciens Combattants Canada pour identifier et aider les vétérans sans abri. Bien qu'elle ne tienne pas de statistiques détaillées, elle estime qu'au cours des trois dernières années, plus de 60 vétérans et membres de leur famille ont profité d'un refuge d'urgence. Le nombre de vétérans qu'ils ont aidés à payer leur loyer pour éviter qu'ils deviennent sans-abri est de plus du double.
    La Direction provinciale de la Nouvelle-Écosse et du Nunavut a lancé le programme de sensibilisation des vétérans, rassemblant des ressources communautaires et établissant des partenariats pour offrir une aide proactive aux vétérans sans abri.
    Ce sont là quatre exemples clés d'efforts concertés dans le domaine de l'itinérance au sein de nos directions provinciales. Ces dernières ne recueillent pas toutes des statistiques sur les vétérans sans abri au même niveau de détail que la Direction provinciale de l'Ontario, mais toutes les filiales et directions provinciales ont aidé des vétérans sans abri de diverses façons.
    Je peux vous dire que le message global est clair: il n'y a pas d'approche universelle pour venir en aide aux vétérans sans abri. Nous savons tous que les raisons de l'itinérance sont complexes et résultent d'une combinaison de facteurs, notamment la maladie mentale, la toxicomanie, la pauvreté, la faiblesse du marché du travail, une diminution du nombre de logements abordables et des épreuves comme la violence familiale ou l'éclatement de la famille. Nous avons appris que le fait de donner un toit à quelqu'un ne règle pas les problèmes qui l'ont poussé à devenir sans-abri. Nous veillons d'abord à ce que les personnes aient un abri sûr et nous travaillons avec elles pour déterminer le problème, puis la meilleure façon de le résoudre à sa source.
    Nous avons entendu dire, par exemple, que certains vétérans sans abri ne veulent pas avoir la responsabilité sociale un logement et de son entretien. Bien qu'il n'y ait pas de solution unique, nous avons estimé qu'il fallait commencer quelque part. Reconnaissant la nécessité d'une stratégie nationale coordonnée pour s'attaquer aux problèmes des vétérans sans abri, la Légion a coordonné et organisé un forum des vétérans sans abri en avril 2014. Cette réunion a regroupé des organismes nationaux qui travaillent auprès des sans-abri, mais en mettant l'accent sur les vétérans. Il a été déterminé que d'autres efforts visant à lutter contre l'itinérance chez les vétérans pourraient bénéficier de la mise sur pied d'un groupe de travail plus petit, chargé de définir la meilleure façon de lutter contre l'itinérance chez les vétérans.
    Le Comité consultatif sur l'itinérance chez les vétérans de la Légion royale canadienne a été créé et est présidé par notre président national. Il compte des représentants d'Anciens Combattants Canada, des Forces armées canadiennes, de l'Armée du Salut, des Good Shepherd Ministries, de la Commission de la santé mentale du Canada, d'EDSC, de la Direction provinciale de l'Ontario de la Légion et de VETS Canada.
    Ensemble, nous comprenons mieux le problème et nous établissons des réseaux et discutons de solutions. Le forum et notre groupe de travail ont aidé à cerner les domaines prioritaires et les lacunes dans les connaissances. Permettez-moi de nommer les principales: les obstacles à la transition; la sensibilisation et la communication; les services et les programmes; l'accessibilité et la coordination des efforts.
    Pourquoi y a-t-il autant de vétérans sans abri? Des consultations comme celles que je viens de décrire nous ont appris pourquoi. Nous devons maintenant nous concentrer sur les solutions.
    Anciens Combattants Canada est le ministère chargé de s'occuper des vétérans. Je pose donc la question suivante: pourquoi le Canada n'a-t-il pas une stratégie nationale pour lutter contre l'itinérance chez les vétérans? En 2016, nous avons été informés d'une stratégie et d'un plan d'action d'Anciens Combattants Canada sur l'itinérance, qui seraient axés sur les vétérans et fondés sur des données probantes et des résultats. On nous a dit que cela permettrait à ACC et à ses partenaires de mieux identifier et aider les vétérans sans abri et en crise et de prévenir l'itinérance chez eux. À ce jour, nous n'avons vu aucun signe de progrès.
     La gestion de cas doit inclure de l'aide pour trouver un logement et des liens avec les soutiens disponibles au sein de la collectivité.
(1545)
     Un programme d'acquisition de compétences de base pour offrir des possibilités d'apprentissage et de réseautage aux vétérans est nécessaire dès maintenant. Les vétérans ont servi notre pays et se sont sacrifiés pour lui, et il est de notre devoir de les défendre et de veiller à ce qu'ils aient accès aux soins et au soutien dont ils ont besoin.
    Au nom de tous nos vétérans, je demande quand nous pouvons nous attendre à une stratégie nationale de lutte contre l'itinérance chez les vétérans.
    Monsieur le président, nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de faire cet exposé et nous attendons vos questions.
    Merci.
    Monsieur McColeman, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Lowther et monsieur McInnis, je vous remercie de l'attention que portent vos deux organisations à cette importante question de l'itinérance chez les vétérans.
    Il y a quelques semaines, nous avons appris qu'il ne restait que 35 % du Fonds d'urgence pour les vétérans six mois après le début de l'exercice. On a demandé ce qui arriverait une fois que le fonds serait épuisé. La réponse a été que le gouvernement s'en remettrait à vos organisations pour combler le vide. Étiez-vous au courant de cela? Qu'en pensez-vous?
    Non, je n'étais pas au courant.
     Je connais le Fonds d'urgence pour les vétérans. Nous collaborons avec ses responsables depuis qu'il est utilisé partout au pays sous diverses formes. Je dirais que nous avons appuyé le fonds d'urgence à maintes reprises, partout au pays, mais je n'étais pas au courant de cette déclaration du gouvernement. Pourquoi n'est-il pas possible de renflouer ce budget? Si le budget est destiné au fonds d'urgence et qu'il y a de l'argent, en fait, il devrait être renfloué en fonction des sommes utilisées et du nombre de cas. Je n'ai pas encore été officiellement mis au courant du fait qu'il ne reste que 35 % ou de combien d'argent il disposait. Je sais que le montant maximum versé par personne est de 2 500 $. Notre contribution est supérieure à cela, alors j'aimerais que plus d'argent soit disponible. Le budget devrait être renfloué.
(1550)
    Avez-vous des commentaires, madame Lowther?
    Je n'étais pas au courant non plus, mais je peux dire que même s'il reste de l'argent dans le fonds d'urgence, nous offrons un soutien dans les cas où l'utilisation du fonds d'urgence ne peut être autorisée ou dans les cas des personnes qui ne veulent pas présenter de demande. Nous sommes sollicités, même s'il reste de l'argent dans le fonds.
    Selon votre témoignage, vous recevez environ la moitié de ce que vous demandez et de ce dont vous avez besoin d'Anciens Combattants Canada. Ce manque à gagner de 50 % est-il comblé par les revenus provenant des autres organismes qui vous soutiennent?
    Oui, le manque à gagner est comblé par des dons privés de Canadiens bienveillants.
    Est-ce que ce sont des organismes comme La patrie gravée sur le coeur et d'autres qui recueillent des fonds pour les vétérans dans divers contextes?
    Oui, nous avons déjà reçu quelques subventions de La patrie gravée sur le coeur.
    D'accord.
    Monsieur McInnis, avez-vous des commentaires? Est-ce que cet argent provient du Fonds du Coquelicot? Est-ce qu'il sert à combler le manque à gagner que le gouvernement ne finance pas?
    Je dirais que ce n'est pas tant un manque à gagner que le gouvernement ne finance pas, mais plutôt que dans le cas d'un vétéran qui a des besoins financiers — comme vous le savez, ou peut-être que vous ne le savez pas, la Légion royale canadienne n'accepte aucun financement gouvernemental. Tout notre financement provient du Fonds du Coquelicot et du fonds de fonctionnement. Nous avons un Fonds du Coquelicot qui relève de la Direction nationale. Chaque direction a également un fonds. Certaines, comme celle de l'Ontario — et je vais laisser Dave en parler — ont leur propre fonds pour les vétérans sans abri. Pour ce qui est du Fonds du Coquelicot, tant que les vétérans sont dans le besoin et s'adressent à nous, nous les aidons.
    D'accord.
    Nous avons lu dans nos documents d'information qu'un sondage effectué par Emploi et Développement social Canada estimait qu'il y avait environ 2 250 vétérans dans la rue. Ce chiffre correspond-il au nombre de demandes que vous avez, soit 2 250? Je ne devrais pas dire dans la rue. Je suppose que le mot est sans-abri. Désolé.
    Je vous dirais que ce chiffre est erroné. Un journaliste m'a demandé, il y a probablement quatre ans, combien il y avait de vétérans sans abri. Je lui ai répondu: « Combien de flocons de neige sont-ils tombés lors de la dernière tempête de neige? Personne ne le sait. »
    D'accord.
    Nous constatons que beaucoup de vétérans ne veulent pas s'identifier. En fait, dans ma ville natale, il y a un vétéran itinérant qui vit sous une tente. Nous avons récemment offert de le faire sortir de la rue. Sa réponse a essentiellement été: « Laissez-moi tranquille. Je ne veux pas de votre aide. » Il y a des gens qui ne veulent pas d'aide.
    Pour ce qui est du nombre, 2 000 ou peu importe, personne ne le connaît.
    Je comprends la situation de ce vétéran. En fait, certains sans-abri ne veulent pas avoir d'aide pour une raison ou pour une autre. Quelles techniques utilisez-vous ou que faites-vous pour régler le problème et entrer en contact avec ceux qui se révèlent être des vétérans? Avez-vous quelque chose que vous considérez comme innovateur pour les sortir de cette situation?
    Au départ, nous avons offert des sacs de Shoppers Drug Mart. En passant dans Moss Park une fois à Toronto, nous avons vu sept de ces sacs. Nous offrons maintenant des trousses ou des sacs à dos à Anciens Combattants Canada. La plupart des bureaux d'Anciens Combattants Canada en Ontario en ont. Espérons que ce sera bientôt le cas partout au pays. C'est ce que nous faisons. Souvent, il faut plus d'une rencontre ou d'une conversation avec un vétéran sans abri pour gagner sa confiance. Ce n'est qu'à la deuxième ou à la troisième rencontre que nous offrons un sac à dos ou que le gestionnaire de cas du vétéran lui offre un sac à dos.
    Nous offrons également des cartes-cadeaux, comme des cartes Tim Hortons. Nous les emmenons chez Tim Hortons et nous prenons un café et un beigne, un sandwich ou quelque chose d'autre avec eux. Nous leur offrons des cartes-cadeaux. Si nous leur trouvons un logement, c'est l'Auxiliaire féminin qui se charge de le meubler. Nous fournissons des trousses de démarrage d'une valeur de 250 $, y compris des assiettes, des ustensiles ou tout ce qu'il faut pour s'installer dans un appartement.
    Nous venons de conclure cette semaine notre troisième entente pour un programme de soins dentaires avec St. Joseph's Health Care à London. Nous offrons aussi un programme de soins dentaires à Ottawa et à Toronto.
(1555)
    Merci.
    Monsieur Eyolfson.
    Je tiens à vous remercier tous d'être venus.
    Madame Lowther, pourriez-vous nous parler des mesures que vous utilisez pour identifier les vétérans qui sont sans abri ou qui risquent de le devenir et faire un suivi? Y a-t-il des indicateurs qui peuvent être utilisés à cet égard?
    Nous utilisons une approche à deux volets, un proactif et un réactif. De façon proactive, nous avons des bénévoles qui descendent dans la rue. Ils parcourent les rues et visitent les refuges à la recherche de vétérans pour leur offrir de l'aide. Pour ce qui est du volet réactif, nous recevons les recommandations d'autres organisations et des vétérans eux-mêmes.
    Pour ce qui est du suivi, nous tenons une base de données exhaustive de tous les vétérans qui se présentent à nous. Une bonne partie de notre travail porte sur la prévention. Lorsque des vétérans qui ne sont peut-être pas sans abri, mais qui ont l'air d'être sur cette trajectoire, viennent à nous, nous leur accordons une plus grande attention. Nous voulons nous attaquer aux causes profondes des risques d'itinérance.
