Je remercie le Comité de m'avoir invité à témoigner.
Ma dernière comparution a eu lieu dans le cadre d'une consultation sur la réforme électorale et le mode de scrutin. J'espère que cette fois-ci les travaux seront plus concluants.
En guise de première remarque, je dirais que la contribution à un parti demeure un exercice démocratique fondamental, voire un droit démocratique fondamental. Dans un système politique, donner de l'argent à un parti est une forme d'expression politique au même titre que le militantisme. C'est le premier élément qu'il faut garder à l'esprit. C'est aussi une façon de soutenir une cause, un courant politique et, de façon générale, de soutenir la démocratie.
La contribution à un parti politique est aussi un moyen pour les partis politiques et les élus de conserver un lien avec la société civile. C'est aussi une façon de dynamiser la base militante d'un parti politique ou d'avoir des objectifs à cet égard.
Il n'est donc pas banal de réfléchir à cela et de se questionner sur les modifications à la Loi électorale du Canada en matière de financement politique. J'ajouterais qu'il est fondamental de se questionner sur le rôle d'encadrement que l'État doit jouer en matière de financement politique. Mes commentaires et mon analyse du projet de loi vont dans ce sens.
Les règles de financement des partis sont à la base d'un régime démocratique. Nous devons être conscients que le projet de loi peut avoir des effets sur l'équilibre des forces politiques et sur l'entrée de nouveaux joueurs au sein d'un système partisan. C'est le cas lorsqu'on touche, de près ou de loin, aux règles de financement politique.
L'État a un rôle certain en matière de responsabilité quant à la transparence et à l'équité entre les électeurs. C'est le rôle que doit jouer l'État en matière d'encadrement des partis politiques et de leur financement.
Au fil des ans, le Canada a su mettre au point un modèle distinct de celui utilisé aux États-Unis. Au coeur de ce modèle, on trouve la primauté de l'électeur. C'est un principe fondamental de la Loi électorale du Canada depuis quelques années.
Si on analyse de façon plus détaillée le projet de loi , on constate qu'il respecte les principes de transparence et de primauté de l'électeur; il ne remet pas en question ces principes. Dans les faits, il va accroître la transparence, mais il ne réglera pas les problèmes structurels qui ont été soulevés dans le débat politique, dont ceux liés à l'équité et à la confiance, qu'il vise pourtant à régler.
De façon générale, quels objectifs le projet de loi vise-t-il? D'abord, il vise à lutter contre une certaine forme de cynisme, bien entendu en réaction à des critiques soulevées quant à l'accès aux élus en fonction de contributions politiques. Il vise à éviter que la contribution à un parti politique soit perçue comme un accès privilégié à un politicien et que seule une partie de la population plus fortunée ait cet accès.
En quoi le projet de loi répond-il à ces objectifs? D'abord, il faut se rappeler que, comme la plupart des projets de loi en matière de réglementation électorale, celui-ci découle d'une polémique médiatique. La création d'un registre des activités de financement géré par les partis qui découlera de ce projet de loi sera sans doute, à terme, géré par le directeur général des élections.
L'une des conséquences importantes de ce projet de loi dès son adoption est qu'il mènera à une logique de registre des lobbyistes. C'est un effet structurel qui doit être débattu et auquel il faut réfléchir. Autrement dit, le projet de loi va créer une dynamique qui s'apparente à un registre des lobbyistes.
Dans un système de financement démocratique, la provenance des dons, bien sûr, doit être publique. Le projet de loi va plus loin lorsqu'il demande de publier dans un registre, cinq jours à l'avance, les activités de financement et, par la suite, les participants. C'est une dynamique politique ou une dynamique de transparence qui s'apparente davantage à la divulgation préalable des activités d'influence qu'à des activités de militantisme.
Dans la même veine, le projet de loi pourrait avoir des effets pervers sur la dynamique politique. Dans un premier temps, un tel processus sera beaucoup plus difficile à gérer pour les plus petits partis que pour les partis fortement institutionnalisés, qui disposent d'une bureaucratie partisane bien établie pour gérer la reddition de comptes. C'est le premier élément.
De plus, le projet de loi va accroître les risques d'infraction, de pénalité et de blâme pour les partis politiques, compte tenu de la multiplicité de leurs activités de financement. Il risquera aussi de décourager certains militants de contribuer à des partis politiques. C'est du moins ma crainte. Cela vient confirmer la perception que c'est suspect de contribuer à un parti politique, alors que dans les faits, comme je le rappelais d'entrée de jeu, contribuer à un parti politique est un exercice démocratique et de militantisme. Même si, dans sa forme actuelle, le projet de loi prévoit des exclusions en période électorale, la dynamique politique risque de faire en sorte que ces exclusions seront remises en question.
Revenons aux objectifs du projet de loi. Si on veut réduire le cynisme et démontrer que la perception de l'accès aux élus en échange de contributions est erronée, je crois qu'il faut réfléchir davantage à l'abaissement des seuils de contribution. Il faut réduire les seuils de contribution annuelle à un parti politique. Il faut aussi réfléchir au rétablissement d'une forme d'allocation étatique.
Concernant l'autre aspect qui porte sur l'encadrement des courses à l'investiture et à la direction, le projet de loi donne suite à des recommandations du directeur général des élections de comptabiliser l'ensemble des dépenses. C'est lui qui est le mieux placé pour établir la terminologie juridique appropriée en vue d'atteindre ces objectifs.
En ce qui me concerne, le questionnement qui découle de l'analyse du projet de loi porte sur deux éléments. Pourquoi ne pas étendre ses dispositions à l'élection de tous les officiers nationaux d'un parti? On sait qu'il y a des campagnes à l'élection à la présidence et à différents postes d'exécutifs nationaux d'un parti, qui sont somme toute des postes prestigieux.
Pourquoi ne pas revoir aussi les dons anonymes? On sait que la loi canadienne est beaucoup plus tolérante que celle d'autres instances, notamment du Québec.
En conclusion, votre comité réalise un travail essentiel pour la démocratie. Lorsqu'on étudie les questions de financement des partis politiques, on fait plus qu'étudier un projet de loi. On étudie l'équilibre des forces politiques dans un Parlement, mais aussi dans la société civile. Modifier les règles de financement, c'est intervenir dans ce qui constitue le nerf de la guerre en politique, soit le financement.
Il importe d'évaluer les effets positifs tout comme les effets potentiellement négatifs des modifications. Je crains que le projet de loi ne transforme la perception de ce qu'est un don politique qui, à mon avis, doit être associé à du militantisme politique et non à un geste d'influence, en adaptant ou en intégrant une dynamique propre au registre des lobbyistes.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
:
Monsieur le président, merci de m'avoir invité à participer à votre examen du projet de loi .
