Bienvenue à la 114 e réunion du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 16 avril 2024, le Comité reprend son étude sur l'état de la concurrence entre les lignes aériennes au Canada.
Avant de commencer, j'aimerais rappeler à tous les députés et aux autres participants à la réunion dans la salle les mesures préventives importantes suivantes.
Pour prévenir les incidents acoustiques perturbateurs — et potentiellement dangereux — susceptibles de causer des blessures, nous rappelons à tous les participants de garder leur oreillette éloignée de tous les microphones à tout moment. Comme indiqué dans le communiqué du Président à tous les députés le lundi 29 avril, les mesures suivantes ont été prises pour aider à prévenir les incidents acoustiques. Toutes les oreillettes ont été remplacées par un modèle qui réduit considérablement la probabilité d'un incident acoustique. Les nouvelles oreillettes sont noires alors que les anciennes oreillettes étaient grises. Veuillez utiliser uniquement une oreillette noire approuvée. Par défaut, toutes les oreillettes inutilisées au début d'une réunion seront débranchées. Lorsque votre oreillette n'est pas utilisée, veuillez la placer face vers le bas, au milieu de l'autocollant sur la table, tel qu'indiqué par l'image. Veuillez consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices sur la prévention des incidents acoustiques. La disposition de la salle a été ajustée pour augmenter la distance entre les microphones et réduire le risque de retour d'une oreillette dans la salle.
Ces mesures sont en place afin que nous puissions exercer nos activités sans interruption et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris, bien entendu, celles de nos interprètes. Je vous remercie tous de votre collaboration.
La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Conformément à la motion de régie interne du Comité concernant les tests de connexion pour les témoins, j'aimerais informer le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de connexion requis avant la réunion.
Chers collègues, pendant la première heure, nous accueillons les représentants du Bureau de la concurrence du Canada: Mme Melissa Fisher, la sous-commissaire de la Direction des fusions; et Bradley Callaghan, le sous-commissaire délégué de la Direction de la politique, de la planification et de la promotion. Bienvenue à vous deux.
Nous allons commencer par les déclarations préliminaires, pour lesquelles je vous cède la parole. Vous disposez de cinq minutes.
:
Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui. Je m'appelle Melissa Fisher et je suis sous-commissaire à la Direction des fusions du Bureau de la concurrence. Mon collègue Brad Callaghan, sous-commissaire délégué de la Direction de la politique, de la planification et de la promotion, se joint à moi aujourd'hui.
[Français]
Le Bureau est un organisme d'application de la loi qui est indépendant. Il protège la concurrence et en fait la promotion au bénéfice des consommateurs et des entreprises du Canada. Au Bureau, nous assurons et contrôlons l'application de la Loi sur la concurrence, une loi d'application générale qui vise tous les secteurs de l'économie. Nous menons des enquêtes et nous luttons contre l'abus de position dominante, les fusions anticoncurrentielles, la fixation des prix et les pratiques commerciales trompeuses. Nous faisons également la promotion de règles et de règlements qui favorisent la concurrence.
Il importe de souligner que notre rôle relève de l'application de la loi, et non de l'arbitrage ou de la décision judiciaire. La Loi sur la concurrence nous oblige à respecter plusieurs normes et critères, comme de prouver que la concurrence subit un tort considérable.
[Traduction]
Je ferai également remarquer que, sur les fusions de compagnies aériennes, il existe un processus d'examen de l'intérêt public qui peut être déclenché par le ministre des Transports. Lorsque cela se produit, la loi nous oblige à fournir des conseils, et non à faire exécuter les règles. Notre rôle est de signaler au ministre des Transports, au moyen d'un rapport public, les enjeux de concurrence que pourrait soulever la fusion. C'est au ministre que revient la décision de recommander ou non l'approbation de la transaction proposée.
Nous avons procédé ainsi dans le cadre de trois transactions au cours des dernières années: d'abord avec la transaction entre First Air et Canadian North en 2019, ensuite avec la fusion proposée d'Air Canada et d'Air Transat en 2020 et, plus récemment, avec celle de WestJet et de Sunwing. Nous estimons important de rectifier les faits à la lumière des témoignages que vous avez entendus. Le Bureau n'a pas approuvé ces fusions. En fait, nos rapports publics ont relevé de graves préoccupations en matière de concurrence liées à chacune d'entre elles.
En 2015, nous avons également participé au dernier examen majeur de la Loi sur les transports au Canada. Notre mémoire contenait des recommandations au gouvernement qui, selon nous, se traduiraient par une baisse des prix, une amélioration de la qualité des services et une plus grande innovation dans le secteur des transports.
