FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent des finances
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 23 mai 2002
¿ | 0945 |
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)) |
M. Jack Layton (président, Fédération canadienne des municipalités) |
¿ | 0950 |
¿ | 0955 |
La présidente |
M. Fred McMahon (directeur, Centre pour les questions de globalisation, Institut Fraser) |
À | 1000 |
À | 1005 |
La présidente |
Mme Loleen Berdahl (présidente intérimaire et directrice générale, Canada West Foundation) |
À | 1010 |
La présidente |
Mme Enid Slack (témoignage à titre personnel) |
À | 1015 |
À | 1020 |
La présidente |
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne) |
Mme Enid Slack |
À | 1025 |
M. Charlie Penson |
Mme Enid Slack |
M. Jack Layton |
À | 1030 |
M. Charlie Penson |
M. Jack Layton |
M. Charlie Penson |
M. Jack Layton |
La présidente |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
À | 1035 |
M. Jack Layton |
Mme Pauline Picard |
M. Jack Layton |
À | 1040 |
Mme Pauline Picard |
M. Jack Layton |
M. James Knight (chef de la direction, Fédération canadienne des municipalités) |
La présidente |
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.) |
À | 1045 |
M. Jack Layton |
À | 1050 |
Mme Enid Slack |
La présidente |
M. Fred McMahon |
La présidente |
M. Fred McMahon |
À | 1055 |
Mme Loleen Berdahl |
M. Bryon Wilfert |
Á | 1100 |
La présidente |
M. Jack Layton |
Á | 1105 |
Mme Enid Slack |
Mme Enid Slack |
M. Jack Layton |
M. Lorne Nystrom |
M. Fred McMahon |
M. Lorne Nystrom |
M. Fred McMahon |
Á | 1110 |
M. Lorne Nystrom |
Mme Loleen Berdahl |
M. Lorne Nystrom |
Mme Loleen Berdahl |
Á | 1115 |
La présidente |
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.) |
Á | 1120 |
M. Jack Layton |
Mme Enid Slack |
Mme Maria Minna |
Á | 1125 |
M. Fred McMahon |
Á | 1130 |
La présidente |
Mme Maria Minna |
M. Fred McMahon |
Mme Maria Minna |
La présidente |
Mme Maria Minna |
La présidente |
M. Charlie Penson |
M. Fred McMahon |
Á | 1135 |
M. Charlie Penson |
M. Fred McMahon |
M. Charlie Penson |
Mme Loleen Berdahl |
M. Charlie Penson |
La présidente |
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.) |
Á | 1140 |
M. Fred McMahon |
M. Gary Pillitteri |
M. Fred McMahon |
M. James Knight |
Á | 1145 |
La présidente |
M. Charlie Penson |
La présidente |
CANADA
Comité permanent des finances |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 23 mai 2002
[Enregistrement électronique]
¿ (0945)
[Traduction]
La présidente (Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)): Bonjour, tout le monde.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous reprenons ce matin nos discussions prébudgétaires. À cette fin, nous accueillons la Fédération canadienne des municipalités, MM. Jim Knight et Jack Layton; de l'Institut Fraser, M. Fred McMahon, de la Canada West Foundation, Mme Berdahl, et enfin à titre individuel, Mme Enid Slack.
Soyez les bienvenus parmi nous. Nous allons donner à chaque organisme le temps de faire un exposé de 10 minutes, avant de passer aux questions. Je propose que nous suivions l'ordre inscrit à l'ordre du jour.
Est-ce que ce sera vous, monsieur Knight, ou M. Layton, qui allez faire l'exposé?
Monsieur Layton, allez-y.
M. Jack Layton (président, Fédération canadienne des municipalités): Bonjour, mesdames et messieurs, membres du comité. Je vous remercie de nous permettre de comparaître à nouveau devant vous pour vous faire part de la situation qui confronte nos municipalités, nos villes en particulier. Nous vous félicitons aussi à nouveau de tenir de telles tribunes, où l'on peut aborder divers sujets de façon assez libre. À mon avis, les autres ordres de gouvernement devraient imiter cette façon de procéder, dans la préparation de leurs budgets. Nous-mêmes allons nous en inspirer dans l'administration de notre ville, afin d'éviter de mettre les citoyens devant le fait accompli d'un budget préparé d'avance et sans consultation, et auquel ils ne peuvent que réagir. Donc, merci encore de cet exemple.
En outre, le fait de consacrer du temps à l'étude des besoins des villes est une initiative importante. En effet, il fut un temps où l'on aurait tout simplement dit que les villes relèvent des provinces, et qu'il ne servirait à rien d'en discuter avec des représentants du gouvernement fédéral.
La Fédération canadienne des municipalités estime que ce genre de discussion vient à point nommé, car les villes canadiennes sont dans une situation extrêmement précaire en ce moment. Dans les quelques minutes qui me sont imparties, je vais d'ailleurs m'efforcer d'en souligner les principaux aspects, et aussi de vous soumettre certaines propositions de solutions.
D'abord, vous n'ignorez sans doute pas que la Fédération canadienne des municipalités représente 1 000 administrations municipales au Canada. Ses membres y étudient les questions auxquelles font face les grandes villes, les municipalités plus modestes ainsi que les collectivités rurales, afin d'en tirer les thèmes communs. Lorsque nous témoignons devant votre comité, nous gardons tout de même à l'esprit que, de par vos fonctions, vous devez tenir compte des avis que vous présente une vaste gamme de collectivités situées dans toutes les régions du pays. Par conséquent, ce que nous allons vous présenter aujourd'hui se fonde sur les travaux de nos membres, des plus petits aux plus grands, et sur le consensus qui s'en dégage.
Cela dit, en tant que comité des finances, vous devez prendre du recul et envisager la situation financière de la nation ainsi que son économie dans une perspective générale. Cette fois-ci cependant, nous vous demandons de voir ces questions sous leur aspect urbain. Comme nous, vous avez commencé sans doute à remarquer que nos villes se trouvent dans une très grave situation financière.
Voici quelques faits intéressants à ce sujet. Depuis cinq ans, les recettes fédérales ont augmenté d'environ 38 p. 100; celles des provinces de près de 30 p. 100, mais celles des administrations municipales de 14 ou 15 p. 100. Cela tient au fait que pour financer leurs services, les administrations municipales doivent de plus en plus compter sur leurs taxes foncières, car les autres ordres de gouvernement ont dû assainir leurs finances, et ont donc réduit leur soutien aux municipalités, ce qui a donc fait monter les coûts.
À l'heure actuelle, les recettes municipales proviennent à 82 p. 100 de leurs propres sources. Cette situation est unique parmi tous les pays développés. Il y a quelques années seulement, les services étaient financés dans une proportion de 77 p. 100 au moyen de nos propres ressources, mais ce pourcentage a vraiment grimpé.
À présent, les impôts fonciers représentent jusqu'à 55 p. 100 de nos recettes, ce qui est très différent de ce qu'on observe aux États-Unis ou en Europe, où cette catégorie d'impôts occupe un pourcentage moindre de l'assiette du revenu des municipalités. Au Canada, dans certaines villes, les impôts fonciers vont même au-delà de 55 p. 100.
Au cours de la dernière décennie, les impôts fonciers par habitant se sont accrus de 58 p. 100, augmentation rendue nécessaire pour combler le vide laissé par les compressions de dépenses des autres paliers de gouvernement, mais nous avons atteint un niveau de saturation.
Si l'on compare les courbes illustrant, d'une part, la baisse de la participation du gouvernement, et d'autre part, la hausse des coûts, on voit un écart, qui va d'ailleurs grandissant, et qui un jour, aura des conséquences dans nos villes. Pour ma part, je dirais même que ses effets sont déjà perceptibles.
Si on utilise des indicateurs comme les niveaux de congestion par la circulation, l'indice de smog, la réduction des services de transport en commun , le nombre de sans-abri et la pénurie de logements abordables, parfois même le nombre de nids de poule par kilomètre, on se rend compte de la lutte que doivent mener les villes pour s'accrocher à leur situation antérieure.
On peut demander pourquoi les villes ne gèrent pas mieux leurs affaires? Eh bien, depuis 10 ans, elles ont travaillé d'arrache-pied pour le faire. Elles ont rapidement imposé des économies. Cependant, elles en sont maintenant réduites à sabrer dans des services essentiels. Cela signifie que nous manquons de ces infrastructures tout à fait indispensables pour pouvoir prospérer. Nous ne pouvons plus affirmer avec l'assurance de naguère, que nos systèmes d'approvisionnement en eau et nos réseaux d'égouts sont satisfaisants. Dans certaines villes, on déverse encore des eaux usées directement dans l'environnement. Eh bien, tout cela est directement lié à ces graves bouleversements financiers.
Ici, j'aimerais vous citer des chiffres qui m'ont renversé lorsque je les ai vus, car je ne me rendais pas compte à quel point notre situation était tragique. Au Canada, les administrations municipales dépensent environ 785 $ par personne par année; aux États-Unis, pour financer le même ensemble de services, on dépense 1 652 $ par personne par année. C'est plus du double. Cela fait 30 ans que j'enseigne l'administration municipale, et auparavant, je pouvais dire, grâce à Dieu nos villes diffèrent de celles des États-Unis, et je pouvais toujours parler des incidents dans les villes américaines qu'on rapportait dans les médias.
Eh bien, je dois avouer que maintenant, je m'entends souhaiter tout haut que nos villes ressemblent aux villes américaines. J'aimerais bien que nous investissions dans nos villes comme cela s'est fait sous l'administration Reagan, méthode qui a d'ailleurs été suivie par les gouvernements suivants, quelle que soit leur affiliation politique. Les autorités américaines ont reconnu qu'il faut investir dans les villes. Je crois que le gouvernement fédéral au Canada, lui aussi s'en est rendu compte, et qu'il a lancé d'importants jalons d'un tel investissement.
Nous tenons certainement à applaudir l'initiative. Je sais qu'il en a été question au sein de ce comité au cours des ans. Quoi qu'il en soit, les premières étapes nous paraissent très importantes, elles ont d'ailleurs été bien accueillies par les Canadiens. Cela nous paraît essentiel, parce qu'on aurait pu s'imaginer que la population reprocherait au gouvernement fédéral de se lancer dans un domaine qui n'est pas vraiment le sien. Vous avez, en quelque sorte, franchi une frontière, et dès le début, la réaction des gens a été positive.
Pour ce qui est du logement abordable, en dépit des problèmes que vous avez connus avec certaines provinces, question que je ne veux pas aborder aujourd'hui, sauf pour vous prier de persévérer, la province de Québec a adhéré très rapidement à votre programme, suivie par la Colombie-Britannique, mais il reste encore de graves lacunes à combler.
Par ailleurs, le programme en question est relativement modeste. Le Groupe de travail du premier ministre a d'ailleurs souligné le besoin de créer un programme de logements abordables au plein sens du terme, c'est-à-dire dont les moyens se rapprocheraient sensiblement de ce que nous avons recommandé, soit environ 1,7 milliard de dollars par an. Cependant, attendons les résultats de cette première étape puis accélérons le programme le plus rapidement possible.
En second lieu, au sujet du transport en commun, je crains que les investissements annoncés dans certaines villes ne commencent à peine à se profiler à l'horizon. Nous avons pourtant besoin d'un programme national de soutien du transport en commun et des transports. Tous les autres pays du G-8 s'en sont dotés. Nous brillons par notre absence à cet égard, et le prochain budget pourrait corriger cette situation à point nommé. C'est d'ailleurs ce que proposait le Groupe de travail du premier ministre, tout comme le Livre rouge et le discours du Trône. Par conséquent, nous attendons de voir l'annonce d'une mesure dans ce sens dans le prochain budget, car c'est le seul de tous ces beaux documents à nous garantir des sommes d'argent à dépenser.
En dernier lieu, au fil des ans, vous vous êtes servis de divers programmes pour investir dans les infrastructures. Le problème avec ce genre de mécanismes, aussi bons soient-ils, c'est qu'ils sont d'habitude à court terme, alors que les investissements dont les villes ont besoin portent sur des projets à long terme comme les canalisations d'égouts, les stations de traitement d'eau, les lignes de transport en commun qui sont tous des projets à long terme.
¿ (0950)
Il nous faut un programme d'investissement dans les infrastructures de plus longue durée. Nous vous prions donc d'en élaborer un, ou de restructurer le programme actuel en ce sens. Encore une fois, le groupe de travail du Premier ministre a relevé cet impératif, et nous l'appuyons à cet égard.
Nous envisageons les choses sur une plus longue durée, et ne prévoyons donc pas trouver dans le prochain budget, tout ce qui se rapporte à un projet d'aussi longue haleine. Il a été proposé, par exemple, que les municipalités disposent de pouvoirs d'imposition plus vastes, comme c'est souvent le cas en Europe, et même aux États-Unis, où 6 100 administrations municipales perçoivent diverses formes de taxe de vente. En fait, 3 000 municipalités américaines perçoivent une espèce d'impôt sur le revenu, et pas seulement une ou deux.
Pour s'engager dans une telle voie, il faut au préalable, un long et patient travail d'élaboration, auquel devront participer tous les ordres de gouvernement. Malheureusement, nous ne pouvons attendre d'en arriver à une telle solution, compte tenu de nos besoins actuels qui sont urgents. Cependant, nous sommes tout à fait disposés à collaborer avec vous à cette entreprise de longue haleine, tout comme nous tenons à voir la population canadienne en discuter. D'ailleurs, cette dernière est en avance sur nous à certains égards, si l'on songe aux derniers rapports de la Banque Toronto-Dominion, où l'on réclamait ce genre de choses. Le Conference Board lui aussi se penche sur la question, et il y a seulement deux jours, Mme Anne Golden disait qu'il faut envisager ces nouvelles stratégies.
Enfin, nous avons déjà participer ensemble à des initiatives très novatrices, et pouvons aussi le refaire à l'avenir. L'idée d'un Fonds vert est très intéressante; ce mécanisme permettrait le transfert de fonds à l'association des municipalités qui, à son tour, les affecterait aux administrations municipales à des fins très précises, et à la suite d'une évaluation fondée sur les meilleures pratiques. Comme en conviennent déjà beaucoup de gens, c'est un véritable succès, et en outre, ce moyen aide certainement le gouvernement national à atteindre d'autres objectifs comme la réduction des gaz à effets de serre, et le reste.
Nous avons aussi remarqué que partout dans le monde développé, il se crée des institutions financières municipales. Il en existe déjà une en Colombie-Britannique, dont les pratiques exemplaires la mettent au premier rang dans le monde entier. Au sein de cette organisation, les municipalités mettent en commun leurs facilités de crédit, et grâce à un certain appui du gouvernement provincial, peuvent ainsi atteindre des cotes de crédit élevées. Elle n'a jamais eu besoin de recourir à ce crédit, mais il existe bel et bien et rassure sur la viabilité des municipalités. Nous pourrions peut-être envisager un projet de ce genre à l'échelle nationale, puisqu'il a réussi en Colombie-Britannique.
Dans notre document plus détaillé, que vous aurez l'occasion de lire ultérieurement, nous proposons des initiatives assez semblables, qui nous permettraient d'exploiter nos excellents antécédents en gestion et administration municipales. Tirons parti de notre crédit et mettons-le à l'oeuvre.