[Traduction]
Ma présentation comportera deux volets. D'abord, je vais formuler quelques observations générales sur l'objet du projet de loi, qui visent notamment à situer les modifications dans le contexte de l'évolution de la réglementation du financement politique aux termes de la Loi électorale du Canada, puis je formulerai quelques commentaires sur certaines dispositions du projet de loi.
Le cadre de réglementation du Canada pour les élections et le financement politique est considéré, à juste titre, comme l'un des plus progressistes au monde. Il repose sur un certain nombre de principes, dont la transparence. Comme c'est le cas pour d'autres parties de la Loi électorale du Canada, les moyens de faire progresser les principes pertinents ont évolué au fil du temps. Les avancées se sont produites en réaction à un scandale, ou à tout le moins en réponse à des craintes quant au risque que des intérêts bien nantis exercent une influence indue sur le processus politique et législatif fédéral. Nous pouvons penser, par exemple, au scandale du Pacifique de 1872, de même qu'à l'affaire Rivard et à la polémique connexe quant à l'irrégularité du financement du parti sous le gouvernement Pearson, au milieu des années 1960.
En réponse au premier cas, le scandale du Pacifique, le Parlement a introduit une exigence au titre de la Loi des élections fédérales de 1874 selon laquelle les candidats étaient tenus de déclarer leurs réponses électorales. Toutefois, faute de sanctions ou d'organe d'application, la disposition est restée lettre morte.
En réponse aux polémiques des années 1960 et de la pression exercée sur les partis politiques en matière de financement des campagnes électorales, le gouvernement Pearson a constitué le Comité des dépenses électorales en 1964. On le désigne souvent comme la Commission Barbeau. Des portions importantes du rapport ont été mises en application dans la révolutionnaire Loi sur les dépenses d'élection de 1974.
Au fil du temps, deux choses se sont produites pour renforcer la transparence du financement politique à l'échelon fédéral. D'abord, les obligations en matière de production de rapports ont été étendues au-delà des partis et des candidats pour couvrir d'autres entités — associations de circonscription, candidats à la direction, candidats à l'investiture et tierces parties. J'ajouterais que cette expansion découle de certaines recommandations de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis. J'étais coordinateur principal de la recherche pour la Commission, alors je ne suis pas tout à fait impartial. Mais parfois, il faut beaucoup de temps avant que les travaux des commissions royales soient réellement mis en oeuvre, et le présent exemple en est un où il a fallu une dizaine d'années avant que les obligations étendues en matière de production de rapports recommandés dans le rapport Lortie entrent en vigueur.
Puis, certaines obligations instaurées dans les années 1970 sont devenues plus contraignantes. Par exemple, depuis 2004, les partis politiques doivent déclarer les contributions qu'ils reçoivent tous les trois mois, plutôt qu'une fois par année.
Le projet de loi s'inscrit tout à fait dans l'optique que je viens de décrire. Premièrement, s'il est adopté, il étendra les obligations de production de rapports, à quelques exceptions près, aux personnes qui assistent à la plupart des activités de financement parrainées par les partis représentés à la Chambre des communes, de même que par leur direction et par les candidats à l'investiture, pourvu qu'ils répondent à certains critères.
Le projet de loi répond à des préoccupations concernant l'influence potentielle de personnes qui assistent à des activités de financement, mais qui ne font pas de contribution politique. Bien entendu, l'identité des personnes qui versent des contributions est déclarée par l'entremise des exigences actuelles.
Certains s'inquiètent plus particulièrement de la présence de chefs d'entreprises non canadiennes à certaines activités de financement. Je n'ai pas besoin d'entrer dans les détails; vous savez de quoi je parle. Je partage cette inquiétude étant donné que les contributions étrangères aux entités politiques fédérales sont interdites, ce que presque tous les Canadiens appuient, j'en suis persuadé. Je m'inquiète de la présence de chefs d'entreprises étrangers et, en effet, des intérêts étrangers venant de différents secteurs qui se trouvent à être des chefs d'entreprises qui ont été mentionnés dans certains des commentaires au sujet des campagnes de financement.
Pour résumer, j'insisterais sur le fait que les exigences politiques en matière de production de rapports financiers visent non seulement à permettre au public, aux médias et à d'autres d'accéder en temps opportun à des renseignements pertinents, mais visent aussi un objectif plus vaste. Mon collègue y a fait référence également.
Le rapport Lortie comporte l'observation suivante: « La confiance du public dans l'intégrité du système électoral passe par la divulgation complète des dépenses et des dons électoraux. » La ministre des Institutions démocratiques a elle aussi fait ce lien lors de son discours en deuxième lecture le 8 juin 2017: « Les Canadiens ont le droit d'en savoir plus sur les activités de financement politique [...] de façon à maintenir [leur] confiance envers notre démocratie. »
J'ajouterais que ce que le projet de loi vise à faire, et ce que la Loi électorale du Canada fait déjà, doivent être situés dans un contexte plus large. Nous ne pouvons pas tout imputer à la Loi électorale du Canada. Nous avons des règles relatives à l'enregistrement des lobbyistes; nous avons un code d'éthique; et nous avons des agents du Parlement qui sont chargés d'appliquer les lois et les règlements d'application, et deux d'entre eux témoigneront devant vous aujourd'hui, y compris mon ancienne collègue Mary Dawson.
J'aimerais maintenant formuler trois brefs commentaires sur les dispositions du projet de loi . Avant tout, certains se demandent pourquoi les obligations de production de rapports devraient s'appliquer aux partis politiques qui ne forment pas le gouvernement. En guise de réponse, je dirais que, tout d'abord, il est tout à fait possible qu'un parti de l'opposition devienne le parti au pouvoir. Il s'agit d'un aspect fondamental de notre système, et cela arrive tout le temps. Entretemps, son chef et les députés qui en font partie participent au processus législatif. Il est donc légitime d'appliquer des règles semblables pour les activités de financement des partis de l'opposition. De plus, le système de réglementation du financement politique, tel qu'il a été établi en 1970 et modifié depuis, ne repose pas sur une distinction entre le parti au pouvoir et les autres partis politiques. Il énonce plutôt les conditions à respecter pour que les partis politiques, qu'ils représentent la Chambre ou non, soient reconnus, pourvu qu'ils respectent certains critères. Lorsque c'est fait, les mêmes obligations s'appliquent à tous les partis reconnus, que ce soit en matière de production de rapports, de dépenses ou de contribution. Que vous fassiez partie du gouvernement ou que vous siégiez du côté de l'opposition ou même que vous soyez à l'intérieur ou à l'extérieur de la Chambre, il n'y a aucune distinction, pourvu que vous soyez enregistrés.
