Bienvenue à la 111e réunion du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes.
Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 18 avril 2024, le Comité entreprend son étude sur l'état de la concurrence entre les lignes aériennes au Canada.
Avant de commencer, j'aimerais rappeler les mesures préventives importantes suivantes à tous les députés et aux autres qui participent à la réunion dans la salle.
Afin de prévenir les retours de son dérangeants et potentiellement dommageables qui peuvent causer des blessures, on rappelle à tous les participants en personne de garder leurs écouteurs loin du microphone en tout temps. Comme il est indiqué dans le communiqué que le Président a adressé à tous les députés le lundi 29 avril, tous les écouteurs doivent être remplacés par un modèle qui réduit considérablement la probabilité de retour de son. Les nouveaux écouteurs sont noirs, alors que les anciens étaient gris. Veuillez utiliser seulement les écouteurs en noir approuvés. Par défaut, tous les écouteurs non utilisés seront débranchés au début d'une réunion. Lorsque vous n'utilisez pas votre écouteur, veuillez le placer vers le bas, comme il est indiqué, au milieu de l'autocollant à cette fin — vous le trouverez sur la table. Veuillez consulter les cartes sur la table pour obtenir des lignes directrices visant à prévenir les retours de son.
Chers collègues, l'aménagement de la salle a été modifié pour accroître la distance entre les microphones et réduire le risque de rétroaction acoustique provenant d'une oreillette ambiante. Ces mesures sont en place pour que nous puissions mener nos activités sans interruption et protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris de nos interprètes. Je vous remercie tous de votre compréhension et de votre coopération.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion avec les témoins, j'aimerais également vous informer que tous les témoins ont effectué et réussi les tests requis avant la réunion.
J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.
Nous recevons M. John Gradek, chargé de cours et coordonnateur de programme, Leadership en aviation, à l'École d'éducation permanente de l'Université McGill — mon alma mater —, qui comparaît à titre personnel. Il se joint à nous par vidéoconférence.
Je vous souhaite la bienvenue, monsieur.
Nous accueillons M. Karl Moore, professeur agrégé, également de l'Université McGill, qui témoigne à titre personnel.
Bienvenue, monsieur.
[Français]
Nous recevons, à titre personnel, M. Jacques Roy, qui est professeur titulaire à HEC Montréal. Il se joint à nous par vidéoconférence.
Nous recevons également M. Mehran Ebrahimi, qui est directeur de l'Observatoire international de l'aéronautique et de l'aviation civile. Il est aussi professeur à l'Université du Québec à Montréal. Il se joint également à nous par vidéoconférence.
Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.
[Traduction]
Nous allons maintenant commencer par les déclarations préliminaires.
Sur ce, je cède la parole à M. Gradek.
Vous avez cinq minutes, monsieur.
Je remercie les membres du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes de m'avoir invité, ainsi que mes collègues du milieu universitaire, à venir vous parler aujourd'hui de l'état de la concurrence entre les lignes aériennes au Canada.
Mes commentaires à ce sujet sont le fruit de près de 50 années passées à travailler dans les entrailles de l'industrie ou à enseigner aux gestionnaires du monde entier les choses à faire et à ne pas faire pour obtenir un rendement financier et opérationnel respectable dans l'industrie. On pourrait dire que j'ai observé les hauts et les bas de la déréglementation du Canada. Il y a eu notre fameux livre blanc Aller sans entraves à partir de 1985, la Loi sur les transports au Canada en 1987, la privatisation d'Air Canada et bien d'autres éléments, y compris, bien sûr, l'évolution de nombreux transporteurs aériens commerciaux au Canada.
L'état de la concurrence entre les lignes aériennes au Canada a beaucoup évolué ces derniers temps aux yeux des voyageurs aériens canadiens, comme en témoigne la réduction des activités de nombreux exploitants qui se sont présentés comme des transporteurs à faible ou à très faible coût. Cette mesure de l'activité est-elle vraiment le bon indicateur que nous devrions utiliser pour déterminer si nous sommes ou non un point névralgique pour la concurrence dans le secteur de l'aviation? J'ai posé cette question pour la forme dans un article récent du Hill Times: L'aviation civile canadienne est-elle en crise? La réponse devrait être non. L'industrie est simplement en train de traverser ce qui a été décrit comme des écueils habituels — des bouleversements dans l'évolution des compagnies aériennes.
Les transporteurs se lancent en grande pompe, avec des tarifs aériens réduits, au grand plaisir des voyageurs aériens canadiens. On crée de grandes attentes en matière d'expansion afin d'offrir un service aérien et des tarifs moins élevés aux marchés primaire et secondaire. Des avantages encore plus importants liés à de multiples nouveaux transporteurs ayant des stratégies similaires ont été lancés. C'est une excellente nouvelle pour les Canadiens qui, par nature, adorent les bas tarifs aériens.
Même si la phase de la lune de miel est prometteuse, dans un délai relativement court, la réalité de la concurrence est que les activités commerciales canadiennes ont une incidence sur la viabilité financière de ces entreprises canadiennes en démarrage. Le nombre de marchés canadiens du transport aérien dans lesquels ces exploitants exercent traditionnellement leurs activités est le même que là où des duopoles sont établis au Canada. Très peu de nouveaux centres urbains canadiens ont profité de cette concurrence accrue. Très peu de centres urbains au Canada comptent plusieurs aéroports et ont la capacité de soutenir de multiples transporteurs qui essaient d'augmenter la fréquence. De nouveaux transporteurs ont renforcé leur présence en plus des services existants, et la concurrence en matière de prix pourrait limiter la réponse concurrentielle pendant un certain temps seulement.
Alors que les transporteurs traditionnels réagissaient à cette concurrence et réduisaient leurs tarifs en cours de route, les nouveaux transporteurs devaient constamment réduire leurs tarifs pour maintenir leur écart concurrentiel. C'est le nivellement par le bas. Nous savons tous comment cette histoire se termine. On y a mis fin à maintes reprises depuis le début des années 1990.
Le gouvernement fédéral de feu l', sous le mandat de feu l', avait de grands idéaux pour l'évolution de l'industrie aérienne canadienne — comme le prévoit la Loi sur les transports au Canada depuis de nombreuses années —, où la concurrence et les forces du marché, au sein des divers modes de transport et entre eux, sont les principaux facteurs en jeu dans la prestation de services de transport viables et efficaces. Malheureusement, les maigres marchés intérieurs du transport aérien ont rendu ces idéaux très difficiles à atteindre.
Les voyageurs aériens canadiens ont besoin d'un meilleur ensemble de mesures de l'efficacité lorsqu'il s'agit d'évaluer l'état de la concurrence entre les lignes aériennes au Canada. Tout commence par un meilleur ensemble de possibilités réalisables, réalistes et viables.
Merci beaucoup.
Tout d'abord, je remercie les membres du Comité de m'avoir invité ce matin à venir vous faire part de mes réflexions sur le sujet qui est à l'étude.
Je suis tout à fait d'accord sur les propos de M. Gradek.
Comme vous le savez, nous, les professeurs, nous sommes habitués à discuter d'un sujet pendant trois heures. Je vais donc sortir un peu de mon texte, parce que je n'y arriverai pas en cinq minutes.
J'aimerais aborder rapidement trois thèmes, soit le marché intérieur canadien — M. Gradek en a beaucoup parlé —, le transport régional et les aéroports, mon sujet favori sur lequel j'aimerais glisser quelques mots.
Parlons d'abord du transport intérieur canadien. Aussi loin que je m'en souvienne, il y a toujours eu, essentiellement, Air Canada. Pendant longtemps, il y a aussi eu un deuxième transporteur établi dans l'Ouest, soit les Lignes aériennes Canadien International. Les deux concurrents ont fusionné au début des années 2000.
Au départ, c'était un mariage un peu forcé, mais cette fusion a par la suite ouvert la porte au transporteur WestJet, qui a été lancé en 1996 comme transporteur à bas coût. WestJet a connu une croissance assez phénoménale entre 2000 et 2016. En effet, sa part de marché est passée de 6 % à 41 %. Cela a évidemment intéressé beaucoup de nouveaux joueurs, qui ont décidé de devenir également des transporteurs à bas coût.
Puis, les Jetsgo de ce monde se sont lancés dans l'aventure, qui a connu une fin assez tragique. Même Air Canada a lancé son service Tango et des filiales Zip. Tout le monde voulait accaparer un peu ce marché des transporteurs à bas coût.
Finalement, la compagnie WestJet a elle-même réalisé les limites de ce modèle, parce qu'il y a très peu de paires de villes au Canada qui sont capables de soutenir la présence d'un transporteur à rabais avec des appareils comme les Boeing 737. Le marché fait en sorte que ce modèle de Southwest Airlines, offrant des services point à point sur de courtes distances à bas coût, est très difficile à reproduire au pays.
Pour croître, WestJet a dû ouvrir de nouveaux marchés et s'en aller vers des marchés internationaux, s'éloignant ainsi des conditions de succès des transporteurs à bas coût.
Aujourd'hui, de nouveaux joueurs sont présents sur le marché, mais nous constatons qu'ils rencontrent des difficultés. Parmi ces nouveaux joueurs, il y a Lynx Air et Flair Airlines, qui continuent d'offrir des services. Porter Airlines va aussi chercher une certaine part de marché dans certains créneaux.
Air Canada maintient sa position dominante aujourd'hui. WestJet a perdu près de 10 % du marché au profit des autres transporteurs.
Je vais aborder brièvement la question de la concurrence à l'échelle régionale. La situation est encore plus difficile, parce que le petit nombre de passagers fait évidemment en sorte que les transporteurs vont utiliser de plus petits appareils, ce qui signifie des coûts plus élevés par siège. Si on a de la difficulté à remplir les appareils, le coût par passager est donc plus élevé, ce qui fait que les tarifs sont globalement plus élevés.
Les pays un peu partout dans le monde se rendent compte de ce problème, et ils ont mis en place des programmes d'aide. C'est le cas aux États‑Unis, en Australie et en Europe. Au Canada, il n'y a pas de programmes d'aide, mais il y en a eu pendant la pandémie. Au Québec, le gouvernement provincial a choisi de mettre en place un programme d'aide pour rembourser un pourcentage du prix des billets d'avion et offrir des billets subventionnés, si on veut, pour les voyageurs d'agrément ou les touristes venant des grands centres.
