FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 26 avril 2001
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King-Aurora, Lib.)): La séance et ouverte. Je souhaite à tous la bienvenue aujourd'hui. Comme vous le savez, l'ordre du jour d'aujourd'hui est l'examen du projet de loi C-18, Loi modifiant la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces.
Nous avons le plaisir de recevoir le ministre des Finances du Manitoba, M. Greg Selinger, accompagné de M. Ron Neumann, directeur des affaires intergouvernementales de la province.
Soyez les bienvenus. Comme vous le savez sans doute, je vous invite à faire une déclaration de 10 ou 15 minutes, après quoi nous allons vous poser des questions.
L'hon. Greg Selinger (ministre des Finances, Assemblée législative (Manitoba)): Je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte de prendre la parole devant vous aujourd'hui.
[Français]
Membres du comité, le programme de péréquation est une pierre angulaire importante de la Fédération canadienne. Il est si important qu'il a été reconnu et incorporé à notre Constitution.
J'affirme qu'il nous incombe à tous de défendre les principes de ce programme et de nous assurer que les actions entreprises à son égard soient conformes tant à l'esprit qu'à la lettre des dispositions de l'article 36 de la Constitution.
[Traduction]
Je prends la parole devant le comité pour parler des dispositions du projet de loi C-18, et des répercussions potentielles du maintien du plafond imposé sur les paiements de péréquation.
Il est tout à fait exceptionnel qu'un ministre manitobain prenne la parole devant un comité du Parlement fédéral, mais ma présence souligne bien l'importance de cette question pour le gouvernement du Manitoba. De fait, le maintien du plafond des paiements de péréquation est un sujet de préoccupation pour tous les ministres provinciaux et territoriaux des Finances, ainsi que pour tous les premiers ministres provinciaux.
Je suis, pour l'année en cours, président du Conseil des ministres des Finances des provinces et des territoires. À ce titre, j'ai organisé une rencontre avec mes collègues à Winnipeg en décembre 2000. Au cours de cette rencontre, ces ministres ont unanimement réitéré leur appui à notre position commune, qui est que le plafond des paiements de péréquation soit supprimé. Le communiqué rédigé à la suite de la rencontre figure dans son intégralité dans le cahier que je vous remets aujourd'hui, à la page 21.
• 1540
Je voudrais souligner que ce soutien apporté à la suppression
du plafond n'est pas nouveau. Qu'ils bénéficient ou non des
paiements de péréquation, les provinces et territoires ont
invariablement appuyé une telle action. Je me présente ici
aujourd'hui pour m'assurer que notre position est clairement
comprise. Le plafond du programme de péréquation est un obstacle à
sa pertinence et doit être éliminé à jamais.
Plus tôt aujourd'hui, vous avez entendu les ministres des Finances des provinces de l'Atlantique expliquer que ce serait pour eux un programme adéquat de paiements de péréquation. Je crois que tous nos messages seront semblables, mais je voudrais souligner certaines des principales questions que j'ai présentées à l'Assemblée législative du Manitoba sous forme de document budgétaire. Ce document se trouve également parmi ceux que je vous présente aujourd'hui. Je voudrais en particulier souligner le rôle important que joue le programme de péréquation dans la force, la vitalité et l'unité du Canada. La péréquation permet d'offrir de meilleures perspectives d'avenir et de croissance économique dans l'ensemble du pays, un fait qui a souvent été nié ou même déformé par la presse.
Le but du programme de péréquation est bien défini au paragraphe 36(2) de la Constitution.
-
Le Parlement et le gouvernement du Canada prennent l'engagement de
principe de faire des paiements de péréquation propres à donner aux
gouvernements provinciaux des revenus suffisants pour les mettre en
mesure d'assurer les services publics à un niveau de qualité et de
fiscalité sensiblement comparable.
En étant capable de fournir des services comparables et des taux d'imposition comparables, toutes les provinces peuvent effectivement se faire concurrence pour favoriser la croissance économique et la création d'emplois que tous les Canadiens désirent. Sans services comparables, certains Canadiens seraient moins prêts à profiter des perspectives qui s'offrent à eux. Sans taux d'imposition comparables, les décisions concernant l'emplacement des entreprises seront prises en fonction de facteurs autres que l'aspect strictement économique de ces décisions.
Certains faits montrent que le Canada a bénéficié du programme de péréquation. Une étude longitudinale récemment effectuée par MM. Richard Bird et François Vaillancourt montre que depuis l'introduction du programme de péréquation en 1957, la croissance économique par habitant dans les provinces bénéficiaires a été légèrement plus importante que celle des provinces non bénéficiaires au cours des quatre dernières décennies. Je pense qu'il s'agit là d'un résultat remarquable, un résultat qui réfute bien la notion répandue selon laquelle la péréquation nuit à la croissance économique.
En un mot, la réalité c'est que la péréquation ne crée pas de dépendance. Elle assure aux provinces les moyens nécessaires à la croissance et à la diversification de leur économie, les rendant ainsi moins dépendantes des transferts du gouvernement fédéral.
La croissance n'a pas été suffisamment importante pour empêcher une migration nette hors des provinces bénéficiaires ou pour éliminer les disparités par habitant. Toutefois, nous faisons des progrès.
La situation migratoire du Manitoba s'est récemment renversée, si bien que notre province bénéficie maintenant d'un solde migratoire positif. Et nous avons besoin de ce renversement, car la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée est un des facteurs qui ralentissent notre croissance économique.
Maintenir des coûts et des taux d'imposition sur le revenu des particuliers comparables à ceux des autres provinces est un facteur important pour attirer les gens au Manitoba et les convaincre d'y rester. Les paiements de péréquation aident à niveler le terrain pour les provinces qui veulent être concurrentielles, non seulement sur le plan national, mais aussi dans le contexte d'une économie de plus en plus mondiale.
L'autre moyen que nous utilisons pour augmenter directement notre réserve de main-d'oeuvre qualifiée est d'améliorer les possibilités de formation professionnelle et d'éducation. Là encore, le programme de péréquation nous aide à fournir les services publics nécessaires.
Je suis heureux que notre gouvernement ait récemment pu investir dans les établissements d'enseignement post-secondaire manitobain le montant le plus important de l'histoire de notre province. Il nous faudra toutefois continuer à faire de tels investissements afin de garantir que notre province bénéficie d'une main-d'oeuvre bien formée et équipée des compétences requises pour que notre croissance économique demeure forte.
Je ne vous ai présenté que quelques exemples visant à souligner l'importance du programme de péréquation pour le Manitoba et pour l'ensemble du Canada. Il y en a bien d'autres. Je crois toutefois que la plupart des membres du comité reconnaissent le mérite du programme. C'est pourquoi je suis encouragé par la présentation du projet de loi C-18, qui permettra la suppression du plafond imposé sur les paiements de péréquation pour l'exercice 1999-2000. C'est aussi pourquoi je suis perplexe et déçu que le gouvernement du Canada n'ait pas décidé de supprimer ce plafond pour l'année 2000-2001 et les années suivantes.
Ce plafond aura des répercussions négatives pour les provinces bénéficiaires si aucune action n'est entreprise. Je voudrais toutefois souligner que ce potentiel ne dénote pas une faiblesse du programme. En fait, la diminution des disparités fiscales par habitant au fil des années a permis de réduire les coûts du programme proportionnellement au PIB. Ce plafond a des répercussions négatives car il a été abaissé de manière arbitraire à trois reprises au cours des 20 dernières années, dont la dernière fois en 1999.
L'abaissement progressif du plafond est détaillé dans les documents que je vous ai présentés, y compris ma lettre récente à M. Martin et mon document budgétaire.
• 1545
Ce plafond a baissé d'un taux effectif de 1,33 p. 100 du PIB
entre 1982 à 1987 à un taux de 1,04 p. 100 du PIB aujourd'hui. Ces
diminutions du plafond ont été effectuées sans égard au niveau de
paiement nécessaire pour la réalisation des objectifs du programme.
La formule du programme de péréquation est conçue pour déterminer
les paiements objectivement. Il y a toujours des améliorations
proposées d'ordre technique à apporter, mais il s'agit là de sujets
à discuter dans le cadre du renouvellement quinquennal du
programme.
Si le plafond n'est pas supprimé pour l'exercice 2000-2001 et les exercices suivants, les paiements de péréquation ne progresseront pas et pourraient même diminuer par rapport au niveau de 1999-2000. Ce résultat ne cadre pas avec la proposition faite par le premier ministre aux ministres provinciaux et territoriaux en septembre dernier à Winnipeg. Selon cette proposition, le plafond sur les paiements de péréquation devait être éliminé pour l'année 1999-2000, et les paiements devaient augmenter au rythme de la croissance du PIB dans les années suivantes.
Parmi les documents que je vous ai présentés, vous trouverez un tableau récapitulatif de l'effet combiné des augmentations du TCSPS contre la récupération possible du plafond de péréquation à partir de l'exercice 2000-2001. Ce tableau montre qu'à moins que les paiements de péréquation puissent augmenter sans récupération imposée par le plafond, seules les trois provinces les plus riches retireraient un bénéfice net de la proposition faite en septembre par le premier ministre.
Le tableau se trouve à la page 35 de la version anglaise et 36 de la version française. Il est très révélateur de la situation du Manitoba. Nous ne nous faisons pas d'illusions. Le plafond actuel ne permettra pas aux paiements de péréquation résultant de la formule d'être versés pour l'année 2000-2001 et les années suivantes. Les données économiques et fiscales, dont les effets n'ont pas encore été pris en compte pour les calculs, portent à croire que les répercussions de ce plafond seront plus importantes pour l'exercice 2000-2001 que pour l'année 1999-2000.