Ce ne sont que quelques-unes de nos propositions. Le document que nous vous avons fourni porte le titre d'avant-projet. C'est qu'il faut que nous le fassions passer par toutes les étapes de notre processus à la Fédération avant de rédiger la version définitive. La semaine prochaine, notre principal congrès se réunira à Hamilton. Bon nombre de ministres et de représentants de tous les partis y assisteront, et nous pourrons donc profiter de l'occasion pour achever le travail et peut-être corriger quelques chiffres.
Je vous remercie beaucoup et me réjouis de pouvoir discuter avec vous ce matin.
¿ (0955)
La présidente: Lorsque vous aurez la version définitive en main, pourriez-vous en aviser le greffier, ou peut-être la lui envoyer. Merci beaucoup d'avance.
Nous allons maintenant donner la parole à l'Institut Fraser, représentée par M. McMahon.
M. Fred McMahon (directeur, Centre pour les questions de globalisation, Institut Fraser): Permettez-moi d'abord de vous remercier de m'avoir invité à comparaître. Je remplace notre directeur des études fiscales, M. Jason Clemens, qui a l'âge de seulement 30 ans pourrait vous citer plus de statistiques que je ne pourrais jamais en apprendre dans toute ma vie.
Je tiens aussi à m'excuser de ne pas avoir apporté suffisamment d'exemplaires de mon mémoire. J'en enverrai d'autres au comité. Intitulé: The Corporate Capital Tax: Canada's most Damaging Tax (l'impôt sur le capital des sociétés: La taxe canadienne la plus préjudiciable), Il a été publié la semaine dernière, et le comité pourrait le considérer comme ayant été rédigé à son intention.
Les comités comme le vôtre risquent parfois de s'enliser dans des détails. Je tiens donc à vous rappeler qu'à mes yeux, les taxes sont importantes, à la fois par la façon dont le régime fonctionne et par la lourdeur des impôts eux-mêmes. On sait que les nations ayant le taux d'imposition le plus faible ont un grand avantage sur les autres en matière de croissance.
Il y a à peu près 15 ans, l'Irlande a considérablement réduit son fardeau fiscal et simplifier de beaucoup son régime d'imposition. Du jour au lendemain, elle est passée de la situation d'une nation à forte imposition à celle de nation à faible imposition, et le processus s'est accompagné de réductions d'impôts beaucoup plus radicales que tout ce que Ronald Reagan et Margaret Thatcher avaient fait. À la même époque, et ici les chiffres sont vraiment renversants, le PIB par habitant du Canada était deux fois et demi celui de l'Irlande. Aujourd'hui, le PIB par habitant de l'Irlande est de 25 p. 100 supérieur à celui du Canada. Dépassant autrefois l'Irlande par deux fois et demi, le PIB du Canada est maintenant plus faible que celui d'un pays qui était auparavant le plus pauvre de l'Europe. C'est tout à fait remarquable, et ce renversement est dans une grande mesure le résultat de réductions d'impôt, surtout l'impôt sur les sociétés.
Dans cette évolution, l'autre facteur important à garder à l'esprit est l'évolution dans la mentalité des syndicats. Insistant auparavant pour obtenir la rémunération la plus élevée possible tous les ans, les syndicats ont changé leur fusil d'épaule et essayent plutôt d'encourager leurs entreprises à réaliser des bénéfices les plus élevés possibles parce qu'ils se sont rendu compte que ce sont les bénéfices qui attiraient l'investissement.
Aujourd'hui, je vais surtout développer nos idées au sujet de l'impôt sur le capital, qui en ce moment est l'impôt le plus préjudiciable au Canada.
Auparavant, permettez-moi de faire une autre remarque. Votre comité n'est pas obligé de faire des recommandations sans incidence sur le plan fiscal. Le fardeau fiscal général que le Canada doit assumer atteint presque 40 p. 100. Aux États-Unis, le fardeau fiscal global est de près de 30 p. 100. Nous dépassons la moyenne des pays de l'OCDE. Nous pouvons donc alléger notre fardeau fiscal général, et, il faudrait le faire, car je le répète, ce n'est pas seulement la structure du régime qui est en cause, mais aussi le poids général de la fiscalité.
Je presse instamment le comité de réfléchir sérieusement à l'impôt sur le capital social. Le gouvernement actuel a déjà pris de bonnes mesures en matière fiscale. Il a enfin équilibré le budget. Cela fait environ deux ans que l'on réduit la fiscalité, mais pas assez à nos yeux pour éponger le déficit. En fait, le gouvernement a aussi réformé quelque peu son impôt sur les gains en capitaux, ce qui est une bonne chose. Il pourrait cependant aller encore beaucoup plus loin pour redresser la situation fiscale en s'attaquant à l'impôt sur le capital social.
L'impôt sur le capital social a d'abord été créé pour que toutes les sociétés paient un impôt quelconque. Le régime fiscal canadien était devenu tellement complexe que les fiscalistes pouvaient trouver divers moyens de contourner l'impôt. On a donc adopté un impôt sur le capital pour que toutes les sociétés payent leur part.
Toutefois, ainsi que le précisait le rapport technique sur la fiscalité de 1997, les sociétés ne payent pas d'impôt. Permettez-moi de le citer:
En fin de compte, ce ne sont pas les entreprises qui payent les taxes—elles se contentent de les transmettre aux autres: Aux clients sous forme de prix plus élevés, aux fournisseurs et aux travailleurs sous la forme de paiements et de salaires plus bas, et à ceux qui leur fournissent leurs capitaux, sous la forme de rendements plus faibles. C'est ainsi que les impôts sur les sociétés sont payés par les particuliers, soit directement, soit indirectement. |
À (1000)
Ce ne sont pas les grandes sociétés détestées qui sont imposées au moyen de la taxe sur le capital social; c' est nous tous qui sommes imposés. Et puisque cette taxe est l'un des impôts les plus inefficaces, ayant un coût économique marginal de l'ordre d'environ 1,5 ou plus, selon diverses études, par rapport au coût économique de l'ordre de 0,5 ou 0,7 dans le cas de l'impôt sur le revenu des particuliers ou des sociétés, on ne fait que gaspiller l'efficacité économique et l'argent des contribuables en continuant à percevoir cette taxe dont le coût est très élevé.
Une étude récente entreprise par la société Coopers Lybrand révèle qu'une telle taxe augmente le coût du capital, décourage des niveaux plus élevés de capitaux dans les institutions financières et est un obstacle à l'investissement car chaque investissement est frappé par cette taxe.
On juge les taxes selon trois critères: l'efficacité, l'équité et la simplicité. Je vous ai déjà expliqué le manque d'efficacité de l'impôt sur le capital social étant donné son coût économique marginal très élevé. Quant à l'équité, cet impôt est tout à fait injuste. Il surtaxe les sociétés qui ont beaucoup de capitaux, lesquels sont en fait nécessaires pour nous permettre d'améliorer notre niveau de vie et la productivité du Canada dont la croissance accuse un retard.
Même si elle s'est améliorée depuis un an, tous les membres du comité savent qu'elle a été horrible depuis 10 ans. L'impôt sur le capital des sociétés entrave la croissance de productivité parce qu'il empêche l'investissement dans le capital.
Finalement, pour ce qui est de la simplicité, quoi que ce genre d'impôt puisse avoir l'air simple à première vue, étant donné le grand nombre de façons d'appliquer ces taxes, c'est-à-dire les exemptions et ainsi de suite, cet impôt devient tout à fait compliqué. L'Institut C.D. Howe a par conséquent formulé l'idée intéressante, de créer une taxe d'affaires sur la valeur ajoutée. Nous pourrions également envisager la possibilité de percevoir une taxe à la consommation. Mais, je le répète, le comité n'est pas tenu d'adopter une mesure sans incidence fiscale. Il est temps de se débarrasser de cette taxe, qui ne fait que ralentir la croissance économique du Canada et, par conséquent, nous appauvrir tous à la longue.
Merci.
À (1005)
La présidente: Monsieur Berdahl, la parole est à vous.
Mme Loleen Berdahl (présidente intérimaire et directrice générale, Canada West Foundation): D'abord, je tiens à vous remercier de nous donner l'occasion d'exposer notre point de vue. Lorsque mon avion a décollé de Calgary, la ville était couverte d'un manteau de neige, il a donc été agréable de voir des tulipes à mon arrivée.
Vous savez sans doute que la Canada West Foundation est un institut neutre qui se consacre à la recherche sur les politiques touchant l'Ouest canadien. Pour cette raison, mon exposé portera donc principalement sur les débouchés et les défis qui concernent cette région du pays.
Cela étant dit, on rencontre sans doute des problèmes analogues dans le reste du Canada, mais je me fonde sur des recherches effectuées dans l'Ouest, et mes remarques porteront donc sur l'Ouest.
Dans le cadre de notre projet Building the New West, la Canada West Foundation s'est employée, tout au long de l'exercice 2000-2001 à examiner les étapes à suivre pour assurer la prospérité à long terme de notre région, notamment en consultant les citoyens. Voici les cinq domaines prioritaires qui, selon nous, devraient être améliorés.
Il nous faut d'abord disposer des moyens susceptibles d'attirer, de maintenir et de retenir le capital humain. Nous parlons ici de la main-d'oeuvre qui répondra à nos besoins dans l'avenir, et pour ce faire il faudra notamment augmenter la participation des peuples autochtones, attirer des immigrants dans l'Ouest canadien et se pencher sur les besoins en matière de formation, d'éducation et d'innovation.
Notre deuxième priorité est la diversification économique, c'est-à-dire qu'il nous faut trouver des moyens d'assurer la prospérité de la région autrement que par l'exploitation de ses ressources naturelles, ce qui semble être notre prédilection.
En troisième lieu, mentionnons les infrastructures de transport, car il nous faudra maintenir et améliorer notre système de transport des marchandises, qu'il s'agisse de transport par route, par voie ferrée, par voie maritime ou aérienne.
Quatrièmement, il faudra prendre les moyens qui s'imposent pour que nos villes soient dynamiques et concurrentielles, et enfin, il faudra concevoir des mécanismes de collaboration régionale.
Nos recherches nous ont révélé que ces cinq domaines prioritaires constituent la base de la prospérité régionale à long terme, et qu'elles sont liées de bien des manières. Aujourd'hui, j'aimerais encourager le gouvernement du Canada à s'engager dans chacun de ces domaines, mais étant donné le temps dont je dispose, je me concentrerai sur deux d'entre eux. Les villes et la collaboration régionale. Je vous ai cependant apporté le rapport en entier, dans les deux langues officielles, afin que vous puissiez le lire au complet si vous le souhaitez.
D'abord, pour ce qui est des villes, vous n'ignorez sans doute pas que le Canada est une nation urbaine, et que notre qualité de vie et notre prospérité à long terme ne s'en porteraient que mieux si les gouvernement fédéral et provinciaux le reconnaissaient.
Le rapport déposé récemment par le Groupe de travail libéral du premier ministre sur les questions urbaines offre un excellent aperçu des nombreux problèmes auxquels sont confrontées les villes canadiennes, et propose certaines solutions intéressantes, comme l'application d'une perspective urbaine à l'échelle fédérale, ce qui me paraît tout à fait indispensable pour scruter les activités du gouvernement central.
Les programmes urbains du fédéral ont bien entendu leur utilité, et j'appuie l'intérêt du gouvernement à cet égard. Cela dit, j'aimerais toutefois encourager le gouvernement central à voir son rôle plutôt comme celui d'un animateur chargé de stimuler un dialogue urbain au Canada, et à tenir davantage compte des conséquences globales des politiques fédérales sur les villes.
Les subventions accordées aux villes permettent de régler certains problèmes au fur et à mesure qu'ils émergent, mais n'assurent pas nécessairement la capacité à long terme des administrations--fédérale, provinciales et municipales--à trouver des solutions. C'est pourquoi nous devons nous pencher sur les problèmes à court terme, tout en gardant à l'esprit la question sous-jacente des rôles, des responsabilités et des ressources.
J'aimerais également encourager le gouvernement fédéral à faire preuve d'une grande souplesse au moment d'accorder des fonds aux villes, car chacune d'elles a ses propres forces et faiblesses, ses propres priorités. Il serait à mon avis beaucoup plus efficace de donner aux villes la possibilité de faire connaître leurs priorités en matière d'aide financière plutôt que de fonctionner selon un système hautement spécialisé. En effet, Vancouver pourrait vouloir améliorer son système de transport urbain, Calgary travailler à l'épanouissement de son milieu artistique et Winnipeg se pencher sur la revitalisation de son centre-ville. Les subventions du fédéral accompliraient beaucoup plus si on les adaptait aux diverses priorités des villes. Je sais que le modèle fédéral actuel ne favorise pas une telle souplesse, mais il s'agit là, à mon avis, d'une idée qu'il vaut la peine de mettre en oeuvre.
À (1010)
En second lieu, j'aimerais vous parler de la collaboration régionale. En travaillant sur notre projet Building the New West, une idée revenait de plus en plus souvent: les quatre provinces de l'Ouest gagneraient à accroître leurs efforts de collaboration. Elles seraient ainsi mieux équipées pour régler des problèmes transprovinciaux, développer des domaines de spécialisation, travailler efficacement et réduire les chevauchements.
Cette collaboration n'irait pas sans difficulté: l'Ouest canadien n'a pas la capacité institutionnelle pour planifier à l'échelle régionale et le territoire à couvrir est immense. En outre, cette collaboration ne doit pas se faire au détriment d'une saine concurrence entre les provinces. Toutefois, nos recherches et nos consultations laissent entendre que la population est favorable à une telle collaboration, et qu'il serait amplement justifié de le faire. Dans un pays aussi vaste et diversifié, il me semble tout à fait logique d'adopter une approche régionale.
Quel est le lien avec le gouvernement fédéral? Étant donné que le gouvernement fédéral est si essentiel à la résolution de nombreux dossiers stratégiques touchant l'Ouest canadien, son rôle ne serait pas négligeable, non plus en matière de collaboration régionale, notamment par l'entremise du ministère de la Diversification de l'économie de l'ouest (DEO).
Je propose au gouvernement du Canada d'élargir le mandat du DEO au-delà de la diversification économique, afin qu'il représente la région de façon plus générale. Je ne sais pas exactement en quoi son mandat devrait être modifié, mais cela refléterait mieux la réalité de son rôle dans la région.
Et cette réalité, c'est que le DEO est surtout perçu comme un lieu d'échange entre la région et Ottawa. Le gouvernement et la région gagneraient tous deux à tirer parti de ce lien.
En terminant, j'aimerais souligner à nouveau qu'à mon avis, le gouvernement du Canada pourrait apporter un soutien non négligeable et son leadership à chacun des domaines prioritaires dont j'ai parlé. Le capital humain, la diversification économique et les infrastructures du transport, tout comme la collaboration régionale et les villes, sont des domaines pour lesquels le fédéral peut faire énormément. C'est pourquoi je vous encourage fortement à tenir compte de ces cinq domaines dans la planification de votre prochain budget fédéral.
Je vous remercie.
La présidente: Merci beaucoup.
Le dernier témoin à faire un exposé est Mme Slack.
Mme Enid Slack (témoignage à titre personnel): Merci beaucoup. Permettez-moi de remercier également le comité de m'avoir invitée à parler ici ce matin.
Je suis une consultante en économie de la région de Toronto. Je me spécialise en finances municipales. J'enseigne également les finances municipales à l'Université de Toronto.
