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HERI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON CANADIAN HERITAGE

COMITÉ PERMANENT DU PATRIMOINE CANADIEN

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 22 novembre 2001

• 0901

[Traduction]

Le président (M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)): Il est 9 heures. La séance est donc ouverte. Le Comité permanent du patrimoine canadien se réunit aujourd'hui conformément au paragraphe 108(2) du Règlement,

[Français]

pour continuer l'étude de l'état du système de radiodiffusion canadien.

[Traduction]

Nous sommes tous très conscients du fait que le CRTC, en tant qu'organisme de réglementation et d'attribution de licences, joue un rôle capital dans le système de radiodiffusion, voire dans l'application de la Loi sur la radiodiffusion, qui relève de notre comité. Il est tout à fait approprié que le CRTC soit le premier groupe que nous entendions, après la ministre et les fonctionnaires des ministères de l'Industrie et du Patrimoine qui ont témoigné devant nous la semaine dernière.

Nous sommes très heureux de souhaiter la bienvenue à M. David Colville, président du CRTC,

[Français]

Mme Andrée Wylie, vice-présidente de la radiodiffusion, et M. Jean-Pierre Blais, directeur exécutif de la radiodiffusion.

[Traduction]

Monsieur Colville, vous avez la parole.

M. David Colville (président, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité, de nous avoir invités à témoigner devant vous aujourd'hui.

Comme vous l'avez indiqué, je m'appelle David Colville—je le répète pour les fins du compte rendu—et je suis président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes. Il y a, avec moi, la vice-présidente de la radiodiffusion du CRTC, et le directeur exécutif de la radiodiffusion, Jean-Pierre Blais.

Nous vous expliquerons donc, en gros, comment le conseil s'est acquitté des objectifs de la Loi sur la radiodiffusion de 1991 grâce aux politiques qu'il a élaborées et au rôle qu'il a joué pour mener l'industrie de la radiodiffusion au succès qu'elle connaît actuellement. Depuis la dernière mise à jour de la Loi sur la radiodiffusion de 1991, le changement est demeuré un terme omniprésent. Tous les intervenants ont dû réagir à des changements rapides, et ce, tant au chapitre de la structure de propriété et de la structure de l'industrie qu'au chapitre du développement technologique et de la mondialisation.

En cette ère où tout change si vite, le CRTC ne cesse de faire preuve de souplesse pour s'adapter aux réalités de l'heure. Grâce à la latitude que lui confère la Loi sur la radiodiffusion, le conseil a pu modifier ses politiques et ses règlements à la lumière de cette évolution. Nos discussions régulières avec le public sur les questions de radiodiffusion ont démontré que les Canadiens veulent un système de radiodiffusion qui traduit leurs réalités et leurs expériences.

Récemment, le conseil a énoncé les objectifs stratégiques sur lesquels il se fonderait pour élaborer des politiques et prendre des décisions dans le domaine de la radiodiffusion. Ces objectifs s'articulent autour du maintien des choix et de la diversité pour les Canadiens ainsi que du maintien d'une forte présence canadienne. Pour atteindre ces objectifs, il faudra offrir une vaste gamme de services, tant analogiques que numériques, et promouvoir des services qui traduisent les valeurs des Canadiens.

• 0905

[Français]

Mme Andrée P. Wylie (vice-présidente, Radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Au cours des dernières années, le CRTC s'est servi de la souplesse que lui confère la loi et il a entrepris un examen détaillé de tous ses principaux règlements et de toutes ses grandes politiques touchant la distribution, la radio et la télévision. Il a même adopté récemment de nouvelles politiques régissant des domaines tels que la radiodiffusion à caractère ethnique et les services spécialisés numériques afin de refléter les changements technologiques et l'évolution démographique de la société canadienne. Les résultats portent désormais leurs fruits et les effets sont positifs.

En mai 1999, le conseil a entendu les demandes de renouvellement de licence des stations de radio et des réseaux de télévision de la SRC/CBC. Pour le radiodiffuseur public, ce fut l'occasion de présenter une stratégie globale; pour le CRTC, ce fut l'occasion d'évaluer le rôle de la SRC/CBC dans le système canadien de radiodiffusion.

Dans ses décisions, le conseil a insisté sur le rôle essentiel que la SRC/CBC joue dans la fourniture d'émissions canadiennes d'information et de divertissement de grande qualité.

En cette période d'incertitude financière, le conseil a convenu que la SRC/CBC devait consacrer toutes les ressources disponibles aux services de radio et de télévision existants au lieu d'investir dans de nouveaux projets.

Nous avons incité les stations de radio de la SRC/CBC, tant celles de langue anglaise que celles de langue française, à étendre davantage leurs services afin que la majorité de chaque groupe linguistique les reçoive à la grandeur du pays. La SRC/CBC a donné suite à cette demande et elle est déjà en train d'élargir l'auditoire cible de tous ses réseaux radiophoniques.

[Traduction]

M. David Colville: La politique révisée du conseil concernant la radio commerciale comportait trois grands objectifs: assurer la meilleure place possible aux artistes canadiens; assurer le maintien d'une forte présence francophone à la radio; et faire en sorte que l'industrie de la radio soit bien financée et mieux positionnée pour respecter ses obligations en vertu de la loi.

Pour tenir compte de l'accroissement du nombre d'artistes canadiens, le conseil a porté à 35 p. 100 le pourcentage requis de contenu canadien pour l'ensemble des pièces musicales populaires diffusées. On comprend mieux l'importance de cet accroissement quand on sait qu'avant 1971, année où le conseil a imposé des pourcentages minimums concernant la diffusion de musique canadienne, les pièces canadiennes ne comptaient que pour 2 p. 100 environ de la programmation des stations de radio.

Dans la première moitié des années 90, l'industrie de la radio commerciale a connu des difficultés financières et elle n'arrivait pas à emboîter le pas aux autres industries médiatiques en pleine croissance. Le conseil a donc laissé tomber les restrictions relatives au temps de publicité et a assoupli la plupart des règlements relatifs à la formule et au contenu des émissions. Toujours dans le cadre de la nouvelle politique de radio, le conseil a élaboré un modèle qui nous permet d'accroître les fusions dans les marchés sans pour autant compromettre ni la diversité des sources de nouvelles ni la concurrence.

Les résultats attribuables à ces changements et les économies d'échelle réalisées grâce au regroupement de propriété figurent sur la diapositive. Les recettes et les profits ont tous deux augmenté tout au long des années 90 et l'industrie peut à nouveau livrer une véritable concurrence aux autres médias.

En vue de stimuler la concurrence, de promouvoir la diversité des choix et de compenser les effets des modifications aux restrictions à la propriété, la nouvelle politique concernant la radio prévoit des mesures qui incitent de nouvelles sociétés à entrer dans le système. Aussi, il y a eu de nombreux processus d'octroi de licences pour de nouvelles stations FM dans tous les marchés et à la grandeur du pays. Le conseil a attribué 44 licences dans le cadre de ces processus et pas moins de 39 d'entre elles sont allées à de petits intervenants ou à de nouveaux venus, ce qui a contribué à la diversité et a permis d'obtenir de nouvelles émissions autochtones et multiculturelles.

L'industrie de la radio continue de tirer profit des révisions aux lignes directrices concernant la propriété. En effet, depuis leur adoption en 1998, les avantages de transfert se sont chiffrés à 51,4 millions de dollars en date de juillet 2001. Ces sommes d'argent sont consacrées aux nouveaux talents canadiens.

[Français]

Mme Andrée Wylie: Dans le cadre de l'examen des politiques relatives à la télévision effectué en 1999, le conseil a décidé d'examiner les licences des grandes chaînes de télévision en tant que groupe. Les radiodiffuseurs présentent un seul plan stratégique pour l'ensemble de leurs stations.

Un des avantages de cette méthode fut de permettre au conseil de mieux évaluer les demandes et de mieux comparer les licences sur une base nationale. Elle lui permet aussi d'appliquer les exigences réglementaires plus équitablement entre les groupes.

• 0910

Les grands groupes comme TVA, CTV et Global doivent maintenant s'engager à diffuser huit heures d'émissions prioritaires canadiennes par semaine, pendant les heures de grande écoute. Grâce à cette exigence, plus de temps d'antenne est accordé aux productions canadiennes, ce qui crée également de nouvelles possibilités pour la diffusion de dramatiques canadiennes de qualité.

Comme le révèle la diapositive, la part d'écoute des émissions canadiennes de langue anglaise par rapport à l'ensemble des émissions de langue anglaise a augmenté en 2000 pour se chiffrer à 33 p. 100. En 1991, lorsque la Loi sur la radiodiffusion a été adoptée, l'écoute s'établissait à 29 p. 100. En raison de la pénétration croissante des services étrangers dans le marché canadien de la radiodiffusion depuis une dizaine d'années, le simple fait de maintenir les taux d'écoute des émissions canadiennes s'avère en soi un tour de force.

Le taux d'écoute des émissions canadiennes de langue française par rapport à l'ensemble des émissions de langue française est demeuré élevé, au-dessus de 75 p. 100, pendant des années, si bien que le défi du conseil en matière de réglementation demeure encore la programmation de langue anglaise.

Le secteur de la télévision n'a pas échappé à la tendance au regroupement de propriété. Depuis juin 1999, les avantages tangibles destinés à satisfaire aux objectifs de la loi se sont chiffrés à 429 millions de dollars, soit 10 p. 100 de la valeur de chaque transaction.

La plupart de ces avantages ont été destinés à des émissions prioritaires de qualité.

Les titulaires de licences de télévision continuent d'investir davantage dans les émissions canadiennes. En 2000, les services conventionnels et les services spécialisés ont consacré plus de 1,5 milliard de dollars aux émissions canadiennes. L'essor de l'industrie est essentiellement attribuable aux services de télévision payante et spécialisée qui sont en expansion.

Dans le cadre du régime d'attribution de licences de services de télévision spécialisée et payante, le CRTC a élargi le type de programmation canadienne disponible et a ainsi créé de nouvelles avenues d'expression pour les Canadiens. Ceci a non seulement accru les choix de programmation, mais a également permis d'accroître la diversité de propriété au sein du système canadien de radiodiffusion.

La croissance que ce secteur de l'industrie a connue sur le plan de l'écoute, des recettes et des contributions dans le domaine culturel est sans conteste un véritable succès pour la radiodiffusion canadienne.

Cette diapositive présente une comparaison entre la croissance des recettes provenant des services conventionnels de langue anglaise et celle des recettes provenant des services de télévision spécialisée et payante. Comme le révèlent les chiffres de 1991, les recettes découlant des services de télévision spécialisée et payante ne représentaient que 25 p. 100 des recettes provenant de la télévision conventionnelle. En 2000, par contre, ces recettes représentaient près de 70 p. 100 du secteur conventionnel.

À cause de la petite taille du marché de langue française, nous n'avons pu autoriser autant de nouveaux services spécialisés que dans le cas du marché de langue anglaise. Par contre, comme le révèle la diapositive, les recettes provenant du marché de langue française ont plus que triplé depuis 1991.

[Traduction]

M. David Colville: Voilà qui nous amène à la réalité émergente, à l'ère du numérique. Encore une fois, le CRTC s'est mis au diapason en adoptant en janvier 2000 un cadre de politique régissant l'attribution des licences des nouveaux services numériques canadiens de télévision spécialisée et payante. La nouvelle politique profite de l'évolution de la technologie pour favoriser l'atteinte des objectifs de la loi, notamment l'arrivée d'une nouvelle gamme de services multiculturels et de services dans la langue de la minorité. Grâce à son cadre de politique flexible, le conseil a fait un pas de plus vers l'accroissement de la concurrence en autorisant de nouveaux services numériques. Ainsi, au lieu que ce soit le conseil qui décide lui-même des meilleurs choix, les abonnés se voient offrir plus d'options, et c'est dès lors le marché qui décide du succès ou de l'échec des entreprises de programmation.

Environ 80 p. 100 des ménages canadiens reçoivent leurs services de télévision directement des distributeurs autorisés. Les entreprises de distribution canadiennes jouent donc un rôle clé dans l'atteinte des objectifs de la loi. En 1993, le conseil a lancé un avis public portant sur la structure de l'industrie. Par cet avis, le conseil a présenté de nouvelles politiques en matière de distribution et il a reconnu le développement de la technologie numérique de même que les possibilités en matière d'adressabilité et d'accroissement de la concurrence dans le secteur de la distribution. De plus, l'avis public sur la structure de l'industrie a jeté les bases et fournit les fonds initiaux de ce qui est maintenant le Fonds canadien de télévision.

• 0915

En janvier 1998, le nouveau règlement sur la distribution des émissions est entré en vigueur. Il s'agit d'une nouvelle approche globale pour la réglementation des entreprises de distribution qui vise à permettre aux abonnés de faire un choix de services parmi des distributeurs concurrents. Le système compte désormais deux distributeurs satellitaires autorisés ainsi que d'autres concurrents. Bell ExpressVu et Star Choice ont chacune connu une expansion rapide et elles ont offert aux Canadiens une alternative au câble.