Pour l'exercice financier 2000-2001, la perte potentielle de revenu a été estimée à 100 millions de dollars pour le Manitoba. Cet argent pourrait servir à réduire nos impôts, continuer d'investir dans l'enseignement postsecondaire ainsi que dans le secteur de la santé, il va sans dire.
Je voudrais faire une autre observation. Lorsque le plafond des paiements de péréquation a été introduit, le gouvernement fédéral accusait d'importants déficits budgétaires qui s'accroissaient. Pour l'exercice qui vient de se terminer, il accusait un excédent budgétaire dépassant les 10 milliards de dollars. Il est vraisemblable que le gouvernement fédéral amasse des excédents budgétaires par le truchement d'une récupération des paiements de péréquation des provinces les moins riches du Canada. J'exhorte les membres du comité à réfléchir davantage à l'importance du programme de péréquation, à notre engagement collectif envers l'égalité des chances pour tous les Canadiens et Canadiennes—une égalité clairement exprimée dans la Constitution—et au fait que notre nation est plus forte lorsque toutes ces régions sont prospères. Le plafond imposé sur les paiements de péréquation doit être supprimé.
C'est là-dessus que se termine ma déclaration, monsieur le président.
Le président: Merci, monsieur le ministre.
Nous allons maintenant donner la parole à M. Epp. Il s'agira d'un tour de 10 minutes.
M. Ken Epp (Elk Island, AC): Merci, monsieur le président et merci à vous, monsieur Selinger, d'être venu comparaître ici.
Monsieur le président, je vous signale que M. Selinger vient lui aussi de la Saskatchewan. Ce sont donc deux grands esprits qui se rencontrent ici.
J'aimerais vous poser quelques questions, dont certaines que j'aurais aimé poser aux autres ministres des Finances qui étaient ici ce matin. Je vais commencer par une question toute simple. De toute évidence, vous êtes hostile au maintien du plafond. Vous voulez qu'il soit supprimé. Si j'ai bien compris votre déclaration, vous voulez que les paiements de péréquation augmentent chaque année au rythme de la progression du produit intérieur brut.
Vous avez laissé entendre que c'est ce que le premier ministre a offert. Ce n'est pourtant pas ce que les autres témoins ont dit ce matin. Êtes-vous sûr de votre fait? Pouvez-vous le prouver?
M. Greg Selinger: Oui, nous avons le document. Nous avons fourni la lettre du premier ministre. De fait, les autres provinces sont du même avis que nous. Nous l'avons confirmé en décembre à l'occasion de notre rencontre à Winnipeg. La promesse faite à cette réunion, lorsque nous nous sommes entendus sur les améliorations à apporter au transfert social, était que le plafonnement des paiements de péréquation avait cessé pour un an et que ceux-ci progresseraient ensuite au rythme du produit intérieur brut.
Leur valeur de base serait donc établie à 10,78 milliards de dollars. En ramenant le chiffre à 10 milliards, nous ne suivons pas la progression du produit intérieur brut. Nous régressons. C'est ce que montre le tableau dont je vous parlais, à la page 36.
M. Ken Epp: Dans ce cas, ai-je raison de dire que le seul amendement que vous apporteriez au projet de loi C-18 serait de fixer non pas à 10 milliards mais bien à 10,8 milliards de dollars à peu près ce montant calculé d'après le PIB—et de le laisser monter au fur et à mesure que le PIB progressera par la suite?
M. Greg Selinger: Nous appuyons les amendements proposés ce matin par la ministre des Finances de l'île-du-Prince-Édouard. Elle en a proposé deux. Le premier était de supprimer tout simplement le plafond. Si ce n'est pas possible, que la somme soit calculée à partir de la croissance réelle de l'année pendant laquelle il a été supprimé, puis qu'on le laisse monter au rythme du PIB par la suite. Nous espérons que c'est au moins cette position que le comité adoptera grâce à cet amendement. Idéalement, nous voudrions supprimer carrément le plafond.
M. Ken Epp: J'ai dit ce matin que je conçois volontiers le Canada comme une collectivité. Je suis venu au Parlement fédéral comme Canadien, d'abord et avant tout. Bien sûr, je dois représenter non seulement ma circonscription de l'Alberta, mais aussi ma province dans une certaine mesure, mais je pense d'abord comme Canadien. Je n'hésite pas à le dire lorsqu'il s'agit de soins de santé, de scolarisation des jeunes ou d'autres problèmes économiques ou d'infrastructure au pays: essentiellement, il faut mettre l'argent dans une grande marmite et y puiser de manière égale.
L'actuel régime de péréquation ne permet pas d'assurer l'équité par habitant. Si vous examinez les tableaux, la façon dont la formule s'applique dans les diverses catégories, et le montant versé aux différentes provinces bénéficiaires, le montant par habitant varie beaucoup. Estimez-vous que l'on devrait revoir ou refaire les formules—je sais que l'examen s'en vient, mais je fais un peu de prospective—de sorte qu'au lieu de la faire reposer sur les recettes que la province aurait perçues si elle avait eu les mêmes taux d'imposition dans toutes les catégories—ce qui est le cas actuellement, elle reposait sur les coûts réels? Ou alors la baser sur un coût moyen par habitant au pays, puis en l'adaptant au prorata de la population de chaque province bénéficiaire. Accepteriez-vous d'envisager cette idée la prochaine fois qu'on examinera le programme de péréquation?
M. Greg Selinger: Tout d'abord, notre objectif ici aujourd'hui est de parler du projet de loi C-18 et votre question va au-delà. En ce qui concerne le C-18, notre position est très claire: enlever le plafond. Si vous ne le supprimez pas, calculez-le en fonction du montant réel de l'année pendant laquelle il a été supprimé et laissez-le monter en fonction du PIB.
Ce serait une amélioration importante. Ce ne serait pas une réforme de fond en comble de la formule, mais ce serait une amélioration importante pour les provinces. C'est la position des dix provinces et il m'apparaît important de répéter qu'il y a consensus.
Une fois que ce sera fait, nous pourrons envisager les autres améliorations à apporter. Les ministres des provinces examinent déjà plusieurs idées en collaboration avec les fonctionnaires provinciaux et seront heureux de faire des propositions du gouvernement fédéral, mais ce n'est pas la question qui nous occupe aujourd'hui, monsieur Epp. Nous essayons de réaliser des progrès sur un point où il y a consensus, où tout le monde s'entend.
M. Ken Epp: Nous prenons acte du consensus provincial sur la question que vous avez évoquée. J'essaie seulement d'élargir un peu la discussion pour voir comment on pourrait améliorer le programme au profit de ceux qui en ont besoin.
Il n'y a pas longtemps, j'ai lu un livre intéressant et j'en ai parlé dans ma déclaration à la Chambre pendant la deuxième lecture. Sauf tout le respect que je dois à mon collègue M. Blaikie là-bas, et à d'autres, ils ont compris tout de travers ce que j'ai dit. Je ne dois pas avoir le don de la communication. Je ne sais pas pourquoi, mais ils me sont vraiment tombés dessus quand j'ai dit qu'il y a une anomalie dans le système actuel qui permet aux riches d'être subventionnés par les pauvres. C'est basé sur des données réelles et empiriques. Ce n'est pas seulement une affirmation de ma part, et pourtant j'ai été mal interprété.
M. Greg Selinger: J'aimerais répondre à ce que vous venez de dire. Je pense que ce serait une fausse représentation des conséquences du programme. Vous changez les unités d'analyse. Le programme de péréquation est un transfert du gouvernement fédéral aux provinces pour leur permettre d'offrir des niveaux de service comparables à des taux comparables d'imposition. Changer l'analyse pour parler de quelqu'un qui serait plus pauvre en Alberta que quelqu'un qui pourrait être plus riche au Manitoba, c'est présenter un argument fallacieux. Vous changez complètement les unités d'analyse, vous passez des provinces aux individus.
• 1555
Il y a toujours des anomalies. La question fondamentale, c'est
la capacité des provinces de fournir à leurs citoyens des services
qui sont à peu près égaux, à des niveaux d'imposition qui sont à
peu près comparables. Statistiquement, cela permet habituellement
aux citoyens de ces provinces d'avoir les mêmes avantages et des
chances égales dans la vie. C'est ce vers quoi on tend. Il y aura
toujours des anomalies comme celles que vous signalez, mais ce
serait mal avisé de condamner le programme sur la base d'exemples
pareils.
M. Ken Epp: Je ne condamne pas le programme. Je signale simplement que c'est peut-être une question que nous devrions examiner car, en fait, les riches des provinces bénéficiaires se trouvent à bénéficier d'un allégement d'impôt à cause de ce programme. C'est ce qui arrive en réalité. Je répète que c'est un argument théorique que j'ai lu dans ce livre-ci, mais après l'avoir lu, cela m'a semblé logique. Quoi qu'il en soit, je ne pense pas que l'on devrait s'attarder à cela.
Je voudrais poser une autre question avant de céder la parole à d'autres députés. Le renseignement que je cherche se trouve peut-être dans ces documents, mais les paiements de péréquation représentent quel pourcentage des recettes totales de votre province? Le savez-vous par coeur?
M. Greg Selinger: Oui, c'est 18 p. 100.
M. Ken Epp: Environ 18 p. 100. Dans d'autres provinces, c'est plus élevé. Je pense que d'autres ministres des finances ont dit que la proportion peut atteindre plus de 30 p. 100.
Compte tenu des programmes que cela permet de financer et de la baisse d'impôts que la péréquation peut potentiellement représenter pour vos citoyens, quel pourcentage votre province devrait raisonnablement recevoir dans le cadre de ce programme de péréquation?