L'avantage, ou plutôt l'inconvénient, d'être la dernière à prendre la parole dans un groupe, c'est que l'auditoire a déjà entendu une partie des choses que l'on va dire, mais au moins cela permet de les souligner.
Dans le temps dont je dispose, j'ai jugé bon de poser trois questions et de tâcher d'y répondre. Tout d'abord, pourquoi le gouvernement fédéral devrait-il s'intéresser aux villes? Deuxièmement, quels sont les problématiques financières auxquelles sont confrontées les villes? Troisièmement, que faut-il faire?
Pourquoi le gouvernement fédéral devrait-il s'intéresser aux villes? Une des raisons les plus évidentes, c'est que la plupart des Canadiens vivent dans des villes. Vous connaissez tous les données du dernier recensement, celui de 2001, qui révèle que près de 80 p. 100 des Canadiens vivent dans des centres urbains de 10 000 personnes et plus, que plus de 64 p. 100 d'entre eux vivent dans les 27 régions métropolitaines de recensement, et que plus de la moitié d'entre eux vivent dans les quatre grandes régions urbaines, soit le Golden Horseshoe dans le sud de l'Ontario; Montréal et ses environs, le bas de la vallée du Fraser et le sud de l'île de Vancouver en Colombie-Britannique, et le corridor Calgary-Edmonton. Voilà donc la première raison: la plupart des Canadiens vivent dans des villes.
La deuxième, c'est que l'avantage concurrentiel du Canada est directement lié au succès de ces villes, car ces dernières et les régions municipales sont les principaux moteurs de la prospérité économique. Nous sommes quelques-uns à dire cela depuis des années, depuis le groupe de travail sur le Grand Toronto au milieu des années quatre-vingt-dix et jusqu'au rapport de la Banque TD, qui est paru cette semaine.
La troisième raison, c'est que de nombreuses politiques fédérales ont une incidence sur les villes. Les politiques sur l'immigration, sur les Autochtones, la stratégie de l'innovation, tout cela a un impact sur ce que les villes font et sur leurs dépenses.
En outre, le Canada a pris des engagements internationaux, tels que le protocole de Kyoto, qui exige la mise en oeuvre de programmes municipaux pour atteindre les objectifs. Certaines choses, telles que les transports publics, sont très importantes pour respecter ces engagements; or les transports publics sont une dépense municipale.
Voilà donc trois raisons. Il y en a plus, mais ce sont là les trois principales raisons pour lesquelles le gouvernement fédéral devrait s'intéresser aux villes.
Deuxièmement, quelles sont les problématiques financières auxquelles sont confrontées les villes? Pour être concurrentielles, les villes doivent pouvoir attirer des entreprises et une main-d'oeuvre spécialisées. Cela signifie que l'infrastructure des transports et des communications ainsi que les services qui améliorent la qualité de la vie sont critiques pour assurer la compétitivité. J'entends par là des services tels que les parcs, les installations de loisirs, les installations culturelles, les services sociaux, un bon réseau scolaire, des services policiers, des soins de santé, la salubrité de l'air et de l'eau.
Oui, les taxes sont importantes lorsqu'il s'agit d'attirer des gens, mais les études commencent à révéler, de plus en plus, que pour être concurrentielles, les villes doivent être des endroits où il fait bon vivre. Les travailleurs du savoir, qui sont la clef de la prospérité économique, cherchent de plus en plus un endroit agréable où vivre, et cela signifie qu'ils veulent de bonnes écoles pour leurs enfants. Cela veut dire qu'ils aimeraient pouvoir faire du jogging dans le parc. Ils veulent également se sentir en sécurité. Cela signifie qu'il ne veulent pas voir des sans-abri dans les rues. Ce sont autant de services dont les municipalités sont responsables et, pour être compétitives, elles doivent offrir ces services.
Une deuxième difficulté financière à laquelle les villes sont confrontées, c'est le fait que les gouvernements fédéral et provincial se déchargent sur elles de certains services. Cela a mené à un accroissement des responsabilités municipales. En même temps, il n'y a pas eu diversification des recettes municipales. Comme l'a dit Jack Layton, les municipalités comptent principalement sur les taxes foncières et les frais d'utilisation pour financer les services qu'elles offrent.
J'ai beaucoup écrit au sujet des taxes foncières au fil des ans. Je viens de terminer une étude sur les taxes foncières de 25 pays dans le monde. Je crois que la taxe foncière est une bonne taxe pour les gouvernements locaux, mais je crois que nous exigeons un peu trop de ce type de fiscalité. Il n'est pas approprié—personne ne croit que cela soit approprié, que ce type de taxe assure le financement des services mous, les services sociaux que nous offrons actuellement au niveau municipal.
En outre, cette source de recettes n'est pas très élastique. Autrement dit, les recettes provenant des taxes foncières n'augmentent pas à mesure que croit l'économie. Il faut hausser le taux d'imposition et vous savez combien il est politiquement difficile de faire cela. Mais l'assiette fiscale n'augmente pas automatiquement au fil des ans. Dans certaines municipalités, les recettes fiscales ne suffisent simplement pas pour les services qu'elles doivent fournir.
À (1015)
Une troisième difficulté est celle qui a trait à l'étalement urbain. Qu'on l'aime ou qu'on le déteste—il y a des gens dans les deux camps—nous devons reconnaître que l'étalement urbain a accru le coût des services que les municipalités doivent offrir et a exercé des pressions sur les sources de recettes existantes.
Au vu de ce nouvel environnement financier, les experts en finances municipales commencent à douter de la viabilité financière des villes. Manifestement, elles ont été viables. Elles n'ont pas fait faillite récemment, mais leur capacité continue à répondre aux exigences de dépenses avec les sources de recettes actuelles, dans les circonstances que je viens de décrire, est mise en doute.
Que faut-il faire? Le problème n'est pas simple, la solution non plus. Les trois ordres de gouvernement doivent travailler ensemble et de façon coordonnée pour aider les villes.
Il y a des choses que les municipalités doivent faire elles-mêmes. Elles doivent supprimer les distorsions des taxes foncières. J'ai récemment fait une étude pour l'Institut C. D. Howe où je montre comment certains des moyens qui servent à financer les services à l'échelle locale ont peut-être exacerbé l'étalement plutôt que de le réduire. Par exemple, nous surtaxons les propriétés commerciales et industrielles et les appartements dans ces villes. Cela doit être corrigé. Nous pourrions même augmenter les taux d'imposition foncière dans certaines parties du pays, bien que je sache que cela ne va pas être très populaire.
Nous commençons à faire une plus grande utilisation des frais d'utilisation, mais chose encore plus importante, nous devons les restructurer afin qu'ils permettent l'utilisation efficace des services. Cela signifie que le prix des services d'eau, de voirie et de transport public sont établis de façon judicieuse et de façon à témoigner du coût marginal de prestation de ces services afin que les frais d'utilisation offrent les incitatifs appropriés.
Passons maintenant au niveau provincial. Si nous voulons réduire le déséquilibre financier des municipalités, autrement dit l'écart entre les dépenses et les recettes, le gouvernement provincial doit soit reprendre certaines des responsabilités dont il s'est déchargé, tels que les services sociaux et le logement social en Ontario, ou donner aux municipalités accès à d'autres sources de recettes fiscales telles que par exemple, l'impôt sur le revenu, la taxe de vente ou la taxe sur les carburants. C'est simple: les dépenses croissent plus vite que les recettes. Il faut soit se débarrasser de certaines dépenses, soit trouver des recettes supplémentaires pour parvenir à l'équilibre.
Cela dit, je crois que pour assurer l'autonomie et la reddition de comptes locale, les municipalités doivent être responsables de la perception des impôts auxquels on leur donne accès. Par conséquent, si l'on donne aux municipalités accès à l'impôt sur le revenu, à la taxe de vente ou à la taxe sur les carburants, elles doivent établir les taux d'imposition. Elles doivent avoir la responsabilité de ces taux. Ce sont elles qui dépensent, ce doit être elles qui fixent les taux d'imposition.
Ces taux d'imposition locaux doivent également être fixés à l'échelle de l'ensemble de la région. Par exemple, nous ne pouvons pas avoir une taxe sur les carburants à Toronto sans que le reste de la région du Grand Toronto ne soit touché. On voit bien ce qui se produirait si cela arrivait. Nous devons donc percevoir ces taxes dans toute la région. Or, dans certaines parties du pays, nous n'avons pas la structure nécessaire pour permettre cela. Il n'existe pas de gouvernement qui ait la mainmise sur toute la région. Il va donc falloir qu'il y ait des restructurations municipales dans certaines régions du pays.
Je crois également que les quatre grandes régions métropolitaines dont j'ai parlé au début, où vivent plus de 50 p. 100 des Canadiens, doivent être traitées différemment des autres régions urbaines. Par exemple, je ne suis pas sûr qu'il soit approprié d'accorder le pouvoir de taxation locale des nouvelles sources fiscales à toutes les villes du Canada. Au moins pour commencer, il se peut que cela soit uniquement approprié pour les grandes régions métropolitaines, les plus petites municipalités devant compter un peu plus sur les transferts que les grandes régions métropolitaines. Après tout, ces régions sont différentes et je crois qu'elles devraient être traitées différemment.
En ce qui concerne le gouvernement fédéral, je crois qu'il devrait investir dans les particularités des villes qui les rendent compétitives et améliorent la qualité de lvie. J'entends par cela l'infrastructure des transports, le logement à prix abordable, les réseaux des distribution d'eau et d'égouts.
Je crois également que les fonds fédéraux doivent servir à soutenir la durabilité environnementale, sociale et économique. Autrement dit, l'argent devrait être investi dans des services tels que les transports publics. Il devrait être accordé aux régions où existent des programmes intégrés d'aménagement du territoire et de planification des transports, où les régions municipales utilisent des prix appropriés pour la voirie, les transports publics et l'eau. Ce sont là des aspects importants de la durabilité.
En dernier lieu, j'estime que les municipalités ont besoin d'un financement dédié permanent plutôt que de programmes à durée limitée. Le Groupe de travail consultatif fédéral de la Loi sur les transports, par exemple, a recommandé que l'on donne aux villes accès à la taxe sur les carburants. Vous avez entendu la Fédération canadienne des municipalités le recommander. La Banque TD l'a également recommandé dans l'étude parue cette semaine. Une fois de plus, je crois que le principe de reddition des comptes exige que les municipalités établissent ces taux d'imposition et en soient responsables.
Les trois ordres de gouvernement doivent donc faire certaines choses et j'estime qu'elles doivent être faites de façon coordonnée pour aider les villes à continuer d'être les moteurs de l'économie canadienne.
Merci.
À (1020)
La présidente: Merci beaucoup.
Nous commencerons les tours de questions.
Allez-y, monsieur Penson.
M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.
Je voudrais remercier les témoins d'être venus aujourd'hui et d'avoir soulevé des questions fort importantes.
Toutefois, il me semble que le son de cloche dans les villes, où habitent 80 p. 100 de la population canadienne, est plus ou moins le même que dans les circonscriptions rurales. Les communautés rurales ont les mêmes préoccupations que les villes. En Saskatchewan, par exemple, les routes et autoroutes qui étaient pavées deviennent des chaussées en gravier, parce qu'on n'a plus les moyens de les entretenir.
Je me demande s'il ne s'agit pas plutôt d'une question sur la compétitivité du Canada. Notre niveau de vie est en déclin depuis environ 30 ans. Et il me semble que certaines des difficultés soulevées par les représentants des municipalités et des villes ne diffèrent en rien de celles soulevées par les collectivités rurales. Il serait préférable de remettre la productivité et la compétitivité du Canada sur les rails plutôt que de se concentrer sur les champs de compétence.
Nous savons par expérience, que de vouloir changer la Constitution pour octroyer des nouvelles compétences à divers organismes est un terrain politiquement miné. Je crois donc que nous devrions concentrer nos efforts sur le redressement du pays, et les villes y participeront, puisque comme Mme Slack vient de nous le dire, elles jouent un rôle essentiel dans l'atteinte de cet objectif.
Ne devrait-on pas plutôt essayer de regagner le premier ou deuxième rang en termes de productivité, que nous occupions il y a 30 ans? Je crois que nous devrions changer les politiques contraignantes et essayer de faire le maximum parce que je crois que nous avons le potentiel de réaliser beaucoup plus de choses qu'on ne le fait actuellement.
Ne pensez-vous pas que tout le monde y gagnerait, au lieu d'essayer de changer les champs de compétence pour donner des pouvoirs supplémentaires aux villes?
Mme Enid Slack: Je suis en partie d'accord avec ce que vous dit, mais pas tout à fait. Je crois que dans cette nouvelle ère de mondialisation, les pays font concurrence à d'autres, et les villes rivalisent entre elles. C'est Toronto contre les villes européennes et d'autres villes américaines.
Si nous investissons dans nos villes, le pays entier y gagnera. Les villes sont les moteurs, et si nous voulons être concurrentiels, nous devons commencer par les villes, parce que c'est là où on trouve les travailleurs du savoir, c'est là où on fait de l'innovation, et c'est là où nous serons concurrentiels.
Il ne fait aucun doute qu'il y a des problèmes dans les régions rurales, et ils semblent tous être les mêmes—les routes et les problèmes sociaux. Je n'en disconviens pas, mais vous constaterez peut-être que la gravité des problèmes est très différente dans les villes, surtout dans les grands centres.
Donc lorsqu'on parle des sans-abri, on dit que les villes attirent beaucoup de problèmes des régions avoisinantes. À Toronto, par exemple, nous avons vu que 47 p. 100 des utilisateurs des foyers pour sans-abri venaient de l'extérieur de la ville. Il y a donc une concentration très élevée dans les villes. La saturation est un phénomène fréquent dans les villes.
Nous devons donc, bien sûr, essayer de régler certains problèmes dans les régions rurales, mais je crois que vous constaterez que les mêmes problèmes dans les villes sont plus prononcés et aussi que les villes sont les moteurs de cette nouvelle compétitivité.
À (1025)
M. Charlie Penson: Madame Slack, je suis d'accord avec vous, mais là où je voulais en venir, c'est qu'il ne faut pas se limiter à demander un financement supplémentaire du gouvernement fédéral qui irait directement aux municipalités. À mon avis, une amélioration de notre capacité de faire concurrence aux autres pays découlerait automatiquement des améliorations apportées à nos villes.
Aux États-Unis, les villes se portent très bien, en partie parce que l'économie américaine en général est en bonne santé. Il y a 30 ans, les États-Unis occupaient le premier rang quant à la productivité mondiale, et le Canada le deuxième; nous étions presqu'au même niveau. Nous retrouvons maintenant au 13e rang. Et il me semble qu'un certain nombre des problèmes auxquels les villes font face actuellement témoignent de la baisse du niveau de vie constatée dernièrement dans tout le pays.
Mme Enid Slack: Je ferai une dernière tentative pour répondre à votre question, et je vais demander ensuite à Jack Layton de prendre la parole.
Si j'ai bien compris, vous dites que si nos villes sont compétitives, elles seront prospères. De mon côté, je dis que si nos villes sont prospères, elles seront concurrentielles. C'est que nous constatons que nous avons besoin des travailleurs du savoir et qu'il faut les attirer au Canada; ces gens veulent vivre en milieu urbain où les services dont ils ont besoin existent... Nous parlons des «économies d'agglomération». Il y a un dynamisme qui se crée quand il y a concentration des entreprises.
