[Français]
Bonjour.
Je vous souhaite la bienvenue à la 147e réunion du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
Ce matin, nous poursuivons notre étude des chambres de débat parallèles. Nous sommes heureux d'accueillir le greffier de la Chambre des communes, M. Charles Robert, pour nous faire part de son expertise au sujet des chambres parallèles.
Monsieur le greffier, c'est un plaisir de vous recevoir.
[Traduction]
Avant de commencer, vous vous souviendrez peut-être qu’il y a environ un an, le greffier nous avait annoncé qu’il s’apprêtait à réorganiser le Règlement pour le rendre plus clair et plus accessible, sans le modifier pour autant, et qu’il nous ferait rapport ensuite. Le greffier sera disponible mardi, si le Comité souhaite l'accueillir pour faire le point sur l’état d’avancement de ce rapport et sur sa préparation en vue de la prochaine législature. Je pense qu'il sera prêt avant. Donc, si vous êtes d’accord, le greffier pourrait nous faire rapport à notre prochaine réunion.
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Merci, monsieur le président, et merci aux membres du Comité.
Je suis heureux de me joindre à vous aujourd’hui pour discuter de la question des chambres parallèles. Je crois savoir que le greffier de la Chambre des communes du Royaume-Uni, mon bon ami, sir David Natzler, retraité depuis peu comme vous le savez, s’est fait un plaisir lui aussi de venir vous parler de l’expérience britannique en matière de chambre parallèle, soit Westminster Hall.
Comme point de départ, je rappelle au Comité qu’une version révisée d’une note d’information, que nous avions initialement remise au Comité en 2016 lors de votre étude sur les initiatives visant à favoriser une Chambre des communes propice à la famille, vous a été envoyée il y a quelques semaines. Nous espérons que l’information qu’elle contient sera utile dans vos délibérations sur la possibilité de créer une chambre de débat parallèle.
[Français]
Ma présentation devant vous aujourd'hui se veut une discussion ouverte sur la possibilité de la création d'une seconde chambre de délibérations, parallèle à la Chambre des communes, et sur ses implications pour nos usages et nos procédures. En ce sens, j'aimerais formuler quelques commentaires sur les thèmes à l'étude par le Comité.
Les activités de la Chambre sont régies par des pratiques et des règles de procédure qui encadrent le fonctionnement de chaque séance, allant des ordres émanant du gouvernement aux affaires émanant des députés, et même les affaires courantes. Ces règles régissent aussi le calendrier de la Chambre, la tenue des votes et nombre d'autres travaux.
[Traduction]
L'évolution des usages à la Chambre a souvent été influencée par les besoins exprimés par les députés eux-mêmes. Les grandes réformes touchant à la procédure émanent donc bien souvent d’un consensus provenant des députés.
La création d’une seconde chambre pourrait offrir de nouvelles possibilités intéressantes aux députés. Je vous encourage à étudier des recommandations innovatrices et proposer des options qui, comme l’a si bien dit M. Natzler durant son témoignage, pourraient être nouvelles, surprenantes et différentes du fonctionnement de la Chambre.
Il vous revient donc à vous, membres du Comité, de décider de la portée à donner à votre étude ainsi que des recommandations à faire. Il reviendrait ensuite à la Chambre dans son ensemble de décider si elle veut aller de l’avant avec cette réforme.
Les expériences australienne et britannique sont des points de départ à une réflexion sur la façon dont notre propre Chambre des communes pourrait instituer une chambre parallèle. Certains aspects de leur fonctionnement pourraient être copiés et appliqués à notre situation. D’autres éléments ne pourront toutefois pas être si facilement transposés, puisque nos procédures et nos usages sont, à bien des égards, différents de ceux de nos homologues. C’est donc une bonne idée d’analyser comment d'autres chambres parallèles fonctionnent, tout en tenant compte toutefois de nos propres règles et de nos propres façons de faire.
[Français]
Si votre comité compte recommander la création d'une telle chambre parallèle, il devra déterminer son fonctionnement. Cela implique notamment de déterminer où cette chambre pourrait siéger, les limites imposées sur ce qu'elle pourrait faire et les décisions qu'elle pourrait prendre.
Particulièrement, plusieurs questions se posent. Sur le plan logistique, dans quel type d'endroit les députés voudraient-ils que cette nouvelle enceinte s'installe? Sous quel format physique les députés seraient-ils amenés à délibérer? Serait-ce selon le face-à-face actuel ou, encore, un hémicycle?
[Traduction]
Concernant les délibérations elles-mêmes, d’autres questions importantes pourraient intéresser le Comité. En voici quelques-unes. Comment les différents travaux, dont les projets de loi, les travaux des subsides et les affaires émanant des députés seraient gérés? La chambre parallèle serait-elle habilitée à prendre des décisions? Dans le même ordre d’idée, à combien serait fixé son quorum? Les députés pourraient-ils proposer des motions et des amendements lors de débats dans la chambre parallèle? Comment les deux chambres seraient-elles habilitées à communiquer entre elles afin de garantir une continuité dans les travaux en cours? Quelles règles de débat s’appliqueraient? Seraient-elles semblables à celles de la Chambre ou plutôt à celles des comités? Quelles seraient les heures de séance de la chambre parallèle? Qu’arriverait-il à la séance de la seconde chambre lors des sonneries d’appel et des votes prévus à la Chambre des communes? Ou encore lors du moment prévu pour les Questions orales et d’autres événements où la présence de tous les députés est attendue à la Chambre?
Voilà quelques-unes des questions d’ordre procédural auxquelles le Comité voudra répondre. Lors de vos délibérations, il est possible que ces considérations, et leurs réponses, soient porteuses de certaines conséquences complexes.
[Français]
Ainsi, si je peux me permettre, bien que j'encourage le Comité à poursuivre son étude et à en faire rapport à la Chambre, je suis tenté de vous recommander d'utiliser ce rapport comme tremplin et point de départ du débat sur la procédure prévu au début de la prochaine législature. Votre rapport pourrait ainsi servir de référence, et ses recommandations, de pistes de réflexion pour le débat tenu conformément à l'article 51 du Règlement.