M. Greg Selinger: Ce pourcentage varie. Je pense qu'il importe de situer le programme de péréquation dans son contexte historique. Toutes les provinces du Canada ont été bénéficiaires du programme de péréquation à un moment ou l'autre de leur histoire, sauf l'Ontario; je dis bien toutes les provinces, y compris l'Alberta, qui a reçu des paiements de péréquation jusqu'en 1961.
La proportion que l'on reçoit varie selon la prospérité, la capacité d'offrir des services, l'assise fiscale d'une province, par rapport aux autres provinces, à chaque fois que l'on réexamine la situation, soit à tous les cinq ans. Je ne pense donc pas que la proportion soit fixe.
Nous aimerions avoir le moins possible de paiements de péréquation. En fait, nous préférerions ne pas en avoir du tout. Mais nous voulons y parvenir en développant notre économie et la prospérité potentielle de nos citoyens, grâce aux services que ceux-ci reçoivent, c'est-à-dire l'éducation, la santé, etc. Voilà le but de ce transfert. Il permet aux provinces de bâtir leur économie, d'instruire leur population, de garder leurs citoyens en santé, de mettre en place l'infrastructure nécessaire pour assurer leur indépendance. C'est la raison d'être fondamentale du transfert, et les études historiques menées par les professeurs Bird et Vaillancourt démontrent que le programme a atteint cet objectif depuis 40 ans.
D'aucuns prétendent qu'il crée la dépendance. Les faits démontrent le contraire. Je pense qu'il importe vraiment de ne pas le perdre de vue quand on examine le rôle du programme et la nécessité de l'améliorer.
M. Ken Epp: Je voudrais simplement dire, en guise de conclusion, que je suis convaincu que l'Alberta, la Colombie-Britannique et l'Ontario sont avantagées par ce programme actuellement. Je crois que c'est avantageux pour nous de vivre dans un pays où l'égalité des chances est relativement la même partout. C'est un avantage pour tous les citoyens du pays. Nous sommes aussi citoyens du pays et c'est donc avantageux pour nous. C'est le fonds de ma pensée.
Je vous remercie, monsieur le président. Si nous avons le temps, je reviendrai à la charge au deuxième tour. J'aurais d'autres questions.
Le président: Merci, monsieur Epp.
[Français]
Monsieur Marceau.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président. Monsieur le ministre, merci d'être venu aujourd'hui rencontrer les membres du comité.
Monsieur le ministre, vous avez mentionné, dans votre présentation, les surplus énormes dont bénéficie évidemment le gouvernement fédéral. Quand vous mentionnez l'importance des paiements du programme de péréquation et que vous soulignez, avec justesse, les surplus énormes dont bénéficie le gouvernement fédéral, j'aimerais savoir quelles raisons on vous donne pour refuser de supprimer le plafond? Comment le gouvernement fédéral justifie-t-il le fait de conserver ce plafond qui pénalise beaucoup de provinces?
M. Greg Selinger: De notre point de vue, il est difficile de comprendre ce qui justifie un plafond dans un programme de péréquation. On comprend que, historiquement, le plafond a été instauré quand le gouvernement fédéral avait un déficit et une dette énormes. Mais cette situation s'est beaucoup améliorée ces jours derniers et on croit maintenant que le programme peut retourner à sa fonction de principe sans qu'il y ait un plafond, sans aucun danger pour le gouvernement fédéral d'avoir un déficit.
M. Richard Marceau: Je comprends très bien. Ce que je vous demande quand vous mentionnez ça, c'est quelle est la justification du gouvernement fédéral pour dire non, garder le plafond et refuser la demande unanime des 10 provinces d'enlever le plafond? Qu'est-ce qu'on vous dit à part de dire qu'il n'en est pas question?
M. Greg Selinger: On nous explique qu'il est nécessaire d'avoir un programme abordable. Mais j'ai expliqué, dans ma présentation, qu'en proportion du produit national brut, c'est maintenant moins élevé. Donc, il est difficile pour les provinces de comprendre pourquoi il y a un plafond présentement alors qu'il y a beaucoup plus de pression sur les provinces pour les services essentiels dans le domaine de l'éducation et, surtout, dans le domaine de la santé. On doit se rappeler qu'autrefois, le gouvernement fédéral contribuait pour 50 p. 100 des programmes essentiels au Canada. Même avec les augmentations au titre du TCSPS, sa contribution actuelle est beaucoup inférieure à cela. Mais le programme de péréquation est essentiel pour une province comme le Manitoba afin de lui permettre de continuer d'offrir des services universels et essentiels à ses citoyens et, en même temps, d'avoir un régime de taxation abordable et compétitif par rapport à celui de nos cousins à l'ouest et à l'est de nous.
M. Richard Marceau: On en parlait un petit peu avant la séance du comité: le Québec reçoit environ 45 p. 100 des paiements de péréquation et subit 62 p. 100 des coûts liés à l'existence du plafond, ce qui est une disproportion assez importante. Pourriez-vous me dire quel est le pourcentage des paiements de péréquation que le Manitoba reçoit et le pourcentage des coûts du plafond que le Manitoba doit supporter?
M. Greg Selinger: On a environ 1,3 milliard de dollars en vertu de la péréquation, et avec le plafond prévu dans ce projet de loi, ça nous coûtera environ 100 millions de dollars. Ça, c'est pour nous un montant très important. Avec un montant comme ça, on peut faire beaucoup plus sur la question des impôts compétitifs et du côté des services.
M. Richard Marceau: La question est celle-ci. Le montant global de péréquation est un montant donné. De ce montant total...
M. Greg Selinger: Notre proportion se situe autour de 10 p. 100.
M. Richard Marceau: Autour de 10 p. 100 des paiements. D'accord.
M. Greg Selinger: Oui.
M. Richard Marceau: Et avec le plafond instauré par le gouvernement fédéral, malgré, je le répète, les demandes unanimes des gouvernements, quel est le coût, pour le Manitoba, associé à l'existence du plafond?
M. Greg Selinger: Comme je l'ai expliqué, c'est environ 100 millions de dollars.
M. Richard Marceau: En pourcentage?
M. Greg Selinger: Sans un plafond, notre proportion de péréquation serait d'environ 11 p. 100. Avec un plafond, notre proportion serait d'environ 9,6 p. 100.
M. Richard Marceau: D'accord, 1,4 p. 100.
M. Greg Selinger: Oui.
M. Richard Marceau: La position des provinces est unanime; on l'a dit à maintes reprises. Mais vous semblez en vouloir à cette espèce d'«unilatéralisme» que pratique le gouvernement fédéral. On décide de mettre un plafond, on va suspendre une année, mais juste une année, on garde le plafond et alors que les programmes à frais partagés étaient 50-50, vous venez de le mentionner en réponse à une de mes questions, on baisse le pourcentage de la contribution fédérale. Ne croyez-vous pas qu'une des façons de soustraire les provinces à cet «unilatéralisme» désarçonnant, parce que vous ne savez pas d'année en année combien d'argent vraiment vous allez avoir à votre disposition, serait d'insister davantage sur un transfert de points d'impôt aux différentes provinces pour, en tout cas, venir s'ajouter en complément et peut-être remplacer partiellement le programme de péréquation?
M. Greg Selinger: Le transfert de points d'impôt est le mécanisme que préféreraient quelques provinces dont, bien sûr, la province de Québec.
On n'en est pas là, en ce moment. On préfère améliorer le système qui existe avec les recommandations qu'on a faites aujourd'hui. Cependant, on étudie la possibilité d'un transfert de points d'impôt, parce que ce serait peut-être une situation plus stable à long terme. On préfère toutefois conserver un partenariat avec le gouvernement fédéral et avoir un bon programme de péréquation à l'avantage de toutes les provinces du Canada.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur le ministre Selinger.
La parole est à monsieur Cullen.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre Selinger, et je vous remercie.
Je réitère ce que j'ai dit durant la séance de ce matin. À la conférence des premiers ministres l'automne dernier, le premier ministre du Canada a déclaré, et je cite le communiqué:
-
[...] le premier ministre a convenu de prendre les mesures
nécessaires pour garantir qu'aucun plafond ne s'appliquera à
l'année financière 1999-2000. Par la suite, la formule de
péréquation établie s'appliquera, ce qui permettra au programme de
croître au même rythme que le PIB.
Je sais qu'il y a une controverse sur le sens précis qu'il faut donner à cet énoncé; d'après notre interprétation, cela veut dire que l'on ne voulait pas établir le programme sur de nouvelles bases.
Si j'examine le cas de votre propre province, monsieur, sauf erreur, les transferts fédéraux, y compris la péréquation et le TCSPS, sont de l'ordre de 2 000 $ par personne, soit environ 41 p. 100 de plus que la moyenne nationale. Le but des transferts fédéraux et de la péréquation est de rapprocher les provinces pauvres, si je peux me permettre de les appeler ainsi, des provinces dites riches, afin d'atteindre les objectifs que vous avez évoqués, c'est-à-dire une certaine comparabilité des services et des programmes. Si c'est 41 p. 100 de plus que la moyenne nationale, vous êtes forcé de conclure que, en théorie tout au moins, ils en obtiennent plus.
Maintenant, la question se pose: Est-ce suffisant? Est-ce suffisant pour atteindre l'objectif que vous avez énoncé? Vous semblez laisser entendre qu'au Manitoba, par exemple, les paiements de péréquation ne vous permettent pas de fournir des services de la même qualité que dans le reste du pays. Est-ce une analyse intuitive, ou bien fondez-vous cette opinion sur des données quelconques?