Les entreprises s'établissent dans nos villes, et il faut pouvoir attirer ces travailleurs du savoir. Il faut faire bien d'autres choses, bien sûr, mais afin d'être compétitifs, il faut faire de nos villes des endroits attrayants pour que les travailleurs du savoir veuillent s'y établir; on pourra ensuite augmenter la productivité et prendre les mesures nécessaires pour devenir compétitifs.
M. Jack Layton: C'est une excellente question, et c'est un peu l'histoire de la poule et de l'oeuf. En effet, il s'agit au fond d'une question de cause et d'effet.
Pour commencer, vous avez raison de dire que des problèmes semblables, au moins du point de vue de la qualité, existent dans les milieux ruraux du Canada. Nos municipalités rurales font face souvent au même genre de problèmes, et leur structure financière ne leur permet pas de répondre aux besoins. C'est pourquoi nous avons conçu cette notion de partenariat rural, et nous suivons de très près ici à la Chambre des communes ce dossier des régions rurales. Il y a un réseau actif de députés qui y travaillent en collaboration. Il y a un secrétaire d'État qui se penche sur ces problèmes. Il existe une volonté d'agir.
Dans le cas des villes, à mon avis, ces structures parallèles n'existent pas. La FCM a formé un groupe de maires des grandes villes, qui est très actif, et une tribune rurale très active—il s'agit jusqu'ici d'une tribune rurale, mais nous sommes en train de concrétiser cela dans notre constitution, en créant un caucus rural—qui tienne compte de ces réalités différentes.
En ce qui concerne la compétitivité et la productivité, j'ai quelques exemples très concrets. S'il faut 45 minutes de plus à un camion chargé de pièces d'auto pour se rendre d'Oshawa à la frontière en raison de la congestion de la circulation à Toronto, notre compétitivité est atteinte de façon très concrète. Vous pouvez comptabiliser cela en argent, et le fabricant de pièces d'auto va devoir décider où il voudra installer son usine en fonction du temps de déplacement. Si l'habitation dans une ville donnée coûte si cher qu'il faut donner une indemnité de logement aux travailleurs, cela nuira à la capacité concurrentielle des entreprises qui veulent s'implanter dans cette ville. Tout cela fait partie des facteurs qui entrent en ligne de compte lorsqu'une entreprise songe à se réimplanter.
Pourquoi est-ce que tant de sièges sociaux quittent les grandes villes? Ces décisions sont attribuables en partie sans doute au fait que la qualité de la vie que nous offrons à ces employés dans nos villes est à la baisse. Ils en sont conscients quand ils se rendent à leur bureau: les distances, le temps de déplacement, le nombre d'alertes au smog, les sans-abri dans les rues, la qualité de l'éducation, etc. Ils constatent que ces problèmes s'aggravent, et quand ils font la comparaison avec les États-Unis, leur décision est différente.
À (1030)
M. Charlie Penson: Monsieur Layton, je m'excuse de vous interrompre. Mon temps est très limité, et j'aimerais vous poser une autre question sur les solutions possibles à ces problèmes.
Au moins deux membres de ce groupe de témoins, si je ne m'abuse, ont indiqué que les programmes d'infrastructure ne répondent pas bien aux besoins. Ils n'apportent pas de solutions à long terme. Il n'y a pas de financement à long terme. Je peux vous dire qu'une version précédente du programme d'infrastructure que j'ai déjà connu ici a accordé à la circonscription de Winnipeg représentée par Lloyd Axworthy quatre fois plus d'argent qu'à ma circonscription de Rivière-de-la-Paix.
S'il n'existe pas de financement ciblé, les problèmes politiques surgissent. Comment pouvons-nous résoudre ce problème sans passer outre aux provinces? À mon avis, les provinces doivent avoir un rôle à jouer. Sinon, nous allons nous retrouver dans un fouillis constitutionnel. Que proposez-vous pour inclure les provinces?
M. Jack Layton: Eh bien, jusqu'ici, toutes les ententes ou presque sont inspirées des ententes négociées avec les provinces, comme c'est le cas dans le domaine du logement abordable. Nous félicitons la province de Québec d'avoir si vite signé cette entente et d'avoir respecté l'esprit de l'engagement collectif sur cette question. D'autres provinces n'ont pas si bien réagi, et c'est toujours la difficulté à laquelle on se heurte. Mais nous sommes guidés par le principe qu'il faut obtenir la collaboration des trois paliers de gouvernement.
Il peut y avoir d'importants domaines spécialisés où, avec le consentement des provinces, vous pouvez intervenir, comme le Fonds vert. Le gouvernement fédéral a créé ce fonds après avoir obtenu le consentement de toutes les provinces, qui ont accepté d'appuyer cette initiative. Mais nous visons la création d'un programme à long terme de financement de l'infrastructure, moyennant le consentement des provinces. À notre avis, cela ne nécessiterait pas de modifications à la Constitution puisque, comme vous dites, une fois qu'on entre dans le domaine du partage des compétences, on en sort jamais. Les Constitutions reposent sur des traditions, sur des décisions de la Cour suprême et sur la Constitution elle-même. L'évolution se produira peut-être plutôt sur les deux premiers plans que j'ai mentionnés.
M. Charlie Penson: Et une formule d'amendement qui est très difficile à changer.
M. Jack Layton: Absolument.
La présidente: Madame Picard.
[Français]
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Merci, madame la présidente.
Monsieur Layton, j'aimerais bien que vous précisiez votre pensée; vous venez de répondre quelque chose qui m'amène à croire que j'ai probablement mal compris certains de vos propos. Je connais personnellement la présidente de l'Union des municipalités du Québec et les propos que vous avez tenus dans votre exposé, d'après moi, ne lui plairaient probablement pas. Ce que j'ai compris, bien que vous ayez apporté des nuances à la fin de la question de mon collègue, c'est que vous proposez au gouvernement fédéral de modifier la Constitution pour que le gouvernement fédéral puisse faire fi des gouvernements provinciaux et desservir les municipalités. Laissez-moi vous dire que je ne suis pas d'accord avec vous, et je ne pense pas que l'Union des municipalités du Québec le soit non plus.
Je suis représentante du comté de Drummond, situé au centre du Québec. Notre ville est en plein essor économique, mais on compte également 22 municipalités semi-urbaines et rurales qui n'ont pas du tout les mêmes besoins que la ville principale. Quand on parle de ruralité, par exemple, je précise qu'à l'heure actuelle, certaines municipalités n'ont même pas encore le téléphone. On voudrait avoir accès à Internet mais on n'a même pas le service téléphonique de base. D'après moi, ce serait passablement compliqué pour le fédéral de répondre à tous les besoins.
Comme souverainiste, je suis choquée d'entendre qu'on propose au gouvernement fédéral de venir répondre à des besoins qu'il ne connaît pas. Comment pourrait-il le faire? Il faudrait modifier la Constitution. Même les provinces ont déjà de la difficulté à répondre aux besoins de chaque municipalité. Vous croyez que le gouvernement fédéral, qui est si loin de ces milieux, pourrait répondre adéquatement aux municipalités.
En plus, votre discours semble indiquer que vos études portent uniquement sur les grands centres comme Montréal, Toronto ou Victoria. Or, même s'il est exact de dire que 80 p. 100 de la population se trouve dans les grands centres, le Québec est très grand. Il compte sept millions d'habitants, et s'il y a trois millions de personnes à Montréal, il y en a quand même un autre quatre millions qui sont réparties sur le territoire des différentes municipalités ou comtés du Québec. Enfin, je ne sais pas si je vous ai bien compris, mais j'aimerais que vous m'éclairiez sur ce que vous avez à proposer dans vos recommandations.
À (1035)
M. Jack Layton: Merci de votre question.
Premièrement, il y a quelques semaines, j'ai participé avec d'autres maires à la réunion de l'UMQ. Au cours des discussions sur ces sujets-là, on a pu constater que toutes les municipalités, grandes ou petites, avaient les mêmes problèmes. Elles n'ont pas toutes les ressources nécessaires pour répondre aux besoins locaux. Pour nous, le défi est d'aborder le problème de l'inégalité entre les ressources et les besoins.
Nous voyons que le fédéral a beaucoup de ressources et que les municipalités n'en ont pas. Alors, nous voulons faire de nouveaux arrangements, avec l'accord des provinces, pour transférer de l'aide. Nous avons donc mis de l'avant quelques concepts, compte tenu de notre expérience en cette matière. Nous travaillons ensemble dans le cadre de ces programmes qui exigent la participation des trois niveaux de gouvernement. Nous devons prévoir que ces programmes s'échelonneront sur une période d'environ 10 ans. Il ne s'agit pas d'annoncer un programme de temps en temps qui n'aurait pas les ressources suffisantes pour répondre aux besoins actuels. Alors, je pense que nous pouvons faire de nouveaux arrangements en ce sens.
Je dois dire que le Québec a travaillé très fort dans ce contexte et a connu beaucoup de succès. C'est très intéressant pour moi. De temps en temps, c'est avec le gouvernement de l'Ontario que c'est le plus difficile. Nous devons donc avoir une grande flexibilité dans l'application d'un programme fédéral pour répondre aux besoins dans chaque province, en tenant compte de la situation et du contexte politique actuel. Évidemment, les citoyennes et les citoyens dans les communautés sont les gens qui sont le plus au courant de ce qu'on doit faire, mais nous n'avons pas encore l'engagement de nos collègues ici. Il y a eu quelques premières étapes intéressantes et importantes, mais nous devons avoir beaucoup d'activités dans cette même direction.
Mme Pauline Picard: J'apprécie beaucoup le fait que vous vous adressiez à moi en français. Merci beaucoup.
J'aimerais poser une autre question. Actuellement, il est question qu'on dépose les crédits pour le nouveau Fonds canadien sur l'infrastructure stratégique. Compte tenu des ressources, comme vous dites, et du fait que le gouvernement a fini son exercice avec quelque 10 milliards de dollars de surplus, est-ce que 2 milliards de dollars dans le nouveau Fonds canadien sur l'infrastructure stratégique seront suffisants pour combler les besoins?
M. Jack Layton: Non, parce que nous disons depuis longtemps, et cela a été confirmé encore une fois hier dans l'étude faite par la Banque TD, qu'il y a un déficit de 44 milliards de dollars dans l'infrastructure de nos municipalités. Une grande partie de ce déficit se trouve dans les systèmes d'égouts et d'eau potable et aussi dans les systèmes de transport en commun et dans le logement. Il n'y a pas de politique de logement abordable au Canada à l'heure actuelle. Parmi les pays développés, le Canada est le seul qui n'a pas ce genre de programme.
Deux milliards de dollars, c'est intéressant; nous l'accueillons avec plaisir, mais ce n'est pas suffisant.
À (1040)
Mme Pauline Picard: Que pensez-vous du fait que dans certaines régions rurales où il n'y a même pas de services téléphoniques de base--et je pense que c'est le cas dans l'ensemble du Canada--, on propose que tout le monde soit branché sur Internet? Dans ces régions, les enfants qui vont à l'école ne peuvent pas toucher à l'informatique puisqu'il n'y a pas de services de téléphone ou de câble. J'habite à environ une heure de Montréal, donc cela veut dire qu'on n'est pas si loin. Qu'est-ce qu'on peut faire ou qu'est-ce que vous pouvez proposer pour qu'on puisse éliminer ces inégalités par rapport à d'autres citoyens, puisqu'on ne leur permet pas d'avoir ces outils? C'est incroyable de penser que des gens n'ont pas le téléphone à l'époque où on marche sur la lune. Ces gens-là ne vivent pas dans la jungle, mais dans des municipalités rurales. Vous êtes-vous penché sur ce problème?
M. Jack Layton: Oui, notre Forum rural et notre Forum nordique ont travaillé très fort sur ce dossier. Nous avons proposé à M. Rock, dans le cadre d' une politique dont nous pouvons vous faire parvenir une copie, que les municipalités et les petites communautés soient la porte d'entrée d'Internet dans chaque communauté. Nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires pour réaliser cet objectif. Monsieur Knight peut vous donner des détails sur notre concept.
[Traduction]
M. James Knight (chef de la direction, Fédération canadienne des municipalités): Merci.
Bien sûr dans le discours du Trône d' il y a quelques années, le gouvernement du Canada s'est engagé à donner l'accès universel aux canaux à large bande. La politique est tombée dans l'oubli, mais je crois comprendre qu'elle doit refaire surface bientôt.
Nous pensons que, s'ils travaillent ensemble, les groupes communautaires peuvent lancer leurs propres systèmes, peut-être avec l'aide de la municipalité et le soutien financier du gouvernement du Canada. Nous en avons un excellent exemple tout près d'ici, dans la petite municipalité de Lanark Highlands. Au lieu d'attendre que le secteur privé prenne en charge un marché qui n'était pas vraiment rentable, des groupes communautaires locaux ont travaillé, de concert avec la municipalité, à mettre sur pied leur propre système.
C'est également ce qui s'est passé dans certains villages du Nord. À notre avis, le gouvernement du Canada doit contribuer à de tels projets non pas en donnant d'importantes subventions au secteur privé mais en aidant les organismes communautaires qui travaillent avec les municipalités pour donner accès aux canaux à large bande aux gens des collectivités rurales et nordiques du Canada. Il existe de bons exemples d'une telle collaboration, et nous en discutons actuellement avec M. Rock. Il doit assister la semaine prochaine à notre conférence pour discuter plus à fond de ce dossier.
La présidente: Monsieur Wilfert, vous avez la parole.
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Merci, madame la présidente. Je remercie les témoins d'être venus nous présenter leurs points de vue.
Certains ont fait valoir que les villes ont besoin d'une base financièrement viable. Je pense que tout le monde s'entend là-dessus, et pour ma part je suis tout à fait d'accord. Comme il est toujours utile de se rappeler les positions qu'on a prises dans le passé, j'ai relu certains documents... De temps en temps, je relis les propos que j'ai tenus en novembre 1996 à la Conférence sur les Villes de demain, à laquelle vous avez tous les deux assisté. En un mot, nous avions souligné la nécessité d'une plus grande marge fiscale pour les municipalités du Canada.
Madame la présidente, tous les témoins ont fait état d'une optique urbaine, ou d'une stratégie urbaine, qui correspond de très près aux recommandations du groupe de travail créé par le Premier ministre, surtout en ce qui concerne le logement, le transport et l' infrastructure. À mon avis, le gouvernement fédéral est plus engagé aujourd'hui auprès des collectivités urbaines qu'il ne l'a été depuis le milieu des années 70. Cela me semble excellent puisque, comme 80 p. 100 de la population habitent dans les villes, nous devons collaborer avec les municipalités, quoi qu'en dise la Constitution. En fait, la population du Canada est proportionnellement plus urbanisée que celle des États-Unis.
S'il n'en tenait qu'à moi, les villes seraient reconnues comme un palier de gouvernement au Canada et dans la Constitution. Mais nous ne nous engagerons pas sur ce terrain miné. Du reste, ce n'est pas nécessaire parce que depuis 1993 le gouvernement fédéral s'occupe de plus en plus de domaines comme l'environnement et les infrastructures, ou encore la criminalité et la sécurité urbaine, dont il ne s'occupait pas par le passé. Cette nouvelle orientation tient bien entendu au fait qu'on se rend compte qu'il faut intervenir dans ce domaine.
