Bienvenue à la 160e séance du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. La première partie de la séance est publique. Le premier point à l'ordre du jour est l'examen des règlements concernant les absences de députés dues à une grossesse ou à la nécessité de prendre soin d'un nouveau-né ou d'un enfant nouvellement adopté.
Nous sommes ravis d'accueillir M. Philippe Dufresne, légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes, et Mme Robyn Daigle, directrice, Services en RH aux députés. Merci à vous deux de votre présence.
Comme les membres du Comité s'en souviennent sans doute, notre 48e rapport recommandait que la Loi sur le Parlement du Canada soit modifiée de façon à accorder aux députés une forme quelconque de congé de maternité et de congé parental. La loi a ensuite été modifiée de manière à conférer à la Chambre des communes le pouvoir de prendre des règlements. Comme vous le savez, le Bureau de régie interne s'est penché sur la question la semaine dernière et il a recommandé que notre comité examine un projet de règlement qu'il a approuvé à l'unanimité.
Je souligne, pour les membres, qu'il y a de légères différences entre le projet de règlement qui a été distribué ce matin et le document que le Bureau nous a envoyé la semaine dernière. Je crois que le légiste nous expliquera les raisons pour lesquelles les modifications ont été apportées.
Sur ce, je cède la parole à M. Dufresne, qui nous présentera sa déclaration préliminaire.
:
Merci, monsieur le président.
[Français]
Monsieur le président et membres du Comité, à la suite de la lettre du Bureau de régie interne de la semaine dernière, cela me fait plaisir de comparaître aujourd'hui devant vous avec ma collègue Robyn Daigle, la directrice des Services en ressources humaines aux députés, afin de discuter du règlement potentiel sur les absences liées à la maternité et à la parentalité.
Ce sujet vous sera sans doute familier puisque, comme l'a mentionné le président, il résulte d'une recommandation formulée par le Comité lui-même dans un de ses rapports présentés à la Chambre plus tôt au cours de cette session.
[Traduction]
En vertu de la Loi sur le Parlement du Canada, une somme de 120 $ est déduite de l'indemnité de session pour chaque jour où le parlementaire n'assiste pas à une séance de la Chambre des communes au-delà de 21 jours par session. Les jours où l'absence du parlementaire est attribuable à un engagement officiel ou public, à une maladie ou au service dans les forces armées ne font pas partie des absences comptabilisées, et dans ces circonstances, aucune somme n'est déduite de l'indemnité.
Or, il n'existe pas d'exemption pareille pour les cas dans lesquelles un député ou une députée n'assiste pas à une séance en raison d'une grossesse ou de la nécessité de prendre soin d'un nouveau-né ou d'un enfant nouvellement adopté. Votre comité a étudié la question plus tôt dans la session. Il a examiné les dispositions pertinentes portant sur les déductions en cas d'absence et il a présenté sa conclusion et sa recommandation dans son 48e rapport, intitulé Services destinés aux députés ayant de jeunes enfants:
Le Comité est d'avis que les députés ne devraient pas être pénalisés financièrement s'ils s'absentent du Parlement en raison d'une grossesse ou d'un congé parental. Par conséquent, le Comité recommande:
Que le ministre responsable de la Loi sur le Parlement du Canada envisage de présenter un projet de loi afin de modifier le paragraphe 57(3) de la Loi sur le Parlement du Canada pour qu'il y soit mentionné que les journées d'absence attribuables à une grossesse ou à un congé parental doivent être considérées comme un jour de présence du député ou de la députée pendant la session parlementaire aux fins du calcul des sommes à déduire de l'indemnité de session en cas d'absence.
[Français]
À la suite de cette recommandation du Comité, le projet de loi a été déposé au Parlement et adopté. Cela a modifié la Loi sur le Parlement du Canada afin d'autoriser les deux Chambres du Parlement à prendre des règlements en ce qui a trait à la présence de leurs membres respectifs et aux montants à déduire de l'indemnité de session pour la parlementaire absente à des séances en raison de sa grossesse ou pour tout parlementaire absent pour prendre soin de son nouveau-né ou d'un enfant nouvellement adopté.