    Merci.
    Monsieur Gordon et monsieur McInnis, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Nous avons un document d'une page qui leur est destiné. Au début, le document avait six pages, mais nous l'avons réduit à une page. Les vétérans ne veulent tout simplement pas remplir beaucoup de paperasse. Nous avons un document qui peut être renvoyé par télécopieur à notre bureau. Selon l'heure de la journée, nous pouvons réagir.
    Je peux vous dire que nous avons les noms de tous les vétérans qui se sont présentés à nous et que nous avons identifiés. Nous pouvons retourner dans leur dossier et voir l'aide que nous leur avons fournie. Nous sommes très heureux de dire que nous avons trouvé de l'hébergement pour environ 350 des 667 vétérans que nous avons identifiés.
    Nous avons des statistiques très détaillées. Comme je l'ai dit, nous offrons des services dans 134 villes; nous en avons identifié 280 à Toronto, 45 à London, 45 à Kingston, sept à Trenton, deux à Belleville, etc. Nous avons ces statistiques. Nous pouvons les étayer et vous dire le montant exact qui a été dépensé pour chaque intervention dans n'importe laquelle de ces villes.
     Très bien. Merci.
    Madame Lowther, je veux m'assurer d'avoir bien compris. Vous avez dit que c'est en moyenne 11 ans après la libération qu'ils se retrouvent sans abri. Est-ce exact?
    Oui. Nous avons mené un sondage informel auprès d'un petit échantillon de vétérans, et dans cet échantillon, la durée moyenne entre la libération des forces armées et le premier épisode d'itinérance était de 11 ans.
    D'accord. Merci.
    Lorsque vous recueillez ces renseignements, êtes-vous en mesure de dégager des tendances quant à la durée des problèmes qui ont mené ces personnes à l'itinérance? Je suppose que si 11 années s'écoulent, elles ne suivent pas cette trajectoire pendant 11 ans. Y a-t-il un délai ou y a-t-il des événements communs qui font en sorte que, même si les choses se déroulent bien pendant un certain temps, il se produit telle ou telle chose après un certain nombre d'années? Avez-vous remarqué des tendances dans les délais ou les événements? Je sais que vous en avez mentionné quelques-unes, comme la violence conjugale, la toxicomanie et ce genre de choses.
    Nous ne nous sommes pas posé de questions précises à ce sujet, mais ce que nous savons, c'est que souvent, les problèmes de santé mentale, particulièrement le trouble de stress post-traumatique, prennent un certain temps avant de se manifester, pour ainsi dire. C'est l'une des raisons pour lesquelles cela se produit après 11 ans. L'autre raison pour laquelle cela peut prendre 11 ans, c'est que les vétérans ont d'excellentes aptitudes de survie, de sorte qu'ils peuvent se débrouiller seuls pendant un certain temps avant que la situation ne dégénère.
(1600)
    Très bien. Merci.
    Monsieur Gordon et monsieur McInnis, avez-vous quelque chose à ajouter?
    À l'échelle nationale, nous n'avons pas de statistiques à ce sujet, et il n'y a pas beaucoup de recherches au Canada sur l'itinérance chez les vétérans canadiens, mais en Ontario...
    En Ontario, nous avons trouvé des personnes pour qui cela s'était produit entre deux ans et demi et quatre ans, peut-être cinq, après la libération. Nous avons constaté que ces personnes sont devenues des sans-abri. Soit dit en passant, leur âge varie de 17 à 92 ans.
    Très bien. Merci.
    Nous avons parlé de la maladie mentale. J'ai travaillé à l'urgence pendant un certain nombre d'années, et nous savions que la grande majorité des sans-abri en général — pas seulement les vétérans, mais l'ensemble des sans-abri — sont des personnes atteintes de maladie mentale non traitée ou mal traitée. Y a-t-il des données sur le nombre de ces vétérans qui ont reçu un diagnostic de maladie mentale avant leur service militaire? Cette information est-elle disponible?
    Ce ne sont pas des statistiques que nous tenons, mais je peux vous dire qu'un certain nombre de vétérans que nous avons aidés n'ont pas nécessairement révélé qu'ils avaient eu des problèmes de santé mentale, mais plutôt qu'ils avaient subi des traumatismes pendant leur enfance, avant leur service militaire. Dans certains cas, nous savons que leur service militaire a peut-être aggravé leur prédisposition au trouble de stress post-traumatique.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Madame Mathyssen, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci encore de votre présence. Je pense que cela témoigne de votre détermination à répondre aux besoins des vétérans et à prendre soin de ceux qui ont été laissés pour compte, et je vous en suis très reconnaissante.
    J'aimerais commencer par vous, madame Lowther. La dernière fois que nous nous sommes rencontrés, vous aviez dit que votre contrat était terminé et que vous n'aviez rien et que vous ne saviez pas ce qui allait se passer. Vous dites que le financement a été approuvé en partie. Qu'est-ce que cela signifie pour VETS Canada? Quelle incidence cela a-t-il sur votre organisation et sur ce que vous essayez de faire?
    Essentiellement, nous sommes fermement résolus à poursuivre nos efforts. Cela signifie que nous devrons peut-être nous consacrer en partie à la collecte de fonds. Nous cherchons actuellement à obtenir l'aide d'un collecteur de fonds professionnel pour nous aider à accroître nos dons privés. Je tiens à préciser que le montant que nous avons reçu du Fonds pour le bien-être des vétérans et de leur famille était le même que celui que nous avions reçu dans le cadre de notre ancien contrat. Ce n'est donc pas que nous avons reçu moins d'argent. Lorsque nous avons présenté notre proposition, nous avons examiné les hausses annuelles des deux dernières années, et nous avons pu prévoir le montant dont nous aurions besoin pour l'année à venir, mais ce n'est pas le montant que nous avons obtenu.
     D'accord. De toute évidence, il y a de plus en plus de vétérans itinérants et il faut prendre soin d'eux.
     Vous n'avez pas eu l'occasion de répondre auparavant. À combien estimez-vous le nombre de vétérans sans abri au Canada? Avez-vous une idée? On sait que le ministère dit qu'il y a environ 2 250 personnes qui ont utilisé des refuges pour sans-abri cette année, mais est-ce que ce n'est que la pointe de l'iceberg? Quelle est votre estimation?
    En ce qui concerne le chiffre de 2 250, nous savons qu'il est fondé sur une base de données utilisée par une soixantaine de refuges au pays. Cela ne tient pas compte des vétérans qui utilisent peut-être des refuges qui n'ont pas accès à cette base de données.
     Cela ne tient pas compte non plus des vétérans qui n'ont pas du tout accès aux refuges, ce qui, nous le savons, est le scénario le plus courant. Les vétérans n'ont pas tendance à utiliser le système de refuges. Ils ont plutôt tendance à se faire héberger à gauche et à droite, à vivre dans leur voiture ou à survivre dans la forêt. Ce chiffre de 2 250 est évidemment très bas.
     J'ai bien aimé la comparaison de M. Gordon sur le nombre de flocons de neige qui sont tombés lors de la dernière tempête de neige, parce qu'elle montre bien à quel point il est difficile de déterminer un chiffre.
(1605)
    Merci beaucoup.
    Comme vous le savez sans doute, le Parlement a adopté à l'unanimité une motion visant à prendre toutes les sommes inutilisées, à les réunir et les reverser aux vétérans. C'était une motion intéressante, 301 députés ayant voté pour et aucun contre. Aux termes de cette motion, environ 124 millions de dollars par année devaient être prévus pour améliorer les services offerts aux vétérans du Canada, embaucher plus de gestionnaires de cas et veiller à ce que les vétérans soient une priorité.
    Si cette motion était adoptée en tant que politique — cela figure dans les comptes rendus, tout le monde est d'accord, c'est merveilleux, j'adore cela — et qu'elle devait être mise en place, et si les paroles s'accompagnaient d'actes, est-ce que les dépenses du présent exercice au prochain nous permettraient d'accélérer les approbations des processus et des demandes des vétérans qui souhaitent utiliser le fonds d'urgence?
    Je pense que si cet argent était utilisé... Si j'ai bien compris, l'argent qui reste n'a pas été utilisé aux fins prévues et ne peut servir à autre chose. Si l'argent pouvait être utilisé de n'importe quelle façon, je pense que l'embauche d'un plus grand nombre de gestionnaires de cas, et particulièrement d'arbitres, aiderait certainement à éliminer l'arriéré de clients.
    C'est intéressant, n'est-ce pas? Nous avons cette somme d'argent disponible, elle est réservée pour quelque chose d'autre, alors nous ne pouvons pas l'utiliser. Je suppose qu'elle doit rester dans le coffre-fort fédéral.
    J'aimerais m'adresser à vous tous, mais je ne sais pas s'il me reste assez de temps. Je vais encore parler de cas individuels, de personnes désespérées.
     Il y a ce cas d'un jeune homme qui souffre de trouble de stress post-traumatique. Il a reçu son diagnostic il y a un certain temps. Il a tenté de se suicider à cinq reprises. Chaque fois qu'il pense avoir créé un lien avec Anciens Combattants Canada, il y a un obstacle. Par exemple, à cause du trouble de stress post-traumatique, il appelle tout le temps. Une fois qu'il a atteint un certain nombre d'appels, on le bloque. Il ne peut plus appeler. Tout récemment, cela s'est produit un vendredi après-midi, et il ne s'est rien passé avant le lundi. On parle d'une personne qui a tenté de se suicider à cinq reprises.
    Avez-vous entendu parler de ces cas? Il me semble que s'il survit, il sera probablement sans abri à un moment donné. Je vous cède la parole.
    Votre temps est écoulé.
    Je suis désolée.
    Vous pouvez répondre très brièvement...
    Très rapidement, oui. En tant qu'officiers d'entraide au sein de la Direction nationale de la Légion, nous servons d'intermédiaires avec le ministère pour de nombreuses personnes qui, pour une raison ou une autre, qu'il s'agisse d'appels téléphoniques ou de menaces, ne peuvent plus traiter avec Anciens Combattants Canada. Les officiers d'entraide de la direction les aident, travaillent avec eux et communiquent avec le ministère pour eux, afin qu'ils ne se retrouvent pas dans une situation d'itinérance ou une autre situation du genre.
    Monsieur Bratina, vous avez six minutes.
     C’est une bonne conversation, et nous en avons besoin.
    Il y a une question qui revient souvent et qui est très intéressante et difficile à régler, c’est la création d’une stratégie nationale sur l'itinérance. Quand je m'adresse à des civils et que je leur parle de mon travail au Comité des anciens combattants, ils pensent que les anciens combattants sans-abri font partie des victimes de la pénurie de logement.
    J’entends dire — et peut-être que vous pourriez en parler, madame Lowther — qu’il y a des anciens combattants qui sont victimes de pénurie de logement, peut-être dans la région où ils vivent, mais que beaucoup d’entre eux ont aussi des comportements d’évitement et qu’ils ne veulent plus faire partie du système.
    Diriez-vous que cela va nous causer des difficultés — et je ne dis pas que nous allons hésiter ou ne pas donner suite — pour formuler des recommandations concernant une stratégie du logement? Il faudra voir plus loin que la construction d'habitations supplémentaires. Êtes-vous d'accord avec cette perspective?
(1610)
    Oui, je pense que la construction d'habitations supplémentaires n’est pas nécessairement la solution. Je pense que le logement abordable fait certainement partie de la solution.
    On m’a déjà demandé si, d'après mois, les anciens combattants devraient être considérés comme une population spécialisée. Autrement dit, est-ce qu'il faut leur accorder la priorité en matière de logement? Si vous posiez la question à mon mari, qui est un ancien combattant, il dirait qu’il n’accepterait pas cela. Dans l’armée, on lui aurait dit de céder ce logement à quelqu’un qui en aurait plus besoin.
    Personnellement, je pense que les anciens combattants devraient être considérés comme une population spécialisée et qu’on devrait leur accorder la priorité en matière de logement.