Je suis le premier à admettre qu'il est toujours difficile, dans le meilleur des cas, de mesurer les résultats dans le domaine de la santé et de l'éducation. Mais vous semblez laisser entendre que votre province n'est pas capable de fournir ces services au même niveau de qualité qu'ailleurs au Canada et je me demande si vous avez des renseignements ou des données dont vous pourriez faire part au comité à l'appui de cette thèse.
M. Greg Selinger: Le plafond imposé à la péréquation rend notre tâche encore plus difficile pour ce qui est d'offrir des services de qualité à des niveaux d'imposition comparables.
Sans entrer dans les détails, je pense que vous avez entendu parler des budgets provinciaux qui ont été présentés d'un bout à l'autre du pays ces dernières semaines et vous pouvez donc voir que les niveaux et les formes d'imposition varient grandement, de même que les augmentations des dépenses de programmes. Si vous examinez cela de plus près, vous pouvez voir que plusieurs provinces ont beaucoup de difficulté à équilibrer leurs budgets tout en maintenant le niveau des services.
Un exemple pratique: il y a d'énormes pressions dans le secteur des soins de santé, à propos des salaires, compte tenu des pénuries de professionnels de la santé. Ces pressions sont bien souvent accentuées par des ententes conclues à l'extérieur de notre province, dans des provinces qui ont une plus grande capacité fiscale; pourtant, en dépit des pénuries, il faut offrir des salaires égaux ou comparables pour retenir les services de ce personnel essentiel dans une province. Nous osons croire que nous faisons de notre mieux pour maintenir nos services et pour avoir une fiscalité raisonnable, mais le défi est d'autant plus grand et le risque d'autant plus élevé, pour ce qui est d'établir le juste équilibre, parce que la marge de manoeuvre est beaucoup plus mince.
J'ai indiqué que ce plafond pourrait nous coûter jusqu'à 100 millions de dollars. Notre budget est d'environ 6,7 milliards de dollars, de sorte que cette somme de 100 millions ne semble peut-être pas énorme, mais cela fait une grande différence quand on doit équilibrer le budget au dollar près chaque année financière.
M. Roy Cullen: Oui, et je ne conteste pas les grands défis auxquels sont confrontées toutes les provinces, de même que le gouvernement fédéral, de même que tous les Canadiens.
Vous dites que les transferts fédéraux au Manitoba, qui se situent à 40 p. 100 au-dessus de la moyenne nationale par habitant, ne sont tout simplement pas suffisants, ne vous permettent pas d'y arriver. Je vous crois et je passe à autre chose.
• 1610
À la page 37 de votre mémoire, monsieur, vous faites certaines
hypothèses au sujet de la péréquation. Le TCSPS est un facteur
assez bien connu, mais quand vous faites des projections pour la
péréquation, ne devez-vous pas poser certaines hypothèses
relativement au taux de croissance du PIB et de la population des
provinces bénéficiaires? Vous faites un certain nombre
d'hypothèses. Je me demande quelles sont ces hypothèses et si vous
êtes prêt à nous en faire part.
M. Greg Selinger: On part du principe selon lequel toutes les choses sont égales. On se base sur l'information dont on dispose à l'heure actuelle. On ne fait aucune folle supposition au sujet des changements démographiques ni aucune folle supposition au sujet de la croissance de l'économie. On travaille à partir de points de vue acceptés et du consensus au sujet de ce qui se passe au pays.
On reconnaît que la situation pourrait changer à l'avenir. Comme votre collègue à vos côtés l'admettra, la prévision économique n'est pas une science exacte et elle fait souvent erreur. Nous ne tentons pas de faire quoi que ce soit de particulièrement dramatique ici. Nous tentons tout simplement d'illustrer le fait que revenir à une base de 10 milliards de dollars pourrait, selon les prévisions raisonnables que la plupart des gens feraient dans l'économie canadienne, nous coûter autant que ce que nous avons gagné lorsque nous avons négocié les améliorations au TCSPS avec le premier ministre en septembre dernier.
Cela aurait alors pour conséquence de faire en sorte que les provinces récipiendaires ne seraient pas nécessairement dans une meilleure situation, et avec le TCSPS qui s'accumulerait progressivement pour les provinces non récipiendaires, l'écart pourrait augmenter. Ce genre d'exercice aurait donc un tel résultat non souhaitable et ce serait particulièrement ironique dans le cas de ce transfert en particulier, en creusant l'écart plutôt que de le rétrécir et en permettant qu'il diminue de façon à ce que toutes les régions puissent être concurrentielles et offrir des services de qualité à leurs citoyens.
M. Roy Cullen: Mais, monsieur Selinger, vous êtes d'accord pour dire que c'est en se fondant sur certaines hypothèses. Je suis certain que vos hypothèses sont raisonnables, mais à savoir si le plafond sera déclenché au cours des trois années qui restent, cela dépendra énormément si l'Ontario peut maintenir sa forte croissance par rapport aux autres provinces.
Si la croissance est maintenue, n'est-il pas concevable que la péréquation puisse ne pas correspondre au scénario que vous avez prévu ici dans votre tableau à la page 36?
M. Greg Selinger: Oui, il est très possible que la situation change. Je suis tout à fait prêt à l'admettre. Il est souvent arrivé que les prévisions économiques ne se concrétisent pas.
Si je devais fonder mes hypothèses sur ce qu'a dit le ministre fédéral des Finances, l'économie se portera très bien et ira de l'avant. Ce sont les projections de la plupart des grandes banques. Elles pensent qu'il y aura une reprise au cours de la deuxième moitié de l'année. Nous espérons certainement que ce sera le cas.
Je voudrais cependant revenir au point très fondamental, l'objectif du programme de péréquation. Il s'agit d'un transfert horizontal, ce qui est un terme abstrait pour dire que l'on doit donner aux provinces la capacité d'offrir des services comparables à des taux d'imposition comparables. La péréquation donne aux provinces la capacité de travailler avec le gouvernement fédéral à des projets spéciaux qui sont importants sur le plan du développement économique des régions.
Ce matin, le ministre des Finances du Nouveau-Brunswick a dit très clairement qu'il y avait deux éléments à la disposition constitutionnelle en matière de péréquation—un élément de développement économique régional, et l'élément des services et de l'imposition dont nous parlons ici aujourd'hui. Les deux éléments sont essentiels.
Par exemple, lorsque nous voulons nous engager dans une relation avec le gouvernement fédéral pour un projet, disons pour les peuples des Premières nations, ou un canal de dérivation, ou un projet urbain—toutes les questions dont nous parlons avec le gouvernement fédéral—nous avons besoin des ressources pour le faire et nous avons besoin d'avoir ces ressources sans qu'elles soient accompagnées d'un taux d'imposition élevé, ce qui nous rendrait moins concurrentiels par rapport à nos voisins à l'Ouest et à l'Est.
Par le passé, le programme de péréquation s'est avéré un programme de transfert très sérieux et très axé sur l'avenir qui permet à la fédération canadienne de réduire les disparités au pays et qui permet à toutes les régions de se développer avec succès.
Le président: Merci, monsieur Cullen.
Monsieur McCallum.
M. John McCallum (Markham, Lib.): Merci, monsieur le président.
Tout d'abord, en réponse à l'observation au sujet des prévisions économiques, un des principaux avantages de passer de mon ancien emploi à mon emploi actuel, c'est que je ne suis plus obligé de prétendre que je sais quelle sera la situation dans un an.
Je voudrais tout d'abord vous dire que je suis tout à fait d'accord avec votre justification du programme de péréquation, mais je suis tout à fait en désaccord avec l'idée de donner un allégement fiscal aux riches. Comme vous l'avez dit, l'objectif est d'offrir des services comparables avec un effort fiscal comparable. Sinon, les riches et les pauvres devraient payer davantage d'impôts dans les provinces plus pauvres. Je pense que c'est un programme merveilleux.
• 1615
Cela étant dit, j'aimerais vous poser une question au sujet du
plafond, car il me semble qu'il y a une certaine symétrie entre le
plafond et le plancher. L'objectif du plafond est d'empêcher des
augmentations illimitées ou indûment importantes des dépenses du
gouvernement fédéral au cours d'une année donnée. L'objectif du
plancher est d'empêcher des diminutions indûment importantes pour
une province au cours d'une année donnée. Il y a une certaine
symétrie. Proposez-vous que nous éliminions le plancher ainsi que
le plafond?
M. Greg Selinger: Je vais vous dire de quelle façon la Cour suprême interprète la Charte des droits et la Constitution. Je dirais que cette symétrie est strictement théorique. Le but du programme est de réduire la disparité. En éliminant le plancher, cela ferait augmenter la disparité. Ce serait donc contraire à l'esprit du programme.
Je crois que lorsqu'on interprète le but d'une mesure législative, il faut aller au-delà des symétries superficielles entre les plafonds et les planchers et se demander quels en sont l'esprit et l'objectif. Un plancher est tout à fait logique si on veut réduire la disparité et permettre aux provinces de demeurer concurrentielles, un plafond ne l'est pas. Il n'y a donc aucune symétrie entre ces deux concepts lorsqu'on regarde l'objectif du programme.
M. John McCallum: Y a-t-il une symétrie, cependant, en ce sens que chaque palier de gouvernement veut avoir un certain contrôle de son budget et de ses dépenses futures, étant donné les incertitudes économiques? Le plafond réduit l'incertitude pour le gouvernement fédéral tandis que le plancher réduit l'incertitude pour les gouvernements provinciaux bénéficiaires.