Comme toujours, votre comité est maître de ses délibérations, et la décision sur les prochaines étapes lui revient entièrement. En ce sens, si votre comité — et la Chambre, par la suite — décide de créer une chambre parallèle, il va sans dire que ce sera avec plaisir que nous, tant l'Administration que mon équipe procédurale et moi-même, vous offrirons notre appui. Nous serons disposés à donner suite aux recommandations que vous pourriez formuler à cet égard et à mettre à votre disposition toutes les ressources nécessaires à la mise en œuvre de vos recommandations.
C'est avec plaisir que je répondrai maintenant à vos questions.
Je siège pour la première fois à ce comité. Je me suis toujours demandé de quoi les membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pouvaient bien débattre. Je n'en reviens pas d'entendre ce que vous dites. Nous pourrions peut-être charger un membre du Centre Samara de suivre un député pendant une journée. Il verrait que nous n'avons pas une seconde de libre pour accomplir un iota de travail de plus. Une chambre parallèle, je...
J'ai beaucoup de questions à poser à ce sujet. Ce que vous dites sur les projets de loi omnibus est très vrai, mais l'opposition ne cesse de demander qu'on les sépare, qu'on en débatte dans les comités permanents concernés, mais on n'accorde jamais ces demandes. Je préférerais cela au lieu d'être reléguée dans une horrible chambre que personne ne prendra au sérieux.
Nous avons bien des possibilités d'améliorer l'aspect démocratique du Parlement et d'inviter non seulement les élus, mais des membres du public, des scientifiques et des experts à venir témoigner afin que nous puissions entendre leurs opinions.
Bien des gens trouveront cette initiative passionnante, parce que nous pourrons enfin participer à des débats. Nous ne le faisons pas vraiment ici. Une personne parle, puis une autre occupe le micro, et une autre encore aura éventuellement le temps de faire une allocution. Alors ma grande question est la suivante. S'il y avait un mécanisme, pas nécessairement une autre chambre, mais si chaque année, nous réservions du temps pour organiser de vrais débats, ne pourrions-nous pas alors enfin nous entendre sur les enjeux d'actualité?
Disons par exemple que nous débattions réellement pour résoudre le problème de l'assurance-médicaments. Nous ne nous contenterions pas d'écouter des discours, mais nous animerions un débat intéressant, orienté peut-être par un groupe d'experts.
J'ai regardé un peu en quoi consistent ces deux autres chambres parallèles, et il me semble qu'on y procède exactement comme nous le faisons ici à la Chambre. Alors je me demande pourquoi il nous faudrait une chambre parallèle. Les gouvernements majoritaires me tracassent beaucoup. Comment éviterions-nous, dans cette deuxième chambre, que les députés du gouvernement majoritaire contrôlent entièrement les débats? Qui accordera plus de temps à certains intervenants pendant ces débats? Il faudra discuter de ces questions cruciales.
Quel est l'objectif de cette initiative? Vise-t-elle à offrir un temps de parole équitable à ceux qui n'ont pas l'occasion d'exprimer leurs opinions? À l'heure actuelle, de nombreux députés sont frustrés de ne pas pouvoir déposer leurs projets de loi d'initiative parlementaire à cause des mesures procédurales qu'impose le gouvernement au pouvoir.
Je voudrais savoir si vous avez discuté de ce genre de problèmes avec les deux autres gouvernements pour savoir s'ils ont réglé certaines de ces questions et comment, selon eux, cette seconde chambre les aide.
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En fait, j'avais une question à poser à ce sujet.
Je ne tiens pas à un nom particulier — je sais qu'on en a discuté vivement — ni à un endroit où créer cette chambre. Évidemment, à la longue, il faudra trouver un endroit convenable. En fait, ce choix se fera en fonction de l'évolution de la chambre. Nous ne pouvons pas choisir maintenant un endroit permanent, puisque la Chambre des communes ne siège pas dans une salle permanente. Je ne fais que penser à haute voix. Il en sera de même pour le choix du nom, qui évoluera avec le temps, il me semble.
Tout cela étant dit, voici la question qui me vient à l'esprit. Disons que, comme vous l'avez suggéré, nous discutions de cela dans le cadre de notre débat tenu conformément à l'article 51 du Règlement dans la période de 60 à 90 jours qui suivront le début de la 43e législature. Imaginons même que cette chambre soit créée pendant cette législature. Ce n'est pas garanti, mais c'est très possible. Ensuite, nous venons demander au greffier dans quelle salle il nous suggère d'installer cette chambre.
Quelle salle nous suggéreriez-vous?
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Je pense que les leaders à la Chambre et les whips sont des gens importants à inclure dans cette discussion sur les possibilités et les répercussions. Je sais qu’ils sont suffisamment occupés à s’assurer que les gens se présentent pour combler des postes aux comités, se présentent à un vote et se trouvent à la chambre pour appuyer les gens qui prennent la parole, et ainsi de suite. Il serait probablement bon de les entendre parler des complications que cela pourrait entraîner pour eux ou de la façon dont nous pourrions en tenir compte.
Je suis très préoccupée par toute proposition visant à dépenser davantage alors que nous avons déjà pris l'engagement, par exemple, de trouver les fonds nécessaires pour fournir des services d’interprétation aux Autochtones, et ce n’est pas ce que nous faisons. Par exemple, le comité dont je ressors a accepté pour la première fois de traduire son rapport dans quatre langues. Je pense que les coûts de ce genre de choses vont augmenter. Nous devons réfléchir aux engagements que nous avons déjà pris à la Chambre des communes et par l’entremise des comités avant de commencer à ajouter des dépenses pour ensuite faire marche arrière.
Il est très important d’examiner ce genre de facteurs. En ce qui concerne l’interprétation, il y a maintenant plus de complications. Je pense que l’établissement des coûts sera certainement un élément important que divers leaders demanderont probablement — ce sera certainement le cas du bureau du Président et ainsi de suite.
Qui décidera de l’ordre du jour et des débats? Des personnes différentes par rapport à l'heure actuelle, c’est-à-dire la majorité des membres de chaque comité? Différents comités fonctionnent de façon plus conviviale que d’autres. Cette chambre sera-t-elle différente, surtout si David dit qu’elle devra accorder une plus grande importance aux députés d’arrière-ban? Il y a beaucoup plus de députés d’arrière-ban, dans le gouvernement libéral majoritaire à l’heure actuelle, qu’il n’y en avait dans le gouvernement conservateur majoritaire précédent.
Ce genre de choses... Les députés seront plus enthousiastes s’ils pensent qu'ils auront en général davantage d’occasions de débattre.