Quant à la question de l'optique urbaine, j'abonde dans votre sens. Pour pouvoir fonctionner, les municipalités doivent disposer de ressources à long terme. Pour cela, j'estime qu'il faut leur donner une plus grande marge fiscale, qui ne se limiterait pas à leur permettre de recueillir plus d'argent mais qui s'accompagnerait également de plus de responsabilités et de transparence. Tous les élus municipaux souhaitent pouvoir rendre compte de l'argent qu'ils dépensent. Cela ne nous empêche pas pour autant de poursuivre notre financement à long terme de certains projets, comme je crois que nous devons le faire dans le cas des infrastructures. Nous n'avons mis sur pied un programme national d'infrastructures qu'en 1993. La FCM en avait proposé la création en 1983, mais cela ne s'est fait que lorsque le gouvernement libéral a pris le pouvoir en 1993.
En ce qui concerne le Programme national de transport, il ne faut pas oublier que le Canada compte plus de 5 000 municipalités. Il n'y a peut-être pas de formule unique qui s'applique partout. Il faut cependant que les municipalités aient les moyens de créer un système de transport susceptible d' être financé.
Jack a clairement expliqué que dans le cas des programmes de logement, les difficultés émanent souvent des provinces, même si on peut noter une certaine évolution dans ce dossier. Madame la présidente, j'aimerais que l'on précise davantage les moyens à prendre pour mettre sur pied une assise qui soit viable financièrement. D'une part, il faut accroître la marge fiscale de manoeuvre des municipalités ou des villes pour leur permettre de remplir leurs obligations. D'autre part, nous devons mettre sur pied des programmes de financement viables, d'une durée beaucoup plus longue sans...
Bon, je ne reviendrai pas sur toute cette question. Personnellement, je n'apprécie pas le débat sur la taxe sur les carburants, parce que je pense que c'est à nous qu'il appartient de décider où puiser l'argent.
Pouvez-vous me donner plus de précisions sur les moyens à prendre pour mettre sur pied cette assise viable? Comment devrait-on procéder à votre avis? Selon certains de mes collègues d'en face, il faudrait créer cette base sans pour autant s'engager, ce qui me semble tout à fait impossible.
À (1045)
M. Jack Layton: Je serai bref, parce que je suis sûr que d'autres voudront également intervenir.
Premièrement, je conviens avec vous de la nécessité d'une assise financièrement viable à long terme. Dans notre mémoire, nous abordons certains sujets pratiquement tabous, comme le transfert de points d'impôt, l'élargissement de la marge fiscale et l'attribution de pouvoirs de taxation. Cependant, nous pensons qu'il faut procéder avec beaucoup de prudence. Ces mesures nécessiteront beaucoup de réflexion et de travail, parce qu'elles touchent à l'octroi dans la Constitution des compétences fédérales et provinciales.
Par ailleurs, il y a certaines choses que l'on peut faire à brève échéance. Nous redoutons par-dessus tout que, sous prétexte que des projets sont à l'étude, on refuse de faire avancer d'autres dossiers et que la situation critique dans laquelle nous nous trouvons pourrait être mise dans les limbes jusqu'à ce que les études soient terminées. Ce serait une catastrophe.
Il existe d'excellents modèles de transfert du gouvernement fédéral à des États, des villes et des municipalités de toutes tailles. La réalisation de certains objectifs fédéraux peut être négociée et convenue avec les provinces; c'est ce qui commence à se faire dans le domaine du logement. Il existe d'excellents programmes très innovateurs aux États-Unis et en Europe. Nous vous les avons décrits. Ils reposent sur l'idée de fonds d'infrastructure renouvelables. Je sais que vous connaissez bien cette formule depuis votre passage à la FCM. Nous avons créé de tels fonds dans quelques cas et ils donnent de bons résultats. Les États-Unis ont tenu compte de la situation différente des régions rurales et des villes, en mettant sur pied des fonds renouvelables pour les infrastructures hydrauliques des grandes villes, qui sont remboursées à même les recettes de la taxe d'eau. Dans le cas des petites collectivités, qui n'auraient jamais les moyens de payer pour une usine de filtration de l'eau, elles ont accès à un programme de subventions.
Peu importe la taille de leur municipalité, tous les Canadiens doivent avoir accès à une eau pure et salubre. Cette approche nous semble fondamentale.
Vous avez mentionné brièvement la nécessité de répondre aux différents besoins de transport qui existent au Canada. Nous sommes tout à fait d'accord. Nous proposons même que le gouvernement fédéral exprime certaines attentes—encore une fois de concert avec les provinces—relativement à l'utilisation pouvant être faite de l'argent accordé pour un système de transport viable. Autrement dit, on pourrait établir certaines balises, certains objectifs ou certains systèmes. C'est ce qui s'est passé dans le cas de la taxe sur l'essence en Colombie-Britannique; pour que l'argent soit versé, il faut qu'on ait mis en place un régime de planification visant à prévenir l'étalement urbain. Comme nous souscrivons à ces objectifs, nous sommes disposés à accepter ce genre de conditions.
Comme on le voit, nous pouvons travailler ensemble pour établir une structure financière durable pour les municipalités, en combinant des programmes ciblés et des plans de reconfiguration à long terme.
La présidente: Madame Slack.
À (1050)
Mme Enid Slack: Merci.
Je suis d'accord avec Jack Layton. S'il y a déséquilibre entre les recettes et les dépenses, il faut apporter les correctifs soit aux recettes, soit aux dépenses. Au niveau provincial, je pense que nous devons revoir certaines réorientations et certaines modifications des services locaux opérés à différents endroits du pays. Nous devons nous demander si nous nous sommes déchargés des bonnes dépenses et s'il y a des recettes correspondantes pour les assumer. Je crois que la population commence à en douter.
À mon avis, nous devons commencer par nous demander quels services doivent incomber aux municipalités et à d'autres paliers de gouvernement. Ensuite, nous devrons nous demander si les municipalités ont les recettes nécessaires pour remplis ces obligations. Par exemple, si nous concluons que les services sociaux doivent être financés au niveau municipal, nous ne pouvons pas dire qu'ils seront financés par l'impôt foncier.
Si nous lorgnons tous la taxe sur les carburants, c'est que l'octroi de points d'impôt associé à d'autres sources de recettes fiscales pose certaines difficultés. L'impôt sur le revenu n'est pas la meilleure solution, essentiellement parce que les gouvernements au Canada, et partout dans le monde, s'efforcent de le réduire. L'utilisation de la taxe de vente sera peut-être un peu plus facile, mais la taxe sur les carburants pose le moins de difficultés. Étant donné l'ampleur des problèmes liés au transport, la taxe sur les carburants est plus acceptable aux yeux de la population. Mais d'autres solutions peuvent également être envisagées.
Essentiellement, il faut équilibrer les recettes et les dépenses.
La présidente: Monsieur McMahon.
M. Fred McMahon: Permettez-moi tout d'abord de vous signaler qu'on ne m'a pas indiqué que ce matin nous allions discuter de dossiers urbains.
La présidente: Ne vous en faites pas, nous vous avons invités pour parler d'une autre question. Un autre témoin ne pouvait venir alors nous vous avons invité à sa place.
M. Fred McMahon: Merci. Je vais quand même exprimer mon avis sur la question des municipalités en général.
J'ai grandi en Nouvelle-Écosse. Je me souviens d'être passé en voiture avec mes parents par la vallée d'Annapolis. Ils pouvaient m'indiquer la limite entre deux comtés d'après la qualité de la route. La chaussée était belle du côté du comté du député qui avait élu un député du parti au pouvoir, tandis que de l'autre côté, dans le comté représenté par un député de l'opposition, la route était parsemée de nids de poule.
Si je vous raconte cette anecdote, c'est pour souligner qu'il faut tenir compte de l'imputabilité si on veut régler les problèmes des municipalités. Si on opte pour un programme de subventions, eh bien celles-ci iront, comme on l'a déjà dit, aux villes qui ont «voté du bon bord», plutôt qu'à celles dont les besoins sont les plus grands.
Il est de loin préférable de permettre aux municipalités de lever leurs propres impôts. C'est ce que l'on appelle le principe de la subsidiarité, largement reconnu de nos jours comme un élément de saine gestion: les services doivent être fournis par l'échelon administratif le plus bas. On ne peut pas couper les vivres à un palier de gouvernement qui a ses propres sources de recettes. Autrement, on laisse le champ libre à toutes sortes de magouilles politiques, ce qui contrevient à l'obligation de rendre compte des deniers publics. Dans ce cas, les fonds publics ne sont pas toujours dépensés à bon escient.
Je vous remercie.
La présidente: Madame Berdahl.
À (1055)
Mme Loleen Berdahl: Pour répondre à votre question au sujet de la viabilité urbaine à long terme et le rôle que le gouvernement fédéral devrait jouer, je dirais que le gouvernement devrait concentrer ses efforts sur trois aspects.
Premièrement, en ce qui concerne les différentes responsabilités des trois ordres de gouvernement, il faut étudier le modèle d'entente tripartite et regarder l'accord de Vancouver pour voir si d'autres villes pourraient s'inspirer d'un modèle semblable.
Évidemment, l'accord de Vancouver est si récent qu'il est impossible de savoir si ce sera une réussite ou non. Il me semble cependant que cette formule est la meilleure: engager les trois paliers de gouvernement dans une action locale adaptée aux besoins particuliers de la ville. Évidemment, toutes les villes n'ont pas besoin d'un programme de revitalisation du centre-ville axé sur la lutte contre la toxicomanie; il faut que le programme corresponde aux besoins de la ville.
Deuxièmement, le gouvernement fédéral devrait et pourrait presqu'immédiatement se renseigner davantage et de façon beaucoup plus délibérée au sujet de l'effet de ces programmes sur des régions urbaines. Il devrait engager un dialogue avec les villes à ce sujet.
Par exemple, l'immigration est un domaine de compétence fédérale. Je ne pense pas que quiconque prétende que les villes devraient commencer à s'occuper d'immigration; cependant, la plupart des immigrants s'établissent dans les grandes centres urbains, et il est dans l'intérêt des villes que l'on en soit conscient.
Troisièmement, le gouvernement fédéral doit comprendre les répercussions de son délestage et de son désengagement vis-à-vis de certains programmes. Quand le gouvernement fédéral se décharge de certaines de ses obligations, c'est-à-dire s'il y a un domaine dont le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial devra s'occuper mais ne le fait pas, il arrive souvent que la municipalité s'en occupe, ce qui engendre des pressions financières.
Le désengagement vis-à-vis de certains programmes m'inquiète également. Si le gouvernement fédéral ou le gouvernement provincial, ou encore les trois paliers de gouvernement mettent sur pied certains programmes urbains qui suscitent des attentes plus grandes de la population, et si à la suite d'un changement le climat politique, les deux paliers supérieurs se désengagent, la population s'attend toujours à ce que le programme soit offert; ce qui causera des ennuis à la municipalité. Il faut donc se demander si les mesures que l'on prend vont durer et si c'est le cas, le gouvernement fédéral aurait intérêt à financer ces programmes en milieu urbain.
M. Bryon Wilfert: Cela suppose un processus de consultations plus officiel, comme celui qui a entouré le projet de loi C-10, quand nous avons étudié la question des paiements au lieu de taxe. Dans des dossiers comme celui-là, le gouvernement fédéral doit faire participer les municipalités, normalement par l'entremise de la FCM qui est leur porte-parole national, lorsque la politique fédérale aura des répercussions les régions urbaines ou les villes en général.
À titre de précision, je préfère le mot « ordres » plutôt que « paliers » de gouvernement. Le mot palier a une connotation de hiérarchie. Vous avez utilisé le mot « délestage », qui est tout à fait vrai, car il y en a. Fait intéressant, quand on parle de la situation des villes canadiennes, on dit comme vous l'avez fait, et je suis d'accord, que les villes du Canada doivent être de calibre mondial pour soutenir la concurrence internationale. Nous sommes en concurrence avec les meilleures villes du monde et nous devons munir nos villes des outils nécessaires pour soutenir cette concurrence. La FCM a mis au point un indice de qualité de vie énumérant 10 composantes essentielles qui permettent d'évaluer véritablement la situation de nos villes, qui ne se limite pas toujours à leur situation financière.
En terminant, madame la présidente, je trouve intéressant que la Coalition nationale des citoyens se rallie maintenant à ceux qui préconisent la taxe sur l'essence. Et pourtant, je ne vois personne se rallier à la cause des provinces. Si je ne m'abuse, Vancouver, Montréal, Edmonton et Calgary reçoivent déjà des provinces des recettes provenant de la taxe sur les carburants. Le taux est établi, mais l'argent est là.
Encore une fois, je ne vois pas très bien l'idée, même si... Il appartient au gouvernement fédéral de décider à quoi servira l'argent. Évidemment, si l'on prend des recettes provenant de la taxe sur les carburants, qui peuvent être affectées à... Et je suis d'accord. Cet argent ne va pas nécessairement au transport; il peut être injecté dans le système de santé ou dans d'autres domaines. Mais cela sera contrebalancé parce qu'on prend l'argent d'un endroit pour le mettre ailleurs.
Le fait que nous nous participons à cette discussion et que nous vous recevons aujourd'hui témoigne de toute l'importance que nous attachons au rôle des villes.
Á (1100)
La présidente: Monsieur Nystrom, vous avez la parole.
M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Merci, madame la présidente.
Je vous souhaite à tous la bienvenue au Comité des finances.
Je vais essayer de poser des questions dans trois domaines différents afin de donner à tous les témoins la possibilité de participer, mais je commencerai moi aussi par les municipalités.
Vous dites dans l'un de vos documents que l'une des possibilités pour une municipalité d'obtenir plus de recettes serait de modifier le régime fiscal--en lui accordant une plus grande marge fiscale--et la possibilité de créer une taxe fédérale quelconque. Vous avez mentionné que cela pourrait être un impôt sur le revenu des particuliers, une taxe d'accise sur le carburant, la TPS, et ainsi de suite. Je me demande quels exemples vous avez pu trouver dans différentes parties du monde où l'on a procédé ainsi, c'est-à-dire où les municipalités ont obtenu des points d'impôt. Existe-t-il d'autres exemples semblables dans un État fédéral comme les États-Unis, l'Australie ou l'Allemagne? Les fédérations sont uniques du fait qu'elles comportent trois ordres de gouvernement.
Madame Slack, vous avez mentionné qu'il faut traiter les quatre grandes villes différemment. Lorsqu'on commence à traiter différemment les membres d'une même famille, on risque de choquer la susceptibilité de certains. Où établit-on la distinction? Pourquoi la ville d'Edmonton devrait être traitée différemment de Regina, ma propre ville, par exemple? Et de quelle façon nous traitez-vous différemment? Je ne dis pas que vous parlez de citoyens de seconde zone ou de troisième zone, mais comment les traitez-vous différemment? Je pense qu'il est très important d'examiner cette question également.