Je voudrais terminer en disant un mot sur les aéroports. On souhaiterait parfois que les transporteurs américains à bas coût viennent offrir un peu de concurrence pour permettre à nos voyageurs de se rendre à des destinations américaines. Toutefois, on apprend souvent que ces transporteurs sont un peu réticents à venir au pays à cause de toutes les taxes qui sont appliquées et des frais élevés, notamment dans les aéroports.
Membres du Comité, je pense qu'il serait temps que le gouvernement examine à nouveau la gouvernance des aéroports. On se rend compte que les frais liés aux améliorations aéroportuaires augmentent continuellement, que les coûts des infrastructures et des projets ainsi que les investissements à venir sont énormes. Je pense que le gouvernement devrait revoir un peu son modèle d'intervention.
On a peut-être laissé un peu trop de marge de manœuvre aux administrations aéroportuaires, et il serait temps de revoir le bail de ces organismes.
Si vous désirez obtenir plus de détails, vous en trouverez en abondance dans mon dernier livre, qui porte sur ce sujet.
C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Je vous remercie.
Je vous remercie infiniment de m'avoir invité à participer à cette réunion.
Je suis d'accord sur tout ce qu'a dit mon collègue et ami M. Gradek ainsi que sur les propos de mon collègue le professeur Roy.
Au sein de l'Observatoire, nous étudions, bien sûr, la situation canadienne, mais aussi la situation mondiale. Une comparaison se fait en permanence entre l'évolution de notre système et celle des autres systèmes partout dans le monde. C'est un peu dans cette perspective que j'interviens.
Il faut quand même mentionner que la question de la concurrence ne se pose pas de la même manière au Canada qu'ailleurs dans le monde. On peut penser ici à nos voisins du sud, les États‑Unis, ou à nos amis européens. Il y a plusieurs raisons, d'abord celle de la distance. Une compagnie aérienne, en Europe, peut faire le trajet Paris-Barcelone en effectuant quatre ou cinq rotations par jour. En raison de la distance, au Canada, une rotation entre Montréal et Vancouver ne peut pas se faire cinq fois par jour. Un genre de limitation se fait donc naturellement.
Il y a également la question du climat. En effet, notre climat fait en sorte que l'opérabilité des compagnies aériennes et nos infrastructures sont un peu particulières. Par ailleurs, mon collègue Jacques Roy a mentionné, de façon très pertinente, la densité de la population, qui n'est pas suffisante ici pour que le nombre d'usagers soit équivalent. Il y a aussi un élément plus sociologique, à savoir que la culture de l'avion est moins présente chez nous que chez nos amis américains et européens. Il faut ajouter à cela la question des taxes, qui a déjà été mentionnée. Il faut compter pas loin de 150 $ en taxes aéroportuaires, en taxes gouvernementales, et ainsi de suite. Dès le départ, cela joue sur les prix. Il faut garder à l'esprit que la notion de concurrence, au Canada, est particulière pour ces raisons.
Il y a aussi chez nous une certaine absence de cohérence. Un des éléments qui jouent un rôle important, en plus de ce que mes collègues ont très justement mentionné, est la disponibilité des créneaux. Celle-ci fait en sorte que les compagnies importantes ont leurs créneaux. Toutefois, les plus petites souffrent de cette situation. Elles n'arrivent pas à ouvrir des créneaux. De plus, il ne faut pas oublier que deux aéroports importants du Canada, soit Montréal‑Trudeau et Pearson, vont effectuer des travaux majeurs d'ici 10 ans, ce qui va réduire la quantité de créneaux disponibles et renforcer cette espèce de concentration chez les grands transporteurs.
Il faut aussi souligner — et on aura peut-être l'occasion d'y revenir — le fait que le rôle des compagnies aériennes est vraiment important, mais qu'il faut intégrer dans la réflexion la question des infrastructures. Comme mon collègue le professeur Roy l'a mentionné, un problème lié à la cohérence et à la gouvernance touche nos aéroports, ce qui entraîne des difficultés majeures. Nous n'investissons pas suffisamment dans les infrastructures aéroportuaires.
Prenons comme exemple le gouvernement américain, qui, pendant les premières semaines de la pandémie, est intervenu en offrant un soutien colossal aux compagnies aériennes ainsi que des investissements majeurs aux aéroports. Il s'agissait d'un montant variant de 40 à 50 milliards de dollars. De notre côté, tout ce que nous avons fait pendant cette période a été de forcer, au départ, nos aéroports à rester ouverts. Pendant cette période, leurs revenus ont diminué d'environ 95 %. Par conséquent, même les aéroports dont le bilan était positif se sont retrouvés endettés.
L'investissement du gouvernement canadien dans l'ensemble des aéroports ne dépasse pas 500 millions de dollars.
Cette espèce d'absence de cohérence fait en sorte que d'importants instruments ou leviers de concurrence ne fonctionnent pas. Bien sûr, c'est dans ce contexte que les petites compagnies ont plus de mal à se positionner et que la concurrence devient problématique.
C'est un plaisir d'être ici, à Ottawa. Les gens de Montréal ne disent généralement pas cela, mais c'est le centre du monde pour le Parlement et le système canadiens. Cela fait donc partie de l'économie de l'expérience que d'être ici.
J'ai grandi à Toronto. J'ai enseigné à Oxford pendant de nombreuses années et, il y a environ 27 ou 28 ans, j'ai commencé à travailler avec British Airways et Lufthansa. J'ai suivi de nombreux cours avec l'Association du transport aérien international, l'IATA, dont le siège social se trouve à Genève et à Montréal. J'ai beaucoup travaillé avec des compagnies aériennes étrangères, de sorte que j'apporte ce point de vue, tout comme mes collègues, je le sais.
Le Canada est un endroit différent; il est inhabituel à plusieurs égards. C'est un endroit différent en raison de la taille du pays, de sa faible population et de l'hiver. Vous êtes des parlementaires canadiens, alors ce n'est pas une surprise. Nous avons un hiver ici, à Ottawa. Ces facteurs ont une énorme incidence.
On pourrait dire que l'Australie et le Chili sont de grands pays avec de petites populations. La situation est plus difficile ici que là‑bas. L'une des choses qui nous posent vraiment problème, ce sont les taxes et les règlements gouvernementaux. Nous y reviendrons dans une minute.
Nous avons trois grandes villes — Toronto, Montréal et Vancouver — du point de vue de la population. La famille de mon frère à Calgary me pardonnera peut-être; je lui présente mes excuses. En plus de la taille de la population, Vancouver nous relie à l'Asie. Ce sont là d'énormes problèmes avec lesquels nous devons composer. Nous sommes différents.
Il y a aussi beaucoup de compagnies aériennes étrangères qui offrent des vols vers le Canada. En Europe, on pense à British Airways. Lufthansa se rend à Montréal, à Toronto et ailleurs au pays. Nous avons les compagnies aériennes américaines, dont Delta Air Lines. Sa division internationale des pièces est dirigée par Alain Bellemare, diplômé de McGill, un Canadien qui a déjà dirigé Bombardier. Un très grand nombre de vols en provenance des États‑Unis se rendent dans nos grandes villes. Il y a donc beaucoup de concurrence, plus que nous ne le pensons à première vue.
La COVID est arrivée. C'était la pire période de l'histoire de l'aviation, ce qui semble une exagération, mais cette histoire n'a vraiment commencé que lorsque les frères Wright ont pris leur envol, alors elle ne remonte pas à l'Empire romain. La COVID a été le pire moment. Nous n'avons pas très bien soutenu les compagnies aériennes au Canada par rapport aux États‑Unis et à l'Europe.
Je me souviens d'avoir visité WestJet. Je ne sais pas si c'est encore vrai, mais il y avait six plaques de compagnies aériennes qui ont fait faillite au Canada. Ils l'ont fait pour que les employés de WestJet connaissent l'histoire du Canada. C'est terrible pour les compagnies aériennes. Une partie de cela est attribuable à la domination d'Air Canada et maintenant de WestJet, mais nous avons aussi Porter qui a des poches assez profondes et beaucoup de nouveaux avions intéressants. Ils avaient le grand atout de l'aéroport de l'île. J'y suis allé la semaine dernière parce que je voulais être au cœur de Toronto. Vous êtes sur l'île. Vous prenez un trottoir en mouvement. Vous prenez une navette gratuite et vous y êtes. C'est formidable, mais ils volent maintenant à partir de Pearson parce que les avions sont trop gros pour l'aéroport de l'île.
Le plus gros problème ici, ce sont les taxes. J'ai emmené 48 étudiants de McGill au Maroc et au Caire en mars. Je reçois actuellement des prix pour aller au Kenya l'an prochain. J'ai vu que 1 458 $ plus le taxe donne 2 340 $. Nous sommes passés d'une situation où nous pouvions nous le permettre à une situation où nous ne le pouvons pas en raison des centaines de dollars de taxes.
J'ai une émission de radio; j'interviewe des PDG. J'ai interviewé les quatre derniers PDG de WestJet, les quatre derniers PDG d'Air Canada, le PDG d'Air France à deux reprises, celui de KLM, et ainsi de suite. J'ai parlé à de nombreux dirigeants de l'industrie. Il y a peu de soutien pour les aéroports au Canada. C'est la faute du gouvernement, d'Ottawa — ou de « son approche », si je veux prendre un peu de recul. Le gouvernement peut améliorer la situation de façon spectaculaire.
J'ai trois choses à retenir.
Notre réalité géographique est différente de celle du reste du monde. Nous devons en être conscients, ce que nous sommes; nous sommes Canadiens. Nous avons des taxes et des droits énormes. Un de mes voisins travaille pour l'IATA, et j'ai beaucoup travaillé avec eux. Aucun pays, peu importe sa taille, ne nous impose un fardeau aussi lourd. Nous en avons peut-être manqué un, mais lorsque nous avons examiné la situation aux États‑Unis, dans les pays de l'Union européenne, en Australie et ailleurs, nous avons constaté qu'ils ne sont pas du tout au même niveau.
Nous avons besoin de transporteurs à bas prix, ou TABP, mais comment peuvent-ils survivre avec tous les frais que le gouvernement leur impose? Avons-nous besoin de plus de concurrence? Oui. Ce dont nous avons moins besoin, ce sont des taxes écrasantes, des frais d'aéroport, et ainsi de suite, que le gouvernement impose de façon générale — je ne vous blâme pas.