Cette diapositive résume l'évolution de la concurrence dans le secteur de la distribution. En 1997, les câblodistributeurs avaient pratiquement le monopole des abonnements de base. En octobre 2001, les nouveaux venus avaient gagné environ 18 p. 100 du marché.

En 1998, le conseil a accordé, aux termes de la loi, une certaine souplesse aux distributeurs à l'égard de leurs obligations de contribuer financièrement à la création et à la présentation d'émissions canadiennes. Conformément au nouveau règlement, chaque distributeur doit consacrer 5 p. 100 de ses recettes brutes provenant de la radiodiffusion au fonds de production d'émissions canadiennes ou au canal communautaire ou aux deux.

Tel qu'indiqué, durant l'année de radiodiffusion se terminant en août 2000, les distributeurs ont versé plus de 86 millions de dollars au Fonds canadien de télévision, de même que plus de 11 millions de dollars à d'autres fonds de production d'émissions. La diapositive indique une forte croissance annuelle des contributions. Toujours durant l'année de radiodiffusion 2000, les câblodistributeurs ont injecté une somme supplémentaire de 80 millions de dollars dans l'exploitation du canal communautaire local.

Étant donné que le nouvel environnement numérique vient accroître la capacité des entreprises d'offrir des services de programmation, le conseil a pu offrir en 2001 un choix plus vaste aux abonnés grâce à l'ajout de 19 services à la liste des services par satellite étrangers admissibles. À l'heure actuelle, la liste compte environ 95 services de programmation étrangers parmi lesquels les distributeurs peuvent sélectionner les services qu'ils souhaitent offrir à leurs clients, alors qu'en 1991, cette liste ne comportait que 20 services étrangers.

En 1999, le CRTC a été un des premiers organismes de réglementation à se prononcer sur les nouveaux médias. Le conseil a conclu qu'il ne lui serait pas nécessaire de réglementer l'Internet pour satisfaire aux objectifs de la politique sur la radiodiffusion énoncés dans la loi. Il sera possible de réexaminer cette question en 2004 à la lumière des nouveaux changements dans le milieu de la radiodiffusion.

Les fusions et la convergence qui s'opèrent dans l'environnement de la radiodiffusion canadienne s'insèrent elles aussi dans une tendance internationale de concentration de la propriété et de généralisation de la propriété mixte dans le secteur des médias de masse. Le conseil a tenté de trouver un équilibre entre les impératifs de l'industrie et les craintes du public face à une concentration de propriété de plus en plus forte dans les médias; un équilibre, donc, entre la volonté d'assurer la diversité des voix et le mérite d'augmenter le nombre d'émissions canadiennes grâce à l'apport financier de grands diffuseurs. Tout en appuyant les fusions, le conseil a été prudent et a mis en place des mesures visant à, par exemple, imposer des conditions aux propriétaires afin d'éviter qu'ils ne fusionnent complètement leurs salles de nouvelles.

[Français]

Le conseil continue d'inciter les radiodiffuseurs à agir de manière responsable à l'égard de la violence et des stéréotypes sexuels et d'améliorer l'accès aux malentendants et aux malvoyants.

Avant de rendre une décision, le CRTC sollicite les observations du public sur les demandes qu'il reçoit et sur les questions de politique. Le CRTC estime qu'il est essentiel à la transparence de son processus décisionnel de faire en sorte qu'il soit facile pour toutes les parties intéressées d'apporter leur contribution.

Le conseil a étendu le signal du réseau TVA et de services spécialisés de langue française à l'ensemble des Canadiens pour que les francophones puissent bénéficier d'un choix d'émissions dans leur langue officielle, peu importe où ils choisissent de vivre.

Le conseil a autorisé un réseau national reflétant les cultures autochtones et il lui a fourni les ressources financières adéquates. Il s'agit là d'une première mondiale.

Nous avons autorisé plusieurs services à caractère ethnique, tant radiophoniques que télévisuels, et d'autres demandes sont actuellement devant nous.

• 0920

Le conseil continue de chercher des moyens d'augmenter les points de diffusion de programmation ethnique.

Nous avons aussi instauré des mesures récemment pour distribuer les débats de la Chambre des communes dans les deux langues officielles partout au Canada.

Pour le conseil, il est prioritaire d'assurer que le système de radiodiffusion reflète les préoccupations locales et régionales des résidents du pays.

Nous croyons qu'il est possible de faire plus pour favoriser la création de voix nouvelles et de choix nouveaux, particulièrement à la télévision. Nous travaillons présentement à élaborer de nouvelles politiques pour aider les services communautaires à faire partie intégrante du système canadien de radiodiffusion. Un des moyens de contrebalancer les effets du regroupement et de la croissance des grands radiodiffuseurs nationaux est de multiplier les occasions permettant aux groupes communautaires de participer au système de radiodiffusion.

La fourniture d'émissions locales par les stations de télévision conventionnelle existantes préoccupe le conseil, surtout dans le cas des petits marchés. Nous avons amorcé un projet de politique dans le but d'examiner les répercussions de la télévision par satellite de radiodiffusion directe sur les radiodiffuseurs dans les petits marchés et, en somme, sur l'offre de programmation locale.

[Traduction]

Votre comité jouera un rôle capital pour ce qui est d'ouvrir la voie à l'établissement par consensus des grands principes et des objectifs à long terme qui permettront à tous les intervenants du système de radiodiffusion de relever les défis auxquels ils seront confrontés.

Les nouvelles technologies et la mondialisation croissante présentent autant de défis que de possibilités quant aux nouvelles façons de réglementer en vue d'atteindre les objectifs culturels et sociaux. Grâce à la technologie, nous pourrons promouvoir plus de talents canadiens ici et à l'étranger, ce qui est plus important que jamais si nous voulons continuer de mettre l'accent sur la promotion de la culture et des valeurs canadiennes.

Le cadre législatif en vigueur nous a permis d'accomplir beaucoup de choses, mais nous demeurons ouverts à tout changement visant à améliorer le système. Les enjeux sont énormes, mais nous tenons à vous assurer de notre entière collaboration dans votre examen.

L'objectif du CRTC est de préserver et d'améliorer le système de radiodiffusion et de garantir qu'il demeure un modèle sur le plan international.

Merci de votre temps et de votre attention. Nous nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Colville et madame Wylie, pour cet aperçu très utile que vous nous avez donné du travail du CRTC. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous allons maintenant passer aux questions.

M. Abbott sera le premier, et il sera suivi de Mme Gagnon.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président. Je tiens aussi à remercier les témoins de leur présence ici aujourd'hui. Leur témoignage nous permettra j'en suis sûr de mieux comprendre le rôle du CRTC.

Je voudrais vous lire un tout petit extrait d'un éditorial et vous demander ensuite ce que vous en pensez:

    Premièrement, afin de protéger les oreilles des francophones contre des pièces musicales qu'ils pourraient bien aimer, le CRTC exige des stations de musique FM que 65 p. 100 de leur programmation soit consacrée à des pièces comportant des paroles françaises. Le CRTC vient tout juste de renouveler la licence de CKBY-FM à Ottawa pour une période de 15 mois seulement, au lieu des sept ans qui sont la norme, et a menacé la station de la poursuivre pour outrage au tribunal si elle ne s'amendait pas, la station ayant osé faire tourner des pièces à succès à raison de 51,3 p. 100 de sa programmation pendant la semaine du 9 au 15 mai. Heureusement, aucun décès n'a été signalé parmi les auditeurs qui ont été exposés pendant cette semaine-là à pas moins de 22 chansons à succès excédentaire, mais le CRTC s'est néanmoins dit gravement préoccupé.

    CKBY a fait des excuses et a promis que la situation ne se répétera pas, mais qu'il y avait simplement eu un malentendu du fait que la station n'avait pas le bon palmarès. Il semble que le CRTC ait modifié en 1997 la définition de ce qui constitue un succès, la définition s'appliquant dès lors, non plus aux pièces qui avaient déjà été dans les 40 premières places de certains palmarès, mais à celles qui y avaient déjà figuré avant 1980.

    On crée aussi une exception pour les succès canadiens, qui arrivent non pas par balle, mais avec la nouvelle année. Pour éviter de décourager la diffusion de musique canadienne, qui obtient du succès en dépit des efforts acharnés du gouvernement, la règle précise que toute chanson canadienne qui figure au palmarès des 40 meilleures chansons n'est considérée comme un succès qu'un an après son inscription au palmarès.

Grâce aux progrès technologiques, les gens peuvent maintenant écouter ce qu'ils veulent, en captant les signaux à partir de satellites ou directement sur les ondes. N'est-ce pas vieux jeu de la part du CRTC de vouloir encore chercher à s'ingérer dans les choix des auditeurs et jouer essentiellement le rôle de censeur? Est-ce vraiment dans cette voie que doit se diriger le CRTC?

• 0925

M. David Colville: Permettez-moi de faire une observation générale, après quoi j'inviterai la vice-présidente, Mme Wylie, à réagir à la question de la musique vocale francophone qui a été le point de départ de votre intervention.

Si nous voulons avoir un système qui permette d'assurer la présentation d'un certain pourcentage de contenu canadien à la radio ou à la télévision, il faut que nous établissions des règles en ce sens. Ces règles sont souvent désignées comme étant les règles sur le contenu canadien, même si elles ne portent pas vraiment sur le contenu en tant que tel des émissions. Elles servent plutôt à évaluer la part de contenu canadien dans la programmation sur le plan quantitatif.

Pour ce qui est plus particulièrement de la radio et des chansons à succès, le fait est que, avec le passage de la radio AM à la radio FM, nous avons voulu mettre en place un ensemble de règles pour éviter que la nouvelle technologie FM ne finisse par faire disparaître complètement les stations de radio AM. Avec ces règles, nous avons donc voulu, dans une certaine mesure, imposer des restrictions aux stations FM pour assurer la survie des stations AM.

Nous avons constaté qu'avec le temps les stations AM se sont adaptées au marché, passant à une formule axée davantage sur les interviews-variétés. Beaucoup des stations AM sont passées à des fréquences FM. Aussi je comprends que le pourquoi de certaines de ces règles ne soit pas toujours évident. J'ai indiqué dans notre exposé que nous avions apporté des modifications importantes à notre politique sur le FM afin de donner plus de latitude aux exploitants de stations FM pour qu'ils puissent s'adapter davantage au marché. Nous revoyons constamment nos règles afin de les rajuster et de permettre aux exploitants de mieux répondre aux besoins de leurs clients.

Je vais demander à la vice-présidente, Mme Wylie, de répondre à la question concernant la musique vocale francophone.

Mme Andrée Wylie: En réponse à votre deuxième question, monsieur Abbott, peut-être que l'expression «vieux jeu» est bien choisie dans les circonstances. Pour faire suite à ce que disait M. Colville, si nous avons modifié la définition, c'est précisément pour protéger les stations AM dont la programmation est faite de vieux succès et qui doivent concurrencer les stations FM tout en continuant à diffuser sur des fréquences AM. La définition n'est appliquée dans le grand Ottawa que pour protéger les stations qui font tourner de vieux succès. Ailleurs, elle n'est plus utilisée. La définition vise donc à protéger ceux qui aiment les vieilles chansons, et je ne saurais vous dire si on peut les qualifier de «vieux jeu».

M. Jim Abbott: Si vous me permettez, il me semble évident que le CRTC, dans ce cas-ci—et il y en a bien d'autres—est essentiellement prêt à censurer ce qui est diffusé sur les ondes. En d'autres termes, vous vous arrogez le rôle de censeur en déterminant le type de musique qui peut être diffusé. Cela vient de nous être confirmé.

Vous dites que votre objectif est d'encourager les services de communication qui reflètent les valeurs canadiennes et qui répondent aux besoins des consommateurs. Si donc vous ne répugnez pas à censurer certains types de musique par les moyens obtus que vous venez de nous décrire, vous pourriez peut-être aussi envisager de censurer la pornographie et la violence qui ne fait pas que se glisser dans la programmation mais qui inonde les stations, notamment les stations de télévision, qui sont offertes aux Canadiens.

Je me demande si vous seriez d'accord avec moi pour dire que ces représentations absolument pornographiques ne concordent pas avec les valeurs canadiennes. Je suis peut-être vieux jeu, je ne sais pas, mais il me semble qu'elles ne reflètent pas les valeurs canadiennes.

À quoi peut-on s'attendre du CRTC? Si vous ne répugnez pas à censurer les paroles et les types de musique, pourquoi répugneriez- vous à censurer les émissions qui représentent les femmes notamment comme des objets, au lieu de leur donner la place qui leur revient dans notre société?