Devant les événements récents qui ont soulevé des questions sur la concurrence dans le transport aérien, le Bureau s'est penché sur la pertinence d'une étude plus complète, distincte des questions d'application de la loi qui portent sur des transactions ou des comportements précis. C'est ainsi que nous avons amorcé un processus pour mener une étude de marché sur le secteur. Il s'agira de la première étude de marché que nous réaliserons en vertu de nos nouveaux pouvoirs, qui nous ont été conférés en décembre 2023 par le projet de loi . Elle fait suite à notre étude la plus récente, qui portait sur le secteur de l'épicerie de détail.
Notre intention est d'examiner la concurrence dans le transport aérien et ce que les gouvernements de tout le Canada peuvent faire pour rehausser la concurrence au profit des passagers qui voyagent sur des vols intérieurs, et des travailleurs et entrepreneurs qui permettent ces services. Nous publierons des détails sur cette étude du marché du transport aérien dans les prochains jours, lorsque nous lancerons une consultation sur le cadre de référence.
[Français]
Avant de répondre à vos questions, je tiens à préciser que la Loi oblige le Bureau à mener ses enquêtes en privé et à protéger la confidentialité des renseignements que nous obtenons. Cette obligation pourrait nous empêcher de discuter de certaines de nos enquêtes actuelles ou antérieures.
[Traduction]
Je tiens à remercier le Comité de nous donner l'occasion de comparaître aujourd'hui. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
:
Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier les fonctionnaires du Bureau de la concurrence qui comparaissent devant nous dans le cadre de cette étude très importante.
Cette étude a été lancée parce que le Canada a perdu un concurrent aérien, Lynx Air.
Nous avons mené une étude assez approfondie sur l'état du transport aérien. Je me réjouis d'apprendre que vous mènerez votre propre étude sur ce secteur. Vous avez évoqué trois fusions de compagnies aériennes approuvées par le gouvernement actuel — First Air et Canadian North; Air Canada et Air Transat; et WestJet et Sunwing. Vous avez conclu que chacune de ces fusions aurait pour effet de « diminuer sensiblement la concurrence. » Le gouvernement actuel a pourtant approuvé les trois fusions, malgré les objections du Bureau.
Si notre secteur du transport aérien est toujours à une fusion près de devenir non concurrentiel, le ministère des Transports devrait s'en alarmer. Lorsque nous avons interrogé les fonctionnaires du ministère mardi, ils semblaient penser que tout allait bien.
Que devons-nous faire pour mieux entendre le Bureau de la concurrence et favoriser la concurrence dans le secteur du transport aérien?
:
Je suis vraiment désolé, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
Pour revenir aux fusions, la fusion d'Air Canada et d'Air Transat a été approuvée, mais lorsque la COVID est arrivée, les parties concernées ont décidé que le moment n'était pas opportun pour aller de l'avant.
Le Canada compte un grand concurrent appelé Porter Airlines, dont les représentants n'ont pas témoigné devant le Comité, contrairement aux représentants de Flair Airlines, qui ont soulevé des préoccupations assez graves concernant des comportements anticoncurrentiels.
Le bureau a‑t‑il entendu parler des préoccupations soulevées par le gouvernement ou par Flair? Je sais que vous ne pouvez pas faire de commentaires sur une enquête en cours, mais des enquêtes sont-elles engagées sur des comportements anticoncurrentiels en ce moment?
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les représentants du Bureau de la concurrence d'être parmi nous aujourd'hui.
Madame Fisher, monsieur Callaghan, je constate que vous travaillez déjà sur une étude au sujet de l'état de la concurrence dans le secteur aérien. Si nous vous avions invités un peu plus tard, nous aurions été en mesure d'avoir plus d'information. Je ne sais pas si nous aurons l'occasion de vous revoir.
Le sujet sur lequel je voulais revenir a été abordé par un de mes collègues plus tôt. Plusieurs propositions de vente ou de fusion de lignes aériennes ont été faites au cours des dernières années. Il y a eu, par exemple, la vente de Sunwing à WestJet et la vente d’Air Transat à Air Canada. Je pense qu'il y a eu un autre cas, qui remonte à quelques années. Dans ces deux situations, le Bureau de la concurrence avait formulé de sérieuses préoccupations, particulièrement dans le cas d'Air Canada et d'Air Transat. En fait, si je ne me trompe pas, même le réseau européen de la concurrence disait que ce n'était pas une bonne idée. Pourtant, le gouvernement du Canada a quand même approuvé les transactions.