J'ai terminé, et il me reste cinq secondes. Je suis extrêmement fier de moi.
:
Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à tous les témoins de leurs témoignages.
Je veux revenir à M. Moore. Il a très bien géré son temps, mais je me demande s'il en a plus à dire sur ce que nous venons d'entendre sur le voyageur canadien qui paie les taxes et les frais les plus élevés au monde sur les billets d'avion.
Dans le dernier budget, nous avons vu que le gouvernement a augmenté les frais pour la sécurité. Je crois qu'ils entrent en vigueur demain. Nos frais de sécurité coûteront plus du double de ce qu'il en coûte pour prendre un vol international à partir des États‑Unis.
J'imagine que ma question serait la suivante: quelle est la première solution à apporter? Quels sont les taxes et les frais que le gouvernement peut immédiatement réduire ou ramener au niveau de nos concurrents internationaux?
Devons‑nous fondamentalement modifier la façon dont sont gérés les aéroports? Y a‑t‑il des moyens de réduire les frais dont vont immédiatement bénéficier les passagers qui cherchent des billets d'avion moins chers?
Je veux parler avec M. Ebrahimi.
Vous avez dit que les taxes et les frais commencent à 150 $. Dès le départ, avant même qu'on monte à bord de l'avion, la compagnie aérienne vend son billet 150 $.
Comment peut‑on s'attendre à ce qu'une compagnie aérienne à très bas coûts ou même à bas coûts soit concurrentielle sur le marché si le billet aller‑retour coûte 300 $, même entre Calgary et Abbotsford, mettons, ou pour parcourir une courte distance de 1 000 kilomètres?
Comment pouvons‑nous faire place à plus de concurrence si les taxes et les frais coûtent le double ou le triple des prix annoncés par certaines compagnies aériennes à bas coûts?
:
Vous avez tout à fait raison, monsieur le député.
Ce problème est d'abord lié aux taxes. Ce qui est un peu la philosophie, ici, au Canada, c'est de taxer les utilisateurs-payeurs. À mon avis, c'est une très mauvaise philosophie. Si on taxait les compagnies aériennes et les passagers pour essayer d'avoir des infrastructures adéquates, à la rigueur, je pourrais dire que c'est pour une bonne cause. Ce n'est même pas le cas.
Si je prends le cas de l'aéroport international Montréal‑Trudeau, ce sont à peu près 140 ou 150 millions de dollars, soit près de 12 % de ses revenus, qui vont, de cette façon, dans la poche du gouvernement fédéral.
Pour revenir précisément à votre question, je peux dire que, lorsqu'on examine la concurrence ailleurs, dans d'autres pays, on constate que ce ne sont pas les compagnies traditionnelles qui créent la concurrence. Ce sont des acteurs locaux, notamment des compagnies offrant des bas prix — de très bas prix —, qui interviennent.
L'argument de vente principal de ces compagnies est de proposer des prix intéressants. Quand, dès le départ, elles doivent commencer à partir de 150 $, cela fait en sorte que le prix qu'elles proposent, par définition, va être majoré de ce montant, qui va augmenter, comme vous l'avez mentionné.
D'une certaine manière, on coupe les pieds de ces compagnies dès le départ, et on ne peut pas donner naissance à des compagnies à moyen terme, comme mon collègue M. Gradek l'a très bien mentionné. Elles tiennent le coup, mais, à un moment donné, cela ne fonctionne pas. Ces taxes sont vraiment un obstacle majeur pour que nous puissions espérer voir émerger des entreprises à bas prix, de façon pérenne, dans ce pays.
Il y a beaucoup de questions liées à cette limite relative à la participation étrangère. À mon avis, il n'est pas nécessaire de retirer cette limite.
[Traduction]
Il y a assez de gens riches au Canada qui peuvent investir dans les compagnies aériennes. Je ne pense pas que nous devions alléger ces restrictions.
[Français]
Cela aurait aussi toutes sortes d'implications sur le plan des accords bilatéraux. Par exemple, si nous le faisions, nos partenaires, comme les États‑Unis et d'autres pays, seraient-ils prêts à le faire également?
Revenons à la question des taxes. Je vais me faire l'avocat du diable et dire que tous les transporteurs doivent payer ces taxes. Les règles du jeu sont donc équitables. Les taxes sont élevées, mais, en même temps, c'est un peu normal que les usagers paient le prix le plus réel possible pour les services qu'ils obtiennent.
Ma préoccupation...
:
Merci, monsieur le président, et bienvenue aux témoins d'aujourd'hui. C'est bon de vous compter parmi nous, vous qui avez beaucoup d'expérience et de savoir sur les sujets dont nous discutons en lien avec la concurrence.
Monsieur Moore, vous avez dit que le Canada est un vaste pays où la météo est parfois terrible, ce qui touche les compagnies aériennes. Nous l'avons constaté il y a deux hivers de cela.
Je voyage souvent de Terre-Neuve-et-Labrador à Ottawa, et la principale difficulté, selon moi, c'est de se rendre dans les régions rurales et éloignées. Je ne parle pas de régions très éloignées, mais des régions rurales du Canada atlantique, par exemple. Depuis environ deux ans, la plupart de mes vols se font en trois segments: d'Ottawa à Montréal ou à Toronto, puis à Halifax, puis à Gander. Finalement, le voyage prend toute la journée.
Le problème, c'est qu'une seule compagnie aérienne se rend là: Air Canada, qui sous‑loue maintenant ses avions aux compagnies aériennes provinciales. Il n'y a pas de vols de WestJet, de Porter ni de Sunwing, sauf de manière saisonnière, pour les vols nolisés et ce genre de choses.
Il fut un temps où il y avait des vols vers Gander de deux à quatre fois par jour, mais ce n'est plus le cas maintenant. Voyez‑vous une tendance se dessiner dans la concurrence entre les compagnies aériennes régionales pour desservir les petits aéroports depuis quelques années, voire quelques dizaines d'années? Y a‑t‑il un déclin? La situation est‑elle bien différente de ce qu'elle était?
:
Je pense que vous avez raison, monsieur Rogers. Deux tendances se dessinent. L'une d'elles, c'est de partir de petits aéroports pour économiser de l'argent. Mon frère vit à Abbotsford, et je me souviens d'être allé chez lui pour ensuite me rendre à Calgary, puis à Montréal. C'était fantastique, parce que le personnel de l'aéroport saluait mon frère Gary par son nom. Il devait quand même passer la sécurité, mais le garde le connaissait. Il y avait environ trois portes d'embarquement. Les billets étaient bien moins chers; c'était bien plus accessible. C'était excellent si on vivait dans l'Est de Vancouver. On économisait beaucoup de frais de stationnement et de temps.
C'est une façon d'économiser, mais il faut... Cela dit, il n'y a pas vraiment de petits aéroports dans les Maritimes. Il y en a à Montréal, à Toronto, par exemple, mais pas là‑bas, et nous avons vu un déclin.
C'est en partie parce que les compagnies aériennes sont des entreprises. Veuillez m'excuser, mais je suis professeur en administration des affaires. L'idée, c'est de gagner de l'argent. On peut faire beaucoup d'argent, mais compte tenu de ce qui est arrivé avec la COVID et du manque de soutien qu'on a reçu ici, si l'on se compare aux autres pays, les problèmes financiers ont explosé. Les compagnies aériennes vont avant tout miser sur les villes où il y a de l'argent à faire. Il est donc plus cher de voyager dans certaines régions du monde. Je suis récemment allé au Yukon, et c'est très dispendieux en raison de la faible demande.
C'est en partie en raison de la demande. WestJet s'est jusqu'à un certain point retirée de l'Est du Canada pour se concentrer sur l'Ouest, sous l'égide de son nouveau PDG. Il était dirigeant principal chez Lufthansa, auparavant. Il connaît bien l'Europe et applique une approche concurrentielle.
:
Merci de votre question.
D'abord, j'ai envie de revenir à la question de l'absence de cohérence.
D'un côté, depuis plusieurs années, on dit qu'on n'a pas de climat de concurrence et, d'un autre côté, on accepte la fusion des compagnies. Par exemple, on a accepté que la compagnie aérienne Sunwing soit acquise par WestJet. Cela veut dire que l'on accorde, dès le départ, à WestJet 52 % de toutes les « destinations soleil », comme on les appelle au Canada, et 72 % dans l'Ouest. On a concentré des services aériens. On a accepté cela. Or, c'est une mesure qui va à l'encontre de la concurrence.
Il y a quelques années, à cause de la pandémie de COVID‑19, la situation a changé. On avait accepté qu’Air Transat soit acquise par Air Canada. On a donc encore accepté cette acquisition. Le Bureau de la concurrence au Canada l'a accepté, et il a fallu que ce soit la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne qui tire la sonnette d'alarme.
Il y a donc cette incohérence qui fait en sorte qu'on n'est pas conscient des répercussions. C'est un obstacle important.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
Je voudrais revenir un peu sur le sujet que M. Rogers a abordé et sur ce qu'a dit M. Ebrahimi, c'est-à-dire sur la question de la présence de gros joueurs.
Je suis content de voir que des entreprises ayant une certaine taille peuvent tenir leurs activités à partir d'ici pour desservir des marchés à l'échelle internationale. Je pense notamment à WestJet ou à Air Canada.
Cependant, je m'interroge tout de même sur le fait qu'un seuil pourrait être atteint dans certaines circonstances et que cela pourrait avoir trop de poids. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais, si je ne m'abuse, à Montréal, par exemple, environ 60 % du trafic à l'aéroport de Dorval serait lié aux activités d'Air Canada.
Si je vais à l'épicerie et que 60 % des marchandises sur les tablettes proviennent de la même compagnie, peut-on parler d'un marché sain?
Y aurait-il lieu d'avoir des restrictions ou, du moins, d'imposer des restrictions sur le nombre de créneaux horaires ou le nombre de portes de départ ou d'arrivée qui sont utilisées?
Monsieur Roy, pourriez-vous nous en dire davantage là-dessus?
:
Comme mon collègue M. Roy vient de le dire, ce n'est pas une bonne idée d'affaiblir la compagnie nationale. Celle-ci a, bien sûr, une présence importante dans tous les pays.
La question qu'il faut se poser est celle visant à savoir ce que l'on fait pour s'assurer que la concurrence et d'autres options existent. Le Canada n'a pas de stratégie nationale concernant le transport aérien, ce qui fait qu'il improvise. On prend l'argent des compagnies aériennes, des passagers et des aéroports, mais cet argent ne revient pas dans l'économie du transport aérien pour améliorer l'infrastructure, par exemple.