Je me demande si vous pouvez nous donner des exemples d'autres parties du monde dont nous pourrions tirer des leçons. Je pense que ce que M. McMahon a dit au sujet des transferts est tout à fait pertinent. Il peut y avoir du favoritisme politique et un manque d'imputabilité. Tout dépend des personnes au pouvoir, et de ceux qui reçoivent tout l'argent pour les programmes d'infrastructure. Il n'y a pratiquement jamais eu de députés libéraux dans les régions rurales de la Saskatchewan, de sorte que les routes sont pleines de nids-de-poule, parce qu'on n'obtient pas de transferts dans le cadre d'un programme national de routes. On se débarrasse du tarif du Nid-de-Corbeau. Nous avons des routes au revêtement mince qui sont dévastées par les énormes camions qui y circulent maintenant. C'est un énorme fardeau pour les provinces que de construire des routes à revêtement épais.
Ce sont là certains des problèmes qui découlent des transferts. Nous sommes tous des êtres humains. Nous pouvons dire, si j'étais premier ministre de ce pays, je ne ferais pas cela. Mais qui sait? Je pourrais avoir un ministre des Finances qui le ferait.
M. Jack Layton: Excellent; c'est une question bien formulée.
Premièrement, permettez-moi de parler de ce qui se fait ailleurs. Nous avons des informations de différents pays du monde parmi lesquels nous essayons de trouver les pratiques exemplaires. C'est cela que nous voulons examiner avec vous et avec les meilleurs esprits du Canada, afin de pouvoir présenter les meilleures propositions possibles.
Il est intéressant de voir que l'Allemagne, par exemple, que vous avez mentionnée, est un pays qui s'est formé en fédération alors qu'il y avait déjà des cités-États très évoluées et des structures semblables à celles de provinces. Évidemment dans la Constitution, on a donc pris des dispositions concernant l'existence de ces entités. Ces entités sont celles-là mêmes qui se sont réunies.
Les Pères de la Confédération représentaient principalement des collectivités rurales, ou ce que nous appellerions aujourd'hui des petites agglomérations. Je ne suis pas certain qu'un très grand nombre d'endroits auraient même pu être qualifiés de villes en 1867. Dans leur constitution, ils ont stipulé qu'un pourcentage des recettes perçues par le gouvernement central irait directement au gouvernement local.
En Italie, plus récemment, 4 p. 100 de l'impôt sur le revenu a été affecté aux administrations municipales. À la demande d'une municipalité, on peut y ajouter encore 1 p. 100 de plus. Il s'agit donc à la fois d'une question de transparence et d'imputabilité. C'est une innovation relativement récente en Italie.
Aux États-Unis, comme je l'ai déjà mentionné, il est tout à fait surprenant de voir que 3 000 municipalités ont accès à une certaine forme d'impôt sur le revenu, et que 6 000 ont accès à une forme de taxe de vente. C'est tout à fait remarquable.
Nous voulons voir comment cela fonctionne, et quelles techniques ou stratégies on pourrait appliquer au Canada. Nous sommes prêts à travailler avec vous sur ces idées. Il est manifeste que le débat a commencé. On en discute maintenant en public. C'est une bonne chose.
Je tiens encore une fois à souligner que nous avons besoin de faire cet investissement, entre-temps, dans nos collectivités de toute taille. Je dois dire que la FCM n'établit pas vraiment de distinction entre, par exemple, quatre régions métropolitaines, comme Mme Slack l'a fait. Si je me souviens bien, on parlait de trois seulement. Maintenant on parle de quatre. Nous voyons que c'est une question qui peut poser des problèmes. Nous disons qu'il faut s'occuper de toutes nos collectivités en fonction de leurs besoins particuliers et de leur situation propre. Leurs besoins et leur situation diffèrent, de sorte que le type d'infrastructure qu'elles nécessiteront sera différent. C'est dans la diversité que nous pouvons être forts, pour reprendre une citation banale mais importante. Nous devons donc avoir une certaine flexibilité.
Á (1105)
M. Lorne Nystrom: Madame Slack, nous avons également besoin de normes, de buts et d'objectifs nationaux. Je me demande si vous pourriez expliquer pourquoi vous excluez Regina du traitement différent.
Des voix: Oh, oh!
Mme Enid Slack: Quand j'ai préparé mon allocution, je voulais souligner que nous devons traiter les grandes régions différemment des petites. Je me suis demandée où j'établirais la distinction. La grande question est évidemment de décider qui est inclus et qui ne l'est pas.
J'essaie seulement d'expliquer qu'égalité ne signifie pas nécessairement équité. Traiter tout le monde de la même façon n'est pas nécessairement équitable. C'est parce que les besoins de différentes municipalités sont différents, comme Jack vient de le dire, et que la capacité de satisfaire ces besoins est différente. Je pense que Loleen Berdahl a également fait remarquer que si un programme de traitement de la toxicomanie est nécessaire à Vancouver, cela ne signifie pas qu'on va en créer un dans toutes les villes du Canada. Ce n'est pas nécessairement un besoin dans d'autres endroits.
Franchement, certaines mesures fonctionneront dans de grandes régions, alors qu'elles ne fonctionneront pas dans d'autres. Les points d'impôt provenant de l'impôt sur le revenu ou d'une taxe sur le carburant n'aideront pas une petite ville. Ils n'apporteront pas les recettes nécessaires, parce que la ville n'a peut-être pas l'assiette fiscale suffisante pour ce qui est du carburant ou du revenu. Cela pourra donc peut-être convenir seulement à une grande agglomération.
M. Lorne Nystrom: Winnipeg a 600 000 habitants.
Mme Enid Slack: Eh bien, nous pouvons discuter—j'accepte cela—de ce que nous pouvons inclure dans les grandes régions métropolitaines. Je ne tiens pas mordicus à ces quatre, sauf que 51 p. 100 de la population y vit, je vous le fais remarquer.
Il est cependant important de rappeler que les besoins et les solutions diffèrent dans des régions différentes du pays. L'égalité ne signifie pas équité. Il convient de traiter différemment des endroits différents.
Nous pouvons discuter pour déterminer si la ville de Winnipeg est comprise ou non.
M. Jack Layton: Regina l'est certainement.
M. Lorne Nystrom: Ma ville de Wynyard compte 2 500 personnes. Est-elle incluse?
Je veux poser une question à M. McMahon, si vous le permettez. Les impôts, toujours les impôts—je pourrais probablement discuter longuement avec des représentants de l'Institut Fraser au sujet des impôts. Même dans le cas de l'impôt sur les gains en capital, le résultat dépend partiellement de ce qu'est l'exemption.
Le gouvernement de la Saskatchewan a augmenté pour les sociétés l'exemption en ce qui concerne l'impôt sur les gains en capital, la faisant passer de 10 millions de dollars à 15 millions de dollars. Mais là encore, il s'agit d'impôts très peu élevés.
On vient d'accorder la plus grande réduction d'impôt de l'histoire du pays—100 milliards de dollars sur une période de cinq ans. D'énormes réductions d'impôt effraient une foule de gens. J'en reviens encore à ma circonscription et à ma province, où sévit une terrible sécheresse dans les Prairies, de sorte que les revenus agricoles dégringolent. Nous avons besoin d'un projet de loi d'aide agricole massive pour soutenir les agriculteurs lésés par le projet de loi américain sur le commerce.
Les Américains subventionnent leurs agriculteurs beaucoup plus qu'auparavant, leur accordant 180 milliards de dollars sur une période de 10 ans. Il faut des impôts pour payer une telle aide. Nous avons des problèmes d'itinérance, et il faut des impôts pour résoudre ce problème. Nous avons un programme national de soins de santé. Je pense que 90 p. 100 de la population du pays veut garder un programme national d'assurance-maladie financé par l'État. Nous avons besoin d'impôts pour cela. Dans ce cas, où allez-vous effectuer des compressions, si vous voulez cette sorte de régime d'impôts peu élevés?
Nous voyons maintenant les conséquences des compressions fiscales du gouvernement libéral, si je peux m'exprimer ainsi, en Colombie-Britannique. Avec ces réductions d'impôt, M. Campbell ressemble un peu à un Mike Harris fonctionnant aux stéroïdes. Pensez aux problèmes qui sévissent en Colombie-Britannique, en raison de compressions effectuées dans les localités. Il y a environ un mois, je suis allé à Nelson, en Colombie-Britannique, parler à environ 200 personnes, et l'on m'a dit que les mises à pied dans cette collectivité sont tout simplement dévastatrices. Alors, où tout cela s'arrête-t-il? Est-ce la fin des fins? Que fait-on des gens?
M. Fred McMahon: Eh bien, commençons par ce sur quoi nous nous entendons. Je pense que nous sommes tout deux horrifiés par le projet de loi agricole américain. Le sujet sur lequel nous cessons d'être d'accord est probablement celui des impôts.
M. Lorne Nystrom: Et Gordon Campbell...? Après tout, c'est un libéral.
M. Fred McMahon: Non, en fait, je suis très déçu. Je ne pense pas que Gordon Campbell se soit vraiment attaqué aux grands problèmes qui sévissent en Colombie-Britannique. C'est très bizarre; dans ce gouvernement, on parle beaucoup plus qu'on agit.
Je vais maintenant passer à votre question au sujet des compressions. Premièrement, il y a beaucoup de dépenses motivées par des intérêts politiques au Canada. Nous l'avons vu dans le cas des programmes de création d'emplois, des programmes de développement économique, et d'autres. C'est un endroit où l'on peut réduire les dépenses. Nous pouvons y économiser quelques milliards.
L'Agence de promotion économique du Canada atlantique est principalement une agence motivée par le favoritisme, comme c'est souvent le cas des agences de développement économique. Absolument rien n'indique qu'elles fonctionnent ou qu'elles créent des emplois. Certains de leurs rapports sur le nombre d'emplois créés sont de la pure science-fiction. Quand on regarde l'ensemble des données, on n'y trouve rien. C'est un secteur où l'on peut effectuer des compressions.
L'assurance-emploi n'est pas payée directement par les impôts, il s'agit plutôt de charges sociales. Je viens du Canada atlantique. Ce qu'on fait là-bas avec l'assurance-emploi est un crime. C'est essentiellement un programme gouvernemental de pots-de-vin d'un milliard de dollars offerts aux jeunes pour qu'ils ne poursuivent pas leurs études, pour qu'ils n'acquièrent pas de connaissances et ne cherchent pas un travail à plein temps. C'est une pot-de-vin pour les inciter à travailler dans des industries saisonnières. Nous pourrions économiser là beaucoup d'argent. Et il faudrait éliminer les subventions aux entreprises.
J'ai mentionné quelques secteurs. Comme Everett Dirksen l'a si bien dit, un milliard de dollars ici et là, et l'on parle bientôt de véritables sommes d'argent. Je pense que vous pourriez trouver un milliard ici et là, et commencer à parler de véritables sommes d'argent.
Pour ce qui est de l'impôt sur les gains en capital des sociétés, on pourrait très facilement s'en débarrasser. C'est une très petite partie de l'ensemble des recettes gouvernementales. On pourrait l'éliminer sans en ressentir les effets, et compenser cet argent par un milliard ici et là.
J'aimerais ajouter une note à certaines des observations sur l'imposition municipale. Je pense que c'est probablement une mauvaise idée de donner aux municipalités une part automatique de toute source de recettes, pour deux raisons. Lorsqu'un gouvernement obtient de l'argent sans avoir à rendre des comptes, ce qui arrive lorsqu'il reçoit une part automatique d'une source de recettes, il trouve des moyens de dépenser l'argent, peu importe comment. Donnez à un gouvernement municipal quelques milliards de dollars ou quelques centaines de millions de dollars, qu'il en ait besoin ou non, ou qu'il dépenserait si ses citoyens votaient en faveur de ces impôts, il trouvera un moyen de dépenser cet argent.
En outre—et c'est ce qui vous concerne le plus—quand un gouvernement doit dépenser plus d'argent et n'a pas la latitude voulue en ce qui concerne ses propres taxes, il éprouve alors ces problèmes. Je pense donc que les municipalités devraient être responsables de fixer leurs propres taux pour les recettes fiscales qu'elles reçoivent, et c'est le cas dans des municipalités aux États-Unis, comme Jack Layton l'a mentionné.
Á (1110)
M. Lorne Nystrom: Je me demande si Mme Berdahl aimerait répondre à ma question concernant les dépenses motivées par des intérêts politiques et la diversification de l'Ouest. Vous parliez de la diversification de l'Ouest. Vous avez dit dans votre mémoire qu'il existe des différences économiques et démographiques dans l'Ouest par rapport au reste du pays. Il serait peut-être utile aux membres du comité d'entendre parler de certaines de ces différences et de la façon dont on pourrait en tenir compte sur le plan financier.
Mme Loleen Berdahl: Parlez-vous de différences à l'intérieur de la région ou entre les régions du Canada?
M. Lorne Nystrom: Je veux parler des régions du Canada. Vous dites dans votre mémoire qu'il existe des différences économiques et démographiques. Il serait peut-être utile que vous expliquiez cela davantage.
Mme Loleen Berdahl: Certainement. Je commencerai par la question concernant la diversification économique.
Comme je l'ai mentionné, je vois une grande possibilité de changer le mandat de la DEO pour en faire une voix régionale à Ottawa—de fait, cette agence l'est déjà—ou pour lui accorder une voix plus forte afin qu'elle soit de plus en plus considérée comme un facilitateur pour la coopération régionale.
J'y vois une priorité parce que l'on a accordé passablement d'attention à l'Ouest canadien ces derniers temps. Lorsqu'on s'est intéressé à l'Ouest ces 30 dernières années, dans les milieux universitaires et dans les milieux politiques, on s'est principalement préoccupé de questions de désaffection ou de mécontentement dans l'Ouest, ou d'équité régionale. On ne s'est pas tellement occupé de choses que les gens de la région pourraient faire en travaillant ensemble dans leur propre intérêt, et je pense donc que la DEO peut jouer un rôle à cet égard.
Je veux dire par là qu'à l'heure actuelle, le gouvernement fédéral met peut-être davantage l'accent sur l'aspect diversification économique du titre de Diversification de l'économie de l'Ouest. Je mettrais plutôt l'accent sur l'Ouest comme tel, la voix de l'Ouest.
Pour ce qui est des différences économiques et démographiques entre l'Ouest et le reste du pays, et de ce qui fait que l'Ouest est unique à bien des égards, nous venons de publier un rapport au début de mai sur l'évolution du commerce, des exportations plus précisément, de l'Ouest, où nous séparons les données concernant l'Ouest des données nationales. L'économie de l'Ontario, et en particulier celle du secteur des pièces d'automobile, est tellement considérable dans les données nationales, qu'elle déforme la façon dont ces données sont présentées. Lorsqu'on sépare l'Ouest, on commence à voir des tendances très différentes.
La dépendance économique de l'Ouest face aux États-Unis est en croissance, mais elle n'est pas aussi importante que celle de l'Ontario. L'Ouest a encore une économie fortement dominée par le secteur des ressources. Nous parlons de diversification de l'économie depuis des années, depuis des décennies même. Nous ne voyons pas cette diversification se produire et on a donc cette économie axée sur les ressources qui est une distinction importante pour la région.
Cette économie fondée sur l'exploitation des ressources nous rend vulnérables à un certain nombre d'égards. Premièrement, nous sommes vulnérables à la volatilité des marchés axés sur les ressources. Deuxièmement, si l'on dépend des ressources naturelles qui ne sont pas renouvelables, les perspectives économiques à long terme sont différentes.