M. David Colville: Tout d'abord, je ne suis pas d'accord pour dire que nous censurons la musique. Nous imposons des limites à certains types de programmation canadienne que les stations de radio peuvent offrir et, comme nous venons de l'indiquer, aux types de musique que les stations FM ou AM peuvent diffuser. Ces règles visent essentiellement à favoriser la survie des divers éléments de l'industrie.

• 0930

En ce qui a trait aux émissions pornographiques, la plupart de ces émissions, sinon toutes, à ma connaissance, sont offertes par les chaînes de télévision payante auxquelles il faut s'abonner de façon individuelle. Nous avons établi des codes sur des questions comme la pornographie et la violence à la télévision.

Le Conseil canadien des normes de la radiotélévision fait généralement un excellent travail pour ce qui est de répondre aux plaintes à ce sujet. Il arrive que les codes soient violés, auquel cas nous intervenons dès que la violation est portée à notre attention. En ce qui concerne les émissions pornographiques dont vous avez parlé et qui ont soulevé des préoccupations au début de l'année, dès que le problème nous a été signalé, nous avons pris les mesures voulues et les services en cause aussi pour le régler rapidement.

Le président: Vous aurez une autre chance de poser des questions, monsieur Abbott.

[Français]

Madame Gagnon, vous avez la parole.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Merci.

Il me fait plaisir de vous recevoir ce matin. J'aimerais vous poser quelques questions à propos de la Société Radio-Canada, qui a annoncé avoir conclu un accord avec COGECO, propriétaire des stations de TQS, sur la gestion des informations dans trois marchés locaux au Québec: à Trois-Rivières, Chicoutimi et Sherbrooke. La ministre nous a dit que ce genre de collaboration était la voie de l'avenir.

On sait que plusieurs intervenants du milieu ont déposé des mémoires et qu'ils sont très inquiets de ce type d'alliance, notamment au chapitre de l'indépendance du contenu et au chapitre de la liberté d'expression.

La Loi sur la radiodiffusion mentionne que le système canadien de radiodiffusion a trois composantes: une publique, une privée et une communautaire. Si on dit que le système canadien de radiodiffusion est un système mixte, qui incorpore le secteur public et le secteur privé, et que ces deux secteurs doivent s'entendre, cela veut-il dire qu'ils doivent s'associer pour ne pas se concurrencer? Dans ce nouveau contexte, où il faut assurer la qualité des émissions, le rôle de la télévision publique sera-t-il modifié, ce dont plusieurs s'inquiètent? Je crois qu'hier, à Montréal, des témoins ont présenté des mémoires au CRTC.

On sait que, dans certaines régions, on est inquiet. On se demande quelle sera la liberté de l'un et de l'autre. On se pose la question surtout pour la télévision publique, qu'on dit être unique, culturelle et différente. Va-t-on être capable de conserver sa liberté d'expression?

Mme Andrée Wylie: Dans le cas de l'entente entre COGECO et la SRC, il n'y a pas vraiment de changement radical. Il reste encore deux salles de nouvelles distinctes. Ces stations se sont désaffiliées de la SRC dans le passé et sont maintenant propriété de TQS. Radio-Canada a insisté pour être davantage présente dans ces marchés. Elle voulait être perçue comme étant consciente de ses responsabilités vis-à-vis de ces marchés. Radio-Canada sera donc plus visible et plus présente qu'elle ne l'était auparavant grâce à ses logos, sa présentation, etc. Il y aura quand même deux salles de nouvelles distinctes et des employés distincts; il ne partageront que l'infrastructure.

Cela a soulevé des questions dernièrement. Par exemple, dans le cas du nord de l'Ontario ou de marchés plus petits où il est plus difficile d'offrir de la programmation locale, il pourrait y avoir aussi des échanges ou des partenariats d'infrastructures, de facilités et même peut-être de cueillette des nouvelles, sans nécessairement qu'on fusionne les deux entités, ce qui d'ailleurs n'est pas le cas de l'entente avec COGECO. Dans ce cas, il y aura toujours deux salles de nouvelles distinctes, comme auparavant, et des employés distincts aussi. Cette entente vient surtout du fait que la SRC voulait être plus présente parce qu'au lieu qu'elle ait une station affiliée comme auparavant, un concurrent était maintenant propriétaire des infrastructures.

Mme Christiane Gagnon: Si ma mémoire est bonne, il en a été question dans la presse, au lendemain de cette annonce qui avait inquiété la Société Radio-Canada. Il s'agit donc d'un dossier à suivre, et je pense qu'il va falloir être prudent face à cette volonté de concentration.

• 0935

On sait aussi que la tendance aux fusions dans le domaine de la radio est un autre secteur où les gens s'inquiètent de la diversité des voix. On sait que la diversité des voix est un objectif de la Loi sur le ministère du Patrimoine canadien, mais cela soulève aussi des inquiétudes dans un contexte d'acquisitions comme celle de Télémédia par Astral Communications.

Comment le CRTC s'assure-t-il qu'il y a maintien de la diversité des voix, des emplois, de la programmation et de l'information locale lorsqu'il y a une telle concentration? Est-il en mesure d'imposer des normes dans ses licences et de les faire respecter?

Le CRTC a une règle qui stipule que, dans un marché de moins de huit stations, il décourage la possession par un même groupe de plus de trois stations, dont deux sur la même bande. Pourtant, à St. John's, à Terre-Neuve, vous avez accepté qu'une même entreprise possède trois stations FM et une station AM. À quoi servent vos règles si vous ne suivez pas vos critères?

Mme Andrée Wylie: Nous reconnaissons avec vous le danger de la concentration et d'une décroissance, d'une diminution de la diversité des voix. Mais il y a certaines circonstances—et le cas de St. John's en est peut-être une—où il y a quelquefois un choix à faire entre avoir moins de stations et avoir plus de stations appartenant au même propriétaire. Il s'agit d'essayer de maintenir l'équilibre dans les marchés qui sont plus difficiles à desservir et d'équilibrer ce qui fait l'objet de votre inquiétude et de la nôtre aussi: la diversité des voix et le choix ou le service pour la population.

Dans le cas de Terre-Neuve, en soupesant ces deux objectifs, la majorité des membres du conseil en est venue à la conclusion qu'il était moins dommageable d'avoir une station de plus aux mains d'un même propriétaire que d'avoir des stations qui ne sont plus accessibles au public parce qu'elles ne sont pas viables financièrement.

Mme Christiane Gagnon: J'ai une dernière petite question sur la programmation.

Le président: Très, très brièvement.

Mme Christiane Gagnon: Par exemple, dans le domaine de la radio, on dit qu'il est difficile d'intégrer des vedettes locales à la programmation parce que ça part des grands réseaux. Si ce n'est pas reconnu par les grands réseaux, il est très difficile pour certaines stations de faire la promotion de certaines vedettes locales au niveau de la programmation.

On nous dit, par exemple, que 65 p. 100 des chansons doivent être de langue française, mais si, pour atteindre 65 p. 100, on fait entendre 40 fois Céline Dion et autant de fois une autre chanteuse encore plus connue, est-ce que ça laisse réellement une place aux vedettes locales ou à de la ressource locale qui n'est pas reconnue?

Mme Andrée Wylie: On voit probablement dans la soumission écrite de l'ACR, comme on l'a vu dernièrement dans les journaux, que nous avons mis en place des projets afin d'encourager le développement des talents, et l'ACR a aussi répondu à nos buts et objectifs. Donc, quand les stations de radio obtiennent une licence ou font le renouvellement de celle qu'elles ont, elles doivent faire un effort pour développer les talents canadiens. Vous avez vu ce matin, dans d'autres soumissions, les montants d'argent qui sont déposés. L'ACR a le projet Radio Starmaker Fund, le Fonds Radio Star, pour essayer de mousser le développement des nouveaux talents.

Il est évident que Céline Dion est très populaire. Les gens veulent l'entendre, et nous sommes un petit pays. Tout le monde ne peut pas chanter, mais nous comprenons votre inquiétude, et des efforts sont faits pour développer de nouveaux talents. Vous connaissez sans doute Musique Action, une organisation à laquelle les radiodiffuseurs doivent donner des sommes d'argent chaque année afin de développer les talents.

• 0940

[Traduction]

Le président: Dennis.

M. Dennis Mills (Toronto—Danforth, Lib.): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

Je vais d'abord poser une question. C'est la même question que la toute première question que j'ai posée la première fois que j'ai siégé à ce comité il y a 13 ans. Cette fois-ci, j'aimerais qu'on y réponde par écrit.

Nous parlons du contenu canadien et du fait qu'il a atteint des sommets inégalés. J'ai toujours été d'avis que le contenu canadien ne comprenait pas seulement les artistes anglophones, mais aussi les artistes francophones. À l'époque, j'ai donné l'exemple de Richard Séguin. Aujourd'hui, j'ajoute celui de Kevin Parent.

Pourquoi le CRTC n'exige-t-il pas que les stations de radio canadiennes—les CKFM et autres stations de radio de ma ville, par exemple—incluent dans leur contenu canadien certains des meilleurs artistes francophones pour que ceux-ci soient entendus non seulement à Québec ou à Penetanguishene, en Ontario, mais partout au Canada? Vous n'avez pas à répondre à cette question tout de suite, mais j'aimerais que vous nous fournissiez une très bonne réponse à cette question par écrit.

La question à laquelle j'aimerais que vous répondiez de vive voix aujourd'hui a trait à la diapositive 26 qui porte sur les préoccupations d'ordre social, la violence et les stéréotypes sexuels. J'aimerais revenir à certaines observations faites par M. Abbott.

Monsieur Colville, je ne suis pas d'accord avec vous pour dire que le conseil des normes fait un excellent travail. Dans ma propre ville, on peut chaque jour de la semaine entendre le fameux Howard Stern. On pourrait aussi donner des exemples d'émissions semblables à la télévision. Des électeurs s'adressent régulièrement à moi pour déplorer la violence et les stéréotypes sexuels. La situation à cet égard s'aggrave continuellement.

Je ne comprends vraiment pas. Je ne vois pas pourquoi le CRTC ne peut pas intervenir. Le CRTC a une fonction de révision et de vérification et vous parlez des valeurs sociétales. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement et vous, à titre d'organisme chargé de réglementer la radiodiffusion, ne pouvez rien pour changer la situation.

Pourriez-vous m'expliquer pourquoi vous pensez que ce genre de situation est acceptable pour que je puisse l'expliquer à mon tour à mes électeurs? À votre avis, vous faites un excellent travail.

M. David Colville: Je dis que le conseil des normes faisait un excellent travail et je le crois.

Pour revenir à la discussion que j'avais avec M. Abbott, nous ne pensons pas que nous devons jouer le rôle de censeur. Nous avons établi des codes et des lignes directrices qui portent sur la programmation offensante qui se caractérise par le langage utilisé, la violence ou les stéréotypes sexuels. Nous pensons qu'on respecte ces codes dans l'ensemble.

Lorsque l'émission d'Howard Stern a d'abord été diffusée au Canada, beaucoup de gens se sont inquiétés de son contenu. Nous sommes cependant intervenus, c'est-à-dire que le Conseil canadien des normes de la radiotélévision l'a fait.

Si je ne m'abuse, quelqu'un coupe les parties les plus offensantes de ces émissions. Je suppose que quoi qu'on fasse, quelqu'un trouvera toujours quelque chose d'offensant dans des émissions, mais nous avons essayé de viser un juste équilibre parce qu'il s'agit pour nous non pas de faire de la censure, mais d'exercer un certain contrôle sur la programmation.

Je suppose que certains soutiendront toujours que nous sommes allés trop loin dans un sens ou dans l'autre. Nous voulons cependant éviter qu'on nous reproche de faire de la censure.

• 0945

M. Dennis Mills: Monsieur Colville, quelqu'un vous a-t-il vraiment jamais reproché d'être allé trop loin? Prenons le cas précis d'Howard Stern. Quelqu'un vous a-t-il jamais dit que vous étiez allé trop loin dans ce cas?

M. David Colville: J'ai lu beaucoup d'éditoriaux qui faisaient valoir les deux points de vue et notamment que le CRTC devrait éviter de faire de la censure.

M. Dennis Mills: À titre de président du CRTC, quelle est votre propre position sur ces questions lorsque vous évaluez ce que les radiodiffuseurs diffusent sur les ondes? Quelle est votre position ainsi que celle du CRTC? Vous avez parlé de la violence et des stéréotypes sexuels, mais comment luttez-vous contre ceux-ci si vous permettez que des chaînes pornographiques diffusent n'importe quoi?

M. David Colville: Nous ne le permettons pas. Comme je l'ai dit, il existe des codes qui régissent ces questions. Je ne peux pas vous les citer de mémoire, mais si vous ne les avez pas, je veillerai à ce qu'on vous les fasse parvenir. Le CCNR est chargé de faire respecter les codes que nous avons mis en place et qui traitent des stéréotypes sexuels et de la violence à la télévision. C'est en fonction de ces codes que le CCNR évalue la programmation et les plaintes s'y rapportant.