Quels mécanismes pourrions-nous mettre en place pour nous assurer que, lorsque le gouvernement prend une décision qui va à l'encontre de la concurrence, il y a plus d'encadrement quant à la façon dont il procède?
Pourrions-nous mettre des mesures en place, par exemple, pour aider à ce qu'il y ait plus de transparence dans la façon dont le gouvernement prend sa décision?
En ce qui concerne la façon dont vous faites votre examen, nous avons un document qui est très clair, très explicatif. Cependant, du côté du gouvernement, il est plus difficile de comprendre sur quoi les décisions sont fondées.
:
J'aimerais aborder la question de vos pouvoirs d'enquête dans les cas d'allégations ou lorsque vous soupçonnez qu'il y a eu un abus de position dominante ou des pratiques anticoncurrentielles.
Dans le cadre de mon travail en tant que porte-parole du Bloc québécois en matière de transport, j'ai eu l'occasion de parler de façon très régulière à des gens des régions, des aéroports régionaux et des petites compagnies aériennes.
Dans tous les cas, ces gens ont été presque unanimes. Ils m'ont mentionné vivre souvent des situations où, au moment d'essayer d'établir un nouveau service de transport ou une nouvelle liaison pour une destination donnée, un gros joueur arrive, casse les prix, puis les augmente quelques mois après qu'ils se sont retirés.
Ils ont aussi déploré le fait que, s'ils portent plainte auprès du Bureau de la concurrence, ils ont malheureusement l'impression que cela ne donne rien puisqu'il faut attendre des années avant qu'il y ait un rapport. Ils m'ont aussi dit qu'il fallait accumuler tellement de documents que cela les décourageait. De plus, ils n'ont pas les moyens financiers de soutenir une concurrence déloyale pendant des mois, voire des années.
Existe-t-il des solutions qui permettraient de rendre le processus de résolution des problèmes plus efficace, comme dans le cas dont je viens de vous parler?
:
Merci, monsieur le président.
Bienvenue à nos invités.
Nous portons tous une grande attention aux problèmes dans le secteur du transport aérien, particulièrement dans le Canada rural. Quand on se déplace par avion au Canada atlantique comme je le fais — M. Bachrach se déplace aussi par avion dans les régions rurales de sa circonscription —, on constate qu'il y a beaucoup de problèmes à régler. Qu'il s'agisse de l'accessibilité, du prix des billets d'avion ou autres, les défis sont nombreux.
À titre d'exemple, au Canada atlantique, pour les vols à destination de St. John's, l'accessibilité ne pose pas tellement problème. Cependant, à Gander, à Deer Lake et dans d'autres villes desservies par un petit aéroport, premièrement, c'est très difficile de trouver un vol, et deuxièmement, les prix sont extrêmement élevés comparativement aux prix d'autres vols.
Vous avez mentionné la fusion des compagnies aériennes. La fusion proposée entre Air Canada et Air Transat n'a‑t‑elle pas été bloquée à cause de problèmes?
:
Je peux tenter une réponse.
En gros, nous essayons d'empêcher les entreprises dominantes d'accroître leur emprise sur le marché en adoptant des comportements particuliers. Le cadre a été modifié récemment à la suite des dernières modifications apportées à la Loi sur la concurrence. En un mot, auparavant, il fallait prouver trois choses: premièrement, que l'entreprise occupe une position dominante, autrement dit que c'est une grande entreprise; deuxièmement, qu'elle a des comportements ou qu'elle se livre à une pratique d'agissements anticoncurrentiels; et troisièmement, qu'elle a des effets sur la concurrence.
Depuis que la Loi sur la concurrence a été modifiée, nous pouvons demander une ordonnance d'interdiction pour mettre fin aux agissements en présence du premier facteur — la position dominante — et d'un des deux autres facteurs: soit une pratique visant à nuire à la concurrence ou à un concurrent, soit un effet. Nous pourrions imposer des mesures correctives plus vastes en présence des trois facteurs, mais selon moi, ce changement élargit la possibilité d'avoir recours aux ordonnances d'interdiction.
Les prix d'éviction sont un enjeu particulier. Comme on parle de bas prix, lorsqu'on traite de tels dossiers, il faut faire attention de ne pas restreindre la concurrence fondée sur l'intérêt et l'avantage des bas prix pour les consommateurs. Cela dit, la théorie qui sous-tend les prix d'éviction se rapporte à la préoccupation qu'une entreprise baisse ses prix à court terme, en deçà des coûts de l'entreprise dominante, pour ensuite les augmenter à long terme, une fois qu'elle aura réussi à exclure ou à discipliner son concurrent.