M. Greg Selinger: Ce que vous dites est important. Chaque palier de gouvernement—je pense qu'il s'agit là d'un point de vue légitime—veut pouvoir contrôler ses coûts. Il y a un certain nombre de générateurs de coûts pour tous les budgets, ce qui est un véritable cauchemar pour les ministres des finances lorsqu'ils ont un budget équilibré à respecter. Car on suppose qu'avec un budget équilibré, on peut contrôler toutes ses dépenses et toutes ses recettes. Cela est tout à fait faux pour tous les paliers de gouvernement au pays.
Je prends bonne note de ce que vous dites ici. Les gouvernements cherchent de toute évidence à gérer leurs coûts et leurs recettes, là où ils le peuvent. Je pense que cela est légitime. C'est pourquoi nous proposons une nouvelle base pour le plafond comme un compromis raisonnable calculé à partir du montant réel atteint au cours de l'année où le plafond a été levé. Cela constituerait tout au moins un pas en avant de la part du gouvernement fédéral qui ne s'exposerait pas complètement.
Il faut aussi comprendre cependant que cela ne va croître que si l'économie croît. Il y a un lien entre les deux. Il n'y aura donc pas de croissance. Le gouvernement fédéral ne s'exposera donc pas à moins que l'économie lui donne les recettes supplémentaires pour le faire. Donc je ne pense pas que cela pose un problème particulier ici.
Mon collègue, qui a travaillé dans ce domaine—et, comme vous le savez peut-être déjà étant donné ce que vous faisiez auparavant, il travaille dans ce domaine depuis de nombreuses années—me dit qu'il y a une nouvelle base pour le plancher chaque année. Ce plancher n'est pas gelé pendant cinq ans, comme vous le laissez entendre en ce qui concerne le plafond. Même cela serait une amélioration par rapport à ce qui est proposé dans ce projet de loi. Je vous demanderais donc d'envisager ce changement également, monsieur.
M. John McCallum: Merci.
Et c'est en partie en réponse à mon collègue du Bloc au sujet des énormes surplus fédéraux. Je ne pense pas que nous devrions nous excuser d'avoir eu d'importants surplus au cours des deux ou trois dernières années, et peut-être également cette année, qui ont été utilisés pour payer l'énorme dette fédérale. Le problème, cependant, c'est que si nous allons jusqu'à 800 millions de dollars en dépenses, nous nous engageons à 800 millions de dollars et plus cette année, l'an prochain et pour plusieurs années à venir. Si vous regardez la situation budgétaire du gouvernement fédéral, d'ici l'an 2004-2005, qui est l'année où les réductions d'impôt vont finalement entrer en vigueur, la situation est assez serrée et les surplus ne peuvent être considérés comme énormes.
Je vous dirais donc que l'on peut comprendre pourquoi le gouvernement fédéral ne veut pas se menotter en versant à jamais 800 millions de dollars, plus les dépenses supplémentaires annuelles, étant donné que si l'on regarde l'avenir, la situation budgétaire du gouvernement fédéral pourrait devenir beaucoup moins rose qu'elle ne l'est maintenant.
M. Greg Selinger: Je comprends. Vous avez une vision très pratique des nécessités qu'impose la gestion d'un budget. Je vous ferai une réponse très semblable à celle que j'ai donnée à la question précédente. Il faudra s'adapter à la croissance du PIB. On peut aussi rajuster le plancher chaque année. Sauf tout le respect que je vous dois, on ne sera pas coincé ainsi avec un moment minimal où les coûts dépassent les recettes pendant un creux économique. On peut réajuster le plancher chaque année. S'il y avait symétrie ici, on vous demanderait à tout le moins de rajuster le plafond annuellement. Vous bloquez le plafond pendant cinq ans, mais vous rajustez le plancher chaque année.
• 1620
Si la symétrie est chose importante et nous voulons une
symétrie fondée sur l'objet qui soit compatible avec l'esprit du
programme, cette mesure législative serait sans effet. Il faut à
tout le moins rajuster le plancher chaque année. Nous avons la
conviction que si l'économie et les baisses d'impôt que vous avez
proposées dans votre mini-budget avaient pour effet de limiter vos
ressources, ce programme comporte des mécanismes d'ajustement pour
en tenir compte.
Les provinces sont disposées à faire leur part. Mais lorsque la conjoncture est bonne, lorsqu'on dispose des ressources voulues, nous en avons besoin nous aussi, particulièrement sachant la situation difficile où se trouvent l'éducation postsecondaire et la santé. Ce sont là des responsabilités provinciales en vertu de la constitution, mais les programmes sont basés sur des transferts fédéraux selon une formule 50-50, et nous nous retrouvons maintenant avec un manque à gagner—nous voulons maintenir ces programmes, mais nous avons besoin des ressources voulues pour ce faire.
M. John McCallum: Chose certaine, j'admets que vous avez de bons arguments. Merci.
Le président: Merci, monsieur McCallum.
Monsieur Brison.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président. Merci, monsieur le ministre, d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui.
En 1982, lorsque le plafond a été imposé pour la première fois, on pouvait dire sans risque de se tromper, je crois, que les taux d'imposition étaient à près partout les mêmes au pays. Il n'y avait pas de grandes différences dans les taux d'imposition. La situation a beaucoup changé depuis. C'est une des différences par rapport aux conditions qui existaient en 1982. L'autre chose qui a changé, bien sûr, c'est le fait que le gouvernement fédéral dispose maintenant d'un excédent budgétaire qui lui donne plus de souplesse.
Côté fiscal, étant donné que la péréquation est un programme enchâssé dans la constitution, dont le mandat est d'assurer partout au pays des services de qualité à peu près comparables ainsi que des taux d'imposition équivalents, le bon sens ne commande-t-il pas que nous donnions aux provinces les outils qu'il leur faut pour atteindre cet objectif à court terme? On ne peut pas dire qu'on a maintenant partout au pays des taux d'imposition égaux ainsi que des services de qualité égale. Ce n'est tout simplement pas le cas, nous sommes même loin du compte. Nous savons aujourd'hui combien il est important d'avoir des taux d'imposition qui stimulent la croissance économique. Tant que nous n'aurons pas des taux d'imposition relativement égaux ainsi que des services de qualité égale partout au pays, ne devrions-nous pas faire sauter ce plafond et donner aux provinces la souplesse dont elles ont besoin pour faire du mandat de péréquation une réalité?
M. Greg Selinger: C'est ce que nous pensons, à savoir que le gouvernement fédéral ne devrait pas imposer de plafond économique ou fiscal à ce carrefour de notre histoire financière. Nous pensons qu'il faut permettre à toutes les provinces d'être plus concurrentielles. Nous pensons qu'il serait dans l'intérêt de la confédération que cela se fasse. Nous pensons que cela réduirait en fait la nécessité de ce genre de transfert, si les provinces diversifiaient et consolidaient leurs économies.
M. Scott Brison: Seriez-vous d'accord pour que l'on supprime ce plafond pendant, disons, cinq ans, après quoi on réétudierait la question à partir de cette perspective? Le système actuel ne permet pas vraiment à une province d'investir dans l'infrastructure sociale qu'il lui faut pour réussir dans le monde moderne. Je songe surtout à l'éducation et à la santé, mais aussi à la nécessité de créer l'environnement fiscal qu'il faut pour être concurrentiel. Cela vous donnerait-il plus de souplesse, même si on se limitait à cinq ans?
M. Greg Selinger: Absolument. Une suppression de cinq ans nous donnerait plus de certitude. Toutes les provinces seraient mieux en mesure de faire leurs calculs pour les années à venir. Toutes les provinces pourraient ainsi développer et diversifier leurs économies, leur fiscalité et investir dans l'éducation et la formation, dans les secteurs à niveau élevé de compétences. Cela représenterait une amélioration certaine, et nous serions heureux qu'on en fasse la suggestion ou une recommandation.
M. Scott Brison: Êtes-vous d'accord pour dire que le système actuel de péréquation constitue en fait un obstacle aux provinces qui veulent diversifier leur économie, qui veulent mettre en place une stratégie à valeur ajoutée relativement aux ressources, ou même diversifier du côté du savoir?
• 1625
Particulièrement dans la perspective de la valeur ajoutée, la
péréquation est un obstacle pour les provinces lorsqu'il s'agit de
faire ce que nous les encourageons à faire, à savoir bâtir leur
base économique.
M. Greg Selinger: Permettez-moi de vous donner un exemple. Nous avons perdu le tarif du Nid-de-Corbeau dans l'ouest du Canada. Les agriculteurs vivent des moments extrêmement difficiles à l'heure actuelle, les prix des céréales et des oléagineux étant très bas sur le marché mondial. Pour survivre, les agriculteurs doivent se diversifier. Pour qu'ils puissent se diversifier, il faut les aider à modifier leurs pratiques et leurs activités agricoles. Il faut aussi investir dans l'infrastructure agricole si on veut qu'ils réussissent, par exemple, dans les routes. Les terminaux céréaliers et les marchés sont plus loin aujourd'hui. On trouverait dans la péréquation les ressources qu'il faut pour aider l'économie agricole à se diversifier en ce moment très critique de son histoire au pays.
M. Scott Brison: C'est l'un des rares moments où l'on voit les dix provinces s'entendre sur un transfert, en ce cas-ci, de certaines provinces vers d'autres. C'est assez rare. Sentez-vous qu'il y a réticence de la part du gouvernement fédéral... J'irais même plus loin. Vous avez là dix provinces qui s'entendent sur quelque chose, dont les provinces nanties. Le gouvernement fédéral est également d'accord pour investir dans les programmes de développement économique qui sont des programmes de développement économique fédéraux, qu'il s'agisse de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique ou de la Diversification de l'économie de l'Ouest. N'est-ce pas un autre exemple où l'on voit le gouvernement fédéral essayer de contrôler le plus possible la situation? Est-ce là un des motifs de son action? Pourquoi, à votre avis, le gouvernement fédéral est-il aussi réticent à vous donner plus de souplesse en ce moment très critique?