Ensuite, le projet de loi prévoit que le parti ou l'autre entité doit publier sur son site Web de l'information sur une activité de financement au moins cinq jours avant la tenue de l'événement. Selon moi, cette période est trop courte. La planification de ces événements se fait des semaines, voire des mois, à l'avance. J'estime qu'il faut prolonger la période. Si des modifications doivent être apportées à l'annonce, par exemple, si on invite un ou une ministre, et qu'il ou elle ne peut pas venir à la dernière minute, il est possible de modifier le site Web. De fait, le projet de loi prévoit même les mises à jour.
Enfin, tout comme Jean-Pierre Kingsley, avec qui j'ai travaillé durant un peu plus de 10 ans, j'estime que l'amende de 1 000 $ en cas de non-respect est insuffisante. Le niveau de la sanction devrait envoyer un message clair: les nouvelles obligations doivent être prises au sérieux.
La deuxième partie du projet de loi porte sur les dépenses de campagnes à la direction et les dépenses de campagnes d'investiture. D'après ce que je comprends, ces modifications résultent d'une note d'interprétation publiée par le directeur général des élections en août 2015 et d'une recommandation contenue dans son rapport publié après les élections générales de 2015. Je n'ai pas de commentaire particulier à formuler sur cette partie du projet de loi. Je me contenterai de dire qu'il est important que le libellé reflète l'intention de la Loi.
[Français]
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions et à vos commentaires.
C'est d'abord une question de cohérence. Je vois le projet de loi comme une première étape. C'est clair, les gens demandent toujours davantage de transparence. Mon inquiétude, c'est que les médias ou la population en général va demander ce qu'on a à cacher en période électorale qu'on ne cache pas le reste du temps. On va se demander pourquoi il y a deux systèmes, un en campagne électorale et un autre le reste du temps. Inévitablement, on va demander aux élus pourquoi il y a deux régimes différents.
Bien sûr, on pourrait dire qu'en campagne électorale le rythme est plus effréné parce que plus d'activités ont lieu. Les rapports pourront être produits plus tard, il y a d'autres obligations. La pression sera forte sur les élus pour appliquer, dans un but de cohérence, la même disposition que celle prévue hors période électorale.
J'essaie de voir deux coups d'avance. Pour employer une image très québécoise, je pense que le projet de loi vous met la main dans le tordeur. Inévitablement, il va soulever des questions sur l'application des mêmes principes en campagne électorale. On se dirigera alors vers un registre comparable à un registre des lobbyistes, dont le principe est d'encadrer les relations d'influence.
Je vous parle aujourd'hui de militantisme et de préserver le lien de militantisme qui est associé à un don électoral.
Est-ce que cela répond à votre question?
:
Merci, monsieur le président.
J'aimerais vous remercier tous les deux de votre présence. Nous l'apprécions.
J'aimerais reprendre avec la période de cinq jours, puisque nous en avons beaucoup discuté, comme l'a dit M. Nater. L'un des points qu'a soulevés M. Kingsley et qui a capté immédiatement mon attention, car je pense qu'il permettrait de résoudre l'un de nos problèmes, c'était la question de la période de cinq jours pour l'avis concernant les présences. Je pense que c'est M. Nater qui a soulevé un problème éventuel selon lequel, soit dit entre nous, certaines personnes pourraient savoir à l'avance qui se présentera à la toute dernière minute, de sorte que l'intention du projet de loi serait contrecarrée.
J'aimerais connaître votre point de vue au sujet de la suggestion qu'a lancée M. Kingsley, soit que, si votre nom n'apparaît pas sur l'avis au moins cinq jours avant l'activité — soit dit en passant, c'est encore trop tôt, mais prenons cela comme exemple pour le moment —, vous ne pouvez pas vous présenter. J'aime l'idée, puisque cela permettrait d'éviter, sans tarder, tout type de connivence, et viendrait contrecarrer les projets de ceux qui se plaisent à recevoir quelqu'un, apparemment par surprise, alors qu'en réalité, ce n'est pas une surprise pour tout le monde.
J'aimerais entendre vos réflexions juste pour aller un peu plus loin et dire que si vous faites partie des personnes qui figurent sur une liste et que votre nom n'apparaît pas sur cette liste cinq jours avant l'événement, vous ne pouvez pas y aller.
:
La loi québécoise est récente. Elle a été adoptée en 2012.
Cela étant dit, à la Chaire que je codirige sur la démocratie et les institutions parlementaires, nous menons en ce moment une étude auprès des différents partis politiques sur l'incidence de la loi. Nous comparons le gouvernement fédéral à celui du Québec. Il y a deux éléments très contradictoires qui surgissent en même temps. D'abord, au niveau fédéral, on a aboli l'allocation aux partis politiques relativement au nombre de suffrages obtenus, alors que, au Québec, on est allé dans le sens inverse. Actuellement, le financement des partis politiques au Québec dépend donc à 80 % de fonds publics, de fonds étatiques. C'est l'inverse de ce qui existait avant la réforme de 2012. C''est un changement très important que nous voulons mesurer, soit l'effet de cette situation sur le militantisme.
Il s'agit d'une question d'équilibre. Le principe d'équité est au coeur des deux lois, tant fédérale que québécoise, ainsi que la primauté de l'électeur et la transparence. Ce sont des principes centraux. Au coût de 1 500 $, malgré le crédit d'impôt, peut-on considérer que tous nos concitoyens ont accès aux activités de financement? La question se pose. Ce ne sont pas tous nos citoyens qui peuvent se le permettre. Je crois qu'il faut trouver un équilibre.
Les résultats préliminaires de la recherche que nous menons au Québec montrent que 100 $ est quand même peu. Sans qu'il y ait des excès, il peut donc y avoir un équilibre. Toutefois, le critère fondamental est de savoir si un électeur moyen peut assister à un événement comme celui-là. Sinon, cela devient vraiment une question de « payer pour accéder » s'il est hors de prix pour la majorité des électeurs de participer à une activité.
:
Je vais en citer deux seulement. En quelques mots, deux pays ont beaucoup d'influence sur la culture politique canadienne.
Les États-Unis n'ont pratiquement pas de limites de dépenses sur quoi que ce soit. La seule limite de dépenses qui s'applique vise les candidats à la présidence qui acceptent de recevoir du financement public. Au cours des dernières campagnes, on a vu de plus en plus de candidats refuser le financement public; même les candidats démocrates ont refusé. Avec l'arrêt Citizens United rendu par la Cour suprême il y a cinq ou six ans, les limites de contribution sont encore plus basses qu'elles l'étaient, tout comme les limites en matière de production de rapports imposées par ce qu'on appelle les comités d'action politique.
Les États-Unis ne sont absolument pas — d'aucune manière — un point de référence valide pour le Canada dans ce domaine. Je suis indécis.