    Monsieur McInnis, pourriez-vous également nous dire ce que vous en pensez?
    Je crois que nous avons besoin de beaucoup plus de logements abordables. En plus, nous avons aussi besoin de beaucoup plus de services de gestion de cas. Pour ce...
    ...programme.
    Je veux dire pour l’ensemble du programme.
    Pour revenir à l’autre question, à savoir si nous avions plus d’argent — surtout du côté de l’arbitrage, il y a 38 000 demandes en attente. Les gens attendent plus d’un an et demi ou deux ans avant qu’une décision soit rendue.
    En vertu de la nouvelle Loi sur le bien-être des vétérans, qui a changé le 1er avril, mais ils n’ont pas de traitement. Ce n’est pas comme l’ancienne Loi sur les pensions, en vertu de laquelle ils pouvaient obtenir un traitement, puis, si leur demande était acceptée, ils étaient remboursés. Il y a des gens qui attendent que leur demande soit réglée et ils n’ont aucun traitement. C'est inadmissible.
    S'agissant de logement ou de nouvelle infrastructure, le logement abordable sera la clé.
    Vous pourriez peut-être nous parler de l’Ontario et du fait que nous avons besoin de logements abordables et pas seulement de bâtiments.
    En Ontario, nous avons les trois établissements mentionnés dans le mémoire.
    Nous tenons aussi beaucoup aux logements abordables. Un promoteur s'est proposé à London. Il fournit 14 logements aux anciens combattants sans-abri. Il y en a un autre à Niagara Falls. Il a deux ou trois immeubles de 10 logements chacun. Il les proposera aux anciens combattants sans-abri. Nous faisons actuellement des recherches dans deux ou trois autres secteurs.
    Nous nous intéressons également aux tout petits projets de construction domiciliaire, pour nous faire une idée plus précise de l'endroit où ce serait possible en Ontario. Je rappelle que cela dépend des municipalités. Nous devrons convaincre les municipalités de modifier leurs règlements municipaux pour permettre la construction d’un immeuble de cette taille.
    Certains anciens combattants auront d'autres besoins qu’un simple endroit où vivre. Recommanderiez-vous que certains des logements abordables ainsi créés prennent la forme, peut-être, d’un petit immeuble à logements multiples où plusieurs anciens combattants pourraient vivre ensemble? Est-ce quelque chose qui...?
    C’est ce que nous avons maintenant en Ontario, dans nos trois établissements. Nous avons aussi un bureau pour les travailleurs de la santé. Ils enseignent les programmes de suivi. Nous avons cela dans les trois établissements.
    Anciens Combattants a aussi des bureaux. Ils ont un bureau dans les locaux de Good Shepherd Ministries, sur la rue Queen, à Toronto.
    Je pense aux cas difficiles, comme celui du gars dans la tente qui disait « Laissez-moi tranquille ».
    Il faut une combinaison des deux mesures, d'une part, des logements abordables et, d'autre part, quelque chose comme le complexe d’habitation multiconfessionnel qui sera construit à Rockcliffe et ce qui se passe à Toronto et partout au pays. On a aussi besoin de logements abordables où les gens puissent vivre dans une collectivité et revenir à la vie normale.
     C’est exact.
    Avez-vous parlé de ces questions à vos collègues de l’autre côté de la frontière — je parle de l’expérience des Américains?
    Quand nous avons lancé le programme, nous avons communiqué avec le ministère des anciens combattants à Buffalo, dans l’État de New York. Nous y avons créé des liens. Nous nous sommes assis pour discuter avec ces gens. Nous avons passé une journée et demie avec eux. L’une des choses qu’ils nous ont fortement suggérées a été de ne pas essayer de réinventer la roue. S'il existe un programme, qu'on l'utilise. Je peux vous dire que c'est ce que nous avons fait.
    Je ne vois pas d'inconvénient à vous dire que nous avons utilisé les programmes d’autres personnes, mais que nous les avons adaptés à nos besoins et à nos désirs. Voilà comment nous en sommes arrivés là. Le programme en Ontario est très solide. Nous sommes très fiers de ce que nous avons fait.
(1615)
    Merci.
    Madame Ludwig.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous du travail que vous faites. C’est extrêmement important. Certains éléments sont anecdotiques, et je vais donc poser quelques questions sur les données, mais je tiens à vous remercier du travail que vous faites.
    Madame Lowther, est-ce que vous habitez à Halifax?
    Oui.
    D’accord. J’habite à St. Andrews, au Nouveau-Brunswick, et mon collègue vit dans le nord du Nouveau-Brunswick. Certaines de mes questions porteront donc plus précisément sur la région de l’Atlantique et sur les régions rurales plutôt que sur les régions urbaines. Je siège également au Comité du commerce international. Les témoins nous donnent des réponses très différentes selon la région d'où ils viennent.
    Concernant la répartition géographique des logements abordables, y en a-t-il beaucoup dans le Canada atlantique?
    Il n’y en a pas spécifiquement pour les anciens combattants, mais il y a effectivement une pénurie de logements abordables dans le Canada atlantique.
    Que recommanderiez-vous en matière de logement abordable en milieu très rural? Je pense au nombre de gens des Maritimes qui vont partir, notamment dans le cas des militaires de la base Gagetown, au Nouveau-Brunswick, et qui finiront par revenir. Ils veulent être dans leur collectivité d'origine. S’il n’y a pas de services intégrés, que recommandez-vous à cet égard? Que pouvez-vous nous donner comme information?
    C’est difficile de vivre en milieu rural. Nous savons qu’il y a des moments où les anciens combattants, surtout ceux qui ont des problèmes de santé mentale, ne veulent pas vivre en milieu urbain. Ils préfèrent vivre en milieu rural, plus calme et plus favorable à leur santé mentale. C’est certainement un défi en matière de logement. Honnêtement, je ne sais pas quelle est la solution pour régler ce problème en milieu rural.
    Merci.
    Monsieur Gordon ou monsieur McInnis, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Je dirais simplement que, en milieu rural, il est difficile d’obtenir non seulement un logement abordable, mais aussi des services de santé mentale — tout, quoi. Il s'agit de voir ce qu'ils peuvent trouver dans l’économie locale.
    Pour ce qui est de trouver une solution...
    Au début d’un nouveau programme, une fois que l’ancien combattant frappe à notre porte et que nous vérifions le service, la porte est ouverte. Notre première question est « De quoi avez-vous besoin? » Notre bureau est situé à Aurora, en Ontario, et nous avons une succursale à Kapuskasing. Nous les appelons et leur disons « Nous avons un ancien combattant sans-abri à Kapuskasing et nous devons lui trouver un logement ». Nous avons 394 succursales en Ontario. Je peux vous dire que nous pouvons obtenir le service en deux heures ou dans un délai de...
    Monsieur Gordon, vous êtes un homme de chiffres.
    Oui.
    Y a-t-il un répertoire commun dans lequel nous pouvons intégrer les données chiffrées pour commencer à les recueillir?
    Je pourrai vous faire parvenir une copie des statistiques que nous conservons. Ce n’est pas un problème. À notre connaissance, nous sommes la seule province... ou le seul commandement. Je peux vous dire que cela va changer à partir de samedi. Nous allons faire participer tout le monde pour que nous puissions travailler ensemble.
    Nous avons commencé à conserver des statistiques dès le premier jour. J’ai été l’un des premiers membres du comité du Commandement de l’Ontario à lancer le programme. C’est de là que je tiens tous ces chiffres.
    D’après votre expérience, y a-t-il plus ou moins de soutien pour les anciens combattants qu’il y a cinq ans?
    Il y en a plus, c'est certain. Parfois, il y a même trop de mesures de soutien. Comme je l’ai dit dans mon témoignage, c’est devenu un paysage très encombré. Cela semble être la question à la mode, si on peut dire. Des gens viennent de partout offrir leur soutien. La question est de savoir s'il y a vraiment un service. C’est une question de crédibilité.
     Et les conflits? Est-ce qu'il y a un conflit commun, comme une guerre à laquelle les anciens combattants ont participé, ou s’agit-il simplement de tous les anciens combattants, de 17 à 92 ans, comme vous l’avez dit, monsieur Gordon?
    Oui. Un ancien combattant est un ancien combattant. Je dis cela, et nous sommes honnêtes à ce sujet, parce qu’il y a tellement de gens qui ne viennent pas présenter une demande de prestations d’invalidité parce que, à un moment donné, quelqu’un leur a dit que, pour le service qu’ils ont accompli, ils n’ont pas le droit de faire une demande. Il faut beaucoup d’efforts pour revenir en arrière. Beaucoup d’anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale qui n’ont pas servi outre-mer se sont fait dire qu’ils ne pouvaient pas présenter de demande. Il est difficile d’essayer de les convaincre de le faire à cette étape de leur vie où ils veulent rester chez eux et recevoir les services du PAAC pour ne pas avoir à passer aux soins de longue durée.
    Vous vouliez savoir si les choses ont changé. Oui, il y a eu beaucoup de grands changements, mais il faut convaincre les anciens combattants de venir. Il faut les convaincre de venir pour pouvoir leur offrir le service dont ils ont besoin. Une fois qu’ils sont là, on peut passer par le système, et c’est très bien, mais il faut d'abord les convaincre.
(1620)
    Avez-vous entendu dire que des anciens combattants s’inquiètent de signaler un problème médical ou de santé mentale au médecin militaire pendant qu’ils sont en fonction? Certains m'ont dit que cela risquait de limiter leur carrière.
    Eh bien, pour les gens qui sont encore en fonction, nous n’avons pas besoin de questionnaires médicaux dûment remplis, et ACC n'en exige pas pour une demande d’invalidité. Il faut que cela figure dans le dossier médical. Pour tous ceux qui étaient là quand nous avons fait une demande de prestations d’invalidité renvoyant à un diagnostic, c'est quelque chose de nouveau. Vous parlez de gens qui ne veulent pas se manifester parce que, je le rappelle, c’est une question de stigmatisation. Je ne dirais pas que cette stigmatisation a été éradiquée, mais nous voyons plus de gens se manifester que jamais auparavant, et le taux de réponse favorable aux demandes de prestations pour maladie mentale doit être, à l’heure actuelle, de près de 90 %.
    Ils ont même changé de perspective dans le traitement des demandes. On n'en est plus à n'accorder qu'un minimum de 10 % le plus souvent. S’ils peuvent rendre une décision définitive et procéder à une évaluation à ce moment-là pour éviter que l'intéressé souffrant d’un problème de santé mentale revienne un an ou six mois plus tard, parce que c’est aussi un problème... Les gens veulent simplement être admis, obtenir le traitement et, bien sûr, obtenir une indemnité d’invalidité.
    Merci.
    Madame Wagantall, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci beaucoup, monsieur Gordon, monsieur McInnis et Deb Lowther, d’être ici aujourd’hui.
    Je vais citer un autre témoin. M. Robert Tomljenovic, directeur de secteur au ministère des Anciens Combattants, expliquait, un peu comme vous, que les anciens combattants, comme c'est le cas dans la population en général, deviennent des itinérants en raison de problèmes complexes et connexes comme l’état de santé, les problèmes personnels, l’instabilité d’emploi, la pauvreté, le manque de logement abordable, les problèmes de toxicomanie et autres. De plus, ils ont aussi vécu des situations traumatisantes.
    Je ne peux pas m’empêcher de penser que l’itinérance et toutes ces choses dont il est question sont les symptômes d’une expérience traumatisante. Que vous soyez un ancien combattant ou non, quelque chose vous a amené à glisser sur cette pente, où la vie est moins positive.
     Madame Lowther, votre programme, Boots on the Ground, me fait comprendre que la majorité des gens qui ont vécu ces expériences traumatisantes parmi nos militaires sont ceux qui sont sur le terrain, ceux qui affrontent le feu ennemi, les explosions et toutes sortes de situations. Je vous suis très reconnaissante de ce que vous faites, tous, dans ce qui est vraiment un scénario de gestion de crise. Je suis sûre que vous aimeriez que les circonstances changent pour qu’il n’y ait plus d’itinérance. C’est l’idéal. Je comprends que ce n’est pas possible, mais on pourrait s'en approcher beaucoup plus.