Comme l'a dit mon collègue M. Gradek, le Canada pourrait mettre en place des mesures, par exemple pour réserver un certain nombre de créneaux pour les petites compagnies. La question des taxes ou de la taxation est extrêmement importante. Il s'agit d'une barrière importante, qui est sous le contrôle du gouvernement. Il peut intervenir directement.
Plusieurs pays, dont la Norvège, choisissent les régions dans lesquelles ils veulent intervenir. Ils choisissent les régions qu'ils considèrent comme importantes, c'est-à-dire les régions dans lesquelles le transport aérien est un levier de développement économique. On intervient, d'une manière ou d'une autre, en utilisant des modèles différents.
L'idée d'affaiblir la compagnie nationale n'aide pas forcément à favoriser l'émergence d'autres compagnies, si les systèmes de taxes et l'infrastructure sont défaillants. Je pense qu'il faut regarder tout cela dans son ensemble et tenir une réflexion au sujet d'une stratégie nationale.
Je termine en disant que le Canada est pratiquement le seul pays qui a des compagnies intéressantes, un important savoir-faire et une importante expertise dans le domaine, mais il n'a pas de stratégie nationale concernant le secteur de l'aviation.
:
Je ne vais pas parler de l'idée de limitation, mais j'aimerais revenir brièvement sur la question du seuil.
À partir de quel seuil considère-t-on qu'une entreprise a trop de poids par rapport aux autres ou encore qu'elle devient un monopole ou un duopole?
Sur le plan de la compétitivité, à partir de quel moment cela devient-il mauvais? S'agit-il d'un pourcentage d'activités de 70, 75, 80, 90 %?
Est-ce possible de donner un chiffre ou est-ce qu'il n’y a pas de limite?
Je demande à M. Ebrahimi de répondre à ma question en premier, mais M. Roy va pouvoir y répondre par la suite.
:
Parmi les compagnies nationales, il y a la British Airways, qui mène des activités soutenues à l'aéroport d'Heathrow, à Londres; à l'aéroport de Francfort, il y a Lufthansa; à l'aéroport de Roissy, il y a Air France. Ces compagnies sont très importantes.
Je ne pense pas qu'il y a un seuil. Ce qu'il faut se demander, c'est dans quelle mesure cela a un effet. Aujourd'hui, on sait que, à l'aéroport Montréal‑Trudeau, 50 % des activités sont menées par Air Canada. En soi, il s'agit là d'une donnée. Que peut-on faire? Ce ne sont pas ces 50 % d'activités qui posent un problème. British Airways en compte plus que cela à l'aéroport Heathrow. Quelles sont les autres conditions qui font en sorte que des compagnies aériennes à bas coût peuvent émerger? Il est là, le problème.
On a besoin de composer avec divers facteurs, comme un créneau des heures de départ ou d'arrivée inintéressant, des taxes très élevées, de mauvaises conditions climatiques, d'importantes distances à desservir et une pénurie de main-d'œuvre.
Ce sont ces questions qui deviennent déterminantes. Il ne s'agit pas nécessairement du pourcentage des activités menées par une compagnie nationale dans un aéroport donné. D'ailleurs, ce sont des questions sur lesquelles on peut intervenir, bien que le Canada ait négligé de le faire.
Je ne sais pas s'il faut viser un certain pourcentage. Je ne sais pas non plus si mon collègue M. Roy, qui est un spécialiste dans le domaine opérationnel, pourrait le dire. Cependant, je ne pense pas que ce pourcentage existe.
:
Merci, monsieur le président.
Merci aux témoins d'être ici et de parler avec nous de ce sujet.
Je veux aborder la question sous un angle un peu différent. Nous parlons de concurrence dans le secteur aérien. De toute évidence, il s'agit notamment de déterminer comment les nouveaux entrants sur le marché peuvent concurrencer les grandes compagnies aériennes. On a parlé des taxes et des frais, et pourtant, M. Roy a raison de dire que si on abaissait les seuils pour tous, on ne créerait pas d'avantage concurrentiel pour les petites compagnies aériennes; on ne ferait que diminuer le coût des vols et, bien sûr, quelqu'un devrait assumer ces coûts.
Comme on le sait, certains proposent que le Canada accorde des subventions publiques supérieures aux aéroports. Je m'intéresse à l'objectif sous-jacent de politique publique du transport de passagers, parce que le but n'est pas nécessairement de diminuer le prix des billets d'avion, mais de permettre aux gens de se déplacer. Je pense que c'est un objectif louable auquel nous devons réfléchir de manière plus générale.
Seule environ la moitié des Canadiens voyage souvent par avion. C'est en tout cas ce qu'indiquent les derniers chiffrent que j'ai consultés; ils datent peut‑être de quelques années. Les Canadiens qui voyagent par avion sont peut‑être désormais plus nombreux. Toutefois, une grande partie de la population ne prend pas l'avion. Il n'existe pas de réseau d'autobus dans notre pays. L'une des façons les moins dispendieuses de voyager dans un grand pays, c'est de prendre l'autobus, et pourtant, presque aucun réseau d'autobus ne dessert le pays depuis le retrait de Greyhound. Pour sa part, notre système de transport ferroviaire de passagers n'est que l'ombre de ce qu'on voit dans d'autres pays.
Où devrions‑nous investir nos maigres deniers publics pour obtenir le plus de retombées possible pour le plus de gens possible en matière de transport?
Faut‑il offrir des subventions publiques aux aéroports pour que plus de gens puissent voyager à bas prix? Est‑ce le principal objectif de politique publique dont il faudrait tenir compte dans cette discussion?
Je pose la question à ceux qui voudront bien répondre. Je commencerais peut‑être par M. Gradek, puis nous pourrions entendre M. Moore, qui est ici en personne.
:
Merci, monsieur Bachrach.
Je pense que vous avez mis le doigt sur ce que nous, en tant que Canadiens, devrions faire pour aider les transports dans notre pays.
C'est autour des chemins de fer que ce pays a été construit, il y a 140 ans. Le système de transport aérien canadien a évolué au cours des 110 dernières années, à tel point que je soutiens que les Canadiens considèrent maintenant le transport aérien comme un droit de la personne essentiel et que ce transport est indispensable à la survie du pays. Sans transport aérien, comment nous rendrions-nous à Vancouver depuis Toronto ou Ottawa? Dans le contexte de ce qui se passe dans le monde présentement, il n'y a pas d'alternative viable et vraiment concurrentielle au transport aérien.
Le transport aérien fait partie intégrante du fonctionnement de notre économie. La question est maintenant de savoir qui va payer. Au cours des 25 dernières années, nous, les Canadiens, avons convenu de faire payer les utilisateurs. Les personnes qui utilisent les services aériens doivent payer pour ces services. C'est le modèle qui a créé toutes ces taxes dont mes collègues et moi-même disons depuis des années qu'elles constituent un obstacle à l'entrée de nombreux transporteurs au Canada.
Or, c'est une question tout à fait fondamentale. Le principe de l'utilisateur-payeur veut que les seuls qui devraient payer pour les infrastructures nécessaires en matière de services aériens soient les passagers. Malheureusement, bien que ce modèle ait été adéquat du milieu des années 1990 et au début des années 2000, les opinions à cet égard ont changé. Le monde considère désormais les services aériens, les infrastructures aéroportuaires et l'ensemble des aéroports comme un poids économique qui doit être assumé par les pays eux-mêmes.
En regardant les investissements réalisés dans les aéroports à l'étranger, je constate que l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis investissent 35 à 40 milliards de dollars dans leurs aéroports parce qu'ils savent que l'avenir de leur pays et de leur économie repose sur ces derniers. S'il y a un pays qui devrait vraiment miser sur ses aéroports en tant qu'élément clé des infrastructures, c'est bien le Canada.
Je pense que vous avez raison. Les Canadiens doivent changer de modèle. Le modèle de l'utilisateur-payeur ne fonctionne plus.
Je suis très heureux d'être ici au comité des transports pour parler de la concurrence dans notre secteur aérien. Oui, nous avons un gros problème de concurrence. Nous avons un duopole qui contrôle plus de 80 % des vols au Canada. Je suis heureux d'être en mesure de poser certaines questions aux témoins ici présents quant à la façon de résoudre ce problème de concurrence dans le domaine du transport aérien.
Pour donner un peu de contexte, soulignons qu'en 2019 — l'année que nous avons suivie avant la COVID —, le Canada a recensé 85 millions de voyageurs intérieurs. L'Australie, elle, n'en avait compté que 63 millions. Nous avions un nombre important de voyageurs se déplaçant à l'intérieur du pays. Si l'on ajoute à cela les voyages à l'étranger, les compagnies aériennes canadiennes ont accueilli 166 millions de passagers en 2019. Dire qu'elles sont en difficulté est... Elles s'en sortent très bien. Bien sûr, le trafic est réparti presque à parts égales entre WestJet et Air Canada. Il a été dit plus tôt que nous avons permis à WestJet d'acheter Sunwing. Cela a fait en sorte que ces 166 millions de passagers ont été répartis entre deux compagnies aériennes seulement, ce qui est un problème de taille.
Professeur Moore, vous avez parlé de la demande à laquelle les compagnies aériennes doivent faire face, mais j'aimerais me concentrer sur les exigences plutôt sévères qui nuisent à l'arrivée de nouvelles compagnies dans ce secteur. Je voudrais me concentrer plus particulièrement sur la concurrence et sur les règles que nous devons modifier au Canada pour favoriser la concurrence.
L'exemple que je donnerais est le suivant: si vous achetez un vol aller-retour Toronto-Ottawa la semaine prochaine en période creuse, il vous coûtera environ 585 $. Or, si vous achetez dès maintenant un vol aller-retour Toronto-Vancouver, le prix ne sera que de 385 $. La différence, c'est que pour le trajet Toronto-Vancouver, il y a Flair Airlines qui exerce une concurrence. Entre Toronto et Ottawa, nous avons Porter. Vous pouvez voir la différence.
Que devons-nous faire pour garantir une plus grande concurrence et alléger les exigences imposées aux compagnies aériennes qui souhaitent faire concurrence au duopole actuel?
:
Ce serait formidable d'avoir des transporteurs à très bas prix.