Au Royaume-Uni, depuis l'an 2000 seulement, il y a des limites quant aux dépenses des partis. Les candidats se sont vu imposer des limites en 1883. Mais il n'y a aucune limite de contribution, il y a donc encore des dons réguliers — et je n'exagère pas — pouvant atteindre jusqu'à un million de livres aux partis politiques, y compris le Parti travailliste. Il est intéressant de voir que, souvent, ces donneurs sont comme par magie des membres indépendants de la Chambre des lords ou que ce sont parfois des membres de partis de la Chambre des lords.
Par le passé, la Grande-Bretagne était en quelque sorte un point de référence puisque, quand la Commission Barbeau s'est penchée sur les limites de dépenses dans les années 1960, elle pouvait regarder du côté de la Grande-Bretagne où il y avait des limites imposées au candidat et un organisme... le concept d'agent officiel a commencé au Royaume-Uni en 1883. La Grande-Bretagne a évolué, mais il y a tout de même des secteurs où l'équité censée caractériser le régime de financement politique n'est pas présente.
:
Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître devant vous aujourd'hui dans le cadre de l'étude du Comité sur le projet de loi . Je suis accompagnée de Mme Martine Richard, avocate principale.
[Traduction]
Le projet de loi modifie Ia Loi électorale du Canada dans le but de créer un régime concernant la publicité et la production de rapports sur les activités de financement politique auxquelles assistent des ministres, des chefs de parti ou des candidats à la direction et pour lesquelles les frais de participation excèdent 200 $. L'objectif consiste à accroître la transparence quant aux personnes qui participent à de telles activités. J'appuie dans ses grandes lignes l'esprit de ce projet de loi. Je continue d'affirmer, comme je l'ai déjà fait, que la transparence est une considération importante dans tout régime qui touche aux conflits d'intérêts.
Le projet de loi ne modifie pas et ne vise pas directement les régimes qui relèvent de ma responsabilité, c'est-à-dire la Loi sur les conflits d'intérêts dans le cas des titulaires de charge publique et le Code régissant les conflits d'intérêts des députés. Il s'applique toutefois à certaines des personnes qui sont assujetties à ces régimes.
Les ministres, y compris le , sont des titulaires de charge publique principaux en vertu de la Loi sur les conflits d'intérêts. Les candidats à la direction et les chefs de parti qui sont des députés en fonction sont eux aussi assujettis à l'un de ces régimes qui encadrent les conflits d'intérêts, voire aux deux. J'applaudis la décision d'assujettir tous les chefs de parti et candidats à la direction, et non pas uniquement les ministres, au nouveau régime concernant la publicité et la production de rapports. Je note, toutefois, que le projet de loi ne s'applique pas aux secrétaires parlementaires, qui sont pourtant assujettis à la Loi sur les conflits d'intérêts en qualité de titulaires de charge publique principaux. Le Comité voudra peut-être se pencher sur cette omission.
Il semble que le grand intérêt des médias et du public pour les activités de financement payantes, celles qui donnent droit à un accès privilégié à des personnalités politiques en vue, organisées ces deux dernières années, soit à l'origine du projet de loi . Je parle ici des activités qui offrent a un nombre relativement restreint de participants, moyennant un prix d'entrée, la possibilité de rencontrer un ministre vedette ou un chef de parti. Le Commissariat a reçu beaucoup d'appels et plusieurs demandes d'enquête à propos de ces activités de financement. L'intérêt du public pour de telles activités impliquant des politiciens fédéraux est particulièrement élevé ces derniers temps. Ceci dit, certaines préoccupations au sujet des activités de financement politique ont également été soulevées beaucoup plus tôt dans mon mandat à titre de commissaire. En fait, la question du financement politique a été abordée dans trois de mes rapports d'enquête publics en vertu de la Loi, à savoir le rapport Raitt en mai 2010, le rapport Dykstra en septembre 2010 et le rapport Glover en novembre 2014. J'ai également soulevé la question dans mon mémoire au comité parlementaire chargé de l'examen quinquennal de la loi qui s'est conclu en 2014.
Dans la Loi sur les conflits d'intérêts, une seule disposition, l'article 16, traite directement de la participation à des activités de financement. Selon l'article 16 de la Loi, « il est interdit à tout titulaire de charge publique de solliciter personnellement des fonds d'une personne ou d'un organisme si l'exercice d'une telle activité plaçait le titulaire en situation de conflit d'intérêts ». Le Code régissant les conflits d'intérêts des députés de la Chambre des communes, pour sa part, est muet sur la question des activités de financement politique.
Cette disposition ne fait pas de distinction entre les activités de financement politique et caritatif. Pour qu'il y ait contravention à l'article 16, on doit être en présence de deux éléments. Premièrement, le titulaire de charge publique doit avoir sollicité personnellement des fonds auprès d'une personne ou d'un organisme ou avoir demandé à quelqu'un d'autre de le faire. Deuxièmement, il doit être établi que cette sollicitation plaçait le titulaire de charge publique en conflit d'intérêts.
Je dois mentionner également qu'une autre disposition de la Loi est liée au financement politique. Il s'agit de l'alinéa 11(2)a), qui prévoit une exception à la règle visant les cadeaux concernant ceux qui sont permis par la Loi électorale du Canada. Vous vous rappellerez que la règle visant les cadeaux interdit à tout titulaire de charge publique et à tout membre de sa famille d'accepter un cadeau ou un autre avantage qui pourrait raisonnablement donner à penser qu'il a été donné pour influencer le titulaire de charge publique dans l'exercice de ses fonctions officielles.
Des contraventions à d'autres dispositions de la Loi qui ne portent pas spécifiquement sur les activités de financement pourraient survenir, mais ultérieurement, lorsqu'une personne qui a fait une contribution financière cherche à faire pencher en sa faveur un ministre ou un membre de son personnel.
Ces dispositions n'auraient aucune application durant le déroulement de l'activité de financement ou au moment où est versée la contribution demandée. Par exemple, l'article 6 interdit à tout titulaire de charge publique de prendre une décision officielle ou de participer à la prise d'une telle décision s'il sait ou devait raisonnablement savoir que, en prenant cette décision, il se trouverait en situation de conflit d'intérêts.
Aux termes de l'article 7, la question est de savoir non pas à qui un titulaire de charge publique peut s'adresser lors d'une activité de financement, mais si cette personne reçoit par la suite un traitement de faveur. L'article 7 pose problème, toutefois, en raison de sa portée très limitée. Il interdit non pas toutes les formes de traitement de faveur, mais uniquement les traitements de faveur accordés en fonction de l'identité de la personne qui intervient. Je me suis toujours demandé pourquoi il n’interdisait pas simplement toutes les formes de traitement de faveur.