:
Nous reprenons la séance.
Chers collègues, pour la deuxième partie de la réunion d'aujourd'hui, nous accueillons M. Barry Prentice, professeur au Transport Institute de l'Université du Manitoba, par vidéoconférence. Bienvenue.
Du Centre pour la défense de l'intérêt public, nous recevons M. John Lawford, directeur exécutif et avocat général, et Myka Kollmann, stagiaire en droit. Bienvenue à vous deux.
Nous allons commencer avec les déclarations liminaires. Je vais céder la parole à nos deux témoins qui comparaissent en personne.
La parole est à vous. Vous disposez de cinq minutes.
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le président, et mesdames et messieurs les députés, je suis John Lawford. Je suis directeur exécutif et avocat général au Centre pour la défense de l'intérêt public, CDIP. Je suis accompagné aujourd'hui de Myka Kollman, stagiaire en droit au CDIP.
Je vais commencer par citer un passage du rapport du CDIP sur la concurrence dans le transport aérien au Canada: « À l'heure actuelle, au Canada, il est difficile de choisir ce qui est susceptible d'être le moins inefficace, un duopole réglementé ou un duopole non réglementé. » Pour votre gouverne, ces mots ont été écrits en 1989 — plus ça change...
Il y avait et il y a encore un problème avec la concentration du marché canadien, mais ce marché est maintenant divisé en marchés de liaisons régionales. La compagnie WestJet affirme avoir fait un retour aux sources comme transporteur à bas prix et s'est tournée vers une plaque tournante dans l'Ouest canadien, tout en laissant à Air Canada pratiquement le champ libre dans l'Est du pays. Bien que cela semble laisser de la place à une concurrence régionale, voire à l'entrée de transporteurs nationaux ou régionaux à très bas prix dans la zone d'influence de WestJet ou d'Air Canada, nous voyons que les transporteurs à très bas prix font faillite.
La pandémie a chamboulé toutes les compagnies aériennes. Les effectifs, les itinéraires, la demande des passagers et le financement ne font que commencer à revenir aux niveaux de 2019. Toutefois, ce sont les éléments structurels et réglementaires du marché canadien qui déterminent les effets d'événements tels que la pandémie et d'autres événements précédents, dont la suspension de vol du Boeing 737 Max en 2019.
La structure du marché continue d'être dominée par la compagnie aérienne nationale Air Canada, WestJet, qui est à nouveau une grande compagnie régionale, bien qu'elle propose désormais des itinéraires de vacances Sunwing, Porter, une compagnie régionale du centre du Canada qui a des aspirations nationales, et Air Transat, une compagnie internationale de vacances, qui est uniquement ici parce que l'Union européenne, et non pas le , a déclaré qu'elle ne devrait pas être vendue à Air Canada. Les transporteurs à très bas prix entrent sur le marché et en sortent en l'espace de deux ou trois ans, malgré les opérations prévues à l'échelle nationale. Les trois derniers sont en train de faire faillite, se refinancent ou ont fait faillite.
Pourquoi? C'est parce que les barrières à l'entrée sont trop élevées au Canada. Aucun soutien n'est accordé aux nouveaux arrivants. Les stratégies défensives prévisibles dont disposent les grandes compagnies aériennes, telles que l'adaptation des itinéraires et les prix d'éviction, n'étaient pas, jusqu'à présent, susceptibles d'être contrôlées efficacement par la loi sur la concurrence. Toutes les fusions ont été approuvées par le , ce qui a mené à une concentration. À un plus haut niveau, il n'y a pas de place pour une réglementation de la concurrence des compagnies aériennes, pas de politique aérienne gouvernementale et pas de déclaration sur la manière dont des objectifs politiques tels que le service des petits marchés, le choix des consommateurs, la réduction des prix, la qualité du service et la sécurité pourraient être atteints grâce à la concurrence.
Cependant, de nouveaux outils sont à la disposition du secteur. Il y a notamment des améliorations à la Loi sur la concurrence et des études sur la concurrence, y compris celle annoncée aujourd'hui et celles d'autres pays, en particulier l'Australie.
Madame Kollmann.
:
Dans ce vide politique, nous proposons donc six changements radicaux — trois pour aider la concurrence naissante et les concurrents, et trois pour encadrer la conversation sur la réglementation et la concurrence et donner un vague espoir d'un futur marché concurrentiel.