Si j’ai bien compris, cette idée vient du Centre Samara. Ils ont rédigé un rapport sur les frustrations exprimées par d'ex-députés à l’égard de la démocratie et ainsi de suite. Il y a aussi le fait que le public veut entendre davantage ce que pensent les différents partis et les députés. Je n’ai vraiment entendu personne parler du rôle du grand public dans ce dossier.
Cette salle devra-t-elle accueillir des auditoires importants? C’est une autre question, car le public pourrait venir assister à nos débats à la Chambre. Ils voudront probablement participer à certains de ces débats, surtout s’ils les recommandent.
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Je crois que cela dépend vraiment de l'importance que vous, les parlementaires, y accordez. La chambre parallèle est conçue pour tenir compte — soyons plus audacieux — de la frustration que vous pouvez ressentir dans votre vie de parlementaire et de ce qui pourrait aider à valider et à relever les défis auxquels vous êtes confrontés comme parlementaires.
Si vous estimez que les pétitions sont importantes, qu’elles expriment un intérêt démocratique pour divers sujets, il serait utile de prévoir du temps dans une chambre parallèle pour débattre les pétitions qui atteignent un certain seuil de soutien.
Comme nous l’avons demandé plus tôt, comment gérer un débat sur un projet de loi complexe, comment tenir un débat parallèle qui donnerait aux députés une meilleure occasion de participer à ce qu’ils estiment être un projet de loi important lorsqu’ils ont un point de vue à exprimer — c’est aussi une façon pour la chambre parallèle d’aider à atténuer le sentiment de frustration que peuvent ressentir les députés.
Nous siégeons 100 ou 135 jours dans une bonne année. Nous siégeons à heures fixes. Il y a beaucoup de choses à faire en bien peu de temps. Si la loi devient de plus en plus complexe, comme cela semble être le cas, comment peut-on gérer cela?
Le gouvernement ne risque pas de rapetisser, ni de devenir plus simple. Il est peu probable que les mesures législatives soient aussi faciles qu’il y a quelques années, ou il y a de nombreuses années, lorsqu’un projet de loi de 10 pages était considéré comme un gros projet de loi. Au XIXe siècle, la plupart des lois étudiées par le Parlement étaient privées. Elles n'émanaient pas du gouvernement. Le gouvernement était trop petit pour se mêler d’un grand nombre de mesures législatives. C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles les séances étaient relativement courtes. Je crois que dans un cas, nous avons eu jusqu'à quatre sessions en un an, ce qui signifie quatre discours du Trône.
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J’aimerais parler d’une chose qui a été mentionnée plus tôt, la situation des whips. Je ne pense pas qu'il soit possible de travailler en vase clos et d'exclure les whips. À mon humble avis, je pense qu'il faut créer ici quelque chose qui permet de contourner les pièges dans lesquels un whip peut tomber, pour ainsi dire. Le whip doit donc s’assurer que les votes ont lieu, que les parlementaires se présentent aux votes, et que l'étude du projet de loi progresse. Je parle évidemment du whip et du leader du gouvernement à la Chambre.
Je ne pense pas que la chambre parallèle doive interférer de quelque façon que ce soit avec leur fonction. Si nous étudions les projets de loi d’initiative ministérielle du jour dans la chambre parallèle afin que d’autres personnes puissent prendre la parole, et si je n’ai pas la chance de m'exprimer dans l’édifice de l’Ouest ou à la Chambre des communes, j’aurai l’occasion de m'exprimer dans la chambre parallèle. Mais, encore une fois, cela dépendrait des délibérations à la Chambre des communes.
Je défends la cause des députés d’arrière-ban, mais je ne voudrais pas abolir les fonctions essentielles du whip ou du leader à la Chambre, pour des raisons évidentes.
Soit dit en passant, quelqu’un d’autre a parlé des votes, des marathons de vote et de ce genre de choses. Eh bien, c’est un aspect sur lequel nous devrons également nous pencher. C’est complètement différent. J’ai déjà raconté cette histoire et je vais la répéter. Trois ou quatre députés du Parlement européen sont venus assister à la période des questions. Après la période des questions, il y a eu un vote. Cette personne — j’oublie son nom, mais elle siège au Parlement européen depuis près de deux décennies — a dit: « C’était une expérience fascinante. J’aime votre période de questions, parce que les questions sont limitées à 35 secondes. » Je lui ai demandé pourquoi et elle m’a dit: « Eh bien, c’est passionnant. Vous débattez à l'heure du XXIe siècle, mais pourquoi votez-vous encore comme au XIXe siècle? » C’est vrai, en raison du vote électronique, mais c’est une tout autre question. Je voulais simplement ajouter cela.
Mais en ce qui concerne la chambre parallèle, qu’en est-il des témoins? L’un des avantages que nous avons ici avec les comités, y compris le Comité plénier, c’est que nous pouvons... À titre d’ex-président du Comité des pêches, je peux parler de l’expérience que vivent quotidiennement les pêcheurs, mais quand un témoin de Toogood Arm — cela existe, soit dit en passant; c’est le nom d'un village — arrive et dit: « Voici ce qui se passe dans l’océan en ce moment », c’est un énorme avantage. Les intéressés peuvent venir nous faire part de l’expérience la plus vitale, comme nous le verrons ensuite avec Samara. Ils savent de quoi ils parlent.
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Eh bien, fixez des objectifs qui, selon vous, sont structurés de manière à ce que votre imagination et ces objectifs s’harmonisent. Si vous pensez, par exemple, qu’il pourrait être utile d’avoir une sorte d’association avec le Sénat, alors c’est une option à envisager.
Pour ce qui est des affaires émanant des députés, disons que, dans la mesure où un projet de loi atteint une certaine étape, soit à la Chambre ou au Sénat, ce qui prouve qu’il a un certain niveau d'acceptabilité, il est possible, dans ces circonstances, au lieu de le renvoyer à l’étape de l’étude en comité, de le renvoyer au comité parallèle composé de membres des deux chambres, et cela pourrait servir à faire avancer l’étude de ce projet de loi à la deuxième chambre, quelle qu’elle soit, une fois qu’il a été adopté par la Chambre.
Ce compte rendu des délibérations pourrait, d’une façon ou d’une autre, être pris en compte lorsque les travaux avancent à la deuxième chambre pour fins de délibération. C'est une possibilité.