Les articles 8 et 9 interdisent aux titulaires de charge publique de favoriser ou de chercher à favoriser de façon irrégulière les intérêts personnels d'un donateur, soit en utilisant des renseignements d'initiés, soit en tentant d'influencer une décision.
J'ai recommandé à plusieurs reprises que l'on resserre la disposition de la Loi visant la sollicitation de fonds, par exemple en instaurant des règles plus rigoureuses pour les ministres et les secrétaires parlementaires. Je suis même allée jusqu'à dire dans mon rapport annuel de 2012-2013 que je serais disposée à appuyer l'interdiction absolue pour les ministres et les secrétaires parlementaires de participer à des activités de financement si le gouvernement souhaitait aller aussi loin.
Dans le rapport Glover, j'ai recommandé que la loi soit modifiée de manière à inclure une contravention dans le cas de ministres ou de secrétaires parlementaires qui savaient ou auraient dû savoir que des fonds étaient sollicités par d'autres dans des circonstances qui les plaçaient en situation de conflit d'intérêts et qui n'ont pas pris les mesures appropriées. Je me suis aussi appuyée à plusieurs reprises sur le document du sur la responsabilité gouvernementale, intitulé dans sa dernière version Pour un gouvernement ouvert et responsable. Certains des énoncés qui s'y trouvent pourraient être intégrés à la loi.
J'ai aussi suggéré que la Chambre des communes envisage de mettre en place un code de conduite distinct quant aux activités politiques des députés et des membres de leur personnel, notamment en ce qui a trait aux activités de financement.
Étant consciente que le Comité n'est pas actuellement saisi de la modification des régimes dont j'ai la responsabilité, je mentionne ces recommandations uniquement pour faire une mise en contexte et pour souligner que je suis depuis longtemps favorable de façon générale à un resserrement des règles qui encadrent les activités de financement.
[Français]
Les modifications à la Loi électorale du Canada que propose le projet de loi favorisent la transparence en ce qui concerne les activités de financement.
À mon sens, il s'agit d'une mesure positive qui serait avantageuse pour notre processus électoral. Elle permettrait également d'appliquer avec plus d'efficacité la Loi sur les conflits d'intérêts. L'accès facilité aux noms et adresses des participants à ces activités de financement pourrait s'avérer utile au Commissariat si celui-ci doit enquêter sur une allégation selon laquelle un participant à une telle activité aurait obtenu un avantage de la part d'un ministre.
Cela met fin à ma déclaration d'ouverture. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
:
Monsieur le président et membres du comité, bonjour.
Je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour participer à votre étude du projet de loi , Loi modifiant la Loi électorale du Canada relativement au financement politique.
Je suis accompagnée de M. Bruce Bergen, avocat-conseil.
En ma qualité de commissaire au lobbying, mon rôle est de faire appliquer la Loi sur le lobbying, qui assure la transparence des activités de lobbying, et de mettre au point et d'appliquer le Code de déontologie des lobbyistes, qui définit les normes de comportement applicables aux lobbyistes. Ensemble, cette loi et ce code font en sorte que les Canadiens peuvent avoir confiance en l'intégrité des décisions prises par le gouvernement.
Le lobbying est une activité légitime.
[Traduction]
Je participe à l’élaboration des politiques publiques depuis de nombreuses années, et à ce titre, je sais que l'exposition à un éventail de points de vue est essentielle pour assurer l’élaboration de politiques efficace et une meilleure prise de décisions par les gouvernements. Toutefois, il est important que lorsque les lobbyistes communiquent avec les titulaires d'une charge publique, qu'ils le fassent de façon transparente et conforme à des normes éthiques élevées.
Mon mandat, tel que défini dans la loi, comporte trois volets: gérer le Registre des lobbyistes, qui contient et rend publics les renseignements déclarés par les lobbyistes; élaborer et mettre en oeuvre des programmes éducatifs pour sensibiliser le public aux exigences de la Loi sur le lobbying et du Code de déontologie des lobbyistes; assurer la conformité avec la Loi et le Code.
Le Code de déontologie des lobbyistes complète la Loi sur le lobbying au chapitre du renforcement de la confiance du public à l'égard du processus décisionnel du gouvernement.
Après un processus de consultation de deux ans, un nouveau Code de déontologie des lobbyistes est entré en vigueur en décembre 2015. Le nouveau code traite plus en détail de la problématique du conflit d'intérêts afin qu'il cadre avec la décision rendue par la Cour d'appel fédérale en 2009, qui incorporait le concept de conflits d'intérêts apparents. Ces nouvelles règles simplifiées permettent aux lobbyistes d'éviter de placer les titulaires d'une charge publique dans une situation de conflit d'intérêts réel ou apparent, en particulier lorsqu'ils entretiennent d'étroites relations avec les titulaires d'une charge publique, lorsqu'ils prennent part à des activités politiques et lorsqu'il est question d'offrir des cadeaux à des titulaires d'une charge publique.
[Français]
Compte tenu de l'étude que mène actuellement le Comité, j'aimerais aborder la règle 9 du Code qui porte sur les activités politiques.
Certaines activités politiques pourraient créer un sentiment d'obligation. Même si nous vivons dans un pays démocratique où les activités politiques et les activités de lobbying sont légitimes, les lobbyistes doivent veiller à ce qu'il n'existe aucun conflit d'intérêts réel ni apparent lorsque de telles activités se combinent.
[Traduction]
Le Code interdit expressément aux lobbyistes d'exercer des activités de lobbying auprès de députés et de ministres lorsqu'ils mènent des activités politiques qui pourraient vraisemblablement donner l'impression de créer un sentiment d'obligation. Parmi ces activités figurent l’organisation d'une campagne ou d'une activité de collecte de fonds, la rédaction de discours, la préparation de candidats à des débats et le travail effectué au sein du conseil d'administration d'une association de circonscription. La règle interdit d'exercer des activités de lobbying auprès de titulaires d'une charge publique qui travaillent dans le cabinet d'un ministre ou d'un député. Par contre, des activités politiques telles que verser des contributions en vertu de la Loi électorale du Canada, poser une affiche sur un terrain, agir à titre de membre d'une association de circonscription ou assister à des activités de collecte de fonds ne créent pas de sentiment d'obligation qui pourrait donner lieu à une apparence de conflit d'intérêts.
Lorsque le Code a été publié, j'ai diffusé une directive pour aider les lobbyistes à comprendre comment j'ai l'intention d'appliquer les règles relatives aux conflits d'intérêts. La directive encourage les lobbyistes à se poser la question suivante lorsqu'ils envisagent de se livrer à des activités politiques: « Est-ce qu'une personne raisonnable qui examine mes activités politiques aurait l’impression qu'un sentiment d'obligation a été créé chez tout titulaire d'une charge publique ou chez toute personne cherchant à obtenir un tel mandat? » Si la réponse est oui, toute activité de lobbying connexe risque de placer cette personne en situation de conflit d'intérêts et ne devrait donc pas être entreprise.