Premièrement, le gouvernement du Canada devrait soutenir l'entrée de la concurrence par l'entremise d'une banque de prêt de 10 aéronefs de différentes tailles appartenant au gouvernement, loués au prix coûtant, disponibles uniquement pour les concurrents et à des conditions telles que desservir certains itinéraires à certaines fréquences et avec des barrières de sortie.
Deuxièmement, les aéroports devraient réserver des créneaux horaires et des portes d'embarquement pour les nouveaux venus.
Troisièmement, des règles d'abus de position dominante devraient être appliquées pour la concordance des itinéraires et la réduction des prix, et des planchers de prix devraient être fixés et être assortis de conditions d'entrée et de sortie.
Quatrièmement, l'approbation de l'examen des fusions de compagnies aériennes devrait être inversée. Le ministre des Transports peut conseiller, mais le Bureau de la concurrence ou le Tribunal de la concurrence doit décider.
Cinquièmement, Transports Canada devrait élaborer une politique sur la concurrence dans le transport aérien, au lieu du vague cadre actuel qui appuie le marché du transport aérien, en consultation avec le Bureau de la concurrence.
Enfin, le Bureau de la concurrence devrait réaliser une étude de marché sur le transport aérien au Canada. Nous sommes ravis qu'il en ait fait l'annonce aujourd'hui.
Le cadre du type structure-comportement-rendement est un paradigme utile pour examiner l'état de la concurrence dans l'industrie du transport aérien. La structure fait référence au nombre d'intervenants, à la similarité du produit et aux coûts d'entrée et de sortie.
La concurrence intérieure au Canada se limite à quatre compagnies de transports réguliers de passagers, à l'exclusion des communautés arctiques et éloignées. Air Canada et WestJet, qui sont des compagnies aériennes qui offrent un service complet, représentent plus de 80 % du marché. Elles exploitent des aéroports pivots pour assurer des services de transport de passagers nationaux, transfrontaliers et internationaux, de même que des services de fret. Les deux plus petites compagnies aériennes, Flair et Porter, exploitent des services point à point avec des stratégies de niche. Flair se positionne comme un transporteur à rabais, tandis que Porter offre des avantages non tarifaires et s'adresse davantage au marché des affaires.
Pour de nombreux consommateurs, le transport aérien est devenu un produit. Toutes les entreprises utilisent les mêmes avions, avec des différences minimes dans les attributs non tarifaires de services. La géographie du marché compte également. La forme étroite et linéaire du marché canadien signifie que tous les concurrents empruntent les mêmes itinéraires parallèles dans tout le pays, ce qui laisse peu de place à la différentiation.
Les coûts d'entrée et de sortie dépendent du rapport entre les coûts fixes et les coûts variables de l'industrie. Une proportion élevée de coûts fixes favorise la concentration de l'industrie. Cependant, certains coûts peuvent être semi-variables, comme la location d'avions et la sous-traitance de tâches telles que la manutention des bagages. Le coût variable le plus important est le carburant. Les coûts d'entrée concernent la mise en place d'un système de réservation, les contrats de travail, la location d'espaces aéroportuaires et les opérations de maintenance. Sortir de l'industrie est plus facile, mais il s'agit de coûts irrécupérables.
Les grandes compagnies aériennes réalisent d'importantes économies d'échelle. Plus il y a de paires origine-destination dans leur réseau, plus leur clientèle est importante. La taille permet également aux compagnies aériennes de créer des réseaux en étoile. Les plus gros appareils, qui sont plus rentables, peuvent être déployés à partir de plaques tournantes où ils bénéficient de la courbe en S. L'observation de la courbe en S est que, lorsque les compagnies aériennes augmentent le nombre de vols dans un aéroport, elles reçoivent une part disproportionnée de passagers. Les économies de taille s'appliquent également aux coûts d'exploitation, tels que les hangars, la maintenance et les frais généraux.
Le comportement des entreprises est généralement opaque, car il existe des règlements qui visent à limiter les comportements anticoncurrentiels tels que la fixation des prix, les fausses représentations et l'abus de position dominante. Toutefois, sur un marché oligopolistique, une collusion tacite est possible. Les grands acteurs peuvent réagir aux actions des autres dans le but de se partager le marché et de maximiser leurs profits.
Avant les années 1980, le transport aérien était assujetti à une réglementation stricte concernant les prix et les itinéraires, dans le but d'assurer une stabilité et une protection pour les consommateurs. La déréglementation des compagnies aériennes était fondée sur la théorie des marchés disputables. Essentiellement, cette théorie veut que les participants d'un marché avec peu de rivaux puissent se comporter de manière concurrentielle si la menace de nouveaux venus est suffisante pour les amener à se concentrer sur les ventes plutôt que sur les profits.