J'ai rencontré Skúli Mogensen — qui a vécu à Montréal et qui a fondé WOW Air — et le PDG et fondateur de Southwest. J'en ai parlé à un grand nombre de directeurs d'entreprise. Tout est une question de prix. C'est l'une des trois stratégies de base de Michael Porter à Harvard: les faibles prix. Pensez à quand vous aller chez Walmart ou chez Costco. L'état d'esprit change selon que vous alliez au Ritz-Carlton ou chez Holt Renfrew. Vous êtes dans un monde différent. Dans les compagnies aériennes, les transporteurs à très bas prix se concentrent sur cet aspect des choses. Le problème, c'est qu'au Canada, les taxes et les autres frais sont élevés, ce qui rend cela... La différence entre vous et un transporteur plus complet, comme Air Canada ou WestJet, n'est pas particulièrement axée sur les écarts de prix, de sorte que vous n'êtes pas récompensés pour cette concentration sur les prix très bas qu'ils savent faire.
Cela aiderait et encouragerait ces concurrents à venir et à utiliser leur approche. C'est intéressant, car l'une des choses qu'ils demandent est: « Oh, voulez-vous de l'eau? » Je me souviens avoir demandé de l'eau sur un vol d'Icelandair, et on m'a répondu que c'était 5 $. Je pensais que c'était un droit de la personne. On m'a répondu: « C'est vrai, mais c'est 5 $. » Air Canada et WestJet ont décidé de vous faire payer votre siège. « Oh, voulez-vous un sac? Il vous en coûtera tant. » Le reste est à l'avenant. « Oh, voulez-vous un repas? » Vous êtes assez âgés pour vous souvenir de l'époque où l'on vous donnait des repas et tout le reste.
Nous sommes en train d'ajuster cela, mais je pense que les transporteurs à bas prix sont une bonne solution.
:
Non, je crois que je suis assez vieux.
Le plus important, c'est qu'il y ait des concurrents. Porter Airlines vient de s'agrandir. C'est une réussite canadienne. Vous avez mentionné tout à l'heure que WestJet avait les plaques des six compagnies aériennes qui ont fait faillite. Porter s'est battue bec et ongles pour rester sur cette île et se tailler une place. Elle dispose de 36 avions à réaction et elle essaie d'être concurrentielle. Je suis assez âgé pour me souvenir de l'époque où Porter offrait une bière gratuite sur le chemin de Thunder Bay. C'était un service qu'Air Canada et WestJet n'offraient pas — et nous allons entendre parler de ces compagnies aériennes.
Il y a des obstacles à l'expansion, à l'accès à l'est du Canada et à l'utilisation de cette région. Quel est le rôle du gouvernement? En quoi s'est‑il trompé? Comment le gouvernement peut‑il se ranger un peu sur le côté afin de permettre à Porter de se développer? Dans un autre ordre d'idées, devons-nous envisager une politique de ciel ouvert ou de cabotage pour amener davantage de concurrents sur des marchés où nous n'avons pas le choix de le faire?
L'idée est que nous voulons que les Canadiens aient le choix partout au pays, quel que soit le marché. N'oublions pas que les compagnies aériennes ont transporté 166 millions de passagers. Comment y parvenir?
:
Je n'ai pas inventé le terme « frais indésirables ». Je laisse à d'autres experts le soin d'en revendiquer la paternité.
Lorsque nous parlons de frais indésirables, il s'agit de frais qui s'ajoutent au tarif de base que vous payez à une compagnie aérienne pour voyager. Vous payez pour le choix du siège, un bagage à main ou un bagage enregistré. Les gens considèrent ces frais comme des frais indésirables, et ils existent depuis fort longtemps. Ils n'existent pas seulement depuis des semaines, des mois ou même des années, mais depuis des décennies. Les compagnies aériennes les utilisent pour créer des raisons d'augmenter le prix de votre voyage. Vous comprenez que le prix que vous payez est assorti de conditions. Si vous souhaitez modifier votre tarif, votre itinéraire ou vos dates de voyage, vous allez devoir payer des suppléments. Ce sont ces coûts que l'on appelle maintenant les « frais indésirables », mais ils existent depuis longtemps.
Ce qui se passe à l'heure actuelle, c'est qu'il y a une multiplication de ces frais indésirables. Les transporteurs à bas prix cherchent à améliorer leur rentabilité par ce que l'on pourrait appeler la fragmentation des services qu'ils mettraient normalement à la disposition des passagers. Aujourd'hui, vous payez tant pour votre premier bagage enregistré et tant de plus pour le deuxième. C'est la même chose si vous souhaitez un siège avec fenêtre, un siège dans l'allée ou un siège avec plus d'espace pour les jambes. Ce sont des frais qui font désormais partie du modus operandi des transporteurs à très bas prix.
Lorsqu'un client achète un billet pour un vol Toronto-Vancouver sur Flair Airlines, il peut voir le prix du billet, soit tel montant en dollars. Lorsqu'il réserve sa place, on essaie de lui vendre un tas d'autres choses qui baliseront son voyage: bagages enregistrés, bagages à main, choix du siège, repas et toutes sortes d'autres commodités que le transporteur cherchera à lui vendre. Ce sont ces frais qui constituent parfois le montant réel que paiera cette personne pour voyager avec un transporteur comme Flair. Ces frais peuvent être importants. En fait, Flair a admis que plus de 40 % de son chiffre d'affaires provenait de ces options facturées en sus qui font maintenant partie du marché.
Les frais indésirables sont une partie importante du chiffre d'affaires et ils sont là pour de bon. Je suis prêt à parier qu'il y en aura de plus en plus avec le temps.
:
Merci, monsieur le président.
Il semble y avoir une sorte de consensus parmi les témoins quant au fardeau associé aux taxes et aux frais gouvernementaux qui s'appliquent aux billets d'avion. Cela m'amène à une réflexion et à une question.
Le modèle dont il est question ici est un modèle d'utilisateur-payeur, c'est-à-dire que la personne qui prend l'avion paie le coût réel lié au fait de se déplacer de cette façon. Si l'on optait pour d'autres modèles, où on subventionnerait le transport aérien, par exemple, on finirait par financer les déplacements des gens qui font des voyages d'agrément, que ce soit pour aller se faire bronzer sur une plage ou pour aller voir la tour Eiffel ou la tour de Pise.
Les déplacements de gens plus privilégiés, ceux qui ont la chance d'avoir les moyens de voyager, seraient financés par l'ensemble de la population.
Monsieur Roy, trouvez-vous que c'est un modèle souhaitable?
Y a-t-il des façons de diminuer ces frais sans pour autant en arriver là?
:
Je ne suis pas contre l'idée que les usagers paient. Le transport aérien est un mode de transport très coûteux. C'est normal que les usagers paient, surtout quand c'est pour aller se faire bronzer au soleil, comme vous le dites.
Par contre, je ferais une distinction entre ces gens et ceux qui habitent en région, à Sept‑Îles, aux Îles‑de‑la‑Madeleine ou à Baie‑Comeau, par exemple. Ces derniers ont besoin du transport aérien. C'est un service essentiel pour les déplacements personnels, médicaux, et ainsi de suite. Le gouvernement canadien devrait se pencher sur cette question.
Il y a des paires de villes au pays qui sont mal desservies. Air Canada est parfois la seule option, si elle ne s'est pas déjà retirée complètement de ces marchés. Il n'y a tout simplement pas d'autre compagnie aérienne pour la remplacer. Quand il y en a, ces entreprises sont vulnérables, et elles sont en difficulté.
Il serait temps que le gouvernement canadien étudie cette question et s'inspire un peu de ce qui se fait ailleurs, aux États‑Unis et en Europe, parce que le marché ne fonctionne pas, tout simplement.
:
Je suis tout à fait d'accord avec mon collègue M. Roy.
J'ajouterais qu'il faut considérer le principe de l'utilisateur-payeur dans le sens très large du terme. Il faut aussi tenir compte du fait que le transport aérien est généralement un secteur structurant. Pour chaque dollar investi dans ce secteur, il y en a deux, trois ou quatre qui reviennent dans l'économie. Autrement dit, ce n'est pas juste pour payer les gens qui vont se faire bronzer sur la plage. Il y a tout un ensemble d'activités économiques autour de cela. C'est pourquoi les aéroports sont souvent des lieux importants. Ils génèrent de l'activité économique et des entreprises s'y installent.
Encore une fois, le principe de l'utilisateur-payeur fait en sorte que des citoyens qui ont le droit de prendre l'avion comme n'importe quel autre citoyen ne peuvent pas le prendre. Autrement dit, on fait une sorte de sélection injuste, dans un pays démocratique comme le nôtre, qui fait que ceux qui peuvent se payer des voyages en profitent et ceux qui ne le peuvent pas doivent rester chez eux. Pour moi, ce n'est pas acceptable.
On peut améliorer la situation. Il y a des éléments sur lesquels on peut agir afin que les gens qui veulent prendre l'avion puissent le faire. C'est la question de l'œuf et de la poule. Si le transport aérien est inaccessible et trop cher, les gens ne l'utilisent pas. Moins les gens l'utilisent, moins la demande est grande, et, si la demande est faible, les compagnies ne vont pas dans les régions éloignées.
:
Merci, monsieur le président.
M. Roy parlait des déplacements essentiels à partir des petits marchés régionaux. C'est un sujet très pertinent dans la région que je représente, où la plupart des aéroports sont desservis par Air Canada et par lui seulement. L'écart de prix est énorme lorsqu'il s'agit de prendre l'avion à partir de différents centres.
Si vous vous rendez à Vancouver à partir de deux de nos collectivités, Smithers et Prince Rupert, vous aurez peut-être à payer jusqu'à deux fois plus cher que si vous partez de Terrace, toujours avec Air Canada. La seule différence, c'est que le marché de Terrace est également desservi par WestJet, ce qui force Air Canada à revoir ses prix à la baisse afin de rester concurrentiel.
Dans les petites localités, le marché n'est pas assez important pour qu'il y ait deux transporteurs. Je me demande quelles sont les options en matière de politiques. Une subvention publique comme celle que le Québec a mise en place est-elle la seule option, ou existe‑t‑il d'autres mesures que l'État pourrait prendre pour faire en sorte que le transport aérien soit relativement abordable et qu'il n'y ait pas de grands écarts entre les petites collectivités et les grands centres?
Je vais peut-être poser la question à M. Roy, puisque c'est lui qui en a parlé.