[Français]
Bref, bien que je ne réglemente pas les activités politiques, je crois que des lois comme la Loi sur le lobbying, la Loi électorale du Canada, la Loi sur les conflits d'intérêts et les codes qui existent à l'intention des lobbyistes et des députés contribuent à la confiance que peuvent avoir les Canadiens envers l'intégrité des décisions gouvernementales.
Monsieur le président, cela met fin à mon allocution. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions et à celles des membres du Comité.
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Environ 20 plaintes différentes ou dans ces eaux-là? D'accord. Cela nous donne une assez bonne idée.
Évidemment, la raison pour laquelle vous auriez reçu de si nombreuses plaintes, c'est que c'est quelque chose, à mon avis, qui est assez courant. Le s'est lui-même placé dans ces positions.
J'ai l'impression que, s'il avait suivi les dispositions qui figurent dans son propre document « Pour un gouvernement ouvert et responsable », nous ne serions probablement pas dans une position où nous verrions ces types de situations; vous n'auriez pas reçu le nombre de plaintes que vous avez reçues et, par conséquent, peut-être, pour ce qui est du projet de loi, qui est la façon des libéraux d'essayer de se sortir d'un mauvais pas, nous ne tiendrions même pas cette conversation aujourd'hui.
Je veux citer un extrait du document « Pour un gouvernement ouvert et responsable ». Il précise ce qui suit:
Les ministres et les secrétaires parlementaires doivent éviter tout conflit d’intérêts, toute apparence de conflit d’intérêts et toute situation pouvant donner lieu à un conflit d’intérêts.
Il indique également ce qui suit:
Les ministres et les secrétaires parlementaires doivent s’assurer que les activités de financement politique ou autres éléments liés au financement politique n’ont pas, ou ne semblent pas avoir, d’incidence sur l’exercice de leurs fonctions officielles ou sur l’accès de particuliers ou d’organismes au gouvernement.
Il ne doit y avoir aucun accès préférentiel au gouvernement, ou apparence d’accès préférentiel, accordé à des particuliers ou à des organismes en raison des contributions financières qu’ils auraient versées aux politiciens ou aux partis politiques.
Aucun particulier ou organisme ne doit être visé, ou sembler être visé, par une collecte partisane parce qu’ils traitent officiellement avec des ministres et des secrétaires parlementaires, ou avec leur personnel ou leur ministère.
Je ne crois pas que le projet de loi que nous avons devant nous fasse vraiment quelque chose pour empêcher ces types de collectes de fonds auxquelles il y a un accès privilégié en échange de dons, soit par le soit par les ministres du Cabinet, mais si le premier ministre et ses ministres avaient suivi le conseil de leur propre document « Pour un gouvernement ouvert et responsable », diriez-vous que nous ne serions probablement pas dans la position où nous devons déposer aujourd'hui ce projet de loi et que vous ne recevriez pas le nombre de plaintes que vous avez reçues? Diriez-vous que c'est une observation assez juste?
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Merci, monsieur le président.
Merci à vous deux de votre présence aujourd'hui. Je vous en suis reconnaissant.
En plus de tenir un débat au sujet des menus détails du projet de loi, on s'est demandé, durant ces audiences, si nous ne faisons que des retouches mineures au lieu de produire un changement réaliste et marqué. Des gens ont comparu et ont plaidé que nous ne traitions même pas du vrai problème. L'un des vrais problèmes sur lequel nous devrions nous pencher, c'est le seuil de contribution en tant que tel. Ce problème a été soulevé à un certain nombre d'occasions.
En tant que personne qui admire ce qu'a fait l'ancien premier ministre Chrétien pour ce qui est d'instituer le financement public des partis — ce qui, selon moi, en plus du fait de ne pas envoyer de troupes en Irak, a été sa meilleure décision en tant que premier ministre —, j'ai eu le cœur brisé, durant la dernière législature, quand nous avons vu cette mesure être complètement retirée. Je veux vous laisser formuler un commentaire et je vous demanderais de brosser un portrait du problème dans son ensemble. Toutefois, concernant la contribution de 1 550 $, fait-elle partie de notre problème ou pas, à votre avis? Il y a eu des personnes qui se sont présentées et ont affirmé que, ce que nous devrions être en train de faire, à l'échelon fédéral, ressemble davantage à ce qui se fait au Québec. La somme est d'environ 100 $, et il est ainsi plus facile pour tout le monde de payer, puis beaucoup de ces autres problèmes disparaissent. Voilà l'argument. D'autres personnes disent: « Non, une somme pouvant s'élever jusqu'à 1 550 $ pour une personne de la classe moyenne est raisonnable », puis nous devons établir tous ces freins et contrepoids.
Quelles sont vos réflexions au sujet de ces deux approches? La question n'arrête pas d'être soulevée dans le cadre de notre étude du projet de loi.
Merci.
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Les cinq jours — et, encore une fois, je m'adresse à M. Nater, qui a soulevé cette question — en soi ont soulevé deux ou trois problèmes. Le premier tient au fait que rien n'interdit à quiconque qui ne figure pas sur cette liste cinq jours auparavant de se présenter à l'improviste. Ce qu'on veut, c'est accroître la transparence, et l'une des préoccupations soulevées tenait au fait que, même si vous ne figurez pas sur la liste, vous pourriez tout de même vous présenter, et selon la rumeur, comme en fait foi le clin d'oeil de connivence, le sera présent et le fera une apparition, et vous voudrez vous assurer d'assister à l'événement.
Nous entrons dans les menus détails du projet de loi, et je l'accepterai si vous me dites que je vais trop loin et que je m'avance dans un domaine qui n'est pas le mien. Je comprends cela. Toutefois, c'est là que nous en sommes, et c'est le sujet que nous traitons.
Nous pouvons faire valoir que la période de cinq jours est trop longue, et cette question sera encore soulevée, mais, l'une des solutions qui ont été proposées, c'est que, si vous ne figurez pas sur cette liste cinq jours avant l'événement, vous ne pouvez tout simplement pas vous y rendre. Il a été mentionné qu'une personne pourrait tomber malade trois jours avant et qu'il serait logique que l'on puisse la remplacer.
Eh bien, laissez-moi vous dire que, dans le monde de la politique de puissance, il y a toute une différence — sans vouloir offenser qui que ce soit — entre le fait d'avoir prévu une rencontre avec le ministre de la Culture, qui est tombé malade, puis finir par rencontrer le , car lui, ô surprise, peut s'y rendre.
Quelles sont vos réflexions à ce sujet?