    Monsieur McInnis, je crois que vous avez dit quelque chose au sujet de la nécessité d’être apte à la transition. Notre objectif est de favoriser cette transition harmonieuse de la Défense nationale à ACC vers une vie civile saine. Diriez-vous que ce secteur... Je sais qu’ACC n’a pas hâte de permettre à la Défense nationale de déterminer le moment de votre départ — et si vous partez avec une blessure, qu’elle soit liée au service ou non — pour ne pas avoir à repasser par tout le système en passant par ACC.
     Vous avez dit qu’il fallait plus de gestionnaires de cas. Pouvez-vous nous en parler un peu? Si les circonstances étaient différentes, est-ce que les symptômes que subissent nos anciens combattants seraient différents, ceux qui sont vraiment blessés et qui sont aux prises avec ces problèmes, le TSPT et autres troubles?
    Oui, c’est très important, mais je n’aime pas l’expression « transition harmonieuse ». Il n’y a rien d’harmonieux là-dedans. Il vaudrait mieux dire « transition en douceur »...
    Mme Cathay Wagantall: D'accord.
    M. Raymond McInnis: ... parce que même les personnes qui ne sont pas blessées lorsqu’elles quittent l’armée ont encore de la difficulté à faire la transition vers le monde civil.
    Je ne veux rien enlever à tous les civils présents dans la salle, mais le système de soins de santé n’est pas aussi bon qu’il l’était lorsque nous étions dans l’armée. Dans l’armée, on s’occupait de nous. On cogne à une porte le matin et, quand on revient l’après-midi, tout a été réglé. On ne savait pas ce qu'on avait... c'était à ce point excellent.
    Pour moi, la transition est extrêmement importante. Si les Forces canadiennes ont le mandat de vous garder plus longtemps pour garantir que, au moment de la transition, vous êtes en meilleure santé mentale, physique et financière, alors oui, beaucoup de problèmes disparaîtront.
(1625)
     Si nous devons parler d’argent, pensez-vous que, si nous investissions davantage dans le maintien de leur solde jusqu’à ce que toutes ces questions soient réglées, on finirait, à long terme, par dépenser moins et avoir des citoyens en meilleure santé?
    J’aimerais que vous répondiez brièvement par oui ou par non parce que j’ai beaucoup de questions.
    C’est oui quant à moi, pourvu qu’ils soient dans l’armée et qu’on s'en occupe. C’est la raison pour laquelle ils vont chercher des postes supplémentaires, parce qu’ils seront alors payés, et c’est à cela que les groupes de transition sont censés servir.
    D’accord. Merci.
    Madame Lowther, j’ai visité le nouveau centre d’accueil. C’est remarquable, très intéressant. J’ai eu l’occasion de rencontrer Gary Davis à Victoria, la semaine dernière. Vos services, ainsi que ceux de la Légion, sont tout à fait dignes d'éloges. Merci de ce que vous faites.
     Je sais que, au cours de vos deux premiers mois au centre, vous avez reçu, en fait, plus de 60 cas d'urgence réacheminés par des gestionnaires de cas. Quelles étaient leurs raisons de vous les adresser?
    Concernant le fonds d’urgence, quelle est la façon la plus efficace d’utiliser cet argent quand on s'occupe d’anciens combattants en situation d’urgence, par l’entremise d’ACC ou par le biais d’anciens combattants qui aident les anciens combattants?
    Honnêtement, lorsque le fonds d’urgence a été annoncé, plusieurs gestionnaires de cas nous ont dit qu’ils ne voulaient pas être responsables de l’administration de ce fonds. Ils préféreraient que le ministère donne l’argent à VETS Canada et laisse VETS Canada s’en charger.
    Dans quelles circonstances les gestionnaires de cas nous adressent-ils des anciens combattants ou les dirigent vers notre centre de jour? Les situations sont multiples, mais il y a, en commun, le fait que nous avons la capacité de fournir un soutien immédiat.
    Pour dire les choses clairement, les membres du personnel de première ligne d’Anciens Combattants Canada sont aimables et bienveillants et ils font un excellent travail compte tenu de ce qu'ils peuvent faire. Ils sont assujettis à des lois et à des politiques et procédures très restrictives, alors que nous avons la capacité de fonctionner hors cadre. Il n’est pas nécessaire que quelqu’un signe une note d’information pour dépenser de l’argent, et nous pouvons donc plus facilement prendre les mesures qui conviennent dans de brefs délais.
    Les gestionnaires de cas le savent, et je pense que...
    Merci. Oui.
    Il est clair, monsieur Gordon, que vous faites du bon travail concernant la base de données et l’information, et il n'y en a pas suffisamment à notre avis, ce que je ne comprends pas.
    Cela étant, pensez-vous qu’il serait avantageux de partager cette information avec les groupes qui réussissent à servir les anciens combattants? Vous dites qu’il y en a vraiment trop. Est-ce que Mme Lowther sait quels sont ceux que vous desservez dans certaines régions et s’il y a double emploi?
    Mon mari travaillait au ministère, et il y avait souvent des gens ayant vraiment besoin d’aide qui y allaient, mais, si on était en contact avec tous les organismes de la région, on savait qu’ils étaient allés dans toutes sortes d'endroits et qu’ils n’avaient pas nécessairement profité de l’aide nécessaire.
    Pensez-vous que cette base de données devrait être plus complète?
    C’est une bonne question.
    Nous soutenons toutes les autres organisations — comme VETS Canada — et nous collaborons avec elles. Nous les avons aidées, et, grâce aux trousses du ministère, nous les aidons si elles viennent nous voir. Nous sommes là pour toutes les organisations qui s'adressent à nous pour aider un ancien combattant sans-abri.
    Savez-vous tous les deux qui vous servez?
    Est-ce que vous servez les mêmes personnes? Je suppose que c’est ce que je veux savoir.
    S'il vous plaît, veuillez répondre rapidement.
    Il n'y a pas de double emploi.
    D’accord. Merci.
    Désolé, c’est tout pour le groupe de témoins d’aujourd’hui. Je sais que l’heure a passé très rapidement.
    Au nom du Comité, j’aimerais vous remercier tous les trois d’être venus aujourd’hui et de tout ce que vous faites pour les hommes et les femmes qui servent notre pays.
    Nous allons suspendre la séance pour libérer la salle. Nous passerons très bientôt à l’autre groupe de témoins.

(1630)
     Reprenons, s’il vous plaît. J’invite tout le monde à prendre place.
    Il s’agit de l’étude sur le cannabis médical.
    Nous avons le plaisir d’accueillir, par vidéoconférence depuis Hamilton, le Dr Jason Busse, professeur agrégé et directeur associé du Michael G. DeGroote Centre for Medicinal Cannabis Research de l’Université McMaster.
    Nous avons ici-même, à Ottawa, M. Zhang, professeur adjoint au Département de psychiatrie de l'Université de la Saskatchewan, ainsi que M. Cohen, ancien combattant et étudiant à la maîtrise en sciences au Département de pharmacologie et de psychiatrie de l'Université de la Saskatchewan.
    Chacun d'entre vous fera un exposé de 10 minutes, puis nous passerons à la vidéoconférence avec M. Busse.
     Merci beaucoup. Bonjour, honorables députés. Je suis heureux de pouvoir m’adresser au Comité permanent des anciens combattants de la Chambre des communes.
    Comme on vient de vous le dire, je suis professeur agrégé au département d’anesthésie de l’Université McMaster et directeur associé de notre institut de recherche sur le cannabis.
    L’institut de recherche sur le cannabis ici est financé par des dons philanthropiques. Nous ne recevons aucun financement du secteur privé, et notre mission consiste à mieux comprendre les effets du cannabis en nous appuyant sur des données probantes, qu'il s'agisse de ses avantages thérapeutiques potentiels ou des torts qu'il est susceptible de causer.
    Les activités de notre centre comprennent, de façon générale, la synthèse et la diffusion des meilleures données probantes actuelles, la réalisation et le soutien de recherches novatrices dans les domaines où l'on manque de données probantes, et la création d’un réseau de recherche comprenant des professeurs de l’Université McMaster et des partenaires externes, dont le Dr David Pedlar, directeur scientifique de l’Institut canadien de recherche sur la santé des militaires et des vétérans.
    Mes recherches portent en particulier sur la médecine factuelle, la douleur chronique, la gestion de l’invalidité, les opioïdes et le cannabis.
    Nous rappelons que le service militaire comporte des risques pour la santé. Des sondages récents ont révélé que 41 % des militaires déclarent souffrir de douleurs chroniques et 23 %, de douleurs intermittentes. Les militaires présentent des taux plus élevés de troubles psychiatriques comme le TSPT et l’anxiété que le reste de la population, et ils sont plus susceptibles de commettre des tentatives de suicide et de se suicider.
    Quant à l'aide que le cannabis thérapeutique pourrait apporter à nos anciens combattants, nous disposons à l’heure actuelle de données de qualité moyenne selon lesquelles le cannabis peut réduire la douleur chronique, mais ses effets sont généralement modestes. Notre groupe, ici à l’Université McMaster, est en train de réviser et de mettre à jour cette synthèse de données. Nous prévoyons que notre travail sera terminé au premier semestre de 2019.
    Concernant les données dont nous disposons actuellement à l’appui d’un rôle thérapeutique et de la gestion des symptômes associés à l’anxiété ou au TSPT, nous avons des éléments anecdotiques, mais très peu de données probantes pour tirer des conclusions attestant un avantage ou réfutant son utilité.
    Nous avons quelques données d’observation selon lesquelles, dans les régions où le cannabis devient disponible à des fins médicales, les taux de suicide en général semblent diminuer. Nous avons également des données d’observation selon lesquelles les anciens combattants qui présentent un trouble lié à la consommation de cannabis sont plus susceptibles de commettre des tentatives de suicide. C’est une autre question qu'il faudrait approfondir avant de pouvoir tirer des conclusions fermes.
    Le cannabis a un certain nombre d’effets secondaires, par exemple des étourdissements, de la fatigue, une sensation d'euphorie, de la confusion et de la désorientation. Environ 7 % des consommateurs réguliers souffrent, au cours de leur vie, de troubles ou de dépendances liés à la consommation de cannabis, et les effets indésirables associés au cannabis sont principalement liés à un cannabinoïde, le THC. La plante du cannabis contient plus de 100 cannabinoïdes actifs, dont les plus étudiés sont le THC et le CBD. Le CDB peut avoir certaines propriétés thérapeutiques, mais il n’est pas psychoactif et ne crée pas de dépendance.
    Cela donne à penser que les produits de cannabis qui contiennent principalement du CDB peuvent être associés à beaucoup moins d’effets indésirables que la plante dans son ensemble. Malgré les preuves limitées des bienfaits et des torts connus et soupçonnés du cannabis, la perception générale semble être de plus en plus positive.
    Un sondage mené en 2017 auprès de plus de 16 000 membres de la population américaine a révélé que 81 % d’entre eux estimaient que le cannabis a des effets bénéfiques sur la santé; 9 % étaient d’avis qu’il n’y avait pas de risque et 22 % pensaient qu’il ne créait pas de dépendance. Ces perceptions ne concordent pas avec les données probantes actuelles.
    Nous savons également que l’autorisation de l'utiliser à des fins médicales est en augmentation au Canada. Selon le registre des patients de Santé Canada, environ 8 000 personnes ont été autorisées à utiliser du cannabis à des fins médicales en 2014, et à l’heure actuelle, le nombre approche le quart de million. L’expansion rapide de l’usage thérapeutique du cannabis renvoie au triomphe du marketing sur les preuves scientifiques. Je dirais qu’il y a peut-être des leçons utiles à tirer de l’expérience canadienne des opioïdes pour la douleur chronique.
(1635)
     À l’heure actuelle, plus de 7 000 anciens combattants ont été autorisés au Canada à recevoir du cannabis à des fins médicales, et la question de la posologie est litigieuse. Les données actuelles ne permettent pas de déterminer une posologie précise, et une dose de cannabis ne tient pas compte de la puissance du produit, particulièrement du pourcentage de THC qu'il peut contenir. De plus, le produit du cannabis peut être consommé par inhalation ou par ingestion, et la façon dont on le consomme influe à la fois sur le déclenchement et la durée des effets.