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Merci beaucoup de m’avoir invité.
Je m’appelle Mike Morden. Je suis directeur de recherche au Centre Samara pour la démocratie. À mes côtés se trouve M. Paul E.J. Thomas, associé de recherche principal.
Comme vous le savez peut-être, le Centre Samara est un organisme de bienfaisance indépendant et non partisan qui se consacre au renforcement de la démocratie canadienne au moyen de la recherche et de divers programmes. Nous tenons à remercier le Comité d’avoir entrepris cette étude. Cela témoigne de son engagement à l’égard de la gestion de notre Parlement et de notre démocratie. Cela comprend l’examen de questions qui ne sont pas à l’avant-plan politique, mais qui méritent d’être examinées parce qu’elles présentent un potentiel d’amélioration progressive de nos institutions. C’est un rôle auquel nous voulons également contribuer.
Le Centre Samara appuie la création d’une chambre de débat parallèle. Nous encourageons également le Comité à garder à l’esprit les objectifs suivants lorsqu’il conçoit une telle chambre, c’est-à-dire qu’elle présente une proposition de valeur claire en ne faisant pas que reproduire les travaux et les caractéristiques de la chambre principale; qu'elle habilite les députés d’arrière-ban en leur donnant un plus grand contrôle sur l'ordre du jour et la teneur des débats; ce faisant, elle rendra les débats parlementaires plus pertinents et plus accessibles au Canadien moyen; et elle pourra être utilisée comme plateforme d’expérimentation afin d’améliorer l’état des débats au Parlement dans son ensemble.
Comme les membres du Comité ont peut-être déjà pris connaissance du mémoire que nous avons présenté le mois dernier, nous aimerions gagner le plus de temps possible afin de pouvoir répondre aux questions du mieux que nous le pouvons. Je vais commencer par décrire brièvement notre intérêt pour cette proposition. Paul, qui est plus éclairé à ce sujet et, en fait, sur la plupart des sujets, parlera ensuite d'un modèle de chambre parallèle qui, selon nous, est le mieux placé pour améliorer la vie et le travail du Parlement canadien et pour renforcer ses liens avec les citoyens.
Depuis sa création, le Centre Samara a mené des entrevues de départ auprès d’ex-parlementaires après leur départ à la retraite ou leur défaite électorale. Un thème central qui ressort de ce travail est la forte impression qu’ont les députés qu’un contrôle étendu des partis sur de nombreuses facettes de la vie parlementaire nuit à leur capacité de débattre de façon indépendante les enjeux et d’exercer une influence significative sur les politiques et les lois du gouvernement. Nous avons toujours soutenu que de telles limites ont d’importantes répercussions sur la santé générale de notre démocratie représentative.
Lors de notre dernière série d’entrevues, qui a eu lieu après l’élection générale de 2015, nous avons également été surpris et troublés de découvrir à quel point les ex-députés étaient particulièrement critiques au sujet des débats parlementaires. Nous avons repris ce thème l’année dernière, lorsque nous avons collaboré avec le caucus multipartite pour la démocratie afin de sonder les députés actuels. Nous avons posé des questions aux députés pour déterminer s’ils se sentaient plus ou moins habilités à faire le travail de représentation démocratique. La constatation la plus importante pour nous a été que les débats constituaient l'aspect du travail parlementaire où les députés estimaient avoir le moins d’impact. En fait, les deux tiers des députés qui ont répondu étaient insatisfaits de l’état des débats à la Chambre. Seulement 6 % ont indiqué que les débats représentaient un aspect du travail parlementaire où ils se sentaient habilités à influer sur les politiques ou les lois.
Nous avons également observé, comme d’autres l’ont fait, une augmentation des conflits partisans au fil du temps au Parlement, ce qui se reflète le plus simplement dans la montée récente et soutenue du recours à l’attribution de temps. Ces conflits reflètent le désir légitime des députés de l’opposition — et, nous l’espérons, de tous les députés — de débattre et de délibérer sur les affaires du gouvernement tout en faisant avancer les dossiers de façon indépendante. Ils reflètent également le désir légitime des dirigeants de tous les partis de faire progresser les affaires du gouvernement. Cette tension ne se résoudra pas de façon organique et pourrait même empirer.
Enfin, conformément au point de vue des députés, nos sondages continus auprès des Canadiens moyens ont révélé à maintes reprises que les députés sont plus aptes à refléter le point de vue de leur parti que celui de leurs électeurs. Nous voulons que les points de vue des citoyens soient davantage reflétés dans les débats parlementaires.
Bref, nous voyons quatre problèmes qui se chevauchent et qu’une chambre parallèle pourrait contribuer à résoudre. Premièrement, il y a les députés privés de pouvoir qui, en raison du contrôle du parti, sont entravés dans leur capacité de représenter leurs électeurs; deuxièmement, le mécontentement persistant à l’égard de la qualité des débats parlementaires, même parmi les députés; troisièmement, un manque de temps parlementaire; et quatrièmement, un décalage persistant entre les Canadiens et leur Parlement.
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Je commencerai également par exprimer la gratitude du Centre Samara d’avoir été invité à témoigner devant le Comité aujourd’hui. M. Morden a déjà parlé de certains des défis que nous estimons devoir relever à la Chambre des communes. Je vais donc me concentrer sur la façon dont une chambre parallèle pourrait être conçue pour contribuer à relever ces défis.
Comme le vice-président l’a expliqué dans ses observations au Comité le mois dernier, il existe deux précédents de chambres parallèles qui pourraient servir d’inspiration, soit la Chambre de la fédération au Parlement australien et Westminster Hall au Parlement britannique. Il s’agit dans les deux cas de chambres supplémentaires, et ni l’une ni l’autre n’est utilisée pour les votes par appel nominal. Les deux ne se réunissent que les jours où les chambres principales siègent également.
La Chambre de la fédération australienne est utilisée pour diverses affaires parlementaires, comme les déclarations de circonscription, les déclarations de députés et les débats sur des mesures législatives non litigieuses. Plutôt que d’ajouter de nouvelles fonctions, il s’agit de ce que a appelé une « voie adjacente » pour les travaux de la Chambre, la plupart de ses fonctions se déroulant dans une certaine mesure dans la chambre parallèle. De plus, ce sont les whips des partis qui prennent les décisions concernant les travaux dirigés vers cette chambre.