Plus tôt cette année, le Bureau de régie interne a demandé à l'Administration de la Chambre des communes de préparer un projet pour son examen. En préparant la proposition, l'Administration a notamment pris en considération le fait que les députés ne sont pas des employés. Les députés occupent une charge publique et ne sont pas remplacés lors de leur absence comme le serait, par exemple, un employé en congé parental. Des urgences nationales ou d'autres questions importantes peuvent toujours survenir et obliger le député ou la députée à revenir à la Chambre ou à s'occuper d'un dossier dans sa circonscription.
L'enjeu devant vous n'est donc pas une question de congé au sens strict. Il s'agit plutôt de savoir si les absences liées à la maternité ou à la parentalité devraient être considérées comme étant moins justifiées que celles liées aux autres motifs tels que la maladie, les engagements publics ou officiels, ou le service dans les forces armées.
L'Administration a examiné les règles dans les assemblées législatives des provinces et des territoires au Canada. Nous avons également revu la pratique en Grande-Bretagne. Cet examen a permis de constater que la majorité des assemblées législatives permettent aux députés de s'absenter, sans déduction financière, pour des raisons de maternité ou de parentalité, pour une période déterminée ou indéterminée.
[Traduction]
Les membres du Bureau de régie interne ont adopté à l'unanimité la proposition de règlement suivante: premièrement, qu'aucune somme ne soit déduite de l'indemnité de session d'une députée enceinte qui n'assiste pas à une séance au cours de la période de 4 semaines précédant la date prévue de l'accouchement; deuxièmement, qu'aucune somme ne soit déduite de l'indemnité de session d'un député qui s'absente pour prendre soin de son nouveau-né au cours de la période de 12 mois suivant le jour de la naissance de l'enfant; et troisièmement, qu'aucune somme ne soit déduite de l'indemnité de session d'un député qui s'absente pour prendre soin d'un enfant nouvellement adopté au cours de la période de 12 mois suivant le jour où l'enfant est placé chez lui en vue de son adoption.
À mon avis, cette proposition est en phase avec le 48e rapport du Comité, présenté en 2017, et le nouvel article 59.1 de la Loi sur le Parlement du Canada.
Je souligne qu'il n'est pas question, dans la proposition, d'accorder aux députés un congé au cours duquel ils n'exerceront pas du tout leurs fonctions parlementaires. Je le répète, les députés ne sont pas remplacés durant leur absence. Ils ne se trouvent pas dans la même situation que les employés, et il surviendra toujours des questions d'intérêt national ou local qui obligeront les parlementaires à se présenter au Parlement ou à s'occuper de dossiers dans leur circonscription. Par conséquent, l'objectif de la proposition est de veiller à ce qu'aucune déduction ne soit effectuée sur l'indemnité de session de la parlementaire qui n'assiste pas à une séance de la Chambre en raison de sa grossesse, ou de tout parlementaire qui s'absente pour prendre soin de son nouveau-né ou d'un enfant nouvellement adopté.
Le document intitulé Projet de règlement que vous avez reçu contient le texte juridique qui mettra en œuvre la proposition si celle-ci est adoptée par la Chambre. Je vous prie de noter que nous avons apporté quelques légères modifications au document depuis que le Bureau vous l'a envoyé. Ces modifications n'ont aucune incidence sur le fond de la proposition. Nous avons aussi retiré la disposition d'entrée en vigueur, en présumant que le Comité et la Chambre souhaiteraient que le règlement entre en vigueur dès son adoption. Si ce n'est pas le cas, une date peut être ajoutée.
Je souligne également que dans la lettre qu'il a envoyée au Comité, le Bureau de régie interne a écrit qu'il appuyait aussi la proposition de ne pas effectuer de déduction sur l'indemnité d'un député qui s'absente durant la période de quatre semaines précédant la date prévue de l'accouchement de sa conjointe. Ce faisant, le Bureau reconnaît le rôle important joué par le conjoint durant les semaines qui précèdent la date prévue de l'accouchement.
[Français]
C'est certainement une idée qui mérite d'être explorée. Nous avons effectué une analyse des dispositions de la Loi sur le Parlement du Canada afin de déterminer si, dans sa forme actuelle, celle-ci permettrait d'inclure ces circonstances dans le règlement proposé.