L'histoire des compagnies aériennes canadiennes depuis la déréglementation confirme le bien-fondé de la théorie du marché disputable. Le nombre de nouveaux venus qui arrivent sur le marché et en sortent a permis de maintenir la concurrence sur le marché. Par exemple, les grandes compagnies aériennes ont créé des filiales de rabais pour relever le défi que posent les nouveaux arrivants en offrant les mêmes tarifs et itinéraires.
Le rendement des compagnies aériennes est mesuré selon leur rentabilité et leur efficacité. La rentabilité est plus facile à évaluer pour les entreprises cotées en bourse que l'efficacité. En général, les investisseurs ont considéré que la rentabilité des transporteurs aériens réguliers est moins intéressante que celle de la plupart des sociétés cotées en bourse. Toutefois, les principales compagnies aériennes sont restées relativement stables, les fusions étant plus fréquentes que les faillites.
La question de savoir si le transport aérien au Canada est aussi efficace qu'il pourrait l'être est obscurcie par le protectionnisme. La concurrence intérieure est limitée par les restrictions en matière de cabotage qui interdisent aux compagnies aériennes étrangères d'exercer leurs activités sur le marché canadien. De plus, les contrôles applicables à la propriété étrangère limitent l'accès aux capitaux d'investissement internationaux qui pourrait permettre d'améliorer l'efficacité et le renouvellement de la flotte.
Tandis que les prix des billets augmentent, les coûts de la main-d'œuvre, de l'équipement et du carburant augmentent également, ce qui pourrait avoir une incidence sur la concurrence. Toutes les compagnies aériennes ont enregistré une hausse des règlements salariaux, parce que les travailleurs essaient de rattraper l'inflation. La demande mondiale de pilotes d'avion a entraîné des augmentations de salaire bien supérieures au taux d'inflation. La menace de grève de l'organisation fraternelle de maintenance des avions de WestJet en est le dernier exemple.
La hausse des taux d'intérêt fait augmenter les coûts de cette industrie à forte intensité de capital. Le faible taux de change du dollar canadien joue également un rôle, car la plupart des avions et des pièces d'aéronef sont importés. Les prix du pétrole sont actuellement bas, mais les prix du carburant augmenteront avec les taxes sur le carbone et l'adoption de carburants d'aviation durables.
Enfin, il est peu probable que les pertes subies durant la pandémie aient déjà disparu.
L'incidence du prix des billets sur la demande de transport aérien au Canada est également influencée par les droits et les frais qui ne relèvent pas des compagnies aériennes. Les aéroports canadiens ont augmenté les frais pour faire face aux dettes contractées durant la pandémie. Le gouvernement du Canada continue d'exiger des aéroports des loyers et des frais d'utilisation pour la sécurité qui, au final, sont tous payés par le consommateur.
La faiblesse de l'économie et la possibilité qu'elle entre en récession ne sont pas de bon augure pour la demande des passagers. Le transport aérien est davantage un luxe qu'une nécessité pour la plupart des passagers pour loisirs. Les voyages d'affaires ont également été réduits par l'expérience de la pandémie et un passage aux réunions virtuelles, bien qu'une certaine reprise soit possible.
Depuis la déréglementation, la concurrence entre les compagnies aériennes au Canada s'est traduite par l'apparition de deux grands transporteurs réguliers et par l'entrée et la sortie d'une série de petits transporteurs. La perte récente d'une très petite compagnie aérienne, Lynx, ne signifie pas qu'une nouvelle contraction est inévitable, mais l'instabilité est le prix de l'efficacité...
:
Merci, monsieur le président.
Je vais saisir cette occasion pour présenter une motion urgente avant que nous poursuivions la série de questions sur ce sujet très important.
J'ai donné avis de la motion le vendredi 3 mai.
Elle se lit comme suit:
a) Technologies et développement durable Canada, un fonds d'un milliard de dollars financés par l'argent des contribuables, fait l'objet d'une enquête de la part de la vérificatrice générale du Canada et du commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique;
b) une ancienne administratrice du fonds, Andrée-Lise Méthot, a contribué à envoyer des millions de dollars à plusieurs entreprises dans lesquelles elle possède des intérêts financiers et, malgré cela, le gouvernement l'a nommée administratrice de la Banque de l'infrastructure du Canada.