En revanche, les délibérations à Westminster Hall sont distinctes de celles de la Chambre des communes du Royaume-Uni. Westminster Hall est utilisé exclusivement pour les débats de type ajournement, qui peuvent durer 30, 60 ou 90 minutes, selon la question à l’étude et le nombre de députés qui souhaitent prendre la parole. Les débats sont choisis au moyen de quatre mécanismes différents, qui sont tous dirigés par des députés d’arrière-ban, c’est-à-dire que les députés d’arrière-ban peuvent présenter une demande de débat au bureau du Président, qui tient un scrutin de candidatures une fois par semaine. Ils peuvent présenter une demande au comité des affaires des députés d’arrière-ban, qui est un comité de députés d’arrière-ban qui prévoit une partie du temps de débat à Westminster Hall et à la Chambre principale. Le comité de liaison, qui est composé des présidents des divers comités permanents, peut également planifier les débats sur les rapports des comités. Enfin, le comité des pétitions de la Chambre des communes peut programmer des débats sur les pétitions constituées de plus de 100 000 signatures.
Toutefois, comme sir David Natzler vous l’a fait remarquer, l’une des caractéristiques fondamentales des débats à Westminster Hall, c’est qu’un ministre doit assister aux séances et répondre aux points soulevés. Cette exigence permet aux débats d’avoir beaucoup plus d’importance que ne le permettent les déclarations de députés.
Fait important, il n’est pas nécessaire que de tels débats soient de nature explicitement critique envers le gouvernement. En effet, Westminster Hall est régulièrement utilisé pour des débats qui soulignent des journées symboliques, comme la Journée commémorative de l’Holocauste, la Journée mondiale du cancer ou la Journée internationale des droits de l’homme. De telles occasions permettent au Parlement de donner suite aux préoccupations des citoyens sans mettre l'accent sur une question précise à ce moment-là.
Même si la Chambre de la fédération a permis aux députés australiens de soulever les préoccupations de leurs électeurs et de participer aux débats législatifs, nous croyons que la création d’une nouvelle chambre parallèle semblable à Westminster Hall permettrait de mieux relever les défis auxquels fait face le Parlement canadien.
Même s'il n'est pas possible de reproduire exactement Westminster Hall dans le contexte canadien, le Centre Samara recommande néanmoins qu'une chambre parallèle canadienne soit conçue pour le bénéfice des députés d’arrière-ban, qui pourraient planifier leurs travaux indépendamment des whips des partis; que la participation à une chambre parallèle soit également libre de tout contrôle de la part des whips des partis, sans qu’aucune liste ne soit dressée pour prévoir les interventions des députés; qu’une bonne partie du temps de débat dans une telle chambre soit consacrée à des débats généraux comme ceux qui sont tenus à Westminster Hall, les ministres étant tenus d’y assister et de répondre aux points soulevés; que les sujets de ces débats puissent être choisis au moyen de demandes présentées par des députés, de rapports de comités parlementaires ou de pétitions provenant du grand public; et enfin, que la chambre soit un véhicule pour d’autres expériences procédurales.
À une époque où les citoyens comme les députés remettent en question la valeur des débats parlementaires, la création d’une chambre parallèle consacrée à faire entendre la diversité des Canadiens par l’entremise de leurs représentants élus pourrait contribuer à donner plus de pouvoir aux Canadiens et aux parlementaires eux-mêmes. Elle pourrait contribuer à rendre les députés d’arrière-ban plus au centre des débats parlementaires, et les débats parlementaires plus au centre de la vie politique au Canada.
Merci beaucoup. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.
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C’est tout un chiffre à prendre en considération. C’est donc tout le monde sauf les membres du Cabinet, n’est-ce pas?
Des voix: Oh, oh!
M. Scott Simms: Cela nous montre que nous sommes très en retard pour ce qui est de rendre cet endroit plus accessible, non seulement aux parlementaires, mais aussi aux Canadiens... C’est encore pire, la situation dans laquelle nous nous trouvons, pour essayer de trouver un endroit cohésif, et c'est pourquoi je suis heureux que vous soyez venu ici avec des suggestions concrètes, surtout lorsque vous dites que le modèle Westminster Hall est à privilégier. J’y arrive, parce que nous juxtaposons, en grande partie, Westminster Hall et la Chambre de la fédération, comme on l’appelle, je crois, en Australie.
À Westminster Hall, l’un des aspects les plus populaires d’une chambre parallèle est celui des pétitions. Les gens présentent une pétition qui attire beaucoup l’attention du public. C’est un aspect. Est-ce le genre de chose que vous considérez comme la meilleure voie possible pour une chambre parallèle?
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L’une des choses qui m’a frappé en examinant les observations de sir David Natzler au Comité, c’est qu’il a laissé entendre qu’environ huit des dix débats les plus suivis à Westminster Hall au cours des dernières années avaient été des débats provoqués par des pétitions. C’est vraiment étonnant. Cela ne concernait pas les affaires émanant du gouvernement.
J’ai trouvé cela vraiment encourageant. Cela m'enhardit aussi un peu, parce que cela me donne à penser que, dans ce contexte, il serait encore important pour les Canadiens de voir leurs questions débattues au Parlement et d'être témoins de la valeur d'un tel débat. Comme le greffier et d’autres l’ont expliqué, il y a différentes façons de concevoir la chambre parallèle, et nous avons besoin de précisions sur le problème que nous essayons de résoudre et sur les aspects — je pense que des gens raisonnables peuvent ne pas être d’accord — où il faut trouver un équilibre.
Au cours de la dernière session, Mme Duncan a soulevé la question de l’intervention du citoyen moyen. Nous voyons un mécanisme comme les pétitions, ainsi que la possibilité pour un simple député de s’adresser au bureau du Président ou à un comité des affaires des députés d’arrière-ban pour défendre une question qu’il juge importante pour ses électeurs. Qu’il s’agisse d’une pétition ou d’un député d’arrière-ban, il s’agit d’un mécanisme direct ou indirect par lequel les citoyens peuvent déterminer, par l’entremise d’un plus grand organisme, ce qui est débattu au Parlement. Pour nous, cela constitue une proposition de valeur particulière pour la chambre parallèle.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie nos deux témoins. Monsieur Morden, monsieur Thomas, nous sommes heureux de vous avoir parmi nous.