:
Je peux répondre à cette question.
Je crois qu'il y a deux façons d'agir.
Évidemment, au Québec, on subventionne les voyageurs en leur offrant des rabais, mais il est important d'examiner l'offre de service et de voir si celle-ci est satisfaisante. Peut-on faire un aller-retour chaque jour? Les besoins des gens qui veulent rencontrer des membres de leur famille ou qui ont des exigences sur le plan médical sont-ils satisfaits à des tarifs acceptables?
Cela demande du travail. Il faut vraiment analyser le marché, puis décider si on accepte la situation ou si on intervient. Pour intervenir, il faut déroger un peu du cadre où l'on croit que la concurrence va tout régler, parce que cela ne fonctionne pas. J'étudie le transport aérien régional au Québec depuis 20 ans. On arrive toujours aux mêmes conclusions et on constate toujours les mêmes problèmes.
Il se peut que le gouvernement fédéral doive adopter une certaine forme d'intervention — je n'irai pas jusqu'à parler de réglementation. Il pourrait s'inspirer de ce qui se fait ailleurs pour permettre aux voyageurs canadiens d'avoir un service acceptable.
:
Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins.
Professeur Moore, j'aimerais revenir sur ce que vous avez dit au sujet des aéroports secondaires comme moyen potentiel de réduire les tarifs pour les Canadiens.
L'aéroport international de Hamilton se trouve dans ma circonscription. C'est un exemple de proximité avec une population de cinq ou six millions de personnes à moins d'une heure de route. En fait, Hamilton a été la plaque tournante de WestJet dans l'est du pays pendant un certain temps, c'est‑à‑dire jusqu'à ce que la compagnie déménage à Toronto.
Vous avez parlé du déclin des aéroports secondaires. Voyez-vous, à mesure que nous nous éloignons de la pandémie, une reprise de l'activité dans les aéroports secondaires? Quelles sont les mesures prises par le gouvernement qui entravent leur utilisation? Que peut‑il faire pour améliorer la situation?
:
Les gestionnaires d'aéroport utilisent les données de l'Association du transport aérien international pour savoir... Montréal connaît une forte croissance. Les gestionnaires d'aéroport ont dit: « Si les gens vont à Toronto, puis à Rome, il faut créer un vol Montréal-Rome. » On montre les données et on voit que c'est logique. Vous allez voir Air Canada et Alitalia et vous leur dites: « Voici les données, vous devriez proposer ces vols. »
Il y a une place pour des gestionnaires d'aéroport exceptionnels comme ceux‑là, qui peuvent aller sur le terrain avec leur personnel et vendre leurs analyses aux compagnies aériennes afin de les inciter à offrir tel ou tel service. Là encore, vous pourriez regarder du côté de l'Europe ou des États-Unis, où il y a plus d'options qu'à l'intérieur du Canada. Je pense que ces personnes ont un rôle à jouer dans ce domaine.
Par ailleurs, si l'on veut miser sur le « très bas prix » — et les aéroports secondaires ont tendance à être moins chers —, si c'est un transporteur à très bas prix qui aime ce modèle, alors il faut faire en sorte que le reste du modèle fonctionne également, et cela nous ramène à la question des frais. On ne peut pas se contenter de supprimer une petite partie des coûts, mais une partie substantielle... C'est ce qu'il faut pour être en mesure de dire: « Au lieu de 1 000 $, c'est 500 $, et nous pouvons quand même dégager un bénéfice de cela. »
Pour un certain nombre de raisons, il est plus avantageux d'être à Hamilton qu'à Pearson. Cela peut être mis de l'avant, mais je pense qu'il y a aussi quelque chose à faire avec la réduction des frais afin que le modèle à très faible coût soit plus attractif, certes, mais qu'il soit aussi réalisable et rentable.
:
Lorsque nous parlons des régimes de réglementation applicables aux aéroports, aux compagnies aériennes et au reste du secteur de l'aviation, je pense qu'il faut envisager un régime qui élimine le plus de contraintes opérationnelles et financières possible pour donner aux compagnies aériennes et aux aéroports une chance de survivre.
Nous avons parlé des taxes ce matin. C'est là un facteur important. Il est possible d'uniformiser les règles du jeu en remplaçant ce composant, mais c'est le prix à payer pour jouer le jeu dans ce domaine au Canada.
Je pense qu'il faut chercher à comprendre la politique gouvernementale dans son ensemble en ce qui concerne la façon dont nous travaillons avec toutes les composantes d'un système intégré: les avions, les compagnies aériennes, les aéroports, l'Administration canadienne de la sûreté du transport aérien et NavCan. Tous ces joueurs doivent travailler ensemble. Malheureusement, au Canada, les données dont nous avons besoin pour prendre des décisions vraiment efficaces sur le fonctionnement du secteur ne semblent toujours pas être communiquées en bonne et due forme. Les Européens et les Américains ont accompli un travail exceptionnel pour s'assurer que les joueurs ont les moyens d'échanger des données et des prévisions sur l'évolution de leurs plans et de la situation.
À l'heure actuelle, au Canada, nous avons de la difficulté à faire en sorte que tous ces joueurs puissent échanger des données afin de faciliter grandement la planification des affaires. L'aéroport de Montréal fait l'objet d'un agrandissement de 4,5 milliards de dollars. Pearson subira des agrandissements d'une valeur de x milliards de dollars. Malheureusement, je ne sais pas si toutes les cartes sont sur la table pour certains des autres joueurs afin de veiller à ce qu'ils prennent les bonnes décisions.
:
Merci, monsieur le président.
Mes questions s'adressent à M. Gradek.
J'aimerais avoir un peu plus de détails sur ce qui s'impose, du point de vue commercial, pour établir un climat plus propice au secteur canadien du transport aérien. Ayant moi-même travaillé dans le milieu des affaires pendant de nombreuses années, je dois commencer par dire que, même si le gouvernement et les autres privilégient toujours les subventions, ce qui compte le plus dans le monde des affaires, c'est — et je pense que M. Gradek en a parlé — la présence de politiques plus efficaces et plus stratégiques instaurées par le gouvernement pour permettre une meilleure prise de décisions dans le secteur privé.
Le Canada est un pays immense, mais peu peuplé. Par conséquent, ce sur quoi je voudrais m'attarder, monsieur Gradek, c'est l'intégration de nos réseaux d'approvisionnement. Nous avons examiné la fluidité en ce qui a trait au déplacement des personnes et au commerce. À partir de là, nous avons cherché à rendre le système plus rentable. Bien entendu, cela dépend en grande partie des politiques mises en place par le gouvernement. Du point de vue des activités et des immobilisations, il s'agit d'assurer la viabilité des affaires en intégrant, et non en isolant, la circulation des personnes et des marchandises et, par voie de conséquence, en intégrant nos chaînes d'approvisionnement et nos réseaux. Il faut aussi reconnaître où se trouvent ces plaques tournantes régionales, où se situent ces marchés et quels sont les points forts de chacun. À cela s'ajoutent les chaînes d'approvisionnement, les personnes et les marchandises, la logistique et l'intégration des réseaux d'approvisionnement. Enfin, il y a l'intégration d'un réseau multimodal qui existe au Canada, mais qui n'a jamais été pleinement exploité. Cela nous ramène donc aux notions de fluidité et de rentabilité.
Tout cela étant dit, monsieur Gradek, j'aimerais vous donner l'occasion de formuler des observations, à la lumière de votre expérience, sur la façon de réunir tous ces éléments et d'amener ensuite le gouvernement à mettre en place la politique qui s'impose pour renforcer le réseau aérien.
:
Vous abordez un sujet qui me tient à cœur depuis quelques années, à savoir la chaîne d'approvisionnement nationale, les énoncés de politique et les idées au sujet de ce qui ne va pas dans les chaînes d'approvisionnement au Canada. Les aéroports font partie intégrante de cette chaîne d'approvisionnement.
Une chose que nous avons constatée, c'est que nous ne cessons de pointer le gouvernement du doigt pour le manque de capacité d'intégration entre tous les différents joueurs. Le monde de la chaîne d'approvisionnement a beaucoup changé, et il changera encore plus. Nous passerons à un monde numérique. Nous entrerons dans un monde où, comme je l'ai mentionné il y a quelques minutes, les données seront le moteur de la prise de décisions et de l'efficacité de nos chaînes d'approvisionnement.
Je suis tout à fait d'accord pour dire que nous devons adopter une vision intégrée de la circulation des marchandises partout au pays et nous assurer d'utiliser le bon mode de transport pour déplacer les choses du point A au point B. Nos partenaires internationaux en dépendent. Notre économie d'exportation en dépend aussi. Si nous ne le faisons pas, nous serons relégués au second rang, derrière un certain nombre d'organisations internationales qui ont fait un meilleur travail d'intégration.
Oui, il y a un besoin. La façon dont ce besoin est exprimé et la façon dont nous procédons...
Le poste d'agent national de la chaîne d'approvisionnement est un concept intéressant, mais il ne s'agit pour l'instant que d'une solution de fortune.
Nous devons mettre en place des processus efficaces auxquels les industries peuvent adhérer afin que nous puissions mesurer notre rendement par rapport à celui de nos concurrents et savoir si nous parvenons à améliorer notre efficacité en ce qui concerne la gestion du réseau de la chaîne d'approvisionnement.
Nous ne l'avons pas encore fait.
:
Merci, monsieur Gradek.
Ce que je retiens de vos observations, c'est qu'on s'attend à ce que le bureau de la chaîne d'approvisionnement fasse deux choses. Premièrement, lorsqu'il mettra en place sa stratégie logistique en matière de chaîne d'approvisionnement, il ne devrait pas se limiter à la circulation des marchandises, mais tenir compte aussi de la circulation des personnes.
En ce qui a trait aux immobilisations et aux investissements stratégiques, par exemple, le TGF ou le train à grande fréquence permettra de séparer le déplacement des personnes et celui des marchandises en deux éléments d'infrastructure distincts, ce qui créera plus de fluidité et plus de possibilités d'intégration entre les différents modes de transport.
Je suppose que la prochaine question, monsieur Gradek, concerne la nécessité de mettre l'accent, surtout dans le cas du transport aérien, non seulement sur les voyages intérieurs, mais aussi sur les voyages binationaux avec nos partenaires américains, ainsi que sur les voyages internationaux. Bien entendu, cela rejoint ce que nous disions au sujet de l'intégration d'un réseau multimodal.