Il est possible qu'il soit nécessaire de temps à autres de revoir ces codes et de les renforcer. Comme j'ai dit à M. Abbott, il se peut que des radiodiffuseurs enfreignent à l'occasion ces codes. Lorsque cela se produit, nous intervenons, comme nous l'avons fait dans le cas du matériel pornographique qui était offert par les services de télévision payante par satellite.

M. Dennis Mills: Je vous remercie beaucoup.

Le président: Je vous remercie, monsieur Mills.

Monsieur Harvard, vous avez la parole.

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Je vous remercie de comparaître devant le comité aujourd'hui et de nous avoir fait cet exposé.

J'aimerais cependant vous dire à vous monsieur Colville et à vos collaborateurs que j'ai eu l'impression que cet exposé était une longue annonce publicitaire vantant les mérites du CRTC. Sauf le respect que je vous dois, je pense que c'est la façon dont on peut décrire 95 ou 98 p. 100 de cet exposé.

Je ne reviendrai pas sur ce que vous avez dit sauf pour faire remarquer que vous affirmez que de nouvelles politiques allant de la radiodiffusion d'émissions ethniques aux services numériques spécialisés donnent de bons résultats. Vous vous attribuez le mérite d'avoir empêcher Radio-Canada de trop étirer ses ressources et de se lancer dans de nouveaux projets ambitieux ou en tout cas dépassant ses moyens. Vous vous attribuez aussi le mérite d'avoir remis sur la bonne voie l'industrie de la radio commerciale et vous l'avez fait en permettant la diffusion de plus d'annonces publicitaires et en imposant des règles moins rigoureuses en matière de contenu. Vous vous attribuez aussi le mérite d'avoir accru la programmation canadienne et d'avoir amené tant les chaînes classiques que les services spécialisés à investir davantage dans la programmation canadienne. Voilà pourquoi je dis que votre déclaration préliminaire ressemble à une longue annonce publicitaire.

Tout d'un coup, vers la fin de cette déclaration, en fait presque dans les derniers paragraphes, vous changez de ton et dites que les enjeux sont «énormes». Vous qui croyez que tout allait sur des roulettes, en particulier tout ce qui a à voir avec le CRTC, vous nous dites tout d'un coup que les «enjeux sont énormes».

Si c'est vraiment le cas, pourriez-vous nous expliquer quelles mesures vous comptez prendre pour faire face à ces enjeux? Vers la fin de votre déclaration préliminaire, vous dites aussi que le comité entend jouer un rôle de premier plan, et je suppose qu'il s'agit de ces enjeux énormes que vous ne voulez pas préciser. Voulez-vous que nous siégions à huis clos? Serait-ce que vous ne voulez pas insulter qui que ce soit ou mettre en doute les politiques ou les pratiques en vigueur? Est-ce ce qui vous empêche de nous faire part...?

Vous disposez d'un effectif important. Vous dépensez beaucoup d'argent, monsieur Colville. Si les enjeux sont aussi énormes que vous le dites, pourquoi ne pas prendre quelques minutes pour nous en parler?

M. David Colville: J'aimerais d'abord dire que je ne m'excuse pas de donner l'impression que je suis fier du travail que nous faisons.

M. John Harvard: Je ne vous demande pas de vous excuser.

M. David Colville: Nous sommes fiers du travail que nous faisons, mais je ne m'arroge aucun mérite à cet égard. Tous ceux qui se trouvent dans cette salle font leur travail au nom du Parlement compte tenu des responsabilités qui leur sont conférées en vertu de la Loi sur la radiodiffusion.

M. John Harvard: Vous le dites maintenant, monsieur Colville, parce que j'ai soulevé la question. Il n'en est cependant pas question dans le document que vous nous avez remis.

• 0950

M. David Colville: Je pense vraiment ce que je dis, monsieur Harvard. Nous sommes fiers du travail que nous faisons. Je l'ai déjà dit au personnel du conseil. Il n'y a pas beaucoup de gens au gouvernement qui travaillent sur des questions aussi importantes que les communications, qu'il s'agisse de radiodiffusion ou de télécommunications, et qui sont en mesure de voir le lendemain le résultat de leur travail sur la vie quotidienne des gens. Le conseil compte quelque 400 employés et commissaires qui travaillent très fort et qui sont vraiment fiers de leur travail.

M. John Harvard: Mais ce qui m'intéresse vraiment, monsieur Colville...

Le président: Un instant. Veuillez d'abord permettre à M. Colville de terminer.

M. David Colville: Je comprends le point que vous soulevez et j'y viens.

Nous voulions aujourd'hui faire ressortir le fait que nous sommes souples et que nous pouvons nous adapter à mesure que le milieu et que la technologie changent. Nous ne voulions certainement pas vous cacher quoi que ce soit. Nous sommes sincèrement heureux d'être ici aujourd'hui et nous reviendrons devant le comité autant de fois qu'il le jugera bon pour discuter tant des enjeux passés que des enjeux futurs.

L'un des défis que nous devrons sûrement relever dans l'avenir est de trouver le juste équilibre à mesure que nous progressons dans l'ère numérique, dans l'ère de l'Internet puisque les gens vont avoir de plus en plus de choix et que le phénomène de la mondialisation va s'accentuer. Il se peut qu'il soit de plus en plus difficile de relever certains des défis qui découlent de la Loi sur la radiodiffusion et notamment de favoriser la programmation et le contenu canadiens. À mesure que les technologies évolueront et que les échanges commerciaux s'accentueront dans le monde, je pense qu'il sera de plus en plus difficile d'assurer à la programmation canadienne la place qui lui revient.

Il ne s'agit pas d'essayer de cacher quoi que ce soit. La technologie évolue cependant et nous avons voulu montrer que nos règlements et nos politiques s'y étaient adaptés. Cette tendance va se poursuivre... Nous sommes fiers du travail que nous faisons, mais nous l'accomplissons au nom de la population canadienne parce que nous sommes chargés de mettre en oeuvre la Loi sur la radiodiffusion que le Parlement a adoptée. Nous avons un défi collectif à relever qui est de savoir comment composer dans l'avenir avec l'évolution de la technologie et la mondialisation.

Le président: Monsieur Harvard, allez-y.

M. John Harvard: Pensez-vous vraiment, monsieur Colville, que ce que la majorité des Canadiens veulent, c'est avoir un plus grand choix en matière de radiodiffusion? Je peux comprendre que des Canadiens veulent plus de certaines émissions, plus d'émissions locales ou d'émissions canadiennes, par exemple. Mais comme on nous offre déjà des centaines de chaînes et que nous sommes aussi déjà inondés d'information, je doute vraiment que ce que les Canadiens veulent, c'est plus de choix. Pensez-vous qu'au lieu de 400 chaînes, ils en veulent 450 ou 700? Je ne pense pas. Je pense qu'ils ne veulent pas 100 ou 200 chaînes de plus, mais qu'ils aimeraient, dans une ville comme Winnipeg, davantage d'émissions locales ou davantage d'émissions canadiennes.

Si j'ai raison de penser comme je le pense, comment le CRTC peut-il faire en sorte que les habitants de Winnipeg se reconnaissent davantage dans les émissions de télévision ou de radio qu'on leur offre? Comment le CRTC peut-il aussi faire en sorte que leur pays se reflète davantage dans la programmation qui leur est offerte, en accroissant, par exemple, la programmation canadienne, au lieu de parler de leur offrir 100 chaînes de plus?

M. David Colville: Vous avez soulevé deux questions. La seconde, en particulier, a trait à l'un des défis que nous devrons relever dans l'avenir.

Pour ce qui est de la première question, celle du choix, vous avez probablement raison. La plupart des sondages indiquent que la plupart des gens ont six, huit ou dix chaînes favorites. La difficulté, c'est que mes chaînes favorites ne correspondent sans doute pas aux vôtres. Il se peut que deux ou trois d'entre elles soient les mêmes. Voilà ce qui explique l'énorme choix qui est offert. À mesure que nous entrons dans le monde de la télévision numérique, nous nous sommes demandé comment tirer parti de cette technologie pour satisfaire les goûts de chacun au lieu d'obliger tout le monde à regarder la même chose, c'est-à-dire à s'abonner aux chaînes qui sont prévues dans l'abonnement de base au câble.

• 0955

Quant à la seconde question que vous soulevez, je crois que la programmation locale est l'un des grands défis que nous devrons relever. Nous étudions actuellement la question et nous comptons sous peu faire paraître un avis public portant sur toute la question de l'expression et de la programmation locales.

Comme je l'ai souvent fait remarquer, nous avons la tâche délicate d'essayer de concilier des intérêts divergents. Ce que nous nous sommes efforcés de faire au fil des ans est d'accroître le nombre de dramatiques canadiennes de qualité à la télévision parce que leur nombre n'a pas été très élevé dans le passé en raison de leur coût.

C'est pour qu'il soit possible de produire des dramatiques canadiennes de qualité que nous avons permis certaines fusions dans le domaine de la radiodiffusion comme on l'a vu avec CTV. Nous voulions éviter que ce réseau corresponde à la conception que certains se font de certains réseaux, à savoir 12 personnes qui se disputent. Cette fusion a permis à CTV de devenir une entreprise solide.

Le défi consiste donc à faire en sorte d'assurer des conditions qui permettent aux joueurs nationaux d'être solides tout en assurant une programmation locale à Winnipeg ou à Halifax, ma ville natale. Il s'agira de trouver la meilleure façon d'atteindre cet équilibre pour assurer une programmation locale de qualité.

Cela étant dit, je pense que CTV, Global et Radio-Canada, tant en télévision qu'en radio, assurent un bon niveau de programmation locale. Je sais que chez moi, l'émission Live at 5 est celle que nous regardons le plus.

M. John Harvard: Je ne vous envie pas. Votre travail est difficile. Vous devez accepter sans sourciller les reproches que peuvent vous adresser jusqu'à des gens comme moi.

Je vous remercie.

Le président: Madame Lill, vous avez la parole.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Je vous remercie.

Je vous remercie de comparaître devant le comité.

Notre rôle est d'examiner l'application actuelle et future de la Loi sur la radiodiffusion. À l'alinéa 3(1)b) de la Loi, il est question d'un système composé d'éléments public, privé et communautaire et d'un service public essentiel pour le maintien et la valorisation de l'identité nationale et de la souveraineté culturelle. La loi précise donc que le système de radiodiffusion se compose d'éléments public, privé et communautaire.

Nous savons que l'élément privé n'a pas eu à se plaindre au cours des dix dernières années. Les radiodiffuseurs privés sont très fiers d'eux-mêmes et nous ont déjà fait part de leurs désirs de façon très efficace. On ne peut cependant pas en dire autant des éléments public et communautaire qui sont cependant les éléments dont le caractère canadien est le plus fort. On n'a qu'à ouvrir son téléviseur pour le constater.

La télévision de Radio-Canada, le principal élément public, s'est donné les priorités qu'il convient en matière de programmation publique canadienne, malgré le fait que son budget ait été réduit de 13,5 p. 100 entre 1991 et 2000. Radio-Canada continue d'investir dans la programmation canadienne et a même accru ses dépenses à ce titre de 19,5 p. 100.

Les radiodiffuseurs privés classiques—CTV, Global, CHUM—ont aussi augmenté leurs dépenses au titre de la programmation canadienne d'à peu près le même montant, soit 20,5 p. 100 de leurs recettes, qui ont cependant augmenté de 36,2 p. 100. Radio-Canada est donc le radiodiffuseur qui consacre le plus de fonds à la programmation canadienne, soit 78,8 p. 100 de ses recettes en 2000, ce qui représente une augmentation de 57 p. 100 par rapport à 1991. Les éléments public et communautaire de notre système connaissent tout de même des difficultés.

Le CRTC peut-il nous expliquer pourquoi les éléments public et communautaire sont moins importants qu'ils ne l'étaient? Pourquoi a-t-on favorisé la fragmentation, qui s'est produite au détriment de l'identité nationale? Pourquoi a-t-on aussi oublié les besoins spéciaux des régions? Notre comité parlementaire doit le savoir pour pouvoir corriger la situation.

M. David Colville: Ce qui explique en grande partie cette situation, en tout cas en ce qui concerne Radio-Canada, c'est sûrement une question de financement. Comme vous le savez, ce n'est pas le conseil qui détermine le budget de Radio-Canada.

Lorsqu'il a été question de renouveler les licences de Radio- Canada, comme vous le savez sans doute, nous avons tenu des audiences dans tout le pays et notamment dans les petites localités, et le public a certainement demandé à ce que la programmation des réseaux de télévision et de radio de Radio-Canada fasse une place aux émissions communautaires régionales. Nous avons tenu compte de ces questions dans le cadre du processus de renouvellement des licences.