Je voudrais d'entrée de jeu poser une question au sujet du récent débat sur le Brexit à Westminster Hall. Il me semble que l'un des problèmes qui se pose aux Communes à ce stade-ci, vu que le dossier du Brexit a été débattu, et plus d'une fois, c'est que, pour des raisons qui tiennent au contenu du programme législatif et à la nature changeante de la coalition de députés — je pourrais presque parler de factions — en faveur ou contre les différentes propositions, ou aux règles sur le réexamen d'une question déjà débattue aux Communes, des contraintes limitent le débat dans des voies qui ne sont pas forcément productives. Il serait très intéressant d'appliquer la théorie des jeux pour dégager les étapes de l'évolution de ce débat à la Chambre des communes.
Cela soulève le problème de la pertinence de la Chambre elle-même — ou de ce qu'on pourrait considérer comme une assemblée plénière — en tant que lieu où débattre la question globale du Brexit lui-même, par opposition à telle ou telle solution pour sortir le pays de l'impasse où il se trouve. La nature de l'impasse elle-même change presque de jour en jour. Est-ce vraiment ce qui s'est produit dans ce débat sur les pétitions électroniques, qui, en fait, a permis de revenir en arrière et de réexaminer les grands enjeux? C'est là mon premier point.
En deuxième lieu, ce débat n'a-t-il pas aussi offert une tribune à beaucoup de simples députés, très nombreux au Royaume-Uni, qui ne sont pas ordinairement en mesure de prendre la parole à la Chambre des communes, leur donnant l'occasion de s'exprimer et de débattre les enjeux du Brexit?
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Je dois avouer que je n'ai pas suivi le débat dans son ensemble. Ce que j'en sais me vient pour l'essentiel du compte rendu de la chaîne Radio 4 de la BBC, grâce au balado
Today in Parliament.
Si je me fie à ce compte rendu, il semble qu'il s'agit davantage d'une discussion de fond sur le Brexit. À l'heure actuelle, je pense qu'il est difficile pour la Chambre des communes britannique de débattre tout à fait calmement le dossier du Brexit, vu l'attention accaparante qu'il suscite dans toute la classe politique et, en particulier, les divisions qu'il provoque non seulement entre les partis, mais encore au sein des partis.
Le compte rendu faisait valoir, en conclusion, qu'il était rafraîchissant de voir le débat se dérouler différemment et les lignes de parti s'estomper. À certains égards, c'est l'un des principaux avantages de ce système. Je crois que c'est David Natzler qui a fait remarquer que les sièges à Westminster Hall étaient disposés en fer à cheval, disposition qui invite moins aux interruptions partisanes que l'alignement traditionnel de rangées se faisant face.
Dans un autre ordre d'idées, puisqu'il ne nous reste qu'une minute environ, vous avez mentionné que les chambres parallèles en Australie et au Royaume-Uni ne tiennent des séances que les jours où les Communes, ou les représentants dans le cas de l'Australie, siègent. Ici en revanche, les comités permanents ordinaires de la Chambre des communes, sans parler des comités législatifs, peuvent se réunir lorsque la Chambre ne siège pas. Cela s'explique par le fait qu'il n'y a qu'un petit nombre de députés qui doivent être présents. Pour que la Chambre des communes siège, disons, jusqu'en juillet et en août, il faudrait que chacun des 338 députés accepte de siéger, au lieu de rester dans sa circonscription pendant ces mois. Ce n'est pas le cas pour un comité. C'est ainsi que j'ai participé aux travaux de plusieurs comités, notamment celui de la réforme électorale, qui s'est réuni tout au long des mois d'août et de septembre, alors que la Chambre, elle, ne siégeait pas.
Cela ne pourrait-il pas également être le cas d'une chambre parallèle, vu les exigences faibles quant au quorum, qui pourrait siéger pendant les semaines de relâche et pendant l'été sans créer une situation qui empêcherait les gens de retourner dans leur circonscription?
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Voici mon point de vue, fondé sur mes 11 années d'expérience ici.
Plutôt que de revenir à l'époque sombre où nous mettions le feu à la baraque, pourquoi ne pas essayer tout d'abord de rendre ce lieu — qui est le nôtre — plus démocratique? Au fond, nous avons un système où le gouvernement, appliquant les règles de procédure, peut contrôler à son gré le programme législatif. Son influence varie d'un comité à l'autre, mais comme il est partout majoritaire, il peut décider des questions à discuter, du temps à y consacrer et des témoins à convoquer.
Je pense que c'est là une source de grande frustration. Les députés d'un tiers parti ou ceux qui n'ont pas le statut de parti, ont très peu de chances de prendre la parole à la Chambre. À mon avis, nous ne sommes pas en train de discuter de mesures susceptibles de démocratiser la Chambre. Je ne suis pas convaincue que la création d'une autre chambre atténuerait les sentiments de frustration qu'éprouvent beaucoup de députés, y compris les simples députés du parti majoritaire.
J'ai quelques questions à poser.
Premièrement, qu'est-ce qui vous fait croire que l'influence et la discipline de parti ne s'exerceront pas dans la deuxième chambre? Les députés seront-ils tout à coup libres d'exprimer leur opinion si elle va à l'encontre de la position gouvernementale ou même de celle du parti de l'opposition? Comment est-ce que cela se fera? Est-ce que ce sera la règle du premier arrivé, premier servi? Il y a plus de 180 simples députés libéraux qui vont sans doute vouloir prendre enfin la parole et débattre de questions intéressant leurs électeurs. Comment établira-t-on un équilibre? Qui va vraiment décider quels sujets seront débattus et à qui accorder le droit de parole?
De plus, pourquoi les débats sur les pétitions ne pourraient-ils pas être inscrits au programme de la Chambre, disons une fois par mois? Je pense que ce serait fascinant. Au lieu de procéder ainsi, le gouvernement se contente de les déposer et de dire qu'une réponse a été donnée. Mis à part les signataires de la pétition à qui la réponse a été envoyée, personne ne sait quelle a été la réponse du gouvernement.
Il y a beaucoup de choses qu'on pourrait faire dans le régime actuel sans augmenter la charge de travail. Va-t-on exercer des pressions sur les députés de l'opposition et les simples députés de la majorité pour les inciter à présenter leurs propositions à l'autre chambre et à demander de les inscrire à son programme?