    En général, ACC rembourse actuellement un maximum de trois grammes par jour de cannabis thérapeutique et un maximum de 10 grammes, sur approbation, dans des cas exceptionnels. Ce ne sont pas des politiques extrêmement conservatrices par rapport à d’autres pays. Par exemple, Israël ne rembourse qu’un gramme et demi par jour, et les Pays-Bas, 0,68 gramme par jour. Selon les données de Santé Canada sur la quantité de cannabis que les personnes autorisées à l’utiliser à des fins médicales consomment actuellement, il s'agit en moyenne d’environ 0,75 gramme par jour. La probabilité qu’une personne consomme la quantité maximum permise, soit 10 grammes par jour, indique qu’elle est plus susceptible de développer une dépendance et, éventuellement, un trouble lié à la consommation de cannabis. Cela signifie que des symptômes de sevrage se produiraient si la dose diminuait rapidement ou si le produit n’était plus disponible. Il faut donc faire preuve de prudence et de compassion à l’égard des anciens combattants qui consomment actuellement du cannabis à des fins médicales, surtout s'ils consomment des quantités plus élevées.
    De quoi a-t-on besoin pour promouvoir l’autorisation du cannabis thérapeutique fondée sur des données probantes? Nous avons besoin d’essais contrôlés aléatoires pour établir l’efficacité du cannabis pour les indications prometteuses. Les données d’observation, qui sont celles dont nous disposons le plus, ne permettent pas d'établir de lien de causalité, et il faudrait que ces essais portent sur un nombre suffisant de patients pour que l'on puisse en tirer des conclusions fermes. Il faudrait suivre des personnes pendant une longue période, de six mois à un an, et envisager de mesurer à la fois les avantages et les inconvénients de la consommation de cannabis. Nous avons aussi besoin de plus de données d’observation concrètes. On pourrait inscrire les anciens combattants et les autres utilisateurs de cannabis thérapeutique dans des cohortes de recherche et en faire un suivi durable pour examiner l'évolution de la consommation, les effets sur leurs symptômes et le développement de caractéristiques rares et à long terme.
    Nous avons aussi besoin de lignes directrices pour aider les anciens combattants, les autres patients et les cliniciens à prendre des décisions fondées sur des données probantes concernant le cannabis thérapeutique. La douleur chronique en serait l'objet le plus utile. C’est là que nous avons actuellement le plus de données concernant l'usage du cannabis thérapeutique.
    Par ailleurs, les données probantes à elles seules ne suffisent pas pour prendre des décisions cliniques. En raison des avantages probablement modestes et des effets indésirables connus et soupçonnés, la décision de poursuivre un essai de cannabis thérapeutique n’est pas simple. Nous avons besoin d’une recherche sur les valeurs et les préférences afin de comprendre ce que les patients sont prêts à sacrifier, compte tenu à la fois des données attestant des avantages éventuellement modestes et des outils décisionnels de développement qui faciliteraient le processus décisionnel en matière de soins partagés.
    Sur une note positive, compte tenu de l'injection de ressources suffisantes, de la légalisation actuelle du cannabis et de l’intérêt pour la recherche, le Canada est en bonne position pour devenir un chef de file international de la recherche sur le cannabis thérapeutique, aussi bien pour les anciens combattants que pour l’ensemble de la population.
    En terminant, je tiens à vous remercier de m'avoir permis de témoigner devant le Comité.
(1640)
    Merci.
    Monsieur Zhang, vous avez 10 minutes.
     Bonjour mesdames et messieurs les membres du Comité et chers collègues. Je tiens à vous remercier sincèrement de m’avoir fait l’honneur de m'inviter aujourd’hui.
    Je m’appelle Yanbo Zhang. Je suis clinicien scientifique au département de psychiatrie du Collège de médecine de l’Université de la Saskatchewan. Comme psychiatre, je traite des patients qui ont des problèmes de santé mentale comme la dépression, l’anxiété et le TSPT. Comme chercheur, j’utilise des modèles animaux pour étudier les effets thérapeutiques et les mécanismes internes du cannabis et d’autres traitements ordinaires appliqués à des troubles psychiatriques et neurologiques comme la dépression, le TSPT, la sclérose en plaques et les traumatismes cérébraux.
    Je tiens à déclarer mes sources de financement et mes conflits d’intérêts potentiels. J’ai reçu des subventions de recherche de l’Université de la Saskatchewan et de la Saskatchewan Health Research Foundation. J’ai un contrat d’approvisionnement permanent avec une entreprise de cannabis pour ma recherche animale, mais l’entreprise n’influence pas la conception de mon expérience ni les résultats de la recherche. Je n’ai pas de soutien financier ni de subventions d’aucun secteur d'activité.
    Je suis également secrétaire-trésorier et directeur général de l’Association des psychiatres du Canada. C’est une organisation professionnelle nationale vouée aux psychiatres et aux stagiaires canadiens, mais ici, toutes les opinions exprimées sont les miennes, et je ne représente pas vraiment le point de vue de notre association.
    Les anciens combattants sont au moins deux fois plus susceptibles de souffrir de TSPT que la population canadienne en général. Les personnes atteintes d’un TSPT revivent un traumatisme sous la forme de flashbacks et de cauchemars, et elles souffrent de peur extrême, d’irritabilité, d’hyperexcitation et d’émotions négatives. Le TSPT non traité entraîne une déficience cognitive, physique et sociale grave et chronique.
    Les psychothérapies sont considérées comme les interventions primaires applicables au TSPT. La thérapie cognitivo-comportementale axée sur le traumatisme, dite TCC, est de loin la méthode la plus préconisée. La TCC vise à modifier les idées et les souvenirs dysfonctionnels des patients, puis à réduire ou à diminuer leur réaction et leur mode d'évitement à l’égard du souvenir traumatisant. Cependant, en raison de la stigmatisation, de l’accès aux services, du coût et du temps nécessaire, peu de patients suivent une psychothérapie. La plupart des patients atteints de TSPT prennent aussi des médicaments comme des antidépresseurs, des antipsychotiques et des stabilisants de l’humeur, mais il est rare qu'ils les prennent durablement en raison de leurs effets secondaires ou de l'absence de bienfaits visibles.
    Dans l’ensemble, le traitement du TSPT et les résultats obtenus ne sont pas prometteurs. Des études indiquent également que le TSPT découlant d'une expérience militaire est plus réfractaire aux traitements actuels, ce qui est probablement dû à une forte comorbidité liée à des lésions cérébrales, des douleurs chroniques, des dépendances et d’autres facteurs concurrents. Le cannabis thérapeutique a été autorisé pour le traitement du TSPT dans quelques pays comme Israël, la Hollande et le Canada.
    De plus en plus d’études précliniques donnent à penser que le système endocannabinoïde joue un rôle essentiel dans le TSPT et que le cannabis pourrait jouer un rôle dans le traitement de ce syndrome, mais les données cliniques demeurent incohérentes. La plupart des essais comportent des limites, comme la petite taille de l’échantillon ou l’utilisation de participants en bonne santé pour faire ressortir les symptômes d’anxiété plutôt qu’un patient atteint de TSPT. Ils utilisent aussi un produit de cannabis synthétisé plutôt que toute la plante. Par ailleurs, la gamme posologique thérapeutique et la proportion des différents composés et leurs effets ne sont pas connus.
    Les examens systématiques, qui sont les éléments les plus solides normalement utilisés pour orienter le traitement, ne permettent pas de confirmer des effets ou des avantages thérapeutiques certains au sujet du traitement du TSPT par le cannabis.
(1645)
    Ayant peu d’information, les médecins, les pharmaciens et les patients ne peuvent pas prendre une décision éclairée, parce qu’il n’y a pas d’essais contrôlés aléatoires de grande qualité sur toute la planète du cannabis, qui est le principal produit distribué. Il nous est très difficile de déterminer s’il convient de l’utiliser ou non et d'en définir les avantages.
    De plus, il existe des preuves systématiques que la consommation fréquente et importante de cannabis à forte teneur en THC fait augmenter le risque de déficience cognitive, de psychose et de dépendance, surtout chez les adolescents et les jeunes adultes, mais aussi chez les personnes qui ont des problèmes de santé mentale préexistants. Compte tenu de la forte comorbidité de la dépression, des traumatismes cérébraux et de la toxicomanie chez les anciens combattants souffrant de TSPT, les avantages éventuels du cannabis risquent d'être réduits par le risque accru de déficience cognitive et de dépendance.
    Nous, psychiatres, sommes formés pour pratiquer une médecine fondée sur des données probantes, et nous sommes donc tenus d'examiner les données scientifiques et de faire la part des choses entre les risques et les avantages avant de proposer un traitement. C'est ainsi que beaucoup de psychiatres, dont moi-même, hésitent vraiment à autoriser le cannabis pour traiter des troubles psychiatriques, parce que nous ne connaissons pas les effets à long terme et que nous ne savons pas si les avantages l’emporteront sur les risques.
    D’un autre côté, il est très difficile de traiter efficacement le TSPT. Nous devons envisager de nouvelles interventions susceptibles de profiter à nos patients. C’est pourquoi il est essentiel de comprendre les effets thérapeutiques et les effets indésirables des produits du cannabis selon des posologies différentes et des teneurs différentes en THC et en CBD. Il faut absolument faire des recherches comparant l’efficacité de la consommation de cannabis et celle des traitements actuellement disponibles, comme les antidépresseurs et les psychothérapies, afin que nous puissions établir un profil des avantages par rapport aux risques. Nous devons aussi déterminer les effets à long terme de la consommation de cannabis sur les fonctions mentales, physiques et sociales du patient, ce qui fait largement défaut à ce stade.
    Troisièmement, nous savons qu’il y a une forte comorbidité de la douleur chronique, des lésions cérébrales et de la toxicomanie chez les patients qui souffrent de TSPT. Ces éléments ont des rapports bidirectionnels très compliqués. Des études supplémentaires sur les interactions nous aideront à comprendre les différents modes de prévention et de traitement possibles pour l’avenir.
    En attendant d'autres données probantes, il convient d'appliquer les recommandations sur la consommation de cannabis à faible risque formulées par les professionnels de la santé, comme l’utilisation d’une huile à forte teneur en CBD par opposition à la consommation par ingestion ou inhalation de produits à forte teneur en THC. Je crois que l’intégration sécuritaire du cannabis thérapeutique pourrait améliorer la qualité des soins dispensés au patient, mais il faut des études solides, à grande échelle, à l'aveugle et impartiales pour y arriver.
    Merci.
(1650)
    Monsieur Cohen.
    Bonjour, honorables membres du Comité. Il n’y a pas de mots pour dire à quel point je suis reconnaissant de pouvoir m'adresser à vous aujourd’hui.

[Français]

     J'aimerais vous parler de mes expériences comme soldat, vous informer des obstacles auxquels nous faisons face en tant qu'anciens combattants quand nous demandons des soins et discuter de la recherche que je fais avec le Dr Zhang.

[Traduction]

     Je tiens également à remercier chaleureusement le Dr Robert Laprairie, pharmacologue spécialisé dans le cannabis au Collège de pharmacie, qui nous a aidés à examiner la question, ainsi que Mme Kelly Malka, de Montréal, qui m’a aidé un peu dans la traduction du document et en a assuré l'exactitude.
    J’ai suivi un cours de 1 000 heures en soins primaires paramédicaux au Collège John Abbott, à Montréal. Puis, à l’âge de 19 ans, je me suis engagé volontairement dans les forces armées. J’ai servi dans un régiment d’infanterie légère en qualité d’infirmier de combat, puis, en 2013, au terme de mon contrat, j’ai décidé de partir et j’ai été libéré avec mention honorable.
    Je peux dire que je connais très bien le TSPT parce que, malheureusement, j’ai des amis dans l’armée et dans les SMU qui en ont été atteints de différentes façons. Deux de mes amis, un instructeur paramédical et un militaire, ont choisi de mettre définitivement fin au problème en se suicidant.