Qu'en pensez-vous?
:
Merci, monsieur le président.
Je voudrais parler des différences entre les tarifs canadiens et américains sur le plan des taxes et des frais. Il y a de la concurrence dans mon coin de la Colombie-Britannique. Je vis à Chilliwack, qui se trouve à environ une demi-heure de l'aéroport d'Abbotsford et à environ 45 minutes, ou à une heure au maximum, de l'aéroport de Bellingham.
Selon certaines analyses, le prix des vols au Canada comprend 43 % de taxes, comparativement à 15 % aux États-Unis. En ce qui concerne les loyers des aéroports, le gouvernement fédéral a perçu, en 2022‑2023, 419 millions de dollars en loyers aéroportuaires, soit une hausse de 42,5 % en 10 ans seulement. À compter du 1 er mai, c'est‑à‑dire demain, les voyageurs au Canada paieront des frais de sécurité de 9,94 $ pour un vol intérieur et de 34,42 $ pour un vol international. Les mêmes frais aux États-Unis sont inférieurs à 15,30 $.
Je vais peut-être m'adresser à vous, monsieur Moore. Vous avez parlé de l'aéroport d'Abbotsford, qui est l'aéroport international le plus près de chez moi. Pensez-vous que le gouvernement fédéral s'inquiète du fait que des millions de Canadiens choisissent chaque année de prendre l'avion à Bellingham, à Sea-Tac, à Billings, à Great Falls et à Buffalo? Ils font ce choix parce que le transport aérien canadien est inabordable. Si vous emmenez une famille de quatre personnes à Disneyland, peut-être pour un voyage qui ne se présentera qu'une fois dans votre vie, ou si vous faites un voyage d'agrément, je peux vous dire que tous mes concitoyens qui voyagent ne regardent pas seulement WestJet et Air Canada. Ils se demandent aussi s'il vaut mieux passer par l'aéroport international de Vancouver ou celui de Seattle-Tacoma.
Pouvez-vous nous dire si cela est quantifié? Le gouvernement surveille‑t‑il ce phénomène? Pensez-vous qu'il se soucie particulièrement du fait que les Canadiens prennent l'avion à partir des marchés américains plutôt que des marchés canadiens?
:
Ce n'est pas difficile à surveiller. Plattsburgh est à une heure et quart de Montréal. Je suis allé accorder une entrevue au réseau PBS la semaine dernière. Un des panneaux à Plattsburgh indique que c'est « l'aéroport américain de Montréal ». On ne verse pas dans la subtilité. PBS s'intéresse à Montréal, parce qu'on y trouve quatre millions de personnes, dont un million d'anglophones, par rapport au nord de l'État de New York. Ils savent où se trouve le marché.
À certains égards, le trajet pour se rendre à Plattsburgh n'est pas aussi rapide pour les Canadiens, mais si vous vivez sur la rive sud de Montréal et que vous avez une carte Nexus, il faut presque autant de temps pour se rendre à Plattsburgh que pour aller à l'aéroport Trudeau. J'exagère un peu, mais j'observe la même chose dans le cas de mon frère qui vit à Abbotsford et qui se rend aux États-Unis pour économiser de l'argent.
D'une certaine façon, cela aide les Canadiens, et nous en sommes heureux. Cela crée des emplois aux États-Unis, et non au Canada, et le gouvernement en est conscient, mais il a choisi une certaine approche qui aide beaucoup de familles canadiennes. J'essaie de me souvenir de mes cours de géographie, mais je dirais que la majorité des Canadiens vivent à une courte distance des États-Unis. Je pense à l'exemple de Montréal, et lorsque j'habitais à Toronto, nous allions à Buffalo. C'est un peu plus loin. Si vous vivez à Hamilton ou à Niagara Falls, il n'est pas difficile de prendre l'avion à Buffalo. Je l'ai déjà fait. Montréal, Toronto et Vancouver, nos plus grandes villes, ont toutes...
Cela dit, dans le cas d'Edmonton, c'est plus difficile. Je suis d'accord. C'est un long trajet en voiture. Il reste que c'est une option avantageuse pour beaucoup de Canadiens. Le gouvernement en est conscient. C'est l'approche qu'il a choisie. Il est indéniable que les Canadiens tirent leur épingle du jeu.
:
L'environnement est un facteur qui entre également en ligne de compte. Il est très clair qu'en France, si vous pouvez vous rendre quelque part par train — je crois que la limite est de deux heures —, vous n'aurez pas l'option de prendre l'avion. Quand on y pense, l'aspect environnemental a vraiment joué un rôle important partout dans le monde.
Cela dit, nous pouvons examiner certaines régions des États-Unis et de l'Europe, entre autres, où il y a un excellent réseau ferroviaire, et je pense que nous les envions à juste titre.
Vous avez raison de dire que le projet est axé sur Toronto, Montréal et Ottawa, en particulier, et peut-être sur Edmonton et Calgary, mais les capacités sont limitées dans le nord de la Colombie-Britannique, par exemple, pour notre ami, M. Bachrach, ici présent. Cela ne se produira tout simplement pas de notre vivant.
C'est une discussion très intéressante. Au fond, il n'y a pas de solution miracle. Le système pourrait être financé selon le principe de l'utilisateur-payeur au lieu d'être subventionné par le gouvernement... ce qui semble très complexe.
J'ai une question à vous poser. S'il devait y avoir des subventions pour les déplacements nécessaires vers des régions éloignées — on a cité l'exemple des Îles‑de‑la‑Madeleine —, quel ordre de gouvernement devrait logiquement subventionner ces déplacements? Serait‑ce forcément le gouvernement fédéral, sachant que le transport aérien est de compétence fédérale, ou serait‑il plus logique de demander aux provinces, aux territoires ou même aux administrations locales de s'en occuper?
Si quelqu'un veut donner son avis à ce sujet, je serais curieuse de l'entendre.
:
Je vais commencer à répondre à cette question pour enclencher le processus.
Lorsque nous parlons de la façon dont nous envisageons les services aériens offerts au Canada, nous remarquons que, s'il y a une partie de la population du Canada qui est vraiment lésée en matière de services aériens, c'est bien le Nord. Le Nord a été desservi par des transporteurs qui, au fil des ans, ont été subventionnés par divers ordres de gouvernements provinciaux, et les Premières Nations elles-mêmes subventionnent une partie de ce trafic.
Cependant, il est très coûteux de voyager par avion dans le Nord du Canada, et nous avons besoin d'équipements et de pilotes spécialisés pour voler dans cette partie du monde. Si nous considérons qu'il est nécessaire que nous investissions dans l'avenir de notre pays — et le Nord fait partie intégrante de notre pays —, je dirais que le filet de sécurité devrait émaner du gouvernement fédéral.
Toutefois, le premier niveau de soutien devrait provenir des gouvernements provinciaux. Ce sont eux qui comprennent le mieux la situation. Ils connaissent les collectivités qui en ont besoin, et ils ont construit et soutenu l'infrastructure de ces collectivités. Des décisions doivent être prises en fonction des besoins des gouvernements provinciaux, mais le gouvernement fédéral doit fournir un filet de sécurité correspondant lorsqu'il est question du financement nécessaire pour soutenir ces services.
:
Je pense que nos alliés dans les pays du Nord de la Scandinavie ont fait un très bon travail de coordination entre les différents ordres de gouvernement. Le degré de soutien de l'aviation dans ces collectivités... Si vous voulez vraiment examiner la façon dont ils ont procédé, leur modèle est intéressant. Pourrait‑il s'appliquer au Canada? Je n'en sais rien.
Il y a, bien sûr, des enseignements à tirer de leur exemple. Cherchons à comprendre comment ils ont procédé, à comprendre qu'ils ont traversé des difficultés et des épreuves pour arriver à un modèle correct. Ce modèle est‑il parfait? Bien sûr que non. Est‑il meilleur que celui du Canada? Je n'en sais rien. Je ne l'ai pas étudié à ce point, mais il fonctionne.
Dans les régions septentrionales des pays scandinaves, certains services bénéficient d'un certain niveau de financement, provenant probablement de l'État ou des gouvernements régionaux, et cela fonctionne. Il y a des enseignements à en tirer.
Nous ne devrions pas hésiter à prendre l'initiative d'élaborer une solution canadienne. Nous travaillons dans ce secteur depuis longtemps, et nous volons vers le nord depuis des décennies. Nous connaissons certains des problèmes qui se posent. Nous savons ce qu'il faut faire pour que ces services fonctionnent. Nous manquons simplement de volonté, de direction ou de force morale — à défaut d'un meilleur terme — pour faire bouger les choses.
Le Nord attend. Nous devons nous grouiller collectivement et faire fonctionner le Nord de manière à ce qu'il soit beaucoup plus efficace qu'il ne l'est en ce moment.
:
Je travaille sur ce sujet depuis plusieurs années et j'appuie ce que mon collègue et ami M. Gradek a dit.
Le problème que pose ce modèle est que l'on considère le transport aérien comme une finalité quant au développement des régions. Je crois que c'est une erreur. Dans le modèle scandinave, justement, on a renversé ce rapport. Dans les pays scandinaves, on a dit que le transport aérien régional était un moyen de développement des régions et qu'il fallait que les régions se développent, que ce soit sur le plan économique ou touristique. On a dit que, quand on faisait du développement régional avec les acteurs locaux, la demande se créait.
Au Québec, on a de très belles régions, mais l'infrastructure touristique, par exemple, n'est pas là. Si vous allez dans un aéroport régional, vous allez voir qu'il n'y a pas de service de location d'autos, pas d'hôtels, et ainsi de suite. L'attrait touristique n'est pas exploité à son plein potentiel.
À l'inverse, au Danemark, même dans les régions situées très loin dans le nord du pays, on a créé des aéroports régionaux et, autour de ces aéroports, on a créé de l'activité économique. On a donc créé de la demande. En Norvège, on a établi des zones industrielles autour des aéroports régionaux, avec la collaboration des acteurs locaux. On a invité les entreprises à s'établir près de ces aéroports. Ainsi, à cause de cette proximité, on a créé de l'effervescence dans les activités de l'aéroport et on a stimulé l'économie. On a donc créé de la demande, notamment celle des gens d'affaires qui voyagent de ces régions aux villes centrales.