Troisièmement, et Fred et moi en discutions juste avant le début de cette réunion, on commence à voir beaucoup de protectionnisme se manifester aux États-Unis, au sujet des ressources naturelles, ce qui frappera en particulier l'ouest du Canada. C'est donc une préoccupation.
Pour ce qui est des différences démographiques dans l'Ouest du Canada, cette région est à peu près autant urbanisée que le reste du pays. La région est unique du fait que deux tiers des Autochtones vivant au Canada habitent dans les quatre provinces de l'Ouest, et ils sont particulièrement concentrés en Saskatchewan et au Manitoba. Cela signifie qu'il est particulièrement important pour l'Ouest du Canada de s'occuper de questions concernant les Autochtones, de chercher à combler certains des écarts socio-économiques qui existent ainsi que des questions liées aux traités.
Il y a un certain nombre d'éléments démographiques dignes de mention. Je veux parler en particulier de l'immigration. Dans l'Ouest du Canada, l'immigration est très inégale, en ce sens que la majorité des immigrants finissent par s'installer en Colombie-Britannique, en particulier à Vancouver, sinon ils ne vont pas du tout dans l'Ouest. Il faut vraiment commencer à chercher à attirer des immigrants dans la région et dans l'ensemble de la région.
Á (1115)
La présidente: Merci.
Madame Minna.
Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, madame la présidente.
Personnellement, je tiens à féliciter la FCM, Mme Slack et Mme Berdahl, ainsi que M. Knight pour leur travail sur les questions urbaines. Je suis vraiment heureuse de voir qu'on tient finalement un véritable dialogue dans ce pays—il est du moins entamé. Au sein du groupe de travail du premier ministre, ainsi qu'au cours des discussions de ce comité et d'autres auxquels vous participez, je pense qu'il est temps de commencer à s'occuper de ces questions d'une façon très agressive.
Je suis moi-même extrêmement en faveur d'une telle idée et je conviens qu'il faut examiner la question du financement. Il est certain que pour les grands centres urbains, quelle que soit la façon dont nous fixerons la ligne de démarcation, quand nous discutons de la question, il faut reconnaître qu'il y a une différence dans la façon dont les petites agglomérations pourraient être traitées, c'est-à-dire qu'elles peuvent nécessiter une approche différente. Tout en tenant compte de toutes ces différences, je pense qu'il est important d'identifier des moyens de financement à long terme pour les municipalités. C'est pourquoi je suis prête à examiner toutes les solutions possibles.
Je préférerais, comme le professeur Slack, un financement au moyen de taxes perçues, pour lesquelles les municipalités devraient rendre des comptes, parce que ce moyen permet d'établir un rapport entre les personnes qui paient les impôts—ou cela pourrait représenter une partie du financement, au lieu que tout provienne de transferts.
L'autre question qui doit être résolue également, et Mme Slack l'a mentionnée dans son allocution, c'est le fait que quelqu'un s'est déchargé de ses responsabilités, qu'il s'agisse du gouvernement fédéral à l'endroit des gouvernements provinciaux, mais dans bien des cas des provinces envers les municipalités, car nous transférons des sommes en fonction de la population, par exemple, ce qui est de l'aspect social... Le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux (le TCSPS) est versé aux provinces en fonction de leur population, ce qui inclut la population des municipalités.
Si les provinces ne consacrent pas cet argent à des questions sociales et se déchargent de cette responsabilité sur les municipalités, que se passe-t-il? Continuons-nous d'effectuer des transferts aux provinces en fonction de leur population? Il me semble donc qu'il faut des discussions vraiment rigoureuses dans le pays.
Mon unique question—car je veux passer ensuite à M. McMahon—concerne l'imputabilité et la perception d'impôt.
Madame Slack, monsieur Layton, avez-vous examiné l'aspect constitutionnel de cette question, ou la FCM l'a-t-elle fait? Ces mesures sont-elles possibles sans qu'il soit nécessaire de modifier la Constitution? Vous savez en effet ce que cela signifie; nous n'arriverons jamais à résoudre ce problème s'il faut une telle modification. Pouvons-nous régler la question de l'imputabilité, au moyen d'un impôt direct quelconque, sans qu'il soit nécessaire de modifier la Constitution? Avez-vous examiné la question dans ce contexte?
Á (1120)
M. Jack Layton: Je pourrais peut-être répondre en premier.
Pour que les villes aient leur propre pouvoir d'imposer les revenus ou de taxer les ventes, à notre avis, il faudrait probablement entamer des négociations qui risqueraient de soulever des questions d'ordre constitutionnel, et elles seraient donc probablement difficiles. Il faudrait procéder avec un très grand soin. Le tout prendrait probablement plusieurs mois, peut-être même des années. D'ici là, il faut s'occuper quand même de notre infrastructure.
C'est pourquoi nous proposons aujourd'hui que le gouvernement fédéral se joigne à nous et s'occupe des trois besoins identifiés comme urgents par le groupe de travail du premier ministre: un programme national de logements complètement révisé et financé; un programme complet d'investissement dans le transport en commun, car notre pays se distingue vraiment du fait que notre gouvernement national n'investit aucunement dans le transport en commun; et enfin, un programme d'infrastructure doté d'un financement à long terme afin que chaque Canadien puisse avoir accès à de l'eau propre et que nous ne déversions pas d'eaux usées dans des cours d'eau avoisinant nos villes. Nous voulons vraiment que votre comité nous aide à faire entrer ces questions dans les discussions sur le budget.
Pour revenir au monde de la réflexion intellectuelle à long terme, nous voulons certainement explorer des solutions à plus long terme, des solutions durables, assorties d'un élément d'imputabilité, mais pour l'instant, nous regardons cette situation où la structure financière du pays évolue. Il y a 10 ans, nous n'étions pas dans une situation où le gouvernement fédéral disposait d'excédents de l'ordre de 15 milliards de dollars. Nous n'étions pas dans une situation où les sommes transférées aux provinces par le gouvernement fédéral au titre des programmes sociaux--et une bonne partie de cet argent allait également aux municipalités, dans certaines provinces--avaient été réduites. Je sais que ces sommes sont maintenant calculées en fonction de la population, mais comparativement au niveau de financement passé, ces sommes ont été considérablement réduites dans certains domaines, et c'est l'une des raisons pour lesquelles il y a maintenant un excédent. On commence maintenant à en voir les conséquences, 10 ans plus tard. Nous devrons commencer à voir comment on pourrait résoudre ce problème, car les municipalités, avec leurs impôts fonciers, ne pourront tout simplement pas par elles-mêmes résoudre un grand nombre des problèmes auxquels nous devons trouver une solution maintenant.
Voilà donc essentiellement ce que je voulais dire. Nous voulons travailler avec vous à la restructuration du financement à long terme, mais nous avons vraiment besoin de votre aide pour ce qui est du prochain budget. Nous pensons qu'il y a déjà eu des progrès sur lesquels nous pouvons tabler. Nous avons surmonté ce qui aurait pu être considéré comme des obstacles constitutionnels, mais il y a encore des gens, même dans cet édifice, qui diront que les municipalités relèvent vraiment des provinces. Cela nous préoccupe, car nous pensons qu'il faut vraiment nous éloigner de cette façon de penser traditionnelle encore plus que nous le faisons maintenant.
Mme Enid Slack: Certains d'entre nous travaillent justement sur les questions que vous avez posées. Il y en a beaucoup. Lorsque nous parlons de la perception d'impôt sur le revenu par les municipalités, on pense aux accords de perception d'impôt conclus entre le gouvernement fédéral et les provinces. Il y a une loi sur les municipalités dans chaque province, et elles diffèrent toutes les unes des autres. En Ontario, par exemple, la loi stipule expressément que les municipalités ne peuvent pas percevoir d'impôt sur le revenu.
Il y a beaucoup d'études et de négociations qui seront nécessaires avant d'en arriver à une solution. Cela ne veut pas dire que ce n'est pas faisable, mais il y a quand même certains obstacles en cours de route.
Mme Maria Minna: [Note de la rédaction: Difficultés techniques]... Par rapport à ce qu'il a dit précédemment au sujet des comparaisons entre le Canada et les États-Unis, lorsque vous avez fait votre exposé au début. C'est quelque chose que j'ai entendu dire à maintes reprises de la part de différents témoins. On nous compare constamment de façon défavorable en général.
L'Irlande est toujours citée comme l'exemple favori, et franchement j'en ai assez de l'entendre citée en exemple et je vais vous dire pourquoi. Lorsque j'ai parlé à des politiciens de l'Irlande, ils m'ont dit très franchement que ce ne sont pas les réductions d'impôt qui ont stimulé l'économie, mais le fait qu'ils aient reçu énormément d'argent de l'Union européenne et le fait qu'ils aient offert l'accès gratuit aux universités. L'éducation a donc alimenté le moteur de l'économie, puis les réductions d'impôt sont venues par la suite dans une certaine mesure. Ils n'accordaient cependant pas tout le crédit aux réductions d'impôt.
Je pense que nous devons voir les choses en perspective. Si on donnait à tous les jeunes Canadiens l'accès gratuit à l'université et si on mettait en place un programme de développement du jeune enfant, de la naissance à six ans, imaginez le pouvoir humain que nous aurions au Canada—si nous envisagions le potentiel humain pour changer les choses, et pas seulement les réductions d'impôt. Je voulais donc présenter les choses dans ce contexte.
J'aimerais revenir aux chiffres indéniables, car lorsqu'on nous compare aux États-Unis, je veux également examiner certains chiffres que j'ai ici du ministère des Finances. Dans les réductions budgétaires de 2000, nous allons regarder, de 2000 à 2005... Le taux fédéral d'impôt sur le revenu qui se situe à 26,12 p. 100 en 2002—c'est pour le Canada—sera de 22,12 p. 100 en 2005. Le taux fédéral d'impôt sur le revenu aux États-Unis se situe à l'heure actuelle à 35 p. 100 par rapport à 26 p. 100 pour le Canada, et restera à 35 p. 100 en 2005 par rapport à 22 p. 100 au Canada. Le taux provincial d'impôt sur le revenu au Canada se situe à l'heure actuelle à 38 p. 100. Au x États-Unis il est de 39 p. 100. Au Canada il sera de 31 p. 100 en 2005 et il s'établira à 39 p. 100 aux États-Unis. Le taux d'impôt fédéral-provincial sur le revenu des entreprises, incluant l'impôt sur le capital au Canada est de 41, 5 p. 100 à l'heure actuelle, et sera de 34, 6 p. 100 en 2005; aux États-Unis, il se situe à 40 p. 100 à l'heure actuelle et se situera à 40 p. 100 en 2005.
Sauf votre respect, je pense que les choses vont assez bien pour nous. Non seulement cela, mais nos taxes servent à payer différentes choses, ce dont on ne tient jamais compte lorsqu'on donne des chiffres en général. Lorsque j'entends parler de l'impôt des sociétés, je n'entends jamais parler des avantages sociaux, des soins de santé, du fait que les entreprises au Canada ne sont pas tenues de payer et de négocier cela à la table de négociations. Il y a aussi le coût de la vie. Dans certaines régions des États-Unis, mon collègue ici me dit que l'assurance de son véhicule automobile lui coûte 600 $ pour six mois, non pas pour toute l'année. Je pense qu'ici dans certains cas il est possible d'assurer une voiture pour deux ans pour ce montant. Ensuite il y a le coût de la vie. je regardais récemment un tableau sur les provisions—des choses que nous importons des États-Unis. Elles coûtent moins cher ici au Canada par rapport à ce qu'elles coûtent dans certaines villes américaines. Nous comparons donc constamment des pommes et des oranges.
En ce qui concerne l'impôt de base des sociétés, si je regarde nos réductions d'impôt et si je regarde quel sera notre taux d'imposition en 2005 et quel sera le taux d'imposition aux États-Unis en 2005, il me semble que nous allons nous retrouver derrière eux. Alors pourquoi disons-nous constamment que nous n'avons pas suffisamment de réductions d'impôt et que nous devons les réduire davantage? Où allons-nous réduire? Dans les programmes de formation pour aider les gens à trouver des emplois? Chacun sa propre interprétation de l'APECA, mais ce serait la même que pour la diversification de l'Ouest, qui devrait être éliminée également. Le développement régional serait alors éliminé. Sabrons dans les programmes qui en fait...
Je ne suis pas en train de me défouler; je dis tout simplement que j'aimerais voir des chiffres. D'après les chiffres du ministère des Finances, à moins que vous me disiez que leurs chiffres sont tout à fait détraqués, je constate qu'en ce qui a trait à l'impôt sur les sociétés, y compris l'impôt sur le capital, d'ici 2005, notre taux d'imposition sera de 5,4 p. 100 inférieur à celui des États-Unis.
Á (1125)
M. Fred McMahon: Tout d'abord, permettez-moi de faire une observation au sujet de votre préambule sur l'Irlande. Les Irlandais ont réformé leur enseignement postsecondaire au milieu des années 60, je crois, ou peut-être un peu plus tard.
Je me rappelle, lorsque je me trouvais dans un bureau à Dublin, avoir entendu deux types de la banque centrale parler ensemble et l'un a dit à l'autre: «Le milieu des années 80 a été une époque épouvantable, n'est-ce pas, Rafique?». Il a répondu: «Oui, il semble qu'à l'époque les gens prenaient un taxi pour se rendre directement de l'Université à l'aéroport afin d'aller trouver un emploi aux États-Unis».
Oui, les Irlandais ont offert une bonne éducation. Ils l'ont offerte quelques décennies avant le début de leur miracle économique. Lorsque leurs impôts étaient élevés, ils exportaient leurs gens bien éduqués vers le Royaume-Uni et les États-Unis. Les gens commencent maintenant à revenir.
Pour ce qui est des subventions de l'Union européenne à l'Irlande, elles situent en général entre 2 p. 100 et 4 p. 100 du PIB. La moitié était des subventions agricoles. Nos transferts nets au Canada atlantique sont entre 20 et 40 p. 100 du PIB. Si ce genre de subventions aidaient, le Canada atlantique serait l'étoile économique—non pas l'Irlande qui n'a pas reçu grand-chose de l'Union européenne en comparaison. Comme je l'ai dit, il y a eu des réductions d'impôt majeures, qui ont été de loin plus brutales qu'en Grande-Bretagne ou aux États-Unis sous Thatcher ou Reagan. Ce qui est encore plus important, c'est qu'à cela venait s'ajouter le fait que les syndicats étaient d'accord avec l'idée selon laquelle les profits étaient importants pour l'économie.
Pour ce qui est des programmes qui doivent faire l'objet de coupures, vous m'avez lancé toute une série de chiffres. J'aurais bien aimé que Jason soit ici, car il connaît plus de chiffres que tous ceux dont je pourrais me rappeler au cours de ma vie. Je pense cependant qu'il ne faut pas oublier deux choses. Si on regarde les impôts sur les sociétés au Canada, nos taux les plus élevés se situent à un niveau assez bas. Aux États-Unis, le taux marginal d'imposition élevé dont vous parlez s'applique lorsqu'on parle de quelques centaines de milliers de dollars, je crois. Les nôtres s'appliquent bien avant cela.