    Je peux aussi dire que la période de transition est extrêmement difficile à vivre. De nombreuses études ont montré que cette période peut être la plus instable de toutes et qu’elle donne souvent lieu à la consommation de substances.
    Dans mon cas, je suis passé du statut d'infirmier de combat, au niveau compagnie et au niveau peloton, hautement respecté et apprécié à celui d'individu qui a dû se heurter aux organismes de délivrance de licences pour pouvoir retourner au travail dans des délais raisonnables. Malheureusement, il est très courant d’entendre parler de tels cas. Cela, combiné au fait que les militaires sont libres de consommer de la drogue et de l’alcool en dehors de l’organisation militaire ou paramilitaire à laquelle ils appartiennent, et vous obtenez souvent une concoction mortelle qui mène au chômage, à l’itinérance, au suicide et à d’autres conséquences dévastatrices.
    Dans l’armée, la toxicomanie est un phénomène culturel très répandu. Les soldats, tous grades confondus, ont souvent recours à l’alcool pour s’automédicamenter, et parfois même pour faire le vide après un déploiement stressant ou une longue période de stress. Il n’est pas rare non plus que des soldats du rang se présentent avec une terrible gueule de bois à l'entraînement de 5 heures du matin.
    De plus, de nombreux soldats consomment des quantités dangereuses de produits comme des boissons énergisantes et des analgésiques, du type acétaminophène et ibuprofène, souvent combinés avec la cigarette, le tabac à chiquer et des boissons énergisantes.
    À mon époque, on consommait aussi un peu de cannabis de synthèse, le « Spice », un produit très riche en THC aux effets délétères. À l'époque, il était indétectable dans les urines. Je crois que c’est maintenant possible, mais je n'en suis pas certain.
    Cela dit, l'ancien combattant est souvent lui-même son pire ennemi. Il hésite à demander un traitement et éprouve des difficultés, à sa sortie de l'armée, à établir des liens avec d'autres pour différentes raisons. Le désir d’obtenir des résultats immédiats nuit à tout progrès.
    De nombreux anciens combattants qui souffrent d’épisodes aigus de TSPT se font souvent prescrire des médicaments très puissants comme l’halopéridol et la quétiapine, qui sont habituellement réservés aux patients psychiatriques graves. C’est un problème, car le TSPT est très difficile à diagnostiquer, surtout aux premiers stades, et il est souvent associé à des problèmes comme l’anxiété, l’insomnie, la douleur chronique, la perte auditive, les acouphènes et autres.
    Le stigmate voulant que seuls les faibles se font traiter, de même que le « cocktail zombie » — comme l'appellent de nombreux anciens combattants — prescrit par les médecins, sans compter le refus entêté de se faire traiter sont autant de facteurs susceptibles de précipiter patient et clinicien dans l'interminable cercle vicieux de la détresse.
    Le fait que le TSPT soit également associé à différents types de dépendance justifie souvent le fait que les médecins hésitent à prescrire des remèdes en dehors des lignes directrices recommandées, comme le cannabis.
    C’est à cette étape de ma vie que j’ai constaté que beaucoup de gens, surtout les vétérans, parlent sans agir, sans prendre l’initiative d'opter pour une autre solution. J’ai aussi constaté chez mes amis que les symptômes vont de très bénins à très graves. Par exemple, l'un d'eux a décidé de remettre d'un an le début de ses études de médecine et de prendre congé pour se calmer. À l’autre extrémité du spectre, quelques-uns ont eu besoin de traitements intensifs, de médicaments et même de séjours en hôpital pour traiter des problèmes d’insomnie et les cauchemars aux premiers stades du TSPT.
    J’ai entendu dire, de façon anecdotique, que le cannabis médical permettait d'alléger ce genre de problèmes. Cela remonte à ma sortie de l'armée. C’est à ce moment-là que la question du cannabidiol destiné à calmer les crises d'agressivité, le syndrome de Dravet, a vraiment attiré mon attention.
(1655)
    J’ai aussi communiqué avec un homme du nom de Boone Cutler, qui avait servi dans l’armée américaine. Après avoir eu un traumatisme crânien à cause d'un projectile de mortier l'ayant atteint directement, il s’était retrouvé dépendant de médicaments prescrits par les médecins de Walter Reed. Il est alors passé au cannabis CBD à haute teneur en THC, qu'il prenait au besoin, et il est devenu depuis un animateur de radio, auteur, chroniqueur, réalisateur de vidéo et défenseur de la cause des vétérans. Il a pris le serment de Spartan, qui consiste à inciter les anciens combattants à ne pas s'ôter la vie et à « se trouver une mission pour aider leurs camarades d'armes ».
    Cela m’a incité à appliquer l'art du commandement militaire et à prendre l’initiative d’étudier la question par moi-même. J’ai laissé s'écouler huit mois après ma libération avec mention honorable avant de revenir aux études. Même aujourd’hui, on n'aperçoit pas beaucoup d'anciens combattants dans les écoles. S'ils sont sous-représentés, c'est simplement parce qu’ils sont peu nombreux, un point c'est tout, ou alors qu'il n'y a pas de clubs de vétérans sur les campus. C'est donc très difficile de les atteindre.
    L'éducation fait grandement défaut à ce sujet. Même dans le programme de pharmacologie dans lequel j'étudie, il y a encore des professeurs qui ne savent pas que, grâce à de nouvelles technologies, il est possible d’isoler différents composés de la plante pour en faire de l’huile, et cela avec une précision de 0,01 à 0,25 milligramme par millilitre, selon le laboratoire. Beaucoup ne savent pas non plus que les entreprises enregistrées en tant que producteurs autorisés auprès de Santé Canada doivent habituellement respecter des lignes directrices très strictes. Les compagnies réputées, comme MedReleaf, Aurora, Canopy — je ne les appuie pas, je ne fais que les mentionner — sont non seulement normalisées BPF, mais ont aussi la certification ISO, qui est une forme de réglementation plus stricte. Les produits se déclinent de nombreuses façons autres que sous forme de feuilles séchées, comme les huiles, les produits comestibles, les solutions de vapotage et les crèmes.
    Toutefois, comme les deux médecins l’ont dit, de nombreuses études et opinions se contredisent. Il existe un gouffre non seulement entre les pays, mais aussi au sein d’une même province. Par exemple, l’AMC ne semble pas être favorable au cannabis pour traiter le TSPT. Cependant, le ministère israélien de la santé, lui, appuie le recours au cannabis médicinal après l’échec des options pharmacologiques traditionnelles ou quand la psychothérapie ne donne pas suffisamment de résultats dans les deux mois. En Israël, on recommande également de faibles doses de THC pour traiter les cas graves de TSPT.
    Bien que les patients puissent être autorisés à consommer du cannabis à des fins médicales et qu'ils semblent avoir une couverture d’assurance raisonnable, il est souvent très bureaucratique et déroutant de commencer le processus, à cause des nombreuses exigences différentes dans chaque province et à l'échelon fédéral.
    Je crois que nous avons besoin de plus de recherche sur les médicaments à base de cannabis afin de pouvoir démontrer leur efficacité éventuelle chez les personnes atteintes de TSPT. Il est aussi absolument nécessaire de mieux éduquer les professionnels de la santé ainsi que les professeurs qui enseignent ces matières afin que nous puissions faire la distinction entre les composés appropriés pour une utilisation récréative et les composés nocifs.
    Les lignes directrices actuelles limitent la consommation à trois grammes par jour, mais c’est suffisant pour six prises d'un demi-gramme de cannabis en 18 heures. Cela peut sembler beaucoup, mais bien des patients, surtout ceux qui sont allés en zone de combat, peuvent avoir des conditions plus graves et avoir besoin de plus grandes quantités, surtout s’ils ont développé une tolérance ou s’ils fument le cannabis, puisque, dans ce cas, la biodisponibilité maximale citée dans la littérature est alors de 56 %.
    À l’heure actuelle, des opioïdes puissants sont prescrits aux quatre heures environ aux patients souffrant de douleurs chroniques, conformément aux lignes directrices sur la gestion de la douleur. Étant donné que ces opioïdes sont extrêmement dangereux et que c’est aussi la force motrice derrière l’épidémie actuelle de fentanyl en Amérique du Nord, il me semble logique de permettre des doses peut-être plus élevées dans des conditions graves, surtout s’ils consomment du cannabis fumé.
    Il n'y a que peu, voire aucune donnée pharmacologique sur la relation dose-effet en fonction du poids corporel, du type d’administration et du type de composés. Des études sur des patients humains seront nécessaires pour permettre l’élucidation complète de la pharmacologie des cannabinoïdes. L’absence d’options de traitement sans effets secondaires graves et le fait de savoir que des produits du cannabis étaient utilisés avant la légalisation au Canada et aux États-Unis m’ont incité à étudier le cannabis en tant qu'agent thérapeutique potentiel du TSPT.
    Bien qu’il s’agisse d’un sujet controversé, des preuves anecdotiques indiquent que des vétérans consomment du cannabis pour atténuer les symptômes causés par la toxicité de la méfloquine. Je devais démontrer, et j'espère y être parvenu, que, même si le cannabis présente des risques, les avantages l’emportent.
    Durant mes études de premier cycle, j’ai optimisé un modèle de TSPT chez les animaux pour refléter les expositions et les conditions humaines. Les animaux sont exposés de jour et de nuit, puis ils sont quotidiennement changés de cage pour simuler un déploiement au combat ou un quart de travail de SMU avec des collègues différents à chaque fois. Ce modèle nous a permis de découvrir qu’une faible dose de cinq milligrammes par kilogramme d’huile de CBD peut vraiment réduire les symptômes de TSPT et qu'elle ne semble pas avoir de propriétés toxicomanogènes. Bien que les résultats soient prometteurs, il est encore trop tôt pour tirer des conclusions judicieuses applicables aux humains. Nous espérons explorer différents composés, doses et relations dose-effet chez des rats mâles et femelles avant de procéder à des essais cliniques randomisés de plus grande échelle, avec l’aide de la Légion, j’espère.
(1700)
     Ce sera à la fois la base et l’objectif de ma thèse de maîtrise. Nous pensons qu’une meilleure connaissance des subtilités et des mécanismes des systèmes endocannabinoïdes du corps humain nous permettra de mieux définir la dose optimale pour chaque souche et composé de la plante de cannabis. Pour prendre de meilleures décisions, il faut mener des études sur l’innocuité des troubles pédiatriques, comme les épilepsies associées au syndrome de Dravet, et établir des seuils de sécurité pour les effets cognitifs de la consommation de THC. Nous pensons que cela pourrait profiter autant aux cliniciens qu’aux patients.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Kitchen, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d’être ici aujourd’hui. Je vous suis très reconnaissant d’être venus nous renseigner sur cette question.
    J’ai eu l’occasion de rencontrer Jacob.
    Je crois, monsieur Busse, vous avoir déjà rencontré.
    J’ai assisté à la conférence de l’ICRSMV et j’ai été enthousiasmé par l’exposé de M. MacKillop à ce sujet. J’espère qu’il viendra ici une autre fois.
    Docteur Busse, j’ai vraiment aimé lire votre éditorial dans le Journal of Military, Veteran and Family Health, à titre de collaboration spéciale. C’est extrêmement instructif. J’encourage tout le monde à le lire. Vous avez notamment parlé du lien entre la légalisation du cannabis médical et la réduction des ordonnances pour des opioïdes, des antidépresseurs et des anxiolytiques. Je me demande si vous pourriez nous en dire davantage à ce sujet.
    Absolument. Merci.
    Cette information découle de données d’observation sur différents États américains. À l’heure actuelle, une trentaine d’États américains ont légalisé le cannabis thérapeutique et huit autres ont légalisé le cannabis récréatif. Il a été possible de faire des analyses chronologiques. Dans ces États, on a examiné le taux d’utilisation des différents médicaments d’ordonnance avant et après la légalisation du cannabis thérapeutique.