À la suite de cette analyse, je suis d'avis que le fait d'étendre l'application de la période de quatre semaines de non-déduction aux députés dont la conjointe est enceinte irait au-delà du libellé du nouvel article 59.1 de la Loi sur le Parlement du Canada, qui prévoit les situations où la Chambre des communes peut prendre des règlements. On indique que l'absence pourrait s'appliquer aux cas suivants:
a) la parlementaire qui n’assiste pas à une séance de la chambre dont elle fait partie en raison de sa grossesse;
b) le parlementaire qui [...] doit prendre soin de son nouveau-né [ou] d’un enfant nouvellement adopté [...]
[Traduction]
Le libellé de la version anglaise est semblable; il n'inclut pas la situation d'un député dont la conjointe est enceinte. Cependant, je précise qu'en vertu du régime actuel, un député dont la conjointe est enceinte peut tout de même s'absenter durant la période précédant la date prévue de l'accouchement sans subir de déduction si le nombre total d'absences est inférieur à 21 jours de séance.
[Français]
Dans les circonstances, je ne suggère pas que le Comité recommande d'étendre l'application de la période de non-déduction avant la naissance de l'enfant aux députés dont la conjointe est enceinte. La mise en œuvre de cette suggestion nécessiterait une modification à l'article 59.1 de la Loi sur le Parlement du Canada.
C'est toutefois un enjeu important qui mérite d'être étudié. Le Comité pourrait décider d'explorer cette question lors de la prochaine session afin de trouver des options potentielles. Ces options pourraient inclure des modifications législatives ou encore une analyse des données afin de préciser des tendances et de mesurer les répercussions des règles actuelles sur les conjoints des personnes enceintes.
[Traduction]
Enfin, le Bureau a soulevé la question du pairage pour les députés qui s'absentent de la Chambre et qui manquent un vote pour des raisons familiales. Le Comité pourrait également décider d'explorer ce sujet en vue d'un futur rapport.
Voilà qui met fin à ma déclaration préliminaire, mais bien sûr, nous serons ravis de répondre à vos questions.
:
Je vais pouvoir répondre à certaines questions de Mme Sahota.
Vous vous demandiez dans quelles circonstances il peut s'agir d'engagements publics ou officiels. Je pourrais vous décrire un cas qui est quand même raisonnablement plausible. Si un député devient président d'une association parlementaire internationale, par exemple l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN ou l'Assemblée parlementaire de l'OSCE, on peut supposer qu'il s'absentera souvent en raison des voyages qu'il aura à faire. Ayant connu certains présidents ou certaines présidentes d'associations parlementaires internationales, je sais que cela cause beaucoup d'absences. Je sais aussi que certains députés ont été pressentis pour présenter leur candidature à une association internationale, mais ont choisi de ne pas le faire. Quoi qu'il en soit, si un député occupe un poste reconnu à l'international qui prend beaucoup de son temps, cela pourrait être une des raisons plausibles pour lesquelles il ne serait pas souvent présent au Parlement canadien. C'est un exemple d'engagement public ou officiel qui expliquerait pourquoi un député n'est pas présent.
Je peux maintenant vous expliquer de quelle façon nous en sommes venus à ce règlement.
J'ai eu trois enfants, donc trois grossesses, alors que j'étais députée. Quand j'ai entrepris le travail sur cette question, je savais que, tant que la Loi sur le Parlement du Canada n'était pas modifiée, on ne pourrait pas procéder à l'étape suivante, soit celle du règlement.
Il y a eu une première rencontre au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Par la suite, le Comité a produit un rapport qui contenait cette recommandation. La mesure a ensuite été incluse dans le budget. Une fois que la loi d'exécution du budget a reçu la sanction royale et que, par conséquent, la Loi sur le Parlement du Canada a été modifiée, j'ai fourni une ébauche de règlement à la leader à la Chambre du NPD, qui était Mme Brosseau à ce moment-là. C'est elle qui était responsable de faire adopter le règlement. En effet, il revenait aux leaders à la Chambre, Mmes Bergen, Chagger et Brosseau, de commencer à discuter du règlement.
À mon retour après avoir accouché, je suis revenue sur la question afin de savoir pourquoi le règlement n'était toujours pas adopté. J'ai aussi tenté qu'on remette ce dossier à l'ordre du jour. Je sais donc qu'il y a eu d'autres discussions entre les leaders à la Chambre des différents partis pour le remettre à l'ordre du jour avant la fin de la session parlementaire, pour ne pas qu'un nouveau Parlement ait à finaliser le travail là-dessus.
Voilà donc ce qui s'est passé concernant le règlement.