M. Greg Selinger: Je m'abstiens habituellement de parler au nom des autres ou de chercher à comprendre les motivations des autres politiciens. Normalement, je me contente d'avancer les arguments les plus clairs qui soient. Mais je dirais ceci: Le gouvernement fédéral—et cette situation existait peut-être même avant l'actuel gouvernement—est soucieux de voir ses contributions reconnues au niveau provincial.
Pendant longtemps, les provinces avaient le don d'accepter les paiements de transfert, puis ensuite blâmer le gouvernement fédéral pour en obtenir davantage. Il est difficile pour tout gouvernement de donner de l'argent et de se faire taper sur les doigts en guise de remerciement. Je crois que tous les paliers de gouvernement doivent avoir la courtoisie de reconnaître les contributions de chaque palier au développement d'une province ou d'une région. Je crois donc que ce facteur a contribué à aggraver les choses historiquement.
Ce jeu varie d'une région à l'autre. Par exemple, j'ai entendu des provinces non bénéficiaires se dire surprises de voir que le gouvernement fédéral contribue, disons, à l'édification du réseau routier ou à des infrastructures, par exemple, dans certaines provinces maritimes, dans les provinces de l'Atlantique. Mais quand on examine la situation, on se rend compte que le gouvernement fédéral a fait des investissements stratégiques dans toutes les provinces de notre pays, qu'il s'agisse de l'industrie de haute technologie, des sables bitumineux, d'un canal de crue ou d'un port dans le nord du Manitoba, à Churchill par exemple. Le gouvernement fédéral fait ces investissements stratégiques dans toutes les provinces, et bien sûr il veut que l'on reconnaisse les contributions qu'il apporte.
La péréquation n'est pas liée à un projet en particulier, il est donc un peu difficile d'y acquérir de la visibilité. Il faudra peut-être étudier cette question lors du renouvellement de ce programme. Mais je peux vous dire que sans ce transfert, il est plus difficile de créer des partenariats avec le gouvernement fédéral pour ces projets spéciaux étant donné que vos ressources sont plus limitées. Lorsque le gouvernement fédéral nous dit qu'il veut faire quelque chose pour les agriculteurs à la fin de l'exercice financier et qu'il investira 60 p. 100 si nous investissons 40 p. 100, il nous est très difficile de trouver ces 40 p. 100 si notre excédent budgétaire est de 10 millions de dollars et que l'excédent budgétaire fédéral est de plus de 10 milliards de dollars. Notre marge de manoeuvre est beaucoup plus limitée. Cependant, nous voulons nous aussi faire quelque chose. La péréquation nous permet de faire quelque chose.
M. Scott Brison: Votre province a-t-elle du mal à trouver les fonds de contrepartie pour la Fondation canadienne pour l'innovation, par exemple?
M. Greg Selinger: Il nous est très difficile de financer la fondation pour l'innovation parce qu'il nous faut trouver 40 p. 100. Les décisions sont souvent prises au niveau fédéral, et il nous faut alors trouver les 40 p. 100 manquants. Nous voulons participer, nous voulons encourager l'innovation dans notre province, et nous nous donnons beaucoup de mal pour créer au Manitoba un climat propice à la R-D, et cela fait partie de la difficulté. Mais ce qui nous irrite, c'est qu'on nous oblige à faire un chèque une fois que les décisions sont prises, sans que nous ayons notre mot à dire au sujet des projets, essentiellement, et des montants qu'on y verse.
Le président: Merci, monsieur Brison.
Nous allons passer à M. Blaikie, ensuite à Mme Guarnieri.
M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Merci, monsieur le président.
J'ai remarqué que la conversation a porté pendant un moment sur toute la question de la visibilité fédérale dans les paiements de transfert aux provinces. Cela m'a rappelé qu'il y a vingt ans de cela, ce mois-ci, je faisais partie d'un groupe de travail parlementaire spécial sur les accords fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, qui était à l'époque présidé par Herb Breau. On disait alors qu'il y avait un problème parce que le gouvernement fédéral avait le sentiment qu'on ne lui donnait pas assez de visibilité par rapport aux montants qu'il dépensait.
La péréquation ne posait pas de problèmes à cet égard. Il s'agissait davantage du financement des programmes établis et de l'argent que le gouvernement fédéral investissait dans la santé et l'éducation postsecondaire. Mais dans la querelle entre les provinces et le gouvernement fédéral, les bons et les méchants changent souvent de place. À l'époque, je dirais que c'était surtout le gouvernement fédéral qui avait un grief légitime contre les provinces qui ne dépensaient pas les crédits fédéraux dans les domaines pour lesquels ils étaient réservés.
Les années ont passé, et j'ai maintenant le sentiment que c'est le gouvernement fédéral qui est devenu le méchant dans la querelle fédérale-provinciale, surtout parce que s'il se décharge de ses responsabilités, abdique ses responsabilités, et impose des plafonds là où il ne devrait pas y en avoir. La péréquation est après tout un principe constitutionnel. On aurait pu inscrire une clause nonobstant dans la Constitution qui aurait un lien avec la Charte, mais pour ce qui est du principe de péréquation, nous n'avons pas enchâssé de clause nonobstant qui s'applique capricieusement, car c'est ce que le plafond de la péréquation est devenu. C'est un principe constitutionnel, et il me semble qu'il faut y adhérer. Mais ce n'est là qu'un commentaire.
J'aimerais que le ministre des Finances du Manitoba nous donne plus de détails sur une autre question.
Je sais que vous en avez parlé à quelques reprises, mais pouvez-vous nous expliquer la logique perverse de cette évolution? Ce sont en fait les provinces les plus pauvres, celles qu'on appelle les provinces défavorisées, les provinces bénéficiaires—qui est le mot neutre qu'on emploie pour décrire les provinces qui profitent de la péréquation—qui, quand on voit ce qui s'est passé avec l'accord sur la santé, le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux et la péréquation, qui en fait se retrouvent défavorisées, que le gouvernement fédéral l'ait voulu ou non. Je ne crois pas que tout le monde comprenne très bien pourquoi il en est ainsi.
M. Greg Selinger: Je ne disserte pas que c'était là le résultat escompté ou planifié. Des négociations ont eu lieu entre les premiers ministres des provinces et le premier ministre du Canada lors d'une réunion à Winnipeg, et on a recommandé de hausser le maximum de la péréquation pour un an dans le cadre des mesures visant à améliorer le TCSPS. Il ne faut toutefois pas oublier que le TCSPS était auparavant un transfert de péréquation et qu'il est devenu un transfert proportionnel au nombre d'habitants. On a réduit l'égalité du transfert selon les besoins des provinces en ce qui a trait aux ressources précises en santé, dans l'enseignement postsecondaire et dans les services sociaux, que l'on oublie souvent. Le TCSPS comprend également ce qui était auparavant le Régime d'assistance publique du Canada, ainsi que les deux programmes qui étaient financés sous le régime du financement des programmes établis, le FPE, dans les domaines de la santé et de l'enseignement postsecondaire.
En passant à un transfert proportionnel au nombre d'habitants, qui est à l'avantage des provinces qui ne reçoivent pas de paiements de péréquation, nous croyons, au Manitoba, que le rehaussement du maximum en a été, en fait, la contrepartie. Ce rehaussement devait accroître l'équité si l'on conjugue l'ensemble des programmes de transfert du gouvernement fédéral. D'une part, il y avait une égalité moindre du fait du passage à un transfert proportionnel au nombre d'habitants sans égard au besoin ou à la capacité financière. D'autre part, le rehaussement du maximum rétablissait en partie la fonction initiale du transfert, le but précis de la péréquation. Le maximum que l'on impose aux paiements de péréquation est un obstacle artificiel à son efficacité. On croyait qu'en rehaussant ce maximum on rendrait le régime plus équitable pendant que l'on établissait un consensus sur ce que le gouvernement fédéral et les provinces pourraient faire de concert dans les domaines de la santé et de l'éducation. On parle maintenant de réduire ce maximum à 10 milliards de dollars et on contredit clairement ce que le premier ministre avait écrit dans sa lettre, ce qui va à l'encontre de l'esprit de cette réunion, à notre avis.
Le président: Merci, monsieur Blaikie.
Madame Guarnieri.
Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, permettez-moi de poser une question dans la même veine que celle de mon collègue M. McCallum. Dans votre mémoire, vous signalez que le maximum des paiements de transfert a provoqué un déficit de 100 millions de dollars. Le fédéral dira sans doute que s'il n'y a pas de plafond, rien ne vous protège contre la pluie. Je suis sûre que vous avez observé les efforts qui ont été faits par le passé pour limiter les paiements de transfert sans maximum, comme c'était le cas dans le Régime d'assistance publique du Canada. Un peu plus tôt, en réponse à la question de M. McCallum, vous avez reconnu l'importance pour tout ministre des Finances crédible de ne pas s'exposer à des facteurs d'augmentation imprévisibles. Je vais donc vous poser une question que j'ai déjà posée à vos collègues un peu plus tôt aujourd'hui.
Lorsque les gouvernements sont obligés de revoir leurs plans de réduction des dépenses et des impôts, cela a des effets énormes sur la confiance des consommateurs. Dans quelle mesure vous inquiétez-vous de ce que les changements que vous avez apportés à votre budget en raison, peut-être, d'un ralentissement de l'économie conjugué au maximum des paiements de péréquation pourraient ébranler la confiance des consommateurs et réduire les dépenses et les investissements dans votre province? Ce risque est-il quantifiable?