    Comme il s’agit d’une étude par observation, d’autres facteurs pourraient influencer l’utilisation des médicaments d’ordonnance, mais il a été démontré que, dans un certain nombre d’États, le taux d’utilisation des médicaments d’ordonnance et le taux d’achat de ces médicaments ont diminué dans le cas de médicaments habituellement utilisés pour traiter les douleurs chroniques, l’anxiété et la dépression. Cela ne nous donne pas suffisamment de preuves pour dire que le cannabis est efficace pour traiter ces maladies, mais c’est un constat intéressant et prometteur qui laisse entendre qu’il pourrait y avoir des bienfaits thérapeutiques et que, dans certains cas, les patients pourraient remplacer leurs médicaments par du cannabis médicinal et être suffisamment soulagés pour en rester à ce produit.
(1705)
    Merci, monsieur.
    Je vous félicite tous d’avoir parlé de la recherche et de sa valeur, surtout en ce qui concerne les avantages et les risques potentiels liés au cannabisme, non seulement pour nos vétérans, mais aussi pour d’autres personnes.
    Docteur Zhang, dans votre exposé, vous avez parlé de la fumée de cannabis séché et de sa faible biodisponibilité. Le Dr MacKillop, lui, a parlé un peu des problèmes liés aux cannabinoïdes synthétiques. Alors, je me demande, évidemment d’un point de vue éducatif, pourquoi cette différence entre les produits de synthèse et les produits séchés.
    Très bonne remarque.
    Au tout début, au moment de l’élaboration du produit de synthèse, on a tenté de séparer les composés utiles et de faire en sorte que les composés soient mieux ciblés en fonction de certaines situations. Cependant, d’autres données montrent que les substances de synthèse sont assorties d'un risque accru de psychose. Cela veut dire que le cannabis, en tant que plante, a des interactions compliquées entre tous ces différents composés. Jusqu’à présent, les éléments les plus importantes sont le THC et le CBD. Le produit de synthèse contient presque uniquement du THC sans équivalent de CBD; c’est pourquoi il y a un risque accru de voir apparaître tous les effets secondaires.
    Même d’après nos lignes directrices ou nos recommandations actuelles relatives à une consommation à faible risque, nous invitons les gens à utiliser le composé naturel qui contient à la fois du THC et du CBD plutôt que de consommer un composé de synthèse.
     D’après ce que je comprends, le produit destiné au grand public, à des fins récréatives, contient plus de THC, tandis que la marijuana médicinale contient plus de CBD, ce qui semble avoir un meilleur effet. C'est vrai ou pas?
    Les produits récréatifs sont très variés, et il est donc très difficile de faire des comparaisons. Cela dépend de leur force et de la préférence des clients, mais du point de vue du médecin que je suis, quand je sensibilise mes patients, je leur dis toujours: CBD, CBD, CBD.
    C’est le message que je communique, parce que, si vous voulez consommer du cannabis pour être euphorique ou pour un usage récréatif, vous devez avoir du THC. Autrement, vous n’aurez pas tous les avantages que vous voulez. Alors, pourquoi en prendre?
    Cependant, ce n'est probablement pas quand on en consomme qu'on songe aux effets secondaires et aux conséquences à long terme. C’est pourquoi j’essaie même de persuader les gouvernements locaux et les décideurs d’établir un plafond pour la composante THC. Nous savons que c’est nocif, alors pourquoi voulons-nous que les gens continuent à en consommer? Si nous pouvions trouver un moyen pour amener les gens à atteindre un équilibre entre la défonce et un sentiment de bien-être, de relaxation, sans trop de dommages, ce serait l'idéal.
    Merci, monsieur Kitchen. Votre temps est écoulé.
    Madame Ludwig.
    Merci de votre témoignage d’aujourd’hui.
    Je vais commencer par M. Cohen.
    Tout d’abord, merci pour vos états de service. Il est assez rare que quelqu'un ayant votre expérience et votre vécu aille faire une maîtrise en pharmacologie. Alors merci pour cela; c'est lourd de sens.
    Sans parler de recherche que vous menez professionnellement, votre programme d'étude fait-il partie du programme général de pharmacologie consistant à étudier les impacts et les effets indésirables, et même les interactions entre d’autres médicaments et le THC, le cannabis?
(1710)
    En un mot, non. Certains professeurs ont essayé. Ils ont produit des données valables, mais je peux en trouver beaucoup sur Google. Le problème, c’est qu’une grande partie de ces données sont désuètes.
    Par exemple, il y a quelques semaines, lors d'un exposé sur le nombre de composés présents dans la plante de cannabis, le conférencier a cité un chiffre de 2011, soit 60. Or, nous savons maintenant qu’il y en a plus de 100, et je crois que dans une étude publiée l’autre semaine, il y en aurait maintenant plus de 115. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de programme officiel et que l’information est souvent désuète.
    Merci.
    Mardi, nous avons reçu deux médecins. Tout d’abord, j’ai trouvé surprenant qu’ils soient au courant que le ministère des Anciens Combattants ne prescrit pas les médicaments, mais qu’il les rembourse. Nous savions tout cela. En ce qui concerne les spécialistes autorisés, comme les psychiatres et les professionnels de la santé, ils nous ont dit que les facultés de médecine donnent peu de formation au sujet de la prescription et de l’utilisation de la marijuana.
    Docteur Zhang, pourriez-vous également nous en parler? Avant de prescrire n’importe quel type de médicament — parce que je considère que c’est un médicament dans ce cas-ci —, on fait habituellement beaucoup de recherches sur ses effets possibles. Certaines personnes ont des conditions très compliquées. Elles peuvent prendre des médicaments et ne pas se rendre compte de l’effet combiné de la consommation d’alcool. Pourriez-vous nous en parler?
    C’est une question très importante. Je pense qu’en général, les politiques relatives à la consommation de marijuana — même dans le cas de la consommation récréative — devancent les constats scientifiques, non seulement au Canada, mais ailleurs dans le monde.
    De ce point de vue, la médecine, ainsi que la psychiatrie prise en tant que discipline médicale, sont très circonspectes. Pourquoi? Eh bien, parce que la vie des gens, leur fonctionnement et leur qualité de vie sont entre nos mains. C’est pourquoi une médecine fondée sur des données probantes est la meilleure que nous puissions rêver. Sans cela, il est très difficile de dire si nous faisons ce qu'il faut pour traiter les patients. Tous les médicaments ont des effets secondaires, mais, dans une certaine mesure, nous savons ce qui va se passer et comment prévenir ces effets, ce dont nous discutons en détail avec nos patients.
    Le cannabis est probablement le seul médicament à ne pas avoir été approuvé par Santé Canada. Il n’est pas approuvé, mais il est autorisé par les médecins. Nous sommes dans un dilemme, dans une situation cornélienne. Je sais que certains patients pourraient avoir besoin de cannabis, mais comment un médecin comme moi pourrait-il faire fi de la nécessité de ne causer aucun préjudice? Notre éthique fondamentale nous astreint à ne pas causer de tort. Avant de savoir si le cannabis cause un tort ou non, et de le prescrire... c’est pourquoi je ne le fais pas.
    De plus, nous n’avons pas reçu de formation. Avant, on nous disait que le cannabis était mauvais. Puis, soudain, c’est bon, mais nous ne savons pas jusqu'à quel point c’est bon. Voilà le dilemme.
    Monsieur Cohen, quelle est la meilleure façon de communiquer l’information à, disons, un ancien combattant qui consomme de la marijuana, peut-être même par automédication — parce que, comme l’a fait remarquer le Dr Zhang, il y a une différence de concentration du THC entre la marijuana thérapeutique et la marijuana récréative — afin de nous assurer que ceux qui en consomment disposent des meilleurs renseignements?
    Malheureusement, d’après ce que je vois, la diffusion de l’information se fait actuellement en grande partie par l’entremise des médias sociaux et de Facebook, mais cette information n’est pas nécessairement mauvaise. C’est surprenant... il y a des mises en garde, mais je pense néanmoins que la meilleure façon serait d’informer les gens des endroits où se procurer de la marijuana. Quelqu’un pourrait peut-être produire de la documentation à cet effet, à inclure éventuellement dans la trousse de sortie d’hôpital.
(1715)
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste 40 secondes.
    Docteur Busse, ce que vous suggérez me semble vraiment important. Comme le Dr Zhang et M. Cohen, vous vous reportez à la recherche et aux travaux que vous avez réalisés.
    À mesure que nous progressons, la recherche prend une importance cruciale, du fait qu’il est question ici de la santé des gens, domaine où aucun gouvernement n’intervient à la légère. Nous nous sommes penchés sur cette question en vue d’apporter un soutien, d’offrir aux gens les meilleurs soins possible.
    Si vous pouviez nous envoyer de l’information ou un mémoire sur ce que vous recommandez en matière de recherche, peut-être même dans une optique de coordination, cela nous serait très utile.
    Je serai heureux de le faire.
    L’une des raisons qui fait que nous nous trouvons dans cette situation bizarre, c’est que, en temps normal, avant qu’un produit soit disponible à des fins thérapeutiques, il doit faire l’objet de recherches rigoureuses et d’essais cliniques, et son profil de risque doit s’avérer acceptable.
    Le cannabis médicinal est arrivé sur la scène à la suite d’une série de contestations judiciaires. Il est désormais disponible, si bien que c’est après coup que nous devons chercher des preuves pour déterminer ce à quoi il peut servir ou ne pas servir. À bien des égards, on a mis la charrue devant les bœufs.
    Quant à ses interactions possibles avec d’autres médicaments, je pense que c’est une question cruciale. Il existe au Canada un réseau appelé le RIEM, Réseau sur l’innocuité et l’efficacité des médicaments, qui tire parti de l’utilisation de données à grande échelle, par l’entremise du Service intégré d'information scientifique, pour voir où il y a des interactions entre les médicaments. Nous en avons certainement beaucoup profité au moment d’établir la ligne directrice sur les opioïdes pour comprendre leur interaction avec les benzodiazépines et d’autres sédatifs, puis confirmer une contre-indication réelle. L’essai auquel M. Cohen a fait allusion au sujet du syndrome de Dravet a montré le risque d’interaction entre le CBD, à forte dose, et d’autres médicaments antiépileptiques.
    Il est encore tôt, mais nous devons nous pencher sérieusement sur la question.
    Madame Mathyssen, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup à tous ceux qui sont ici.
     Il est intéressant... [Difficultés techniques]... que nous connaissons ou auxquels nous avons été exposés collectivement, est anecdotique.
    En ce qui concerne la formation, j’aimerais revenir sur ce que Mme Wagantall a dit et sur ce que vous avez dit, docteur Zhang, au sujet du manque de formation.
    Comment surmonter ce problème? Le problème est reconnu, c’est clair. Comment pouvons-nous offrir cette formation clinique? Un effort a-t-il été fait en ce sens?
    Je pense que la plus grande difficulté, c’est que nous ne parlons pas d’une voix unique. L’information provenant de différentes parties, de différents instituts et groupes d’intérêt, peut procéder d’attitudes très différentes.
    Comme nous le savons, grâce à l’Association médicale canadienne, à l’Association des psychiatres du Canada et à toutes les provinces, nous avons produit de nombreux dépliants et documents d’information dans le but d’éduquer nos membres en nous fondant sur nos connaissances. Toutefois, cela n’aide pas vraiment le médecin qui prescrit de la marijuana. Pourquoi? Parce que, comme nous l’avons constaté dans nos campagnes d’éducation, la plupart des médecins ne la prescrivent pas vraiment... ou ne l’autorisent pas, et c’est à cause de leurs préoccupations au sujet des effets secondaires.
    Le message est donc transmis, mais pas vraiment de façon efficace.
    Merci.
    Pour revenir à l’anecdote, je travaille sur le cas d’un jeune homme qui a des tendances suicidaires. Au cours des cinq ou six dernières années, on lui a prescrit 29 différents cocktails de médicaments. Leur composition changeait fréquemment. Il souffrait d’anxiété, de dépression et de tout ce qui est lié au TSPT. Décrivant son expérience de la marijuana, il a dit qu’elle lui apportait, pour la première fois en deux ans, de bonnes nuits de sommeil. Sa famille a dit que c’est un cadeau du ciel.