Vous avez affirmé que vous aviez songé à l'idée que le projet de loi s'applique à tous les secrétaires parlementaires, aux ministres et peut-être à tous les parlementaires, qui ne pourraient plus participer à ces types d'événements. J'ai entendu cela, mais, ensuite, vous avez ajouté: « Eh bien, je n'en suis pas certaine; c'est seulement quelque chose qui m'a traversé l'esprit. »
Je me rappelle le témoignage que nous avons entendu juste avant le vôtre. En raison de la façon dont nous fonctionnons dans notre démocratie — la façon dont elle est organisée, sur le plan pratique —, les partis ont besoin de recueillir des fonds. Ce n'est pas que les partis; c'est nous, en tant que députés. Quand on y pense, les secrétaires parlementaires et les ministres sont responsables de leur propre circonscription, pas seulement du portefeuille de leur cabinet politique. Ils sont responsables de leur propre circonscription, et ils doivent recueillir des fonds pour les associations de leur circonscription, simplement dans le but de devenir députés. On ne peut pas être membre du Cabinet si on n'est pas député, n'est-ce pas?
Si nous allons à cet échelon fondamental, j'ai l'impression qu'à un certain moment, nous tentons de régler des problèmes. Comme l'a affirmé le témoin précédent, nous pourrions nous retrouver face à des conséquences perverses, si nous poussons le projet de loi trop loin. Comment ces personnes sont-elles censées faire leur devoir civique, assumer le rôle de chef d'une campagne et la diriger, si elles sont ministres, mais qu'elles ne peuvent pas recueillir de fonds dans leur propre circonscription, pour leur propre association de circonscription?
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J'aimerais pour commencer remercier le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre de m'avoir invité à vous présenter mes observations concernant le projet de loi , Loi modifiant la Loi électorale du Canada, portant sur le financement politique. Je suis content d'avoir l'occasion de vous présenter mes commentaires et mes conseils sur le processus électoral. Quand je formule des commentaires devant un comité de la Chambre des communes, je sais très bien qu'en fait, je m'adresse aux législateurs du Canada.
Aujourd'hui, j'aimerais parler brièvement des sujets suivants: premièrement, la création de règles du jeu équitables; deuxièmement, le système de financement électoral de l'Ontario; et troisièmement, les dispositions du projet de loi à l'étude.
Ma première observation concerne l'importance d'assurer des règles du jeu équitables. Tous les acteurs politiques ont besoin de ressources financières, et l'argent est un aspect essentiel, en politique. Les directeurs généraux des élections du Canada, ceux d'hier et ceux d'aujourd'hui, mentionnent le rôle particulier que jouent les partis dans le processus démocratique. Ils parlent aussi de la nécessité d'atteindre un juste équilibre pour créer une formule de financement qui permet aux partis d'exister, sans les enrichir injustement ou encore, à l'inverse, en faire les obligés d'une source de contribution quelconque.
La notion de règles du jeu équitables est essentielle, dans notre démocratie. C'est aussi un principe unificateur de l'administration des élections; cette notion relie le processus du scrutin et le processus de la campagne. Voici en quoi ces processus sont reliés. Le résultat d'une élection est censé refléter la volonté réelle du peuple. Les règles du financement politique sont censées faire en sorte que les parties ont des chances égales de recueillir et de dépenser de l'argent afin de faire connaître leur message et de gagner des votes. Le résultat d'une élection ne devrait pas être différent parce qu'un parti a eu plus de chances qu'un autre d'influencer l'électorat.
Les universitaires et les juges ont beaucoup écrit sur le sujet. En tant qu'administrateur électoral, je crois que cela se résume à une proposition fondamentale: toute personne qui entre dans l'arène électorale doit être traitée comme toute autre. Il convient alors de déterminer quelles règles rationnelles, nécessaires et pratiques il faut adopter. Autrement dit, nous devons réaliser l'équilibre entre la transparence et la participation, dans le processus électoral.
J'aimerais maintenant faire un survol du régime des finances électorales de l'Ontario.
L'an dernier, l'Ontario a modifié en profondeur son système électoral. On m'a demandé de servir de conseiller au Comité permanent des affaires gouvernementales, ce que j'ai fait. En tant que directeur général des élections, je suis un fonctionnaire indépendant de l'assemblée législative. Mon mandat consiste entre autres à contrôler les exigences en matière d'enregistrement et de rapports financiers que doivent respecter tous les partis et tous les candidats, non pas seulement ceux qui font partie de l'assemblée législative. Vous pourriez dire que je suis un arbitre et qu'à ce titre, je fais respecter les règles du jeu politique dans le cadre des élections provinciales. Je crois que mon rôle consiste à faire en sorte que les règles du jeu s'appliquent de la même manière à tous les compétiteurs.
L'Ontario a lancé un grand processus de consultation du public. Pendant que j'étais conseiller, j'ai eu l'occasion de parcourir la province et d'entendre des témoins parler des liens entre l'argent et la politique. J'ai moi-même comparu trois fois devant le Comité pour lui faire part de mes réflexions sur les dispositions du projet de loi.
Je me suis intéressé aux discussions touchant le projet de loi avant que le processus de consultation ne commence, et il m'est apparu évident qu'il y avait une ferme volonté de réformer le régime de financement des campagnes pour mettre fin à ce que l'on appelait « l'accès au comptant ». L'Ontario a apporté d'importants changements à ses limites de contribution.
La première mesure a consisté à interdire les dons des sociétés et des syndicats. Désormais seuls les particuliers qui résident en Ontario peuvent contribuer à des partis politiques, à des associations de circonscription ou à des campagnes de candidats, de candidats à la direction d'un parti et de candidats à l'investiture.
Le deuxième changement important touchait le montant maximal de la contribution annuelle d'un particulier à un parti politique. Avant les modifications, un particulier pouvait verser chaque année une contribution allant jusqu'à 9 975 $ et faire une contribution supplémentaire de 9 975 $ pendant une campagne. Cela veut dire que, les années où nous avons eu deux élections partielles, les particuliers ont pu verser à un parti une contribution qui a pu atteindre 29 925 $.
Selon le projet de loi actuel, la limite de contribution à un parti politique serait fixée à 1 200 $ par année; ce serait le même montant pour les contributions à une association de circonscription ou à la campagne d'un candidat à l'investiture, ainsi que pour les contributions à la campagne d'un candidat à la direction d'un parti, ce qui porte à 3 600 $ la limite des contributions annuelles totales. Aucun dépassement de cette limite annuelle ne serait permis, peu importe le nombre de campagnes.
J'aimerais maintenant vous parler des allocations annuelles.