M. Greg Selinger: Je suis persuadé que la réduction du maximum des paiements de péréquation à 10 milliards de dollars réduit notre souplesse financière et augmente le danger que nous ne soyons pas capables d'atteindre nos objectifs en matière de dépenses et d'impôts dans le cadre d'un budget équilibré. Il faut savoir que le Manitoba a probablement la loi la plus rigoureuse au pays en matière de budgets équilibrés. L'équilibre ne doit pas s'établir chez nous sur une période de trois ou quatre ans, nous devons équilibrer notre budget chaque année, au dollar près. Parallèlement, nous nous sommes engagés à réduire notre endettement. Cette mesure réduit notre capacité d'atteindre ces objectifs et pourrait donc avoir un effet négatif. Nous souhaiterions que ce ne soit pas le cas. Les gouvernements ne se préparent évidemment pas au pire. Nous concevons les dépenses de notre budget en fonction d'un accroissement de l'économie du Manitoba, d'une augmentation du produit provincial brut, et les paiements de péréquation font partie de cette formule.
Mme Albina Guarnieri: Il faut voir également le danger parallèle que cela pose au niveau de la confiance des consommateurs, si le gouvernement fédéral ratait son objectif et devait effectuer des compressions, ne trouvez-vous pas qu'il est très important que les prévisions du gouvernement fédéral soient inébranlables pour ce qui est de l'argent, des taux d'intérêt et de la confiance des marchés? Ne pourrait-on pas dire que les intérêts des Manitobains seraient bien servis sans qu'il y ait d'effet négatif sur le maximum, que la stabilité fédérale serait plus importante pour les Manitobains?
M. Greg Selinger: Oui, il est important pour le Manitoba que l'économie fédérale soit forte et que le climat soit positif à l'échelle nationale. Nous sommes tous dans le même bateau, bien sûr. Cela dit, si les provinces ont des difficultés, cela mine également la confiance à l'échelle nationale. Il faut donc trouver un juste milieu. Nous trouvons que c'est un compromis très raisonnable, comme vous avez pu le constater dans nos amendements, qui ont été proposés par le ministre des Finances de l'Île-du- Prince-Édouard. Rétablir ce maximum pour l'année au cours de laquelle il a été supprimé permettrait au gouvernement fédéral de faire ses prévisions.
Comme je l'ai déjà dit à votre collègue, si le PIB connaît un ralentissement, cela a automatiquement des effets sur la formule et celle-ci est revue—le seuil est revu chaque année. Vous ne vous retrouveriez donc pas avec des dépenses énormes que vous devriez payer avec des revenus moindres. Ce programme s'adapterait à la capacité financière du gouvernement fédéral. Ce que nous disons, c'est que le rajustement annuel vous cause les inconvénients des avantages qu'il nous rapporte.
Je ne suis pas nécessairement un partisan de la symétrie. Dans un pays aussi hétérogène que le Canada, il y a de bons arguments en faveur de l'asymétrie. Mais pour répondre à votre collègue, on pourrait faire valoir qu'au moins pour ce qui est du seuil et du plafond, il devrait y avoir une certaine symétrie, prévoir des rajustements annuels plutôt qu'un maximum fixe à 10 milliards de dollars pour des périodes de cinq ans. C'est, il me semble, une proposition raisonnable qui ne présenterait pas de danger pour votre gouvernement, c'est-à-dire notre gouvernement national.
Mme Albina Guarnieri: Merci de votre franchise. Nous pouvons être assurés que vous défendrez agressivement les intérêts financiers des Manitobains.
Le président: Merci, madame Guarnieri.
La dernière question est à vous, monsieur Epp.
M. Ken Epp: Merci.
J'ai retenu quelque chose que vous avez dit tout à l'heure. Vous avez dit que le TCSPS, qui a maintenant beaucoup changé, est maintenant proportionnel au nombre d'habitants. Ne croyez-vous pas que le coût des soins de santé dépend en grande partie du nombre des habitants? Il y a sans doute une composante fixe, surtout pour les provinces moins peuplées. Les coûts sont les mêmes pour construire un hôpital et le doter en personnel, que l'on offre les services à 100 ou 300 personnes, mais pour les choses à plus grande échelle, les coûts dépendent du nombre d'habitants. Les provinces plus peuplées doivent donc payer des sommes plus importantes au titre des soins de santé, de l'enseignement et des autres choses de ce genre.
M. Greg Selinger: En fait, je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Epp.
M. Ken Epp: Mais c'est ce que vous avez dit.
M. Greg Selinger: Ce qui décide des coûts dans les soins de santé, ce n'est pas seulement le nombre de personnes. Il y a un facteur démographique. Le ministre des Finances de Terre-Neuve a déclaré ce matin que certaines provinces ont une proportion plus élevée de personnes âgées que d'autres. Dans d'autres provinces, la population est répartie sur un territoire plus étendu.
Par exemple, il y a 45 000 citoyens dans le nord du Manitoba. Bon nombre d'entre eux se trouvent dans des collectivités des Premières nations. Même si ces collectivités relèvent du gouvernement fédéral, nous payons le coût de transport des patients vers les établissements qui peuvent leur offrir des soins. Nous avons sans doute fait cette année des choses que nous n'aurions probablement pas dû faire si nous appliquions les règles de façon stricte sans empiéter sur les fonctions fédérales. Nous installons des unités de dialyse dans les collectivités des Premières nations pour répondre aux besoins de ces populations et éviter d'avoir à transporter les patients par avion vers des installations plus dispendieuses. Nous essayons de fournir de bons traitements et une aide efficace dans ces collectivités.
Les facteurs de demande des services de santé, donc des budgets de santé, sont différents d'une province à l'autre: il y a la population, le niveau de pauvreté, la dispersion géographique de la population, les lieux où sont concentrés les spécialistes médicaux. Par exemple, au Manitoba la majorité de nos spécialistes résident à Winnipeg. En fait, 65 p. 100 de la population réside à Winnipeg et il est donc difficile d'attirer des spécialistes dans les petites communautés. Nous cherchons des solutions comme par exemple la télémédecine, le recours à la vidéo, aux nouvelles technologies pour que ces traitements et ces spécialistes soient accessibles.
La pression des coûts est donc différente. Selon le ministre des Finances du Nouveau-Brunswick, financer les services de santé de Calgary, dont la population est à peu près égale à celle du Nouveau-Brunswick, revient moins cher que financer ceux du Nouveau-Brunswick puisque la population y est beaucoup plus dispersée et en raison du problème d'accès aux professionnels et aux spécialistes nécessaires. Il est également plus difficile d'attirer des professionnels dans ces communautés moins peuplées et de les y retenir. La pression des coûts est vraiment différente et elle est due à des facteurs multiples et non pas uniquement démographiques.
M. Ken Epp: D'accord. Cela m'amène à une question très intéressante. S'il y a bel et bien une telle disparité au niveau des coûts réels de prestation, notre système actuel de péréquation ne peut y répondre. Notre système actuel, plutôt que de penser en termes de coûts réels, de coûts estimés ou de coûts projetés, pense en termes d'augmentation de recettes dans l'hypothèse où vous auriez un système fiscal analogue à celui des autres provinces.
M. Greg Selinger: Très intéressant. Vous envisageriez de faire reposer la péréquation sur les besoins plutôt que sur la capacité fiscale, ce qui dans un monde parfait pourrait être la solution. Mon collègue, qui étudie ce dossier depuis une vingtaine d'années, me dit qu'il est très difficile de quantifier cette dépense d'une manière qui ait l'agrément de tous. Ce pourrait être un thème de réflexion pour les fonctionnaires provinciaux et fédéraux.
Aujourd'hui, ce qui nous intéresse c'est simplement une hausse du plafond qui profite à tout le monde. Nous pourrons continuer à travailler sur ces questions plus difficiles dans un esprit de coopération. Mais ce n'est pas une raison pour bloquer les améliorations qui sont suggérées aujourd'hui.
M. Ken Epp: Je suis d'accord avec vous. En passant, si votre collègue travaille sur ce dossier depuis une vingtaine d'années, il a dû commencer quand il avait dix ans.
Ma dernière question concerne les choix. Dans chaque province il y a un trésorier ou un ministre des Finances responsable de calculer les recettes potentielles et de déterminer comment dépenser cet argent au nom des citoyens de sa province ou de son territoire.
• 1645
La tâche des financiers provinciaux et territoriaux sera-t-elle
facilitée si en lieu et place de ce système de péréquation
avec ces seuils maximum et minimun, avec ces projections, etc, qui
dans une certaine mesure sont imprévisibles, on pouvait faire ces
calculs sur la base d'une autre formule plus prévisible et moins
changeante?
Voilà un exemple. Sauf erreur, le Manitoba a perdu 50 millions de dollars de péréquation l'année d'introduction des loteries parce que le potentiel de gains tirés de loteries au Manitoba était considéré comme très important. Or, d'après ce que je sais des Manitobains—du moins ceux de ma famille qui vivent au Manitoba—ils n'achètent pas de billets de loterie, juste par principe. Je crois qu'il y a littéralement des milliers de Manitobains qui n'achètent pas de billets de loterie. Le Manitoba a donc perdu 50 millions de dollars que devait lui donner le gouvernement fédéral selon cette formule à cause de l'inclusion des billets de loterie et pourtant il n'en tire pas de ses citoyens les recettes attendues parce que ces derniers n'achètent pas de billets. Le calcul était purement potentiel. Il me semble que ce calcul devrait être fondé sur la réalité et non pas sur une hypothèse.