    Comment concilier tout cela? Ce qui est prescrit doit être sûr, je le comprends. Nous ne voulons pas aggraver la condition de qui que ce soit. Mais quand la femme d’un ancien combattant me dit que son mariage est rompu parce que son mari souffre trop d’anxiété, qu’ils ne peuvent pas vivre ensemble et que la marijuana thérapeutique est la seule chose qui semble aider, comment pouvons-nous concilier tout cela?
(1720)
    Je pense que c’est le défi du métier de psychiatre. Pourquoi? Parce que, même si nous avons des preuves pour toutes sortes de choses, même pour les médicaments disponibles, ceux-ci ne fonctionnent pas nécessairement pour les patients individuels. C’est pourquoi nous suivons les lignes directrices établies par une majorité ou un groupe de psychiatres qui ont fait une recherche suffisamment approfondie sur ce sujet. Nous appliquons les traitements de première ligne et de deuxième ligne, parfois nous les modifions, nous ajoutons différents médicaments et, si cela ne fonctionne pas, qu’est-ce ce que nous faisons ensuite?
    Lorsque nous sommes confrontés à un cas de dépression ou de TSPT résistant au traitement, nous devons faire preuve d’innovation. Nous devons être audacieux. Dans de tels cas, après avoir tout essayé, je ne m’oppose pas à l’utilisation de l’huile de CBD ou de la marijuana si cela peut soulager la douleur ou le stress d’un patient. Cependant, je ne suis pas du tout en faveur de recourir à la marijuana comme premier traitement sans appliquer d’abord tous les autres traitements que nous connaissons, parce qu’elle est dangereuse. Cela ajoutera aux problèmes que nous essayons de traiter.
    Il y a toujours un équilibre. Il y a toujours une exception. J’en fais de même lorsque nous mettons à l’essai un médicament qui n’a jamais vraiment été utilisé. Cette approche doit être fondée sur une compréhension complète entre les patients et les médecins.
    Il est intéressant de constater qu’il y a eu beaucoup de discussions au sujet de l’utilisation de la marijuana thérapeutique. Elle existe depuis un certain temps, nous le savons. Pourquoi y a-t-il un tel écart entre, d’une part, la recherche actuelle et le suivi des effets thérapeutiques et, d’autre part, l’utilisation, déjà ancienne, de la marijuana thérapeutique par des anciens combattants et d’autres personnes? Est-ce que cela tient au fait que les gens se sont sentis stigmatisés en admettant qu’ils consommaient de la marijuana?
    Je pense que M. Busse peut probablement répondre à cette question également.
    Très brièvement, je pense que c’est parce que la marijuana n’a été légalisée que récemment. Dans le passé, la plupart des études provenaient de la FDA, qui a des lignes directrices très strictes. Toute la marijuana qu’elle utilise pour ses recherches provient d’une seule source, qui remonte probablement aux années 1960, pour ce qui est des souches ou du contenu. C’est pourquoi une grande partie de la recherche...
    Il est également très difficile d’obtenir des subventions pour la recherche sur la marijuana. La majorité s’y opposera. Si votre recherche porte sur les effets secondaires ou la toxicomanie, vous obtenez plus facilement des subventions. C’est pourquoi la recherche elle-même est biaisée.
    Monsieur Bratina, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons un excellent groupe de témoins. Je suis désolé que nous manquions de temps parce que vous nous apportez tous des témoignages de grande qualité.
    J’ai fait une petite recherche sur les antécédents de nos témoins et j’ai constaté que vous avez tous d’excellentes qualifications.
    Docteur Zhang, vous avez étudié la médecine en Chine. J’étais à Qingdao avec une délégation médicale…
    Wow!
    … et j’ai vu comment les remèdes traditionnels et à base d’herbes médicinales sont intégrés dans la pratique générale. Le cannabis existe dans l’expérience chinoise. Pouvons-nous en tirer certaines conclusions?
    Je ne crois pas. C’est parce que le cannabis d’autrefois était totalement différent. Comme je viens de le mentionner, dans les années 1960, le cannabis était différent. Les hippies qui en ont consommé ne pourraient pas nécessairement faire la même chose ici. De plus, depuis le changement du régime chinois il y a 50 ou 60 ans, tous les stupéfiants sont strictement interdits. Les sanctions pénales sont très lourdes, et c’est pourquoi il n’y a presque aucune recherche et aucune exposition à la marijuana. Il est très difficile d’en obtenir.
    Deuxièmement, même dans la médecine chinoise traditionnelle, les normes sont différentes de celles de la médecine occidentale. Je ne crois pas non plus qu’on pratique en Chine une médecine avancée.
    Je vois.
    Docteur Busse, le témoignage de M. Cohen va quelque peu à l’encontre de ce que vous disiez. Je le dis en tout respect, puisque je trouve que cet échange est des plus fructueux. M. Cohen a raconté l’histoire de Boone Cutler, que vous avez entendue. Comment un pur chercheur évaluerait-il ce genre de preuve? Qu’en feriez-vous? De toute évidence, l’effet est assez puissant pour que M. Cutler ait pu progresser comme il l’a fait.
    Quelle est votre réaction à ce genre d’histoire?
(1725)
    Je pense que nous devons écouter ce genre d’anecdotes, puisqu’elles sont une forme de preuve. Lorsqu’une personne tout à fait non fonctionnelle montre une amélioration spectaculaire et que, à la suite d’un traitement particulier, elle reprend son emploi, devient fonctionnelle et fait voir une régression spectaculaire de ses symptômes, son cas constitue un élément d’information très important, à partir duquel il faut travailler.
    En tant que chercheur, si je devais mener un test sur un individu, j’effectuerais ce qu’on appelle un essai avec un seul sujet, qui est en fait un essai contrôlé randomisé au niveau de l’individu. Je randomisais l’administration de cannabis actif et d’un placebo dans un ordre aléatoire, puis je vérifiais si la régression des symptômes correspondait à ce qui était administré au sujet. Il y a une façon de faire des études au niveau individuel. Je suis d’accord avec le Dr Zhang pour dire que beaucoup des études que nous avons portent sur les effets moyens. Même si tel traitement ne fonctionne pas pour la moyenne des gens, il peut s’avérer bénéfique pour certaines personnes. Ce que nous voulons ensuite connaître, ce sont les caractéristiques qui distinguent les personnes plus susceptibles d’en bénéficier de celles qui sont plus susceptibles d’en ressentir un effet néfaste, ou même d’acquérir une dépendance, de façon à pouvoir prendre des décisions cliniques répondant mieux à ces caractéristiques.
    Monsieur Cohen, avez-vous des observations?
    Oui. J’aimerais ajouter quelque chose, bien que ce soit anecdotique, au sujet d’une autre question importante concernant la recherche. Par exemple, Raphael Mechoulam, qui a isolé de nombreux composés dans le plant de cannabis, a mené ses recherches illégalement pendant de nombreuses années, obtenant ses produits de cannabis de la police israélienne, avec qui il en était arrivé à quelque arrangement.
    Le plus gros problème, c’est que le cannabis et la recherche appropriée, ou un suivi réel, font défaut. C’est pourquoi nous en sommes là aujourd’hui. Nous n’avons rien d’autre que des preuves anecdotiques, bien qu’elles soient un point de départ plutôt faible pour la recherche.
    Il y a néanmoins ces histoires quasi miraculeuses de patients qui ont grandement bénéficié du cannabis.
    Ça va, merci.
    Nous avons le temps pour deux tours de deux minutes.
    Nous allons commencer avec M. Eyolfson.
    Merci, monsieur le président.
    Docteur Busse, j’aimerais vous poser une question dans le peu de temps dont je dispose.
    À titre d’information, je suis médecin. Lorsque j’étais en formation — il y a maintenant une vingtaine d’années —, le nabilone était l’un des médicaments figurant dans la liste de médicaments. Je suppose que vous êtes au courant. Il y figurait sous forme de pilule, une pilule de THC. Il était utilisé comme antiémétique et pour la douleur neuropathique.
    Y a-t-il eu des études à ce sujet? Voilà quelque chose qui existe depuis des décennies et qui figure dans la liste de médicaments. Y a-t-il eu des études à ce sujet, vu les indications que la marijuana est maintenant couramment prescrite à des fins médicales?
    Oui, il y a eu des recherches sur le nabilone, qui est un analogue du THC synthétique. Vous avez entendu le Dr Zhang mentionner plus tôt que c’est un agoniste puissant; il se lie donc très fortement aux récepteurs, ce en quoi il diffère de la forme naturelle de THC que l’on trouve dans la plante, qui est un agoniste faible.
    Nous avons des études cliniques du nabilone pour les indications que vous avez mentionnées. Il y a des preuves de qualité moyenne de son efficacité, et c’est pourquoi il a été approuvé. Ce qu’il faut déterminer maintenant, c’est si l’effet thérapeutique des analogues du THC synthétiques diffère de celui des composés qui se trouvent plutôt dans le cannabis naturel, qui est plus facilement disponible aujourd’hui.
    Connaissez-vous les tendances au sein de la communauté médicale?
    Je pratiquais la médecine d’urgence et je n’ai donc jamais eu à prescrire de cannabinoïdes.
    Êtes-vous au courant de pratiques de prescription du nabilone dans la communauté médicale, ou est-ce un médicament dont l’utilisation est plus ou moins restreinte au milieu hospitalier?
    Il est probable que son l’utilisation soit limitée au milieu hospitalier, contre les nausées et les vomissements associés à la chimiothérapie.
    Il y a beaucoup plus d’autorisations du cannabis à des fins médicales. Nous le constatons au nombre croissant de cas répertoriés par Santé Canada.
    Je répète que quelques médecins sont de plus en plus actifs dans ce domaine également.
    Monsieur McColeman, vous avez deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    D’après nos notes d’information sur les anciens combattants — et j’aimerais savoir ce que vous en pensez —, les données les plus récentes du ministère révèlent que 31 millions de dollars ont été dépensés à titre de remboursement du cannabis des anciens combattants durant la première moitié de 2016-2017. Selon ces mêmes données, nous avons dépensé 63,7 millions de dollars pour la marijuana thérapeutique en 2016-2017, soit le triple de l’année précédente.
    S’il y a une telle augmentation de la consommation de marijuana thérapeutique chez les anciens combattants... J’ai fait personnellement le même constat dans le milieu des personnes ayant des besoins spéciaux. Certaines d'entre elles sont atteintes du syndrome de Dravet, dont je n’ai malheureusement pas pu entendre le témoignage. Dans le groupe des gens atteints du syndrome de Dravet, entre autres, pour obtenir une ordonnance de marijuana thérapeutique — du moins dans mon coin du monde, c’est-à-dire en Ontario —, on peut le faire assez facilement en s’adressant à un médecin sur Skype. On n’a pas à rencontrer le médecin. Ça se fait par Skype. On les appelle les médecins du Skype. Vous les connaissez probablement.
    Pensez-vous que la compréhension qu’a le milieu médical de la consommation de marijuana thérapeutique soit devenue telle qu’elle puisse justifier cette croissance constatée chez les anciens combattants? Ce n’est pas à moi de juger si c’est nécessaire ou non. D’après ce que je peux voir de ces chiffres, la progression est vertigineuse.
(1730)
    Je ne peux que spéculer sur ce qui se passe.
    Je me demande si la légalisation de la marijuana récréative et le fléchissement de notre résistance à la consommation de marijuana ont influé sur l’opinion des médecins à cet égard. Puisqu’on peut l’acheter n’importe où et qu’il ne s’agit plus d’un médicament d’ordonnance, les gens en concluent que la marijuana est forcément sûre, ou plus sûre qu’auparavant. Je pense que le seuil que les médecins doivent respecter pour déterminer s’il y a lieu de la prescrire ou non tend à baisser. Cela peut probablement expliquer en partie ce qui se passe.
    Je ne pense pas qu’il y ait eu de preuve, depuis deux ans, qui justifierait de modifier cette attitude. Ce n’est qu’une hypothèse.
    Voilà qui met fin à notre réunion.
    Je tiens à vous remercier, mesdames et messieurs, au nom de toutes les personnes ici présentes, de vos témoignages et de tout ce que vous faites pour aider les hommes et les femmes qui ont servi sous les drapeaux.
    La séance est levée.
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