• 1000

Nous avons aussi accordé des licences à un certain nombre de stations de radio du pays pour qu'elles répondent aux besoins particuliers de certaines collectivités. Je songe notamment à la station de télévision à laquelle nous avons accordé une licence à Cole Harbour, qui fait partie de Dartmouth, où se pose un problème particulier comme vous le savez. Je ne vois pas ce que je pourrais ajouter de plus. Peut-être pouvez-vous préciser votre question.

Mme Wendy Lill: Je voudrais savoir quelle est la conception que vous vous faites de l'équilibre à viser entre les éléments communautaire, public et privé du système de radiodiffusion. Je n'ai pas l'impression que l'élément public soit très solide et je dois dire que je ne sais même pas quel est l'élément communautaire. J'aimerais connaître quelle est l'importance de l'élément communautaire dans le système de radiodiffusion et je crois que le comité souhaite le savoir également. Combien d'employés compte cet élément? Quel est son auditoire? Combien de personnes regardent les émissions communautaires?

Le câblodistributeur de ma région a changé de mains plusieurs fois. Ce n'est d'ailleurs pas le seul. Les gens disent qu'il n'est pas accessible et ne répond pas aux besoins communautaires. Nous savons que les câblodistributeurs font des bénéfices énormes. Qu'en est-il de l'élément communautaire? Où est cette impression d'être maître de son destin que les gens veulent avoir en possédant leur propre chaîne? Au cours de cette étude, je vais surtout m'intéresser aux éléments communautaire et public du système. J'aimerais connaître votre position sur ces éléments.

M. David Colville: Comme la loi le propose—en fait l'exige—, il faut accorder de l'importance aux trois éléments. Radio-Canada joue un rôle capital à cet égard. Je crois que la décision que nous avons rendue il y a environ un an reflète cette préoccupation. Cette préoccupation est partagée par le public qui accorde aussi beaucoup d'importance à l'élément communautaire.

Comme je l'ai dit, nous examinons toute la question de la programmation communautaire et nous comptons sous peu diffuser un avis public qui portera non seulement sur les chaînes communautaires qui sont offertes par les câblodistributeurs, mais aussi sur la question de la programmation communautaire locale tant à la télévision qu'à la radio.

Pour ce qui est des chiffres, nous serions certainement prêts... S'il vous faut ces renseignements, nous pourrions certainement vous donner le nombre de stations et le type de programmation communautaire qu'elles offrent.

Andrée, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Andrée Wylie: Je pourrais ajouter qu'à mesure que la technologie le permet, on peut offrir de plus en plus de chaînes. Nous avons aussi accordé des licences numériques à plusieurs services de nouvelles régionales et d'affaires publiques qui ne les diffusent pas encore. Les radiodiffuseurs sont donc prêts à offrir ces services et les abonnés sont prêts à les acheter. Vous connaissez peut-être le service numérique de nouvelles régionales et d'affaires publiques de Toronto qui s'appelle CP24. À mesure que la technologie numérique évoluera, on pourra accroître le nombre de chaînes offrant de la programmation locale et régionale.

Le président: Très bien.

Mme Wendy Lill: Nous pourrions peut-être demander au conseil de nous fournir une bonne analyse du secteur communautaire et de répondre aux questions que nous lui poserons à ce sujet. Je vous remercie.

Le président: Si j'ai bien compris, monsieur Colville, vous avez offert de rassembler l'information que vous a demandée Mme Lill. Je vous demande de bien vouloir la transmettre à notre greffier.

M. David Colville: Certainement.

Le président: Je vous remercie. Si les membres du comité souhaitent obtenir des renseignements additionnels après cette séance, nous communiquerons avec vous. Je vous remercie.

• 1005

J'accorde de nouveau la parole à M. Abbott.

M. Jim Abbott: Monsieur Colville, vous avez dit que le CRTC n'exerçait pas de censure sur le contenu des émissions. Vous avez aussi dit que le CRTC comptait 400 employés. Pourriez-vous expliquer au comité ce que font ces employés?

À titre d'exemple, je suppose que certains de ces employés s'occupent de la microgestion des diverses stations de radio et de télévision puisque vous exigez que ces stations tiennent des registres indiquant les chaînes qu'elles offrent et leur capacité. Il serait utile que le comité comprenne le bien-fondé d'exigences qui peuvent paraître trop poussées. Je pense en particulier que nous devrions examiner une décision qui, à la lumière de ce que nous savons maintenant, est sans doute une décision malavisée du CRTC en ce qui touche la diffusion directe.

Compte tenu de l'importance toujours plus grande de l'Internet, nous serons de moins en moins en mesure d'exiger le respect d'un certain contenu canadien.

Prenez votre décision sur la diffusion directe. Il s'agit d'une arme à deux tranchants. Le fait qu'à Radium Hot Springs, en Colombie-Britannique, je peux regarder une chaîne de télévision de Halifax, et vice versa, rend inopérant les règlements qui s'appliquent aux radiodiffuseurs qui diffusent en direct. À mesure qu'augmentent le nombre de personnes qui sont abonnées à la télévision par satellite, les restrictions que vous imposées aux radiodiffuseurs qui diffusent en direct n'auront plus aucun sens. C'est une décision parallèle qui a été rendue par le CRTC.

Parlons maintenant de l'autre tranchant de cette arme.

Il y a une autre décision à laquelle je trouve à redire. Peut-être pourriez-vous nous donner des précisions à cet égard. Lorsque TFO a demandé la permission de diffuser au Québec, on a rejeté sa demande. J'ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi il ne serait pas dans l'intérêt des francophones du Québec de pouvoir avoir accès à un service en français qui serait offert par des francophones de l'extérieur du Québec. Ce qui est intéressant de signaler, c'est qu'en raison de la décision portant sur la diffusion directe, la population du Québec peut capter TFO et s'intéresse à sa programmation. Vous comprendrez donc que j'ai du mal à saisir sur quel raisonnement se fondent ces deux décisions du CRTC qui touchent l'une à la technologie et l'autre à l'accès.

J'ai réussi à poser beaucoup de questions en très peu de temps.

Le président: C'est justement ce que je me disais.

Monsieur Colville, je vous en prie.

M. David Colville: Je vais essayer d'y répondre.

Tout d'abord, nous serions heureux de vous fournir une description détaillée des principales unités de travail au conseil. Il convient de préciser au départ que nous avons deux grands secteurs, la radiodiffusion et les télécommunications. Nous ne parlons que de radiodiffusion aujourd'hui, mais nous pouvons vous faire parvenir cette information.

Vous avez ensuite parlé des registres et des rapports sur la capacité, dont vous avez dit qu'ils équivalaient à faire de la microgestion. Or, si nous avons des critères en matière de contenu canadien, il faut avoir des moyens de déterminer si les diffuseurs satisfont à ces critères. C'est à cela que servent les registres. Nous ne pouvons pas nous permettre avec l'effectif que nous avons de faire de la microgestion et d'aller vérifier ce que fait chaque station; nous faisons donc des vérifications au hasard. Les registres nous permettent de vérifier la feuille de route de la station dont la licence doit être renouvelée. Le plus souvent, il n'y a pas de problème.

Si nous demandons des rapports sur la capacité, c'est pour que nous puissions nous faire une idée de la progression de l'analogique vers le numérique de manière à pouvoir décider en toute connaissance de cause de l'opportunité d'attribuer des licences pour des nouvelles chaînes. Il faut tenir compte des considérations pratiques, à savoir quelle est la capacité existante et comment elle est répartie, pour pouvoir prendre des décisions relativement à l'attribution de licences.

• 1010

Il serait ridicule par exemple que nous exigions des distributeurs qu'ils offrent plusieurs centaines de chaînes sous forme numérique si la plupart d'entre eux n'ont pas la capacité de le faire. Si nous exigeons des rapports sur la capacité, c'est donc pour que nous soyons mieux au fait de la progression de l'analogique vers le numérique, de la rapidité avec laquelle elle se fait, de la répartition de la capacité, etc. Je le répète, c'est pour que nos règles correspondent à ce qui existe dans la pratique.

Pour ce qui est de la diffusion directe... encore là, il s'agit de trouver un juste milieu entre la décision d'autoriser les stations... il faudrait que les distributeurs satellitaires soient en mesure de répondre aux besoins propres aux marchés qu'ils servent. Ces distributeurs sont défavorisés par rapport aux câblodistributeurs en ce sens qu'ils n'ont pas de chaînes de télévision locales ni de stations locales dans un marché donné au pays, que ce soit à Halifax, à Cranbrook ou je ne sais trop où. Ils ont donc incorporé à leurs services un certain nombre de stations locales dans les différentes régions du pays pour essayer d'offrir aux consommateurs un bouquet de services qui puissent concurrencer ce qui est offert par les câblodistributeurs.

Cela nous amène à une autre question: Supposons que je sois un radiodiffuseur local et qu'une station locale étrangère vienne pénétrer mon marché. L'arrivée de cette station étrangère soulève des questions de droits relativement à la programmation. Comme vous le savez, nous avons essayé de régler les problèmes de ce genre en protégeant les diffuseurs locaux grâce à nos règles sur la substitution de signaux identiques par rapport aux émissions américaines.

La diffusion directe exige, je le répète, que nous essayons de trouver un juste milieu entre autoriser les distributeurs satellitaires à distribuer suffisamment de chaînes pour qu'ils puissent être concurrentiels avec les câblodistributeurs et, par ailleurs, répondre aux souhaits des téléspectateurs qui veulent avoir un éventail de choix et, d'autre part, mettre en place un régime qui assure une protection au diffuseur local pour empêcher que ses émissions ne puissent être captées en direct. Nous continuons donc à nous pencher sur ces questions, notamment sur la question de TVO et TFO.

J'ai une certaine expérience à ce chapitre étant donné que, quand j'étais autrefois au gouvernement de la Nouvelle-Écosse, nous devions essayer de trouver des moyens d'assurer la viabilité de notre chaîne éducative provinciale. Nous nous étions interrogés à l'époque sur l'opportunité de permettre que TVO soit diffusée en Nouvelle-Écosse. Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse était d'avis que si c'est ce que voulaient les câblodistributeurs et les téléspectateurs, il n'y avait pas de mal à ce que TVO—à l'époque, le service était un service de langue anglaise—soit diffusée chez nous. Les règles du CRTC exigeaient toutefois que la chaîne éducative locale bénéficie d'une distribution prioritaire. Nous étions d'avis qu'il n'y avait pas d'inconvénients à ce que TVO soit distribuée chez nous, mais il ne fallait pas que la chaîne ontarienne se voit accorder une place prioritaire sur le câble, car cette place devait être réservée à notre chaîne à nous, celle de la Nouvelle-Écosse.

Nous étions favorables à la diffusion de TFO au Québec; la question qui s'est posée était de savoir si la distribution de cette chaîne serait obligatoire ou non.

Mme Andrée Wylie: Monsieur Abbott, TFO est disponible au Québec depuis longtemps si les câblodistributeurs... La demande présentée au conseil visait à rendre la distribution de la chaîne obligatoire et payante. Il faut se reporter à la loi.

Le Parlement autorise le conseil à délivrer des licences à Sa Majesté en droit d'une province, sauf si la chaîne de télévision visée est une chaîne éducative indépendante. Chaque province peut donc avoir une chaîne semblable. Le problème qui se posait a trait à la distribution payante de TFO au Québec lorsqu'il s'agit d'une chaîne provinciale. Les câblodistributeurs peuvent cependant offrir cette chaîne depuis longtemps au Québec.

M. Jim Abbott: J'aimerais savoir si la distribution de la télévision autochtone est obligatoire au Québec?

Mme Andrée Wylie: Elle est obligatoire dans l'ensemble du pays, à quelques exceptions près dans le cas des très petits systèmes qui ont une capacité limitée. Il y a une composante francophone à la télévision autochtone.

Le président: Avant que je n'accorde la parole à M. Bonwick, j'aimerais signaler aux membres du comité que les représentants du CRTC ont gentiment accepté de revenir jeudi prochain lorsque nous discuterons du contenu canadien. Nous accueillerons un certain nombre de témoins dont des radiodiffuseurs francophones ou canadiens, Téléfilm Canada, le Conseil des arts de Toronto et le BCPAC, c'est-à-dire le Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens qui relève du ministère du Patrimoine canadien. Le CRTC participera donc à la séance qui portera sur le contenu canadien. Je tenais à vous le signaler.

• 1015

Monsieur Bonwick, vous avez la parole.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

J'aimerais d'abord m'excuser auprès de nos témoins d'être arrivé en retard. Quelqu'un devait venir me chercher ce matin à la maison et ne l'a pas fait. J'ai dû attendre un taxi.

J'ai pu lire votre déclaration liminaire pendant que d'autres membres du comité vous posaient des questions. Je trouve assez amusant le fait que les gouvernements créent des conseils et des agences autonomes, mais remettent en question cette autonomie lorsque ces organismes rendent des décisions qui ne leur plaisent pas.