De plus, le gouvernement majoritaire a une pléthore de députés qu'il peut envoyer où il le juge bon. Les petits partis subissent déjà des pressions. Ils doivent être à la Chambre. Ils doivent siéger en comité. Certains d'entre eux sont peut-être en déplacement pour les audiences d'un comité. Leur situation est toute différente. Pour le parti qui dispose de beaucoup de députés, il sera facile de dire qu'il peut probablement arranger les choses dans l'autre chambre. Je pense qu'il faut réfléchir également à cette éventualité.
J'aimerais bien aussi qu'on me présente de bonnes idées sur les moyens de rendre la Chambre des communes plus démocratique et plus intéressante pour le public.
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Voici l'élément clé. Il s'agirait de créer un espace où les débats sont choisis et où les intervenants peuvent s'exprimer, en principe sans la participation des whips de parti.
L'objectif consisterait, idéalement, à créer un tel espace comme banc d'essai, pour voir si l'existence d'un espace exempt de partisanerie pourrait aider à propager des idées de changement chez les divers partis dans l'autre enceinte, la Chambre.
La montée de la partisanerie dans les débats à la Chambre des communes a suscité, il me semble, bien des critiques à peu près tout au long du siècle dernier. Si vous lisez le grand ouvrage de Ned Franks, intitulé The Parliament of Canada, paru à la fin des années 1980, vous constaterez que beaucoup de ses propos demeurent d'actualité.
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Cela vaudrait la peine de demander aux élus de ces deux pays s'ils se sont réellement libérés de la discipline de parti. C'est ce que vous préconisez, et je pense donc qu'il serait vraiment utile de le savoir. Une telle transformation s'est-elle vraiment produite dans les chambres parallèles?
Nous avons des rencontres avec les médias tous les jours, et les gens s'en tiennent toujours à la ligne de parti. Je ne sais pas si, tout à coup, cela va changer du fait que ces rencontres se feront dans une autre salle, pour peu que les médias continuent à les diffuser. C'est un défi, mais il serait intéressant de savoir si, dans ces deux pays, il y a eu une transformation et si les gens ont l'impression...
S'il s'agissait davantage d'une discussion que d'un débat — les gens examinent une question et tout le monde propose des idées novatrices —, comment allons-nous résoudre ce problème? C‘est une possibilité, mais si le débat porte sur un projet de loi qui a été présenté à la Chambre et que les lignes de parti ont déjà été tracées, ce sera chose intéressante à voir.
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Puis-je ajouter quelque chose?
Je vous dirais franchement que c'est le principal avantage. Le modèle de Westminster permet aux députés de soulever des questions qui sont pertinentes pour eux ou pour leurs circonscriptions. Cette semaine, par exemple, il y a eu un débat sur le cancer du pancréas. L'objectif souhaité était d'en arriver, sans égard aux allégeances politiques, à améliorer le traitement pour les gens atteints du cancer du pancréas. Des députés de partout au Royaume-Uni ont des électeurs qui pourraient être touchés. Ils sont venus exprimer leurs préoccupations et le ministre y a donné suite. Les députés ont agi non pas en fonction de leur appartenance politique, mais bien en tant que représentants de leur collectivité. Je crois que dans le mémoire que nous avons présenté au Comité, nous avons inclus la liste des débats qui ont eu lieu. L'infrastructure des transports à Essex, par exemple, est une question sur laquelle tous les députés pourraient s'entendre et dont l'aboutissement, heureux ou non, ne devrait pas dépendre des allégeances partisanes.
Bien franchement, j'espère que les députés résisteront à leur parti lorsqu'ils constatent qu'une mesure proposée ne jouit pas de l'appui nécessaire. L'histoire parlementaire est truffée d'exemples d'innovations qui ont été essayées et qui ont échoué, mais cela ne veut pas forcément dire qu'il faut s'abstenir d'essayer.
À ce sujet, je sais que lorsque les chambres parallèles ont été introduites aux deux endroits, elles l’ont été temporairement. Vous avez demandé s’il y avait eu une enquête auprès des députés lorsque la proposition a été mise aux voix, et ils ont été massivement en faveur. Il y a eu un genre de mise à l'essai pendant un an ou deux. Par la suite, la mesure a reçu un appui total de la part des députés pour les raisons que les deux messieurs ont exprimées, cet aspect d’un meilleur débat, comme vous l’avez souligné.
Je ne suis pas d’accord sur un point. Vous avez dit que nous avons l’attribution d'une période de temps parce que de nombreux députés veulent prendre la parole. On demande souvent aux députés d’aller lire un texte, ce qui, en théorie, est contraire à nos règles. Nous ne sommes pas autorisés à lire un texte, mais nous le faisons. Lisent-ils les textes? Je crois savoir que ce n’est pas le cas au Royaume-Uni. Est-ce qu’ils les lisent dans la deuxième chambre au Royaume-Uni ou en Australie, ou sont-ils forcés de vraiment prononcer un discours?
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Je n’ai qu'une ou deux remarques générales. Je ne prendrai pas beaucoup de temps.
Il y a quelque chose qui n’a pas été dit et qui devrait l’être.
Lors de la campagne électorale de l'an 2000 — je crois, Scott Reid, que c’est là que vous avez été élu pour la première fois —on avait promis que les pétitions appelleraient à débattre. Rick Mercer s’en est moqué en adressant une pétition de Doris Day concernant Stockwell Day. Elle réunissait trois millions de signatures.
Ce n’est pas toujours une bonne idée de pétitionner la Chambre, avec, au milieu, le comité qui est maître de l’ordre du jour. Une fois que la position intermédiaire qui contrôle l’ordre du jour est acquise, un ordre du jour clair peut être établi pour une seconde chambre. Je pense que c’est une bonne approche.
Vous avez entendu le groupe de témoins précédent. Vous avez entendu mes commentaires sur la création d’une chambre mixte avec le Sénat. Que pensez-vous de l'idée d’une seule chambre mixte qui s’occuperait directement des projets de loi d’initiative parlementaire et qui déciderait de leur sort?