Le Comité fasse comparaître les témoins suivants au moins deux heures chacun: le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc; le président-directeur général de la Banque de l'infrastructure du Canada, Ehren Cory; des représentants du Secrétariat du personnel supérieur du Conseil privé; la fondatrice et associée directeure de Cycle Capital, Andrée-Lise Méthot.
Monsieur le président, je présente cette motion aujourd'hui car, une fois de plus, la capacité de ce gouvernement de prendre des décisions éthiques et judicieuses est sérieusement mise en doute. Le Fonds d'appui technologique au développement durable est mêlé à un scandale dans lequel il fait l'objet d'une enquête pour avoir détourné des millions de dollars de l'argent des contribuables vers des entreprises dans lesquelles sa directrice avait des intérêts financiers. L'une des directrices impliquées dans cette affaire est Mme Andrée-Lise Méthot. Ses entreprises ont reçu 42 millions de dollars de TDDC alors qu'elle siégeait à leur conseil d'administration. Cette directrice est également impliquée dans le versement de prestations liées à la COVID aux entreprises auxquelles elle est associée. Malgré ces graves conflits d'intérêts et ces problèmes éthiques, Mme Méthot a récemment été nommée au conseil d'administration de la Banque de l'infrastructure du Canada.
En tant que comité responsable de surveiller la Banque de l'infrastructure du Canada, il est extrêmement important que nous allions au fond de cette affaire, dans laquelle la directrice a elle-même admis qu'elle avait des conflits d'intérêts. Les Canadiens doivent avoir confiance dans leurs institutions fédérales et démocratiques. Pour ce faire, nous devons entendre le témoignage du , qui l'a nommée. Nous devons également entendre les témoignages de fonctionnaires du Bureau du Conseil privé, et nous proposons d'entendre directement des représentants de la BIC et Mme Méthot.
J'espère que cette motion recevra le soutien de tous les partis présents à cette table.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Lawford et madame Kollmann, merci d'être venus au Comité aujourd'hui. C'est un plaisir de vous recevoir. Vous avez mentionné un certain nombre de bonnes idées dans votre déclaration liminaire.
Je voudrais commencer par l'état de la concurrence dans le transport aérien au Canada. Nous sommes ici parce que Lynx Air, un transporteur à très bas prix, un concurrent, a fait faillite. Il nous reste cependant Flair. Le PDG de Flair était ici il y a quelques semaines. Je ne sais pas si vous avez entendu son témoignage. Il a mentionné un comportement anticoncurrentiel au Canada, ce qui est très préoccupant. Cela menace son entreprise et cette compagnie aérienne, qui rivalise pour obtenir certains itinéraires importants.
Pouvez-vous nous parler de l'état des comportements anticoncurrentiels au Canada et de la façon dont ils menacent la concurrence entre les compagnies aériennes, plus particulièrement les nouveaux venus sur le marché?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je suis heureux d'être de retour. J'ai été membre associé il y a quelques années et je suis heureux de revenir au Comité aujourd'hui.
Tout d'abord, je remercie les témoins de nous avoir octroyé de leur temps et de nous faire part de leurs connaissances aujourd'hui.
J'aimerais commencer par M. Prentice si possible.
Monsieur Prentice, j'adorerais vous entendre sur l'avenir des dirigeables au Canada. Nous pourrons peut-être vous réinviter pour que vous nous en parliez. Je suis fasciné par votre travail à ce sujet. Cela dit, aujourd'hui, je m'en tiendrai au cadre de l'étude qui nous occupe.
Tout le monde autour de la table sait que le secteur des transports et l'industrie du transport aérien du Canada sont des composantes essentielles de notre économie, mais nous semblons être dans un cycle qui manque de véritable concurrence. Les petites compagnies aériennes sont rachetées ou échouent. Quelles sont les principales conclusions à tirer, selon vous? Quelles leçons devrions-nous tirer de la situation? Pendant que vous réfléchissez à votre réponse, je vous rappelle que nous cherchons à obtenir des recommandations. Il serait donc utile que vous en teniez compte.
Merci beaucoup.
C'est difficile, car il faut se demander quelle concurrence est possible sur le marché. À nouveau, le marché est très étroit et linéaire pour la plupart des voyages aériens. La majorité d'entre eux se font entre les principaux centres, entre les neuf ou plutôt les 29 principaux aéroports.
Les compagnies fournissent le même type de services, mais certaines offrent des voyages plus fréquents. C'est ce que recherchent les consommateurs. Ils veulent rentrer à la maison à l'heure qu'ils souhaitent. Certaines compagnies ont des liens avec des services internationaux. Il faut également tenir compte du fait que le marché international compte des transporteurs internationaux, mais aussi nos transporteurs nationaux, de sorte que la concurrence sur ce marché ne se limite pas à WestJet et à Air Canada. Ces compagnies disposent d'un système d'alimentation vers ce marché. Il est également question de la quantité de compagnies aériennes qui sont liées à tel ou tel marché.