Monsieur le président et chers collègues, j'aimerais faire quelques remarques et j'essaierai de glisser une question à la fin de celles-ci. Si vous devez le faire, vous pourrez répondre à ma question jeudi prochain ou par écrit.

Je m'élève contre les propos de M. Abbott qui parlait de «valeurs morales et de censure». Les cheveux me dressent sur la tête lorsque j'entends quelqu'un prononcer ces mots, et en particulier dans ces édifices.

Il a dit qu'on peut peut-être lui reprocher d'être un vieux jeu parce qu'il a des valeurs morales et je crois qu'il a ainsi insulté la génération actuelle en laissant entendre que ses valeurs morales ne sont pas aussi élevées que celles de la génération précédente. Je ne pense certainement pas comme lui.

Il a utilisé le mot «censure». Comme nous avons pu le constater à d'autres occasions et comme nous le constaterons sans doute dans l'avenir, sa façon de percevoir les choses n'est pas celle de la majorité des membres du comité et peut-être pas non plus celle de la majorité des Canadiens. Je m'inquiète toujours, et à juste titre, lorsque j'entends quelqu'un utiliser ce mot.

Je voulais m'assurer d'avoir la définition de ce mot sous les yeux pendant qu'il parlait. Pour la gouverne de M. Abbott et de tous ceux qui suivent nos délibérations ou qui liront le compte rendu de la séance, on peut parler de censure lorsqu'un fonctionnaire est autorisé à examiner des documents, des films, des nouvelles, etc. avant qu'ils ne soient rendus publics pour en extirper les parties qui seraient obscènes ou qui constitueraient une menace à la sécurité.

Sauf le respect que je dois à mon collègue, ce n'est pas ce que vous faites. Il utilise le mot mal à propos. Il risque d'induire en erreur les téléspectateurs. Quant à moi, je préférerais que vous cherchiez le plus possible à favoriser la liberté d'expression au lieu de faire le contraire comme le souhaiteraient certains de mes collègues. Je ne partage pas leur avis sur cette question.

Il y a aussi la question du choix et du nombre de chaînes que vous devriez approuver. Je pense que le monde industrialisé—et quant à cela, le Canada—veut davantage de choix. S'il y a sans doute cinq ou six chaînes que toutes les personnes dans cette salle regardent, il est fort probable aussi qu'il y ait quatre ou cinq chaînes qui leur sont propres, ce qui porte à 400 ou 500 le nombre de chaînes qui sont regardées par le petit nombre de gens qui se trouvent ici.

Je pense aussi que si un entrepreneur privé a investi de l'argent pour monter une nouvelle chaîne et pour présenter une demande au conseil, il a sans doute fait une étude de marché. À mon sens, il vaut mieux offrir plus de chaînes aux gens que moins.

J'aimerais aussi souligner le fait que certains, comme ma collègue du NPD, semblent considérer que faire des bénéfices est obscène. Je crois, madame Lill, que vous avez parlé «d'énormes bénéfices». Si nous voulons étudier l'industrie, et en particulier l'élément privé, je pense qu'on devrait plutôt s'intéresser à la notion de rendement. Il faudrait comparer les investissements consentis par le secteur privé au taux de rendement sur ces investissements. Je pense qu'on cesserait alors de parler de «bénéfices énormes».

• 1020

Le président: [Note de la rédaction: Inaudible]

M. Paul Bonwick: La censure est une question qui suscite des réactions émotives. Je m'inquiète vraiment quand un gouvernement commence... Si l'histoire nous a enseigné quoi que ce soit, c'est certainement que les gouvernements devraient recourir le moins possible à la censure.

M. Jim Abbott: Je me demande si vous avez une question à poser au témoin.

M. Paul Bonwick: Je voulais répliquer à vos propos, monsieur Abbott. Je crois que je peux utiliser le temps qui m'est imparti comme je le juge bon.

Voici donc la question que je voudrais vous poser. J'espère que vous n'en avez pas parlé dans votre déclaration préliminaire. Quels outils ou quels changements voudriez-vous que nous proposions dans notre rapport pour aider le conseil à remplir son mandat dans cinq ans? Je vous remercie.

Le président: Je suppose que c'est une question à laquelle nos témoins voudront réfléchir et nous répondre par écrit.

M. Paul Bonwick: Ils peuvent y répondre par écrit s'ils le souhaitent, mais ils peuvent aussi le faire tout de suite.

M. David Colville: Je pense que je préférerais réfléchir à la question et vous répondre par la suite. Nous n'avons pas beaucoup réfléchi aux modifications qu'il serait nécessaire d'apporter à la loi.

Comme je l'ai dit plus tôt à M. Harvard, les défis auxquels nous faisons face sont de savoir comment assurer la présence canadienne à mesure que la technologie évoluera. Certains ont mentionné l'Internet et d'autres technologies. Je ne suis pas convaincu cependant que l'Internet remplacera la télévision classique et que du jour au lendemain on se mettra à regarder les émissions à l'Internet ou à passer par un serveur situé à Los Angeles pour visionner des films. Je ne suis pas sûr que la technologie le permettra et je ne suis pas sûr non plus que c'est nécessairement ce qui va se produire.

On a aussi dit que la radio allait signifier la disparition des disques, que l'apparition de la télévision entraînerait le déclin de la radio, que le câble remplacerait la télévision en direct et que les satellites se substitueraient à tout ce que je viens de mentionner. Or, tous ces modes de distribution continuent d'exister et se sont adaptés aux besoins du marché.

Quant à la question du juste milieu qu'il va nous falloir trouver—pour répondre à votre allusion à la question des bénéfices—de façon à continuer d'avoir de bons intervenants solides sur le marché susceptibles de consacrer les ressources nécessaires à la production d'émissions canadiennes de bonne qualité dans un marché comme celui du Canada; d'avoir des intervenants solides tout en préservant la diversité de pensée et d'opinion que nous souhaitons maintenir sur le marché—, voilà autant de défis qu'il va nous falloir relever, je pense. Nous pouvons nous focaliser sur certains problèmes plus précis, mais de façon générale, ce genre de principes—encore une fois, cela me ramène à la question que m'a posée M. Harvard; nous n'avons peut- être pas, dans notre exposé, passé assez de temps à discuter de ce genre de choses, mais nous avons sans nul doute...

M. Paul Bonwick: Monsieur le président, je demanderais à nos témoins d'y réfléchir pendant quelque temps et de nous communiquer les idées et suggestions qu'ils souhaitent nous voir inclure dans notre rapport.

M. David Colville: Ce que je dirais, c'est qu'il important, selon moi... On m'a demandé de faire un discours à l'école Kennedy de Harvard il y a environ un an et demi, et j'ai fait des remarques au sujet des caractéristiques distinctes ou de différences qui existent entre le système de réglementation américain et celui du Canada. J'ai signalé trois choses, et notamment—ce qui était la plus importante à mes yeux—le fait que la législation ne devienne pas trop normative.

Je peux citer le secteur des télécommunications comme exemple car je connais mieux le système américain. Lorsque les Américains ont adopté leur loi sur les télécommunications en 1996, ils ont non seulement donné un objectif stratégique général à la FCC en lui demandant d'atteindre cet objectif, mais ils lui ont également imposé la façon de l'atteindre—ce qui, à mesure que le marché a évolué, a rendu difficile toutes mesures d'adaptation car la loi finit par être trop spécifique et qu'il était difficile de la modifier.

Le président: Vous pourriez peut-être nous faire parvenir le texte de ce discours, par le biais de nos attachés de recherche.

M. David Colville: En fait, j'ai parlé sans notes de cette question, car nous nous étions lancés dans une discussion à ce sujet avec la classe à laquelle je m'adressais.

Le président: Je pensais simplement qu'il serait bon de donner à d'autres membres du comité la possibilité de poser des questions, et il serait donc très utile pour nous d'obtenir tout ceci par écrit, si possible.

M. David Colville: Bien, nous allons réfléchir à la question et nous vous ferons part du fruit de nos réflexions.

Le président: Merci beaucoup.

• 1025

[Français]

On passe d'abord à M. Duplain, puis à Mme Gagnon.

Monsieur Duplain, la parole est à vous.

M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): Je tiens à vous féliciter et à vous remercier d'être ici aujourd'hui. Ce n'est pas toujours facile, je crois, d'oeuvrer dans votre domaine. On vous critique plus souvent qu'on ne souligne vos bons coups. Dans nos régions, on entend aussi très souvent la critique qui se fait. Je m'aperçois que l'étude du système de la radio et de la télédiffusion est un monde en soi. C'est quelque chose de très complexe.

Je veux d'abord aborder la question de la télévision communautaire comme l'a aussi fait Mme Lill. Certaines personnes m'ont approché pour partager avec moi leurs préoccupations par rapport à la télévision communautaire.

Vous dites dans votre document: «...il est prioritaire d'assurer que le système de radiodiffusion reflète les préoccupations locales et régionales...». Vous parlez aussi de la création de voix nouvelles et de choix nouveaux, particulièrement à la télévision. Vous dites aussi que vous travaillez présentement à l'élaboration de nouvelles politiques pour les services communautaires. Dans les années antérieures, certaines lois sont tombées. Je ne reviendrai pas sur tout ce qui a été fait par rapport à la télévision communautaire et sur le fait que les câblodistributeurs ont été relevés de certaines de leurs obligations.

Vous êtes sans doute au courant du fait que les fusions communautaires ont réduit le nombre d'heures de programmation réservées à la télévision communautaire. Les groupes maintiennent que ceci n'est pas le cas parce que la programmation est faite en région et est distribuée à différentes télévisions communautaires. Toutefois, le problème qu'il commence à y avoir, c'est que ceci ne reflète plus la programmation vraiment locale.

Je me permets de vous donner un exemple. J'ai la chance de vivre dans une ville où il y a une télévision communautaire vraiment dynamique. Les personnes qui y travaillent veulent offrir une certaine programmation et elles ont la chance d'avoir un câblodistributeur qui les aide beaucoup. C'est bien d'avoir une télévision communautaire qui reflète vraiment la localité. Je crois bien que ma télévision communautaire n'est pas la seule au Canada à être ainsi. Il y en a quand même des dizaines.

Toutefois, ces personnes ont certaines préoccupations. Elles se demandent ce qui se passerait si le câblodistributeur décidait de vendre son entreprise. Elles se demandent qui achèterait l'entreprise et ce qui se passerait dans le futur, et elles sont inquiètes. Elles sont préoccupées pas leur manque de moyens.

Depuis quelque temps, on me fait surtout part du fait que l'on n'est pas sûr que le CRTC soit vraiment à l'écoute des demandes et des préoccupations des groupes oeuvrant à la télévision communautaire. On s'interroge beaucoup à ce sujet. On me parle beaucoup de cela. Les gens sont préoccupés et ils ont besoin de parler. Ils veulent vraiment que la télévision communautaire conserve sa programmation vraiment locale.

J'aimerais vous entendre là-dessus surtout en raison du fait que vous parlez de nouvelles politiques pour les services communautaires.

Mme Andrée Wylie: Nous reconnaissons, monsieur Duplain, le fait que ces revendications sont très importantes au Québec parce qu'il s'est développé au Québec un système de télévision communautaire différent et possiblement un peu plus autonome qu'ailleurs au Canada. Toutefois, il y a des revendications qui se font entendre partout au Canada au sujet du milieu local. C'est une question sur laquelle nous nous penchons. Vidéotron a justement changé son approche quant au Canal Vox. Quant à la disparition partielle de certains groupes communautaires qui participaient davantage auparavant, nous n'avons pas de revendications à cet égard dans les secteurs où se trouve COGECO. C'est vraiment une question sur laquelle nous nous penchons. Nous nous sommes penchés sur cette question lors de l'achat de Vidéotron par Quebecor.

Un moratoire sur les changements est présentement en vigueur et le demeurera jusqu'à ce que nous ayons statué sur la possibilité d'effectuer un recul vers une télévision plus communautaire plus accessible. Est-ce que la télévision communautaire restera comme elle l'est présentement ou si elle reviendra à ce qu'elle était auparavant dans tous les secteurs du Québec? Cela reste à voir.

C'est une question qui nous préoccupe, et vos concitoyens nous gardent bien au courant des problèmes qu'ils ont à ce sujet.

Le président: On passe maintenant à Mme Gagnon et ensuite à Mme Lill.

Mme Christiane Gagnon: Je vous remercie, monsieur le président.

• 1030

J'ai plein de questions au sujet d'Internet, qui portent sur le fait que vous avez décidé de ne pas réglementer. Par exemple, n'avez-vous pas peur de manquer le bateau si vous attendez de voir l'impact que ça pourrait avoir sur le contenu canadien? Toutefois, j'aimerais plutôt poser des questions qui portent sur autres choses.