En ce qui concerne l'imposition des sociétés en général, non pas seulement l'impôt sur le capital des sociétés—KPMG vient tout juste de publier une étude qui révèle que le fardeau fiscal cette année au Canada se situe à 42,1 p. 100. Il est à la baisse, et il atteindra 38,6 p. 100 l'an prochain. Je n'établirai pas de comparaison avec les États-Unis pour commencer, mais le taux d'imposition des sociétés en général pour les pays de l'OCDE se situe à 31,4 p. 100. Dans les pays de l'Union européenne—les pays où le taux d'imposition est réellement élevé—il est de 32,5 p. 100. Aux États-Unis, en fait le fardeau fiscal des sociétés est assez élevé, à environ 40 p. 100, une comparaison qui vous plaira. En Irlande, il est de 20 p. 100, à la baisse pour atteindre 16 p. 100.
Nous avons encore une grande marge pour réduire les impôts ici au Canada. les chiffres en général le montrent bien. Nous taxons 40 p.. 100 de notre économie. Aux États-Unis, c'est 30 p. 100. L'un des avantages lorsqu'on réduit les impôts—comme le révèlent des études qui ont été faites dans le monde entier, non pas seulement en Irlande ou aux États-Unis—c'est que lorsqu'on réduit les impôts pour stimuler la croissance économique, cela se traduit au bout du compte par davantage d'argent.
Á (1130)
La présidente: Très rapidement, madame Minna.
Mme Maria Minna: Vous avez fait allusion à un taux d'imposition des sociétés de 41 p. 100 cette année, mais vous avez négligé de reconnaître le fait que le budget de 2000 est une réduction progressive. D'ici 2005, le taux d'imposition aura été réduit à 34,6 p. 100, tandis qu'aux États-Unis il se situera à 40 p. 100.
À mon avis, il s'agit là d'un excellent progrès pour le Canada. Cela nous place dans une très bonne position, sans mentionner le fait que les réductions d'impôt américaines prendront fin après dix ans, ce qui est une façon intéressante de réduire les impôts.
M. Fred McMahon: Je suis heureux que nous soyons tous les deux d'accord pour dire que les réductions d'impôt seront bonnes pour l'économie canadienne dans la situation actuelle.
Mme Maria Minna: Je ne dis pas que nous devions réduire davantage les impôts, cependant. Je dis que nous les avons déjà suffisamment réduits. D'ici l'an 2005, nous serons en fait derrière les États-Unis, ce qui est assez bon, à ce moment-ci.
La présidente: À titre d'éclaircissement, lorsque vous dites «derrière», vous voulez dire que le taux d'imposition sera moins élevé?
Mme Maria Minna: D'ici 2005, il sera en fait moins élevé au Canada qu'aux États-Unis.
La présidente: Très bien. Je voulais tout simplement tirer cela au clair.
Mme Maria Minna: À ce moment-ci, nous devrions songer à investir dans les gens.
La présidente: Merci.
Monsieur Penson, pour une question, suivi de M. Pillitteri.
M. Charlie Penson: Je voudrais poser une question à M. McMahon et Mme Berdahl.
Je voulais tout simplement dire, M. McMahon, que l'une des raisons pour lesquelles nous ne vous avons pas parlé davantage de l'impôt sur le capital, c'est que Jack Mintz de l'Institut C.D. Howe et Herb Grubel sont venus nous rencontrer précédemment pour parler de cette question très importante. Si j'ai bien compris, vous dites que pour le montant que le trésor fédéral en retire, le coût est élevé relativement à l'investissement global au Canada. C'est négatif sur le plan de l'investissement. Est-ce bien ce que vous dites?
M. Fred McMahon: Absolument. Il est important—et je l'ai peut-être fait par inadvertance—de ne pas confondre l'impôt sur le revenu des sociétés et l'impôt sur le capital des sociétés. Pour ce qui est de l'impôt sur le capital des sociétés, oui, vous avez très bien compris. C'est un montant relativement peu élevé, soit environ, 0,6 p. 100 des recettes fédérales. Cela crée énormément de distorsion. Nous pourrions épargner de l'argent, tant sur le plan du recouvrement que de la stimulation de l'activité économique, si on l'éliminait.
Au fait, je ne sais pas si c'est la même chose pour vous, mais je suis assez obtus en ce qui concerne les questions fiscales. Il serait donc très utile pour moi qu'on me répète trois fois la même chose, mais je m'excuse si je reviens sur des questions dont on a déjà beaucoup parlé.
Á (1135)
M. Charlie Penson: Non, je pense que c'est important. D'après l'exposé que nous ont présenté M. Mintz et M. Grubel, nous savons que nous avons besoin d'un certain niveau d'imposition, mais quelle est la meilleure façon de le faire sans que cela empêche les gens de travailler, d'investir ou d'épargner? Seriez-vous d'accord pour dire...?
M. Fred McMahon: C'est tout à fait juste. À ce moment-ci, comme le dit le titre du document que je vous ferai parvenir, il s'agit de la taxe qui fait le plus de tort au Canada.
M. Charlie Penson: Merci.
J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Berdahl. J'ai été un peu surpris que vous choisissiez la Diversification de l'économie de l'Ouest comme moyen d'atteindre les objectifs de l'Ouest canadien. C'est peut-être en partie parce que les gens de l'Ouest estiment qu'ils ont droit eux aussi à une part du gâteau.
Il me semble que l'on a considérablement discrédité les programmes de développement régional. La vérificatrice générale, année après année, nous dit que ce n'est pas un bon investissement. Ce regard de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique dont M. McMahon a parlé, cela représente une partie très importante de l'argent qu'elle obtient d'Ottawa, mais bon nombre d'institutions ont discrédité ce modèle. Je me demande pourquoi on voudrait faire cela plutôt que de réduire les taxes fédérales, les règlements et les obstacles au commerce interprovincial, ce qui serait beaucoup plus efficace.
Mme Loleen Berdahl: Je pense que c'est une question formidable. J'hésite un peu à suggérer d'élargir la Diversification de l'économie de l'Ouest, et je ne suggère pas cela; je suggère d'élargir son mandat. Cela pourrait même vouloir dire changer ce que nous pensons que fait la Diversification de l'économie de l'Ouest.
Lorsque les gens dans la région pensent à la Diversification de l'économie de l'Ouest, nous pensons à la présence et à la voie du gouvernement fédéral dans la région, beaucoup plus qu'aux programmes même de diversification de l'économie, ou aux programmes de développement économique. D'une certaine façon, il y a donc une tension.
Je ne suis pas ici pour suggérer d'élargir les programmes de développement économique dans l'ouest du Canada. Je suis ici pour dire que de nous devrions examiner le fait que la Diversification de l'économie de l'Ouest est une entité fédérale qui est présente dans l'Ouest, qui a une certaine crédibilité dans l'Ouest, mais qui est en mesure de participer aux négociations sans que les gens se disent: «Oh, le gouvernement fédéral est ici...». Je ne m'exprime pas aussi bien que je le voudrais.
La Diversification de l'économie de l'Ouest a un certain capital politique qui serait avantageux à l'idée de la coopération régionale. Si nous allons de l'avant en ce qui a trait à la coopération régionale, et j'espère que la région le fera, ce serait bien que le gouvernement fédéral puisse participer au dialogue, ou tout au moins être au courant de ce dialogue. Je pense que la DEO, étant la voix fédérale dans la région, est en quelque sorte un avantage.
Comme je l'ai déjà mentionné, je sépare en quelque sorte le terme «de l'Ouest» du terme «diversification de l'économie» dans le titre. Au cours des dernières années, la DEO a fait l'objet de nombreuses critiques, surtout en ce qui a trait à la diversification économique. Ces critiques n'étaient peut-être pas justifiées. Personnellement, je n'ai pas fait de recherche à ce sujet, de sorte que je ne peux faire de commentaire.
Ce que je crains, c'est que si nous disions: «Le modèle de développement économique ne nous plait plus, alors éliminons-le», il n'y aurait plus de présence fédérale dans l'ouest du Canada. C'est pourquoi je suggère que l'on commence à reconsidérer le mandat et le rôle de la DEO. Je pense qu'il est nécessaire d'avoir une présence dans l'Ouest. Cette présence s'est très bien développée au bureau régional, et je n'aimerais pas beaucoup qu'on l'élimine sans tenir compte de cette voix régionale.
M. Charlie Penson: Je vous remercie pour cette explication.
La présidente: Monsieur Pillitteri, à vous de poser la dernière question.
M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.
Je vais d'abord poser deux ou trois questions qui me trottent dans le tête puisque je suis ici depuis assez longtemps pour me souvenir de beaucoup de ces exposés.
J'aime bien le scénario au sujet des Irlandais et des gens qui sortent de l'université, qui prennent un autocar ou un billet d'avion et qui se rendent aux États-Unis. Voici la question que je veux vous poser. Voyez, j'ai une famille, et j'ai un fils que je voulais envoyer faire des études en Irlande étant donné qu'il ne lui était pas possible, ici, au Canada, d'aller à l'université. Au milieu ou à la fin des années 70, il n'y avait pas assez de places dans les écoles de médecine ou de droit au Canada pour tous ceux qui voulaient faire des études de ce genre, et l'Irlande est un pays dont le Canada reconnaît les diplômes. Par conséquent, il y a eu beaucoup de Canadiens qui sont allés faire des études en Irlande et qui ont ensuite fait reconnaître leurs diplômes au Canada.
Avez-vous des statistiques sur le nombre de Canadiens qui sont allés s'instruire à leurs frais en Irlande? Ils ne faisaient pas partie de ce que l'on pourrait appeler un exode des cerveaux, puisqu'ils sont uniquement allés là-bas pour y faire des études. Voilà donc ma première question.
Je voudrais également dire autre chose au sujet de votre exposé. Nous savons, par exemple, que près de 25 p. 100 de nos dépenses proviennent des recettes de la TPS, dont le taux est de 7 p. 100. Elle produit des recettes de 20 milliards de dollars. En ce qui concerne la fiscalité, quelle est la part de l'impôt sur le revenu des particuliers, celle de l'impôt des sociétés et celle des charges sociales? Aux États-Unis, c'est beaucoup plus élevé. Pouvez-vous nous présenter des colonnes comparatives afin que nous puissions équitablement poser des questions à tous sur ce que nous faisons en matière de restructuration des dépenses pour les programmes publics? Voilà donc également une autre question que je voudrais poser.
Monsieur Knight, j'ai également oeuvré dans la politique municipale avant de venir ici. Je me souviens que nous mettions de l'argent de côté pour les dépenses en immobilisations. En fait, très souvent, les municipalités les plus frugales épargnaient beaucoup d'argent. Pourquoi n'exigerait-on pas des municipalités qu'elles rendent des comptes lorsque, tous les ans, elles adoptent un budget selon lequel elles ne vont pas augmenter les impôts avant la prochaine élection municipale? Pour ne pas augmenter les impôts, elles retirent de l'argent des budgets d'immobilisations et s'en servent pour réduire le taux par mille. Autrement dit, les conseillers municipaux essaient de se faire réélire.
Pensez-vous qu'il faut les contraindre à agir de façon plus responsable? Si l'argent est mis de côté, ne faudrait-il pas qu'il soit utilisé uniquement pour les fins prévues? Les villes pourraient alors avoir les infrastructures appropriées, alors qu'actuellement, tout à coup, elles se servent de cet argent et disent: désolées, nous n'avons pas d'argent pour nous lancer dans un programme d'infrastructure.
Comme vous voyez, il s'agit d'une question à deux volets. Je voudrais avoir vos réponses à ces questions.
Á (1140)
M. Fred McMahon: Tout d'abord, non, malheureusement, j'ignore le nombre de Canadiens qui vont faire des études en Irlande. Je peux vous dire que, dans l'avion qui me ramenait d'Irlande, j'ai eu une conversation très intéressante avec un jeune étudiant canadien en médecine. Je sais donc qu'il y en a au moins un.
Pour ce qui est de la ventilation des recettes fiscales, ces chiffres sont faciles à trouver, mais je ne les ai malheureusement pas. Encore une fois, Jason n'est pas ici, et il aurait pu vous fournir les chiffres pour chaque province, chaque ville et chaque territoire. Mais il est important d'essayer de maintenir la simplicité de l'ensemble du fardeau fiscal. La TPS, qui est une taxe à la consommation, est une taxe très simple, bien conçue. Nous devrions chercher à recourir à des impôts uniformes dans toute notre économie, là où nous pouvons les obtenir. Cela dit, je le regrette, je ne peux vous fournir la ventilation précise.
M. Gary Pillitteri: Je vais faire une observation à ce sujet avant que M. Knight ne réponde. Quel est le taux de la taxe à la valeur ajoutée en Irlande? Faisons une comparaison. Vous pourriez également nous donner le taux des taxes à la valeur ajoutée qui existent principalement dans les pays d'Europe.
M. Fred McMahon: Je regrette, je ne me souviens pas du taux de la taxe sur la valeur ajoutée en Irlande.
M. James Knight: Merci de votre question concernant les réserves municipales et leur utilisation pour des fins politiques à court terme. Bien sûr, les administrations municipales et les conseils municipaux doivent rendre des comptes de l'utilisation de l'argent des contribuables. Vous avez soulevé un aspect que je considère fondamental: l'insuffisance des impôts fonciers. C'est le seul type de taxe qui vous arrive par le courrier. Je connais le montant exact de mes impôts fonciers, mais je ne sais pas combien j'ai payé en TPS. Je ne sais pas du tout ce que j'ai payé en taxe d'accise, ni même, je l'avoue, en impôt sur le revenu, bien que j'ai appris certaines choses à ce sujet aujourd'hui.
Les impôts fonciers sont très visibles, et ils sont donc assez controversés du point de vue politique, du point de vue des efforts de se faire réélire. Les élus locaux peuvent difficilement augmenter les impôts fonciers, parce qu'un autre candidat va faire campagne sur sa promesse de réduire ces mêmes impôts. Comme c'est une taxe très visible qui est envoyée par la poste, les impôts fonciers créent une vulnérabilité politique.
C'est pourquoi nous sommes d'avis qu'il est nuisible aux municipalités de devoir miser trop sur les impôts fonciers. C'est pourquoi les administrations municipales dans d'autres pays en dépendent beaucoup moins, puisque les impôts fonciers constituent un outil très peu raffiné. C'est une taxe régressive. Des aînés qui habitent des quartiers bien établis où les valeurs foncières sont à la hausse peuvent être forcés de quitter leur maison dans certains cas. C'est une taxe que les élus ont beaucoup de difficulté à appliquer. Ces impôts sont importants et nécessaires, et ils devraient contribuer de façon significative aux revenus municipaux, mais dans certaines villes ils représentent 80 p. 100 des recettes, ce qui est beaucoup trop élevé. Il faut que les municipalités aient accès aux taxes d'accise, aux impôts sur le revenu, aux taxes de vente, etc., qui comportent moins de risques politiques. C'est notre point de vue.
Á (1145)
La présidente: Monsieur Penson, vous avez la parole.
M. Charlie Penson: J'aimerais demander à Mme Berdahl si elle pourrait envoyer au comité un exemplaire de l'étude qu'elle a citée et qui a donné des chiffres sur l'ouest du Canada en ce qui concerne...
La présidente: D'accord. Si vous voulez bien l'envoyer au greffier du comité, nous allons la faire distribuer à tous les membres.
Merci beaucoup au nom de tous les membres du comité. Nous étions 11 ici aujourd'hui. Je suis heureuse à l'idée que nous allons tous recevoir cette information; nous allons envoyer le document à tout le monde.
La séance est levée.