Il y a présentement une grave pénurie de pilotes, ce qui limite la concurrence. Dans une certaine mesure, certains des services qui pourraient être offerts aux petites collectivités ne le sont pas, simplement parce qu'il n'y a personne pour piloter les avions. C'est un problème en soi.
Je ne sais pas si j'ai entièrement répondu à votre question, mais cela dit, j'adorerais parler des dirigeables.
L'un des problèmes dans la situation qui nous occupe dont je peux parler est qu'il n'y a de la concurrence entre les compagnies aériennes que dans le Sud du Canada. Il n'y en a pas dans le Nord. Il est très difficile d'en avoir en raison de l'étroitesse des marchés et du coût d'exploitation de ces derniers. Par conséquent, une autre forme de transport en soutien ferait une grande différence.
En fait, je vais tricher un peu et utiliser le mémoire que le Bureau de la concurrence a soumis à l'OCDE en 2015.
La première barrière concernait la modification de la propriété étrangère, ce qui a été fait. La deuxième était le manque de trafic d'alimentation aux deux extrémités de leurs itinéraires. La troisième était l'absence d'un programme de fidélisation efficace, dont personne n'a parlé jusqu'à présent. Il y avait ensuite l'absence de salons aéroportuaires pour les classes affaires, l'absence d'une marque établie, les coûts de location ou d'achat d'aéronefs — qui est une question importante que nous avons abordée —, les coûts de recrutement de l'équipage, l'obtention de l'accès aux installations aéroportuaires — en particulier les portes d'embarquement, mais aussi de nombreux autres équipements —, les coûts d'engagement à un horaire afin d'établir une réputation de fiabilité, la publicité, les coûts de familiarisation des agents de voyage, les exigences réglementaires de la Loi sur les transports, la rareté de créneaux horaires intéressants aux aéroports clés, etc. Nous avons également essayé de nous pencher sur ce dernier point.
C'est la liste du Bureau de la concurrence. C'est ce que nous disons, mais je serais intéressé de voir quelles seraient ses conclusions s'il menait une nouvelle étude de marché.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui. J'ai beaucoup apprécié leurs allocutions d'ouverture, et j'ai bien hâte d'en apprendre davantage sur le sujet, particulièrement sur les six recommandations proposées par les représentants du Centre pour la défense de l'intérêt public. C'était de la musique à mes oreilles, et j'espère que le Comité va être unanime quant à celles-ci.
Monsieur Lawford, j'aimerais approfondir certaines de vos recommandations. Il y en a une où il est question de l'accès aux portes d'embarquement et aux créneaux horaires pour les nouveaux venus dans le secteur de l'aviation.
Selon vous, quel mécanisme permettrait de résoudre cette question? Cet accès devrait-il être obligatoire? Vous en avez peut-être parlé dans votre allocution d'ouverture, mais je n'ai pas bien saisi vos propos.
J'ai dit plus tôt que le Bureau de la concurrence pourrait en faire une obligation. Peut-être que l'on pourrait automatiser une procédure en ce sens au sein des aéroports.
Y a-t-il d'autres mécanismes plus appropriés qui permettraient de faire cela?
:
Il y a plusieurs mécanismes en place dans les aéroports, ainsi que chez Transports Canada et au sein des lignes aériennes.
[Traduction]
Si je ne m'abuse, les créneaux sont essentiellement un enjeu de négociation entre les aéroports et les compagnies aériennes. Avec le projet de loi , le ministre n'aura que le pouvoir de demander ce qui se passe. Il serait probablement utile d'impliquer davantage Transports Canada dans le processus de négociation.
Il serait utile de rationaliser les cas où le droit de la concurrence peut intervenir dans ces accords. Le Bureau de la concurrence fait de petits pas pour s'insérer dans la réglementation de l'industrie du transport aérien en matière de concurrence, et, avec un peu de chance, nous aurons un jour quatre parties qui discuteront d'enjeux tels que les créneaux.
Cela dit, il n'y en a que deux pour le moment. Comme je l'ai dit, on revient à la règle suivante : vous utilisez le créneau ou vous le perdez. Comme Air Canada est un transporteur dominant et une compagnie aérienne établie, si elle désire ravoir son créneau et qu'elle l'a utilisé, elle le récupère.