Vous avez dit que vous vouliez accroître, dans la politique du CRTC, la disponibilité de services spécialisés dans la langue officielle et dans la langue de la minorité—c'est une bonne chose—et aussi des services aux collectivités multiculturelles et multilingues du Canada.

On sait que depuis la vente d'Astral, une chaîne culturelle à Montréal—je pense qu'il y a eu deux nouveaux propriétaires—, la diffusion des commerciaux se fait exclusivement en anglais. Ça nous vient de Toronto. C'est un accroc aux deux langues officielles. Bien souvent, les immigrants qui s'expriment par la voie de ce canal le font soit dans leur langue, soit en anglais. C'est compréhensible, car c'est un service qu'on leur offre. Cela veut donc dire que l'on ne s'exprime pas en français à cette chaîne. Quels mécanismes de contrôle pouvez-vous appliquer dans une situation qui, comme celle-ci, ne respecte pas un des objectifs du CRTC, soit celui du respect des deux langues officielles?

C'est un peu difficile de voir comment vous arrivez, par exemple, à exercer un certain contrôle quant aux objectifs que vous poursuivez, que ce soit celui portant sur la diversité des voies ou celui portant sur la qualité de la langue. C'est assez difficile de voir comment vous mettez en place un mécanisme de contrôle. Avez-vous assez de ressources pour assurer le suivi une fois que vous avez accordé une licence et que l'on ne se conforme pas aux obligations de la licence?

J'ai une autre série de questions.

Vous avez dit dans votre présentation que vous aviez des préoccupations d'ordre social. Ce sont des objectifs poursuivis par le CRTC. Un de ces objectifs porte sur la transparence. Je voudrais savoir ce que vous entendez par transparence. Dans les différents mémoires qui nous ont été présentés, on voit que la transparence est une des préoccupations que plusieurs organismes partagent. Les gens nous ont écrit à ce sujet-là.

Commençons d'abord par le conseil d'administration. Personnellement, je ne sais pas d'où proviennent les gens qui forment ce conseil. J'aimerais donc avoir un aperçu—vous n'êtes probablement pas en mesure de me le fournir ce matin—de la composition du conseil. Je vous demande cela parce qu'on nous a dit qu'il faudrait qu'il y ait beaucoup plus d'ouverture, qu'il ne faudrait pas que ce soient des nominations politiques qui se fassent. Si, par exemple, on ne tend pas vers une plus grande démocratisation des gens qui doivent siéger au conseil d'administration afin de permettre beaucoup plus de transparence... On sait que ce qui est arrivé à la SRC dans le cas de M. Lester. Quand on est à la solde d'un parti politique ou à la merci d'une nomination, on sait qu'on est redevable. J'aimerais donc savoir ce que vous entendez par transparence.

En tout cas, je compte bien suivre ce dossier. Je pense qu'il est temps d'avoir un échantillonnage de gens qui proviennent du milieu de la radiodiffusion. Je ne juge pas les gens. Ce sont seulement des questions que je vous soumets parce qu'elles ont été soulevées dans différents mémoires où il était question de la transparence au CRTC.

Je vous remercie.

Mme Andrée Wylie: Évidemment, les nominations ne découlent pas du CRTC. Nous ne nous nommons pas l'un et l'autre. Pour nous, la transparence, c'est notre capacité de déployer des efforts et d'utiliser les ressources que nous avons afin de permettre au public de participer au système de façon ouverte.

Tous les jours, nous recevons un nombre très élevé de demandes de renseignements et de plaintes auxquelles nous répondons. Je cherche justement le nombre précis, car celui-ci m'échappe. On va peut-être pouvoir me le fournir sous peu. Bon, voilà. Il y en a 250 par jour.

• 1035

Nous utilisons nos ressources et faisons beaucoup d'efforts pour que notre site web soit facile d'accès. Nous dépensons beaucoup d'énergie et de ressources pour organiser des audiences publiques et des consultations informelles quand il est question de politiques ou, par exemple, du renouvellement du permis de la SRC. Nous allons partout au Canada et nous tenons des forums informels où les gens peuvent venir nous parler de leurs difficultés, etc.

Voilà comment nous concevons ce concept de transparence: que nos processus soient publics, que nous soyons accessibles et qu'il soit facile pour les gens de nous parler. Il s'agit aussi de faire des efforts pour que nos décisions soient plus lisibles et moins difficiles à décortiquer. Il faut aussi fournir des sommaires qui font en sorte que les gens puissent mieux comprendre où nous allons; nous faisons des efforts pour que notre langage soit plus facile à décortiquer. Voilà notre vision de ce que veut dire la transparence. Nos modes de fonctionnement et notre processus décisionnel doivent favoriser et rendre plus facile la participation du public.

Mme Christiane Gagnon: [Note de la rédaction: inaudible] ...inventer des mécanismes de vérification du respect des langues officielles dans le cas de la chaîne multiculturelle.

Le président: Madame Wylie, pouvez-vous répondre à cette question?

Mme Andrée Wylie: Je ne suis pas certaine de comprendre à quel service vous...

Mme Christiane Gagnon: [Note de la rédaction: inaudible] ...Montréal qui était contrôlé par Astral et qui a, depuis, été vendu. Ces critiques m'ont été transmises parce que je suis responsable du patrimoine et on m'a demandé de vérifier. Il semble que les émissions proviennent de Toronto et qu'il y a beaucoup de publicité de langue anglaise qui est diffusée sur cette chaîne multiculturelle de Montréal.

Mme Andrée Wylie: Voulez-vous parler de CKMI, qui est une station conventionnelle? Si je comprends bien, votre inquiétude vient du fait qu'il y a plus de publicité en anglais.

Mme Christiane Gagnon: Certaines émissions sont faites dans une langue étrangère, mais surtout en anglais.

Mme Andrée Wylie: Je m'excuse. Il n'est pas question de CKMI, mais de CJMT. Il s'agit de cette chaîne multiculturelle. Lors de l'attribution de leur permis, nous leur avons imposé des conditions au chapitre de la langue. Cette chaîne diffuse en français, en anglais et en d'autres langues, et ils doivent respecter certaines conditions sur l'utilisation de ces langues.

Mme Christiane Gagnon: J'aimerais que vous m'expliquiez de quelle façon vous vous assurez du respect des conditions que vous posez lorsque vous accordez des permis. Quand, par exemple, vous parlez d'une proportion de 65 p. 100 de français, comment faites-vous pour savoir si ce chiffre est exact? Quels sont vos mécanismes de contrôle?

Le président: Pourriez-vous procéder plus rapidement, s'il vous plaît.

Mme Christiane Gagnon: Je sais, mais c'est parce que...

Le président: D'accord, mais je crois qu'elle a compris la question.

Mme Andrée Wylie: Nous avons parlé plus tôt des rapports que les radiodiffuseurs doivent nous fournir, qui doivent refléter ce qu'ils font. Nous pouvons ainsi savoir s'ils respectent la proportion de 65 p. 100 de français ou non. Nous avons utilisé des mécanismes, dans le passé, pour les mettre au pas quand ils ne respectaient pas les règles. Alors, nous savons ce qu'ils diffusent. Ils doivent nous présenter un rapport.

Le président: Et s'ils ne respectent pas les conditions?

Mme Andrée Wylie: Normalement, s'ils ne respectent pas les conditions, nous ne leur accordons qu'un renouvellement à court terme et nous assurons aussi un suivi beaucoup plus précis.

M. Blais aurait peut-être quelque chose à ajouter.

Mme Christiane Gagnon: Finalement, on a beau contrevenir à n'importe quel règlement, il semble qu'il n'y ait pas vraiment de contrôle. Si on a un tel genre de processus, on doit menacer de retirer le permis ou d'appliquer une quelconque sanction. Je me demande donc quel genre de contrôle vous exercez. Vous semblez dire...

Le président: Je pense que la question est bien claire.

• 1040

Deux autres personnes ont demandé à poser des questions. Il faut que nous quittions la salle à 11 heures. Je suggère que M. Blais nous fournisse un document expliquant exactement quels sont ces moyens de contrôle et quelles sont les sanctions potentielles lorsqu'il y a non-respect des critères.

Mme Christiane Gagnon: Peut-on y inclure des exemples?

Le président: Si c'est possible, oui.

[Traduction]

Madame Lill.

Veuillez m'excuser, madame Lill, j'aimerais me réserver quelques instants pour poser moi-même une question.

Mme Wendy Lill: J'aimerais faire une remarque au sujet de votre intervention. Vous dites que le conseil essaye de trouver un juste milieu entre les besoins de l'industrie et les préoccupations du public face à la concentration croissante de la propriété des médias, entre l'intérêt d'avoir des intervenants solides qui créent plus d'émissions canadiennes et le besoin d'entendre exprimer divers points de vue. J'aimerais comparer cette observation à une remarque faite par le propriétaire de CanWest Global:

    À l'avenir, les journalistes, en se levant, vont rédiger un texte pour le Web, écrire un article, prendre leurs caméras, faire un reportage et préparer un rapport pour la télévision ainsi qu'un vidéoclip pour le Web. Nous avons fait un bon de géant dans le produit que nous offrons aux annonceurs et avons mis au point une énorme machine de production de contenu créatif.

Voilà encore une fois le vilain mot «énorme».

Cela me donne l'impression qu'il n'y a qu'une seule «voix», une seule paire de yeux. Ce n'est pas ce que j'appelle la diversité. J'essaie simplement de faire la quadrature du cercle autour du terme diversité, car à mon avis, la convergence des médias dont nous sommes témoins ne favorise pas la diversité. Je vois plutôt une production de contenus multimédias et polyvalente. Mais où est la diversité? Où sont les expressions d'opinions divergentes et stimulantes dont nous avons besoin pour survivre et préserver une culture nationale?

Avez-vous simplement baissé les bras devant ce problème de la convergence des médias? Je vous saurais gré de m'expliquer comment vous essayez de résoudre cette question très cruciale de la diversité.

M. David Colville: Lorsque nous parlons de cette question de la prétendue convergence entre les sociétés de télécommunication, les journaux et la télévision, nous parlons en grande partie de trois joueurs présents sur le marché. Or, il est un fait que ce sont trois importants intervenants nationaux, mais ce sont avant tout trois joueurs. Il y a donc trois voix différentes, au moins trois. Et il y a beaucoup d'autres entités auxquelles nous avons accordé des licences sur le marché intérieur, qu'il s'agisse de stations de radio, d'autres stations de télévision, de chaînes spécialisées, ou autres. Il y a un grand nombre de titulaires de licences et de nombreux intervenants sur le marché.

Je ne peux pas donner mon avis sur ce qu'a pu déclarer M. Asper lors d'un discours, où il a présenté les opinions de sa société. Toutefois, je pense que nous avons essayé de régler ce problème, comme nous l'avons signalé dans notre allocution d'aujourd'hui, et de faire la part des choses entre, d'une part, le fait de permettre... Nous ne savons pas quelle forme va prendre cette convergence. Personne ne le sait, je pense. Vous pourriez poser la question à M. Monty, M. Péladeau ou M. Asper. Je ne pense pas qu'ils sachent avec certitude ce que nous réserve cette convergence ou d'où vont venir en grande partie les économies si l'on gère ces entreprises selon ce principe.

Nous voulions essayer de leur laisser la latitude suffisante pour gérer efficacement ces services. D'une part, tout en permettant l'expression de points de vue divers, surtout pour les nouvelles, de façon à ce que les Canadiens d'un bout à l'autre du pays puissent avoir des points de vue différents dans les bulletins de nouvelles. Cela me ramène à la réponse que la vice-présidente, Mme Wylie, a donné plus tôt à Mme Gagnon au sujet de la diversité d'opinions à la radio.

Même à Jonquière, où l'industrie de la radio a connu de nombreuses difficultés au début des années 90, lorsque nous avons permis aux stations de se regrouper pour commercialiser conjointement leurs services, nous avons néanmoins insisté pour qu'elles exploitent des services de nouvelles distincts, car nous sommes convaincus que la diversité d'opinions est importante sur le marché. Lorsque nous avons dit que nous allions examiner la question de la convergence, c'est le juste milieu que nous essayons d'atteindre: veiller à ce que ces entreprises puissent quand même réaliser des économies tout en garantissant la diversité d'opinions.

Je ne sais pas ce que nous réserve à l'avenir la question de la convergence. Je le répète, cela répond aux questions de M. Harvard et de M. Bonwick, et l'un des plus gros enjeux de demain consistera pour nous à trouver ce juste équilibre, dans notre pays, entre la présence d'intervenants solides sur un marché plus mondialisé qui sera inévitable pour nous, et la place à ménager à cette diversité d'opinions et d'expressions. Il s'agira dans certains cas de trouver un juste milieu entre ces intervenants. Dans d'autres cas, il faudra accroître le nombre de stations communautaires sur le marché. De toute façon, cela va constituer pour nous un défi permanent.