M. Greg Selinger: Noté. Mon collègue aimerait vous dire quelques mots sur les billets de loterie car c'est un peu plus compliqué que ce que vous avez laissé entendre. Mais nous prenons note du fait que le système de péréquation devrait prendre en compte les besoins réels des citoyens des régions bénéficiaires de ce transfert social.
J'aimerais simplement conclure en disant que la péréquation est une espèce de police d'assurance pour les citoyens canadiens. Certaines provinces connaissent aujourd'hui la prospérité. L'histoire nous montre que certaines de ces mêmes provinces ont aussi connu des périodes difficiles au cours de leur vie. Cette police d'assurance donne à toutes les provinces une chance de prospérer, quelles que soient les circonstances, et notre histoire nous montre que c'est bel et bien ce qui est arrivé.
M. Ken Epp: Oui, je suis d'accord avec votre évaluation.
Monsieur le président, j'ai fini.
Le président: Il semble que vous ne serez pas le dernier. M. Brison va avoir droit à encore cinq minutes.
M. Scott Brison: Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, à propos de cette notion de mobilité dans la péréquation et des bons résultats de certaines provinces sur ce plan, le chef de mon parti, M. Clark, qui a représenté ma circonscription l'été dernier pendant un certain temps, a déclaré pendant la campagne d'élection partielle que les Albertains devaient ne pas oublier qu'avant qu'ils aient l'intelligence et la sagesse d'exploiter et de conserver leur pétrole, l'Alberta était une province défavorisée. C'est l'exemple concret de cette évolution dont vous avez parlé.
Pour ce qui est de l'argument avancé par certains députés d'en face qui prétendent que c'est une question de prévisibilité des dépenses du gouvernement fédéral, qu'il est nécessaire de pouvoir prédire exactement ou presque exactement quelles seront ces dépenses et que ce plafonnement facilite cet exercice, il me semble quelque peu spécieux car il y a très peu de postes budgétaires qui soient complètement et totalement prévisibles en termes absolus. En fait, le vérificateur général a critiqué les dépenses erratiques et les dépassements de projections dans certains cas de ce gouvernement. Quoi qu'il en soit, vouloir être en mesure de prédire absolument ou de contrôler absolument les dépenses dans une économie fluide me semble relativement spécieux.
C'était un simple commentaire. J'aimerais savoir ce que vous en pensez puisque vous avez la responsabilité de gérer un budget au niveau provincial.
M. Greg Selinger: Il est indubitable—et je l'ai déjà dit plus tôt—que le gouvernement ne contrôle ni toutes les recettes ni toutes les dépenses. Le ministre des Finances encore moins. Le gouvernement peut gérer certains postes, mais il ne peut complètement les contrôler.
J'ai dit que de la manière dont ce programme est conçu, le montant transféré augmente ou diminue en fonction de la croissance du PIB. Il comporte donc, pour le gouvernement fédéral, un système de protection automatique susceptible de rendre nulle et non avenue la notion de plafond. Le plafond limite artificiellement la valeur de ce transfert à un niveau inférieur à la croissance du PIB qui se traduit par un profit pour le gouvernement fédéral au détriment des provinces. Elles courent donc un plus grand risque, même pendant des périodes de bonnes conjonctures, du fait de la manière dont ce plafond est appliqué, et pendant les périodes où d'énormes pressions sont exercées sur des programmes fondamentaux comme la santé et l'éducation.
• 1650
Il me semble injuste qu'un palier de gouvernement soit le
bénéficiaire d'un plafonnement artificiel alors que d'autres
paliers de gouvernement doivent se débrouiller pour assumer des
responsabilités qui auparavant étaient financées à 50-50 par le
gouvernement fédéral.
M. Scott Brison: Merci.
Le président: Monsieur le ministre, j'ai une dernière question à vous poser, et ce sera peut-être pour vous l'occasion de répondre à ceux qui prétendent que la péréquation a augmenté de 33 p. 100 depuis 1993-94 avec des versements ayant atteint près de 10,8 milliards de dollars. Je parle ici du niveau national, le plus haut niveau. Par contraste, d'autres programmes de dépenses fédéraux, excluant les transferts aux provinces, n'ont augmenté que de 2,6 p. 100.
Que dit-on à ceux qui peuvent penser qu'une hausse de 33 p. 100 est importante?
M. Greg Selinger: Je répondrai qu'en effet c'est important. Je crois que nous avons la preuve que ça n'a pas été difficile pour le gouvernement fédéral étant donné les excédents qu'il a pu afficher. Ce que vous me dites montre donc exactement ce que nous disons nous-mêmes. Cela n'a pas ruiné le gouvernement fédéral, mais c'est un programme important qui a permis aux provinces de prospérer et d'assurer des services... Par exemple, au Manitoba, nous finançons 85 p. 100 des services de santé. Autrefois, nous n'en financions que 50 p. 100.
Nous assumons donc plus de responsabilités suite à certaines réductions dans les dépenses de programmes dans d'autres secteurs du gouvernement fédéral. Ce transfert est une aide aux provinces qui ont dû assumer cette responsabilité additionnelle et cela n'a pas empêché le gouvernement fédéral d'accumuler d'importants excédents budgétaires et d'offrir aux Canadiens des réductions d'impôt.
Ce que vous dites est donc très important parce que cela montre très bien en quoi c'est un bon programme, en quoi cela a assuré aux provinces et aux citoyens de ces provinces les ressources nécessaires sans être un fardeau énorme pour le gouvernement fédéral.
Le président: Dans votre province, je crois que l'augmentation est supérieure à 33 p. 100. N'est-ce pas? C'est probablement environ 42 p. 100.
M. Greg Selinger: Mon collaborateur me dit qu'elle a probablement été supérieure mais nous pensons qu'elle est proportionnelle peut-être même inférieure à l'augmentation de vos recettes au cours de la même période.
Le président: Donc supérieure.
M. Greg Selinger: Oui...
Le président: Mais que voulez-vous dire par «peut-être»? Est-ce plus ou non?
M. Greg Selinger: Plus.
Le président: D'accord.
Ce n'est donc pas suffisant 40 p. 100, 42 p. 100, quel que soit le chiffre? Ce genre d'augmentation ne suffit pas à compenser le fardeau supplémentaire que vous devez supporter, par exemple, comme le disait le ministre, pour les soins de santé et l'éducation. Est-ce ce que vous voulez dire?
M. Greg Selinger: Oui.
Le président: D'accord.
Monsieur Hubbard.
M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, monsieur le président. Je n'ai qu'un commentaire à faire et peut-être que le ministre voudra répondre.
Vous faites allusion à de gros excédents budgétaires au niveau fédéral. Vous savez que le gouvernement canadien a un déficit énorme et qu'étant donné qu'il faut payer des intérêts sur ce déficit, je trouve étrange que vous prétendiez que nous ne devrions pas avoir d'excédent. Si nous n'en avons jamais, nous ne réussirons jamais à diminuer cette dette et nous n'aurons jamais l'argent voulu pour offrir les services nécessaires aux Canadiens.
Je ne trouve pas que ce soit un bon argument. Je comprends que vous puissiez différer d'opinion quant aux dépenses que nous choisissons de faire, mais critiquer le fait que nous avons un excédent de 10 ou de 12 milliards de dollars par an ne me semble pas très prometteur pour l'avenir du régime fédéral canadien.
M. Greg Selinger: Je ne voudrais pas que vous pensiez que je préconise que vous n'ayez pas d'excédent.
M. Charles Hubbard: Vous pensez que si nous avons un excédent, nous devons le donner aux provinces, c'est cela?
M. Greg Selinger: Non, je ne veux pas dire que vous devriez remettre entièrement votre excédent aux provinces. Je dis simplement que le programme de péréquation devrait pouvoir fonctionner comme prévu. En supprimant le plafond, ce qui serait préférable et ce qui pourrait être une solution, pour qu'il soit au moins rétabli au niveau qu'il avait atteint l'année au cours de laquelle vous l'aviez supprimé, vous aideriez davantage les provinces.
Il serait souhaitable que toutes les provinces et le gouvernement fédéral aient un excédent afin de pouvoir rembourser leurs dettes et investir dans l'avenir. Nous ne devons pas adopter des politiques qui soient néfastes pour les uns ou les autres. Il s'agit de trouver un juste équilibre.
• 1655
Surtout ne croyez pas que mes arguments cherchent à vous faire
les poches à notre avantage, ou, par contre, à suggérer qu'il est
bon que vous trouviez votre avantage à réduire artificiellement les
revenus des provinces. Il s'agit de trouver un bon équilibre, et
nous pensons que nous avons exprimé une position raisonnable
aujourd'hui, basée sur l'entente conclue à Winnipeg à la veille
d'une élection fédérale, où il s'agissait de supprimer le plafond
pendant un an, pour ensuite permettre aux transferts de s'accroître
en proportion avec la croissance du PIB. Nous pensons que c'était
une position raisonnable, établie en bonne et due forme par les
premiers ministres et par le premier ministre du Canada. Nous
pensons que cette loi vient saper cette entente, et nous voudrions
que la loi représente d'une manière plus fidèle l'atmosphère de
cette réunion, l'esprit qui a régné et ce qui y a été accompli.
M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.
Le président: Monsieur le ministre, au nom du comité, je vous remercie beaucoup. Bien entendu, nous allons étudier ce projet de loi en nous rappelant que, en tant que Canadiens, nous partageons les risques et les avantages de notre citoyenneté commune. Nous resterons fidèles à cette idée durant notre étude de ce projet de loi.
M. Greg Selinger: Merci.
Le président: La séance est levée.