Au début de ma déclaration préliminaire, j'ai souligné qu'il fallait atteindre un juste équilibre pour créer une formule de financement qui permet aux partis d'exister sans les enrichir injustement ou encore, à l'inverse, en faire les obligés d'une source de financement quelconque. C'est dans ce but que l'Ontario a proposé un système unique consistant à verser des allocations trimestrielles à l'appui des activités des partis politiques ou des associations de circonscription. Des formules de financement ont été élaborées pour qu'on puisse déterminer combien recevra chaque parti ou chaque association de circonscription.
Même si je crois sincèrement que le soutien financier de source privée ou publique est essentiel aux partis politiques, je ne suis pas partisan d'un modèle plutôt que d'un autre; je crois plutôt qu'une formule de financement qui tient compte de façon équilibrée des sources publiques et privées est un élément important de notre système démocratique.
Une autre modification importante concernait les activités de financement proprement dites. L'Ontario a adopté des exigences en matière de déclaration similaires à celles prévues dans les dispositions du projet de loi pour ce qui concerne les activités de financement. De plus, les partis sont tenus d'annoncer publiquement sur leur site Web, sept jours à l'avance, qu'ils tiendront une activité de financement.
La participation à des activités de financement, cependant, a fait l'objet d'importantes modifications, en Ontario. De nombreux acteurs politiques ne sont maintenant plus autorisés à assister aux activités de financement. Il s'agit des chefs d'un parti enregistré, des députés et des membres du personnel du bureau du chef de parti. Comme vous le voyez, l'Ontario a adopté une approche ferme au moment de modifier son régime de financement des élections.
Ce que j'aimerais vous soumettre, lorsque le Comité examinera et modifiera les dispositions touchant les lois sur le financement électoral, c'est le risque qu'il y ait des conséquences inattendues. Permettez-moi de vous donner un exemple.
Pendant que l'Ontario modifiait ses exigences en matière de financement, en empêchant les chefs de parti, les députés et les candidats à l'investiture de participer à des activités de financement, elle n'a pas prévu d'exceptions pour les événements comme les assemblées générales annuelles, les congrès d'orientation et d'autres activités du même ordre. Je crois que les nouvelles exigences en matière de financement visaient au départ à restreindre la participation à de grands dîners-bénéfice et à des activités du même genre. Toutefois, étant donné le libellé de la loi, les restrictions relatives à la participation ont eu je crois comme conséquence inattendue de s'appliquer à des réunions de parti, par exemple les assemblées générales annuelles, pour lesquelles les droits d'inscription des délégués comprennent une part de contribution. J'ai donc écrit aux trois chefs de parti pour leur recommander de modifier dès que possible la Loi sur le financement des élections afin d'y intégrer une exemption spécifique pour de tels événements.
Je ne crois pas que les dispositions sur la participation visaient à empêcher les chefs de parti et les députés de participer à des événements où les politiques et les programmes de leur parti font l'objet d'un débat et sont arrêtés. De manière générale, j'étais en faveur de la plupart des changements et je trouvais que l'ampleur des modifications était appropriée.
Je vais maintenant parler des dispositions du projet de loi . Quand je dois examiner les dispositions d'un projet de loi, celui-ci ou un autre touchant le système électoral, je me demande toujours si les changements visent à protéger l'intégrité du processus électoral, à en préserver le caractère équitable et à promouvoir la transparence.
J'ai examiné le projet de loi dans ses moindres détails, et j'ai fait les observations suivantes. Les dispositions du projet de loi ne sont pas aussi strictes que celles que prévoit le système actuel de financement des élections de l'Ontario. Pourtant, il compte de nombreux éléments positifs. Je crois sincèrement qu'il assurera une plus grande transparence, puisqu'il rend les activités de financement publiques et qu'il ajoute des exigences de déclaration au directeur général des élections.
Je suggérerais aux membres du Comité, lorsqu'ils délibéreront sur ces dispositions, d'appliquer le principe d'uniformité lorsqu'il s'agit de régir des acteurs politiques. La façon dont le projet de loi est rédigé laisse croire que de nombreuses dispositions en matière de financement s'appliquent uniquement aux chefs de parti, aux chefs intérimaires ou aux candidats à la direction d'un parti. Je crois qu'on a oublié de tenir compte, par exemple, des députés ou des membres importants du personnel politique, par exemple les chefs de cabinet, au moment de réglementer la présence à des activités de financement. Ils sont nombreux, dans ce groupe, à exercer une influence qu'il est important de reconnaître. M. Jean-Pierre Kingsley a soulevé cette question lorsqu'il est venu témoigner devant vous au sujet de ce projet de loi, et je partage ses justifications.
Votre comité va continuer à discuter de ce projet de loi et des modifications supplémentaires du mode de financement politique, et je vous rappelle encore une fois d'examiner de très près toutes les dispositions du projet de loi pour vous assurer qu'il n'y aura pas de conséquences inattendues.
J'aimerais profiter de l'occasion pour remercier le Comité de m'avoir invité à prendre la parole et à faire part de mon point de vue en tant que directeur général des élections de l'Ontario. Je vous félicite du travail que vous faites pour modifier le système électoral et je répondrais avec plaisir à vos questions.
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C'est intéressant. Mais, objectivement, sous le dernier régime, la plupart des partis politiques respectaient les limites que vous avez mentionnées, à l'exception d'un seul grand parti. Je ne vais pas le nommer, mais on raconte qu'en fait, il ne lui était même pas nécessaire de tenir des activités de financement, parce qu'il avait accès à tout ce dont il avait besoin, et je crois que nous entrons ici dans le domaine de ce qui constitue, selon ce que vous dites, un enrichissement indu. C'est ce que je voulais dire, avec ma première question.
Disons par exemple, aux fins de la discussion, qu'un parti donné tire avantage de la situation, pour une foule de raisons, même si pour tous les autres, en somme, les choses vont bien. Comment allez-vous vous y prendre pour mettre en place un système qui serait juste pour tout le monde alors que la dynamique de ce parti est telle que ce sera quasiment impossible? Est-ce que vous allez tolérer ça?
Si je pose la question, c'est que, à mon avis, on peut dire que le régime fédéral qui était en place était équitable pour la plupart des joueurs — il permettait d'arriver à l'équilibre dont vous parlez et il convenait à la plupart d'entre nous —, sauf pour celui-là. Vous ne pourrez jamais trouver un régime qui permet cela, de cette manière, tout simplement en raison de la dynamique de ce parti et de la façon dont il envisage le fédéralisme.
Avez-vous d'autres réflexions à nous soumettre? Est-ce que vous allez tolérer ça, sachant que 80 % des joueurs sont couverts et que, pour ce qui est des 20 % restants, nous allons devoir tolérer ça? Y a-t-il un facteur d'atténuation auquel je n'ai pas pensé? Pourrais-je savoir ce que vous en pensez, monsieur?