Andrée, vouliez-vous ajouter quelque chose?

• 1045

Mme Andrée Wylie: Madame Lill, nous avons également essayé de mettre en place certaines garanties. Comme vous le savez, elles sont jugées assez strictes dans le cas de Québécor. Certains d'entre vous estiment peut-être que nous outrepassons notre mandat lorsque nous voulons veiller à ce que le regroupement des entreprises n'ait pas des conséquences excessivement négatives pour un petit marché comme le nôtre. Au Canada anglais, nous avons mis en place des mesures de protection—j'ai parlé plus tôt de la transparence. L'une de ces mesures prévoit la constitution d'un comité indépendant, auquel les gens qui estiment qu'un certain comportement est inadmissible par rapport aux promesses qui leur ont été faites peuvent déposer des plaintes, et les radiodiffuseurs doivent tous les ans faire un rapport sur les résultats de l'utilisation de ce comité.

Voilà les garanties actuelles qui, à notre avis, devraient au moins permettre de faire comprendre aux intéressés que nous allons surveiller les répercussions de cette concentration. Bien entendu, et vous le savez bien, certains prétendent que le regroupement permet en fait une plus grande diversité, plus d'articles différents, une plus grande capacité pour ce qui est du journalisme d'enquête. D'après ce que nous savons, il y a aussi du bon dans tout cela.

Le président: Madame Hinton, vous avez la parole.

Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président. Votre exposé a été des plus intéressant et j'ai vraiment hâte à jeudi prochain où j'aimerais aborder d'autres questions.

J'ai une remarque à faire, monsieur Colville. Nous ne sommes pas en train d'évoluer vers l'ère du numérique; nous y sommes déjà et ce, depuis un certain nombre d'années. Cela va avoir une énorme incidence sur les émissions que regardent les Canadiens.

Il y a en fait un aspect qui a été complètement passé sous silence, celui de la nature humaine. Nous n'en avons pas tenu compte. Certains sont préoccupés par la censure. Mon collègue a fait certaines observations au sujet des chaînes qui lui paraissent choquantes, et je comprends son raisonnement. Il y a eu ensuite les remarques de M. Bonwick qui s'est attaqué à cette prise de position, ce qui m'a amusée, en fait, mais aucun des deux n'a vraiment raison.

Lorsque j'ai déménagé à Ottawa, au début, je n'avais pas la télévision. Lorsque je l'ai eue, je n'avais que le service de base. Le premier soir, j'avais branché la bouilloire pour me faire une tasse de thé—je comptais m'asseoir et relaxer—et j'étais en train de changer de chaîne. Je suis allée débrancher la bouilloire et préparer mon thé. À mon retour, il y avait des scènes de nus présentées par la chaîne sur laquelle j'étais tombée. J'étais tout à fait sidérée. C'était la chaîne française. Lorsque vous dites que tout cela est très chaste... C'était la chaîne française et, soyons honnêtes, une phrase comme «oui, c'est bon,» n'a pas besoin de traduction. J'ai pu comprendre l'essentiel de ce qui se passait. J'ai donc immédiatement éteint la télévision. Ce n'est pas ce que je souhaite regarder, mais j'admets que certaines personnes aiment ce genre d'émission. Il faut donc des options diverses.

J'aimerais me concentrer sur deux remarques que vous faites à la diapositive 10. Vous dites que «les avantages de transfert sont consacrés aux nouveaux talents canadiens» et «se sont chiffrés à 51,4 millions de dollars en date de juillet 2001, depuis leur adoption en 1998». Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et me citer un exemple? Quels sont les talents que nous exploitons? Comment utilisons-nous ces fonds pour développer des talents canadiens?

Le président: Madame Hinton, pourquoi ne faites-vous pas...

Mme Betty Hinton: Ma deuxième question porte sur la diapositive 11, où vous dites que «grâce à cette exigence, plus de temps d'antenne est accordé aux productions canadiennes, ce qui crée également de nouvelles possibilités pour la diffusion de dramatiques canadiennes de qualité». Pourriez-vous me citer un exemple de ces dramatiques canadiennes de qualité qui ont profité de cet avantage?

M. David Colville: Je regrette, pourriez-vous revenir à la première question et me la répéter? Je n'ai pas entendu le début.

Mme Betty Hinton: Ma remarque vous a pris au dépourvu, n'est-ce pas?

M. David Colville: Oui, j'étais en pleine réflexion.

Mme Andrée Wylie: Nous voulons savoir s'il s'agissait d'hommes ou de femmes.

Mme Betty Hinton: Ne nous lançons pas là-dedans.

Je vous pose une question au sujet des avantages de transfert qui sont consacrés aux nouveaux talents canadiens. Pouvez-vous me donner un exemple de nouveaux talents canadiens qui ont profité de ce financement?

M. David Colville: Il s'agit des avantages que nous exigeons en échange des transactions, si je ne m'abuse. Dans le cas de la transaction entre BCE et CTV, l'avantage se chiffrait à plus de 200 millions de dollars, des fonds supplémentaires injectés dans le système par BCE et qui, autrement, n'auraient pas été investis pour financer la production de nouvelles émissions canadiennes. C'était une de nos exigences relatives à cette transaction.

• 1050

Je n'ai pas en tête d'émissions précises à vous citer. Nous pourrions peut-être vous fournir certains exemples, mais je n'ai pas...

Je donne la parole à Andrée.

Mme Andrée Wylie: Sauf erreur, la diapositive 10 porte sur les émissions de radio. Le développement des talents canadiens est la promesse qui est faite lorsque nous accordons de nouvelles licences et lors du renouvellement de licences, comme je l'ai expliqué plus tôt ce matin.

Par exemple... chacun cotiserait soit à Musique Action ou à FACTEUR, qui font la promotion des nouveaux talents. Il s'agit d'une organisation qui accorde un financement à des artistes en herbe pour leur permettre de produire leur premier disque compact. Tous les ans, cette production est abondante. Nous permettons également que des fonds soient versés à l'échelle locale, si c'est ce que préfère le secteur de la radio, et ces fonds vont soit à des bourses ou à la promotion d'artistes canadiens, surtout de nouveaux artistes prometteurs, et non pas ceux qui ont réussi. Cela aide certains à percer.

Depuis 1998, nous avons consacré quelque 50,4 millions de dollars à ce genre d'activité. Je ne sais pas si ces exemples vous suffisent.

Mme Betty Hinton: Autrement dit, si un artiste canadien... disons que nous avons affaire à une chanteuse prometteuse, une Shania Twain en herbe. Ce fonds serait versé à Shania Twain pour qu'elle démarre?

Mme Andrée Wylie: Normalement, à partir du moment où Shania Twain est reconnue, elle n'est plus admissible. Ce fonds sert à aider les nouveaux talents. Tous les six mois, il y a un assez grand nombre de disques compacts produits par ces artistes et on encourage leur diffusion à la radio. C'est comme ça qu'on obtient une Céline Dion ou une Shania Twain. C'est un début.

Mme Betty Hinton: Cela répond à une de mes questions.

Deuxièmement, vous avez dit que l'exigence d'une programmation prioritaire a ouvert plus de temps d'antenne à des productions canadiennes et établi de nouveaux encouragements pour que soient diffusées des dramatiques canadiennes de qualité. Pouvez-vous me donner un exemple d'une dramatique canadienne de qualité qui a été aidée ainsi?

Mme Andrée Wylie: Vous connaissez sans doute Da Vinci's Inquest. Je ne sais pas s'il y a des scènes de nudité là-dedans, mais la production de ce genre d'émission coûte très cher. Il est difficile de produire des émissions qui vont attirer les téléspectateurs quand la programmation américaine, qui dans bien des cas... Dans l'ensemble, une heure de programmation américaine bénéficie du double de l'argent que nous consacrons à une heure canadienne. Ainsi, cela aide certains... nous entendons par programme prioritaire, le genre de programme qui est moins regardé, parce que sa production est coûteuse, comme par exemple celle d'une dramatique ou d'une programmation régionale qui n'existerait peut-être pas à moins... ou montrée aux heures de grande écoute.

Le président: D'accord. Puis-je signaler deux ou trois questions auxquelles on n'a pas donné de réponse mais auxquelles vous pourrez répondre plus tard?

Il y a tout d'abord la question de Mme Gagnon qui voudrait savoir quels profils ont les commissaires du CRTC et quels sont leurs antécédents. Pouvez-vous nous donner cela?

Ensuite, il y a une question concernant votre décision d'examiner les nouveaux médias mais de ne pas les réglementer. Avez-vous l'intention de revenir sur votre décision de ne pas réglementer?

M. David Colville: Puis-je répondre brièvement maintenant? Nous pouvons certainement vous envoyer une réponse plus tard.

Ce segment des nouveaux médias, ce segment d'Internet qui pourrait être englobé dans la définition de radiodiffusion, laquelle figure dans la loi, a été exempté par le CRTC. Comme nous l'avons dit dans notre exposé, nous allons réexaminer l'opportunité de cette exemption en 2004, je pense. Alors oui, nous pourrions revenir sur cette décision.

Le président: En terminant, pouvez-vous nous dire pourquoi le respect des dispositions sur les langues officielles et les sanctions ne devraient pas être réglementés?

• 1055

Il y a une question qui vient d'un membre de mon parti et que je trouve intrigante. Pendant le travail préparatoire à cette étude, travail qui a été assez poussé, les gens que nous avons interviewés nous ont posé des questions épineuses. Nous n'avions pas la réponse. Il s'agit tout simplement de questions suggérées pour lesquelles on nous a demandé de trouver la réponse.

Dans un cas, il s'agit du vide créé du fait qu'il existe deux ministères, Industrie et Patrimoine, qui s'occupent de la radiodiffusion sous un aspect ou sous un autre, tout cela dans un climat d'évolution technologique rapide depuis quelques années. On nous a fait remarquer—car l'idée n'est pas de nous—qu'il existait un vide du côté de la prise de décision au gouvernement, et que le CRTC avait comblé ce vide en se transformant de plus en plus en un instrument de politique plutôt qu'en un instrument de réglementation ou de délivrance de permis.

Pourriez-vous nous donner des réponses? Le CRTC devient-il de plus en plus un organisme d'orientation, le gouvernement ayant renoncé à son rôle en ce qui concerne les politiques? Le CRTC a-t-il dû remplir ce rôle? Avez-vous cette impression?

M. David Colville: Pas vraiment. Je crois que la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur les télécommunications contiennent des dispositions qui définissent la politique du gouvernement. Je pense que le mot «politique» est utilisé de temps à autre à tort et à travers, et je dirais que nos fonctions se bornent à prévoir la politique réglementaire dans divers domaines.

Si la loi dispose que la programmation doit être à prédominance canadienne, nous élaborons alors une politique pour la télévision qui définit comment on atteindra cet objectif. Je ne vois pas de conflit entre l'élaboration que nous donnons à cette politique et la politique prévue dans la loi, laquelle relève de vous.

Je n'ai donc pas cette impression. En outre, dans les deux lois, il est prévu que le gouvernement peut donner des directives de toute façon, puisque l'on sait qu'il faut du temps pour modifier une loi. Ainsi, le gouvernement peut régler certaines questions qui surgissent de temps à autre.

Ainsi, à mon avis, il n'y a pas de vide, il n'y a en effet pas de conflit entre le rôle du conseil et l'élaboration d'une politique de réglementation pour concrétiser la politique générale qui figure dans la loi.

Je reviens à ce que je disais tout à l'heure: la loi actuelle comporte certaines qualités. D'une part, elle est neutre sur le plan technologique, ce qui a permis au conseil de se prononcer sur les nouveautés technologiques. Mme Hinton a raison, nous vivons à une époque numérique. Nous la considérons comme une transition. Quand je songe au câble... nous avons encore un pied dans le monde analogique alors que l'autre est déjà dans le monde numérique.

Ainsi, un des atouts de la loi est qu'elle est neutre sur le plan technologique. D'autre part, elle est rédigée de telle sorte qu'elle donne une orientation générale sans s'attarder aux détails, ce qui accorde à l'organisme de réglementation la souplesse nécessaire pour s'adapter aux changements au fur et à mesure qu'ils surgissent.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Colville.

Malheureusement, nos séances sont trop courtes. Nous devons libérer la salle. Notre séance a toutefois été extrêmement intéressante sur le plan des renseignements obtenus. Nous sommes impatients de vous rencontrer de nouveau la semaine prochaine. Nous vous remercions d'être venus. Merci.

M. David Colville: Merci, monsieur le président. Je vous l'ai déjà dit, nous reviendrons volontiers non seulement la semaine prochaine, mais aussi si l'occasion se présente, suivant la question que vous étudiez, avec le personnel du conseil qui pourra vous donner des réponses sur les détails. Nous sommes ravis de pouvoir participer au travail que vous accomplissez ici. Merci.

Le président: Merci beaucoup.

La séance est levée.

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