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Une réponse partielle à la question de M. Graham sur ce qu’on peut faire du côté constitutionnel, ce qu’on peut arriver à faire, pour instituer une seconde chambre de délibérations, en bout de ligne, il faut présenter un projet de loi dans les deux chambres. Cependant, les règles concernant la première, la deuxième et la troisième lecture sont, si je comprends bien, de régie interne et pourraient donc être supprimées. De fait, on en a saisi le tribunal en 1919, suite à la loi référendaire du Manitoba, laquelle présumait qu'un projet de loi adopté par référendum supplante les étapes de lecture à l’assemblée législative et équivaut à la sanction royale. Le tribunal a déclaré que la sanction royale devait intervenir. La Constitution le prévoit, mais les tribunaux ont décidé que les diverses étapes internes de compression ou de télescopage des diverses lectures pouvaient être traitées au moyen de... Je ne sais pas si une loi pourrait le faire ou si vous avez besoin de modifier le Règlement. Quoi qu’il en soit, ils ont réglé le problème. Il y a des références qu'on peut consulter, si on essaie de déterminer ce qui est permis et ce qui ne l’est pas en vertu de notre Constitution. Tout cela concerne la Constitution de 1867, par opposition à ce qui a été ajouté en 1982. Elle demeure applicable.
Je voudrais faire un commentaire sur la préoccupation de Mme Duncan concernant l’apparition généralisée de whips, d'éléments d'appréciation partisans et de sectarisme politique dans les comités. C’est ce qui se produit dans la plupart des comités, la plupart du temps, y compris dans celui-ci. D’après mon expérience, parfois ce n’est pas le cas.
Il y a un exemple, sur la Colline du Parlement, d'un sous-comité qui a su décourager pratiquement tous les jeux politiques et l'esprit partisan. Il s’agit du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité des affaires étrangères, que j’ai présidé pendant huit ans. Il possédait déjà cette culture non politicienne avant mon arrivée. Elle a été florissante sous ma gouverne et elle est toujours vivante. Peu importe ce qui a motivé son apparition, je remarque qu’il suffisait de respecter certains principes. Nous avons convenu que le Règlement continuait de s’appliquer à tout ce qui concernait la marche à suivre, mais que nous pouvions, par convention unique à ce comité, nous entendre pour nous attaquer à un dossier seulement s'il y avait consensus.
Partout dans le monde, on assiste à un cocktail de violations des droits de la personne, ce qui nous permettait de choisir les causes où il n’y avait pas de clivage évident entre la gauche, la droite ou le parti. Si le débat porte sur les droits de la personne au Venezuela, le régime Maduro est inévitablement remis en question, ce qui fait problème parce que les avis sont partagés à ce sujet. Si le débat porte sur un problème vécu dans un autre pays où il y a des intérêts miniers canadiens, par exemple, vous risquez moins d’avoir ce problème. Par conséquent, des critères de sélection rigoureux et d’autres règles internes...
Quand nous recevons des témoins, je pense que c'est l'occasion d'entendre ce qu'ils veulent faire valoir, ce qu'ils pensent et ce qu'ils ont étudié.
Vous avez dit plus tôt, dans votre breffage, que vous aviez étudié le cas de gens qui avaient perdu leur emploi ou pris leur retraite en 2015. Vous dites que les deux tiers des personnes semblaient frustrées par la façon dont cela fonctionnait.
Avez-vous vérifié si, pour 2006, 2008, 2011 ou toutes les élections précédentes, les chiffres étaient différents?
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La nature des débats à Westminster Hall reflète en partie une tradition différente, devrait-on dire, de la Chambre des communes du Royaume-Uni, où la discipline de parti est beaucoup plus lâche. Le vote de troisième catégorie existe dans cette enceinte, donc le gouvernement se réserve les aspects cruciaux et permet la dissidence sur un plan plus général. Cette pratique existait avant même la mise en place du Westminster Hall. La culture de la chambre qui choisissait le sujet à débattre influait sur cet aspect dans une certaine mesure. Les députés avaient l’habitude d’avoir des opinions divergentes.
Cela témoigne également de la relation plus détendue des députés avec leur whip. Les chefs de parti n’ont pas la même capacité de menacer de ne pas sélectionner de nouveau un député. Les candidats sont choisis par les associations de circonscription.
Cela dit, là où cela a fait la plus grande différence, c’est dans la capacité des députés de tenir un débat dans le cadre d’une action de défense plus large sur une question particulière. Souvent, un député va soulever un problème en particulier, disons le cancer du pancréas, comme première étape. Ensuite, cela peut susciter un autre débat et peut-être un projet de loi.
Dans le cadre de mes propres recherches, j’ai examiné l’évolution de la loi en matière de vol de ferraille. Le vol de ferraille est un gros problème au Royaume-Uni. Le pays compte beaucoup de vieux immeubles. La question a d'abord été l'objet d'un débat à Westminster Hall, puis d'un projet de loi d’initiative parlementaire visant à réglementer les marchands de ferraille. Cela a permis aux députés d’arrière-ban de mener une campagne plus vaste. Plus d’outils sont ainsi offerts pour ce genre de défense des droits.
Pour ce qui est de la relation fondamentale entre les députés et leur parti, elle a toujours été un peu plus informelle. Toutefois, ces dernières années, et cela rejoint le point soulevé par Mme Duncan, les rébellions ont été plus fréquentes. Il y a eu plus de différences d'opinion. Cela s'explique en partie du fait que c'est un gouvernement de coalition et que le Parlement est sans majorité.
J’espère avoir répondu à vos questions.
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Je suis tout à fait d’accord avec Mme Duncan sur certains points qu'elle a soulevés, mais je suis en désaccord avec elle sur d’autres.
Il y a certainement beaucoup d'esprit de parti dans l'actuel Parlement, mais je crois que cela change de temps à autre. Lorsque nous débattons des projets de loi d’initiative parlementaire, je remarque qu’il y a moins de sectarisme politique. À l'étape de la mise aux voix de ces projets de loi, le sectarisme diminue un peu, sauf au NPD.
Dans les comités, nous voyons aussi un peu moins d'esprit de parti, jusqu’à ce qu’il y ait un vote sur une question quelconque, mais lorsque nous essayons d’explorer des sujets et de brasser des idées, cet esprit disparaît un peu, par conséquent, je peux imaginer une chambre parallèle où la culture ne disparaît pas complètement, mais change un peu, et c’est un début.
Je vous suis vraiment reconnaissante du travail que vous avez accompli. En ce qui concerne les débats sur les projets de loi du gouvernement, quelqu’un vous a-t-il déjà dit qu’il n’y avait pas assez de temps prévu, que cette personne ait été députée du parti ministériel ou de l’opposition?