Une fois que la demande est créée, qu'elle soit de nature touristique ou industrielle, des compagnies s'installent et des projets émergent, ce qui permet à l'activité économique régionale de devenir pérenne. C'est cette formule qu'il faudrait adopter. Malheureusement, on pense que si on établit une ligne aérienne, le problème sera réglé. Cela n'a jamais été le cas.
:
J'aimerais revenir sur la question des aéroports ruraux et des petits centres régionaux.
M. Moore a fait remarquer que la majeure partie de la population canadienne vit à quelques kilomètres de la frontière américaine. Nous vivons également à peu de distance de la frontière américaine, mais il s'agit tout simplement de l'autre frontière américaine, c'est-à-dire celle du sud-est de l'Alaska, et je crois que le problème, c'est que beaucoup de gens ont l'impression que la grande compagnie aérienne arnaque les consommateurs. Il n'y a pratiquement pas de concurrence, et elle est en mesure d'imposer les tarifs qu'elle estime que les gens sont prêts à payer. Lorsqu'il s'agit d'un voyage essentiel et que les gens doivent se rendre dans un grand centre — pour un rendez-vous médical, par exemple —, ils sont prêts à payer ce qu'il faut pour s'y rendre.
À défaut de faire comme le Québec — et peut-être d'autres provinces — qui subventionne le coût de ces vols, quelles sont les autres options en matière de politiques dont le gouvernement dispose pour faire en sorte que les compagnies aériennes facturent un prix équitable? Je pense que tout le monde admet que l'exploitation d'une compagnie aérienne entraîne des coûts et qu'une société comme Air Canada mérite de réaliser des bénéfices, mais j'ai l'impression que les tarifs imposés dans certains cas sont exorbitants. Existe-t‑il d'autres options en matière de politiques qui sont susceptibles de garantir que les consommateurs sont traités équitablement?
Je commencerai par interroger M. Moore, étant donné qu'il est assis à côté de moi, puis, si le temps et la présidence me le permettent, je passerai à d'autres témoins.
:
Je reviens tout juste du Maroc. Ce qui nous a frappés là‑bas, c'est le rôle que le gouvernement joue dans la création de centres. Il a créé un centre, où nous avons séjourné, afin d'attirer des familles vers de très beaux hôtels. Il a établi ce centre, organisé des vols à destination de cet endroit et créé ainsi une raison de s'y rendre.
Qu'il s'agisse de tourisme — il y a une belle région du pays à visiter — ou d'une industrie, comme l'exploitation minière à Labrador City, on a l'impression qu'il y a une raison de se rendre là‑bas. J'y suis allé pour visiter la mine.
De cette façon, le nombre de voyageurs augmentera, et vous serez plus susceptibles d'avoir accès à un nombre plus important de vols et de bénéficier de meilleurs prix. C'est une politique à moyen et long terme à laquelle nous devrions réfléchir. Qu'est‑ce qui amènerait les gens à se rendre dans les régions reculées du Québec? C'est de là que je viens, et ces régions sont extrêmement belles. Alors, construisons l'infrastructure que quelqu'un a mentionnée.
C'est là une mesure que nous pourrions prendre, mais j'estime que nous pourrions également prendre d'autres mesures. C'est un projet à moyen et long terme que je viens d'observer au Maroc et qui me vient vraiment à l'esprit comme une mesure que nous pourrions envisager de prendre. Nous le faisons déjà en partie, mais nous pourrions le faire davantage.
Comme je l'ai indiqué, je travaille dans ce secteur depuis plusieurs décennies. Je me souviens de l'époque de la réglementation, de l'époque du contrôle des prix. Je me souviens de l'époque où l'on établissait une relation directe entre le coût du transport de passagers d'un point A à un point B et le tarif imposé aux passagers qui voyageaient du point A au point B. À l'époque, Transports Canada, l'OTC ou leurs prédécesseurs validaient toute tentative du transporteur d'augmenter ses tarifs au‑delà des coûts de ses activités.
Nous nous sommes éloignés du modèle de réglementation parce que nous avons estimé qu'il fallait permettre au marché de déterminer le fonctionnement des tarifs et le comportement des compagnies aériennes en matière de tarification. À mon avis, nous avons laissé le marché évoluer au cours des 50 dernières années, et nous nous demandons maintenant quelle est la relation entre les tarifs et les coûts. Malheureusement, nous n'en trouvons pas.
Comme vous l'avez mentionné, le tarif imposé est celui que le marché peut supporter. Oui, vous payez des sommes importantes pour obtenir des services dans des marchés non concurrentiels. Comment pouvons-nous régler ce problème? Pouvons-nous le régler? Devrions-nous le faire?
:
Merci, monsieur le président.
Je trouve important de souligner ce qui suit. J'entends souvent mes collègues d'en face dire que c'est la faute du gouvernement. Selon eux, c'est toujours la faute du gouvernement. Vous conviendrez avec moi que c'est facile de dire que c'est toujours la faute de notre gouvernement. Cependant, les aéroports existent depuis longtemps, depuis bien avant 2015. Si un mécanisme est en place présentement, c'est parce que cela a toujours fonctionné de cette façon.
Notre gouvernement a beaucoup investi dans les aéroports. Il faut admettre que le gouvernement du Canada n'a pas de pouvoir sur toutes les compagnies aériennes. Il joue un certain rôle, et il a un certain mot à dire sur les aéroports et sur leur fonctionnement. Toutefois, je n'ai jamais entendu dire que le gouvernement du Canada exerçait un contrôle direct sur toutes les compagnies aériennes.
Il faut aussi admettre que les compagnies aériennes ont également leur mot à dire et qu'elles ont leurs façons de faire. Au bout du compte, il faut arriver à établir une collaboration entre les deux parties.
Cela dit, ce n'est pas exclusivement la faute du gouvernement du Canada. Je dois dire que c'est plutôt celle de tout le monde s'il n'y a pas de collaboration.
[Traduction]
En fin de compte, tout le monde cherche à réaliser des profits. C'est cela qui compte. Toutefois, cette attitude est problématique: vous réalisez des profits, mais qu'en est‑il du service? C'est à ce moment‑là que le gouvernement du Canada intervient, car le service en souffre. Tout le monde cherche à réaliser des profits, et le service se dégrade de plus en plus.
[Français]
Monsieur Ebrahimi, pouvez-vous expliquer au Comité le lien qui existe entre la gestion du rendement et le prix des billets d'avion?
:
Depuis au moins trois décennies, les gouvernements successifs du Canada n'ont pas joué le rôle qu'ils auraient pu jouer pour améliorer la situation. Cela, je peux le dire. Pourquoi fais-je une telle affirmation? Vous avez raison de dire que tout le monde veut faire de l'argent, mais, si vous regardez bien la situation, Lufthansa fait de l'argent, et les aéroports allemands sont bien gérés. Ils génèrent des profits, et l'accessibilité est intéressante. L'aéroport de Paris et Air France font aussi de l'argent, et l'accessibilité est grande.
En raison du mode de gouvernance de nos aéroports, on se retrouve dans une situation où tout le monde fait un peu ce qu'il veut. Il n'y a pas une espèce de cohérence d'ensemble. On a choisi de dépenser pas loin de 4,5 milliards de dollars à l'aéroport Montréal‑Trudeau, et jusqu'à 10 milliards de dollars à l'aéroport Pearson.
Or, rien n'empêche le gouvernement fédéral de décider que les créneaux supplémentaires qui seront ainsi créés seront confiés à des compagnies qui vont générer de la concurrence. Rien ne l'empêche de dire aux compagnies que, s'ils ont des vols internationaux très rentables, ils ont également l'obligation d'offrir et de maintenir des vols régionaux. Le gouvernement peut le faire, puisque c'est de compétence fédérale. Il peut faire ces choses.
Cela dit, il n'est pas question de tomber dans la dictature ni d'imposer une économie planifiée, mais, avec la collaboration des acteurs du milieu, le gouvernement peut arriver à trouver des compromis. C'est possible.
Nous pouvons donc avoir un certain rendement, tout en servant la population adéquatement.
:
Merci beaucoup, monsieur Iacono.
[Traduction]
Si aucun membre du Comité n'y voit d'objection, j'aimerais poser une question aux témoins.
Comme je ne vois personne s'y opposer, je vous en remercie, chers collègues.
J'adresse ma question aux trois témoins qui sont encore parmi nous. Le modèle canadien repose davantage sur le principe du paiement à l'utilisation que le modèle américain, selon lequel le gouvernement fédéral a tendance à dépenser davantage d'argent pour réduire les taxes sur le prix des billets d'avion.
Et si nous avancions l'argument selon lequel il serait dans notre intérêt d'éliminer certaines des taxes qui pèsent actuellement sur les billets d'avion?
M. Rogers a parlé des taxes qui s'ajoutent, et plusieurs de nos témoins en ont également parlé. Vous avez évoqué le fait que le prix de départ s'élève à tel ou tel moment, et que lorsque l'on a fini d'ajouter les taxes, le prix du billet s'élève à tel ou tel autre montant.
Supposons que nous supprimions toutes ces taxes, que le gouvernement absorbe ces coûts et qu'il les transforme en dépenses publiques. Qu'est‑ce qui empêcherait des compagnies comme Air Canada, par exemple, de dire: « Les Canadiens paient actuellement 1 000 $ pour ce même billet, et le gouvernement fédéral va abaisser son coût à 700 $, en supprimant tous ces frais et absorbant 300 $ de taxes »? Qu'est‑ce qui empêcherait ces compagnies d'augmenter le prix du billet en le faisant passer à 1 000 $, ce qui reviendrait au même pour les consommateurs canadiens, mais les 300 $ se retrouveraient dans les poches des compagnies, alors que les contribuables paieraient ce montant?
Quelqu'un souhaite‑t‑il formuler des observations à ce sujet?
:
Merci beaucoup, chers collègues. Je vous suis reconnaissant de m'avoir permis de poser cette question.
J'ai une dernière question de régie interne à régler, que j'ai abordée avec la plupart d'entre vous.
Nous devons adopter le budget pour l'étude que nous menons actuellement. Le budget en question a été distribué vendredi dernier.
Quelqu'un s'oppose‑t‑il au budget? Consentez-vous à l'unanimité à adopter le budget pour l'étude?
Des députés: Oui.
Le président: Comme personne ne s'y oppose, le budget est adopté. Je remercie tous nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui et d'avoir utilisé leurs compétences pour nous aider à mener cette étude très importante.
La séance est maintenant levée.